DANS LA MÊME COLLECTION

«Angers sous l'Occupation» par Michel LEMESLE «Brest sous l'Occupation» par François PÉRON «Caen sous l'Occupation» par Jeanne GRALL «Nantes sous l'Occupation» par Benoît CRESSARD et Olivier EUDES «Rennes sous l'Occupation» par François BERTIN «Saint-Malo sous l'Occupation» par Patrick BÉROUL «La Libération de Paris» par Jacques BAROZZI «La Libération de la Bretagne» par Philippe CAMBY

En couverture: Fin mai 1940: les Allemands occupent Lille.

Photo des pages précédentes: Détendus et confiants, les réservistes font une partie de cartes en attendant de revêtir l'uniforme.

maquette de couverture: Bernard Louviot.

@ 1 9 8 2 O U E S T - F R A N C E

Gérard Landry

L i l l e -

R o u b a i x T o u r c o i n g

s o u s l ' o c c u p a t i o n

ouest france 38, rue du Pré-Botté 3 5 1 0 0 - R e n n e s

A ma mère qui, par ses récits, m'éveilla à ce tragique épisode de notre histoire.

Avant-propos

Près de quarante ans ont passé depuis que, dans un formidable cataclysme, les Allemands ont quitté notre sol. De nombreux ouvrages ont été publiés sur cette occupation sans précédent pour la France mais non pour notre région. Une tâche immense reste cependant à accomplir pour que les jeunes générations puissent avoir une clai re idée de ce que fut cette période dans la vie quotidienne de leurs parents ou de leurs grands-parents. De ces années 1940-1944, ils se représentent peut-être mieux Vichy, siège du gouvernement français, Lyon,p!aque tournante de la Résistance, Paris, demeurée capitale culturelle, ou Marseille, dont les Allemands rasèrent le vieux port, que leur cadre habituel de Lille- Roubaix-Tourcoing taché de feldgrau.

Des associations (1), des chercheurs s'emploient à combler cette lacune. Pour ma part, j'ai cru bon de présenter sur ma ville des images (dont la qualité de reproduction est souvent mauvaise, mais dès son arrivée, l 'occupant interdit toute photographie!), des témoignages visuels qui sembleront tout proches à certains tant ils ont vécu dans leur chair et dans leur âme ces quatre années, et très éloignés à d'autres qui peuvent difficilement se les imaginer.

J'ai aussi réalisé cet ouvrage parce que je pense que je ne suis pas le seul à vouloir connaître et assumer l'histoire de la ville qui m'a vu naître et du peuple qui l'a bâtie.

G. L.

(1) Notamment, Z.I.-R.E.M.O.R., Zone Interdite-Recherches et mémoire de l'Occupation et de la Résistance, 18, rue de Lattre de Tassigny, 59490 Somain.

ci-contre photo du haut : 2 septembre 1939: la mobilisation générale est décrétée.

ci-contre photo du bas : Affiches rappelant les réservistes, apposées sur l'ancien immeuble des PTT, boulevard Gambetta à Roubaix.

De septembre 1939 à avril 1940: préparatifs et incertitude

Le 3 septembre 1939, la France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre à l'Allemagne. En accord avec Staline, 48 heures auparavant, les troupes d'Hitler ont fondu sur la Pologne. Deux semaines plus tard, ce sera le tour des Russes d'envahir, dans sa partie orientale, la malheu- reuse Pologne qui, malgré une résistance héroïque, est éc raséedès le 28 septembre et partagée entre les deux puissances, nationale-socialiste et soviétique.

A l'Ouest, après les concessions pour préserver la paix à tout prix, on suit avec frémissement l 'anéantissement de l'allié polonais. Mais on reste confiant. Le Général Weygand n'a-t-il pas déclaré, fin juillet 1939, à l'Hippodrome des Flandres de Lambersart: «Je crois que l'armée fran- çaise a une valeur plus grande qu'à aucun moment de son histoire. Elle possède un matériel de première qualité, des fortifications de premier ordre, un moral excellent, un Haut-Commandement remarquable. Per- sonne chez nous ne veut la guerre; mais j'affirme que si l'on nous oblige à gagner une nouvelle victoire, nous la gagnerons».

Après l'opération avortée sur Sarrebrück du généralissime français Gamelin, on s'installe, pour plusieurs mois, dans «la drôle de guerre», si souvent décrite dans ses aspects les plus dérisoires et les plus dramatiques.

