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FIGURE STUDIES DAVID MICHALEK 05 octobre 2012 - 06 janvier 2013 DOSSIER PÉDAGOGIQUE EXPÉRIENCE 15 ©David Michalek

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FIGURE STUDIES DAVID MICHALEK

05 octobre 2012 - 06 janvier 2013

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

EXPÉRIENCE 15

©David Michalek

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©David Michalek

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p 04 LE LABORATOIRE PRÉSENTE SA 15e EXPÉRIENCE

p 05 CORPS & IMAGE, ENTRE ESTHÉTISME ET TÉMOIGNAGE SCIENTIFIQUE

p 06 A PROPOS DE DAVID MICHALEK

p 07 CONVERSATION ENTRE DAVID MICHALEK ET DAVID EDWARDS, FONDATEUR DU LABORATOIRE

p 12 LA COLLABORATION AVEC DAN LIEBERMAN , BIOLOGISTE À L’UNIVERSITÉ D’HARVARD

p 14 CONVERSATION ENTRE DAN LIEBERMAN ET DAVID EDWARDS

p17 LA BIOMÉCANIQUE, ENTRE ART ET SCIENCE

p 20 LA BIOMÉCANIQUE DANS L’HISTOIRE

p 24 LE RALENTI, ENTRE TECHNIQUE ET ART

p 26 DATES CLÉS

p 27 GLOSSAIRE

p 31 ANNEXES

p 32 LE LABORATOIRE

p 34 ARTSCIENCE LABS

p 35 DAVID EDWARDS

p 46 THE LABSTORE

p 47 PRIX ARTSCIENCE

p 38 INFORMATIONS PRATIQUES

SOMMAIRE

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LE LABORATOIRE PRÉSENTE SA 15e EXPÉRIENCE

Le Laboratoire présente : Figure Studies* de l’artiste américain David Michalek ; une oeuvre vidéo dont la capture des images est réalisée à haute vitesse et dont le traitement du mouvement rap-pelle les célèbres études photographiques d’Eadweard Muybridge et d’Etienne-Jules Marey** sur la locomotion humaine.

David Michalek s’est inspiré de sa pièce Slow Dancing (2007)*** qui consiste à filmer cinq secondes de danse à une cadence de 3000 images par seconde ce qui produit un ralenti des corps en mouve-ment exceptionnel pouvant s’étirer sur une dizaine de minutes. Figure Studies applique un procédé identique à Slow Dancing mais à une échelle bien plus grande que la captation de danseurs ; ici sont filmés des corps spécialement façonnés par l’athlétisme, ou le travail physique par exemple, ou bien des corps ordinaires, en tentant de représenter un large éventail d’âges et de morphologies, mais aussi d’origines ethniques et culturelles.

Chaque sujet réalise une séquence de mouvements à partir de réflexions esthétiques et scienti-fiques. Sur ce dernier aspect, le biologiste de l’Université d’Harvard, Dan Lieberman a aidé à définir différentes catégories biomécaniques et a recommandé l’emploi de modes d’exécution explorés pendant les répétitions.

Les réalisations de Muybridge et de Marey ont servi de base de travail pour les répétitions. Les im-provisations et les entretiens qui ont été menés avec les sujets ont abouti à de nouvelles gestuelles, pour arriver à une seule idée de mouvement cristallisée en une séquence de cinq secondes. Les vidéos finales, qui présentent généralement des sujets nus, durent environ dix minutes.

Figure Studies se compose de 60 vidéos projétées sur six grands écrans dans l’obscurité la plus totale. Le visiteur découvre la force attractive de gestes décomposés par un ralenti de l’image qui, entre fantasmagorie et décryptage scientifique, invite le regard dans une suspension du temps.

*Une première version de Figure Studies, commandée par le Demarco European Art Foundation, a été présentée en août 2012 au Summerhall pendant le festival d’Edinburgh.

**Les études d’Eadweard Muybridge et d’Etienne-Jules Marey font partie des grandes réalisations photographiques du XIXe siècle et sont considérées comme les ancêtres du cinéma. Célèbres pour leurs décompositions photographiques du mouvement, leurs photographies sont devenues par là-même des témoignages scientifiques.

***Slow Dancing a déjà été présenté dans 17 grandes villes à travers le monde, en installation intérieure comme en dispositif extérieur monumental.

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CORPS & IMAGE, ENTRE ESTHÉTISME ET TÉMOIGNAGE SCIENTIFIQUE

David Michalek est fasciné par les mouvements du corps et plus généralement par les individus. Son travail de vidéaste et de photographe s’attache à l’expression des corps et des visages qui, en-tre grâce et légèreté, respirent une force vitale singulière. Plus que tout, David Michalek s’intéresse à l’être humain.

Figure Studies est la suite de la série Slow Dancing qu’il a créé en 2007 et qui continue d’être un grand succès de part le monde. Des danseurs, parmi les plus reconnus ( comme Bill T. Jones, An-gelin Preljocaj, William Forsythe, Sidi Larbi Cherkaoui...) ont été filmés pendant 5 secondes avec une caméra de très haute définition capable de capter 3000 images par seconde. Le résultat en est stupéfiant ! En diffusant la vidéo à vitesse normale, le film s’étend sur 10 minutes de ralenti excep-tionnellement lent. (Les vidéos sont visibles sur www.slowdancingfilms.com).

Cette étude esthétique des corps a interpellé certains chercheurs comme Dan Lieberman, biolo-giste à l’Université d’Harvard. Les images rappellent en effet un certain témoignage scientifique mis en oeuvre 150 ans plus tôt par Muybrige et Marey dont le travail a profondément inspiré David Michalek. Ce dernier affirme, à ce propos, s’être imprégné du travail de Muybridge plus que celui de Marey qui en véritable savant cherchait la vérité scientifique alors que Muybride révélait des im-ages d’un intense esthétisme.

De fait, la rencontre entre David Michalek, l’artiste, et Dan Lieberman le scientifique évoque tout naturellement celle d’Eadweard Muybridge, le photographe anglais et celle de Jules-Etienne Marey, le physiologiste français en 1881, lorsque les deux hommes engagent une étude sur les mouvements du corps, plus généralement appelée la biomécanique.

Si Figure Studies est la continuité de Slow Dancing, la mise en oeuvre s’est néanmoins avérée différente.Pour Slow Dancing, les danseurs ont eux même imaginé 5 secondes de chorégraphie ou plus exactement un mouvement dansé.Pour Figure Studies, la collaboration avec Dan Lieberman a été fondamentale. Spécialiste de la structure du corps humain, le biologiste a initié les scénarii des 60 vidéos. Pour que le résultat filmé soit au plus prêt de la recherche expérimentale en tant que témoignage scientifique, David Michalek a travaillé avec des modèles aussi différents les uns des autres, d’ethnies et cultures dif-férentes : des danseurs, des maçons, des bûcherons, des joueurs de base ball, des jeunes gens, des enfants, des personnes âgées, des athlètes, des gens ordinaires sélectionnés sur casting... Et pour que l’image devienne témoignage scientifique et utile aux recherches de D. Lieberman, celui ci a proposé toute une série de gestes et mouvements : porter, courir, marcher, sauter, jeter.... Afin d’étudier au plus prêt les mouvements des corps filmés et d’en retirer le maximum d’enseignement, les modèles sont tous filmés nus, ce qui donne un sens purement scientifique à la monstration es-thétique du vidéaste.C’est à ce point précis, que l’on reconnait le coeur de la rencontre artscience entre David Michalek et Dan Lieberman. Pour autant, David Michalek insiste sur le fait que son oeuvre demeure purement artistique et n’a aucune prétention ni valeur scientifique.

