L'Individuation Psychique Et Collective - Simondon

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GILBERT SIMONDON individuation psychique et collective L a philosophie de Gilbert Simondon a pour objet le processus d'individuation et son antériorité sur l'individu qui n'est qu'une phase dans. un processus pré- individuel. Sa problématique s'organise autour du fonds grec - la physis des anciens physiologues et les notions platonicienne et aristotélicienne de «forme» - et des· découvertes contemporaines qui en permettent la critique: celles de «potentiel>l, d'« information », de «métastabilité Il et de «transductivité". Cette problématique est ici mise en œuvre à propos de l'individuation psychique et collective. En même teS qu'il développe une critique de l'hylémorphisme et logique de l'identité et du tiers-exclu au nom d'équilibre métastable, l'auteur jette les fOlnprltg'i science unitaire. Cet ouvrage écrit en 1958 de manière plus que prémonitoire tout un seteur ! philosophie française contemporaine qui, en-dciL monisme et du dualisme, veut être une dynamique et une génétique des singularités de l'être et de GILBE SIMONDON (1921989) est l'auteur de nOlllbr dont, aux éditions Aubier, Du mode /existence des ubi 1 Philosoph

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Filosofía

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  • GILBERT SIMONDON

    L'individuation psychique et collective

    L a philosophie de Gilbert Simondon a pour objet le processus d'individuation et son antriorit sur l'individu qui n'est qu'une phase dans. un processus pr

    individuel. Sa problmatique s'organise autour du fonds

    grec - la physis des anciens physiologues et les notions platonicienne et aristotlicienne de forme - et des

    dcouvertes contemporaines qui en permettent la critique:

    celles de potentiel>l, d' information , de mtastabilit Il

    et de transductivit".

    Cette problmatique est ici mise en uvre propos de l'individuation psychique et collective. En mme ternCIS

    qu'il dveloppe une critique de l'hylmorphisme et

    logique de l'identit et du tiers-exclu au nom

    d'quilibre mtastable, l'auteur jette les fOlnri,Arrlp.rltgri'i

    science unitaire. Cet ouvrage crit en 1958 de manire plus que prmonitoire tout un selteur cj! philosophie franaise contemporaine qui, en-dlaciL

    monisme et du dualisme, veut tre une dynamique

    et une gntique des singularits de l'tre et de

    GILBERT SIMONDON (1924-1989) est l'auteur de nOlllbr) dont, aux ditions Aubier, Du mode cf/existence des

    ubier 1 Philosoph

  • GILBERT SIMON DON L'individuation

    psychique et collective

    Prface de Bernard Stiegler

    Aubier 1 Philosophie

  • La philosophie est faire et c'est une bonne nouvelle.

    Elle n'est pas donne dans son histoire, ses institutions, ses textes, son inconscient: elle est toujours autre que son pass. Elle doit tre invente l'occasion des nouveaux savoirs qui hantent l'encyclopdie, par exemple les technologies et les sciences, mais pas seulement elles. L'invention philosophique a un programme : prendre en compte la nouveaut et l'nergie de la dcision philosophique, cesser de critiquer >. Et un mot d'ordre : Inventez la philosophie!

  • L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE

    ET COLLECTIVE

  • GILBERT SIMON DON

    L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE

    ET COLLECTIVE la lumire des notions de Forme,

    Information, Potentiel et Mtastabilit.

    Res L'invention philosophique

    AUBIER

  • A Michelle Berger, ma femme

    SLUB

    Editions Aubier, 1989 et. 2007 ISBN 978-2-7007-1890-4

  • L'INQUITANTE TRANGET DE LA PENSE ET LA MTAPHYSIQUE DE PNLOPE

    Pour Franois Laruelle, qui m'a fait connatre l'uvre de Gilbert Simondon.

    Depuis Jean-Jacques Rousseau, une des questions les plus rpandues dans les dbats politiques (et par o se distinguent traditionnellement la droite et la gauche) est de savoir si l'homme est naturellement bon ou mauvais. Or une telle question n'a philosophiquement aucun sens -et lorsque l'on attribue au penseur du contrat social le propos selon lequel l'homme est foncirement bon, on altre sa pense prcisment l o elle est philosophique.

    Sans aucun doute, pour Rousseau, si l'homme de la pure nature existait, il ne pourrait tre que foncirement bon. Mais il n'existe pas. En revanche, nous avons besoin de sa fiction pour penser l'homme, et ce, parce que Rousseau met en vidence que l'homme est un processus, qu'il est donc en devenir, et que dans ce devenir, ce qui le meut est un motif dont Rousseau pose en principe que, tendant l'quilibre du droit travers le dsquilibre des faits, tendant en cela l'unit travers ses diffrences, il affirme une galit de tous les hommes qui a pour corrlat leur gale bont.

    Car il s'agit, dans le fameux Discours, de penser l'homme en droit, c'est--dire l'homme venir. L'homme devient, et un tel devenir n'est pas un mcanisme aveugle: c'est l'exercice d'une libert -la libert qu'a l'homme d'tre ou de ne pas tre bon. Autrement dit, l'homme n'est ni bon ni mauvais, parce qu'il est bon en droit et mauvais en fait: il est entre deux tendances, celle du rel actuel, et celle de l'imaginaire venir fond sur la fiction d'un pass absolu: celui de 1 'homme de la pure nature. Et la fiction de cet homme de la pure nature se mire dans l'avenir pos l'infini

  • II L'INDMDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    d'un processus d'individuation par essence inteinable. l'infmi, cela signifie aussi que cet tat d'galit et de bont qui dfinit l'honnne de la pure nature peut-tre n'a jamais exist [et] probablement n'existera jamais 1 : Rousseau n'a jamais prtendu I)i raliser le paradis sur terre, ni qu'il ait jamais eu lieu 2. A cet gard, mme le bon sauvage est mauvais en fait - si peu que ce soit.

    En fin de compte, poser la question de savoir si l'honnne est bon ou mauvais, c'est ne pas comprendre ce qu'est une question philosophique : c'est ne pas comprendre la ncessit de distingner ce qui est en fait de ce qui est en droit, et que la libert tient justement cette diffrence, tandis que la philosophie tient cette libert. Si la philosophie peut faire cette distinction, et sans opposer les termes qui s'y forment, c'est parce que le philosophe pose, l'origine mme de la philosophie, et connne une question fondatrice de toute philosophie, que l'honnne n'est ni bon ni mauvais: il est irrductiblement les deux. Il est bon et mauvais '.

    *

    Ce et ouvre ce que Simondon, reprenant un terme de la Thorie de la Forme, qui l'emprunte elle-mme la physique de l'lectromagntisme, appelle un champ' : la conjonction de coordination et, dans l'expression bon et mauvais , qui est videmment aussi une disjonction, qui est donc le nud d'une contradiction constitutive, nouant en cela un principe dynamique, cette conjonction disjonctive se tient entre des termes formant une relation transductive - o

    1. Rousseau, Discours sur l'origine de l'ingalit parmi les hommes, uvres compltes, Seuil, 1971, p. 210.

    2. Il n'est mme pas venu dans l'esprit de la plupart des ntres de douter que l'tat de nature et exist, tandis qu'il est vident, par la lecture des livres sacrs, que le premier homme, ayant reu immdiatement de Dieu des lumires et des prceptes, n'tait point lui-mme dans cet tat, et qu'en ajoutant aux crits de Mose la foi que leur doit tout philosophe chrtien, il faut nier que, mme avant le dluge, les hommes se soient jamais trouvs dans le pur tat de nature, moins qu'ils n'y soient retombs par quelque vnement extraordinaire: paradoxe fort embarrassant dfendre et tout fait impossible prouver , ibid., p. 212.

    3. Je commente ces anyses de Rousseau en dtail dans La technique et le temps 1. La faute d'Epimthe, Galile, 1994, p. 122-123.

    4. Cf infra, p. 36, 44, 46.

  • PRFACE III

    c'est la relation qui constitue ses tennes, et o un tenne, par exemple le bon, n'existe pas sans l'autre tenne, par exemple le mauvais.

    Or, une relation transductive comme celle du bon et du mauvais (qui est un champ) est elle-mme inscrite dans une relation transductive d'un type particulier (et qui ouvre un autre champ), que Simondon appelle une dyade 1 - tenne qu'il reprend Platon. La dyade n'est pas une simple relation transductive en ceci que ses tennes sont eux-mmes indfiuis, et en cela intenninables (et indtenninables). Ils tendent l'infini.

    Simondon pose que le champ o le et articule et en cela constitue le bon et le mauvais en les distinguant est travers de tendances qui ne s'actualisent et ne se concrtisent que dans ce et. C'est dans un tel champ que se fonne et transfonne un individu qui, comme processus d'individuation psychique se conjuguant avec une individuation collective tout en s'en distinguant, o il s'individue psychiquement en droit comme en fait, devient le centre et en ce sens le milieu de cette relation, et ce, prcisment comme sa conjonction disjonctive. Gilles Deleuze reprendra Simondon, et comme l'un des traits les plus rcurrents de son uvre propre, cette faon de penser partir d'une conjonction disjonctive en inscrivant les problmes de l'individuation au milieu d'une relation o il faut partir du milieu de la relation plutt que de ses extrmits pour pouvoir la penser.

    Une telle relation dynamique est une tension. Et elle ne peut se tendre qu' l'intrieur d'un processus d'individuation qui dpasse l'individu, et qui le traverse comme les tennes iudfinis de la dyade, dont cet individu est un thtre d'individuation. Qu'i! soit un tel thtre, et que l'individuation qui s'y joue comme une pice soit toujours dj la fois psychique et collective, que cette individuation, autrement dit, dpasse l'opposition de l'intrieur et de l'extrieur, et que, dans ce dpassement, jouent et s'expriment des tendances qui correspondent ce que l'on appelle, dans les expressions morales du jugement, tre bon ou tre mauvais (ou tre mchant ), cela veut dire qu'en tant que ce thtre, ce qui se joue sur la scne d'un tel individu

    1. Ibid., p. 21, 22, 40, 52, 117.

  • IV L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    s'individuant peut tre soit favorable l'individuation collective, par son individuation psychique, soit dfavorable cette individuation collective par cette mme individuation psychique, Mais dans ce cas, celle-ci tend tre plutt une dsindividuation psychique : une perte d'individuation psychique,

    C'est ainsi que Simondon consacre une brve mais vigoureuse analyse- la question de la tentation " tout en renouvelant de fond en comble la question du bien et du mal' qu'il ne range donc pas au magasin des antiquits mtaphysiques et morales. C'est aussi pourquoi il en appelle Socrate sur ce point. Car tre dfavorable l'individuation collective, c'est toujours, en [m de compte, tre dfavorable sa propre individuation psychique : tous comptes bien faits, c'est ncessairement se dsindividuer soi-mme,

    Et tel est aussi le sens du' et la fois conjonctif et disjonctif, non seulement dans la relation du bon et du mauvais, mais dans le processus d'individuation psychique et collective, o Simondon pose en principe que je ne peux m'individuer psychiquement qu'en participant l'individuation collective - tandis que toute volution de l'individuation collective affecte en retour les conditions de mon individuation psychique,

    C'est ce que disait dj Socrate: tre dfavorable l'individuation collective, ce que Socrate appelle tre injuste, c'est invitablement se faire tort' : tel est l'un des principaux enjeux du Gorgias.

