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    UNIVERSITE DE PARISB I B [. 1 O T H Q U E

    DE I.AFACULT DES LETTRESXVI

    TUDES D'HISTOIRE BYZANTINECONSTANTIN V, EMPEREUR DES ROMAINS

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    Librairie FLIX ALCAN, io8, Boulevard Saint-Germaix, Paris, ^

    BIBLIOTHQUED1-: LA

    FACULT DES LETTRES DE L'UNIVERSIT DE PARISL De l'authenticit des pigrammes de Simonide, par Amde Hau-vette, professeur adjoint Je langue et de littrature grecques la

    Facult. I vol. in-8o , 5 f'r.II. Antinomies linguistiques, par Victor Henry, professeur de sanscrit et

    de grammaire compare des langues indo-europennes la Facult.I vol. in-8o 2 fr.

    III. Mlanges d'histoire du moyen ge, publis sous la direction de M. leProfesseur Luchaire, par MM. Luchaire, Dupont-Ferrier etPouPARDiN'. I vol. in-8" 3 Ir. 50IV. tudes linguistiques sur la Basse-Auvergne. Phontique histo-rique du patois de Vinzelles, par A. Dauzat, licenci s-lettres.

    Prface de A. Thomas, charg du cours de philologie romane laFacult. I vol. in-So 6 fr.

    V. La Flexion dans Lucrce, par A. Cartault, professeur de posielatine la Facult, i vol. in-8o 4 fr.

    VI. Le Treize Vendmiaire an IV, par Henry Zivy, tudiant .'i la Facult.I vol. in-S" 4 fr.

    VII. Essai de reconstitution des plus anciens mmoriaux de la Chambredes Comptes de Paris {Pain, Noslcr', Nosler^, Oui rs iii tivlis,Croix, A^), par MM. Joseph Petit, archiviste aux Archives natio-nales, Gavrilovitch, Maury et Teodoru, avec une prface JeCh.-V. Langlois, charg de cours la Facult, i vol. in-8, avecune planche hors texte 9 fr.

    VllI. tudes sur quelques manuscrits de Rome et de Paris, par AchilleLuchaire, professeur d'histoire du m\en ge la Facult. l vol.in-S" 6 fr.

    IX. tude sur les Satires d'Horace, par A. Cartault, professeur de posielatine la Facult, i vol. m-?, 11 fr.

    X. L'Imagination et les Mathmatiques selon Descartes, par PierrelOL'TROLX, licenci s-lettres. i vol. in-S" 2 fr.XI. tude sur le dialecte alaman de Colmar (Haute-Alsace), par VictorHenry, professeur de sanscrit et de grammaire compare des languesindo-europennes la Facult, i vol. m-'& 7 fr.

    XII La main-d'uvre industrielle en Grce, par P. Guiraud, professeuradjoint la Facult, i vol. in-8o 6 fr.

    XIII. Mlanges d'histoire du moyen ge, publies sous la direction de M.le professeur Luchaire, par MM. Luchaire, Halphen, Huckel, ivol. in-8 6 fr.XIV. Mlanges d'tymologie franaise, par Antoine Thomas, professeur delittrature du moyen ge et philologie romane la Facult, i- vol.in-8o. ....'.:., 7 fr.XV. La Rivire Vincent Pinzon. Etude sur la cartographie de h Guyane,par P. Vidal de la Blache, professeur de gographie la Facult.i vol. in-8" 6 fr.XVI. tudes d'histoire by-aiitiue. Constantin V, empereur des Romains(740-77S), par Alfred Lombard, licenci es lettres, avec une prfacede Ch. DiEHL, charg de cours la Facult. i vol. in-S". 6 fr.

    CHARTRES. IMPRIMERIE DURAND, RUE FULBERT.

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    UNIVERSIT DE PARISBIBLIOTHQUE

    DE LAFACULT DES LETTRESTUDES D'HISTOIRE BYZANTINE

    CONSTANTIN V, EMPEREUR DES ROMAINS(7^0-775)

    PARALFRED LOMBARD

    AVEC UNE PREFACE DE CH. DIEHLCHARG DU COURS d'hiSTOIRE 0TZANT1>'E A LA FACUL

    m lusFLIX ALCAX, LDITEURANCIENNE LIBRAIHIE e.

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    .LhS

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    PREFACE

    Il n'existe point, l'heiire acluellc, d'hisloire gnrale Jel'empire byzjmtin, j'entends une histoire vraiment scienti-fique et rpi! soit au courant dos |)ins rcentes recherches : etaussi bien, cette histoire est-elle, pour l'instant, peut-treimpossible crire. Troj) de |)roblmes essentiels restentencore sans solution, trop de priodes importantes demeurentencore enveloppes d'obscurit, trop d'aspects caractristi-ipies de la civilisation byzantine se dessinent encore en traitsIrop vagues sur le fond des vnements, pour qu'on puissesans imprudence se risquera prsenter uu tableau d'ensembleet formuler des ides gnrales: le vouloir faire seraits'exposer de gait de cur tre faux, incomplet, inexact.Il faut donc pendant quelques annes encore nous rsignerbravement des recherches |)lus particulires, des aperusmoins ambitieux : de ces travaux jirparatoires et ncessairesl'n'uvre sortira en son temps.On sait tout ce que les Jcihrbclu'r de Munich ont apportde lumire et de prcision dans la connaissance de l'histoired'Allemagne : je voudrais que, pour combler les trop nom-breuses lacunes qui existent encore dans la suite des annalesbyzantines, on nous donnt des monographies de cette sorte,tri-s prcises et trs scientifiques. Kntre le vf sicle, o j'aitach de faire une lude attentive du grand rgne de Jusli-nien, et le x'', qui est assurment, grce aux travaux de

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    Rambaul et do G. Schliimbcrger, la priode la mieux connuede l'histoire de l'empire grec, il y a un grand trou sombre,qu'clairent peine ici et l de brves lueurs. Entre la mortde Basile II et la prise de Constanlinople par les croiss, endehors du livre ile Brhier sur le schisme du xi' sicle et decelui de Chalandon sur le rgne d'Alexis Comnne, il en va peu prs de mme, et le xn sicle en particulier, la plus glo-rieuse poque de la dynastie des Comnnes, est peu prsinexplor. Enfin le xiv" et le xv*' sicles sont tudier presquecompltement, et la ngligence qu'on v a jusqu'ici apporteest d'autant plus surprenante que pour cette priode lesdocuments abondent, l'histoire de Bvzance se trouvant alorstroitement mle celle des Turcs, des Slaves du Sud et despeuples de l'Occident '.

    L'histoire des institutions de Bvzance est peut-tre plusmal connue encore cpie l'histoire politique de l'empire grec.Assurment, le jour est fort loign encore o nous auronspour Bvzance l'cpiivalent de ce qu'est pour Rome le Manuelde jMommsen et Marquardt : du moins faut-il s'appliquer hler ce jour par des tudes approfondies sur l'administra-tion byzantine, tudes difficiles sans doute, mais que leurnouveaut doit rendre particulirement sduisantes. Tout,en effet, ou presque, est faire ici, et de bonnes monogra-phies sur le gouvernement intrieur de tel ou tel basileiis jet-teront sur l'histoire administrative de Bvzance, sur sa vieconomique et sociale, d'un mot, sur sa civilisation, desclarts inattendues.Le mmoire de M. A. Lombard sur le rgne de Constantin V

    est une de ces monographies auxquelles j'ai encourag meslves. On sait quelle est dans l'histoire bvzantine l'impor-tance de la priode des empereurs iconoclastes, et combien

    I. J'ai dress le bilan, aussi exact que possible, des rsultats acquis actuellement,et esquiss le programme, tel que je le conois, des recherches futures dans unarticle sur les tudes H'hhtoire byzanline en 1901. (^lievue de synthse historique, oct.1901, p. 177-225 )

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    leur uvre a t diversement juge. Parmi eux, Constantin V,si maltrait par ses contemporains, si exalt par ses modei'uespangyristes, mrite, ce semble, une particulire attention.Grand homme de guerre, il a victorieusement dfenilu lesfrontires et assur aux armes romaines un prestige nouveau.Politique avis, il a nettement compris le rle de l'empiregrec ilans le monde oriental, et son administration intrieurea singulirement contribu aux |)rogrs de l'iiellnisme.Thologien enfin, et plus encore croyant sincre, il a tentun nergique effort pour relever le niveau intellectuel etmoral de son peuple. Et malgr les haines dont il fut l'objet,son uvre a dur, en somme, et coiitiibu la renaissancede Bvzance.

    Il m'a sembl ([ue le j)ublic savant trouverait c[uelqueintrt voir expli(|uer ces choses dans une lude complte,attentive, conduite avec une mthode rigoureuse et une cri-tique svre, et que le grand empereur iconoclaste \ aj)pa-raitrait peut-tre sous un jour assez nouveau et plus vrai. 11m'a sembl, en outre, qu'il v aurait avantage montrer sanstaider ti'o[) ce que peut proiluire le sminaire d'histoirebvzantine que nous tchons de constituer en Sorbonne.D'autres travaux s'\ prparent en ce moment mme, sur lergne de l'impratrice Irne, sur le gouvernement de Basile I,sur le gouvernement de Lon VI, sur la gographie histo-rique et les institutions administratives de la More franque.Ainsi, peu peu, je l'espre, nous donnerons l'histoirebvzantine des bases plus solides, et nous conti'ibuerons jiournotre part aux progrs de la science dont notre Ducange fut,jadis, le fondateur.

    Cn. DiKHh.

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    CONSTANTIN VEMPEREUR DES ROMAINS

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    CHAPITRE ILES SOURCES

    Le princip;il document pour l'histoire du rgne de Constantin Vest la C/ironogriip/ue crite entre 810 et 8i5 par Thopliane leConfesseur '. Cette chronique, si sche et si insuffisante qu'elleparaisse h la lecture, est cependant le rcit le plus complet et leplus dtaill que nous possdions des vnements de cette priode.Les faits y sont classs par annes du monde et dats par indic-tions ; la chronologie y est dresse avec le plus grand soin, etM. Hubert a dmontr rcemment que dans Thophane, contraire-ment l'opinion reue, les annes de l're mondaine taientparfaitement exactes et devaient nous servir de base pour tablirla chronologie de cette priode". Le Breviariani du patriarche

    t. Krunibacher. By:. Litl : p. 3^2.2. Byzanlinischc Zeitschrift, 1897, p. 5o4. Voir pour l'ancionnc chronologie les

    notes de Pagi et de Maiisi dans les ditions de Baronius, et les travaux des Bollan-disles (AA. SS., octobre VIII. p. 128, introduction la Vie d'Andr in Crisi, marsIII, p. \ cl mars II, p. Got)). On s'est surtaul occup des premires annes du rgne deLon III eldc la date de ses premiers dils. Voir, outre les ouvrages cits, Ilerde. IV, p.3^9 et sqq. ; Schlossor, p. lG et sqq.; Marx, p. () et sqq.; Schvvarzlose, p. 3() et sqq.;Sclienk, Kaiser Lon III, p. 30 et sqq. et A'. /,. ///. Walten in Innern, p. 27a et sqq.On admettait que la chronologie de Thophane tait en avance d'une anne partir de l'an I d'Hracllus jusipi' la dernire anne de (lonstanlin Gopronjino, c'est--dire i[ue l'anne G3'i.5 de Thophane, par exemple, tait en ralit l'anne (ia^t)de l're d'Alexandrie et correspondait ainsi l'anne de noire re qui va de sep-lend)re 753 septembre 75.'( el non celle qui va de septembre 702 septembre 703.Thophane avait ensuite ddoubl la dernire anne de Constanlin et celle nou.velle erreur, qui compensait la premire, avait ainsi redress sa chronologie. Onexpli

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    2 CO^iSTANTIlN V, EMPF.RF.IR DES ROMAnSNicphore contient un rcit plus sommaire et plus rapide. Il seborne h raconter l'histoire de Byzance proprement dite, tandis queThophane prtend nous donner une histoire gnrale de l'Orient,et parle aussi bien des Arabes que des Grecs. I.e texte de Nic-phore prsente des analogies frappantes avec celui de Thophane;les ternies employs sont souvent identiques et cependant l'ordredure du rgne des empereurs. Il dit ainsi que Constantin V a rgn 34 ans 2 mois2(1 jours et pourtant il le fait rgner du 17 juin 6282 au i4 septembre 6267, ce quilait plus de 35 ans. Murait, dans son Essai de chronologie byzantine, tait arriv unsystme trs compliqu et peu logique, corrigeant le chifTre de Tanne du monded'aprs l'indiction, pour les vnements que Thophane date par lindiction, main-tenant, au contraire, ce chiffre lorsque l'indiction n'est pas donne.

