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1 Bassin commercial central (Burkina Faso) et Bassin commercial Est (Bénin, Niger, Nigéria, Tchad) - Juin 2013 Marchés et Sécurité Alimentaire dans le Sahel

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Bassin commercial central (Burkina Faso) et Bassin commercial Est (Bénin, Niger, Nigéria, Tchad) - Juin 2013

Marchés et Sécurité Alimentaire dans le Sahel

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Résumé exécutif

Suite à une pluviométrie favorable entre juin et septembre 2012, les récoltes dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest étaient supérieures à la moyenne en 2012/2013. Malgré cette bonne production, des pluies abondantes au Nigeria ont provoqué des inondations très importantes, notamment dans les états du Niger, Kebbi, Kano, Jigawa et sur les rives du Niger et de la Bénoué. Le déficit de production auquel s’est ajouté l’insécurité civile au nord du Nigeria a provoqué le développement atypique des flux dans la région et a réduit les mouvements habituels de population et augmenté le coût du transport et des transactions. Par conséquent, le fonctionnement des marchés est perturbé au nord Nigeria, ce qui contribue à maintenir les prix à un niveau atypique et élevé par rapport aux tendances saisonnières sur les marchés au Nigeria et sur les marchés transfrontaliers et avoisinants du sud-est et centre du Niger. Malgré les bonnes productions observées au Sahel, le comportement atypique du marché en 2013 fait craindre un retour du fonctionnement atypique observé en 2005 et qui avait engendré une crise alimentaire et nutritionnelle au Niger, au Tchad et dans les zones sahéliennes du Burkina Faso et Mali.

Pour mieux comprendre le comportement et l’évolution de la disponibilité et des prix des céréales et du bétail, une évaluation conjointe par le CILSS, la FAO, le PAM, et le FEWS NET, avec l’appui du système national d’information sur les marchés du Niger a été organisée juste avant la période de soudure, en mai et juin 2013 afin de mieux comprendre la capacité des marchés nationaux et régionaux à répondre sur la base des stocks existants, à toute potentielle baisse de disponibilité ou une demande accélérée des consommateurs jusqu’à la fin de l’année de consommation.

D’après les résultats de l’évaluation rapide, la bonne campagne agricole juin-septembre 2012 a permis de reconstituer les stocks commerçants et producteurs à un niveau moyen à supérieure à la moyenne en général dans le bassin Centre1. Dans le bassin Est, les stocks, aussi bien au niveau des ménages que des commerçants, sont en général moyens avec des disparités selon les pays, ce qui n’est pas le cas au Nigéria où il a été observé une tendance à la baisse. En ce qui concerne les flux, les échanges commerciaux se sont renforcés du Ghana et de la Côte-d’Ivoire comme en année normale vers le Burkina. Dans le bassin Est, les flux commerciaux atypiques ont persisté avec quelques inversions surtout pour le mil et le maïs entre le Nigeria et le Niger et entre le Nigeria et le Benin. Pour les flux entre bassins, ils se sont renforcés du Burkina Faso et Mali vers le Niger. Pour la demande, elle est restée globalement normale et souvent en baisse grâce aux stocks encore détenus par les ménages notamment producteurs. Toutefois, la demande du Nigeria est restée forte et toujours affectée par l’insécurité et le mauvais fonctionnement interne du marché. L’offre est globalement satisfaisante dans la région. Cependant, l’augmentation de l’acuité de l’insécurité au nord du Nigeria, a coupé les zones de production avec les marchés et les zones de consommation, ce

1 Les trois bassins commerciaux sont simplement connus sous les noms de bassin Ouest, Centre, et Est. En plus du mouvement du sud vers le nord des produits, les flux de certaines céréales se font aussi horizontalement. (1) Le bassin Ouest comprend la Mauritanie, le Sénégal, l’ouest du Mali, la Sierra Leone, la Guinée, le Libéria, et la Gambie où le riz est le plus commercialisé. (2) Le bassin central se compose de la Côte d'Ivoire, le centre et l’est du Mali, le Burkina Faso, le Ghana, et le Togo où le maïs est généralement commercialisé. (3) Le bassin Est se rapporte au Niger, Nigéria, Tchad, et Bénin où le millet est le plus fréquemment commercialisé.

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qui a continué à affaiblir l’offre sur les marchés au centre et nord-est du Nigeria et des zones avoisinants des pays limitrophes comme le Niger. Pour les prix, le dynamisme des échanges commerciaux dans le bassin Centre continue à maintenir l’équilibre des marchés et garder la stabilité des prix avec de légères baisses contrairement à la tendance saisonnière normale. Dans le bassin Est, le niveau atteint par les prix en juin montre que la situation atypique haussière des prix se maintient au Nigeria, Niger et Benin où les prix continuent à être plus hauts que ceux de la soudure de l’année passée.

En perspectives, la situation alimentaire devrait rester stable de septembre à décembre 2013 dans la plupart des régions à la faveur des récoltes de 2012 moyennes à supérieure à la moyenne qui ont générées de bons niveaux de stocks des ménages. Cependant, les prix des céréales qui sont restés supérieurs à la moyenne des cinq dernières années et à ceux de l’année passée à la même période sur la plupart des marchés dans le bassin Est continueront à limiter le pouvoir d’achat pour les populations les plus vulnérables qui dépendent fortement du marché pour leur accès alimentaire. En outre, l’insécurité civile et le mauvais fonctionnement des marchés au Nigeria continuent à être la pièce centrale du fonctionnement des marchés en Afrique de l’Ouest notamment dans les bassins central et Est. L’installation de la campagne agricole 2013/14 dans la région va avoir un effet catalyseur de la hausse des prix si elle n’est pas normale ou atténuant si elle est normale.

I. Contexte

Des productions globalement supérieures à la moyenne dans la région mais une production en baisse au Nigeria

Suite à une pluviométrie favorable entre juin et septembre 2012, les récoltes dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest étaient supérieures à la moyenne en 2012/2013. Selon les estimations de production agricole publiées par CILSS/AGRYHMET en novembre 2012, la production totale de céréales et tubercules dans le bassin commercial Est de l’Afrique de l’Ouest (« bassin Est »), a augmenté de 18 % par rapport à 2011, une année proche de la moyenne pour l’Afrique de l’Ouest. Comparée à la moyenne quinquennale, la production de 2012 dans la région a augmenté globalement de 24 %.

Malgré cette bonne production, des pluies abondantes au Nigeria ont provoqué des inondations très importantes, notamment dans les états du Niger, Kebbi, Kano, Jigawa et sur les rives du Niger et de la Bénoué. Ces inondations ont entraîné une baisse de 6 % de la production de céréales et de tubercules par rapport à la moyenne quinquennale. Le maïs, les patates douces et le manioc ont été les plus affectés, et leurs productions ont baissé de 1 %, 8 % et 3 %, par rapport à leurs moyennes quinquennales respectives. Étant donné que le Nigeria produit habituellement les trois quarts des denrées alimentaires de base du bassin Est, ces pertes dues aux inondations, même si elles ne représentent qu’un faible pourcentage, sont significatives en ce qui concerne la production régionale et l’offre sur le marché. Comparés à la moyenne quinquennale, la baisse des récoltes au Nigeria en 2012 diminue d’environ trois quarts des gains de production constatés ailleurs dans le bassin Est.

Schéma 1 : Carte des Etats du Nigeria

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Toutefois, on a assisté aussi à de bonnes productions de contre saison en légumes, tubercules et sorgho de décrue. Les résultats ne sont pas connus mais de l’avis de tous les acteurs, les productions obtenues sont supérieures à la moyenne même au Nigeria.

