Ma Chambre froide

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Ma Chambre froide

Texte original et mise en scène Joël Pommerat

du 7 au 24 juin 2012Ateliers Berthier

durée 2h

avec Jacob Ahrend, Saadia Bentaïeb, Lionel Codino, Frédéric Laurent, Serge Larivière, Ruth

Olaizola, Marie Piemontèse, Nathalie Rjewsky, Dominique Tack

scénographie Éric Soyer avec Thomas Ramon

lumière Éric Soyer avec Jean-Gabriel Valot

costumes Isabelle Deffin

son François Leymarie & Grégoire Leymarie

Production Compagnie Louis Brouillard

Coproduction Odéon-Théâtre de l'Europe, Théâtre National de Bruxelles, TNP de Villeurbanne, le

Grand T – Nantes, La Foudre – Théâtre du Petit Quevilly, La Coupole Melun Sénart, Théâtre

d’Arras, Espace Malraux – Scène nationale de Chambéry et de la Savoie, la communauté de

spectateurs de la Scène nationale de Cavaillon, Bonlieu Scène Nationale – Annecy, le Centre

National de Création et de Diffusion Culturelles de Châteauvallon – Théâtre National Lille

Tourcoing Région Nord Pas-de-Calais

L’équipe des relations avec le public

Publics de l’enseignement

Christophe Teillout 01 44 85 40 39

[email protected]

Yves-Marie Desvigne 01 44 85 41 17

[email protected]

Groupe d’adultes, groupes d’amis, associations, CECarole Julliard 01 44 85 40 88

[email protected]

Timothée Vilain 01 44 85 40 37

[email protected]

Publics de proximité des Ateliers Berthier et du champs socialAlice Hervé 01 44 85 40 47 – [email protected]

Dossier également disponible sur theatre-odeon.eu et www.tribus-odeon.fr

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Sommaire

Extrait de Ma Chambre froide

Présentation de la pièce

Résumé

Les personnages

Thématiques et enjeux

Joël Pommerat et la Compagnie Louis Brouillard

Le théâtre de Joël Pommerat

La Compagnie Louis Brouillard

Créations

Les comédiens

Ce qu'en dit la presse

Pour aller plus loin...

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Cela fait partie de ces choses dans notre vie

que nous ne voyons pas se dérouler.

Joël Pommerat

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Extrait

C’était vraiment bien de travailler avec elle

elle prenait toujours de la hauteur sur les choses

au magasin elle avait commencé comme caissière, puis était

devenue polyvalente

c'est-à-dire… qu’elle pouvait tout faire…

elle avait une théorie elle disait dans la vie les choses ne sont pas

figées…

une situation qui ne convient pas, on peut toujours la transformer

Je me souviens

c’était la seule personne autour de moi qui s’intéressait aux grandes

choses de la vie,

le cosmos par exemple et les étoiles dans le ciel, ainsi qu’aux plus

petites…

Elle disait

je me demande vraiment

où vont tous ces produits

que nous écoulons ici, au magasin, toute la journée,

et que les gens achètent, avalent, et évacuent…

Cela fait partie de ces choses dans notre vie

que nous ne voyons pas se dérouler…

aussi invisibles que les étoiles les plus éloignées du ciel…

Ma Chambre froide (Acte I), Actes Sud – Papiers

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Présentation

Face au succès de Ma Chambre froide, créé l’an dernier aux Ateliers Berthier, une reprise du

spectacle en 2012 s’imposait. Cette saison, elle fait suite à Cercles/Fictions, répondant à la

chronologie de l’œuvre de Pommerat, mais aussi à bien d’autres esthétiques ou thématiques que

les deux pièces se partagent. A commencer par un dispositif circulaire, avec un cercle plus

restreint pour Ma Chambre froide : l’arène des « fictions » laisse place à un examen « à la loupe »

de ce microcosme cruel où l’imaginaire, entre rêve et cauchemar, se voit réservé le plus bel écrin.

Le récit, simple, presque banal, est une étude au microscope d’un quotidien presque banal mais

qui fait et défait toutes les grandes questions sociétales qui le traversent, et qui souvent traversent

l’œuvre de Pommerat : l’entreprise, le travail, le pouvoir, le consumérisme...autant de thèmes qu’il

explorait il y a peu encore dans Cercles/Fictions.

A peine a-t-on quitté Pommerat avec une multitude de récits, de « fictions » qu’on le retrouve cette

fois avec une narratrice déroulant une histoire enfouie dans sa mémoire.

– Oui, une histoire, unique, en dépit de ses rebondissements et des différents plans sur lesquels

elle se déroule. Telle est la surprise : Pommerat, dans Ma Chambre froide, revient au cadre du

« grand récit » qu’il avait délaissé depuis cinq ou six ans. Mais sans rien sacrifier pour autant de la

clarté qu’il s’est forgée entre temps, ni de la capricieuse diversité des plans narratifs. Car cette

fois-ci, il semble avoir voulu puiser ses forces théâtrales dans le rythme et la forme du feuilleton !

Comme tous les feuilletons, il serait dommage de raconter la fin de celui-ci. En voici du moins les

données initiales. Nous découvrons dans sa vie quotidienne une jeune femme simple, d’une bonté

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discrète, que ses collègues et son patron exploitent sans vergogne. Mais jamais Estelle ne se

plaint, et jamais elle n’accuse ni ne condamne personne – pas même son patron, pourtant odieux

et d’ailleurs détesté de tous. Elle en est en effet convaincue, même si elle a du mal à le formuler et

plus de mal encore à se faire comprendre : en lui-même, il est bon, seules ses idées sont

mauvaises, et s’il en avait de bonnes, alors il se comporterait bien… Il suffirait peut-être que ce

patron puisse voir, vraiment voir, en quoi il se trompe pour qu’il soit transformé. Il suffirait d’une

chance de le lui faire voir… Comme disait Hamlet, « le jeu est le piège / où je prendrai la

conscience du Roi »…On le devine, le théâtre (tragédie ou comédie, car Ma Chambre froide

réserve une large place au rire) a ici un rôle essentiel à jouer. Mais l’héroïne n’est pas la seule à

devoir s’engager dans une tâche et sur un terrain inconnus pour elle. Ses collègues, eux aussi, se

voient confrontés à des choix des plus difficiles (…)

Dans Ma Chambre froide, Pommerat se plaît à rendre hommage tantôt à Brecht, tantôt à

Shakespeare, présences tutélaires accompagnant son retour, comme il avait pu s’inspirer de

Tchekhov dans Au Monde ou dans Grâce à mes yeux. Mais sa façon d’entrelacer les fils de son

récit, où suspense et humanité se renforcent et s’aiguisent l’un l’autre, n’appartient décidément

qu’à lui.