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David Michalek utilise l’idée et les techniques du portrait comme point de départ de ses œuvres, à petite comme à grande échelle, sur une large gamme de supports. Il a obtenu un B.A. en littérature anglaise de U.C.L.A et a travaillé comme assistant auprès du photographe Herb Ritts.A partir du milieu des années 1990, il a commencé sa carrière de photographe professionnel en tra-vaillant comme portraitiste pour des publications telles que The New Yorker, Vanity Fair, Interview et Vogue. Parallèlement, David Michalek a réalisé des performances et des installations, et a développé des projets multidimensionnels.Depuis qu’il a abandonné la photographie commerciale en 1998, son travail a été exposé au niveau national et international, avec de récentes monographies présentées au Brooklyn Museum, à Har-vard, à la Serpentine Gallery, à Trafalgar Square, à l’Opéra Bastille, à la Biennale de Venise, à Yale, à The Kitchen et au Lincoln Center.En tant qu’artiste visuel, il a collaboré avec le metteur en scène Peter Sellars sur deux pièces : Kafka Fragments, présenté au Carnegie Hall pendant la saison 2005-2006, et Saint-François d’Assise, présenté au Festival de Salzbourg et à l’Opéra de Paris.Au théâtre, il a aussi réalisé des films et vidéos pour The Tallis Scholars, John Malpede et L.A.P.D., et avec le Philharmonique de Brooklyn pour la série « Musique Hors les murs » au Musée de Brooklyn. Il est professeur invité de la Yale Divinity School, où il enseigne la religion et les arts.David Michalek vit à New York avec sa femme Wendy Whelan, première danseuse du New York City Ballet.

Infos + sur : www.davidmichalek.net

© Mark Kornbluth

À PROPOS DE DAVID MICHALEK

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CONVERSATION ENTRE DAVID MICHALEK ET DAVID EDWARDS, FONDATEUR DU LABORATOIRE

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David Edwards : Vous m’avez dit cet été à New York que l’observation au ralenti de mouvements du corps apporte une vision totalement nouvelle ; une vision qui procure une sorte de paroxysme esthétique lorsqu’on s’approche de la vitesse de prise de vue de 3 000 images par seconde que vous utilisez dans votre film. Pouvez-vous nous en dire plus ?

David Michalek : En 2006, lorsque j’ai commencé à travailler sur les aspects conceptuels et tech-niques de Slow Dancing (très voisin, par sa nature, de Figure Studies), j’avais une idée assez arrêtée du niveau de ralenti que je voulais obtenir, sans l’avoir testé avec une caméra haute vitesse. Du coup, mes premiers essais, avec un appareil de qualité moyenne, ont eu des résultats très différents de ce que j’avais espéré. Tout d’abord, la cadence de prise de vue permettant d’obtenir le ralenti superfluide des mouvements humains que je recherchais tournait autour de 3 000 images par seconde au lieu des 300 que j’avais imaginées au départ. Ensuite, la séquence de mouvement qui était nécessaire pour produire un film de dix minutes à ce niveau de ralenti s’est révélée incroyablement brève, à peine cinq secondes. Ce qui me semblait bien trop court pour qu’un danseur puisse s’exprimer réellement. J’ai néanmoins poursuivi mon idée en demandant à chaque danseur de créer une séquence d’exacte-ment cinq secondes composée d’un début, d’un milieu et d’une fin. La formule a remarquablement bien marché et a même souligné une qualité propre aux grands danseurs : la manière dont ils mobi-lisent chacun de leurs membres, à la milliseconde près, avec un degré élevé de « pleine conscience » et de contrôle instinctif.Je pars de l’idée qu’une décomposition aussi étendue du mouvement peut avoir une résonance profonde (que je qualifierai de paroxysme esthétique), notamment lorsqu’on utilise le vocabulaire gestuel que nous appelons « danse ». La qualité émotionnelle qui s’en dégage peut toucher les gens de manière intime. Au début, ils sont parfois gênés par cette extrême lenteur, mais la gêne peut se transformer, au fil de la vision, en une attention hypnotique qui fait perdre toute notion du temps qui passe. Cet effet semble d’autant plus fort que la pièce est projetée sur grand écran. Cela vient pro-bablement de la possibilité qu’a ainsi le spectateur de se déplacer dans et autour de l’image, et de porter son regard sur tous les éléments, aussi réduits soient-ils, qui la composent.Je pense que cette attention hypnotique ne relève plus du seul ressenti et qu’elle touche à quelque chose de vivant en chaque spectateur, à une conscience et une connaissance de son corps qui sont à la fois utilitaires et spirituelles, fonctionnelles et signifiantes, physiques et métaphysiques, selon les cas.

“une décomposition aussi étendue du mouvement peut avoir une résonance profonde que je qualifierais de paroxysme esthétique”

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David Edwards : Outre la dimension proprement scientifique, Figure Studies a exigé un très gros travail technique ; pourriez-vous nous en parler ? Par ailleurs, le fait d’associer plusieurs domaines de création vous a-t-il appris quelque chose sur la pratique artistique ?

David Michalek : Les Figure Studies n’ont pas exigé une technicité supérieure à celle de bien des films de fiction. On peut néanmoins être surpris de voir le degré de spécialisation technique qu’il a fallu mettre en œuvre pour réaliser un objet visuel aux contours relativement limités : la captation d’un corps en mouvement qui se détache sur un fond noir. La prise de vue à haute vitesse, par exemple, nécessite une très grande quantité de lumière et le concours d’un technicien sachant tirer le meilleur parti possible de la lumière et de la puissance électrique disponibles. La personne qui a joué le rôle sans doute le plus important a été en ce sens le directeur technique, Manu Sawkar. Manu a participé à toute la phase de production des images pour assurer l’intégration de tous les éléments techniques. Mais la majeure partie de son travail a commencé une fois le tournage terminé, en organisant et coor-donnant les différentes étapes de postproduction – une dizaine au total. Pour cela, il a développé une procédure de traitement des fichiers informatiques à l’aide de logiciels et d’appareils conçus spécia-lement. Sa formation de chercheur en informatique a pour cela été cruciale.Concernant la pratique artistique, j’aurais plutôt tendance à ne pas la séparer du savoir-faire tech-nique. Pour moi, ce sont deux domaines à la fois exigeants et porteurs de la véritable signification de ce qu’est la technologie : technique + connaissance (Platon n’aurait probablement pas vu de diffé-rence entre l’informaticien admirant la conception d’un superbe logiciel et l’artiste attiré par sa vision formelle). En ce sens, l’artiste ne se distingue pas du commun des mortels, et toute personne est un artiste en puissance si elle tient compte du fait que l’art exige un niveau particulier de profondeur et de contemplation dans le champ d’activité qu’on s’est choisi. Ce que j’entends par contemplation, c’est l’élévation du niveau de référence entre empirique et réfléchi, entre simple perception et regard actif. Ce type de regard, ce que saint Augustin appelle l’ingenium, correspond au terme sanscrit de « contrôleur interne » ; l’Esprit immanent considéré comme conscience tout autant artistique, morale que spéculative. Cela dit, j’essaie de m’entourer d’artistes venus de tous les horizons liés à mon travail.

David Edwards : Nous nous sommes rencontrés sur le campus d’Harvard pendant la présentation, particulièrement bien accueillie, de séquences de Slow Dancing. Vous avez évoqué alors votre fasci-nation esthétique et votre curiosité scientifique pour l’exploration de la décomposition au ralenti des mouvements du corps humain. En préparant vos nouvelles Figure Studies pour Le Laboratoire, vous avez eu de nombreux échanges avec des scientifiques, dont le chercheur en biologie Dan Lieberman. Quel enseignement en avez-vous tiré et comment ces personnes ont-elles contribué à façonner votre nouvelle œuvre ?

