Maxime Dubois - DoYouBuzz

94
MASTER « URB’EA » (URBANISME, ENVIRONNEMENT, AMENAGEMENT) Spécialité : Urbanisme durable et Aménagement Parcours : Patrimoine et Urbanisme opérationnel Mémoire de fin d’études 2 ème année Maxime Dubois LA PROBLEMATIQUE DES ZONES COMMERCIALES EN FRANCE : EVOLUTION DE L’INTEGRATION URBAINE DE CES ESPACES Directrice de mémoire : Emmanuelle Gillet-Lorenzi Année universitaire 2013/2014

Transcript of Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page 1: Maxime Dubois - DoYouBuzz

MASTER « URB’EA » (URBANISME, ENVIRONNEMENT, AMENAGEMENT)

Spécialité : Urbanisme durable et Aménagement

Parcours : Patrimoine et Urbanisme opérationnel

Mémoire de fin d’études 2ème année

Maxime Dubois

LA PROBLEMATIQUE DES ZONES COMMERCIALES EN FRANCE :

EVOLUTION DE L’INTEGRATION URBAINE DE CES ESPACES

Directrice de mémoire : Emmanuelle Gillet-Lorenzi

Année universitaire 2013/2014

Page 2: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 2

Résumé

La problématique des zones commerciales est complexe notamment dans leur relation avec la

ville. Le commerce a toujours eu une place importante en milieu urbain mais les mutations des

systèmes économiques et des modes de consommation l’ont totalement écarté de la ville. La

dénomination « zone » tend d’ailleurs dans le sens d’une offre commerciale compartimentée dans un

seul espace. La réglementation de l’urbanisme est venue encadrer de façon plus ou moins réussie le

développement des pôles commerciaux périphériques tout comme l’urbanisme commercial. Le

compromis entre les aspects urbanistiques et économiques semble difficile à trouver quant au contrôle

de l’essor des zones. Les récentes dispositions qui insistent sur la prise en compte de l’environnement

viennent encadrer plus durement l’urbanisation en privilégiant le renouvellement urbain plutôt que

l’étalement urbain. Parallèlement, le commerce est de plus en plus déterritorialisé avec l’avènement

du e-commerce qui rend incertain l’avenir des zones commerciales.

Abstract

Shopping areas’ problematic is complicated, in their relation with the city in particular. Trade

had always an important place in urban space but the transformations of economic systems and modes

of consumption have totally isolated it from the city. The designation “area” strives in the sense that

compartmentalized trade supply is located in only one space. Urban and commercial planning

regulations try to control more or less successfully the development of shopping areas. The

compromise between urban planning and economic aspects appear difficult to find about the control

of areas development. The recent clauses, which underline the taking into account of the environment,

come to organize more severely the urbanization: the urban regeneration is privileged instead of urban

sprawl. At the same time, trade is more and more deterritorialized with the advent of e-shopping which

makes unsure the future of shopping areas.

Page 3: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 3

Remerciements

A Emmanuelle Gillet-Lorenzi, directrice de mon mémoire pour ses conseils avisés tout au long de ma

réflexion ;

A Luc Florent, géographe et membre du jury de la soutenance, pour sa disponibilité ;

A Marc Rocle, architecte-urbaniste et gérant du bureau d’études Aptitudes Aménagement pour ses

remarques pertinentes en tant que professionnel ;

A mes camarades, Léa, Narimann, Christophe et Soufyane pour leur soutien et les discussions

partagées tout au long de l’année ;

A ma famille, à mes proches pour leur soutien quotidien sans faille, pour avoir cru en moi ;

J’adresse mes sincères remerciements.

Page 4: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 4

Table des matières

Résumé ...................................................................................................................................... 2

Remerciements .......................................................................................................................... 3

Liste des sigles ............................................................................................................................ 7

Introduction ............................................................................................................................... 8

Partie I : Origines et évolutions des zones commerciales du milieu du XXème siècle à nos jours .... 13

1. La naissance des zones commerciales en France dans un contexte de croissance économique

accrue ................................................................................................................................. 13

1.1 Les multiples facettes de la modernisation d’après-Guerre ............................................... 14

1.1.1 La reconstruction de l’Etat français par le phénomène de l’ « américanisation » ........ 14

1.1.2 1946-1975 : les Trente Glorieuses, années de croissances accrues et multiples

modernisation ......................................................................................................... 16

1.2 Le modernisme au service des grandes surfaces ................................................................ 18

1.2.1 L’essor de l’automobile, véritable bouleversement du paysage français .................... 18

1.2.2 L’apparition de nouveaux équipements confortant le développement de la grande

surface .............................................................................................................................. 20

2. L’interventionnisme étatique et les prémisses de l’urbanisme commercial face au phénomène

de périurbanisation ............................................................................................................. 22

2.1 La volonté du législateur de contrôler l’essor du commerce à la périphérie des villes ........ 22

2.1.1 Les outils d’urbanisme propices au développement des zones commerciales ............ 22

2.1.2 La loi Royer ou la naissance de l’urbanisme commercial ............................................ 25

2.2 L’essor considérable des zones d’activités commerciales occultant les dispositions

régulatrices ..................................................................................................................... 26

2.2.1 Les conséquences inopportunes de la Loi Royer ........................................................ 26

2.2.2 De la zone « hypermarché » à la zone commerciale spécialisée : l’exemple de la zone

commerciale de Charmeil ......................................................................................... 28

3. L’essoufflement d’un modèle en lien avec de nouvelles problématiques ............................... 31

3.1 La volonté du législateur de renforcer l’encadrement des projets commerciaux ............... 31

3.1.1 La Loi Doubin redéfinissant la notion d’ensemble commercial................................... 31

3.1.2 De la CDUC à la CDEC : un réel changement ? ............................................................ 33

3.2 La fracture urbaine causée par les zones commerciales .................................................... 34

3.2.1 La sectorialisation des ensembles commerciaux par le POS ....................................... 34

3.2.2 Le phénomène d’étalement urbain marquant le pas des zones commerciales ........... 36

Partie II : La situation des zones commerciales aujourd’hui ........................................................ 40

1. La place des zones commerciales dans le modèle urbain actuel : vers une intégration croissante

de ces espaces au sein des territoires ................................................................................... 41

1.1 La refonte des documents de planification pour une meilleure prise en compte des zones

commerciales ................................................................................................................. 41

Page 5: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 5

1.1.1 La modification en profondeur des documents d’urbanisme : vers un urbanisme durable

............................................................................................................................... 41

1.1.2 La charte d’urbanisme commercial : un outil au service des collectivités pour une

appréhension globale de l’appareil commercial au sein des territoires ...................... 44

1.2 Le rattrapage spatial de l’urbanisation causé par le phénomène d’étalement urbain :

l’exemple de la zone commerciale des Ailes à Vichy ......................................................... 45

1.2.1 D’une zone aux portes de l’agglomération, à une zone incluse dans le tissu urbain .... 45

1.2.2 Une intégration urbaine vraiment totale ? ................................................................ 48

2. Des espaces en quête d’innovation afin de prendre en compte les principes du développement

durable ............................................................................................................................... 50

2.1 La zone commerciale pensée aujourd’hui comme un véritable projet urbain .................... 51

2.1.1 Le concept du fun shopping, ou comment rendre les achats agréables pour le

consommateur ........................................................................................................ 51

2.1.2 Le parc commercial de Be Green à Saint-Parres-aux-Tertres : une réelle révolution du

commerce périphérique ? ........................................................................................ 53

a. Les fondements du label HQE™ Aménagement ............................................... 54

b. Le parc commercial Be Green : un projet d’aménagement durable ? ................ 55

2.2 L’interaction des différents acteurs de l’urbanisme commercial : entre intérêts économiques

et développement durable .............................................................................................. 62

2.2.1 Des aménageurs sans cesse en quête d’originalité pour concevoir des espaces

commerciaux attractifs ............................................................................................ 62

2.2.2 Le rôle accru de l’intercommunalité au sein des territoires en termes d’urbanisme

commercial et d’urbanisme en général ..................................................................... 63

2.2.3 Le contrôle étatique via les CDAC/CNAC dans la délivrance des autorisations

commerciales : vers une meilleure prise en compte des réalités territoriales ............. 64

Partie III : L’avenir des zones d’activités commerciales .............................................................. 66

1. Pour une réglementation des grandes surfaces commerciales dans la continuité des précédentes

mais plus territorialisée ....................................................................................................... 66

1.1 L’intercommunalité comme échelle pertinente pour la prise de décision concernant

l’organisation de l’implantation commerciale .................................................................. 67

1.1.1 La pertinence de l’élaboration des documents d’urbanisme par l’intercommunalité

appuyée par la Loi ALUR .......................................................................................... 67

1.1.2 La réforme de l’urbanisme commerciale : vers une intégration au droit de l’urbanisme

ou seulement une énième évolution des CDAC/CNAC ? ............................................ 69

1.2 La région comme échelle adéquate pour la délivrance d’autorisation concernant les projets

commerciaux d’envergure ? ............................................................................................ 70

1.2.1 L’échec du projet de loi Ollier-Piron : vers une autorisation délivrée au niveau régional

............................................................................................................................... 70

1.2.2 De grandes enseignes commerciales à l’impact régional : l’exemple d’Ikea à Clermont-

Ferrand ................................................................................................................... 71

2. De futures tendances contradictoires sur le devenir des zones d’activités commerciales ....... 74

2.1 La reconstruction des zones commerciales sur elles-mêmes, en phase avec le modèle urbain

actuel et futur ................................................................................................................. 74

Page 6: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 6

2.1.1 Le recyclage des friches commerciales : de la zone commerciale au quartier

multifonctionnel ...................................................................................................... 74

2.1.2 L’utilisation de la situation d’interface, entre centre urbain et milieu périurbain et rural

............................................................................................................................... 78

2.2 Des projets commerciaux à l’encontre des orientations urbanistiques récentes : l’exemple

d’Europa City .................................................................................................................. 80

2.2.1 Un projet englobé au sein du Grand Paris : vers une intégration réussie ? ................. 80

2.2.2 L’oubli des enjeux environnementaux au profit du dynamisme économique ............. 82

Conclusion ............................................................................................................................... 85

Bibliographie ............................................................................................................................ 87

Annexes ................................................................................................................................... 90

NOTA BENE : Les photographies des terrains d’étude de la zone commerciale de Charmeil, de la zone

commerciale des Ailes et du parc commercial Be Green sont numérotées et localisées sur des cartes

en annexe.

Page 7: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 7

Liste des sigles

- AdCF : Assemblée des Communautés de France

- ALUR (loi) : loi pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové

- ANRU : Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine

- CCI : Chambre de Commerce et d’Industrie

- CEE : Communauté Economique Européenne

- CDAC/CNAC : Commission Départementale/Nationale d’Aménagement Commercial

- CDEC/CNEC : Commission Départementale/Nationale d’Equipement Commercial

- CDUC/CNUC : Commission Départementale/Nationale d’Urbanisme Commercial

- CNCC : Conseil National des Centres Commerciaux)

- DOO : Document d’Orientations et d’Objectifs

- EPCI : Etablissement Public de Coopération Intercommunal

- HQE : Haute Qualité Environnementale

- LOF : Loi d’Orientation Foncière

- LOV : Loi d’Orientation pour la Ville

- PAZ : Plan d’Aménagement de Zone

- PLU : Plan Local d’Urbanisme

- PLUI : Plan Local d’Urbanisme Intercommunal

- POS : Plan d’Occupation des Sols

- RT 2012 : Réglementation Thermique 2012

- SAU : Surface Agricole Utile

- SCOT : Schéma de Cohérence Territoriale

- SD : Schéma Directeur

- SEM : Société d’Economie Mixte

- SHON : Surface Hors Œuvre Nette

- SRU (loi) : loi relative à la Solidarité et au Renouvellement Urbains

- UE : Union Européenne

- ZAC : Zone d’Aménagement Concerté

- ZACOM : Zone d’Aménagement Commercial

- ZUP : Zone à Urbaniser en Priorité

Page 8: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 8

Introduction

D’après l’Assemblée des Communautés de France (AdCF) en 2012, 62% du chiffre d’affaires du

commerce se réalisent en périphérie des villes, contre 25% en centre-ville et 13% dans les quartiers

avoisinant le centre-ville (commerces de proximité). Dans certains cas extrêmes, la périphérie peut

compter jusqu’à 80% du chiffre d’affaires. Ces chiffres indiquent que les activités commerciales

implantées en périphérie sont aujourd’hui incontournables en France.

La zone d’activités commerciales se caractérise par son implantation en périphérie des villes

et plus exactement en entrée de ville, le long des axes de circulation les plus importants. Appelée

également parc d’activités commerciales, elle se compose la plupart du temps d’un supermarché ou

hypermarché accompagné de magasins spécialisés et de plus petite taille. Si l’on se base sur un point

de vue plus technique, la zone commerciale peut être définie comme « un espace à ciel ouvert,

aménagé en lots en vue d’être vendus ou loués à des entreprises pour l’exercice d’activités

commerciales » (Chaze, 2008).

Le rapport à la ville de la zone d’activités commerciales est difficilement définissable. Si nous

souhaitons l’assimiler à un quartier dans la ville, d’après le dictionnaire Larousse elle apparait comme

« une partie de la ville ayant certaines caractéristiques ou une certaine unité ». En prenant compte

uniquement cette définition généraliste, le quartier pourrait inclure la zone commerciale, l’activité

commerciale étant l’activité économique majeure de cet ensemble. Si l’on se penche sur des

définitions scientifiques issues, par exemple de la géographie, le quartier s’inscrit « comme résultat de

l’interaction espace/société » (Humain-Lamoure, 2007) c’est-à-dire que le quartier s’inscrit dans un

espace urbain et est créé par des pratiques et des représentations sociales, c’est-à-dire par l’Homme.

Le commerce est avant tout une pratique sociale existant depuis plusieurs siècles. Mais, pour le

sociologue et urbaniste Alain Bourdin, « le quartier est toujours défini à partir de l’habitat dans un

premier temps et lorsque l’on se réfère à soi. […] Mais, outre que la mixité n’apparait pas comme une

très grande préoccupation des usagers on constate que l’idée de quartier spécialisé ne déplait pas

nécessairement et que l’on a des idées sur ce que peut ou doit être un quartier spécialisé. » Cela signifie

que le quartier serait donc un morceau de ville qui à l’origine regroupait essentiellement de l’habitat,

mais le quartier spécialisé dans une seule fonction comme peut l’être la zone commerciale aurait

également sa place. Malgré tout, les définitions existantes sur la zone commerciale l’isolent du reste

de la ville : elle ne peut donc être assimilée à un quartier.

Depuis la constitution des premières villes et villages, le commerce a toujours connu une place

importante. Que ce soit dans les cités grecques et romaines, la place du marché était le moteur de

Page 9: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 9

l’économie urbaine. Cela a perduré au Moyen-Age, la place du marché se situant au cœur de la ville.

Le commerce se sédentarise ensuite sous la forme de boutiques, de magasins aux XVIIIème et XIXème

siècles. A la fin du XIXème siècle et au début du XXème les grands magasins apparaissent en centre-ville,

notamment à Paris, jusqu’à la fameuse crise de 1929 où cette forme de distribution connait ses limites,

avec des coûts élevés et des ventes en stagnation. Les grandes enseignes ont donc eu l’idée de lancer

des magasins plus modestes où le prix unique des produits doit attirer le client et donc relancer la

consommation des ménages. Le nom des enseignes va d’ailleurs permettre de donner le ton sur le

concept de ces nouveaux magasins : c’est la création de Prisunic, de Monoprix, d’Uniprix par Le

Printemps.

La fin de la Seconde Guerre Mondiale va marquer un tournant pour le commerce en ville en

France. C’est l’apparition du libre-service, issu du modèle américain où ce procédé existe depuis les

années 1910 : le premier supermarché est créé par Piggly Wiggly, une enseigne de grande distribution

de Memphis. Suite à la « Mission d’étude sur les structures et les techniques commerciales

américaines » réalisée par de grands commerçants français d’avril à mai 1950, il est conclu de

développer le supermarché en libre-service. Dès lors, le commerce en périphérie des villes est né. Les

premières Zones d’Activités Commerciales sont créées en entrée de ville à la fin des années 60, en

périphérie de Paris ou à proximité de grandes villes de province : les terrains et locaux sont moins chers

qu’en centre-ville, l’espace est vaste et facilement extensible et l’accessibilité est relativement aisée

avec l’essor de l’automobile. Nous pouvons citer par exemple Plan-de-Campagne dans la région de

Marseille en 1967 ou encore Englos à l’Ouest de Lille. Par la suite, ces zones se sont développées en 4

grandes étapes :

- Au départ, elles ont accueilli des supermarchés ou hypermarchés puis ce sont constituées avec

des magasins de meubles et des concessionnaires auto ;

- Au cours des années 80, elles ont connu une forte croissance accompagnée d’une

diversification commerciale, avec l’apparition de grandes surfaces spécialisées en bricolage et

jardinage ;

- Au cours des années 90, le ralentissement de la consommation a freiné leur expansion et a

bénéficié aux solderies, avant de se résorber et de laisser place à une nouvelle période de

croissance.

L’apparition du commerce en périphérie a entrainé une concurrence entre les commerces de

centre-ville et ces nouvelles zones commerciales. Déjà concurrencés depuis le début du XXème siècle

par l’arrivée des grands magasins puis des magasins à prix unique, les petits commerces traditionnels

peinent à survivre et il n’est pas rare de voir de petits commerçants investir dans des zones d’activités

Page 10: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 10

commerciales. La motorisation des ménages leur est également bénéfique, les centres-villes devenant

difficiles d’accès.

Il ne faut également pas négliger la réglementation qui s’est imposée aux zones commerciales

que ce soit celle relevant du Code de l’Urbanisme ou celle intégré au Code du Commerce et de la

Consommation. En effet, à l’origine, leur développement anarchique a été rendu possible

puisqu’aucune réglementation stricte n’existait. Puis l’essor de ces zones de chalandise a conduit à

l’apparition de l’expression « urbanisme commercial » afin de désigner « l’ensemble des mesures

techniques, administratives et financières visant à permettre un développement des activités

commerciales à la fois harmonieux, efficace et cohérent avec les autres choix d’urbanisme (utilisation

du sol, répartition des quartiers d’habitat, transport, …) » (Merlin, 2010). Ce terme est apparu dans les

années 60 en plein milieu des Trente Glorieuses, période durant laquelle l’Etat français souhaitait au

départ pouvoir régir le développement des grands ensembles avec le développement des zones

d’activités commerciales : cette période se caractérise par un interventionnisme étatique important

où l’investissement des pouvoirs publics est omniprésent dans le but de reconstruire le pays après-

guerre et de le moderniser économiquement parlant. C’est dans ce contexte de forte croissance que

ces zones ont vu le jour dans des lotissements ou des ZUP (Zones à Urbaniser en Priorité) puis elles se

sont organisées au sein de ZAC (Zones d’Aménagement Concerté) avec la LOF (Loi d’Orientation

Foncière) de 1967 : la ZUP puis la ZAC conçues au départ pour ériger les grands ensembles de

logements sociaux, ont été utilisées afin de créer les zones commerciales. Cette opération d’urbanisme

publique devait consister à créer un projet urbain moyennant une procédure plus concertée. Mais le

fait que la ZAC disposant d’une pièce planifiant l’opération indépendamment du POS (Plan

d’Occupation du Sol), le PAZ (Plan d’Aménagement de Zone), a conduit au constat que nous pouvons

dresser lorsque nous arrivons aux portes de n’importe quelle ville française aujourd’hui : les entrées

de ville ont été banalisées avec des zones commerciales semblables composées d’enseignes que l’on

retrouve aux quatre coins du territoire (cf Figure 2).

Aujourd’hui et depuis une vingtaine d’années, la tendance générale en Europe est de freiner

le développement des zones commerciales consommatrices d’espace, nuisant au paysage et d’un point

de vue économique entrainant une certaine désertification commerciale des centres-villes mais

également des bourgs ruraux. D’après Philippe Cattiaux, directeur du commerce intérieur dans les

années 90, les raisons sont de deux ordres : « le mécanisme même des décisions d'urbanisme

commercial qui conduit à examiner, au coup par coup, les projets n'a pas permis une prise en

considération forte des problèmes d'aménagement du territoire » et « le développement du réseau

routier, notamment celui des rocades d'une part, les réserves foncières existant dans les petites

communes voisines des agglomérations, la recherche de la taxe professionnelle de leurs municipalités

Page 11: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 11

d'autre part, ont favorisé la création de zones commerciales périphériques dans une relative

anarchie. » Les années 2000 marquant la prise en compte de l’environnement en urbanisme avec la

loi SRU1 (Solidarité et Renouvellement Urbains), les lois Grenelle2 ainsi que le projet de loi ALUR (Accès

au Logement et un Urbanisme Rénové), vont dans le sens de ne plus étendre la ville mais de la densifier.

La réimplantation de petites et moyennes surfaces en centre-ville du style Carrefour City ou encore

Monoprix suit cette tendance en visant notamment les personnes âgées et les petits ménages qui n’ont

pas accès à la mobilité pour se rendre en périphérie. Pourtant, cela n’empêche pas que de nouvelles

zones commerciales apparaissent en se voulant plus « alléchantes » esthétiquement parlant, afin de

ne plus faire l’objet de critiques. Les zones d’activités commerciales « verdissent » afin de répondre au

mieux aux exigences du développement durable. Par exemple, les matériaux de construction sont

conformes à la RT 2012 (Réglementation Thermique 2012), la végétation n’est pas négligée afin que la

biodiversité puisse se développer, la gestion des eaux pluviales est de qualité avec la création de fossés

et de parkings perméables et la desserte en transport en commun est effective. Aussi, promoteurs,

élus et enseignes de distribution veulent attirer toujours plus de consommateurs en recherchant

l’innovation. Aujourd’hui, ce ne sont plus uniquement des espaces d’achats marchands mais

également des espaces de loisirs et de détente où tout une panoplie d’activités est mise en place pour

rendre la visite des clients toujours plus agréable.

Nous constatons donc que ces espaces commerciaux ont connu une évolution entre leur

apparition et aujourd’hui. Symbole de la modernité, elles ont par la suite fait l’objet de critiques.

Considérées comme totalement déconnectées de la ville, nous pouvons donc nous demander si les

zones commerciales peuvent être à l’avenir en phase avec le modèle urbain actuel, favorisant

l’intégration, la densification et le renouvellement urbains ?

Afin de répondre à cette question, nous nous attacherons à remonter à la naissance du concept

de zones commerciales en France. Nous verrons quelles en sont les origines, comment se sont formées

les premières. Il sera également nécessaire de relater les différentes évolutions qui ont engendré le

modèle des zones d’activités commerciales actuelles tant du point de vue juridique qu’urbanistique.

Dans une seconde partie, nous nous pencherons sur le modèle actuel des zones commerciales.

Après avoir fait l’objet de critiques notamment en ce qui concernent l’intégration paysagère, la

consommation de foncier ou encore la rupture avec le reste de la ville, elles sont de plus en plus prises

1 Loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains 2 Comprenant la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (dite loi Grenelle I) et la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (dite loi Grenelle II)

Page 12: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 12

en compte et intégrées dans les politiques publiques. Les orientations urbanistiques récentes qui ont

été prônées par la loi SRU, les lois Grenelle et plus récemment par la loi ALUR vont dans le sens d’une

densification de la ville.

Enfin dans une troisième et dernière partie, il s’agira d’effectuer une prospective afin de savoir

comment ces zones pourront évoluer de la façon la plus pertinente possible dans les années futures.

La règlementation en urbanisme étant contraire au modèle des zones commerciales implantées en

entrée de ville, leur avenir peut être remis en cause. Ce dernier point sera d’autant plus vrai qu’il sera

renforcé par la loi ALUR. L’influence de grands groupes de distribution tels que Carrefour ou encore

Leclerc peut néanmoins être très importante encore dans la réalisation de projets commerciaux

périphériques.