    *

    Tendue comme jamais entre bont et mchancet, la question de l'avenir de l'humanit s'impose aujourd'hui vertigineusement - et cette question d'abord morale devient

    1. Ibid., p. 162-163. 2. Ibid., p. 159, 163, 244, 256. 3. Simondon crit ce sujet que le raisonnement de Socrate, ov8etcr

    fXCUV aj1a:p'tavet, selon lequel nul ne fait le mal volontairement, est remarquablement rvlateur de ce qu'est la vritable conscience morale de l'individu et d'une socit d'individus; en effet, comme la conscience morale est auto-nonnative et auto-constitutive, elle est par essence place dans l'alternative ou bien de ne pas exister, ou bien de ne pas faire le mal volontairement ) , cf infra, p. 259.

  • PRFACE v

    (comme cela s'impose avec Rousseau) la politique mme : c'est celle de la philia.

    Or, Simondon nous pennet d'envisager ces questions devenues politiques dans des tennes neufs - qui rinterprtent et ractivent l'ensemble des questions fondatrices de la pense philosophique travers un appareil conceptuel absolument original.

    Celui-ci dcrit les processus d'individuation vitale, physique et psychosociale en s'appuyant sur les acquis de la physique ontemporaine aussi bien que sur les rsultats des sciences humaines. Et son but dclar est de fonder une science humaine runifie - prcisment en ce qu'elle dpasse l'opposition du psychique et du social, artificiellement produite par la division du travail intellectuel qui aura donn naissance la psychologie et la . sociologie, au moment o la philosophie, comme pouvoir de synthse, abandonnait aux sciences positives ses capacits analytiques rgionales.

    Le devenir analytique des savoirs est issu de la sparation mthodologique des objets de l'intellect devenant les disciplines de la pense aussi bien que de la division industrielle du travail (manuel puis intellectuel) 1 .

    Psychologie et morale se sont spares dans la philosophie (ce qui n'avait aucun sens l'poque grecque) partir du moment o se sont mises en place des catgorisations et des distinctions dans le travail intellectuel qui ont fmalement conduit une division entre, d'un ct, mtaphysique (ou

    1. La distinction analytique des objets de la pense aura t la fois une condition pralable et un contrecoup de la division industrielle du travail de cette pense. Et elle aura conduit la liquidation de la Grande Synthse Psychosociale qu'tait l'unit de l'objet de la foi - un Objet/Sujet (Dieu) produit par le monothisme comme fruit et condition de ce gfd'in[diViduation psychique et collective que l'on aura appel

    Or. cette Grimde Synthse Psychosociale portait d'une main comme raison thorique et de l'autre la raison pratique subjectif de diffrenciation du bien et du mal, du bon et

    Jj;[fl\;rmeiflleur et du pire, du haut et du bas. La mort de Dieu . de cette Grande Synthse Psychosociale comme contradictions que recelaient les individuations psyhrites des Grecs et des Hbreux. Il en aura rsult du travail intellectuel - dans le contexte de la division indus

    travail - dont Simondon acte ici des limites, c'est--dire en l'r"pose une critique, au sens le plus philosophique qui soit: la fois

    le sillage de Kant et en rupture avec lui.

  • VI L'INDIVIDUATiON PSYCHIQUE ET COLLECTiVE

    critique de la mtaphysique) et pistmologie, et de l'autre ct, sciences humaines - celles-ci rsultant d'une division analytique des objets humains et sociaux selon les mthodes d'observation et de quantification spcifiant de nouveaux champs du travail intellectuel.

    Une telle rpartition des tches, qui conduisit l'clatement des savoirs (tel que dans le mme temps, la philosophie se sparait aussi des sciences de la nature), est contemporaine de la discrtisation des oprations du travail humain ( travers un processus de grammatisation ') et de leur extriorisation dans les machines par le capitalisme industriel.

    Cet tat de fait, qui aura induit un extraordinaire progrs des connaissances, est pourtant aussi ce qui conduit une sorte d'nuclation de la pense, voire sa dsindividuation, que tentent de nos jours de surmonter diverses vellits d'agrgations pluridisciplinaires - ainsi par exemple des sciences dites cognitives . Or, de telles ambitions, la facult de relier synthtiquement les savoirs analytiquement constitus par leurs mthodes fait largement dfaut - tandis que l'uvre de Simondon est la pense d'une telle facult, de sa ncessit, et de ce qui y fait obstacle de faon non pas conjoncturelle, mais bien structurelle, et comme ce qui, pour cette raison mme, est ce qui donne penser, et plus prcisment, penser une nouvelle critique de la pense comme raison individuante.

    *

    Comme l'a soulign Jacques Garelli2, Simondon ractive les questions des Prsocratiques: la pense de l'individuation psychique et collective est une gtandiose rouverture de la question inaugurale de l'Un et du Multiple et de l'hypokeimenon proton - qui se pose l'origine de la pense grecque comme le problme surgissant avec et pour la polis

    1. J'a dvelopp ce concept dans De la misre symbolique 1. L'poque hyperindustrielle, Galile, 2004, p. 103 et 112 sq. ; Mcrance et discrdit 1. La dcadence des dmocraties industrielles, Galile, 2004, note 1 p. 65-67, et Renchanter le monde. La valeur esprit contre le capitalisme industriel, Flammarion, 2006, p. 74 sq. et 124 sq.

    2. Dans sa Prface L'Individu et sa gense physico-biologique, Jrme Millon, 2005.

  • PRFACE VII

    naissante (o le principe de son dynamisme est aussi, comme tension de l'Un et du Multiple, le principe de ce qui la menace - comme danger de cette dsindividuation que les Grecs nomment stasis).

    En revisitant le nud de l'Un et du Multiple, Simondon tend reconstituer une poque synthtique de la philosophie aprs plusieurs sicles de domination de la pense analytique en philosophie - depuis Descartes et sa nouvelle conception de la mthode. Cela se voit particulirement bien dans L'Individuation psychique et collective qui, outre ses trs abondants et puissants dveloppements sur ce qu'il en est de la question de la relation comme premire question de la philosophie, et que cet ouvrage creuse dans tous les sens, revendique explicitement l'ambition de fonder avec ce nouveau concept de la relation 1 '( et donc de la synthse) une autre axiomatique des sciences humaines qui puisse fonder la science humaine.

    Cette ambition, cette mission de synthtiser2, rassigne la philosophie, et comme runification d'une science humaine, ce que Simondon compare au dpassement de l'opposition entre physique et chimie dans les sciences de la nature', n'est pas pour autant un cong doun l'analyse

    au contraire : rarement on aura vu un ouvrage de philotenir compte aussi scrupuleusement des savoirs de

    et dans tous les domaines, et par leur menu le bhlslmallv1IOlle (science physique, science de la vie, techno-

    l;ii::i:' psychologie, sciences sociales, sciences du repassant chaque fois par toute l'histoire de en aucun cas d'abandonner les considrations

    nallyjlqUies des objets de la pense, ni les mthodes qui perde les produire : il ne s'agit pas de s'opposer aux

    souligner le travail imposant que Jean-Hugues Barthlmy a simondonnienne de la relativit philosophique :

    Simondon et la philosophie de la nature, et Penser et la technique aprs Simondon, L'Hannattan, 2005.

    synthse n'est videmment pas dialectique, et elle appelle !':'d(,:iconcept de ce qu'il en est des conditions de la synthse mme j,r plus simplement ici ce qui unifie, ce qui produit de l'Un,

    o relance la multiplicit en l'in-dividuant : dynamique et ,'wlifa.ire, c'est ce que Simondon appelle une transduction rsolu

    p. 27. p. 34 35.

  • VIn L'INDMDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    sciences, ou de leur contester leurs objets. Il s'agit tout au contraire de considrer ces objets au plus prs. Mais il s'agit aussi de rinscrire ces rsultats analytiques dans un cheminement synthtique, c'est--dire dans une mthode qui est la relation mme en tant que sun-thsis.

    Une telle mthode repose sur le primat donn la relation qui constitne ses termes, et qui est dite en cela transductive - un primat donn par rapport la relation dductive a priori et la relation inductive a posteriori : c'est un nouveau rapport l'exprience pense comme tant irrductiblement inscrite dans un systme dynamique. La philosophie ellemme, et singulirement celle que propose Simondon luimme, est un cas spcifique d'une telle exprience et d'une telle inscription. Cette nouveaut (qui donne cong l'opposition de l'a priori et de l'a posteriorz) est la transduction comme relation dynamique dans un systme - et dans un ensemble de systmes, eux-mmes en relations transductives - pour laquelle il faut se donner le concept de prindividualit, et plus prcisment, de milieu prindividuel.

    *

    L'Individuation psychique et collective est l'ouvrage o Simondon tablit les conditions de possibilit et les limites de la connaissance de l'individuation sous toutes ses formes - physique, vitale et psychosociale: c'est une critique de la connaissance au sens kantien.

    Les conditions de possibilit de la connaissance de l'individuation y sont relatives : ce sont aussi des conditions d'impossibilit, ou encore, ce sont les conditions d'une possibilit limite et toujours relance. Ce sont les conditions d'une connaissance essentiellement conue, ds lors, comme le processus d'un inachvement qui caractrise aussi l'individuation en tant que telle.

    Cette nouvelle critique est un nouvel appareil conceptnel o les catgories qui furent la base de toute la philosophie, et qui tentaient d'apprhender l'individu (comme -roBe TI et O'Vvoov ou comme subjectum et finalement comme sujet), deviennent une rgion de la pense, comme les principes de Newton ou l'axiomatique d'Euclide sont des rgions de la physique et de la gomtrie contemporaines.

  • PRFACE IX

    Ce, qui doit dsonnais tre pens est le prindividuel comme milieu o se produit un processus dont l'individu est un rsultat, et pour lequel les catgories qui pennettent de cerner celui-ci sont inoprantes. Dans une telle pense du processus, il n'y a plus de privilge accord l'individu psychique : les individus sociaux sont ni plus ni moins des individus que les personnes physiques.