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David Michalek : Mes conversations avec Dan Lieberman ont vite montré que les images à très haute définition que je réalise habituellement ne lui seraient pas d’un grand intérêt pour son travail de recherche et que le niveau de ralenti propre à mes pièces ne conviendrait pas nécessairement à ses analyses du mouvement (le niveau de ralenti approprié dépendant en grande partie de l’objet de chaque étude).Dan m’a conseillé de définir plusieurs grandes catégories de mouvement : lancer, lever, porter, mon-ter, marcher, courir et sauter. Il a également suggéré de faire appel à la fois à des spécialistes et à des non-spécialistes de chaque catégorie (par exemple, lancement d’un objet par un joueur de base-ball et par une personne ordinaire). Il a également proposé différentes stratégies de réponse physique à des sollicitations externes, en déplaçant le centre de gravité du corps (par exemple, placer quelqu’un sur un taureau de rodéo mécanique ou inverser la direction d’un tapis roulant) ; là aussi avec la parti-cipation de personnes ordinaires et de spécialistes des situations de déséquilibre (professionnels du rodéo et funambules).Pour les étudiants en biomécanique, tout cela semble élémentaire. Mais, pour moi et pour ma colla-boratrice, la danseuse et chorégraphe Jill Johnson, ces notions simples se sont avérées extrêmement précieuses et nous ont fourni des outils très utiles à nos recherches.

David Edwards : On perçoit naturellement votre travail comme la poursuite des recherches pion-nières de Muybridge et de Marey. Confirmez-vous cet héritage ? En quoi ce travail expérimental sur l’image est-il nouveau et quels parallèles, divergences et résonances peut-on tirer sur l’exploration artistique et scientifique du corps humain ?

David Michalek : Je travaille dans l’esprit de Muybridge plutôt que dans celui de Marey. Muybridge était un artiste et non pas un savant. Ses images ne relèvent pas de l’analyse scientifique du mouve-ment tel qu’on l’entend habituellement, et ont une faible valeur scientifique au regard de la bioméca-nique. Elles représentent pourtant « un trésor d’images figuratives, un rappel de la pratique picturale contemporaine et un recueil d’histoire sociale et de fantaisie érotique », selon l’expression de Marta Braun. Les séquences d’images de Muybridge, ainsi que mes films, peuvent raconter des histoires à l’aide de corps qui se déplacent dans l’espace et de fragments d’existence pouvant évoquer des drames, des joies ou des rêves. Mais le résultat, pour Muybridge comme pour moi, est d’abord un rendu visuel permettant de stimuler le plaisir esthétique, avec accessoirement la mobilisation de va-gues notions scientifiques (l’esthétique, dans ce cas, signifie plus un sentiment qu’une compréhen-sion). Marey a quant à lui fait œuvre de savant en réalisant des images spécialement destinées à ses objets d’étude. A ce titre, elles sont précises, analytiques, systématiques… et dénuées de prétention esthétique. Marey ne cherchait pas à représenter la nature mais à découvrir les lois qui la régissent.

“Vivre cette expérience en tant qu’artiste et en tant qu’être humain a été un incroyable bonheur… une sorte de rédemption ...”

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David Edwards : Vos Figure Studies se penchent donc autant sur les mouvements de danseurs et d’athlètes que sur ceux d’hommes et de femmes ordinaires et de tous âges. Comment cette large panoplie de modèles a-t-elle enrichi votre travail artistique ?

David Michalek : A vrai dire, je ne suis pas sûr que la réaction du public à Figure Studies, ainsi que la mienne d’ailleurs, soient de même nature que celle qu’a connue Slow Dancing, qui, par son objet même, avait quelque chose de séduisant et d’émouvant. Les danseurs qu’on y voit sont les meilleurs exemples aujourd’hui de l’alliance entre qualités athlétiques et qualités esthétiques. Ils sont réputés précisément pour la beauté, à la fois physique et intellectuelle, qu’ils dégagent. Leurs costumes aux tissus chatoyants semblent, dans l’ultra-ralenti, miroiter comme l’eau qui coule (Michel-Ange et le Bernin auraient probablement aimé).Les Figure Studies, en comparaison, sont très dépouillés. On y voit un éventail bien plus large de ca-ractères humains (dont, là aussi, quelques danseurs). Aucun tissu chatoyant n’attire le regard. Accom-pagnés par un travail très fouillé d’éclairage et de composition de l’image, les personnages ne sont pourtant pas « objectivés ». Leur nudité n’a rien à voir avec la crudité qu’on lui associe bien souvent. Ce « dévêtissement », comme dirait Muybridge, nous apporte un surcroît de sens, de spiritualité. C’est en tout cas ce qui se dégage de la « performance » de chacun des modèles. On le doit probablement à la sensation de justesse, de liberté et de dignité qu’ils ressentaient pendant le tournage, et au respect que leur montraient tous les membres de l’équipe. Vivre cette expérience en tant qu’artiste et en tant qu’être humain a été un incroyable bonheur… une sorte de rédemption ...

©David Michalek

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LA COLLABORATION AVEC DAN LIEBERMAN, BIOLOGISTE A L’UNIVERSITE D’HARVARD

Dan Lieberman est professeur au département de biologie humaine évolutive à Harvard. Il a fait ses études à Harvard (BA, MA, Ph.D.) et Cam-bridge (M. Phil). Ses recherches combinent la biologie expérimentale et la paléontologie pour se pencher sur le mode de fonctionnement et de structuration du corps humain. Il s’intéresse particulièrement à l’origine de la marche bi-pède, à la biologie et à l’évolution de la course d’endurance ainsi qu’à la transformation de la tête humaine.

Infos + surhttp://www.fas.harvard.edu/~skeleton/danlhome.html

© Jim Harrison

Une reconnaissance mondiale

Dan Lieberman est mondialement connu pour ses travaux sur la locomotion humaine et notamment pour sa participation au best seller mondial : Born for run (Né pour courir, Ed Guérin). Une véritable bible pour les adeptes de la course à pieds. On y découvre spécialement, grâce à ses nombreuses années de recherches, que la course à pied, pour de meilleures performances sportives, physiques, une meilleure santé et posture, doit s’effectuer pieds nus et en atterissant sur la pointe des pieds (contrairement à une course normale chaussée, où le talon tape en premier le sol). Cette modifica-tion comportementale et physiologique est apparue au fil de l’évolution humaine. C’est en étudiant les origines de la locomotion humaine, de la marche bipède, et de nombreuses expériences con-temporaines sur le corps humain que Dan Lieberman en est arrivé à cette conclusion. Cette finalité a été ensuite dévoilée au grand public, et immédiatement adoptée par les plus grands runners comme les coureurs occasionnels. Cette pratique est plus connue sous le nom de “barefooting” qui signifie courir pieds nus et a donné lieu a un nouveau concept de chaussures de courses devenant alors comme une enveloppe protectrice épousant au mieux la forme des pieds.

Que se passe-t-il dans le corps lorsqu’il se met à bouger ?C’est la question que se pose les scientifiques. Le corps humain est l’instrument que l’homme utilise pour s’exprimer et travailler.Le corps se construit à partir de mouvements, constituant ainsi à lui seul un langage propre et pos-sède un rôle décisif parmi tous les arts du mouvement : rôle d’expression, de pensée et de com-munication.Le mouvement du corps occupe la place principale dans le domaine de la danse et de la vie quoti-dienne. Ainsi, il est capital d’étudier les limites, capacités et mécanismes du corps humain et de ses mouvements. On s’exprime avec son corps tout entier. Le corps transmet toutes les émotions et messages.La précision extrême des vidéos de David Michalek permettent d’analyser les mouvements plus en détail et observer les déplacements et actions des muscles.