Page 13: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 13

Partie I : Origines et évolution des zones commerciales du milieu du XXème siècle à nos jours

La seconde moitié du XXème siècle marque les prémisses du phénomène de mondialisation où

les relations économiques entre les Etats vont s’accroitre. Pour Jacques Adda, la mondialisation se

définit comme « l’abolition de l’espace mondial sous l’emprise d’une généralisation du capitalisme,

avec le démantèlement des frontières physiques et réglementaires ». Malgré la Guerre Froide qui

survient quasiment à la suite de la Seconde Guerre Mondiale, les échanges économiques et financiers

vont s’accélérer à travers le monde même si ce sont principalement trois pôles qui en bénéficient :

l’Amérique du Nord, l’Europe de l’Ouest et le Japon. La création du GATT en 1947 qui permettait de

faire baisser les prix des produits importés et de réduire les tarifs douaniers va être bénéfique pour les

échanges commerciaux.

Ce phénomène encore peu descriptible à l’époque va être lancé entre autre grâce à l’aide

américaine offerte à l’Europe afin qu’elle puisse se reconstruire après la guerre. Les échanges

économiques vont d’ailleurs entrainer des échanges culturels puisque les modes de vie vont suivre des

produits de consommation comme nous allons le voir dans cette partie.

La zone commerciale est donc le fruit de ces échanges puisque le mode de consommation

américain va s’imposer en France et en Europe comme le synonyme de la modernité et le passage à

une nouvelle ère de progrès. La période de guerre et de disette doit être oubliée au profit d’une

période où l’offre alimentaire est abondante et abordable pour tous.

Nous allons donc voir la naissance, le succès mais aussi le rejet des zones d’activités

commerciales à l’entame des années 90 où les préoccupations environnementales (Sommet de la

Terre à Rio en 1992) vont surgir.

1. La naissance des zones commerciales en France dans un contexte de croissance économique

accrue

L’apparition des zones commerciales est en lien étroit avec deux facteurs économiques mais

qui sont tout de même différents. En effet, le premier facteur plutôt exogène est le phénomène de

l’ « américanisation » qui n’est ni plus ni moins que le fait de calquer le modèle économique et sociale

des Etats-Unis en Europe. Le second facteur est quant à lui endogène même si le Plan Marshall l’a

Page 14: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 14

provoqué : c’est la période des Trente Glorieuses, symbole de croissance économique en France et de

multiples progrès.

1.1 Les multiples facettes de la modernisation d’après-Guerre

1.1.1 La reconstruction de l’Etat français par le phénomène de l’ « américanisation »

Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, la France est détruite tant au niveau physique qu’au

niveau économique. De nombreuses villes et villages français tels que Caen, Brest et Le Havre sont

rasés par les affrontements générés par le débarquement : 74 départements métropolitains sur 90 ont

subi des dommages importants et plus de 20% du capital immobilier est détruit3. L’Etat français sort

ruiné de cette guerre. Ce phénomène touche l’Europe d’une façon plus générale, que ce soient du côté

des Alliés (Grande-Bretagne) et de l’Ennemi (Allemagne, Italie). Seuls les Etats-Unis sortent grandis de

cet affrontement.

C’est dans ce contexte qu’apparait le Plan Marshall institué par les Américains et proposé par

le secrétaire d’Etat Georges C. Marshall le 5 juin 1947. Ce plan vise à fournir aux Européens les dollars

dont ils ont besoin, à condition qu’ils déterminent eux-mêmes leurs besoins et assurent la répartition

des crédits américains. Cette proposition bien que généreuse est tout de même fortement intéressée.

D’une part, le Plan Marshall s’adresse à tous les pays européens y compris ceux qui pourraient tomber

sous influence soviétique. Mais la seconde raison essentielle, et en lien direct avec le sujet, est la

volonté des Etats-Unis d’imposer leur modèle économique à savoir le modèle libéral fondé notamment

sur la consommation de masse.

Née à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, la consommation de masse peut être

définie comme étant « une production de masse et un système de vente de masse qui suppose une

disponibilité toujours plus grande de biens dans une culture qui privilégie l’achat et la vente, le désir,

le glamour et des identités souples et consuméristes. » (Rosenberg, 2009). La révolution industrielle

précoce aux Etats-Unis, au même titre que la Grande-Bretagne, va conduire à la standardisation des

produits de consommation. Le développement de la publicité sous forme d’affiches et de panneaux va

3 Longone, Pierre, Peltier, Roger, Barsalou, Joseph [dir.], 1967, « La France contemporaine, Tome III – Renouveau et solidarités », L’Union Européenne d’éditions, pp 24-26

Page 15: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 15

être le moteur de la consommation de masse.

La Seconde Guerre Mondiale va être un moyen pour les Etats-Unis de faire découvrir aux

Européens leurs modes de vie et leurs cultures à travers des produits standardisés. Les soldats

américains diffusent la mode des blue-jeans, du chewing-gum et des cigarettes. La firme Coca-Cola en

profite également pour développer ses premières usines au rythme où les troupes américaines

gagnent du terrain. Les prémisses de l’American Way of Life (mode de vie américain en français) sont

donc posées et le modèle va s’intensifier avec le Plan Marshall.

Indirectement, le plan cherche à trouver des débouchés pour les investissements privés

américains en Europe. Il cherche à faciliter l’identification du modèle américain dans la croissance

économique des pays concernés tels que la France. Il permet notamment à des industriels français de

venir visiter les Etats-Unis au cours de missions consacrées à l’agriculture, au marketing, au commerce.

C’est à la suite d’une de ces visites que des commerçants français ont rédigé « le Rapport de la mission

d’étude des structures et des techniques commerciales américaines » en 1951. Un des fondements

des structures commerciales américaines va dès lors être repris par les commerçants européens : le

libre-service. Le principe n’est plus de servir le consommateur mais que celui-ci arpente le magasin à

la recherche de produits qu’il paye ensuite à la caisse. Le second fondement est le discount qui consiste

à vendre des produits de consommation en réduisant les circuits de distribution encombrés par une

cascade d’intermédiaires inutiles, de réduire les marges et d’introduire la notion de productivité dans

le commerce : il n’y a pas de livraison, pas de crédit et pas de locaux luxueux.4 Un des pionniers en

France du discount est Edouard Leclerc qui ouvre en 1949 son premier magasin à Landerneau, une

petite ville du Finistère. Ce modèle commercial qui au départ peine à convaincre les consommateurs

mais aussi les fournisseurs va connaitre un réel succès à la fin des années 50 : en 1958, on dénombre

60 Centres Leclerc dont la première implantation hors de Bretagne, à Grenoble.

Cette véritable révolution va connaitre un engouement tel qu’une concurrence va s’établir. De

nombreux commerçants vont s’inspirer du modèle d’Edouard Leclerc. C’est le cas de Gérard Mulliez

qui va créer en 1961 l’enseigne Auchan ou encore de Marcel Fournier et Louis Defforey qui créeront

Carrefour (cf Figure 1). Cette nouvelle forme de commerce va être synonyme de modernité : pour

preuve, le Carrefour de Sainte-Geneviève-des-Bois va être l’objet de toutes les curiosités, de

nombreuses personnes venant se photographier devant l’enseigne les dimanches. Le supermarché est

donc né : combinaison à la fois de l’influence américaine mais également française, ce type de

4 Desse, René-Paul, 2001, « Le nouveau commerce urbain. Dynamiques spatiales et stratégies des acteurs », PUR, 198 pages

Page 16: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 16

commerce va connaitre un véritable succès en se développant dans la France entière mais également

dans d’autres pays européens.

L’influence américaine a donc été le facteur majeur de l’apparition de la consommation de

masse sous la forme du supermarché. Mais un phénomène d’autant plus important va être à l’origine

des formations commerciales en périphérie des villes : ce sont les Trente Glorieuses.

1.1.2 1946-1975 : les Trente Glorieuses, années de croissances accrues et multiples

modernisations

Ces trois décennies ont été dénommées « Trente Glorieuses » par Jean Fourastié, économiste

français dans l’ouvrage Les Trente Glorieuses, ou la révolution invisible de 1946 à 1975 publié en 1979.

Cette période synonyme de prospérité, de modernité ainsi que d’augmentation du niveau de vie pour

les Français a vu naitre les zones commerciales, et les a même modelé.

Le rôle de l’Etat est au départ primordial dans ce phénomène de croissance. En partie aidé par

le Plan Marshall, il va très largement intervenir dans les projets d’aménagement pour reconstruire le

pays et le développer. De grands travaux vont être menés durant cette période, que ce soient les

grands ensembles à partir des années 60 mais également les villes nouvelles qui seront créées autour

de Paris afin de désengorger la capitale et de créer de nouveaux pôles d’attractivité. Il ne faut pas

oublier, qu’à cette époque, la natalité reprend après une période de guerre et il faut donc loger une

population nouvelle. C’est le phénomène « baby-boom », où l’on observe une augmentation forte des

naissances : d’après l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques), le nombre

Figure 1 : Le premier supermarché de l’enseigne Carrefour à Sainte-Geneviève-des-Bois (source : lemonde.fr)

Page 17: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 17

des naissances est supérieur à 800 000 naissances annuelles sur toute la période des Trente Glorieuses,

avec des pics à 860 200 naissances annuelles sur la période 1946-1950 et à 853 200 naissances

annuelles sur la période 1961-1965. Avec un taux de mortalité en diminution constante, la population

passe de 41 millions d’habitants en 1948 à 52 millions en 1973.

Les Trente Glorieuses marquent également une rupture avec la période de l’Entre-Deux-

Guerres concernant l’emploi. Le secteur primaire au sortir de la guerre perd un grand nombre

d’emplois avec la modernisation de la production qui est de plus en plus mécanisée. En 1949, un peu

plus de 5 millions de personnes travaillaient dans l’agriculture tandis qu’en 1973, le nombre d’emploi

chute de moitié soit 2,5 millions de personnes. L’industrie se maintient à 5 millions d’emploi sur toute

la période et connait même une petite augmentation durant les années 70 avec presque 6 millions

d’emploi. Enfin, le secteur tertiaire est le grand gagnant avec des hausses très importantes : le nombre

d’emplois au sein des services marchands passe de 5 millions en 1949 à 7,5 millions en 1973 et de 3

millions en 1949 à 4,5 millions en 1973 pour les services non marchands5. Cette forte hausse est due

notamment à l’essor des emplois dans le secteur du commerce sur toute la période avec en tête le

développement de la grande distribution.

Ces diverses créations d’emplois vont engendrer l’apparition de la classe moyenne qui va

devenir la véritable cible de la grande distribution. Cette classe sociale va être le modèle qui illustre

parfaitement l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages, avec notamment l’augmentation du

nombre de femmes ayant un emploi. En effet, les Trente Glorieuses ont été marquées sur le plan

sociétal par la montée de la « classe moyenne » devenue par son poids et son influence le pivot de

l’organisation sociale (Dubet, 2009). Ces classes moyennes vont adopter un mode de vie nouveau

conduisant à des comportements de consommation transformés : la grande distribution va offrir la

possibilité de « massifier » les achats tout en réalisant des économies permettant de consommer plus.

D’ailleurs, les premières formes de la grande distribution que sont le supermarché puis l’hypermarché

(la différence entre les deux se faisant par la taille ainsi que l’aire de chalandise qu’ils forment) vont

être implantées au départ au sein des grands ensembles, où résident les classes moyennes et

modestes. La circulaire Sudreau-Fontanet de 1961 permettait de doter ces nouveaux espaces

urbanisés en commerces en imposant un schéma d’équipement commercial : ce texte sera le premier

document à faire le lien entre urbanisme et commerce. La notion d’urbanisme commercial est créée.

Parallèlement, les Trente Glorieuses connaissent l’apparition d’inventions qui vont être

5 Bouvier Gérard, Pilarski Charles, 2008, « Soixante ans d’économie française : des mutations structurelles profondes », INSEE Première n°1201, juillet 2008, 4 pages

Page 18: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 18

bénéfiques pour le développement de la grande distribution et plus tard pour les zones commerciales :

la banalisation de l’automobile, l’amélioration de la conservation des denrées périssables et l’essor de

la publicité sont des facteurs qui ont contribué à leur succès.

1.2 Le modernisme au service des grandes surfaces

1.2.1 L’essor de l’automobile, véritable bouleversement du paysage français

Le développement de l’automobile va profondément marquer l’aménagement du territoire

que ce soit en France mais également dans tous les pays industrialisés. Les Etats-Unis comme pour le

libre-service ont été les précurseurs dès l’après-guerre et ont dû prendre en compte la banalisation de

la motorisation des ménages dans l’organisation de la ville.

En France et d’une manière plus générale en Europe, l’automobile se généralise avec les Trente

Glorieuses, la voiture devenant abordable financièrement pour les ménages, en lien avec la hausse de

leurs revenus. Les firmes automobiles veulent rendre également accessible cette invention en créant

des modèles aux coûts les plus bas : ce sont par exemple les modèles tels que la 2CV de Citroën qui va

être diffusée tout au long de la période de l’après-guerre jusqu’aux années 70, de 6 200 unités

produites en 1950 à 232 551 en 1960 (+ 3 650%). La voiture devient en l’espace de quelques années

un moyen de transport synonyme de liberté et de totale autonomie car les individus ne sont désormais

plus dépendants des transports en commun (train, tramways). Son gros avantage est que l’on peut se

rendre n’importe où. On dénombrait en France 1 million d’automobiles en 1946 puis 11,2 millions en

1968 et 15,5 millions en 19756.

Cet essor va dès lors redistribuer l’organisation spatiale et urbaine : les villes vont devoir

évoluer en prenant en compte l’automobile. Le stationnement va se développer, que ce soit le long

des artères mais également sous forme de grandes aires que sont les parkings. La banalisation de

l’automobile va complètement engorger les centres-villes.

Parallèlement, de nouvelles infrastructures vont être créées afin de faciliter la circulation des

automobilistes. Des pénétrantes vont voir le jour afin de regagner le cœur des villes, des autoroutes

6 Cf Annexe 1 - Données sur le logement en France de 1946 à 1975 in Fourastié, Jean, 1979, « Les Trente Glorieuses, ou la révolution invisible de 1946 à 1975 », Fayard, Paris, 300 pages

Page 19: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 19

vont être tracées afin de connectées les villes entre elles mais également les campagnes qui sont

encore très peuplées. Puis, des périphériques, des rocades vont venir encercler les grandes villes

toujours dans un souci de faciliter l’accessibilité : par exemple, le périphérique parisien inauguré le 25

avril 1973, fait le tour de la capitale sur 35 kilomètres. Quelques années plus tôt, c’est Lyon qui

inaugure en 1958 sa première portion.

Dès lors, l’accès au centre des villes va être de plus en plus difficile. Les commerces établis en

ville et qui tentent de développer le discount vont s’apercevoir des freins au développement. Certes,

la voiture engorge la ville mais les structures commerciales ne sont plus en adéquation avec le modèle

du supermarché. Face à cela, les commerçants vont venir s’installer le long des grands axes routiers

(grands boulevards urbains, autoroutes), où l’accès est beaucoup plus aisé pour les consommateurs,

où les réserves foncières sont pratiquement inépuisables et peu chères afin de construire des

structures de plus grande superficie pour proposer l’offre de produits standardisés la plus importante

possible : les bases de la grande distribution sont alors posées. L’opportunité de l’emplacement est

donc le critère indissociable aux zones commerciales. L’implantation reste tout de même assez proche

de la ville pour ne pas dissuader la clientèle. Les premières zones commerciales et centres

commerciaux sont donc créés et viennent former d’une manière plus générale la notion d’entrée de

ville. Pour Arnaud Gasnier, l’entrée de ville peut être définie comme « une forme d’urbanisation

originale dans le sens où elle demeure structurée sur les principales voies d’accès ou de

contournement des villes le long desquelles elle s’étend. De taille variable, ce phénomène s’inscrit

toujours en continuité de l’agglomération dont il représente une porte ». La première zone

commerciale créée et celle de Plan-de-Campagne entre Marseille et Aix-en-Provence en 1967 (cf Figure

2).

Figure 2 : La zone commerciale de Plan-de-Campagne en 2004 (source : Boris Horvat/AFP)

Page 20: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 20

Les entrées de villes françaises vont se structurer globalement de la même façon, sous forme

de corridors commerciaux c’est-à-dire le long d’un axe mais également sous forme d’espaces plus

regroupés toujours le long d’un axe mais avec des voies entièrement dévouées pour accéder aux

commerces : cela va former les zones commerciales, espaces complètement autonomes constitués de

divers magasins. Le plus souvent, la zone est formée d’un supermarché ou hypermarché puis des

commerces spécialisés de taille plus modeste vont venir s’implanter autour : chacun profite alors de la

clientèle des autres et inversement. Les aires de stationnement gigantesques vont accompagner ces

zones dans le but de pouvoir accueillir une clientèle de masse : c’est le principe fondamental du « No

Parking, no business » signifiant en français « pas de stationnement, pas d’affaires ». Enfin, la publicité

est le dernier élément du triptyque des zones commerciales. Elle prend la forme de panneaux et

d’affiches disposés le long des axes de circulation à proximité de ces espaces : généralement, chaque

enseigne possède sa publicité afin de guider le consommateur dans cette « jungle commercial » que

forment les entrées de villes.

1.2.2 L’apparition de nouveaux équipements confortant le développement de la grande

distribution

De manière bien plus modeste que l’essor de l’automobile, l’amélioration de l’équipement des

logements va de pair avec le développement des zones commerciales, nouveau symbole de la

consommation de masse.

La fin des années 50 et le début des années 60 voient apparaitre le réfrigérateur, qui se fait

une place dans la cuisine des logements. Il permet de conserver les produits frais achetés notamment

dans les supermarchés ou hypermarchés durant plusieurs jours. Ce nouvel appareil ménager va être

bénéfique à la consommation de masse : les clients de la grande distribution vont pouvoir acheter des

produits en grande quantité car ils pourront les consommer sur un plus long terme. Son nombre a

augmenté de façon très importante sur la période des Trente Glorieuses : en 1954, seulement 6,7%

des ménages disposent d’un réfrigérateur, 40,3% en 1962 puis 91% en 19757. Ce nouveau

comportement de consommation d’acheter en gros est un point important car, contrairement au

commerce traditionnel de centre-ville où l’on achète le plus souvent au jour le jour, le supermarché va

permettre l’achat de produits alimentaires pour une à plusieurs semaines. Couplé avec la place

7 Cf Annexe 1 - Données sur le logement en France de 1946 à 1975 in Fourastié, Jean, 1979, « Les Trente Glorieuses, ou la révolution invisible de 1946 à 1975 », Fayard, Paris, 300 pages

Page 21: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 21

importante accordée à l’automobile (cf Figure 3), ce nouveau type de commerce va donc profiter du

développement de toutes les nouvelles technologies.

Indirectement, d’autres appareils électroménagers vont prôner la consommation de masse

diffusée par la grande distribution. Tout d’abord, la radio qui existe depuis le début du XXème siècle et

qui est démocratisée depuis longtemps, va

permettre d’émettre des annonces

publicitaires sur des produits standardisés

vendus en grande surface. La banalisation du

poste radio permet de vanter à un grand

nombre de personnes les avantages du

supermarché également : d’après Jean

Fourastié, 71,7% des ménages disposent d’un

poste radio en 1954, puis en 1968 ce sont

pratiquement tous les ménages qui en

disposent (95%).

Enfin, la télévision est le second

émetteur de publicité dans les foyers. Elle se

démocratise au cours de la période s’étalant

des années 50 aux années 70. En 1954,

seulement 1% des ménages possèdent un

téléviseur contre 63,3% en 1968 et 86% en

1975. Son gros avantage par rapport à la radio

est qu’elle peut illustrer à travers des films des

actes de la vie quotidienne tels qu’aller faire ses courses au supermarché.

Tous ces appareils vont d’ailleurs être en vente dans des magasins spécialisés. Constituant le

plus souvent des moyennes surfaces, ces commerces vont très vite s’implanter à proximité des

supermarchés et hypermarchés afin de jouir d’une clientèle occasionnelle existante. De plus, la taille

imposante des produits électroménagers induit une grande surface de stockage qui justifie largement

son emplacement en périphérie des villes. L’enseigne Darty, créée en 1954, est l’une des plus

populaires dans la vente d’appareils électroménagers : c’est d’ailleurs la première à s’implanter en

zone commerciale à la fin des années 60.

Finalement, la période des Trente Glorieuses à travers de nombreux facteurs déterminants,

voit naitre cette nouvelle forme d’urbanisation en entrée de ville. Le commerce qui est à l’origine le

Figure 3 : Campagne de publicité des années 70 pour la Renault 4 (source : /)

Page 22: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 22

moteur de l’économie des centres-villes connait donc une concurrence de la part des zones

commerciales. Cette dualité centre-périphérie aurait pu d’un premier abord être saine et dynamisante

pour la ville, mais l’absence de régulation de cette forme urbaine à créer très rapidement une

concurrence écrasante du commerce périphérique, entrainant inexorablement la diminution du

nombre de petits et moyens commerces de proximité.

Il ne faut tout de même pas négliger la réglementation lié au droit de l’urbanisme. La volonté

du législateur de prendre en compte l’implantation du commerce ainsi que protéger les réserves

foncières en entrée de ville, va conduire à leur standardisation.

2. L’interventionnisme étatique et les prémisses de l’urbanisme commercial face au phénomène de

périurbanisation

L’Etat centralisateur va réagir quant au développement des zones commerciales menées par

les hypermarchés. Les années 70 vont marquer le point de départ de l’urbanisme commercial qui ne

va cesser d’être modifié au fur et à mesure des mutations économiques et sociales. Nous allons voir

qu’à l’instar du droit de l’urbanisme, le droit de l’urbanisme commercial « n’a pas su anticiper

l’expansion « des grandes surfaces » et est intervenu a posteriori, pour être sans cesse corrigé au gré

des mutations du secteur du commerce. » (Alexandre Graboy-Grobesco, 1999).

2.1 La volonté du législateur de contrôler l’essor du commerce à la périphérie des villes

2.1.1 Les outils d’urbanisme propices au développement des zones commerciales

L’apparition et l’essor des zones commerciales en périphérie des villes ont été rendus possible

par l’existence d’opérations d’aménagement. La distinction entre l’action et l’opération faite par le

Code de l’Urbanisme restant floue (Art. L300-1, Art. L123-1-4), nous pouvons tout de même définir

l’opération d’aménagement comme étant un ensemble d’actions visant à modifier le tissu urbain. Elle

est donc caractérisée par son degré de complexité car il faut une combinaison d’interventions diverses

pour qu’elle soit menée à son terme. La distinction entre une action et une opération relève donc de

l’importance du projet, puisque l’intervention de la collectivité publique doit avoir une incidence

Page 23: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 23

urbaine forte8.

Le lotissement, procédure la plus ancienne et la plus utilisée et la ZAC, beaucoup plus

contemporaine ont été les deux outils utilisés pour la création des zones commerciales. Ils sont définis

par le Code de l’Urbanisme et nous allons voir quels ont été leurs intérêts dans la formation des zones

commerciales.