    Les conditions relatives de possibilit de la connaissance de l'individuation sont alors des conditions d'impossibilit, parce qu'il n'est pas possible de connatre l'individuation sans l'individuer, et sans s'individuer: sans s'individuer et , sans individuer du mme coup l'individuation ainsi connue et redevenant par l mme inconnue, c'est--dire inadquate. Connatre, c'est individuer, et individuer, c'est trans-fonner l'objet connu, et le rendre inconnu, c'DIDlallre, re-connatre; et il en va ainsi parce que l'indi'ylclu8ltlo,n gnosologique est un cas d'individuation psyc:nl/lue et sociale qui conduit la transindividuation. C'est

    le cas par excellence o l'individuation du sujet ie:

    ;l:e:n

    t

    an

    t qu'individu psychique, est immdiatement li du savoir en tant que celui-ci est indissocia-

    une ralit sociale et une ralit psychique. iibin,div'' iu"tm psychique et collective est cette critique

    que l'ouvrage dcrit l'opration de transindividuation ''':'''''lUli, dans le processus qu'est l'individuation, se pro-

    la catgorisation en gnral, et telle que de cette concientre le psychique et le social dans l'acte de connatre

    paradoxalement une inadquation irrductible entre de connatre et le rsultat de cette connaissance,

    ,son objet: la connaissance d'un tel objet est comme ,,"l" une production de cet objet, mais qui surgit ici

    connaissance comme saut quantique dans h'idllatiion aboutissant une mtastabilisation du savoir,

    une instabilisation potentielle de ce savoir - et qui s'y est constitll.

    :l::li:q}ue la connaissance est un processus sans j' une individuation collective plus vaste, (pr,indi'idllel, porteur de potentiels qu' actllalisent des

    psychiques ou sociaux, ne s'individue qu' travers d'un processus d'individuation o s'enchanent

    quLilit)res mtastables toujours la limite du

  • X L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    C'est en cela que cette critique de la raison individuante procde des questions qu'auront ouvertes la thermodynamique et la mcanique quantique; et c'est ainsi qu'elle enchane sur la Critique de la raison pure dont le milieu d'individuation tait la physique newtonienne, Cet enchanement, comme dpassement de l'opposition de la matire et de la forme (principal acquis de L'Individu et sa gense physico-biologique), suspend du mme coup l'opposition de l'a priori et de l'a posteriori, et la raison individuante ne peut plus tre pense en dehors du couple individu connaissant/milieu connu.

    La consquence en est que la connaissance y devient performative : l'individu qui connat altre le milieu en le connaissant, c'est--dire en l'individuant, et une telle situation ncessite une rforme de l'entendement humain telle que, comme l'opposition de la forme et de la matire, et comme celle de l'a priori et de l'a posteriori, l'opposition de la psychologie et de la sociologie doit tre dpasse (et toutes les oppositions qui s'ensuivent dans l'ensemble des sciences de l'homme) : c'est en ce sens que le projet de cette critique de la raison individuante qu'est L'Individuation psychique et collective est de refonder une science humaine, c'est--dire une connaissance de ce qu'il en est de cette individuation psychosociale dont la connaissance ellemme n'est qu'un cas.

    *

    Or, une telle science humaine doit rendre une dignit plnire et mme primordiale aux questions spirituelles, morales et thiques. L'impossibilit de connatre l'individuation sans s'individuer et sans individuer du mme coup l'individuation - qui signifie que l'opposition du sujet et de l'objet ne permet plus de penser la connaissance, et qui inscrit une inadquation irrductible au cur mme de l'acte de connaissance - est un cas du dfaut qui constitue en gnral la subjectivation comme individuation, et dont l'exprience quotidienne de l'individu s'individuant est avant tout morale bien plus tt que gnosologique.

    Car ce n'est que depuis la pense d'une inadquation de l'individu lui-mme, qui tient ce que l'individu intriorise toujours dj son milieu extrieur, et les potentialits

  • PRFACE XI

    prindividuelles d'individuation venir qu'il recle, et telle que l'individu s'en trouve toujours dj dpass par l'individuation . le traverse et le soutient, ce n'est que comme

    celtte,ina,d'qmlli(m de l'individu lui-mme que la con jonc-et, dans le processus d'individuation psychique et col

    .tectiv,e, tant aussi une disjonction, fait et dfait tout la le psychosocial comme processus d'individuation: le

    individuation psychosociale est la Pnlope de Jlindividmltion.

    que depuis cette conjonction disjonctive, comme spirituelle, morale et thique, qu'il est possible de les conditions gnrales de l'individuation comme

    'Jl11a!S:SaJlce dans une schize gnosologique o la connais-toujours dj individuation psychosociale, et en

    ,j\flratique, est donc aussi et irrductiblement politique. [;

    ,j:penser le suicide de George Eastma!U1' ? Une

    l est un exemple typique du conflit de l'individu CIUl-merrle qu'est toujours l'individwtion, et un exem'h",;,,,,p de ce que la science hUl11aine simondonienne

    et de la manire dont elle le fait en individuant son :Car s'il s'agit de fonder une science humaine, cette

    unifie de l 'homme et de la socit hUl11aine ne se rintroduisant du haut et du bas' dans la

    dans le corps social : qu'en faisallt de ce qu'elle processus dynaJ11ique fond par des dyades qui des multiplicits, des divisions, et dont les termes

    .fel:111Cln originaire (la trallsduction), mais qui sont les uns aux autres, en sorte que les relations

    :,',' __ ,. sont tout aussi bien des couples dynaJ11iques ,tistallise l'inadquation de l'individu lui-mme -

    une consquence du caractre intrinsquement processus d'individuation.

    comme indfinition des termes entre lesquels les dynamiques, engendrent des multipli-.

    dalls le cours de l'individuation que celle-ci donne de la trallsindividwune deuxime individuation , par

    SirnOIldou caractrise le spirituel dans le prindivil'exprience mme de l'incompltude de l'in

    seulement de l'espce : l'preuve de son

  • XII L'INDIVIDUATION PSYCIDQUE ET COLLECTIVE

    inadquation lui-mme, et qui ne cesse de se doubler - en pass et en avenir, en mmoire et en imagination. (La doctrine de l'innnortalit de l'me retrouve ici un sens, et d'une faon gnrale, c'est l'une des trs grandes forces de cet ouvrage que de donner leur ncessit et donc leur actualit aux poques passes de la pense, c'est--dire aux stades antrieurs de l'individuation collective.)

    Il y a donc chez Simondon du suprieur et de l'infrieur, du haut et du bas : l'individuation. oscille sans cesse entre ces deux termes. Et le suprieur y est accessible dans les conditions exceptionnelles dont Du mode d'existence des objets techniques dcrit l'exprience la fois premire (originelle) et quotidienne : comme attrait pour ce que cet ouvrage appelle les points-cls, les moments et les lieux d'exception, les sommets et les ftes (par exemple comme rituels) 1. Ici, la psychologie n'est pas sparable de la morale et de l'thique - et il en va ainsi parce qu'il s'agit de la psychologie d'un tre spirituel, c'est--dire social, c'est-dire transindividuel.

    *

    La psychologie de Simondon, qui est une individuation toujours dj sociale, qui est donc une sociologie, est en forme de croix : elle est structure d'un ct par les relations de la perception et de l'affection 2, et en quelque sorte horizontalement, et de l'autre ct par les relations du haut et du bas, c'est--dire verticalement '. L'Individuation psychique et collective est l'exprience d'une permanente avance dans l'horizontalit qui monte et retombe, explorant le vertical, et c'est ainsi qu'est redfinie la question de la tentation partir de laquelle est pens le temps4, et o ce n'est plus l'opposition du bon et du mauvais, du bien et du mal, du suprieur et de l'infrieur, qui fait le cours du processus, mais leur composition.

    1. Du mode d'existence des objets techniques, Aubier, 2002, p. 166-168. 2. C'est ce qu'explorent les deux premiers chapitres de la premire

    partie de L'Individuation psychique et collective. 3. Dans Du mode d'existence des objets teclmiques et ici mme p. 159,

    161 163 et 240. 4. Cf infra, p. 168.

  • PRFACE XIII

    lors, deux concepts fondamentaux s'articulent l'un dans l'uvre de Simondon, sans y tre visibles

    ni dsigns comme tel: les concepts d'une part et d'autre part de niveaux de l'lvation. C'est par .

    de ces concepts que Simondon dveloppe sa de la science humaine comme processus

    ividllatiion constitu par des relations transductives. retati(lnS transductives sont des croissances : elles

    des morphogenses de proche en proche , et dynamique de ces relations transductives, la ten

    . .. cre, c'est le circuit qui fait qu' une perception une action, et une affection rpond une motion l

    de tels circuits que se concrtisent les relations lCI:1Ves. et par cette croissance et cette structuration,

    ,latiorls produisent de l'information et de la significareliant l'individu psychique l'individu col

    dlJaSsertt ainsi leur diffrence - la signification ce circuit tant la fois intrieure et extrieure psychique et l'individu social', c'est--dire :

    lircirc:u::l.an:t dans l'indfini de la dyade, et 1 mme qui ouvre la libert.

    faon gnrale, tout ce que dit Simondon est par les polarits entre lesquelles apparaissent les Ces polarits s'articulent entre elles, jouent les les autres, et constituent ainsi le processus de l'in

    COmme transindividuation qui produit du tranEntre ces polarits se produisent des drames

    Ictlions), par exemple l'preuve de la tentation, o l'on .air

  • XIV L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    poser nouveaux frais le problme de croire en ce monde 1 et la question d'une nouvelle croyance '.

    Ceci doit tre articul avec ce que dit Simondon du ddoublement de la personnalit : la psych, travers la mmoire comme travers l'imagination, se double en permanence, et en tant que telle, se temporalise 3 : c'est dans ces doublures qui produisent la symbolisation du moi que se constitue la possibilit de changer de niveau, Et c'est ainsi que Simondon pense le temps partir de l'exprience de la tentation.

    C'est parce que l'on pense toujours polairement, toujours entre deux ples, horizontaux ou. verticaux, un ple ne fonctionnant pas sans l'autre, ne pouvant donc pas tre oppos l'autre, que Simondon dit qu'il faut penser les choses par leur milieu, ce que Deleuze mettra la base de la problmatique peut-tre trop fameuse du rhizome - trop fameuse en ce qu'elle aura trop souvent obr que s'il y a dans cette polarit du cardinal, de l'est, de l'ouest, du nord et du sud, il y a aussi du vertical : pas de cardinalit sans horizon, et pas d'horizon sans haut et sans bas, o le temps passe et troue cet horizon avec la course des astres, et comme le processus cosmique affectant l'individu psychique devenant ainsi social - ce que Kant appelle la loi morale.

    Sans cette problmatique des points-cls que sont les minences, les sommets et les moments d'exception, on ne comprend rien la question du doublement propos de quoi Simondon prtend, c'est peut-tre l une de ses faiblesses, pouvoir rapporter la question de la psychanalyse, savoir la pense de l'inconscient, celle de Janet.

    La thorie simondonienne de l'individuation psychoso' ciale est aux sciences de l'homme et la philosophie ce que la mcanique quantique est la physique.

    Elle l'est la philosophie, dont elle renverse la totalit des catgories fondamentales, mais elle l'est aussi aux sciences

    1. Gilles Deleuze, L'Image-temps, Minuit, 1985, p. 221-225. 2. Selon l'expression de Nietzsche. Cf. Marc Crpon, Nietzsche, l'art

    et la politique de l'avenir, PUF, 2003. 3. Cf infra, p.I64-165, 194.

