Mag XIX

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Dossier La France a peur ? Découverte Le Théâtre du Nord, Gardien de la cité Tour du Monde Futebol, favelas e cachaça Portrait Eric Darques, un lil- lois en lutte contre la corruption lescandaleuxmag.fr « TOUTE PERSONNE QUI PENSE FORTEMENT FAIT SCANDALE » BALZAC LE MAGAZINE DES ETUDIANTS LILLOIS #19 - HIVER 2015 NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE

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Voici le magazine de l'hiver 2015 qui a pour thème principal "La France a peur?". Vous y trouverez une série d'article sur des problèmes de société, mais aussi un portrait d'Eric Darques ou encore le compte rendu d'une rencontre avec la nouvelle direction du Théâtre du Nord.

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Dossier

La Francea peur ?

DécouverteLe Théâtre du Nord,

Gardien de la cité

Tour du MondeFutebol, favelas

e cachaça

PortraitEric Darques, un lil-lois en lutte contre la

corruption

lescandaleuxmag.fr

« TOUTE PERSONNE QUI PENSE FORTEMENT FAIT SCANDALE » BALZAC

LE MAGAZINE DES ETUDIANTS LILLOIS

#19 - HIVER 2015

NE

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2 3LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015 LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Sommaire

# 19 - Hiver 2015

Directeur de la publication : Fanny JardinRédacteur en chef : Pierre-Luc SchamingRelations partenaires : Fanny JardinMise en page : Hélène Willemin, Mathilde Pierre, Pierre-Louis Jeauffroy

DÉPÔT LÉGAL : W59008653 ISSN 1961 - 0262

N°SIREN

: 519318745

-

18

Chères lectrices,

-

-

-

Dossier: La France a peur

6 L’affolante mondialisation

8 Crise, le pire est-il a venir?

10 L’épouvantail islamique

Loisirs

Recette

Horoscope

CultureLe théâtre du Nord,Gardien de la Cité

BrésilOrdem et progresso,une devise qui se réalise?

GéopolitiqueRussie, vers une nouvelle guerre froide?

16 Politique FrançaiseEric Darcques, un lillois qui lutte contre la corruption

Brèves insoliteschers lecteurs

Pierre-Luc SchamingRedacteur en chef du ScandaleuxMag

Page 3: Mag XIX

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2 3LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015 LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Sommaire

# 19 - Hiver 2015

Directeur de la publication : Fanny JardinRédacteur en chef : Pierre-Luc SchamingRelations partenaires : Fanny JardinMise en page : Hélène Willemin, Mathilde Pierre, Pierre-Louis Jeauffroy

DÉPÔT LÉGAL : W59008653 ISSN 1961 - 0262

N°SIREN

: 519318745

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Chères lectrices,

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Dossier: La France a peur

6 L’affolante mondialisation

8 Crise, le pire est-il a venir?

10 L’épouvantail islamique

Loisirs

Recette

Horoscope

CultureLe théâtre du Nord,Gardien de la Cité

BrésilOrdem et progresso,une devise qui se réalise?

GéopolitiqueRussie, vers une nouvelle guerre froide?

16 Politique FrançaiseEric Darcques, un lillois qui lutte contre la corruption

Brèves insoliteschers lecteurs

Pierre-Luc SchamingRedacteur en chef du ScandaleuxMag

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Les Brèves

LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Les Brèves Insolites

A Berlin, des dizaines de frigos parsèment les rues. On y dépose les aliments qu’on ne consomme pas. Une façon sympa d’éviter le gaspillage.

Les Belges veulent inscrire les frites au patrimoine culturel immatériel de l’Huma-nité. Un sujet qui met toute la Belgique d’accord.

La ville de Bruges a autorisé la construction d’un pipeline à bière de 3 km de long pour réduire les embouteillages en ville.

3% des Suisses mangent en cachette du chat ou du chien, selon l’association SOS Chats qui a lancé une pétition contre leur consommation.

L’argent a « une place trop importante dans notre société » pour 79% des Français (et pour 90% des cadres). Ben oui, l’argent, c’est surfait.

En France, en Estonie, en Finlande et en République tchèque, un commerçant a le droit de refuser un règlement en espèces si le client lui remet plus de 50 pièces.

Aux Etats-Unis, une femme sur 200 a� rme être tombée enceinte en étant vierge. Doux Jésus !

En 2011, le 30 décembre a été supprimé du calendrier sur les îles Samoa et Toke-lau : on y est passé directement du 29 au 31 décembre.

Pris d’un besoin pressant, un Angevin a aspergé une toile d’une valeur de 50 000 €. La justice ne laissera pas pisser !

27 % des Français pensent que les francs-maçons contrôlent le pays. Pourtant, seuls 10 % des parlementaires appartiennent à une loge. Ce serait donc les reptiliens qui dirigent la France ?

Lassés de voir leurs vergers et poulaillers pillés, les 1 620 habitants d’Ostrovany (Slovaquie) ont construit un mur en béton de 150 m de long pour éloigner les Roms.

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Culture

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Hélène WILLEMIN

Le nouveau Théâtre du Nord,

Gardien de la Cité

Faire du théâtre un lieu d’échange en y invitant des musiciens ou chanteurs, comme Rosemary Stand-ley, la chanteuse de Moriarty, invitée en octobre ou la violoniste Sonia Wieder-Atherton, qui ac-compagnera André Markowicz, invité du théâtre du Nord pour la saison 2015. Il s’agit aussi d’enga-ger de nouvelles collaborations, comme avec La Voix du Nord ou avec des entreprises pour ouvrir de nouveaux horizons au théâtre. Mais à l’inverse, la nouvelle direction du � éâtre du Nord se pro-pose aussi d’entraîner le théâtre hors de ses murs, comme avec Le Dîner en Ville où Remi de Vos et Carole � ibaut joueront au restaurant la Réserve à Lille (17 février 2015).Proposer un théâtre qui s’adresse à tous les publics. Le nouveau directeur a essayé de faire la balance entre les grands textes, les créations et les artistes internationaux. On retrouve ainsi dans la pro-grammation des classiques du répertoire, comme Phèdre, des textes contemporains comme Harol Pinter dont la Compagnie C/T propose Les Nains,

ou encore du théâtre de marionnettes avec Le rêve d’Anna, mis en scène par Bérengère Vantusso qui se jouera du 10 au 17 avril au � éâtre de Tour-coing. Il y en aura donc pour tous les goûts au � éâtre du Nord et Christophe Rauck se donne les moyens de reconquérir le « non-public », celui qui croit que le théâtre est réservé à une poignée d’érudits pédants. En� n, un des enjeux majeurs de la nouvelle direc-tion est de faire du théâtre un lieu de vie, que les gens n’aient plus peur de pénétrer dans l’impo-sante bâtisse de la Grand-Place. Pour cela, l’entrée a été rénovée pour devenir un lieu cosy, avec un assemblage hétéroclite de fauteuils tout droit sor-tis de la réserve des décors, de lampes esprit art déco, et de citations de Shakespeare et d’auteurs contemporains peintes sur les murs. On peut s’y retrouver à toute heure pour boire une petite bière ou se réchau� er un moment, et les soirs de repré-sentation, on y croise souvent tout ou partie de la troupe.