    Hubert, d'aprs une conjecture de Bury (^Hislorr of Ihe taler ftoman Empire,i88g, t. Il, p. 425) est arriv une chronologie plus satisfaisante. Il admet qu'en72C, pour des raisons financires, Lon III a fait doubler l'indiction. c'est--direque la 10' indiction, qui correspondait l'anne du monde 6219, aurait t avancejusqu' l'anne O218 laquelle aurait ainsi appartenu deux indictions. Nous aurionsdonc :

    725^6217-6218 Ind. rg. 8-9 Thopb. J *"726= 6218-6219 Ind. rg. 9-10 Thoph. 10-727:^6219-6220 Ind. rg. lo-ii Thoph. 11-13A partir de 726 et jusqu'en 773, l'indiction byzantine se trouva ainsi en avance

    d'une anne sur l'indiction rgulire employe en Occident. Mais l're du mondeemploye par Thophane donne bien l'anne exacte. L'avnement de Constantintombe ainsi en 740 :740^6232-6233 Ind. rg. 8-9 Thoph. 9-10

    Tlicophane place, en effet, cet avnement au iS juin 6232, indiction 9. Le conciledes Blachcrnes tombe en 753. Thophane le fait durer du 10 fvrier au 8 aot del'indiction 7, en 0345. Or :

    753 ^ 6245-O246 Ind. rg. 6-7 Thoph. 7-8Mais en 770 Constantin s'avisa de rtablir Byzance l'indiction rgulire. Pourcela, il procda une opration contraire celle de Lon III ; il prolongea probable-ment de six mois chacune des indictions 11 et 12. On eut ainsi :771^6263-6264 Ind. rg. 9-10 Ind. Thoph. lo-ii772^6264-6265 Ind. rg. lo-ii Ind. Thoph. 11778^6265-6266 Ind. rg. ii-ia Ind. Thoph. 11-12774^6266-6267 Ind. rg. i2-i3 Ind. Thoph. i2-i3et ainsi de suite. Les contradictions entre les chiffres de l're mondaine et les calculsde Thophane sur la dure du rgne des empereurs, proviennent de ce qu'il a faitces calculs lui-mme et d'aprs l'indiction, sans tenir compte des irrgularits i|uis'y taient produites, .\insi est rsolue la diCBcull qui embarrassait le plus les histo-riens : la dure exacte du rgne de Constantin ^ . Thophane place son avnementau 18 juin 6282 et sa mort au i4 septembre 6267, '^'^ 1"' '^^'^ ^^ ^"* ^ mois 26 jours.11 indique, d'autre part, qu'il a rgn 84 ans 2 mois 26 jours, parce qu'il a comptles annes de son rgne de l'indiction IX. l'indiction XIII, sans rflchir que l'in-diction XII avait dur deux ans. Constantin a bien rgn 35 ans.

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    i.p.s sninc.r.sdes vnements nest pas le mme, ce qui incline penser que cesdeux nuteurs ne se sont pas faitd'emprunts rciproques, mais plu-tt qu'ils ont puis tous deux une source commune '. Schenka montr que Nicphore, grce h sa situation officielle, tait mieuxplac que Thophane pour consulter des documents authentiques".Sa narration est en outre plus impartiale et plus sobre que cellede Thophane. La passion religieuse et la haine des empereurshrticjues y sont moins visibles ; les Invectives et les dclamationsy tiennent moins de place. La partie anecdotique y est moinsdveloppe ; en revanche des vnements importants comme lesguerres de Bulgarie sont rapports d'une faon plus complte etplus claire. Il est trs regrettalile que le rcit de Nici'phores'arrte l'anne 769.

    Les chroniques postrieures sont beaucoup moins importantes.Georges Ilamartolos, ou Georges le Moine, crit sous Michel II!(842-867) une Histoire abrge du monde d'Adam

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    /| COIVSTANTIIV V, lMPKRKL'R DKS fiOMAIKSIlamartolos. Enfin Michel Glycas (xii" sicle)' imite son touret Cetlrenus et Zonaas.

    Les chroniques relatives au rgne de Constantin sont doncparticulirement pauvres et peu nombreuses. La littrature tho-loffique de cette priode est au contraire trs abondante et lesrenseignements qui s'y trouvent disperss supplent en quelquemesure h l'insuffisance des historiens.

    Les trois discours Sur les images de Jean Damascne " intressentla premire priode de la querelle iconoclaste. Mais les ouvragesanonymes ad Conslantinum Caballiniini^ eX ad Tlicopliiliim impe-ratorem'' nous fournissent cjuelques indications utiles sur le rgnede Constantin. On sait que ces discours ont t attribus tort Jean Damascne '.

    La Lettre T/ii)/>/ii/e, crite dans les dernires annes du rgnede cet empereur, c'est--dire vers 8A5 ", contient un rcit rapidedes vnements de la perscution depuis les origines jusqu'Michel II. Les principaux passages relatifs Constantin Y y sontreproduits textuellement de la V^ie d'Etienne '.Le discours ad Constanlinum Cahallinum est plus dilficile dater. Schvvarzlose* prtend qu'il a t crit dans les derniresannes du rgne de Constantin Y, soit entre 766 et 776. Maisje remarque (juc l'auteur de cette invective parle de ConstantinCaballinus comme d'un adversaire mort'. Les termes dans les-quels il rappelle les dcrets de Constantin contre l'invocationdes saints montrent qu'au moment oii il crivait, ces dcretstaient oublis ou tombs en dsutude'". Le fait que cette lettreest adiesse Constantin ne signifie pas qu'elle ait t crite deson vivant. 11 ne s'agit ici que dune invective de rhtorique ol'on prend partie l'hrsie elle-mme dans la personne de son

    I. Krumbachcr, p. 38o.i. !\lignc, P. G., l. 9^.3. Aligne, t, 95, p. 338 sqq.4. Migne, t. 95, p. 362 sqq.5. V. Schwarziosc, p. 108.0. Sclnvarzlose, p. iio, d'aprs le chapitre ix : i3o ans sont couls tiepuis les

    prcmicrcs violences des Arabes contre les images.7. Le serment impos aux populations, la nomination de Conslantin, le concile

    des Blachernes, Epist. ad Theuiih., 36o-36i el Vie iVlienne, 1112-1120.S. P. 109.9. P. 342.10. P. 338.

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    LRS SOI Rr,i:srcprscMilaiil li' plus inniqiuiiU : Xicophorc, ([iiMiiinU' ;iiis plustard, crira encore contre Constantin Coproiiynie. D autre part,je remarque que l'auteur du discours /; Constantin Caballiniis n'apas connu le concile de 787. Lorsqu'il attaque le concile icono-claste de 753, il lui oppose non pas l'autorit du concile de Nice,mais celle des six conciles cumniques qui l'ont prcd'. Jeplace donc le discours qui nous occupe entre 776 et 787, plusvraisemblablement dans les premires annes du rgne d'Irne.Ce serait nanmoins, avec les textes (jui nous sont rests du concilede 753, le plus ancien document relatiCau rj^ne de Constantin V.iMais les renseignements que nous y trouvons ont un caracliofortement lgendaire. Quant la Lettre contre les iconoclitstcs,crite vers 771 d'aprs Schwarzlose ", et attribue galement Jean Damascne, elle est beaucoup moins intressante.

    heiiAntirrhc'tici an patriarche Nicphore, crits entre 810 et S20,nous fournissent par contre un grand nombre de renseignementsprcieux. L'auteur y rfute point par point un ouvrage hrtiquequ'il attribue an Copronyme. En outre, dans son troisime discours,il s'en prend la personne de l'empereur dfunt. Faisant appel ses souvenirs et il ceux de ses contemporains, il passe en revue lavie prive de Constantin, son administration, sa politique ext-rieure '. Il est intressant de constater les contradictions quiexistent entre cet ouvrage de polmique et la chronique du mmeauteur '. Le thologien transforme en dfaites les batailles queriiislorieii rapportait comme d'clatantes vicloiies.

    L'd'uvre considrable de Thodore Stoudite ne nous sera pasd'une grande utilit. L'abb de Stoudion appartient ;i une poquepostrieure, et ses crits, anlirrlictici, lettres, et pigrainmes,dirigs contre Lon l'Armnien, ne nous fournissent pas derenseignements rtrospectifs. Seule, la Vie le Phiton, ligoiiiiine(le Sacroiulion, nous donne qutd([ni's indications sur le rgne deConstantin.Pour les dbuts et l'origine de l'hrsie iconoclaste, nous poss-

    dions quelques documents occidentaux, entre autres des lettres

    1. P. 33i et S'i.'. Lo. fait quo ilans co discours Constantin n'est pas dsigne sousle nom de Coprnnjmn est une |ire\ivo ilo son anciennet. Cf. ci-dessous, p. i2-i3.

    2. I', 112, cause ili' i'i(i!\ : de]iuis la passion et la rsurrection, -j\) ans sontcouls.

    3. Vntirrli.. III. ."lo't Jl '|.'( Viilirrli.. III. 508; lireviarium . [>.

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    6 co.\sTA,\Ti> V, i;>ii'i;iii;i r, in:.s noMAi.ASadresses h Lon III et attribues au pape Grgoire II'. On admontr qu'elles n'taient pas authentiques ; mais elles conser-vent une certaine valeur puisqu'elles ont t crites eu Orient peuaprs les vnements dont elles parlent'. Pour le rgne de Cons-tantin, cette catgorie de documents fait absolument dfaut. Noussavons, par le Liber Pontiflcalis, que Zacharie et Paul V ontsouvent crit des lettres ii Constantin V pour l'exhorter h rtablirle culte des images, mais aucune de ces lettres ne nous est par-venue^.

    Les actes du concile de Nice nous sont prcieux h cause de leurauthenticit et de leur caractre officiel. C'est par les citations qui ysont insres que nous pouvons connatre les dcrets du concilede 753. Outre la rfutation de ces dcrets, les dlibrations duconcile contiennent un grand nombre de renseignements originauxsur la situation de l'Eglise pendant le rgne de Constantin V.Beaucoup moins bien connues sont les Vies de Saints. Le principaldocument de l'hagiographie du viii" sicle est la Vie de Saint Etienne

    le Jeune, martyr sous Constantin V, rdige par Etienne, diacrede Sainte-Sophie, en 808, c'est--dire plusieurs annes avant leschroniques de Nicphore et de Thophane. Ce document, publids le xvii sicle, a t souvent considr comme une source d'im-portance capitale et faisant autorit. On y trouve, en eflet, un rcitoriginal et assez dtaill de la perscution iconoclaste. Plusieurspersonnages de cette poque, plusieurs martyrs notamment, nenous sont connus que par les mentions qui en sont faites dans la\ ie d'Etienne. La Vie d'Etienne a t utilise de bonne heure parles chroniqueurs. C'est d'aprs cette Vie que, de nos jours, lesBollandistes ont dress la liste des martyrs de la perscution icono-claste et fix la chronologie de cette priode*. Il me semble qu'ona accord ;i la 17e d'Etienne plus de confiance qu'elle n'enmrite. Je ne parle pas des rcits purement merveilleux qu'ellerenferme. Mais elle est sur plusieurs points importants en con-

    I. Mansi, XII, gSg et sqq., 97/1 et sqq.3. Schwarzlose, op. cit., inlrocluction an cliapilrp: Pailei untl Sysicm dcr Bil-

    (lerfrcunde/i et p. il 3. Elles ont t crites n|irs 7j3 ; IKibcit, lici'iie Itisl., l. (ig,p. 4.

    3. Lib. Pont., 2ir), 358 ; Cod. Car.. 30.4- Voir les travaux des nouveaux Bollandistes dans la prface la 1 ie d'Andr in

    Crisi, A-V. SS., octobre Vlll, p. 138 et sqq. L'abb Marin (op. cil., p. 34i-345) areproduit le rcit de la vie d'Etienne.

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    s (.0% slA^TL^ V. ioui;i;r;ii! in:s i.omainsAnastase, Conslaulin et Xictas ; enfin ceux quils appellent lesx'.ps.::if/x:, c'est--dire les fauteurs ou les promoteurs de l'hrsie.Le nom de l'vque de Nacolie ne figure que dans ce derniergroupe, ct de celui de Jean de Xicomdie.