  • PRFACE xv

    dont' elle est une critique au sens o Kant aura critique de la raison travers celle de la mta

    si cette critique ne consiste pas ici limiIfnirel!' . sciences .. de l'homme et de la socit, mais

    le confronter la question de l'illimit, et telle en cause la division analytique du travail des

    !tl::Yholmnle et de la socit -, ce qui a pour cons. retour des questions thiques et spirituelles. . . pour Simondon, les sciences de l'homme

    ne sont pas un avatar de la philosophie, une fc,s:;'!'; comme ce fut souvent le cas "I franais aprs l'vanouissement de la tmctualjste, mais bien un nouveau rgime du phi

    et plus gnralement de la pense. Si, depuis icisment, la philosophie s'est spare des formattlnlatiqlles et de la science, qui s'est eUe-mme

    physique, en chimie et en biologie, leur tour dans des rgions de savoirs dfinissant des ontoqui a fait de l'homme et de la socit des objets se sparant de la philosophie en devenant exp

    nn"jtj'ves et mthodiques, s'tablissant avant tout tho,des permettant d'assurer des faits pouvant tre'

    par la pense, la philosophie de Simondon j'troitelnelrrt la science de son temps dans son

    eUe revisite la psychologie de la forme depuis de la cristaUographie, eUe reconceptualise les

    ;d"in"I!r'OUlJ et d'out-group venues de la sociologie se pense depuis ce que la science lui

    que la philosophie n'avait pas donn la science, re-synthtise, c'est--dire rindividue.

    entrer dans cette pense, c'est un peu faire un : c'est s'engager dans une exprience de

    du familier, c'est faire l'preuve de l'inquide la pense o tout est dj connu, o tout

    vu, et o cependant tout apparat, et soudainement, radicalement nouveau. y fait droit tous les problmes qu'a rencontr

    au cours de son histoire - de la religion au monde n'est ici objet de considration que

    processus qui dcrit l'activit mme de la pense de le penser (ce qui est une sorte d' affrnit

  • XVI L'INDIVIDUATION PSYCIDQUE ET COLLECTIVE

    transcendantale dynamique '), situation qui dcrit notre activit mentale et individuante, et donc dj sociale, au moment mme o nous lisons Simondon, qui ne pense l'individuation que pour autant qu'il s'individue lui-mme en tentant de la penser, et nous individue, donc, avec lui, Ici comme dans la physique quantique, les phnomnes n'apparaissent plus tels que nous les exprimentons quotidiennement : ils requirent une nouvelle conversion du regard, et une sorte d'pokh, s'il est permis de convoquer ici des catgories de la phnomnologie husserlienne,

    Bernard STIEGLER.

    1. Au sens de la Critique de la raison pure, mais en dpassant le: caractre statique qu'elle y conserve en tant qu'elle reste prise dans une ontologie. Sur ette question, cf. La technique et le temps 3. Le temps du cinma et la question du mal-tre, Galile, 2001, p. 78, 106-107.

  • AVER'fIS:SE,lT DE V:e.DITEUR

    : L'individuation psychique et collective, ici la seconde partie indite de la thse

    Gilbert Simondon dont seule la premire sous le titre: L'individu et sa gense PIIFo;(:PUF, 1964, Collection Epimthe).

    a; et pour le rendre plus intelligible, aj'7ul' une introduction. Celle-ci comprend

    : la premire est l'introduction gnrale nous reprenons Z' ouvrage dit aux pas destin reparatre actuellement ;

    une confrence faite la Socit fran,hilosop,hie et qui explicite la problmatique re5iM0ld,m. Enfin nous avons adjoint gale

    Z' essentiel de la conclusion du iiivriJ.,'e : elle trouve ici sa place normale.

    est accompagn de la rditi/Jn dans la !l'tio'n de Du mode d'existence des objets

    aUigmenit d'une prface de John Hart et de Yves Deforge. Ainsi est reconstitue

    des uvres les plus inventives de la franaise du xx' sicle.

    Franois LARUELLE.

  • INTRODUCTION

    I. - POSITION DU PROBLEME DE L'ONTOGENESE . Il existe deux voies selon lesquelles la ralit de

    l'tre comme individu peut tre aborde : une voie substantialiste, considrant l'tre comme consistant en son unit, donn lui-mme, fond sur lui-mme, inengendr, rsistant ce qui n'est pas lui-mme; une voie hylmorphique, considrant l'individu comme engendr par la rencontre d'une forme et d'une ltnatire. Le monisme centr sur 'lui-mme de la pense

    :!::i . s'oppose la bipolarit du schme ,h Mais il y a quelque chose de commun . ces manires d'aborder la ralit de l'indi-

    : toutes deux supposent qu'il existe un principe !:ti: antrieur l'individuation elle-mme, I de l'expliquer, de la produire, de la

    A partir de l'individu constitu et donn, s'elOlrce de remonter aux conditions de son exis

    manire de poser le problme de l'in di partir de la constatation de l'existence

    recle une prsupposition qui doit tre 00, parc:e qu'elle entrane un aspect important

    l'on propose et se glisse dans la e:!rn;t d'individuation: c'est l'individu q1 constitu qui est la ralit intdale ral'it expliquer. Le principe d'indivi

    recherch comme un principe susceptible e/c:oDaP1:e des caractres de l'individu, sans

    (ssare avec d'autres aspects de l'tre qui

  • 10 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    pourraient tre corrlatifs de l'apparition d'un rel individu. Une telle perspective de recherche accorde un privilge ontologique l'individu constitu. Elle risque donc de ne pas oprer une vritable ontognse, de ne pas replacer l'individu dans le systme de ralit en lequel l'individuation se produit. Ce qui est un postulat dans la recherche du principe d'individuation, c'est que l'individuation ait un principe. Dans cette notion mme de principe, il y a un certain caractre qui prfigure l'individualit constitue, avec les proprits qu'elle aura quand elle sera constitue; la notion de principe d'individuation sort dans une certaine mesure d'une gense rebours, d'une ontognse renverse : pour rendre compte de la gense de l'individu avec ses caractres dfinitifs, il faut supposer l'existence d'un terme premier, le principe, qui porte en lui ce qui expliquera que l'individu soit individu et rendra compte de son eccit. Mais il resterait prcisment montrer que l'ontognse peut avoir comme condition premire un terme premier : un terme est dj un individu ou tout au moins quelque chose d'individualisable et qui peut tre source d'eccit, qui peut se monnayer en eccits multiples; tout ce qui peut tre support de relation est dj du mme mode d'tre que l'individu, que ce soit l'atome, particule inscable et ternelle, la matire prime, ou la forme: l'atome peut entrer en relation avec d'autres atomes par le clinamen, et il constitue ainsi un individu, viable ou non, travers le vide infini et devenir sans fin. La matire peut recevoirr ,une:::et dans cette relation matire-forme gt l S'il n'y avait pas une certaine inhrence de l'atome, la matire, ou bien la forme, aurait pas de possibilit de trouver dans ces invoques un principe d'individuation. R'ch,er,ch,r principe d'individuation en une ralit l'individuation mme, c'est considrer 1'!1di'villul!tl comme tant seulement ontognse. Le principe viduation est alors source d'eccit. De fait, au !.' le substantialisme atomiste que la doctrine phique vitent la description directe de l'o:ntc'gJ elle-mme; l'atomisme dcrit la gense du

  • INTRODUCTION 11

    comme le corps vivant, qui n'a qu'une unit prcaire et prissable, qui sort d'une rencontre de hasard et se dissoudra nouveau en ses lments lorsqu'une force plus grande que la force de cohsion des atomes 'attaquera dans son unit de compos. Les forces

    de cohsion elles-mmes, que l'on pourrait considrer comme principe d'individuation de l'individu compos, sont rejetes dans la structure des particules lmentaires qui existent de toute ternit et sont les vritables individus; le principe d'individuation, dans l'atomisme, est l'existence mme de l'infinit des atomes : il est toujours dj l au moment o la pense veut prendre conscience de sa nature : l'individuation est un fait, c'est, pour chaque atome, sa propre existence donne, et, pour le compos, le fait qu'il est ce qu'il est en vertu d'une rencontre de hasard. Selon le schme hylmorphique, au contraire, l'tre ndividu n'est pas dj donn lorsque l'on considre

    matire et la forme qui deviendront le .6voov : on n'assi,ste pas l'ontognse parce qu'on se place tou

    avant cette prise de forme qt est l' ontognse ; P:

    id'individuation n'est donc pas saisi dans

    te: mme comme opration, mais dans ce (tjte opration a besoin pour pouvoir exister,

    une matire et une forme : le principe est soit dans la matire soit dans la

    l'opration d'individuation n'est pas "ca.pable d'apporter le principe lui-mme,

    le mettre en uvre. La recherche s'accomplit soit aprs

    avant l'individuation, selon que ;1;illdivic:lu est physique (pour . l'atomisme

    technologique et vital (pour le PtJ:)bi,I:{1:U'). Mais il existe dans les deux . recouvre l'opration d'indi: est considre comme chose

    11 ce en quoi l'explication doit notion de principe d'individua

    considre comme chose pense est tendue vers l'tre

    1031> 32.

  • 12 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    individu accompli dont il faut rendre compte, en passant par l'tape de l'individuation pour aboutir l'individu aprs cette opration. Il y a donc supposition de l'existence d'une succession temporelle : d'abord existe le principe d'individuation; puis ce principe opre dans une opration d'individuation; enfin l'individu constitu apparat. Si, au contraire, on supposait que l'individuation ne produit pas seulement l'individu, on ne chercherait pas passer de manire rapide travers l'tape d'individuation pour arriver cette ralit dernire qu'est l'individu : on essayerait de saisir l' ontognse dans tout le droulement de sa ralit, et de connatre l'individu travers l'individuation plutt que l'individuation partir de l'individu.

    Nous voudrions montrer qlii! faut oprer un retournement dans la recherche du principe d'individuation, en considrant comme primordiale l'opration d'individuation partir de laquelle l'individu vient exister et dont il reflte le droulement, le rgime, et enfin les modalits, dans ses caractres. L'individu serait alors saisi comme une ralit relative, une certaine phase de l'tre qui suppose comme elle une ralit prindividue1le, et qui, mme aprs l'individuation, n'existe pas toute seule, car l'individuation n'puise pas d'un seul coup les potentiels de la ralit prindividuelle, et d'autre part, ce que l'individuation fait apparatre n'est pas seulement l'individu mais le couple individu-milieu'. L'individu est ainsi relatif en deux sens : parce qu'il n'est pas tout l'tre, et parce qu'U rsulte d'un tat de l'tre en lequel il n'existait ni comme individu ni comme principe d'individuation.

    L'individuation est ainsi considre comme seule ontogntique, en tant qu'opration de l'tre CUimp'''''. L'individuation doit alors tre considre rsolution partielle et relative qui se manifeste un systme reclant des potentiels et renfermant certaine incompatibilit par rapport lui-mme, patibilit faite de forces de tension aussi bien d'impossibilit d'une interaction entre termes des dimensions.

