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ZONE / PAGE 5 Distribution (par ordre alphabétique) Nicolas Desfossés ........................................... Tarzan Dave Jenniss ................................................ Moineau Maxime Lavoie..................................... Passe-Partout Richard J. Léger ........................................ Le policier Frédérique Thérien..................................... Ciboulette Jean-Simon Traversy .................................... Tit-Noir Concepteurs et collaborateurs artistiques Dramaturge ................................... Antoine Côté Legault Scénographie et accessoires .............. Dominic Manca Éclairages .............................................Guillaume Houët Costumes ....................................................... Nina Okens Conception sonore ....................... Jean-Michel Ouimet Assistance à la mise en scène et régie ........................................................ Alain Lauzon Équipe de production – Théâtre français de Toronto Direction artistique .................................... Guy Mignault Direction administrative et financement ........................................ Ghislain Caron Direction de production......................... Dominic Manca Équipe de production – Théâtre la Catapulte Direction artistique .........................Jean Stéphane Roy Direction administrative .........................Sibylle Berger Agent de production et de tournée. Lindsay Tremblay Équipe de production – Théâtre Denise-Pelletier Direction de production...........................Réjean Paquin Direction technique.................... Jean-François Landry Attachée de presse .................................. Isabelle Bleau Équipe de scène – Théâtre Denise-Pelletier Chef machiniste....................................... Pierre Léveillé Chef électricien ...................................Michel Chartrand Chef sonorisateur ..........................................Claude Cyr Chef habilleuse ................................... Louise Desfossés Chef cintrier ........................................ Pierre Lachapelle L'ÉQUIPE DU SPECTACLE ZONE Texte de Marcel Dubé Mise en scène de Jean Stéphane Roy Une production du Théâtre français de Toronto et du Théâtre la Catapulte (Ottawa), présentée par le Théâtre Denise-Pelletier Salle Denise-Pelletier Du 25 septembre au 18 octobre 2013

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Distribution (par ordre alphabétique)Nicolas Desfossés ........................................... Tarzan

Dave Jenniss ................................................ Moineau

Maxime Lavoie .....................................Passe-Partout

Richard J. Léger ........................................ Le policier Frédérique Thérien .....................................Ciboulette Jean-Simon Traversy .................................... Tit-Noir

Concepteurs et collaborateurs artistiquesDramaturge ...................................Antoine Côté Legault Scénographie et accessoires ..............Dominic Manca Éclairages .............................................Guillaume Houët Costumes .......................................................Nina Okens Conception sonore ....................... Jean-Michel Ouimet Assistance à la mise en scène

et régie ........................................................ Alain Lauzon

Équipe de production – Théâtre français de TorontoDirection artistique ....................................Guy MignaultDirection administrative

et financement ........................................Ghislain CaronDirection de production .........................Dominic Manca

Équipe de production – Théâtre la CatapulteDirection artistique .........................Jean Stéphane RoyDirection administrative .........................Sibylle BergerAgent de production et de tournée . Lindsay Tremblay

Équipe de production – Théâtre Denise-PelletierDirection de production ...........................Réjean PaquinDirection technique ....................Jean-François Landry

Attachée de presse .................................. Isabelle Bleau

Équipe de scène – Théâtre Denise-PelletierChef machiniste ....................................... Pierre LéveilléChef électricien ...................................Michel ChartrandChef sonorisateur ..........................................Claude CyrChef habilleuse ...................................Louise DesfossésChef cintrier ........................................Pierre Lachapelle

L'ÉQUIPE DU SPECTACLE

ZONETexte de Marcel DubéMise en scène de Jean Stéphane RoyUne production du Théâtre français de Toronto et du Théâtre la Catapulte (Ottawa), présentée par le Théâtre Denise-PelletierSalle Denise-PelletierDu 25 septembre au 18 octobre 2013

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Le Théâtre français de TorontoEn quarante-trois ans d’existence, le Théâtre français

de Toronto (TfT) est devenu un des plus importants

théâtres de langue française hors Québec avec près de

240 productions à son actif. Aujourd’hui le TfT accueille

chaque saison plus de 10 000 spectateurs venus de

toute la région métropolitaine torontoise et du sud-

ouest de l’Ontario et il compte près de mille abonnés.

La saison du TfT comporte cinq spectacles grand public,

deux spectacles pour adolescents et un spectacle pour

enfants. Le TfT joue au Berkeley Street Theatre depuis

1990. Il offre à son public francophone et francophile

un répertoire varié qui comprend créations, œuvres

canadiennes, internationales et grands classiques. Ses

productions partent régulièrement en tournée à travers

l’Ontario et tout le Canada. Compagnie éclectique, le TfT

crée, produit et accueille des productions théâtrales d’ici

et d’ailleurs. La création occupe une place importante

dans la démarche artistique du TfT ; elle est source

d’échanges, de découvertes et de ressourcement. Les

choix artistiques du TfT sont portés par le besoin de

raconter, de surprendre et d’émouvoir les amateurs

de théâtre en français, qu’ils soient des enfants, des

adolescents ou des adultes.

www.theatrefrancais.com

Le Théâtre la CatapulteLe Théâtre la Catapulte est une compagnie de

développement et de création enracinée en Ontario

français, proposant des expériences artistiques

audacieuses et contemporaines nourries par la fougue

des artistes en émergence et des artistes établis. Il

assure à ses productions une diffusion importante en

les présentant à ses divers publics, à Ottawa et en tournée

dans l’ensemble du Canada.

Fondé par un groupe de jeunes artistes sous la direction

de Patrick Leroux en 1992, ce théâtre tourné vers l’avenir

de la pratique théâtrale a présenté plus de 30 productions

professionnelles, et autant de mises en lecture et de

laboratoires publics diffusés sur une échelle régionale,

provinciale et nationale.

Le Théâtre la Catapulte est aujourd’hui perçu comme

une des forces artistiques les plus importantes du Grand

Outaouais et du Canada français. Il s’est mérité de très

nombreux prix locaux, provinciaux et nationaux au cours

des dernières années. Ayant maintenant pignon sur rue,

la visibilité de la compagnie ne cesse de croître.

www.catapulte.ca

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PRÉSENTATION ET RÉSUMÉ

Zone raconte l’histoire d’une bande de cinq jeunes de 16 à 20 ans, issus d’un quartier pauvre de Montréal, qui ont tous vécu une vie familiale difficile : parents alcooliques, violence, abandon… Dirigés par leur chef Tarzan, ils prennent leur destin en main et s’adonnent à la contrebande de cigarettes dans l’espoir de gagner suffisamment d’argent pour surmonter leur misère. Tous les cinq sont guidés par ce rêve, jusqu’à ce qu’un jour Tarzan soit surpris par un douanier au moment de sauter illégalement la frontière américaine. Pris par la peur et la panique, il perd ses moyens et tue le douanier… Les cinq contrebandiers devront faire face à un policier prêt à tout pour savoir la vérité. Et que deviendra Ciboulette, elle qui est secrètement amoureuse de Tarzan ?

Zone est créé par l’équipe de La Jeune Scène le 23 janvier 1953 lors du Festival dramatique de l’Ouest du Québec dans une mise en scène de Robert Rivard et des décors de Robert Prévost. La pièce se mérite les trophées Calvert et Arthur B. Wood, alors que les comédiens Monique Miller (Ciboulette) et Raymond Lévesque (Moineau) remportent les prix d’interprétation. À la clôture de tous les concours régionaux du Canada, la pièce se voit attribuer le prix sir Barry Jackson pour la meilleure pièce, et toute l’équipe est invitée à la grande finale qui aura lieu à Victoria en Colombie Britannique. Le juge évaluateur est Pierre Lefebvre, comédien et

metteur en scène du Old Vic de Londres. L’équipe de Zone remporte tous les prix.

Pas de paradis au fond de la ruelle

Photo: Josée Robidoux, Pauline Traversy, David McKinney (participants de Wikipedia Takes Montreal)

Tarzan voulait sortir ses amis de la ruelle pour les emmener au paradis. Mais la ruelle de leur enfance se termine dans un cul-de-sac.

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Le théâtre de Dubé est un théâtre de personnages. Comme souvent, Dubé a créé les personnages en pensant à des comédiens qu’il aimait. Zone aurait été écrit pour Monique Miller et Guy Godin. Le sort de ses personnages se confond avec celui du Québec des années cinquante. Mais aujourd’hui, la pièce Zone peut être abordée dans toute son actualité. Ces cinq adolescents demeurent les représentants de notre société afin que tous puissent s’identifier au besoin de prise de parole, au besoin de rêver.

Zone, c’est aussi une histoire d’amour qui ne peut pas se dire. Marcel Dubé l’expliquait ainsi : « Ciboulette aime Tarzan. En silence. Et Tarzan l’aime aussi. Mais en image. Il l’aime parce qu’elle lui suggère des images étranges. Des images de fleur maladive, de reine cachée, insoumise et sauvage. Dans le cœur de Ciboulette, l’amour grandit sur deux plans : celui de l’adoration pour le beau garçon qu’est Tarzan et celui de l’inquiétude pour le risque qu’il court ».

Dès cette époque, Dubé apparaît déjà comme le plus important des

dramaturges canadiens-français.

Zone a germé chez le jeune auteur après la lecture d’un fait divers paru dans un journal, mais aussi en se souvenant d’une aventure qui lui était arrivée alors qu’il était étudiant. Pour avoir voulu passer une fin de semaine à Plattsburg, Marcel Dubé avait été refoulé à la frontière américaine faute de papiers d’identité. Comme il s’était rendu sur le pouce, il n’avait pas voulu rebrousser chemin et avait attendu la nuit pour traverser la frontière par les bois. Il n’a jamais oublié la peur ressentie cette nuit-là.

Mais au-delà du fait divers, Dubé évoque le songe de l’enfant qui ne veut pas grandir et encore moins sortir de son milieu. Il nous montre des jeunes qui ne trouvent pas leur place dans la société et qui ne trouvent pas d’autre espace que la gang pour s’affirmer.

Frontière, Canada/États-Unis, 1959

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Chez Tarzan, l’amour a la pureté d’un amour de douze ans. C’est la première fois qu’il aime, et la dernière. Au troisième acte, il veut retrouver Ciboulette, lui avouer son amour et en dessiner une image sublime : « Laisse-moi te calquer dans ma tête comme à l’école on calquait des dessins sur nos tablettes magiques ».

Pour Mario Borges, Tarzan, Ciboulette, Passe-Partout, Tit-Noir et Moineau choisissent de « vivre dans l’action, libres d’agir, de penser et de s’exprimer selon leurs propres choix. […] Zone est un cri de liberté, d’amour et de compassion. 1»

MARCEL DUBÉ : POUR METTRE AU MONDE SON PROPRE THÉÂTRE

Dramaturge prolifique, Marcel Dubé a signé plusieurs centaines de textes pour la scène, la radio, la télévision et différents journaux et magazines auxquels il a collaboré en cinquante ans de carrière d’écrivain. Il occupe une place très particulière entre Gratien Gélinas et Michel Tremblay. D’une extrême sensibilité, son écriture a ému des générations de spectateurs par la finesse de son style et l’intelligence de son regard.

Marcel Dubé est né à Montréal en 1930. Il étudie au collège Sainte-Marie tout près de la salle du 1 Mario Borges, « Zone… à la frontière de la liberté », Revue de théâtre

Jeu, No 106, 2003.

Gesù où se produisaient les Compagnons de Saint-Laurent et le Théâtre du Nouveau Monde (TNM). Alors qu’il est encore au collège, il se fait engager comme portier, ce qui lui permet de découvrir de nombreuses pièces, dont Tit-Coq de Gratien Gélinas. Il se passionne pour l’œuvre des auteurs dramatiques Jean Giraudoux, Jean Anouilh, Henry de Montherlant, Jean-Paul Sartre et Albert Camus. Dès 1949, il se fait connaître avec un recueil de poèmes intitulé Couleurs des jours mêlés. En 1950, il commence à écrire des textes pour la radio qui sont retransmis sur les ondes de Radio-Canada. Il risque ses premiers textes pour payer ses études en littérature à l’Université de Montréal. Il veut devenir professeur de littérature québécoise. En cinq ans, Radio-Canada diffusera, à la radio, quatorze de ses dramatiques. En 1951, Dubé fonde avec des amis une troupe de théâtre, et se consacre dès lors à sa vocation théâtrale.

