Livret Harmonium

AVRIL 2008

L’HARMONIUM

ALEXANDRE PERE ET FILS

N°89968

PRESERVATION

&

RESTAURATION

LIVRET DE PRESENTATION

L’HARMONIUM ALEXANDRE PERE ET FILS N°89968

Xavier POULAIN / 30 Avril 2008



Table des matières Table des matières.................................................................................................................... 3 Introduction .............................................................................................................................. 4 Pourquoi s’intéresser aux harmoniums ? .............................................................................. 5 Bref historique : splendeur et déchéance ............................................................................... 6

Hier : la genèse de l’harmonium ......................................................................................................... 6 Aujourd’hui : le retour en grâce ?........................................................................................................ 7

Fonctionnement d’un harmonium.......................................................................................... 9 La soufflerie ........................................................................................................................................ 9 Les registres....................................................................................................................................... 10 Le clavier........................................................................................................................................... 10 Les anches ......................................................................................................................................... 11

Coupe d’un harmonium......................................................................................................... 12 Cheminement de l’air à travers l’instrument ..................................................................................... 12

Description de l’harmonium Alexandre n°89968................................................................ 13 Caractéristiques ................................................................................................................................. 13 Composition ...................................................................................................................................... 13 Remarques ......................................................................................................................................... 14 Historique de l’instrument................................................................................................................. 14 Quels furent les lieux de sa carrière ?................................................................................................ 17

Préservation et restauration.................................................................................................. 18 La restauration en photos et en commentaires .................................................................................. 18

Les registres de l’harmonium n°89968................................................................................. 23 Composition ...................................................................................................................................... 23 Description des registres ................................................................................................................... 24

La manufacture Alexandre Père et Fils ............................................................................... 26 Son histoire........................................................................................................................................ 26 Ses adresses ....................................................................................................................................... 26

Les autres instruments de la collection ................................................................................ 28 Harmonium de Salon M. Kasriel....................................................................................................... 28 Guide Chant, M. Kasriel.................................................................................................................... 29

Remerciements ....................................................................................................................... 30 Bibliographie........................................................................................................................... 30

Livres................................................................................................................................................. 30 Quelques sites internet....................................................................................................................... 30



Introduction L’harmonium Alexandre n°89986 provient de l’église Saint-Pierre du Martroi à Orléans, en centre ville, où il a terminé sa carrière d’accompagnement liturgique dans les années 1990, avant d’être rem-placé par un orgue électronique, lui même remplacé par un orgue à tuyaux. En 2004, à l’occasion de travaux de réfection dans l’église, le clergé a souhaité se séparer de cet har-monium. Son bon fonctionnement, son bon état de conservation malgré son âge, sa qualité sonore et son ancienneté justifiaient pleinement sa préservation. C’est le 4 Décembre 2004 que le vénérable instrument de musique quitta l’église qui l’abritait depuis plusieurs décennies. L’objectif de ce modeste livret est, à travers la présentation de cet instrument restauré, de faire redé-couvrir au public l’univers de l’harmonium, de contribuer à sortir ces instruments de l’oubli dans le-quel ils s’étaient tus, et de participer à la sauvegarde de ces témoins d’un XIXe Siècle romantique et créatif.

Xavier POULAIN



Pourquoi s’intéresser aux harmoniums ? Mais…d’où vient mon attrait pour les harmoniums, moi qui ne suis pas musicien mais seulement mé-lomane ? Comment peut-on s’y intéresser ? Le son et la musique, d’abord ! Les orgues à tuyaux me passionnaient déjà, depuis l’adolescence. Le premier harmonium que j’ai entendu de ma vie, je l’ai acheté : c’est un petit guide chant Kasriel trouvé dans un bric-à-brac Emmaüs dans la région lyonnaise. Son son doux et plaintif m’a totalement séduit. Peu de temps après, j’ai découvert les enregistrements de Joris Verdin, qui ont achevé ma conversion. Ensuite, en découvrant et explorant le sujet, j’ai été stupéfié par l’ingéniosité et la qualité de la fac-ture, par l’inventivité des facteurs du XIXe Siècle, par la modernité de l’approche commerciale et in-dustrielle à cette époque, par la richesse de l’étendue sonore et des possibilités et par la beauté de certains meubles souvent très travaillés. Surtout, l’harmonium est un très riche témoin de ce XIXe Siè-cle que j’affectionne tant. Comme pour l’orgue, l’harmonium est au carrefour de l’Histoire, de l’Art et de la Technique. Entretemps, j’ai pu acquérir un petit instrument aspirant Kasriel de « type américain » et enfin un très bel harmonium Alexandre typique de 4 ½ jeux, qui représente presque à mes yeux le nec plus ultra de l’harmonium de salon du milieu du XIXe Siècle, juste derrière les Debain ou les Mustel plus renom-més. Ma collection est actuellement limitée par la taille de mon appartement : un F3 ancien de 60m2 en plein centre-ville d’Orléans ! Néanmoins, bien que réduite, cette collection illustre bien la diversité de la facture et de l’utilisation des harmoniums.



Bref historique : splendeur et déchéance L’objet de ce paragraphe n’est pas de parcourir l’évolution technique et artistique de l’harmonium - il existe des publications à ce sujet - mais de mettre en lumière les raisons de son succès rapide puis de son oubli.