Résumé[...] Nous entrons d’abord dans la vie au jour le jour d’un magasin, avec ses coulisses

mesquines, ses rivalités de travail, ses moments de lassitude et de vertige – de pure comédie,

aussi, car Pommerat, dans l’écriture de cette création, a voulu ménager au rire une large place.

Estelle, qui sait toujours prendre «de la hauteur sur les choses», y a commencé comme caissière

avant de devenir «polyvalente» – ce qui semble signifier dans son cas que n’importe qui peut lui

demander n’importe quoi à n’importe quelle heure. Et ses camarades ne s’en privent pas plus que

Blocq, le propriétaire et le patron, un être dont la grossièreté et le cynisme brutal lui valent d’être

détesté de tous ses employés. Sauf d’Estelle, justement…

A vrai dire, quand commence cette histoire, on croirait presque à une hagiographie moderne :

l’héroïne se comporte en tous points comme une sainte, toujours dévouée, prête à se mettre en

quatre au service d’autrui, sans jamais s’en plaindre, sans même se permettre de juger ceux qui

l’exploitent. [...]

Ou la bonté de l’héroïne, son dévouement, son refus de condamner les êtres, ne sont-ils qu’un trait

de caractère sans dimension spirituelle particulière, une sorte de masochisme, le symptôme d’une

certaine faiblesse ? A moins qu’ils ne cachent un besoin de se fondre en autrui, de vivre sous le

signe de l’autre et du devenir-autre ? – Qui est-elle donc, cette Estelle ? Pas à pas, l’enquête de

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personnalité progresse, et l’étrangeté de l’héroïne va grandissant : elle a parfois de ces réflexions

qui sur le moment paraissent bizarres, voire cocasses, mais qu’on s’empresse de négliger [...] et

ce n’est qu’après coup, après sa disparition, des mois ou des années plus tard, que leur écho

revient hanter ceux qui l’ont connue et leur impose d’y déchiffrer un autre sens [...]

Ce genre de remarques, qui constituent par petites touches la singularité d’Estelle, auraient

été vouées à l’oubli si un événement n’était venu tout faire basculer. Et dès lors, de surprises en

rebondissements, Pommerat nous entraîne dans un véritable feuilleton, qui ne s’achève qu’aux

dernières secondes du spectacle : Blocq, apprenant qu’il est atteint d’un mal qui le condamne à

brève échéance, va proposer à ses employés un contrat. Il leur cède l’ensemble de ses

entreprises à condition qu’ils inventent en échange une façon de le sauver du néant pur et simple.

Et Estelle de saisir sa chance : avec ses collègues, elle s’engage par-devant notaire à écrire,

répéter et monter un spectacle sur l’existence de Blocq, dans des délais qui permettront à celui-ci

d’y assister – et donc, de comprendre ce qu’aura été sa vie, de ne pas la quitter sans s’être

métamorphosé [...]

Cependant l’héroïne, en s’improvisant auteur, metteur en scène, chef de troupe, n’est pas la seule

à devoir s’engager dans une tâche et sur un terrain inconnus pour elle. Ses collègues, eux

devenus patrons à leur tour, se voient confrontés aux choix économiques les plus douloureux, qui

leur semblaient naguère inhumains et leur paraissent à présent inéluctables… En fait, chacun des

personnages que nous accompagnons dans Ma Chambre froide va découvrir des lois qu’il ignorait

et devoir, devant elles, se mesurer : lois de l’économie, loi de la mortalité – et lois de l’art, aussi,

puisque l’art lui-même a ses exigences, qui ne sont pas moins impérieuses, voire cruelles. Or

chacune de ces lois, du fait même qu’elle impose ses rythmes, entre en conflit avec les autres. […]

Et tandis que les urgences se télescopent et s’aggravent, on sent monter peu à peu la tentation

d’imposer entre elles un arbitrage par la violence…

Une femme a disparu, une femme va disparaître : le spectacle se tient dans cet écart et

construit ce suspens. Nous revoyons vivre et agir un être qui ne sait pas encore qu’il va se

soustraire à ce monde. Et au moment où le public et l’intime, s’affolant réciproquement, viennent

se briser net sur un coup de théâtre – au moment, donc, où la comédie sociale paraît tourner au

drame policier, Pommerat parvient à nous surprendre encore en refermant tous les cercles au

point même d’où il est parti…

Daniel Loayza

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Les personnages

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Distribution Personnages

Jacob Ahrend Bertrand, magasinierLe frère d’Estelle qui travaille à l’hôpitalUn notaireLe directeur de l’abattoirUn ours polaireUn moine

Saadia Bentaïeb Adeline, chef comptableUne sœur dans le couvent Une chèvre

Agnès Berthon Claudie, caissière narratrice de l’histoireUne sœur dans le couvent L’inspectrice de police

Lionel Codino Chi, magasinier asiatique parlant mal le françaisLe voisin d’EstelleUn employé de l’abattoirUn moine

Ruth Olaizola Estelle

Frédéric Laurent Alain, second boucherUn moine

Serge Larivière Blocq, patron du magasinUn client du barUn employé de l’abattoirL’inspecteur de police

Marie Piemontese Nathalie, caissièreUne danseuse de bar

Dominique Tack Jean-Pierre, chef boucherLe mari d’Estelle, policierUne huppeUn moine

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Thématiques et enjeux

L'horreur économique La priorité de leurs bilans tient lieu de loi universelle, de dogme, de postulat

sacré, et c'est avec la logique des justes, l'impassible bienveillance des belles

âmes et des grands vertueux, le sérieux des théoriciens, qu'est provoqué le

dénuement d'un nombre toujours croissant d'êtres humains et que sont

perpétrés la soustraction des droits, la spoliation des vies, le massacre des

santés, l'exposition des corps au froid, à la faim, aux heures vides, à la vie

horrifiée.

Viviane Forrester, L' Horreur économique

La mort de leur patron confrontent les employés à la réalité économique. Inversant les rôles, ils

vont pour la première fois devoir prendre des décisions sévères, qu'ils contestaient autrefois. Cet

échange fait d'eux des emblèmes de l'impitoyable système économique, qui transforme les

victimes exploitées en bourreaux contraints par des Lois intangibles.