Il écrit Zone, sa première pièce en trois actes en 1952 (elle sera présentée devant public en 1953). L’année 1952, c’est aussi les débuts de la télévision au Québec. Cet événement est capital pour Dubé qui verra, de 1952 à 1972, vingt-trois télé-théâtres et deux feuilletons présentés à la télévision de Radio-Canada. Comme il vit encore chez ses parents, il investit tout ce qu’il gagne à la radio et à la télévision dans la production de ses pièces de théâtre. Il peut dire qu’il a mis au monde son propre théâtre : « …pas seulement

La Jeune Scène : Julien Plouffe, Hubert Loiselle, Robert Rivard, Guy Godin, Monique Miller, Marcel Dubé

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comme auteur, mais comme producteur, constructeur de décors (un de mes frères m’aidait), régisseur. Je concevais aussi les éclairages. Je m’occupais de tout sauf de la mise en scène.2 » Boursier du Québec en 1953, il voyage en Europe et se rend en France où il fait des stages dans différentes écoles de théâtre jusqu’à son retour en 1954.

Avec ses pièces Zone (1953), Florence (1957), Un simple soldat (1957), Bilan (1960), Les Beaux Dimanches (1965), Au retour des oies blanches (1966), Marcel Dubé a campé des personnages qui sont devenus des archétypes de la dramaturgie québécoise, incarnés par des comédiens passionnés comme Jean Duceppe, Denise Pelletier, Andrée Lachapelle, Monique Miller, Jean Gascon, Gilles Pelletier. À ceux qui lui reprochaient d’être noir et pessimiste, il répondait : « Je ne veux pas être noir et pessimiste. Je cherche seulement à découvrir la tragédie chez mes personnages.3 » Même si sa dernière pièce, L’Amérique à sec, date de 1987, Marcel Dubé affirme aujourd’hui qu’il pense toujours au théâtre, ce qui ne l’empêche pas de s’intéresser à d’autres écritures : portrait de son amie comédienne Andrée Lachapelle (Andrée Lachapelle entre ciel et terre, 1995), livre commenté des œuvres du peintre Jean-Paul Lemieux (Jean-Paul Lemieux et le livre, 1988), premier roman à l’âge de 70 ans (Yoko ou le retour à Melbourne, 2000).

Extraits de textes de Véronique Borboens, publiés dans le No 52 des Cahiers du TDP.

MARCEL DUBÉ, AUTEUR ENGAGÉ

L’œuvre de Dubé est immense : plus de 300 titres. Mais ce travail titanesque ne l’a pas empêché de s’engager dans d’autres domaines. Il a été secrétaire, puis président du Conseil de la 2 Extrait d’un entretien réalisé par Marie-Andrée Brault dans Jeu, Revue

de théâtre, No 106, janvier 2003.3 Dans Textes et document, de Marcel Dubé, Leméac, collection

Documents, Montréal 1973.

langue française, président-directeur général des Rencontres francophones du Québec et cofondateur et directeur général du Secrétariat permanent des peuples francophones.

MARCEL DUBÉ, FRÉQUEMMENT HONORÉ

Marcel Dubé a reçu plusieurs distinctions honorifiques dont l’insigne de Chevalier de l’Ordre de la Pléiade de l’Assemblée internationale des Parlementaires de langue française (1991) ; la Médaille de l’Académie canadienne-française (1987) dont il devient membre ; la médaille de l’Ordre des francophones d’Amérique (1985) ; le prix Molson du Conseil des Arts du Canada (1984) ; le prix

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Athanase-David du Gouvernement du Québec (1973) ; le prix Victor-Morin de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (1966). En 1962, il est admis à la Société royale du Canada et il obtient le Prix du Gouverneur général pour les arts du spectacle, réalisation artistique (2005)

MARCEL DUBÉ À LA NOUVELLE COMPAGNIE THÉÂTRALE ET AU THÉÂTRE DENISE-PELLETIER

Un simple soldat est présenté à la Nouvelle Compagnie Théâtrale (NCT) en 1969 dans la mise en scène de Gilles Pelletier au Gesù, rue Bleury. La pièce initie alors le concept de « répertoire québécois », et c’est la NCT qui en est l’instigatrice. Florence est joué en 1987 dans la mise en scène de Lorraine Pintal alors que Jacques Rossi signe de nouvelles mises en scène de Florence en 2006 et d’Un simple soldat en 2007.

Zone, dans la mise en scène de Paul Blouin, est le spectacle d’ouverture du Théâtre Denise-Pelletier (TDP) en 1977. La pièce est reprise par

les metteurs en scène Jacques Rossi en 1984 et Mario Borges en 2003. Il était donc tout à fait indiqué que Zone, sans doute la plus jouée et la mieux connue des pièces de Marcel Dubé, ouvre la saison 2013-2014, saison du cinquantième anniversaire de fondation de la compagnie.

Le Théâtre Denise-Pelletier avant la restauration de 2009.

Zone, décor de Claude Fortin, production d’ouverture du Théâtre Denise-Pelletier, 1977.

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ACTEURS ET PERSONNAGES

NICOLAS DESFOSSÉSTARZAN... je me disais: j’aimerais ça sortir d’ici et aller voir Ciboulette et la prendre par la main et l’amener au cinéma voir un film, un film de la jungle ou un film d’amour...je me disais: faudrait bien qu’elle soit heureuse un jour, faudrait bien que je sois heureux moi aussi, comme tout le monde le samedi soir dans la grande rue...

DAVE JENNISS MOINEAUT’as raison Ciboulette. Les mots ça veut souvent rien dire, et en plus, on sait jamais ce que les gens pensent en dedans. On le sait pour personne. La musique, elle, a fait pas de mensonge, la musique parle pour vrai, pas les mots.

MAXIME LAVOIE PASSE-PARTOUT«Passe-Partout, tu me fais de plus en plus penser à une araignée, à une araignée qui profite de tout pour se faire une toile.»

(réplique de Ciboulette)

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RICHART J. LÉGERLE POLICIER Ça me fait drôle. J'ai un fils qui a le même âge, pis qui trouve la vie facile.

FRÉDÉRIQUE THÉRIEN CIBOULETTE Je suis rien qu’une petite fille, Tarzan, pas raisonnable et pas belle, mais je peux te donner ma vie.

JEAN-SIMON TRAVERSY TIT-NOIR Donnez-moi la punition que vous voulez, ça m’est égal, je dirai rien.

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RENCONTRE AVEC JEAN STÉPHANE ROY, METTEUR EN SCÈNE

Jean Stéphane Roy

Jean Stéphane Roy cumule depuis 1988 une longue expérience théâtrale. Artiste multidisciplinaire et pédagogue, il a marqué la scène tant canadienne que québécoise par son talent d’acteur, d’auteur, de metteur en scène et de professeur entre autres, à l’École nationale de Théâtre du Canada et à l’Option-Théâtre du Collège Lionel-Groulx. Il a signé jusqu’à maintenant plusieurs mises en scène pour le Théâtre français de Toronto, le Théâtre du Nouveau Monde, le Théâtre d’Aujourd’hui, le Théâtre de la Licorne et la Petite Licorne, la Salle Fred-Barry du TDP, le Théâtre Petit à Petit et pour plusieurs autres compagnies indépendantes à travers le Canada et ce, dans les deux langues.

Comme acteur, Jean Stéphane Roy s’est illustré autant du côté canadien-anglais qu’au Québec et a pris part, par exemple, à The Caucasian Chalk Circle à Edmonton, Un nouveau monde, 1968 et La Fille de Rapaccini à la Salle Fred-Barry, Exil de Wajdi Mouawad à Prospero et Six personnages en quête d’auteur mis en scène par André Brassard au TNM. Finalement, comme auteur, Jean Stéphane Roy a signé plusieurs adaptations pour la Roulotte de la Ville de Montréal dont Le Capitaine Fracasse (1995 et 2003) et Zorro (1998 et 2007). Il s’est établi à Ottawa depuis quelques années où il enseigne au Département de théâtre de l’Université d’Ottawa. Depuis 2010, il est à la tête du Théâtre la Catapulte où il a monté Les Médecins de Molière, production récipiendaire du Prix Rideau 2010 de la meilleure production, et Albertine en cinq temps de Michel Tremblay. Zone de Marcel Dubé a remporté les Prix Rideau Awards 2012 pour la meilleure mise en scène, la meilleure production et le meilleur décor.

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MOT DE JEAN STÉPHANE ROY

J’avais lu Zone au secondaire comme presque tous les francophones de ce pays. J’en avais gardé un souvenir vague et presque ennuyant. Ma mémoire d’adolescent me rappelait l’effort que ça prend pour lire du théâtre. Aujourd’hui, avec des milliers de pièces lues dans ma vie, je redécouvre Zone avec émerveillement. Je suis charmé par le jeune homme de 20 ans qui a pris la peine de sortir son crayon et osé mettre sur papier ce qui était une révolution : une pièce dramatique écrite expressément pour nous, les nègres blancs d’Amérique, les Canadiens français.

La pièce fut longtemps traitée comme s’il s’agissait d’un gang de rue. Les protagonistes de Zone ne sont pas des délinquants, ils sont des hors-la-loi ! Une bande de Robins des Bois qui prennent aux mieux nantis afin d’aider les pauvres. La pièce ne parle pas de violence mais d’espoirs déchus. Pour nous faire comprendre à quel point ses personnages ont de bonnes intentions, Marcel Dubé a transposé, à travers cette bande d’amis, l’histoire du Christ et de ses apôtres. En faisant de Tarzan la figure allégorique d’un Christ canadien-français, l’auteur nous aide à comprendre la fragilité des minorités et les pièges qui nous entourent. Cette pièce possède le langage universel des laissés-pour-compte de ce monde. Cette pièce fut écrite en 1953 dans une période de grande noirceur politique et économique. Aujourd’hui, avec le recul du français à travers le pays, y compris au Québec, avec le gouvernement Harper qui place des unilingues anglophones dans des postes majeurs du système parlementaire, avec Air Canada et Postes Canada qui ne respectent pas la loi sur les langues officielles, avec la crise économique qui ne cesse de se manifester, et surtout avec l’imposante reprise de la contrebande de cigarettes au pays, peut-on dire que la situation a réellement évolué ?

Marcel Dubé a littéralement créé une œuvre qui a touché et qui touche encore notre inconscient collectif. Zone fut un cri ; il est aujourd’hui l’écho qui nous

rappelle que nous avons notre place plus que jamais sur notre continent et que notre différence fait notre force.

CARNET DE LA CRÉATION DE ZONE

2010

Après Les Médecins de Molière et Les Fridolinades de Gratien Gélinas respectivement mises en scène par Jean Stéphane Roy et Perry Schneiderman, Zone de Marcel Dubé est choisi pour être la troisième coproduction du « projet sur 5 ans » du Théâtre la Catapulte et du Théâtre français de Toronto. Jean Stéphane Roy en assumera la mise en scène. Ce projet est un cycle de coproductions sur cinq ans afin d’encourager la circulation du théâtre en Ontario français. Le Théâtre la Catapulte tourne ses productions pour adolescents depuis plusieurs années à travers la province. Durant ces tournées, force est de constater que les spectacles grand public ne circulent que dans le triangle Sudbury-Ottawa-Toronto. Il faut entreprendre une action pour pallier à ce manque et permettre à tous

Les comédiens en résidence de création à Hearst, en Ontario.

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les francophones de la province d’avoir accès à du théâtre professionnel. Ce projet vise donc la systématisation de l’offre des spectacles grand public en Ontario français sur une période de 5 ans et cherche à assurer un rayonnement et un développement culturel sur ce vaste territoire, de Hearst jusqu’à Windsor, de Thunder Bay jusqu’à Hawkesbury. Pour ce faire, les deux compagnies décident de mettre à profit leurs spécificités – celle de la création de spectacles de répertoire pour le TfT et celle de créer des spectacles « clé en main » et d’organiser des tournées sur l’ensemble du territoire ontarien pour le Théâtre la Catapulte. Les deux compagnies se sont engagées à coproduire un spectacle par année pendant cinq ans tout en respectant les spécificités des salles non traditionnelles des diffuseurs membres de Réseau Ontario. Autrement dit, il s’agit de spectacles complètement autonomes sur le plan technique. Le but de ce projet artistique de longue haleine est donc d’offrir au public des régions éloignées une occasion de développer un sens critique face au théâtre et aux différents codes qui le composent. En effet, la réalité culturelle des régions diffère grandement de celle des zones urbaines. Contrairement au public urbain habitué à voir plusieurs formes de théâtre, les spectateurs des régions ne voient peu ou pas de théâtre et ont donc peu de chances d’aiguiser leur compréhension de la diversité des codes scéniques et théâtraux.