Le lotissement est une procédure juridique d’urbanisme datant de la fin du XIXème obéissant à

cette époque à une logique privée : elle a considérablement évolué au fil du temps. En effet, suite à de

nombreux excès, les divisions de propriété ont été réglementées par les autorités avec la loi du 19

juillet 1924 : dès lors, le propriétaire est obligé de créer des équipements collectifs avant la

commercialisation des parcelles. Puis cette opération a été définie ensuite par l’article 82 de la loi du

15 juin 1943, en excluant les activités économiques du lotissement, qui n’est consenti qu’en vue de

l’habitat. Aujourd’hui, le lotissement est défini par l'article L442-1 du Code de l’Urbanisme, le

lotissement résultant de « la division en propriété ou en jouissance d’une unité foncière ou de plusieurs

unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ». Cette

définition juridique qui a régulièrement évolué, reste tout de même assez sommaire : cette opération

d’aménagement du foncier constitue en une simple division d’un terrain en plusieurs destinés à être

bâtis. C’est d’ailleurs grâce au lotissement que les premières formes d’organisation urbaine ont vu le

jour : au départ, il est fortement utilisé pour construire des quartiers résidentiels. Totalement banalisé,

ce terme défini par le Code de l’Urbanisme renvoie aujourd’hui à l’image des quartiers pavillonnaires

où l’homogénéité des constructions et la mono-fonctionnalité sont omniprésentes. Cette même

mono-fonctionnalité va donc être favorable à la création des zones commerciales. Principalement

conduite par des acteurs privés (lotisseurs, aménageurs), l’opération de lotissement va être utilisée à

des fins économiques et notamment commerciales. Composé d’un règlement interne à travers le

cahier des charges, il va apparaitre comme très souple dans le montage des dossiers de création,

d’autant plus qu’il suffit d’un arrêté de lotir délivré par le maire pour que le lotissement soit créé.

Aujourd’hui et depuis 2007, la procédure n’est plus la même puisque le permis d’aménager remplace

l’arrêté de lotir : il y a donc un contrôle des services de l’Etat qui s’opère, la procédure est beaucoup

plus encadrée.

8 CE, 29 juillet 1993 ; DJDU n°11994

Page 24: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 24

Bien entendu, il est difficile de distinguer le type d’opération d’aménagement utilisé pour la

création de n’importe quelle zone commerciale. Mais le lotissement a été la procédure la plus utilisée

selon plusieurs facteurs. Premièrement, le lotisseur achetait un terrain afin de le rediviser en lot qu’il

devait ensuite viabiliser avant la commercialisation. Cela implique donc qu’il devait contracter un

capital important pour mener à bien son opération d’aménagement. Afin de rentabiliser au maximum

l’opération, le plan d’aménagement était donc sommaire, selon une forme hippodamienne (plan

quadrillé) (cf Figure 4). C’est pourquoi les zones commerciales quelle qu’elles soient, ont connu une

standardisation de leur agencement. Deuxièmement, étant principalement d’initiative privée, le

lotissement a permis aux groupes de la grande distribution de s’implanter aisément en entrée de ville :

ils achetaient le foncier, viabilisaient les lots puis commercialisaient ceux dont ils n’avaient pas besoin

pour leur activité. On peut donc retrouver dans les lotissements commerciaux un supermarché ou

hypermarché qui constituait la locomotive de la zone, accompagné de moyennes surfaces spécialisées

qui venaient profiter de l’attractivité générée.

Les ZAC ont également été utilisées pour la création d’ensembles commerciaux en périphérie

des villes. Instituées par la LOF de 1967 en remplacement des ZUP, ces zones sont selon l’article L311-

1 du Code de l’Urbanisme celles « à l’intérieur desquelles une collectivité publique ou un établissement

public y ayant vocation décide d’intervenir pour réaliser ou faire réaliser l’aménagement et

l’équipement des terrains, notamment ceux que cette collectivité ou cet établissement a acquis ou

acquerra en vue de les céder ou de les concéder ultérieurement à des utilisateurs publics ou privés ».

Figure 4 : Image satellite de l’Aire des Moissons à Saint-Parres-aux-Tertres (10) caractérisant le plan hippodamien de la zone commerciale

(Source : Géoportail, 2012)

Page 25: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 25

Contrairement au lotissement, cette opération ne peut être menée que par un acteur public (ex :

communes, EPCI), son périmètre ainsi que le programme de la ZAC devant être approuvés par

délibération de l’organe délibérant (conseil municipal pour une commune). En effet, d’après l’article

L311-1 du Code de l’Urbanisme, « Les zones d'aménagement concerté sont les zones à l'intérieur

desquelles une collectivité publique ou un établissement public y ayant vocation décide d'intervenir

pour réaliser ou faire réaliser l'aménagement et l'équipement des terrains, notamment de ceux que

cette collectivité ou cet établissement a acquis ou acquerra en vue de les céder ou de les concéder

ultérieurement à des utilisateurs publics ou privés ». Comme l’affirme l’article, la collectivité ou

l’établissement public portait le projet de ZAC mais pouvait concéder la réalisation à d’autres acteurs

publics ou privés tels qu’une SEM9 (Société d’Economie Mixte) d’aménagement ou un

aménageur/promoteur. La ZAC avait pour objectif d’améliorer la concertation entre les collectivités et

les acteurs privés. Elle est également constituée d’un document d’urbanisme spécifique, le PAZ ce qui

génère des projets urbains à part entière, qui ne sont pas pris en compte par les POS, également

institués par la LOF. Le POS qui est le premier véritable document de planification administrant

l’occupation du sol à l’échelle communale ne prenait donc pas en compte ces zones : il pouvait y avoir

une dualité de planification au sein d’une commune car les deux plans (POS et PAZ) n’avaient aucun

lien. Il était donc possible pour une même commune de prévoir des zones commerciales au travers du

zonage du POS et d’aménager un ensemble commercial par le biais d’une ZAC. L’absence de POS mais

l’existence d’une ZAC était également possible. Avec ce nouvel outil de l’urbanisme apparait donc la

notion d’urbanisme dérogatoire c’est-à-dire que la ZAC est venue dans de nombreux cas prescrire des

règles spécifiques à la zone et différentes de celles édictées par le POS s’il existait.

2.1.2 La Loi Royer ou la naissance de l’urbanisme commercial

L’essor des zones commerciales va donc conduire le législateur à mieux prendre en compte le

commerce dans l’organisation urbaine au début des années 1970. Cette intervention de l’Etat est

également due au mécontentement des petits et moyens commerçants qui voient de plus en plus leur

clientèle partir à l’extérieur des villes, car séduite par le discount. Dans ce contexte, la Loi Royer du 27

décembre 1973 vient encadrer la création et l’extension des surfaces commerciales en donnant aux

9 Entreprise publique locale sous forme de société anonyme, créée par les collectivités locales. Elles doivent être majoritaires au niveau des actionnaires (entre 50 et 85% du capital) et couplées à des actionnaires privés (entre 15 et 50% du capital).

Page 26: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 26

CDUC (Commission Départementale d’Urbanisme Commercial) un pouvoir décisionnel. Créées dans un

premier temps à titre consultatif en 1969, elles n’ont bien entendu eu aucun poids et grâce à cette loi,

l’urbanisme commercial devient une véritable branche de l’urbanisme. Une autorisation d’exploitation

commerciale est donc délivrée par cette commission, composée de neuf élus, de neuf représentants

des professions du commerce et de deux représentants des associations de consommateur10. La CDUC

était alors compétente « pour la création ou l’extension (de plus de 200 m² de surface de vente) d’une

surface commerciale dépassant (ou devant atteindre en cas d’extension) 2000 m² hors œuvre ou 1000

m² de surface de vente (seuils majorés de moitié dans les villes de plus de 40 000 habitants) » (Merlin,

2010). Ce sont des surfaces très importantes qui sont soumis à l’avis de la commission, notamment les

hypermarchés. Le centre commercial, qu’il est possible de définir comme étant un ensemble de

magasins et de services réalisé et géré comme une entité, est aussi concerné car souvent de superficie

importante. Une grande majorité de commerces n’atteignant pas les seuils légaux est alors exclue du

champ d’intervention de la CDUC.

De plus, cette loi prévoit la création du SDC (Schéma de Développement Commercial), « un

document qui rassemble des informations sur l’activités commerciale et son environnement

économique. Il comporte une analyse prospective puis indique les orientations en matière de

développement commercial et les secteurs d’activités à privilégier » (Art. R751-18 du Code du

Commerce). Ce schéma doit venir aider les CDEC dans leur choix : il n’existe donc qu’à titre informatif.

La volonté du législateur d’avoir instauré un seuil relativement élevé pour les surfaces

commerciales soumises à l’avis de la CDUC va entraîner des effets totalement indésirables pour ce

dernier.

2.2 L’essor considérable des zones d’activités commerciales occultant les dispositions

régulatrices

2.2.1 Les conséquences inopportunes de la loi Royer

La loi Royer génère dès son adoption un vide juridique considérable. En effet, les zones

commerciales composées de groupements de magasins tels que les lotissements commerciaux ne sont

10 D’après Choay, Françoise [dir.], 2010, « Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement », PUF, 1024 pages

Page 27: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 27

pas concernés par les seuils. La superficie respective de chaque magasin est en-dessous du seuil des

1000 m² (1500 m² pour les villes de plus de 40 000 habitants) : ils ne sont donc pas considérés comme

un ensemble aux yeux de la loi.

C’est donc à l’insu de l’Etat que « bon nombre de constructeurs et promoteurs ont eu l’idée de

créer sur un même périmètre, plusieurs unités commerciales inférieures aux seuils prévus par la loi »

(Graboy-Grobesco, 1999). Nous pouvons donc parler dans ce cas-là d’un contournement du droit de

l’urbanisme commercial : si la loi avait inclus la superficie globale de toutes les unités commerciales

présentes sur un même site, il aurait été intéressant de connaitre le paysage des entrées de ville

françaises actuellement. Du coup, de nombreuses enseignes vont connaitre une période riche où leur

développement va fortement s’accélérer. Toutes les caractéristiques des zones commerciales que le

législateur souhaitait voir disparaitre vont perdurer : les enseignes de la distribution implantent autour

de leur supermarché/hypermarché des enseignes spécialisées disposant d’une aire de stationnement

et des voies d’accès communes.

Pour parer à cette forme de zone commerciale, la circulaire du 10 mars 1976 relative à la

compétence et au fonctionnement des CDUC va définir la notion d’unité économique d’ensemble en

reprenant un avis du Conseil d’Etat. Cette notion revient à assimiler « à la création d’un magasin unique

la création de plusieurs magasins situés dans un même lieu, et constituant une unité économique

d’ensemble en raison de leur conception générale ou de conditions communes d’exploitation. »

(Bouyssou, 1989). De ce fait, plusieurs cas de figure dans les années 80 vont faire l’objet d’avis du

Conseil d’Etat en reprenant cette notion. Par exemple, le groupe Intermarché fait partie des chaines

de grande distribution qui vont profiter de la souplesse de la loi Royer. Sous la forme de lotissement,

il va implanter plusieurs filiales telles que Bricomarché et Vétimarché autour d’un Intermarché. Le

groupe va faire l’objet de plusieurs cas de jurisprudence dans les années 80 comme l’arrêt en Conseil

d’Etat du 25 mai 1988 concernant la commune de Ménétrol dans le Puy-de-Dôme11. Dans cette

configuration, le groupement d’enseigne constitue un centre commercial « Les Mousquetaires » car

sur un même terrain sont implantées des magasins du même groupe ayant une aire de parking

commune ainsi que des voies de desserte. Le Conseil d’Etat va reprendre la notion d’unité économique

d’ensemble afin d’annuler un permis de construire pour l’extension d’un garage-station-service

(dénommé Station-Marché) et la création d’un magasin de pièces automobiles de 420 m² de surface

hors œuvre dont 198 m² de surface de vente. Cet établissement, qui aurait été couplé à deux grandes

surfaces du groupe (Bricomarché et Intermarché) sur le même terrain appartenant à une même SCI

11 CE, 25 mai 1988, Commune de Ménétrol, n°80335, Recueil Lebon

Page 28: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 28

(Société Civile Immobilière), et qui aurait pratiqué des campagnes commerciales conjointes, aurait

engendré une surface globale supérieure à 2 000 m².

Malgré tout, de nouveaux espaces marchands périphériques vont apparaitre afin de ne pas

correspondre à l’unité économique d’ensemble. Les années 80 vont être la décennie d’expansion de

zones commerciales spécialisées, où d’après Alexandre Graboy-Grobesco « l’hypermarché-

locomotive » n’est plus forcément attractif pour l’implantation de commerces spécialisés.

2.2.2 De la zone « hypermarché » à la zone commerciale spécialisée : l’exemple de la zone

commerciale de Charmeil

Les années 80 sont fortement marquées par la périurbanisation des ménages, qui fuient les

villes à la recherche de plus grands espaces, notamment d’un logement plus vaste accompagné d’un

jardin. Même si ce phénomène a déjà été observé durant les années 60 et 70, c’est lors de cette

décennie qu’il prend tout son sens : « le commerce en périphérie des villes s’appuie […] sur une

clientèle suburbaine et périurbaine qui représente environ les deux tiers de la population et qui a

d’ailleurs augmenté de 27% entre 1975 et 1990. » (Graboy-Grobesco, 1999). De nouveaux

équipements commerciaux périphériques font donc leur apparition, du fait de la spécialisation des

grandes et moyennes surfaces et de la polarisation des points de ventes. C’est le cas de l’agglomération

vichyssoise qui connait une polarisation très nette de son offre commerciale qui est bénéfique pour

les communes périurbaines (cf Figure 5). En effet, sur les quatre zones commerciales, trois sont

implantées dans des communes voisines de Vichy. Nous pouvons constater également que seule la

zone commerciale de Charmeil ne dispose pas d’un hypermarché : c’est une zone commerciale

composée seulement de magasins spécialisés, exemple typique des pôles commerciaux périphériques

des années 80-90.

Charmeil est une petite commune périurbaine composée seulement de 562 habitants en 1982.

La présence d’une zone commerciale sur son territoire en fait une commune atypique puisque la zone

commerciale constitue la grande majorité de l’urbanisation de la commune : elle est surement due à

un aspect économique recherché par la commune, la taxe professionnelle lui permettant d’engranger

des recettes. Nous retrouvons donc des enseignes qui vendent des produits susceptibles d’être

encombrants et dont la localisation en cœur de ville serait difficile. De plus, elle est aisément accessible

par la route, puisque située le long de départementale la reliant au cœur de l’agglomération, aux

communes importantes (Vichy, Cusset et Bellerive-sur-Allier). Au vu du nombre d’habitants et de sa

Page 29: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 29

localisation aux portes de l’agglomération, elle est clairement destinée à alimenter l’ensemble des

communes du bassin de vie vichyssois.

Elle s’est constituée en plusieurs phases :

- Dans les années 80 avec l’arrivée de concessionnaires automobiles,

- Dans les années 90, de grandes enseignes de bricolage, d’ameublement et de jardinerie se

sont implantées dans la zone,

- Dans les années 2000, quelques enseignes d’ameublement puis des petits commerces

d’alimentation sont apparus, cassant littéralement l’image de grandes surfaces.

Figure 5 : La polarisation du commerce périphérique et des hypermarchés sur l’agglomération vichyssoise (Sources : Géoportail, DAC SCOT Vichy Val d’Allier)

Zone commerciale des Graves-Bartin

(Cusset)

Zone commerciale des Ailes (Vichy)

Zone commerciale Carré d’As-Leclerc

(Bellerive)

Zone commerciale de Charmeil

Page 30: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 30

Cette zone commerciale même en l’absence d’hypermarché a réussi à se maintenir dans le temps et

même aujourd’hui à attirer de petits commerces. Le peu de grandes surfaces spécialisées que ce soit

en bricolage ou jardinerie sur une agglomération de taille moyenne oblige les consommateurs à se

déplacer à Charmeil. Nous pouvons d’ailleurs remarquer que la zone commerciale n’a été conçue que

pour l’unique automobile, les aires de stationnement étant tellement conséquentes qu’elles ne sont

jamais saturées (cf Figures 6).

Le bourg situé en continuité Nord de la zone commerciale est également totalement occulté

par sa présence. L’offre commerciale de la commune n’est quasiment représentée que par la zone

commerciale, le bourg ne disposant que de deux bar-restaurants. Les liaisons entre ces deux espaces

Figures 6 : Des aires de parking majoritairement vides dans la zone commerciale de Charmeil (Source : Maxime Dubois, 21 février 2014)

Figures 7 : Le cheminement piéton reliant le bourg de Charmeil à la zone commerciale (Source : Maxime Dubois, 21 février 2014)

1 2

3 4

Page 31: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 31

sont d’ailleurs très limitées, hormis une liaison piétonne peu utilisée par les habitants (cf Figures 7) : la

voiture reste le moyen de transport privilégié.

De vastes surfaces commerciales en entrées de ville ou d’agglomération ont donc pu voir le

jour malgré l’apparition d’une réglementation de leur implantation avec l’urbanisme commercial et la

Loi Royer. Des rectificatifs vont tout de même être élaborés dans les années 90, décennie qui va être

marquée par de multiples ruptures tant sur le plan du droit que des mentalités.

3. L’essoufflement d’un modèle en lien avec de nouvelles problématiques

Après 20 ans de développement effréné, les hypermarchés et zones commerciales en

périphérie des villes ne vont plus avoir la même image. Tout d’abord, le législateur va à maintes

reprises réformer le droit de l’urbanisme commercial afin d’abolir la création de lotissements

commerciaux sous forme de « boite à chaussures ». Une forme de rejet de ces espaces va également

apparaitre d’autant plus que la problématique environnementale et paysagère surgit. Pratiquement

jamais prise en compte dans les projets d’ensembles commerciaux, elle avait pourtant été sous-

entendue. La Loi Royer promulguait pourtant dans son article 1er que l’activité commerciale devait

contribuer à l’amélioration de la « qualité de la vie ». Les critères environnementaux et d’insertion

paysagère n’étaient bien entendu pas les critères les plus pris en compte par les CDUC a contrario des

critères économiques. La composition de ces commissions était également critiquable puisque seuls

des élus et des professionnels de la consommation les composaient. Des urbanistes ou des paysagistes

auraient eu un rôle de conseil non négligeable en matière d’insertion paysagère d’autant plus que les

projets commerciaux s’implantaient tous en entrée/sortie de villes.

3.1 La volonté du législateur de renforcer l’encadrement des projets commerciaux

3.1.1 La Loi Doubin redéfinissant la notion d’ensemble commercial

La loi Royer accompagnée de la notion d’unité économique d’ensemble a constitué en grande

partie le paysage des entrées de villes françaises actuelles. Malgré tout, le législateur va tenter de

stopper l’hémorragie des années 80 en s‘appuyant sur les cas de jurisprudence (cf p. 27 CE, 25 mai

Page 32: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 32

1988, Commune de Ménétrol, n°80335, Recueil Lebon) : c’est la loi du 31 décembre 1990

d’actualisation des dispositions relatives à l’exercice des professions commerciales et artisanales dites

Loi Doubin. La notion d’unité économique d’ensemble est remplacée par la notion de même ensemble

commercial : il est clairement constaté que l’Etat souhaite voir cesser la création de lotissement

commercial. L’article 29 de cette loi stipule d’ailleurs qu’il est tenu compte de tous les magasins de

commerce de détail qui font partie d’un même ensemble commercial. Le 1° du même article définit

plus précisément les critères pour le passage devant la CDUC :

« Sont regardés comme faisant partie d’un même ensemble commercial, qu’ils soient ou non situés

dans des bâtiments distincts et qu’une même personne en soit ou non le propriétaire ou l’exploitant,

les magasins qui sont réunis sur un même site et qui :

- Soit ont été conçus dans le cadre d’une même opération d’aménagement foncier, que

celle-ci soit réalisée en une ou plusieurs tranches (ex : ZAC),

- Soit bénéficient d’aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l’accès des

divers établissements,

- Soit font l’objet d’une gestion commune de certains éléments de leur exploitation,

notamment par la création de services collectifs ou l’utilisation habituelle de pratiques et

de publicités commerciales communes,

- Soit sont réunis par une structure juridique commune, contrôlée directement ou

indirectement par au moins un associé, exerçant sur elle une influence au sens de l’article

357-1 de la loi n°66-357 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ou ayant un

dirigeant de droit ou de fait commun. »

Cette association de critères cumulatifs et de critères alternatifs montre bien la détermination de l’Etat

à vouloir empêcher une seconde fois le fleurissement des zones commerciales. Sur ce modèle, un

lotissement commercial tel que celui des « Mousquetaires » à Ménétrol n’aurait pas pu du départ

s’étendre, d’autant plus que la demande en commission aurait été rejetée à la vue même de plusieurs

critères alternatifs.

Dès lors, le nombre de dossiers traités par les CDUC va considérablement diminuer. Par

exemple, le nombre de nouveaux hypermarchés décroit dès le début des années 90 : en 1990, on

compte 18 nouveaux hypermarchés, 11 en 1991, puis en 1993 les fermetures d’hypermarché sont plus

nombreuses que les ouvertures. Ces chiffres restent toutefois à relativiser sachant que le concept

d’hypermarché s’essouffle durant cette période. Mais ils restent pertinents car on constate tout de

même une baisse corrélé avec l’entrée en vigueur de la loi Doubin à partir de 1991.

Page 33: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 33

Va s’ensuivre l’adoption d’une seconde loi qui va réformer les commissions délivrant les

autorisations d’exploitation, la Loi Sapin en 1993.

3.1.2 De la CDUC à la CDEC : un réel changement ?

Le changement de dénomination intervient avec la Loi Sapin en 1993 suite à de multiples

affaires de corruption concernant des autorisations d’exploitation commerciale qui auraient été

arrangées. En effet, les années 80 voient l’apparition des lois de décentralisation qui viennent donner

aux communes la compétence en urbanisme. Mais la liberté des communes n’est pas absolue non plus.

Seul le maire dont la commune dispose d’un POS ou d’une carte communale avec délibération est apte

à la délivrance des autorisations d’urbanisme.

Les problèmes de corruption au sujet des zones commerciales sont en lien avec la délivrance

des autorisations d’urbanisme. En effet, le maire siégeait au sein de la CDUC quand un projet

commercial se situait sur le territoire de sa commune, et il était possible que ce dernier soit force de

persuasion pour que le projet aboutisse. Afin de limiter les tractations occultes, la loi transforme la

CDUC en CDEC (Commission Départementale d’Equipement Commercial). Sa composition évolue en

diminuant : de 20 membres, elle passe à 7 membres dont 4 élus locaux (deux représentant la commune

et la structure intercommunale d’implantation et deux autres représentant les communes les plus

peuplées du même arrondissement). Comme le sous-entend Jérôme Monnet, il semblerait que « ces

différentes communes sont en concurrence, les plus peuplées représentant les centres qui tentent de

défendre le petit commerce existant et les autres représentant des périphéries qui cherchent à attirer

des grandes surfaces en tant qu’activités génératrices de taxes et d’emplois ».12 La détermination de

la composition de la CDEC montre clairement la volonté de la loi Sapin à insister davantage sur la prise

en compte de la concurrence par les commissions que sur l’occupation du sol.

Ce dernier principe est renforcé par l’obligation pour chaque pétitionnaire de réaliser une étude

d’impact économique. D’après l’article 31, elle doit préciser « l’offre et la demande globales pour

chaque secteur d’activité dans la zone de chalandise concernée ; la densité d’équipement en

moyennes et grandes surfaces dans cette zone ; l’effet potentiel du projet sur l’appareil commercial et

artisanal de cette zone et sur l’équilibre souhaitable entre les différentes formes de commerce. ». On

12 D’après Monnet, Jérôme, 2008, « L’urbanisme commercial français de 1969 à 2009 : Quels changements avant et après la directive européenne « Services » ? », octobre 2008, 14 pages

Page 34: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 34

constate donc un basculement entre la Loi Royer et la Loi Sapin. En effet, l’intervention du législateur

a au départ un intérêt urbanistique en voulant rééquilibrer le commerce entre le centre et la

périphérie. Puis, l’intérêt économique prend le dessus, la CDEC devant réguler la concurrence entre les

zones commerciales mais également à une échelle plus large c’est-à-dire entre les communes d’un

même arrondissement. L’absence de professionnels en aménagement du territoire au sein des

commissions est également un facteur prépondérant.