La catharsis artistiqueLa tragédie [...] est une imitation faite par des personnages en action et non par

le moyen de la narration, et qui par l'entremise de la pitié et de la crainte,

accomplit la purgation des émotions de ce genre.

Aristote, La Poétique

La pitié et la crainte sont des émotions fortes éprouvées par le spectateur d'une

tragédie. Il a l'habitude des pleurs et des lamentations qu'excitent les orateurs en

produisant leurs témoins devant les tribunaux. Devenue insuffisamment

émouvante, la crainte a été remplacée par la «terreur». Ces sentiments

bouleversants seraient un danger pour la cité s'ils n'étaient pas traduits par un

traitement esthétique. Aristote ne l'analyse pas, mais suggère que la purgation

rend inoffensive, et même agréable, la violence inhérente à la tragédie.

Michel Corvin, Dictionnaire encyclopédique du théâtre à travers le monde

La dénégation théâtrale permet l'expression scénique des pulsions

dangereuses, des désirs interdits : le meurtre familial, l'inceste, le déchainement

de la sexualité, tout ce que l'on résume sous le nom d'Œdipe, scéniquement

présenté, « libère » le spectateur […]. On peut dire que la dénégation théâtrale

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permet à la représentation d'investir sans obstacles les fantasmes du sujet,

puisque le jugement de réalité est refusé : je-spectateur peux parler avec et en

même temps que le comédien-personnage, dire ses paroles puisque :

1- ce n'est pas moi qui parle (mais quelqu'un qui parle, quelqu'un de présent) ;

2- les paroles que prononce le comédien, ce n'est pas lui qui les dit, mais un

autre absent.

Anne Ubersfeld, L' École du spectateur

La fascination qui s'empare progressivement d'Estelle pour sa pièce peut être de l'ordre de la

catharsis théorisée par Aristote. Elle perçoit intuitivement que le stratagème théâtral a quelque

chose de purifiant, que le mensonge de la représentation peut étrangement servir de passerelle à

la vérité. Seulement cette femme n'a pas les moyens d'exprimer ce qu'elle ressent. Et elle est

seule, désespérément seule face à ses contradictions. Plus la chose théâtrale, sensible,

pulsionnelle, devient confuse dans son esprit, plus ses collègues, obnubilés par l'implacable

logique économique, la pensent dérangée.

Transformation, Métamorphose, Cycle éternel« Mon cœur me porte à dire les formes changées en corps

nouveaux. »Ovide, Les Métamorphoses

Estelle regarde l'eau qui coule. Transformée, évaporée, utilisée, souillée, purifiée... Son mystérieux

voisin, employé dans une station d'épuration proche, l'initie à l'observation du cycle de l'eau. Cette

passion rejoint ses interrogations sur le cosmos et l'infini, l'immuable et l'inconstant.

Travestissements, métamorphoses, semblent être constitutives de sa personnalité, de son être au

monde. Mais ce qu'Estelle cherche à atteindre, justement, c'est cette continuité inaltérable au-delà

des dissemblances, une essence permanente du monde et de sa personne.

Héritage théâtralEstelle angélique en quête spirituelle n'est pas sans rappeler la Violaine claudélienne de

L'Annonce faite à Marie. Mais si Joël Pommerat reconnaît une filiation chez ses personnages et sa

trame narrative, c'est surtout chez Brecht que le lien se fait, en particulier dans deux de ses

pièces :

- La Bonne âme de Setchouan : Une petite prostituée, Chen-Té, est choisie par trois dieux

suprêmes venus sur terre pour sauver la province du Setchouan de la misère et du malheur. Ils

étaient en quête d’un être humain animé par sa seule bonté, et qui puisse démontrer par son

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exemple que l’altruisme dans ce monde impitoyable était possible. Ils n’ont trouvé qu’elle. Pour lui

permettre de faire ses preuves, ils lui laissent alors un millier de dollars avant de regagner le ciel.

Chen-Té, maintenant riche, voit affluer les quémandeurs en tous genres. Chacun autour d’elle, et

surtout les pauvres, exploite sa bienveillance ou sa pitié pour la piller et l’acculer à la ruine. A la

tête d’un commerce de tabac que ses penchants altruistes font courir à la faillite, elle finit par

s’inventer un cousin, Chui-Ta, un individu dur en affaires et inflexible, chargé pour un temps de la

défendre contre sa générosité naturelle.

- Sainte Jeanne des Abattoirs : L’histoire se passe aux

abattoirs de Chicago. D’un côté, les fabricants de

viande en conserve, et de l’autre, le chœur des

employés qui font les frais de la concurrence sauvage

entre leurs patrons. Entre les deux, les Chapeaux

noirs, groupe caritatif religieux, moitié secte, moitié

milice. Parmi eux, Jeanne Dark, jeune femme

généreuse, naïve, qui s’apercevra trop tard qu’elle s’est

laissée manipuler par les uns et les autres.

Nous retrouvons dans ces deux pièces un personnage

féminin extrêmement bon et altruiste, manipulée par

les autres auxquels elle vient en aide. Face au poids

des responsabilités qui lui incombent, Estelle, comme

Chen-Té et Jeanne sera obligée de trouver un moyen

pour s'affirmer et combattre sa gentillesse.

C'est également dans l'univers shakespearien que nous pouvons puiser des références éparses.

Blocq, comme le roi Lear accepte de léguer son entreprise à ses filles si celles-ci sont capables de

lui prouver leur amour. Mais contrairement aux hypocrites Goneril et Mégane, elles ne peuvent dire

à leur père qu'elles l'aiment.

L'utilisation du théâtre comme lieu de vérité, de révélation (des choses, des hommes) fait

directement référence à la pièce imaginée par Hamlet pour confondre son beau-père.

Le thème du travestissement se retrouve lui, entre autre, dans la comédie Comme il vous plaira.

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Joël Pommerat et la Compagnie Louis Brouillard

Joël Pommerat est né en 1963.

Il arrête ses études à 16 ans et devient comédien

à 18 ans.

A 23 ans, il s'engage dans une pratique régulière

de l'écriture.

Il étudie et écrit de manière intensive pendant 4

ans.