Pour ce faire, le projet sur 5 ans a été construit à partir de cette logique artistique : présenter des textes et des auteurs qui ont façonné notre culture francophone nord-américaine. À travers ce voyage, nous créons des relectures du théâtre de répertoire pour terminer avec une création franco-ontarienne comme cinquième et dernière production du projet.

Novembre 2010

Tenue d’auditions à Ottawa et Toronto

Janvier 2011

Répétition d’un extrait de 20 minutes avec les comédiens Nicolas Desfossés, Maxime Lavoie, Richard J. Léger et Anie Richer qui interprète Ciboulette. L’envie de dépoussiérer la pièce afin de lui donner une nouvelle jeunesse commence à germer dans la tête du metteur en scène.

14 janvier 2011

Présentation de cet extrait à Contact Ontarois au Centre des Arts Shenkman à Orléans. Le succès rencontré est tel que la pièce reçoit le Prix du

RENCONTRE AVEC JEAN STÉPHANE ROY, METTEUR EN SCÈNE

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Richard J. Léger (le policier) et Nicolas Desfossés (Tarzan) en répétition à Ottawa pour Contact ontarois en janvier 2011.

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Réseau des Organisateurs de Spectacles de l’Est du Québec (ROSEQ), qui donne droit à une « vitrine » lors du ROSEQ événement de diffusion se tenant à Rimouski, ainsi que le Prix « Coup de foudre » des diffuseurs pluridisciplinaires de Réseau Ontario, prix remis pour la première fois à du théâtre en trente ans d’histoire de Contact ontarois. Jean Stéphane Roy a réussi le pari de toucher les spectateurs avec le texte de Marcel Dubé qui fut pourtant écrit au début des années 1950. Le Prix « Coup de foudre » garantit une tournée dans tout l’Ontario.

Du 13 au 16 juin 2011

Résidence de création au Conseil des Arts de Hearst (ville ontarienne située à 935 km au nord de Toronto). Dave Jenniss et Jean-Simon Traversy s’ajoutent aussi à la distribution, de même que le dramaturg Antoine Côté Legault, qui sera chargé de la recherche autour du spectacle et de l’œuvre de Dubé, ainsi que de s’assurer que la production reste fidèle à l’œuvre originale.

Du 12 au 16 décembre 2011 Répétitions à La Nouvelle Scène d’Ottawa. L’idée de réorganiser l’acte 2 de la pièce, celui des interrogatoires, nait dans la tête de Jean Stéphane Roy.

Fin décembre 2011

Jean Stéphane Roy et Antoine Côté Legault travaillent longuement à la réorganisation du deuxième acte et à la création d’un prologue. Souhaitant rajeunir la pièce sans trahir l’œuvre originale de l’auteur, ils se font la réflexion suivante :

Pour écrire Zone, Marcel Dubé s’est inspiré beaucoup des films noirs de sa jeunesse. En s’inspirant du cinéma de notre époque à nous, nous nous sommes dit que nous devrions pouvoir rendre

la pièce plus actuelle sans la dénaturer. Comme le cinéma contemporain est très déstructuré, nous sommes allés dans cette direction-là.

La première scène de l’acte 2, le premier interrogatoire de Tarzan (il y en a deux), est placée au début de la pièce, devenant ainsi un prologue. L’acte 2 est ensuite complètement réorganisé (à l’exception des aveux de Tarzan qui le clôturent) : les répliques ont été déplacées afin d’entremêler les différents interrogatoires, sans qu’un moindre mot du texte ne soit changé.

Janvier 2012

Reprise des répétitions à Toronto.

Maxime Lavoie et Richard J. Léger, Contact ontarois, janvier 2011.

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Du 1er au 12 février 2012

Représentations à Toronto.

L’étonnante prestation du policier, tout comme l’immense détresse du chef de la bande nous font oublier le fossé historique et culturel qui sépare notre époque du contexte de grande crise au Québec. Amandine Sanial, L’Express de Toronto

Du 20 février au 9 mars 2012

Représentations à Ottawa. Trente matinées scolaires sont jouées. La représentation grand public du 25 février affichant complet dès janvier, une supplémentaire est programmée le 3 mars. Elle aussi a lieu à guichet fermé.

Zone c’est d’abord une merveilleuse histoire d’amour empreinte de lyrisme comme il ne s’en fait plus beaucoup. Jocelyne Lachance, Liaison, no 156.

25 et 26 février 2012

Captation de la pièce en vue d’une diffusion sur TFO, télévision culturelle et éducative de l’Ontario français.

RENCONTRE AVEC JEAN STÉPHANE ROY, METTEUR EN SCÈNE

Mars, avril et mai 2012

Tournée dans le nord de l’Ontario – Chapleau, Kapuskasing, Hearst, Timmins, Sturgeon Falls - et à Saskatoon (Saskatchewan) dans la programmation de la Troupe du Jour.

Le journaliste Yves Bergeras du Droit rencontre Jean Stéphane Roy (25 février, 2012).

« Jean Stéphane Roy s’est donné plusieurs défis. Ne pas tomber dans le piège de la nostalgie, mais lui donner une résonance contemporaine. Faire un mélo, sans tomber dans la caricature. Soulever l’aspect christique qu’il a trouvé dans le texte. Et adapter le discours politique de cette pièce écrite pendant la Grande Noirceur. […]

L’action se passe dans les ruelles, des lieux sordides à l’époque. Aujourd’hui, les ruelles sont vertes et n’évoquent rien de sombre. Alors j’ai fait faire un gros pont métallique, parce que c’est sous les ponts qu’on trouve désormais les sans-abri. Il sert de tour d’observation à ces jeunes. […]

Ces jeunes, bien que délinquants, sont en fait des Robins des Bois, et vraiment pas des criminels. C’est là la force de la pièce, sa charge sociale et politique. »

Jean-Simon Traversy, maquillage pour la captation vidéo.

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Les comédiens jouent avec justesse et précision, par le verbe et le mouvement. Comme dans d’autres pièces de la Catapulte, les déplacements tiennent de la chorégraphie. Mireille Vennes, l’Eau vive (Saskatoon)

9 novembre 2012

Présentation d’un extrait à la FrancoFête de Moncton (Nouveau-Brunswick) en vue d’une éventuelle tournée en Acadie à l’automne 2013, tout de suite après les représentations au Théâtre Denise-Pelletier.

Novembre 2012

Répétitions en vue d’une reprise à La Nouvelle Scène. La distribution est inchangée.

9 avril 2013

Série de représentations au Centre des arts Juliette-Lassonde de Saint-Hyacinthe (Québec).

Mai 2013

Zone remporte les Prix Rideau Awards 2012 pour meilleure mise en scène, meilleure production et meilleur décor.

25 septembre – 18 octobre 2013

Zone est joué en ouverture de la saison 2013-2014 – saison du 50e anniversaire – au Théâtre Denise-Pelletier, Montréal (Québec).

Choix des extraits : Hélène Beauchamp

Nicolas Desfossés et Maxime Lavoie durant la vitrine à Contact ontarois en janvier 2011.

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Les comédiens Nicolas Desfossés, Jean-Simon Traversy et Richard J. Léger en train de monter le décor pour une représentation en tournée au printemps 2012.

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MARCEL DUBÉ DANS L’HISTOIRE DOSSIER

DU THÉÂTRE AMATEUR …

Le Festival d’art dramatique du Canada est sans doute l’organisme qui aura le plus et le mieux œuvré pour sortir le théâtre de son amateurisme et pour conduire ses artistes à une professionnalisation certaine. Festival compétitif, il est fondé en 1932 sous l’impulsion du gouverneur général Lord Besborough lors d’une réunion des représentants des milieux canadiens du théâtre. Le concours est national, se prépare lors de phases éliminatoires dans les régions, et les grands gagnants sont proclamés à la rencontre nationale qui a lieu au printemps, chaque fois dans une ville différente. Les trophées sont décernés sur décision d’un adjudicateur pour l’interprétation, les décors, la mise en scène, et les grands prix sont attribués à la meilleure pièce et à la meilleure production. La tenue du festival est suspendue de 1940 à 1947 et à sa reprise, les compagnies québécoises y brillent de plus en plus. Les Compagnons de Saint-Laurent y obtiennent de grands succès avec, entre autres, la production d’Antigone (1948). La Jeune Scène y est fort remarquée avec De l’autre côté du mur (1951) et Zone (1953) de Marcel Dubé, productions qui raflent tous les prix. La pièce de Jacques Languirand, Les Insolites, est primée en 1956, alors que le travail du metteur en scène Paul Buissonneau et de son Théâtre de Quat’Sous y est récompensé en 1955 et en 1956. Si le Festival souligne le talent des comédiens, des metteurs en scène et des décorateurs, il valorise aussi, et de plus en plus, les pièces d’auteurs canadiens.

Mais les artistes québécois éprouvent des insatisfactions face à ce Festival qui est surtout

anglophone et où se manifestent de façon évidente les différences entre les cultures. En 1958, Guy Beaulne, metteur en scène et alors réalisateur à Radio-Canada, fonde l’Association canadienne du théâtre amateur (ACTA) dont les compagnies membres œuvrent partout au Canada. En 1972, l’ACTA deviendra l’Association québécoise du jeune théâtre (AQJT) qui concentrera ses énergies sur l’épanouissement du théâtre québécois jusqu’en 1986.

DE LA RADIO ET DE LA TÉLÉVISION …

Les années d’avant-guerre sont marquées par l’arrivée de la radio. Radio-Canada et CKAC, les radios francophones les plus importantes au Québec, diffusent des radios romans, des radios feuilletons, des radios théâtres. En 1941-1942, la radio atteint 85% de la population, fait travailler auteurs et comédiens, et contribue grandement à la création des personnages et des histoires qui construiront progressivement une littérature et une culture québécoises. C’est à CKAC que Gratien Gélinas crée Fridolin en 1937. Paul Gury

Le théâtre des années 1950

Numéro thématique de Jeu, revue de théâtre sur plus de vingt ans d’activité de l’Association québécoise du jeune théâtre (1958-1980).

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Le Gouriadec écrit la Fiancée du commando, dont le sous-titre est explicite : Les Aventures de deux commandos québécois en Bretagne. L’émission, diffusée trois fois par semaine de 1942 à 1947, attire un million d’auditeurs. Ce grand récit de guerre, d’amour et d’aventures sera porté sur la scène du Monument National en septembre 1947. La télévision commence à diffuser le 6 septembre 1952 et propose au petit écran un reflet direct de la société. Dès le milieu des années 1950, 90% des foyers urbains ont la télévision, et des téléromans comme La Famille Plouffe, diffusé de 1953 à 1959, captivent des milliers de téléspectateurs. La télévision devient vite indispensable.

Les années 1950 sont riches en inventions techniques, et la multiplication des émissions de radio et de télévision assure un travail régulier aux auteurs, aux comédiens et, de façon générale, aux

artisans de la scène. On comprend aisément que Marcel Dubé ait été tenté par tous ces moyens de diffusion de son œuvre, lui qui vouait un grand attachement au Québec et qui voulait vivre de son travail d’écrivain.

DU THÉÂTRE PROFESSIONNEL…

La période de transition que représentent les années de guerre 1939-1945 prépare l’avènement du théâtre professionnel au Canada et au Québec. Dans les faits, cette période est très riche et témoigne de tous les possibles. Beaucoup d’artistes fondent alors leur compagnie qu’ils cherchent à loger dans des édifices transformables en théâtre. Ils font preuve d’une inventivité à toute épreuve et d’une grande envergure. Est-ce parce que tout est à faire et que, même sans moyens, ils sentent que tout est possible ? Qu’il est encore permis de rêver et de réaliser ses rêves ? Les gens de théâtre se mettent à l’essai de tous les styles et de tous les genres, renouvellent le répertoire et donnent tout son sens à la mise en scène. Les années 1950 foisonnent des aventures de celles et ceux qui n’ont pas froid aux yeux et qui se lancent sans filet de sécurité, sans subvention, en ne sachant pas tout à fait quels spectateurs ils toucheront. Ils le font avec détermination et avec un grand amour du théâtre !

Les Compagnons de Saint-Laurent, fondés en 1937, donneront en quelque sorte le ton. En choisissant de monter des textes d’inspiration chrétienne d’abord, puis tirés des répertoires classique et moderne, ils ouvrent la voie. Et quand la compagnie cesse de produire en 1952, les comédiens qui s’y trouvaient essaiment, mettant sur pied d’autres structures de production, comme le Théâtre du Nouveau Monde (TNM) en 1951. Pierre Dagenais, tout jeune homme issu du Collège Sainte-Marie, fonde L’Équipe en 1943, et se lance dans des mises en scène d’envergure à partir du répertoire moderne (Cocteau, Pagnol, Sartre, Salacrou). Joignant leurs

Gratien Gélinas en Fridolin. Photo : Henri Paul, vers 1938. Bibliothèque et Archives Ca-nada, numéro de référence : e000001102.