Hier : la genèse de l’harmonium La consultation de n’importe quel dictionnaire nous apprend que l’harmonium, instrument à anches li-bres, soufflerie et clavier, est une invention du François Alexandre-François Debain (1809-1877) qui déposa un brevet en 1840. Cependant, des précurseurs avaient déjà réalisé quelques instruments pré-sentant les caractéristiques « classiques » de l’harmonium : citons parmi les plus importants l’orgue-expressif de Gabriel-Joseph Grenier (1756-1837), inventé en 1810, et le Poïkilorgue du célèbre facteur d’orgues Aristide Cavaillé-Coll (1811-1899). Bien qu’il fut d’abord une appellation commerciale déposée réservée aux instruments de Debain, le nom « Harmonium » désigna rapidement tous les instruments tels que nous les connaissons au-jourd’hui : instrument de musique à clavier, dont le son est créé par le passage d’air à travers des an-ches libres, et à soufflerie, généralement mue par des pédales. La maison Alexandre, par exemple, ap-pelait ses instruments « orgues-melodium ». Avec la naissance du courant romantique, la fin du XVIIIe Siècle et le début du XIXe siècle ont vu naître la quête d’une musique plus expressive, plus dynamique, riche en nuances, de sons plus chauds et plus sensuels, c’est à dire d’une musique permettant de traduire et d’exalter tous les sentiments et émotions humains. C’est ainsi que, dans les salons, le Piano-Forte avait supplanté le clavecin, que la clarinette était apparue, que l’orgue à tuyaux se dotait de la boîte expressive et que l’orchestre sym-phonique commençait son ascension. Un seul mot d’ordre : la recherche de l’expression. La naissance et l’apogée de l’harmonium se pla-cent totalement dans cette mouvance. En effet, outre ses timbres chaleureux typiques du XIXe siècle, il faut noter que, par sa constitution, l’harmonium présente la possibilité de nuancer à loisir les sons émis, à la manière des instruments à vent, ce qu’aucun autre instrument à clavier n’est réellement ca-pable : l’harmonium est l’instrument expressif par excellence. Dès lors, sitôt mis au point dans les années 1840, et aidé par les progrès de l’industrie, l’harmonium peuplera tous les salons mondains, et connaîtra une croissance sans précédent. En témoignent l’abondante musique de salon et de chambre écrite pour lui par les artistes en vogue (Rossini, Bizet, Guilmant, Widor…), la prolifération des brevets et innovations, des récompenses aux expositions et la multiplication dans le monde entier des manufactures d’harmoniums. Ce n’est que plus tardivement que cet instrument prendra sa place dans les églises au service de la li-turgie, hélas trop souvent perçu comme substitut à l’orgue à tuyaux dans les paroisses pauvres – c’est la fameuse pompe à cantique. Cette fonction liturgique est celle que nous lui connaissons le plus, pour-tant ce n’était pas là sa vocation initiale.



Las ! Comme tous les phénomènes de mode, la désaffection et le désintérêt frappèrent l’harmonium aussi rapidement que vint sa gloire.

Aujourd’hui : le retour en grâce ?

Raréfaction Peu à peu, les derniers harmoniums se taisent dans l’indifférence, essoufflés par un service liturgique intense, et remplacés, dans les paroisses encore vivantes, par des orgues électroniques. Les plus chan-ceux d’entre eux finissent dans un coin de la sacristie ou d’une chapelle latérale, le clavier face au mur. Quel régal pour les mites et les vers ! Entendre jouer un harmonium devient vraiment exception-nel de nos jours – et encore faut-il qu’il soit bien joué.

Amnésie Comme tout ce qui gravite autour de la culture religieuse, les générations actuelles ont peu connu l’harmonium, à la différence de nos parents pour qui l’instrument reste intimement associé aux offices liturgiques. Ainsi, progressivement, en même temps qu’il disparaît, l’harmonium s’échappe des préju-gés défavorables qui l’enfermaient. Ce sont ainsi des oreilles « vierges « de tout cliché, par essence réducteur, qui pourront en écouter les derniers témoins vivants, et qui pourront réexplorer les meilleures pages écrites pour cet instrument. Peut-être l’harmonium doit-il passer par cet oubli pour renaître, suivant le même chemin que les cla-vecins deux siècles auparavant . Un jour viendra où l’on admirera un Alexandre ou un Debain comme l’on admire aujourd’hui un Goujon ou un Ruckers !

Harmonium Alexandre préservé par un particulier



Patrimoine Fort heureusement, nous pouvons nous réjouir de la prise de conscience générale suscitée autour de la notion de patrimoine, qui ne concerne plus seulement les grands chefs d’œuvre de peinture ou d’architecture, mais qui s’étend désormais aux techniques, aux cultures locales, aux objets ou au mobi-lier. En témoignent les écomusées, les restaurations de tours de télégraphe Chappe, les opérations lo-cales de mécénat pour la restauration de retables, de lavoirs, les circulations de vieux trains à vapeur restaurés. Gageons que l’harmonium rejoigne ce chemin, en témoin vivant de son époque.

Redécouverte Nous pouvons même lui souhaiter un chemin plus beau que celui du clavecin, hélas relégué dans le pe-tit cercle de la musique ancienne. D’une part, avec l’harmonium, pourront ressusciter de nombreuses pages de la musique de chambre et de salon du XIXe siècle, écrites pour lui soit en soliste soit en en-semble, et d’autre part, par sa riche palette sonore, par son expressivité, par ses timbres proches de l’accordéon ou de la clarinette, l’harmonium ne pourrait-il pas s’essayer à la musique folklorique ou bien à la musique de variété ?