Christophe Rauck, comédien, metteur-en-scène et directeur du � éâtre Gérard Philippe de Saint-Denis de 2008 à 2014, a été nommé directeur du � éâtre du Nord, à la suite de Stuart Seide, en juin dernier. Les choix stratégiques et esthétiques se sont donc appliqués à la saison dernière, et le Scandaleux Mag a eu la chance d’assister à deux représentations, l’une de Phèdre et l’autre d’Acrobates, qui témoignent bien de la ligne adop-tée par la direction du théâtre. En marge de ces représentations, nous avons eu le plaisir de rencontrer Anne-Marie Peigné, directrice des Relations Publiques, qui nous a expliqué les enjeux de ce renouveau, dont nous vous livrons ici l’essence.

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« la France, l’un des pays les plus généreux au monde : 20% de son PIB consacrés aux pres-tations sociales, le double des

Etats-Unis »

A l’origine décriée par une partie de la gauche seulement, la mondialisation est depuis quelques années largement rejetée par les Français. En eff et, selon un sondage pour Le Monde, trois Français sur cinq la voient comme « une menace, une atteinte à leur souveraineté, à leur bien-être et à leur mode de vie ». Explications.

Une mondialisation diaboliséeLes Français considèrent la mondialisation comme la pre-mière cause de chômage dans le pays. Pour une majorité, elle est directement responsable de la crise de l’euro. Certains lui imputent même la crise de 2008, cette dernière s’étant répandue dans le monde entier du fait de l’interconnexion entre les pays. Ce phénomène est amplifi é par les politiques, de plus en plus tentés par l’isolationnisme. La protection contre les consé-quences de la mondialisation sera au cœur de la campagne présidentielle, aussi bien à droite qu’à gauche.

En outre, les Français ont toujours été atta-chés à leur indépendance. La mondialisation, au-delà de

Dossier

6 7LE SCANDALEUX MAG #19 - Hiver 2015

connecter les pays, les rend interdépendants ce qui est mal perçu par bon nombre de gens. Cette peur n’est pas nouvelle. Lors du référendum de 2005, la France a dit non à la Constitution Européenne et donc indirectement à la tendance libre-échangiste de l’Union européenne.

Elle était alors le seul pays avec les Pays-Bas à la rejeter. La mondialisation, synonyme de déclassement ? La mondialisation était d’abord vue comme profi -table pour les pays dévelop-pés. Ainsi, les Français se considéraient au début des années 2000 comme acteurs

majeurs et principaux bénéfi ciaires de la mondialisation. Avec des pays en voie de développement de plus en plus puissants, à l’image du Brésil, de la Chine ou de l’Afrique du Sud, cette perception a changé. Aujourd’hui, la moitié des Français estime même que notre économie peut être dépassée par celle du Mexique ou de la Thaïlande. Face à

En France plus qu’ailleurs, la mondialisation angoisse: comment expliquer cette impopularité record ?

L’affolante mondialisation

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Dossier

« Dans le « village planétaire » où nous prenons peu à peu conscience de notre interdé-pendance, les peurs multiples, malgré l’extrême diversité de leurs causes, s’alimentent les

unes les autres. » Jean Delumeau, La Peur en Occident

(1978)

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Un manifestant contre le traité transatlantique

Marie NIERENGARTEN

une telle concurrence, la France craint un déclassement et rejette donc la mondialisation.La France est l’un des Etats les plus généreux au monde : 20% de son PIB est consacré aux prestations sociales, soit deux fois plus qu’aux Etats-Unis. Le système social se place à la huitième place des valeurs que les Fran-çais veulent préserver selon un sondage réalisé par 20 Minutes. Même s’il est envié par le monde entier, ce sys-tème est propre à la France. Avec la mondialisation, et l’uniformisation des systèmes, la crainte de son abandon progressif est donc rationnelle. Les Français, historique-ment attachés à l’Etat Providence, préfèrent donc rejeter la mondialisation afi n de préserver leur système social. La France, gagnante de la mondialisationMalgré toutes les réticences, la mondialisation a de nom-breux avantages. Tout d’abord, elle a permis l’importa-tion à des coûts beaucoup plus bas. Le pouvoir d’achat a ainsi doublé ces dix dernières années. De plus, les Fran-çais sont de grands consom-mateurs de produits importés dans tous les domaines : Ikea, Adidas, Zara et autres Star-bucks prolifèrent dans toutes les villes de France. Ces entre-prises, en s’implantant dans le pays, dynamisent l’économie française. McDonald’s possède aujourd’hui 1260 restaurants et achète des aliments à hauteur de 583 millions d’euros aux en-treprises françaises. Cette en-treprise américaine représente donc un marché important pour l’agriculture. A l’inverse, la mondialisation permet éga-

lement de valoriser les entre-prises. Aujourd’hui, toutes les entreprises du CAC40 réalisent la majorité de leur chiff re d’af-faires à l’étranger.Reste le problème de la concurrence déloyale. Même en diminuant les coûts du tra-vail, la France ne pourra jamais concurrencer le prix de la main-d’œuvre chinoise. Cependant,

il serait non productif d’arrêter les importations. En eff et, aujourd’hui plus de la moitié du commerce mondial se compose d’importations réexportées. Ainsi, un produit importé d’origine chinoise par exemple a bénéfi cié de la plus-value de plusieurs autres pays. Arrêter l’importation détruirait donc de nombreux emplois dans de nombreux pays. A l’inverse, engager une politique d’ouverture commerciale pour tenter de gagner des parts de marché plus importantes en Chine serait profi table. Bien que la mondialisation inquiète aujourd’hui la France, elle lui a apporté bien plus de bénéfi ces que de pertes. Les Français ont toujours été frileux face aux change-ments. Cela pourrait expliquer en partie ce fort rejet de la mondialisation. Il est donc probable que l’appréhension des Français évolue rapidement et qu’ils comprennent fi nalement tous les avantages que la mondialisation peut leur apporter !

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Crise : Le pire est-il à venir ?