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forces, Yvette Brind’Amour et Mercedes Palomino fondent le Théâtre du Rideau Vert (TRV) en 1948 et amorcent prudemment des saisons où quelques productions choisies sont montées soit dans le petit Théâtre Anjou soit au Monument National. Le TRV crée du Félix Leclerc, monte du Guitry, du Musset, mais aussi Huis-Clos de Sartre en 1958. C’est l’époque de la constitution des publics alors que les spectateurs commencent à reconnaître leurs propres goûts, que les comédiens sont en mesure de jouer le même spectacle sur un mois dans une saison théâtrale qui va du début octobre à la fin juin.

Le Théâtre-Club, fondé en 1953 diffusera des œuvres de haute qualité sous la direction de Monique

Lepage et de Jacques Létourneau jusqu’en 1964. La compagnie ouvre son Studio du Théâtre-Club en 1958 et y crée les premiers textes dramatiques de Jacques Ferron. Paul Buissonneau, grand animateur de La Roulotte, théâtre ambulant des parcs de la Ville de Montréal, fonde le Théâtre de Quat’Sous en 1955. Quant aux Apprentis- Sorciers, fondés en 1955 également, ils choisissent les auteurs de l’avant-garde européenne et conduisent leur quête d’un théâtre différent jusqu’au seuil du Théâtre d’Aujourd’hui. Jeanine Beaubien, pour sa part, rêve d’un théâtre international qui présenterait des textes de langues et de cultures différentes, et elle construit un théâtre à l’intérieur des murs d’une ancienne poudrière dans l’Île Sainte-Hélène en 1958.

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Le Théâtre de Quat’Sous avant sa reconstruction en 2009.

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On le constate : tout est à inventer pendant ces années d’après-guerre et les artistes s’y lancent avec une avidité et un entrain qui annulent l’attentisme de la période précédente. La liste des réalisations impressionne, tant du point de vue du renouvellement du répertoire que de l’ouverture des salles de théâtre ou encore des innovations techniques. Et il faut aller vite pour rattraper le temps perdu et pour accueillir l’Expo 67 !

Hélène Beauchamp, texte extrait du dossier sur Un simple soldat, Cahier No 68, 2007.

Le 17 octobre 1977 le Théâtre Denise-Pelletier ouvrait ses portes avec Zone donné en série « Répertoire » et en série « Op Théâtre ». 86 représentations furent données devant 68 632 spectateurs dans la mise en scène de Paul Blouin, les décors de Claude Fortin, les costumes de François Barbeau, les éclairages de Luc Marineau, la musique de Claude Léveillée. Distribution : Jean-Pierre Bergeron, Marielle Bernard, Yvan Canuel, Jean Leclerc, Marc Messier, Aubert Pallascio, Michel Pasquier, Marc Picard, Jacques Thériault.

Zone (1977), mise en scène de Paul Blouin, NCT. Marielle Bernard (Ciboulette), Jean Leclerc (Tarzan).

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Extraits du texte d’Alain Pontaut publié dans le Cahier d’octobre 1977.Est-ce sa longue et fructueuse carrière d’auteur dramatique ? Est-ce cette célébrité qu’il connut dès l’âge de vingt ans, au début des années 1950 ? Est-ce son appartenance depuis de nombreuses années à l’Académie canadienne-française ou à la docte Société royale du Canada ? Le fait est que Marcel Dubé est depuis longtemps considéré dans son pays comme un écrivain classique. Si classique, voire si vénérable, comme on dit d’un âge qu’il est vénérable, que des voix plus ou moins juvéniles d’amateurs, de critiques ou d’auteurs […] nous invitent périodiquement à déjà le figer dans le Panthéon des gloires passées, c’est-à-dire dépassées, à très respectueusement, mais un peu vite, le momifier dans la crypte où l’on met les ancêtres.

Or, plutôt que de pratiquer à l’égard de Dubé cet escamotage inconvenant – je connais peu d’êtres plus jeunes et vivants que lui -, mieux vaut, en attendant son œuvre future, rappeler à partir de Zone quelques-unes des raisons qui ont rendu son

nom indissociable de l’identité même du théâtre québécois.

L’IDENTITÉ MÊME DU THÉÂTRE QUÉBÉCOIS

Car c’est là le premier phénomène. Quand, il y a 27 ans, le rideau se leva pour la première fois sur la première pièce de Marcel Dubé, les trois coups qu’on frappa ce soir-là n’annoncèrent pas que l’avènement d’un dramaturge mais, dans une large mesure, la naissance du théâtre québécois.

C’est son premier mérite, et qui n’est pas seulement un mérite du hasard. Quand il commence, à vingt ans, avant lui il n’y a presque rien. Quelques années plus tard, et à chaque fois que lui ou d’autres s’exprimeront sur un théâtre, on parlera beaucoup, alors, de la scène québécoise mais parce que lui, d’abord, l’aura fondée1.

1 Il n’est pas question de nier l’importance du Tit-Coq de Gratien Gélinas, créé en 1948. Il nous semble […] que le mérite de cette pièce, à mi-distance des variétés, fructueux laboratoire, et du théâtre de mélodrame, est davantage circonstanciel et historique que dramatique.

Marcel Dubé en 1977…

Marcel Dubé, dessin de Paul Blouin, 1977.

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À vingt ans, Dubé écrit donc sa première pièce, Le Bal triste. À vingt-deux ans, en 1952, il obtient le Prix de la meilleure pièce canadienne au Festival d’art dramatique avec De l’autre côté du mur, brouillon ou ébauche de Zone, créé par la Jeune Scène l’année suivante et qui, cette fois, remporte tous les prix.

Cette naissance de Dubé au théâtre a la chance de coïncider avec la fondation des grandes compagnies théâtrales et avec une autre naissance capitale : celle de la télévision, pour laquelle il ne cessera plus d’écrire. D’ailleurs, présentée en circuit fermé par Radio-Canada en 1952, De l’autre côté du mur (1952) est aussi la première œuvre dramatique de la télévision, ce qui n’est que justice puisqu’elle marque le théâtre québécois naissant. Zone, dont le succès ne s’est pas démenti, c’est d’un coup la poignante vérité du sujet, du personnage, du débat dramatique, du langage. L’accueil fait à la pièce permet à son auteur de se consacrer

entièrement au théâtre, de parfaire son métier d’auteur, d’assimiler ses influences, de Tchékhov à Jean Anouilh, d’Arthur Miller à Irving Shaw. 1955, c’est Chambre à louer, Le Barrage, Le Naufragé. En 1957, c’est coup sur coup deux pièces majeures, d’abord écrites pour la télévision, Florence et Un simple soldat, qui, avec Le Temps des lilas, vont clore le cycle de cette première période, vouée à la peinture des petites gens, du réalisme le plus efficacement sensible, empreint de poésie populaire.

UN SUCCÈS PUBLIC CONSIDÉRABLE

À partir de mai 1958, Un simple soldat, drame d’un adolescent révolté, par refus de vieillir, par refus de la société nouvelle issue de la guerre, connaît un succès public considérable, que ce soit à la Comédie Canadienne, où les reprises se succèdent, au Capitol de Québec ou à la Nouvelle Compagnie Théâtrale, où brille encore l’actualité de l’œuvre

Monique Miller (Denise) et Guy Godin (Fred) dans De l’autre côté du mur, 1951.

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longtemps après la création. « L’autre soir, écrit un journaliste nommé René Lévesque, j’ai eu la chance de voir à Québec Un simple soldat de Marcel Dubé. Car j’ai vu ce qui, à mon avis, est la pièce la plus drue et vraie qu’on ait encore tirée de nous. » Jugement de la critique en effet : ce drame est « l’un des plus profondément émouvants du répertoire québécois ». Commentaire de l’auteur : « Joseph Latour, le simple soldat, c’est un adolescent en guerre contre famille et société mais qui demeure un personnage très pur, qui ne fait mal à ceux qui l’aiment que parce que, congénitalement, il était fait pour vivre harmonieusement. C’est, à travers tout ce que j’ai écrit, le personnage qui représente le plus ce que j’avais à crier quand j’avais son âge. »

Du refus de l’adolescence à la vieillesse doublement menacée : c’est tout pétris d’une émotion à la fois discrète et tragique que les personnages du Temps des lilas […] sont voués à des rêves d’humaine continuité que viennent d’autant détruire l’injustice sociale que leur propre manque de courage.

Et puis Florence (1957), Antigone de bureau, Florence qui se heurte brutalement, au nom de sa vérité, à la médiocrité des siens (dont son père, réveillé, conviendra), à un monde de sclérose et de peur, Florence ou la dénonciation farouche de l’étroitesse larvée de tant de « p’tites vies plates ». « À part nous autres, le reste du monde n’était fait que de méchants. Pas de plaisirs permis, du mal partout ! On nous a appris à avoir peur des fantômes pendant qu’on nous dépouillait de nos vrais biens… ».

Une période s’achève qui, inventant, en s’amorçant, le théâtre québécois, fournit aussi par avance, avec la mise en question de Florence, les thèmes d’avenir de ce théâtre : finale de Médium saignant de Françoise Loranger, canevas désaliénants des Enfants de Chénier de Jean-Claude Germain, grandes scènes profondément révélatrices des Belles-sœurs de Michel Tremblay. Dubé, avec Florence, invente

effectivement tous les schémas futurs du théâtre de la contestation sociale, de la réidentification québécoise.

LA DESCRIPTION POLITIQUE, AVEC INTENSITÉ

À partir de 1960, c’est une autre période qui s’amorce où on le voit passer de l’étude sensible, poétique des petites gens au réalisme psychologique et bourgeois du monde des parvenus. « À la place des rêves, dit un critique, ils ont l’argent ; au lieu des aspirations obscures et des illusions, une volonté terriblement lucide d’arriver à leurs fins. » De Florence, le projecteur se déplace en direction du

Couverture de la publication de Florence en 1960, Institut littéraire du Québec, Ltée.

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patron de Florence, ou de ses semblables : William dans Bilan (1968), Victor des Beaux dimanches (1965). Des hommes qui se sont fait tout seuls et qui ont, comme on dit, réussi dans l’industrie, dans la finance ou dans la politique. Des hommes « arrivés », assurément, mais sur le plan moral, arrivés en mauvais état.

Autre expérience, plus ambitieuse encore : sans rien abandonner du social et du politique, Au retour des oies blanches, créé en 1966, à la Comédie Canadienne, tente, par le langage, la hiératisation, le symbole, par l’implacable des passions et du destin, une ambitieuse démarche en direction, cette fois, de la tragédie.

En fait, un triple élan anime ce théâtre. En lui, il y a la volonté d’intensité du miroir social, de la description politique, amorcée dans Florence, imposée dans Les Beaux Dimanches, reprise dans Pauvre Amour (1968), Un matin comme les autres (1968), Le Coup de l’étrier (1969). Il y a le don de l’observation psychologique, de l’acuité et de la différenciation de l’âme des personnages. Il y a enfin la solution au problème si débattu du véhicule linguistique, obsession, invention de la langue, condition nécessaire à l’existence de l’œuvre théâtrale, en même temps qu’à son vœu de libération.

« Au départ, dit Marcel Dubé, vers le début des années 1950, le problème de la langue se posait d’autant plus que le public n’existait pas au théâtre. Ou bien les auteurs ne parlaient pas la langue du peuple, ou bien les gens, en général, ne s’exprimaient pas. Alors il s’agissait, au moyen de leur langue à eux, une langue à inventer mais de telle sorte qu’elle fût la leur, d’exprimer des choses qu’ils n’avaient jamais exprimées à voix haute. […] Je pense que c’est respecter le public, tous les gens de tous les niveaux, que de faire s’exprimer même le réalisme théâtral le plus populaire dans une langue correcte. Au reste, les tenants les plus

acharnés du joual en viendront et en viennent déjà à s’exprimer dans ce langage correct qu’on appelle le français. Je pense que, malgré nous, inévitablement, nous tendons vers une perfection et que, fût-ce au théâtre, un langage, c’est une chose perfectible. »

Ce qui revient à dire que, pour fonder le théâtre québécois au début des années 1950, il fallait avant tout lui trouver un langage adéquat et pourtant respectueux de lui-même, et que Marcel Dubé a aussi gagné en son temps ce pari difficile.