La Loi Raffarin en 1996 va également renforcer l’intérêt économique de la CDEC avec une

nouvelle révision de la Loi Royer. L’autorisation s’étend à tous les commerces de plus de 300 m² mais

également aux hôtels de plus de 30 chambres ainsi qu’aux cinémas de plus de 1500 places. La

commission est composée d’un membre en moins puisqu’il ne reste plus qu’un représentant de la

commune de l’arrondissement la plus peuplée. Cette diminution de l’effectif est probablement due au

fait que des difficultés sont apparues pour rendre un avis sur certains dossiers qui concernaient les

communes périphériques. Ces dernières veulent attirer de grandes et moyennes surfaces

commerciales tandis que la commune la plus peuplée voit en cela un risque de pertes d’activités

commerciales dans son centre-ville.

Nous pouvons donc dire qu’il y a un réel avancement dans la structuration des CDEC par rapport

aux CDUC. Même si les critères économiques avec notamment la question de la concurrence

prédominent dans le choix des commissions, les seuils ont été rabaissés et un plus large éventail de

commerces est concerné par l’avis de la CDEC. Néanmoins, si l’on se détache des évolutions de

l’urbanisme commercial, les zones commerciales ne sont plus synonymes de modernité comme elles

ont pu l’être à leur apparition. Elles sont décriées tant par les élus que par les professionnels de

l’urbanisme pour plusieurs raisons.

3.2 La fracture urbaine causée par les zones commerciales

3.2.1 La sectorialisation des ensembles commerciaux par le POS

Les zones commerciales se sont développées en parallèle du POS sur à peu près une trentaine

d’années. Ce document d’urbanisme qui est le premier plan déterminant l’occupation des sols des

communes françaises, doit en théorie organiser de façon harmonieuse l’urbanisation. Tout le territoire

Page 35: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 35

communal est quadrillé par le POS, et seules les ZAC et les secteurs sauvegardés exclus des morceaux

de territoire de ce document.

D’une manière générale, le POS a consisté à compartimenter les différentes activités sur le

territoire des communes. Très souvent, le zonage représentait des zones propres au commerce, à

l’habitat, à l’industrie, … sans créer de réelle cohérence ni de continuité entre elles. L’exemple

précédemment développé de Charmeil est pertinent dans le sens où une zone commerciale a vu le

jour sans avoir pris en compte l’existant. Il n’y a aucune cohérence entre l’espace bâti représentant le

bourg et les « boites à chaussures » le jouxtant. C’est donc une des grandes critiques faites au POS

puisque qu’il n’était pas un outil permettant de guider les communes dans un urbanisme de cohérence,

mais seulement un outil foncier réglementant l’occupation du sol. Les communes ont recherché le

profit en attirant des enseignes commerciales réputées, facteurs de taxes professionnelles et

d’emplois.

Pourtant, d’après Dominique Moreno, le commerce aurait pu être réellement intégré dans les

POS. En effet, selon elle, le principe d’un zonage géographique et par activité a été enrichi par la LOV

(Loi d’Orientation sur la Ville) de 1991 en ajoutant un onzième alinéa à l’article L123-1 du Code de

l’Urbanisme. Afin d’attirer l’attention des communes sur le fait de veiller à une répartition

harmonieuse des équipements commerciaux et d’éviter l’omniprésence des grandes surfaces, « les

POS peuvent délimiter les zones dans lesquelles pourront s’implanter les commerces de détail soumis

à autorisation d’urbanisme commercial ». A la lecture de cet alinéa, nous pouvons constater que cette

disposition n’est que facultative ce qui laisse une totale liberté aux communes. De plus, la volonté du

législateur de rééquilibrer l’appareil commercial entre le centre et les périphéries n’est pas explicite

avec cette unique démarche. Il aurait été judicieux également d’instituer un zonage en faveur des

commerces de proximité. Enfin, « on ne peut que regretter que le législateur en 1991 n’ait pas été au

terme d’une réelle démarche d’intégration de l’ensemble des composantes du commerce dans les

documents de planification […] la loi s’est limitée aux POS, alors que les documents en tenant lieu

étaient tout autant concernés (ZAC commerciales) » (Moreno, 1999).

Enfin, l’implantation des zones commerciales par les POS ne peut être que de la seule

responsabilité de la commune. En effet, cette affirmation est d’ailleurs soulevée par Phillipe Cattiaux

dès 1994. Les équipements commerciaux sous forme de grandes surfaces en périphérie des villes

attirent des consommateurs sur une zone de chalandise dépassant très largement le territoire

communal : « l’aire de chalandise d’un supermarché correspond approximativement à 10 000

habitants et celle d’un hypermarché à 50 000 habitants ou plus (vingt minutes en automobile) »

(Merlin, 2008). La question d’une responsabilité intercommunale est donc soulevée, celle-ci pouvant

varier selon la nature des commerces, leur pouvoir d’attractivité et l’état de la concurrence. Philippe

Page 36: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 36

Cattiaux sous-entend donc déjà la pertinence d’un document d’urbanisme à l’échelon intercommunal

(« POS intercommunal »).

Dans ce contexte, le phénomène d’étalement urbain qui s’est développé tout au long de la

seconde moitié du XXème siècle va apparaitre. Les lotissements pavillonnaires mais aussi les zones

commerciales vont être pointés du doigt comme étant les causes de l’artificialisation du sol. Les aspects

environnementaux et paysagers vont dès lors être de plus en plus prégnants.

3.2.2 Le phénomène d’étalement urbain marquant le pas des zones commerciales

L’étalement urbain est une notion assez récente malgré que ses origines remontent aux

années 50. Sans utiliser ce terme, Jean Fourastié parlait déjà de ce phénomène ainsi que des probables

effets qu’il pouvait engendrer :

« On peut s’inquiéter de voir tant de gens habiter, même propriétaires, des logements ou des maisons

si éloignées de leurs lieux de travail et de ravitaillement. On peut habiter n’importe où aujourd’hui, et

de plus en plus souvent on le fait, en pleine campagne, au creux d’un vallon, au sommet d’un rocher –

mais c’est au prix d’une consommation énorme d’énergie mécanique (fuel, gaz, essence, électricité,

…) pour le chauffage, les transports, la cuisine, l’eau, le téléphone… ».

Nous pouvons également définir l’étalement urbain comme la résultante du « processus

d’urbanisation conduisant à une diminution de la densité des zones urbanisées, du fait du

développement de zones d’urbanisation peu denses en périphérie des pôles urbains et/ou, parfois,

d’une diminution de la population en centre-ville. » (Sainteny, 2008)

Même si l’habitat est principalement mis en avant quand nous parlons de ce phénomène, le

commerce fait également partie des activités génératrices de l’artificialisation des sols en périphérie

des villes. En effet, au vu des surfaces commerciales créées en entrée de villes couplées aux vastes

aires de parking goudronnées, ce sont plusieurs hectares qui sont régulièrement urbanisés. Entre 1992

et 2004, ce sont plus de 600 km² de superficie par an qui sont artificialisés soit l’équivalent de la surface

d’un département tous les dix ans. Ce sont principalement les terres agricoles qui en font les frais.

Toujours selon Sainteny, l’étalement urbain vient « en concurrence directe avec les productions

agricoles alimentaires et énergétiques, d’autant plus qu’il se fait d’abord au détriment de l’agriculture

urbaine et périurbaine qui représente 50% de la valeur ajoutée agricole ». L’artificialisation des

surfaces agricoles qui provoquent d’ailleurs souvent le morcellement des terres, engendre la

disparition des circuits courts. Par exemple, si l’on prend le cas de l’Aire des Moissons à Saint-Parres-

Page 37: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 37

aux-Tertres, commune périurbaine de l’agglomération troyenne, la zone commerciale a engendré une

consommation de foncier agricole de l’ordre de 33,8 hectares en 1995, surfaces commerciales et aires

de stationnement comprises (Figures 8). La SAU (Surface Agricole Utile) de la commune a d’ailleurs

diminué de presque 20% de 1988 à 2000 en passant de 1082 ha à 847 ha (source : recensement agricole

2010). Quand on compare également avec la superficie du bourg de la commune qui est relativement

étiré, la zone représente un tiers de la surface du bourg (94,7 ha). L’essor des zones commerciales a

donc contribué au phénomène d’étalement urbain.

La transformation de l’occupation du sol joue directement sur le paysage. En effet, la

disparition de terres agricoles au profit des zones commerciales modifie irrévocablement la perception

paysagère. Le commerce périphérique a entrainé avec lui une architecture, de la voirie, une trame

Figures 8 : Evolution de la zone commerciale de l’Aire des Moissons à Saint-Parres-aux-Tertres de 1983 à 1995 (Source : Géoportail)

1983

1990 1995

Localisation de l’Aire des Moissons dans l’agglomération troyenne (Source : Géoportail)

Troyes

Saint-Parres-aux-Tertres

Aire des Moissons

Page 38: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 38

végétale ainsi que des équipements qui suppriment les paysages agraires tels que l’openfield ou le

bocage. L’architecture des grandes surfaces commerciales est d’ailleurs un des principaux points noirs

nuisant à l’esthétique des entrées de villes. Le terme de boite à « chaussures » caractérise bien cela :

un bâtiment sans fenêtres, ni vitrines, de forme rectangulaire et composé le plus souvent de tôle. Nous

pouvons les assimiler à des hangars. Là encore, la recherche de la rentabilité a conduit les enseignes

de la grande distribution a érigé des magasins aux coûts les plus bas : la recherche de l’esthétisme est

nulle.

Pourtant, avec l’apparition des zones commerciales et l’arrivée de la Loi Royer, des mesures

ont été adoptées afin de prendre en compte l’environnement dans les projets. Il a déjà été remarqué

que la Loi Royer de 1973 faisait apparaitre la notion de « qualité de vie » dans l’implantation d’activité

commerciale. Les grands projets commerciaux devaient en outre faire l’objet d’une étude d’impact

environnementale ainsi qu’une enquête publique. La loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de

la nature définit d’ailleurs l’étude d’impact comme étant « une analyse de l’état initial du site et de son

environnement, l’étude des modifications que le projet y engendrerait et les mesures envisagées pour

supprimer, réduire et si possible, compenser les conséquences dommageables pour

l’environnement ». Cette étude aurait donc dû être le préalable indispensable en amont de toute

réflexion développée en matière d’urbanisme commercial. Comme le souligne à juste titre Alexandre

Graboy-Grobesco, les critères environnementaux sont totalement occultés par les critères

économiques dans les CDUC puis les CDEC : « afin de contraindre les promoteurs de grande surface à

s’intégrer harmonieusement dans les sites et paysages, les membres des commissions

départementales devrait davantage s’attacher aux exigences environnementales avant de se

prononcer sur la conformité des projets ». Cette critique doit néanmoins être remise dans son contexte

puisque les membres des commissions d’urbanisme commercial n’ont aucun titre d’urbanistes ni de

paysagistes. Seuls des élus et des représentants des consommateurs ou des CCI (Chambres du

Commerce et de l’Industrie) les composent, soit des personnes ayant uniquement des compétences

dans le domaine de l’économie et de la consommation.

Le législateur a pourtant à de maintes reprises réagit. Entre autre, la circulaire du 12 janvier

1981 relative à l’instruction des demandes de permis de construire visées par la Loi Royer impose de

replacer les projets dans leur « contexte urbanistique » c’est-à-dire le site d’accueil du centre

commercial ou du supermarché envisagé. La Loi Paysage du 8 janvier 1993 va aller encore plus loin

dans la réflexion puisqu’elle fait du paysage une notion juridique. Elle devient une loi d’aménagement

et d’urbanisme au même titre que les lois Montagne et Littoral. Les documents d’urbanisme et a

fortiori les autorisations d’urbanisme doivent donc être compatibles avec cette présente loi. Cette loi

va être suivie par le premier texte qui va réellement bouleverser l’implantation en entrée de villes : le

Page 39: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 39

rapport du sénateur Ambroise Dupont intitulé « Les entrées de ville ou redonner le goût de

l’urbanisme ». Ce texte va introduire la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection

de l’environnement qui créé l’article L111-1-4 du Code de l’Urbanisme. Celui-ci « interdit, en dehors

des espaces urbanisés des communes, les constructions sur une bande de 100 mètres de part et

d’autre de l’axe des autoroutes et routes express, réduite à 75 mètres pour les routes à grande

circulation » (Moreno, 1999). Malgré tout, il était possible de déroger à la règle avec la circulaire du 13

mai 1996. Si les collectivités locales et les partenaires privés réfléchissaient à « insérer dans leur POS

un projet urbain portant sur la qualité architecturale, la sécurité et la réduction des nuisances aux

portes de leur territoire », ce dernier pouvait voir le jour en-dessous des seuils précédemment cités.

La problématique environnementale commence donc à émerger dans les mentalités mais aussi

dans la réglementation. Ce changement radical a d’ailleurs été provoqué par de grandes conférences

telles que le Sommet de Rio en 1992 qui va influencer le droit de l’urbanisme actuel.

Page 40: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 40

Partie II : La situation des zones d’activités commerciales aujourd’hui

Actuellement, l’urbanisme et a fortiori l’urbanisme commercial est influencé par les grandes

préoccupations environnementales et sociétales qui sont apparues lors du Sommet de la Terre à Rio

de Janeiro en 1992. Cette réunion internationale présidée par l’ONU (Organisation des Nations Unies)

et rassemblant une centaine de pays va être l’élément décisif en vue de changer les comportements

de consommation des populations. Il est dressé le constat d’un dérèglement climatique en partie causé

par les pratiques humaines (pollutions) : celles-ci entrainant entre autre des hausses de température

et la disparition d’espèces animales et végétales. A la suite de cela, la majorité des Etats s’est engagée

à faire des efforts de mise en œuvre afin de respecter la nature. Des moyens et objectifs ont été fixés

aux Etats par la suite pour que les espaces naturels soient préservés et qu’ils aient une consommation

énergétique plus raisonnée. Le Protocole de Kyoto en 1997 est le plus important traité fixant des

objectifs en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour l’ensemble des Etats

signataires : réduire entre 2008 et 2012 de 5,2% les émissions de gaz à effet de serre par rapport à

1990. La notion de développement durable apparait dans les discussions de ces deux événements.

Apparu dans les années 80 mais mis en avant dix ans après, il a été défini par le Sommet de la Terre

comme étant un développement permettant de « répondre aux besoins des générations actuelles sans

compromettre la capacité des générations futures, ni celle d’autres groupes, proches ou éloignés, à

satisfaire leurs propres besoins ». Il s’articule autour de trois piliers fondamentaux qui ne doivent en

aucun cas être isolés les uns des autres dans toutes les opérations dites durables : le pilier économique,

social et environnemental.

Parallèlement, en Europe, l’UE (Union Européenne) est créée par le Traité de Maastricht en

1992-1993. Les compétences communautaires sont beaucoup plus développées qu’au temps de la CEE

(Communauté Economique Européenne) et le droit européen va se nourrir des objectifs prônés par la

communauté internationale. Dès lors, chaque Etat membre de l’UE doit retranscrire dans le droit

national les directives européennes. Les années 2000 vont donc être marquées par la prise en compte

du développement durable et notamment de l’environnement dans le droit de l’urbanisme. Dans la

continuité des dispositions apparus dans les années 90 telles que l’Amendement Dupont, les zones

commerciales vont évoluer sur bien des points dans un souci d’intégration urbaine. L’attractivité

commerciale est également un enjeu afin que ces espaces restent durables, surtout au vu de la

revitalisation des commerces en centre-ville.

Page 41: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 41

1. La place des zones commerciales dans le modèle urbain actuel : vers une intégration croissante

de ces espaces au sein des territoires

Les années 2000 marquent un tournant pour le Code de l’Urbanisme puisque la Loi SRU du 13

décembre 2000, dites Loi Gayssot, vient poser de nouveaux fondements dans le domaine de

l’urbanisme. La prise en compte du développement durable a largement influencé cette nouvelle loi

dont l’orientation première et de renouveler la ville c’est-à-dire reconstruire la ville sur elle-même en

assurant sa densification. Il s’agit dès lors de mener des opérations en priorité sur le tissu urbain

existant au lieu de construire en périphérie des villes comme les zones commerciales ont pu l’être,

engendrant l’étalement urbain. Parallèlement, les zones commerciales situées en entrée de villes ont

connu un rattrapage de l’urbanisation venant alors englober ces zones dans le tissu urbain et ainsi

créer des continuités. L’étalement urbain a pu dans certains cas être bénéfique notamment pour ces

espaces.

1.1 La refonte de la planification commerciale pour une meilleure prise en compte des zones

d’activités périphériques

1.1.1 La modification en profondeur des documents d’urbanisme : vers un urbanisme durable

Avec la loi SRU apparaissent deux nouveaux documents d’urbanisme qui viennent remplacer

le POS ainsi que le SD (Schéma Directeur). Le PLU (Plan Local d’Urbanisme) et le SCOT (Schéma de

Cohérence Territoriale) sont beaucoup plus structurés et pertinents pour mener à bien la volonté de

l’Etat visant à densifier l’urbanisation plutôt que l’étaler.

Le PLU vient remplacer le POS qui n’avait été conçu que pour régir l’occupation du sol de la

commune. Son remplaçant reste toujours dans une optique d’un zonage où s’organise les différentes

fonctions (habitat, activités économiques, agriculture) mais va beaucoup plus loin : il planifie la

stratégie communale grâce au PADD (Projet d’Aménagement et de Développement Durables). Cette

pièce permet d’après l’article L123-1 du Code de l’Urbanisme de définir « les orientations générales

d’aménagement et d’urbanisme retenues pour l’ensemble de la commune », et montre donc la volonté

de l’Etat que les autorités locales aient une vision à moyen et long terme de leur territoire. Du PADD

découlent ensuite toutes les autres pièces du dossier de PLU, que ce soient les orientations

Page 42: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 42

d’aménagement ainsi que le zonage et le règlement. En outre, toutes les pièces doivent être mises en

cohérence, le zonage résultant de la stratégie urbaine portée par la municipalité.

La loi SRU met fin également au caractère dérogatoire des ZAC puisque le PAZ et le RAZ

(Règlement d’Aménagement de Zone) n’existent plus pour les ZAC nouvellement créées : les règles

d’urbanisme de ces zones sont désormais incluses au sein du PLU. Par contre, les ZAC créées avant

cette loi disposent toujours de PAZ et de RAZ. Il n’y a donc pas une volonté de l’Etat de mettre en

compatibilité les « anciennes » ZAC avec le PLU. Mais le fait d’inclure les zones créées à posteriori

montre déjà une avancée dans la façon de construire un urbanisme durable : le législateur souhaite

abolir l’urbanisme dérogatoire.

A l’échelon intercommunal, le SCOT est le document d’urbanisme de l’aire urbaine fixant les

grandes orientations des politiques publiques dans les domaines de l’urbanisme, de l’aménagement,

des transports ou encore de l’implantation commerciale. Il va donc être un document important pour

les zones commerciales notamment. Au départ, d’après l’article L122-3 du Code de l’Urbanisme, le

SCOT doit seulement prendre en compte « la zone de chalandise des commerces » ainsi que les

schémas de développement commercial. Tout comme pour le PLU, c’est le PADD qui va être la pièce

centrale du document. Nous pouvons donc constater un progrès quant à l’intégration des équipements

commerciaux dans les documents d’urbanisme, même si une simple prise en compte est instituée par

le législateur. C’est la Loi de Modernisation de l’Economie, dites LME de 2008 qui va créer une pièce

spécifique pour régir le développement des surfaces commerciales : le DAC (Document

d’Aménagement Commercial). Cette loi, issue de la Directive européenne « Services » de 2006, marque

l’influence de l’UE dans le droit français et notamment dans ce cas de faire évoluer le régime des

autorisations commerciales. Elle inscrit dans le Code de l’Urbanisme que les SCOT :

« peuvent définir des zones d’aménagement commercial […] définies en considération des exigences

d’aménagement du territoire, de protection de l’environnement ou de qualité de l’urbanisme

spécifiques à certaines parties du territoire couvert par le schéma. Leur délimitation ne peut reposer

sur l’analyse de l’offre commerciale existante ni sur une mesure de l’impact sur cette dernière de

nouveaux projets de commerces. La définition des zones figure dans un document d’aménagement

commercial [qui] doit faire l’objet, dans un délai d’un an à compter de la délibération l’adoptant, d’une

enquête publique » (Art 102, IX, 2)13.

13 D’après Monnet, Jérôme, 2008, « L’urbanisme commercial français de 1969 à 2009 : Quels changements avant et après la directive européenne « Services » ? », octobre 2008, 14 pages

Page 43: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 43

Les SCOT ne sont donc pas dans un premier temps obligés d’avoir un DAC, ce qui n’encourage

pas les structures porteuses des SCOT d’en rédiger un. Les ZACOM (Zones d’Aménagement

Commercial) dont le périmètre est défini au sein de ce document sont les zones où le développement

commercial sera privilégié. Le DAC est donc le premier document qui vient régir l’implantation des

zones commerciales à l’échelle d’un bassin de vie.

Son caractère obligatoire va être effectif avec les lois Grenelle et plus précisément avec la loi

ENE (Engagement National pour l’Environnement) du 12 juillet 2010. Cette loi découlant du Grenelle

de l’Environnement de 200714 conduit à l’apparition d’une multitude de dispositions en matière

d’environnement et de développement durable : c’est une grande avancée qui vient réellement

encadrer le développement urbain. Les documents d’urbanisme vont être modifiés dont le SCOT où le

DAC devient obligatoire. Les conditions d’implantation vont être posées comme la superficie minimale

requise pour qu’une enseigne s’implante dans une ZACOM. Par exemple, pour le SCOT de Vichy Val

d’Allier, la zone commerciale de Charmeil définie comme étant une ZACOM ne peut recevoir que des

commerces dont la surface commerciale est supérieure à 1000 m². La communauté d’agglomération

souhaite donc renforcer les pôles commerciaux existants mais surtout éviter une dispersion des

grandes surfaces commerciales afin notamment de lutter contre l’étalement urbain, synonymes de

disparition de terres agricoles, de zones naturelles, … Le périmètre de la ZACOM de Charmeil a

également été tracé tout autour des entités existantes afin de ne pas poursuivre son développement.

Cette zone que nous avons qualifié d’atypique auparavant puisque située dans une commune peu

peuplée et surtout excentrée du cœur urbain de l’agglomération, ne pourra donc continuer à

s’accroitre : l’objectif est qu’elle se maintienne.

Au niveau du PLU, la Loi ENE va renforcer la partie environnementale avec l’obligation de

recenser et préserver la trame verte et bleue au travers des corridors écologiques et des zones

humides. L’urbanisation dans la lignée de la Loi SRU doit être densifiée et principalement dans la

continuité du tissu urbain existant. Un échéancier de l’ouverture à l’urbanisation des zones AU (zones

à urbaniser) est rendu obligatoire dans les OAP (Orientations d’Aménagement et de Programmation).

Le législateur vient dès lors ajouter la variable temps dans le développement urbain des communes,

des zones ne pouvant être ouvertes à l’urbanisation qu’à partir d’une certaine date. Ce qui signifie une

utilisation à bon escient des réserves foncières des communes et surtout qu’un ou des projets urbains

sensés voient le jour sur ces terrains.

14 Processus mis en place par le gouvernement français dès 2007 sous forme de rencontres politiques visant à prendre en compte l’environnement et le développement durable dans les politiques publiques menées à long terme. Il a été suivi par les lois Grenelle I et II impactant de nombreux domaines dont le droit de l’urbanisme.

Page 44: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 44

Le droit de l’urbanisme intègre donc de plus en plus le commerce dans la règlementation. Mais

un outil indépendant de ce droit a permis de réguler la production de surfaces commerciales en

sensibilisant les collectivités locales.