    La Vie d'Etienne a t rdige, comme nous l'avons vu, ;iune poque assez rapproche des vuemcnts. L auteur nous ditque les plus gs de ses contemporains ont t les sujets de Cons-tantin ^' '. Il nous avertit que les vnements dont il parle lui ontt raconts par des tmoins oculaires". Je tiens cette histoire,dit-il en terminant, des amis et des proches du saint, et mmed'anciens complices de l'empereur''. Mfions-nous de ces tradi-tions purement orales. La Vie d'Etienne offre toutes les apparencesd'une uvre rdige d'aprs des rcits transmis de houche enbouche, dforms par l'loignement et la passion religieuse, etqui ne sauraient avoir pour nous la valeur des documents critsconsults par Thophane et par Xicphore. Tout y porte le carac-tre de la lgende. Il est vident que le diacre Etienne a voulugrouper et rassembler dans son rcit les principaux vnementsde la perscution, et qu'il a tenu y faire figurer tous les person-nages importants du conflit. Voil pourquoi il y donne une place Constantin de Nacolie, dont le nom tait rest comme celui d'undes chefs de l'hrsie. On avait gard le souvenir de la perscu-tion du prfet des Thracsiens, Michel Lachanodracon, et de celledu prfet de Crte, Thophane Lardotyre : le diacre Etienne atenu mnager dans sa narration une rencontre entre l'abbd'Auxcnce et les victimes de ces perscutions, Thostricte dePelecita et Antoine de Crte, entrevue au cours de laquelle lesmoines se racontent les uns aux autres les violences qu'ils ont eu subir.

    Les Bollandistes, qui considrent comme trs important, pourla chronologie de l'poque, le fait que tel ou tel martyr ait oun'ait pas t mentionn dans cette conversation, ont fond leursraisonnements sur une base bien fragile.

    Cependant, si la Vie d'Etienne laisse beaucoup dsirer aupoint de vue de la prcision et de l'enchanement exact des vne-ments, les faits qu'elle signale et les dtails de toute sorte que nousy trouvons pars n'en sont pas moins prcieux. Ils nous montrent

    I. P. I iSl-1. P. iiS.3. P. iiSo.

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    i.i;s SOI [-.ci^s f)les souvenirs qu';iv;iionl laisss, aprs ((uaraiitc ans d'intervalle, lergne de Constantin et la priode sanglante de la querelle desimages.

    Les vies d'Andr in Crisi^ et de Pan/ le Jeune' prsentent lesmmes caractres et le mme ffenre d'intrt. Mais elles sontbeau-coup moins importantes. Et nous ne possdons, pour la premirede ces vies, que la recension trs postrieure de Mtaphraste.

    Par contre, j'ai trouv dans la 17e de A'ictas, du couvent deMdicion, crite entre 820 et 83o par le moine Thostricte^, outreplusieurs renseignements originaux et intressants*, un rcit dudveloppement de l'hrsie et de la perscution crit avec unesret de vues et une prcision qui font habituellement dfaut auxhagiographes.

    Les autres vies de saints contemporaines, dont plusieurs nesont que des extraits de la 17e d'Etienne, ne nous fournissentqu'un trs petit nombre de renseignements utiles.En dehors des sources bvzantines, quelques chroniques syria-ques et arabes rcemment publies, renferment des dtails prcieuxsur les guerres de Constantin en Asie-Mineure".

    1. .^A. SS., nrtobro VIII. i30.2. AA. SS.. juillet II. 636.3. AA. SS.. avTill, XXIII.4. Entr'aulrcs l'anecdole propos de l'iioslilit do Conslanlin contre la Vierge,

    p. .\xiv, reproduite par Georges Ilamartolos, p. ySa, par Lou Granim.. p. 181 etpar Cedreiius, p. 880.

    5. ^ oir les notes du chapitre I\ .

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    CHAPITRE IILA LEGENDE DE CONSTANTIN V

    Limiiopularitc de l'empereur iconoclaste remonte assez loindans l'histoire. Au milieu du ix'-' sicle dj, sous le rgne de^lichel 111, le tombeau de Constantin V aux Saints-Aptres futviol, son corps brl sur la place publique et ses cendres jetesau vent. Pendant tout le moyen Age la mmoire du Copronvme futun objet d'excration pour la population de Byzance. Et aujour-d'hui encore ce souverain est particulirement dillicile juger,parce qu il nous est connu seulement par le tmoignage de sesadversaires.

    Nous savons bien qu'il a exist une littrature iconoclaste. Ellea mme t considrable, en juger par le grand nombre dcritsque les partisans des images ont d composer pour la rfuter et lacombattre. Seulement cette littrature n'est pas parvenue jusqu'nous. Le premier soin des iconoltTres aprs leur triomphe a tdo faire disparatre les crits de leurs adversaires. Le canon IXdu concile de Nice ordonne que tous les crits et les fauxdcrets rendus contre les saintes images' soient dposs la maisonpiscopale de Constantinople, pour ytre enferms avec les autrescrits hrtiques. Si quelqu'un en trouve un et le cache, il seradpos ou frapp d'anathcme^ . Nous .ne connaissons des critsiconoclastes, outre une partie des actes du concile des Blachernes,que les rares fragments que les auteurs orthodoxes citent pour lesrfuter. M. Krumbacher a donn la liste de ces dbris'. Ce sont lescitations d'crivains inconnus nomms Jean le grammairien etAnto-nius, dans le Scriptor incertus de Leone V" et dans la Continuation

    1. Vppcl quelquefois Constantin IV, suivant que l'on donne au successeur d'H-raclius le nom de Constantin ou celui d Hraclius le Jeune.-3. y.a- Twv azTzi&v E'zdviov -]'-vo;jiv3t... Canon IX, Mansi, XIII, p. 43o.

    3. Cf. Hefele, IV, p. 3-4; Schwarzlose, p. 54.4. Krumbacher, p. 67.."i. Ed. de Bonn, p. 35o.

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    I.A LKdlOMli; I>i; CO>STVMI\ V IIde Thophane^ ; quelques extraits de posies satiriques attribuesh Jean, Sergius, Ignace et Etienne, dans la Refutalio impinruinpoemalum de Thodore Stoudite^; enfin, dans les, Anlhirrktici deNicphore, dos fragments plus importants d'un ouvrage attribu iiConstantin Copronyme, et sur lesquels nous aurons revenir^.Mais ces passages ne parlent que de thologie et ue nous appren-nent rien sur la politique ni sur l'administration des empereursiconoclastes. Force a donc t de se contenter, pendant longtemps,pour l'tude de leur rgne, du tmoignage d'crivains qui, tous,furent des ecclsiastiques et des adversaires acharns de l'hrsie.

    Thophane a t lun des principaux ennemis de Lon V ; il estmort en exil, Samolhrace. Nicphore a jou dans la lutte unrle plus Ini]iortant encore. Patriarche de Constantinople aumoment de lavncment de Lon l'Armnien, il fut dpos par lui;> cause de sa rsistance l'hrsie et mourut galement en exil.Les chroniqueurs postrieurs sont des moines qui ont gard, avecla foi orthodoxe, une haine farouche des empereurs hrtiques.Les auteurs des Vies de Saints sont des moines galement, leur par-tialit est naturelle et vidente. Or, jusqu' nos jours, le tmoignagede ces crivains a seul t admis. On se bornait ;i dire que Con-stantin V avait t un tyran dplorable, acharn contre les moineset contre l'Eglise'. Le Beau reproduit, sans les discuter, les accu-sations les plus saugrenues des hagiographes et des ciironiqueurset dclare qu'il n'y a aucune autorit ii opposer ;i la leur ce qui,mme de son temps, n'tait pas la vrit. 11 y ajoute mme dusien et prtend que le Copronyme ne savait pas faire la guerre .Pourtant Waleh dj avait souponn combien l'histoire du rgnede Constantin avait t dfigure pai- la passion et par la haine". INlaisc'est de nos jours seulement que l'on a pu tenter une l'habilita-tion des empereurs iconoclastes, grce aux reeiierches de Zachariu'de Lingenthal et la dcouverte des travaux lgislatifs de Lonrisaurien. C'est l'historien grec Paparrigopoido (jui a dveloppavec le plus d'autorit et de hardiesse les conceptions nouvellessuggres par YEcloga. Et sans doute les documents dcouverts

    I.

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    12 CONSTANTIN' V, E:\ir F.RF.t'R nKS ROMAINSpar Zachai'ia- n'cflaii'cnt qu'indirectement l'histoire politique etriiistoire religieuse de notre priode. Mais ils nous inspirent de lamfiance h l'gard des tmoignages, quels qu'ils soient, des chro-niqueurs et des hagiographes. Examinons le portrait que ces chro-niqueurs et ces hagiographes nous tracent de Constantin V; cettetude dj nous clairera singulirement sur la valeur de leursapprciations.

    [>eur malveillance se manifeste d'abord par les surnoms inju-rieux quilsont donns Constantin V. Ils l'appellent tantt Co/;/o-nrimis, tantt Cahalliniis. On explique gnralement le surnom deCopronyme par une anecdote clbre que nous rapporte, entreautres, le chroniqueur Thophane'. Lors du baptme du jeuneConstantin, le 25 octobre 71S, dans le triclinium Auguston, l'en-fant imprial aurait souill les fonts ])aptismaux au point d'incom-moder tous les assistants. Et le patriarche Germain, qui prsidiiitla crmonie, se serait cri, pouvant par ce phnomne : Voici qui prsage les plus grands maux pour les chrtiens ! cetenfant souillera l'Eglise'; de cette aventure serait venu, croj-ait-on, le surnom de Copronyme^. Quant au surnom de Caballinus, lesUimes auteurs l'expliquaient par le got de l'empereur pour leschevaux. Mais Ranke* a mis la conjecture que l'pithcte deCopronyme avait probablement la mme origine que celle deCaballinus. Cette explication est videmment la bonne. La pas-sion des chevaux entrane ncessairement la frquentation descuries. De l accuser l'empereur de vivre dans le fumier, il n'yavait qu'un pas pour les chroniqueurs ; et cette accusation, diver-sement formule, revient dans les textes beaucoup plus souventque l'anecdote du baptme. Thostricte prtend mme que cethomme impie s'enduisait du fumier des btes, ordonnait sesfamiliers de f;iire de mme et les honorait d'autant plus qu'ilsle laisaient plus volontiers '. Remarquons du reste que Tho-

    1. AM.. 6311. p. loo. Or. adv. Const. Cab.. 338; Vie de yictas, A.\. SS..a\rill. XXIV; Zoriaras, i3ao; Cetlrenus, 868.

    2. oJ70; sx'/r[ni-a: t^ 'E/./.>.7)o;a Suaolo'.a ixfjiXi]. Or. adv. Const. Cab., ibid.3. Telle est ropinion de Baronius et de Pagi (719, XII), de Migne (108, p. 807

    note), de Hofelc (IV, agi), de Finlay (p. 53).4. Weltgeschichte, V, 80; Schwarzlose, p. 58; Bavot, dans Vllislolre rjncralc,

    t. 1,632.5. Vie de Nictas, A. SS., avril I, XXIV ; Niccphoro (Antirrh., I, 296) luireproche aussi ses aspersions de fumier : xfj; /.o-^fa; 5] OtoXeuJii. Le Beau reproduit

    eu toute confiance ces k'a;endcs bizarres.

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    LA r,i:r.r.M)r. dr coinstaiatiiN v i3pliaiic. loiil en rapportant l'anecdote du baptme, ne dit nulle-nuiil (|iic le surnom de Copronyme ait eu cette origine; et l'au-teur de l'Invective anonyme contre Constantin, qui la rapportegalement, n'appelle jamais l'empereur que Caballinus. L'cri-vain postrieur Zonaras est le premier qui iiit tabli un rapportentre les deux faits'. Bien plus, et cette constatation ne laissesubsister aucun doute, le mot -/.i^rpiv, fumier, ne figure pas dans lercit que Thophane nous fait du baptme, tandis qu'il revienttoutes les fois que le mme auteui' nous parle du got de l'empe-reur pour le fumier et les chevaux'.