    Le mot d"ontognse prend tout son sens si,

  • INTRODUCTION 13

    de lui accorder le sens, restreint et driv, de gense de l'individu (par opposition une gense plus vaste, par exemple celle de l'espce), on lui fait dsigner le caractre de devenir de l'tre, ce par quoi l'tre devient en tant qu'il est, comme tre. L'opposition de l'tre et du devenir peut n'tre valide qu' l'intrieur d'une certaine doctrine supposant que le modle mme de l'tre est la substance. Mais il est possible aussi de

    . supposer que le devenir est une dimension de l'tre, correspond une capacit que l'tre a de se dphaser par rapport lui-mme, de se rsoudre en se dphasant ; l'tre prindividuel est l'tre en lequel il n'existe pas de phase ; l'tre au sein duquel s'accomplit une individuation est celui en lequel une rsolution apparat par la rpartition de l'tre en phases, ce qui est le devenir ; le devenir n'est pas un cadre dans lequel l'tre existe ; il est dimension de l'tre, mode de rsolution d'une incompatibilit initiale riche en potentiels '. L'individuation correspond l'apparition de phases dans l'tre qui sont les phases de l'tre ; elle n'est pas une consquence dpose au bord du devenir

    . . isole, mais cette opration mme en train de slae

  • 14 L'INDIVIDUATION PSYCillQUE ET COLLECTIVE

    autorisant l'usage du principe du tiers exclu, ne s'appliquent pas l'tre prindividuel, ce qui explique que l'on ne puisse recomposer aprs coup le monde avec des monades, mme en rajoutant d'autres principes, comme celui de raison suffisante, pour les ordonner en univers ; l'unit et l'identit ne s'appliquent qu' une des phases de l'tre, postrieure l'opration d'individuation ; ces notions ne peuvent aider dcouvrir le principe d'individuation ; elles ne s'appliquent pas l'ontognse entendue au sens plein du terme, c'est--dire au devenir de l'tre en tant qu'tre qui se ddouble et se dphase en s'individuant.

    L'individuation n'a pu tre adquatement pense et dcrite parce qu'on ne connaissait qu'une seule forme d'quilibre, l'quilibre stable ; on ne connaissait pas l'quilibre mtastable ; l'tre tait implicitement suppos en tat d'quilibre stable ; or, l'quilibre stable exclut le devenir, parce qu'il correspond au plus bas niveau d'nergie potentielle possible ; il est l'quilibre qui est atteint dans un systme lorsque toutes les transformations possibles ont t ralises et que plus aucune force n'existe ; tous les potentiels se sont actualiss, et le systme ayant atteint son plus bas niveau nergtique ne peut se transformer nouveau. Les Anciens ne connaissaient que l'instabilit et la stabilit, le mouvement et le repos, ils ne connaissaient pas nettement et objectivement la mtastabilit. Pour dfinir la mtastabilit, il faut faire intervenir la notion d'nergie potentielle d'un systme, la notion d'ordre, et celle d'augmentation de l'entropie ; il est ainsi possible de dfinir cet tat mtastable de trs diffrent de l'quilibre stable et du repos, Anciens ne pouvaient faire intervenir dans la re

  • INTRODUCTION 15

    mais elle n'puise pas la ralit de l'individuation physique.

    Or, on peut supposer aussi que la ralit est primitivement, en elIe-mme, comme la solution sursature et plus compltement encore dans le rgime prindividuel, plus qu'unit et plus qu'identit, capable de se manifester comme onde ou corpuscule, matire ou nergie, parce que toute opration, et toute relation l'intrieur d'une opration, est une individuation qui ddouble, dphase l'tre prindividuel, tout en corrlant des valeurs extrmes, des ordres de grandeur primitivement sans mdiation. La complmentarit serait alors le retentissement pistmologique de la mtastabilit primitive et originelle du rel. Ni le mcanisme, ni l'nergtisme, thories de l'identit, ne fu:;t compte de la ralit de manire complte. La

    des champs, ajoute celle des corpuscules, thorie de l'interaction entre champs et corpussont encore partiellement dualistes, mais s'achevers une thorie du prindividuel. Par une autre thorie des quanta saisit ce rgime du prindi

    qui dpasse l'unit : un change d'nergie se r;: lmentaires, comme s'il y avait de l'nergie dans la relation entre

    que l'on peut en un sens considrer des individus physiques. Ce serait peut-tre

    que l'on pourrait voir converger les deux )lOUlVellles restes jusqu' ce jour impntrables

    celle des quanta et celle de la mcaAdulltoire - elles pourraient tre envisages

    manires d'exprimer le prindividuel manifestations o il intervient Au-dessous du continu et du

    a le quantique et le complmentaire l'le PUIS qu'unit), qui est le prindividuel

    '"'''.

  • 16 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COUJ!CTIVE

    chelle macroscopique un phnomne qui repose sur des tats de systme appartenant au domaine microphysique, molculaire et non molaire ; elle saisirait l'activit qui est la limite du cristal en vole de formation. Une telle individuation n'est pas la rencontre d'une forme et d'une matire pralables existant comme termes spars antrieurement constitus, mais une rsolution surgissant au sein d'un systme mtastable riche en potentiels : forme, matire et nergie prexistent dans le systme. Ni la forme ni la matire ne suffisent. Le vritable principe d'individuation est mdiation, supposant gnralement dualit originelle des ordres de grandeur et absence initiale de commu' nication interactive entre eux, puis communication entre ordres de grandeur et stabilisation.

    En mme temps qu'une nergie potentielle (condi' tion d'ordre de grandeur suprieur) s'actualise, un matire s'ordonne et se rpartit (condition d'ordre grandeur infrieur) en individus structurs un de grandeur moyen, se dveloppant par un pr

  • INTRODUCTION 17

    comme celle de l'individu physique, concentre sa limite ; il existe en lui un rgime plus complet de rsonance interne exigeant communication permanente,

    une mtastabilit qui est condition de Ce n'est pas l le seul caractre du vivant, et on

    assimiler le vivant un automate qui mainun certain nombre d'quilibres ou qui cher-

    des compatibilits entre plusieurs exigences, formule d'quilibre complexe compos

    1Jilibr,e! plus simples ; le vivant est aussi l'tre qui individuation initiale et qui amplifie lildivi,:lmlticon ce que ne fait pas l'objet technique

    mcanisme cyberntique voudrait l'assimiler lc:l.lenlelllt. Il y a dans le vivant une individua

    tnli!ivi'du et non pas seulement un fonctionneIt,nt rl" >n individuation une fois accomplie,

    une fabrication ; le vivant rsout des . pas seulement en s'adaptant, c'est-

    sa relation au milieu (comme une "." . " .. *), mais en se modifiant lui

    des structures internes nouvelles, compltement dans l'axio

    vitaux ', L'individu vivant est !,iation, systme individuant et sys

    rsonance interne et la traduc. en information sont dans ce

    le domaine physique, la rso-c6r;e la limite de l'individu en

    le domaine vivant, elle l'individu en tant qu'individu ;

    isylitJme de l'individu et non pas l'individu forme avec son

    irit:errl de l'organisme ne rsulte du cristal) de l'activit

    modulation qui s'opre la d'intriorit et le domaine

    perptuellement #rit p'riphl:iq\le par rapport son domaine, n'a pas de

    ndividu vivant a au contraire

    d'Ashby_

  • 18 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLllCTlVE

    une vritable intriorit, parce que l'individuation s'accomplit au-dedans ; l'intrieur aussi est constituant, dans l'individu vivant, alors que la limite seule est constituante dans l'individu physique, et que ce qui est topologiquement intrieur est gntiquement ant'" rieur. L'individu vivant est contemporain de lui-mme en tous ses lments, ce que n'est pas l'individu physique, qui comporte du pass radicalement pass, mme lorsqu'il est encore en train de crotre. Le vivant est l'intrieur de lui-mme un nud de communication informative ; il , est systme dans un systme, comportant en lui-mme mdiation entre deux ordres de grandeur'.

    Enfin, on peut faire une hypothse, analogue celle des quanta en physique, analogue aussi celle de la relativit des niveaux d'nergie potentielle : on peut supposer que l'individuation n'puise pas toute la ralit prindividuelle, et qu'un rgime de mtastabilit est non seulement entretenu par l'individu, mais port par lui, si bien que j'individu constitu transporte avec lui une certaine charge associe de ralit prindivi,. duelle, anime par tous les potentiels qui la caI'actrisent ; une individuation est relative comme un gement de structure dans un systme ph:ysi,!ue certain niveau de potentiel demeure, et tions sont encore pOSSibles. Cette nature pr.!inlli' duelle restant associe l'individu est une d'tats mtastables futurs d'o pourront sortir , individuations nouvelles. Selon cette serait possible de considrer toute vllI'trame comme ayant rang d'tre, et comme se d"e1o l'intrieur d'une iruIividuation nouvelle ; la ne jaillit pas entre deux termes qui seraient individus ; elle est un aspect de la rsonance d'un systme d'individuation ; elle fait partie de systme. Ce vivant qui est la fois plus que l'unit comporte une problmatique peut entrer comme lment dans une plus vaste que san propre tre. La parti,;lpati. l'individu, est le fait d'tre lment dans duation plus vaste par l'intermdiaire de la

  • INTRODUCTION 19

    ralit prindividuelle que l'individu contient, c'est-dire grce aux potentiels qu'il recle.

    II devient alors possible de penser la relation intrieure et extrieure l'individu comme participation sans faire appel de nouvelles substances. Le psychisme et le collectif sont constitus par des individuations venant aprs l'individuation vitale. Le psychisme est poursuite de l'individuation vitale chez un tre qui, pour rsoudre sa propre problmatique, est oblig d'intervenir lui-mme comme lment du problme par son action, comme sujet ; le sujet peut tre

    icn:U comme l'unit de l'tre en tant que vivant indi-iNitiu et en tant qu'tre qui se reprsente son action

    !tr'av,ers le monde comme lment et dimension du ; les problmes vitaux ne sont pas ferms sur

    Hrlnles ; leur axiomatique ouverte ne peut tre que par une suite indfinie d'individuations

    ce!;shres qui engagent toujours plus de ralit prinet l'incorporent dans la relation au milieu ; et perception s'intgrent en motion et en

    qui supposent un recours des dimensions Cependant, l'tre psychique ne peut rsoudre

    nr/mT" problmatique ; sa charge de pr,in.di1{due.l1e, en mme temps qu'elle s'indi

    tre psychique qui dpasse les limites individu et incorpore le vivant dans un monde et du sujet, permet la participation de condition d'individuation du collectif ;

    sous forme de collectif fait de l'individu groupe, associ au groupe par la ralit qu'il porte en lui et qui, runie celle

    s'individue en unit collective. Les illl,;ti010S, psychique et colleCtive, sont rcira:pp,)rt l'autre ; elles permettent

    transindividuel qui tend sylltmElticlue de l'individua-

    xcl1liqlue), et de l'individuation extmonde psycho-social du trans

    'social brut ni l'interindividuel ; d'individuation

    )PJ:::e associe aux indi-

    j:: une;> nouvelle problma-

  • 20 L'INDIVIDUATION PSYCBlQUH lIT COLlllC'fIVE

    tique ayant sa propre mtastabilit : il exprime une condition quantique, corrlative d'une pluralit d'ordres de grandeur. Le vivant est prsent comme tre problmatique, suprieur et infrieur la fois l'unit. Dire que le vivant est problmatique, c'est considrer Je devenir comme une dimension du vivant : le vivant est selon le devenir, qui opre une mdiation. Le vivant est agent et thtre d'individuation ; son devenir est une individuation permanente ou plutt une suite d'accs d'individuation avanant de mtastabilit en rotastabilit ; l'individu n'est ainsi ni substance ni simple partie du collectif : le collectif intervient comme rsolution de la problmatique individuelle, ce qui signifie que la base de la ralit collective est dj partiellement contenue dans l'individu, sous la forme de la ralit prindividuelle qui reste associe la ralit individue ; ce que l'on considre en gnral comme relation, cause de l'hypothse abusive de la substantialisation de la ralit individuelle, est en fait une dimension de l'individuation travers laquelle l'individu devient : la relation, au monde et au collectif, est une dimension de l'individuation laquelle participe l'individu partir de la ralit prindividuelle qui s'individue tape par tape.