1.1.2 La charte d’urbanisme commercial : un outil au service des collectivités pour une

appréhension globale de l’appareil commercial au sein des territoires

Face au trop grand nombre d’équipements commerciaux au sein des agglomérations, pouvant

être renforcé par l’apparition de projets commerciaux qui ne feraient qu’accroitre l’offre engendrant

le déclin de certains pôles, les collectivités se sont penchées sur un moyen de réguler le développement

du commerce. C’est ainsi que de nombreuses agglomérations ont rédigé une charte d’urbanisme

commercial, document contractuel fédérant l’ensemble des acteurs (communes, EPCI, CCI, …) autour

d’une vision partagée de l’aménagement commercial. Ce document met également l’accent sur le

caractère intercommunal du commerce. En effet, les collectivités, en élaborant cette charte, prennent

conscience que l’activité commerciale possède un pouvoir de captation dépassant très largement les

limites communales.

Depuis le début des années 2000, la surface commerciale autorisée en France n’a cessé

d’augmenter en passant de 2 500 000 m² en 2001 à 4 000 000 m² en 2009 (Madry, 2011). Cette

surproduction immobilière a entrainé l’apparition de friches commerciales soit parce que certains

pôles difficilement rentables ont souffert de l’apparition de nouveaux, soit dans une moindre mesure

parce que les nouveaux projets commerciaux n’ont pas trouvé d’enseignes. D’autant plus, si ce sont

des zones commerciales en périphérie des villes, leur recyclage parait difficile : elles sont la plupart du

temps accessibles que par l’automobile et les bâtiments « boites à chaussures » restreignent le type

d’activités qu’ils peuvent accueillir. La charte est donc dans ce cas conçue afin que l’offre commerciale

soit en totale adéquation avec le territoire. Elle est d’ailleurs élaborée le plus souvent dans de grandes

aires urbaines telles que Bordeaux et Rennes, où la pression foncière et la surface vouée au commerce

sont importantes.

Elle se compose d’un diagnostic faisant l’état des lieux du tissu commercial du territoire : il va

permettre notamment de hiérarchiser les différents pôles commerciaux selon leur degré d’attractivité

que ce soit au travers de l’importance des enseignes qui les composent (petits commerces

traditionnels caractérisant le centre-ville ; grandes surfaces caractérisant les communes périurbaines).

Ensuite, des principes sont posés c’est-à-dire des axes de développement des différents pôles afin

Page 45: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 45

d’anticiper l’implantation de tous projets commerciaux. Il y a la volonté de créer une harmonie aux

différentes zones commerciales mais également au commerce de centre-ville afin d’atténuer le

déséquilibre centre-périphérie. Dès lors, pour chaque pôle commercial, la charte d’urbanisme

commercial peut venir diversifier le type de commerce spécialisé selon les zones ou encore interdire

le développement de certaines si celles-ci sont déjà bien pourvues en magasins. Le principe de

concurrence qui était le facteur déterminant auparavant devient petit à petit moins primordial, laissant

une plus grande place aux principes urbanistique et paysager.

Ce document qui reste tout de même une volonté politique d’un territoire n’est pas

négligeable une fois créé. En outre, la charte peut servir de base à la création d’un SDC (Schéma de

Développement Commercial) ou directement être prise en compte par le SCOT.

Nous constatons donc une plus grande intégration du commerce dans l’urbanisme afin que les

zones commerciales notamment ne soient plus en rupture avec les nouvelles orientations que peuvent

être le renforcement des réseaux de transports en commun ou des modes de circulation douce en

général. Cette intégration est d’autant plus visible aujourd’hui puisque l’intercommunalité par le biais

des chartes d’urbanisme commercial et des SCOT intervient directement sur le devenir de ces espaces.

Néanmoins, le phénomène de périurbanisation voire même de rurbanisation15 est venu urbaniser les

abords de certaines zones commerciales, ce qui a donc conduit les pouvoirs publics à adapter ces

espaces.

1.2 Le rattrapage spatial de l’urbanisation causé par le phénomène d’étalement urbain :

l’exemple de la zone commerciale des Ailes à Vichy

1.2.1 D’une zone aux portes de l’agglomération, à une zone incluse dans le tissu urbain

La zone commerciale symbolisant l’entrée de ville ou d’agglomération des années 60 à 90 n’est

plus forcément visible aujourd’hui. L’étalement urbain qui a principalement été caractérisé par le

développement des zones d’habitat individuel est allé de pair avec le développement des zones

commerciales. Située à l’interface de l’urbain et du rural, les ensembles commerciaux périphériques

ont été accompagnés d’autres formes urbaines telles que les lotissements pavillonnaires, attractifs

15 Phénomène caractérisant le peuplement et l’urbanisation des territoires ruraux périphériques à une ville

Page 46: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 46

pour leurs habitants car à la fois près de toutes les fonctionnalités urbaines et également localisés dans

des espaces semi-ruraux permettant de se sentir vivre à la campagne.

C’est le cas de la zone commerciale des Ailes, qui a été implantée au Nord de Vichy à partir des

années 70 (cf Figure 5 et Figures 9). Au départ, seul un hypermarché est conçu à proximité du quartier

de grands ensembles de logement collectif portant le même nom. Il y a donc une volonté d’attirer des

consommateurs vivant dans ce quartier mais également une clientèle plus éloignée avec l’aire de

stationnement de taille importante caractéristique de l’époque.

L’hypermarché va ensuite connaitre une extension dans les années 80. Puis au début des

années 90 un lotissement commercial va être créé à proximité de l’hypermarché. Nous retrouvons la

1970 1974

1992 2010

Figures 9 : Evolution du développement de la zone commerciale des Ailes à Vichy (03) (Source : Géoportail)

Page 47: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 47

formation classique d’une zone commerciale, la grande surface alimentaire étant le moteur de la zone

tandis que les enseignes spécialisées profitent de l’attractivité de l’hypermarché pour perdurer.

Parallèlement à son développement, la zone a connu au fil des décennies un rattrapage spatial

de l’urbanisation dû en grande partie à l’essor de l’habitat individuel en périphérie de l’agglomération

vichyssoise, notamment sur la commune de Creuzier-le-Vieux située à l’Est des Ailes (Figure 10).

Progressivement, le site d’entrée de ville a été repoussé encore plus loin du centre de l’agglomération,

la zone commerciale des Ailes étant aujourd’hui incluse dans le tissu urbain.

Dans les années 60 et jusqu’en 1979, l’hypermarché vient achalander le quartier des Ailes

composé d’habitat collectif au Nord et au Sud de ce dernier. Sur la même période, nous constatons

Figure 10 : Evolution de l’urbanisation autour de la zone commerciale des Ailes

(Source : Géoportail)

Avant 1979 1979-1987

1988- 1997 1998-2010

Page 48: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 48

l’apparition de l’habitat individuel sur la commune de Vichy à l’Est des Ailes puis quelques habitations

sont construites au coup par coup ou sous la forme de lotissement sur la commune de Creuzier-le-

Vieux. Sur la période 1979-1987, l’hypermarché connait une extension de ses locaux afin d’accroitre

sa surface commerciale et de proposer une cafeteria. Dans le même temps, de nouveaux pavillons sont

érigés à Creuzier-le-Vieux et une clinique privée vient enrichir le quartier des Ailes. La période suivante,

1988-1997, c’est la naissance du lotissement commercial regroupant des moyennes surfaces

spécialisées à proximité de l’hypermarché. Enfin, la période récente de 1998 à 2010 va connaitre une

urbanisation quasi-totale autour du site : les coteaux de Creuzier-le-Vieux vont connaitre une

urbanisation grandissante conjuguant habitat collectif et habitat individuel. Nous pouvons donc dire

que la zone commerciale est intégrée au tissu urbain puisqu’il ne connait pratiquement pas de

discontinuité.

L’intégration urbaine ne se résume pourtant pas à ce seul critère. En effet, il s’agit de savoir si

l’intégration est plus complexe que cela, notamment en terme de connexion que ce soit des transports

en commun mais également en mode de déplacement doux (pistes cyclables, cheminements piéton).

1.2.2 Une intégration urbaine vraiment totale ?

La zone commerciale des Ailes, malgré le fait qu’elle soit enveloppée dans l’urbanisation

existante, connait quelques points noirs. En effet, elle est tout d’abord typique des zones commerciales

conçues sous la forme de « boite à chaussures ». Nous retrouvons le plan à damiers qui a fait son

succès économiquement parlant. Le style architectural est relativement sommaire et très symétrique

(cf Figure 11) entrainant une intégration paysagère nulle. De plus, la prédominance de l’automobile

est visible puisque les aires de stationnement représentent une grande partie de l’occupation du sol.

Figures 11 : La zone commerciale des Ailes : le modèle typique des « boites à chaussures » marquant la prédominance des enseignes et du stationnement (Source : Maxime Dubois, 21 février 2014)

5 6

Page 49: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 49

Il en va de même pour l’hypermarché Cora qui est le moteur économique de la zone. D’après Pierre

Merlin, le nombre de place de stationnement est proportionnel à la surface de vente, à raison de 15 à

20 places de stationnement pour 100 m² de surface de vente. La surface de vente faisant environ

14 000 m², il devrait y avoir 2100 places. Or, nous constatons qu’il n’y en a qu’un peu plus de 900. Nous

sommes donc bien loin de la norme qui peut être pratiqué dans d’autres hypermarchés. Malgré tout,

la surface du parking est conséquente (environ 2 ha) et entièrement goudronnée : les eaux pluviales

ne sont donc pas prises en compte.

La végétation est présente mais reste tout de même minimaliste. Seules des arbres et quelques

haies agrémentent le site mais elles servent surtout de délimitation des aires de stationnement entre

chaque commerce. Nous pouvons en déduire qu’à sa création, l’automobile étant un facteur

important, tous les efforts ont été consentis pour l’accessibilité routière et le stationnement.

D’ailleurs la place du piéton est assez réduite (cf Figure 12). En effet, l’accès à la zone

commerciale n’est seulement possible que par des trottoirs reliés entre eux par des passages piétons.

Un lieu de détente composé de bancs est également présent mais au vu du nombre de piétons

arpentant la zone, cet espace n’a aucun intérêt. Les quelques aménagements proposés pour les

piétons sont donc très minces et nous pouvons penser qu’ils ont été créés en lien avec la présence du

quartier d’habitat entourant la zone commerciale. Ils ont tout de même le mérite d’exister puisqu’ils

Figures 12 : Une place du piéton limitée mais présente (Source : Maxime Dubois, 21 février 2014)

7 8

9

Page 50: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 50

sont utilisés par une minorité de consommateurs, la part la plus importante venant de communes

voisines à celles de Vichy.

Enfin, nous pouvons noter la présence de transport en commun ainsi que des voies de

circulation douce (piste cyclable) reliant notamment la zone commerciale au centre-ville. Elle connait

donc une intégration que l’on peut qualifier de partielle. En effet, par rapport au précédent exemple

de la zone commerciale de Charmeil, la place accordée à l’automobile est en recul. Des aménagements

piétonniers et cyclables ainsi qu’une ligne de bus permettent à une plus large partie de la population

d’accéder à cet équipement commercial. L’urbanisation générée au fil des décennies autour a conduit

les pouvoirs publics à mettre en place des infrastructures collectives qui ont été profitables à

l’intégration urbaine de la zone. Cet exemple montre donc déjà une évolution dans la constitution des

zones commerciales en périphérie des villes.

2. Des espaces en quête d’innovation afin de prendre en compte le principe du développement

durable

Aujourd’hui, la zone commerciale nouvellement créée n’est plus la zone de la fin du XXème

siècle. Jugée à de nombreuses reprises comme dégradant les paysages des entrées de ville

notamment, des efforts d’implantation et de conception ont été mis en œuvre. Le concept a également

évolué puisque l’alimentaire n’est plus la dominante essentielle au maintien voire à la pérennité de la

zone d’activité commerciale. Que ce soit les enseignes, les promoteurs, les communes et/ou les

intercommunalités, chacun prône pour des zones commerciales innovantes afin d’attirer une clientèle

toujours plus nombreuse, de générer des profits, de créer des emplois et donc un dynamisme

économique du territoire. Malgré tout, nous allons voir que des dysfonctionnements existent encore

et toujours au sein de ces espaces.

Page 51: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 51

2.1 La zone commerciale pensée aujourd’hui comme un véritable projet urbain

2.1.1 Le concept du fun shopping, ou comment rendre les achats agréables pour le

consommateur

Le phénomène du fun shopping n’est pas récent puisqu’il est apparu au tournant des années

50 aux Etats-Unis, avec le néologisme retailtainment, contraction des termes retail (commerce) et

entertainment (divertissement). Ce concept peut se définir comme étant la combinaison de l’activité

commerciale et des loisirs, pouvant mêler à la fois « des ambiances festives, services récréatifs, biens

ludiques et commerces en tout genre » (Gasnier, 2008). Il a également évolué en lien avec le

développement commercial, au départ dans les downtowns puis il est allé de pair avec les immenses

malls des suburbs américains.

En France, il tient surtout de la volonté d’enseignes qui veulent se démarquer de la

concurrence en proposant des activités à leur client en plus de la vente d’articles. Les précurseurs sont

des enseignes telles que Disney, la FNAC ou encore Decathlon pour le sport. Cette dernière a d’ailleurs

misé énormément sur le fun shopping. En témoigne le magasin situé sur les communes de Kingersheim

et Wittenheim dans l’agglomération de Mulhouse en Alsace (cf Figure 13), qui s’étale sur pas moins de

30 ha en proposant une multitude d’activités sportives. La partie magasin est donc minoritaire sur cet

exemple mais reste tout de même conséquente (38 000 m²). C’est une nouvelle forme de commerce

en périphérie des villes. Même si la forme « boites à chaussures » de la zone commerciale est toujours

présente, les usages sont beaucoup plus diversifiés, le sport étant dans ce cas un élément moteur de

Figure 13 : Le Decathlon de Mulhouse, symbole de la démesure du fun shopping (Source : decathlon.fr)

Page 52: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 52

l’attractivité du site. Tout un complexe sportif bien entendu payant vient en prolongement de l’offre

de produits : l’enseigne a trouvé un bon moyen de proposer à ses clients un espace où utiliser ses

accessoires de sport.

Baptisé Village Oxylane, ce concept créé par l’enseigne Decathlon fleuri de plus en plus en

France, en lien notamment avec la médiatisation de phénomènes tels que le surpoids et les bienfaits

du sport sur la santé. De plus, ces villages fonctionnent en totale autonomie économique : le

supermarché ou l’hypermarché n’a pas lieu d’exister à proximité. Il suffit qu’il ne soit pas trop éloigné

en temps et en distance de la ville-centre (10 minutes environ) pour pouvoir attirer. Comme l’affirme

Arnaud Gasnier, « cette conception marketing repose bien évidemment sur la stratégie de

différenciation et de niche pour pouvoir se démarquer de la concurrence d’une part, sur celle de

l’implantation face aux freins constitués par les CDEC et la raréfaction des terrains opportuns proches

des grandes villes centres, d’autre part »16.

L’exemple de Village Oxylane montre bien que seule une implantation en périphérie d’une

ville-centre peut être pertinente pour créer un tel complexe commercial. Mais le fun shopping est

visible également plus ponctuellement, dans des zones commerciales plus « classiques ». En effet, des

loisirs sont venus renforcer l’appareil commercial des zones périphériques : c’est notamment le cas

des multiplexes de cinéma, des bowlings et de la restauration rapide. Aujourd’hui, il est très fréquent

de trouver ces activités et a fortiori un restaurant McDonald’s ou Quick dans une zone commerciale

de moyenne ou grande superficie. Apparus durant les années 90 et 2000, les loisirs au sein des zones

d’activité commerciale sont venus répondre à l’essoufflement du modèle « hypermarché » et aux

nouveaux comportements des consommateurs. En outre, la réduction du temps de travail et le succès

de l’achat-plaisir en lieu et place de l’achat utile ont accru la demande en loisirs. Tout ceci concourt à

personnaliser les zones commerciales que ce soit l’ambiance, la thématisation ou encore l’identité du

lieu. Nous pouvons entrevoir également l’apparition d’une mixité des fonctions puisque le commerce

n’est plus le seul critère d’attractivité de la zone : les loisirs vont permettre de rendre beaucoup plus

agréable les achats des consommateurs.

Cette mutation des zones commerciales montre l’adaptabilité des espaces ainsi que des

groupes de la grande distribution à apporter sans cesse de la nouveauté pour le consommateur. Au

départ censées être des groupements de commerce discount permettant aux individus de faire des

économies pour les achats quotidiens, les zones commerciales veulent devenir « des espaces à vivre »

16 Desse, René-Paul [dir.], 2008, « Dictionnaire du commerce et de l’aménagement », PUR, 355 pages

Page 53: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 53

où l’achat n’est plus forcément obligatoire. L’arrivée des loisirs permet d’attirer également des

consommateurs sur des temps plus longs : l’usage que nous faisons des zones commerciales n’est plus

minuté. D’après Bruno Sabatier et Arnaud Gasnier, « l’imbrication de plus en plus étroite de ces deux

fonctions définit un nouveau genre de projets urbains à caractère ludique, festif, touristique et produit

de nouvelles formes d’urbanisation dans l’espace urbain, suburbain et périurbain ». En définitive, la

multifonctionnalité s’est substituée à la spécialisation des espaces qui s’était imposée durant plusieurs

décennies. Ces zones multifonctionnelles ont depuis quelques années encore évolué, l’accent ayant

été mis sur davantage de verdure toujours dans l’optique d’ « espace à vivre » et d’une insertion sur

le site plus travaillée.

2.1.2 Le parc commercial Be Green à Saint-Parres-aux-Tertres : une réelle révolution du

commerce périphérique ?

Une nouvelle génération de zone commerciale est apparue depuis peu. Le modèle du retail

park (parc d’activités commerciales) caractérise cette forme récente du commerce périphérique. Selon

le CNCC (Conseil National des Centres Commerciaux), un parc d’activités commerciales se définit

comme étant « un ensemble à ciel ouvert, réalisé et géré comme une entité. Il comprend au moins

cinq unités locatives et sa surface est supérieure à 3000 m² de SHON (Surface Hors Œuvre Nette) ». A

la différence des « zones boites à chaussures », les différents commerces disposent chacun d’un local

au sein d’un même bâtiment. Il permet donc en théorie de diminuer la consommation en foncier, de

mutualiser les aires de stationnement et ainsi de réduire les coûts d’entretien et de fonctionnement.

Rien qu’aux dires des trois points précédents, nous pouvons constater déjà un souci de limiter

l’étalement urbain mais également de créer des zones commerciales mieux organisées qu’auparavant.

Un des exemples récents de retail park est celui de Be Green situé sur la commune de Saint-

Parres-aux-Tertres, à l’Est de Troyes. Ouvert à l’automne 2013, il est en fait une extension de la zone

commerciale de l’Aire des Moissons existante, composée seulement de magasins spécialisés, car étant

localisée à proximité d’un hypermarché E.Leclerc. D’ailleurs, la zone des Moissons a subi une

requalification des espaces extérieurs (voirie, espaces verts, signalisation) parallèlement à la création

de Be Green. Mené par la communauté d’agglomération du Grand Troyes en association avec un

promoteur de la région, le projet a permis de créer 30 000 m² de surface commerciale afin d’accueillir

26 enseignes. Construit sur des terrains agricoles, la zone Be Green a donc dû répondre à une

problématique d’intégration sur le site mais également au sein de la zone commerciale existante. Elle

Page 54: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 54

a a priori réussi ce pari puisqu’elle est la première zone à être labellisée HQE™ (Haute Qualité

Environnementale) Aménagement.

Nous allons donc voir si la certification de ce retail park est justifiée et si celui-ci a été intégré

dans son environnement, qu’il soit immédiat mais également plus lointain (à l’échelle de

l’agglomération troyenne). Pour cela, nous allons analyser le label HQE™ Aménagement afin de voir si

l’intégration urbaine du projet Be Green répond aux principes du développement durable.

a- Les fondements du label HQE™ Aménagement

Le label HQE™ Aménagement a été créé par l’association HQE regroupant aussi bien des

donneurs d’ordre que des professionnels et experts de l’aménagement et de la construction. Il est

donc né d’une collaboration entre acteurs publics et acteurs privés regroupée au sein d’une plateforme

de la construction et de l’aménagement durable reconnue d’utilité publique depuis 1996, seulement

quelques années après le Sommet de la Terre de Rio.

Ce label qui au préalable fait l’objet d’une démarche tout au long du projet urbain, a pour

objectif de prendre en compte les enjeux du développement durable. Un cadre de référence a donc

été réalisé afin de pouvoir évaluer le projet et le certifier « durable » au sens du label HQE™

Parc commercial Be Green (extension de l’Aire des

Moissons)

Figure 14 : Situation du parc commercial Be Green par rapport à la zone commerciale existante (Source : Géoportail)

Voies d’accès créées

Page 55: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 55

Aménagement : 17 thèmes d’aménagement durable ont été mis en place au sein d’une grille. Ces

thèmes sont d’ailleurs compatibles avec les 20 engagements de la charte EcoQuartier élaborée par le

Ministère de l’Egalité des Territoires et du Logement17, où toutes les collectivités signataires de la

charte doivent respecter ces principes dans la réalisation de leur projet d’éco-quartier. Les projets

labellisés EcoQuartier étant nécessairement des quartiers d’habitat, nous pouvons en déduire que le

label HQE™ Aménagement est plutôt destiné aux autres types de « quartiers », même s’il est pour le

moment difficile d’assimiler une zone commerciale à un quartier.

Les 17 thèmes composant la démarche recoupent des thématiques diverses et variées. En

effet, ils concernent aussi bien l’accessibilité du quartier, que l’efficacité énergétique des bâtiments, la

protection des milieux naturels ou encore l’ambiance du site. Ces thèmes sont également regroupés

en trois grands ensembles que nous pouvons identifier comme ressemblant aux trois piliers du

développement durable :

- Assurer l’intégration et la cohérence du quartier avec le tissu urbain et les autres échelles

du territoire (dimension urbaine)

- Préserver les ressources naturelles et favoriser la qualité environnementale et sanitaire de

l’aménagement (dimension environnementale)

- Promouvoir une vie sociale de proximité et conforter les dynamiques économiques

(dimension socio-économique)

Nous allons donc voir en appliquant chaque thème de la démarche si le projet Be Green

répondant aux critères HQE™ Aménagement est un projet d’aménagement durable. La démarche qui

semble pourtant réfléchie et organisée va peut-être laisser entrevoir une certaine limite de la

labellisation, qui se cantonnerait peut être trop à la mise en place d’une grille d’évaluation

standardisée.

b- Le parc commercial Be Green : un projet d’aménagement durable ?

Le premier ensemble de thèmes composant la dimension urbaine regroupe tout ce qui attrait

à l’intégration du projet, que ce soit l’accessibilité du site, la densité ou encore l’intégration paysagère.