« S’il y a bien un avantage aux crises, c’est qu’elles permettent de prendre les mesures afi n qu’elles ne se

reproduisent plus. »

Après les crises économiques et fi nancières de 2008 et 2010, même si la menace d’eff ondre-ment de l’économie européenne est passée, la situation peine à s’améliorer considérablement. La France, particulièrement, a plus de diffi cultés que ses voisins européens à se relever. Le pays est-il réellement sorti de la crise ?

Depuis 2008 et la crise des subprimes, on parle en France de « la crise » comme s’il n’y en avait eu qu’une. On mé-lange les sphères économique, fi nancière, politique et même éthique comme si tout cela n’était fi nalement qu’une pé-riode de décadence globale pour notre système social à l’échelle européenne. Mais aujourd’hui, si la crise des subprimes semble lointaine et si personne n’a plus aucun doute sur le regain subit d’honnêteté de nos banques, le climat économique n’a pas l’air de s’amélio-rer. Ou plutôt, il n’a pas l’air de s’améliorer chez nous,

Dossier

8 9LE SCANDALEUX MAG #19- HIVER 2015

en France. En eff et, lorsqu’on regarde de l’autre côté de l’Atlantique, le taux de chômage aux Etats-Unis retrouve peu à peu son niveau d’avant 2008 : 5,9 % en septembre

2014 contre 6,1 % juste avant la faillite de Lehman Bro-thers et le début de la crise fi -nancière de l’automne 2008. Même en Europe, les taux de chômage respectifs de l’Alle-magne et du Royaume-Uni étaient respectivement de 6,3% et 6,0% en septembre 2014 avec une tendance à la baisse. On considère ici

le taux de chômage comme un indicateur des plus per-tinents car, plus que la croissance ou le taux d’intérêt

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Dossier

« Il semble impensable de mo-difi er le système économique

sans modifi er les systèmes sociaux et politiques. »

8 9LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Source : Insee, comptes nationaux, base 2010.

Arthur HIREL

de la dette publique, il caractérise au mieux la façon dont la population ressent la conjecture économique.

Cette impression de crise qui n’en fi nit pas vient tout d’abord du fait que l’Europe a été frappée par deux grandes crises économiques et fi nancières entre 2007 et 2011 : tout d’abord la crise des subprimes, bien sûr, mais ensuite par la crise de la dette européenne, en 2010 qui a frap-pé durement la Grèce, Chypre, l’Irlande et le Portugal et qui a eu des répercussions sur l’en-semble de l’Union européenne et plus particulièrement la zone Euro. S’il y a bien un avantage aux crises, c’est qu’elles permettent (en principe en tout cas) de prendre les me-sures afi n qu’elles ne se reproduisent plus. C’est chose faite avec le Mécanisme européen de stabilité (MES), créé après la crise de la dette publique et qui a pour but de limiter l’explosion des taux d’intérêt des Etats.

En observant les diff érents indices macro-économiques de la France, on remarque qu’après une légère amélio-ration, ceux-ci se sont détériorés fi n 2010 suite à la crise de la dette publique. Aujourd’hui, l’Europe a évité le pire, mais l’économie peine à se relancer. On peut donc légitimement se demander si la conjoncture actuelle correspond réellement à une crise ou à une situation globale de déclin contre lequel on ne peut fi nalement pas faire grand chose. D’un côté donc, nous pouvons espérer sortir de cette mauvaise passe à moyen terme, de l’autre, nous sommes condamnés à interchanger nos hommes et femmes politiques, à modifi er à tâtons nos politiques économiques sans qu’on puisse en attendre de résultat bénéfi que sur le long terme. La principale raison de cette stagnation est la diffi culté à réduire la dette publique. En eff et, si les diff érents gouvernements s’eff orcent à la faire augmenter de moins en moins rapi-

dement, il semble diffi cile sinon impossible de la réduire et il est toujours plus simple de se lancer dans l’habi-tuelle fuite en avant qui aboutit fi nalement à la faillite.

Pour l’économiste Jean-Luc Ginder, « l’impact de la crois-sance zéro sur la dette de la France aura pour eff et de

diviser de moitié l’enrichis-sement global annoncé par les dirigeants ». Il reste donc deux possibilités : l’austérité et la réduction massive de dépenses pour diminuer la dette, ou la relance passant par d’importants investis-sements afi n de stimuler la

croissance. Mais aucune de ces deux mesures ne semble être appliquée et assumée de manière totale, ce qui condamne la situation économique du pays à la stagna-tion. Les crises économiques devraient être un moment privilégié pour tester de nouvelles solutions mais les déci-sions économiques sont cristallisées par les crises sociale et politique que traverse le pays. En eff et, le système économique dans lequel nous vivons s’est construit en même temps et en s’appuyant sur les systèmes sociaux et politiques et il peut paraître impensable d’en modifi er un sans toucher aux autres. Pourquoi innover économi-quement quand on risque d’empirer la situation et de voir le Front national progresser encore dans les sondages ?

La crise agit donc comme un inhibiteur sur les poli-tiques qui, par la peur du futur, la peur de la défl ation, des taux d’intérêt qui risqueraient d’exploser ou de la désindustrialisation refusent de changer en profon-deur le système actuel, ce qui entraîne, au pire une détérioration, et au mieux une stagnation peu robuste qui vacillera à la moindre alerte sur les marchés. Cette stagnation ne coûte peut-être que quelques dizaines de milliers de chômeurs par an à la France à l’heure actuelle, mais il serait dommage que l’avantage que représente une démographie dynamique et une nata-lité relativement élevée (pour l’Europe) devienne à terme, par les dépenses sociales qu’elles engendrent, le boulet qui tirera un pays qui n’a pas su réagir à temps.

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« tomber dans la logique du confl it de civilisations [...]c’est anéantir l’espoir de la

paix civile. »

Dossier

10 11LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

S’il est un sujet dont se régalent les médias français, c’est celui de la montée de l’intégrisme islamiste et du communautarisme musulman en France. Mais cette focalisation, fondée sur des analyses faussées et tronquées, ne serait-elle pas ce que nous devrions craindre le plus?

On assiste régulièrement à un concours de suren-chère dans la diabolisation : un Islam conquérant et violent au nom duquel des musulmans de banlieue récemment convertis se ruent en Syrie combattre le régime laïque d’Assad. Un Islam radical et prosélyte qui se répand comme une traînée de poudre au sein des couches popu-laires immigrées. En bref, à prêter une oreille trop attentive ou naïve à la presse mainstream, on en arrive rapidement à la conclusion que la religion de Mohammed constitue une des plus grandes menaces pour la France. C’est précisément pour cette raison qu’une prise de recul s’impose à l’égard de ce discours apocalyptique digne de l’enfumage que l’on trouve dans les tabloïds anglo-saxons. Car tomber dans la logique du confl it de civilisations théorisé par Samuel P. Huffi ngton, selon laquelle la chute du commu-nisme aurait conduit à une montée des sentiments iden-titaires et de l’éveil d’un Islam radical menaçant la civili-sation occidentale, c’est anéantir l’espoir de la paix civile.