    Le surnom de Copronyme vient donc purement et simplementdu got de Constantin pour les chevaux. C'est plus tard qu'on l'arapproch de l'aventure du baptme, qui, authentique ou non,avait sans doute frapp les esprits superstitieux et malveillants desmoines et du peuple orthodt)xe et leur avait paru un symbole dela vie honteuse de l'empereur hrtique.Nous venons de voir un exemple frappant des injures et desaccusations outrageantes sous lesquelles les chroniqueurs acca-blent Constantin Y. Quelle que soit la haine qu'ils aientprouve pour Lon 111, le promoteur de l'hrsie, elle n'estrien en comparaison de la fureur qui les anime contre leCopronyme. Dans toutes les chroniques, dans toutes les viesde saints, le changement de rgne est marqu par un redou-blement (le rage. Lon, dit Thostricte, avait commenc dtruire les images ; aprs lui vint Constantin, rejeton pire issud'une mauvaise racine... il serait trop long de raconter toutesses infamies''. Lon, dit le diacre Etienne, avait commenc perscuter les chrtiens. Le diable lui trouva un successeur impur,

    1. Zonaras, iSao. zavTcCiOcv rovOfiaiOrivai zo-poivujjiov.2. Cet ennemi de Dicvi, nous dit-il, tait adonn au fumier de clieval, zaSaXXta'.;

    zcTtpo'.;, aux obscnits et aux ordures. Tlioph., AM. 6282, p. /ii3. Et plus loin,il l'accuse d'avoir transform le temple d'Euphmie on dpt de fumier, zo-po-Osaiov (Thopli., AM. (iaSS, p. /lio). Certains passages de Nicpliore sont encoreplus concluants. 11 reproche galement Constantin il'avoir transform les glisesen dpts de fumier, nTioTTa^ia zl zo;;pcva; (Antirrli., III, !t)f\) et le fragmentcit [lar Georges le Moine ajoute que cela est naturel de la part d'un homme dontle nom signifie fumier (toto zonpovou; zai /.oipoivuijio; r.ir.oiriy.z, Mlgne, 110,g.5o). Et dans VA polnijclique pour les Saintes Immjcs, Nicpliorc propose d'appeler le.synode des Blaiherncs z07:p03JVo3ov, cause du got de son chef pour le fumier(5i -0 To i3uvaYYOVto; -JiXoV.o-pfjv. Migne, 100, p. ">7i))- ^ aussi Aulirrh., I.280, zgo.

    3. AA. SS.. aMll 1, \\l\.

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    l'i r,o\STA>Ti>' V, R'MPr.nF.rR des roaimnscomme Achab succda Achaz et ArchlaiisHrode. pire que lui'.Pour tous, Constantin est un tyran abominable, un monstre altrde sang, une bte froce, vpu-:aT: O;:'. Il a surpass en cruautles tvrans qui avaient le plus tourment l'humanit, les Achab,les Diocltien^^Iais c'est dans Thophane que la fureur et la hainesexhalent avec le plus de violence. D'aprs lui, Constantin est un chtiment de Dieu pour la multitude de nos fautes'. Il accumulecontre lui les pithtes homriques (i^:y.:Tr,-.:-, -aviOX'.:r, TavwXr;;,k\i.ioi'r.r,-.::, (xh^iicp::, :ra;j.;j.;ap:. Ces injures puriles et sans porten'oflriraient pas d'intrt si l'on ne songeait pas que jusqu' nosjours elles seules ont t retenues de tout ce que les textes nousapprenaient sur le rgne d'un grand souverain.

    Mais les chroniqueurs ont formul contre Constantin des accusa-tions plus prcises. Ils lui ont attribu les hrsies les pi us diverses etles plus incohrentes. Nous nous occuperons plus tard de ces griefsthologiques, ainsi que de tout ce qui concerne les violences del'empereur contre les moines et l'Eglise. Retenons pour l'instantun seul fait, qui ressort des textes avec une grande clart : lescontemporains ont eu l'impression trs nette que Constantinn'tait pas seulement un hrtique comme Lon, mais un ennemidclar de la religion chrtienne.

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    T,A T.r.GENnr: nr. co>siami\ v ioce qu'elles montrent bien la confusion qui se produisait alors dansles esprits entre les crmonies du culte paen qu'on ne compre-nait plus et les pratiques les plus grossires de la superstitionpopulaire. Le diacre Etienne et aprs lui le moine Georges nousassurent que l'empereur adorait Bacchus et Vnus et qu'il avaitconsacr leur culte un ancien temple situ hors de la ville, celuide Sainte-Maura. C'est l qu'il faisait ces dieux des sacrificeshumains'. Un des disciples de l'abb Etienne, qui a trahi sonmatre, devient prtre du palais Sophianum, o l'empereur cl-brait ses pompes impures, et on le nomme pape de la Joie', hors-que Paul le Jeune se prsente devant l'ompereur, il le trouveen train de fter de honteuses nonr/incs '. Au mois de novembrel'empereur clbre en l'honneur de l'impratrice Eudoxie les ftesdes Broumalia oii il fait des libations honteuses Dionysos et :iBroumos, crateurs du sperme et du vin*. Cette crmonie desBroumalia tait en effet purement paenne; c'est une fte agricoledont on fait remonter l'origine Romulus. Mais elle n'avait jamaiscess d'tre clbre h Byzance et par les plus orthodoxes desempereurs. Il est h remarquer du reste que le patriarche Nic-phore ne mentionne pas de semblables lgendes. Il reprochesimplement Constantin sa superstition. H diffrait ses desseins,dit-il, si la religion perscute par lui s'y opposait' . Voil ungrief assez inattendu contre l'empereur incrdule et paen qu'oncherche h nous reprsenter. Au reste le portrait que Nicphorenous trace de Constantin V est fort intressant. 11 tait, nousdit-il, alllig de maladies tranges et de souff'ranccs inexprimables.Ses membres taient couverts d'ulcres. Il rejetait immdiatementla nourriture qu'il avalait. Comme harcel par les furies, il taittourment sans cesse par la fivre et passait misrablement ses nuitsdans les insomnies*^. Rappelons-nous que Constantin est mort d'uncharbon aux jambes, consum par une (ivrc tellement violente

    1. Mignc, loo, 1170", Georges Hati., 984. On nous rapporte mme le nomd"unc de ses victimes. C'tait un enfant appel Souplilanilos, dont le meurtre long-temps cach par l'empereur, dit le mme Georges, fui enfin manifest par lavolont de Dieu .

    2. -anv T7); yxpi;. Migne, 100, Ii48.3. .\A. SS., juillet II. G30.!{. Vie d'lienne. Migno, 100, H70-1172.5. Anlirrh., III, 5oO. to; 'jjyy^'.u.iw.^; souTSpitov, x'/-:z-t^ii-;oJST,; t^; -xo' ajTOj

    G. 'ihi,i . r.o'jci s,i(|.

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    lO COKSTAMTN V, F.MI'RRKl II IIRS l\()M\l\Squ'elle pouvantait les mdecins et qu'il criait sans cesse : Je suisbrl vivant par un feu inextinguible' et que son fils, l'empe-reur Lon IV Cbazare, mourut d'une maladie analogue, la tte.Rappelons-nous aussi que les vies de saints nous parlent des accsde colre subits de l'empereur, qu'ils reprsentent comme de vri-tables crises", ainsi que de ses nuits troubles par des angoisses etdes songes^. Nicphore ajoute qu'il tait terrible pour ses familierset ses serviteurs et qu'il les frappait journellement de coups '.

    Les auteurs s'accordent aussi lui reprocher une vie dbau-che et des murs honteuses. Sa vie tout entire, dit Nicphore ,qui du reste s'abstient de prciser davantage, fut aussi honteuseque possible ; il surpassa l'infamie des btes et il fut l'esclave desvolupts de la chair''. Il passait sa vie dans des banquets, couter le chant des cithardes''. Il profrait des jurements horri-bles'. Il s'exerait avec ses familiers il des danses et des dis-cours obsnes et leur interdisait de vivre chastement*.Nous avons vu dj son got pour les chevaux ; on lui a fait uncrime galement de sa passion pour les jeux du cirque". MaisThophane a port contre lui une accusation plus formelle etplus grave. 11 lui attribue des vices contre nature. Il a faitprir, dit-il, des gens de sa cour qui avaient t complices deses abominations, parce qu'il redoutait l'effet de leurs confes-sions. Il avait pris auprs de lui, dit-il, un homme d'unegrande beaut nomm Stratgius ; mais, apprenant qu'il s'taitconfess au moine Etienne, il le fit prir'". Stratgius a t, en effet

    1. Thopli., AM. 6a(')8, p. !^/^8 ; Cedrenus, 900; Niccph., Antirrli., III, 5o5.2. Vie d'Elicnnc, Ii28-ii58; Vie d'Andr in Crisi, AA. SS., octobre VIII.3. Vie d'Etienne, 1174.. Antirrh., III, 5o6 ; Georges Ham., Migne, 110, p. qSo.5. Antirrh., III, 5o4. V. Antirrh., I, :i3o, il tait souill de turpitudes nfastes,

    aa/poTrjtitv ppj)TOt |ji.jj.oXuvoixvov.G. Thoph., AM. 6257, .\M. 6359, p. 'l'i-, V42 : ) ic d'liemw, 1172, 117S.7. hoph.. AM. O259, p, A42 ; Nicpli., Aulirrh., III, p. 5oS.8. Thoph., AM. 6259, p. 442.(). \'ic d'Etienne, p. iii3, 1172 : Constantin possdait un cocher qu'il honorait

    plus (jue tous les pres de l'Eglise ensemble. 11). Thophane, AM. (iaSg, p. 443; Zonaras, i33(i. La vie d'Etienne contient desallusions videntes ces faits. Elle nous apprend que l'empereur, contrairement aux

    prescriptions de la Bible, avait ordonn tous ses sujets de se raser, afin qu'ils pa-russent toujours dans la lleur de leur ge (zai oopifv jtotvTOTE (); iVnou; (l7)Xu-[jLavs;, p. 1 134)- Et nous voyons que de nos jours encore les vieillards do 70 ans ontconserv cette mode et se rasent le visage comme le voulait Constantin. 1'. 1 134.de mme p. 1 132 et i i3t).

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    LA LEGKNUE DE COKSTAKTIIV V I7mis mort par l'empereur, en 765 ; mais il avait t arrten mme temps que dix-huit autres fonctionnaires, et Thophanenous dit lui-mme qu'ils taient accuss de haute trahison'.Si Nicphore avait cru Constantin coupable de tels crimes, il neles aurait point passs sous silence dans son 3 discours, o nousne trouvons rien de semblable. Et le diacre Etienne, qui connais-sait ce Stratgius', en aurait parl aussi.On le voit, toutes ces allgations manquent de consistance. Lesaccusations que nous venons de passer en revue sont de celles quel'on a pu porter avec une gale vraisemblance contre n'importelequel des souverains de Byzance. tant donne la malveillancedes chroniqueurs, il est mme tonnant qu'ils n'aient pas russi relever contre Constantin des charges plus accablantes. Nousconnaissons des empereurs trs orthodoxes auxquels ils imputentdes faits bien autrement graves et prcis. Au surplus l'incoh-rence et l'trangel des accusations dont on a cherch ternirla mmoire de Constantin montrent bien que les chroniqueursn'avaient rien trouv de positif lui reprocher. Il n'est pas dutout ncessaire de lui attribuer des murs sans reproche,comme l'ont fait Walch^ et Paparrigopoulo ', mais, quoi qu'endise IIefele% nous n'avons aucune raison de supposer que la viede Constantin V ait t moins rgulire que celle des autresempereurs de Byzance.

    Les tmoignages favorables que nous trouverons dans lestextes seront naturellement d'autant plus prcieux et plus sug-gestifs qu'ils seront plus rares et plus perdus dans la masse desinvectives. Or ces tmoignages existent, et ils sont, heureuse-ment, d'une suffisante prcision.Remarquons d'abord qu'aux yeux des pieux chroniqueurs duviii^ et du ix^ sicle, le grief d'hrsie est tellement grave qu'iltient lieu de tous les autres. Un, empereur hrtique est jug etcondamn sans appel ; il n'est pas besoin pour l'accabler de luirefuser des capacits politiques et militaires qui ne sauraient att-nuer l'horreur de ses errements thologiques. Lorsque le patriar-che Anastase veut amener le peuple de Byzance renverser Con-stantin et il se prononcer en faveur de l'usurpateur Artavasde, il

    I. Thcopli.. .VM. G257, p. 438; Me, Dm:, p. -',.a. Vie d'Blieiine, ii"'!.3. X, 36i, /(OJ.4. V. 2o5.5. IV, :i.-5.

    XVI. ConsUmlin \ . 3

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    i8 co^STA^TI> v, empereir des romainstient simplement ce langage : L'empereur ma dit que celuique Marie a enfant, le nomm Christ, n'tait pas le fils deDieu, ni rien de plus qu'un homme ordinaire' , et aussitt lepeuple invective Constantin et proclame Artavasde.