Il met en scène un premier texte en 1990, à 27

ans, Le Chemin de Dakar. Monologue non

théâtral présenté au Théâtre Clavel à Paris. Il

fonde à cette occasion sa compagnie qu'il

nomme Louis Brouillard. Il s'engage

personnellement à monter une pièce par an

pendant quarante ans et se promet d'embaucher

à chaque pièce les sept acteurs avec lesquels il

travaille.

Suivront les créations de Le théâtre en 1991, 25 années de littérature de Léon Talkoi en 1993, Des

suées en 1994, Les événements en 1994. Différents textes écrits et mis en scène selon un

processus qui commence à se définir. Le texte s'écrivant conjointement aux répétitions avec les

acteurs. Tous ces spectacles sont présentés au Théâtre de la Main d’Or à Paris.

En 1995, il répète et créé le spectacle Pôles au Fédérés de Montluçon. Premier texte

artistiquement abouti selon l'auteur. Et premier texte à être publié (sept ans plus tard en 2002 aux

Editions Actes Sud-Papiers). En 1997, création de Treize étroites têtes aux Fédérés puis repris au

Théâtre Paris-Villette.

Début d’une longue résidence de la compagnie au Théâtre de Brétigny-sur-Orge.

En 1998, il écrit une pièce radiophonique Les enfants, commande de France Culture.

Il co-réalise pour la radio sa pièce Les événements la même année.

Après la création de Treize étroites têtes et pendant 3 ans, jusqu’en 2000, il se consacre

exclusivement à la recherche cinématographique. Il réalise plusieurs courts métrages vidéo.

Il présente au Théâtre Paris-Villette, trois mises en scène de ses textes. Deux "recréations" Pôles

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et Treize étroites têtes et une création Mon ami.

En 2001, la compagnie Louis Brouillard entame une série de représentations de ses spectacles en

tournée. Depuis, les tournées de spectacles ne cesseront de se développer.

En 2002, il crée Grâce à mes yeux toujours au Théâtre Paris-Villette.

En janvier 2003, il crée Qu'est-ce qu'on a fait à la Comédie de Caen. Cette pièce est une

commande de la CAF du Calvados sur le thème de la parentalité. Ce spectacle est joué dans les

centres socio-culturels de la région de Caen.

En janvier 2004, il crée Au Monde au Théâtre National de Strasbourg. Début des tournées

internationales. En juin 2004, il crée Le Petit Chaperon rouge au Théâtre de Brétigny-sur-Orge.

Premier spectacle destinés aux enfants.

En février 2005, il crée D’une Seule main au CDR de Thionville.

La compagnie entame alors une résidence de trois ans avec la Scène nationale de Chambéry et

de la Savoie.

En janvier 2006 il crée Les Marchands au Théâtre National de Strasbourg.

Il crée Cet enfant en avril 2006 au Théâtre Paris-Villette, recréation du texte Qu'est ce qu'on a

fait ?.

Invité au 60e Festival d’Avignon en juillet 2006, il y présente Le Petit Chaperon rouge, Cet Enfant,

Au Monde et Les Marchands qui constituera l’un des événements marquants de festival et pour

lequel il reçoit le 3e Grand Prix des auteurs dramatiques. Cette fable théâtrale est le long

monologue d’une femme, qui raconte en voix off, sa vie que vont incarner avec profondeur et

justesse, entre réalité et fantasmes, des acteurs muets pendant tout le spectacle. L’auteur et

metteur en scène obtient la consécration, il est encensé par la critique unanime qui découvre pour

partie son approche audacieuse du théâtre, dont la conception formelle est radicale : épure de

l’écriture, espaces dépouillés, noirs massifs et lumineux – « mettre les personnages dans le vide »

– lumières fulgurantes, sons assourdissants, cris terrifiants, mais aussi intimité et silence,

tendresse, secret du vivant.

En 2007, il crée Je tremble (1) au Théatre Charles Dullin à Chambéry. Cette même année, la

compagnie entame une résidence avec le Théâtre des Bouffes du nord, de trois ans. Il crée une

nouvelle mise en scène de Cet enfant en russe, au Théâtre Praktika, à Moscou.

En mars 2008, il crée Pinocchio à l’Odéon-Théâtre de L’Europe, deuxième spectacle pour les

enfants. En juillet 2008, il crée Je tremble (2) au Festival d'Avignon et reprend Je tremble (1).

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Je tremble (1) et (2) sera repris au Théâtre

des Bouffes du nord en septembre 2008.

En janvier 2010, il crée Cercles/Fictions au

Théâtre des Bouffes du nord.

Il écrit un livret pour l'opéra d'après sa

pièce Grâce à mes yeux (musique d'Oscar

Bianchi mise en scène et création au

Festival d'Aix en juillet 2011) En octobre

2010, il crée une nouvelle mise en scène

de Pinocchio en russe au Théâtre

Meyerhold à Moscou dans le cadre des

années croisées France-Russie.

Il entame une association de trois ans avec l'Odéon-Théâtre de L’Europe et de cinq ans avec le

Théâtre National de Bruxelles.

Pommerat a également réalisé plusieurs courts métrages dont Me (moi en anglais, 1998) et

Visages (1999).

Les textes de Joël Pommerat sont édités chez Actes Sud-Papiers.

Ils sont traduits en anglais, allemand, coréen, croate, espagnol, grec, italien, roumain, russe et

suédois.

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Pinocchio, écrit et mis en scène par Joël Pommerat

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La compagnie Louis Brouillard

Joël Pommerat a crée la compagnie Louis Brouillard en 1990.

La permanence de ses collaborateurs

artistiques est une donnée fondamentale de son

travail, lui permettant de creuser sa propre

recherche au fur et à mesure de ses créations. Il

peut ainsi nourrir ses œuvres suivantes des

réussites et des échecs rencontrés dans tous

les domaines, et lui offre la possibilité d’aller

plus vite et toujours plus loin.

