Matériaux : Elaboration, caractérisation préliminaire et...

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Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures 59 Chapitre III Matériaux : Elaboration, caractérisation préliminaire et résistance à la propagation de fissures our réaliser cette étude, nous avons choisi deux céramiques présentant un effet de courbe R, l’alumine et la zircone dopée en oxyde de cérium Ce-TZP avec des mécanismes de renforcements bien établis. Il s’agit du pontage par grains pour l’alumine, dont l’importance dépend de la taille moyenne des grains, et de la transformation de phase pour la zircone, dont l’effet est lié au taux du dopant et à la microstructure. Nous avons élaboré quatre nuances d’alumine avec des microstructures différentes, ainsi que quatre nuances de zircone dopées avec différents taux d’oxyde de cérium, mais ayant la même microstructure (même taille moyenne de grains). P

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Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

59

Chapitre III

Matériaux :

Elaboration, caractérisation préliminaire

et résistance à la propagation de fissures

our réaliser cette étude, nous avons choisi deux céramiques présentant un effet de

courbe R, l’alumine et la zircone dopée en oxyde de cérium Ce-TZP avec des

mécanismes de renforcements bien établis. Il s’agit du pontage par grains pour l’alumine, dont

l’importance dépend de la taille moyenne des grains, et de la transformation de phase pour la

zircone, dont l’effet est lié au taux du dopant et à la microstructure.

Nous avons élaboré quatre nuances d’alumine avec des microstructures différentes, ainsi que

quatre nuances de zircone dopées avec différents taux d’oxyde de cérium, mais ayant la même

microstructure (même taille moyenne de grains).

P

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

60

III.1 Choix des matériaux

L’élaboration des matériaux est une étape cruciale, qui nous a permis de contrôler les

propriétés finales des matériaux, notamment l’effet de courbe R.

Pour l’alumine, l’amplitude du renforcement est directement liée à la taille de grains, que

nous avons contrôlée en modifiant les conditions de frittage.

Pour la zircone Ce-TZP, deux paramètres peuvent influencer le renforcement : la

microstructure et le taux de dopant. Ces deux paramètres agissent sur le taux de

transformation de phase, mais la microstructure (en particulier la taille de grains) peut

également induire du pontage qui contribue au renforcement du matériau. Afin de minimiser

son influence et d’étudier uniquement celle de la transformation de phase, nous avons dans un

premier temps élaboré des nuances ayant la même microstructure mais différents taux de

dopant, ensuite des Ce-TZP à différentes tailles de grains

Dans la suite, sont présentés les matériaux étudiés, leur mode d’élaboration et leurs

caractéristiques générales, en particulier les courbes de résistance à la propagation de fissures

déterminées en flexion.

III.2 Alumine

III.2.1 Poudre d’alumine La poudre d’alumine utilisée dans cette étude, est une AKP50 fournie par Sumitomo

(Japon) dont les caractéristiques sont présentées dans le tableau III.1. Sa pureté est donnée

pour être supérieure à 99,9%. Nous avons mesuré un diamètre moyen de poudre de 0,45 µm

sur ce lot, alors que la mesure donnée par le fournisseur est de 0,1-0,3 µm. Il faut relativiser

cet écart important par le fait que nous n’avons pas utilisé une suspension optimisée. D’autre

part, pour vérifier la pureté de notre poudre, une analyse chimique montre qu’elle présente

moins de 100 ppm d’impuretés, ce qui est cependant un peu plus que ce qui est donné par le

fournisseur (50 ppm).

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Tableau III.1 : Caractéristiques de la poudre AKP50

Caractéristiques fournies

par SUMITOMO

Caractéristiques

déterminées au laboratoire

Taille des particules (µm) 0,1-0,3 0,4-0,5

Surface spécifique BET(m2/g) 9-15 14

Impuretés (ppm)

Si 15 50 ± 10

Ca non précisé 30 ± 10

Na 2 -

Mg 2 <15

Cu <1 -

Fe 6 -

H2O (%) 0,1 -

III.2.2 Mise en forme La bonne coulabilité de la poudre utilisée permet une bonne aptitude à la compaction

et limite les variations de densité des crus. La mise en forme a été réalisée par pressage

uniaxial de la poudre, à 60 MPa, dans une matrice rectangulaire. Afin d’augmenter la densité

à cru et de diminuer les variations de densité dues au pressage uniaxial, les échantillons ont

subi un pressage isostatique à 350 MPa.

