Éléments de géologie

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Élémentsde géologie

17e édition

Maurice Renard Professeur émérite de l’Institut des Sciences et de

la Terre de Paris (Sorbonne Université)Yves Lagabrielle

Directeur de recherche au CNRS au laboratoire Géosciences Rennes (Université Rennes 1)

Erwan Martin Maître de conférences de l’Institut des Sciences et de

la Terre de Paris (Sorbonne Université)Marc de Rafélis

Professeur au laboratoire GET (Géosciences Environnement Toulouse de l’Université Paul Sabatier (Toulouse 3)

Sylvie Leroy Directrice de Recherche au CNRS à l’institut des Sciences et de

la Terre de Paris (Sorbonne Université)Nicolas Coltice

Professeur des universités à l’École Normale Supérieure de Paris

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© Dunod 2002, 2005, 2011, 2015, 2018, 2021 pour la 17e édition© Armand Colin, Masson 1965, 1997 pour les précédentes éditions

11, rue Paul Bert, 92240 Malakoff Cedex www.dunod.com

ISBN 978-2-10-082831-9

Crédits photographiquesp. 1 : le sommet du Mauna Kea, 4205 m à Hawaï regroupe un ensemble d’observatoires internationaux © M. Lagabrielle. p. 69 : vallée encaissée recoupant le socle de la chaîne himalayenne © S. Guillot. p. 255 : falaise côtière de Big Island, Hawaï, montrant les coulées des éruptions les plus récentes © M. Lagabrielle. p. 339 : le Cervin. Le sommet appartient à la plaque apulienne et la base est européenne © B. Corre. p. 459 : Piton de la fournaise (Réunion) en octobre 2006 © A. Peltier. p. 615 : baie de Baffin (Groenland) lors de la mission ArcticNet le 26 juillet 2014 à bord du NGCC Amundsen © C. Aubry/Université Laval – Canada. p. 781 : panorama des terrains continentaux du Danien affleurant sur la colline d’Albas (Corbières, France) © D. Desmares/Sorbonne Université. p. 969 : sédimentation pélagique alternante d’âge Pliocène de la coupe de Punta di Maiata (Scala di turchi, Agrigente, Sicile) © M. de Rafélis/Toulouse 3. Photo de couverture : Vue de la falaise et du rocher à Bell Island Light House, Terre-Neuve, Canada. ©Agnus.AdobeStock

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Table des maTières

Avant-propos XI

PARTIE I – La Terre : une planète dans l’Univers

Chapitre 1 • L’architecture de l’Univers 21.1 L’architecture de l’Univers 31.2 Une architecture hiérarchisée 51.3 L’expansion de l’Univers et le « Big Bang » 71.4 Les dimensions de l’Univers 91.5 Le fond cosmique de rayonnement radio

ou rayonnement fossile (fond diffus cosmologique) 12

1.6 L’âge de l’Univers 15

Chapitre 2 • La nucléosynthèse 172.1 La structure de la matière : particules,

noyaux et atomes 172.2 Nucléosynthèse et évolution de l’Univers 21

Chapitre 3 • Le Système solaire 313.1 La structure du Système solaire 313.2 La naissance du Système solaire 373.3 Le Soleil 463.4 Les différentes planètes 48

PARTIE II – La dynamique de la Terre solide : géochimie

et géophysique globales

Chapitre 4 • Forme et structure de la Terre solide : géodésie et gravimétrie 704.1 Forme et surfaces remarquables de la Terre :

les apports de la géodésie 724.2 Les enveloppes externes de la terre solide :

croûte et manteau, lithosphère et asthénosphère 76

4.3 La mesure de la pesanteur terrestre : la gravimétrie 79

4.4 La représentation gravimétrique de la Terre : L’ellipsoïde de référence et le géoïde 83

4.5 Les anomalies de la gravité 934.6 L’interprétation des anomalies

gravimétriques : isostasie et mouvements verticaux de la lithosphère 96

Chapitre 5 • Composition et histoire de la Terre solide : géochimie globale et géochronologie 1045.1 Structure interne et composition chimique

du globe : évolution des connaissances 1055.2 La géochimie : objectifs et méthodes

d’études 1115.3 La radiochronologie : dater

les événements géologiques 1165.4 Réservoirs géochimiques, différenciation

mantellique et origine des continents 125

Chapitre 6 • Structure du globe et mobilité de la lithosphère : sismologie et géomagnétisme 1356.1 La sismologie 1366.2 Le géomagnétisme 185

Chapitre 7 • La tectonique des plaques lithosphériques 2077.1 La dérive des continents 2087.2 L’expansion des fonds océaniques 2127.3 La tectonique des plaques 2147.4 L’analyse du mouvement des plaques :

notions de cinématique 219

Chapitre 8 • Synthèse sur la dynamique globale : mobilité de la lithosphère et de l’asthénosphère 2368.1 Deux régimes dynamiques bien différents 2378.2 Lithosphère-Asthénosphère-Mésosphère 2378.3 La lithosphère : une enveloppe rigide

visco-élastique 2388.4 Le manteau asthénosphérique : le fluage

plastique et la convection 2438.5 Dynamique du manteau et mouvements

verticaux : la topographie dynamique 2508.6 Évolution des plaques au cours de

l’histoire de la Terre 251

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PARTIE III – La dynamique de la lithosphère océanique

Chapitre 9 • Exploration sous-marine et géologie des fonds océaniques 2569.1 L’exploration sous-marine 2579.2 Morphologie des fonds sous-marins 262

Chapitre 10 • La lithosphère océanique : plaines abyssales, bassins arrière-arc et points chauds 26910.1 Les plaines abyssales 26910.2 Les bassins océaniques marginaux

ou arrière-arcs 27210.3 Les îles océaniques, rides et points chauds 274

Chapitre 11 • Les dorsales océaniques 27911.1 Bathymétrie et géophysique des dorsales 27911.2 Les processus magmatiques au niveau des

dorsales. Comparaison avec les ophiolites 28411.3 Dorsales lentes et dorsales rapides 29011.4 La segmentation des dorsales 29511.5 Les zones de fracture et les failles

transformantes 29911.6 Les structures particulières : propagateurs,

microplaques, jonctions triples, interaction avec les points chauds 302

11.7 L’hydrothermalisme des dorsales 303

Chapitre 12 • Les marges continentales et océaniques 30712.1 Les marges stables 30812.2 Les marges actives 322

PARTIE IV – La déformation de la lithosphère continentale

Chapitre 13 • La rhéologie des ensembles géologiques 34013.1 Force et contrainte : le tenseur

des contraintes 34013.2 Déformation expérimentale 34213.3 Relations contrainte-déformation 34413.4 Déformation des ensembles géologiques 34913.5 Conclusion 356

Chapitre 14 • Tectonique analytique : étude des objets déformés aux différentes échelles 35814.1 La déformation cassante 35914.2 Les plis 36914.3 Chevauchements et nappes de charriage,

rampes et duplex 375

14.4 Déformation des roches profondes 37914.5 La représentation géometrique des objets

tectoniques 38714.6 Tectoniques superposées et héritage 38914.7 Tectonique et morphologie 390

Chapitre 15 • Des bassins sédimentaires aux chaînes de montagne 39615.1 Bassins et rifts 39915.2 Les chaînes de subduction 40615.3 Les chaînes d’obduction 41215.4 Les chaînes de collision 41915.5 Une chaîne dite intracontinentale :

les Pyrénées 43915.6 Un problème récurrent dans les chaînes

de subduction-collision : l’exhumation des unités de haute pression 444

15.7 Tectonique de l’Europe préalpine 45115.8 Conclusion 455

PARTIE V – Les constituants endogènes des enveloppes solides de la Terre :

roches ignées et roches métamorphiques

Chapitre 16 • Minéralogie 46016.1 Caractéristiques et propriétés des minéraux 46016.2 Les principaux minéraux 469

Chapitre 17 • Les magmas : origine et diversité 48117.1 Le magmatisme sur Terre : répartition

géodynamique et causes 48217.2 Les processus conduisant à la grande

variété des roches magmatiques 50017.3 Le magmatisme au cours des périodes

géologiques 513

Chapitre 18 • Les roches magmatiques : textures, classification et mise en place 51818.1 Textures et classification des roches

magmatiques 51918.2 Les roches plutoniques 52518.3 Les roches volcaniques 532

Chapitre 19 • Le métamorphisme 57619.1 Notions principales, répartition du

métamorphisme 57719.2 Structures des roches métamorphiques 58519.3 Les facteurs du métamorphisme 58719.4 Évolution métamorphique et trajet P-T-t 59019.5 Métamorphisme et géodynamique 600

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VII

Table des matières

PARTIE VI – Les enveloppes fluides de la planète Terre : climat, paléoclimats,

océanographie et hydrogéologie

Chapitre 20 • Le bilan thermique de la planète Terre 61620.1 La Terre : un système thermique

globalement en équilibre 61620.2 Des sous-systèmes climatiques (surface

terrestre vs atmosphère) en déséquilibre radiatif 618

20.3 Des déséquilibres énergétiques régionaux 61920.4 Les circulations atmosphériques

et océaniques : une redistribution de l’énergie à la surface de la Terre 620

Chapitre 21 • L’atmosphère 62221.1 Composition de l’atmosphère terrestre 62221.2 Structure de l’atmosphère 62321.3 Les nuages 62621.4 Origine et évolution de l’atmosphère 62821.5 Les circulations atmosphériques et

la zonation climatique 63321.6 Des dispositifs climatiques régionaux 636

Chapitre 22 • Le contrôle astronomique du climat : la théorie de Milankovitch 64122.1 Le cycle des saisons 64122.2 La théorie astronomique du climat

ou théorie de Milankovitch 64322.3 La dissymétrie climatique des deux

hémisphères terrestres 649

Chapitre 23 • L’océan : Propriétés physiques et chimiques de l’eau de mer 65123.1 Un océan mondial ou des océans ? 65223.2 Les propriétés de l’eau de mer 65423.3 L’origine de l’eau sur Terre 65623.4 La répartition des températures dans l’océan 66023.5 La composition chimique de l’eau de mer 66223.6 L’hydrothermalisme sous-marin 67123.7 Les circulations océaniques 67623.8 L’eustatisme : les variations absolues

du niveau marin et notion de niveau marin relatif 687

Chapitre 24 • Les grandes étapes de l’histoire climatique de la Terre 69224.1 Les méthodes de la paléoclimatologie 69324.2 Les fluctuations climatiques

de premier ordre 69624.3 Les fluctuations climatiques

de second ordre 697

24.4 Les fluctuations climatiques de troisième ordre 704

24.5 Les fluctuations climatiques de quatrième ordre 711

24.6 Synthèse des variations climatiques depuis le Mézozoïque 718

Chapitre 25 • Prévisions sur l’évolution du climat terrestre 72125.1 La sortie de l’interglaciaire actuel 72325.2 Deux scénarios climatiques liés