Amateurs et collectionneurs Qu’ils soient organistes ou mélomanes, l’harmonium rassemble de plus en plus d’adeptes, séduits par sa musique, par sa facture ou par l’époque féconde qui les a vu naître. Ces amateurs agissent la plupart du temps à titre privé, tentant ça et là de préserver les témoins les plus intéressants ou les plus repré-sentatifs. Un de mes amis préserve deux Debain…telle association a sauvé un autre harmonium Alexandre. C’est ainsi que, restauré, mon harmonium Alexandre n°89968 aborde aujourd’hui une nouvelle jeunesse…



Fonctionnement d’un harmonium En quelques lignes succinctes, comment fonctionne un harmonium ? L’harmonium est composé essentiellement de quatre éléments principaux : la soufflerie, le clavier, les anches et les registres. Ces éléments sont disposés rationnellement dans un meuble plaqué de chêne, palissandre ou d’acajou, souvent vernis et décoré de moulures, de poignées de bronze et de co-lonnettes. L’accès au clavier se fait grâce à un couvercle au dessus du meuble. La structure de l’harmonium est conçue de façon à pouvoir accéder à toutes les parties internes de l’instrument en vue des réglages et de la maintenance.

Extrait de « les Grandes Usines » par Turgan, 1865

La soufflerie Son rôle : amener l’air. Car l’harmonium est un instrument à vent. Dans la partie inférieure du meuble, elle consiste en deux gros soufflets triangulaires, appelés pompes, maniés par l’instrumentiste au moyen de deux larges pédales en façade. L’air produit est régulé en pression et débit par un grand ré-servoir situé au dessus des pompes.

Les deux pompes (ici sorties du meuble) – Harmonium Alexandre



Le mécanisme d’expression consiste à supprimer l’action de ce réservoir de régulation : ainsi, l’air n’est pas régulé, et donc, par l’action des pédales, l’interprète peut varier à loisir l’intensité du son, et donc produire ce fameux effet d’expression qui est l’essence même de l’harmonium et la raison de son succès.

Les registres L’air du réservoir est ensuite dirigé vers la table des soupapes des registres. Celle-ci, par le biais de ti-rants actionnés par l’instrumentiste, permet de choisir, d’assembler ou d’isoler les sonorités de l’instrument : les jeux ou registres. Ces tirants sont situés au dessus du clavier et portent chacun sur une porcelaine le nom du jeu correspondant. A noter que les noms des principaux jeux de l’harmonium sont unifiés d’un fabricant à l’autre. Les jeux sont divisés en demi-jeux : demi-jeux des basses (notes graves) et demi-jeux des dessus (notes aiguës) de façon à pouvoir différencier les sonori-tés de la main gauche et de la main droite. Cet artifice multiplie donc les possibilités sonores de l’instrument.

La table des soupapes des registres – Harmonium Alexandre

Le clavier Généralement de cinq octaves, il est divisé en deux parties : la partie inférieure des basses (du Do grave au Mi médium) et la partie supérieure des dessus (du Fa médium au Do aigu). Chaque partie possède ses registres ou demi-jeux. Il est souvent transpositeur : deux boutons permettent de déplacer le clavier vers la gauche ou la droite pour changer le ton. Certains gros harmoniums disposent de deux claviers. A chaque touche du clavier correspond une soupape qui va permettre l’émission de la note en s’ouvrant.

Tirants de registre au dessus du clavier – Harmonium Kasriel



Les anches Ce sont de fines lames de laiton qui créent le son au passage de l’air. La hauteur du son émis est pro-portionnelle à leur longueur. Des formes d’anche différentes permettent d’obtenir les timbres des dif-férents jeux de l’harmonium. Les anches sont regroupées par demi-jeu sur le sommier. Le sommier est une sorte de grande table horizontale présentant deux faces : une face inférieure com-partimentée prenant appui sur la table des soupapes des registres, qui permet le choix des différents timbres ou jeux, et une face supérieure qui reçoit les soupapes des notes actionnées par le clavier.

Les anches, réparties par demi-jeu dans les compartiments du sommier

D’autres perfectionnement mécaniques ont progressivement enrichi l’harmonium : systèmes de volets de forté, systèmes de genouillères permettant des tutti ou des forte, trémolo, accouplement d’octaves, pédalier, célesta, etc. En parallèle, les facteurs ont cherché à enrichir la palette sonore en créant de nouveaux timbres.



Coupe d’un harmonium

Cheminement de l’air à travers l’instrument

• 1 : l’air est aspiré par les pompes mues par les pédales mises en mouvement par l’interprète.

• 2 : il est ensuite dirigé vers le réservoir. Ce réservoir, par l’action de ressorts à boudin, ré-gule la pression et le débit de l’air.

• 3 : l’air passe à travers les soupapes ouvertes des registres qui ont été sélectionnés par l’interprète. Ces soupapes, mues par les tirants de registre situés au dessus du clavier, sont fixées à la table des soupapes de registres.

• 4 : l’air arrive ensuite dans les compartiments du sommier. Dans chaque compartiment du sommier se trouvent rassemblées toutes les anches d’un registre, fixées côte à côte.

• 5 : lorsque l’interprète joue une note, la soupape de note correspondante s’ouvre, et laisse passer l’air à travers l’anche correspondante. L’air s’échappe ainsi du sommier vers l’air libre.

