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Livret n° Maintien de l’ordre 6

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Livret n°

Maintien de l’ordre

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Introduction

« Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation

ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. »Article 10 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789.

La sécurité est un droit fondamental et l’une des conditions d’exercice des libertés individuelles et collectives. L’État a le devoir d’assurer la sécurité en veillant à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l’ordre publics, à la protection des personnes et des biens. Le maintien de l’ordre répond à l’équilibre entre, d’une part, la liberté de manifester et d’exprimer une opinion et, d’autre part, la préservation de l’intégrité physique des manifestants et de ceux qui ne le sont pas (les commerçants, les journalistes, les forces de sécurité intérieure, etc.) mais également les autres libertés individuelles comme la liberté de circulation.

Depuis plusieurs années, on constate plusieurs évolutions significatives en matière de maintien de l’ordre :

• Une augmentation importante du nombre de manifestations sur le territoire national : de nombreuses manifestations ont lieu régulièrement en France. La très grande majorité ne pose d’ailleurs aucune difficulté tant pour les organisateurs que pour les forces de l’ordre. Mais elles augmentent considérablement depuis le début des années 2010. Ainsi 32 126 opérations de maintien de l’ordre ou services d’ordre ont eu lieu en 2019 en zone de compétence de la police nationale contre 27 098 l’année précédente, soit une augmentation de 18,5 % en un an. Sur le plus long terme, la préfecture de police en a encadré 6 933, ce qui représente une augmentation de 54 % par rapport à 2007.

• Une diminution importante des effectifs spécialisés dans le maintien de l’ordre : entre 2007 et 2012, la révision générale des politiques publiques (RGPP) a entraîné la suppression de 13 000 postes dans la police et la gendarmerie. Ces suppressions ont particulièrement touché les effectifs spécialisés dans le maintien de l’ordre. Ainsi, plus de 2 300 postes ont été supprimés au sein des escadrons de gendarmerie mobile (ayant conduit à la dissolution de 15 EGM) et quelque 1 400 postes ont été supprimés au sein des compagnies républicaines de sécurité (CRS). En 2020, le ministère de l’Intérieur compte dorénavant 12 446 gendarmes affectés en EGM et 12 215 policiers affectés en CRS (8 200), en compagnie d’intervention à la préfecture de police (1 340) et en CDI/CI/BI/SI de la direction centrale de la sécurité publique (2 255).

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• Une émergence de nouveaux acteurs, de nouveaux modes de contestation et d’une plus grande violence : zadistes, casseurs, éléments radicaux de l’ultragauche et l’ultradroite, etc., autant de nouveaux profils de manifestants qui viennent concurrencer les syndicalistes dans les cortèges. Ces manifestants particuliers rompent avec les schémas traditionnels en s’agrégeant aux manifestants pacifiques de façon plus ou moins structurée mais généralement très violente en constituant notamment des « blacks blocs ». Ils n’hésitent alors pas à aller au contact des forces de l’ordre et rechercher l’affrontement au sein des cortèges. Ces formes radicales se conjuguent avec des mobilisations caractérisées par leur imprévisibilité, l’absence fréquente de déclaration et de service d’ordre ainsi qu’un refus de l’exercice codifié des manifestations.

• L’accroissement des phénomènes de violences urbaines (VU) sur l’ensemble du territoire : ces VU ne concernent plus que les grandes agglomérations mais aussi des zones jusque-là préservées. L’usage des mortiers d’artifice, qui était encore sporadique il y a une dizaine d’années, est devenu fréquent, en plus des jets de projectiles et autres engins incendiaires.

• Une médiatisation accrue des opérations de police : la diffusion d’images en temps réel par les médias audiovisuels ou les réseaux sociaux est devenue aujourd’hui quasiment la norme. L’enregistrement photo ou vidéo des opérations de police a un impact important, notamment sur la gestion du maintien de l’ordre et sur l’ensemble des acteurs. Ainsi, lorsque des violences surviennent, elles sont rapidement relayées dans les médias sociaux. Cette hypermédiatisation des événements en temps réel contribue à radicaliser le rapport de force entre policiers et gendarmes d’un côté, manifestants de l’autre.