à l’augmentation du CO2 d’origine anthropique 724

25.3 Le Miocène et le Crétacé moyen, des analogues fossiles des deux scénarios 725

25.4 Le Pliocène, un analogue Fossile possible des prévisions du GIEC pour 2100 727

Chapitre 26 • Les eaux continentales : Notions d’hydrogéologie, de glaciologie et de géomorphologie 73126.1 Les eaux de surface 73226.2 Les eaux souterraines, éléments

d’hydrogéologie 74726.3 Glaciologie 76026.4 Les ablations sans vecteurs organisés et

l’évolution des versants 776

PARTIE VII – Sédimentologie : roches et environnements sédimentaires

Chapitre 27 • L’altération des continents et la production des constituants des sédiments 78427.1 Les processus d’altération 78527.2 Les mécanismes de l’altération soustractive

à l’échelle du minéral et de la roche 79027.3 Les altérations additives 80127.4 Influence du relief sur la répartition des types

d’altérations (additives vs. soustractives) 80327.5 Les sols 80527.6 L’érosion des continents 80827.7 Le bilan des grands fleuves, transport

particulaire vs. transport dissous : une image de l’érosion mondiale 809

Chapitre 28 • Transport et sédimentation : figures et structures sédimentaires associées 81228.1 Le transport par les eaux 81328.2 Impact de l’hydrodynamisme sur les

sédiments et figures sédimentaires associées aux modes de transport et de dépôt 822

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Éléments de géologie

VIII

28.3 La classification granulométrique des roches sédimentaires 834

28.4 Le transport par le vent 839

Chapitre 29 • Sédimentation et environnements continentaux 84629.1 La sédimentation lacustre et margino-littorale

(lagunes) 84629.2 La sédimentation fluviatile 85629.3 Le domaine fluvio-marin : estuaires

et deltas 860

Chapitre 30 • Sédimentation et environnements néritiques 86530.1 La sédimentation carbonatée de plate-forme 86730.2 La classification des roches carbonatées 87530.3 Récifs et bioconstructions 88030.4 Les plates-formes carbonatées actuelles 88630.5 Modèles et profils de dépôt, analyse

séquentielle 88930.6 La sédimentation phosphatée 893

Chapitre 31 • Sédimentation gravitaire et environnements du talus 89631.1 Les phénomènes gravitaires 89631.2 Les séquences gravitaires 90031.3 Les séries gravitaires 903

Chapitre 32 • Sédimentation et environnements pélagiques 91032.1 La sédimentation pélagique carbonatée 91132.2 La sédimentation pélagique argileuse 92132.3 La sédimentation pélagique siliceuse 92232.4 La sédimentation océanique : un témoin

de la mobilité lithosphérique 92432.5 Le contrôle climatique de la sédimentation

pélagique : les fluctuations de la teneur en CaCO3 des carbonates pélagiques et les rythmes sédimentaires de type Milankovitch 925

32.6 Les séries pélagiques alternantes 92732.7 Les séries pélagiques anciennes 93032.8 Le bilan de la sédimentation carbonatée

marine 931

Chapitre 33 • Sédimentation de la matière organique 93533.1 La matière organique continentale 93533.2 La production de matière organique

dans l’océan 93633.3 Les modalités de la conservation

de la matière organique 938

33.4 La caractérisation chimique de la matière organique sédimentaire 943

33.5 Les principales roches carbonées 945

Chapitre 34 • Du sédiment à la roche : la diagenèse 95234.1 Les facteurs de la diagenèse 95234.2 La diagenèse siliceuse 95734.3 La diagenèse carbonatée 959

PARTIE VIII – Notions de stratigraphie : aperçu de l’histoire de la vie et de la Terre

Chapitre 35 • La stratigraphie et ses méthodes 97235.1 Les principes de la stratigraphie 97335.2 La lithostratigraphie 97635.3 La biostratigraphie 97935.4 La radiochronologie 98335.5 Cyclostratigraphie, dendrochronologie

et sclérochronologie, téphrochronologie, thermochronologie 984

35.6 La magnétostratigraphie 98835.7 La chimiostratigraphie 98935.8 La stratigraphie séquentielle : une approche

synthétique de la stratigraphie 98935.9 L’échelle stratigraphique 1003

Chapitre 36 • Géochimie sédimentaire : chimiostratigraphie 101036.1 Signal géochimique primaire vs. signal

diagénétique 101136.2 Le rapport isotopique de l’oxygène 101236.3 Le rapport isotopique du carbone 102936.4 Le rapport isotopique du strontium (87Sr/86Sr) 103436.5 Les éléments traces 1036

Chapitre 37 • Origine, premiers stades et crises de la vie sur Terre 104637.1 Les hypothèses sur les mécanismes et

les lieux d’origine de la vie terrestre 104737.2 L’évolution de la biosphère : crises et

radiations 1062

Chapitre 38 • Le Quaternaire et l’émergence de l’Homme 107838.1 Chronologie et événements

du Quaternaire 107838.2 Émergence de l’homme 108338.3 Les industries humaines 1099

Bibliographie et sites WEB 1103

Index 1109

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La présente édition est dédiée à la mémoire de Charles Pomerol qui fit tant pour que les jeunes apprennent et aiment la géologie et qui m’écrivait lors de la 9e édition :

Maurice Renard

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XI

avanT-propos

Éléments de géologie, dont la première édition date de 1965 (sous la plume de Pierre Bellair et Charles Pomerol), a toujours été, au fil du temps, le miroir fidèle des évolutions majeures des Sciences de la Terre et de l’Univers. Consciente de la rapidité de la transformation des connais-sances, de la nécessité qu’un ouvrage d’enseignement reste en prise directe sur les recherches en cours dans les laboratoires et afin de préparer l’avenir et d’assurer la pérennité de l’ouvrage, l’équipe rédactionnelle (Maurice Renard, Yves Lagabrielle, Erwan Martin et Marc de Rafélis) a souhaité s’adjoindre, dès cette édition, la collaboration de deux nouveaux collègues (Sylvie Leroy, ISTeP, Sorbonne Université et Nicolas Coltice, PSL, École Normale Supérieure de Paris).

Notre ambition reste que ce manuel soit le livre « compagnon » de l’étudiant en Sciences de la Terre, l’accompagnant depuis sa première année de licence ou de classe préparatoire jusqu’à la préparation des concours (CAPES ou Agrégation) et ses premiers pas professionnels d’enseignant et/ou de chercheur (au cours de sa thèse). Nous avons donc conservé une rédaction permettant une lecture à différents niveaux de culture géologique. Les avancées des connaissances et des tech-niques, l’apport de l’expérimentation en Sciences de la Terre sont présentés tout en privilégiant les analyses du terrain et des objets géologiques (illustrés de plus par les reportages présentés en ligne sur le site de l’éditeur). Nous nous appuyons sur ces observations pour étayer les concepts et aboutir à une compréhension des phénomènes globaux montrant que la Terre est un système à multiples entrées.

L’iconographie, le plus souvent originale, a été réalisée par les auteurs avec l’aide talentueuse d’Alexandre Lethiers (ISTeP, Sorbonne Université) et de Bernadette Coléno. Le suivi éditorial a été réalisé par Laetitia Hérin, Vanessa Beunèche et Nour Guezmir, nous tenons à les remercier chaleu-reusement pour leur travail minutieux.

Nous avons bénéficié des observations, critiques et conseils d’un grand nombre d’enseignants et de chercheurs, rencontrés au cours des années, dans les laboratoires, sur le terrain, dans le cadre d’associations ou au jury de l’agrégation. Leur disponibilité et leur empressement ont été constants pour mettre à notre disposition des résultats, des documents, des informations, pour nous montrer leur terrain ou pour relire nos manuscrits. Si les lecteurs reconnaissent une originalité et une attrac-tivité à ce manuel, ces collègues et amis y seront pour beaucoup.

Dans la mesure du possible, les auteurs et les sources ont été cités pour chaque illustration. Néanmoins, au risque de commettre de fâcheux oublis, nous tenons à remercier de façon nomi-native les collègues des laboratoires de Brest, Clermont-Ferrand, Gif-sur-Yvette, Grenoble, La Réunion, Montpellier, Nantes, Nouméa, Orsay, Paris, Rennes et Strasbourg. Nous sommes ainsi particulièrement reconnaissants à P. d’Arco, J.P. Avouac, M. Ballèvre, F. Baudin, L. Bazalgette, C. Beltran, G. Bokelmann, L. Bougeois, S. Boulila, M. Brunel, G. Cabioch, S. Calmant, A. Chau-vet, R. Cirio, I. Cojan, M. Daignières, E. Doerflinger, S. Dominguez, L. Emmanuel, X. Escartin, J. Ferrière, A. Finizola, C. Gorini, A. Gébelin, P. Gente, C. Guivel, B. Ildefonse, M. Jolivet, P. La-baume, L. Le Callonnec, M. Jentzen, S. Lallemand, N. Le Moigne, A. Letreguilly, J. Malavieille,

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Éléments de géologie

XII

G. Manatschal, N. Mangold, H. Martin, R. Maury, R. Metge, F. Minoletti, J.P. Montagner, A. Néde-lec, B. Pelletier, A. Peltier, A. Person, H. Philip, B. Pouyaud, G. Rousselle, M. Régnier, E. Robin, L. Segalen, Ph. Razin, J.-F. Ritz, J. Y. Royer, B. Senut, M. Séranne, P. Thommen, B. Villemant, B. Vrielynck et V. Zeitoun.