Une fois de plus dans son histoire, Lille, Roubaix et Tourcoing sont dans la zone armée, et leur population, au «Carrefour des invasions» (1), assiste avec anxiété à la concentration d'unités dans la région, au replâ-

(1) Titre d'un ouvrage de François Debergh et Jean Piquet. Paris, 1966.

t r a g e d e s e s f o r t i f i c a t i o n s , à l ' i n s t a l l a t i o n d e s i r è n e s a u s o m m e t d e c e r t a i n s é d i f i c e s p u b l i c s , a u c r e u s e m e n t d e t r a n c h é e s - a b r i s , a u r e p é - r a g e d e s c a v e s , à l ' o r g a n i s a t i o n d e s p o s t e s d e s e c o u r s , à la m i s e e n p l a c e d e t o u t u n s y s t è m e é l a b o r é d e d é f e n s e p a s s i v e . A R o u b a i x , e n j a n v i e r 1 9 4 0 , o n i n a u g u r e l ' a b a i s s e m e n t à 1 2 0 v o l t s d e l ' i n t e n s i t é l u m i n e u s e d e s a m p o u l e s d e 2 2 0 v o l t s q u i é c l a i r e n t l e s r u e s d e la vi l le : e l l e s n e s o n t p l u s a l o r s v i s i b l e s q u ' à 1 5 0 m è t r e s d e h a u t e u r . N o n s a n s r a i s o n , o n vit d a n s la h a n t i s e d ' u n e b r u s q u e a t t a q u e a é r i e n n e . L e s a u t o r i t é s n ' e x c l u e n t p a s n o n p l u s l e s m e n a c e s d ' i n v a s i o n et , s e l o n l e s p r e s c r i p t i o n s o f f i c i e l l e s , la p r é f e c t u r e d e Lille a p p l i q u e le p l a n d e d i s p e r s i o n : l e s s e r v i c e s a d m i n i s - t r a t i f s à F o u r n e s , l e s c h e f s d ' o e u v r e s d u P a l a i s d e s B e a u x - A r t s à T r é v a - rez , e n I l l e - e t - V i l a i n e , t e s v i e i t t a rd s de s h o s p i c e s l i l l o i s à B e r c k - P t a g e , l e s p e n s i o n n a i r e s d e la M a i s o n d é p a r t e m e n t a l e d ' E s q u e r m e s à B a i l l e u l e t A r m e n t i è r e s . U n e p s y c h o s e d e g u e r r e r è g n e e t l ' é c o n o m i e s e d é r è g l e ; m a l g r é l ' a c t i v i t é d e s u s i n e s d e g u e r r e , q u i p r o f i t e a u t e x t i l e e t à la m é t a l l u r g i e r é g i o n a l e , l e s p r i x g r i m p e n t , le c h ô m a g e s év i t , l ' a g r i c u l t u r e s o u f f r e d e la r é q u i s i t i o n d e s h o m m e s e t d e s c h e v a u x , le c o m m e r c e p â t i t d e s p e r t u r b a t i o n s d e s l i a i s o n s i n t e r n a t i o n a l e s e t d e s t r a n s p o r t s .

A v a n t l ' o r a g e e t d a n s l ' a f f r o n t e m e n t p s y c h o l o g i q u e a u q u e l s e l i v r en t l e s b e l l i g é r a n t s , l e s a u t o r i t é s f r a n ç a i s e s s e s o u v i e n n e n t m ê m e q u e la

ci-contre et ci-dessus : La foule vient se renseigner sur les derniers événements au Journal de Roubaix.

plupart des 25.000 ouvriers frontaliers de Lille, Roubaix, Tourcoing sont de langue flamande: en novembre 1939, le Conseil général du Nord, pour contrecarrer la propagande ennemie, souhaite «que le poste régio- nal de Radio-Lille assure désormais des émissions patriotiques en lan- gue flamande, susceptibles de galvaniser ces forces morales qui décident du sort des batailles même économiques, de réagir aussi contre les perfides insinuations en langue française du poste allemand de Stuttgart, qui s'appliquent à désagréger le moral français».

De septembre 1939 à l'invasion du Danemark et au débarquement des troupes allemandes en Norvège, en avril 1940, l'attente désœuvrée des soldats ou angoissée des civils a succédé à la fièvre des préparatifs à l'action.

Le succès de l'expédition alliée sur Narvik en Norvège passe rapide- ment au second plan: le 10 mai 1940, Hitler déclenche son offensive à l'Ouest.

Photo des pages suivantes: Le 31 mai 1940: alors que tout espoir est perdu pour Lille, ces servants d'une batterie de 75 tirent leurs derniers obus à Haubourdin.

A la gare de Roubaix, les réservistes attendent le départ et reçoivent les dernières recommandations de la famille. -.1 .

Des réfugiés belges qui ont la chance de posséder un bon vélo attendent à la gare de Tourcoing.

« s u » L i l l e -

R o u b a i x T o u r c o i n g

s o u s r o c c u p a t i o n

Encore t raumatisées par la terrible occupation de la Première Guerre Mondiale, déclarées en zone interdite dè s juin 1940, longtemps coupées du reste de la France, la capitale des Flandres et ses deux villes-sœurs furent le théâtre de violents combats et d 'événements tragiques.

Image après image, ce livre nous aide à mieux connaître ces quatre années, inoubliables pour cer- tains, difficilement imaginables pour d'autres.

Lillois d'origine, marié à une Roubaisienne, co- auteur d 'une Histoire secrè te de la Flandre et de l'Artois, Gérard Landry nous fait partager à l'aide de quelque 200 documents, la vie sous l'Occupation 1940-1944 des habitants de l'immense métropole Lil- le-Roubaix-Tourcoing.

Un livre témoignage sur l'une des périodes les plus tragiques de notre histoire.

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