Les échantillons obtenus ont une densité à cru égale à 56 % de la densité théorique. Ceci met

en évidence une bonne aptitude à la compaction.

III.2.3 frittage L’analyse dilatométrique de la poudre AKP50 montre que la température de début de

frittage est de l’ordre de 1000 °C et la température de retrait total est de 1550 °C (Fig. III.1).

Une température de 1500 °C permet d’obtenir une densité supérieure à 97 % de la densité

théorique [83].

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

62

-20

-18

-16

-14

-12

-10

-8

-6

-4

-2

0

600 800 1000 1200 1400 1600

Température ( °C)

∆L/L

o

Figure III.1 : Courbe dilatométrique de l’alumine AKP50

Dans le but d’avoir des échantillons avec différentes tailles de grains, le frittage a été réalisé à

différentes températures allant de 1550 °C jusqu’à 1750 °C. La densité mesurée est supérieure

à 97 % de la densité théorique. Afin de bien maîtriser la microstructure, le frittage a été réalisé

avec le souci d’éviter toute contamination, qui conduit généralement à une croissance

exagérée des grains. Dans cette optique, les échantillons ont été enrobés dans la poudre

AKP50, et placés dans des creusets élaborés à partir de cette même poudre.

III.2.4 Caractérisation microstructurale

Nous avons observé au microscope électronique à balayage les surfaces polies des

alumines attaquées thermiquement à des températures inférieures de 20 à 100 °C à la

température de frittage. Les micrographies (Fig. III.2) montrent une microstructure homogène

et équiaxe même à une température de frittage élevée. Ce résultat est dû au grand soin pris

lors de l’élaboration et du frittage des échantillons, ce qui nous a permis d’éviter toute

contamination [84,85].

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

63

Figure III.2. Microstructure des différentes nuances d’alumine élaborées

La taille moyenne des grains est obtenue par la méthode d’interception linéaire sur des

micrographies représentatives et les résultats sont répertoriés dans le tableau III.2, dans lequel

la désignation des différentes nuances élaborées est indiquée.

AKP4

AKP14

AKP20

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

64

Tableau III.2 : Taille moyenne des grains de l’alumine AKP50 en fonction de la température de frittage

Désignation Température de

frittage

Durée du pallier Densité relative/

dth (%)

Taille moyenne de

grains (µm)

AKP4 1550 °C 2 h 97,7 4

AKP7 1650 °C 4 h 98,4 7

AKP14 1750 °C 6 h 98,9 14

AKP20 1750 °C 12 h 99,3 20

III.2.5 Caractérisation mécanique préliminaire Les propriétés mécaniques sont regroupées dans le tableau III.3. La résistance à la

rupture, σR, a été mesurée en flexion 4 points, sur des éprouvettes de dimensions 3×4×50

mm3. Pour la ténacité, des éprouvettes de dimensions 4×6×50 mm3, entaillées à une

profondeur relative de 0,5 ont été utilisées. Nous constatons que la ténacité augmente avec la

taille des grains par contre, la résistance à la rupture diminue, ce qui est conforme à la

littérature [86].

Tableau III.3 : Caractéristiques mécaniques des différentes nuances d’alumine

Nuance σ0 (MPa) KIC (Mpam1/2)

AKP4

AKP7

AKP14

AKP20

384 ± 19

372 ± 23

358 ± 14

345 ± 10

3,6 ± 0,2

3,8 ± 0,2

4,3 ± 0,2

4,6 ± 0,3

III.1.6 Courbes R en flexion La rupture se fait d’une manière contrôlée pour les nuances d’alumine AKP20 et

AKP14. Par contre pour les nuances AKP7 et AKP4 la rupture est catastrophique malgré toutes

les précautions prises lors des essais, ce qui implique à priori l’absence de renforcement lors

de la propagation de fissure. La figure III.3 montre un enregistrement des deux types de

rupture contrôlée et brutale.