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Au cours de la seconde moitié du xxe siècle, le développement de l’exploration spatiale a

conduit à un rapprochement de la communauté scientifi que des astronomes et de celle

des géologues. Les géologues ont compris qu’ils ne pouvaient appréhender l’évolution de

leur objet d’étude, la Terre, qu’en le replaçant dans son contexte universel. Indépendam-

ment des apports de la planétologie comparée, l’infl uence des phénomènes cosmiques sur

les crises biologiques, celle des fl uctuations des paramètres orbitaux sur le climat et la sé-

dimentation ont plusieurs fois été développées par les géologues au cours de ces dernières

années. Les astronomes ont, pour leur part, découvert que les archives géologiques ter-

restres contenaient un enregistrement des phénomènes cosmiques qu’ils étudiaient et qu’il

était ainsi possible d’avoir accès à une historicité de ces phénomènes.

La Terre :une planète dans l’Univers

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L’architecture de L’univers

◗  Année-lumière, unité astronomique, parsec.

◗  Galaxies, amas, super-amas, quasars et trous noirs.

◗  Effet Doppler, récession des galaxies, loi et constante de Hubble.

◗  Big Bang, inflation.

◗  Constante cosmologique, matière noire, WIMP (Weakly Interacting Massive Particles).

◗  Anomalie Pioneer, énergie noire.

◗  Rayonnement fossile (fond diffus cosmologique), COBE, WMAP, Planck.

En astronomie, la mesure de la distance est en fait le temps que met la lumière pour la parcourir (v ≃ 300 000 km⋅s–1)1. Ainsi, la Lune est à environ une seconde-lumière, le

Soleil est à 8 minutes de la Terre et son diamètre est de l’ordre de 5 secondes-lumière. Toutefois à l’échelle de l’Univers la vitesse de la lumière est très faible et, du fait du temps de transit, les renseignements apportés sont anciens. La lumière est donc une sorte de machine à remonter le temps, c’est le fameux paradoxe « Regarder loin, c’est regarder tôt ». Les objets les plus éloignés observés actuellement, par le télescope spatial Hubble lancé en 1990, sont situés à 14 milliards d’années-lumière (soit environ 90 % de l’âge de l’Uni-vers). L’analyse de la lumière qu’ils ont émise représente la jeunesse de l’Univers. Ainsi l’observateur se trouve-t-il au sommet d’une « Montagne de temps » et de tous côtés son regard plonge dans le passé. Il n’existe donc pas de vision instantanée possible de l’Univers.

1. En fait 299 792,458 km/s

CH

AP

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MOTS-CLÉS

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

Trois types d’unités de mesure de distance sont classiquement utilisés :

– l’année-lumière (al, soit 9,46⋅1012 km) et ses sous multiples ;

– l’unité astronomique (UA) qui correspond à la distance moyenne de la Terre au Soleil (environ150⋅106 km, en fait 149,6⋅106 km) ;

– le parsec (pc), l’unité la plus utilisée par les astronomes, qui est basée sur l’estimation de l’angle de parallaxe pour évaluer la distance des étoiles proches (fig. 1.1). C’est la distance telle qu’une unité astronomique est vue sous un angle d’une seconde. Un parsec est égal à 3,262 années lumières soit 3,08568⋅1013 km.

Soleil

1 UA

p = parallaxe = 1 seconde d’arc (1’’)

(p)étoile proche

fondduciel

1 parsec = 1 pc

La Terre

La Terre

orbite terrestre

Figure 1.1 Le parsec : mesure de la distance des étoiles proches par estimation de l’angle de parallaxe.

Du fait de la rotation de la Terre autour du Soleil, les étoiles proches paraissent effectuer une révolution sur le «  fond du ciel  ». Deux observations, à 6 mois d’intervalle, permet-tront donc d’évaluer l’angle de parallaxe en

résultant. On peut donc définir le parsec comme la distance à laquelle il faudrait se placer pour observer le rayon de l’orbite terrestre (1 UA) sous un angle d’une seconde.

Encart 1.1 – Les unités de mesure en astronomie

1.1 L’architecture de L’univers

1.1.1 Les galaxies

L’observation du ciel nocturne montre un ruban qui s’étire comme un grand cercle autour de la sphère céleste et que l’on connaît depuis l’Antiquité sous le nom de Voie Lactée. En 1750, Thomas Wright suggéra que les étoiles étaient rassemblées en une sorte de « galette aplatie » ; le Système solaire étant situé à l’intérieur de cette galette, nous voyons depuis la Terre beaucoup plus de lumière quand nous regardons selon ce plan que dans les autres directions. Cette hypothèse fut par la suite confirmée et l’on pense aujourd’hui que la Voie Lactée est un disque aplati (fig. 1.2) d’un diamètre d’environ 100 000 al et d’une épaisseur de 6 000 al. Le Système solaire est à environ 30 000 al du centre du disque, un peu au « nord » du plan médian. Le disque est en rotation avec des vitesses pouvant atteindre 250 km⋅s–1 et il présente de gigantesques bras spiraux. Le Soleil en fait le tour en environ 240 Ma.

La masse de notre Galaxie est évaluée à 100 milliards de masses solaires. La Galaxie est constituée d’étoiles (109 à 1011 étoiles), de gaz interstellaires (± 1 atome de gaz par cm3) et de poussières qui représentent une masse non négligeable (1 à 2 % de la masse stellaire). Les étoiles sont très éloignées les unes des autres, ainsi par rapport au Soleil, il n’y a pas une étoile à moins de 3 années-lumière. Du point de vue stellaire, le ciel est « vide » et les probabilités de collision entre deux étoiles sont très faibles.

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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Elliptiques Spirales Spirales barrées

E0

E1

E2

E3

E4

E5

E6

E7

Sa

Sb

Sc

SBa

SBb

SBc

A

DIRBE

λ = 1,25 μm

λ = 2,2 μm

composite : λ = 1,25 + 2,2 + 3,5 μm C

100 000 al = 30 kpc env.

soleil bulbe disque

halo

amas globulaireB

bras Sagittarius

bras Perseus

brasScutum-Centaurus

bras externe

Figure 1.2 Les galaxies et notre galaxie, la Voie Lactée.

A. Représentation schématique de divers types de galaxies. Les galaxies elliptiques représentent 2/3 des galaxies.

B. La galaxie de la Voie Lactée (Milky Way) vue en plan et en coupe et situation de notre Soleil en po-sition externe sur un des bras.

C. Le disque de la Voie Lactée et son bulbe central tels qu’ils furent perçus pour diff érentes longueurs d’onde par les photomètres infrarouges de l’instrument DIRBE (Diff use InfraRed Experiment) porté par le satellite COBE (Cosmic Background Explorer) pour diff érentes longueurs d’ondes. COBE fut lancé en 1989 pour étudier le fond diff us cosmologique (rayonnement fossile, voir fi g. 1.6).

On observe aussi des taches lumineuses étendues qu’on appelle « nébuleuses ». Ainsi la nébuleuse d’Andromède est mentionnée pour la première fois par l’astronome arabe Al-Soufi en 964. E. Kant est le premier, en 1755, à postuler que certaines nébuleuses pouvaient être des galaxies identiques à la nôtre (toutefois d’autres, comme la nébuleuse d’Orion, sont des masses gazeuses situées dans notre Galaxie).

Au XiXe siècle, l’amélioration des télescopes met en évidence la forme elliptique ou spirale des nébuleuses mais il fallut attendre 1920 pour que E. Hubble parvienne à résoudre en étoiles indivi-duelles la nébuleuse d’Andromède. De plus, il découvre dans les bras spiraux de cette nébuleuse des étoiles particulières qui présentent une variation périodique de la luminosité (ces étoiles sont connues dans notre Galaxie sous le nom de Céphéides). Cette découverte fut importante car quelques années plus tôt, des astronomes américains avaient montré qu’il existe une relation entre la périodicité de variation de la luminosité des Céphéides et leur luminosité absolue (puissance totale rayonnée par un objet astronomique dans toutes les directions). La brillance d’un objet tel que nous le percevons n’est pas déterminée par sa luminosité absolue mais par sa luminosité apparente (puissance rayonnée reçue par cm2 sur le miroir d’un télescope). La luminosité apparente est fonction de la luminosité absolue et de la distance. Hubble mesura la luminosité apparente des Céphéides d’Andromède et, estimant leur luminosité absolue d’après leur période de variation, il put calculer leur éloignement (donc celui de la nébuleuse d’Andromède) à partir d’une loi simple où la luminosité absolue est inversement propor-tionnelle au carré de la distance. Il trouva la nébuleuse d’Andromède située à 900 000 al soit dix fois plus loin que l’objet le plus éloigné connu à l’intérieur de notre Galaxie. La position extra-galactique de la nébuleuse d’Andromède était donc établie.

Des calibrations nouvelles ont depuis augmenté la distance d’Andromède jusqu’à deux millions d’al, mais dès 1923 l’aspect plurigalactique de l’Univers était démontré.