Le corps en mouvement

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Quelques exemples de mouvements que Dan Lieberman a proposé à David Michalek, scènes de la vie quotidienne, d’une force de travail ou d’athlète : - scène de toilette - scène de tir à la corde- scène de danse - scène de lancé de poids

©David Michalek

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CONVERSATION ENTRE DAN LIEBERMAN ET DAVID EDWARDS

David Edwards : Pourriez-vous nous parler de vos recherches, notamment en ce qui concerne la biomécanique des mouvements humains.

Dan Lieberman : J’étudie comment et pourquoi le corps humain est ce qu’il est, surtout d’un point de vue évolutionniste. Je m’intéresse donc à ce qui a conduit à la morphologie actuelle de l’espèce humaine, de la forme de notre voûte plantaire par exemple à celle de notre appareil nasal, mais aussi à l’utilisation que nous faisons de notre corps ou au rôle de la sélection naturelle, au cours des der-niers millions d’années, dans la constitution des créatures si étonnantes que nous sommes. Je travaille notamment sur l’évolution de nos capacités de coordination et d’optimisation de nos mouvements [appelées « athleticism » en anglais], car je pense que les humains ont développé des compétences bien plus importantes que nous ne le pensons habituellement. Et ce n’est pas un hasard, c’est le résul-tat d’une sélection naturelle commune, parce que, encore récemment, les êtres humains devaient être des athlètes. Leur existence en dépendait. Ce n’est que dernièrement que les individus comme vous et moi ont été autorisés à se passer de qualités athlétiques pour leur survie. Mon laboratoire fait donc toutes sortes de recherches de biomécanique appliquées aux activités humaines.

D.E. : Dans le cadre de votre travail scientifique, vous étiez-vous déjà penché sur l’observation des mouvements humains par les artistes ?

D.L. : Oui, absolument, les œuvres des peintres sont par exemple une source d’information inépui-sable sur l’utilisation du corps humain à chaque époque. C’est donc, depuis longtemps un de mes grands objets d’étude. Nous vivons aujourd’hui dans un monde étrange où l’ensemble des individus exercent bien moins d’activités physiques qu’auparavant. Exemple saisissant d’influence de facteurs externes : la mécanique de la marche, notre allure, notre posture, sont conditionnées par l’utilisation de chaussures à soutien plantaire. Les représentations visuelles du passé sont donc comme des fe-nêtres ouvertes sur ce que les gens voyaient et sur ce qu’ils considéraient comme le canon de la mor-phologie humaine. Les peintures et les vases grecs de l’antiquité, et jusqu’aux œuvres très récentes, contiennent des informations déterminantes sur la façon dont le corps a été pensé et utilisé à chaque époque, en comparaison avec aujourd’hui.

D.E. : C’est un sujet passionnant. David Michalek fait évidemment partie de ce « monde étrange» dont vous parlez. En tant que scientifique, et précisément en tant que scientifique fasciné par la façon dont l’art capture le mouvement humain, avez-vous été surpris par le regard et la pratique de cet artiste ?

D.L. : Sa pièce Slow Dancing a évoqué un tas de choses dans mon esprit. La première est bien sûr le « contrôle moteur », à savoir la capacité de coordonner l’action du corps et des membres en vue de faire des mouvements déterminés. Là-dessus, les danseurs ont la capacité exceptionnelle d’exécuter des actions complexes hors de portée du commun des mortels, et même parfois d’autres spécia-listes du déplacement dans un espace à trois dimensions que sont les acrobates. Prenons l’exemple de singes bondissant d’un arbre à l’autre ; qui mieux que les danseurs peuvent restituer ce mélange d’équilibre et d’agilité ! A chaque fois que je les regarde évoluer, et plus encore depuis que j’ai vu les ralentis de David, je me demande s’ils ont bien conscience du degré extrême de contrôle que néces-sitent leurs actions. Mais aussi, les danseurs ont en commun avec les acrobates l’apprentissage de la souplesse et de la grâce.

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D.E. : David Michalek a été très intéressé par votre point de vue de scientifique avant de réaliser Figure Studies. Ses questions vous ont-elles surpris ?

D.L. : Il se pose la question qui est au cœur de ma discipline, « A quelles actions la sélection naturelle nous a-t-elle formés ? » J’étudie particulièrement le comportement des chasseurs-cueilleurs, mais aussi celui de diverses populations jusqu’aux périodes récentes. J’ai donc immédiatement pensé aux activités devenues rares aujourd’hui mais qui ont permis notre développement pendant des millions d’années, comme de fouiller le sol, grimper aux arbres, courir, marcher, cueillir des fruits et les dépla-cer d’un lieu à l’autre. Aujourd’hui, nous faisons beaucoup de choses très bizarres : marcher avec des chaussures, porter des objets dans des sacs à dos… Combien y a-t-il de personnes dans le monde qui continuent à grimper aux arbres ou à déterrer des racines avec un bâton ? Ces actions, aujourd’hui presque disparues, ont été jusqu’à tout récemment encore essentielles à notre espèce. J’ai donc pro-posé à David de réfléchir à cette question en adoptant une approche évolutionniste dans la manière de distinguer et de classer les activités humaines. Nous savons aussi que des activités jusque-là incon-nues ont récemment vu le jour. Certains sports et certains arts notamment sont très intéressants à étudier car ils montrent des comportements nouveaux. A cet égard, il serait d’ailleurs utile de savoir s’il s’agit de modifications de comportements antérieurs ou de créations détachées de toute pratique préexistante.

D.E. : Il semble que vous ayez tiré une grande satisfaction de vos échanges avec David… de quelle nature était-elle ? Vous avez aussi parlé de « grâce »... d’autres mots vous viennent-ils à l’esprit ?

D.L. : La science fonctionne de deux façons. Elle est majoritairement déductive, mais peut parfois être inductive. De grandes découvertes scientifiques, comme la théorie de Darwin sur la sélection naturelle, sont ainsi tirées de l’observation de la nature. Le travail de David a été pour moi une mani-festation éloquente du fait que l’étude du mouvement humain trouve son origine dans l’art. L’art et la science n’étaient pas vus comme des domaines séparés. A Paris, Etienne Marey a contribué à l’invention du cinéma sur le plan scientifique comme artistique. Je ne pense pas qu’il distinguait l’un de l’autre. Il en va probablement de même, dans une certaine mesure, de Muybridge, qui travaillait en Californie pendant ces mêmes années. Nous traçons souvent une frontière artificielle entre l’art et la science, qui sont en vérité plus interdépendants qu’on ne le pense. La science utilise des principes plus logiques pour poser les questions tandis que les artistes y mettent des considérations plus abs-traites. Mais combien le dialogue entre eux est fructueux !

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LA BIOMECANIQUE, ENTRE ART ET SCIENCE

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La biomécanique est la mécanique appliquée aux sciences vivantes. Elle est l’étude et la reproduc-tion des mécanismes qui parviennent à la réalisation d’un mouvement déterminé du corps. De tous temps, les hommes furent fascinés par l’étude et les mouvements du corps humain. Le corps occupe une place centrale dans la vie de l’homme, tant sur le plan scientifique qu’artistique.

Nées d’un intérêt scientifique pour le corps humain et son anatomie, les premières traces de recherches apparaissent dès 1700 av J.C. sur des papyrus égyptiens.

La curiosité des hommes à expliquer le com-portement du vivant a toujours été vive. C’est pourquoi le développement de la bioméca-nique, déjà évoqué par Aristote dans son traité « De motus animalium », confronte les recherches et expériences dans les domaines de la physique, chimie, mécanique, biologie, médecine, chirurgie,… Au 4ème siècle avant J.C., Hippocrate (460-377 av. J.C.) fonde la médecine moderne, com-plétant alors les connaissances anatomiques et physiologiques.