Aujourd’hui, cette organisation en compagnie lui

permet d’atteindre la dimension qu’il a toujours

cherchée à donner à son travail. En effet, la compagnie Louis Brouillard devient une des seules

troupes en France à avoir à son actif un répertoire de spectacles. Ce système de troupe leur

permet par exemple de présenter, dans la saison théâtrale 2006-2007, deux centre quatre vingt dix

représentations en tournant quatre spectacles différents : Le Petit chaperon rouge (créé en 2004),

Les Marchands (créé en 2006), Cet Enfant (créé en 2003), et Je tremble (créé en 2007). Cette

organisation permet également de faire vivre les spectacles plus longtemps que la moyenne, de

les laisser murir, et de pouvoir les perfectionner à l’extrême. Au fur et à mesure des

représentations, ils prennent ainsi une autre dimension. […]

Ce succès marque ainsi la réussite de cette organisation en troupe, qu’il est parvenu à instaurer

sans un lieu fixe de création. L’engagement profond de chacun des membres de la compagnie

témoigne de leur volonté à s’investir pleinement dans le projet artistique qu’il dirige. […] Joël

Pommerat s’est engagé auprès de ses acteurs à faire une création par an, et «à leur donner une

belle place dans chacune de ses pièces». Ces comédiens peuvent être qualifiés de

« permanents » [...]

Si Joël Pommerat n’impose pas de relation exhaustive à ses collaborateurs, le rythme de travail de

la compagnie est devenu tellement soutenu au fil des années que les comédiens ne peuvent pas

s’engager dans d’autres productions. Toutefois ils peuvent se retirer du travail de la compagnie

pendant un certain temps (pour jouer avec d’autres metteurs en scène). Ce faisant, ils ne

participent pas à la création en cours.

Source : Description ; analyse et interprétation de la création des Marchands, une œuvre scénique écrite et

mise en scène par Joël Pommerat. Johanna Silberstein (Directeur de mémoire : Joseph Danan)

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Créations

1990 Le chemin de Dakar Théâtre de la Main d’or1991 Le Théâtre Théâtre de la Main d’or1993 Des suées Théâtre de la Main d’or1993 Vingt-cinq années Théâtre de la Main d’or1994 Les Événements Théâtre de la Main d’or1995 Pôles Théâtre des fédérés (Montluçon)1996 Les Enfants

(pièce radiophonique)

France Culture

1997 Treize Étroites Têtes Théâtre des fédérés (Montluçon)2000 Mon ami Théâtre Paris-Villette2002 Grâce à mes yeux Théâtre Paris-Villette2003 Qu’est-ce qu’on fait ? Centre dramatique de Caen2004 Au monde Théâtre National de Strasbourg2004 Le Petit Chaperon rouge Théâtre Brétigny2005 D’une seule main Théâtre de Thionville2006 Cet enfant Théâtre Paris-Villette . Prix de la meilleure

création d’une pièce en

langue française

(syndicat de la critique)2006 Les Marchands Théâtre National de Strasbourg2007 Je tremble (1) Théâtre Charles Dullin Chambéry

Théâtre des Bouffes du Nord

. Grand Prix de

littérature dramatique

. Nominations au

Molière de l’auteur

francophone vivant et

au Molière des

compagnies (2008)2008 Pinocchio Odéon-Théâtre de l’Europe2008 Je tremble (1 et 2) Festival d’Avignon

Théâtre des Bouffes du Nord

. Nomination au Molière

de l’auteur francophone

vivant (2009)2010 Cercles / Fictions Théâtre des Bouffes du Nord . Nomination au Molière

de l’auteur francophone

vivant

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Page 18: Ma Chambre froide

. Molière des

compagnies

. Prix Théâtre de la

SACD2011 Ma chambre froide Odéon-Théâtre de l’Europe . Nomination au Molière

du metteur en scène

. Molière de l’auteur

francophone vivant

Molière des

compagnies

. Grand prix du théâtre

du syndicat de la

critique2011 Thanks to my eyes

(Opéra de chambre

d’Oscar Bianchi / livret de

Joël Pommerat)

Festival d’Aix-en-Provence

Théâtre de Gennevilliers

2011 Cendrillon Théâtre national de Belgique

Odéon-Théâtre de l’Europe2011 La Grande et Fabuleuse

Histoire du commerce

Comédie de Béthune

2013 La Réunification des deux

Corées (projet de création)

Odéon-Théâtre de l’Europe

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Le théâtre de Joël Pommerat

Il faut prendre en compte la manière dont travaille Joël Pommerat avec sa compagnie. « En

général, j’ai passé du temps tout seul à la table à réfléchir, à rêver, à prendre des notes sans

chercher à produire du dialogue, un plan, ni même des personnages. » Il distribue aux acteurs des

fragments de texte, il les envoie au plateau dès qu’ils l’ont mémorisé. Il corrige le texte demandant

aux comédiens de mémoriser les deux versions, ne sachant tout de suite ce qu’il va choisir. Il leur

demande de ne pas jouer, de ne pas être artificiels, mais « d’être avec des mots le plus

simplement possible », « de chercher le réel ». Il s’entoure également de tout le dispositif

nécessaire à la représentation. « Dès la première répétition, tout est là : régisseur, lumière, son,

costumes. Tous les éléments comptent au moment du travail. » Joël Pommerat essaie alors de

« positionner la parole en rapport avec l’espace, le son et la lumière. » La mise en scène est une

écriture. « Je mets en scène parce que c’est un moyen d’aller au bout du travail d’écrivain ». C’est

peu à peu que les sens émergent, que le spectacle prend forme même s’il reste un état du travail

susceptible d’évoluer, de se modifier. De cela on retiendra notamment que la parole au théâtre est

pour l’auteur un résidu de la représentation à partir de laquelle il convient de créer des images que

les émotions dans la lecture suscitent.

Une écriture scéniqueIl n’existe pas, dans le théâtre de Joël Pommerat, de séparation entre les activités d’écrivain, qui

auraient lieu dans un premier temps, et celles de metteur en scène, qui leur succèderaient […]

La démarche de Joël Pommerat […] est en rapport avec sa conception de l’écriture dramatique.

Cette écriture ne se borne pas à la production du texte de théâtre, mais elle s’étend au contraire

pour envelopper aussi la scène. Elle est en même temps écriture du texte et écriture scénique. Le

concept d’écriture scénique, quand il est utilisé, revêt différents signifiés. Pour une formulation

intuitive, nous pouvons citer ce que Jean-Pierre Engelbach dit à propos des objectifs que s’est

fixée Noëlle Renaude pour l’écriture de Ma Solange, comme te raconter mon désastre :

« Écrire directement pour la bouche, pour le corps de l’acteur ; écrire directement pour l’espace de

la scène, pour le volume de la salle, sans l’intermédiaire du metteur en scène, écrire directement

pour l’instant de la représentation, pour le jeu, pour la parole ; écrire directement pour l’oreille, pour

le plaisir du spectateur, pour la mise à l’épreuve immédiate du texte...»