Tirant de registre

Table des soupapes des registres

Touches du clavier

Pédale

Réservoir

Meuble

Ressort

Pompe

Sommier

1

2

3

4

5

Soupape de note

Anche

Couvercle



Description de l’harmonium Alexandre n°89968 L’harmonium Alexandre Père et Fils n° 89968 représente l’instrument français typique de 4 ½ jeux, le plus répandu dans les salons puis dans les églises. La manufacture Alexandre Père et Fils était célè-bre pour la qualité de sa production et la modernité de son usine d’Ivry-sur-Seine, et elle se plaçait parmi les meilleures manufactures d’harmoniums. Cet instrument historique, qui va sur ses 130 ans d’âge, provient de l’église Saint-Pierre du Martroi à Orléans (Loiret), lieu qu’il peut n’avoir jamais quitté. Il était encore en service au courant des années 1980, essoufflé mais toujours vaillant. Il a été supplanté par la suite par un orgue électronique, lui-même remplacé par un orgue à tuyaux. Sa restauration s’est achevée en Janvier 2008.

L’harmonium Alexandre n°89968 avant et après restauration…

Caractéristiques

• Datation : années 1870-1880 (après 1872). • Numéro de série : N° 89968 / DN 11953 • Type français, à soufflerie soufflante • 15 registres. Sans genouillères. • Clavier de 61 notes d'étendue C-c'''', non transpositeur, coupure en basses et en dessus entre e'

et f'. • 4 ½ jeux • Elégant meuble droit en chêne plaqué palissandre, avec 2 colonnettes décoratives. • Dimensions du meuble : L = 1,20 m – H = 1,00 m – P = 0,70 m

Composition S-Sourdine O-Forte 3&4 4-Basson 8' 3-Clairon 4' 2-Bourdon 16' 1-Percussion ou Cor Anglais 8'

G-Grand-Jeu E-Expression

1-Percussion ou Flûte 8' 2-Clarinette 16' 3-Fifre 4' 4-Hautbois 8' C-Voix Céleste 16' O-Forte 3&4 T-Tremolo

Voir plus loin pour la description détaillée des registres.



Remarques L’instrument se rapproche du type n°10 du Catalogue de la Manufacture Alexandre Père et Fils. Son meuble est très soigné. L’absence de clavier transpositeur montre que cet instrument n’était pas desti-né à accompagner des chants d’église mais à interpréter de la musique de salon. Sa composition est exactement celle qui est décrite dans la fameuse Ecole d’Orgue op. 54 de Louis Raffy. Il est doté en outre du système de percussion « de Martin de Provins » sur le 1er jeu de 8 pieds, qui permet une meilleure attaque du son. L’adresse « 106 rue Richelieu » mentionnée sur le fronton du clavier, ainsi que le numéro de série per-mettent d’affirmer que l’instrument date d’après 1872, vraisemblablement d’environ 1880. Cependant les caractéristiques de sa facture se rapprochent de celles qui étaient en vigueur dans les années 1850-1860.

Historique de l’instrument Par Cyrille Bourgery, organiste et amateur d’harmoniums Cet harmonium Alexandre, longtemps présent en l’église Saint-Pierre du Martroi d’Orléans, corres-pond au type n°10 (4 ½ jeux) du catalogue du célèbre facteur et semble avoir été construit vers 1880. Il s’agit d’une instrument de salon ainsi qu’en témoignent le beau meuble coffre en palissandre, l’absence de transpositeur ou encore ses sonorités riches et finement harmonisées. Le début de l’histoire de cet instrument est mal connu. On ignore les raisons de son acquisition de même que sa destination initiale. Tout au plus sait-on qu’en 1982, le Comité des Orgues de la Cathé-drale entreprit de faire le point (le ménage) sur les harmoniums paroissiaux. Pas moins d’une dizaine d’instruments, dans des états très variables, furent alors recensés dans les différents lieux (chapelles de la Cathédrale Sainte-Croix, église Saint-Pierre, presbytères, école paroissiale Saint-Benôse, chapelle Saint-Joseph). Il fut décidé de ne conserver que les 4 harmoniums en meilleur état : l’Alexandre et un Rodolphe de 5 ½ jeux pour un usage liturgique en l’église Saint-Pierre du Martroi, un guide-chant Alexandre maintenu au presbytère de Saint-Pierre pour l’usage du maître de chapelle de la cathédrale, et un harmonium de facteur inconnu pour la salle de répétition de la chorale des Petits Chanteurs de Sainte-Croix au Centre Saint-Pierre. Deux instruments furent cédés à des paroisses du diocèse, tandis qu’un autre était transféré au Centre de vacances paroissial du Quinquis à Perros-Guirrec. Enfin, les 4 derniers, en trop mauvais état, furent détruits. L’Alexandre, ainsi que les deux harmoniums revendus et l’instrument affecté aux Petits chanteurs bé-néficièrent à cette époque d’une révision. Elle fut confiée à un facteur d’harmonium de Vendée qui procéda à un nettoyage, à quelques réparations d’étanchéité et au changement de quelques anches.



Ainsi remis en état, l’harmonium Alexandre reprit un service assez actif dans l’église Saint-Pierre du Martroi, une église du centre ville, annexe de la cathédrale. Un orgue électronique à trois claviers tenta de lui ravir la vedette au milieu des années 1990 mais l’humidité et la foudre eurent rapidement raison de la fiabilité du présomptueux « Grand opéra ». Notre Alexandre poursuivit sa carrière de manière originale, en duo avec le Rodolphe de 5 ½ jeux. En effet, ce dernier avait pour lui la puissance, mais l’Alexandre offrait des timbres incomparablement plus raffinés. Les organistes successifs prirent donc l’habitude d’accompagner les chants sur le Rodolphe et d’exécuter les pièces sur l’Alexandre ! A titre anecdotique, il convient de souligner que la situation des organistes durant toute cette période fut as-sez… précaire voire périlleuse. En effet, faute de siège à bonne hauteur ou de banc adapté, le sacristain installait consciencieusement avant chaque office une chaise rehaussée…d’un carton de cierges de dé-votion ! Et c’est ainsi perché que les organistes assuraient leur service avec une dignité sans faille !