Un fonctionnement atypique dès février 2013 du marché régional perturbé par l’insécurité et la baisse des productions au Nigeria qui pourrait affecter la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages et aussi les conditions de commercialisation 2013/14

Le déficit de la production, l’insécurité civile au nord du Nigeria a réduit les mouvements habituels de population et augmenté le coût du transport et des transactions. Beaucoup de commerçants sont réticents à traiter avec les marchés où la violence atteint des niveaux élevés. En conséquence, les activités et flux commerciaux des denrées alimentaires, les cultures commerciales et le bétail ont baissé par rapport à leurs niveaux habituels dans ces parties du Nigeria, tout comme dans le sud-est du Niger et le sud-ouest du Tchad voisin.

Des indicateurs précoces dès janvier 2013 indiquent que sur les principaux marchés de référence, les prix des denrées de base se situent déjà à un niveau élevé par rapport à la moyenne, soutenus par des prix en constante augmentation depuis la dernière année de consommation. En outre, les comportements et les délais de commercialisation des céréales affichent des décalages non négligeables par rapport à la norme saisonnière, y compris la commercialisation tardive de cultures céréalières essentielles par les ménages et les commerçants, ainsi que l’approvisionnement et les chaînes logistiques des commerçants provenant de sources atypiques (c.-à-d. du Bénin au lieu du Nigeria). Une analyse approfondie de ces facteurs indique que des augmentations substantielles de

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la demande régionale liée à la baisse des récoltes au Nigeria influencent et continueront d’influencer le comportement des commerçants et les systèmes commerciaux pour les denrées de base.

Ainsi, pour le maïs, les commerçants du Nigeria sont partis chercher le produit au Bénin voisin où les disponibilités existent à un prix compétitif. C’est la même tendance pour les zones structurellement déficitaires du sahel comme le Niger qui se sont retournés vers le Burkina Faso et le Mali pour leurs approvisionnements à cause de la bonne production au niveau de ces deux pays cette année. Pour le mil, la pluspart des pays ont continué à dépendre de leurs marchés locaux jusqu’en Février 2013 compte tenu de la bonne production au niveau régional car le produit a été moins affecté par les inondations de 2012. Toutefois les pays du sahel ont fait recours aux marchés du bassin centre pour s’approvisionner au moment où ils devraient dépendre du Nigeria pour satisfaire leurs besoins en mil à partir de mars-avril 2013.

En avril 2013, l’insécurité a fortement augmenté au Nigeria ce qui a conduit le gouvernement à décréter l’état d’urgence dans les zones les plus affectées que sont le Borno, le Yobé, Adamawa et Taraba. Ces zones sont d’importantes zones de surplus de sorgho de contre saison qui avait commencé à arriver sur le marché en avril 2013, ce qui avait conduit à une amélioration de l’offre et une stabilisation des prix.

Malgré les bonnes productions observées au Sahel, le comportement atypique du marché en 2013 fait craindre un retour du fonctionnement atypique observé en 2005 caractérisé par des taux de change naira/franc CFA et différentiel de prix en faveur des exportations de céréales du Niger vers le Nigéria et des flux transfrontaliers inversés qui a occasionné une baisse significative des disponibilités au Niger avec des prix élevés de part et d’autre de la frontière entre les deux pays. . Cette situation avait engendré une crise alimentaire et nutritionnelle au Niger, au Tchad et dans les zones sahéliennes du Burkina Faso et Mali. Cela pourrait se reproduire encore en 2013 si les stocks détenus de part et d’autre des frontières par les ménages et les commerçants ne sont pas importants pour supporter la pression de la demande jusqu’à la fin de la soudure 2013.

Les bassins Est et central les plus concernés par le fonctionnement atypique du marché

Jusqu'en décembre 2012 les prix des céréales étaient restés élevés par rapport à leurs niveaux moyens sur cinq ans, mais ont suivi généralement leurs tendances saisonnières respectives. Mais à partir de février/mars 2013, la demande du Nigeria a commencé à faire pression sur les disponibilités céréalières dans le bassin Est en particulier pour le maïs, au Bénin pendant que les approvisionnements normaux de mil, de sorgho et de maïs qui devraient normalement se faire du Nigeria vers le Niger à partir de mars/avril, se sont révélés complètement réduits ou souvent absents privant ainsi les ménages du Niger d’un approvisionnement régulier de céréales bon marché qui leur arrivait chaque année progressivement en fonction de leur demande qui augmente au fur et à mesure que leurs stocks s’épuisent .

Schéma 2 : Cartes des bassins de commercialisation en Afrique de l’ouest

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Les figures 1a, 2a, 3a et leurs anomalies respectives par rapport à la moyenne 1b, 2b, 3b, montrent après août 2012 une inversion du différentiel des prix des céréales entre le bassin Est et le bassin central suite aux bonnes récoltes engrangées dans le bassin central. Les anomalies des prix observés par rapport à leur niveau moyen des cinq dernières années, montrent aussi la situation atypique du bassin Est où les prix continuent à être plus haut que la moyenne des cinq dernières années tandis qu’ils continuent à s’approcher de cette moyenne dans le bassin central. Dans le cas du mil, les prix observés en avril 2013 dans le bassin central, sont même devenus plus bas que la moyenne des cinq dernières années (figure 2b).

Ces évolutions des prix ont conduit à des comportements atypiques (car pas habituels) mais normaux sur le plan commercial (exploitation du meilleur différentiel des prix).

Schéma 3 : Prix du mil, maïs et sorgho et leurs anomalies

Figure 1a : Prix du maïs par bassin Figure 2a : Prix du mil par bassin Figure 3a : Prix du sorgho par bassin

Figure 1b : Anomalie du prix du maïs comparé à la moyenne des cinq dernières années

Figure 2b : Anomalie du prix du mil comparé à la moyenne des cinq dernières années

Figure 3b : Anomalie du prix du sorgho comparé à la moyenne des cinq dernières années

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La hausse des prix au Bénin et au Nigeria s’est étendue au Niger avec tous les risques de pénuries sur les marchés du centre et de l’est du pays qui sont naturellement approvisionnés par le Nigeria. Cette situation a obligé les commerçants du Niger à s’orienter vers le Burkina Faso, le Mali, le Ghana et la Côte d’Ivoire pour s’approvisionner en céréales à des prix plus bas que ceux observés au Bénin et au Nigeria.

Les stocks détenus par les ménages, les commerçants et les organismes d’intervention, principaux leviers pour éviter une crise de disponibilité et une flambé des prix dans le bassin Est

Pour éviter ou anticiper les conditions de reprises d’un fonctionnement atypique des marchés similaire à celui de 2005 avec toutes ses conséquences sur la sécurité alimentaires des ménages et la malnutrition, il est important d’évaluer les niveaux des stocks détenus par tous les acteurs afin de savoir s’ils seront suffisants pour garantir une accessibilité adéquate des céréales pour les ménages jusqu’aux prochaines récoltes.

C’est pour cela que, juste avant la période de soudure dans le Sahel, le CILSS, la FAO, le PAM, FEWS NET et plusieurs autres partenaires dont les systèmes nationaux d’information sur les marchés, ont entrepris une évaluation conjointe pour déterminer la capacité actuelle des stocks de céréales dans la région à satisfaire les augmentations prévues de la demande en céréales et tubercules, notamment dans les zones où les céréales du Nigeria constituent généralement une part importante du marché. Cette évaluation doit actualiser celle qui a été effectuée en janvier/février et estimer la disponibilité générale des céréales en déterminant les niveaux relatifs des stocks des ménages, des coopératives et des commerçants, par rapport à la moyenne. Les résultats permettront d’identifier les anomalies évidentes dans les niveaux des stocks, les pratiques en matière de l’offre et les achats, de même que les niveaux et délais de commercialisation des céréales, et d’apprécier par anticipation les changements de l’offre et de la demande.