L’écriture scénique serait un type d’écriture, produite au plus près du plateau, qui tiendrait compte

des données essentielles de la représentation : le corps du comédien, l’espace, la réception de la

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Page 20: Ma Chambre froide

part du spectateur, etc. Cette idée vise donc seulement le texte dramatique. L’écriture scénique

serait composée de mots qui auraient la qualité d’être immédiatement appropriés pour la scène,

puisqu’ils ont été produits en tenant compte d’elle. [...]

Pour Joël Pommerat, l’écriture scénique implique un élargissement de l’idée d’écriture, qui

effacerait la différence entre l’écrivain et le metteur en scène. Il se réclame enfant d’une génération

de metteurs en scène pour lesquels la mise en scène atteint le statut d’une écriture. La mise en

scène «réécrit» le texte sans changer les mots, mais en leur donnant chaque fois un nouveau

sens. […]

Entre ces « deux écrivains », celui de la scène, qui réécrit un texte en le mettant en scène, et celui

des mots, Joël Pommerat voit une continuité.

« Je crois que je suis comme un enfant de cette nouvelle génération de metteurs en scène qui

m’ont finalement convaincu que la mise en scène était une écriture. Donc, tout simplement, être

metteur en scène, c’est être dans l’écriture. Alors, après c’est juste une question de

développement du processus. C’est-à-dire que, à un moment donnée, quand tu auras écrit cinq ou

dix fois Hamlet sans changer un seul mot, tu auras envie de réécrire Hamlet, mais en allant même

jusqu’à changer les mots. Cela est associé au concept de palimpseste. C’est-à-dire après avoir

réécrit sans changer le texte, tu commences à réécrire en effaçant le manuscrit et en réécrivant

par-dessus, ce qui est la définition du palimpseste : effacer un parchemin et réécrire un parchemin.

[…] C’est bien par cette définition de la mise en scène que je suis devenu écrivain. »

Processus d’écriture et dramaturgieSelon Joël Pommerat, l' « histoire » n’est pas une

bonne façon d’aborder l’écriture de théâtre. […]

Lors du processus de création théâtrale, il avanc[e]

avec une grande méfiance vis-à-vis du

développement fictionnel. L’histoire n’est donc pas

conçue en premier lieu, ce qui serait artificiel, mais

elle doit s’imposer à la fin du processus.

Schématiquement, on peut dire que son

développement suit un parcours qui va de l’image

fantôme au personnage, du personnage aux

situations et des situations à l’histoire.

Joël Pommerat s’accorde un moment d’écriture

préalable au travail avec les comédiens, où il s’agit

de « bâtir des figures » à partir de l’imaginaire, de

« dresser des espèces d’images fantômes ». Puis

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Page 21: Ma Chambre froide

il va chercher à donner de la chair à ses images, à travers un travail sur le concret, qui se fait peu

à peu, jusqu’à définir les personnages. […] Les personnages occupent donc pour Joël Pommerat

la place primordiale. Sa recherche tente d’abord de les développer, de leur donner le plus de chair

et de vie possible. C’est seulement ensuite qu’il construit une histoire à partir d’eux :

« Pour moi ce sont les personnages qui induisent la fable, et ce n'est pas la fable qui va venir en

premier et ensuite agir sur les personnages. Dans mon processus d’écriture, les personnages

existent en premier. C’est parce que ce qui m'intéresse c’est raconter ces êtres là, que ces êtres

vont me conduire à produire une fable. […] La

fable, même si elle est un peu baroque, un peu tordue, doit être générée presque naturellement

par les personnages. C’est-à-dire que ce n’est pas moi qui dois avoir la bonne idée, la fable doit

s’imposer. Les personnages imposent la fiction ».

La recherche de la « présence »Nous avons dit que Joël Pommerat prenait le temps de

développer les personnages à partir des images fantômes

originaires, en essayant de rester dans la vérité de ces

personnages,

sans leur imposer tout de suite une fiction. Or ce développement

est produit dans une recherche de la «présence», qui est liée

pour Joël Pommerat à un travail sur le plateau plutôt qu’à une

recherche littéraire.

« Je ne considère pas l’écriture du texte comme l’essentiel de

l’écriture théâtrale. C’est-à-dire que, pour moi, ce qu’il y a

d’essentiel et urgent à représenter au théâtre aujourd’hui, c’est le corps, la présence. Cette notion

de présence est essentielle pour moi, c’est ma fascination première, mon centre d’intérêt premier.

Je crois qu’aujourd’hui, ce n’est pas simplement à travers le langage, ce qu’on appelle le texte,

qu’on peut représenter l’homme. Ce n’est pas seulement à l’intérieur d’une histoire, d’une fiction

qu’on peut le représenter, mais à travers une représentation, comme un sculpteur cherche à

représenter le corps, la présence humaine, comme un photographe cherche à saisir la personne.

Pour révéler cette présence, je dois placer mes personnages dans un temps et un espace

extrêmement concrets. Je crois que, au théâtre, si le temps et l’espace ne sont pas concrétisés

avec précision, la présence est ratée. »

Source : Le processus d’écriture et la pratique scénique chez Joël Pommerat et Rafael Spregelburd.

Le cas de Au Monde et La Panique, Guillermo Pisani. (Directeur de recherches : Joseph Danan)

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Page 22: Ma Chambre froide

Les comédiens

Jacob AhrendTrilingue français-néerlandais-allemand.

Formation en interprétation dramatique à l’Insas (Institut National Supérieur des Arts du

Spectacle). Il joue dans plusieurs créations pour le jeune public. Il a mis en scène plusieurs textes,

notamment L’Amant de Pinter. Il tourne dans de nombreux films et téléfilms.

Au théâtre il a joué sous la direction notamment de Philippe Sireuil, Monique de Laere, Michel

Dezoteux, Alain Maratrat. Il travaille pour la première fois avec Joël Pommerat pour la création

Cercles/Fictions.

Saadia Bentaïeb Formation avec Philippe Adrien, Robert Cantarella, Gabriel Garran, Marc-Michel Georges, Claude

Merlin, Ariane Mnouchkine. Depuis 1981, a joué notamment avec Philippe Adrien (Cami), Bernard

Beuvelot (Patard), Maurice Attias (Fatima Gallaire), Thierry Atlan (Feydeau), Archaos, Y. Poirier

(Renaude), Ghislaine Dumont (Ionesco), Christophe Thiry (Marivaux), Sabine Stepanoff, PA Sagel,

Ghislaine Beaudout (Copi), Vincent Colin, Sophie Renauld (W).