UNE ŒUVRE MULTIFORME

Cela fait bien des titres à sa gloire. Cela dote aussi de bien des facettes une œuvre qui n’a pas cessé d’être multiforme. Dubé a touché avec bonheur : à la comédie, sentimentale et musicale avec, par exemple Il est une saison (1966), inspirée du Misanthrope de Molière, légère et satirique avec L’Impromptu de Québec ou Le Testament (1974), inspirée du Légataire universel de Régnard ; au ballet avec, entre autres, Jérémie (1972) ; à la poésie avec le sobre lyrisme des Poèmes de sable (1974), et bien sûr au téléroman avec les innombrables épisodes de qualité de La Côte de sable (1960-1962)ou De 9 à 5 (1963 à 1966), de Virginie (1968) ou de Manuel. Jusqu’à ce grave et farouche constat de notre système éducatif et humain qu’est le récent Réformiste (1977), son œuvre est trop prolifique pour être ici dénombrée en son entier.

Mais ce qu’il faut redire, c’est que, outre sa rare continuité, sa lucidité généreuse, ses massives qualités – thèmes, langage, construction – d’invention théâtrale, le théâtre de Marcel Dubé exprime surtout dans l’évolution de ses personnages une identité et un sort qui coïncident étroitement avec ceux du Québec contemporain. Ainsi, créant le fait théâtral québécois, continue-t-il de constituer en son domaine, après quelque trente ans de profusion, un monde de l’essentiel et un parfait miroir.

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Extraits d’un entretien avec Marcel Dubé réalisé en septembre 1977 par Micheline La France et publié dans le même Cahier d’octobre 1977.

Marcel Dubé, en écrivant Zone en 1953, rêviez-vous déjà de devenir auteur dramatique ?

Non, pas du tout. J’avais vingt-trois ans, j’étais encore aux études et j’avais écrit, l’année précédente, De l’autre côté du mur, où l’on peut

retrouver une ébauche des personnages de Zone. Avec un groupe d’amis, on a eu envie de retenter l’expérience et je dois dire que le succès de Zone nous a tous pris par surprise. Bien sûr, nous étions conscients de présenter un spectacle de qualité mais nous ne mesurions pas les implications sociales de la pièce. Nous ne nous attentions pas à une telle réception de la part du public.

Personnellement, j’ai subi un choc ; ma vie a été complètement bouleversée. Du jour au lendemain j’étais amené, sans préparation aucune, à consacrer ma vie à l’écriture dramatique. C’est merveilleux, bien sûr, mais extrêmement difficile. Le métier est exigeant. L’une des premières difficultés fut pour moi de me détacher des personnages de Zone. J’étais littéralement hanté par eux.

Vous arrive-t-il encore de rêver à Tarzan, d’imaginer par exemple, s’il avait vécu, quel type d’homme il serait devenu à quarante-cinq ans ?

Oui, je crois que Tarzan, aujourd’hui, aurait deux possibilités : ou bien il aurait le goût et l’énergie de réformer sa société, ou alors, il la fuirait carrément.

Vous le placeriez à une croisée des chemins ou vous choisiriez pour lui l’une de ces deux voies ?

Je ne choisis pas. Je pose des jalons, et dès que les personnages sont nés, ils se meuvent d’eux-mêmes. Ce n’est pas moi qui les dirige ; ce sont eux qui me dictent leurs comportements, leurs paroles. Moi, je suis à l’écoute d’eux.

Dans votre théâtre, la véritable finale est souvent en suspens ; vous ne la donnez pas au public.

Je préfère, en effet, les pièces qui n’ont pas de finale proprement dite. Cela permet au public de

Marcel Dubé à l’époque des études clas-siques au collège Sainte-Marie. Photo tirée du livre de Maximilien Laroche, Marcel Dubé, Fides, 1970

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réfléchir, de s’impliquer davantage. Je refuse de réfléchir à la place du public. Si le théâtre ne se prolonge pas dans la vie, à quoi sert-il ?

Après vingt-cinq ans de production intense, comment voyez-vous le théâtre au Québec et le vôtre particulièrement ?

Je pense qu’il y a eu, depuis une quinzaine d’années – depuis le début des années 1960 –, énormément de changements au Québec ; certains ont été profonds, d’autres superficiels. Dans tous les domaines. Le théâtre a été touché, bien sûr, par ces changements. Il nous reste à voir clair dans tout ça. Personnellement, j’ai besoin de m’éloigner un peu du théâtre, de faire autre chose.

Et vous abandonneriez l’écriture ?

Non, pas complètement, mais j’ai besoin de prendre mon temps, et peut-être d’aborder d’autres genres que le théâtre : le roman, ou la poésie, par exemple. Je veux m’accorder du temps d’observation, de réflexion.

Marcel Dubé, êtes-vous nostalgique par rapport à votre jeunesse, à vos vingt ans ?

Je pense que les moments qu’on a connu à vingt ans sont irremplaçables. On y a vécu un certain bonheur indéfinissable, qui parfois nous rendait malheureux parce qu’on n’arrivait pas à le définir et qu’on sentait qu’il n’allait pas durer. Je suis toujours idéaliste.

Si c’était à refaire, je tenterais de voyager davantage, d’observer sans relâche ; je perdrais moins de temps. Non pas que j’estime avoir vraiment perdu mon temps, mais je tenterais de donner à ma vie une orientation plus précise.

Dessin de la main de Marcel Dubé par Paul Blouin en 1977.

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Les écrivains, Marcel Dubé tout autant que Gabrielle Roy, Roger Lemelin, Michel Tremblay, s’entraînent à voir et à entendre ce qui se passe autour d’eux. C’est comme s’ils notaient dans de petits carnets, ou imprimaient dans leur mémoire sensible ce qui les étonne, les offusque, les conforte, les fait rire, les émeut dans ce qui les entoure. Pour Marcel Dubé, c’est là que réside le premier travail de l’écrivain, dans cette sensibilité au monde et aux personnes, à ce qui est humain. « Rien ne me touche que ce qui est d’abord et avant tout humain. » Et il crée son « monde » en passant par la transposition et la composition. Le « Monde de Marcel Dubé » est ainsi fabriqué à partir des liens que l’auteur a tissés avec les personnes, leurs histoires, leurs émotions telles qu’il les a perçues et qui, par le travail de l’invention, arrivent à l’existence.

Auteur sensible, à l’écoute de ce qui se passe autour de lui, attentif à son époque et aux personnes qui en

témoignent, Marcel Dubé a bien dessiné les fonds de scène de ses fictions théâtrales. Et dans ces paysages urbains et socialement identifiables, il place ses personnages comme autant de repères, de voyants lumineux. C’est en effet à ses personnages qu’il confie la tâche délicate de se faire les témoins privilégiés de ces années qui s’échelonnent de 1945 à 1970, ces années d’après-guerre qui annoncent, pour le Québec et pour le monde, des transformations fondamentales. Comment ses personnages auraient-ils pu résister aux vagues de fond qui se déclenchent alors?

DE GRANDS RÉVOLTÉS

Les plus évidents des personnages de Dubé, les « héros » de ses pièces, sont manifestement en révolte. Quelque chose dans leur vie les a cassés, quelque chose ne s’est pas déroulé comme cela aurait dû. Leur environnement, les conditions qui

Les personnages de Marcel Dubé

Un simple soldat (1968-1969) mise en scène de Gilles Pelletier, NCT. Robert Rivard et Gilles Pelletier.

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leur sont faites ne leur conviennent pas et ils comprennent que d’autres situations que la leur existent. Sont-elles meilleures? Ils ne le savent pas, mais ils décident, poussés par une émotion venue de loin ou bousculés par un événement récent, de risquer le tout pour le tout afin de le savoir. Ont-ils les moyens nécessaires pour y accéder? Ils ne sont ni riches ni instruits, ils manquent d’information. Mais ces êtres sont marqués au sceau d’un grand idéal, de façon indélébile. Ils ne peuvent donc pas faire autrement que de se révolter. Ils ont en quelque sorte un territoire à reconquérir, qu’ils n’ont peut-être jamais habité mais dont ils savent qu’il existe quelque part. Leur a-t-on volé leur espace, ou ne leur a-t-on jamais laissé la chance de l’occuper? C’est comme s’ils se battaient pour vivre, contre tout ce qui leur échappe. Ils sont des « révoltés de la vie » selon la belle expression de Marcel Dubé. La plupart du temps, ils sont seuls, agissant sur un coup de tête, un « ras le bol », sur un déclic, et ils se lancent, sans plan de match.

Ces personnages se battent en effet, ne se tiennent pas pour défaits avant d’avoir tout tenté. Tarzan,

dans Zone, est le chef d’un groupe de jeunes dont il a organisé le fonctionnement au mieux de sa connaissance pour mener les opérations de contrebande de cigarettes. Sa motivation? Ne plus être esclave d’un travail abrutissant. Il sait ce dont il ne veut plus. Autour de lui, les rêves varient selon les individus. Moineau veut apprendre la musique et acheter une musique à bouche « plus longue avec beaucoup de clés et beaucoup de notes ». Tit-Noir aurait voulu s’instruire. Le groupe a son lieu de ralliement, des règles de conduite et des codes de communication. Le chef, charismatique, est aimé, mais il sera trahi. En définitive, c’est leur condition sociale qui freine leur quête. Le chef de police avertit Tarzan : « On ne sort pas de sa condition sociale comme on sort d’une salle de cinéma, les yeux remplis d’images, la tête bourrée de rêves… ». La concrétisation de leur idéal dépendrait de leur capacité à changer de classe en jouant de la fortune. Le rêve entrevu est inatteignable, mais l’action de ces personnages demeure exemplaire.

Dans Un simple soldat, Joseph Latour a choisi de s’enrôler dans l’armée, entre autre pour quitter

Un simple soldat (1989-1990), mise en scène de René Richard Cyr, NCT. Gildor Roy (Joseph), Jean Lajeunesse (Édouard).

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une maison où il lui est impossible de vivre. Il a découvert que la discipline militaire lui convient, qu’il aime ce métier, mais une fois la guerre finie, il est obligé de revenir dans une société qui ne peut lui fournir les repères identitaires qu’il cherche et, sans grade, il se retrouve au chômage. Dans cette société qui en est à se réorganiser économiquement, il peine à trouver sa place et décide de se réengager. William Larose, dans Bilan, a profité, lui, du pays « tout neuf » qu’il a trouvé à son retour de la guerre. « Je me suis lancé avec Gaston dans le débossage des autos, ensuite dans le béton, pour finir dans la construction et le pavage. Au bout de dix ans, j’avais gagné mon premier million… » Où en est-il maintenant? Il a accepté le titre « d’organisateur en chef et de grand argentier » du parti politique qui ne l’a jamais renié. Mais son fils Étienne, mal à l’aise dans la maison de son père, lui oppose des refus. « Tout ce qui l’intéresse, c’est la maudite

sociologie, l’indépendance et le socialisme. C’est comme une maladie, il veut pas en démordre. (…) J’ai une allergie pour les révoltés. » Étienne meurt dans un accident de voiture.

Le regard du dramaturge se pose sur le système politique et sur ses acteurs, un système pourri de l’intérieur, dépassé par un nouvel ordre mondial que l’après-guerre met en place, et désormais grugé par une économie mondialisée. Dans Au retour des oies blanches, l’auteur met en procès une bourgeoisie qui vit dans le confort du mensonge pour protéger un certain statu quo. Ici, c’est Geneviève qui se révolte de façon systématique et qui mène une enquête aux allures de jeu de la vérité. L’enjeu est de mettre enfin au jour les relations incestueuses qui se sont tissées dans sa famille et de mettre chacun des personnages face à lui-même. Certains assumeront cette mise à nu, alors que d’autres en

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Un simple soldat (2007-2008), mise en scène de Jacques Rossi, coproduction TDP, Théâtre de la Bordée et Productions JBH. Raymond Legault (Édouard), Louis-Olivier Maufffette (Joseph).

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seront incapables. C’est toute une société, encore fermée sur elle-même, encore soumise et hypocrite, qui est mise en procès par cette héroïne qui, une fois ses dénonciations effectuées, ne peut plus accepter d’y vivre. Quel est donc le message que nous transmettent ces grands révoltés?