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

L’Univers est donc constitué de plus de 100 milliards de galaxies (100 000 al. de diamètre environ) séparées par des distances moyennes de 1 000 000 al. Le nuage de Magellan est à 300 000 al, Andro-mède, nous l’avons vu, à 2 000 000 al. La distance intergalactique n’est donc pas énormément plus grande que la dimension des galaxies. « Le ciel des galaxies n’est pas aussi vide que celui des étoiles », aussi les collisions ne sont-elles pas rarissimes et il en résulte des projections de matière dans l’espace intergalactique. Il existe ainsi entre le nuage de Magellan et la Voie Lactée un pont de matière produit, il y a environ 200 millions d’années, quand les galaxies étaient plus proches.

Les galaxies sont les structures principales de l’Univers, c’est en quelque sorte des « usines à trans-former la matière gazeuse en étoile ». Elles se répartissent en trois types principaux (fig. 1.2) :• les galaxies spirales (1/4 des galaxies dont la Voie Lactée) en forme de disque aplati avec des bras

spiraux émergeant du noyau central (fig. 1.4). Riches en gaz, les compressions résultant de la rota-tion de la galaxie provoquent la naissance de nouvelles étoiles au niveau du bras. Le noyau central peut avoir la forme d’un barreau. On parle alors de galaxie barrée ;

• les galaxies elliptiques présentent une symétrie elliptique ou sphérique (sphéroïde) sans structures évidentes mais avec divers degrés d’aplatissement. Elles représentent 2/3 des galaxies. La plupart des étoiles qui les composent sont très âgées (10 000 Ma). Comme ces galaxies sont appauvries en gaz, il ne peut pas se former de nouvelles étoiles. Les plus grandes galaxies connues (1013 masse solaire) sont de ce type. Elles sont souvent le siège d’émissions radio importantes, on parle alors de radiogalaxies. La grande luminosité du noyau de ces galaxies serait due à la présence de quasars (quasi stellaire astronomical radiosource), objets d’apparence stellaire, de très forte luminosité, dont le spectre représente un fort décalage vers le rouge. Ils pourraient résulter de la contraction gravita-tionnelle d’étoiles « supermassives » ;

• les galaxies irrégulières, qui représentent moins de 1/10 de toutes les galaxies, dans lesquelles plusieurs sous-classes peuvent être distinguées.

1.2 une architecture hiérarchisée

Les galaxies ne se répartissent pas au hasard, elles ont tendance à se grouper en structures plus grandes : les amas. Ainsi notre Galaxie, la Voie Lactée, fait partie au même titre que la nébuleuse d’Andromède ou le nuage de Magellan, de l’amas local (une vingtaine de galaxies dans un rayon d’environ 5 millions d’années-lumière).

Il semble que les amas s’organisent eux-mêmes en structure d’ordre supérieur : « les super-amas » qui regrouperaient plusieurs milliers de galaxies dans un volume dont les dimensions sont de l’ordre de plusieurs dizaines de millions d’années-lumière. Ainsi l’amas local ferait partie du super-amas de la Vierge.

Charles Messier publia en 1781 un catalogue intitulé « Nébuleuses et Amas d’étoiles ». Les astro-nomes utilisent encore la numérotation de Messier pour désigner les 103 objets décrits dans le catalogue. Ainsi, Andromède est appelé M 31, la constellation d’Orion, M 42 et la galaxie massive du super-amas de la vierge, Messier 87.

Encart 1.2 – Le catalogue Messier

La région centrale du super-amas est en général occupée par une galaxie très massive (plusieurs centaines de fois la masse d’une galaxie normale) et il semble que les autres galaxies gravitent autour d’elle. Toutefois, du fait de leur relative proximité et des forces d’attraction qu’elles exercent sur leurs voisines, les galaxies perturbent constamment leurs trajectoires et ont tendance à s’approcher du centre du super-amas. Pour certains astrophysiciens, ces galaxies monstrueuses hébergeraient un

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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« trou noir », au cœur des quasars, qui finirait par englober les autres galaxies mais les données sont loin d’être évidentes et le système est peut-être en équilibre : il y aurait autant de matière formée que de matière engloutie.

Imaginés pour la première fois par Laplace, les trous noirs correspondraient à des structures si denses que même la lumière ne pourrait plus s’en échapper. Leur nature physique ne peut se comprendre que dans le cadre de la théorie de la relativité généralisée (Einstein). L’intense lumino-sité des quasars pourrait ainsi s’expliquer : la matière attirée, portée à des températures extrêmes, rayonnerait de façon très intense, avant de s’engouffrer dans le trou noir.

Encart 1.3 – trous noirs et quasars

Le super-amas de la Vierge possède sa galaxie « monstrueuse » (Messier 87) située à 52 millions d’al de la Terre. L’existence d’un trou noir dans cette galaxie avait été suspectée par les observations spectrographiques du télescope spatial Hubble (fig. 1.3B) qui montraient l’existence d’un disque de gaz chaud et ionisé en rotation à une vitesse de 1,9 million de km·h–1. Pour maintenir ce disque dans ces conditions, il faut une attraction gravitaire correspondant à une masse de 2 à 3 milliards de soleils qui pourrait être un trou noir super-massif (Sagittarius A*). L’existence de ce trou noir a été démontrée par Reinhard Genzel et Andrea Ghez qui ont constaté une très forte accélération des étoiles sur leur trajectoire liée à l’attraction gravitionelle à proximité de la structure Sagittarius A*. Pour leurs travaux, ces deux chercheurs ont reçu, en compagnie de Roger Penrose, un théoricien du concept de trou noir, le prix Nobel de physique en 2020.

Il ne semble pas y avoir de structure d’ordre plus élevé, tout se passe comme si les galaxies « s’igno-raient » quand elles sont à plus de soixante millions d’années-lumière (ordre de grandeur des super-amas). La figure 1.3 résume les principales caractéristiques des différents objets constitutifs de l’Univers.

1012 amas de galaxies 1014 107 pc 10–28

108 galaxies 1011 104 pc 10–23

102 amas d’étoiles 105 102 pc 10–22

10–1 étoiles 1 106 km 1

10–3 naines brunes 5.10–12 105 km 10

10–10 planètes 10–5 104 km 4

10–33 astéroïdes 10–12 100 km 1

poussières 10–39 1 μm 1

Limites (en M*)

Objet Masse (en M*)

Taille Densité

masses exprimées par rapport à la masse solaire (M* = 2,1030 kg), pc = parsec.A B

Figure 1.3 Les objets constitutifs de l’Univers.

A. Tableau des principales caractéristiques des objets formant l’Univers (d’après Brahic, 1999).

B. La mission Hubble (en anglais, Hubble Space Telescope ou HST) est une collaboration entre la NASA (National Aeronautics and Space Administration) et l’ESA (Agence spatiale européenne). Ce télescope a été lancé le 24 avril 1990 et mis sur orbite circulaire par la navette spatiale Discovery. Il effectue le tour de la Terre en environ 96 minutes. Hubble évolue à 600 km d’altitude, en dehors de l’atmosphère et peut donc faire des observations à très haute résolution de radiations qui seraient captées par l’atmosphère terrestre. C’est un télescope réflecteur à deux miroirs qui utilise deux panneaux solaires pour produire de l’électricité. Il a apporté de précieux résultats sur l’organisation et l’évolution de l’Univers, notamment sur son expansion (fig. 1.4).

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

Lancé en 1990, ce télescope spatial, ainsi nommé en l’honneur de l’astronome Edwin Hubble (cf. infra) continue de fonctionner (le lancement d’un successeur, le James Webb Space Telescope, plusieurs fois reporté devrait avoir lieu en 2021). Hubble a subi plusieurs remises à niveau par les «  mécanos de l’es-pace » des différentes navettes (1997, 1999, 2002 et 2009), après sa réparation initiale (1993, correction du défaut de courbure du miroir principal). Il permet des observations impossibles ou très difficiles à partir des obser-vatoires terrestres notamment dans les domaines infrarouge et ultraviolet en s’affran-chissant des perturbations atmosphériques.

Son apport, particulièrement dans l’étude des galaxies, du fonctionnement stellaire, des comètes et dans l’évaluation de l’âge de l’Uni-vers, a été capital. Ainsi Hubble a fourni, en 1994 des images de la collision de la comète Shoemaker-Levy 9 avec Jupiter. De même, la preuve que des planètes gravitaient autour d’étoiles autres que le Soleil a été obtenue pour la première fois avec Hubble. Au début de l’année 2000 on estimait qu’il avait étudié 13 670 objets et transmis 3 500 milliards d’octets d’informations qui ont été à la base de plusieurs milliers d’articles scientifiques (voir fig. 2.4b, une mosaïque réalisée à partir d’images de Hubble).

Encart 1.4 – Le télescope spatial Hubble (fig. 1.3)

1.3 L’expansion de L’univers et Le « Big Bang »La vision du ciel nocturne donne l’impression que l’Univers est immobile ; en réalité les étoiles se déplacent à des vitesses pouvant atteindre quelques centaines de kilomètres par seconde, ainsi une étoile rapide parcourt-elle 10 milliards de km en une année mais ceci ne représente que le millième de la distance qui nous sépare des étoiles les plus proches et leur position dans le ciel ne varie que très lentement. Les astronomes appellent « mouvement propre » le déplacement apparent des étoiles proches.

Notre connaissance du déplacement des objets célestes est basée sur une propriété, commune à tous les mouvements ondulatoires, appelée « effet Doppler ».

L’effet Doppler concerne la variation de la fréquence des ondes émises par une source en fonction de son déplacement. J.-C.  Doppler, professeur de mathématiques à Prague semble avoir été le premier à noter ce phénomène en 1842, tant pour les ondes sonores que lumineuses.