Face à ce nouveau contexte, les difficultés, les incompréhensions, voire les polémiques se sont multipliées, altérant ainsi l’indispensable lien de confiance entre les forces de l’ordre et la population :

• La communication entre les forces de l’ordre et les manifestants est devenue de plus en plus difficile : si les organisations syndicales ou politiques demeurent des acteurs majeurs des manifestations, les interlocuteurs des autorités publiques sont moins voire pas identifiés et les relations avec les services d’ordre sont de fait moins formalisées. Ainsi, le dialogue préventif entre les autorités et les organisateurs en amont des manifestations n’est plus systématique, et les échanges en cours de manifestations sont trop rares. Cela génère un manque de lisibilité du maintien de l’ordre pour l’ensemble des acteurs, notamment dans sa mise en œuvre et ses actions, et aggrave donc les tensions entre forces de l’ordre et manifestants.

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• L’emploi de la force par les policiers et les gendarmes fait régulièrement débat. Il est pourtant encadré par des dispositions du Code pénal et du code de la sécurité intérieure. Au-delà même des manquements déontologiques réels ou supposés, la notion même de « violence légitime » est régulièrement mise en cause par les acteurs des manifestations. Il en va de même s’agissant de l’utilisation des armes durant les manifestations. Une situation d’autant plus préoccupante que les représentants des forces de l’ordre apparaissent des cibles pour les manifestants les plus violents et font l’objet d’une violence croissante et inédite. De fait, depuis 2017, ce sont plus de 4 000 policiers et gendarmes des unités de maintien de l’ordre qui ont été blessés en mission.

• Un manque de transparence est reproché aux forces de l’ordre. Se développe le soupçon d’une opacité organisée dont le but serait de dissimuler un usage disproportionné de la force par les policiers et les gendarmes, en rendant impossible leur identification. De la même façon, l’action des inspections générales de la police nationale et de la gendarmerie est régulièrement mise en cause en raison notamment de l’absence de communication sur les suites données aux différents signalements effectués. Cette situation nourrit ainsi une spirale de défiance croissante.

• L’augmentation significative de l’activité de maintien de l’ordre entraîne de facto des difficultés capacitaires. Les compagnies républicaines de sécurité (CRS), les escadrons de gendarmerie mobile (EGM) et les compagnies d’intervention de la PP ne peuvent faire face à l’intégralité de la charge. Depuis 2018, les unités de force mobile ont été engagées près de 200 jours par an, ne permettant plus d’assurer les formations collectives et générant une dette de repos et permissions.

• Les VU qui se multiplient sur le territoire obligent des policiers ou des gendarmes insuffisamment formés et équipés à intervenir en complément des brigades anticriminalité en police (BAC) ou pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) pour rétablir l’ordre dans les quartiers, souvent sans renforts immédiats. Les effectifs engagés sur ces opérations se trouvent donc, dans l’urgence, à devoir faire face en grande infériorité numérique à des déchaînements de violences qui obligent à faire un usage plus intensif de moyens collectifs de défense.

Tout ne sera pas traité dans cette table ronde. Certains sujets sont renvoyés à d’autres chantiers : celui de la captation vidéo et celui dédié au contrôle interne notamment. Nous évoquerons les conditions de mise en œuvre de la nouvelle doctrine définie dans le Schéma national de maintien de l’ordre (SNMO) pour protéger la liberté de manifester, les Français et leurs biens, ainsi que les moyens d’améliorer encore la confiance de la population à l’égard des forces de l’ordre.

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État des lieux

Véritable révolution : pour la première fois, le ministère de l’Intérieur s’est doté en 2020 d’un document de doctrine en matière de maintien de l’ordre commun à l’ensemble de ses forces. Le Schéma national de maintien de l’ordre (SNMO) du 16 septembre 2020 entérine ainsi le nouveau cadre d’emploi des unités de force mobile et modernise les pratiques du maintien de l’ordre. Cette nouvelle doctrine est plus protectrice pour les manifestants et plus ferme avec les auteurs de violences. Le SNMO repose sur le principe de tactiques plus mobiles et réactives et un dialogue permanent avec les manifestants.