    .

    Aussi, psychologie et thorie du collectif sont c'est l'ontognse qui indique ce qu'est la au collectif et qui indique aussi ce qu'est psychique conue comme rsolution d'une pr,)bli;n tique. L'individuation qu'est la vie est conue dcouverte, dans une situation conflictuelle, d'une matique nouvelle incorporant et unifiant en contenant l'individu tous les lments de cette tion. Pour comprendre ce qu'est l'activit l'intrieur de la thorie de l'iJo.dilviiiu2ltic)U rsolution du caractre conflictuel d'un tat il faut dcouvrir les vritables voies d'insltittl systmes mtastables dans la vie ; en ce bien la notion de relatwn adaptative de milieu ' que la notion critique de reiratiron connaissant l'objet connu doivent la connaissance ne s'difie pas de ll:i;i li partir de la sensation, mais de

  • IN'1'RODUCTION 21

    tique partir d'une premire unit tropistique ou taxique, couple de sensation et de tropisme, orientation de l'tre vivant dans un monde polaris ; ici encore il faut se dtacher du schme hyJmorphique ; il n'y a pas une sensation qui serait une matire constituant un donn a posteriori pour les formes a priori de la sensibilit ; les formes a priori sont une premire rsolution par dcouverte d'axiomatique des tensions rsultant de l'affrontement des units tropistiques ou ta.x:iq,U!s primitives ; les formes a priori de la sensibi

    sont ni des a priori ni des a posteriori obtenus ,par 2tbstralcti.on, mais les structures d'une axiomatique

    apparait dans une opration d'individuation. Dans tropistique ou taxique il y a dj le monde et

    ;vhrant, tuais le monde n'y figure que comme direccoamle polarit d'un gradient qui situe l'tre

    une dyade indfinie dont il occupe le (,mdian, et qui s'tale partir de lui. La percep

    la science, continuent rsoudre cette propas seulement par l'invention des

    %l,SI?atio-ternp,orfl]s, mais par la constitution de la .ct'bj:I

    devient source des gradients prim!

    vl entre eux selon un monde. La l'a priori et de ra posteriori, retentisse

    hylmorphique dans la thorie de la voile de sa zone obscure centrale la

    plt'atlon d'individuation qui est le centre La notion mme de srie qualitative

    d'tre pense selon la thorie des elle n'est pas relationnelle et sou-

    riexist'n(Je des termes extrmes, mais . partir d'un tat moyen primitif

    et l'insre dans le gradient qui

    :lt:: ou taxlque J la

    du sens selon lequel ou tax!que. Il faut partir saisi en son centre selon

    lllC, :nG>ll d'un individu substan.,;t1ranger lui '.

    employe pour explorer COllstituent la rsonance

    t[i.,tllIne, et rattachent l'tre

  • 22 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    individu la ralit prindividuelle qui est associe lui, comme l'unit tropistique ou taxique et la perception le rattachent au milieu. Le psychisme est fait d'individuations successives permettant l'tre de rsoudre les tats problmatiques correspondant la permanente mise en communication du plus grand et du plus petit que lui.

    Mais le psychisme ne peut se rsoudre au niveau de l'tre individu seul ; il est le fondement de la participation une individuation plus vaste, celle du collectif ; l'tre individuel seul, se mettant en question lui-mme, ne peut aller au-del des limites de l'angoisse, opration sans action, motion permanente qui n'arrive pas rsoudre l'affectivit, preuve par laquelle l'tre individu explore ses dimensions d'tre sans pouvoir les dpasser. Au collectif pris comme axiomatique rsolvant la problmatique psychique correspond la notion de transindividuel.

    Un tel ensemble de rformes des notions est soutenu par l'hypothse d'aprs laquelle une information n'est jamais relative une ralit unique et homogne, mais deux ordres en tat de disparation : l'information, que ce soit au niveau de l'unit tropistique ou au niveau du transindividuel, n'est jamais dpose dans une forme pouvant tre donne ; elle est la tension entre deux rels disparates, elle est la signification qui surgira lorsqu'une opration d'individuation dcouvrira la dimension selon laquelle deux rels disparates peuvent devenir systme ; l'information est donc une amorce d'individuation, une exigence d'individuation, de passage du mtastable au stable, elle n'est jamais chose donne ; il n'y a pas d'unit et d'identit de l'information, car l'information n'est pas un terme ; elle suppose tension d'un systme d'tre pour la recevoir adquatement ; elle ne peut tre qu'inhrente une problmatique ; l'information est ce par quoi l'incompatibilit du systme non rsolu devient dimension organisatrice dans la rsolution ; l'information suppose un changement de phase d'un systme, car elle suppose un premier tat prindividuel qui s'individue selon l'organisation dcouverte ; l'information est la formule de l'individuation, formule qui ne peut

  • INTRODUCTION 23

    prexister cette individuation ; on pourrait dire que l'information est toujours au prsent, actuelle, car elle est le sens selon lequel un systme s'individue '.

    La conception de l'tre sur laquelle repose cette tude est la suivante : l'tre ne possde pas une unit d'identit, qui est celle de l'tat stable dans lequel aucune transformation n'est possible ; l'tre possde une unit transductive, c'est--dire qu'il peut se dphaser par rapport lui-mme, se dborder lui-mme de part et d'autre de son centre. Ce que l'on prend pour relation ou dualit de principes est en fait talement de l'tre, qui est plus qu'unit et plus qu'identit ; le devenir est une dimension de l'tre, non ce qui lui advient selon une succession qui serait subie par un tre primitivement donn et substantiel. L'individuation doit tre saisie comme devenir de l'tre, et non comme modle de l'tre qui en puiserait la signification. L'tre individu n'est pas tout l'tre ni l'tre premier ; au lieu de saisir l'individuation partir de l'tre individu, il faut saisir l'tre individu partir de l'individuation, et l'individuation partir de l'tre prindividuel, rparti selon plusieurs ordres de grandeur.

    L'intention de cette tude est donc d'tudier les formes, modes et degrs de l'individuation pour replacer l'individu dans l'tre, selon les trois niveaux physiques, vital, psychique et psycho-social. Au lieu de supposer des substances pour rendre compte de l'individuation, nous prenons les diffrents rgimes d'individuation pour fondement des domaines tels que matire, vie, esprit, socit. La sparation, l'tagement, les relations de ces domaines apparaissent comme des aspects de l'individuation selon ses diffrentes modalits ; aux notions de substance, de forme, de matire, se substituent les notions plus fondamentales d'information premire, de rsonance interne, de mtastabi-lit, de potentiel nergtique, d'ordres de grandeur .

    . Mais, pour que cette modification de notions soit possible, il faut faire intervenir la fois une mthode et une notion nouvelles. La mthode consiste ne pas essayer de composer l'essence d'une ralit au moyen d'une relation conceptuelle entre deux termes extrmes

  • 24 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    prexistants, et considrer toute vritable relation comme ayant rang d'tre. La relation est une modalit de l'tre ; elle est simultane par rapport aux termes dont elle assure l'existence. Une relation doit tre saisie comme relation dans l'tre, relation de l'tre, manire d'tre et non simple rapport entre deux termes que l'on pourrait adquatement connatre au moyen de concepts parce qu'ils auraient une existence effectivement spare et pralable. C'est parce que les termes sont conus comme substances que la relation est rapport de termes, et l'tre est spar en termes parce que l'tre est primitivement, antrieurement tout examen de l'individuation, conu comme substance. Par contre, si la substance cesse d'tre le modle de l'tre, il est pOSSible de concevoir la relation comme non-identit de l'tre par rapport lui-mme, inclusion en l'tre d'une ralit qui n'est pas seulement identique lui, si bien que l'tre en tant qu'tre, antrieurement toute individuation, peut tre saisi comme plus qu'unit et plus qu'identit g. Une telle mthode suppose un postulat de nature ontologique : au niveau de l'tre saisi avant toute individuation, le principe du tiers exclu et le principe d'identit ne s'appliquent pas ; ces principes ne s'appliquent qu' l'tre dj individu, et ils dfinissent un tre appauvri, spar en milieu et individu ; ils ne s'appliquent pas alors au tout de l'tre, c'est--dire l'ensemble form ultrieurement par l'individu et le milieu, mais seulement ce qui, de l'tre prindividuel, est devenu individu. En ce sens, la logique classique ne peut tre employe pour penser l'individuation, car elle oblige penser l'opration d'individuation avec des concepts et des rapports entre concepts qui ne s'appliquent qu'aux rsultats de l'opration d'individuation, considrs de manire partielle.