L’église Saint-Pierre du Martroi à Orléans

En 2001, l’acquisition d’un orgue de salon sonna l’heure de la retraite, pour les deux harmoniums de l’église Saint-Pierre. Après 120 ans de service, l’Alexandre fut réduit au silence et relégué dans un bas côté. Deux visites en 2002 et 2004 montrèrent les méfaits de cette inactivité avec l’apparition de légè-res moisissures. En 2005, la perspective de travaux importants fit planer une menace plus radicale , le clergé cherchant un moyen de « se débarrasser des deux m… qui traînaient le long du mur de la sa-cristie » (sic). C’est alors qu’un paroissien se porta généreusement acquéreur de l’Alexandre pour la somme de 500 euros. Ne pouvant se résoudre à voir disparaître un des plus beaux harmoniums d’Orléans avec le Mustel du Conservatoire**, cet amateur acquis à la cause de l’harmonium entreprit une restauration de l’instrument. La partie instrumentale fut déposée et le meuble confié à un restaura-teur de meuble ancien. Celui-ci restitua la colonnette manquante, ainsi que quelques éléments de déco-ration et refit intégralement le vernis au tampon (8 couches !). Un menuisier reconstitua le cadre sur lequel un porte-pupitre de facture Alexandre vont prendre place. Cette pièce ainsi que le médaillon en bronze portant la mention « Alexandre Médaille d’or – Exposition de 1855 » fut fourni gracieusement par Pascal Auffret. Pendant ce temps la partie instrumentale fut soigneusement nettoyée, les bois trai-tés, le mécanisme de percussion remis en service – il avait été neutralisé-, les soupapes brossées et ré-visées. La soufflerie en bon étant ne nécessita aucune intervention Après diverses tribulations liées à l’encombrement de l’instrument et un voyage par les airs, le meuble et la partie instrumentale furent réunis en septembre 2007. Le résultat de cette restauration est une franche réussite. La réfection du vernis met pleinement en valeur la superbe finition en palissandre. Quant à l’instrument, il reprend vie laissant entendre des timbres variés. Une mention particulière doit être faite aux dessus de 16’. La Cla-



rinette est d’une remarquable finesse, de même que la mystérieuse Voix céleste. Le Grand-Jeu éclairé par le Clairon-Fifre est puissant et clair à la fois. L’expression est très efficace sur cet instrument, les larges pompes permettant de contrôler le vent de façon optimale. Le sort de cet harmonium est sans doute précurseur de celui de beaucoup d’harmoniums qui après avoir été rejetés trouvent une seconde vie auprès de musiciens appréciant ses possibilités et ses sonori-tés atypiques. La restauration scrupuleuse de cet harmonium Alexandre est exemplaire car intégrale et respectueuse de l’œuvre originale. La qualité intrinsèque de l’instrument le méritait. Encore fallait-il une rencontre providentielle entre le long chemin de cet instrument et la passion d’un amateur. Ainsi en fut-il; place maintenant à la musique ! * Ce « guide-chant » Alexandre sera plus tard cédé à M. Nicolas Grellier, alors organiste de Notre Dame de Recouvrance à Orléans qui l’utilise régulièrement pour des concerts de musique en duo avec une vielliste (groupe « Excusez-nous de vous déranger ») pour un répertoire de chanson tout à fait contemporaine. Le résultat est une franche réussite, bien loin de la « pompe à cantiques » ! **L’harmonium Mustel du Conservatoire provient de l’église Saint-Pierre- le-Puellier. Après la désaf-fectation de cet édifice, la Ville d’Orléans décida de le transformer en lieu d’exposition permanent. Alors que les travaux de restauration allaient commencer, François-Henri Houbart découvrit cet har-monium d’art Mustel abandonné depuis près de vingt ans. M. Houbart le fit transférer au Conserva-toire municipal de Musique. Entreposé dans la Salle du Saloir près de l’orgue Haerpfer–Dupont, ce magnifique harmonium aurait besoin d’une remise en état (au moins un bon nettoyage avec réglage) pour pouvoir être pleinement jouable. Au moins est-il préservé.



Quels furent les lieux de sa carrière ? Mais notre harmonium Alexandre a-t-il fait toute sa carrière dans l’église Saint-Pierre du Martroi d’Orléans ? Bonne question…laissons à nouveau la place à Cyrille Bourgery. La datation de l'instrument autour des années 1875-1880 me rappelle que l'église Saint Pierre du Mar-troi, fermée après la Révolution, a été rendue au culte en ...1877 sur décision de Mgr Dupanloup. Elle sera renfermée en 1905 (à vérifier) et rouverte seulement en 1973. L'église eut bien un vague statut de chapelle dans le courant du XIXe siècle et elle renferma même un orgue Suret acheté par un vicaire de la cathédrale qui n'eut pas les moyens de le payer totalement et n'obtint qu'une autorisation provisoire d'entreposage de l'orgue dans l'église. Toujours est-il qu'en 1877, l'église est sans orgue et sans doute sans mobilier : il faut la meubler intégralement. L'hypothèse selon laquelle Alexandre ferait partie de ce lot d'ameublement est tout à fait plausible mais difficilement vérifiable, sauf peut-être par les regis-tres paroissiaux de la cathédrale, si l'instrument a été acheté par le Conseil de Fabrique. Le mystère Alexandre demeure...