Tout d’abord, en termes d’accessibilité, l’automobile reste le transport le plus adaptée pour rejoindre

la zone Be Green. En effet, le site est localisé en sortie d’agglomération, à proximité de la rocade (cf

17 Cf Annexe 2 – Matrice des correspondances entre les 17 thèmes de la démarche HQE-Aménagement et les 20 dimensions de la Grille EcoQuartier in Guide Pratique du SMO HQE-Aménagement, avril 2013, 18 pages

Page 56: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 56

Figure 15). Une ligne de bus urbain relie la zone commerciale de l’Aire des Moissons au centre-ville de

Troyes, mais il faut tout de même compter 20 minutes de transport. De plus, la fréquence d’arrêt à

l’Aire des Moissons est irrégulière puisque seul un bus sur trois dessert la zone. Les modes de transport

doux ont été développés au sein du site (cf Figures 16) : des pistes cyclables ont été tracées le long des

voies routières, mais il n’y a pas de continuité entre celles-ci et le réseau de l’agglomération. Nous

avons observé des tronçons en direction de Troyes mais ils restent trop occasionnels, obligeant les

usagers à alterner entre voies strictement cyclables et voies routières. Par contre, le piéton a été

totalement privilégié sur le site, avec une multitude de cheminements et de passages piétons. Une

large promenade permet d’ailleurs de longer les différents commerces sans avoir besoin de traverser

les aires de parking. La place de l’automobile a d’un autre côté été diminuée afin que les espaces

publics lui soient rendus. Le stationnement a été mutualisé afin qu’il n’y ait pas de parking dédié à

chaque commerce : il reste encore très consommateur de surface. Les voies de desserte du parc

commercial ont également été rétrécies d’une part pour que la vitesse pratiquée soit sécurisante pour

un espace où le piéton est prioritaire et d’autre part pour que chaque moyen de transport puisse

trouver sa place (piste cyclable le long des axes de circulation). Selon les voies, les sens de circulation

ont été séparés afin de créer un cheminement d’entrée et de sortie du site pour l’automobile ainsi que

Troyes-centre – Aire des Moissons : 20 minutes en bus

Figure 15 : Une situation géographique favorable à l’automobile (Source : Géoportail, TCAT)

Aire des Moissons

Rocade

Page 57: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 57

pour sécuriser les usagers du parc commercial (cf Figures 17). La place du piéton est d’autant plus forte

que les concepteurs ont insisté sur l’aménagement d’espaces publics au milieu des commerces et des

espaces dédiés à l’automobile. Nous avons observé une multitude de bancs, d’aires de jeux pour les

enfants dans l’optique de rendre la visite du parc commercial agréable : l’achat ne doit plus être qu’une

nécessité mais également un loisir. Des agréments ont donc été mis à disposition des consommateurs

afin de les inviter à revenir mais également afin qu’ils prennent plus de temps (Figures 18). Ce nouveau

concept de zone commerciale introduit la notion d’ « espace à vivre » dans le but que cet

aménagement soit durable dans le temps.

Figures 16 : La présence de divers aménagements favorisant la mobilité douce (Source : Maxime Dubois, 20 mars 2014)

10 11

12 13 14

Page 58: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 58

En termes de densité, le parc commercial Be Green offre une densité beaucoup plus

importante que celle de la zone commerciale antérieure. Avant son apparition, l’Aire des Moissons

s’étalait sur 16, 3 ha pour environ 30 moyennes surfaces commerciales. Le parc commercial Be Green

est composé de plus de 30 moyennes surfaces s’organisant sur une superficie de seulement 10 ha.

Nous avons donc une offre commerciale conséquente sur une surface plus petite, le principe du retail

park favorisant cette densité. Le choix de son implantation reste cohérent puisqu’il s’agit d’une

extension de zone commerciale, ce qui évite un aggravement de la polarisation commerciale au sein

de l’agglomération troyenne. Cette extension a d’ailleurs été bénéfique puisqu’elle a permis une

requalification des espaces publics de la zone plus ancienne. Malgré tout, les « boites à chaussures »

sont toujours présentes. Quant au parc commercial Be Green, les bâtiments ne ressemblent en rien

aux locaux des zones des années 80-90. Au niveau des matériaux, le bois est omniprésent et prend la

place de la tôle. Les surfaces vitrées sont conséquentes et permettent aux magasins d’aménager des

vitrines, à l’instar des commerces de centres-villes. Les enseignes sont plus discrètes comparées aux

commerces situés dans l’ancienne zone, mais leur implantation en hauteur permet tout de même de

les localiser. Un certain effort de l’intégration paysagère du projet a donc été fait, notamment au

Figures 17 : Une réduction de la place de la voiture à nuancer (Source : Maxime Dubois, 20 mars 2014)

Figures 18 : Des aménagements agrémentant le cadre de vie et laissant place à la détente (Source : Maxime Dubois, 20 mars 2014)

15 16

17 18

Page 59: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 59

niveau de l’esthétisme des bâtiments. Nous retrouvons néanmoins un magasin qui ne profite pas de

cette configuration : l’enseigne d’ameublement Alinéa, qui se veut être la locomotive du parc

commercial. En effet, le local n’a aucun intérêt architectural ni même paysager puisqu’il n’est autre

qu’une « boite à chaussures », ce qui contraste totalement avec le reste de l’ensemble (cf Figure 19).

Ce magasin est pourtant la vitrine de ce pôle commercial mais sa trop grande superficie en raison des

articles qu’il vend ne pouvait être surement en phase économiquement parlant. Malgré les efforts

accordés au point de vue esthétique, les coûts ne doivent pas être trop conséquents ce qui pourrait

jouer dans le montant des loyers pour attirer des enseignes.

Deuxièmement, la démarche HQE™-Aménagement s’appuie sur la volonté de préserver les

ressources naturelles ainsi que de favoriser la qualité environnementale du projet. L’enjeu premier est

celui de l’eau, qui est la ressource essentielle devant aujourd’hui être traitée par tout projet

d’aménagement. Les eaux de pluie doivent donc être traitées sur le site. Après avoir visité le parc

commercial, nous pouvons en déduire que le réseau d’eaux pluviales aurait pu être plus organisé et

plus efficace. D’une part, le stationnement qui représente la majeure partie de la surface aménagée

ne prend pas en compte ou très peu ce phénomène : les aires de parking ont été entièrement

imperméabilisées ce qui laisse place au ruissellement de l’eau, traité ensuite par des petits bassins

Figures 19 : Le contraste architectural et paysager au sein du parc commercial Be Green (Source : Maxime Dubois, 20 mars 2014)

19 20

Page 60: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 60

d’infiltration. Le système de stationnement perméable aurait pu renforcer le caractère durable du parc

commercial. D’autre part, la toiture végétale recouvrant l’intégralité du retail park parait symbolique

(cf Figures 20) : elle joue son rôle de surface infiltrante pour l’eau mais aurait mérité d’être plus

esthétique, toujours dans l’optique que Be Green soit fidèle à son nom. Là encore, la dénomination

évoque la volonté du promoteur et du Grand Troyes de réaliser une zone commerciale « écologique »

avec de nombreux espaces verts. Nous constatons en effet la part importante allouée au végétal, que

ce soit des arbres longeant les voies d’accès ou encore les haies et pelouses ajoutant de la verdure aux

aires de stationnement. Mais le résultat au niveau environnemental reste mitigé puisque le traitement

des eaux pluviales aurait pu être plus abouti. De plus, l’existence d’une biodiversité est difficilement

quantifiable. En effet, la présence de divers végétaux ne signifie en rien qu’il y ait une faune qui vive

au sein du parc commercial : aucune zone naturelle n’est recensée ni même réglementée à sa

proximité immédiate. Malgré tout, il est quand même préférable d’avoir insérer du végétal plutôt

qu’avoir artificialisé intégralement les sols. Au niveau de la qualité environnementale des bâtiments,

ces derniers ont été érigés dans le respect de la RT 2012 puisque construits à partir de 2013. Nous

sommes donc en présence de bâtiments qui ont une consommation d’énergie primaire au maximum

de 50 kWhEP/(m².an).

Figures 20 : Une prise en compte inaboutie des eaux pluviales (Sources : Maxime Dubois, 20 mars 2014 ; ecovegetal.fr)

21 22

16

Page 61: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 61

Enfin, au niveau socio-économique, le parc Be Green est considéré comme un moteur

économique pour l’agglomération puisqu’il a permis la création de plus de 450 emplois. Ceci n’est pas

négligeable puisque l’aire urbaine de Troyes connait un taux de chômage conséquent de 13,2% en

201018. Malgré tout, ce projet n’en reste pas moins un projet de zone commerciale puisque la mixité

des fonctions et des activités est peu identifiable. Comme toutes les zones d’activités commerciales,

nous pouvons noter la présence de restaurants qui ne font que diversifier l’activité commerciale. Les

espaces de détente et de loisirs viennent ajouter un plus à l’offre de commerces mais sont tout de

même reléguer au second plan : les espaces de loisirs ne sont pas utilisés par des personnes autres que

celles qui viennent faire du shopping. Pour finir, la démarche HQE insiste sur la promotion des filières

économiques locales. A ce propos, nous remarquons que seules des enseignes nationales sont

implantées dans le parc Be Green. Nous retrouvons donc la standardisation commerciale que

connaissent toutes les entrées de villes françaises. Il est d’ailleurs intéressant de rajouter qu’une partie

des enseignes du parc commercial sont également implantées en centre-ville voire dans d’autres zones

commerciales de l’agglomération (ex : Jennifer, Maisons du Monde) ce qui traduit leur volonté

d’achalander une grande partie du territoire et donc d’étouffer le petit commerce traditionnel

principalement situé en centre-ville moins accessible. Néanmoins, le projet a fait appel à des matériaux

et compétences disponibles localement : pour preuve, l’entreprise Petitjean basée à Saint-André-les-

Vergers dans l’agglomération troyenne a été choisie pour la conception de l’éclairage public du site.

L’exemple du parc d’activités commerciales Be Green montre bien les failles de la labellisation

HQE™-Aménagement mais aussi de la labellisation des projets d’aménagement en général. Pour qu’un

projet soit durable, l’instauration d’une grille d’évaluation et d’une démarche opérationnelle ne suffit

pas. Sans être trop rentré dans les détails, nous avons pu mettre en lumière quelques points qui

auraient pu être améliorés. Si l’on compare le concept de retail park avec les anciennes zones

commerciales, seule l’intégration du projet sur le site semble être plus travaillée. Des

dysfonctionnements vis-à-vis de l’intégration sur un territoire plus vaste (bassin de vie) perdurent

comme l’a montré la desserte en transport en commun. Cela montre toute la difficulté de définir un

projet d’aménagement durable d’autant plus quand il s’agit d’une zone commerciale. Les différents

acteurs interagissant au cours de la conception du projet n’ont pas les mêmes intérêts ce qui peut

entrainer des manques à l’arrivée.

18 D’après INSEE, RP2010 exploitations principales

Page 62: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 62

2.2 L’interaction des différents acteurs de l’urbanisme commercial : entre intérêts économiques

et développement durable

2.2.1 Des aménageurs sans cesse en quête d’originalité pour concevoir des espaces

commerciaux attractifs

Qu’ils dépendent d’une enseigne de grande distribution (ex : Immochan pour le groupe

Auchan) ou qu’ils soient indépendants, les aménageurs de zones commerciales doivent se démarquer

de la concurrence dans la conception de ces ensembles. La tendance étant depuis quelques années à

faire des zones commerciales des « espaces à vivre », chaque promoteur se lance dans la réalisation

de retail park où l’environnement au sens de la préservation des écosystèmes, de la biodiversité et de

la gestion des eaux est l’élément déterminant. Chacun conçoit des espaces commerciaux où la nature

se veut être omniprésente afin de minimiser l’effet d’urbanisation induit par le projet. Comme nous

avons pu le constater précédemment avec le centre Be Green à Saint-Parres-aux-Tertres, le végétal est

très présent qu’ils soient sous forme de pelouses, d’arbres ou encore de toitures végétalisées. Ces

exigences que les entreprises de conception de projets commerciaux veulent respecter sont le moyen

pour eux d’afficher leur prise en compte des problématiques environnementales. Cela passe

également par l’obtention de label tel que le label HQE™ Aménagement qui est pour les constructeurs

un gage de qualité de leur projet.

Les aménageurs vont même jusqu’à créer leur propre label de zones commerciales pour

pousser encore plus loin leur engagement dans le respect des principes du développement durable,

l’environnement toujours en tête. Family Village® et autre Green Center® sont autant de marque

déposée de zone commerciale « écologique » où la surconsommation de fonciers agricoles ou

naturelles semble être du passé.

Pourtant, nous constatons qu’en prônant une bonne gestion de l’eau et de la biodiversité et

un choix de matériaux de construction naturels (bois), les aménageurs souhaitent occulter les

dysfonctionnements de la zone commerciale qui n’ont cessé d’être présents depuis son apparition. Ce

sont par exemple la situation géographique toujours plus éloignée des centralités urbaines, et

renforçant la vocation commerciale des entrées de ville, la consommation d’espaces agricoles alors

que les circuits courts de production sont aujourd’hui privilégiés ou encore une inscription dans le

paysage qui n’est pas toujours réussie. De plus, les principes du développement durable ne sont pas

visibles de la même manière. En effet, le pilier environnemental est le plus présent dans les nouveaux

projets de zone commerciale. C’est aussi celui qui est le plus facilement visible lors d’un relevé de

Page 63: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 63

terrain puisque tout un ensemble d’aménagements a été conçu pour le faire ressortir. Le principe

économique et le principe social sont beaucoup moins marqués d’autant plus qu’ils ne sont pas

essentiellement représentés par des éléments visuels. Hormis la création d’emplois induite par le

projet, le pilier économique peut se présenter sous une forme immatérielle telle que des économies

d’échelle réalisées sur le financement de la zone commerciale. Pour le pilier social, le fait de mettre

l’accent sur la constitution de lieu de vie sous-entend forcément des relations sociales au sein des

zones commerciales. Des espaces publics beaucoup plus présents qu’auparavant montrent l’effort fait

par les aménageurs dans la conception des zones commerciales mais nous sommes encore très loin

des relations sociales pouvant apparaitre dans des rues commerciales piétonnes de centre-ville. La

voiture reste encore le moyen de déplacement le plus rapide pour rejoindre ces espaces périphériques.

La mixité des fonctions qui renforcerait le caractère social de la zone commerciale n’est pas assez

affirmée : la conjugaison de logements ou de bureaux avec l’offre commerciale pourrait être un moyen

de favoriser l’intégration des zones commerciales avec le reste de la ville, et notamment du point de

vue social. Ce sont aux collectivités entre autre de réfléchir sur ce point tout en préservant leurs

intérêts dans la réalisation d’un tel projet.

2.2.2 Le rôle accru de l’intercommunalité au sein des territoires en termes d’urbanisme

commercial et d’urbanisme en général

Depuis l’apparition des premières zones commerciales à aujourd’hui, l’action des collectivités

locales en matière d’urbanisme commercial a considérablement évolué. D’une gestion essentiellement

municipale tirant profit des opportunités de développement commercial, nous sommes passés à une

action publique plus intégrée et transversale, définies aux échelles supracommunales (celle de

l’intercommunalité ou du SCOT). En effet, l’époque où une commune périurbaine voulait engranger

des recettes en transformant des terrains naturels ou agricoles en surface commerciale par le biais de

la taxe professionnelle est révolue. Le changement d’échelle pour mieux appréhender l’urbanisme

commercial est pertinent puisqu’une zone commerciale possède une aire de chalandise dépassant

largement le territoire communal, d’autant plus quand un hypermarché y est implanté. L’élaboration

du SCOT ainsi que son suivi réalisés par une structure publique intercommunale doit permettre de

mieux appréhender ces espaces commerciaux périphériques pour qu’ils soient mieux intégrés au reste

du territoire et notamment au centre urbain.

La commune ne dispose plus que d’une marge de manœuvre réduite dans les choix et décisions

à prendre en ce qui concerne le développement commercial. La compatibilité du PLU avec le SCOT et

Page 64: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 64

le DAC laisse peu de possibilité à la commune et à son maire de faire passer sa politique d’urbanisme

commercial. La création de nouvelle zone commerciale ne peut plus être que de l’initiative de la

commune, il faut qu’elle soit portée par la communauté de communes, d’agglomération ou urbaine.

Cela peut nous laisser penser que leur développement va considérablement se ralentir dans le futur

puisque l’objectif principal fixé notamment par le DAC est que les ZACOM recensées sont les seules

zones où l’activité commerciale de grande surface peut s’implanter.

Le développement économique est également envisagé à l’échelle de l’agglomération, du

bassin de vie. Il fait d’ailleurs partie des compétences obligatoires des communautés de communes,

d’agglomération et urbaine. Les emplois induits par la création d’une zone commerciale peuvent donc

être un facteur déterminant pour l’intercommunalité. Il faudra que ses choix et notamment son

implantation soient motivés dans le SCOT et le DAC. La collectivité devra également négocier avec

l’enseigne ou l’aménageur qui désire s’implanter sur l’agglomération. L’arrivée d’une enseigne

nationale tel qu’un hypermarché peut engendrer une attractivité pour le territoire tant du point de

vue économique pour les emplois et la fiscalité créées que du point de vue commercial. Malgré tout,

les pouvoirs publics ne doivent pas céder face à toutes les exigences de la grande distribution, qui

souhaite s’implanter sur le territoire de la manière la plus rentable possible, au détriment souvent du

respect des paysages ou de l’environnement. Pour cela, l’Etat à travers la CDAC vient encadrer le

développement commercial afin que les projets soient cohérents vis-à-vis du territoire et qu’ils soient

intégrés.

2.2.3 Le contrôle étatique via les CDAC/CNAC dans la délivrance des autorisations

commerciales : vers une meilleure prise en compte des réalités territoriales

En 2008, la LME (Loi de Modernisation de l’Economie) du 4 août vient réformer en profondeur

l’urbanisme commercial et correspond à la transposition de la directive européenne « Services ». Cette

dernière a été instituée pour harmoniser les instances délivrant les autorisations. Les CDEC/CNEC sont

dès lors remplacées par les CDAC/CNAC, avec entre autres la disparition des représentants du

commerce et de l’artisanat, « qui étaient à la fois juge et partie puisqu’ils étaient élus par les acteurs

économiques déjà installés » (Monnet, 2008). La CDAC est composée de 8 membres dont 5 membres

sont des élus locaux : aux trois élus de la CDEC réformée par la loi Raffarin s’ajoutent le président de

l’EPCI du SCOT et le président du Conseil général. Les représentants du commerce et de l’artisanat sont

remplacés par des personnalités qualifiées dans les domaines de la consommation, du développement

durable et de l’aménagement du territoire : cela montre que le principe de concurrence n’est plus du

Page 65: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 65

tout le facteur prépondérant, l’aménagement du territoire et l’urbanisme ont pris une place

importante dans les critères de décision de la commission. D’ailleurs, à la vue de ces domaines,

l’évaluation du projet porte sur les critères suivants :

- En termes d’aménagement du territoire, l’effet du projet sur l’animation de la vie urbaine,

rurale et de montagne, l’effet sur les flux de transport et les effets découlant des

procédures d’OPAH et de ZAC ;

- En termes de développement durable, la qualité environnementale du projet et son

insertion dans les réseaux de transports collectifs ;

La CDAC apprécie également les effets du projet sur l’accessibilité de l’offre commerciale, la gestion

de l’espace ou encore les paysages et les écosystèmes. Ces critères restent flous mais témoignent tout

de même de la volonté du législateur de rendre les projets de moyennes et grandes surfaces plus

cohérents avec leur environnement immédiat comme avec leur environnement plus large.

En ce qui concerne les surfaces commerciales soumis à autorisation, le seuil est relevé à 1 000

m² de surface de vente, et les communes de moins de 20 000 habitants gardent la possibilité de saisir

la CDAC pour les projets de plus de 300 m².

Cette réforme marque une réelle volonté de placer l’intercommunalité au premier plan au sein

des commissions et de prendre plus en compte le territoire où s’installe tout projet commercial de

grande surface. En témoigne également le remplacement des personnes représentant le commerce et

l’artisanat par des acteurs de l’aménagement du territoire qui permettent de donner une autre vision

de l’impact du commerce qui est loin de n’être qu’économique.

Pourtant, malgré une évolution des CDAC qui paraissait positive en contextualisant chaque

demande de projet, la surproduction commerciale est bien réelle : la création de surface de vente

progresse plus vite que la consommation. La surface de vente n’a cessé de croitre entre 2007 et 2009 :

en 2007, 3,5 millions de m² ont été autorisés par les CDAC et plus de 4 millions de m² ont été autorisés

en 2009 (PROCOS, 2010). Diverses possibilités sont envisageables afin que les surfaces commerciales

n’augmentent pas en lien notamment avec la lutte contre l’artificialisation des sols et la reconstruction

de la ville sur elle-même. Les espaces commerciaux périphériques ne doivent également pas être

dispersés sur le territoire.

Page 66: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 66

Partie III – L’avenir des zones d’activités commerciales

Le devenir des pôles commerciaux de périphérie parait difficile à prédire tellement les

habitudes de consommation ont évolué ces 40 dernières années. Malgré tout, les zones commerciales

très souvent implantées en des points stratégiques du territoire, ont un important potentiel afin que

celles-ci se réinventent mais surtout qu’elles soient mieux intégrées à la ville dont elles dépendent. La

mixité des fonctions de ces espaces pourrait être la clé de l’intégration urbaine.

La réglementation devrait aller dans le sens d’une meilleure prise en compte du commerce

dans la ville et surtout une gouvernance de l’urbanisme à une échelle plus pertinente que celle de la

commune. La loi ALUR va permettre dans ce cas de renforcer le rôle des communautés de communes

et d’agglomération. Une réforme de l’urbanisme commercial est également souhaitable pour

davantage de cohérence territoriale des projets commerciaux. L’idée d’inclure cette branche au droit

de l’urbanisme pourrait être une solution au décalage qui survient souvent entre les dimensions

économique et urbaine des projets d’implantation.

Enfin, nous nous demanderons si les zones commerciales ne peuvent pas tout simplement

perdurer. Actuellement créées sous forme de retail park, elles continuent d’attirer des consommateurs

aussi bien issus des centres-villes, que du périurbain et du rural. Les éléments qui en ont fait leur succès

à leur apparition dans les années 60 (prix, choix, accessibilité), sont toujours présents aujourd’hui, et

ce malgré le développement par les enseignes de distribution de point de vente en centre-ville

(Carrefour City par exemple).

1. Pour une règlementation des grandes surfaces commerciales dans la continuité des précédentes

mais plus territorialisée

Les zones commerciales « nouvelle génération » montrent un certain effort pour respecter le

site où elles s’insèrent. Le respect des principes du développement durable va également dans le sens

d’une meilleure intégration des espaces commerciaux périphériques même si nous avons pu voir que

des progrès pouvaient encore être faits en la matière. La réglementation de l’urbanisme et du

commerce est venue également prendre en compte ses principes s’inscrivant dans une perspective

plus globale à l’échelle mondiale. Nous allons donc voir si les textes nouvellement ou prochainement

Page 67: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 67

mis en vigueur vont approfondir ces aspects pour davantage connecter les zones d’activités

commerciales avec le territoire dont elles font partie.

1.1 L’intercommunalité comme échelle pertinente pour la prise de décision concernant

l’organisation de l’implantation commerciale

1.1.1 La pertinence de l’élaboration des documents d’urbanisme par

l’intercommunalité appuyée par la loi ALUR

La loi ALUR du 24 mars 2014 vient marquer le pas pour la commune, qui au fil des décennies,

perd petit à petit du poids au sein de la gouvernance des territoires et notamment pour la compétence

urbanisme. Il est vrai qu’avec 36 681 communes françaises dont seulement 947 comptant plus de

10 000 habitants, le développement des territoires peut paraitre freiner, surtout pour des projets

commerciaux où la commune d’implantation ne peut être la seule entité à prendre les décisions.

Cette loi très axée sur le logement, impacte toutefois le commerce ainsi que la réglementation

dont il doit tenir compte. En effet, le terme « urbanisme rénové » présent dans le nom de la loi

confirme bel et bien la volonté de l’Etat d’insister sur le renouvellement urbain, qui passe par la

densification. En premier lieu, le SCOT est renforcé et son rôle de document intégrateur de l’ensemble

des schémas et des normes locales (PDU, PLH entre autres) est plus que jamais confirmé. Au niveau

foncier, le SCOT devra comporter une analyse des capacités de densification ce qui à première vue va

faire émerger directement des pôles où l’urbanisation devra être privilégiée. Mais il est encore trop

tôt pour savoir quel impact ce recensement de foncier aura.