    ^lalgr la haine des orthodoxes, le rgne de Constantin avaitlaiss dans la population de Byzance des souvenirs de grandeur etde gloire. Les textes nous laissent voir en chaque circonstanceque l'arme surtout lui tait dvoue. Seize ans aprs la mort deConstantin, les soldats s'opposent parla force la runion dunconcile favorable aux images et se rpandent dans la ville en criant : Nous ne voulons pas qu'on touche aux dcrets de notre dfuntempereur^. Lon l'Armnien, dit l'auteur de la lettre Tho-phile, fut un imitateur servile des impies empereurs Lon et -Con-stantin, de la dvnastie isaurienne qui, avant lui, avaient occuple trne pendant de longues annes, et qui, par leurs guerres etleurs actions d'clat, avaient dompt les nations barbares et vcudans la gloire et dans le succs'. En cfl'et, au moment de l'av-nement de Lon V, il existait ii Byzance un parti puissant et nom-breux qui combattait ouvertement les empereurs iconodoules etglorifiait la mmoire de Constantin, qu'ils vnraient comme unprophte et un vainqueur *. >' 11 v avait eu mme une meute autourde son tombeau".

    Les actes du concile de Nice nous montrent que, si les succes-seurs de Constantin ont reni sa politique religieuse, ils n'ontpoint song branler le prestige dont sa mmoire tait entoure.Les vques de yS avaient adress aux empereurs Constantinet Lon les louanges accoutumes, disant qu'ils taient leslumires de l'orthodoxie, les vainqueurs de l'idoltrie et de l'er-reur . Le concile de 787 rpond que ces paroles constituentun blasphme. En les employant, les pres de 753 ont refus eneffet, disent les Actes, de dcerner aux empereurs des loges justeset convenables et leur ont attribu la gloire qui appartient ;i Dieuseul". Ils auraient d plutt parler de la vaillance des empereurs, desvictoires remportes sur les ennemis, de la soumission des nations

    1. Thcoph., AM. 0a33. p. ii5; Zonaras, iSaS.2. Thoph., AM. O278. p. '161 ; Vie de Tarasius, AA. SS., fvrier. III, 585.3. P. 367.^. Thopti., AM. G3oi, p. 496; AM. C3o5, p 5oi. IvMvsTavTvov tov 'Ioj'jx

    ooova ^3tza5i^ov-; w: "pOyrJ-TjV 7.ai v'./.5Tr,v.5. Thopli., AM. C3o5, p. 5oi.6. Mansi, XIII, 354.

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    L\ LGKNDF. DF. CO^STA^TI.N V IQbarbares. Et les vques iconodoules rappellent intentionnelle-ment que ces hauts laits ont t reprsents sur de nombreuxtajjleaux, que chacun peut contempler sur les murailles, etqui, rendant toujours prsente la mmoire des empereurs,remplissent ceux qui les regardent de regret et d'enthousiasme'.Il aurait fallu parler aussi des sages mesures qu'ils ont prisespour la conservation de leurs sujets et l'augmentation de leurnombre, des trophes qu'ils ont conquis, des constitutions qu'ilsont tablies, de leurs institutions civiles, des amliorations qu'ilsont introduites dans les cits. Voil, disent-ils enfin, les vritablestitres de gloire des empereurs dfunts, ceux qui leur valent lareconnaissance de tous leurs sujets".Ce passage nous numre d'une faon trs exacte les diffrentstitres de gloire de Lon III et de (lonstantin V. Je crois ne pasme tromper en affirmant que c'est le seul texte conteniporain quifasse mention des rformes lgislatives des empereurs iconoclastes.

    Il faut examiner aussi le troisime discours de l'vque Nic-phore. L'auteur, comme II ledclare ds le dbut, s'y est proposde rfuter les apologistes de l'empereur'. Et ainsi II nous a rendule service de nous prouver qu'au moment o il crivait, c'est--dire/|0 ans aprs la mort de Constantin, ces apologistes existaient etqu'ils taient nombreux ; et ensuite, par les discours qu'il prte ces adversaires supposs, il nous a transmis le plus clatant tmoi-gnage de la gloire de Constantin V. Les partisans de l'empereur,dit-il, malgr les violences qu'il a commises contre l'Eglise et leChrist, glorifient la longueur tonnante de son rgne, sa carrireconstamment heureuse ; ils prtendent qu'il a atteint au comblede la prosprit ; ils clbrent ses victoires sur les barbares etlui attribuent une quantit d'exploits*. Et plus loin : quant cesprtendues victoires, voyons ce qu'il faut en penser, et prenons

    1. oz: [jiaX/.ov aJTO; Ta; vopi'a; tojtwv i^v.r.ivi, ta; /.ati Tv roXpLi'cuv v'/.aj,t; [SaoSapiz 'j-o'-rsi:;, ; iv sy.o'a'.v y.al S;atO''/0'.; e iivrI[i7|V rjrlaaa); ;:oXXo5tTiXoY5at3r|7v. toj; plvia; ~po; :oOov xa! l^Xov 7.zovte.. Mansi, .\III, 355.

    2. TV' T'ai \>~T,y.6o.> Tziy-.oiT^Gv/, Ta; pouX;, - z.r.a'.x. Ta; zos^ix; oja-ss'.;.Ta; no/.'.T'./.i; zaTasTse:;, Ta; tjv t.oXiwj -avopOwoj'.;, aJTai !-a;vTOi paatXes'.vEsT,;ji!ai r T'.vi; za! 7zi-i to 'jTZT^xoot sposzaXoSvTat e; svo'.av. Ibid.

    3. .Migne, loo, p. igO, 5o3.!> KaTa/.'jia'^cJOvTa; vis o:k Tr,-/ ; X,5'-5T0v y.a; tJjv 'E/.zXria'.av jfip'.v, ypdvou;

    u.r|/.i3T0j; /.ai ::apaTTa-c(jt;vr,v ^wr|V, /.x: jiov j;:aOri izjAcjjiETpfiOai Toi MaijKova, zaiEjr,[ijpia; zpov Xa'., v'za; ajTi zaTa ^apCpwv za! ivopafaOrjjjiaTa lj; nXesTan'.ifp?ovT;. to'.; [xv nojpoaiv o5 si; oizpo'aotv kp/sdat Sizatov. Anlirrh., III,p. 5o3 ; Gcorgps Hamarlolos, p. gSo.

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    20 COxASTAiTIN V, EMPKRELR DES ROMAIKSune des plus clatantes'. Puis il raconte sa faon la batailled'Anchialos, et les efforts mmes qu'il fait pour en diminuerl'importance montrent bien qu'on en parlait Byzance commed'une des journes les plus glorieuses de l'histoire nationale.Il parle ensuite de la prise des villes d'Asie iMineure. S'il y avaiteu dans la carrire militaire du Copronyme quelque chec grave,il n'et pas manqu de le rappeler ici ; mais il n'en signale aucun,et il se contente de dire que les succs du Copro)iyme furentchrement achets, ou Ijien qu'ils furent obtenus seulement parla ruse.

    Nicphore se met ensuite en devoir de dmontrer qu il ne fautpas juger les souverains d'aprs leur flicit terrestre et leur gloirehumaine, mais d'aprs les titres qu'ils se sont acquis auprs deDieu. Et cette phrase revient plusieurs fois sous sa plume : Pourquoi glorifier la longueur et l'clat d'un rgne ?' Et ilnumre l'appui de sa thse les rgnes les plus fameux de l'an-tiquit, Nabuchodonosor, Alexandre, Csar Auguste, pour arriverenfin celui de Constantin Copronyme. Il le compare mme au roiJroboam, et lui applique cette parole bien caractristique : ila partag le peuple, et il a emmen avec lui le plus grand nom-bre ^ ).Le rgne de Constantin V, tout boulevers qu il soit par le

    terrible conflit des images, nous apparaitdonc entourd'un grandprestige de gloire politique et militaire. C'est bien la physiono-mie d'un autocrate byzantin que nous voyons se dgager destextes : brillant, heureux, autoritaire, ardent, ne supportant pasd'opposition ; avec cela min par la maladie et inquit par desscrupules religieux, objet pour les uns d'excration, pour lesautres d'enthousiasme, regard par tout le peuple avec crainte etsuperstition.Au mois de juin Si3, l'arme impriale venait d'tre crasepar les Bulgares du roi Krouni. La panique et la droute avaientt telles que les troupes n'avaient pu se rallier qu'aux portes deConstantinople. Le pril tait son comble, l'anarchie tait dansla ville ; Kroum campait devant les murs ; les faubourgs brlaient.La population de Byzance tait affole. Tous avaient entendu

    I. Anlirrh., III, 5o8.3. 5i TOJTO T^ayizXXri TO;; ypo'vo'.; /.al Ta; 3'jr);j.ptaL;.mme 5i5.3. Ibid., p. 5i:!.

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    T.A LEGEKDf: DK COASTANTIA V 31retentir d;ins lour enfance les noms olorieiix d'Anchialos et deLilhosoiia ; le peuple, dans limminence dn pril, maudissaitrimpritie de ses matres et se rappelait les temps de Constantin, l'empereur vainqueur et prophte. Parmi les sectes innom-brables qui pullulaient dans cette foule superstitieuse, Pauliciens,Manichens, Monophysites, iconoclastes de toute nuance, oncommenait dire qutons ces dsastres taient le chtiment parlequel Dieu punissait l'idoltrie des nouveaux empereurs'. Tout coup le bruit se rpandit au milieu de cette population surex-cite que Constantin allait sortir de son tombeau pour chasserles Bulgares. Aussitt la foule se rassembla dans l'glise desSaints-Aptres, o se trouvaient les spultures impriales. Onvoulait pntrer dans la crypte, on se pressait aux portes, maiselles taient fermes et les verrous tenaient bon. Soudain lesbattants s'ouvrirent d'eux-mmes comme pousss par une forcemystrieuse ; et cette masse d'hommes en dlire se rua sur lemausole de Constantin V avec des gmissements et des clameurs. Rveille-toi, Csar, criaient-ils, et sauve la ville qui va prir ! Et tous disaient qu'ils avaient vu le grand empereur s'lancer toutarm, sur son cheval de bataille, conduisant son peuple contreles barbares ".

    1. Thoph., AM. 63o4, p. !iq6.2. Thoph. , AM. 63o5, p. 5oi.

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    CHAPITRE IIIl'aVXEMEXT de CONSTANTIN V ET LA SDITION DARTAVASDE

    On sait que les empereurs de Byzance, afin de rgulariser latransmission du pouvoir si frquemment trouble par des usurpa-tions, avaient pris l'habitude d'associer l'empire, le plus ttpossible, leur filsain. Constantin, n en 718 et baptis le 25 octo-bre de cette mme anne, fut couronn empereur dans le tribunaldes dix-neufs lits, le 20 mars 720, jour de Pques, soit il l'ge dedeux ans '.Au moment de la mort de Lon, au 18 juin 7^0^, Constantintait donc associ l'empire depuis plus de vingt ans ; et il venaitde prendre une part active a la brillante victoire d'Akronon, quiavait sauv l'empire une seconde fois du pril arabe'. Les Bulgarestaient galement tenus en respect ; et l'empire, fortifi au dedanspar de sages lois qui avaient raffermi le pouvoir central et rendula scurit aux populations, semblait plus heureux et plus prosprequ'il ne l'avait t depuis longtemps. On et pu croire que ladynastie fonde par Lon, le sauveur de l'empire, tait lgitimepar le succs, et dfinitivement tablie sur le trne de Byzance.

    Mais la question religieuse avait suffi allumer de terribleshaines contre les empereurs iconoclastes. C'tait uniquement parla modration de Lon III que le conflit n'avait pas amen de criseplus violente ; et Constantin put se rendre compte immdiate-ment des difficults avec lesquelles il allait se trouver aux prises.Il faillit tre renvers par une insurrection et ne put prendrepossession du trne qu'aprs deux ans d'une guerre civile achar-ne.

    Lorsque Lon III s'tait soulev contre Thodose, il avait eucomme principal auxiliaire le stratge des Armniaques, Arta-vasdc, auquel il avait promis, en cas de succs, la main de sa fille

    1. Thoph., AM. 6211, p. 399; AM. 6212, f>. 4oi ; Nicph.,i3r2. Thoph., .AM. 0282, p. 4i3. V. plus haut, p. 2, note.3. Thoph , AM. 023i, p. iii.