Cyrille Bourgery sur l’harmonium Alexandre en Septembre 2004, alors que l’instrument était encore

dans l’église Saint-Pierre du Martroi à Orléans.



Préservation et restauration Le travail de sauvetage de l’instrument a été effectué en plusieurs étapes :

• Déménagement hors de l’église Saint-Pierre du Martroi en Décembre 2004 et mise à l’abri, • Rachat auprès de la paroisse du Cœur de Ville d’Orléans en Mai 2005, • Démontage et dépoussiérage poussé, • Traitement anti-insectes, • Réparations, • Restauration du meuble : vernis tampon, plaquage, moulures, colonnettes, à l’été 2006, • Recherche de pièces détachées : pupitre, médaille, • Remontage et réglages de Septembre 2007 à Janvier 2008.

La partie instrumentale étant en très bon état, la restauration de celle-ci a surtout consisté en une grande révision. En revanche, le meuble a fait l’objet d’une complète restauration à neuf pour retrou-ver sa grande élégance d’origine. Il est en effet important que l’instrument séduise autant l’œil que l’oreille. Nota : des démarches avaient été menées auprès de la Ville d’Orléans pour s’assurer que la paroisse était bien propriétaire de cet instrument antérieur à 1905.

La restauration en photos et en commentaires

Avant restauration, début 2005 : le meuble est passablement marqué par le temps : placage abîmé, moulures, médaille et une colonnette manquantes, tissus éventrés, etc. Le pupitre est manquant et rem-placé par une planche en contreplaqué. Les pédales sont très usées. Mais l’instrument fonctionne bien : pas d’anches manquantes, ni de cornements, ni d’emprunts, ni de fuites !



Le nettoyage de la table des soupapes des registres. Tout le mécanisme de l’instrument est en excellent état de conservation, en dépit de traces d’humidité. La soufflerie ne fuit pas.

Le clavier et le fronton ont été nettoyés. Les ivoires manquantes ont été remplacées, et les tissus (de couleur verte) retendus. Les feutres des soupapes ont tous été brossés.



Aucune anche ne manque ni n’est défectueuse. Sur la photo ci-dessus, on voit bien le mécanisme de percussion « Martin de Provins ».

Le meuble a été complètement remis en état par un artisan restaurateur de meubles (l’Atelier d’Art, à Olivet, Loiret) avec application de vernis tampon en 8 couches, réfection des moulures et des placages, retapissage des pédales. La colonnette manquante a été refaite à l’identique par un ébéniste.



La partie instrumentale et le meuble restaurés séparément ont été ensuite réassemblés, marquant ainsi la dernière étape de la résurrection de l’harmonium Alexandre.

Le support du pupitre a été refait à l’identique, et de nouveaux tissus ont été tendus. Le compas du couvercle a également été refait.



Le voici prêt à être joué… Sur le pupitre, « L’Ecole d’Orgue », de Louis Raffy.

L’harmonium Alexandre n° 89968 intégralement restauré, tel qu’il peut être vu aujourd’hui : le rendu du vernis tampon est très chaleureux.



Les registres de l’harmonium n°89968 Ainsi que je l’ai évoqué plus haut, notre harmonium Alexandre n°89968 possède la composition typi-que de l’harmonium français, reprise dans les différentes méthodes du XIXe siècle. C’est la composi-tion de base, de 4 ½ jeux.

Composition Ce tableau précise la composition de l’harmonium, dans l’ordre des registres situés au dessus du cla-vier, de gauche à droite.

Les jeux sont divisés en demi-jeux, avec des noms différents. Ainsi les numéros associés aux demi-jeux permettent de reconstituer chaque jeu. Exemple : le jeu n°2, de 16’, s’appelle Bourdon pour le demi-jeu des basses et Clarinette pour le demi-jeu des dessus. Pour avoir le jeu complet, il suffit de ti-rer les deux registres correspondants. Colonne de gauche : demi-jeux des basses. Colonne de droite : demi-jeux des dessus.

S-Sourdine O-Forte 3&4 4-Basson 8' 3-Clairon 4' 2-Bourdon 16' 1-Percussion ou Cor Anglais 8'

G-Grand-Jeu E-Expression

1-Percussion ou Flûte 8' 2-Clarinette 16' 3-Fifre 4' 4-Hautbois 8' C-Voix Céleste 16' O-Forte 3&4 T-Tremolo