Avec Joël Pommerat Pôles, Mon ami, Treize étroites têtes, Grâce à mes yeux, Qu’est-ce qu’on a

fait ?, Le petit chaperon rouge, Au monde, D’une seule main, Les Marchands, Cet enfant, Je

tremble (1 et 2), Cercles/Fictions.

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Page 23: Ma Chambre froide

Lionel CodinoFigurant dans plusieurs courts-métrages (Mon printemps talons hauts, de Viva Delorme, ou

Scenarii de Florent Troch), comédien dans le spectacle W de Sophie Renauld en 2001, c'est

surtout avec Joël Pommerat que Lionel Codino lance sa carrière artistique. Il joue dans quasiment

toutes ses créations : Pôles, Mon ami, Treize Étroites têtes, Grâce a mes yeux, Au Monde, D'une

seule main ou plus récemment dans Les Marchands, et Je Tremble (1) et (2)

Serge LarivièreComédien, il a beaucoup travaillé pour la télévision et pour au cinéma notamment avec Benoît

Délépine, Gustave Kerven, Pierre Jolivet, Jean-Pierre et Luc Dardenne, Martin Provost, Jaco Van

Dormael, Michel Houellebecq, Samuel Benchetrit, Philippe Blasband, Yolande Moreau et Gilles

Porte, Costas Gavras, Bouli Lanners…

Au théâtre avec Michel Kacelenbogen, Thierry Debroux, L. Wanson, Beno Besson, Dominique

Séron, Philippe Blasband et de nombreux spectacles avec Charlie Degotte … Sous la direction de

Joël Pommerat, il a joué dans Cercles/Fictions.

Frédéric Laurent1er prix d’art dramatique au Conservatoire Royal de Bruxelles. Maitrise en droit à L’université libre

de Bruxelles. DEA en droit européen à l’Institut d’études européennes de Bruxelles. Comédien au

cinéma, à la télévision et dans des courts-métrages.

Au théâtre, il a joué, entre autres, pour Bernard de Coster, Adrian Brine, Frédéric Dussenne, Jean-

Marie Villégier, Jacques Lassalle, Philippe Van Kessel, Deborah Warner, Laurent Maciet, Jean

Quercy, Gilbert Ponté… Il était également présent dans la création Cercles/Fictions de Joël

Pommerat.

Marie PiemontèseComédienne, elle a joué pour le cinéma avec Jean-Pierre Jeunet (La Cité des enfants perdus

-1995) et Emmanuel Mouret (Promène toi donc tout nu ! -1999 et Laissons Lucie faire – 2000). Au

théâtre elle travaille avec Sophie Renauld dans W, et Matthieu Roy dans Paix. Présente dans Je

Tremble (1) et (2), Les Marchands, Cet Enfant, Au Monde et D'Une seule main, c'est une

collaboration de longue date qu'elle entretient avec Joël Pommerat.

Ruth OlaizolaElle a enregistré plusieurs pièces pour France Culture. Elle a également travaillé avec Claude

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Page 24: Ma Chambre froide

Merlin (Les Eblouissements de M. Maurice, Nocturne à tête de cerf). Elle a été dramaturge pour le

spectacle-opéra Don Quichotte et les tréteaux de Maître Pierre mise en scène par Jacques

Falguière.

Par ailleurs, elle est titulaire d’un doctorat qui porte sur l’analyse de la problématique de l’acteur au

XVIIe siècle dans le cadre du théâtre des jésuites et de leur condamnation du théâtre professionnel

(Les jésuites au théâtre dans l’Espagne du Siècle d’or : théories et pratiques, 1588-1689).

En collaboration avec Joël Pommerat, elle a réalisé des courts-métrages dans le cadre d'un atelier

vidéo-théâtre à Brétigny-sur-Orge, et elle a joué dans Un fils, court-métrage dirigé par Joël

Pommerat.

Elle travaille avec Joël Pommerat depuis 1994 (Des Suées, Pôles, Présences, Treize étroites

têtes, Mon ami, Grâce à mes yeux, Qu'est-ce qu'on a fait ? Au monde, D’une seule main, Les

Marchands, Cet enfant, Je tremble (1 et 2)).

Nathalie Rjewsky A beaucoup joué dans les théâtres institutionnels, pour Luc Fonteyn, Zouzou Leyens, Pascal

Crochet, Jules-Henri Marchant, etc. Ma Chambre froide est sa première collaboration avec Joël

Pommerat. Au cinéma, elle a joué dans Gerda 85, de Patricia Gelise. Actuellement, elle mène une

recherche sur le clown, et sur une autre façon de faire du théâtre.

Dominique TackDiplômé de l’INSAS en Interprétation Dramatique en 1987.

Lauréat aux Prix du Théâtre 2001 (presse belge), meilleur comédien.

Connaissance en Néerlandais, Anglais, Italien, Espagnol et Arabe dialectal maghrébin. Il a travaillé

depuis avec, entre autres, François Beukelaers, Wim Vandekeybus, Patrice Bigel, Thierry Salmon,

Bruno Stori, Letizia Quintavalla, Pascal Crochet, Marian Del Valle, Dirk Opstaele, Lukas Hemleb,

Xavier Lukomski, Jacques Delcuvellerie, Pietro Varasso, Michel Tanner, Virginie Jortay, Patrick

Descamps, Charlie Degotte, Martine Doyen, … Cercles/Fictions marque sa première collaboration

avec Joël Pommerat.

Depuis 2003, il collabore à des projets de groupes et associations d’artistes et intellectuels,

engagés dans la création et la diffusion artistiques au Pérou et en Amérique du Sud. Il a animé

régulièrement divers ateliers pédagogiques en Belgique, France, Espagne, Italie, Maroc, ainsi

qu’au Pérou.

