Manuels 5429fr2 Complements 5532 FR2de Lp Ch1

download Manuels 5429fr2 Complements 5532 FR2de Lp Ch1

of 30

Transcript of Manuels 5429fr2 Complements 5532 FR2de Lp Ch1

Le roman et la

nouvelle au

e XIX

sicle : ralism

e et naturalism

e

1. Le roman au XIXe sicleGroupement 1

Le rel dans le roman raliste et naturaliste.......................... 7

. Zola, Germinal E Nouveaux hros, nouveaux espaces ....................................................................... 7 E. et J. de Goncourt, Germinie Lacerteux E Une posie naturaliste : le paysage............................... 8 Stendhal, Le Rouge et le Noir ; G. Flaubert, Lducation sentimentale E Sociologie des familles ..................................................... 9 H. de Balzac, Illusions perdues ; . Zola, LAssommoir E Enqutes sur les mtiers et les milieux professionnels .................................. 10 G. Flaubert, Madame Bovary ; H. de Balzac, La Cousine Bette E Discours rapports ................. 11 G. Flaubert, Lducation sentimentale ; . Zola, La Fortune des Rougon E Roman et histoire nationale .............................................................. 12

Groupement 2

Le roman damour lpreuve du ralisme............................ 13

H. de Balzac, Modeste Mignon ; L. Tolsto, La Guerre et la Paix E quoi rvent les jeunes lles ......................................................... 13 G. Flaubert, Madame Bovary ; C. Dickens, Olivier Twist E Satires du mariage ........................... 13 Stendhal, Le Rouge et le Noir ; G. de Maupassant, Bel-Ami E Rapports sociaux et sductions ......................................................... 14 G. Flaubert, Lducation sentimentale ; I. Tourgueniev, Premier amour E Survivances du romantisme ............................................................. 15 G. Flaubert, Lducation sentimentale E Cocottes et prostitues .................................................... 16 . Zola, La Bte humaine ; C. Boito, Senso E Sexualits ................................................................ 17

5

Lecture dune uvre H. de Balzac, Le Pre Goriot ................................................................ 18Extraits

Erreur de jeunesse ; La naissance de lambition E Des dbuts difciles ............................. 18 Le discours de Mme de Beausant ; Le discours de Vautrin E Initiateurs ......................... 20 Lenthousiasme du jeune homme ; Un nouveau regard sur les femmes E Lapprentissage de la vie ................................................. 21 Le bonheur ? ; Une comdie cruelle E Valeurs ....................................................................... 23

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Lenterrement du pre Goriot E La n dun apprentissage ........................................................... 24tude densemble .................................................................................................................................................... 26

Histoire littraire Histoire des arts Langue et criture Synthse

Lvolution du roman au XIXe sicle ................................................................. 31 Lart du portrait au XIXe sicle ........................................................................... 31 Les temps du rcit ............................................................................................... 32valuation ......................................................................................................... 34

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

Introduction au chapitreCe chapitre a dabord pour objet de familiariser les lves avec les notions de ralisme et de naturalisme. On passe en revue les thmatiques les plus rcurrentes du rcit raliste et naturaliste du XIXe sicle, et on insiste sur le fait que cette littrature fait toujours signe vers son contexte rel, en prcisant de quoi il sagit : lhistoire politique, les mutations socio-conomiques, idologiques et morales, langagires et scientiques, de la France du XIXe sicle. Il sagit galement de situer le roman raliste dans lhistoire de la ction, en montrant comment des thmes romanesques traditionnels (courage, comique, amour) sont traits par les romanciers ralistes. Enn, ce chapitre est une introduction ltude des formes narratives. On aborde les fonctions lmentaires de la fabrique du rcit (personnages, narrateurs, dcors), les moments essentiels du rcit (incipit, explicit, chute, scnes, sommaires, dialogues), les paramtres fondamentaux du style (scnario, scnographies, focalisation, nonciation, langue). De grands noms, franais ou trangers, sont proposs pour cette initiation aux romans ralistes et naturalistes : Honor de Balzac, mile Zola, Gustave Flaubert, Stendhal, Lon Tolsto, Charles Dickens. Ltude portant sur Le Pre Goriot introduit lunivers dun crivain majeur de la priode. Les extraits retenus pour cette Lecture dune uvre permettent de lenvisager comme un roman dapprentissage, en suivant les tapes de la formation de Rastignac. Les autres dimensions du roman sont abordes dans ltude densemble, notamment le ralisme et ltude des passions.

6

Indications bibliographiques Ren RMOND, Introduction lhistoire de notre temps, T. 2, Le XIXe sicle (1815-1914), Seuil, coll. Points , 1974. Francis DEMIER, La France du XIXe Sicle (1814-1914), Seuil, coll. Points-Histoire , 2000. Michel R AIMOND, Le Roman, Armand Colin, coll. Cursus , 2002. Pierre CHARTIER, Introduction aux grandes thories du roman, Armand Colin, coll. Lettres sup. , 2005. Vincent JOUVE, La Potique du roman, Armand Colin, coll. Campus , 2001.Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Anne-Marie L EFVRE, Honor de Balzac, Le Pre Goriot, Ellipses, coll. Rsonances , 1998. Pierre BARBERIS, Le Pre Goriot de Balzac, criture, structures, signications, Larousse, 1972. Emmanuel QUEROUIL , Le Pre Goriot et le roman dducation, Bordas, 1990.

1 GroupementLe rel dans le roman raliste et naturalisteNouveaux hros, nouveaux p. 18-19 espaces mile Zola, GerminalIl sagit de lincipit du roman. Le hros, encore anonyme, est en marche, la recherche dun travail, sur une route du pays minier dans le nord de la France. Ce texte nous plonge dans lunivers du roman naturaliste : thmes, techniques. une longue rtention dinformation, de la force la rvlation. Et pour cause : lobjet quon dcouvre a quelque chose de monstrueux et de sinistre. 6. On est un pronom personnel indni. Il implique videmment le personnage, mais aussi un reste, qui ne peut tre que le narrateur (le narrateur nest pas ici un personnage, mais est bien une subjectivit). Mais lusage de on a aussi pour fonction dimpliquer le lecteur, de solliciter son appareil perceptif. En ce sens, le point de vue change lgrement. Ce procd est extrmement frquent dans le roman raliste et naturaliste. 7. On pourra citer par exemple : des prols de trteaux gigantesques , cette apparition fantastique, noye de nuit et de fume , la respiration grosse et longue dun chappement de vapeur, quon ne voyait point . Dans ces expressions, absolument tous les termes peuvent faire lobjet dun commentaire. Le mot fosse est aussi, en lui-mme, inquitant et spectaculaire. On prendra garde en revanche dviter linutile recours des interprtations symboliques et dralisantes.7 mile Zola, dessin prparatoire la premire page de Germinal

Le dbut dun roman naturaliste1. Le personnage est un homme seul. Cest un ouvrier au chmage, sans logis et quasiment sans bagage, autrement dit sans bien. Il est pied, dans un pays qui ne lui est pas familier. Il est manifestement anim dune forte volont, qui lui fait affronter la souffrance du froid et de la fatigue. Cest ce qui constitue, pour le moment, son hrosme. 2. Le narrateur nous prive en effet de cette information essentielle (alors quil nous donne des toponymes). Cela conrme que le hros est un inconnu. Quil est sans attache. Cela contribue le rendre mystrieux (comme la nuit et le paysage industriel qui lentoure sont tranges). Cela cre enn une attente chez le lecteur : celle de savoir. 3. Il y a dabord les sensations physiques du personnage (la douleur et la gne). Il y a ensuite son tat desprit (la crainte, mais aussi lespoir et la dtermination). Quant aux penses, le narrateur spcie quil y en a peu en raison de la situation ( tte vide douvrier sans travail et sans gte ). Mais dun autre ct il le montre trs attentif son environnement. Le hros a cet gard les qualits dun pionnier. Pour la seconde partie de la question, les lves rpondront en comparant lexprience du personnage leur propre exprience de la vie et leur propre situation sociale.Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

8. On apprend que Zola prparait mticuleusement ses romans partir de documents (quil transcrivait dans des carnets de travail) et partir dbauches. On apprend surtout que ces prparatifs nimpliquaient pas seulement des textes, mais aussi des images. Et en particulier des cartes signiant quil se faisait une ide prcise de la topologie de son roman. On peut voir, sur le dessin, la route droite parcourue par le hros, et lon voit la fosse du Voreux.

Un espace et une scnographie4. On relvera les indications fournies par le premier paragraphe (notamment les dix kilomtres de pav coupant tout droit , labsence darbre, et toutes les caractristiques du plat pays ). Ces indications sont ralistes, mais leur traitement a quelque chose de potique (nuit, toiles, immensit, solitude de lhomme sur la terre et sous le ciel). Quelque chose de symbolique aussi : la route droite, mtaphore du chemin de la vie. 5. Lauteur retarde lexplication du lieu o lon se trouve, parce que le rcit est ici focalis : les informations qui nous sont donnes correspondent au champ de perception du personnage. Nous apprenons les choses en mme temps que lui. Lintrt est aussi de donner, aprs

9. On sappuiera sur divers lments, situs tout au long du texte, et qui ne sont pas exactement de mme nature. On pourra relier le rapport du spectaculaire du texte lambiance nocturne, au froid violent, ainsi quau mystre qui entoure le personnage et le paysage (en dpit ou cause du caractre parfaitement rel de celuici). On pourra aussi le relier la composition du texte : sa forte structuration (route droite, rigueur et homognit des informations, focalisation) prpare lapparition nale. Enn il faudra sintresser de prs cette apparition, en lenvisageant dun point de vue stylistique (mtaphores, adjectifs qualicatifs, usage du on , usage du mot fosse ) et aussi dun point de vue factuel : la fosse est en soi tout un programme narratif (descente sous la terre, charbon noir, feu souterrain, danger de mort) qui a un caractre formidable.

Groupement

1

Le rel dans le roman raliste et naturaliste

Une posie naturaliste : le paysage pages 20-21 Edmond et Jules de Goncourt,

Germinie LacerteuxCe texte raconte un moment de bonheur de la vie de lhrone, Germinie Lacerteux. Il sagit dune promenade, en compagnie de lhomme dont elle est amoureuse, aprs la barrire de Paris, au nord, en allant vers Saint-Ouen. Ce texte est dune trs grande qualit stylistique. Il permet de faire comprendre aux lves que le ralisme est compatible avec une certaine forme de posie , et mme, sur le plan formel, avec une forme de prose potique.

4. Oui, ces impressions peuvent tre attribues Germinie. Il y a un personnage focal dans ce rcit, et cest Germinie. Toutefois, il ne sagit pas ici de ce quon appelle souvent abusivement focalisation interne . Germinie est ici objective comme personnage et fait en ce sens partie du paysage. Dautre part, le narrateur sassocie clairement lenchantement de Germinie, et la qualit des notations (prcision, apprhension esthtique des phnomnes), est plutt les marques dun esthte. Le langage du narrateur, ici particulirement mis en valeur, nest pas celui de Germinie.