    De l'emploi de cette mthode considrant le principe d'identit et le principe du tiers exclu comme trop troits se dgage une notion possdant une multitude d'aspects et de domaines d'application : celle d transduction. Nous entendons par transduction une opration, physique, biologique, mentale, sociale, par laquelle une activit se propage de proche en proche

  • INTRODUCTION

    l'intrieur d'un domaine, en fondant cette propagation sur une structuration du domaine opre de place en place : chaque rgion de structure constitue sert la rgion suivante de principe et de modle, d'amorce de constitution, si bien qu'une modification s'tend ainsi progressivement en mme temps que cette opration structurante. Un cristal qui, partir d'un germe trs petit, grossit et s'tend selon toutes les directions dans son eau-mre sursature fournit l'image la plus simple de l'opration transductive : chaque couche molculaire dj constitue s.'rt de base structurante la couche en train de se former ; le rsultat est une structure rticulaire amplifiante, L'opration transductive est une individuation .n progrs ; elle peut, dans le domaine physique, s'effectuer de la manire la plus simple sous forme d'itration progressive ; mais elle peut, en des domaines plus complexes, comme les domaines de mtastabilit vitale ou de problmatique psychique, avancer avec un pas constamment variable, et s'tendre dans un domaine d'htrognit ; il y a transduction lorsqu'il y a activit partant d'un centre de l'tre, structural et fonctionnel, et s'tendant en diverses directions partir de ce centre, comme si de multiples dimensions de l'tre apparaissaient autour de ce centre ; la transduction est apparition corrlative de dimensions et de structures dans un tre de tension prindividuelle, cest--dire dans un tre qui est plus qu'unit et plus qu'identit, et qui ne g' est pas encore dphas par :rapport lui-mme en dimensions multiples, Les termes extrmes atteints par l'opration transductive ne prexistent pas cette opration ; son dynamisme provient de la primitive tension du systme de l'tre htrogne qui se dphase et dveloppe des dimensions selon lesquelles il se structure ; il ne vient pas d'une tension entre les termes qui seront atteints et dposs aux extrmes limites de la transduction 'G, La transduction peut tre une opration vitale ; elle exprime en particulier le sens de l'individuation organique ; elle peut tre opration psychique et procd logique effectif, bien qu'elle ne soit nullement limite il la pense logique. Dans le domaine du savoir, elle

  • 26 L'INDIVlDUAUON PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    dfinit la vritable dmarche de l'invention, qui n'est ni inductive ni dductive, mais transductive, c'est-dire qui correspond une dcouverte des dimensions selon lesquelles une problmatique peut tre dfinie ; elle est l'opration analogique en ce qu'elle a de valide. Cette notion peut tre employe pour penser les diffrents domaines d'individuation : elle s'applique tous les cas o une individuation se ralise, manifestant la gense d'un tissu de rapports fonds sur l'tre. La possibilit d'employer une transduction analogique pour penser un domaine de ralit indique que ce domaine est effectivement le sige d'une structuration transductive. La transduction correspond cette existence de rapports prenant naissance lorsque l'tre prindividuel s'individue ; elle exprime l'individuation et permet de la penser ; c'est donc une notion la fois mtaphysique et logique ; elle s'applique l' ontognse et est l'ontognse mme. Objectivement, elle permet de comprendre les conditions systmatiques de l'individuation, la rsonance interne ", la problmatique psychique. Logiquement, elle peut tre employe comme fondement d'une nouvelle espce de paradigmatisme analogique, pour passer de l'individuation physique l'individuation organique, de l'individuation organique l'individuation psychique, et de l'individuation psychique au transindividuel subjectif et objectif, ce qui dfinit le plan de cette recherche.

    On pourrait sans aucun doute affirmer que la transduction ne saurait tre prsente comme modle procd logique ayant valeur de preuve ; aussi bi"nous ne voulons pas dire que la transduction est procd logique au sens courant du terme ; elle un procd mental, et plus encore qu'un procd dmarche de l'esprit qui dcouvre. Cette consiste suivre Z' tre dans sa gense, accomplir gense de la pense en mme temps que s'a,CC()mpl la gense de l'objet. Dans cette recherche, elle appele jouer un rle que la dialectique ne poun: jouer, parce que l'tude de l'opration d'in,dh'dlalJ ne semble pas correspondre l'apparition du comme seconde tape, mais une immanence du tif dans la condltion premire sous forme amcbhrale

  • INTRODUCTION 27

    de tension et d'incompatibilit ; c'est ce qu'il y a de plus positif dans l'tat de l'tre prindividuel, savoir l'existence de potentiels, qui est aussi la cause de l'incompatibilit et de la non-stabilit de cet tat ; le ngatif est premier comme incompatibilit ontogntique, mais il est l'autre face de la richesse en potentiels ; il n'est donc pas un ngatif substantiel ; il n'est jamais tape ou phase, et l'individuation n'est pas synthse, retour l'unit, mais dphasage de l'tre partir de son centre prindividuel d'incompatibilit potentialise_ Le temps lui-mme, dans cette perspective ontogntique, est considr comme expression de la dimensionnalit de l'tre s'individuant.

    La transduction n'est donc pas seulement dmarche l'esprit ; elle est aussi intuition, puisqu'elle est ce

    une structure apparat dans un domaine de illroblimllticlue comme apportant la rsolution des P

    si:o,posS. Mais l'inverse de la dduction, la

    ne va pas chercher ailleurs un principe QIll: ro,soudre le problme d'un domaine : elle tire la

    rsolutrice des tensions mmes de ce comme la solution sursature se cristallise

    ses propres potentiels et selon l'espce chimique ' renferme, non par apport de quelque forme

    lU!l:.ere. Elle n'est pas non plus comparable l'induel'ind1.lction conserve bien les caractres des

    ralit compris dans le domaine tudi, structures de l'analyse de ces termes eux

    elle ne conserve que ce qu'il y a de ,c'est-li-dire ce qu'il y a de commun tous les

    !l inlUlant ce qu'ils ont de singulier ; la transau contraire, une dcouverte de dimen

    . le systme fait communiquer celles de termes, et telles que la ralit complte

    termes du domaine puisse venir s'ordonsans rduction, dans les structures

    dcOlV(ert,es ; la transduction rsolutrice du ngatif en positif : ce par quoi

    Itte', 'S(mt pas identiques les uns aux autres, ,ils, s(mt disparates (au sens que prend ce

    ,de la vision du relief) est intgr au et devient condition de signi-

  • 28 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    fication ; il n'y a pas appauvrissement de l'information contenue dans les termes ; la transduction se caractrise par le fait que le rsultat de cette opration est un tissu concret comprenant tous les termes initiaux ; le systme rsultant est fait de concret, et comprend tout le concret ; l'ordre transductif conserve tout le concret et se caractrise par la conservation de l'information, tandis que l'induction ncessite une perte d'information ; de mme que la dmarche dialectique, la transduction conserve et intgre les aspects opposs ; la diffrence de la dialectique, la transduction ne suppose pas l'existence d'un temps pralable comme cadre dans lequel la gense se droule, le temps luimme tant solution, dimension de la systmatique dcouverte : le temps sort du prindividuel comme les autres dimensions selon lesquelles l'individuation s'effectue ...

    Or, pour penser l'opration transductive, qui est le . fondement de l'individuation ses divers niveaux, la

    notion de forme est insuffisante. La notion de forme hylmorphique fait partie du mme systme de pense que celle de substance, ou celle de rapport comme relation postrieure l'existence des termes : ces notions ont t labores partir des rsultats de l'individuation ; elles ne peuvent saisir qu'un rel appauvri, sans potentiels, et par consquent incapable de s'individuer.

    La notion de forme doit tre remplace par celle d'information, qui suppose l'existence d'un systme en tat d'quilibre mtas table pouvant s'individuer ; l'information, la diffrence de la forme, n'est jamais un terme unique, mais la signification qui surgit d'une disparation. La notion ancienne de forme, telle que la livre le schma hylmorphique, est trop indpendante de toute notion de systme et de mtastabilit. Celle que la Thorie de la Forme a donne comporte au contraire la notion de systme, et est dfinie comme l'tat vers lequel tend le systme lorsqu'il trouve son quilibre : elle est une rsolution de tension. Malheureusement, un paradigmatisme physique trop . sommaire a amen la Thorie de la Forme ne consldrer comme tat d'quilibre d'un systme pouvant rsoudre

  • INTRODucrrON 29

    des tensions que l'tat d'quilibre stable : la Thorie de la Forme a ignor la mtastabiIit. Nous voudrions reprendre la Thorie de la Forme, et, au moyen de l'introduction d'une condition quantique, montrer que les problmes poss par la Thorie de la Forme ne peuvent pas tre directement rsolus au moyen de la notion d'quilibre stable, mais seulement au moyen de celle d'quilibre mtastable ; la Bonne Forme n'est plus alors la forme simple, la forme gomtrique prgnante, mais la forme significative, c'est-.c\ire celle qui tablit un ordre transductif l'intrieur d'un systme de ralit comportant des potentiels. Cette bonne forme est celle qui maintient le niveau nergtique du systme, conserve ses potentiels en les compatibilisant : elle est la structure de compatibilit et de viabilit, eUe est la dimensionnalit invente selon laquelle il y a compatibilit sans dgradation 1Il. La notion de Forme mrite alors d'tre remplace par celle d'information. Au cours de ce remplacement, la notion d'information ne doit jamais tre ramene aux signaux ou supports ou vhicules d'information dans un message, comme tend le faire la thorie technologique de l'information, tire d'abord par abstraction de la technologie des transmissions. La notion pure de forme doit donc tre sauve deux fois d'un paradigmatisme technologique trop sommaire : une premire fois, relativement la culture ancienne, cause de l'usage rducteur qui est fait de cette notion dans le schme hylmorphique ; une seconde fois, l'tat de notion d'information, pour sauver l'information comme signification de la thorie technologique de l'information, dans la culture moderne avec l'exprience des transmissions dans un canaI. Car c'est bien, dans les thories successives de l'hylmorphisme, de la Bonne Forme, puis de l'information, la mme vise que l'on retrouve : celle qui cherche dcouvrir l'inhrence des significations l'tre ; cette inhrence, nous voudrions la dcouvrir dans l'opration d'individuation.

    Ainsi, une tude de l'individuation peut tendre vers une rforme des notions philosophiques fondamentales, car il est possible de considrer l'individuation comme ce qui, de l'tre, doit tre connu en premier.

  • 30 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    Avant mme de se demander comment il est lgitime ou non lgitime de porter des jugements sur les tres, on peut considrer que l'tre se dit en deux sens : en un premier sens, fondamental, l'tre est en tant qu'il est ; mais en un second sens, toujours superpos uu premier dans la thorie logique, l'tre est l'tre en tant qu'il est individu. S'il tait vrai que la logique ne porte les nonciations relatives l'tre qu'aprs individuation, une thorie de l'tre antrieure toute logique devrait tre institue ; cette thorie pourrait servir de fondement la logique, car rien ne prouve d'avance que l'tre soit individu d'une seule manire possible ; si plusieurs types d'individuation existaient, plusieurs logiques devraient aussi exister, chacune correspondant un type dfini d'individuation. La classification des ontognses permettrait de pluraliser la logique avec un fondement valide de pluralit. Quant l'axiomatisation de la connaissance de l'tre prindividuel, elle ne peut tre contenue dans une logique pralable, car aucune norme, aucun systme dtach de son contenu ne peuvent tre dfinis : seule l'individuation de la pense pe.ut, en s'accomplissant, accompagner l'individuation des tres autres que la pense ; ce n'est donc pas une connaissance immdiate ni une connaissance mdiate que nous pouvons avoir de l'individuation, mais une connaissance qui est une opration parallle l'opration connue ; nous ne pouvons, au sens habituel du terme, connatre l'individuation ; nous pouvons seulement individuer, nous individuer, et individuer en nous ; cette saisie est donc, en marge de la connaissance proprement dite, une analogie entre deux oprations, ce qui est un certain mode de communication. L'individuation du rel extrieur au sujet est saisie par le sujet grce l'individuation analogique de la connaissance dans le sujet ; mais c'est par l'individuation de la connaissance et non par la connaissance seule que l'individuation des

    tres non sujets est saisie. Les tres peuvent tre connus

    par la connalssance du sujet, mais l'individuation des

    tres ne peut tre saisie que par l'individuation de laconnaissance du suj et.