La courbe KR relative à la nuance à gros grain AKP20, (Fig.III.4). montre une augmentation

importante du facteur d’intensité de contrainte au début de l’extension de la fissure. A partir

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

65

d’une valeur initiale de 2,6 MPa.m1/2, il atteint 4,1 MPa.m1/2 pour un accroissement de fissure

de 750 µm. Pour la nuance à grain intermédiaire AKP14, on observe une augmentation de KR

à partir d’une valeur initiale de 2,9 MPa.m1/2, suivie d’une saturation autour de 3,5 MPa.m1/2

pour une extension de fissure de 540 µm. Les deux autres nuances AKP7 et AKP4 sont

caractérisées par leur ténacité, calculée dans les mêmes conditions de chargement que les

autres nuances, respectivement égale à 3,9 MPa.m1/2, et 3,7 MPa.m1/2. Elles sont reportées en

pointillés sur la figure III.4.

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

50

0 2,5 5 7,5 10 12,5 15Déplacement (µm)

Cha

rge

(N)

Figure III.3 : Courbe de chargement monotone pour deux nuances d’alumine

2,5

2,7

2,9

3,1

3,3

3,5

3,7

3,9

4,1

4,3

0,45 0,5 0,55 0,6 0,65 0,7 0,75

a/w

fact

eur d

'inte

nsité

de c

ontra

inte

(M

Pa.m

1/2 )

AKP20AKP14

AKP7

AKP4

Figure III.4 : Courbes KR déterminées en flexion 3 points pour les différentes nuances

d’alumine

R-brutale AKP4 R-contrôlée

AKP20

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

66

D’une manière générale, il est communément accepter que la rupture est principalement

intergranulaire dans les céramiques à grains fins est transgranulaire lorsque la taille des grains

devient plus importante. Cependant, il ne faut pas oublier l’effet de la vitesse sur le mode de

rupture : plus la vitesse de fissure est élevée, plus le mode transgranulaire est favorisé. Ainsi,

dans notre cas, La rupture est totalement transgranulaire pour les nuances à grains fins AKP4

et AKP7, caractérisées par une rupture brutale (vitesses très élevées de fissure). Par contre,

pour les nuances AKP14 et AKP20, pour lesquelles la propagation de fissure se fait d’une

manière contrôlée, la rupture est principalement intergranulaire (faibles vitesses de fissure)

(Fig. III.5)

Figure III.5 : Faciès de rupture des nuances AKP4, AKP14 et AKP20 après essais de flexion

AKP4 AKP14

AKP20

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

67

III.3 Zircone Ce-TZP

III.3.1 Poudre de zircone

Quatre nuances de poudre de zircone stabilisée par différents taux d’oxyde de cérium

CeO2 en molle allant de 10% à 16% ont été utilisées dans cette étude. Elles sont fournies par

Zirconia Sales (UK) Ltd. La poudre de zircone dopée à l’oxyde de cérium Ce-TZP est de

couleur jaune. Nous avons mesuré sa surface spécifique (BET), étudié sa granulométrie, et

effectué une analyse par diffraction des rayons X.

Les analyses BET effectuées sur les quatre nuances de zircone, montrent que la surface

spécifique augmente lorsque le taux de dopant diminue (Tab III.4), ce qui implique une

meilleure aptitude au frittage. Les résultats de la mesure de la taille moyenne de grains

(mesurée par granulométrie) de poudre pour différents taux de dopant sont répertoriés dans le

tableau III.4, dans lequel la désignation des différentes nuances est indiquée.

Tableau. III.4. : Surface spécifique et taille moyenne de grains de zircones dopées avec

différents taux de CeO2 en molle

La poudre de zircone dopée à Désignation Surface spécifique Taille moyenne (µm)

10% de CeO2 en moles 10Ce-TZP 23 0.83

12% de CeO2 en moles 12Ce-TZP 23 0.88

14% de CeO2 en moles 14Ce-TZP 21 0.92

16% de CeO2 en moles 16Ce-TZP 18 1

L’analyse par diffraction des rayons X des différentes poudres de zircone révèle que la

proportion de la phase monoclinique diminue avec l’augmentation du taux de CeO2 (Fig.