Les reprsentations du monde moderneCharles Marville, Des Gobelins Alsia, rue de lEssai Claude Monet, Impression, soleil levant

Une description pittoresque et humaniste1. Ce texte est la peinture en mouvement dun paysage anim (route, btiments, arbres, personnages, objets, horizon). Le texte a un intrt documentaire. Dabord parce que ce paysage a aujourdhui disparu, mais quon peut aisment le situer dans la gographie. On comprend quoi ressemblaient ces quartiers ouvriers de la priphrie de la capitale ; on comprend que la campagne tait beaucoup plus proche de Paris, etc. Ensuite parce quil nous montre les occupations des ouvriers parisiens prs de 50 % de la population lpoque le dimanche. 2. Cette question demande quon soit attentif la syntaxe. On remarque les inversions de lordre sujet/verbe, qui mettent en valeur les substantifs, les sries dexpansions du nom, qui mettent en n de priode des notations en valeur (exemple : les cailles dhutre l. 8, les branches dacacia l. 25-26). La n du dernier paragraphe, voquant lhorizon, est particulirement remarquable. On remarquera aussi, rciproquement, limpact des phrases brves (des indpendantes), porteuses de notations colores (le poteau vert l. 15 par exemple). On signalera enn le paragraphe 3, consacr une image unique (particulirement signicative ici du printemps et du dsir de Germinie). 3. Ici encore, la question est dordre stylistique. La symtrie de la premire phrase du texte est un bon point de dpart. Le balancement, au dbut de la phrase 3, peut tre signal aussi. On sera attentif aux assonances et aux allitrations, par exemple dans la remarquable phrase, ou des effets plus simples et nets (la rime intrieure l. 15 rverbre/poteau vert). Mais on peut aussi noter que certaines phrases fonctionnent par paires (exemple : les phrases 2 et 3 du second paragraphe, l. 15-16).

8

5. Oui, cette vue est un paysage, mariant btiments et vgtaux, orient vers un horizon. Ce paysage, bien que du sud de Paris, a un rapport avec ce que dcrivent les Goncourt. On peut noter la composition complexe de limage : rue oblique au loin, muret qui spare limage en deux, angle de vue qui fait quaucun btiment nest saisi de face, etc. Mais aussi ce qui la structure fortement : la srie des verticales, les branches noires parallles en haut gauche. Le lieu est dsert ce moment (un moment qui dure : les prises de vue sont longues cette poque), ce qui procure limage un caractre insolite. 6. Il sagit dun port industriel, dont on distingue les btiments et les machines. On distingue des chemines qui fument. Des barques noires contre-jour, et la bille rouge du soleil levant. Quant savoir si le peintre est prcis : oui, il lest, si lon considre, comme lui, quil rend compte dun moment, dune qualit de lumire et datmosphre. Il ne lest pas, si lon considre quil prend dlibrment le parti de faire ou et desquisser les formes.

7. Ces trois formes de reprsentation ont un point commun vident qui est lintrt pour les paysages et, plus particulirement, pour les paysages urbains ou priurbains et les activits humaines qui sy dploient. Ces trois formes artistiques sont lexpression dune tendance gnrale au ralisme. Mais chacune y participe avec ses propres moyens et en ce sens elles sont complmentaires. Le roman ne peut pas faire voir au sens strict du terme, la photo et la peinture ne peuvent pas raconter au sens strict du terme. Les couleurs de la peinture nappartiennent qu elle, de mme que celles de la photographie. Les moyens propres de ces trois arts complmentaires sont dailleurs des faons de draliser le paysage, et non seulement de nous documenter son sujet : le noir et blanc du

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

photographe, le coup de pinceau ou la touche du peintre, le style potique des crivains, sont trois manires complmentaires denchanter le monde. On peut aussi dire que ces formes dart communiquent. Les tches noires, presque immobiles, au loin , dans le texte des Goncourt, semblent anticiper lart de Monet, mais dans lensemble le texte des Goncourt se caractrise notamment par lart du dtail et mme du micro dtail, qui peut voquer la photographie. Chez Monet, lambiance bleute, le camaeu des bleus (avec le seul contraste, lhorizon et la verticale, du rose orang) ressemble, structurellement, au camaeu de gris de la photographie. Mais les remous de leau, lquilibre qui sinstaure entre les touches, les segments, les lignes, peuvent voquer lart du rythme des Goncourt.

sorte de couple, les oprations du second tant en quelque sorte greffes sur les activits du premier. 3. Sur le caractre des personnages, les interprtations et les jugements des lves seront ncessairement variables, et galement lgitimes, du moins pass un certain niveau dacceptabilit. Mais la question vise surtout reprendre le thme de la focalisation. Le personnage focal est Julien et cest par cette procdure que les autres personnages nous sont montrs. Julien apparat ainsi lui-mme comme un personnage rchi et comme un jugeur tous azimuts. Il fait par ailleurs lobjet dune allusion du marquis, qui signale que Julien fait des fautes dorthographe. Le dialogue est donc aussi un vecteur dinformation au sujet des personnages. Le complexe dinfriorit sociale de Julien, qui dbouche sur un vif ressentiment (le texte parle mme de haine), transparat galement dans ce passage. On notera en particulier les marques de sa vive admiration pour Norbert, suscite par des dtails matriels, ainsi que les lignes 24-25. 4. On peut aborder en particulier la question des rapports ambivalents de Julien avec Mathilde, et plus gnralement avec les femmes, en se penchant sur les lignes 11-19. Les interprtations des lves varieront suivant quils seront plus ou moins psychologues, ou plus ou moins expriments. Le fait que Julien compare Mathilde la femme quil a aime lui confre en tout cas une singulire importance. Et le rejet peut signier, en creux, une attirance.

Sociologie des familles Gustave Flaubert,

p. 22-23

Stendhal, Le Rouge et le Noir

Lducation sentimentaleCes deux textes ont un point commun : ils montrent un jeune hros, un provincial, dcouvrant un lieu parisien, un espace priv, qui se trouve tre en plus la maison dune femme quil aime (pour Frdric) ou va aimer (pour Julien). Ces scnes sont typiques du roman dapprentissage. Elles sont aussi propres faire comprendre la notion de focalisation. Enn, par la composition et par la thmatique sociologique tude des comportements, des discours, des liens familiaux, des objets elles sont typiques de lesthtique raliste.

9

Un intrieur bourgeois [2e TEXTE]5. Il sagit de reprer lensemble des objets et des lments dcoratifs qui ne sont pas franais. Jusquau dtail vestimentaire de la bourse algrienne (l. 24). On pourra rappeler que lhistoire se passe la n des annes 1840, alors que la conqute de lAlgrie se termine. Paralllement, on pourra faire remarquer des lments plus traditionnellement franais et bourgeois (le vin la cave, la causeuse, la table ouvrage). Les Arnoux sont peu prs lquivalent de ce quon appelle aujourdhui les bobos . Ce texte est loccasion dune recherche lexicale ou de manire plus approfondie sur le mobilier et le design au XIXe sicle. La rponse la deuxime sous-question peut tre le point de dpart dune activit dcriture. 6. Ici encore le hros est le personnage focal. Frdric dcouvre lappartement de la femme quil aime. Le luxe des matires, la chaleur du feu, lharmonie des couleurs, les lumires, loriginalit des objets sont en soi pourvoyeurs de sensations douces. Certains dtails sont plus importants que dautres (la chemine). On se trouve dans un espace principalement habit par des objets fminins. Ils disposent aussi le jeune amoureux la rverie parce quils sont les traces de la prsence de Mme Arnoux (l. 18-20), et les marques de son bon got. partir des objets, Flaubert nous introduit dans lunivers dune famille aise et heureuse.

Le point de vue de Julien [1er TEXTE]1. Julien assiste au dner de la famille de son employeur, le marquis de La Mole. Il observe, il coute et il juge. Pour la seconde partie de la question, on peut relever par exemple : semblrent Julien (l. 1). Il le trouva charmant (l. 8), il aperut (l. 9), etc. 2. On peut hsiter, sans doute, en raison de la structure de la phrase. Lindpendante est place dans la continuit de celle qui a pour noyau lexpression semblrent Julien , donc une certaine logique peut attribuer cette pense Julien. Mais la vraisemblance attribue plutt cette maxime au narrateur : Julien dcouvre tout juste Paris et ne peut encore former ce type de jugement. Cette question est loccasion de montrer que lnonciation dans un roman est quelquefois ambigu, que lattribution des phrases nest pas toujours vidente, et que, chez Stendhal en particulier, le personnage et le narrateur forment une

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Groupement

1

Le rel dans le roman raliste et naturaliste

tances sont variables . Lousteau met en doute lauthenticit du discours de Finot (l. 25). 7. On apprend peu de choses sur la relation entre Frdric et M. Arnoux. Il disparat, puis rapparat discrtement la n du passage. Cela est assez signicatif et mrite dtre not. Le second paragraphe montre que Frdric est sensible la fminit de Mlle Marthe, et elle lui. On voit que lenfant est dj habille et coiffe comme une femme (les dtails vestimentaires luxueux et sensuels, sagissant des deux personnages fminins, prennent une grande importance dans ce texte). Le sentiment quprouve Frdric lgard de lenfant est admiratif. Comme souvent, ce personnage est peu caractris (ni action, ni paroles, ni description physique) : ce sont les autres personnages qui le signient comme en miroir (cf. notamment les lignes 10-12). Cet intermde avec lenfant retarde et prpare en mme temps lapparition de Mme Arnoux (on pourra comparer ce texte sa premire apparition sur le bateau, au premier chapitre du roman). La description est extrmement sensuelle et laisse percevoir le dsir de Frdric. La mise en scne du personnage (mergeant de lombre) favorise cette interprtation. Le fait que le corps de Mme Arnoux reste dans lombre ne diminue pas lintensit de sa prsence, au contraire.10

3. Les personnages sont lis par une uvre commune et, en principe, par des opinions communes. Ils sont aussi lis par les alliances quils forment les uns avec les autres et contre les autres, sur le modle de lalliance Finot/Lucien. 4. Il sagit ici dapprocher les manires de parler de Finot. Au dbut du passage, beaucoup de prescriptions ( Lucien), une attitude suprieure et en mme temps complice, dans le secret ; beaucoup dnergie, beaucoup de petites phrases vives qui sadditionnent, et, on peut le supposer, un grand dbit. Attitude typique dun homme de pouvoir, qui a besoin de lieutenants et qui fait sa carrire en conduisant celle des autres. Il convient de souligner le caractre trop dmonstratif de sa harangue (l. 16-23), mais aussi lironie dont il fait preuve lgard de lui-mme, et la complicit quil entretient avec ses auditeurs sur la base dun sous-entendu ironique ( quoique mes opinions subissent une transformation ncessaire , l. 18 sous-entendu : en apparence, car je reste des vtres en ralit, et ce nest pas vous que je mens, mais aux autres). Finot est un comdien et il ne le cache pas, cest ce qui fait quil nest pas tout fait antipathique (voire pas du tout, selon les lecteurs). 5. Il est manifeste que le narrateur samuse : de son point de vue, Finot, Lousteau, Vignon, etc., sont des personnages amusants. Aucune notation ironique du narrateur, aucune censure morale non plus. Mais il faut galement souligner que ce texte est sans illusion aucune sur lhonntet des journalistes ici reprsents. On peut se reporter la vie de Balzac rsume pages 42-43 et insister sur le fait que Balzac lui-mme a volu dans le monde de la presse parisienne de cette poque.