II. Les principales hypothèses et leurs implications (repartir par zones touchées ou bassin de commercialisation)

L’évaluation conjointe menée par FEWS NET et ses partenaires en janvier –février 2013 et publiée en mai 2013, a révélé que les stocks de denrées alimentaires de base présents sur les marchés, étaient déjà en janvier 2013 inférieurs au niveau attendu au Nigeria, et que cette situation est susceptible d'affecter les marchés locaux et régionaux dans le Sahel à partir de mars 2013 tout en persistant jusqu’à la fin de la période de soudure en Septembre. Pour améliorer l’équilibre précaire des marchés, un approvisionnement alimentaire régional est nécessaire par les interventions humanitaires qui doivent être effectuées avec beaucoup de précaution. Cela est d’autant plus nécessaire vu le dysfonctionnement du commerce des produits alimentaires au Nigeria et le contexte de grande incertitude en raison d'importantes inondations, des restrictions commerciales

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et les politiques de prix des carburants qui pourraient changer radicalement à tout moment dans les prochaines mois .

Bien que la demande de céréales des ménages pour leur sécurité alimentaire, sera plus ou moins normale dans le Sahel, il était anticipé que les prix des aliments de base allaient épouser une tendance à la hausse pendant l'année de consommation 2012/13. Quatre sous-espaces d’évolution de ces prix ont été identifiés :

Dans le bassin Est : des tensions importantes prévues sur les marchés avec des prix élevés excepté au Tchad. Il regroupe les sous espaces 1 et 2 composés de zones déjà touchées ou en voie de l’être dans les prochains mois :

- Sous espace 1 – correspondant aux zones qui sont déjà affectées en mars 2013. Il s’agit des marchés de céréales dans le nord du Nigeria, le nord du Bénin, sud-est du Niger, et les marchés de bétail dans le sud-ouest du Tchad. Dans ces zones, les prix du mil devraient augmenter plus rapidement que la tendance saisonnière typique. Les prix du maïs devraient suivre une tendance similaire, mais devait fortement diminuer en août avec la baisse de la demande pour l'alimentation des volailles à la fin de la période du Ramadan. Ainsi il était anticipé que les prix du mil culmineront en juillet à 9,017 NGN / kg à Kano, 294 FCFA / kg à Maradi, 350 FCFA à Tahoua, et 320 FCFA à Tillabéry tandis que les prix du maïs vont culminer à 7,935 NGN / kg à Kano, 220 FCFA à Bol, et 234 FCFA au Bénin. Les prix du maïs et du mil à Kano, au Nigeria, le plus grand marché dans le bassin Est et dans la sous-région, sont censés être au-dessus de leur niveau de juillet 2012 et les niveaux moyens sur cinq ans.

- Sous espace 2 qui regroupe les zones non encore affectées mais qui seront directement touchées dans les prochains mois, quand elles vont commencer, à partir d’avril 2013, à montrer des signes d'augmentation des prix atypiques. Ces zones devraient normalement commencer à s'appuyer davantage sur le Nigeria pour les importations (Niger) mai à mi-septembre. Les prix des céréales dans ces zones, devaient connaitre de fortes hausses pour s’aligner avec ceux du sous espace 1 avec lesquels ils seront fortement liés.

Dans le bassin central : une forte pression de la demande du bassin Est a été anticipée avec un risque atypique d’augmentation des prix et d’interdiction de sortie de céréales. Ce bassin regroupe les sous espaces 3 et 4 qui seront indirectement ou faiblement affectés par la situation au Nigeria entre avril et septembre 2013 Il s’agit de :

- Sous espace 3 qui englobe les zones qui seront indirectement touchées, car elles constituent des sources atypiques d’approvisionnement pour les zones structurellement déficitaires de la région (vraisemblablement les zones de surplus du Burkina Faso et du sud du Mali). Ce sous espace comprend l'Ouest du Niger, les zones de l'Est du Burkina Faso limitrophes du Niger, les zones du sud du Mali qui bordent le Burkina Faso et le Niger, le Bénin, le Ghana et le Togo. L'ampleur attendue des tendances à la hausse des prix va varier selon les incitations commerciales (l'écart de prix moins les frais de transport et de transaction). Les flux commerciaux atypiques ont été observés depuis mars 2013 dans l'Ouest du Niger, avec le mil et le maïs en provenance du Mali et du Burkina Faso plutôt que du Nigeria ou du Bénin.

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- Sous espace 4 où l'impact attendu de la situation au Nigeria est considéré comme minime et les effets de perturbations prévues pour les achats institutionnels sont finis. Ces zones ne sont généralement pas aussi connectées aux systèmes de commercialisation des bassins Centre et Est. Elles comprennent le sud et l'ouest du Mali (Kayes), l’ouest du Burkina Faso, le Sénégal, la Mauritanie et d'autres pays côtiers (Libéria, Guinée et Sierra Leone). Dans ces zones, une évolution normale des prix a été anticipée.

III. Méthodologie

En vue de mieux comprendre les niveaux et la gestion des stocks au plan national et régional, le CILSS, FEWS NET, PAM, FAO, et SIMA Niger ont planifié et entrepris une évaluation rapide axée sur les principaux thèmes suivants : les quantités de stocks de céréales détenues et la manière dont elles sont gérées, l’évolution anticipée de la spéculation et du marché, le comportement actuel de commercialisation comparé à celui d’une année normale et les anomalies évidentes/probables qui pourraient être décelées dans les échanges et la commercialisation des céréales au plan régional, local et transfrontalier.

L’objectif global de l’étude rapide a porté sur l’évaluation des stocks de céréales afin de mieux comprendre la capacité des marchés nationaux et régionaux à répondre sur la base des stocks existants, à toute potentielle baisse ou une demande accélérée des consommateurs jusqu’à la fin de l’année de consommation. L’évaluation devra permettre également d’étudier les réponses ou réactions possibles des principaux détenteurs de stocks que sont les ménages, les commerçants et dans certains cas les communautés et aussi de savoir quelles interventions ou mesures doivent être prises pour éviter une baisse généralisée des disponibilités et une flambé des prix dans les zones plus susceptibles d’être affectées au cours de la période de soudure à venir (juin à septembre 2013).

L’évaluation rapide s’est déroulée du 5 au 12 juin 2013, selon 6 axes pour couvrir suffisamment d’acteurs, de marchés et de villages notamment l’ouest Niger-nord du Bénin, Burkina Faso, centre-est du Niger, nord du Nigeria et Tchad.

Au cours de la visite du terrain, les missions ont échangé avec les principaux acteurs des marchés à savoir les commerçants, les producteurs, les consommateurs, les agents en charge du suivi des marchés, les gestionnaires des stocks communautaires et les associations des commerçants. Elles ont aussi échangé avec les techniciens des Ministères de l’Agriculture, chargés du suivi et du contrôle phytosanitaire, Commerce intérieur et des personnes ressources. L’étude est principalement axée sur le Nigeria, le Niger, le Burkina Faso, le Bénin et le Tchad. Dans chaque pays, on a pris en compte les marchés internes en plus des marchés situés le long de la frontière avec le Nigeria qui jouent un rôle essentiel dans la région. Les équipes de l’évaluation sont divisées en cinq groupes, chacun étant axé sur un ensemble précis de marchés et de communautés de référence dans sa zone visitée.

Dans chaque zone visitée les équipes organisaient des focus groupes aux niveaux des marchés et des villages pour recueillir les informations générales relatives aux niveaux des stocks, le comportement actuel de l’offre et de la demande et leur évolution future, l’évolution des sources de revenus, les sources d’approvisionnement locales comme externes, l’évolution des prix et la capacité de déstockage au cours de la période de soudure. Après entretien avec le groupe, les chefs des marchés indiquaient les grands commerçants devant être interviewer et les chefs des villages faisaient la

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même chose pour indiquer les chefs de ménages très pauvres. Dans les villages où il existe des banques céréalières et autre organisation ou coopérative chargé de stockage, les responsables sont directement identifiés pour les interviews.