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    AVNEMENT IIE CONSTANTIN V ET SIHTION d'aUTAVASDE 23Anne '. L'empereur, victorieux, avait tenu sa promesse ; et. deplus, il avait lev Artavasde h la dignit de curopalatc, et l'avaitnomm gouverneur du thme important d'Opsikion, dont lesstratges portaient le titre de comte"'.A la mort de Lon, Artavasde tenta d'excuter nouveau, et, cettefois, son profit, l'entreprise qu'il avait autrefois mene bien pourle compte d'un autre. Soutenu par l'arme nombreuse dont ilavait le commandement, il sut en outre mettre en avant sa qua-lit d'orthodoxe et exploiter les colres que les dcrets iconoclas-tes de Lon III avaient souleves parmi les grands de Byzance^.hophane nous dit que, ds le premier jour, les bons citoyens,constatant l'impit du nouvel empereur, le prirent en haine,et se prononcrent en faveur d'Artavasde, parce que celui-citait orthodoxe*. Cependant, il ne semble pas que Constantinait rencontr Bvzance aucune opposition ouverte pendant lapremire anne de son rgne; tandis que l'orthodoxie d'Artavasdene lui fit pas mme trouver grce aux yeux de la curie romaine,qui le traita comme un usurpateur et un rebelle".

    Il est probable qu'Artavasde se borna pendant ce temps s'assurer de la fidlit de ses troupes ' et s'entendre en secretavec les partisans qu'il comptait la cour de Byzance, et dontle principal tait Thophaue ^lonouts, patrice et reprsentant del'empereur pendant l'absence de celui-ci'. S'il en avait tautrement, Constantin se serait tenu sur ses gardes, et n'auraitpas t pris 1 improviste comme il le fut par l'attaque inopined'Artavasde. Le 27 juin 7^1. l'empereur quitta Coiistanlinopleet se dirigea vers le thme d'Opsikion pour y organiser uneexpdition contre les Arabes; il campa dans la plaine de Krasos.Artavasde, qui se trouvait en ce moment ;i Doryle, avec les

    1. Tlicoph., AM. H1-. p. 086; AM. 6209, p. SgS. V. Scheiik, Kaiser LonIII. p. l'i. Cf. Scliluiiiberger. f>'i;/t7/. de l'emp. hy:.. p. 2^9.

    2. Thcoph., AM. O309, p. 395-, AM. GaSs, p. 4i3.3. Ttiopli., p. 'ii3. .VM. 6232.A Thco|ili., ibid. ; Georges llain., 93.'| ; Ccdrciius, 882 ; Lon Gramni., p. 1S2.

    Zonaras, i328, prtend que le Snat, le peuple et mme les lgions considrrentds l'abord .Vrtavasde comme le vritable empereur. V. ^ic. Anlirrh., Il, 3'io. On a soulev contre l'empereur ses parents et ses proches, en leur disant qu'iltait un ennemi de Dieu.

    5. Lib. Pont., 219. Do mme loSjrien Dcnvs de TcU Malir (.\S lo.'iS).6. Nie, Brev., p. 9.7. Thcoph., AM. f)233. p. 'ii5; Nie, Brev., p. 60.

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    24 CONSTAJiTI^' V, KMPEREUR DES ROMAINStroupes de son gouvernement, jugea l'occasion favorable*.D'aprs Thophane, l'empereur se serait mfi d'Artavasde etaurait cherch attirer un de ses fils auprs de lui afin de le gar-der comme otage ^. D'aprs Nicphore, il aurait simplement mandArtavasde a son camp afin de s'entendre avec lui sur la conduitede la guerre.

    Quoiqu'il en soit, Artavasde rassembla ses troupes, les haran-gua, marcha contre l'arme de Constantin, la dispersa et se fitproclamer empereur par ses soldats^. Dans cette rencontre pritce patrice Beser auquel les chroniqueurs attribuent un rle siimportant dans les origines de l'hrsie iconoclaste*.Constantin dut prendre la fuite et se rfugier Amorium,dans le thme des Anatoliques. A la tte de cette province setrouvait un officier dvou Constantin, le stratge Longinus. iVuxtroupes de Longinus vinrent se joindre celles de Sisinnius (ouSisinniacus), stratge des Thracsiens^. A la tte de ces deuxarmes, Constantin reprit immdiatement l'offensive contre l'usur-pateur. Le thme maritime des Cibyrrhotes lui tait gale-ment rest fidle.

    Pendant ce temps Constantinople l'insurrection avait clate.Artavasde s'tait ht de faire parvenir ii Thophane, par le siien-tiaire Athanase, la nouvelle de sa victoire et de sa proclamation.Aussitt Thophane, d'accord avec le patriarche Anastase, avaitrassembl le peuple Sainte Sophie ; il produisit le silentiaire,annona que Constantin tait mort, et qu'Artavasdc avait t pro-clam par les troupes des thmes'''. Le patriarche, afin de pro-duire une impression dcisive sur la population orthodoxe deByzance. jura sur la vraie croix qu'un jour Constantin lui avaitfait une profession de foi arienne'. Aussitt la foule profrades invectives contre Constantin et proclama Artavasde empe-

    1. Tliopli., AM. 6333, p. ^lA; Nicph.. Brcv., p. 59; Lib. Pont., 21g.2. De mme Zonaras, p. iSaS.3. Tliopli., ibid. ; JNicph., ibid.i. Thoph., .\M. 62 15, p. 4o3 ; AM. 6218, p. 4o5.5. Thoph., ibid. ; Nicph., ibid. ; Cedrenus, 882 ; Zonaras, i328, {Lnccnus an

    lieu de Longinus). Cf. Schlumbcrger, ShjilL, p. 565.G. Thoph., AM. 6233. p. .^|i5; Nicph., Brcu., p. 60. Constantin mort, cette

    proclamation et eu, en cfTct, un caractre rgulier, puisque .\rtavasdc tait le plusproche parent du Copronyme. Cf. Finlay, p. 56.

    7. Thoph., ibid.\ Lon Gramm., p. i83.

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    AVKNF.MKAT IIE CONSTANTIN V ET SEOITION 1) AltTAVASUR 20reur orthodoxe et dfenseur des dogmes divins')). Il est naturelaussi de croire qu'Artavasde chercha s'attacher par des largessesle peuple de Byzance-.Thophane Monouts se hta de demander des secours h son filsNicphore ', stratge du thme de Thracc, qui vint occuper laville avec son arme. Puis Thophane fit arrter les fonctionnairesdvous Constantin et les partisans qu'il avait conservs dansla ville ; les uns furent emprisonns et les autres punis de la peinedu fouet ou de celle de l'aveuglement. A ce moment Artavasde fitson entre Constantinople avec l'arme d'Opsikion. Il taittemps : Constantin le serrait de prs et se prsentait presqueimmdiatement Chrysopolis, sur la rive oppose du Bosphore.Il retourna ensuite h Amorium pour y prendre ses quartiersd'hiver*.

    Les partis en prsence ce moment sont dj ceux que nousretrouverons durant toute l'histoire du conflit iconoclaste.

    Artavasde tait soutenu, outre ses troupes du thme d'Opsikionet ses anciens soldats Armniaques et Armniens, essentielle-ment parla Thrace et par les provinces d'Europe. C'tait en Occi-dent, en effet, que se recrutaient les partisans les plus ardents desimages ' ; sous Lon III, c'tait de la Grce et des Iles qu'taitpartie l'insurrection de Cosmas, d'Agallianus et d'Etienne".L'impratrice Irne, le champion des images et de l'orthodoxie,tait une Athnienne '.Au contraire, les principaux thmes de l'Asie Mineure; lesplus riches, les plus peupls, avaient t ds le dbut un foyerd'hrsie ; c'tait l, en Phrygie, en Cappadoce, en Lycaonie,que s'taient conserves les vieilles sectes chrtiennes des Marcio-nites, des Manichens, des Pauliciens surtout*. Lon III, nlui-mme, non pas en Isaurie, comme on l'a cru, mais Ger-

    I. Thopli., ibid.3. Lib. Pont.. :!!().3. Ne pas confoiulre ce fiN i\(^ Tlii'ophaiie avec le fils (rArtava>(le qui ]iorlc lemme nom.4. Thopli., AM. 6233, p. /ii5; Nicph., Hrcv.,p. Oo ; Georges llam., p.

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    26 CONSTANTIN V, EMPKUErR DES ROMAINSmanice en Syrie, s'tait trouv de bonne heure en contactavec ces sectes, qui olFraient un terrain trs favorable au dvelop-pement des ides nouvelles. L'Asie Mineure demeura jusqu'aubout le principal appui des souverains iconoclastes. Lorsqu'Irnevoulut runir un concile en faveur des images, elle dut d'abordloigner de Constantinople les troupes d'Asie Mineure restesfidles Constantin, en les renvoyant dans leurs foyers sous unprtexte quelconque ; puis elle mit leur place une arme d'Oc-cidentaux favorables aux images '.

    Artavasde, matre de Constantinople et couronn empereur, yexera pendant une anne tous les actes de la souverainet. Sonpremier soin fut naturellement de rtablir les images '. Plusieursdes lettres des papes sont dates des annes de son avnement^.Il fit couronner son fils Micphore par le patriarche Anastase, etenvoya son second fils Nictas comme stratge du thme desArmniaques', le chargeant de prendre a revers l'arme de Con-stantin.

    Pendant ce temps au khalife Ilacham avait succd Oualid II,et les deux adversaires cherchrent chacun de son ct s'assurer son alliance". INIais le nouveau souverain n'intervint pasdans le conflit, et en profita seulement pour faire excuter enAsie Mineure des razzias fructueuses '.Au mois demai7A2, Artavasde franchit le Bosphore et se dirigeavers le Sud-Ouest travers la Bithvnie, dans lethme d'Opsikion.11 fut oblig de rduire cette province et y commit des pillages;on nous dit qu'il s'y trouva en pays ennemi'' . Nous voyons parlii que le thme d'Opsikion n'avait point gard fidlit sonstratge, et qu'il s'tait empress de faire sa soumission l'em-pereur lgitime. Il est probable que l'arme seule tait dvoue Artavasde, tandis que la population partageait les sympathiesdes autres Asiatiques pour la rforme iconoclaste. Du reste l'Opsi-kion tait peupl en partie par une colonie slave, et ces tran-gers taient sans doute en forte proportion parmi les soldats

    1. Tlicoph., AM. 627g, p. 40a.2. Thoph., AM. 6233, p. 4i5; Niccpli., Brcv., p. Go.3. Migne, Patr. Lai., t. 89, 920 927. Les lettres 917-922 taient dates des annes

    de Constantin. Jaff, 2264, 2266, 2270, 2271.4. Nicpli. Brev., p. 61; Ttiopli., AM. 6234. p- 417.5. Thopli., AM. 6234, p. 4i6.6. Tlioph., .AM. C233, p. 4i5; AM. 6284, p. 4i6.7. Tliopli., AM. 6234, p. 417; Nicph., Brev., p. 6i.

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    AVK>EME>T DF. CO.\STA>TI-\ V ET SrCniTION DARTWASnK 2~d'Artavasde'. Artavasde passa ensuite dans le thme tliracsien.Il comptait videmment sur le concours de son fils Xictas, quis'avanait avec les troupes d'Armnie, pour prendre Constantin revers et l'craser. ^lais cette manuvre choua compltementpar la rapidit des mouvements de Constantin et le retard deXictas. A la nouvelle du dbarquement d'Artavasde, Constantins'tait ht de quitter Amorium ; et il avait travers la Phrygie etla Lydie pour lui couper le passage. Artavasde, rejoint Sardespar l'arme impriale, fut hattu et dut s'enfuir prcipitammentvers le Nord. Aprs une droute o il perdit ses bagages et laplus grande partie de son arme, il fut assez heureux pour attein-dre Cvzique, o il put s'embarquer et regagner ainsi la capitale".Alors Constantin, aprs avoir laiss dans TOpsikion l'arme deSisinnius'^, put se porter avec le reste de ses troupes au-devant deNictas qui accourait d'Armnie. La rencontre eut lieu, au moisd'aot 7^2, Modrina, dans le territoire qui forma bientt aprsle thme des Bucellaires. Il s'y engagea une bataille meurtrire, oprit Tiridate, patriee armnien et cousin d'Artavasde, et qui setermina par la victoire complte de Constantin'.Alors commena pour la population de Byzance la priodedsastreuse de la campagne. Les chroniqueurs nous font le rcitle plus sombre de cette guerre civile, qui, disent-ils, armait lesfils contre les pres et les frres contre les frres". Au mois deseptembre*', Constantin, matre de toute l'Asie Mineure, arrivaprs de Chalcdoine, s'embarqua et passa en Thrace, d'o ilcommena du ct de terre le sige de la capitale. Sislnnius,stratge des Thracsiens, assigeait le mur de terre \ Il fit dfilerses troupes le long du mur de terre, depuis la porte d'Or jusqu'la porte de Charsius et s'tablit enfin dans le quartier de Saint-Mamas. La ville tait ainsi compltement bloque de ce ct.