Enqute sur les mtiers et les milieux p. 24-25 professionnels Honor de Balzac, Illusions perdues mile Zola, LAssommoirCes textes sont exemplaires du caractre documentaire de la littrature raliste et naturaliste. Ils permettent de mettre en exergue la prcision du roman raliste et son attention lmergence de la modernit et des murs nouvelles.Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Une ne quipe [2e TEXTE]6. Ces femmes sont des ouvrires qui confectionnent de petits accessoires dcoratifs, des eurs articielles. Zola voque, sur la table de latelier, leurs outils et les divers matriaux quelles travaillent. Le texte explique comment la journe commence ; il montre galement que toutes les ouvrires travaillent la mme table et comment elles se disposent. On apprend quil fait trs chaud dans latelier. Le petit dtail de la eur dans un pot (l. 17 sq) est intressant : le lieu de travail est lui-mme agrment dune vraie eur, comme une maison particulire : les ouvrires sapproprient ainsi un peu cet espace. 7. Les ouvrires ont pour tutrice Mme Lerat, qui est ellemme ouvrire mais semble avoir aussi les fonctions dun contrematre (sans doute en raison de son anciennet et de son srieux). Les autres ouvrires sont manifestement plus jeunes, Nana, par exemple, tant une adolescente qui vit chez ses parents. Enn il y a la patronne, dont lapproche inspire de la mance. Lattitude des ouvrires se caractrise par une certaine dissipation. La tendance est darriver den retard. La

Une tude de murs [1er TEXTE]1. Finot est le directeur de rdaction dun journal. Il prend le hros sous son aile, noue une relation privilgie avec lui et le lance dans la carrire de journaliste. Cest pourquoi le hros est heureux. 2. Oui, dautres lments conrment la maxime de Finot. Par exemple les recommandations de Finot au dbut du passage, ou sa prise de parole (l. 7). Se faire discret, prendre la place sans en avoir lair, telle est la morale de Finot. Ce patronyme lui-mme est signicatif. Enn, Finot annonce la n du passage quil passe lennemi en faisant simplement remarquer que les circons-

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

bonne humeur et une certaine forme de provocation sont de mise. Nanmoins, le travail est fait et lautorit de Mme Lerat nest pas mise en cause. Les biensances, dont Mme Lerat se porte garante, sont contournes par les jeunes ouvrires : on notera le commrage tendancieux (l. 20-23) et mme lallusion sexuelle (l. 26). 8. Nana est clairement la moins srieuse et la plus frondeuse de toutes (l. 4-5 ; l. 26). Elle est ambitieuse, ou ironique (l. 6-7). Elle est gouailleuse. Elle manque de respect envers son pre (l. 31-32) on pourra noter ici le discours indirect libre. Le jugement du narrateur nest pas marqu.

situation dYonville avec les pays tropicaux, etc. Ce cuistre dit nimporte quoi sur un ton magistral. 2. Emma et Lon alignent les lieux communs. On relvera en particulier les soleils couchants, la mer lie aux ides dlvation spirituelle et dinni. Leur conversation est un produit driv du romantisme, et dun romantisme luimme caricatural. Leur dialogue est structur comme une liste : ils passent en revue lun aprs lautre les clichs qui sont le fond de leur pense. Il sagit de deux tres sensibles, sans doute, mais pas desprits originaux. 3. La construction de la phrase trs longue, avec ses pauses, ses reprises, ses enchanements laborieux, sa ponctuation forte et souvent redouble (qui pourrait signier des pauses, des attitudes thtrales, des gestes), participe du comique. Homais parle en propritaire, dont la science justie quil tende tout lenvironnement son dsir de matrise, et non en scientique. En ce sens, il fait un discours qui le met en valeur et qui en impose son auditoire, quelque chose comme un mauvais cours, au lieu de faire la conversation aux nouveaux venus, dans un esprit hospitalier.

9. Il sagit, pour les lves, de sapproprier le style de cette scne : brefs rcits dactions, brves descriptions, brves prises de paroles, le tout nement entrelac. Il sagit aussi de fabriquer un court rcit impliquant plus de trois personnages : de mettre en scne un groupe. Enn, il sagit de faire une scne raliste, comportant des indications prcises et pertinentes sur la vie de ce groupe et sur son activit. Ce lieu peut tre le lyce lui-mme.

Un grossier personnage [2e TEXTE]4. M. Crevel parle avec condescendance cette femme qui a besoin de lui. Il la dsigne par des termes qui la rabaissent ( mon enfant , dont le caractre abusif est soulign par lauteur laide des italiques, ma petite mre ). Il abuse galement de mots tendres ( cher ange ), quil ne devrait pas sautoriser. Il est humiliant, en lui faisant la leon, et en lui signiant quil la croit sotte (l. 10-11). Enn il est vulgaire, parce quil manifeste sans vergogne son avarice. 5. Sa faon de sadresser Mme Hulot est malsante et en ce sens malhonnte. Mais son discours est franc, dit carrment les choses, est honnte en ce sens. 6. M. Crevel dit en substance que largent gouverne le monde, cest--dire, que les hommes sont mus dabord par des intrts dargent. Au sujet de Louis-Philippe et de la monarchie de Juillet, Balzac dit la mme chose que Stendhal dans Lucien Leuwen. Il semble clair quil accorde du crdit la leon de M. Crevel. On ne dnote aucune erreur logique dans ce discours, qui va au contraire remarquablement droit ses conclusions. 7. La familiarit vulgaire, limpudence, lautosatisfaction, la vanit de Crevel, en bref lnormit et le caractre ostentatoire de ses dfauts, font de Crevel un personnage comique, presque farcesque. Mais cest aussi son inventivit rhtorique qui fait rire (en particulier l. 15-21), son lexique familier, peut-tre dessein ( tripote ), laccumulation des adjectifs qui consacrent la pice de cent sous, le mode de dsignation de la banque (l. 12-13). Cest un discours haut en couleur, amusant et curant la fois.11

Discours rapports

p. 26-27

Gustave Flaubert, Madame Bovary Honor de Balzac, La Cousine BetteCes deux textes mettent en scne des bourgeois et ont un caractre satirique. Ils permettent de travailler la question du discours rapport ainsi que la thtralit du roman raliste.

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Sottises et ides reues [1er TEXTE]1. Lexplication fournie par Homais nest, de toute vidence, pas scientiquement valable et il a tout lair dtre un imbcile. Mais il ne semble pas quil fasse cet effet sur son auditoire bien au contraire ce qui contribue au comique. Linutilit et la superuit de certaines prcisions (la conversation des degrs Raumur en degrs Fahrenheit par exemple) est la marque du pdantisme de M. Homais. Le rapport de cause effet tabli par le pharmacien entre les exhalaisons de la rivire et des btes (les pets de vaches tant comiquement rapports leur composition chimique) et le climat est loufoque. Extension farfelue de la climatologie et de la chimie des gaz. De mme lide que les vents se rafraichissent en passant au-dessus de la Seine, la comparaison de la

Groupement

1

Le rel dans le roman raliste et naturaliste

8. Les lves pourront saider du questionnaire pour traiter cette question.

De faon plus anecdotique, le pre Roque se sent investi dune autorit naturelle et personnelle, et ne tolre pas quon lui tienne tte. 3. Il sagit de la cervelle du jeune homme. La souffrance des prisonniers, labjection (l. 14) laquelle ils sont condamns, mais aussi le caractre impitoyable des gardes nationaux (l. 1) et lignominie du pre Roque, sont les autres aspects effrayants de la scne.

Roman et histoire nationale Gustave Flaubert,

p. 28-29

Lenthousiasme dmocratique [2e TEXTE]4. Les lves doivent tre capables dvoquer la Rvolution franaise et, en particulier, lpisode de la leve en masse, en 1792, dune arme populaire franaise contre les armes trangres. Il sagit dun chant patriotique et rpublicain. Les insurgs de dcembre 1851 sinscrivent dans cette tradition politique. Ils sont eux-mmes provenaux, comme les bataillons marseillais qui chantrent les premiers La Marseillaise en 1792. 5. Le paysage en amphithtre fonctionne comme une caisse de rsonnance qui amplie le chant. Cela sajoute aux bruits de la rivire et de la cascade. On relvera la srie des mtaphores qui apparentent la nature ellemme un orchestre puissant et un chur. 6. partir de La route, devenue torrent (l. 3), le texte prend un tour mtaphorique. Lensemble des mtaphores dsignent des ux (deau, dhommes, de sons) et des vibrations qui se transmettent et se rpondent dobjets en objets. Des parties de la nature, puis la nature tout entire (la terre de France) prend le relai des hommes pour chanter le chant national. Le texte procde par accumulation (reprer par exemple la liste l. 13-15). Il avance aussi progressivement, accompagnant la marche des insurgs (l. 3-7). Cette progression peut tre dcoupe en phases successives, dont les limites sont marques : Quand les derniers bataillons apparurent (l. 6), Et la campagne endormie sveilla (l. 9-10), Alors ce ne fut plus (l. 12-13). On passe de la peau ( elle frissonna , l. 10) aux entrailles de la nature (l. 11). Enn, les segments de phrases sallongent au l du texte, lui donnant de plus en plus dampleur, de majest, et suggrant une amplitude sonore de plus en plus grande.

Lducation sentimentale mile Zola, La Fortune des RougonCes deux textes sont issus de romans qui ne se contentent pas dlire un cadre historique , mais qui cherchent raconter et analyser lhistoire. Les romanciers ralistes, travaillant partir de documents et denqutes, deviennent alors des sortes dhistoriens. Cest ce qui distingue fondamentalement leurs uvres des romans historiques dAlexandre Dumas par exemple. Ces deux textes en quelque sorte se rpondent : les vaincus de juin 1848 rapparaissant, dune certaine manire, sous laspect des rsistants de dcembre 1851.12

Lhorreur [1er TEXTE]1. Flaubert les a mis bout bout pour rendre clairement perceptible lignominie du pre Roque. 2. Le pre Roque assassine le jeune homme dabord parce que cest un ennemi de classe : il se venge, comme lindiquent les lignes 1 4, de la menace qua constitu pour ses biens, ses certitudes et son autorit de bourgeois lactivit des dmocrates-socialistes des dbuts de la Seconde Rpublique. Cette violence, dit le texte, fut particulirement celle des gardes nationaux qui navaient pas particip aux combats, mais qui tenaient dmontrer leur bravoure, comme dit ironiquement Flaubert ligne 9, aprs que le danger tait pass, en sacharnant sur les prisonniers. Il lassassine parce quil est habit de ce fanatisme des intrts dont il est question dans la partie du texte qui a t coupe l. 4. Le pre Roque assassine le jeune homme parce quil estime quil a droit de vie et de mort sur un homme qui, de toute manire, est condamn tre fusill : tout lui est permis sous luniforme, un fusil en main. Son mpris lgard du jeune homme est total et, de ce point de vue, il ne fait quexprimer lesprit gnral de cette rpression qui traite les hommes moins bien que des animaux 900 dans une cave parmi les excrments, la crasse et les cadavres (paragraphe prcdent le dbut de lextrait).