  • INTRODUCTION

    II. - CONCEPTS DIRECTEURS POUR UNE RECHERCHE DE SOLUTION :

    31

    FORME, INFORMATION, FOTENTIELS ET MTASTABILIT

    L'absence d'une thorie gnrale des sciences humaines et de la psychologie incite la pense rflexive chercher les conditions d'une axiomatisation possible. En vue de ce travail qui comporte ncessairement un certain apport d'invention et ne peut tre le rsultat d'une pure synthse, il convient de remettre au jour les principaux systmes conceptuels qui ont t employs, sans accorder de privilge aux plus rcents : les dcouvertes de thorie chimique au dbut du XIx" sicle ont repris des schmes atomistiques dfinis depuis plus de vingt sicles, et les ont enrichis de l'apport de l'analyse pondrale .

    . Ainsi pourrait-on, de faon analogue, rvoquer les principes de Dyade indfinie, d'Archtype, de Forme et. de Matire, et les rapprocher des modles explicatifs rcents de la Psychologie de la Forme, puis de ceux de la Cyberntique et de la Thorie de l'Information, en allant jusqu' faire appel des notions tires des sciences physiques, comme celIe de potentiel. Nous voudrions montrer qu'une esquisse d'axiomatique des sciences humaines ou tout au moins de la psychologie .eSt si l'on essaye de saisir ensemble les trois no1:iOllS de forme, information et potentiel, condition d'aj011ter pour les relier et les organiser intrieurement

    dfinition d'un type particulier d'opration, qui Pl,arat lorsqu'il y a forme, information et potentiel :

    oPERATION TRANSDUCT'IVE. La NOTION DE FORME, en toutes les doctrines o

    . apparat, joue un rle fonctionnel constant : celui germe structural possdant un certain pouvoir

    rec:tettr et organisateur ; eUe suppose une dualit de se, en'tre deux types de ralit, la ralit qui reoit

    et celIe qui est la forme ou recle la forme ; ";;::.;de la forme rside en son unit, sa totalit, c. essentieUe avec elIe-mme. Mme dans taltp,ycholol:ie, la Forme, qui n'est plus ant-

    aucune matire, conserve pourtant sa sup-

  • 32 L'INDIVIDUATION PSYCBIQUE ET COLLECTIVE

    riorit de Ganzheit, et il y hirarchie des formes (bonne forme, meilleure forme). Immanente ou transcendante, antrieure la prise de forme ou contemporaine de cette opration, elle conserve son privilge de supriorit par rapport la matire ou aux lments ; ce qui est le fondement de toute thorie de la forme, archtypale, hylmorphique ou gestaltiste, c'est l'asymtrie qualitative, fonctionnelle et hirarchique de la Forme et de ce qui prend forme.

    2 LA NOTION D'INFORMATION est au contraire la clef de vote de toute doctrine de la rciprocit, de l'quivalence, voire mme de la rversibilit du terme actif et du terme passif dans l'change. L'metteur et le rcepteur sont les deux extrmits homognes d'une ligne en laquelle l'information est transmise avec le maximum de sret lorsque l'opration est rversible ; c'est non seulement le fait du contrle, mais la condition mme de l'intelligibilit qui suppose rversibilit et univocit. Codage et dcodage s'oprent selon des conventions communes l'metteur et au rcepteur : seul un contenu, et non un code, peut tre transmis. On peut associer la Thorie de l'INFORMATION tout type d'explication supposant la symtrie, l'homognit des lments qui s'associent et prennent forme par un processus additif ou de juxtaposition ; plus gnralement, les phnomnes quantitatifs de masse, de population, relevant de la thorie du hasard, supposant la symtrie des .lments (et leur caractre quelconque) peuvent tre penss en thorie de l'information.

    3 L'OPRATION TRANSDUCTIVE serait la propagation d'une structure gagnant de proche en proche un champ partir d'un germe structural, comme une solution sursature cristallise partir d'un germe cristallin ; cela suppose que le champ soit en quilibre mtastable, c'est--dire recle une nergie potentielle ne pouvant tre libre que par le surgissement d'une nouvelle structure, qui est comme une rsolution du problme ; ds lors, l'information n'est pas rversible : elle est la direction organisatrice manant courte distance du germe structural et gagnant le champ : le germe est metteur, le champ est rcepteur, et la limite entre metteur et rcepteur se dplace de faon continue

  • INTRODUCTION 33

    quand l'opration de prise de fonne se produit en progressant ; on pourrait dire que la limite entre le genne structural et le champ structurable, mtastable, est un MODULATEUR ; c'est l'nergie de mtastabilit du champ, donc de la matire, qui pennet la structure, donc la fonne, d'avancer : les potentiels rsident dans la matire, et la limite entre fonne et matire est un relais amplificateur.

    Les phnomnes de masse ne sont nullement ngli ger, mais on doit les considrer comme des conditions de l'accumulation d'nergie potentielle dans un champ, et, proprement parler, des conditions de la cration du champ en tant que domaine possible de transducti vit, ce qui suppose une relative homognit, et une rpartition partie par partie des potentiels nerg tiques ; la relation formematire se transpose alors en relation transductive et en progrs du couple structurant-structur, travers une limite active qui est passage d'information.

    Il existe une certaine relation entre une tude de objet technique et le problme ici prsel't, savoir :

    Forme, Information et Potentiels. Toutefois, l'ob et technique n'est destin qu' servir de modle,

    dexemple, peutetre de paradigme, pour interprr - d'une faon que l'on ne cherche pas prsenter comme nouvelle, mais que l'on voudrait expliative - le problme des rapports entre la notion de tbrme, sous ses diffrentes espces, la notion d'inforination, et enfin celle du potentiel ou d'nergie potenielle. Ce qui nous a dtennin rechercher une corrlation entre fonne, infonnation et potentiels, c'est !li'volont de trouver le point de dpart d'une axiomaique des sciences humaines. De nos jours, on parie ile sciences humaines et il existe. bien des techniques lti maniement humain, mais ce mot de sciences lilllaines , est toujours au pluriel. Ce pluriel signifie probablement que l'on n'est pas arriv ' dfinir une

  • 34 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLI!CTIVB

    axiomatique unitaire. Pourquoi y a-t-il des sciences humaines alors qu'il existe une physique ? Pourquoi sommes-nous toujours obligs de parler de psychologie, de sociologie, de psycho-sociologie ; pourquoi sommesnous obligs de distinguer diffrents champs d'tude l'intrieur de la psychologie, de la sociologie, de la psychologie sociale ? Et l'on ne parle pas des autres sciences humaines possibles. Pour ne prendre que ces trois, savoir celle qui se propose d'tudier les groupes, celle qui se propose d'tudier l'tre individuel, et celle qui explique la corrlation entre l'tre individuel et les groupes, nous . trouvons une multitude de champs et un fractionnement presque indfini de l'tude ; ceci rvle que mme propos d'une seule de ces sciences humaines, la recherche de l'unit est trs problmatique et qu'il faut fonder une thorie souvent rductrice pour arriver l'unit l'intrieur de chacune de ces sciences. On observe une unit de tendances plutt qu'une unit de principes explicatifs. Si nous comparons la situation actuelle des sciences humaines celle des sciences de la nature, telle qu'elle se prsentait dans l'Antiquit, au XVI" sicle, ou au dbut du XIX" sicle, nous trouvons que, au dbut du XIX" sicle, il y avait une chimie et une physique, peuttre mme plusieurs physiques et plusieurs chimies. Au contraire, peu peu, au dbut du XIX" sicle et au dbut du xX' sicle, nous avons vu naitre des grandes thories qui ont apport des possibilits d'axiomatisation. Ainsi, dans le domaine de l'lectricit et du magntisme, on a vu apparatre, vers 1864, la thorie lectro-magntique de la lumire de Maxwell, qui est et restera probablement l'exemple d'une synthse cratrice ; synthse, parce qu'elle runit les lments anciens des diffrentes recherches sur les actions rciproques des courants et des champs, sur les phnomnes d'induction, et cratrice, parce qu'elle apporte une notion nouvelle grce laquelle la synthse est possible et sans laquelle l'axiomatisation n'existerait pas : les courants de dplacement ; ces courants de dplacement sont devenus la propagation du champ lectro-magntique, telle que Hertz l'a rendue manifeste, exprimentalement, vingt ans plus tard.

  • INTRODUCTION 35

    Ne pourrait-on accomplir la mme uvre dans les sciences humaines ? Ne pourrait-on fonder la Science humaine, en respectant, bien entendu, des possibilits d'applications multiples, mais en ayant, au moins, une axiomatique commune applicable aux diffrents domaines ?

    Ce qui nous incite agir de la sorte, c'est la vision de l'volution des sciences de la nature. Il existait une physique et une chimie spares : il existe maintenant une physico-chimie, et nous voyons les corrlations entre physique et chimie devenir de plus en plus fortes. N'y aurait-il pas entre les deux extrmes, c'est--dire entre la thorie des groupes, qui est la sociologie, et la thorie de l'individu, qui est la psychologie, rechercher un moyen terme qui serait prcisment le centre actif et commun d'une axiomatisation possible ? Nous voyons, en effet, dans plusieurs cas, que, mme si nous prenons la psychologie individuelle la plus directement monographique et intrioriste, mme si nous prenons la sociologie des ensembles les plus grands, nous sommes toujours amens une recherche de corrlation, rendue ncessaire par le fait qu'il n'existe pas, en sociologie, le groupe de tous les groupes, ni, en psychologie, l'intrieur de l'individu, un lment, un atome de pense que l'on pourrait isoler pour en faire l'analogue du corps simple chimique, permettant de tout recomposer par des combinaisons avec d'autres lments simples. L'isolement d'une monade, atome psychologique, ou d'un groupe humain qui serait une totalit, c'est--dire une espce d'univers social, se trouve impossible. Il n'y a pas, en sociologie, une humanit , et il n'y a pas, en psychologie, un lment dernier ; nous sommes toujours au niveau des corrlations, que nous allions vers la recherche des lments intrieurs l'individu, ou que nous allions vers celle des groupes sociaux les plus vastes.

    Dans ces conditions, la leon tire de l'volution des sciences de la nature nous incite rvoquer les principes les plus anciens d'explication qui ont t proposs l'intrieur des sciences humaines, dans la mesure o ces principes sont des principes de corrlation. Voil pourquoi nous avons cru pouvoir choisir des notions

  • 36 L'INDIVIDUATION PSYCHIQUE ET COLLECTIVE

    telles que forme, information et potentiels, en commenant par la notion de forme. Cette notion est probablement une des plus anciennes qui ait t dfinie par les philosophes qui se sont intresss l'tude des problmes humains_

    Certes, elle a volu beaucoup, mais nous la trouvons dans l'Archtype platonici