Concernant le PLU, qui représentait encore pour la commune un pouvoir décisionnaire

important pour faire passer la politique de la municipalité en place, la compétence est transférée

progressivement à l’EPCI (Etablissement Public de Coopération Intercommunale) dont dépend la

commune, à savoir soit une communauté de communes ou une communauté d’agglomération. A

l’avenir, le PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal) sera le document d’urbanisme le plus locale.

Ce volet de la loi a d’ailleurs connu plusieurs rebondissements puisqu’au départ il devait être

obligatoire sans opposition possible. Finalement, un compromis a été trouvé afin que les maires ruraux

disposent encore d’un droit de regard sur la compétence : le transfert de la compétence PLU à

l’intercommunalité est effectif sauf opposition de 25% des communes représentant 20% de la

Page 68: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 68

population. Nous pouvons tout de suite en déduire que le PLUI sera plus facilement transféré aux

communautés d’agglomération composées d’une ville-centre peuplée qu’aux communautés de

communes où le nombre de petites communes est très important.

Ce document qu’il soit élaboré à l’échelon communal ou intercommunal, devra au même titre

que le SCOT poursuivre la lutte contre l’artificialisation des sols. Le PADD comportera désormais une

analyse de la consommation d’espace ainsi qu’un objectif chiffré de limitation de celle-ci. Les

possibilités de densification seront également analysées. Enfin, les réserves foncières identifiées

« 2AU » c’est-à-dire les zones à urbaniser à long terme seront considérées comme zones naturelles ou

agricoles si aucun projet d’aménagement ou aucune acquisition foncière n’ont eu lieu au bout de

douze ans. Le PLU devient dont de plus en plus restrictif et les projets d’aménagement vont surement

devoir faire l’objet de motivation de la part de l’organe délibérante.

L’urbanisme commercial est également concerné par la loi ALUR mais il s’agit seulement de

quelques modifications toujours dans l’optique de lutte contre l’artificialisation des sols. D’après

l’article L111-1-6 du Code de l’Urbanisme, la surface dédiée au stationnement des commerces

nonobstant les règles du PLU ne devra dépasser l’équivalence des ¾ de la surface de plancher des

bâtiments affectés au commerce. Avant cette mesure, le plafond était de 1,5 fois la surface de plancher

du bâtiment, ce qui montre une réelle volonté de diminuer les aires de parking qui ont toujours été

démesurées. De plus, les drive viennent compléter la liste des commerces soumis à l’avis de la CDAC.

Apparaissant dans de nombreuses zones commerciales, ce sont actuellement par ce biais que les

grands groupes de distribution se livrent une concurrence acharnée. Enfin, le SCOT connait des

précisions pour le DOO (Document d’Orientations et d’Objectifs) qui recense les zones où

l’implantation des commerces doit être privilégiée (ZACOM). D’après l’article L122-1-9 du Code de

l’Urbanisme, les conditions d’implantation doivent privilégiées la consommation économe de l’espace

que ce soit par un bâti plus compact ou encore une optimisation des surfaces de stationnement.

L’accessibilité via les modes doux et les transports en commun doivent être préférées au « tout-

voiture » ainsi que la qualité environnementale, architecturale et paysagère. Nous retrouvons donc les

critères sur lesquels se basent les projets d’EcoQuartier et HQE™-Aménagement, ce qui devrait

encourager la conception de retail park.

Nous pouvons nous interroger sur le fait que l’urbanisme commercial soit considérer tantôt

dans des mesures liées au droit de l’Urbanisme ou tantôt dans des mesures relevant du droit du

Commerce. N’est-il pas aujourd’hui et à l’avenir pertinent d’inclure définitivement l’urbanisme

commercial à l’urbanisme ?

Page 69: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 69

1.1.2 La réforme de l’urbanisme commercial : vers l’intégration au droit de l’urbanisme ou

seulement une énième évolution des CDAC/CNAC ?

Ce questionnement se retrouve lors de tentative de réforme de l’urbanisme commercial. Et

cela induit une seconde interrogation : faut-il réglementer le commerce seulement en termes

d’aménagement du territoire ou faut-il encore que des règles économiques et concurrentielles

viennent le légiférer ?

Le projet de loi Pinel relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (TPE)

adopté le 18 février 2014 vient réformer à l’instar de la loi ALUR l’urbanisme commercial. Tout d’abord,

les procédures d’autorisations d’implantation commerciale se veulent être simplifiées notamment en

fusionnant le permis de construire avec l’autorisation commerciale. Cette mesure est censée accélérée

la procédure mais d’une façon générale il renforce l’idée selon laquelle le commerce est de plus en

plus influencé par l’urbanisme. La CDAC est également réformée, sa composition passant de 8

membres à 12 : les collectivités seront donc plus représentées lors d’instruction de projet les

concernant mais l’ajout de représentants du département pose question. En effet, ceux-ci n’ont

aucune compétence sur le sujet. La CNAC de son côté pourra s’autosaisir des projets supérieurs à

20 000 m² : cela représente un progrès quand nous savons qu’ « en 2012, celle-ci a refusé 50% des

projets supérieurs à 30 000 m² qui lui étaient soumis, tandis que les CDAC les ont tous validé sauf un ».

Ce projet de loi semble rempli de différentes mesures qui n’ont pas de réelle cohérence. La volonté de

de créer un lien juridique entre autorisation commerciale et permis de construire montre une avancée

importante mais le remaniement des commissions n’a aucun intérêt d’autant plus que la diminution

des membres des CDAC qui a été effectuée au fil des différentes réformes laisse place à un ajout de

quatre membres. Cela ne devrait qu’augmenter les conflits d’intérêt qui restent encore très fréquents.

Cette réforme est clairement synonyme d’hésitation de la part du législateur. A vouloir peut-

être trop inclure la réglementation de l’implantation commerciale dans le droit de l’urbanisme, cela

peut laisser entrevoir la déterritorialisation du commerce à l’exemple d’Internet. Il est clairement

difficile de trouver des compromis sur la réglementation des zones commerciales, qui ne sont à

l’origine que des outils économiques pour les enseignes et les promoteurs mais également pour les

collectivités car synonymes d’emplois, de fiscalité, de dynamisme économique pour le territoire en

général. Il est vrai que les commissions d’aménagement sont nécessaires mais l’échelle d’intervention

peut poser question même si elle renvoie également à la problématique du découpage administratif

français. Le contrôle étatique est plus que nécessaire pour qu’il n’y ait pas d’abus sur certains

territoires et les collectivités locales doivent laisser davantage de place à l’intercommunalité. Pour ce

Page 70: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 70

qui est de la représentativité des professionnels, il nous semble que des urbanistes et paysagistes

apportent un atout sérieux quant à la prise de décision mais ceux-ci doivent être extérieurs au

territoire, pour éviter tout clientélisme. Les professionnels du commerce et de la concurrence doivent

également siéger tels que des experts de la consommation et de l’urbanisme commercial (ex :

membres de cabinet d’études) afin d’éviter la représentation des Chambres de Commerce qui sont

élues par des chefs d’entreprise et qui peuvent avoir intérêt dans la consultation de projets.

A l’avenir, il nous parait délicat d’orienter l’implantation commerciale seulement vers le Droit

de l’Urbanisme. Des réformes façon « puzzle » risquent encore de voir le jour c’est-à-dire tantôt

instituées par l’urbanisme et tantôt par le commerce. De plus, la décentralisation inaboutie symbolisée

par la CNAC, devrait plutôt laisser place à une échelle intermédiaire à celle de la CDAC pour les gros

projets de zones commerciales ayant un rayonnement régional, toujours dans l’idée d’une intégration

territoriale plus pertinente.

1.2 La région comme échelle adéquate pour la délivrance d’autorisation concernant les projets

commerciaux d’envergure ?

1.2.1 L’échec du projet de loi Ollier-Piron : vers une autorisation délivrée au niveau régional

Le projet de loi relative à l’urbanisme commercial porté par Patrick Ollier et Michel Piron en

2010 venait intégrer l’urbanisme commercial dans le droit de l’urbanisme général. De ce fait, les CDAC

étaient supprimées afin que les projets cessent d’être autorisés au coup par coup. A la place, les

documents d’urbanisme voyaient leur rôle renforcé en couvrant la question commerciale, en rendant

obligatoire le DAC dans les SCOT. Le PLUI doit prendre en compte ces dispositions en l’absence de

SCOT. L’intercommunalité est donc l’échelle privilégiée pour la compétence en urbanisme commercial.

En l’absence de document d’urbanisme, une commission au niveau régional est mise en place, la CRAC

(Commission Régionale d’Aménagement Commercial) qui examine au coup par coup les projets de

plus de 300 m² de SHON des communes concernées. Ce remaniement d’échelle parait pertinent

puisque la région est compétente dans le domaine du développement économique en matière de

planification, de programmation des équipements et d’aménagement du territoire.

Cette proposition n’étant pas allée au bout, elle a tout de même inspirée la loi ALUR

notamment en ce qui concerne la problématique commerciale dans les documents d’urbanisme. Mais

Page 71: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 71

les élus locaux pouvaient être réticents vis-à-vis de la CRAC puisque le président du conseil régional et

le président du conseil général représentait dans la commission deux élus sur cinq.

Mais cette volonté de créer une commission au niveau régional peut être utilisée dans un autre

moyen : pour les projets commerciaux d’envergure tels que des centres commerciaux régionaux. Ceux-

ci pourraient être déterminés en fonction de l’aire de chalandise et des surfaces commerciales qu’ils

engendreraient. Ainsi, la CNAC disparait au profit du transfert de compétence à la CRAC où le préfet

de région peut tout de même représenter l’Etat au sein de cette commission. L’aire de chalandise

n’étant pas fixée sur les limites administratives, les régions voisines à la région d’implantation qui

pourraient être englobées dans l’aire de chalandise du projet pourraient également être consultées.

Cette mesure permettrait aux collectivités de mieux prendre en compte certains projets tels que ceux

de la firme Ikea, qui sont à chaque fois colossaux et génèrent des impacts dépassant très largement

les compétences des communautés d’agglomération concernées. En effet, « les sites d’Ikea ne

reflètent pas les contours classiques de la hiérarchisation établie des territoires » (Gaudin & Musereau,

2009).

1.2.2 De grandes enseignes commerciales à l’impact régional : l’exemple de l’implantation

d’Ikea à Clermont-Ferrand

L’arrivée sur un territoire d’une firme multinationale induit de nombreux impacts

économiques, sociales mais également en termes d’aménagement du territoire. La fameuse enseigne

de meubles en kit Ikea fait partie de ces firmes qui sont voulus par les acteurs locaux car synonymes

d’un rayonnement du territoire. L’implantation d’un magasin fait souvent l’objet de polémiques car

les collectivités locales favorisent très souvent son arrivée. Bénéficiant de passe-droit, Ikea a très

souvent peu de problèmes pour s’installer où elle le désire. D’ailleurs, certains Etats sont même allés

jusqu’à modifier certaines règles d’urbanisme. Par exemple, en 2004 en Irlande, la loi restreignait à

6 000 m² la superficie maximum des magasins de grande distribution. Ikea désireuse de s’implanter à

Dublin, le Ministre de l’Environnement de l’époque décide alors de modifier la loi à l’avantage de

l’enseigne suédoise après que la firme ait refusé pendant plusieurs mois de revoir ses plans, et ce

malgré que les plus petites structures commerciales s’y soient opposées. La firme arrive toujours à

mettre en application sa stratégie afin de capter le plus de clients possibles. « En 2005, à peine 50% de

la population française était à moins d’une heure d’un magasin Ikea, aujourd’hui c’est 60% » (Gaudin

& Musereau, 2010). L’objectif à terme est d’atteindre les 80%.

Page 72: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 72

L’implantation d’un Ikea à Clermont-Ferrand témoigne de la volonté de l’enseigne de combler

le manque de représentation au centre de la France. Le plus près actuellement étant à Saint-Etienne

c’est-à-dire à 2h de route de la capitale auvergnate, parait proche. Mais la situation de carrefour

autoroutier de la ville, avec le passage de l’A71, l’A75 et l’A89 (cf Figure 21) permet de rapprocher les

régions Limousin, Languedoc-Roussillon et Centre et donc des acheteurs potentiels n’ayant pas

d’autres Ikea à proximité. La zone de chalandise représenterait environ 800 000 habitants à 1h de route

et le double à 1h30. Cette implantation exprime également la volonté des élus de la communauté

d’agglomération du Grand Clermont d’attirer de grandes enseignes multinationales afin de renforcer

l’attractivité du territoire (ex : création d’emplois). Le site d’implantation est la zone d’activités des

Gravanches localisée le long de l’autoroute A71. D’une surface de 33 000 m², ce magasin sera l’un des

plus grands de France, avec 5 000 m² de plus que celui de Saint-Etienne. Afin d’accueillir les visiteurs,

1 300 places de parkings vont être créées mais ce n’est pas tout. Toute une série d’aménagement du

réseau routier à proximité du site est en cours de réalisation : des ronds-points ont été réalisés sur

Figure 21 : Une localisation privilégiée au carrefour de trois axes autoroutiers (source : Géoportail)

Page 73: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 73

mesure afin de pouvoir supporter le trafic automobile induit ainsi qu’une bretelle d’autoroute afin de

desservir le site. Preuve de la volonté d’implantation de la firme, elle finance pour 1/3 les

aménagements.

Malgré tout, l’implantation des magasins Ikea est toujours conçue sur le même modèle. De

vastes « boites à chaussures » de plusieurs milliers de m² aux couleurs de la firme (bleu et jaune), le

stationnement dispose de surfaces dédiées très importantes et imperméables. Ikea recherche la

rentabilité maximum en déboursant seulement le nécessaire et elle réussit à chaque fois à imposer

son modèle (cf Figure 22). Tous les magasins Ikea sont conçus sur le même plan et ce quel que soit la

région du globe où ils se trouvent. Quand certains promoteurs essaient de réaliser des zones

commerciales à l’architecture innovante, aux espaces verts abondants, Ikea reste sur le modèle des

années 60-70 où l’automobile était le facteur prépondérant. Le modèle est d’ailleurs toujours fondé

sur le tout automobile, puisque la firme cherche encore et toujours à capter une clientèle éloignée à

1h ou plus de ses magasins. Leur intégration se fait à grande échelle et non à l’échelle urbaine.

L’exemple d’Ikea nous montre bien que le commerce sous la forme de grandes surfaces va

probablement continuer à être à deux vitesses. Le devenir des zones commerciales afin qu’elles soient

intégrées à la ville passera par différentes possibilités en phase avec les orientations urbanistiques

actuelles.

Figure 22 : Le magasin Ikea de Bordeaux, symbole d’une conception standardisée (Source : Ikea France)

Page 74: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 74

2. De futures tendances contradictoires sur le devenir des zones d’activités commerciales

Le devenir des zones commerciales va essentiellement être déterminé par les futures

pratiques commerciales des consommateurs et notamment du développement de l’e-commerce qui

jouera un rôle très important dans l’offre commerciale des territoires. Selon Pascal Madry, 20% du

chiffre d’affaires du commerce spécialisé serait généré par le commerce en ligne d’ici 2020. Par

conséquent, 15 millions de m² de commerces physiques deviendraient inutiles et risqueraient d’être

transformés en friches commerciales. Cela laisserait entrevoir de nouveaux espaces de projets pour

les collectivités en lien avec le renouvellement urbain. Mais la création de nouveaux espaces

commerciaux en périphérie des villes n’est-elle pour autant vouée à disparaitre ?

2.1 La reconstruction des zones commerciales sur elles-mêmes, en phase avec le modèle urbain

actuel et futur

2.1.1 Le recyclage des friches commerciales : de la zone commerciale au quartier

multifonctionnel

La question des friches commerciales devrait donc se poser de plus en plus dans les années à

venir. Aux Etats-Unis, le phénomène a été beaucoup plus précoce qu’en France, de nombreux dead

malls (« centres commerciaux morts » en français) fleurissant en périphérie des villes. Ces espaces

abandonnés par leur fonction principale ne seront pour autant un fardeau pour les collectivités, leur

grande étendue géographique, leur localisation avantageuse et l’existence des réseaux (aériens et

souterrains) étant un atout indéniable dans la reconversion des zones commerciales. Ayant souvent

été rattrapé par l’urbanisation des villes (cf Partie II), les friches seraient un moyen de retravailler la

morphologie urbaine ainsi que le paysage des entrées de ville dans l’optique d’une intégration urbaine

de qualité, élément qui ne pouvait être possible avec les zones commerciales dédiées au « tout »

automobile.

En application des orientations urbanistiques actuelles, l’implantation de quartiers durables

serait une réponse à la déconnexion de ces anciens espaces. Nous pouvons d’ailleurs définir un

quartier durable comme étant un quartier répondant aux exigences du développement durable afin

de retrouver des aspects économiques, sociales et environnementaux fonctionnant en synergie. Par

Page 75: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 75

exemple, il regrouperait à la fois des activités économiques telles que des commerces et des services,

des logements de différents types favorisant la mixité intergénérationnelle (petits collectifs, maisons

mitoyennes et individuelles) et des espaces verts qui diminueraient l’artificialisation des sols. La

démolition des « boites à chaussures », qui n’ont aucune qualité architecturale et paysagère,

permettrait de les remplacer par des bâtiments mieux intégrés à leur environnement et notamment

au tissu urbain existant.

Afin d’illustrer de façon claire ce à quoi une reconversion de friche commerciale peut

ressembler, prenons pour exemple la zone commerciale de Charmeil (cf Figure 23), en admettant

qu’elle soit désertée d’ici quelques années par les grandes enseignes spécialisées de bricolage,

d’ameublement et de jardinerie. Les locaux commerciaux de ces enseignes n’ont pas vocation à être

conservés et peuvent donc être démolis pour laisser place à des logements de divers types. D’une

surface totale de 2,9 ha, les terrains ainsi que les locaux commerciaux offrent un potentiel de

logements intéressant. En reprenant les orientations urbanistiques de la loi SRU notamment, les

opérations immobilières doivent favoriser la mixité de l’habitat en vue de créer une mixité

Grandes surfaces à reconvertir

Petites et moyennes surfaces à

conserver

Bourg-centre

Quartier résidentiels environnants

Voie de désenclavement créée

Figure 23 : Orientations sur le devenir des surfaces commerciales de la zone de Charmeil (Source : Maxime Dubois ; Google Earth, 2013)

Page 76: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 76

intergénérationnelle et de densifier l’habitat19 qui est principalement caractérisé par la maison

individuelle à Charmeil. De fait, 4 ensembles collectifs de 10 logements locatifs seront construits en

lieu et place de l’enseigne de bricolage. Les logements seront de tailles diverses afin de pouvoir attirer

à la fois de jeunes couples (T2) mais aussi des seniors (T2-T3) ou encore des étudiants (studios). Le

19 Cf Annexe 5 – La densité selon la typologie de logement d’après MOULINIE, Claire, NAUDIN-ADAM Muriel, « Appréhender la densité. 3. Formes urbaines et densités », Note rapide sur l’occupation du sol, n°384, IAURIF, Paris, Juin 2005

Figure 24 : Schéma d’aménagement de la reconversion de la zone commerciale (Source : Maxime Dubois ; Google Earth, 2013)

Maisons individuelles

Maisons mitoyennes

Petits collectifs (R+2)

Commerces

Page 77: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 77

stationnement sera souterrain afin de diminuer la place de l’automobile dans le quartier. Ensuite, 32

logements individuels denses et donc mitoyens composés d’un étage permettront de diversifier l’offre

afin d’attirer de jeunes couples primo-accédants. Un garage pour chaque logement permettra de ne

pas encombrer les espaces publics. Ces logements disposent également d’un jardin. Enfin, des maisons

individuelles viennent s’ajouter à l’offre de logement : 14 pavillons permettront de loger des couples

avec ou sans enfant qui souhaitent devenir propriétaires. Les parcelles oscillent entre 400 et 700 m² et

chaque logement dispose d’un garage toujours dans l’optique de réduire la place de l’automobile dans

les espaces publics. Au total, 76 logements seront construits et la dimension sociale du quartier est

bien identifiable avec la mixité de l’habitat, des cheminements piétons et une aire de jeux qui viendront

favoriser le lien social au sein du quartier. La voie de desserte principale de la zone commerciale est

conservée et des extensions sont créées afin de desservir chaque îlot de logement et ainsi de

désenclaver cette zone vis-à-vis de la commune.

La fonction commerciale est toujours présentes mais sous forme de commerces de proximité

(boulangerie, salon de coiffure, pharmacie, épicerie, …). Les petites et moyennes surfaces

commerciales apparues dans les années 2000 sont donc conservées. Le stationnement, omniprésent

sur la zone commerciale ne sera pas conservé dans son intégralité : seule l’aire de parking située à

proximité des commerces est maintenue afin qu’ils puissent profiter aux personnes extérieures au

quartier.

Enfin, l’aspect environnemental est illustré par le remplacement de la majorité des aires de

stationnement au profit d’espaces verts permettant l’infiltration des eaux de pluie et l’embellissement

du cadre de vie. Nous passons dès lors d’un espace urbain très minéral à un espace urbain végétal qui

malgré la densité de l’habitat permet de créer des ruptures.

Ainsi, cette reconversion fictive, qui ne prend bien sûr pas en compte les documents

d’urbanisme en vigueur ainsi que tout outil de planification urbaine, ni même les coûts induits mais

qui sert plutôt de prospective sur ce que pourrait devenir une friche commerciale, illustre parfaitement

la frontière qu’il y a entre un quartier c’est-à-dire un « morceau de ville » intégré au tissu urbain

existant et une simple zone où un espace est destiné à une fonction. Toujours dans un souci de

durabilité, l’habitat ne doit pas être l’unique fonction venant remplacer le commerce : c’est la

multifonctionnalité qui doit aujourd’hui être favorisée pour réduire la dépendance à l’automobile.

D’ailleurs, la desserte en transport en commun d’un quartier n’est privilégiée par les collectivités que

s’il y a une demande forte. Charmeil n’étant actuellement pas desservie par le réseau de bus urbain de

l’agglomération vichyssoise, un projet de quartier multifonctionnel pourrait être un moyen de relier la

commune au reste de l’agglomération.

Page 78: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 78

La zone commerciale pourrait également être affectée à une autre utilisation toujours en lien

avec la réduction de la place de l’automobile en ville en bénéficiant de sa position d’interface entre

milieu-urbain et milieu rural.

2.1.2 L’utilisation de la situation d’interface de ces espaces commerciaux entre centre

urbain et milieu périurbain/rural

Nous avons vu que bien souvent les zones commerciales périphériques étaient rattrapées par

l’urbanisation pavillonnaire des années 80-90 des communes périurbaines. Cela a induit l’extension

des réseaux de transport en commun toujours plus éloignés du centre-ville afin de desservir logements

et commerces. Les flux automobiles ont donc augmenté, et ne sont pas forcément tous captés par les

équipements commerciaux de périphérie. La localisation en entrée de ville les place à l’interface entre

le centre urbain où sont présentes la majorité des activités humaines et les zones périurbaines et

rurales caractérisées depuis quelques années par une hausse du nombre de logements sous forme de

maisons individuelles. Les déplacements pendulaires c’est-à-dire les déplacements domicile-travail qui

sont identifiés aux « heures de pointe » (horaires où le trafic routier est dense, huit heures le matin et

dix-sept heures le soir) ne cessent d’augmenter.

Aujourd’hui et dans les années à venir, les autorités s’efforceront de réduire la place de

l’automobile dans les centres-villes. Celle-ci prend de la place sur l’espace public et nécessite des aires

de stationnement de plus en plus grandes et cause bien souvent un dysfonctionnement des transports

en commun aux heures d’entrée et de sortie de travail par le biais de retard dû à la congestion du

trafic. Dans une moindre mesure, elle rejette des gaz à effet de serre qui polluent les villes.