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

7. Il sagit en particulier de faire apparatre que le ralisme de Zola (bien quil se dsigne lui-mme comme un naturalisme et revendique son caractre scientique) est compatible avec un style mtaphorique et avec un grand lyrisme hrit du roman hugolien et plus gnralement du romantisme. Le roman aubertien constitue cet gard une rupture plus nette avec les styles de la premire moiti du XIXe sicle.

2 GroupementLe roman damour lpreuve du ralisme quoi rvent les jeunes fillestravail sur loralit (phrases inacheves, familiarits, exclamations, questions suspendues, approximations) ; la vitesse du rcit, qui est ente sur celle des personnages (vitesse des gestes, mouvements, paroles) et favorise par lellipse temporelle (l. 17-18) ; enn labondance et lintressante scnographie nonciative du monologue intrieur (l. 20-29), qui ddouble le personnage et fait entendre plusieurs voix, elles-mmes caractrises par cette oralit dcrite ci-dessus.

p. 31-32

Honor de Balzac, Modeste Mignon Lon Tolsto, La Guerre et la PaixCes deux textes mettent en scne des jeunes lles qui rvent lamour. Ils rendent compte des dispositions sentimentales de leur temps, ainsi que des murs familiales. Ils peignent tous deux des jeunes lles cultives, pratiquant les arts ; mais le statut du romantisme dans ces textes nest pas quivalent celui quil a dans Madame Bovary. On pourra les comparer aux pages de Flaubert sur la jeunesse dEmma : beaucoup moins ironiques, les textes de Balzac et de Tolsto ont encore un pied dans le romantisme.

Le danger de lire des romans [1er TEXTE]1. Modeste Mignon est malheureuse. Dune part en raison de sa situation familiale : elle a perdu sa sur, sa mre est aveugle, et stricte ; elle est bien garde ; elle sennuie dans sa maison (et dans sa province). Ensuite, ses lectures romantiques la disposent la mlancolie. 2. Le narrateur a une estime manifeste pour les auteurs romantiques franais et peut-tre surtout trangers. Le fait que Modeste Mignon soit plurilingue est intressant cet gard : il sagit dune personne de culture et dune culture complexe, cheval sur plusieurs aires culturelles. Le mot gnie (l. 25) nest pas vain sous la plume de Balzac, celui didal non plus. Il y croit, il en a, il pense quil est bon den avoir. Mais le terme d illusions , mme prcd du qualicatif belles (l. 31), est la marque du retournement opr par le scepticisme (enjou) de Balzac.Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

7. Ces deux gures de jeunes lles sont touchantes. Leurs sentiments, leurs rves, leurs illusions, leurs paradoxes (Balzac, l. 28-29), nous les rendent minemment sympathiques. Ils signient la jeunesse (on a ici, dans la tradition romantique, deux beaux textes sur ladolescence). Lhumour tient en particulier la reprsentation quelles se font des hommes et de leurs relations prsentes ou futures avec les hommes (Balzac, l. 10-12 ; Tolsto in extenso), et la perspective de la faute (Balzac, l. 7). Humour tendancieux, donc. Il tient galement la reprsentation de leurs excs (la mtaphore de lorage chez Balzac, la volubilit de Natacha chez Tolsto). Le personnage de Natacha, plus riche, est luimme dot dhumour et de grandes comptences pour le jeu et pour une sociabilit amusante. Les personnages de la mre et du pre sont eux aussi touchs par la grce de cet humour.

13

Satires du mariage Charles Dickens, Les Aventures dOliver Twist

p. 32-33

Gustave Flaubert, Madame Bovary

3. Ces deux expressions recouvrent des concepts importants aux yeux de Modeste Mignon et sans doute aussi de Balzac. 4. Les lves peuvent rpondre librement cette question, qui est moins faite pour tester leur sagacit que pour stimuler leur imagination.

tude de jeune lle [2e TEXTE]5. Natacha, la diffrence de Modeste, est heureuse en famille et point sujette, pour lors, linquitude. Elle mne une vie amusante et relativement libre. De plus elle est courtise, et par de jeunes aristocrates. Enn elle saime manifestement beaucoup elle-mme. 6. On retiendra en particulier les aspects suivants : lintrication des rcits et des prises de paroles ; le beau

Ces deux textes sont caractristiques de la veine satirique du roman raliste. Ils sattaquent tous deux linstitution du mariage. Mariage bourgeois dans le cas de Flaubert, tout petit bourgeois dans le cas de Dickens. La reprsentation du mariage et de ses prils est comme on sait un lieu commun du roman raliste (et dans une moindre mesure du roman naturaliste).

Un mnage bourgeois [1er TEXTE]1. Le couple Bovary est bien considr en raison de sa relative opulence et en raison des talents de madame.

Groupement

2

Le roman damour lpreuve du ralisme

2. Cette phrase vise la petite vanit du mari, que la possession dune femme aussi talentueuse et dsirable atte. Emma nprouve pas le mme sentiment. Cest notamment le dtail du foulard qui nous lapprend (l. 21-23) : elle veut rformer son mari. 3. Il sagit dimparfaits itratifs. Ils signient la rptition, donc lennui, voire la sottise. 4. Il sagit dune seule et unique phrase, trs linaire, de structure accumulative, qui montre avec quelle continuit et quelle rgularit Charles accomplit, chaque jour, les mmes actions pauvres de contenu (dire des choses dpourvus dun intrt spcial, manger, dormir). Les enchanements sont uides, dnotant une vie mcanique, homogne, dpourvue de fantaisie, et ne comportant aucun vnement, aucune hsitation, aucune intensit. Le dtail des ronements achve le tableau.

Rapports sociaux et sductions

p. 34-35

Stendhal, Le Rouge et le Noir Guy de Maupassant, Bel-AmiLes deux romans ont un rapport, mme si Georges Du Roy et Julien Sorel diffrent compltement. Dans les deux cas il sagit, notamment, du lieu commun de la carrire par les femmes (maries). Mais les deux textes contrastent fortement, le premier mettant en scne un amour vrai qui signore encore, le second une duperie.

Une scne de mnage [2e TEXTE]5. Pour les poux Bumble, le mariage est un contrat, sinon une affaire. Lun et lautre ont le sentiment (pour le lecteur comique) de stre fait rouler. 6. Les deux poux Bumble nont, ni lun ni lautre, strictement rien de dsirable. On peut les croire lorsquils se plaignent de leur conjoint. Mais on ne les plaint pas puisquon les trouve ridicules, trop chargs de dfauts physiques et moraux, et quon rit deux. En soi, ce dispositif est caractristique de la farce. Cette scne est un vif dialogue, et mme un face face, ce qui lui confre une certaine thtralit. Leur interaction est particulirement comique, puisquelle signe la dconture du mari, dont lautorit lgale (l. 33-36, le jeu sur le mot prrogative ) est mise en chec par la supriorit langagire, morale et mme physique de lpouse. Les excs de langage, les excs de la colre participent galement du registre farcesque. Enn, on peut signaler certains dtails : celui du ron ement par exemple, comme chez Flaubert (l. 29 et suivantes). 7. Le narrateur met des jugements ironiques sur les personnages ( son intressante pouse , l. 16-17), samuse ouvertement de leur situation, soit par ses commentaires ( mais le soupir il en disait long, ce soupir. , l. 8-9), soit par des modalisateurs ironiques ( tout hasard , l. 18), soit par des priphrases comiques ( ce son si inattendu , l. 27).

Lamour de Mme de Rnal [1er TEXTE]1. Ce sont notamment des dtails physiques qui font penser que Mme de Rnal est amoureuse. Trs proccupe par son apparence, elle se change souvent et raccourcit ses robes. On peut aussi noter quelle accomplit le plus rapidement possible un dsir, une suggestion de Julien (un chemin pour se promener ensemble), et se met son cole (l. 8-10), alors quil est son employ. Mais le bonheur lui-mme, la joie de vivre, lnergie, peuvent tre aussi interprts comme des manifestations de lamour, tout le moins du dsir. 2. Le parc, lt, le grand air, disposent au bonheur. Stendhal reprend ici un motif traditionnel, celui du jardin. Le motif du chemin est galement intressant, pour ce quil signie du bonheur dtre ensemble, et parce quil peut indiquer un but, un avenir, un chemin de vie. 3. La chasse aux papillons croise la thmatique typiquement stendhalienne de la chasse au bonheur . Lamour est frquemment et traditionnellement compar une chasse, en particulier chez les libertins, et Stendhal a repris cette ide. Mais les papillons sont tus et ceci peut tre lu comme un mauvais prsage (le narrateur insiste : les pauvres lpidoptres ). 4. Le narrateur met des jugements sur les personnages, et en particulier sur lhrone, des jugements quil peut fortement modaliser (l. 21), ou loger dans un simple adjectif ( barbare , l. 14, superbe , l. 22), ou dans une expression dveloppe (l. 24). On peroit de lironie dans le paragraphe nal, qui tient au fait que ces remarques ont un contenu sous-entendu, qui est rotique : Mme de Rnal est remplie de dsir pour Julien, Mme de Rnal est en train de tomber amoureuse ; et aussi celui-ci : Mme de Rnal sapprte fauter, elle a dj pass la limite du raisonnable. Le lecteur est cens comprendre ces signes, et se fait donc complice de lironie du narrateur.

14

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

8. Il est essentiel que les textes soient rdigs limparfait ( valeur itrative) et que, au lieu dinventer une scne, comme a fait Dickens ici, ils envisagent le quotidien des poux Bumble (les repas, les discussions sur des sujets matriels, les soires, les nuits, les dimanches).

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

Lamour de Mme Walter [2e TEXTE]5. Mme Walter a un rendez-vous amoureux avec un autre homme que son mari. Elle est donc en position de commettre une indlit et, la diffrence de Mme de Rnal, elle en est consciente. Autre diffrence, subsidiaire : elle en prouve du remords, et elle souffre. 6. Les personnages ont choisi ce lieu parce quil est discret, et parce quil est improbable. Mme Walter la choisi pour une autre raison, qui est quelle a besoin de se mettre sous la protection de Dieu et aussi, sans doute, de chercher son pardon. Mais en ralit le choix de cet endroit a un caractre blasphmatoire et cest de toute vidence, de la part de Maupassant, une provocation anticatholique. 7. Georges Du Roy fait une dclaration damour. Il a lintention de se faire passer pour ce quil nest pas : un homme sentimental, un homme aimant, un homme fragile aussi. Son attitude nest gure comparable celle de Julien Sorel de ce point de vue (dont lthos est plutt inverse : en position de faiblesse et dinfriorit, Julien est constamment la recherche dune position dominante). Lattitude de Georges Du Roy relve de limposture et de la manipulation. 8. Cette scne de dclaration damour ne comporte pas dlment sensuel parce quelle met aux prises une femme qui nest pas sensuelle et qui de plus est en souffrance, et un homme qui na pas damour et dont les paroles sonnent faux. La situation est cruelle.

vain. Entre eux circule une rose. Mais les deux couples sont trs diffrents lun de lautre. Si le personnage de Tourgueniev est le plus romantique des deux hros, la situation narrative ne lest pas tellement ; si la situation narrative, chez Flaubert, est romantique, le hros manque dtoffe.