Prémices des premières études du corps humain

DR

Serment d’Hippocrate

“La science de la mécanique est en cela si noble et utile en comparaison à toutes les autres sciences, qu’il se peut que tous les organismes vivants ayant la possibilité de se mouvoir soient régis selon ses lois”.Extrait du Codex Atlanticus de Léonard de Vinci

LA BIOMÉCANIQUE DANS L’HISTOIRE*

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------*Présentation inspirée d’un article écrit par A. Manolova et P. Debraux en septembre 2011, respectivement professeur en biomécanique et professeur en performance motrice et intitulé Biomécanique du Sport et de l’excercice.

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Dans le courant du IIe siècle, Claude Galien (130-201 ou 216), médecin de l’empereur Marc Au-rèle, détourne l’interdiction de disséquer des corps humains et étudie l’anatomie du singe Magot. Malgré une proximité physiologique entre le singe et l’Homme, ses recherches sont très fortement faussées mais restent inchangées durant près de 1300 ans ; jusqu’aux dissections humaines réali-sées par le médecin flamand Andreas Vesalius (1514-1464) qui révolutionne l’anatomie et l’étude du corps humain.

L’Homme de Vitruve, Léonard De Vinci

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Renaissance et prospérité scientifique

DR

Etude des mouvements du bras et de l’avant-bras, Léonard de Vinci, Codex Atlanticus

C’est toutefois Léonard de Vinci (1452-1519) qui fut l’un des premiers à disséquer des êtres humains. Dans son essai, Codex Atlanticus, il réalise les premières études de la mécanique des mouvements humains.

Et c’est avec Galilée (1564-1642) que la mé-canique devient une science à part entière. Il étudie la médecine et la physique, con-firme plusieurs théorèmes sur le centre de gravité et étudie la chute des corps.

Enfin, c’est à Giovanni Alfonso Borelli (1608-1679) que l’on doit l’un des premiers essais d’analyse scientifique du mouvement des organismes vivants : la locomotion.S’apuyant sur la théorie de la mécanique de Galilée, il compare la locomotion de l’homme avec le mouvement d’une petite barque et de son rameur et constate les similitudes entre l’appui du pied sur le sol et l’appui de la pelle de la rame dans l’eau. Borelli s’intéresse également à l’explicatiosn des forces internes (les contractions mus-cualires). Enfin, il étudie la locomotion sur terre, dans l’eau et dans l’air avec la marche des animaux, la nage des poissons et le vol des oiseaux.

XIXe siècle et analyse scientifique du mouvement

La notion moderne de la locomotion est née. Elle englobe tous les déplacements des organismes vivants dans les milieux réels. Chez l’homme, la marche est une locomotion terrestre très com-plexe dans lequel participe pratiquement tout le système locomoteur : environ 200 os, 320 muscles squelettiques et de nombreuses articulations. Les premières recherches expérimentales sur la loco-motion humaine sont réalisées à Göttingen par les frères Wilhelm et Eduard Weber en 1836.La recherche sur la locomotion humaine s’accroit lorsqu’Eadweard Muybridge (1830-1904) ré-alise les premières photographies successives d’un mouvement dans l’espace. A l’époque, une polémique existait quant à savoir si lors d’un galop les quatres jambes du cheval pouvaient être en l’air simultanément.

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En 1878, Muybridge dispose 12 appareils photographiques sur une ligne. Un cheval au galop s’élance et déclenche chaque appareil en passant devant lui. Cette première suite de photogra-phies prouve qu’il existe une phase où les quatre jambes du cheval sont en l’air simultanément.Il s’intéresse dès lors au mouvement animal et humain et met au point le zoopraxiscope, un pro-jecteur qui recompose le mouvement par la vision rapide et successive des phases du mouvement. La machine est réalisée dès 1879. Ses travaux le posent en précurseurs du cinéma. En 1887 est édité son plus important ouvrage Animal Locomotion.

Intéressé par les travaux de Muybridge, le scientifique Jules-Etienne Marey (1830-1904) prend contact avec lui en 1881. Il veut étudier la mécanique du vol des oiseaux. A cette époque, le pôle de la recherche scientifique se trouve en France ; le leader en est J.E. Marey Professeur au Collège de France. A la suite de sa rencontre avec Muybridge, Marey créé le fusil photographique en 1882. (le chronophotographe).C’est un appareil portatif qui permet de prendre 12 clichés sur une même plaque grâce à un obturateur rotatif qui fonctionne sur le même principe qu’ un fusil.

Muybridge et Marey

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Horse in motion, E.Muybridge

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Chronophotographie et étude des corps

E-J Marey était assisté de G.Demenÿ l’un de ses anciens élèves, passionné de sport et de-venu collaborateur. Ils développèrent ensemble le principe de la chronophotographie en effectuant de nombreuses recherches avec des sportifs. La chronophotographie, créée par deux personnages alliant par leurs formations en médecine, physiologie, gymnastique et inventeur, nous immerge dans l’univers de l’étude du corps humain en pleine action. L’ensemble de ces travaux vient à con-stituer ainsi une véritable encyclopédie visuelle de la mécanique des corps, un mélange entre ac-complissement sportif et beauté artistique.Georges Demenÿ et Etienne-Jules Marey ont également bâti ensemble la station physiologique du Parc des Princes, premier laboratoire de biomécanique. A l’aide du chronophotographe, ils fixent l’image de sportifs en action sur des plaques de verre établissant ainsi les lois physiologiques du mouvement. Puis Marey invente le chronophotographe à pellicule qui permet de séparer les images et d’étudier ainsi les mouvements très rapides. Après sa brouille avec Demenÿ, Marey s’attachera à faire vivre ce lieu historique qui a vu naître le cinéma, les théories d’éducation physique et de l’aviation. Afin de conserver la mémoire de ces découvertes, il fera construire sur le même terrain en 1899, l’Institut Marey, musée-laboratoire re-groupant les résultats de ses longues années de recherches. A la mort de Marey, ses élèves con-tinueront à utiliser le laboratoire de recherche.

Dans la continuité de son obsession pour l’invisible, Marey développe avec l’aide de Lucien Bull, le concept de micro-cinématographie à grande vitesse. Il souhaite filmer les mouvements infiniments petits. Marey installe alors un microscope sur son chronophotographe, révélant ainsi les profondeurs des tissus vivants. Cette découverte cinématographique est également capitale dans l’avancée de la science.

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Lucien Bull, élève de Marey, met au point la technique de ciné-ma rapide dès 1904 en atteignant la capacité de 4 000 images par secondes. Il perfectionne sa technique en 1928 avec la vitesse de 50 000 images par seconde et atteint finalement le million d’images par seconde en 1951.Il développe également, en plus du cinéma ultra-rapide, un appareil permettant de zoomer 8 à 10 fois : le microcinématographe.

Toutes ces avancées cinématographiques ouvrèrent la porte aux scientifiques contemporains et à la mise en place de leurs tech-niques vidéos.