Des villages et des marchés situés le long de la route ont fait aussi l’objet de visite de manière à élargir l’évaluation et recueillir plus d’information.

Trois guides d’entretien sont développés afin de servir de supports de collecte de données auprès des commerçants, des communautés et des ménages.

IV. Les principales conclusions de l'évaluation et de leurs implications pour la disponibilité alimentaire et des prix dans les zones touchées (directement ou indirectement) par les anomalies de marché au Nigeria

IV. 1 Stock

a. Stocks dans le bassin Centre (Burkina Faso)

La bonne campagne agricole juin-septembre 2012 a permis de reconstituer les stocks commerçants et producteurs à un niveau moyen à supérieure à la moyenne en général dans le bassin Centre. Dans le cas du Burkina Faso, les stocks commerçants et producteurs sont au-dessus de la moyenne pour la période en raison de la bonne campagne agricole de 2012-2013. Pour les grossistes interviewés le niveau de stocks est d’environ deux fois plus élevé que celui d’une année normale.

b. Stocks dans le bassin Est

Les stocks aussi bien au niveau des ménages que des commerçants sont en général moyens avec des disparités selon les pays, ce qui n’est pas le cas au Nigéria où il a été observé une tendance à la baisse :

Au nord Benin, les stocks détenus par les producteurs sont jugés importants. En ce qui concerne les stocks commerçants, ils sont jugés globalement supérieurs à leur niveau habituel. Les principaux produits en stocks sont le maïs, le sorgho, le soja, le niébé, le gari et le voandzou. Selon certains acteurs interrogés, la mauvaise évaluation de la production agricole par les commerçants a entrainé une forte reconstitution des stocks en prévision d’une éventuelle crise alimentaire compte tenu de la hausse rapide des prix aux premiers trimestres. Avec le niveau actuel des stocks, les commerçants pensent qu’ils peuvent faire face à une demande extérieure en se basant sur leurs stocks et ceux des zones d’approvisionnement qu’ils ont jugée importants dans les grandes zones de production du Bénin comme le Borgou.

Au Nigeria, les niveaux des stocks sont généralement faibles par rapport à la moyenne pour le mil et le maïs au nord Nigéria auprès des commerçants en raison des pertes dues aux inondations liées à la production, des conflits, et des prix élevés sur les marchés à la récolte. Pour les ménages pauvres, les stocks couvrent seulement 4 mois cette année contrairement à la normale où ils peuvent atteindre 6 mois. La plupart de ces ménages ont déjà épuisés leurs stocks.

Au Niger, à l’ouest du pays, les stocks détenus actuellement par les paysans dans les régions visitées sont moyens à supérieurs à la moyenne à la faveur d’une bonne production agricole. Les stocks des ménages en cette période de juin varient de 1-4 mois de consommation contre 1 à 2 mois

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selon les paysans. En ce qui concerne les stocks commerçants, ils ont augmenté de 10 à 15 pourcent par rapport à leur niveau moyen. Ces stocks sont constitués de mil, sorgho, maïs et riz. Quant aux stocks communautaires, de l’avis des acteurs, leurs niveaux actuels sont inférieurs à la normale. Le prix élevé pendant la période de la reconstitution des stocks en octobre-décembre et la demande des collecteurs à un prix supérieur à celui qu’ils proposaient ne leur a pas permis d’atteindre le niveau d’approvisionnement qu’ils escomptaient.

Dans le reste du Niger, les stocks commerçants sont moyens. D’après les entretiens sur les principaux marchés visités de Zinder, Maradi et Tahoua, les grands commerçants estiment leurs capacités de réponse suffisantes pour faire face à une éventuelle augmentation de la demande à la faveur des achats effectués pendant la période de récolte ainsi que des possibilités de faire appel à leurs réseaux traditionnels de commerçants céréaliers au niveau de la région. Cependant à Diffa, les commerçants ne détiennent pas d’importants stocks en général. La plupart ont des partenaires au Nigéria voisin qui les approvisionnent en fonction de la demande locale sur les marchés. Toutefois, il faut noter que les commerçants dépendent fortement des marchés du nord-est Nigéria qui sont directement affectés par le conflit civile et l’état d’urgence d’où la lenteur dans le ravitaillement des céréales. Dans les villages visités, la plupart des stocks communautaires sont reconstitués à leur niveau optimal. En outre, la situation des stocks producteurs est comparable à la moyenne. Pour le cas de Tahoua, Maradi et Zinder 20 pourcent des producteurs sont estimés détenir des stocks céréaliers pouvant couvrir les besoins alimentaires au cours de la période de la soudure. 80 pourcent des ménages font recours aux marchés pour compléter leurs besoins de consommation. Cependant tirant les leçons des crises alimentaires des années passées, une partie de ces ménages intègrent une gestion rationnelle de leurs stocks en dégageant une quantité de céréales épargnées pour la consommation pendant la période de soudure et en continuant à acheter des petites quantités sur les marchés complétées par les produits horticoles. A Diffa les producteurs des villages visités qui possèdent de stocks céréaliers pouvant couvrir les besoins de la période de consommation sont estimés à 40 pourcent comme en année normale. D’après l’entretien avec les producteurs, près de 60 pourcent vont recourir aux marchés pour leurs achats au cours de la période de soudure. Toute augmentation des prix suite à un éventuel problème d’approvisionnement à partir du Nigéria, pourrait conduire à des difficultés d’accès aux céréales pour ces 60 pour cent des ménages.

Au Tchad, dans la zone soudanienne, les stocks producteurs et commerçants sont faibles par rapport à la normale. Les ménages dépendent en grande partie des achats sur le marché et aussi des filets communautaires comme en année normale. Dans la zone sahélienne, le niveau actuel des stocks producteurs, commerçants et communautaire est supérieur (10 à 20 pourcent) par rapport à une année normale.

IV. 2 Flux

a. Les flux dans le bassin Centre

Les échanges commerciaux se sont renforcés du Ghana et de la Côte-d’Ivoire vers le Burkina Faso pour satisfaire non seulement la demande interne du Burkina Faso qui est restée faible compte tenu du bon niveau des stocks familiaux, mais surtout la demande atypique externe vers le Niger.

b. Les flux dans le bassin Est

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Conformément aux résultats du rapport spécial d’avril de FEWS NET, les flux commerciaux atypiques ont persisté avec quelques inversions des flux commerciaux surtout pour le mil et le maïs en Afrique de l’ouest. La persistance du conflit civil au nord-est du Nigeria depuis un certain temps a conduit le gouvernement fédéral a décrété l’état d’urgence dans les Etats de Borno, Yobé et Adamawa en mai, ce qui a causé un ralentissement des flux des produits alimentaires et animaliers internes et externes.

Axe Bénin-Niger

En année normale, le Niger est la principale destination des céréales comme le maïs et le sorgho, en provenance du Bénin. Cependant, il a été noté une réduction des approvisionnements en maïs du Bénin vers le Niger au profit du Burkina Faso et du Mali à cause de la bonne disponibilité des céréales et du niveau des prix moins élevé dans ces deux pays. Le Niger continue à approvisionner le Bénin en niébé et en voandzou.

Axe Bénin-Nigéria

Les flux du maïs en destination du Nigéria à partir de Nikki, Kallalé et Ségbana sont en nette augmentation comparativement à une année normale due à la baisse de la production au Nigéria et des différentiels de prix favorables à l’exportation de Nikki vers le Nigeria.