    I. Celle colonie avait cl Iransporle de Macdoine en Billiynie |iar Juslinien IIen 688. V. Rambaud, o/.. ril., p. i88, 207, 25o.

    3. Thoph., AM. 1)23^. p. 4i7 ; Nie. Brev., p. Ci. .\rlavasde revenait cemoment de la plaine de Kelbianum dans le thme Thracsieii.3. C'est au moins ce que nous devons conclure du passage o l'on nous dit que

    Sisinnius s'embarqua ensuite Abydos, l'extrmit do rilcllcspont. Thoph., KM.6235, p. ii8; (^edi'cnus, p. 882.4. Thoph., \M. ()23.V p. 4i7 ; Me, Brev., p. Ci.5. Thoph., AM. GaZi, p. /417 ; Nie., Brev., p. Ci.e. Indiction MI, donc septembre 7.42, mais trs prol>ablement en CaSS. puisque

    l'anne du monde ne commence qu'au 20 septembre.7. Thoph., .\.M. C235, p. iig; Niccph., lirev., p. Ci.

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    28 CONSTAMIN V, ICMPlCRKUIi DKS ROMAINSArtav.Tsde ne semble pas avoir song approvisionner la place,car la famine s'y fit sentir presque immdiatement aprs la cl-ture du blocus. Artavasde chercha la ravitailler par la voie demer, qui restait libre ; le secrtaire Atlianase et le domestiqueArtavasde partirent avec une flotte et russirent embarquer unchargement de bl. Mais, leur retour, Constantin envova contreeux la (lotte des Cibyrrhotes. Le convoi fut captur, le bl futdistribu aux troupes impriales, et les deux chefs de l'expditionfurent aveugls'. Artavasde russit loigner la flotte des Cibvr-rhotes au moyen du feu grgeois, mais une sortie qu'il tenta futdsastreuse pour lui. 11 y perdit son principal auxiliaire, le vicaireThophane Monouts ". La famine et la mortalit commenaient faire des ravages terribles dans la capitale. On voit que les cri-vains ont t vivement frapps pai- ce (lau, qu'ils attribuent natu-rellement l'impit de l'empereur. Ils ont retenu ce fait que pen-dant ces jours la mesure d'orge se pava jusqu' douze nomismes'.

    Artavasde fut oblig de permettre la population non combat-tante de quitter la ville. Ce fut le signal d'un exode gnral. Beau-coup de gens se dguisrent en prtres ou en femmes et trom-prent la vigilance des gardes, ou bien les corrompirent prixd'argent. D'autres mme se laissrent tomber du haut des remparts.Constantin fit bon accueil cette population de transfuges ; il lestraita avec humanit et leur fit distribuer des vivres*.

    Cependant Nictas avait tent un dernier effort pour secourirson pre et dgager Constantinople par une diversion. Il avaitruni une arme avec les dbris des troupes battues Modrina ets'tait prsent son tour Chrysopolls . Sans abandonner pourcela le sige de la ville, Constantin franchit le dtroit ; mais Nic-tas n'attendit pas la bataille et se retira devant l'arme impriale.Rejoint Nicomdie, il fut fait prisonnier avec son arme. A sescts se trouvait le curateur Marcellinus, ancien vque de Gangres,que le' vainqueur fit dcapiter immdiatement. Quant Nictas ilfut mis aux fers et ramen sous les murs de Constantinople. L, onle promenait enchan en vue des assigs, afin que du haut des

    1. Tfioph., AM. 6:!35, p. 4ig.2. Thojjh., ibid.3. Tficoph., AM. 6235, p. iiig; Nicph., lirev., p. 61; Nicpli., Antirrh., III.

    .oo; Georges Ham., p. 984; Lon Gramin., p. i83; Cedrenus, p. 884; MichelGlvcas, p. 627.

    4. Thoph., ibid. et p. 420; Mcpli., Brev., ibid. ; Georges Ham.. [>. i)36.f). Thoph., AM. ()235, \>. ^20; Nicph., lirev., p. G2 ; Georges Ham., goO.

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    AVNEMENT DE COINSTANTIN V ET Sr.DlTrO.N DAUTAV\SI)E at)remparts son pre pt le contempler clans cette triste situation '.

    Dsormais Artavasde, abandonn par la population de sa capi-tale, ses dernires troupes disperses, n'avait plus aucun secours esprer. Cependant il ne capitula pas, et la ville dut tre prised'assaut. Le 2 novembre, les troupes de Constantin pntrrent l'improviste par le mur de terre'. Artavasde avait eu cependantle temps de s'chapper. Il monta sur un navire avec le patriceBactangios et russit h franchir le dtroit, 11 dbarqua en Bithy-nie, parvint encore runir Nice quelques soldats, et s'enfer-ma dans la citadelle de Fouzanos (ou Pouzantis^). Bientt arrivaun dtachement de troupes envoyes par Constantin, et Artavasdefut ramen prisonnier Constantinople, o l'attendaient ses deuxfils. Le patrice Bactangios fut dcapit au Cyngium, et, selonl'usage, sa tte resta expose pendant trois jours au Milium '.

    Quant il Artavasde et ses fils, Constantin les punit de l'aveu-glement et les fit en outre promener enchans dans le cirque,pendant les jeux qu'il fit clbrer l'occasion de son triomphe. Lepatriarche Anastase fut galement produit au cirque, assis sur unne, suivant la coutume des excutions publiques Byzance, levisage tourn du ct de la queue de l'animal-'. Tous les historiensont cru, sur la foi d'un passage mal interprt de Thophane, quele patriarche avait t aveugl comme Artavasde et ses fils. Mais,outre que Nicphore ne mentionne pas ce supplice, nous voyonsqu'Anastase prsida dans la suite des crmonies qui supposentla facult de la vue". Constantin, estimant sans doute que la leonserait suffisante, ne poussa pas plus loin sa vengeance et maintintAnastase au patriarchat de Constantinople. Anastase vcut dslors en bonne intelligence avec l'empereur '.

    1. hopli.ine, AM. Osli., p. ^9,0.2. Tliopli., ibid. ; Kic, Brev., p. 62.3. Ou l^vzaniti.; (Finlay, p. 58), lieu du resle cnmplitonient inconnu.4. ^iicpll., lirev., ibid. ; Tlioph., ibid., raconte que 3o ans aprs Constantin

    ordonna la femme de Bactangios d'aller dterrer les os de son mari dans le mona-stre de Xwp. o il tait enseveli, de les mettre dans son tablier et d'aller les jeterau Pelaj.'iuni, dans la l'os.se des condamns mort... Do mme Zonaras, iSaS;Lon Grainm., p. i83. prtend que Bactangios eut les pieds et les mains coups.

    5. Sic., Breu., \k t)9. ; Thophane, AM. GaS, p. /i30 ; Lih. Pont., 219.G. Le baptme de Lon Chazare. Thoph.. A^L624I, p. 4^6 ; Scliwarzlose, p. 179.De Boorarlal)lilc texte de Thophane(TJ90;vT'. aulieu deTu^XwOsvT'.). Tlioph., AM.

    ()235, p. 420. Lon Gramm., p. 18/1, ne mentionne pas non plus cet aveuglement.7. Sisinnius par contre fut aveugl peu de temps aprs la rentre de l'empereur

    Constantinople. Il tait accus de conspiration. Thopli., ibid. ; Nie, Bicv.,p. 62.

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    'So C0NSTA1\TI,\ V, KMPEREIU DES ROMAIASOn a accus galement Constantin, sur la foi des chroniqueurs,

    d'avoir souill son triomphe par des excutions sanglantes. Tho-phane prtend qu'il fit prir un grand nombre de chefs, qu'il enaveugla un nombre immense, qu' d'autres il fit couper les piedset les mains, et qu'il fit subir la ville des maux innombrables' .Cependant, nous ne voyons pas que Constantin se soit livr desvengeances aussi cruelles. Il se borna faire aveugler les chefs dela rbellion, et Thophane lui-mme ne nous rapporte que deuxexcutions capitales, celles de Bactangios et de iMarcellinus. C'taitcertainement le moins que put faire un souverain de Byzancecontre des fonctionnaires coupables de haute trahison, et quil'avaient chass pour deux ans de sa capitale. L'histoire deByzance nous offre h chaque page des exemples de punitionsbien autrement cruelles pour des crimes moins graves. Qu'on serappelle le retour de Justinien II Constantinople, faisant dca-piter Lontius et Tibre, empaler leurs partisans, brlant dix-septpersonnes petit feu, et foulant aux pieds dans le cirque, avantde les envoyer au supplice, les corps de ses ennemis ; et l'onconviendra que Constantin V, si bienveillant envers la populationinsurge de la capitale, si bnin l'gard du patriarche rebelle,a fait preuve d'une clmence que l'on n'attendrait gure d'unsouverain de Constantinople.

    Il se contenta d'exiler un grand nombre de rebelles- ; et 'Jho-phane nous rapporte qu'il permit aux nobles trangers qu'ilavait amens avec lui de s'installer dans la ville et de s'emparerdes biens des citoyens * ; d'o nous pouvons conclure que Cons-tantin procda, comme il tait naturel, des mutations impor-tantes dans le corps des hauts fonctionnaires. Il chercha loignerles personnages suspects de la cour et de la noblesse et lesremplacer par les hommes dvous sa cause qu'il avait trouvsdans les provinces fidles de l'Asie Mineure. Mais il ne rentra pasdans la ville en ennemi ; et le peuple de Byzance garda dsormaisfidlit au souverain qui, dans la lutte, avait fait preuve :i lafois d'une humanit plus grande et d'une supriorit militaireaussi crasante.

    I. Thcojili., \M. (laS."), |>. 'lao ; Georges Hain.. ij30 ; Ccdreiius, 884; Zonaras.i328.

    a. Lib. Ponl., 2i(|.3. Thophane, AM. G23, p. iao; Ccdrenus, 884 ; Georges llain., g3G. Cf. Le

    Beau, p. 202.

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    CHAPITRE lYLA POLITIQLE EXlll IRL IIK : LES AIIADKS

    Depuis llcraclius, les invasions des Arabes avaient mis plusieursfois l'empire il deux doigts de sa perte. L'avnement de LonITsaurien marque le moment du plus grand pril. En 717, sousle khalife Soliman, auquel succda, le 2U septembre de cettemme anne, le khalife Omar, le gnral Masiama vint bloquerByzance par terre et par mer. On connat les pripties de cesige clbre ', et l'on sait qu'aprs une anne d'eff'orts inutiles,les troupes arabes, dcimes par la famine et par la maladie, leursflottes dtruites par le feu grgeois, durent lever le sige deConstantinople. Leur retraite fut dsastreuse et dix galres seu-lement regagnrent la Syrie. La tnacit de Lon avait sauvl'empire pour plusieurs sicles. Les annes qui suivirent furentrelativement tranquilles. Les Arabes taient incapables de tenterune seconde fois une entreprise aussi considrable ; en outre, ilstaient menacs du ct du Nord par les tribus des Chazares. Ilest probable que Lon III, qui avait obtenu le concours des Bul-gares pour repousser l'invasion arabe, chercha s'assurer gale-ment celui des peuples barbares d'au del le Caucase ". Le mariagede Constantin V, en 702, avec la fille du Khagan de Chazarie, quifut baptise selon le rite catholique et reut le nom d'Irne, estun indice de ce rapprochement'.

    Cependant, :i l'avnement d'IIacham, en 72^, les agressionsdes Arabes menacrent de nouveau l'empire. En 72."), Csarc futprise et Nice mme fut en danger. Cette fois encore, ce fut unediversion des Chazares en Armnie et en Mdie qui procura auxpopulations de l'Asie Mineure quelques annes de rpit*. Mais, en787, le gnral Abdallah-Al-Baltal pntra jusfjue dans les pro-vinces occidentales de la pninsule. Les annalistes arabes jirten-

    1 . V. Schenk, Kaiser Lon III, p. 22-26 ; Finlay, p. 18 et sqq. Brooks : Tlie cam-paiijns of /iG-'] 18 from Arab sources. (Journ. HcU. Studios, iSycj).