Lucien Bull et sa caméra stéréoscopique à film 35

Fusil photographique. DR

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Avancées scientifiques ou fins artistiques : la polémique Ces recherches menées avant tout par des scientifiques, entrouvrent toutefois la porte d’un monde imaginaire, celui qu’un œil ne peut pas voir révélé dès lors par l’appareil chronopho-tographique. Marta Braun, professeure au département d’histoire du cinéma et de la photographie de la Ryerson Polytechnic University à Toronto est une grande spécialiste du travail de Marey ; elle a également étudié les travaux de Muybridge sur lequel elle soulève une polémique majeure. Selon ses recher-ches, Muybridge aurait modifié ses clichés par bien des égards. Son but étant purement artistique et selon la mode d’un certain esthétisme d’époque, Muybridge n’aurait pas hésité à recadrer et manipuler des images. Ce qui tend à affirmer que le travail de Muybridge n’a pas de valeur pure-ment scientifique. Dans son article Muybridge le magnifique, paru en novembre 2011, Marta Braun résume : “C’est dans le cadre de mes recherches sur Etienne-Jules Marey que j’ai commencé à m’interesser au monumental ouvrage d’Eadweard Muybridge, Animal Locomotion, il y a plus de 20 ans. Dans les histoires du cinéma et de la photographie, les oeuvres des deux chercheurs ont long-temps été considérées comme semblables, dans leurs intentions et dans leurs résultats. A l’intar des contemporains de Muybridge, les historiens ont perçu ses travaux en Pennsylvanie comme une photographie du mouvement dont la régularité séquentielle fournissait les “moyens d’une mesure aussi proche que possible de l’exactitude scientifique, réduisant autant que faire se peut les sources d’erreurs”, selon les termes du professeur Marks, en introduction à la publication de 1888. Pourtant, à mes yeux, un siècle plus tard, Animal Locomotion ne s’accorde guère aux critères savants - bien moins que les chronophotographies de Marey. Si on la compare avec les protocoles rigoureux du physiologiste français, il est difficile de comprendre en quoi l’oeuvre du photographe américain correspond à un projet scientifique proprement dit - c’est à dire une démarche analytique, systéma-tique, précise, objective et désintéressée”.

Woman in motion, E.Muybridge

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« Je n’ai jamais obtenu de vitesses pareilles. Des vitesses qui arrivent à l’immobilité. » Jean Cocteau

Inventé en 1904 par l’Autrichien August Musger, le ralenti est un procédé caractéristique de l’étude du mouvement et du temps, qui a par la suite été utilisé comme technique narrative ou artistique au cinéma.Le ralenti est, au départ, un dispositif de décomposition systématique des mouvements, des gestes animaux et humains, mais aussi des impacts de balles, avant de devenir un art.L’utilisation d’un ralenti à un degré quelconque permet donc de voir un mouvement trop rapide pour être observé directement.

En modifiant la cadence de prise de vues, on peut obtenir les effets d’accélérés ou de ralenti à la projection.

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Tennis, Harold Edgerton

LE RALENTI, ENTRE TECHNIQUE ET ART

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Evolution des techniques

En 1932, le spécialiste en électronique et professeur au MIT, Harold Edgerton, invente le procédé stroboscopique. Il met au point un tube contenant du xénon, capable de produire des éclairs de forte intensité et de très brève durée (3 à 1000 éclairs par seconde). Le stroboscope permet de dé-composer les mouvements trop rapides pour que l’œil ne les perçoive.

Aujourd’hui, la caméra la plus puissante au monde a été créée par le MIT (Massachussetts Institute of Technology). Elle possède l’incroyable capacité de filmer à la vitesse de la lumière soit un billion (1 000 milliards) d’images par seconde. Rappelons qu’une caméra classique ne filme qu’entre 25 et 60 images par seconde. Plus la vitesse d’enregistrement de l’image est importante, plus le ralenti sera détaillé et permettra d’analyser les détails les plus précis, invisibles à l’œil nu.Avec de telles capacités, la caméra est en mesure de capter les mouvements de la lumière (temps d’exposition d’une picoseconde, soit le temps que met un photon -particule de lumière- pour par-courir 3.3 mm).

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Pomme, Harold Edgerton

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DATES CLÉS

Hippocrate (460-370 av.J.C.) Fondements de la médecine

Aristote (384-322 av. J.C.) Premières études du mouvement chez l’animal et l’homme

Archimède (287-212 av. J.C.) Etudes sur la poussée des corps

Claude Galien (130-201) Dissections sur le singe Magot

De Vinci (1452-1519) Etudes sur la position d’équilibre, le centre de gravité Etudes sur la locomotion et la posture humaine Etude du vol des oiseaux = fondements de l’aérodynamique

Andreas Vesalius (1514-1564) Dissections humaines

Galilée (1564-1642) Invente la méthode expérimentale en science

Borelli (1608-1679) Travaux sur le mouvement des animaux

Newton (1642-1727) Principe des leviers « il est aisé de déterminer les forces exercées par les tendons sur les os pour créer le mouvement”

Muybridge (1830-1904) 1879 – Invention du Zoopraxiscope

Marey (1830-1904) 1882 – Création du fusil photographique et de la chronophotographie

Auguste et Louis Lumière 1895 - Invention du cinématographe

August Musger 1904 - Invention du ralenti

Harold Edgerton 1932 - Invention du stroboscope

Michael Ivanitski (1895-1969) 1938 - publication du livre fondamental sur la biomécanique du sport : Les mouvements du corps humains

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Biomécanique : étymologiquement, la biomécanique est la mécanique appliquée aux sciences vivantes. C’est l’étude et la reproduction des mécanismes qui aboutissent à un mouvement déter-miné du corps. Elle permet ainsi d’analyser les forces et mouvements intervenants dans le monde vivant et les modifications qu’ils entraînent.

Bullet time : né du principe de la chronophotographie, le bul-let time est un effet visuel dérivé du ralenti, obtenu grâce à une série d’appareils photos disposés autour de l’action et déclen-chés avec un différentiel de temps très court.Il donne une impression d’extrême ralenti tout en donnant l’impression que la caméra tourne autour d’une scène figée, comme si le temps s’était arrêté.La technique a été inventée et réalisée par E.Muybridge lors de son étude du mouvement d’un cheval au galop.

Cadence : la cadence est le nombre de photogrammes à la seconde défilant derrière la fenêtre de prise de vues ou de projection. Elle est synonyme de fréquence, à ne pas confondre avec la vitesse de défilement.Au cinéma 24 i/s = 0.456m/s en 35 mm standard.

Cinématographe : ancêtre du cinéma inventé par les frères Lumière, c’est un appareil servant à enregistrer des photographies animées et à les projeter sur écran.

Chorégraphie : est un ensemble conçu ou imaginé de mouvements corporels délibérés qui pos-sède un nexus, c’est-à-dire une logique de mouvement, propre.

Chronophotographie : est une méthode d’analyse du mouvement d’un corps au moyen d’une série de photographies successives.

High speed camera : est une caméra à grande vitesse. C’est un dispositif utilisé pour l’enregistrement d’objets en mouvement rapide comme une image photographique sur un support de stockage. Les images stockées peuvent être ensuite lues au ralenti.

Plateau Bullet Time, Eammnuel Carlier

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GLOSSAIRE

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I/S : est l’abréviation de l’unité de mesure « images par seconde » et correspond ainsi au nombre d’images affichées en une seconde par un dispositif. Il est utilisé principalement en cinéma. Ce dernier a pour réglementation le tournage d’un film en 24 i/s. La polémique actuelle étant, avec l’apparition de nouvelles technologies, l’évolution en 60 i/s.Aujourd’hui, la plus puissante caméra au monde est capable d’enregistrer un billion d’images par seconde, soit 1 000 000 000 000 i/s. Développée par le MIT (Institut Technologique du Massachus-setts aux USA), elle est utilisée dans le domaine de la recherche scientifique et est suffisamment rapide pour capturer des ondes lumineuses. La caméra à haute vitesse utilise des impulsions laser qui durent moins d’un milliardième de seconde comme un éclair. Cette technique est aujourd’hui nommée femto-photographie.

Locomotion : la locomotion est l’action motrice de déplacement d’un lieu à un autre faisant changer la localisation du corps entier dans l’environnement.