Cette peur trouve un large écho au sein de la population française, comme l’atteste le succès du Suicide français d’Eric Zemmour, déjà vendu à 450 000 exemplaires.Le moins que l’on puisse dire, c’est que le constat zem-mourien est violent : 50 ans auront suffi pour passer de la France gaullienne, étatique et indépendantiste à une France technocratique peuplée de chômeurs et de ra-

cailles. On en sort cafardeux et pu-gnace, prêt à écraser les bataillons islamistes des cités pourvoyeuses de djihadistes à grand renfort de chars Leclerc. Toujours est-il que ce discours joue sur les mécanismes de notre psyché émotionnelle et conduit inévitablement à un rai-sonnement manichéen irrationnel : amour vs. haine, Bien vs. Mal. Il va

falloir choisir son camp et ne pas avoir de pitié pour celui d’en face. La principale imposture de ce sombre constat est que la présentation de ce reliquat de religion correspond à une vision extrême et biaisée de l’islam, dont les valeurs de charité et de tolérance se retrouvent à l’identique, quoique formulées diff éremment, dans les Évangiles.

L’épouvantail islamique

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Dossier

10 11LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Paul-Alexandre PRODANIC

Forcément, dans des cités paupérisées construites sur la division ethnique des quartiers populaires, où la culture ghetto importée des US à travers le rap game et l’idéolo-gie libertaire glorifi ent les armes, les putes et la drogue, il est extrêmement diffi cile pour un jeune d’appliquer les véritables préceptes de l’Islam, surtout lorsque nombre de zo-nards dealers de shit « conver-tis » six mois auparavant s’en réclament. Peut-être aussi fau-drait-il cesser de corréler Islam et délinquance en remplaçant la variable « Islam » par la va-riable « pauvreté » ? C’est là qu’intervient la responsabilité de la politique post-gaullienne, avec les eff ets pervers du regroupement familial. Il s’agit, d’une part, de tirer les salaires vers le bas en installant durablement les travailleurs étrangers et leur famille sur le territoire français, et d’autre part, de fragmenter la conscience de classe à une époque où le Parti communiste représentait plus de 20 % des votes en la transformant en conscience identitaire. La polarisation des tensions entre immigrés et Français « de souche » fera une superbe diversion pour faire passer la pilule de l’austérité sous Mitterrand. Lors de ses deux man-dats, l’institutionnalisation de l’anti-racisme qui fl attait un communautarisme victimaire des minorités contre l’humiliation du français présumé raciste, réactionnaire et chauvin, faisant monter les rancœurs des deux côtés, au lieu de faciliter le dialogue des cultures et de fédérer l’ensemble des citoyens autour de valeurs communes. Aujourd’hui, c’est cette même minorité musulmane qui est mise au ban de la société. Jugée antisémite et extré-miste par une caisse de résonance médiatique qui ampli-fi e des questions mineures comme le voile à l’école, la communauté musulmane doit maintenant se dédoua-ner des crimes commis par les fanatiques de l’EIIL (ou Daesh) au Proche-Orient, ou des attentats contre Charlie Hebdo, car présumée solidaire ! A quand un #NotInMy-Name pour les juifs non impliqués vis-à-vis de la politique d’extrême-droite israélienne ou pour le peuple français par rapport à la destruction programmée de la Libye ? Malgré la bonne intention au départ, cette campagne a rapidement dévié sur une fumisterie abjecte suspectant des citoyens français d’être des terroristes en puissance. Que ces journaux le veuillent ou non, les départs de dji-hadistes français ne constituent qu’un épiphénomène, agité comme un chiff on rouge aux yeux d’une France furieuse et scandalisée. L’urgence est à la réconciliation citoyenne, pas au confl it civil.

A l’inverse des discours violents et des regroupements identitaires si faciles, s’intéresser à l’autre est un tra-vail bien plus sophistiqué. Cela passe par une ouverture d’esprit et un désir de comprendre la diff érence : Gran-deur de l’Islam fait partie de ces livres qui nous aident à

y parvenir. Publié en 1961 par le professeur orientaliste Gas-ton Wiet, cet ouvrage recueille des morceaux choisis d’auteurs principalement orientaux qui retracent mille ans d’une épo-pée racontée par les poètes, historiens et aventuriers au fur et à mesure de son déroule-

ment. Soumission du Maghreb, conquête de l’Espagne, prise de Constantinople, islamisation des Balkans et de la Perse : la civilisation musulmane, elle-même nourrie de la métaphysique grecque, a fécondé en retour la pensée occidentale. Pourquoi parler d’un livre publié 50 ans auparavant par un orientaliste français ? Pour montrer le dialogue de deux civilisations, l’échange des savoirs et le creuset in-tellectuel qu’abritaient Bagdad, Alep ou encore Tripoli, aujourd’hui hélas détruites (le choc des civilisations à l’américaine ?). Mais il faut aussi que « l’autre camp » s’im-plique dans cette démarche : montrer sa volonté de vivre dans une France multi-ethnique et multi-confessionnelle en s’intéressant à sa langue, son histoire, ses valeurs et en luttant pour les intérêts de la nation. En clair, faire un pas vers la réconciliation citoyenne !

« Peut-être aussi faudrait-il cesser de corréler islam et délinquance en remplaçant la variable « islam »

par la variable « pauvreté » ? »

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Sous des cieux bien plus cléments que ceux de Lille se trouve une fourmilière en pleine ébul-lition qui, depuis quelques années, attire tous les regards. Cette fourmilière, entre révoltes et évènements mondiaux d’envergure, c’est le Brésil. Nous vous proposons d’y faire un petit tour, pour voir quel est l’état d’esprit de ce pays aux mille visages, en plein cœur de cette période qui semble marquer pour lui un tournant historique.

L’ ascension de cet État-continent (15 fois la taille de la France, excusez du peu) et sa nouvelle place de choix dans l’organigramme mondial ne font pas de doute. En ayant multiplié par 10 son PIB en l’espace de 20 ans, le Brésil se retrouve aujourd’hui à la 8e place du même indi-cateur – derrière le Royaume-Uni et la France et devant l’Italie et le Canada – et s’érigerait à la 4e place d’ici 2050 selon les projections de la Banque Mondiale. Grâce à sa superfi -cie et sa population, qui atteint les 200 millions, ainsi que ses richesses considé-rables – qu’elles soient minières, pétro-lières ou agricoles –, le pays a, de fait, toutes les cartes en main pour réussir sa transformation. Plus encore, le Brésil se forge aujourd’hui une certaine noto-riété dans les esprits des populations tout autour du monde, non plus unique-ment en tant que pays du futebol, mais également en tant que terre de culture – avec un certain engouement pour sa musique, son folklore, voire sa langue – et en tant qu’espace de communion mondiale, le pays ayant accueilli les Journées Mondiales de la Jeunesse en 2013, la Coupe du monde de football en 2014 et s’apprê-

International

12 13LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

tant à être l’hôte des Jeux Olympiques d’été en 2016.