Axe Nigeria-Tchad

A la faveur de la bonne production au Sahel tchadien d’une part et la fermeture de la frontière avec le Nigéria en lien avec l’insécurité civile, les flux de cette année sont très faibles. Par ailleurs, des sources d’approvisionnement atypiques ont été observées dans la partie soudanienne en provenance du Cameroun (Maroua) et de la République centrafricaine (Mini) en raison de la faiblesse de l’offre sur les marchés de la zone soudanienne. Ces flux concernent essentiellement le sorgho et le berbéré. Cependant, les inondations dans la zone soudanienne en 2012/2013 ont beaucoup affecté la production et maintenu les prix à un niveau élevé dépassant parfois le niveau des prix dans la zone sahélienne qui dépend habituellement des approvisionnements de la zone soudanienne. Cette situation a engendré de faibles différentiels de prix qui ne favorisent pas le commerce informel entre ces deux zones.

Axe Nigeria-Niger

De façon globale, les flux en provenance du Nigéria vers le Niger ont significativement baissé cette année comparativement à la normale surtout pour le mil et le maïs. En revanche pour le sorgho il a été observé une nette augmentation des importations du Nigéria vers le Niger en raison de la bonne production de décrue au Nigéria. Il a été également observé des flux atypiques des marchés secondaires comme Bakin-Birji et Guidiguir actuellement approvisionnés par le Nigéria en mil et sorgho vers les marchés d’Agadez et Tahoua. Les flux du Niger vers le Nigéria concernent en grande partie le niébé dont les échanges sont au ralentit en raison de la faible demande au Nigéria. Contrairement aux autres régions du Niger qui ont connu une inversion de flux, la région de Diffa continue à dépendre des importations de mil et de sorgho à partir du Nigeria en période de soudure. L'approvisionnement des marchés de sorgho au Nigeria a été supérieur à la moyenne à la fin mai et début juin grâce à la bonne production de la culture de décrue en avril-mai. Concernant les flux internes de sorgho, depuis que l’Etat d’urgence a été décrété au nord-est du Nigeria (Etats de Borno,

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Yobe et Adamawa), les flux commerciaux du nord-est qui est la principale zone de production vers les autres zones du nord du pays ont été négativement affectés.

c. Les flux Inter bassin

Les flux du maïs et de sorgho en provenance du Burkina Faso (marchés de Pouytenga, Ouagadougou et Namouno) sont en nette augmentation en destination du Niger. Il faut noter que certains flux de maïs quittent aussi le Ghana et la Côte d’Ivoire pour le Niger de façon régulière via le Burkina Faso. Au nord du Burkina Faso (marchés de Dori et de Seytenga) et du Mali, il est aussi noté des flux supérieurs à la normale de mil vers le marché de Tillabéry. L’intensification des flux en provenance du bassin Centre a entrainé l’inversion des flux au niveau du Niger. En effet on observe des flux atypiques de maïs de Niamey vers Zinder, Maradi et Tahoua.

Schéma 4 : Carte simplifiée des flux commerciaux de maïs en Afrique de l’Ouest

Schéma 5 : Carte simplifiée des flux commerciaux de mil en Afrique de l’Ouest

Schéma 6 : Carte simplifiée des flux commerciaux de sorgho en Afrique de l’Ouest

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IV. 3 Demande

Comme anticipée en mai 2013, la demande au Sahel est restée globalement normale et souvent en baisse grâce aux stocks encore détenus par les ménages notamment producteurs. La demande du Nigeria est restée forte et toujours affectée par l’insécurité et le mauvais fonctionnement interne du marché.

a. La demande dans le bassin Centre

Au Burkina Faso, la demande sur les marchés pourrait être renforcée par les achats institutionnels déjà en cours de 31 000 tonnes de céréales par l’Etat à travers la SONAGESS (Société Nationale de Gestion du Stock de Sécurité Alimentaire) dans le cadre de la reconstitution du stock national de sécurité. Il faut noter que ces achats institutionnels qui interviennent normalement entre février-avril sont tardifs en 2013 et de ce fait ils peuvent être considérés comme atypiques pour cette période de l’année. Pour l’instant (juin 2013), ces opérations n’ont pas eu d’influence à la hausse sur les prix.

b. La demande dans le bassin Est

La plus forte demande a été beaucoup plus exprimée sur les marchés du bassin Est. Compte tenu du niveau élevé des prix dans le contexte de soudure et le manque de financement par les états en lien avec la mauvaise gestion du stock national de sécurité dans certains pays du bassin Est, les achats institutionnels sont timides. Toutefois, quelques appels d’offres internationaux sont lancés dans certains pays comme le Niger dans le cadre de la reconstitution du stock national de sécurité.

Au Benin, la demande en produits céréaliers est jugée faible par les commerçants qui signalent des méventes au niveau du maïs dans certaines localités comme Parakou où le stock commerçant est nettement supérieur à la normale. En revanche, dans la zone Nord, frontalière du Nigeria, la demande est de plus en plus forte comparativement à la normale. Environ, 200 à 600 tonnes de maïs sortent chaque jour du marché de Nikki en destination du Nigeria contre 100 à 300 en moyenne. Cette présence nigériane est également notée à Malanville où la demande du maïs en destination du Nigéria dépasserait actuellement les 2/3 des flux sortants contre moins du 1/5 en année normale en

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cette période de l’année. Il faut noter que cette forte demande du Nigéria sur les marchés du Bénin peut être satisfaite vu les stocks importants au Bénin cette année.

Au Nigeria, la demande des ménages est légèrement supérieure à la normale à cause de l’épuisement précoce de leurs stocks par rapport aux normes saisonnières en raison des effets des inondations qui ont beaucoup affecté leur production. Par ailleurs, les contraintes liées à la faiblesse du pouvoir d’achat limitent la pression de cette demande sur les marchés. La demande industrielle est globalement plus faible que la normale notamment pour le sorgho qui est utilisé dans la transformation. En effet, le sorgho entre beaucoup dans la fabrication des boissons locales qui sont vendues sur les lieux publiques. Avec le conflit civil, il y a moins de fréquentation dans les lieux publiques par les étrangers et les populations locales qui craignent d’être agressés ou pris pour des faiseurs de troubles. Ceci a contribué à faire baisser la demande en boissons locales, et a, en conséquence, engendré une baisse de la demande industrielle en sorgho. En revanche, la demande de maïs pour la production avicole est comparable à la moyenne.

A l’ouest du Niger, la demande en céréales telles que le mil et le maïs sur les marchés est relativement plus faible que celle de l’année passée à la même période à cause de la bonne production locale cette année et l’afflux des céréales sur ces marchés à partir du Burkina Faso, du Mali et du Bénin. Pour la plupart des marchés visités notamment : Torodi, Ayorou, Tera, Boureimi (Dosso), la demande est locale dans la grande majorité et concerne essentiellement les ménages qui reconstituent leurs stocks avant la période de soudure ou des ménages qui achètent du maïs sur le marché pour préserver leur mil pendant la période de soudure. Au niveau des marchés de Niamey, la demande est plus atypique mais également plus élevée que la normale. En effet, en plus de la demande habituellement de Niamey constituée des commerçants locaux détaillants et des régions de Dosso et de Tillabéry, elle est renforcée par les demandes venant des régions de Maradi pour le maïs, de Tahoua et de Konni pour le mil et le sorgho.

A Maradi, Zinder et Tahoua, la demande en mil est relativement faible compte tenu de sa substitution par le sorgho. A Diffa, la demande du maïs est relativement stable cette année à cause de la bonne production locale.