Lorsque nous observons une onde sonore émise par une source au repos, l’intervalle de temps séparant la réception de 2 crêtes d’ondes successives (période) est le même que celui qui sépare leur émission par la source. Si la source s’éloigne, l’intervalle séparant deux réceptions sera plus grand que celui séparant deux émis-

sions, chaque «  crête  » devant parcourir un chemin plus long pour nous parvenir. Suppo-sons une source lumineuse émettant un rayon-nement de période T et s’éloignant de l’obser-vateur à la vitesse V.  Elle parcourt entre l’émission de deux crêtes une distance VT. Le temps nécessaire pour qu’une crête parvienne à l’observateur est donc accru de VT/c où c est la vitesse de la lumière. Le temps qui sépare la réception de deux crêtes successives est donc T’= T + (VT/c). À l’émission la longueur d’onde de la lumière est l = cT  ; à la réception, elle devient l = cT’= c [T + (VT/c)]. Si la source se rapproche, V est remplacé par – V.

Encart 1.5 – L’effet Doppler

Il est facile d’en avoir une démonstration triviale pour les ondes sonores ; quand une voiture roule à régime constant le bruit du moteur paraît plus aigu (c’est-à-dire que sa période est plus petite et sa fréquence plus élevée) lorsqu’elle se rapproche d’un observateur que lorsqu’elle s’en éloigne.

Doppler pensait que ce phénomène pouvait expliquer les différences de couleurs des étoiles (les couleurs des étoiles s’éloignant de la Terre seraient déplacées vers le rouge tandis que celles des étoiles se rapprochant le seraient vers le bleu). En fait la couleur des étoiles dépend surtout de leur température de Voir fig. 2.5

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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surface. De plus dans le cas d’un effet Doppler, comme l’ensemble des raies du spectre est décalé, la couleur résultante ne subit pratiquement pas de modification.

L’importance de l’effet Doppler en astronomie ne se révéla que lorsqu’il fut appliqué à l’étude des raies spectrales individuelles des corps chimiques présents dans les objets célestes.

On observa alors que les spectres des galaxies étaient légèrement décalés vers le rouge ou vers le bleu. Ces observations, qui furent attribuées à l’effet Doppler, indiquaient que certaines nébuleuses se rappro-chaient de la Terre (telle la nébuleuse d’Andromède avec une vitesse de 300 km⋅s–1) tandis que d’autres s’en éloignaient. En 1924 sur 41 galaxies étudiées, Hubble en observa 36 qui s’éloignaient (fig. 1.4) et 5 qui se rapprochaient. Dans un premier temps, on pensa qu’il s’agissait de vitesses relatives dues au mouvement propre du Système solaire (qui se rapprocherait de certaines galaxies et s’éloignerait d’autres) mais les observations se multipliant, il apparut que la grande majorité des galaxies (à l’exception de quelques nébuleuses « voisines » comme Andromède) s’éloignaient de la nôtre. Le fait que les galaxies semblent toutes s’éloigner de nous ne signifie nullement que notre Galaxie occupe une position centrale dans l’Univers. Tout observateur placé dans une autre quelconque galaxie aurait aussi l’im-pression que toutes les autres s’éloignent.

De plus, en 1929 Hubble nota que le décalage spectral des galaxies vers le rouge (donc leur vitesse) était proportionnel à leur distance à la Terre. La vitesse d’éloignement s’exprimant sous la forme :

V = H doù d est la distance et H une constante dite constante de Hubble. V est exprimée en km⋅s–1 et d en

mégaparsecs (106 parsecs).

A B

40

60

80

100

120

10 20 30 40Distance (108 al)

Vite

sse

(104 k

m/s

)

20

Figure 1.4 L’éloignement des galaxies : loi de Hubble.

A. La loi de Hubble relie la vitesse d’éloignement (récession) des galaxies et leur distance. Le calcul des vitesses est basé sur le décalage spectral vers le rouge (effet Doppler), celui de la distance sur l’intensité de la luminosité apparente. Cette loi nous amène au concept d’un Univers en expansion accélérée.

B. La galaxie Messier 83 se trouve dans la constellation Hydra à une distance d’environ 15 millions d’années-lumière de la Terre. C’est un lieu de fabrication active de nouvelles étoiles. Elle est deux fois plus petite que notre galaxie, la Voie Lactée. On y distingue des bras bien définis riches en jeunes étoiles et une région centrale, comprenant un disque et une « barre  » de forme allongée (galaxie spirale barrée simple, voir fig. 1.2). Photographie produite par ESO, European Southern Observatory (l’ESO regroupe 15 nations et développe notamment des télescopes : NTT, VLT, ALMA) sur des sites situés dans le désert d’Atacama au Chili.

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

La première valeur de H trouvée par Hubble était 600 km⋅s–1⋅Mpc–1, cette valeur fut réduite d’abord à 200 km⋅s–1⋅Mpc–1 puis à 100 km⋅s–1⋅Mpc–1. Actuellement un débat existe entre les partisans d’une échelle des distances courte (80 ≤ H ≤ 100 km⋅s–1⋅Mpc–1) et les partisans d’une échelle longue (H = 50 km⋅s–1

⋅Mpc–1). En 1994, un calcul basé sur les Céphéides de l’amas Virgo aboutit à H = 87 ± 7 km⋅s–1⋅Mpc–1.

Il semble donc qu’à partir d’une certaine distance, les galaxies fuient toutes et ce d’autant plus vite qu’elles sont plus éloignées (fig. 1.4). La proportionnalité entre distance et vitesse d’éloignement a été vérifiée jusqu’à des vitesses de 60 000 km⋅s–1 (soit 20 % de la vitesse de la lumière). Nous arrivons donc à la vision d’un Univers en expansion à partir d’une “explosion initiale” communément appelée Big Bang (expression qui apparaît en 1950, à la suite d’une émission radio britannique où elle est formulée, de façon ironique, par un de ses adversaires, l’astronome Fred Hoyle). Notons que l’expan-sion de l’Univers n’a pas de centre. On perçoit l’expansion de la même façon quel que soit le lieu où l’on se place.

1.4 Les dimensions de L’univers

Newton fut le premier à envisager ce problème en admettant que si la matière de l’Univers était égale-ment répartie dans une région finie elle tendrait à tomber vers le centre. Au contraire, si elle était répartie dans un espace infini, il n’y aurait pas de centre et elle pourrait alors se condenser en un nombre infini d’agrégats dispersés à travers l’Univers (agrégats qui, pour Newton, pouvaient être à l’origine du Soleil et des étoiles).

a) La constante cosmologique d’EinsteinIl n’y eut guère de progrès avant la formulation de la théorie de la relativité générale par Einstein. Notre vision actuelle de l’Univers repose sur deux principes :• le principe d’universalité à savoir que les lois physiques sont les mêmes en tous les points de l’Uni-

vers ;• le principe cosmologique qui stipule que l’univers est, à grande échelle, uniforme et isotrope.

Toutes les observations vérifient, pour le moment, ces deux principes. Ainsi la cartographie des 31 000 radio-sources les plus intenses (Gregory et Condon, 1991) ne montre aucun écart significatif à une répartition aléatoire. De même, les mesures du rayonnement fossile par le satellite COBE (Cosmic Background Explorer) ont montré une concordance avec la courbe du corps noir à 2,7 K (voir § 1.5 et fig. 1.6).

En 1917, Einstein essaya de trouver une solution de ses équations qui décrirait la géométrie spatio-temporelle de l’Univers dans sa totalité. Il rechercha une solution qui fut homogène, isotrope et malheureusement, conformément aux idées de l’époque, stationnaire. Afin de construire un modèle en accord avec ces hypothèses, il dut se résoudre à modifier ses équations en introduisant un terme dit « constante cosmologique », qui représente « l’énergie du vide » contrebalançant les forces d’attraction gravitationnelle à grande distance. Le modèle d’Einstein était vraiment stationnaire et le décalage spectral vers le rouge n’y était pas prévu. Les travaux d’Hubble sur les mouvements des galaxies orientèrent alors les théoriciens vers des modèles cosmologiques homogènes, isotropes mais non stationnaires, il n’y avait donc pas besoin de modifier les équations d’Einstein par une « constante cosmologique ».

En fait, dès 1922, le mathématicien russe Friedmann proposa une solution générale homogène, isotrope et non stationnaire des équations originales d’Einstein qui est à la base de la plupart des théories moderne. On peut donc considérer que dès 1922, Friedmann prédit ce que Hubble démontrera en 1929.

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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Le modèle d’expansion de l’Univers peut donc être assimilé à une compétition entre l’expansion qui disperse la matière et la gravité qui s’y oppose et rassemble la matière. Il existe ainsi une densité cri-tique qui est de l’ordre de 10–29 g⋅cm–3 à 5 x 10–30 g⋅cm–3, soit environ l’équivalent de 3 atomes d’hydro-gène pour un volume de 1 000 litres. Selon que la densité de l’Univers sera ou non supérieure à cette densité critique, celui-ci s’effondrera sur lui-même au bout d’un certain temps (Big Crunch) ou conti-nuera son expansion éternellement.

b) Les différents modèles de l’Univers : importance de la matière noireDans le cadre de la relativité générale, il existe une relation entre la géométrie de l’Univers et la densité puisque la matière tend à courber l’espace-temps. En simplifiant, on peut dire qu’il existe trois classes de modèles de Friedmann :1) Si la densité est supérieure à la valeur critique, la gravitation recourbe l’Univers sur lui-même ; sa

géométrie est sphérique et fermée. Dans ce cas, le champ de gravité est assez intense, pour mettre fin à l’expansion de l’Univers qui pourrait alors se contracter tandis que la densité de matière augmenterait. L’évolution de l’Univers pourrait alors être une succession de phases d’expansion (à partir du Big Bang) et de contraction (jusqu’au Big Crunch) ;

2) Si la densité est égale à la valeur critique, l’Univers est plat, la géométrie euclidienne et l’expansion éternelle mais avec un taux de plus en plus faible finissant par s’annuler ;

3) Si la densité moyenne de matière de l’Univers est inférieure à la valeur critique, l’Univers est hyperbolique et ouvert et, dans ce cas, l’expansion se poursuivra éternellement.