III.6). Ce résultat confirme le fait que plus on augmente le taux de dopant CeO2 plus on

stabilise la phase quadratique dans la poudre de zircone.

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

68

0

100

200

300

400

500

600

700

27 28 29 30 31 32 33

2 Ο

Cps

10Ce-TZP12Ce-TZP14Ce-TZP16Ce-TZP

Fig.III.6 : Spectre de diffraction des rayons X des poudres 10Ce-TZP, 12Ce-TZP, 14Ce-TZP

et 16Ce-TZP

Les proportions de phase monoclinique dans la poudre de zircone en fonction du taux de

dopant, CeO2, sont répertoriées dans le tableau III.5.

Tableau III.5 : proportion de phase monoclinique en fonction du taux de dopant CeO2

Poudre 10Ce-TZP 12Ce-TZP 14Ce-TZP 16Ce-TZP

Pourcentage en volume de la phase monoclinique mesurée

53.9% 46% 38.7% 29.5%

III.3.2 Mise en forme Comme dans le cas de l’alumine, la poudre de zircone a été pressée dans une matrice

en acier de forme parallélépipédique pour réaliser des échantillons de dimension 60*30*E

mm3 avec ‘E’ épaisseur fonction de la quantité de poudre. La pression uniaxiale appliquée est

égale à 20 MPa. Ensuite les échantillons ont subi un pressage isostatique à froid de l’ordre de

350 MPa.

III.3.3 Frittage et microstructure

L’aptitude au frittage des différentes poudres de zircone dopées est évaluée, par une

analyse dilatométrique. Les courbes dilatométriques et leurs dérivées (Figures III.7 et III.8)

q

mm

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

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montrent que la frittabilité est sensiblement la même et que la température de début de

frittage est de 980 °C en moyenne pour les quatre poudres de zircone.

-2,5E-01

-2,0E-01

-1,5E-01

-1,0E-01

-5,0E-02

0,0E+00

0 500 1000 1500 2000

Température (°C)

∆L/L

Figure III.7 : Courbes dilatométriques des différentes poudres de zircone

-1,4E-03

-1,2E-03

-1,0E-03

-8,0E-04

-6,0E-04

-4,0E-04

-2,0E-04

0,0E+00800 900 1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600

Température (°C)

d(∆L

/L)/d

T

10Ce-TZP

12Ce-TZP

14Ce-TZP

16Ce-TZP

Figure. III.8 : Courbe dérivée de la courbe dilatométrique pour les différentes poudres de

zircone Afin de minimiser l’effet de la variation de microstructure sur le renforcement et de pouvoir

relier celui-ci uniquement au taux de transformation de phase déterminé par le taux de dopant,

nous avons dans un premier temps déterminé les conditions de frittage permettant d'obtenir

123

4

1 : 10Ce-TZP 2 : 12Ce-TZP 3 : 14Ce-TZP 4 : 16Ce-TZP

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

70

une microstructure identique et une densité proche de 100%, pour les quatre nuances de

zircone dopée. Pour cela, nous avons fritté des échantillons des différentes nuances à des

températures allant de 1400 °C jusqu'à 1550 °C pendant deux heures, avec une rampe de

montée et de descente de 120 °C/h.

Nous avons observé au microscope électronique à balayage la surface polie des différentes

nuances de Ce-TZP. Les échantillons sont préalablement attaqués thermiquement pendant 30

mn à une température inférieure de 50 °C à la température de frittage. Les micrographies

montrent une microstructure homogène et une taille de grains qui augmente avec la

température de frittage.