Mais tout n’est pas rose au pays des carnavals : la délin-quance y est monnaie courante, motivée par la pauvreté, la drogue et le manque d’éducation ; le déséquilibre du partage des richesses, avec 90% d’entre elles détenues par 10% de la population, l’absence d’un système admi-

nistratif fi able, effi cace et libéré de la corruption ont déjà mené à des mouve-ments de protestation populaires qui ne demandent qu’à se répéter. On se souvient des révoltes qui ont marqué les quelques mois précédant le mondial de foot, des images montrant l’armée fédérale investissant les quartiers te-nus par des dealers. On a entendu par-ler du mouvement des sans-terre, ces paysans réclamant le droit à disposer d’un terrain qui serait le leur et non ce-lui de riches dynasties de propriétaires terriens ...

Pour autant, les dernières élections présidentielles du mois d’octobre ont

reconduit à ses fonctions la présidente Dilma Rousseff , déjà héritière en ligne directe du charismatique pré-

Ordem e Progresso: une devise qui se réalise?

Page 13: Mag XIX

International

« Je vais voter Dilma,car j’ai bénéfi cié des

programmes qu’elle a mis en place : quotas, bourses universitaire

et famille. » (témoignage recueilli par l’Obs)

12 13LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Pierre-Louis JEAUFFROY

sident Lula (2003-2011).De fait, les années Lula et Rous-seff ont vu se réaliser des avan-cées sociales considérables : des millions de per-sonnes sont sor-ties de l’extrême pauvreté et ont obtenu la possibilité d’entrevoir un futur moins miséreux grâce à un meilleur pouvoir d’achat, les universités publiques sont au-jourd’hui plus structurées, mieux équipées et sont dotées des moyens nécessaires à une for-mation plus solide et au dévelop-pement de la recherche ... Mais, paradoxalement, l’enseigne-ment de base qui est le pilier d’un système éducatif et dé-mocratique viable a été complètement oublié. Il manque des écoles maternelles, les écoles primaires semblent mises au rebut et, comme ailleurs, les professeurs sont mal payés, mal préparés et les élèves sont démotivés ; le taux d’illettrisme chez les plus de 15 ans atteint ainsi les 8,6%, ce qui représente une population de 13,2 millions de personnes.

De même, de nombreuses voix se sont élevées à travers le pays, voyant dans la multiplication des aides et l’ab-sence de réel programme d’insertion sociale une incita-tion à ce qu’une bonne partie de la population se satis-fasse des allocations, sans plan ni perspective d’avenir. Et c’est bien ce que révèlent les dernières élections pré-sidentielles, au sortir desquelles les deux prétendants se sont trouvés au coude à coude : un peu plus de la moitié des électeurs a voté en faveur de Dilma Rousseff , la pré-sidente sortante, du Parti des travailleurs (51,64 %) quand Aécio Neves, du Parti de la social-démocratie brésilienne, a recueilli 48,36 % des suff rages. Ceci a généré un climat de rivalité qui a divisé le pays en deux avec, d’une part, les régions Norte et Nordeste – concentrant les États les plus pauvres et donc les plus reconnaissants pour les pensions octroyées par le pouvoir sortant – et, d’autre part, les Sul et Sudeste où se trouve le cœur économique

« Nous voulons des écoles et des hopitaux dans la ‘‘norme FIFA’’ »

du pays.

Cependant, les derniers évènements semblent marquer un tournant important dans le rapport qu’entretient le peuple brésilien avec la démocratie. Le fait de voir une population pour laquelle le football international revêt une importance fondamentale se soulever peu avant la Coupe du monde et investir les rues en réclamant un meilleur système de santé, plus d’éducation et de façon générale des services publics plus honnêtes, préférant par là même défendre des causes nobles plutôt qu’un plaisir éphémère – et des espérances fi nalement déçues – est un événement unique, porteur de beaucoup d’es-poir pour ce géant aux pieds d’argile.L’intérêt et l’intensité des débats qui ont ponctué la campagne présidentielle, l’attention portée par chacun aux propositions faites par les candidats et l’atmosphère de réfl exion générale malgré des intérêts diff érents viennent également confi rmer, par leur caractère inédit,

cette tendance qui laisse présager que les Brésiliens sauront se mon-trer plus attentifs que jamais, afi n de pouvoir juger en conscience les initiatives et les décisions de leurs dirigeants.Du point de vue de ses structures, de son administration ainsi que de sa culture démocratique, le Brésil reste donc un immense chantier à ciel ouvert, dynamique et plein d’espoir, mais, à la fois riche et corrompu, saura-t-il être au ren-dez-vous de l’Histoire ?

Les deux candidats en lice pour le second tour

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Vers une nouvelle Guerre Froide ?

« Pendant les crises, on a l’im-pression que la politique est le facteur principal de la forma-tion des prix des produits éner-gétiques. » – Vladimir Poutine

Depuis le début de l’été le prix du baril de pétrole a chuté de près d’un tiers, passant de 105 dollars en juin dernier, à 67 début décembre. Cette évolution est bien évidemment probléma-tique pour les principaux producteurs de pétrole mondiaux, dont les revenus sont menacés. La Russie produira près de 525 millions de tonnes de pétrole cette année, soit plus de 13% de la production mondiale de brut, ce qui en fait le premier producteur mondial.Alors que les tensions entre l’OTAN et la Russie s’intensifi ent, s’attaquer au prix du pétrole est une arme qui peut mettre en diffi culté le pays dirigé par Vladimir Poutine.

En Russie, où le pétrole représente près de la moitié des rentrées budgétaires annuelles, le budget 2015 a été bâti sur une prévision d’un baril au prix de 96 dollars. Les économistes de la banque russe Alfa ont estimé récem-ment qu’une chute de 10 dollars du prix du baril de pétrole coû-terait 10 milliards de dollars au budget fédéral russe et 0,4 point de croissance du PIB du pays.Cette situation n’est pas nou-velle : sous la présidence Reagan en 1986, les actions de l’Occi-dent pour baisser les prix du pé-trole en « inondant » le marché grâce à une surproduction de l’Arabie Saoudite, fi rent ainsi passer le prix du baril sous les 10 dollars, et contribuèrent à l’eff ondrement de l’URSS.Les moyens pour attaquer économiquement la Rus-

International

14 15LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

sie ressemblent une fois de plus à ceux de 1986.