    2. Schenk, Kaiser Lon III, p. 27.3. Thoph.,.\M. 6224, p- .'io();Nicph., C/ei'.,p. 8; Zonaras, iSa ; Ccdrcnus, 877.4- Schenk, Kaiser Lon 111, p. 28.

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    32 COSSTA?.TI> V, EMPEREUR DES ROMAINSdent que dans cette campagne Constantin V lui-mme aurait tfait prisonnier. Mais ce fait, qui n'est mentionn nulle part dansles chroniques byzantines, n'est certainement pas historique etprovient d'une confusion de noms'.

    Enfin, au printemps de 789, les Arabes organisrent une exp-dition considrable. Trois armes franchirent le Taurus. La pre-mire, commande par Soliman, vint assiger Tyane ; la seconde,avec Gnnier, ravagea les parties limitrophes de la Phrygle ; latroisime, sous les ordres d'Al-Battal et d'Abd-Al-Melich, opraautour d'Akronon. Les deux premires de ces armes repassrentle Taurus aprs avoir fait un butin considrable. Mais la troisimefut attaque Akronon par les deux empereurs Lon et Constan-tin. Une bataille terrible s'engagea ; Al-Battal fut tu et les dbrisde ses troupes purent grand'peine rejoindre l'arme de Soli-man". C'tait une belle fin de rgne pour le vieil empereur et unglorieux dbut pour le jeune Constantin. La victoire d'Akrononsemble avoir arrt pour longtemps les progrs des Arabes en AsieMineure. L'poque du pril musulman est passe ; dsormais, laguerre contre les Arabes ne sera plus qu'une guerre de frontires.Constantin n'aura qu'il continuer l'uvre de Lon 111 et conso-lider les positions acquises pendant le rgne prcdent. Et sa tchesera facilite encore par les dissensions terribles qui alors djbranlaient l'empire arabe : d'abord, entre 743 et -5o, les discor-des des derniers Ommiades, Oualid 11, Yzid 111, Marouam II ;enfin, en 700, le soulvement formidable qui substitua la dvnastiedes Ommiades celle des Abbassides.

    Il n'est naturellement pas possible de dterminer avec prci-sion quelle tait la frontire de l'empire byzantin du ct de l'Est l'avnement de Constantin. Cependant une ligne tire de l'em-bouchure du Boas, au fond de la mre Xoire, Tarse en Cilicie,et dtachant ainsi toute la pninsule proprement dite, marqueassez exactement la ligne frontire que Constantin eut disputeraux Arabes. Les thmes frontires taient, au Xord, celui des Arm-niaques, et, au Sud, sans doute celui des Anatoliques, faisant faceaux provinces arabes d'Al Sham et Al Gazira. Ceux de Lycandos,de Chalde et de Msopotamie sont de formation postrieure'.

    I. V. Weil, I, 638 ; Schenk, Kaiser Lon III, p. 28 note.i. Thopli., .\M. 623i, p. 4ii ; Denjs de T. M., AS. ioi6 ; Schenk, p. 29;

    Weil, I, p. 688-689.3. V. Rambaud, p. 176 el 178, aSi et sqq. ; Geizer, GenesU der Themenverfas-

    suiuj, p. 7y. Dielil, L'origine du rgime des thmes (1896).

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    LA POLITIQUE EXTRIEURE : LES ARABES 33Constantin avait, sans doute, l'intention de poursuivre les

    succs obtenus Akronon et de dbarrasser l'Asie Mineure desbandes arabes de Gamer et de Soliman. Le 27 juin y^i; il quittaConstantiuople, se rendit dans la plaine de Krasos et y convo-qua les stratges des thmes voisins pour organiser une expdi-tion contre les Musulmans '. C'est alors qu'il fut surpris par l'in-surrection d'Artavasde.

    Nous devons supposer qu' ce moment les Arabes taient djbien affaiblis par leurs dissensions ou dcourags par le dsastred'Akronon, puisque ni Hacham ni son successeur Oualid II netentrent aucun effort srieux pour profiter des avantages ines-prs que leur offraient les dissensions des Romains. Les chroni-queurs ne nous signalent que des razzias sans Importance oprespar Soliman, en 7^1, et par Gamer, en 742". Pourtant l'occasionet t belle pour le khalife d'intervenir dans les affaires deByzauce, puisque chacun des deux adversaires en prsence luiavait simultanment demand son appui par ambassade spciale^.Mais sans doute il se rappelait les circonstances de l'avnement deLon III et craignait de n'tre qu'un instrument dans la maindu plus habile des deux rivaux*. Sur ces entrefaites, en 7^3, l'in-surrection de Marouam contre Yzid III et Ibrahim dbarrassa lesByzantins d'un de leurs plus redoutables adversaires, le fameuxSoliman . Et, ds son avnement, Marouam fut absorb par dessoulvements redoutables dans diverses parties de son empire.

    Constantin V sut profiter de ces dissensions pour excuter lesprojets que l'insurrection d'Artavasde l'avait oblig diffrer. En7^5, il envahit la Syrie du Nord et le pays de l'Euphrate ; ilenleva aux Arabes Germanice, la ville natale de Lon III, etensuite, plus au Sud, Doulikia (Doulouk, Dolich), et opra la sou-mission des contres voisines''. Il transporta ensuite la population

    1. Tlioph., AM. C232, p. 4i3; Nicph., Drev., p. Sg ; Zonaras, iSaS; Lib.Pont., 2ig.

    2. Thoph., .\M. 6233, p. 4i5: AM. C23i, p. 4 16.3. Thoph., AM. O234. p. ii6..'|. V. Schenk. p. it)-23.5. Thoph., AM.

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    34 CONSTAJNTI?. V, EMPERELP. DES ROMAINSde ces villes en hrace, afin d'v combler les vides faits par lesravages des Bulgares.

    L'anne 746 est marque par une grande victoire navale. Pen-dant que Marouam continuait lutter contre les insurrectionsd'Hliopolis et de Damas, une (lotte arabe quittait Alexandrie etfaisait voile pour Chypre. Ou croit gnralement que cette leavait t reconquise par Lon Flsaurlen ; il est plus vraisemblabled'attribuer la roccupation de Chypre la victoire de 746'. Cons-tantin envoya Chypre l'escadre des C^ibyrrhotes, que nous avonsvue h l'uvre dj pendant la sdition d'Artavasde. L'amiral byzan-tin surprit la flotte arabe au moment o elle tait enferme dans leport de Crame. II occupa aussitt toutes les issues de la rade etincendia les vaisseaux ennemis. Trois navires seulement purents'chapper. Les Cibyrrhotes revinrent triompher Constanti-nople avec un butin considrable*.

    Les trois annes suivantes virent la chute de la dynastieomniiade. Le soulvement partit de Perse et s'tendit vers l'Occi-dent. Les Abbassides reconnaissentpourmaitrel'iman Ibrahim. Lesgnraux de iSIarouam sont battus l'un aprs l'autre par les insur-gs. Enfin, IMarouam lui-mme voit son anne dtruite complte-ment sur le fleuve Zab. Il russit fuir en Egypte, mais il y estreconnu et mis et mort. Pendant ce temps, l'iman Ibrahim avait

    1. Le fait n est cependant pas absolument certain. En 686, Chypre avait t d-clare neutre et galement tributaire des Romains et des Arabes (Tliopli., A.M.6178, p. 363). Cinq ans plus tard, Justinien II avait viol ce trait et enlev de l'leun grand nombre de Cypriotes (AM. 6i83, p. 365). Aucun texte ne nous indiqueformellement que 1 le ait t reconquise depuis par Lon l'Isaurien. Certains tmoi-gnages sembleraient mme prouver le contraire. Georges de t^liypre, le grandadversaire de Lon, parait avoir vcu hors des atteintes de l'autorit impriale, toutcomme Jean Damascne (Mansi, Xlll, 355). En 742,1e khalife OualidCt enlever lesCypriotes et les transporta en Syrie (Thoph., AM. 6234. p- 4i7). Mais il peut n'yavoir eu ce moment qu'une razzia sans consquence. L abb Etienne mentionneChypre dans son numration des pays o les moines n'auront rien redouter desviolences du tyran (p. 11 18). Mais nous savons ce qu'il faut penser de la valeur decette gographie (v. plus bas, p. i65). Du rcit del bataille navale de 746, on nepeut rien conclure sur la situation de l'le ; noter cependant que d'aprs Tlio-phane la flotte romaine se trouvait Chypre au moment o les .\rabes y sont arrivs.En 770, Lachanodracon. stratge des Thracsicns, fait transporter Chypre l(^moines rebelles (Thoph., AM. 6262, p. 445). En tout cas, en 788, l'le appartenaitaux Romains, puisque les Arabes font une expdition pour la conqurir (Thoph.,AM. 6282, p. 465). De mme en 806 (Thoph., AM. 6298, p. 482).

    2. Thoph., AM. 6238, p. 422 ; Nicph., Brev., p. 63; Cedrenus, 886. Cf. Fia-lay, p. 60.

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    LA POl.lTIQUR EXTRIEURE : LES ARABES 35succd Abdul-Abbas, qui partagea les provinces entre sesparents, et s'tablit lui-mnic non plus Damas, mais en Perse,o bientt aprs il fonda Bagdad. Les massacres et les dvasta-tions se prolongent en Syrie pendant six ans'.

    Les dissensions des Arabes, l'loignement de leur nouvellecapitale, permirent Constantin de prendre l'offensive en AsieMineure". En 751, il s'empara do Thodosiopolis et de Mlitne^.A ce moment, le khalife Abdul-Abbas tait occup par une rvolteen Msopotamie. Constantin bloqua troitementMlitne aprs avoirdispers dans un combat la cavalerie arabe. 11 offrit la vie sauve auxhabitants. Ceux-ci refusrent tout d'abord de se rendre. MaisConstantin commena les oprations, dressa les machines de sige,el la ville dut capituler*. Les historiens arabes eux-mmes recon-naissent que la population entire fut pargne^. Les habitantschrtiens. Armniens ou Syriens, furent enlevs et transports enThrace, o ils remplacrent les populations dtruites par lapeste ". Les habitants arabes furent disperss dans toute la pro-vince. Quant la ville, elle fut dtruite entirement et ses rem-parts rass'.Aprs la prise de Mlitne, les Romains continurent la campa-gne et enlevrent le fort de Claudias*'. Quant Thodosiopolis(Kalikala), elle aurait t prise par un des allis armniens de Cons-tantin, le patricc Kouchan'. Thodosiopolis eut le sort de Mlitne.

    1. Tlioph., |j. /i34-426.2. Les passages de chroniqueurs arabes relatifs auK guerres a\ecles Romains ont

    t [)ublis par Brooks, Eiujlhii Histori-'al ftevietr, I, oelolre I)00, p. -juS ~f\~ :Annalistic Eximcts (llin Walidili el Al Tabari); 11, janvier igoi, p. 84-g2 : Exlraclsfrom Al lialadhuri.

    .H. Tboph., .\M. 02/(3, p. .'127; Nicph., Bve.. p. 6.5; Gedrcnus. 889; Zonaras.i33o; Lon Gramm., i85 ; Ibn Wabdib, AIL i33 (p. 781) ; Tabari, AH. i3S(p. 733). Denvsde Tell Mahr, .\S. 1061. (Kd. Chabot. Paris, iStjS, BM. des HautesEtudes, fasc. 112); llie de Nisibc, AH.. i33. (d Bathgon, Abhaiull.fiir die Kundedes Morgenlands, Bd. 8). Contrairement ce que dit Brooks, op. cit.. H, p. 88,la campagne peut avoir eu lieu dans l't de 761. C'est en 760 que Constantin s'esttrouv Constantinople le jour de la Pentecte: indiction byzantine IV, anne 62^2(749-730), couronnement de Lon Chazare, rapport par anticipation l'anne Oa'i'(Thoph., p. /12O).

    4. Baladhuri, p. 88.5. Tabari, AH. loB (se trompe en disant que la ville fut emporte d'assaut).0. Nicph., Brev., p. G3, 06; Thoph., AAL 6246. p. 429. Voir p. ga.7. Baladhuri, p. 8g; Ta