Plusieurs évolutions sont portées par le schéma afin de répondre aux objectifs fixés : développement de la mobilité et des capacités de projection des forces de sécurité, plus grande réactivité pour faire cesser les troubles à l’ordre public, développement de l’information, reconnaissance de la place particulière des journalistes, contribution des unités hors forces mobiles, recherche de transparence dans l’action des forces, modernisation des sommations, intégration d’un dispositif judiciaire, confirmation de l’intérêt des moyens et armes de force intermédiaire tout en adaptant leur emploi, recherche de solutions moins vulnérantes, mise en place d’un référent chargé de l’appui aux victimes auprès de chaque préfet, etc.

Le schéma national est d’ores et déjà décliné en engagements concrets avec notamment :

• le recrutement sur le quinquennat de 600 effectifs supplémentaires dédiés spécifiquement au maintien de l’ordre (CRS, EGM, CI PP) permettant à toutes les unités de revenir à 4 pelotons ou 4 sections ;

• le remplacement de 250 véhicules de la gendarmerie mobile et 120 véhicules des CRS ;

• la modernisation et le renforcement des capacités en véhicules de reconnaissance de la DOPC (64 véhicules pour 2022 et 2023) ;

• l’acquisition de 7 engins lanceur d’eau par la police nationale ;

• le renouvellement du parc blindé de la gendarmerie nationale.

Cette nouvelle stratégie s’accompagne d’un renforcement du potentiel opérationnel des unités spécialisées dans le maintien de l’ordre et d’un effort important pour renouveler le parc automobile et les équipements.

Début juin, le Conseil d’État a annulé quatre dispositions concernant les manœuvres d’encerclement des manifestants et certaines règles applicables aux journalistes. Le ministère de l’Intérieur va modifier le SNMO et ses annexes pour prendre en compte cette décision.

Depuis sa parution en septembre 2020, le ministre de l’Intérieur a mis en place un comité de suivi de la mise en œuvre des mesures entérinées. En parallèle, les réflexions ont été poursuivies par une commission d’enquête de l’Assemblée nationale, présidée par Jean-Michel Fauvergue. Son rapport sur l’état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l’ordre a été rendu le 20 janvier 2021 et a formulé 35 recommandations sur le cadre juridique, le traitement des enquêtes judiciaires mettant en cause

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les policiers et les gendarmes, l’évolution des inspections générales de la police et de la gendarmerie, la doctrine même de maintien de l’ordre ou encore la déontologie.

Jean-Marie DELARUE, conseiller d’État, a présidé une commission indépendante chargée de proposer des mesures afin de mieux concilier le travail des journalistes et celui des forces de l’ordre, notamment lors de manifestations ou opérations de maintien de l’ordre mais aussi dans les nombreuses situations où les forces de l’ordre constituent pour les médias une source d’information. Après plus de trois mois d’auditions, cette commission dresse le constat d’une relative dégradation des relations entre la presse et les forces de sécurité intérieure qui s’est cristallisée principalement sur les opérations de maintien de l’ordre. Différentes pistes sont formulées pour améliorer ces relations, notamment en promouvant plus d’échanges entre forces de l’ordre et journalistes, en rappelant le principe de liberté de la presse, en formant les policiers et les gendarmes à la prise en compte des journalistes, ou encore en garantissant leur protection respective.

Le ministère de l’intérieur doit donc continuer d’adapter sa capacité de manœuvre aux nouvelles menaces et à l’accroissement de l’activité opérationnelle. Il doit donner les moyens nécessaires pour une réponse plus efficace et plus transparente.

Éclairage international

L’exemple allemand de quasi-contractualisation avec les organisateurs de manifestation

En dehors des actions violentes de groupes d’individus déterminés, les relations entre les forces de l’ordre et les

manifestants en Allemagne sont normées par la négociation préalable avec les organisateurs et la communication permanente.