Photogramme : un photogramme est une image photographique obtenue sans utiliser d’appareil photographique. Il est obtenu en plaçant les objets sur une surface photosensible et en l’exposant ensuite directement à la lumière.Au cinéma, le photogramme est la plus petite unité de prise de vue.

Ralenti (Slow motion): le ralenti est un effet cinématographique qui fait apparaître sur l’écran les mouvements plus lents qu’ils ne le sont dans la réalité, et qui provient d’un tournage accéléré. Inventé par l’autrichien August Musger, c’est un trucage du temps obtenu par une augmentation de la cadence à la prise de vues et une cadence normale à la projection. Il permet l’analyse des mouvements très rapides.

Le saviez-

vous?

Les premières bobines qui comportaient des ralentis sont issues de recherches de l’armée pour préparer les guerres. Le ralenti était un moyen pour eux d’observer les impacts des balles, calibrer les projectiles et améliorer les performances d’impact.

Comment réaliser un ralenti ? On règle la caméra sur une cadence supérieure à 25 images par sec-onde (dans notre expérience ici au Laboratoire, la caméra est réglée sur 3000 i/s), ce qui entraîne lors de la projection ou diffusion à cadence normale (25 i/s) un ralentissement des mouvements poussés à l’extrême, donc un plan au ralenti.

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Stroboscope : Le stroboscope permet d’observer des phénomènes périodiques dont la fréquence est trop élevée pour l’œil qui ne perçoit pas la discontinuité : 1/1 seconde, saccades ; 1/24, film con-tinu. Il faut régler la fréquence des flashs sur celle du phénomène qui apparaît alors comme fixe, ou ralenti (en avant ou en arrière) et devient observable. C’est l’« effet stroboscopique », lui-même un cas particulier d’observation d’un mouvement à partir d’images fixes comme dans le cinéma. Ses degrés de liberté (ou paramètres) sont l’intensité de chaque flash, la durée du flash et la période entre deux flashs. Initialement composé d’une lampe flash xénon (ou tube à éclair), celle-ci est main-tenant de plus en plus remplacée par des diodes électroluminescentes (DEL).

Le saviez-

vous?

Vitesse de défilement : c’est le métrage de pellicule défilant par seconde dans l’appareil.Vitesse perçue = cadence de projection / cadence de la caméraAinsi, un plan tourné à 100i/s projeté à 25 i/s donnera l’impression d’un mouvement projeté à ! de la vitesse normale.

Zoopraxiscope : Inventé par Eadward Muybridge, c’est l’un des premiers dispositifs permettant la visu-alisation de courtes séquences animées. Les images sont inscrites sur un disque rotatif. Grâce à leur rota-tion dans l’appareil, les images donnent l’impression de mouvement.Le zoopraxiscope fut l’une des principales inspirations de thomas Edison et William Dickson pour l’invention de leur Kinétoscope (premier dispositif de visualisation de films à vocation commerciale).

Zootrope : vient du mot zoo qui signifie animal et tropos ; tourner. Mis au point par le physicien belge William George Homer en 1834. C’est l’adaptation horizontale du zoopraxiscope : tambour dans lequel sont découpées des fentes par lesquelles on observe des images dosposées. le tam-bour tournant rapidement autour de son axe, le sujet en image semble alors s’animer.

Les stroboscopes étaient utilisés pour photographier les mouvements ennemis de nuit pendant la Seconde Guerre Mondiale.

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ANNEXES

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LE LABORATOIRE

Le Laboratoire est un lieu d’art et de design aux frontières de la science ; il s’inscrit sous l’égide du réseau international ArtScience Labs, créé par David Edwards (écrivain et professeur à l’Université d’Harvard).Les expériences exposées au Laboratoire sont issues de la rencontre entre créateurs et scienti-fiques ; elles sont vouées à des fins éducatives, humanitaires et commerciales lorsque l’innovation est le catalyseur d’un produit.

DES RENCONTRES ARTSCIENCE

Depuis son ouverture en octobre 2007, Le Laboratoire a développé des expériences dans un champ créatif très large. Dans cette lig-née, des artistes plasticiens comme Fabrice Hyber ou Shilpa Gupta ont pu accéder à la rencontre d’éminents scientifiques, respective-ment Robert Langer, chercheur en biochimie, et la neuropsycho-logue américaine Mazharin Banaji.

Les architectes R&Sie(n) ont eu la possibilité d’inscrire leur recher-che grâce à l’intervention des plus grands mathématiciens comme François Jouve ; le compositeur japonais de musique numérique Ryoji Ikeda a pu présenter sa première exposition personnelle en collaboration avec le théoricien des nombres de l’Université d’Harvard, Benedict Gross.

L’artiste sud-africain William Kentridge a présenté le fruit de sa collaboration avec le scientifique Peter Galison sur la simultanéité du temps. Au printemps 2011, Le Laboratoire a proposé une ex-périence inédite : WA|HH by Starck + Edwards, un spray de saveur dessiné par le célèbre designer.Cet automne, et pour sa 15e expérience, Le Laboratoire accueille le vidéaste américain David Michalek qui a collaboré avec le biolo-giste Dan Lieberman sur les mouvements du corps.

UNE VOCATION HUMANITAIRE

L’une des vocations du Laboratoire est d’initier des programmes humanitaires internationaux, telle l’exposition du photographe américain James Natchtwey. Son travail fut le fruit de sa collaboration avec Anne Goldfed, chercheuse en médecine, professeure à Harvard et co-fondatrice d’un dispen-saire au Cambodge. Ce témoignage photographique sur la souffrance de malades atteints du SIDA dans des pays peu développés a été le fer de lance d’une série de conférences internationales sur la santé. Aujourd’hui, le sac CellBag - un nouveau système de transport de l’eau dessiné par les designers Mathieu Lehanneur et Julien Benayoun et imaginé par le professeur David Edwards - est à l’origine d’un programme humanitaire en Afrique du Sud.

©Phase One Photography

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UN INCUBATEUR COMMERCIAL

Certaines collaborations initient par ailleurs des innovations sujettes à la production de nouveaux objets. Quand David Edwards imagine avec le designer Mathieu Lehanneur un nouveau système de purifi-cation par les plantes exposé à l’ouverture du Laboratoire, Andrea naît quelques mois plus tard. Ce filtre est aujourd’hui vendu dans le monde entier. Quand le même David Edwards créé Le Whif, un inhalateur de saveurs imaginé avec le Chef Thierry Marx, l’objet devient Aeroshot quelques années plus tard et multiplie ses points de vente mondiale ; la startup Aerodesign atteint aujourd’hui des records de vente. La cuisine aérienne est née des innovations de David Edwards qui a continué à développer des objets insolites comme le Whaf, un générateur de nuages de saveur designé par Marc Bretillot et tout récemment, WA|HH Quantum Sensations créé avec Philippe Starck. Au printemps 2012, c’est le fruit de la collaboration entre David Edwards et le designer François Azambourg qui a mené à la création de la startup WikiCell Designs, le tout premier emballage co-mestible.

UN PROGRAMME EDUCATIF

Le programme éducatif du Laboratoire constitue également une partie importante des activités du lieu. Certaines expositions trouvent leurs origines dans un cours tenu par David Edwards à l’Université d’Harvard. Les expériences CellBag, Musetrek ou Design Cellulaire ont vu le jour sur une idée d’un groupe d’étudiants.Par ailleurs, Le Prix ArtScience développe des projets pédagogiques où ingénierie et art cohabitent au service de l’innovation. Fondé à Boston en 2009, le Prix a pour objectif de stimuler la créativité de jeunes étudiants en design et de grandes écoles d’ingénieurs en les incitant à rapprocher deux domaines culturels : l’art et la science.Le Laboratoire accueille tout au long de l’année, les étudiants qui participent au Prix ArtScience et reçoit chaque été, un workshop international constitué des étudiants des plus grandes universités et écoles du monde.