S - Sourdine

0 - Forte 3 et 4

4 - Basson

3 - Clairon

2 - Bourdon

1 - Cor Anglais

Trémolo

0 - Forte 3 et 4

C - Voix Céleste

4 - Hautbois

3 - Fifre

2 - Clarinette

1 - Flûte E - ExpressionGJ - Grand Jeu



Description des registres D’après Pascal AUFFRET, Musica Saint-Nazaire

1 - Cor Anglais - Flûte de 8’ Jeu de sonorité douce et ronde toujours diapasonné en 8’. C’est un jeu de base car il est présent dans tous les harmoniums, même les plus modestes. Le Cor Anglais est le jeu le plus doux à gauche ; si l’harmonium ne possède pas de Sourdine, c’est lui qu’il faut employer pour les accompagnements. En combinaison avec le Bourdon, il imite les Fonds d’Orgue d’Église ; avec le Bourdon et le Clairon, le plein-jeu ; avec le Basson, la Voix Humaine ; avec le Clairon et le Basson, le Violoncelle. La tessiture du Cor Anglais ne correspond pas à celle de l’instrument de l’orchestre ; par contre, celle de la Flûte correspond bien, à quelques notes près, à celle de son modèle. Seule, elle doit être employée pour les chants doux et tendres ; avec le Fifre pour les passages légers et brillants ; avec le Hautbois, elle imite la Voix Humaine ; avec la Clarinette, les Fonds d’Orgue d’Église ; avec la Clarinette et le Fifre, le Plein-jeu. Ce jeu n° 1 de Cor Anglais – Flûte est muni sur l’harmonium Alexandre n°89968 d’un mécanisme de percussion, dû à Martin de Provins en 1842. Ce système a pour but d’améliorer l’attaque des notes, car les anches sont lentes à se mettre en mouvement. Il consiste en l'action d'un marteau, pareil à celui des pianos, qu'un mécanisme particulier lance contre la lame de cuivre (anche libre) au moindre mou-vement que l'on imprime à la touche ; ce marteau met instantanément la lame en vibration, et cette vi-bration est immédiatement continuée et soutenue par le vent des soufflets. La percussion est toujours appliquée aux registres N° 1 (Cor Anglais - Flûte). Quand on s'en sert, il faut avoir soin d'attaquer la touche avec une grande légèreté afin que le frappement du marteau sur la lame ne se fasse pas entendre, ce qui produirait un effet désagréable. La Percussion est surtout utile dans les passages détachés ou piqués ; dans les phases lentes et liées, il est au contraire préférable de ne pas s'en servir.

2 - Bourdon - Clarinette de 16’ Jeu de 16’. Il donne de la profondeur aux ensembles comme le Grand-Jeu. "La Clarinette est connue pour être l’un des demi-jeux les plus chantants et les plus purs"(Alph. Mustel). Seule, elle est idéale pour les chants graves et mélancoliques. En combinaison avec le Fifre, elle convient pour les passages légers et en notes répétées (Tarentelles, Boléros et autres danses) ; ces deux jeux sont à distance de deux octaves et l’effet produit est très curieux car les deux jeux s’entendent très distinctement. La ré-putation du Bourdon est celle d’un jeu lourd car son émission se fait un peu tardivement.

3 - Clairon - Fifre de 4’ Le Clairon utilisé avec le Basson imite la Trompette ; avec le Basson et le Forté, on obtient un timbre éclatant et cuivré. Le Fifre ne s’emploie jamais seul mais donne du mordant dans tous les mélanges. Avec la Flûte, il excelle dans les passages légers et brillants.

4 - Basson - Hautbois de 8’ Le timbre du Basson est chaud et pénétrant, mais sans dureté. En combinaison avec le Cor Anglais, il imite le Voix Humaine; avec le Cor Anglais et le Clairon, c’est un Violoncelle. Sa tessiture correspond à peu près à celle de l’instrument dont il emprunte le nom. Le Hautbois, d’un



timbre nasillard et champêtre, possède toutes les qualités de l’instrument de l’orchestre et est, de ce fait, souvent utilisé seul. Avec la Flûte, il imite la Voix Humaine ; avec le Fifre et le Forté, c’est la Musette. Il est quelquefois de 16’.

C - Voix Céleste de 16’ C’est un demi-jeu de droite très agréable à l’oreille lorsqu’il est réussi. Ce sont en fait deux séries d’anches qui ne sont pas accordées ensemble avec une parfaite justesse. C’est un jeu ondulant qui se compose le plus souvent avec la Clarinette de 16 ‘, la Flûte de 8’ ou la Musette de 16’. Il s’emploie seul en général et est très caractéristique de l’harmonium.

0 – Forté 3 et 4 Mécanisme qui consiste à augmenter la force de certains jeux. Ils agissent sur les jeux à l’arrière du sommier, c’est-à-dire les 3 et 4. Il y a deux registres de Forté : un à droite et un à gauche. Lorsqu’on tire un registre, un clapet ou des jalousies s’ouvrent, laissant passer plus d’harmoniques aiguës d’où une impression de plus grande puissance.

E – Expression Raison d’être de l’harmonium, ce registre met en communication directe les pédales avec la partie so-nore en court-circuitant le réservoir de régulation. Ainsi l’interprète peut varier à loisir l’intensité so-nore, et obtenir des pianissimo comme des fortissimo, donnant à l’instrument et à sa musique ce carac-tère humain et expressif qui fut la quête de toute la fin du XVIIIe Siècle et du début du XIXe Siècle. Savoir utiliser l’expression demande beaucoup de technique.

GJ - Grand-Jeu C’est un mécanisme qui permet d’ouvrir simultanément tous les jeux de l’instrument.

T - Trémolo Dès qu’il est appelé, une soupape, d’un genre particulier munie d’un poids, s’ouvre et fait trembler le son. Il fait parler un jeu déjà existant, le plus souvent c’est la Clarinette de 16’ à droite ou un jeu de 4’ ou de 8’ à gauche. On l’appelle quelquefois Tremblant.

S - Sourdine C’est le Cor Anglais qui parle mais la soupape d’admission de l’air est beaucoup plus réduite. Ce re-gistre se trouve toujours à gauche car un des inconvénients de l’harmonium est que les basses couvrent toujours les dessus. Si l’on veut faire ressortir une mélodie à la Flûte, il faut un accompagnement fai-ble ; la Sourdine convient parfaitement.



La manufacture Alexandre Père et Fils C’est Jacob Alexandre (1804-1876) qui fonde en 1829 une entreprise d’accordéons et d’harmonicas.