Mlancolie aubertienne [1er TEXTE]1. Il sagit du jardin, du moment de lanne, de la rose (la seule du jardin) offerte Mme Arnoux. 2. Tout laisse penser quils saiment profondment. Et dailleurs ils se le disent, lun en donnant la rose, lautre en aspirant la eur et en ayant un regard aussi doux quun baiser (l. 20-21). 3. Il sagit de paroles de Mme Arnoux rapportes au discours indirect libre. 4. Les lves rpondent librement cette question.

Mystrieuse Zinada [2e TEXTE]5. Zinada fait leffet dune personne trouble, voire malade. On ne sait si elle ne se donne pas volontairement en spectacle. Durant lentretien elle est la fois tendre (l. 10), douce (l. 13), sductrice (la rose est dans ce cas-ci un accessoire de sduction) et fuyante, vasive (l. 25-26), et nalement dcevante, avec un zest de provocation (l. 30-31). Il sagit donc dune gure de jeune femme sduisante, jouant avec la piti dautrui, et dune tendresse vaguement suggestive. 6. Ce jardin nest pas, par consquent, le lieu du bonheur. Le thme, encore clbr chez Stendhal (p. 34), et mme chez Flaubert (en particulier dans le passage coup l. 1, p. 36), est ici dgrad. Aucun lment agrable ne vient de lenvironnement, pas mme la rose qui nalement sonne le glas des espoirs du hros. 7. Il sagit de lamour dun adolescent pour une personne plus ge et surtout plus exprimente que lui. Son intrt procde de ladmiration, de la commisration et de lloignement, du mystre. Il est soigneusement entretenu par la jeune femme (qui en ralit a une liaison avec le pre du jeune homme, linsu de celui-ci). Pour rpondre la seconde sous-question, on sera attentif aux formes de phrases (phrases inacheves, suspendues), leur caractre allusif ( Et vous serez de nouveau comme avant ? ), qui fait signe vers un pass heureux, aux notes de rgie caractrisant la voix du jeune homme (l. 24), qui appuie lexpression du regret, de la douleur (l. 24), et bien sr la dclaration damour (l. 27).

15

9. La question invite tudier le dcoupage du texte (brivet des paragraphes, rapidit des enchanements, varit du propos), le rythme des phrases, toujours assez brves, et variablement dcoupes : trois subordonnes (phrase 1), un complment rejet aprs virgule (phrase 2), la coordination de deux indpendantes (phrase 3), etc. Le rythme est toujours vif, mais vari, mlodieux. La question invite mettre en relation cet aspect stylistique du texte avec lallgresse des personnages (mouvements, changes, jeux, sductions).Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Survivances du romantisme Gustave Flaubert,

p. 36-37

Lducation sentimentale Ivan Tourgueniev, Premier amourCes deux textes ont plusieurs points communs (en dehors du fait quils sont peu prs contemporains et quils sont crits par deux amis). Un jeune homme se promne dans un jardin avec la femme quil aime en

8. On privilgiera deux axes. 1. La situation : lamour impossible, surtout en prsence de lenfant et de la bonne ; le jardin, triste en dpit du printemps ; les objets

Groupement

2

Le roman damour lpreuve du ralisme

la pelle feu qui voque les cendres, lunique rose ; le dpart et la solitude de Frdric. 2. Le dialogue, avec ses sentences tristes, ses rptitions, ses regrets, ses allusions un pass commun, qui construisent une histoire commune et sont le seul mode dexistence du couple, mais aussi les gestes et les regards qui accompagnent les paroles. NB. On pourra montrer aux lves La Fille la valise, lm de Valerio Zurlini (1960) avec Claudia Cardinale et Jacques Perrin, qui raconte une histoire proche de celle-ci.

3. La question ligne 13, tout fait idiote, signale lironie de Flaubert lgard du hros, de mme que la phrase Frdric le crut . Flaubert cherche ici provoquer le rire par un mot desprit. Ce monologue intrieur de Frdric, rapport au discours indirect libre, indique sa mauvaise foi. Il permet au lecteur de synthtiser la situation romanesque : Frdric chasse exclusivement sur les terres de M. Arnoux, sur un territoire quil na pas eu dcouvrir lui-mme.

Deux gurations de la prostitution parisienne

Cocottes et prostitues p. 38-39 Gustave Flaubert, Lducation

Gustave Manet, Olympia Henri de Toulouse-Lautrec, Au salon de la rue des Moulins

sentimentaleLe texte, assez suggestif (et plus encore la suite), raconte le dbut de la liaison entre Frdric Moreau et Rosanette, la Marchale , une femme entretenue, entre autres, par M. Arnoux et par Delmar, un acteur. Ce texte permet daborder lun des lieux communs du roman raliste et de la satire des murs bourgeoises, ce que Stendhal a appel la femme en deux volumes : le grand amour non consomm dune part et la cocotte dautre part.

16

Une scne burlesque1. La Marchale se comporte dentre de jeu en cocotte : gestes et paroles dune familiarit exagre et dune certaine vulgarit, contacts physiques, allusions sexuelles (et nancires) : je lai, je lai (l. 1), mais aussi prvenance exagre dune femme qui soccupe dun homme (l. 11), excitation physique et thtralisation de celle-ci (le baiser vraisemblablement sur la bouche monte sur un coussin, l. 9-10). Frdric commence par tre transparent, par se laisser conduire, tout en refusant de saisir la situation ( savoir quil est chez une femme entretenue et quil se trouve l pour des motifs sexuels, que les baisers ont pourtant dj en partie satisfaits). partir de la ligne 24, on voit Frdric traiter la Marchale carrment (l. 23). Le texte est allusif mais sans ambigut : quel que soit le geste exact, il caresse le postrieur de la Marchale. Il le fait de manire insistante et en faisant de ses ractions. Au paragraphe qui suit lextrait reproduit, il est dans son lit. 2. Les commentaires du narrateur (l. 18-21), qui prennent immdiatement le relai du monologue intrieur du personnage, en mettent en doute lhonntet et sont franchement pjoratifs : non seulement Frdric manque de bre, mais il est foncirement lche et de mauvaise foi.

4. Ce tableau a fait scandale parce quil est la reprsentation explicite dune jeune prostitue, dsigne par son nom (nom rel ou pseudonyme usage professionnel) et reprsente sur son lit. Il ne sagit ni dun nu acadmique, ni dun sujet mythologique (Vnus, nymphe, etc.), mais dune femme bien relle et dont la nudit est nettement sexualise ; il ne sagit pas non plus dune odalisque orientale, dune femme des colonies, mais dune femme blanche qui pourrait tre une Franaise (la prsence dune femme noire, quant elle habille, le souligne fortement). Dautre part cette jeune prostitue a pris la place de la desse Vnus, ce qui constitue une forme de dgradation. Olympia a ironiquement remplac la divinit olympienne. Le cadre, la scnographie, la gestuelle du Titien sont ici pastichs, au prot dun discours raliste et cru, qui renvoie aux bourgeois franais du XIXe sicle un miroir dsagrable. 5. Le regard dOlympia, droit dans les yeux du spectateur, sa pose pleine de ert, en dpit de sa nudit, la fausse pudeur de sa main gauche : tout cela est provocant provoque le dsir, de le dsir et de la moralit publique. 6. La construction du tableau de Manet est frontale. Les personnages sont dans un plan parallle celui du spectateur et tourns vers lui. Olympia est l tout entire, au centre de lattention. Les personnages de ToulouseLautrec habitent le fond de lespace (le premier plan tant vide), sont dans un plan oblique et tournent le dos au spectateur, pour certains dentre eux. Lune des six femmes est coupe. 7. On voit que ltablissement est luxueux : colonnes, pilastres, dorures, immenses canaps de velours, broderies, papiers peints, lumire. Le peintre, bien quil pratique un style proche de lesquisse, a t attentif rendre les matires, et en particulier les textiles. 8. Ces six femmes, loin dtre dans une attitude de d, ont lair las, fatigu. Il sagit manifestement dune pause dans leur journe. Elles-mmes ne semblent pas luxueuses, au contraire dOlympia qui prend grand soin de sa personne. Elles ne semblent pas non plus

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

particulirement jeunes. Le personnage coup droite est dans une attitude un peu obscne, mais sans intention de provoquer.

Le sexe et leffroi [1er TEXTE]1. Jacques vit le dsir sexuel sur un mode panique. Il en perd la matrise de soi. Il est obsd par lide du meurtre, cest--dire, il est habit du dsir de tuer la femme quil dsire possder. 2. On ne peut pas dire que Jacques est inhumain parce quil est conscient du mal dont il est atteint et parce quil en souffre. Il souhaite une vie normale et cette vie normale implique, ses yeux, une histoire damour. 3. On peut rassembler de nombreux lments pour rpondre cette question. Llment le plus spectaculaire est le corps dsirable de la jeune femme, au contact de la brutalit de Jacques. Les vtements arrachs et lapparition de la poitrine (l. 34-35) sont le point culminant du passage envisag sous cet angle. Zola met prcisment en scne le contact des corps et la frnsie des personnages. Il y a galement le spectacle de la folie de Jacques. Enn, les objets funestes (les cordes, les ciseaux).

9. Il sagit dune scne burlesque. Lessentiel tourne autour des gestes et des paroles de la Marchale (qui mne rondement et trs thtralement son entreprise) et de ses interactions trs piquantes avec Frdric. La n du texte est particulirement bouffonne (les deux personnages adoptant de concert le registre de la grivoiserie, de la gauloiserie, aprs en avoir essay quelques autres plus sentimentaux) ; mais le narrateur sanctionne ironiquement le dfaut de cette attitude (l. 35-36), qui ne dispose pas rellement au lit mais en tient lieu au contraire (lexpression motion srieuse dsignant ironiquement un lan un peu consistant de libido). Lincomptence de Frdric est en jeu dans cette scne. Il convient donc aussi de sintresser au point de vue, au monologue intrieur de Frdric (on sappuiera sur la rponse aux questions 2 et 3). Enn il faut voquer la prsence de Delmar, qui, aprs avoir peut-tre pass la nuit l et pris ses aises (assis son petit guridon), se voit tout coup tenir la chandelle. On pourra montrer que, en dpit de son caractre comique (voir question 1), Rosanette est aussi une gure de femme touchante (l. 2-4) et que cette scne, dans la mesure o elle constitue une tude de murs et un document sur la vie des cocottes et lattitude des hommes leur gard, possde un caractre srieux.