Andreas BACKHOFF, coordonnateur des unités de maintien de l’ordre des länder au ministère fédéral de l’Intérieur (BMI), exposera les différentes étapes de la gestion des manifestations en Allemagne :

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• établissement de relations préalables à la manifestation avec les organisateurs et négociation sur l’organisation de l’évènement ;

• modalités de communication avec les organisateurs durant la phase préparatoire et au moment de la manifestation ;

• formation des personnels chargés de la « désescalade » ;

• prise en compte des groupes violents au sein d’une manifestation ;

• utilisation de dispositifs ou d’engins spécifiques au cours de manifestations violentes.

Les pistes du Beauvau de la Sécurité

Dans la continuité du schéma national du maintien de l’ordre et des commissions en cours, plusieurs pistes de réflexion peuvent être envisagées dans le cadre de la table ronde dédiée au maintien de l’ordre.

Comment adapter l’emploi des forces pour faire face aux nouvelles exigences du maintien de l’ordre ?

1. en améliorant la communication à destination des manifestants

La foule ne comprend pas toujours les manœuvres et les intentions des forces de l’ordre en cours de manifestation. Et de fait, les manifestants ne savent pas toujours ce qu’ils doivent faire.

La communication à destination du public des manifestations doit devenir une des priorités des autorités habilitées à l’emploi de la force présentes sur le terrain, mais aussi des directeurs du service d’ordre. Cette communication, tout au long de la manifestation, doit permettre de transmettre des éléments d’information et d’ambiance. Pour ce faire, les autorités utiliseront le nouveau

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dispositif de liaison et d’information prévu par le SNMO, en s’appuyant sur des haut-parleurs adaptés, des panneaux à message variable, ou encore des SMS envoyés automatiquement à toutes les personnes présentes sur le secteur de la manifestation (diffusion cellulaire dite technique du « cell broadcast »).

En outre, la modernisation des sommations (article R 211-1 du CSI), telle que prévue par le SNMO, permettra une meilleure compréhension des instructions par les manifestants.

2. en accentuant la formation

La DGPN et la DGGN doivent systématiser et sanctuariser les formations continues au maintien de l’ordre et à la gestion des violences urbaines pour les unités spécialisées (CRS et EGM), mais aussi pour toutes les unités concourantes (CDI, BAC, PSIG…).

La formation collective des effectifs impliqués dans le maintien de l’ordre est essentielle pour assurer leurs missions dans un contexte de plus en plus violent et difficile. Leur robustesse est un gage d’efficacité face aux nouvelles menaces.

Pour répondre aux nouveaux besoins en formations, des réflexions capacitaires au niveau de la police nationale pourraient être menées. À ce stade, seul le centre national de la gendarmerie à Saint-Astier permet l’entraînement au maintien de l’ordre et aux techniques d’intervention. Est-il possible de fédérer les mutualisations sur ce site ? Faut-il créer un nouveau site de formation et d’entraînement au maintien de l’ordre et aux violences urbaines ? Quoi qu’il en soit, il faut favoriser l’harmonisation des pratiques professionnelles et faciliter l’interopérabilité des forces concourant au maintien de l’ordre.

Ces formations devront intégrer des modules dédiés à la déontologie, ainsi qu’à la gestion du stress et du discernement, mais aussi, comme le préconise la commission DELARUE, à la prise en compte des journalistes dans les opérations de maintien de l’ordre.

La formation des cadres supérieurs, responsables de l’ordre public (responsables de l’ordre public, directeurs de service d’ordre, autorités civiles, chefs de secteur opérationnel et commandant de la force publique), pourrait également être renforcée sur les aspects stratégiques et tactiques du maintien de l’ordre (conception des dispositifs, définition de la stratégie et des orientations opérationnelles). L’apport de l’Institut des hautes études du ministère de l’Intérieur (IHEMI) pourrait être intéressant en la matière.