énergie noire

matière normale (baryonique) : 4,4 %

lumière : 0,05 % neutrinos : 0,5 %

72 %

éléments lourds (0,003 %)étoiles (0,26 %)gaz (2,23 % + 2 % manquants)

matière noire

26 %

+

+

+

BA

Expa

nsio

n(d

ista

nce

entr

e le

s ga

laxi

es)

PRÉSENT

TempsT1T2

T3

1

2

3

123

4

4

Univers fermé

Univers plat

Univers ouvertUnivers avec énergie noire

T0

Figure 1.5 L’Univers : expansion et composition.

A. Le taux d’expansion de l’Univers que l’on peut assimiler à l’évolution de la distance séparant deux galaxies typiques est représenté (en unité arbitraire) en fonction du temps, pour quatre modèles cosmologiques possibles. Dans le cas d’un « Univers fermé », la densité est supérieure à la densi-té critique, l’expansion est dite elliptique  ; elle prendra peut-être fin et sera suivie d’une phase de contraction (courbe 1). Dans le cas d’un « Univers plat », la densité est égale à la densité critique et l’expansion est parabolique (courbe 2), elle se poursuit éternellement mais à un taux de plus en plus faible qui tend à s’annuler pour des temps infinis. Dans le cas d’un « Univers ouvert », la densité est inférieure à la densité critique et l’expansion bien que se ralentissant, se poursuivra éternellement (courbe 3). Dans le cas où intervient l’énergie noire, il existe une force de répulsion à grande échelle qui force une expansion accélérée de l’Univers (courbe 4). Les courbes 1, 2 et 3 sont calculées avec les équations de champ d’Einstein, sans constante cosmologique et pour un Univers à dominance ma-térielle. T0, T1, T2 et T3 sont les âges respectifs de l’Univers correspondant aux différents modèles.

B. Composition de l’Univers en énergie et en matière. Parmi les 26 % de matière, seulement 4,4 % sont faits de matière baryonique, c’est-à-dire de noyaux d’atomes (fig. 2.1). Le reste de la matière est sous forme non baryonique, totalement inconnue, qui interagit néanmoins gravitationnellement avec le mi-lieu, mais sans être faite d’atomes. Sa présence est toutefois nécessaire pour la formation des galaxies.

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

Il n’est pas aisé de choisir entre les différentes classes de modèles. Une première tentative peut être faite à partir de l’étude du mouvement des galaxies (fig. 1.5). Si l’Univers est fermé, la fuite des galaxies éloignées doit se ralentir. Les mesures sont très complexes mais il semble que le ralentissement des galaxies éloignées ne soit que minime, donc que l’Univers soit ouvert et doive poursuivre son expansion éternellement.

L’approche la plus fructueuse serait l’évaluation de la densité cosmique mais il est extrêmement difficile d’estimer la matière présente dans l’Univers car une grande partie est invisible et ne peut être décelée qu’à partir des perturbations gravitationnelles qu’elle engendre. Si l’on ne se fonde que sur la densité de la matière effectivement observée, la densité moyenne de l’Univers serait de l’ordre de 5 × 10–32 g⋅cm–3 et ne représenterait donc que le centième de la densité critique. L’Univers serait donc ouvert.

Une autre approche du problème, la mesure du deutérium par rapport à l’hydrogène léger, aboutit à la même conclusion. En effet, dans la phase de nucléosynthèse initiale, la formation du deutérium dépend de la densité de matière et les mesures conduisent à conclure que la densité présente de l’Univers est comprise entre 3 et 5 × 10–31 g⋅cm–3, valeur inférieure à la densité critique.

Toutefois, il est fort probable que la plus grande partie de la matière de l’Univers soit confinée dans des trous noirs ou qu’il existe un gaz extragalactique très dense (certains auteurs considèrent qu’on ne verrait que 10 à 20 % de la matière présente dans l’Univers, le reste correspondrait à de la matière « noire »). La notion de matière noire, particules invisibles de nature mystérieuse, est apparue à la fin des années 1970, afin de rendre compte de la rotation des galaxies spirales. Si l’on ne tient compte que de la matière visible, les forces de gravité ne sont pas suffisantes pour s’opposer à la force centrifuge et les étoiles externes devraient être expulsées. La matière noire viendrait compenser la force centri-fuge, elle serait composée d’un nouveau type de particules, les WIMP (Weakly Interacting Massive Particles), qui n’émettent pas de lumière et interagissent peu avec la matière ordinaire.

c) L’anomalie « Pioneer » : une mise en évidence de la matière noire ?Les trajectoires des sondes spatiales conduisent, elle aussi, à s’interroger sur les fondements de la physique. Une force inconnue semble freiner les sondes lancées dans les années 1970. Ainsi, la sonde Pioneer-10, après avoir survolé Jupiter en 1973, poursuit sa route en direction d’une étoile, Aldébaran, qu’elle devrait atteindre dans environ 2 millions d’années. Depuis 1980, on a décelé des anomalies dans la trajectoire de cette sonde qui se déplace à plus de 12 km⋅s–1. Elle est plus proche du Soleil (400 000 km) que ne le prévoyaient les calculs. Tout se passe comme si une force inconnue freinait l’engin (« anomalie Pioneer »). On a d’abord pensé à une erreur de calcul, mais Pioneer-11, lancé peu de temps après, semble présenter la même anomalie. En 1998, les ingénieurs concluaient qu’il ne pouvait s’agir d’une cause technique propre à la sonde. Les données de navigation d’autres sondes, telles Galileo et Cassini, ne mettent pas en évidence une telle anomalie du fait de problèmes internes aux engins qui ne permettent pas de mesurer de si petites anomalies. La force « anomalique » est 10 milliards de fois inférieure à l’accélération de la pesanteur terrestre.

Divers scénarios ont été envisagés pour expliquer l’anomalie Pioneer, mais le plus récent ferait intervenir la matière noire, matière invisible de l’Univers, déjà invoquée pour expliquer les anomalies de rotation des galaxies et dont on pensait qu’elle ne provoquait des anomalies aux lois de newton qu’aux très grandes échelles. L’anomalie Pioneer pourrait être la première manifestation d’une alté-ration de la gravité newtonienne à petite échelle. Dans ce cas la densité effective de l’Univers pourrait être supérieure à la densité critique. Le débat sur les anomalies Pionneer a été relancé par de nouvelles modélisations des trajets des sondes dans le cadre de la physique standard. Ces différents travaux synthétisés en 2012 attribuent les retards observés au fonctionnement de générateurs nucléaires que les sondes transportent. Ces générateurs émettraient des photons qui produiraient une force de recul suffisante pour expliquer le retard, par réflexion sur l’antenne de la sonde. Différentes équipes ont

Voir fig. 2.2

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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proposé des projets de lancement d’une sonde équipée d’un micro-accéléromètre pour tester diffé-rentes hypothèses. Pour l’instant, ces projets n’ont pas été retenus par les différentes agences spatiales.

d) Une accélération de l’expansion ? L’énergie noireLe débat est loin d’être clos car les données obtenues grâce au télescope spatial Hubble ont conduit deux équipes à postuler une accélération de l’expansion de l’Univers. Entre 2001 et 2003, onze super-novae de type Ia, très éloignées, ont été observées par le télescope spatial. La luminosité de ce type de supernovae est si forte qu’elles sont utilisées pour mesurer les distances dans l’Univers. La luminosité mesurée par le télescope spatial s’est révélée plus faible que celle attendue dans le cas d’un Univers sans accélération mais seulement cohérente avec une expansion en accélération. Ces observations confirment celles, plus ambiguës, effectuées en 1998 à partir de télescopes terrestres. L’accélération de l’expansion serait due à la présence d’une force répulsive à grande échelle, capable de surpasser l’at-traction gravitationnelle existant entre les différents constituants de l’Univers (fig. 1.5). La nature de cette force répulsive qui repousse la matière reste énigmatique et on lui a donné le nom d’énergie noire ou d’énergie sombre (certains auteurs ont réutilisé le terme d’Einstein : « énergie positive du vide »).

L’Univers serait donc principalement formé (fig. 1.5 B) de : – 4 % de matière visible (matière « ordinaire » ou baryonique, c’est-à-dire constituée de baryons :

les protons et les neutrons) ; – 22 % de matière noire (constituée de particules WIMP) qui n’émettent pas de lumière et intera-

gissent peu avec la matière ordinaire) ; – 72 % d’énergie noire.

Cependant, on considère actuellement que la part de matière « ordinaire » baryonique est sous estimée car il existerait de la matière « ordinaire » invisible. En effet quand on compare les calculs des modèles théoriques aux mesures spectroscopiques basées sur l’Univers observable, il manque une quantité importante de baryons. Cette matière baryonique invisible serait présente sous forme de plasmas chauds ionisés au niveau des halos périgalactiques et des filaments intergalatiques. Dans ces plasmas les baryons sont dépourvus d’électrons, ce qui les rend invisibles par les techniques clas-siques de spectroscopie.

Enfin, l’existence de la force répulsive de l’énergie noire, qui accélère l’expansion de l’Univers, repose le problème de la constante cosmologique qu’Einstein avait supprimée de ses équations après la mise en évidence de la récession des galaxies par Hubble. En utilisant une constante légèrement supérieure à celle d’Einstein, on obtiendrait un cas de figure proche des observations actuelles.

Dans ce cas, l’Univers serait né dans un Big Bang suivi d’une expansion ralentie par la gravité, mais la force de répulsion à grande échelle aurait pris progressivement le dessus et l’Univers serait entré dans une phase d’expansion accélérée éternelle.