Aujourd’hui, alors même que les confl its s’intensifi ent dans la région du Moyen-Orient, la plus riche du monde en pétrole, les cours commencent à chuter. C’est une

tendance anormale. Depuis la prise inattendue d’une région pétrolifère irakienne autour de Mossoul et de Kirkuk par l’Etat islamique en juin dernier, le pétrole Brent a perdu 30% de sa valeur. Aucune baisse de la demande pétrolière n’est pourtant enregistrée dans l’ensemble, ou en Chine, et les réserves d’huile de schiste aux USA n’ont pas augmenté.

La situation est similaire a celle de 1986, et pourtant cette fois, les eff ets sont diff érents.

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International

14 15LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015 LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Nathaniel McNary

En eff et, le gouvernement russe semble avoir trouvé une solution contre ce problème ; vendre le gaz et le pétrole russes contre de l’or physique.

Attardons-nous sur l’évolution des réserves d’or russes:

Lors du troisième trimestre de 2014, la Russie a ache-té près de 150 tonnes d’or physique (alors qu’elles ne représentaient que 77 tonnes en 2013). Comme le pétrole, l’or a vu son cours baisser ces derniers mois, passant de 1350 dollars l’once à 1200 au-jourd’hui (une diminution de plus de 11% en 5 mois).

Partons d’une hypothèse loin d’être farfelue. Dans leur lutte contre la Russie, les pays occidentaux, sous l’impulsion des Etas-Unis, manipulent les marchés pour abaisser le prix de l’or et des hydrocarbures. Ainsi, ils distordent les réalités économiques existantes au pro-fi t du dollar afi n d’augmenter son pouvoir d’achat. Aujourd’hui, les actifs tels que l’or ou les hydrocarbures paraissent aff aiblis et sous-évalués par rapport au dollar.Cependant, la stratégie russe semble répondre à ces phénomènes, en vendant les hydrocarbures russes en échange de dollars artifi ciellement appréciés, ensuite échangés contre de l’or artifi ciellement déprécié, neu-tralise les eff ets négatifs de ces manipulations des cours.Dans sa lutte contre les Etats-Unis, la Russie a trouvé un allié de poids : la Chine (et dans une moindre mesure les autres pays des « BRICS »).En eff et, la Chine a récemment annoncé qu’elle ces-serait d’accroître ses réserves de devises et d’or libel-lées en dollars. La question est alors de savoir vers quoi la Chine va s’orienter pour les remplacer. La réponse semble encore une fois être l’or physique.Sous cet angle, le partenariat entre le Chine et la Rus-sie est extrêmement profi table pour les deux pays. La Russie achète des marchandises à la Chine avec l’or à son prix actuel, pendant que cette dernière achète les hydrocarbures russes avec de l’or, là aussi à son prix actuel. Un échange où le dollar est totalement absent.

Traditionnellement, les deux méthodes utilisées par les Etats-Unis et l’Occident pour éliminer les menaces sur

l’hégémonie du pétro-dollar et les privilèges qu’il confère sont ce que l’on appelle les « révolutions colorées », et en cas d’échec, l’agression militaire et les bombardements.On peut voir que les guerres en Ukraine et en Syrie, soutenues par les États-Unis, sont au fond deux fronts d’une même lutte stratégique visant à aff aiblir éco-nomiquement et géopolitiquement la Russie et évin-cer Poutine de l’arène politique. Ces confl its visent à empêcher l’apparition, en Eurasie, d’un centre de pouvoir qui ne s’inscrirait pas dans le Nouvel ordre mondial sous l’égide des USA à travers le contrôle des « pivots stratégiques » (au sens de Brzesins-kyi) que sont l’Ukraine et la région autour de la SyrieSur chacun de ces fronts, le but stratégique est de contrôler les fl ux d’hydrocarbures : notamment les gazoducs entre la Russie et l’Europe via l’Ukraine; et entre l’Iran, la Syrie et l’Europe via la Syrie.

La guerre énergétique des USA contre la Russie s’oriente vers un échec. La Russie de Poutine a eu le temps d’en-treprendre des mesures stratégiques, avec la Chine et d’autres nations amies, pour réduire sa dépendance envers l’Occident. Les guerres pétrolières ne font que pousser la Russie à se focaliser sur la garantie de ses inté-rêts nationaux et à abandonner le système de gouver-nance mondiale par le dollar.

« La Russie et la Chine doivent résister aux pressions de Wash-ington et rester unies dans l’inté-rêt du monde entier. » - Xi-Jinping

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« Près d’une aff aire de corrup-tion transnationale sur deux implique en eff et des agents publics de pays développés. »

Eric Darques est bien connu des principaux hommes politiques du Nord-Pas-de-Calais. Beau-coup commencent à le craindre. Son combat ? La lutte contre la corruption et le détournement d’argent public. Et les cas ne manquent pas : il a ouvert des centaines de dossiers. Parmi eux, ceux du Stade Pierre-Mauroy et du contrat lillois de la Lyonnaise des Eaux.

Dans son portrait détaillé de la corruption publié en novembre dernier, l’OCDE remet en cause l’idée selon laquelle les pays en développement seraient les seuls concernés par la corruption d’agents publics. Près d’une aff aire de corruption transnationale sur deux implique en eff et des agents publics de pays développés. Mais Eric Darques n’a pas attendu ce rapport pour faire ce triste constat : « la cor-ruption représente en Europe 1% du PIB. En France, c’est 40 mil-liards. Avec ça, on règle la dette de la SNCF. »

De Pierre Mauroy au Grand Stade

C’est essentiellement dans la région de Lille que sévit ce-lui qui aime à se présenter comme un contribuable sou-cieux de la bonne utilisation de l’argent public. Il s’y est fait un nom, redouté par bon nombre de politiques lo-caux. Et pour cause, il n’a pas peur de s’attaquer aux gros poissons. En 2002, juste après avoir participé à la créa-tion de l’association anti-corruption Anticor, il fait face à Pierre Mauroy dans son premier dossier important, une

Politique

16 17 LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

aff aire d’emploi fi ctif. À la suite d’une lettre anonyme accompagnée de copies de fi ches de paie, Éric Darques découvre que Lyne Cohen-Solal, conseillère municipale PS à Paris, est rémunérée comme attachée de presse par Lille Métropole Communauté Urbaine (LMCU), alors présidée par Pierre Mauroy, alors qu’elle ne fi gure pas dans l’organigramme et ne dispose même pas de ligne téléphonique. Il obtiendra la condamnation de Mauroy

et Cohen-Sohal, et le rem-boursement des salaires in-dûment perçus, au terme de 13 années de procédure. Le Don Quichotte lambersartois, longtemps considéré comme un élément isolé, jubile, avec la ferme intention de rempor-ter d’autres victoires pour les

contribuables, pour la justice.