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

1350 1400 1450 1500 1550 1600

Température de frittage °C

Taill

e m

oyen

ne d

e gr

ains

(µm

)

10Ce-TZP

12 Ce-TZP

14 Ce-TZP

16 Ce-TZP

Figure III.9 : Taille moyenne de grains en fonction de la température de frittage pour les quatre nuances de zircone. La partie sombre détermine pour chaque nuance la température de frittage conduisant à une microstructure identique avec une taille moyenne de grains de

1.6 µm

La figure III.9 montre l’évolution de la taille moyenne de grains en fonction de la température

de frittage et du taux de dopant. Pour la gamme de températures utilisées, la densité est

supérieure à 98 % de la densité théorique quel que soit le taux de dopant. Pour la suite de

notre étude, nous avons retenu pour chaque nuance la température de frittage permettant

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

71

d’avoir la meilleure densité avec une microstructure très voisine pour toutes les nuances, cela

correspond à une taille moyenne de grain de 1.6 µm (partie grise sur la figure III.9). Les

températures de frittage permettant de réaliser ces conditions sont indiquées dans le tableau

III.6.

Tableau III.6 Conditions de frittage retenues

Nuance Température de frittage Durée de frittage

10Ce-TZP

12Ce-TZP

14Ce-TZP

16Ce-TZP

1450 °C

1430 °C

1430 °C

1450 °C

2 heures

2 heures

2 heures

2 heures

10Ce-TZP

12Ce-TZP

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

72

Figure III.10: Microstructure de différentes zircones Ce-TZP retenues

L’analyse par diffraction des rayons X révèle que les différentes nuances frittées sont

composées essentiellement (presque à 100% ) de zircone tétragonale. Un exemple est donné

pour la nuance la plus transformable i.e. 10Ce-TZP (Fig III.11)

Figure III.11 : Spectre de diffraction des rayons X du matériau 10Ce-TZP après frittage

III.3.4 Caractérisation mécanique préliminaire

Le tableau III.7 regroupe les principales caractéristiques mécaniques des différentes

nuances : la densité relative, dr, le module d'Young, E, la contrainte à la rupture, σR, et la

ténacité, KIC, mesuré par la méthode SENB. Avant les essais mécaniques, les éprouvettes ont

subi un traitement thermique permettant de relaxer les contraintes dues à la transformation de

phase (q → m) qui se produit lors de l'usinage.

0

200

400

600

800

1000

1200

27 28 29 30 31 32 33

2O

Cps

14Ce-TZP

q

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

73

Tableau III.7 : Caractéristiques mécaniques des Ce-TZP

E (GPa) KIC (MPa.m1/2) dr σR (MPa)

10Ce-TZP 190 ± 3.4 14.1 ± 1.2 99 % 504 ± 26

12Ce-TZP 192 ± 3.3 6.5 ± 0.4 99 % 540 ± 48

14Ce-TZP 196 ± 2.8 5.6 ± 0.4 99 % 678 ± 64

16Ce-TZP 194 ± 2 4.5 ± 0.2 98 % 648 ± 82

III.3.5 Résistance à la propagation de fissures III.3.5.1 Courbe R en flexion

Pour la nuance 10Ce-TZP, la rupture se fait d'une manière parfaitement contrôlée,

comme en témoigne l'enregistrement de la courbe charge déplacement (Fig.III.12-a). Pour la

nuance 12Ce-TZP, la rupture se fait aussi de manière stable, mais la vitesse de propagation

de fissure est moins contrôlée (Fig.III.12-b) comparée à celle de la nuance 10Ce-TZP. Par

contre, pour les nuances 14Ce-TZP et 16Ce-TZP, la rupture se fait de façon brutale

(Fig.III.12-c et Fig.III.12-d). Ceci implique à priori l'absence de renforcement lors de la

propagation de fissures. Ces deux nuances sont caractérisées seulement par leur ténacité,

calculée à partir de la valeur maximale de la contrainte (déterminée dans les mêmes

conditions de chargement que les autres nuances à effet de courbe R).

0

40

80

120

160

200

0 20 40 60 80 100Déplacement (µm)

Cha

rge

(N)

10Ce-TZP

020406080

100120140

0 10 20 30Déplacement (µm)

Cha

rge

(N)

12Ce-TZP

a b

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

74

0

20

40

60

80

100

120

0 10 20 30 40Déplacement (µm)

Cha

rge

(N)

14Ce-TZP

0

20

40

60

80

100

0 10 20 30Déplacement (µm)

Cha

rge

(N)

16Ce-TZP

Figure III.12 : Charge en fonction du déplacement pour différentes nuances de zircone.