En outre, les zones commerciales implantées tout autour des villes le long des principales voies

d’accès pourraient être utilisées comme des pôles secondaires, passages obligés pour les personnes

souhaitant regagner le centre-ville. Ces espaces joueraient le rôle de frontières entre le transport

automobile et les transports en commun. Disposant de stationnement sous-utilisé, les zones

commerciales permettraient aux automobilistes venant de communes périphériques de garer leur

voiture et de finir leur trajet via le bus, le tramway voire le métro pour les grandes agglomérations. Un

double enjeu pourrait ressortir de ce concept : d’un côté, les centres-villes voient leur cadre de vie

amélioré avec le recul de l’automobile au profit des transports en commun et des modes de

déplacement doux (cycles, piétons) ; de l’autre, les zones commerciales et notamment les

hypermarchés qui sont censées être en perte de vitesse à l’avenir bénéficient d’un potentiel de

Page 79: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 79

consommateurs qui partiraient travailler le matin en ville puis rentreraient le soir en passant faire ces

courses au préalable.

Nous pouvons en conclure que ce concept, qui pourrait s’adapter à de nombreuses

agglomérations françaises géographiquement parlant, serait un moyen durable d’intégrer les espaces

commerciaux périphériques au reste de la ville. Mais la mise en place d’une telle initiative implique

forcément une volonté politique clairement affichée d’élus voulant désengorger les centres-villes, qui

ne sera peut-être pas partagé par la population.

Pour autant, ce concept montre une fois de plus que les zones commerciales possèdent un

potentiel de reconversion très intéressant qui dans le futur va pouvoir laisser place à de nouvelles

formes urbaines. Le nombre d’acteurs limité ainsi que les moyens importants dont dispose la grande

distribution encourageront une mutation relativement rapide de ces espaces en lien avec les enjeux

contemporains. Mais la création ex nihilo de nouveaux projets commerciaux doit-elle encore être

tolérée à l’extérieur des villes ?

Actuellement A l’avenir

Figure 25 : Schéma du concept d’interface entre urbain et rural (Source : Maxime Dubois, Agence Odonata)

Habitat rural/périurbain Zone commerciale Centre urbain

Déplacement travail Plateforme de correspondance Déplacement commerces Transport mutualisé

Page 80: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 80

2.2 Des projets commerciaux à l’encontre des orientations urbanistiques récentes : l’exemple

d’Europa City

Le projet Europa City est un exemple qui montre bel et bien l’influence de la grande

distribution dans les projets de territoire. Porté par le groupe Auchan, via sa filiale immobilière

Immochan, ce vaste espace commercial sera localisé d’ici 2020 au sein du Triangle de Gonesse, une

zone d’aménagement de 280 ha située entre les aéroports du Bourget de de Roissy-Charles de Gaulle,

à 19 km au Nord-Est de Paris, sur des terres actuellement à vocation agricole (céréaliculture). Comme

nous allons le voir, ce projet pharaonique s’inscrit dans le projet du Grand Paris.

2.2.1 Un projet englobé au sein du Grand Paris : vers une intégration réussie ?

Le projet du Grand Paris, qui vise à terme à transformer l’agglomération parisienne en une

métropole de rang mondial, a vocation à « améliorer le cadre de vie des habitants, à corriger les

inégalités territoriales et à construire une ville durable » d’après le Ministère du Logement et de

l’Egalité des Territoires. Toute une série de projets d’aménagement vont être réalisés en synergie pour

arriver à ce résultat, et Europa City viendra se greffer au Grand Paris.

Europa City

Figure 26 : Localisation d’Europa City au sein du projet du Grand Paris Express (Source : Secrétariat d’Etat à la Région Capitale, 2009)

Page 81: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 81

Ce projet commercial cumule tous les superlatifs puisqu’il a été désigné comme le plus gros

projet structurant du Grand Paris et c’est également le projet d’investissement immobilier privé le plus

important de France (plus de 80 ha). Il se veut être un centre commercial combiné à de nombreux

loisirs : la dimension ludique et culturelle sera poussée à l’extrême par rapport aux zones commerciales

« nouvelle génération ». Au total, l’offre de surface commerciale représentera 230 000 m² qui sera

complétée par une offre de loisirs à l’effigie des grands centres commerciaux dubaïotes : une piste de

ski, un parc aquatique ou encore une piste de cirque. Ce projet illustre donc la volonté d’une enseigne

de la grande distribution à faire passer le commerce en second plan : Europa City n’est pas destiné à

recevoir des consommateurs mais des touristes. En témoigne les objectifs que se sont fixés les

dirigeants d’Auchan : accueillir 30 millions de visiteurs par an d’ici 2025 soit deux fois plus que

Disneyland.

En ce qui concerne l’implantation, pour l’entreprise Auchan, le choix du site est idéal (cf Figures

26 et 27) puisque localisé entre deux aéroports de Paris et à proximité d’un carrefour autoroutier très

fréquenté (A1-A3-A104). Son existence est également liée à la création de nouvelles lignes de transport

qui doivent renforcer la cohésion du territoire de l’agglomération parisienne : sa situation aux portes

de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle va être bénéfique puisqu’elle sera connectée au RER D et

aussi à la ligne de métro automatique appelé Grand Paris Express. Le projet Europa City a donc vocation

à attirer des personnes résidant aussi bien au sein de l’agglomération parisienne que de l’extérieur.

A1

A3

A104

Périmètre Europa City

Triangle de Gonesse

Autres zones commerciales

Aéroports de Paris

Autoroutes

Voies ferrées

Figure 27 : Vers une saturation des équipements commerciaux au sein du Triangle de Gonesse (Source : Maxime Dubois, Géoportail)

Page 82: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 82

Pour ce qui est de l’intégration architecturale, urbaine et paysagère, le projet retenu se veut en rupture

totale avec ce qui peut se faire actuellement (cf Figure 28). Les formes sont épurées et les concepteurs

souhaitent que l’urbanisation des terres agricoles n’altère en rien le paysage. La végétation sera

abondante et une continuité écologique traversera cet espace commercial toujours dans cette optique

de prendre en compte l’environnement.

Au vu de ces éléments, Europa City peut être considérer comme un projet de territoire

démesuré que ce soit par sa surface mais également les activités et services qu’il regroupera. Mais

peut-on qualifier ce projet de durable en sachant que c’est un des objectifs premiers du Grand Paris et

qu’il intègrera tous les critères que nous retrouvons dans des retail park « écologiques » (toitures

végétalisées, végétation abondante, …) ?

2.2.2 L’oubli des enjeux environnementaux au profit du dynamisme économique

Ce projet ne peut être qualifié de projet durable et ce pour différentes raisons. Tout d’abord,

il sera situé sur des parcelles actuellement cultivées et à très bon rendement. Ce sont également les

terres agricoles les plus proches de la capitale, ce qui favorise les circuits courts et la production

alimentaire locale (cf Figure 29). D’après l’association Les Amis de la Terre, qui revendique la lutte

contre l’urbanisation des terres agricoles du Triangle de Gonesse, 740 tonnes de blé par an seraient

perdus chaque année si le projet venait à voir le jour. Malgré la protection au Nord d’Europa City de

Figure 28 : Projection d’Europa City (Source : BIG architects)

Page 83: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 83

terres agricoles au sein d’un « Carré Vert », la pression foncière qu’entrainera l’apparition de ce projet

viendra probablement urbaniser cette zone. En effet, le projet n’a qu’un but économique car il va

permettre de dynamiser un territoire où le taux de chômage est élevé : d’après le recensement INSEE

de 2010, les communes membres de la communauté d’agglomération du Val-de-France ont un taux

de chômage compris entre 13,7% (Arnouville) et 22,7% (Sarcelles). Nous sommes donc face à un

territoire qui a besoin d’attirer des entreprises et des activités afin de remédier à cette problématique.

C’est dans cette perspective que les élus ont donné leur accord à Auchan puisque le projet va être un

véritable moteur de l’emploi pour l’Ile-de-France : la construction nécessitera plus de 12 000

embauches sur 4 ans, puis une fois l’ouverture d’Europa City, ce sont 11 500 emplois directs et 6 000

emplois indirects qui seront créés. 40% des emplois ne sont donc pas assurés sur du long terme.

Mais certaines zones commerciales situées aux abords du futur projet risquent de souffrir de

la concurrence et cela pourrait entrainer la fermeture de magasins, laissant place à l’apparition de

friches commerciales (cf Figure 27). En effet, pas moins de cinq pôles commerciaux de moyennes et

grandes surfaces sont situés dans un rayon de 10 km d’Europa City. Le problème ne serait donc que

déplacé, le projet créant des emplois tandis que de potentielles pertes d’emplois pourraient survenir

dans les zones commerciales voisines. De plus, aucune mesure n’a encore été faite pour que les

Figure 29 : Carte des types d’agriculture d’Ile-de-France (Source : IAU IdF)

Triangle de Gonesse

Page 84: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 84

emplois créés par Europa City soient destinés en priorité aux personnes touchées par le chômage sur

le territoire.

Ce projet est-il donc si nécessaire pour le territoire du Nord-Est Parisien mais également pour

l’Ile-de-France ? Malgré les dispositions récentes prises en urbanisme où il est prôné la protection des

terres agricoles afin d’enrayer l’étalement urbain et de favoriser le renouvellement de la ville, des

projets commerciaux tels que celui d’Europa City vont pouvoir continuer à voir le jour. Bien que cet

exemple semble exceptionnel, cela prouve que des projets d’envergure plus modestes peuvent

apparaitre dans les années à venir au nom de la création d’emploi et du dynamisme économique, et

en occultant les enjeux agricoles et naturels qui sont pourtant essentiels à l’avenir.

Taux de chômage

Gonesse 15,2%

Garges-les-Gonesse 20,9%

Sarcelles 22,7%

Villiers-le-Bel 17,5%

Arnouville 13,7%

Bonneuil-en-France 15,9%

Figures 30 : Taux de chômage en 2010 des communes membres de la Communauté

d’Agglomération du Val de France (Sources : INSEE RP 2010 exploitations principales ; agglo-

valdefrance.fr)

Page 85: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 85

Conclusion

Finalement, l’avenir des zones commerciales semble indécis malgré les signes annonciateurs

d’une augmentation de la surface commerciale. Mais cette forte croissance conduira inéluctablement

au développement des friches commerciales dans les années à venir, et ce malgré la diversification des

activités qui est de plus en plus prégnante. Malgré tout, la zone commerciale ne peut pas encore être

identifiée comme étant un quartier, sa dénomination renvoyant toujours à la compartimentation de

l’offre commerciale au sein d’un même espace. Une évolution semble avoir tourné la page des « boites

à chaussures » : la zone est remplacée par le parc d’activités ou retail park, symbole d’une volonté

d’intégration de cet espace au sein d’un territoire. Nous avons un réel changement du paysage des

entrées de ville avec ces nouvelles formes de locaux commerciaux, des matériaux jusqu’à l’esthétisme.

La part dédiée à l’espace public est visible et « vert ». Mais l’éloignement des zones d’activités

commerciales du pôle urbain et la desserte automobile encore omniprésente ne nous permettent pas

d’affirmer que ces zones sont intégrées à la ville dont elles dépendent. Il reste donc encore des

améliorations à apporter à ces espaces : une mixité des fonctions plus affirmée pourrait être une

solution afin que les zones commerciales puissent devenir des quartiers multifonctionnels où

logements et activités économiques cohabiteraient.

Le droit de l’urbanisme doit continuer à prendre en compte le commerce. Il est impossible de

dissocier cette entité ainsi que la ville qui ont toujours eu besoin l’une de l’autre pour perdurer. Des

avancées ont pu être observées depuis la création de l’urbanisme commercial dans les années 60-70 :

les phases successives de décentralisation de la compétence urbanisme ont aidé à mieux appréhender

l’équipement commercial des villes. Les documents d’urbanisme (SCOT et PLU) n’ont cessé d’encadrer

le développement des zones commerciales au vu notamment des orientations urbanistiques actuelles

telles que le renouvellement urbain. Le principal problème dans l’encadrement du commerce tient à

la coexistence de deux réglementations distinctes : le code du commerce et le code de l’urbanisme.

Les différentes réformes des CDAC en sont la preuve : leur composition a été perpétuellement

mouvante et les critères d’autorisation commerciale au départ plutôt économiques sont aujourd’hui

axés sur le développement durable. Mais la théorie est souvent très loin de la pratique puisque

l’économique et le financier sont encore les critères majeurs, qui permettent aux projets commerciaux

de continuer à naitre en périphérie des villes. Les distributeurs de la grande surface et les aménageurs

l’ont bien compris et se tournent aujourd’hui vers les territoires ruraux. De petites communes

éloignées des pôles urbains disposent d’une zone commerciale en entrée de ville, au détriment du

petit commerce de centre-ville qui arrivait encore à se maintenir. Au contraire des commerces

Page 86: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 86

traditionnels en centre urbain concurrencés par les enseignes franchisées, les commerces des

communes rurales attiraient une clientèle locale qui les dynamisait. La zone commerciale vient nuire

au petit commerce rural, au même titre que les commerces de centre-ville urbain.

Le transfert de la compétence urbanisme à l’intercommunalité peut être un moyen de réguler

l’implantation commerciale à une échelle de bassin de vie. Mais encore faut-il une volonté politique

qui vienne favoriser le maintien du commerce traditionnel de centre-ville à forte valeur ajoutée

(commerces alimentaires par exemple) et qui autorise l’implantation de commerce spécialisé en

périphérie pour des questions d’accessibilité pratique notamment dans la vente de produits

encombrants. A ce titre, les enseignes d’ameublement, de bricolage et de jardinage sont concernées.

De plus, les similitudes des zones commerciales avec les grands ensembles de logement

collectif pourraient faire réfléchir les autorités dans la création d’une agence nationale du

renouvellement des zones commerciales sur le même principe que l’ANRU (Agence Nationale pour la

Rénovation Urbaine). L’intégration urbaine étant actuellement une préoccupation importante à

l’élaboration de tout projet, cette agence pourrait permettre une rénovation et une réflexion de ces

espaces par rapport au reste de la ville : la problématique de l’accessibilité et de l’intégration paysagère

et urbaine seraient les objectifs premiers de cette agence. La concertation des acteurs économiques

(aménageurs, enseignes) et des acteurs publics (élus, Etat) sera bien évidemment déterminante.

Finalement, la question des zones commerciales et de leur intégration au territoire est et sera

complexe à l’avenir. L’évolution des modes de consommation sera l’élément clé dans la façon

d’appréhender le commerce. Le e-commerce prenant de plus en plus d’ampleur dans le quotidien des

consommateurs et dans la stratégie économique des distributeurs, il faudra surement encadrer

l’implantation de hangars style « boites à chaussures » au fonctionnement similaire aux drive : des

locaux de stockage de marchandises pourraient continuer à fleurir en lien avec le commerce par

Internet engendrant des flux de marchandises accrus en ville afin de livrer le consommateur. Cette

forme urbaine pourrait redevenir les locaux commerciaux de demain.

Page 87: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 87

Bibliographie

Ouvrages :

- Longone, Pierre, Peltier, Roger, Barsalou, Joseph [dir.], 1967, « La France contemporaine,

Tome III – Renouveau et solidarités », L’Union Européenne d’éditions, pp 24-26

- Fourastié, Jean, 1979, « Les Trente Glorieuses, ou la révolution invisible de 1946 à 1975 »,

Fayard, Paris, 300 pages

- Moreno Dominique, 1999, « Urbanisme et équipement commercial », Economica, 111 pages

- Graboy-Grobesco, 1999, « Droit de l’urbanisme commercial », Bibliothèque De Droit de

l’Urbanisme et de l’Environnement Tome 5, LGDJ, 338 pages

- Sueur, Jean-Pierre, 1999, « Changer la ville : pour une nouvelle urbanité », Odile Jacob, pp 78-

88

- Desse, René-Paul, 2001, « Le nouveau commerce urbain. Dynamiques spatiales et stratégies

des acteurs », PUR, 198 pages

- Peron, René, 2004, « Les boîtes, les grandes surfaces commerciales des villes », Collection

Comme un accordéon, Editions L’Atalante, 221 pages

- Desse, René-Paul [dir.], 2008, « Dictionnaire du commerce et de l’aménagement », PUR, 355

pages

- Choay, Françoise [dir.], 2010, « Dictionnaire de l’urbanisme et de l’aménagement », PUF, 1024

pages

Articles :

- Bouyssou, Fernand, 1989, « Urbanisme commercial. Autorisation de la Commission.

Assujettissement. Pluralité d’établissements. Constitution d’une unité économique

d’ensemble. Appréciation. », La Semaine Juridique Notariale et Immobilière n°12, 24 mars

1989, p. 23

- Cattiaux, Philippe, 1994, « Pour une critique sereine de la loi Royer. Point de vue d’un

praticien », RDI 1994, pp 562-565

- Bourdin, Alain, 2003, « Urbanisme et quartier. Ce que nous apprend Paris Rive gauche »,

Terrain n° 41, pp 137-148

- Gasnier, Arnaud, 2007, « Dynamiques et enjeux des pôles commerciaux périphériques : études

de cas français », Territoire en mouvement, 3 | 2007, 14 pages

- Sainteny, Guillaume, 2008, « L’étalement urbain », Responsabilité & Environnement n°49,

janvier 2008, pp 7-16

- Bouvier, Gérard, Pilarski, Charles, 2008, « Soixante ans d’économie française : des mutations

structurelles profondes », INSEE Première n°1201, juillet 2008, 4 pages

- Monnet, Jérôme, 2008, « L’urbanisme commercial français de 1969 à 2009 : Quels

changements avant et après la directive européenne « Services » ? », octobre 2008, 14 pages

- Desailly, Bertrand, Beringuier, Philippe, Briane, Gérard, Dejoux, Jean-François, 2009, « Les

impacts environnementaux de l’étalement urbain », Perspectives Villes, février 2009, 4 pages

- Schmit, Philippe, 2009, « Urbanisme commercial, à la recherche d’un nouveau modèle »,

Intercommunalités, n°135, 12 pages

Page 88: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 88

- Rosenberg, Emily, 2009, « Le « modèle américain » de la consommation de masse », Cahiers

d’Histoire. Revue d’histoire critique, 108 | 2009, pp 111-142

- PROCOS, 2010, « 2009 : en pleine crise, la surproduction de surfaces commerciales s’aggrave »,

note d’expert, 2 pages

- Musereau, Jonathan, Gaudin, Solène, 2010, « IKEA, un modèle territorial « en kit » : stratégies d’implantation et pouvoirs locaux », Revue Géographique de l'Est, vol. 50 / 3-4 | 2010, 18 pages

- Madry, Pascal, 2011, « Le commerce est entré dans sa bulle », Etudes foncières n°151, mai-

juin 2011, pp 12-17

- Madry, Pascal, 2012, « La fin de l’urbanisme commercial », Etudes foncières n°160, novembre-

décembre 2012, pp 20-24

- DATAR, 2012, « Des facteurs de changement 2 », Territoires 2040 n°6, La Documentation

française, pp 27-41

- Allé, Camille, 2013, « Maitriser l’urbanisme commercial », Working papers du Programme

Villes & territoires, 2013-03 Paris, Science Po, 36 pages

- Dossier « De la zone au quartier », Revue Urbanisme hors-série n°46, novembre 2013, pp 70-

74

Colloques/Séminaires :

- Jourdan, Gabriel, 2008, « Les zones périphériques industrielles et commerciales : de nouvelles

centralités pour la ville de demain ? », Les cahiers de la FNAU n°22, décembre 2008, 5 pages

- Sabatier, Bruno, 2009, « Les recompositions territoriales liées à la consommation en Midi-

Pyrénées : un enjeu de développement régional » in Développement territorial : jeux

d'échelles et enjeux méthodologiques, Lausanne : Suisse (2009), 8 pages

Rapports/Projets de loi :

- Projet de Loi Ollier-Piron relatif à la réforme de l’urbanisme commercial de 2010

- Projet de Loi ALUR de 2013

- Projet de Loi Pinel relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises de 2013

Jurisprudence :

- CE, 25 mai 1988, Commune de Ménétrol, n°80335, Recueil Lebon

Documents de planification et d’urbanisme :

- Le SCOT de Vichy Val d’Allier de 2013

Page 89: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 89

Etudes / Guides méthodologiques :

- Moulinié, Claire, Naudin-Adam, Muriel, « Appréhender la densité. 3. Formes urbaines et

densités », Note rapide sur l’occupation du sol, n°384, IAURIF, Paris, Juin 2005

- CAUE de Loire-Atlantique, 2011, « Réinventer la zone d'activités. Pour un aménagement

durable des espaces d'activités », 40 pages

- CCI de l’Essonne, 2011, « Zones d’activités économiques en Essonne : recommandations pour

une prise en compte du développement durable dans les projets de requalifications », 60

pages

- AdCF, 2012, « Urbanisme commercial : une implication croissante des communautés mais un

cadre juridique à repenser », 68 pages

- Gardesse, Camille, 2014, « Cas d’étude, Paris, France : Europa City l’implantation d’un grand

projet privé dans le cadre du Triangle de Gonesse ». Context, Rapport 3. Groupe de

programmes d’urbanisme, AISSR, Amsterdam, 100 pages

Références internet :

- Site de la Préfecture du Morbihan : www.morbihan.gouv.fr

Informations concernant le rôle et la composition de la CDAC

- Site de Frédéric Renaudin, avocat spécialiste en droit public et expert en urbanisme

commercial : www.urbanismecommercial.com

Informations concernant les effets de la loi LME sur l’urbanisme commercial

- Site du service public de l’accès au droit : www.legifrance.gouv.fr

- Site de la fédération PROCOS : www.procos.fr

- Site de l’Assemblée Nationale : www.assemblee-nationale.fr

Projet de loi « Ollier » sur la réforme de l’urbanisme commercial

- Site du Ministère de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme : www.artisanat-commerce-

tourisme.gouv.fr

Projet de loi « Pinel » relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises

- Gaudin, Solène, Musereau, Jonathan, 2009, « Ikea revisite les classiques de la géographie »,

Espacetemps.net, Objets, 26 novembre 2009

- Site Urbanews : www.urbanews.fr

Foucher, Yoan, 2013, « Quel avenir pour les zones d’activités commerciales », Le Mag’ du

24/04/2013

Page 90: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 90

Annexes

Annexe 1 : Données sur le logement en France de 1946 à 1975 (Source : Fourastié, Jean, 1979, « Les Trente Glorieuses, ou la

révolution invisible de 1946 à 1975 », Fayard, Paris, 300 pages)

Page 91: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 91

An

ne

xe 2

: Lo

calis

atio

n d

es p

rise

s d

e vu

e su

r la

zo

ne

com

mer

cial

e d

e C

har

me

il (S

ou

rce

: M

axim

e D

ub

ois

, Gé

op

ort

ail)

1

2

3/4

Page 92: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 92

Annexe 3 : Localisation des prises de vue sur la zone commerciale des Ailes (Vichy – 03) (Source : Maxime Dubois, Géoportail)

5 6

7

8

9

Page 93: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 93

Annexe 4 : Localisation des prises de vue sur le parc d’activités commerciales Be Green de Saint-Parres-aux-Tertres (Sources : Maxime Dubois, Open Street Maps)

10

13

11

14

12

15 16

17

19 18

20

21

22

Page 94: Maxime Dubois - DoYouBuzz

Page | 94

Annexe 5 : La densité selon la typologie de logement (Source : MOULINIE, Claire, NAUDIN-ADAM Muriel, « Appréhender la densité. 3. Formes urbaines et densités », Note

rapide sur l’occupation du sol, n°384, IAURIF, Paris, Juin 2005)