1.5 Le fond cosmique de rayonnement radio ou rayonnement fossiLe (fond diffus cosmoLogique)

En 1964, deux radioastronomes Penzias et Wilson, en travaillant sur l’antenne du laboratoire de la Bell Telephone (construite pour assurer les télécommunications par satellites), cherchaient à mesurer l’intensité des ondes radio émises par notre Galaxie aux latitudes galactiques élevées (c’est-à-dire hors du plan de la Voie lactée). De telles mesures sont très délicates car l’émission radio est peu diffé-rente du bruit de fond électronique de l’antenne. Il était donc capital d’identifier le bruit électronique produit par le système récepteur. Dans ce but, ils développèrent une série d’expériences en réglant la

voir § 2.1.2

voir p. 9

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réception sur une longueur d’onde relativement courte (7,35 cm) où le bruit radio produit par notre Galaxie devait être négligeable. Ils s’attendaient à une légère perturbation par l’atmosphère mais celle-ci devait être facilement identifiable car dépendante de la direction d’observation (proportion-nelle à l’épaisseur de l’atmosphère dans cette direction, elle serait moins intense dans la direction du zénith que dans celle de l’horizon). À leur étonnement, ils détectèrent un bruit significatif à 7,35 cm beaucoup plus fort qu’ils ne l’attendaient et surtout indépendant de la direction d’observation et du temps (aussi bien à l’échelle de la journée qu’à celle de la variation saisonnière).

On se demanda donc si l’antenne n’était pas le siège d’un bruit propre plus important que prévu, on multiplia les précautions (démontant et nettoyant l’antenne car un couple de pigeons y avait niché et créé quelques « dégâts ») mais la diminution de la puissance du bruit observé ne fut que très faible.

Pour décrire leur enregistrement ils utilisèrent le vocabulaire familier des radio-ingénieurs qui consiste à traduire l’intensité du bruit radio en terme de température équivalente (c’est-à-dire la température des parois d’une enceinte à l’intérieur de laquelle le bruit radio aurait la même intensité que celui enregistré). Ils trouvèrent que la température, équivalente du bruit radio qu’il recevait, était de l’ordre de 3 K. Un peu par hasard, Penzias et Wilson (qui reçurent, pour ces travaux, le prix Nobel en 1978) venaient de faire une découverte aussi importante pour l’astronomie que celle du décalage spectral vers le rouge : le rayonnement fossile.

En effet, à la même époque, les théoriciens du Big Bang notamment Dicke et Peebles redécou-vraient les calculs faits par Gamow (un élève de Friedmann) et ses collaborateurs en 1948, qui prévoyaient l’existence d’un fond de rayonnement, vestige des débuts de l’Univers, que l’expansion aurait réduit à une température de l’ordre de 3 K. Pour les théoriciens du Big Bang, l’existence aux premiers temps de l’Univers, d’un rayonnement d’une température équivalente très élevée et de longueur d’onde très courte, était nécessaire pour expliquer l’abondance de l’hydrogène (qui forme les 3/4 de l’Univers actuel, fig. 2.2). Ce rayonnement, ayant l’énergie suffisante, aurait détruit les noyaux plus lourds au fur et à mesure de leur formation. Il aurait, par la suite, survécu à l’expansion universelle mais sa température équivalente continuerait de décroître en fonction inverse de la taille de l’Univers (fig. 1.6). Il est surprenant que pendant plus de 15 ans, personne n’ait cherché à vérifier ces conclusions théoriques. Quoi qu’il en soit la découverte de Penzias et Wilson est capitale car elle met en évidence un phénomène prévu par la théorie (c’est sans aucun doute l’argument le plus fort en faveur de la théorie du Big Bang) et montre que l’Univers est passé d’un état initial à « dominance radiative » dans lequel la majorité de l’énergie se trouvait sous forme de rayonnement à un état à « dominance matérielle » dans lequel la plus grande partie de l’énergie est contenue dans la masse des particules nucléaires.

Les images transmises par le satellite COBE (lancé en 1989 pour étudier le rayonnement fossile) ont aussi fortement contribué à valider la théorie du Big Bang. Tout d’abord dès sa mise en service, on observa que le spectre de la lumière fossile correspondait point par point à celui d’un corps noir, ce que prévoyait la théorie (fig. 1.6).

C’est un objet théorique caractérisé par un parfait équilibre thermodynamique et une isolation totale vis-à-vis du milieu extérieur de telle sorte que son rayonnement ne dépende que de sa température. La théorie du Big Bang prévoit que l’Univers opaque originel correspond à un tel objet

Encart 1.6 – Le corps noir

En second lieu, COBE permet de répondre à une des interrogations majeures de la théorie : comment expliquer le passage d’un état absolument homogène (donc stable) à l’Univers hétérogène actuel ? C’est-à-dire comment rendre compte de la naissance des étoiles et des galaxies ? À partir de 300 milliards d’observations dans différentes longueurs d’onde, une carte de rayonnement fossile

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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(c’est-à-dire une carte de l’Univers environ 300 000 ans après le Big Bang) a pu être établie en 1992, mettant en évidence des fluctuations minimes de températures de l’ordre de 5⋅10–6 degrés. Avec des fluctuations de cet ordre, la genèse des galaxies et des étoiles peut s’expliquer par la seule action de la force de gravitation (la théorie prévoyait des fluctuations de l’ordre de 10–6). Une telle coïncidence entre prédictions et observations a provoqué un regain d’intérêt pour la théorie du Big Bang dans sa variante dite « théorie de l’inflation » : 10–35 seconde après l’instant initial, alors que l’expansion de l’Univers se déroule tranquillement, il va se produire une phase de super-expansion (super Big Bang, entre 10–35 et 10–32 s, l’Univers voit ses dimensions augmenter d’un facteur 1050) qui va entraîner une grande homogénéité de l’ensemble. Le processus du Big Bang classique se continue et vers 300 000 ans le rayonnement fossile est émis tel que le satellite COBE a pu l’enregistrer. Il existait donc alors des inhomogénéités dans l’Univers avec des zones de concentration de matière séparées par des zones de moindre densité. Depuis COBE, des missions satellitaires (WMAP, Planck, BICEP2) et des observa-tions de radiotélescopes ont permis de préciser la carte du fond diffus cosmologique ( fig. 1.6).

Longueur d’onde (en cm)

Courbe théorique

Mesures e�ectuées par le satellite COBE

0,5 0,1 0,05Lum

inos

ité (1

0–4 e

rg/c

m2 .s

r.sec

.cm

–1)

1

0,4

C Planck, 2013

COBE WMAP PlanckA B

Figure 1.6 Le fond diffus cosmologique (rayonnement fossile).

A. Comparaison des mesures du rayonnement fossile effectué par le satellite COBE (carrés rouges) et du spectre du corps noir à 2,7 ˚K (courbe bleue). Cette figure montre que le rayonnement fossile suit exactement la loi du corps noir élaborée pour comprendre la thermodynamique.

B. Le fond diffus cosmologique : comparaison de la résolution de trois satellites principaux. Des cartes du fond diffus cosmologique sont produites par les radiotélescopes à terre et les satellites spatiaux, notamment le satellite américain WMAP (Wilkinson Microwave Anistropy Probe) lancé en 2001 et le

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Chapitre 1 ■ L’architecture de l’Univers

satellite européen Planck lancé le 14 mai 2009 par une fusée Ariane 5. Planck avait comme objectif de dresser une carte 20 à 30 fois plus précise que celles de COBE et WMAP grâce à son instrument principal HFI refroidi à 0,1 Kelvin. La collecte des données par HFI s’est achevée en janvier 2012 après avoir épuisé l’hélium destiné à refroidir ses détecteurs (des bolomètres).

C. Carte du fond diffus cosmologique (ou rayonnement fossile). Cette carte publiée en 2013 par les équipes scientifiques de la mission Planck nous montre une image du ciel (rayonnements millimé-triques) tel qu’il était 380 000 ans après le début de l’expansion. Les ondes de densité parcourant le fluide de l’Univers après l’inflation laissent leurs empreintes sous la forme de fluctuations de tempéra-tures variables selon les directions de l’observation. Ces fluctuations sont représentées sur ces cartes du ciel sous forme de taches colorées.

1.6 L’âge de L’univers

Une estimation de l’âge de l’Univers (l’unité est le milliard d’années ou Ga) peut être obtenue par trois approches indépendantes : le mouvement des galaxies, l’âge des plus vieilles étoiles (à partir de l’analyse de leurs ressources énergétiques) et l’âge des plus vieux atomes (à partir des techniques de radioactivité).

a) Le mouvement des galaxiesSi les galaxies s’éloignent les unes des autres avec une vitesse (V) qui est proportionnelle à leur distance (d), (Fig. 1.4), il est possible de calculer le moment où elles ont dû être rassemblées dans le passé. En effet, le rapport 1/H = d/V représente le temps de récession des galaxies soit une approxima-tion de l’âge de l’Univers. Suivant la valeur de la constante de Hubble (H) choisie, les différentes estimations sont comprises entre 15 et 20 Ga.

Les données sur l’amas de Virgo, relativement « proche » de la Terre, avaient abouti à des âges plus jeunes de l’ordre de 11,2 ± 0,9 Ga (1994), alors que des données sur des amas globulaires aboutis-saient à 16,5 ± 2 Ga (1991). Ces différences ne sont actuellement pas expliquées par les astrophysi-ciens. Les données issues des observations du télescope spatial Hubble tendent aussi vers 16 Ga.