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Page 25: Ma Chambre froide

Ce qu'en dit la presse

Source : Théâtral Magazine, Février-Mars 2011

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Page 26: Ma Chambre froide

Source : Télérama, mercredi 9 mars 2011

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Page 27: Ma Chambre froide

Source : Le Figaro, Vendredi 11 mars 2011

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Page 28: Ma Chambre froide

Source : L’Express Style, Mercredi 16 mars 2011

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Page 29: Ma Chambre froide

Source : Les Inrockuptibles, Mercredi 23 mars 2011

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Page 30: Ma Chambre froide

Le Monde.fr

Le génial feuilleton théâtral de Joël PommeratSi vous entrez dans Ma chambre froide, vous n'en sortirez pas. Le nouveau spectacle de Joël

Pommerat, dont la première a eu lieu mercredi 2 mars, aux Ateliers Berthier du Théâtre de

l'Odéon, dégage une force d'attraction telle qu'il est impossible de lui résister : il vous entraîne

comme un manège un peu dangereux, et vous poursuit longtemps après que vous l'avez quitté,

vous laissant totalement séduit et, en même temps, mal à l'aise. De telles expériences sont rares

au théâtre. Elles valent l'inconfort des sièges du dispositif dans lequel la pièce se joue.

Ce dispositif est celui d'un cirque, avec des gradins qui donnent une vue plongeante sur la piste où

Ma chambre froide se déroule, comme un feuilleton. Cela commence dans le noir absolu, d'où

surgit une voix. Elle dit qu'il va être question d'une femme, Estelle, qui a disparu depuis dix ans, en

laissant un petit carnet dans lequel elle a noté son histoire. Cette femme était étrange. Elle aimait

le théâtre et les déguisements, s'intéressait aux étoiles et voulait toujours faire le bien des autres.

Elle pensait que dans la vie rien n'est jamais figé, et qu'on peut toujours faire évoluer une situation.

La narratrice avait connu Estelle dans le magasin où elles travaillaient. Elle était très appréciée,

parce qu'elle était polyvalente, et rendait service à ses camarades.

La voilà sur la piste, cette Estelle en blouse verte, avec ses lunettes, son petit visage sévère et son

calme. Autour d'elle, il y a Alain et Jean-Pierre, les deux bouchers, Bertrand, Adeline, Claudie,

Nathalie et Chi, le Chinois qui vit depuis vingt ans en France et que personne ne comprend, sauf

Estelle. Et puis, il y a le patron, Block, qui possède, en plus du magasin, une cimenterie, un bar de

nuit et un abattoir. Il est fier de sa réussite, grossier et direct : "Un travail, aujourd'hui, c'est un

privilège, et un privilège, faut que ça se mérite. C'est ça la démocratie." Mais un jour, au milieu

d'une réunion avec ses employés, Block apprend qu'il est condamné par une tumeur au cerveau.

C'est là que le feuilleton vire. Block ne veut pas laisser ses biens à sa famille, qu'il déteste. Il

décide de les donner à ses employés. Mais il pose une condition : que chaque année, ils lui

consacrent une journée, pour lui rendre hommage. Estelle propose qu'ils le fassent à travers une

pièce de théâtre. Les voilà donc s'essayant au métier d'acteur, et cela donne des scènes

hilarantes. Les voilà aussi confrontés aux obligations de patrons, et cela vire au cauchemar. Joël

Pommerat dévide ainsi deux histoires, auxquelles il faut ajouter celle du meurtre du mari d'Estelle,

retrouvé dans la chambre froide.

Tout le temps du récit, Estelle demeure fidèle à elle-même : elle veut le bien, mais avec une

détermination telle qu'elle en devient trouble. Que masque la gentillesse absolue de la jeune

femme ? Joël Pommerat travaille les zones d'ombre de l'humain comme il travaille le gouffre de

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Page 31: Ma Chambre froide

l'échec économique dans lequel plongent la jeune femme et ses camarades : avec un pessimisme

dur, qui s'appuie sur une fatalité obscure. Il y a, dans sa vision du travail et de la vie, quelque

chose d'intransigeant, qui laisse peu de place à la liberté. D'où ce mal-être que l'on ressent, ce

sentiment de danger dans lequel il nous entraîne.

Mais, en grand artiste, Joël Pommerat sait tenir les rênes de son propos. Ma chambre froide est un

spectacle d'une virtuosité géniale, oui, c'est le mot qui convient. Découpées en séquences, comme

au cinéma, les scènes s'enchaînent d'une manière hypnotisante. On a l'impression qu'elles sortent

directement du cerveau du metteur en scène, et qu'un tour de magie les rend concrètes sur la

piste. Elles peuvent aller du trivial au fantasmagorique, sans jamais rien perdre de leur beauté

stupéfiante, taillée dans le noir et blanc et traversée d'éclats foudroyants de lumière.

Et puis, il y a les neuf acteurs, qui, eux aussi, semblent nés directement des visions de Joël

Pommerat. On se demande ce qu'il leur dit, et comment il les fait travailler, pour qu'ils soient à ce

point individuels et unis comme un choeur - au point que leurs rôles ne sont pas spécifiés, dans la

bible du spectacle. Parfaits de bout en bout, ils sont, au même titre que le metteur en scène, les

auteurs de cette Chambre froide qu'on n'est pas près d'oublier.

Source : Le Monde.fr, Brigitte Salino,mise en ligne le 18 avril 2011

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Page 32: Ma Chambre froide

Pour aller plus loin...

Bibliographie• Théâtres en présence

de Joël Pommerat, Actes Sud-Papiers/Collection Apprendre - mars 2007

• Joël Pommerat, troubles

de Joëlle Gayot et Joël Pommerat - Editions Actes Sud - août 2009

• « Le cas de Au Monde et La Panique » in Le processus d’écriture et la pratique scénique

chez Joël Pommerat et Rafael Spregelburd.

Guillermo Pisani. (Directeur de recherches : Joseph Danan)

• Le Théâtre de Joël Pommerat : Présences en scène / présence au monde : l'épiphanie

d'un mystère : Focus sur la mise en scène de Les Marchands

Isabelle Antoine (Directeur de thèse : Anne Surgers)

• Joël Pommerat ou le corps fantôme

Flore Lefebvre des Noëttes (Directeur de recherches : Georges Banu)

Travail universitaire• Description ; analyse et interprétation de la création des Marchands, une œuvre scénique

écrite et mise en scène par Joël Pommerat.

Johanna Silberstein (Directeur de mémoire : Joseph Danan)

Webographie• le site «pièces (dé)montées», du CRDP de Paris :

http://crdp.ac-paris.fr/piece-demontee/piece/index.php?id=je-tremble

http://crdp.ac-paris.fr/piece-demontee/pdf/pinocchio_total.pdf

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