IV. 4 L’offre

Aucun évènement nouveau n’est venu s’ajouter pour perturber l’offre dans la région. Au contraire elle a connu une prédisposition à l’amélioration dans tous les bassins suite aux bonnes récoltes des cultures de décrues et de contre saison enregistrées entre janvier et mai 2013 au Nigeria, au Niger, au Tchad et au Burkina Faso. Cependant, l’augmentation de l’acuité de l’insécurité au nord du Nigeria, a coupé les zones de production d’avec les marchés et les zones de consommation, ce qui a continué à affaiblir l’offre sur les marchés du centre et du nord-est du Nigeria et ceux du centre et du sud-est du Niger.

a. L’offre dans le bassin Centre

Au Burkina Faso, comparativement à une année normale, les marchés sont bien approvisionnés en céréales. L’abondance des offres sur l’ensemble des marchés visités exerce une pression à la baisse des prix contrairement à une année normale. Aussi, la demande exceptionnelle du Niger force les commerçants burkinabé à augmenter les offres de céréales sur les marchés bien qu’une partie des

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stocks ait été constituée au moment où les prix étaient encore élevés à la collecte (en octobre-décembre les prix variaient entre 13 500 et 14 000 F CFA le sac de 100 kg de maïs blanc contre 12 500 à 13 500 F CFA actuellement).

b. L’offre dans le bassin Est

Au Benin, l’offre des produits agricoles est jugée globalement normale sur l’ensemble des marchés visités. Pour le maïs, l’offre est supérieure à celle de l’année passée et représente sur le marché plus de la moitié de l’offre céréalière. Ceci s’explique par le fait que les producteurs se sont lancés dans une vaste campagne de culture de maïs pour profiter de la hausse probable des prix. La demande (essentiellement nigérienne) étant en baisse, cela a bouleversé la situation, ce qui a conduit à une offre largement supérieure à la demande sur les marchés. Selon les commerçants enquêtés, à Parakou et Malanville, l’offre est nettement supérieure à la demande comparativement à la même période de l’année passée du fait d’une bonne production enregistrée dans les zones productrices du pays. Pour ce qui concerne le commerce des légumineuses (voandzou et Niébé), l’offre est en baisse d’environ 40 pourcent comparativement à l’année passée sur le marché de Malanville. Cette baisse est due à la faible demande causée par le niveau élevé des prix sur le marché. Les prix producteurs pour ces spéculations sont également jugés élevés par les commerçants. Ceci ne laisse pas beaucoup de marge bénéficiaire et réduit la présence des acheteurs du Ghana comparativement à l’année passée.

Au Nigeria, la production de riz irrigué du nord-ouest du pays a été inférieure à la moyenne à cause des inondations au cours de 2012/2013 notamment dans les états du Niger, Kebbi, Kano, Jigawa et sur les rives du Niger et de la Bénoué. L’approvisionnement du riz importé du marché international est normal. Toutefois, les restrictions commerciales sur le riz importé sont toujours en vigueur pour promouvoir la production locale au Nigéria. En raison du changement de la dynamique observé depuis 2009 dans la structure de production au profit du maïs, la production de mil a été en dessous de la moyenne. En effet les producteurs trouvent que le maïs a un rendement meilleur et une plus grande diversité d’utilisation que le mil, il est donc plus facile à écouler. En plus de la production locale de maïs, la hausse atypique des prix au Nigéria a amené les propriétaires des fermes avicoles à faire appel au marché régional principalement du Bénin et du Niger pour satisfaire leurs besoins, contrairement à une année normale.

A l’ouest du Niger, l’offre des céréales sur les marchés visités est jugée globalement moyenne à bonne comparée à une situation normale. Les céréales habituelles que sont le mil, le sorgho et le maïs sont disponibles. Les proportions observées sont jugées habituelles. A Maradi et Zinder, malgré l’existence d’un important potentiel en offre commerciale, la situation actuelle de l’offre observée est bonne. Toutefois, sur certains marchés ruraux comme Dan Isa à Maradi, les ménages à faibles revenus ont substitué le mil par le sorgho dont le prix est relativement plus abordable, du coup les approvisionnements se font au gré de la demande qui est plus forte pour le sorgho. A Tahoua, l’offre en mil et maïs sur les marchés est stable par rapport à une année normale grâce à la régularité des importations de ces deux produits à partir de nouvelles sources comme Niamey. Normalement, c’est le Nigéria qui approvisionne ces marchés en cette période de l’année, mais actuellement ils reçoivent les flux du Mali, Burkina Faso et Bénin. A Diffa, l’offre du mil est en baisse par rapport à une année normale avec des prix qui ont fortement augmenté sur les marchés sources du Nigéria comme Gashua, Geidam et Maiduguri. En revanche, l’offre du sorgho est en nette

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amélioration par rapport à une année normale compte tenu du faible niveau des prix à la source et d’une demande qui a augmenté du fait de la substitution du mil par le sorgho au niveau des ménages pauvres et très pauvres.

Au Tchad, sur les marchés situés dans la bande sahélienne du pays, l’offre est actuellement au-dessus de son niveau de l’année dernière et de la moyenne. En revanche, dans la bande soudanienne, l’offre sur les marchés visités a baissé d’environ 70 pourcent comparé à la normale pour le mil pénicillaire (appelé également petit mil) et le sorgho, à cause du déficit de production dans cette zone due aux inondations de la campagne hivernale 2012/2013. D’autre part, les méventes des oléagineux et du bétail sur les marchés frontaliers du Nigéria dues à la fermeture des frontières ont maintenu un niveau normal de disponibilité de ces produits sur les marchés locaux.

IV. 5 Prix

Le fonctionnement atypique du marché au Nigeria avec la faiblesse de l’offre qu’il a engendrée est la cause principale de l’augmentation des prix dans les sous-espaces 1 et 2 du bassin Est. Jusqu'en décembre 2012, les prix des céréales étaient restés élevés par rapport à leurs niveaux moyens sur cinq ans, mais ont suivi par la suite des tendances saisonnières respectivement normales. Mais à partir de janvier 2013, les conditions de commercialisation en cours au Nigeria ont commencé à faire pression sur les approvisionnements alimentaires de base au Niger et Bénin pour le maïs, le mil et les tubercules. La situation s’est fortement dégradée à partir de mars/avril 2013. Les commerçants nigériens ont de ce fait ralenti leur approvisionnement à partir du Benin alors que les commerçants de l’ouest du Niger se sont orientés vers le Burkina Faso, le Mali, le Ghana et la Côte d’Ivoire. Le Centre et l’Est du Niger continuent à dépendre de l’approvisionnent à partir du Nigeria, ce qui a engendré une hausse des prix et un mauvais approvisionnement sur certains marchés de ces zones. En effet, les commerçants de ces zones ont créé un partenariat économique durable avec ceux du Nigeria basé sur la confiance et plusieurs années d’expérience. Ils peuvent importer les céréales à partir du Nigeria et rembourser l’argent après la vente. Ce qui n’est pas le cas avec les commerçants du bassin Centre qui réclament le versement intégral de la somme avant livraison.

a. Les prix dans le bassin central

Le dynamisme d’échanges commerciaux dans le bassin Centre continue à maintenir l’équilibre des marchés et garder la stabilité des prix avec de légères baisses dues à une offre très satisfaisante, contrairement à la tendance saisonnière normale. En mai, le bassin enregistre les prix les moins élevés de maïs de la sous-région soit 122,5 CFA/kg à Namouno au Burkina Faso et 113,21 à Tamale au Ghana. Ainsi, contrairement à la tendance saisonnière habituellement marquée par une hausse des prix, on observe plutôt des niveaux de prix généralement en baisse ou stables en mai par rapport au mois d’avril et la même période de mai 2012 sur presque tous les marchés visités. Toutefois, les prix restent élevés par rapport à la moyenne quinquennale.

b. Les prix dans le bassin Est

En mai 2013, il était anticipé selon le rapport spécial de FEWS NET que les prix du mil culmineront en juillet à 9,017 NGN / kg à Kano, 294 FCFA / kg à Maradi, 350 FCFA à Tahoua, et 320 FCFA à Tillabéry tandis que les prix du maïs vont culminer à 7,935 NGN / kg à Kano, 220 FCFA à Bol, et 234 FCFA à Malanville. Les prix du maïs et du mil à Kano, au Nigeria, le plus grand marché dans le bassin Est et

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dans la sous-région, sont censés être au-dessus de leur niveau de juillet 2012 et les niveaux moyens sur cinq ans.