Pour montrer la difficulté du problème, il faut rappeler que durant les années trente et quarante, l’estimation de la constante de Hubble était beaucoup plus élevée (170 km/s/Mpc) qu’actuellement (50 ≤ H ≤ 100) et conduisait à des âges de 2 Ga soit beaucoup moins que ce que donnait la radioactivité pour l’âge des plus vieilles roches terrestres.

b) Le fonctionnement stellaireL’âge des étoiles peut être estimé à partir de l’analyse des éléments chimiques qu’elles consomment pour assurer leur brillance. Toutes les étoiles n’ont pas la même durée de vie, les plus massives brillent plus mais ont une durée de vie plus courte. On admet que les étoiles se forment en groupes (amas d’étoiles) dans lesquels on trouve des étoiles de tous les types (des plus brillantes aux plus ternes), toutes nées ensemble au moment de la formation de l’amas. L’âge de l’amas est estimé d’après l’âge de la plus grosse des étoiles survivantes. Dans notre Galaxie, il existe des amas d’âges variés. Les plus vieux sont formés d’étoiles, dites de première génération (ou primitives), très pauvres en éléments chimiques lourds, sub-contemporaines de la formation de la Galaxie. Ils ont un âge compris entre 14 et 16 Ga. Des recherches sur les galaxies voisines ont abouti au même ordre de grandeur. Comme, dans la théorie de l’expansion universelle, les galaxies sont censées apparaître très tôt (de l’ordre du milliard d’années) après l’explosion initiale, cet âge paraît une bonne approximation de l’âge de l’Univers.

c) Les radio-isotopesC’est une extension des techniques de la radiochronologie qui, appliquées aux roches terrestres, lunaires et aux météorites, conduit à un âge de 4,55 milliards d’années pour la formation du Système

voir p. 9

Voir fig. 2.5

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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solaire. On peut reprendre ces données et chercher à les extrapoler plus loin dans le passé. Prenons, par exemple, deux radio-isotopes de l’uranium (235U et 238U), qui présentent chacun une période longue mais sensiblement différente (1 milliard et 6,5 milliards d’années), comme leur taux de désin-tégration est différent, leur rapport de concentration varie aux cours des temps. Le rapport 238U/235U est actuellement de 137,8 il n’était que de l’ordre de 10 au début du Tertiaire (65 Ma) et de 3 à la naissance de la Terre. En extrapolant la courbe jusqu’à un rapport de 1, on obtient un âge de 15 Ga. De même, on constate actuellement que l’isotope 187 de l’osmium est beaucoup plus abondant que l’isotope 186. Cet excès de 187Os provient de la désintégration du rhénium (187Re). Connaissant l’abondance cosmique et la période du 187Re, il devient possible de calculer le temps nécessaire pour créer l’excès de 187Os. On obtient alors un âge de 17 ± 4 Ga. L’âge moyen de l’Univers, le plus communément admis actuellement, à partir des différentes techniques radiochronologiques, est de 15 ± 5 Ga.

Ainsi trois approches indépendantes, basées sur des processus physico-chimiques différents, abou-tissent à des âges concordants. Cette concordance est une présomption forte en faveur de la théorie du Big Bang. L’estimation la plus précise a été obtenue en 2015 à partir des données du satellite Planck (ESA) combinées à celles, plus anciennes, des satellites WMAP et COBE. On obtient un âge de 13,798 ± 0,037 milliards d’années (fig. 2.4).

À retenir

➤ L’Univers, qui présente une architecture hiérarchisée : galaxies (formation des étoiles), amas et super-amas, est une structure en expansion qui paraît constituée de seulement 4 % de matière baryonique visible, de 23 % de matière noire et de 73 % d’énergie noire. La présence de matière baryonique invisible (par les méthodes spectroscopiques classiques) a été détectée, son importance est en cours d’évaluation.

➤ L’Univers serait né à partir d’une explosion initiale, le Big Bang, suivie d’une expansion ralentie par la gravité. Ensuite la force de répulsion à grande échelle aurait pris progressivement le dessus et l’Univers serait entré dans une phase d’expansion accélérée éternelle.

➤ La découverte du rayonnement fossile (fond diffus cosmologique et la concordance des âges (environ 13,8 Ga) obtenus à partir de la récession des galaxies, du fonctionnement stellaire et des radio-isotopes sont des arguments forts en faveur de la théorie du Big Bang.

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La nucLéosynthèse

◗  Particules élémentaires, modèle standard, quarks, leptons, bozons, nucléosynthèse, cycle de Bethe.

◗  Phases cosmique, stellaire, interstellaire et planétaire.

◗  Diagramme de Hertzsprung-Russell, phase T. Tauri, supernova, pulsar.

Une des forces de la théorie du Big Bang est de pouvoir expliquer assez fidèlement la proportion actuelle des éléments chimiques dans l’Univers à partir d’un modèle de

synthèse des noyaux des éléments chimiques. Pour être valide, la théorie doit notamment expliquer trois données principales :• L’hydrogène est l’élément le plus abondant (90 % des atomes de l’Univers sont de l’hy-

drogène) et moins d’un atome sur mille n’est ni de l’hydrogène ni de l’hélium (fig. 2.2).• Il existe une décroissance progressive de l’abondance des éléments en fonction des

numéros atomiques croissants.• Trois éléments échappent à cette corrélation, le lithium, le béryllium et le bore qui,

malgré leur petit numéro atomique, sont parmi les éléments les moins abondants de l’Univers (fig. 2.2).

2.1 La structure de La matière : particuLes, noyaux et atomes

La physique des particules s’est développée au cours du XXe siècle notamment grâce à l’étude des rayons cosmiques et surtout par l’analyse des expériences de collisions expérimentales réalisées dans les accélérateurs comme le LHC (Large Hadron Collider) du CERN (Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire) à Genève1. Pourquoi accélérer et faire entrer en collision des particules ? La formule d’Einstein E = MC2 montre l’équivalence entre masse et énergie. Lorsque des particules entrent en collision, l’énergie qu’elles transportent est utilisée pour créer de nouvelles particules (dont la durée de vie est parfois très brève car elles sont souvent instables). Plus l’énergie disponible est élevée plus ces dernières seront lourdes et nombreuses. Pour classifier les centaines de types de parti-cules ainsi observées et comprendre les liens et les interactions les reliant, une théorie a été élaborée dans les années 1960-1970 : Le Modèle Standard qui, s’il n’explique pas tout (cf. infra), a résisté jusqu’à maintenant à tous les tests expérimentaux. Le modèle standard suppose l’existence de douze

1. Pour plus d’informations, le lecteur pourra consulter l’excellent ouvrage collectif « Passeport pour les deux infinis », Dunod éd. 2016.

CH

AP

ITR

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2

MOTS-CLÉS

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Partie I ■ La Terre : une planète dans l’Univers

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types de particules plus ou moins sensibles à quatre forces fondamentales transmises par quatre parti-cules médiatrices ou bosons dont seules trois ont pu être mises en évidence (cf. infra).

2.1.1 Les forces fondamentales régissant l’univers

L’ensemble des phénomènes de l’univers peut être décrit grâce à quatre interactions ou forces fonda-mentales. Deux d’entre elles, la gravité et l’électromagnétisme nous sont familières, du fait de leur implication dans des processus de notre vie courante (chute des corps, électricité, magnétisme). Les deux autres, dites interactions « fortes » et « faibles » interviennent dans le monde de l’infi niment petit. L’interaction « forte » est responsable de la cohésion des noyaux atomiques. L’interaction « faible » gouverne les processus de désintégrations radioactives.

Chacune de ces forces est transmise par une ou plusieurs particules médiatrices ( bosons) dont la masse gouverne la portée, plus ou moins grande, de l’interaction (plus leur masse est grande, plus la portée est courte, tableau 2.1 et fi g. 2.1).

Les caractéristiques des forces fondamentales :

les quatre forces qui agissent sur les particules élémentaires sont classées par intensité décroissante par rapport à celle de la force « forte » prise arbitrairement comme unité.

TypeIntensité relative

Particules médiatrices (bosons)

Processus principaux dans lesquels ces forces sont impliquées

Force forte 1 Gluon Cohésion des noyaux atomiques

Force électromagnétique

10–3 Photon Cortège électronique entourant le noyau

Force faible 10–5 Boson Z0, W+, W− Désintégration radioactive bêta

Gravitation 10–38 Graviton ? particule non encore observée

Chute des corps, astres, évolution des galaxies

2.1.2 Les particules élémentaires : Quarks et Leptons

On a découvert des centaines de types de particules sensibles à l’interaction « forte » regroupées sous le terme d’hadrons dont font partie les constituants des noyaux atomiques (nucléons) : les protons et les neutrons. La diversité des hadrons résulte du fait qu’ils sont constitués par la combinaison de constituants plus élémentaires les quarks qui sont maintenus ensemble par des gluons (responsables de l’interaction « forte »).

Il existe six types de quarks : les quarks u (up) et d (down) qui constituent les protons et les neutrons des noyaux atomiques, le quark « étrange » observé dans les rayons cosmiques et les quarks « charme », « bottom » et « top » observés dans les accélérateurs (fi g. 2.1). À chaque quark correspond une antiparticule ou antiquark dont l’association constitue l’antimatière. Les quarks ont des charges électriques de −1/3 pour les quarks down (d) ou de + 2/3 pour les quarks up (u).

Les quarks s’associent pour former les « particules composites » ou hadrons que l’on peut regrouper en deux types les baryons (pour les assemblages de trois quarks) et les mésons (pour les assemblages quark/antiquark). Ainsi le proton (charge électrique +1) est un baryon constitué de deux quarks up (charge +2/3) et d’un quark down (charge −1/3) tandis que le neutron (charge électrique nulle) est un assemblage de deux quarks down et d’un quark up.

Les leptons (fi g. 2.1) sont aussi une famille de six particules élémentaires : l’électron, le muon, le tau et leurs trois neutrinos associés. Ces particules ont des propriétés voisines notamment elles ne sont pas sensibles à l’interaction forte.

TA

BL

EA

U

2.1

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