3. en améliorant la réactivité et la flexibilité

La rapidité et la réactivité de déplacement des unités engagées en maintien de l’ordre constituent un facteur important d’efficacité. Les forces de l’ordre doivent s’adapter et répondre au caractère soudain des événements de type insurrectionnel (violences urbaines en situation dégradée, missions de

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maintien de l’ordre à fort engagement ou situation de crise de forte intensité) par une réactivité opérationnelle capable de créer un impact psychologique fort sur le terrain. Pour répondre à cette exigence, la préfecture de police a notamment créé les brigades de répression de l’action violente (BRAV et BRAV-motos) au sein de ses unités dédiées au maintien de l’ordre afin d’allier réactivité, mobilité et capacité d’interpellation.

La création de dispositifs d’intervention augmentée de la gendarmerie (capacité de mobilisation 24/7 de 2 blindés, un EGM, un détachement d’alerte de l’antenne GIGN et un état-major tactique dans chacune des 7 zones de défense) et la réorganisation de la CRS 08 (capacité d’intervention 24/7 sur le ressort du territoire métropolitain) permettront d’intervenir rapidement en tout point du territoire en cas de troubles graves à l’ordre public.

Développer, dans la police nationale, l’interopérabilité et l’appui des unités de sécurité publique permettrait d’améliorer la réactivité grâce à la connaissance fine du territoire. La sécabilité de leurs unités permet de s’adapter aux différents schémas tactiques, sous réserve de l’optimisation de la chaîne de commandement et d’une formation adaptée.

4. en prenant mieux en compte les journalistes

Le SNMO réserve une place particulière à la question de la présence des journalistes dans les manifestations. Les réactions qui ont fait suite à sa publication ont montré la nécessité de préciser un certain nombre d’éléments. La commission présidée par JM DELARUE était chargée de faire des propositions en la matière.

Il en ressort la nécessité pour les forces de l’ordre de mieux protéger l’intégrité physique des journalistes et leur liberté d’informer en captant

des images (principe même de la liberté de la presse). En contrepartie, il est demandé aux journalistes d’améliorer

leur identification par les forces de l’ordre dans les manifestations, condition essentielle pour pouvoir

les protéger et leur permettre de travailler.

Au-delà de ces temps de manifestation, il apparaît indispensable, pour retisser des

liens de confiance, d’institutionnaliser des échanges réguliers entre les forces de l’ordre et la presse, tant au niveau central que territorial. Cela doit permettre de rapprocher des cultures très différentes et de faire comprendre les contraintes respectives.

Un travail spécifique devra être mené, sous l’égide des ministères de l’Intérieur et de la Culture, pour mettre en œuvre les propositions de cette commission

DELARUE.

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Comment se donner les moyens d’une réponse adaptée aux nouveaux enjeux ?

L’objectif est de moderniser le maintien de l’ordre sur l’ensemble du spectre des moyens (matériels, techniques, aide à la décision, doctrine, etc.) dans le prolongement du SNMO afin d’obtenir une réponse plus efficace et acceptée.

1. en adaptant l’emploi des effectifs spécialisés à la réalité du contexte sécuritaire

Les unités de forces mobiles (UFM) connaissent un niveau d’emploi important ces dernières années et particulièrement ces derniers mois sous l’effet des nécessités du maintien de l’ordre (mouvement des gilets jaunes, contestation de la proposition de loi sécurité globale), mais aussi des enjeux de lutte contre l’immigration clandestine ou encore des contrôles des mesures prises contre la COVID 19.

Cet emploi important n’est pas sans conséquence sur la disponibilité de forces dans le cadre d’un événement imprévu sur les missions de sécurisation traditionnellement confiées à ces UFM en appui des services territoriaux de la police et de la gendarmerie nationales.

Cet engagement conséquent, outre le fait qu’il entraîne de la fatigue et du stress pour les effectifs, empêche les personnels de bénéficier de l’intégralité de leurs droits à congés/permissions et de leurs formations de recyclage obligatoires.