Une mise en scne de la sensualit [2e TEXTE]4. Leau, la nudit de lhrone, lexpression du dsir et la perspective trs explicite de lamour physique, confrent une grande sensualit ce texte. Le fait que cet endroit sappelle une sirne a pour ainsi dire une valeur programmatique. 5. Livia est une femme sensuelle et manifestement libre sur le plan sexuel. Elle est dote (et cest important dans lconomie du roman) dun fort amour delle-mme : elle se trouve belle et prend plaisir tre seule avec elle-mme. 6. Cet homme est sans nul doute celui quelle dsire, celui quelle attendait, le lieutenant Remigio. Elle est nue et le dsire, il lest presque et est venu pour lui faire lamour, lissue de cette rencontre absolument non fortuite ne fait aucun doute.17

Sexualits Camillo Boito, Senso

pages 40-41

mile Zola, La Bte humaine

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

Ces deux textes contrastent. Le premier est la marque dun intrt trs moderne pour la psychiatrie et pour la vie sexuelle au sens o la psychiatrie lentend. Le second se situe dans une tradition libertine qui remonte au XVIIe sicle. Mais tous deux montrent que, dans la seconde moiti du XIXe sicle, le roman peut voquer nouveau explicitement la sexualit quand, dans la premire moiti (en raction au libertinage du XVIIIe sicle), il se linterdisait.

7. Les lves doivent tre capables de proposer un dcoupage pertinent du texte et doivent comprendre correctement la notion dintensit : il sagit dintensit motionnelle (et plus particulirement sexuelle) et dintensit dramatique. lintensit du rapport sexuel sajoute celle du meurtre dans le dernier paragraphe.

e uvre Lecture dun

Honor de Balzac, Le Pre GoriotDes dbuts difficiles p. 44-45voir le jeune homme quitter les lieux. Ses paroles montrent son agacement, comme le souligne le verbe de parole scria-t-il , ainsi que la modalit exclamative Monsieur, vous auriez pu dire M. Goriot ! . Ici, sa premire raction souligne son mcontentement davoir entendu le mot pre dans la bouche de Rastignac. La comtesse montre moins clairement son agacement et tente de le dissimuler. Malgr ses efforts, de nombreux signes laissent percer son embarras, ampli par la raction brutale de son mari. la ligne 7, une gradation met en avant son trouble grandissant : La comtesse plit dabord [], puis elle rougit, et fut videmment embarrasse . Ladverbe videmment souligne que son trouble est bien visible. Les modalisateurs elle voulut rendre naturelle et air faussement dgag montrent quelle joue une comdie, de manire visible. Aprs une parole visant apaiser la tension ( il est impossible de connatre quelquun que nous aimions mieux ), elle change de sujet, parle musique et se met mme chanter pour faire diversion. Il convient de noter que la phrase Cest dommage, vous vous tes priv dun grand moyen de succs (l. 20) peut tre comprise de deux manires. Elle concerne premire vue lignorance de Rastignac en matires de musique, mais elle peut aussi renvoyer lerreur que vient de commettre le jeune homme, erreur qui lui ferme la porte de chez la comtesse. De cette manire dtourne, la comtesse se venge. 3. Les deux rpliques nales, prononces par M. de Restaud, sont construites sur un paralllisme. Elles dbutent de la mme manire : Toutes les fois que vous viendrez , Toutes les fois que Monsieur se prsentera . Dans la premire, le comte tmoigne Rastignac le plaisir quil a eu de le recevoir et lui suggre de revenir leur rendre visite. Cependant, une fois le jeune homme parti, il donne une consigne son domestique, Maurice : ne plus laisser entrer Eugne chez eux, en prtextant leur absence. La succession de ces deux phrases, de manire trs rapproche, illustre lhypocrisie du comte : il congdie un intrus de manire trs courtoise, mais cette politesse nest quune faade car il bannit dnitivement Rastignac de sa maison. Il sagit, pour Balzac, de montrer la distance qui spare le public et le priv. Cet extrait est, en effet, une Scne de la vie prive , qui permet de dmasquer lhypocrisie de laristocratie. 4. Le narrateur semploie dmontrer lignorance et la maladresse du jeune homme. Dans le premier texte, sa description physique pointe sa gne et son manque de lucidit : devenu rouge et bti par lide confuse quil eut davoir commis quelque lourde sottise . Rastignac prend conscience de son erreur, mais sans vritablement savoir quelle est cette erreur prcisment. Il est dpeint comme un enfant

Ltude du roman tant centre sur lapprentissage de Rastignac, le premier texte raconte sa premire erreur, due son inexprience des milieux de laristocratie parisienne. Aprs le bal donn par Mme de Beausant, le jeune homme est tomb sous le charme dAnastasie de Restaud. Pensant devenir son amant et ainsi obtenir son aide pour sintgrer dans la socit, il se rend chez la jeune femme. En arrivant, il croise le pre Goriot, qui sort de la maison. Le texte montre lignorance de Rastignac, mais Balzac y met aussi en scne lhypocrisie sociale qui domine dans laristocratie. Le second texte illustre lui aussi la jeunesse de Rastignac. La distance entre ses conditions de vie dans la pension de Mme Vauquer et le luxe des beaux quartiers fait natre en lui une ambition qui ne cessera de grandir au l de luvre. La pension Vauquer, par sa mdiocrit, va le pousser trouver des solutions pour sortir de ce milieu.18

Un jeune homme ignorant [1er et 2e TEXTES]1. Dans le premier texte, Rastignac annonce, en toute candeur, quil a vu le pre Goriot sortant de chez les de Restaud. Il sagit dune erreur puisquAnastasie et son mari veulent cacher leur parent avec cet homme qui na pas leur condition sociale. Anastasie ne doit pas montrer la face du monde quelle est la lle de ce dernier car cela pourrait tre prjudiciable sa rputation et la fortune du couple. Cest bien la parent qui drange, comme le souligne lemploi de litalique la ligne 4 : ce nom enjoliv du mot pre . Rastignac commet donc une erreur cause de son ignorance des codes sociaux et des relations familiales au sein de la famille Goriot. De plus, il devient dangereux pour le couple dans la mesure o il connait le pre Goriot et son lien avec Anastasie : il pourrait rvler lorigine sociale de la jeune femme. 2. Plusieurs signes trahissent lagacement des personnages. Le comte a un mouvement vif : le comte, qui tisonnait, jeta les pincettes dans le feu, comme si elles lui eussent brl les mains . La rapidit du geste, marque par le passage au pass simple, exprime une forte gne, renforce par la comparaison avec la brlure, qui marque avec force son embarras, et suggre mtaphoriquement que Rastignac vient daborder un sujet brlant. Aprs ce premier mouvement, il fait les cent pas (ligne 19 : Le comte de Restaud se promenait de long en large ), signe de son trouble et de son impatience

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

qui a honte. Le paragraphe allant des lignes 22 27 met en avant encore plus nettement sa maladresse. Aprs avoir rappel, grce limage de la baguette magique , leffet produit par lemploi du nom pre Goriot , le narrateur le compare un intrus chez une amateur de curiosits . Cette mtaphore met en parallle les dommages causs par Rastignac avec la maladresse de cet intrus qui casse des objets inconnus qui sont chers au collectionneur. La phrase qui clt ce paragraphe Il aurait voulu se jeter dans un gouffre souligne sa gne et son embarras, mal matriss cause de sa jeunesse. Lors de sa sortie de chez les Restaud, son geste de salut est aussi prsent ironiquement grce ladverbe, salua profondment , qui souligne son manque daisance et son respect un peu outr des conventions. Dans le second texte, le narrateur ironise dans les dernires lignes de lextrait, se moquant de la jeunesse et de lignorance de Rastignac. Aprs avoir expos les projets du jeune homme dsireux de se faire une place dans la socit par le travail et les femmes, le narrateur emploie une exclamation moqueuse : Il tait encore bien enfant ! Cette phrase dtruit les rves du personnage en les prsentant comme des illusions de jeunesse. Le commentaire du narrateur qui suit illustre, au contraire, la connaissance que ce dernier a de la socit et dmontre que les projets de Rastignac sont, en effet, irralisables.

opposs par la construction binaire : Dun ct de lautre . De plus, les termes mlioratifs qui dcrivent le monde luxueux entrevu chez Mme de Beausant ( fraiches , charmantes , la plus lgante , jeunes , vives , les merveilles de lart et du luxe ) contrastent radicalement avec les termes pjoratifs qui dcrivent la pension ( sinistres , fange , faces ). Les deux univers sont dpeints grce la mtaphore du tableau, comme lindiquent les termes encadres , tableaux bordes de fange . Cette image permet dopposer deux tableaux, deux images du monde : lun positif, lautre ngatif. Les personnes qui habitent ces deux milieux sont donc servies par un cadre lgant et riche, ou dtruites par un cadre dgrad et sale. De plus, les passions , prsentes dans les deux mondes, ne sont pas reprsentes de la mme manire. Dans le beau monde, on peut voir des ttes passionnes pleines de posie , tandis que la pension Vauquer ne laisse la place qu des faces o les passions navaient laiss que leurs cordes et leur mcanisme . Ainsi, tout oppose ces deux mondes : les ttes et les faces , la posie et les cordes et mcanismes . Dans le premier univers, les passions spanouissent dans la beaut tandis que la pension dtruit les individus et les passions sont rduites des pulsions dnues de charme et dintrt.19

La Misre [2e TEXTE]5. Le jeune homme est drang, dgot par la vue de la pension : le spectacle de ces misres et laspect de cette salle lui furent horribles. . Cest le contraste entre ce lieu et les beaux quartiers quil vient de quitter qui provoquent ce sentiment de malaise. Ce sentiment fait natre lambition chez lui, de manire forte comme en tmoigne la locution outre mesure . De plus, ce sentiment trouve son aboutissement la n du texte dans sa dcision de changer de vie et de milieu. La personnication la misre les commenta (l.16) montre que cest cette image de la pauvret physique, nancire et morale, qui permet Rastignac de tirer des conclusions sur sa propre vie, de prendre des dcisions quant son avenir, en lui rappelant notamment le discours de Mme de Beausant. 6. La pension est reprsente comme un lieu o rgne la misre. Les termes pjoratifs abondent : nausabonde , sinistres, fange , misre . La pension apparait donc comme un lieu des bas-fonds, le repaire privilgi dune humanit dgrade. Les pensionnaires perdent leur humanit, comme en tmoigne la comparaison avec les animaux : il aperut comme des animaux un rtelier, les dix-huit convives en train de se repatre . Ce dernier verbe poursuit la comparaison et donne limage dune assemble de personnes mdiocres qui mangent comme un troupeau de bestiaux. 7. Les deux phrases illustrent la transition et le contraste voqus la ligne 7. Les deux mondes dcrits, les beaux quartiers et la pension Vauquer, sont 8. Cet exercice vise faire travailler la caractrisation du personnage. La question 2 permet daborder lanalyse du personnage de Mme de Restaud et peut aider les lves entrer dans lanalyse. Le commentaire propos permettra, en outre, de dresser le bilan de ltude sur lhypocrisie sociale quincarne ce personnage. En plus des lments dj voqus dans la question 2, on pourra attendre des lves quils tudient les paroles rapportes au discours direct, notamment son cri Rrrrah ! , exprimant sa passion, mais aussi sa colre en ce moment dembarras. Sa faon de jouer avec son piano montre la vivacit de sa colre. Elle apparait donc comme une femme hypocrite, comdienne, mais aussi comme une esthte, une musicienne pour qui le piano semble cependant moins une passion quun moyen de succs. Cest donc limage dune femme manipulatrice qui se dessine.