DES FEMMES DÉTERMINÉES

Marcel Dubé semble affectionner tout particulièrement ses personnages féminins qui, pourtant, n’ont vraiment pas la vie facile. Leurs révoltes sont multiformes et, surtout, elles ne sont pas spontanées, mais marquent plutôt l’aboutissement d’un long cheminement. En fait, les femmes qui veulent vraiment survivre n’ont qu’un seul choix : partir. Elles doivent quitter le milieu qui les opprime – et il s’agit souvent de la famille et de la maison – mais on ne sait pas toujours si leur départ leur procure la réalisation de leurs rêves. Ce que l’on sait, c’est que les femmes qui restent – dans la maison, dans la famille, dans le couple – s’en évadent par l’alcool, les drogues légales que sont les médicaments, ou périssent d’ennui.

On dépeint souvent les jeunes personnages féminins des pièces de Dubé comme étant naïves, et on leur attribue la pureté du regard et la détermination. Dans Zone, Ciboulette, une de ses premières héroïnes, est portée par une réelle intransigeance qui donne à ses répliques un ton tragique. Elle est toute acquise au projet de Tarzan, pour qui elle a quitté sa famille et dont elle est l’alliée la plus sûre. Il reconnaît sa force morale et sa fidélité, mais quand la pièce se termine sur la mort de Tarzan, on ne sait pas ce qui l’attend, elle.

Les personnages féminins dans Un simple soldat et dans Florence sont plus nombreux et différenciés, entre autres parce qu’ils relèvent de générations successives. Les mères, qui sont de la génération née au début du siècle – Bertha dans le premier cas, Antoinette dans le second –, semblent figées dans un passé qu’elles ne veulent pas remettre en question. Ce serait trop déstabilisant de quitter le statu quo qu’elles ont érigé en guise de mur protecteur autour de leurs émotions réelles – qu’elles ne connaissent pas vraiment – et pour éloigner les rêves qui pourraient surgir. Si Bertha

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Un simple soldat (2007-2008), mise en scène de Jacques Rossi, coproduction TDP, Théâtre de la Bordée et Productions JBH. Annie Charland (Marguerite), Marie Ginette Guay (Bertha).

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rêve de déménager avec son fils dans un bungalow tout neuf, Antoinette, elle, refuse même d’envisager qu’elle pourrait éprouver un désir quelconque.

Marguerite, la fille aînée de Bertha, a un destin absolument terrible. Elle est de cette génération née vers 1920, et elle n’a connu que la crise économique dans une société non structurée et dans une ville livrée aux magouilles. Sans éducation et sans statut social, incapable de trouver en elle-même l’énergie nécessaire au refus et à la révolte, elle est en quelque sorte livrée au marché du travail et finalement aux souteneurs et à la prostitution. Et personne, semble-t-il, ne peut l’aider.

Fleurette, sa petite sœur, a 21 ans à la fin d’Un simple soldat. Elle reçoit positivement, semble-t-il, les conseils d’Émile, ami de son frère Joseph, qui lui recommande de quitter la maison de Bertha, de partir. C’est Joseph qui l’aurait voulu, ajoute-t-il, certain que cet argument la touchera. « Sors de ta rue, beauté, cours ta chance. » Elle a connu une déception amoureuse, a compris à cette occasion quelle était sa condition sociale, et elle sait sans doute ce qu’elle devra faire pour se trouver, par exemple, un emploi de secrétaire. Elle se trouve sensiblement dans la même situation que Florence lors de son embauche à l’agence William Miller Advertising. Florence a manifestement suivi une formation, elle parle l’anglais et travaille en ville. Il lui reste à quitter sa famille et la maison familiale et c’est son amie Suzanne qui lui en fait la suggestion. « Sais-tu ce que tu devrais faire, Florence ? Prendre un peu plus de temps pour réfléchir. Laisser ta famille, te trouver une chambre quelque part, connaître le plaisir d’être libre avant d’enchaîner ta vie à celle d’un autre. » Florence partira peut-être vers New York. C’est en tout cas la lumière qu’elle vient d’allumer pour elle-même au bout de son épreuve.

Les personnages féminins qui se révoltent, on le constate, le font autrement que les personnages

masculins. Elles le font après mûre réflexion, ce qui ne signifie pas pour autant que leurs refus soient plus faciles à assumer. Elles semblent planifier leurs départs, conscientes sans doute du fait que c’est l’emploi bien rémunéré qui leur procurera la liberté qu’elles cherchent, et la possibilité de s'autodéterminer. Mais rien ne garantit le succès de leurs démarches. Geneviève, dans Au retour des oies blanches, planifiera très bien sa sortie, même si c’est vers le suicide, en menant cette enquête où elle met toutes les lâchetés en accusation.

UNE SOCIÉTÉ CONTRE SES POÈTES

Les premiers textes de Dubé – De l’autre côté du mur (1951), Zone (1953), Chambres à louer (1953) – sont d’une écriture où le réalisme des situations et des dialogues s’accorde avec un souffle poétique certain. On y sent même des élans qui pourraient rappeler ceux du dramaturge Paul Claudel, en même

Florence (1987-1988), mise en scène de Lorraine Pintal, NCT. Marcel Leboeuf (Maurice), Sylvie Gosselin (Florence).

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temps que certaines marques du théâtre de Beckett. (En attendant Godot est écrit en 1948). On y sent un lyrisme qui s’articulera de multiples façons dans l’ensemble de ses textes, selon qu’il sera mis au service de la poésie, de l’expression de personnages artistes ou de l’engagement politique.

Cette attirance pour la poésie est constante chez Dubé et elle se manifeste également par la création de personnages d’artistes qui sont sans doute les plus malmenés de son théâtre. On pense immédiatement à Moineau, dans Zone, dont l’harmonica, avec ses notes mélancoliques, est le plus fidèle allié en même temps que l’image même de son rêve. La musique, dit-il « fait pas de mensonges, la musique parle pour vrai, pas les mots… ». Adrien, le fiancé de Simone dans Chambres à louer est pianiste au Honeymoon, sans doute situé quelque part sur la Main, un bar qui « n’est

pas aussi bien que le Rialto ou le Café Royal ». Mais Adrien espère qu’un jour, peut-être, il jouera en concert. « On ne sait jamais. » François, le frère de Simone, est le poète philosophe, l’étudiant romantique qui incarne en quelque sorte l’amour impossible, thème que l’on retrouve dans toutes les pièces de Dubé.

Le mystérieux Vincent Marquis du Temps des lilas a été peintre avant de faire la guerre, de s’engager politiquement, d’être emprisonné et de s’exiler pendant 20 ans. Il n’a plus de famille, et il revient à la peinture en même temps qu’à la vie dans le jardin de Blanche et Virgile. Mais les événements le trahissent. L’art est sans doute un refuge, mais il ne protège pas des assauts d’une société en mal de vengeance. Étienne, sociologue et socialiste, est le personnage de Bilan qu’on peut le plus associer à une attitude divergente, et il meurt avec Élise dans

Zone (1979-1980), mise en scène de Gilles Pelletier, NCT, Johanne Seymour (Ciboulette), Daniel Gadouas (Tarzan).

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un accident qui ressemble beaucoup à un suicide. Étienne était critique de la société pourrie par l’argent, les trahisons et les manigances politiques dans laquelle il était incapable de vivre.

Robert, dans Au retour des oies blanches, est celui qui écrit, mais il estime qu’il ne sera bientôt plus que l’ombre d’un homme. « Je regarde, je me souviens et j’écris. Mais je ne vis pas vraiment. Je suis une sorte de robot. »

Toutes les issues semblent bouchées pour ces personnages qui refusent de s’inscrire dans une société qu’ils perçoivent comme étant matériellement engagée mais socialement injuste. Ils ne parviennent pas à y trouver d’accomplissement satisfaisant ni dans l’action, ni en politique, ni en art. Sont-ils si mal accordés à leur époque qu’il leur est impossible d’y trouver une quelconque

satisfaction? Leur idéal est-il plus ambitieux que ce que leur société est en mesure de leur offrir?

En définitive, c’est toute une société que Dubé met en procès dans son théâtre, une société qui s’est laissée dépasser par l’Histoire et qui peine à y trouver sa place. Ce sont conséquemment les personnages qui sont livrées à eux-mêmes, abandonnés à leur sort individuel. Les projets de société ne sont pas encore élaborés dans ce Québec des années 1960. Les héros et les héroïnes de Dubé auraient-ils applaudi à la victoire de Jean Lesage en 1960 ou à celle de René Lévesque et du Parti Québécois en 1976 ? Auraient-ils brandi les casseroles du Printemps érable ? La question reste entière.

Hélène Beauchamp, texte extrait du dossier sur Un simple soldat, Cahier No 68, 2007.

Zone (1984-1985), mise en scène de Jacques Rossi, NCT. Jean-Guy Viau (le Chef), René-Richard Cyr (Passe-Partout), Jacques Rossi (Roger).

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ZONE… À LA BASE DE NOTRE TRADITION THÉÂTRALE

En fait, non seulement Zone (1953) est-elle une œuvre importante, mais elle se trouve à la base même de notre tradition théâtrale locale. Cette pièce de Marcel Dubé et Tit-Coq de Gratien Gélinas (1948) constituent les premiers textes théâtraux proprement canadiens-français. À l’époque où ils sont écrits, l’influence culturelle de la France reste dominante sur les artistes d’ici, au théâtre certes, où on joue principalement des textes étrangers, mais aussi en chanson par exemple.

Ainsi, en plus des acteurs, tous les chansonniers québécois emploient une diction et un parler « franchouillard » jusqu’aux années 1950. C’est à cette époque qu’on peut entendre pour la première fois Félix Leclerc afficher ses origines sans pudeur dans ses chansons, tant dans sa langue que dans les thèmes dont il traite. Ironiquement, ce poète et

chansonnier ne sera reconnu au Québec qu’une fois l’avoir été en France par un important impresario de l’époque. Il faut toutefois attendre les années 1960 pour que plusieurs importants auteurs-compositeurs-interprètes suivent les traces de Leclerc, Gilles Vigneault, Jean-Pierre Ferland, Claude Léveillé, qui composa d’ailleurs la musique pour l’une des productions de la pièce Zone. Il ne faut pourtant pas croire que le combat contre l’influence culturelle de la France était déjà gagné à cette époque. Même Robert Charlebois, chanteur populaire qu'on reconnaît aujourd'hui comme un fier utilisateur d'une langue vulgaire et relâchée, employait durant les années 1960, au début de sa carrière, une langue et un accent français.

Avant la fin des années 1940 et le début des années 1950, période durant laquelle sont présentées Tit-Coq de Gratien Gélinas et Zone de Marcel Dubé sur les scènes d’ici, de nombreux acteurs canadiens-français jouent des pièces presque exclusivement

Marcel Dubé en 2013 …

Antoine Côté Legault a rédigé le document d’accompagnement de Zone pour le Théâtre la Catapulte. Voici comment il présente la pièce aux jeunes en 2013.

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Richard J. Léger, Jean-Simon Traversy, Dave Jenniss, Maxime Lavoie, Frédérique Thérien, Nicolas Desfossés.

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improvisées dans leur langue naturelle, celle du peuple. Ces pièces, dites burlesques, allient rire et divertissement, dans une forme faite d’un collage de sketches humoristiques, de numéros de chant, de danse et même de cirque. Ces spectacles, qui changent complètement d’un soir à l’autre selon l’inspiration des interprètes et les réactions du public, sont véritablement les seules œuvres théâtrales de la première moitié du XXe siècle à refléter la réalité canadienne-française avant Tit-Coq et Zone.

Malheureusement, en raison de leur caractère improvisé, très peu de traces nous restent de celles-ci. Cela est d’autant vrai qu’ils sont snobés de plusieurs, qui ne trouvent aucune noblesse

dans ces spectacles voués au divertissement, dans lesquels les interprètes n’hésitent pas à utiliser un humour gras pour s’attirer la faveur du public. On se souviendra tout de même du nombre impressionnant de spectateurs qui assistaient à ces spectacles improvisés et du nom de plusieurs interprètes réputés : La Poune, Olivier Guimond (père et fils), Juliette et Arthur Pétrie.

Durant la saison 2010-2011, le Théâtre français de Toronto et le Théâtre la Catapulte ont repris conjointement Les Fridolinades de Gratien Gélinas, comédien et auteur de cette tradition burlesque. À chaque fin d’année, à la manière du Bye Bye de Radio-Canada, ce dernier avait l’habitude de produire des spectacles à sketchs inspirés des événements qui avaient marqué l’année. Le personnage principal incarné par Gélinas portait le nom de Fridolin, d’où Les Fridolinades. Suite à cet hommage du Théâtre français de Toronto et du Théâtre la Catapulte à cette tradition de pièces à sketchs, souvent improvisées par les acteurs, il allait de soi de proposer l’un des premiers textes de théâtre canadien-français. Les Fridolinades (1938-1946) précèdent d’à peine quelques années la création de Zone.