En juin 2013, les prix du mil sont de 9,000 NGN / kg à Kano, 282 FCFA / kg à Maradi, 304 FCFA à Tahoua, et 292 FCFA à Tillabéry tandis que les prix du maïs se situent à 8,500 NGN / kg à Kano, 163 FCFA à Bol, et 200 FCFA à Malanville.

Le niveau atteint par les prix en juin montre que la situation atypique haussière des prix se maintient au Nigeria, Niger et Benin où les prix continuent à être plus hauts que ceux de la soudure de l’année passée. Pour le maïs, le prix observé en juin 2013 à Kano est au-dessus du niveau anticipé de juillet 2013 et le niveau moyen sur cinq ans. Cela constitue un risque de hausse généralisée des prix sur les marchés du centre et de l’est du Niger qui sont naturellement approvisionnés par le Nigeria en cette période. Cela pourrait engendrer une baisse significative des approvisionnements et des difficultés d’accès aux aliments pour les pauvres et les très pauvres de la zone.

Au Nigéria, l’état d’urgence couplé au déficit de production qui est de 6 pourcent pour les céréales et les tubercules par rapport à la moyenne quinquennale suite aux inondations pendant la campagne précédente font maintenir la tendance haussière atypique des prix sur les marchés. En juin 2013, le prix du mil qui était de 9000 naira et celui du maïs de 8500 naira le sac de 100 kg sur le marché de Kano sont déjà élevés et supérieurs à leur niveau de la soudure de 2012. Ils présentent chacun 13 pourcent de hausse par rapport à mai 2013. Comparé à leur moyenne des cinq dernières années, ils sont en haussent de plus 40 pourcent. Cette situation s’est traduite par un faible différentiel de prix à l’exportation des céréales du Nigéria vers les pays du Sahel et qui n’incite pas les commerçants des régions productrices à approvisionner les zones structurellement déficitaires du sahel. Ces faibles écarts du différentiel ne favorisent pas la mise sur le marché de quantités importantes par les producteurs pour l’approvisionnement des villes sahéliennes. Au Bénin, les prix sont restés en général stables mais à un niveau élevé par rapport au mois passé sur tous les marchés visités notamment pour le maïs et le sorgho. Comparé à l’année passée de la même période le prix du sac de 100 kg de maïs est en hausse de 9 pourcent et celui du sorgho de 17 pourcent sur le marché de Malanville à cause de la forte demande du Nigeria sur le marché. En revanche à Parakou, le prix du sac de 110 kg de maïs est en baisse de 9 pourcent par rapport à la même période de 2012 due à la faiblesse de la demande des acteurs du Niger. Les flux importants en provenance du Burkina Faso vers le Niger a considérablement réduit la demande nigérienne sur les marchés du Benin. Selon les commerçants, le prix du maïs du Burkina Faso est plus bas que celui en provenance du Bénin.

Au Niger les prix des principales céréales sont stables mais à un niveau élevé comparés à avril 2013 et à la même période de l’année passée sur certains marchés. Toutefois des hausses des prix sont observées en mai 2013 à Zinder pour le sorgho de 15 pourcent et Maradi de 8 pourcent due à la forte demande en substitution du mil dont le prix est plus cher sur les marchés. La légère hausse de 5 pourcent pour le maïs à Maradi s’explique par la forte demande à l’exportation vers le Nigeria.

Au Tchad, dans la bande sahélienne, les prix des céréales sont restés stables au cours des trois derniers mois consécutifs. Ces prix qui se situent actuellement dans la bande entre 150-200FCFA /kg sont en dessous de ceux observés l’année dernière (300-400 FCFA/kg) et de l’année normale (200-250 FCFA/kg) à la même période. Dans la bande soudanienne en revanche, le faible approvisionnement des marchés doublé d’une demande soutenue des ménages suite à une baisse de la production agricole a entrainé une hausse des prix des céréales. A titre d’exemple, sur le

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marché de Sarh dans le Moyen Chari, le prix du sorgho a connu une hausse de 18 pourcent en juin 2013 comparé à son niveau de l’année dernière à la même période et 16 pourcent comparé à la moyenne quinquennale.

Schéma 7. Prix du mil en mai 2013 en Afrique de l’Ouest (XOF/kg)

Schéma 8. Prix du maïs en mai 2013 en Afrique de l’Ouest (XOF/kg)

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Schéma 9. Prix du sorgho en mai 2013 en Afrique de l’Ouest (XOF/kg)

V. Les perspectives pour le reste de l'année de consommation 2013.

L’insécurité et le mauvais fonctionnement des marchés au Nigeria continuent à être la pièce centrale du fonctionnement des marchés en Afrique de l’Ouest notamment dans les bassins central et Est. L’installation de la campagne agricole 2013/14 dans la région va avoir un effet catalyseur de la hausse des prix si elle n’est pas normale ou un effet atténuant si elle est normale.

a. Dans le bassin central

Les perspectives alimentaires sont bonnes pour la majorité des ménages du fait des disponibilités céréalières aussi bien dans les ménages que sur le marché. Par ailleurs, le déstockage des grands producteurs pourrait intervenir vers juillet-août 2013 si la campagne agricole s’installe normalement comme annoncée dans les prévisions saisonnières des pluies. A cela s’ajoutera l’offre potentielle dans certains pays du bassin comme le Mali, la Côte d’Ivoire et le Ghana qui avec des prix d’achat plus profitables vont augmenter la disponibilité sur les marché.

D’une manière générale, les prix du mil vont augmenter légèrement, conformément aux tendances saisonnières normales en août-septembre pour significativement baisser en novembre-décembre. Les prix du maïs et du sorgho resteront stables en août-septembre 2013 tout en restant proches ou légèrement supérieurs à la moyenne des cinq dernières années, puis ils baisseront conformément à la tendance normale en novembre-décembre 2013. Le prix du riz restera normalement stable par rapport à son niveau actuel jusqu'en décembre 2013.

Au Burkina Faso : le mécanisme d’appel offre restreint pour les achats institutionnels de 31 000 tonnes de céréales par l’Etat à travers la SONAGESS (Société Nationale de Gestion du Stock de Sécurité) dans le cadre de la reconstitution du stock national de sécurité pourrait permettre d’éviter

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une hausse atypique des prix sur les marchés locaux. Par ailleurs, les stocks commerçants et des organisations paysannes seront plus importants car on s’attend à une mise sur le marché des récoltes des grands producteurs courant juillet-août si la campagne agricole se déroule normalement.

b. Dans le bassin Est

Malgré un commencement tardif de la saison agricole dans certaines régions, les prévisions pluviométriques prévoient une année moyenne à supérieurs la moyenne avec des précipitations moyennes ou supérieures à la pluviométrie moyenne dans la région à l'exception du sud, du centre et le nord du Nigeria où il a été observé un retard d’installation de la campagne. Dans ces zones, des conditions moyennes sont attendus. Cela va retarder l’arrivée en juillet-août 2013 des productions de maïs et tubercules au centre et nord Nigeria. Ce qui pourrait exercer une pression à la hausse sur les prix qui continueront à augmenter jusqu’en septembre-octobre en affectant l’accessibilité des ménages pauvres au Nigeria ainsi que les flux vers le Niger et le Bénin. En novembre-décembre 2013, les prix pourraient se stabiliser mais à un niveau élevé et les flux internes et transfrontaliers des céréales sèches se feront faiblement. Cependant, les prix vont continuer à être élevés au centre et à l’est du Niger à cause des conditions de financement du commerce avec le Nigeria jusqu’en août-septembre. Ces zones vont continuer à être attachées à l’approvisionnement du Nigeria vu l’éloignement avec le bassin central et aussi à cause du partenariat économique durable avec ceux du Nigeria basé sur la confiance et plusieurs années d’expérience. Ils peuvent importer les céréales à partir du Nigeria et rembourser l’argent après la vente. Ce qui n’est pas le cas avec les commerçants du bassin Centre qui réclament le versement intégral de la somme avant livraison. A partir de novembre-décembre 2013 les prix pourraient légèrement baisser compte tenu de l’arrivée des récoltes.