(a) 10Ce-TZP, (b) 12Ce-TZP, (c) 14Ce-TZP, (d) 16Ce-TZP

La résistance à la propagation de fissure, qui se traduit par une stabilité de la fissuration en

flexion 3 points, est d'autant plus importante que le taux en oxyde de cérium est faible (Fig

III.13). En effet, la nuance 10Ce-TZP caractérisée par le taux en oxyde de cérium le plus

faible, montre une résistance à la propagation de fissure phénoménale, loin de ce qui est

habituellement observé pour les céramiques : à partir d'une valeur initiale de 8.5 MPa.m1/2,

KR atteint 13.4 MPa.m1/2 pour ∆a = 700 µm ; elle continue ensuite à croître légèrement à

partir de cette valeur, sans qu'un régime de saturation ne soit complètement atteint. La nuance

12Ce-TZP présente aussi un effet de courbe-R mais très limité : KR augmente initialement de

5.8 MPa .m1/2 pour atteindre la valeur maximale KR = 6.7 MPa.m1/2 au plateau. A l’opposé,

les nuances 14Ce-TZP et 16Ce-TZP sont seulement caractérisées par leur ténacité

respectivement égale à 5.5 MPa.m1/2 et 4.5 MPa.m1/2.

c d

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

75

0

2

4

6

8

10

12

14

16

0 0,25 0,5 0,75 1 1,25 1,5 1,75∆a (mm)

Fact

eur d

'inte

nsité

de

cont

rain

te

(MPa

.m1/

2 )

10Ce-TZP12Ce-TZP

Figure III.13 : Courbes R déterminées par la mesure in situ de la longueur de fissure pour les

nuances 10Ce-TZP et 12Ce-TZP

Deux mécanismes peuvent être à l’origine du renforcement : d'une part, la transformation de

phase quadratique-monoclinique générant des contraintes s'opposant à la propagation de

fissure [87-92], et d'autre part, la microfissuration, résultat de cette transformation de phase.

L'analyse par diffraction des rayons X des faciès de rupture de différentes nuances, montre

que le taux de transformation de phase q → m est important pour les nuances 10Ce-TZP et

12Ce-TZP, par contre, pour les nuances 14Ce-TZP et 16Ce-TZP l’analyse révèle qu'il n'y a

presque aucune transformation (Fig. III.14). En effet, plus le taux de dopant est faible, plus la

phase quadratique est dans un état métastable, donc facile à transformer à l'état monoclinique,

ce qui explique l'amélioration de la résistance à la propagation de fissure.

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

76

0%

20%

40%

60%

80%

100%

9% 10% 11% 12% 13% 14% 15% 16% 17%Taux de CeO2

Taux

de

la p

hase

mon

oclin

ique

avant recuitaprès recuitfaciès de rupture

Figure III.14 : Taux de phase monoclinique en fonction du taux dopant après usinage, après

recuit et pour les faciès de rupture.

III.3.5.2 Analyse de l'activité acoustique

Un suivi par émission acoustique a été réalisé pour les trois nuances 10Ce-TZP, 12Ce-

TZP et 16Ce-TZP. Pour la nuance 16Ce-TZP aucune activité acoustique n'a été observée

avant l'amorçage de la fissure (Fig. III.15). Ceci montre que l'émission acoustique est liée

seulement à la propagation de la fissure, sans transformation de phase. Ce résultat est bien

corrélé à l'analyse par diffraction des rayons X effectuée sur les faciès de rupture, qui

confirme l’absence de transformation de phase pour cette nuance (Fig. III.14).