UN THÉÂTRE CANADIEN-FRANÇAIS

À l'époque, Zone (1953) et Un simple soldat (1957), une autre des premières pièces de Marcel Dubé, offrent au peuple canadien-français un reflet authentique de sa réalité en utilisant ses mots de tous les jours. Ces œuvres forment aussi une sorte d’appel à la libération du peuple canadien-français, un peuple soumis à l’emprise de la religion catholique, soumis aux valeurs traditionnalistes (si ce n’est pas rétrogades) de Maurice Duplessis, un peuple pauvre qu’on définissait aussi souvent comme étant « né pour un petit pain ». Sans véritablement le savoir, par cet appel à la libération de son peuple, Marcel Dubé annonçait la Révolution tranquille. P

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Nicolas Desfossés, Maxime Lavoie, Frédérique Thérien.

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Mettre pour la première fois sur une scène des personnages canadiens-français, c’était une véritable révolution, qui a permis au peuple canadien-français de prendre conscience de sa situation et d’avoir envie de se battre pour changer les choses. Tit-Coq, le soldat bâtard de la pièce de Gélinas, Joseph Latour, le soldat canadien-français brisé par la guerre d’Un simple soldat et les jeunes, pauvres et quasi-orphelins de Zone, ont certainement été un ingrédient essentiel à ce qu’une révolution plus grande puisse éclater durant les années 1960 et 1970.

DUBÉ DANS LE REGARD D’AUJOURD’HUI

La Jeunesse révoltée

On le sait, l’adolescence est une période fondamentale pour la formation de notre personnalité où éclatent les conflits de génération. Dans l’extrait suivant, André Durand explique très bien le rapport entre la pièce et l’adolescence.

Zone montre le caractère crucial de l’adolescence, l‘état de passage où l’illicite est roi, période marquée par la volonté de rupture avec les parents, par le désir d’un autre monde, et, en même temps, par le nécessaire passage à l’état adulte, par l’acceptation du monde tel qu’il est. Marcel Dubé a magnifié en ses personnages leur attachement à ce paradis du rêve où l’enfance cherche à se perpétuer. Puis il a montré que les paradis sont des illusions, que se réfugier dans cet espoir ne peut conduire qu’à un « réveil » pénible, à l’échec sinon au drame.

La pièce consacre donc l’impossibilité du rêve, la victoire définitive et fatale du réel sur le rêve. Mais ce passage au réel se fait par l’amour qui, au-delà de sa simple découverte qui a lieu dans la pièce, aurait été, le couple se formant, la famille se profilant, l’acceptation de responsabilités.

Au moment de la reprise de sa pièce en 2003, ne s’étonnant pas de sa constante actualité de sa pièce, Marcel Dubé déclara : « La jeunesse, qu’on le veuille ou non, est marginale tant qu’elle n’est pas devenue adulte. Marginale, non dans un sens pessimiste, mais dans le sens où elle a des droits sans avoir d’obligations ni de responsabilités. Cela dit, je crois qu’il est encore plus difficile d’être jeune aujourd’hui1.

La Bande

Refusant le monde des adultes, les jeunes de la bande de Tarzan se recréent une nouvelle famille qui fonctionne selon ses propres règles. Peu importe ce qu’en diront leurs parents, peu importe les lois que la société dicte, accéder à la liberté constitue un idéal pour lequel ils sont prêts à tout sacrifier. La bande, c’est le symbole même du refus des jeunes de se plier aux règles du monde des adultes, le symbole même de la révolte que tous les jeunes doivent vivre avant d’être capables de passer à l’âge adulte. Tarzan, Ciboulette, Passe-Partout, Tit-Noir et Moineau ont des parents violents, alcooliques, absents et ils refusent de reproduire ce modèle parental. En se rassemblant et en s’entraidant, ils espèrent pouvoir couper avec leurs racines et accéder à une meilleure situation. Comme les adolescents de toutes les époques, ils ont aussi besoin de tester les limites de la moralité et de la légalité avant de les accepter. Pour les gens de milieux défavorisés, la bande peut devenir la seule véritable famille. Dans un article2, Hugo Thérien analyse l'importance de la gang chez les adolescents.

Selon Dubé, le nœud de la pièce réside dans sa tragédie quotidienne et humaine. Il écrit dans une courte préface : « Les cinq adolescents de Zone […] portent en eux les thèmes et les drames qui composent le paysage humain et

1 André Durand sur www.comptoirlitteraire.com2 hugotherien.wordpress.com/2009/12/01/zone-de-marcel-dube

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lunaire de la vie. […] Au premier regard, ils n’ont rien de tragique. Leurs allures quotidiennes nous détourneraient facilement d’eux, mais comme ils se demandent devant nous pourquoi ils vivent, leurs dialogues et leurs gestes nous poussent à la compréhension et peut-être à la pitié. » Cette pièce relate un comportement humain propre aux adolescents et aux jeunes adultes qui à cause de certains facteurs, comme la pauvreté, les difficultés d’adaptation, les familles désunies et le manque d’autorité parentale, ainsi que le décrochage scolaire fuient le nid familial pour se regrouper en bande. De ce fait, la bande remplace la famille, c’est l’occasion de jouer un rôle, d’être quelqu’un, d’y sentir une chaleur affective, de vivre un sentiment de sécurité et de solidarité apaisant l’inquiétude et l’anxiété. Les membres sont présents, ils soutiennent et écoutent sans juger. Chacun veille sur l’autre et peu importe ce qui arrive, le groupe sera une des dernières choses que le jeune remettra en question. D’ailleurs, l’enjeu de la pièce tourne autour de la fidélité d’un des membres du

groupe (Passe-Partout) qui, par jalousie, tente de faire tomber le chef de la bande (Tarzan). Le phénomène ne diffère que très peu entre les bandes des années 50 et celles d’aujourd’hui. […]

La pièce de Dubé traite aussi d’un phénomène majeur dans la vie d’un adolescent qui est implicitement présenté dans Zone ; l’identification à un groupe. La trame narrative de la pièce fait état de cette quête identitaire lorsque le chef de la bande demande aux membres du groupe à quel point ils sont solidaires et unis. Pour réussir leur coup, ils doivent compter les uns sur les autres. Cependant, Passe-Partout, ne se considérant pas comme un membre à part entière, trahit leur chef pour son compte personnel. La quête identitaire à l’adolescence, hors du contexte familial, est un phénomène naturel dans l’évolution de l’homme, une tendance essentielle pour trouver sa place comme individu dans la société. L’adhésion (à différents niveaux) à un groupe, criminalisé ou non, semble donc nécessaire pour se forger, se construire. L’affirmation de l’identité du

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Frédérique Thérien, Dave Jenniss, Maxime Lavoie.

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groupe passe par la confrontation avec les valeurs traditionnelles, le groupe devant être anticonformiste pour montrer sa différence et s’établir comme étant unique et à part entière. Cette thématique est très moderniste dans la mesure où cette quête identitaire n’apparait que lorsque le modèle familial traditionnel explose, où la rupture avec le monde religieux s’impose. À ce moment, l’homme se retrouve sans base, il ne sait plus d’où il vient et où il va. Rejoindre un groupe et s'identifier à ses pairs devient donc une source de sécurité et de valorisation en dehors des religions ou de la famille.

La religion catholique

Durant les années 1940 et 1950, et même plus tard, les jeunes comme Marcel Dubé sont éduqués par les Frères et les Sœurs de l’Église Catholique. Ceux-ci enseignent donc le français, les mathématiques et les autres matières obligatoires, mais ils forment aussi l’esprit selon la morale catholique. Pour ce faire, les enseignants emploient un livre appelé Le Petit Catéchisme, qui fonctionne selon une logique de question-réponse. Par cette structure, on limite grandement le développement de la pensée individuelle.

Sans doute en raison de l’éducation de Marcel Dubé, sa pièce est imprégnée de symboles religieux. Dans sa description du décor de la pièce, Dubé insère l’un des plus importants symboles catholiques, la croix : « des cordes à linge vides traversent la scène, accrochées à un poteau croche planté derrière la palissade et dont le travers du haut, donne l’impression d’une pauvre croix toute maigre, sans larron ni Christ dessus ». À la toute fin de

la pièce, c’est Tarzan, tué alors qu’il essaie de se sauver des policiers en passant par le toit des hangars, qui remplira le rôle du Christ. Il annonce en effet un monde meilleur avant d’être tué, malgré la noblesse de l’idéal de liberté qu’il défend. La bande qui accompagne Tarzan est en quelque sorte le groupe d’apôtres qu’il a su rassembler et Passe-Partout est - comme Judas - celui qui vendra son chef. Sinon, Le Chef - comme Ponce Pilate - est celui qui doit juger Tarzan et ses apôtres. Finalement, au moment où vous assisterez à la pièce, il est fort probable que vous remarquerez des références aux sept péchés capitaux ou aux dix commandements, dans la façon dont les jeunes envisagent le monde.

Entre moralité et légalité

L’une des plus grandes qualités de la pièce Zone est qu’elle ne nous met pas face à des oppositions tranchées. Tout sujet abordé par la pièce devient matière à débat. Bien que les jeunes de la bande de Tarzan soient hors-la-loi, il leur semble tout à fait moral d’emprunter des moyens illégaux pour sortir de leur misère, puisqu’ils n’en ont pas d’autres. Sont-ils vraiment des bandits alors ou est-ce que leur misère et leur pauvreté justifient de détourner les lois ? Est-ce que Passe-Partout est profondément malhonnête et méchant, ou n’a-t-il pas seulement vécu une vie tellement dure qu’il a dû apprendre à voler et à mentir pour survivre ? Le Chef a-t-il vraiment envie de condamner ces jeunes gens dépourvus ou ne les comprend-il pas, eux qui au fond essayent seulement de s’en sortir ? N’est-ce pas injuste que Tarzan meure alors qu’il défendait une noble cause ?

QUEL GENRE DRAMATIQUE POUR ZONE ?

Le mélodrame est un genre théâtral né en France au début des années 1800, qui se définit comme une « tragédie populaire », pour reprendre les mots

Par sa langue et par son écriture, l’écrivain transporte le spectateur dans un univers troublant de vraisemblance, tout en gardant un caractère poétique et imagé.

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de Charles Nodier. Contrairement aux tragédies de Racine ou de Corneille, qui donnaient aux aristocrates du XVIIe siècle une vision noble et héroïque d’eux-mêmes, le mélodrame est d’abord conçu pour les gens du peuple, pour ceux « qui ne savent pas lire », explique Pixérécourt, auteur considéré comme étant le père du mélodrame. Ces pièces de théâtre accessibles, guidées par le désir de provoquer l'émotion et les larmes du spectateur, attirent de grandes foules, dans lesquelles se retrouvent des gens de toutes les classes sociales. Au XXe siècle, les techniques du mélodrame sont reprises par plusieurs formes d’art populaire comme le cinéma et la télévision.

Le mélodrame

Très rapidement, les gens d’ici apprécient grandement les mélodrames de toutes sortes. Il suffit de penser au film à succès La Petite Aurore l’enfant-martyr (1952), adaptation d’une pièce de théâtre qui connut pas moins de 5000 représentations entre 1921 et 1950. On peut aussi penser à la série télévisée Les Belles Histoires des pays d’en haut et son célèbre personnage de Séraphin (1956-1970). Outre cela, les héritiers contemporains du mélodrame seraient certainement les séries dramatiques à la télé (Trauma, La Promesse, Destinées...), les comédies dramatiques et les comédies romantiques du cinéma (Titanic, Le Journal de Bridget Jones, Cyrano de Bergerac...). Les romans-savons (ou soap-opera) de la télévision comme Les Feux de l’amour et les romans Harlequin reposent sur une même quête de l’émotion et des larmes.

Ces héritiers contemporains du mélodrame se caractérisent tous par une intrigue déchirante, des rebondissements inattendus, un amour impossible ou romantique. Pensons par exemple à la version cinématographique de Titanic, dans laquelle deux amants vivent un amour impossible en raison de leurs différences de classe sociale. Le film se clos justement sur une scène déchirante qui amène

même les moins sensibles d’entre nous à verser une larme : au comble de l’épuisement, le beau Jack (Leonardo DiCaprio) se laisse couler et se noie dans les eaux glacées de l’Atlantique sous les yeux horrifiés de sa chère Rose (Kate Winslet) qui elle, survivra et en gardera le souvenir jusqu’à la fin de ses jours.