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

9. Pour les cartes de Paris, on pourra utiliser un moteur de recherche et lancer une recherche de plan. Pour une carte historique reprsentant le Paris du dbut du XIX e sicle, on pourra se reporter ladresse suivante : http://www.lexilogos.com/paris_carte.htm. Ce site recense plusieurs cartes de Paris et, notamment des cartes anciennes, parfois longues charger.

e uvre Lecture dun

Honor de Balzac, Le Pre Goriot

On pourra galement consulter la carte des lieux du Pre Goriot reproduite dans louvrage dEmmanuel Querouil, Le Pre Goriot et le roman dducation, Bordas, 1990, p. 21 Lanalyse de ces lieux fera apparatre le quartier de la pension Vauquer dans lactuel cinquime arrondissement, mais aussi la zone des beaux quartiers, de lautre ct de la Seine, vers le nord-ouest de Paris. Ainsi, on pourra conclure une vraie gographie sociale luvre dans Paris. Le cimetire du pre Lachaise est, lui, un peu isol par rapport aux autres lieux, mais sa situation en hauteur permet dembrasser dun coup dil les lieux traverss par le jeune homme et de dresser un bilan de son parcours.

fonctionne la socit et quels sont les moyens de parvenir les plus efcaces. Mme de Beausant propose dailleurs directement son aide (ligne 2), se plaant ainsi dans la position de linitiatrice. 2. Mme de Beausant et Vautrin se prsentent comme deux personnes lucides et clairvoyantes, qui ont une ne connaissance de la socit. Ils emploient tous les deux limage de la lecture pour montrer quils savent dchiffrer le monde, quils ont appris ses codes : Quoique jaie bien lu dans ce livre du monde, il y avait des pages qui mtaient inconnues. Maintenant, je sais tout. (Texte 1) ; Vous tes revenu avec un mot sur le front, que jai bien su lire : Parvenir ! . Les deux initiateurs insistent ainsi sur leurs connaissances, notamment par lemploi du verbe savoir . Ce verbe recouvre tant les connaissances que les comptences acquises dans la frquentation de la socit. On peut voquer aussi les phrases au prsent de vrit gnrale et les passages o les deux initiateurs voquent les personnages de lhistoire (la famille Goriot, celle de Rastignac). 3. Mme de Beausant propose Rastignac de se servir de Delphine de Nucingen : due par son amant actuel, elle est prsente comme fragile et il sufrait Rastignac de lintroduire chez Mme de Beausant pour se faire aimer delle, comme le souligne la dernire phrase de lextrait. De plus, ce stratagme a le mrite de faire jouer la rivalit entre les deux surs : Anastasie a russi et Delphine est consume par la jalousie. Cest un moyen de parvenir qui est donc raliste et trs envisageable. Vautrin, lui, dessine deux voies : par lclat du gnie ou de la corruption . Mais il semble que sa prfrence aille au second moyen. Il montre Rastignac quil est un jeune ambitieux comme les autres, et quil doit donc se dmarquer. Ainsi, formule-t-il une rgle de vie : il faut entrer dans cette masse dhommes comme un boulet de canon, ou sy glisser comme une peste. Lhonntet ne sert rien . Pour Rastignac, deux solutions sont envisageables : sduire Delphine et sen servir pour entrer dans le monde ; sintroduire dans la socit par des actions malhonntes grce laide de Vautrin. Il faut rappeler que, dans la suite de son discours (qui nest pas reproduite ici), Vautrin va proposer Rastignac de sduire la pauvre Victorine Taillefer, et de faire excuter le frre de la jeune lle an que celle-ci hrite de la fortune de son pre. 4. Mme de Beausant a un niveau de langue courant, parfois soutenu : vous sonderez , vous toiserez . Cela correspond la femme du monde, au ton libre et en mme temps rchi avec lequel elle sadresse Rastignac. La parole de Vautrin est plus intressante, puisquen employant le niveau de langue familier, Balzac nous fait entendre la langue des bagnards. On retrouve largot du bagne dans des expressions comme : vous y avez air la Parisienne. , Voil un gaillard

Initiateurs

p. 46-47

20

Le discours de Mme de Beausant et le discours de Vautrin sont deux textes cls dans le parcours de Rastignac. Ces deux personnages vont lui donner des indications prcieuses pour comprendre et pntrer la socit. Ce sont deux visions du monde que proposent ces discours travers une grande dame et un ancien bagnard. Tout au long du roman, Rastignac va longuement hsiter entre les deux solutions qui lui sont proposes pour russir.

Deux discours dinitiation [1er et 2e TEXTES]1. Le langage des initiateurs se remarque la tonalit didactique de leur parole. Chacun sadresse Rastignac par le vouvoiement et emploie des temps verbaux propres la transmission. On retrouve dans les deux textes des phrases au prsent de vrit gnrale pour montrer la connaissance des locuteurs, qui sont deux personnes dexprience, mais aussi pour apprendre des rgles de vie Rastignac : Il existe quelque chose de plus pouvantable que ne lest labandon du pre par ses deux lles, qui le voudraient mort. Cest la rivalit de deux femmes entre elles. (texte 1) ; Lhonntet ne sert rien (texte 2). Vautrin emploie le pass pour rappeler ce quil a vu, ce que Rastignac a dj expriment et tent pour russir. Le futur est employ dans les deux textes pour envisager lavenir du jeune homme, lui prsenter les choix auxquels il peut se trouver confront ou encore la marche suivre pour russir. Enn, limpratif est employ pour donner des conseils : Frappez sans piti, vous serez craint. , gardez bien votre secret , apprenez (Texte 1) ; jugez . Le discours de Mme de Beausant se caractrise par une avalanche de conseils, tandis que lextrait choisi du discours de Vautrin est plus concis : il fait le bilan du pass pour envisager un avenir. Dans les deux cas cependant, il sagit dapprendre Rastignac comment

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

qui me va ! , Dieu sait comme ! , ler comme des soldats la maraude , des gars de la force de Poiret. . Au-del de la caractrisation des personnages, cette diffrence de niveau de langue souligne la diffrence de statut social entre les deux personnages, mais aussi la diffrence de point de vue sur le monde : celui dune grande dame intgre dans la haute socit, celui dun bagnard marginal. partir de cette diffrence, il est possible de faire remarquer aux lves que la personnalit de chaque locuteur envahit son discours. Mme de Beausant se trompe de prnom, prise quelle est dans ses tourments amoureux avec dAjuda Pinto. Son discours traite dailleurs du malheur de se rendre esclave dun amant, du dsespoir de se faire dlaisser. La leon quelle donne Rastignac est une consquence des vnements immdiats de sa vie. Vautrin, lui, prconise logiquement la corruption : cest un bagnard en cavale.

Deux discours, une vision du monde [1er et 2e TEXTES]5. Les deux initiateurs dfendent larrivisme, lopportunisme et les vertus de la corruption pour parvenir dans la socit. Ils recommandent le calcul, la force et le cynisme plutt que le respect des valeurs traditionnelles associes au bonheur et la russite : lhonntet, la sincrit des sentiments, lamour vrai et la famille sont mis mal dans les deux textes. Vautrin montre linutilit du travail pour une russite clatante : au contraire, il ne mne qu des vies mdiocres comme celle de Poiret. 6. Mme de Beausant distingue les hommes des femmes et attribue chaque sexe des qualits spciques. Les femmes sont corrompues, et constituent des moyens de russir dans le monde ; les hommes sont vaniteux ( la misrable vanit des hommes ). Quoi quil en soit, hommes ou femmes sont des moyens, des instruments quil faut connatre et manuvrer pour se faire une place dans le monde. On ne retrouve pas cette opposition dans le texte 2 : la Parisienne est un objet de convoitise, la sur est une personne faible que ouent leurs frres, les hommes sont des ambitieux ou des misrables selon le moyen quils ont choisi pour parvenir. Quoi quil en soit, pour Vautrin, hommes ou femmes se valent puisque tous sont corrompus. 7. Le texte 1 voque plusieurs luttes. La lutte entre les surs Goriot est la plus vidente. Ces deux personnages sont en rivalit pour la gloire, ce qui dtruit Delphine, comme le souligne la tonalit pathtique : la jalousie la dvore, elle est cent lieues de sa sur ; sa sur nest plus sa sur . Au-del, cest la rivalit au sein des familles qui est voque. De manire indirecte, Mme de Restaud voque la rivalit amoureuse, lorsquelle voque de Marsay, qui est lactuel amant de Delphine et que Rastignac devra clipser. De mme, au sein du couple, il convient de calculer ses actes, de taire ses sentiments car il existe une rivalit entre les amants :

Vous ne seriez plus le bourreau, vous seriez la victime , elle sest fait lesclave de de Marsay . Ainsi, il faut dominer au sein de son couple, se faire matre ou bourreau. Elle parle aussi dun combat plus gnral, qui rgne sur toute la socit : Frappez sans piti, vous serez craint . Il convient donc de simposer par la force dans le monde que dpeint linitiatrice. Vautrin prsente la lutte de lensemble des jeunes ambitieux pour russir : Vous tes une unit de ce nombrel. Jugez des efforts que vous avez faire et de lacharnement du combat. Il faut vous manger les uns les autres comme des araignes dans un pot, attendu quil ny a pas cinquante mille bonnes places. . La comparaison animale renforce la noirceur et la difcult de la lutte. Il sagit dun combat qui est moins physique que mental et qui requiert une stratgie bien rde. Ces deux discours, en prsentant le monde comme un terrain de lutte gnralise, permettent de mettre en garde Rastignac sur les embches qui peuvent advenir sur son chemin. Il est ainsi prvenu des erreurs ne pas commettre et des adversaires quil doit affronter. De plus, il faut noter que connatre ces rivalits peut lui permettre de mieux apprhender la socit et de se servir des faiblesses de chacun.21

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

8. Il sagit dun exercice dimitation qui doit sappuyer sur le texte 1. Ainsi, les lves doivent : crire la manire de Mme de Beausant : un discours direct, qui nomme le destinataire et rappelle de temps autre sa prsence ; de nombreuses phrases limpratif, au futur, au prsent de vrit gnrale pour dlivrer un message ou donner un conseil ; des phrases courtes, souvent binaires ( Plus froidement vous calculerez, plus avant vous irez ; Frappez sans piti, vous serez craint ) ; lensemble du discours doit tre structur de la mme manire, partant de considrations gnrales sur la nature humaine, pour aborder ensuite des conseils de conduite et enn proposer une solution daction ; rvler un jeune homme une vision dsenchante de la socit actuelle : llve doit mettre mal certaines valeur en montrant comment elles sont mprises dans le monde contemporain (le travail, le respect dautrui, la solidarit), mais aussi illustrer la vision dsenchante par des exemples (dhypocrisie, dindividualisme, darrivisme).