Pour les nuances 10Ce-TZP et 12Ce-TZP, l'émission acoustique est observée avant

l'amorçage de la fissure (Fig. III.16 et III.17), et correspond à une transformation de phase

antérieure à la propagation de fissure. En effet, l'activité acoustique débute avec une faible

cadence d'événements, dont le nombre augmente rapidement après l'amorçage de fissure. Le

comportement des deux nuances diffère d'une manière notable. Pour la nuance 10Ce-TZP,

l'activité acoustique est observée dès le début du chargement à une charge égale à 20 N, alors

que pour la nuance 12Ce-TZP, l'émission acoustique débute à une charge plus élevée de

l'ordre de 90 N.

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

77

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

0 50 100 150 200 250 300 350

Temps (s)

Cha

rge

(N)

0

20

40

60

80

100

Nom

bre

de sa

lves

Figure III.15 : Charge et nombre d’événement acoustique en fonction du temps lors d’un

essai de flexion trois points (SENB) pour la nuance 16Ce-TZP

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

200

0 250 500 750 1000 1250 1500

Temps (s)

Cha

rge

(N)

0

750

1500

2250

3000

3750

4500

5250

Nom

bre

de sa

lves

Figure III.16 : Charge et nombre d’événement acoustique en fonction du temps lors d’un

essai de flexion trois points (SENB) pour la nuance 10Ce-TZP

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

78

0

20

40

60

80

100

120

140

0 100 200 300 400 500 600Temps (s)

Cha

rge

(N)

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

4500

Nom

bre

de sa

lves

Figure III.17 : Charge et nombre d’événement acoustique en fonction du temps lors d’un

essai de flexion trois points (SENB) pour la nuance 12Ce-TZP III.3.5.3 Effet de la taille de grain

La résistance à la propagation de fissure a également été déterminée pour une nuance à

gros grains (3.7 µm) de la 10Ce-TZP. Elle est comparée à celle de la nuance à petits grains

(1.6 µm) sur la figure III.18. Nous constatons qu’au début de la propagation de fissure, KR est

le même pour les deux nuances, mais qu’à mesure que la fissure se propage, il devient plus

important pour la nuance à gros grains.

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

0,5 0,55 0,6 0,65 0,7 0,75 0,8 0,85

a/w

FIC

(MPa

m1/

2 )

10Ce-TZP 3.7 µm10Ce-TZP 1.6 µm

Figure III.18 : Effet de la microstructure sur la résistance à la propagation de fissure pour la nuance 10Ce-TZP.

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

79

En effet la largeur de la zone transformée, h, est plus importante pour la nuance à gros grains

(Fig. III.19). Elle est de 50 µm pour la nuance à petits grains, alors qu’elle atteint une valeur

égale à 150 µm pour la nuance à gros grains. Les paramètres de résistance à la propagation de

fissures Kini, facteur d’intensité d’amorçage, Kmax, facteur d’intensité maximal et Ksh,

correspondant au renforcement maximal sont regroupés dans le tableau III.8 pour les deux

nuances.

Tableau III.8 : Effet de la microstructure sur les paramètres caractérisant la résistance à la

propagation de fissure pour la nuance 10Ce-TZP

Kini (MPa.m1/2) Kmax (MPa.m1/2) Ksh (MPa.m1/2) h (µm)

10Ce-TZP (petit grain) 8.5 14.1 5.6 50

10Ce-TZP (gros grain) 8.1 15.7 7.6 150

Figure III.19 : Micrographie optique montrant l’effet de la microstructure sur la taille de la zone transformée. (a) ; 10Ce-TZP (1.5 µm), (b) ; 10Ce-TZP (3.7 µm)

a

b

200 µm

200 µm

Elaboration Caractérisation préliminaire Résistance à la propagation de fissures

80

Conclusion

Ce chapitre a porté sur la caractérisation des poudres utilisées, sur le mode

d’élaboration et sur l’étude mécanique des nuances obtenues, en particulier la détermination

de la résistance à la propagation de fissure

Nous avons montré que plus la microstructure de l’alumine est grossière, plus le pontage est

important, induisant par conséquent, une propagation de plus en plus stable.

Enfin, nous avons pu mettre en évidence que le mécanisme responsable du renforcement dans

la zircone Ce-TZP, réside dans la transformation de phase qui est d’autant plus importante que

le taux d’oxyde de cérium est faible.