Son histoire Dès 1843, alors que le brevet de l’harmonium vient à peine d’être déposé par Debain, l’entreprise conçoit et commercialise ses premiers instruments, sous le nom d’« orgues mélodium », car le mot « Harmonium » était déposé par Debain. Le fils de Jacob Alexandre, Edouard Alexandre (1824-1888), prend vite part active dans l’entreprise qui s’appelle dès lors « Alexandre et Fils » puis « Alexandre Père et Fils ».

La manufacture Alexandre faisait partie des grands noms de la facture d’harmoniums, avec Debain ou Mustel. Cette entreprise innovante, menée par d’habiles commerçants, proposait au public une produc-tion très variée, de qualité : de « l’orgue à 100 francs » aux grands instruments monumentaux à plu-sieurs claviers. Son succès est couronné par l’obtention de la médaille d’honneur lors de l’exposition universelle de 1855. Une autre médaille d’or sera attribuée lors de l’exposition universelle de 1889.

Ses adresses Les adresses successives de la maison Alexandre Père et Fils (siège et salon d’exposition) ont été :

• 1829 : 6, rue Transnonain à Paris • 1840 : 38, rue de Montmorency à Paris • 1843 : 10, boulevard Bonne-Nouvelle à Paris • 1850 : 39, rue Meslay à Paris • 1872 : 106, rue Richelieu à Paris



L’usine, qui faisait la fierté de l’industrie française, se situait à Ivry-sur-Seine.

L’entreprise arrêta sa production d’harmoniums en 1955.



Les autres instruments de la collection Je possède également deux autres harmoniums, de la manufacture Kasriel.

Harmonium de Salon M. Kasriel Cet harmonium est un instrument de salon, qui a la particularité de disposer d’une soufflerie aspirante, suivant l’usage anglo-saxon. Cela permet une grande douceur de timbres mais réduit la possibilité des effets d’expression. Ce petit instrument du facteur Kasriel provient du presbytère de Beaugency (Loi-ret). Il est en bon état de fonctionnement, sauf qu’il lui manque une anche. L’esthétique du meuble est typique des années 1930 !

Composition

Basses : Forté Sourdine Bourdon 16' Cor Anglais 8'

Vibrator – Coupler Dessus : Flûte 8' Clarinette 16' Voix Céleste 16' Flûte d'Amour Forté

Genouillère gauche : Grand-Jeu Genouillère droite : Forté

Description • Datation : années 1930 • Numéro de série : N°43078 • Type américain (reed organ), à soufflerie aspirante • 11 registres – deux genouillères • Clavier de 61 notes, transpositeur, coupure entre Mi3 et Fa3 • 2 ½ jeux • Meuble en chêne clair verni



• Dimensions du meuble : L = 1,14 m – H = 1,25 m – P = 0,54 m La Flûte d'Amour est la Flûte 8' en sourdine. L’anche du La 4 sur cette Flûte 8’ est manquante. Le re-gistre de Vibrator est un trémolo à turbine à vent perdu, agissant sur les dessus de 16'. Son efficacité est médiocre. Le registre de Coupler est un registre d'octave grave sur les basses et d'octave aiguë sur les dessus.

Guide Chant, M. Kasriel Le guide-chant est un petit harmonium simplifié, transportable, destiné à l’accompagnement et à l’apprentissage des chants dans les chorales et dans les écoles. Ce guide-chant du facteur Kasriel a été acquis dans un bric-à-brac Emmaüs de la région lyonnaise. Nettoyé et traité contre les vers, il est en parfait état de fonctionnement.

Description • Datation : deuxième quart du XXème Siècle. • Numéro de série : 54245 • Type français, à soufflerie soufflante • 1 seul registre permanent – pas de genouillère • Clavier de 49 notes, transpositeur • Meuble en chêne clair verni • Dimensions du meuble : L = 0,96 m – H = 0,79 m – P = 0,39 m



Remerciements Que soient ici remerciés : P. Claude Girault, Orléans, curé de l’église Saint-Pierre du Martroi, M. Cyrille Bourgery, Orléans, organiste et amateur d’harmoniums, M. Arnaud de Reviers, Orléans, pépiniériste, M. Jacques Vaitty, Olivet, L’Atelier d’Art, restauration de meubles anciens, M. Pascal Auffret, Saint-Nazaire, accordeur de pianos et collectionneur d’harmoniums, M. Gilbert Riballet, Aubigny-sur-Nère, menuisier retraité.

Bibliographie Livres Louis Raffy, Ecole d’Orgue Op n°54, Procure Générale de Musique Religieuse, Arras, 1907 Alphonse Mustel, l’Harmonium d’Art

Quelques sites internet Le site de l’association « l’harmonium français » http://www.harmonium.fr L’encyclopédie Wikipédia, qui permet une approche généraliste de l’instrument. http://fr.wikipedia.org/wiki/Harmonium Le site de Pascal Auffret, accordeur réparateur de pianos sur Saint-Nazaire. Une mine d’informations. http://www.musica-stnazaire.com/dossiers/harmuniu.htm Le site de Nelly Johnson, dédié à la restauration de quelques beaux harmoniums. http://sos.harmonium.free.fr Les sites de Philippe Dufour, avec location d’instruments. http://harmonium.monsite.orange.fr http://www.grandorgueenliberte.fr Et même un blog, de Bob le Bricoleur http://harmonium.le-blog.info/

Livret Harmonium

Documents

Transcript of Livret Harmonium