Lapprentissage de la vie

p. 48-49

Les deux textes permettent de mesurer lvolution du rapport de Rastignac aux femmes dans le roman. Tout au long de luvre, celles-ci font lobjet dune attention particulire : elles sont objet du dsir et moyen de parvenir. Lors du premier bal auquel il assiste, premier

e uvre Lecture dun

Honor de Balzac, Le Pre GoriotLes leons de lexprience [1er et 2e TEXTES]5. Lextrait est compos en deux temps. Dans le premier paragraphe, Rastignac se trouve avec Mme de Beausant dans lintimit de ses appartements. Il coute son dernier discours, assiste la prparation de la femme qui donne son dernier bal. Les deux autres paragraphes se droulent dans la sphre publique du bal : Rastignac peut observer les sur Goriot et Mme de Beausant en public. Cette dernire change de comportement entre le premier et le second lieu. En effet, dans ses appartement, elle se laisse aller sa mlancolie, fait un cadeau Rastignac, se montre mue et touchante lorsquelle dresse le bilan de sa vie, symbolise par son coffret gants : il y a beaucoup de moi l-dedans, il y a toute une Mme de Beausant qui nexiste plus . Mais au moment de se rendre dans la salle de bal, elle sche ses larmes et se reprend an de faire bonne gure : Puis, aprs stre un moment cach les yeux avec sa main, elle se les essuya, les baigna deau fraiche, et prit le bras de ltudiant. Elle efface les marques visibles de sa tristesse et cherche paratre forte et sereine. Lexpression douleur noblement contenue reprsente bien lintensit de ses efforts ; et cest bien cela qui impressionne Rastignac. 6. Mme de Restaud se montre arrogante et en mme temps gne. Elle fait preuve d orgueil et ladjectif magnifique , ainsi que lexpression diamants tals , traduisent sa confiance en elle et sa volont de paraitre la plus belle. Cependant, le narrateur remarque un jeu de regard : elle ne soutenait pas bien les regards de son mari . Elle prouve donc de lembarras. En effet, la mtaphore du feu, dans tous ses diamants tals, qui, pour elle, taient brlants sans doute , rappelle que ces bijoux reprsentent plus quune simple parure. En effet, Anastasie, qui navait pas de quoi payer sa robe pour le bal, a mis en gage les bijoux des de Restaud pour payer les dettes de Maxime de trailles, son amant. Le comte dcouvre ce quelle a fait et parvient reprendre les bijoux. Lors de la soire, les bijoux lui permettent dexhiber sa fortune et de dmentir des rumeurs. Cependant, ces diamants sont en effet brlants puisquils ont mis jour les excs de Mme de Restaud aux yeux de son mari, jusqualors complaisant. 7. Rastignac a progress dans la connaissance des femmes, et plus largement de la socit. En effet, dans le premier texte, il est sous le charme, merveill, comme un enfant, devant le luxe et la beaut de Mme de Restaud. Il entreprend de la sduire avec candeur et rve dun avenir glorieux grce elle. En revanche, le second bal le montre introduit dans les secrets des femmes : il entre chez Mme de Beausant qui se cone lui, il connait les secrets de Mme de Restaud, et de Delphine de Nucingen puisquil est son amant. Ainsi, il a appris mieux connatre les femmes, mais aussi ne plus se laisser impressionner par les fastes de lapparence. Il a appris se tenir distance aussi, observer,

contact avec le grand monde, il se laisse merveiller par Mme de Restaud et le faste de cette vie quil voudrait mener. la n du texte, il connait les secrets de chacune des femmes prsentes, signe de son intgration dans la socit aristocratique. De plus, il faut noter que Rastignac est alors lamant de Delphine, autre signe de son intgration.

Le regard dun jeune premier [1er TEXTE]1. Rastignac sinscrit sur la liste des danseurs pour deux danses avec Anastasie. Il prote de la premire pour lui parler et lui demander o il peut la revoir. Rastignac se montre, certes, entreprenant, mais il est en dcalage avec les usages du milieu dans lequel il volue. Il est dune franchise et dune spontanit tonnante, comme le montre ladverbe brusquement . 2. Le narrateur porte un regard amus et ironise sur la navet dEugne. Ladjectif aventureux la ligne 7 semble ironique, puisquil ny a ici pas grand pril pour le jeune homme. Ladjectif naf (l. 15) souligne, lui, son ignorance. Le commentaire qui suit illustre le regard ironique que porte le narrateur sur Rastignac : autant quun jeune homme peut se lier avec une femme pendant une contredanse et une valse . Cette prcision montre que ce lien est bien tnu par rapport limmense importance quil semble revtir aux yeux dEugne. Des modalisateurs viennent indiquer au lecteur que Rastignac est pris au pige de lillusion : il prit pour une grande dame , crut sa visite ncessaire . Le terme ignorance renforce le portrait de Rastignac en jeune premier maladroit. Ainsi, la n de lextrait, la question du narrateur souligne que le hros commet une erreur bien commune, ne de sa mconnaissance de ce milieu et de la candeur de sa jeunesse. 3. Linnitif prsent est employ de nombreuses reprises. Il est ici employ pour exprimer la vivacit des sentiments de Rastignac, ce que renforce son accumulation et lemploi de la modalit exclamative. Rastignac voit un avenir brillant et ressent ici une forte euphorie : son ambition grandit, il est plein de son dsir pour Mme de Restaud et, au-del, de cette vie quil convoite. 4. Mme de Restaud est ici reprsente comme le symbole de lespoir du jeune homme, presque une allgorie. Elle se tient en hauteur, re comme le suggre le verbe se dressait , et simpose ici comme une alternative entre les tudes de droit, dsignes par le nom Code , et la vie de Rastignac chez Mme Vauquer, dsigne par le nom misre . Mme de Restaud est une apparition providentielle, idalise par le jeune homme. Elle reprsente donc aux yeux du jeune homme son moyen de parvenir, son salut, une sorte de protectrice qui peut le mener la russite.

22

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

1. LE ROMAN AU XIXe SICLE

de manire plus distance. Enn, on peut remarquer une dception de Rastignac : euphorique lors de son entre dans le monde, il est habit de sombres penses dans le second texte. Ce qui limpressionne dsormais, cest la matrise de Mme de Beausant, sa capacit dissimuler sa douleur.

Un nid damour [1er TEXTE]1. Le pre Goriot apparait comme un sauveur puisque il a achet et meubl lappartement rue dArtois. Il intervient au moment o Delphine veut aller dner pour annoncer : jai pay toutes les factures . Ainsi, il sort Rastignac dennuis nanciers. Il reprsente une sorte de martyr de la paternit, qui se dvoue pour le bonheur de ses lles. Cest en imaginant lembarras nancier dans lequel allait se trouver Delphine quil sest dcid payer lappartement et ses meubles. En ce sens, on peut assimiler Goriot un crateur, celui qui ralise les rves, rend concret ce qui ntait quimagination. 2. Largent domine tout. On retrouve des chiffres qui correspondent au budget du pre Goriot : je me suis fait, avec quinze mille francs, douze cents francs de rentes viagres bien hypothques , jai l-haut une chambre de cinquante cus par an, je peux vivre comme un prince avec quarante sous par jour . De plus, il fait rfrence aux tractations nancires qui ont cours lpoque, notamment en faisant rfrence aux usuriers juifs : vous allez emprunter de largent des juifs, nest-ce pas ? , je me suis fait juif, jai pay toutes les factures , vous ne me devez pas un centime , a ne fait pas une grosse somme, tout au plus cinq mille francs . Le discours du pre Goriot est donc envahi par ces rfrences largent. Cette valeur domine les changes au XIXe sicle, et vient mme pervertir les relations familiales : ici, malgr son dvouement et son envie de bien faire, le pre Goriot parle conomie et hypothques, rduisant ainsi les relations familiales des considrations nancires. 3. Delphine compare lappartement aux armes des chevaliers mdivaux : Autrefois les dames ne donnaientelles pas leurs chevaliers des armures, des pes, des casques, des cottes de mailles, des chevaux, an quils pussent aller combattre en leur nom dans les tournois ? . Elle poursuit en afrmant : Les choses que je vous offre sont les armes de lpoque . Le parallle est intressant sur le plan des valeurs. Les armes numres par Delphine renvoient au combat, lunivers de la chevalerie et ses valeurs : gloire, honneur, vaillance Or, lappartement, sil est une arme, renvoie dautres valeurs, celles de la socit au dbut du XIXe sicle : cest un signe extrieur de richesse et de russite. Cest bien cela que reprsente cet appartement pour Rastignac : ce logement lui permet de sortir de la pension Vauquer et constitue une tape supplmentaire vers sa russite. 4. Le Pre Goriot demande aux deux jeunes gens sils sont heureux. A priori, le bonheur quil se reprsente existe : ils sont en couple, ont un appartement bien amnag, et dj pay, ce qui loigne les soucis nanciers. Lextrait montre aussi quils veulent former une vraie famille unie : Delphine appelle son pre papa , mon pauvre pre , et ce dernier pose la question : ntesvous pas mes enfants ? Or, ce bonheur est un bonheur

Livre du professeur Franais 2e ditions Belin 2011

8. Le tableau de Vermeer introduit le spectateur dans lintimit du personnage fminin, assis au second plan du tableau. Au premier plan, un vestibule, o sont entreposes des partitions (en bas droite), situe le spectateur : il nest pas dans la chambre, mais dans lentre, lextrieur, en position de voyeur. Le drap situ au premier plan, en haut droite, contribue aussi cet effet : tout se passe comme si lon dvoilait une intimit, comme si on ouvrait une porte au spectateur. Dans la pice principale, on voit une femme, assise tenant sur ses genoux un luth, signe de son rang social lev, et dans sa main droite une lettre, que sa servante lui a probablement donne. Cest du moins ce que lon peut dduire du regard de la femme, tourn vers sa servante (la fonction de cette dernire tant identiable son vtement, au balai pos dans langle de la porte et au panier de linge pos ses pieds). Les dalles, au sol, guident, par un effet de perspective, le regard du spectateur vers la femme et la lettre, qui se trouve au centre de la composition. Seul le titre du tableau parle de lettre damour . Sans ce titre, le lecteur se retrouve dans la position dun enquteur : il doit mettre ses propres hypothses sur la nature du document que tient la femme. Le luth indique cependant la prsence du thme amoureux, puisquil symbolise lunion entre les amants. De plus