Face à ce constat, le ministre de l’Intérieur a confié une mission à l’inspection générale de l’administration (IGA) pour faire des propositions pour un emploi plus optimal des UFM dans le contexte sécuritaire actuel et à venir (avec notamment l’organisation en France de la coupe du monde de rugby 2023 et des Jeux olympiques et paralympiques 2024). Cette mission devra notamment objectiver l’évolution de l’engagement des forces mobiles sur ces 20 dernières années, faire des propositions sur les missions permanentes qui leur sont assignées aujourd’hui, ou encore apprécier l’effort de remise à niveau des UFM entrepris depuis 2017 dans le cadre du plan 10 000 emplois. Les conclusions de cette mission sont attendues courant juin 2021.

2. en clarifiant le cadre juridique

Le cadre juridique de l’encadrement des manifestations est d’inspiration libérale. Il s’est néanmoins progressivement adapté pour concilier la protection effective de la liberté fondamentale de manifester avec les impératifs d’ordre public et de sécurité des personnes et des biens. Récemment, le Parlement a adopté une proposition de loi visant à renforcer et à garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations avec notamment plusieurs mesures tendant à compléter les outils préventifs et répressifs à la disposition des forces de sécurité et du juge judiciaire afin de prévenir et de sanctionner les infractions commises lors des manifestations.

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Pour autant, certaines pratiques des forces de l’ordre restent régulièrement contestées. Il semble donc opportun de poursuivre les travaux, en lien avec le ministère de la justice, sur le volet du traitement des enquêtes judiciaires ou encore de la caractérisation du délit d’attroupement.

3. en modernisant les équipements

La modernisation des équipements est essentielle. Au-delà des commandes de véhicules et de matériels d’ores et déjà annoncées dans le cadre de la mise en œuvre du SNMO, il s’agit de réfléchir à des équipements innovants ayant pour objectif d’alléger les forces de l’ordre, d’offrir une grande modularité et gagner en agilité.

La mise en œuvre du concept intégré des salles de commandement d’ordre public de la police nationale pourra se traduire par la création d’un pool de référents de salle de commandement ordre public (SIC OP). Les personnels ressources dont l’expertise est reconnue pourraient former in situ des profils détectés au sein des services de police afin de constituer un pool de référents. En parallèle, la formation et la qualification des opérateurs radio, de superviseur vidéo et de physionomistes sont essentielles pour valoriser leurs responsabilités dans la conduite des maintiens de l’ordre.

Les moyens numériques modernes sont utiles à la conduite des opérations : une cartographie intégrée et multimodale (vidéo protection, géolocalisation et messagerie) pour transmettre des instructions ciblées, des interfaces tactiles de pilotage des dispositifs pour aider la manœuvre, l’amélioration des moyens technologiques de communication et la procédure radio, etc.

4. en rendant l’action des forces de l’ordre plus transparente

À ce jour, les policiers et gendarmes engagés en opération de maintien de l’ordre ne sont pas toujours identifiables. Cela est souvent reproché aux forces de l’ordre car les enquêtes en cas de manquement réel ou supposé à la déontologie sont rendues inopérantes par l’absence d’identification1.

Comme prévu par le SNMO, il apparaît nécessaire d’harmoniser les signes d’identification des forces engagées pour améliorer la transparence de l’action et répondre aux besoins opérationnels. Les signes distinctifs de reconnaissance pourraient être inscrits sur le casque, les boucliers, les dossards à porter sur la tenue de maintien de l’ordre et les véhicules.

Cette ambition de transparence pourrait également s’appuyer sur la généralisation de l’équipement en caméra piéton (cf. table ronde sur la captation vidéo).

1 La question du contrôle interne par l’IGPN et l’IGGN de l’action des policiers et des gendarmes sera abordée à l’occasion d’une table ronde ad hoc.

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Cela pourrait également se traduire par une modernisation du code de déontologie de la police et de la gendarmerie pour préciser les règles spécifiquement applicables aux opérations de maintien de l’ordre, dans un souci d’apaisement des tensions avec les manifestants.

Enfin, comme on le verra dans le chantier dédié au contrôle interne, il est nécessaire que les autorités donnent une meilleure information et une plus grande lisibilité sur les réponses apportées par l’IGPN et l’IGGN afin d’éviter les suspicions, et contribuer, ainsi, au renforcement de la confiance dans le rapport des citoyens à l’égard des forces de l’ordre.

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