En plus de la définition générale que nous en avons donnée, on peut relever plusieurs caractéristiques propres à la forme mélodramatique. De nos jours, les techniques du mélodrame nous sont très familières puisque le cinéma et les séries télévisées populaires les emploient couramment.

Avec de la musique

Elle prend toujours une place très importante dans le mélodrame, et sa fonction est d’amplifier l’émotion. Dans les scènes particulièrement tragiques, la musique est souvent utilisée comme un moyen pour nous tirer une larme. De nos jours, on est habitué à ce genre de trame sonore qu’on retrouve dans les films populaires et les séries télévisées. Le film Titanic ne serait certainement pas aussi émouvant si ce n’était de la fameuse chanson My Heart Will Go On de Céline Dion. Lorsque vous écoutez la télé, portez attention à la présence de la musique dans les séries dramatiques. Un roman-savon comme Les Feux de l’amour ou même une série dramatique comme Trauma y ont souvent recours, à un point tel qu’il est parfois difficile d’entendre les dialogues sous cette avalanche de musique. La présence constante de la musique semble dans certains cas avoir pour objectif d’enterrer des dialogues pauvres ou mal écrits. Ainsi, même si une scène n’est pas si émouvante, elle peut nous toucher uniquement en raison de son enrobage musical.

Un traître (ou un méchant)

En repensant à différents exemples de mélodrames, nous pouvons aisément trouver dans la majorité

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d’entre eux un personnage qu’on aime détester, puisqu’il fait souffrir le héros ou l’héroïne de l’histoire. De nos jours, plusieurs films, séries dramatiques et romans-savon ont eux aussi leur « bitch » ou leur « chien sale »- pour reprendre nos mots de tous les jours - qu’on se plaît à détester.

Une victime

Selon la logique mélodramatique, le héros ou l’héroïne des pièces de théâtre, des films et des séries télé sont victimes des manigances ou de la méchanceté du traître. C’est le cas de Rose, dans Titanic, qui doit se soumettre à la volonté de celui à qui elle est promise. C’est pareil pour le personnage de Donalda dans Les Belles Histoires des pays d’en haut, qui souffre de son union avec Séraphin. Ces personnages de victimes nous inspirent une pitié et une émotion des plus sincères. Une émotion

par laquelle on se laisse emporter avec le plus grand des plaisirs.

Des situations déchirantes

Tout bon mélodrame comporte une histoire d’amour impossible ou tout autre type de situation déchirante qui nous inspire la tristesse, la pitié ou la peur. Un personnage peut donc révéler dans une scène particulièrement triste qu’il est orphelin et même faire face à un ennemi terrifiant comme le fait Harry Potter. Dans un cas comme dans l’autre, cela « viendra nous chercher » en tant que spectateur. C’est justement ce qui nous attire lorsqu’on va au cinéma ou au théâtre. Et on est même prêt à accepter sans difficulté que l’histoire soit « tirée par les cheveux », tant et aussi longtemps qu’il se passe quelque chose.

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Nicolas Desfossés, Frédérique Thérien.

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Le mélodrame dans Zone

L’histoire et les personnages de la pièce de Dubé répondent directement à la logique mélodramatique. Au moment de voir la pièce, vous pourrez constater vous-même à quels moments la musique est employée et en quoi elle permet d’amplifier l’émotion. Dans le cas des autres caractéristiques, on les retrouve directement dans le texte de la pièce. Le traître est très certainement incarné par le personnage de Passe-Partout et la victime par celui de Ciboulette. Passe-Partout fait très certainement souffrir Ciboulette par des avances répétées et des commentaires méchants à l’égard de Tarzan, particulièrement durant les derniers moments de la pièce, quand celui-ci risque d’être condamné à mort. Passe-Partout est aussi celui qui est le moins vigilant lorsqu’il fait de la contrebande, contrairement à ce qu’exige le chef, et celui qui trahit Tarzan et la bande durant les interrogatoires de peur d’être emprisonné et par souci de profiter de la situation pour remplacer Tarzan dans le rôle de chef.

Zone comporte aussi de nombreuses situations déchirantes. Passe-Partout fait preuve d’une grande cruauté à l’égard des autres. À l’égard de Moineau, parce qu’il est moins intelligent et ne se défend pas lorsqu’il est frappé, de Ciboulette, parce qu’elle est une amante potentielle et qu’elle aime Tarzan, finalement à l’égard de Tarzan parce qu’il veut obtenir son rôle. Ciboulette et Tarzan refusent de vivre leur amour de peur de compromettre leur rêve de s’en sortir grâce à la contrebande. Pareil au Christ, Tarzan meurt alors qu’il défendait une cause noble et qu’il a su rassembler et inspirer les autres membres de la bande. C’est sans doute là le plus gros du déchirant et du tragique de la pièce.

Le personnage de Tarzan est d’ailleurs empreint d’une grande empathie à l’égard des autres. Qui aurait accepté d’aider quelqu’un d’aussi malhonnête que Passe-Partout sinon quelqu’un

de profondément bon ? De la même façon, comme le Christ qui tisse des liens avec tous les êtres placés en marge de la société, il donne sa chance à tous les membres de la bande, dont Moineau, qui n’a pas l’intelligence ni la vivacité d’esprit des jeunes de son âge.

Comme au cinéma

On l’a compris aisément, le cinéma d’aujourd’hui emploie plusieurs techniques mélodramatiques : flot de musique pour augmenter l’émotion, histoires d’amour impossibles, intrigues déchirantes pleines de rebondissements inattendus... De son côté, la pièce Zone renferme elle-même des références cinématographiques. Rappelons à ce titre que durant le début des années 1950, quand la pièce a été écrite, la télévision n’était pas encore répandue. De nos jours, les adolescents peuvent trouver des modèles à la télé ou chez les chanteurs populaires, mais dans les années 1950, les modèles proposés aux jeunes adultes étaient à peu près exclusivement ceux du cinéma. Les super-héros du grand écran et des bandes dessinées comme Tarzan ou Superman, les héros de films policiers auxquels Tarzan fait référence lors de son interrogatoire, les amoureux au cœur pur des films romantiques sont autant de modèles qui ont forgé l’imaginaire des jeunes adultes de l’époque de Zone.

On retrouve d’ailleurs dans la pièce une référence directe à ces héros de cinéma dans le nom des personnages, qui sont tous des noms inventés : Tarzan, Ciboulette, Passe-Partout, Tit-Noir, Moineau. Ciboulette semble incarner par moment l’image classique au cinéma de la jeune femme emportée par l’émotion embrassant tendrement son amoureux au son du violon. D’ailleurs, dans la pièce Zone, Le Chef est décrit comme portant un long imperméable bleu foncé et un chapeau gris, une référence aux policiers des films noirs des années 1950.

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Marcel Dubé grandit en lisant Gabrielle Roy et Roger Lemelin. Son œuvre réaliste est la première à lever le voile sur la pauvreté, les problèmes familiaux et l’émancipation de la femme, tabous à l’époque. Elle s’intéressera plus tard à la bourgeoisie. L’auteur est également un pionnier au niveau de l’utilisation du langage populaire au théâtre, pavant la voie à Michel Tremblay et aux Belles-Sœurs.

DUBÉ, Marcel, La Tragédie est un acte de foi, Ottawa, Leméac, coll. « documents », 1973, 120 pages.

DUBÉ, Marcel, Textes et documents, Ottawa, Leméac, coll. « théâtre canadien », 1968, 80 pages.

DUBÉ, Marcel, Zone, Ottawa, Leméac, coll. « théâtre canadien », 187 pages.

DURANT, André, « André Durant présente Marcel Dubé », Québec, texte de 32 pages accessible sur le site www.comptoirlitteraire.com.

GODIN, Jean-Cléo, « Les avatars du réalisme québécois », Jeu : revue de théâtre, n° 85, (4) 1997, p. 65-72.

GODIN, Jean-Cléo, « Marcel Dubé et les bourgeois », Jeu : revue de théâtre, n° 106, (1) 2003, p. 77-82.

LAROCHE, Maximilien, Marcel Dubé, Montréal, Fides, coll. « écrivains canadiens d’aujourd’hui », 1970, 191 pages.

LAROCHE, Maximilien, « Zone et Marcel Dubé », dans Marcel Dubé, Zone, Ottawa, Leméac, coll. « théâtre canadien », p. 7-22.

POUR EN SAVOIR PLUS...

LAURIN, Michel, Étude de Un simple soldat de Marcel Dubé, Groupe Beauchemin, Collection Parcours d’une œuvre, 1999.

RIVARD, Jacques, L’Universalité du théâtre de Marcel Dubé, mémoire de maîtrise, Montréal, Département de langue et de littérature françaises, Université McGill, octobre 1992, 109 pages.

THÉRIEN, Hugo, « Zone » de Marcel Dubé, l’importance de la « gang » chez les adolescents, 2009, tiré du site http://hugotherien.wordpress.com/2009/12/01/zone-de-marcel-dube/.

THOMASSEAU, Jean-Marie, Le Mélodrame, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », 1984, 127 pages.

Films

Marcel Dubé, de Claude Godbout, réalisateur, Montréal, Productions Prisma 1982. À travers l’évolution de la carrière de l’écrivain Marcel Dubé, ce film retrace les principaux thèmes de sa dramaturgie reflétant les drames, les aspirations et les difficultés de la société québécoise. Aperçu de l’importance de son œuvre.

Marcel Dubé : aimer, écrire, de Guy Simoneau, réalisateur, Montréal Cinéma libre, 1997. Auteur visionnaire, prolifique et extrêmement populaire durant les années 50, 60 et 70, ex-grand viveur, Marcel Dubé, maintenant seul, bien vivant, les yeux bleus d’un ciel voilé, écrit toujours. Et bien que les historiens et les spécialistes parlent de Marcel Dubé comme d’un monument, il s’agit surtout, dans ce film, d’un homme

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Lisez le mot du metteur en scène Jean Stéphane Roy. Êtes-vous d’accord avec ce qu’il dit, est-ce que ses propos vous choquent ? Après cette lecture, est-ce que la pièce Zone vous semble pertinente encore aujourd’hui bien qu’elle ait été écrite en 1953, il y a près de 60 ans ?

La pièce Zone a été grandement inspirée par le cinéma des années 1940 et 1950. Au-delà du fait que Tarzan dit lui-même « ça s’est passé comme dans un film », en quoi est-ce que son récit vous rappelle le cinéma ? Est-ce qu’il vous rappelle certains de vos films préférés, certaines scènes, certaines atmosphères, certains personnages ? « TARZAN - Je me suis préparé pendant trois jours. J'y ai pensé sans arrêt et ce soir, j'ai tenté ma chance et j'ai réussi. Y ont dû découvrir ma disparition une demi-heure trop tard. Ça s'est passé comme dans un film. »

On trouve des références à Tarzan, aux films policiers à travers le personnage de l’inspecteur, aux films romantiques à travers la relation de Tarzan et Ciboulette. Avez-vous pu trouver des ressemblances entre la forme de vos films préférés et la pièce Zone, que ce soit chez les personnages, dans leurs costumes, dans la façon dont la musique et les éclairages étaient utilisés ?

À quels personnages pouvez-vous associer le rôle du traître et de la victime dans la pièce Zone ? Expliquez. Pour définir le personnage du traître et de la victime, qu’on voit fréquemment dans les films, les séries télévisées et les pièces de théâtre, référez-vous aux caractéristiques du mélodrame.

POUR ALLER PLUS LOIN...

Matière à réflexionDans la pièce, Tarzan et ses amis font la contrebande de cigarettes. Ce phénomène existe-t-il encore aujourd’hui ? Pourquoi selon vous ?

Peut-on encore associer un statut social à la cigarette comme on le faisait dans des émissions de télévision ou des films des années 1940 à 1980 ?

Revenir sur les répliques associées à chacun des personnages de la pièce dans la rubrique ACTEURS ET PERSONNAGES. Pourquoi ces répliques sont-elles caractéristiques des personnages qui les énoncent ? Que disent-elles de ces personnages ? Écrire un bref texte de présentation de chacun des personnages à partir des répliques.

Matière à lectureAntigone de Jean Anouilh pour connaître un personnage tragique qui est aussi intransigeant que Ciboulette.

Le Dernier Jour d’un condamné de Victor Hugo pour le procès et l’interrogatoire musclé qui conduit à une condamnation et à la mort.

Matière à débat. Après avoir vu la pièce, croyez-vous que la bande a raison de faire de la contrebande de cigarettes pour sortir de sa pauvreté ? Si oui, pourquoi ? Si non, quels seraient les autres moyens qu’ils pourraient employer pour améliorer leur situation économique difficile ?

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