« Depuis une trentaine d’années, [la France] s’enfonce un peu plus chaque jour parce que trop d’hommes poli-tiques, de droite comme de gauche, n’ont d’autre ambi-tion que de servir leurs intérêts personnels, estime-t-il dans des propos tenus au journal La Croix. En tant que citoyens, nous nous devons de réagir. » Ce justicier de l’argent public dont le modèle est le Général de Gaulle suit actuellement près de 150 dossiers, dans le Nord-

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Politique

« Ce justicier de l’argent public dont le modèle est le Général de Gaulle suit actuellement près de 150 dossiers, dans le Nord-Pas-de-Calais ou ailleurs, et a déposé une quarantaine

de plaintes. »

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Eric Darques (photo rue 99%)

Pierre-Luc SCHAMING

Pas-de-Calais ou ailleurs, et a déposé une quarantaine de plaintes. Ces derniers temps, il faut se tourner vers le Grand Stade Lille Métropole Stade Pierre-Mauroy pour trouver un de ses dossiers principaux. Ou plutôt deux d’entre eux. Le premier, c’est la dénomination du stade : pourquoi choisir de l’appeler Pierre Mauroy le 21 juin 2013 alors que le pauvre, mort le 7 du mois, n’était ni amateur de football, ni favorable au projet : « Le LOSC aura un grand tade quand ce sera un grand club. » Mais, vous vous en doutez, ce n’est pas la raison pour laquelle Éric Darques s’est penché sur le sujet. En eff et, Lille Métropole a refusé l’option du naming – donner au stade le nom d’une marque, comme l’Allianz Riviera de Nice, l’Emirats Stadium d’Arsenal ou la Veltins Arena de Schalke 04 – qui aurait pu rapporter jusqu’à 3,3 millions d’euros annuels. L’off re du casinotier Partouche (2 M€/an) est déclinée. L’hommage à l’ex-Premier ministre Pierre Mauroy valait-il 20 millions d’euros (10 ans de na-ming) ? Pour Éric Darques, la réponse est non. Il a donc déposé un recours contre l’abandon du naming, mais il a été invalidé.

Cette défaite n’a pas arrêté Éric Darques. En 2008, alors que le projet du consortium Bouygues-Norpac, initiale-ment choisi par les experts, tenait la corde, c’est Eiff age qui avait été choisi quelques jours plus tard en séance plé-nière. Pour 108,5 M€ de plus. Un matin, il reçoit un cour-rier anonyme contenant des PV de réunions alimentant la thèse de la tricherie dans sa boîte aux lettres. Convain-cu que l’attribution du marché ne s’est pas faite dans la transparence, Éric Darques décide de porter l’action en justice. Après une première plainte classée sans suite, il redépose un second dossier. En plein dans le mille : en juin dernier, deux fonctionnaires de LMCU, soupçonnés de faux et d’usages de faux, sont mis en examen. Mais le Zorro du Nord voit plus loin que ces « lampistes » et espère que les élus vont tomber : « Je ne veux pas que ce soient les lampistes qui payent ! Les fonctionnaires ont agi sur ordre du pouvoir politique, affi rmait-il à La Voix du Nord il y a quelques mois. J’attends avec impatience la mise en examen d’élus, c’est eux que je vise ! ». C’est « le début des dominos ». Cependant, en août, la juge en charge de l’information judiciaire a rendu une ordon-nance constatant l’extinction de l’action publique pour prescription. Un « écran de fumée » qui n’a pas empê-ché Éric Darques de faire appel, de déposer une nouvelle plainte pour « favoritisme dans le cadre de l’attribution du marché » et de réclamer la requalifi cation des faits en faux en écriture publique. La prescription des faits s’eff a-cerait alors après dix ans, au lieu de trois en écriture pri-vée. Le 3 décembre, la chambre d’instruction de la cour d’appel de Douai a examiné l’appel du militant anti-cor-ruption. Le délibéré devrait être rendu le 14 janvier.

Mais nul doute qu’on entendra encore parler d’Eric Darques, pour cette aff aire ou pour une autre. Car s’il ne gagne pas à tous les coups, il fait au moins trembler ceux qui se pensent intouchables.

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Détente

LE SCANDALEUX MAG #19 - HIVER 2015

Bélier – Là-bas... n’y va pas ! Ah bah si allez –y ! Cour-rez-y, même. Il est temps d’ouvrir vos horizons et d’aller chercher bonheur et travail dans des contrées plus loin-taines. Et si vous ne voulez pas, tant pis, de toute façon on ne veut plus de vous ici ! Taureau – Il est cinq heures, Paris s’éveilleEt vous, vous allez encore vous coucher tard ! Et vous relever aussitôt pour un cours en amphi à 8h. Heureusement votre pugnacité vous permet de conci-lier cours, vie sociale et santé mentale stable … jusqu’à quand ? Gémeaux – Ça plane pour moiEh oui tout autour de vous est beau et gentil. Bon il est temps d’arrêter les champis ! Rendez-vous à la réalité, on est à Lille, il pleut et les partiels ne sont jamais loin. Mais rappelez-vous que vous pouvez toujours noyer ce froid dans les frites lilloises. Cancer – Les copains d’abordVous êtes plein de bonnes résolu-tions  : moins d’alcool, au dodo à 23h, et présence à tous les cours ! Même les amphis ! … Ah … Vos potes vous pro-posent un p’tit verre rue solfé … bon, allez, la prochaine fois sera la bonne ! Lion – La BohèmeC’est un temps que les plus de 20 ans ont tous bien connu : c’est la dèche ! Vous pourrez compter une fois de plus sur vos amis pour vous héberger et vous nourrir durant ces mois glaciaux... sans quoi, la clochardise vous guette! Vierge – J’ai encore rêvé d’elleCôté cœur, célibataire ou en couple, vous allez soudainement rencontrer LA personne et vos draps s’en souvien-dront. Attention tout de même, le réveil sera rude. Votre travail au contraire, lui, est bien réel !

Balance – Ne me quitte pasAh… oui, refrain qui vous est malheu-reusement connu : que ce soit pour rete-nir votre aimé(e) qui ne supporte plus de venir vous voir dans le froid ou juste de votre connexion internet qui vous quitte à 98% du téléchargement du dernier Game of � rone.