Dans le reste du sahel, les prévisions montrent que la saison agropastorale sera normale à supérieure à la moyenne dans la plupart des pays. Une production moyenne à supérieure à la moyenne est attendue dans la région. Le retard dans le début de la saison ne va pas affecter le niveau de production, mais pourrait engendrer une période des récoltes un peu plus tardive que la période normale. Les marchés continueront à être bien approvisionnés jusqu’à la fin de la période de soudure à l’exception de ceux affectés par le dysfonctionnement des marchés au Nigéria et les marchés avoisinants qui dépendent de l’approvisionnement du Nigéria en période de soudure ainsi que les marchés de la bande soudanienne du Tchad affectés par les effets des inondations de l’année passée. Si la campagne agricole s’installe normalement, les besoins financiers liés aux dépenses pour supporter la campagne agricole pousseront les commerçants et les grands producteurs à déstocker une partie de leur réserve céréalière dans les zones où les stocks sont importants. On pourrait alors observer une amélioration des offres sur les marchés. Toutefois, avec la forte demande en céréales pendant le ramadan, la tendance des prix pourrait connaitre une stabilité voire une légère hausse en août-septembre 2013 avant d’évoluer vers la baisse généralisée sur la plupart des marchés en novembre-décembre 2013.

Cependant, le retard dans l’installation de la campagne agricole par rapport à la normale va engendrer un retard des récoltes au centre et nord Nigeria en octobre-novembre au lieu de septembre-octobre, ce qui pourrait créer une demande atypique qui pourrait maintenir les prix à un

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niveau élevé au Nigéria. Cette situation pourrait entrainer une inversion des flux des marchés sahéliens vers les marchés du Nigéria en septembre-octobre 2013 et empêcher les prix des céréales sur les marchés du sahel de baisser malgré les perspectives de production moyenne à supérieure à la moyenne.

Au Niger

A Diffa, avec l’installation effective de la campagne pastorale et la présence de plus en plus importante de bétail du Nigeria et du Tchad, il est à craindre une pression importante sur le pâturage et une hausse atypique de la demande céréalière sur les marchés locaux avec pour impact négatif la saturation autour des puits publics, les problèmes d’espace avec les agriculteurs et une hausse additionnelle des prix

En outre, l’insécurité persistante au Nigeria et l’afflux continue des refugiés (nigériens et nigérians) dans la région, pourrait entrainer un épuisement plus rapide des stocks des familles d’accueil mais également une plus grande pression de la demande sur les marchés céréaliers.

Au Bénin

Dans les mois à venir, les marchés continueront à être bien approvisionnés. Certains commerçants continueront à augmenter leurs stocks jusqu’en fin juillet à la faveur du bon niveau des stocks producteurs. Ces commerçants vont procéder aux déstockages avec l’installation effective de la campagne agricole pour faire face aux coûts inhérents aux travaux champêtres.

Selon les personnes enquêtées, le pic du prix du maïs serait atteint entre juillet et août et connaitre une baisse normale en octobre-novembre 2013 avec les nouvelles récoltes. Concernant le prix du sorgho, un pic pourrait être observé entre novembre-décembre et il pourrait ensuite suivre sa tendance saisonnière jusqu’à l’arrivée des nouvelles récoltes qui se font habituellement en janvier.

Au Nigeria

Il est attendu un niveau faible des stocks commerçants jusqu'à la fin de la période de soudure en septembre 2013 dans la plupart des régions du nord du Nigeria. La faiblesse des stocks des ménages continuera à être un problème jusqu’en août/septembre 2013. Dans l’Etat du Niger et les Etats du centre du pays, les ménages vont commencer à sortir de la période de soudure d’ici un mois (fin juin /juillet) en raison de la disponibilité d'aliments sauvages, et de cueillette. La disponibilité des produits en verts et les aliments de soudure seront plus importants dans les parties centrales et nord-ouest du pays. Toutefois, au cours du mois de Ramadan (10 juillet - 10 août en moyenne) une accalmie pourrait être observée concernant l’insécurité civile au nord du Nigéria, ce qui pourrait amener l’Etat à lever l’état d’urgence. Cela pourrait favoriser une fluidité des denrées alimentaires sur les marchés pour supporter la forte demande des ménages et faire baisser légèrement les des céréales prix au cours de cette période.

Au Tchad

Pendant la période de soudure et le Ramadan, les acteurs du marché dans la zone soudanienne seront confrontés à plusieurs difficultés notamment 1) des marchés disposant de faibles stocks, 2) la

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faible capacité d’approvisionnement en provenance des sources habituelles (Moundou et Sarh) ainsi que 3) la faible disponibilité ou l’inexistence de stocks communautaires. Sur le marché du bétail autour du Lac Tchad, malgré l’avènement du Ramadan et de la Tabaski qui feront augmenter la demande locale, les prix resteront légèrement en dessous de leur niveau saisonnier normal à cause des demandes provenant du Nigeria qui sont faibles comparées à la tendance saisonnière normale.

VI. Conclusions.

Il ressort de cette évaluation rapide qu’il y a une disponibilité en céréales moyenne à bonne sur la plupart des marchés des bassins Est et Centre, à l’exception de ceux du Nigéria où le niveau observé des prix en juin reste significativement élevé comparé à l’année passée et à la normale. Au Nigéria, la mauvaise production agricole et l’insécurité civile ont entrainé une faible disponibilité des céréales sur les marchés et sur les marchés de la bande soudanienne du Tchad durement affectés par les effets des inondations de l’année passée. Ces disponibilités sont essentiellement détenues sous forme de stocks par les producteurs et les commerçants. Il est important de souligner que les stocks des producteurs sont mobilisés et mis en marché normalement excepté au Nigeria ce qui, couplé avec la forte demande interne, justifie la faiblesse de l’offre sur ces marchés et les prix élevés au Nigeria. Cependant, des prix de maïs plus incitatifs sur les marchés du Burkina Faso ont favorisé l’intensification des importations à partir du Burkina Faso vers le Niger, contrairement aux années passées où ces importations sont plus important en provenance du Bénin. En outre, le mil en provenance du Burkina Faso et du Mali approvisionne actuellement le centre du Niger où il a remplacé les flux qui en année normale proviennent du Nigeria.

D’une manière générale, la situation alimentaire devrait rester stable de septembre à décembre 2013 dans la plupart des régions à la faveur des récoltes de 2012 moyennes à supérieure à la moyenne qui ont générées de bons niveaux de stocks aux ménages, bien que les prix des céréales soient restés supérieurs à la moyenne des cinq dernières années. Avec le début de la saison agricole dans plusieurs zones, les niveaux de salaire normal en lien avec les activités agricoles seront disponibles pour la plupart des ménages pauvres et très pauvres de la région.