©Phase One Photography

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ARTSCIENCE LABS

ArtScience Labs est le réseau international qui fédère les Laboratoires créés par David Edwards, professeur à l’Université d’Harvard.Ces Laboratoires sont des lieux de recherche, de création et de réalisation qui allient l’art et la science de pointe dans une démarche socialement responsable. Ils invitent des artistes, designers, scien-tifiques et étudiants du monde entier à développer leur esprit créatif dans des projets innovants, péda-gogiques, industriels et humanitaires.

UN INCUBATEUR D’IDEES

« Nous avons créé notre réseau de laboratoires d’artscience – aujourd’hui fédéré autour d’ArtScience Labs - pour offrir un envi-ronnement expérimental homogène dans lequel des idées origi-nales peuvent s’épanouir et se traduire en applications majeures dans le domaine de l’éducation, de la culture, de l’industrie et du lien social. Ce réseau de laboratoires s’apparente à un « in-cubateur d’idées ». Des idées qui y pénètrent à l’état de rêve dans l’esprit de lycéens ou d’étudiants passionnés, s’y transfor-ment en œuvres d’art ou de design et en sortent sous forme de produits commerciaux ou tout aussi différent en actions hu-manitaires. Chemin faisant, les participants ont appris à imag-iner, convaincre, collaborer, réaliser.Les différents centres d’ArtScience Labs proposent aux créateurs un environnement expérimental stimulant et interdisciplinaire, et servent de catalyseurs du changement pour les établisse-ments scolaires et universitaires, les entreprises, les organismes publics ou les organisations non-gouvernementales. »

David Edwards

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David Edwards est fondateur du Laboratoire et du réseau Art-Science Labs, en France, aux Etats-Unis et en Afrique du Sud. Il est créateur de plusieurs innovations (Andrea, Aeroshot, le Whaf, CellBag, WA|HH Quantum Sensations, WikiCells…), écrivain, et professeur à l’Université d’Harvard où il dirige un programme d’innovation étroitement lié au Laboratoire. Il vit et travaille à Paris.David Edwards est l’auteur d’Artscience: creativity in the post-google generation (Harvard press 2008), livre initiateur du Labo-ratoire, et de The lab:creativity and culture (Harvard press 2010), paru aux Editions Odile Jacob sous le titre Le Manifeste du Labo-ratoire (janvier 2011). Il est également l’auteur des deux romans expérimentaux du Laboratoire (sous le nom de Séguier) : Niche (l’ensba 2007) et Whiff (l’ensba 2009).David Edwards est membre des académies nationales des tech-nologies en France (depuis 2008) et aux Etats-Unis (depuis 2001). Il a reçu de nombreux prix internationaux pour ses innovations et ses ouvrages ; il a été fait Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres par le ministère de la culture en 2008.

www.davidideas.com

L’ARTSCIENCE, SOURCE DE NOUVELLES EXPERIMENTATIONS

« Les œuvres d’art et de design qui résultent d’une confrontation avec la science, ou tout au moins avec la technologie, remplissent aujourd’hui les musées. Les œuvres d’art et de design qui naissent d’expérimentations dans un laboratoire culturel possèdent une définition plus étroite. Au Labora-toire, nous cherchons des idées qui nécessitent l’apport conjoint de visions artistiques nouvelles et de recherches scientifiques poussées. Une fois les idées formulées, nous apportons notre con-tribution, notamment financière, à la réalisation des projets expérimentaux qui en résultent. Ainsi, l’artscience, ce processus de pensée créatrice qui synthétise les démarches esthétiques et analyt-iques, devient un catalyseur de l’innovation et la base de partenariats pouvant toucher tout autant les domaines culturels, industriels et humanitaires. (…)L’art, comme la science, sont donc vus au travers des processus mis en œuvre. Le résultat, que ce soit une installation d’art contemporain ou un objet de design industriel, n’est évidemment pas mineur, mais il perd un peu de son sens si l’on fait abstraction du processus expérimental dont il est issu. »

David EdwardsFondateur du réseau ArtScience Labs

Extraits de The Manual of Museum Management (seconde édition), de Barry Lord and Gail Dexter Lord.Rowman and Littlefield, 2009.

DAVID EDWARDS

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THE LABSTORE

The LabStore de Paris est la première boutique inaugurée par le réseau ArtScience Labs. Créée sous l’impulsion de David Edwards, The LabStore est dédié au design issu des expériences présen-tées au Laboratoire.

Toujours à la pointe de l’innovation, The LabStore présente des produits en exclusivité :Andrea, le purificateur d’air par les plantes designé par Mathieu LehanneurAeroshot, l’inhalateur de saveur inventé par David EdwardsLe Whaf, le générateur de nuages de saveur dessiné par Marc BretillotLe CellBag, le sac-gourde imaginé par David Edwards et designé par Mathieu Lehanneur et Julien BenayounWA|HH Quantum Sensations, le spray de saveur by Starck + Edwards.

Fort de son succès parisien, d’autres LabStore ouvriront leurs portes aux Etats-Unis en 2014.

The LabStore Paris4, rue du BouloiFR- 75001 Paris+ 33 (0)1 78 09 49 63

Jours et horaires d’ouvertureLundi-jeudi-vendredi-samedi : 12h-19hDimanche : 13h-19hMardi: fermé

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PRIX ARTSCIENCE

Le Prix ArtScience, initié à Boston aux Etats-Unis, a vu le jour à Paris à l’automne 2010. Il a pour objectif de stimuler la créativité de jeunes étudiants en les incit-ant à rapprocher deux domaines culturels, l’Art et la Science.

Durant un semestre, une trentaine d’étudiants répartis en petits groupes se réunissent autour d’une thématique de recherche choisie par un comité scientifique. Ils développent leurs propres projets d’innovation et apprennent à les concrétiser, guidés par des artistes, des scientifiques et des de-signers reconnus.

Les thématiques proposées sont à la pointe de l’actualité : la première édition (2010-2011) interro-geait les étudiants sur «L’Avenir de l’Eau», la seconde sur «Les Mondes Virtuels». L’édition 2013 est quant à elle, axée sur le thème de la «Biologie synthétique».

Télécom Paris Tech, l’Ecole Centrale de Paris, Strate Collège, l’Ecole Parsons à Paris et l’University College of London, aux côtés des partenaires Orange (partenaire depuis la première édition), Da-none Research et Disney sont impliqués dans ce projet mis en œuvre par Le Laboratoire et Art-Science Labs.

A l’issue du semestre, les étudiants présentent leurs projets au comité scientifique du Prix Art-Science. Deux ou trois groupes deviennent lauréats et sont récompensés par une dotation finan-cière qui aidera à la concrétisation de leurs innovations.

Enfin, les projets gagnants sont présentés lors de la session internationale du Prix ArtScience à l’Université d’Harvard, chaque automne.

© Phase One Photography © Phase One Photography

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LE LABORATOIRE4, rue du BouloiF-75001 Paris

[email protected]

Métro

Louvre Rivoli, ligne 1 (350 m)Palais- Royal / Musée du Louvre, lignes 1 & 7 (300 m)

Bus

48, 74, 85, 21, 81, 67

Vélib’

12, rue du Colonel Driant29, rue J.-J. Rousseau192, rue Saint- Honoré

Parking

devant Le Laboratoire : Parking Vinci, rue Croix des Petits Champs

JOURS D’OUVERTURE

Vendredi, samedi, dimanche, lundide midi à 19h

INFORMATIONS PRATIQUES

TARIFS

Tarif normal: 6 eurosTarif réduit: 4,50 eurosTarif de groupe à partir de 8 personnes : 3 euros

Gratuit tous les premiers dimanches du mois