Scorpion – Avec le tempsChose promise, chose due ! Cette fois-ci vous avez droit à un horoscope.Célibataire, vous allez en� n rencontrer quelqu’un. En couple, vous n’avez jamais été aussi heureux à 2 ! Faites juste en sorte qu’avec le temps tout ne s’en aille pas … Sagittaire – La vie en roseAh, que c’est beau de voir la vie du bon côté. Continuez ! Surtout vu ce qui va vous arriver. Entre rupture et vol de vos a� aires, il vaut mieux en e� et rester opti-miste. Ah, et au fait, le rose, c’est parce que vous avez besoin de lunettes. Capricorne – Pour moi la vie va com-mencerEn� n ! Ca y est ! Avec la vie étudiante votre vie d’adulte commence pour de vrai. Génial : votre propre appart, vos propres horaires, vos propres courses … vos propres dettes et dimanches soirs glaciaux. Youpi ! Vive les responsabili-tés ! Verseau – Je suis maladeEn même temps on est en plein hiver … à Lille ! Vous espériez quoi ? Bon, sinon, heureusement dans ce froid vos cours vont vous maintenir au chaud (grâce à votre travail ou à leur combustion … à vous de choisir). Poisson – Déjeuner en paixOh ! Quel bonheur ce serait ! Malheu-reusement, ce trimestre encore votre sympathie vous poussera à héberger les lions dans votre tanière, mais bon, au moins, cela rompra avec votre solitude hivernale.

Le WelshHoroscope

18 LE SCANDALEUX MAG #19- HIVER 2015

Détente

Le WelshIngrédients pour 4 personnes :

400gr de fromage de Cheddar4 tranches de jambon4 cuillères à soupe de bière (bière ambrée ou bière brune)25cl de bière4 à 6 tranches de pain (pain de campagne ou pain de mie)4 cuillères à soupe de moutardeSel et poivre4 oeufs (facultatif)

Dans une casserole, faites fondre le cheddar mélangé avec la bière et la moutarde. Vous obtiendrez une pâte bien lisse. Assaisonnez de sel et poivre.

Imbibez de 25cl de bière les tranches de pain. Mettez vos tranches dans des ramequins individuels. Déposez une tranche de jambon au dessus de chaque pain, puis nappez abondamment chaque ramequin avec la crème de cheddar qui recouvrera la tranche de jambon.

Enfournez le tout 10 min au four (180° Th 6).

Pour les plus gourmands, vous pouvez éventuellement rajouter un oeuf au dessus de la prépara-tion.

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Bélier – Là-bas... n’y va pas ! Ah bah si allez –y ! Cour-rez-y, même. Il est temps d’ouvrir vos horizons et d’aller chercher bonheur et travail dans des contrées plus loin-taines. Et si vous ne voulez pas, tant pis, de toute façon on ne veut plus de vous ici ! Taureau – Il est cinq heures, Paris s’éveilleEt vous, vous allez encore vous coucher tard ! Et vous relever aussitôt pour un cours en amphi à 8h. Heureusement votre pugnacité vous permet de conci-lier cours, vie sociale et santé mentale stable … jusqu’à quand ? Gémeaux – Ça plane pour moiEh oui tout autour de vous est beau et gentil. Bon il est temps d’arrêter les champis ! Rendez-vous à la réalité, on est à Lille, il pleut et les partiels ne sont jamais loin. Mais rappelez-vous que vous pouvez toujours noyer ce froid dans les frites lilloises. Cancer – Les copains d’abordVous êtes plein de bonnes résolu-tions  : moins d’alcool, au dodo à 23h, et présence à tous les cours ! Même les amphis ! … Ah … Vos potes vous pro-posent un p’tit verre rue solfé … bon, allez, la prochaine fois sera la bonne ! Lion – La BohèmeC’est un temps que les plus de 20 ans ont tous bien connu : c’est la dèche ! Vous pourrez compter une fois de plus sur vos amis pour vous héberger et vous nourrir durant ces mois glaciaux... sans quoi, la clochardise vous guette! Vierge – J’ai encore rêvé d’elleCôté cœur, célibataire ou en couple, vous allez soudainement rencontrer LA personne et vos draps s’en souvien-dront. Attention tout de même, le réveil sera rude. Votre travail au contraire, lui, est bien réel !

Balance – Ne me quitte pasAh… oui, refrain qui vous est malheu-reusement connu : que ce soit pour rete-nir votre aimé(e) qui ne supporte plus de venir vous voir dans le froid ou juste de votre connexion internet qui vous quitte à 98% du téléchargement du dernier Game of � rone.

Scorpion – Avec le tempsChose promise, chose due ! Cette fois-ci vous avez droit à un horoscope.Célibataire, vous allez en� n rencontrer quelqu’un. En couple, vous n’avez jamais été aussi heureux à 2 ! Faites juste en sorte qu’avec le temps tout ne s’en aille pas … Sagittaire – La vie en roseAh, que c’est beau de voir la vie du bon côté. Continuez ! Surtout vu ce qui va vous arriver. Entre rupture et vol de vos a� aires, il vaut mieux en e� et rester opti-miste. Ah, et au fait, le rose, c’est parce que vous avez besoin de lunettes. Capricorne – Pour moi la vie va com-mencerEn� n ! Ca y est ! Avec la vie étudiante votre vie d’adulte commence pour de vrai. Génial : votre propre appart, vos propres horaires, vos propres courses … vos propres dettes et dimanches soirs glaciaux. Youpi ! Vive les responsabili-tés ! Verseau – Je suis maladeEn même temps on est en plein hiver … à Lille ! Vous espériez quoi ? Bon, sinon, heureusement dans ce froid vos cours vont vous maintenir au chaud (grâce à votre travail ou à leur combustion … à vous de choisir). Poisson – Déjeuner en paixOh ! Quel bonheur ce serait ! Malheu-reusement, ce trimestre encore votre sympathie vous poussera à héberger les lions dans votre tanière, mais bon, au moins, cela rompra avec votre solitude hivernale.

Le WelshHoroscope

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Le WelshIngrédients pour 4 personnes :

400gr de fromage de Cheddar4 tranches de jambon4 cuillères à soupe de bière (bière ambrée ou bière brune)25cl de bière4 à 6 tranches de pain (pain de campagne ou pain de mie)4 cuillères à soupe de moutardeSel et poivre4 oeufs (facultatif)

Dans une casserole, faites fondre le cheddar mélangé avec la bière et la moutarde. Vous obtiendrez une pâte bien lisse. Assaisonnez de sel et poivre.

Imbibez de 25cl de bière les tranches de pain. Mettez vos tranches dans des ramequins individuels. Déposez une tranche de jambon au dessus de chaque pain, puis nappez abondamment chaque ramequin avec la crème de cheddar qui recouvrera la tranche de jambon.

Enfournez le tout 10 min au four (180° Th 6).

Pour les plus gourmands, vous pouvez éventuellement rajouter un oeuf au dessus de la prépara-tion.

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