Lib .pdf

48
PHOTO FRANCK F F E . AFP Airbus L’AÉRIEN AU 7 e CIEL PAGES 2-5 L’avionneur, qui a enregistré vendredi un succès avec le premier vol de l’A350, est le symbole d’un secteur industriel en expansion. Au point de manquer de candidats à l’embauche. w Le Met de New York restitue deux statues khmères au Cambodge. w Une évocation du compositeur Benjamin Britten par ses proches. w Cartographie de la jeunesse tunisienne, mais aussi chroniques, Bourre-Paf, la semaine de l’écrivain François Rivière… CAHIER CENTRAL leMag Sónar, 20 ans d’electro chic Le festival barcelonais change de quartier pour une édition anniversaire toujours aussi riche. REPORTAGE, PAGES 24-25 Les boîtes de Furosémide contenaient… du Furosémide D’après nos informations, les quatre personnes qui sont mortes ont pris des médicaments qui n’étaient pas altérés par la présence de somnifères. RÉCIT, PAGE 10 MET 1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION N O 9980 SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats Unis 5$, Finlande 2,70 €, Grande Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €, Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays Bas 2,30 €, Portugal (cont ) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA

description

journal

Transcript of Lib .pdf

Page 1: Lib .pdf

PHO

TOFR

AN

CK

FF

E.A

FP

AirbusL’AÉRIEN

AU7e CIEL

PAGES 2­5

L’avionneur, qui a enregistré vendredi un succèsavec le premier vol de l’A350, est le symbole d’un

secteur industriel en expansion. Au point demanquer de candidats à l’embauche.

w Le Met de New Yorkrestitue deux statueskhmères au Cambodge.w Une évocation ducompositeur BenjaminBritten par ses proches.w Cartographie de lajeunesse tunisienne,mais aussi chroniques,Bourre-Paf, la semainede l’écrivain FrançoisRivière…

CAHIER CENTRAL

leMag

Sónar, 20 ansd’electro chicLe festival barcelonais changede quartier pour une éditionanniversaire toujours aussiriche. REPORTAGE, PAGES 24­25

Les boîtesde Furosémidecontenaient…du FurosémideD’après nos informations,les quatre personnes qui sontmortes ont pris desmédicaments qui n’étaientpas altérés par la présencede somnifères.

RÉCIT, PAGE 10

MET

• 1,60 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO9980 SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 WWW.LIBERATION.FR

IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,30 €, Andorre 1,60 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,70 €, Canada 4,50 $, Danemark 27 Kr, DOM 2,40 €, Espagne 2,30 €, Etats Unis 5 $, Finlande 2,70 €, Grande Bretagne 1,80 £, Grèce 2,70 €,Irlande 2,40 €, Israël 20 ILS, Italie 2,30 €, Luxembourg 1,70 €, Maroc 17 Dh, Norvège 27 Kr, Pays Bas 2,30 €, Portugal (cont ) 2,40 €, Slovénie 2,70 €, Suède 24 Kr, Suisse 3,20 FS, TOM 420 CFP, Tunisie 2,40 DT, Zone CFA 2 000CFA

Page 2: Lib .pdf

Le premier vol réussi de l’A350 illustre la très bonnesanté du secteur aéronautique en France. Qui, pourtant,manque de main-d’œuvre et délocalise.

L’aérien, une pistepour l’emploiE xplosion de joie et ouf de sou-

lagement chez Airbus. Huitans après le géant des airsA380, le nouvel A350 a effec-

tué vendredi son premier vol sans en-combre, se payant même le luxe d’unpassage à basse altitude au-dessus desmilliers de spectateurs rassemblésautour de la piste de Toulouse-Blagnac,où l’appareil a atterri à 14 h 05. «C’estun grand jour pour Airbus», s’est réjouiThomas Enders, PDG d’EADS, la mai-

son mère del’avionneur.Airbus frappe

fort à trois jours du salon du Bourget(Seine-Saint-Denis), dont l’A350 seral’une des vedettes (lire page 4). Le plusgrand raout aéronautique mondial, quiouvre ses portes lundi, va encore se tra-duire par un festival de commandes.

Thomas Enders s’attend à «plusieurscentaines» de ventes pour Airbus pen-dant le salon. Malgré la crise, l’aéronau-tique civile affiche en effet une santé in-solente, avec un chiffre d’affaires qui aexplosé de 16% au niveau mondial cesdouze derniers mois, selon le cabinetDeloitte. Et le futur s’annonce tout aussiradieux. Il devrait se vendre 35000 avi-

ons d’ici 2032, pour 3 600 milliardsd’euros. Boeing a ainsi relevé de 3,7%,mardi, ses prévisions de marché sur lesvingt prochaines années. Surtout, alorsque presque tous les pans de l’industriefrançaise enchaînent les plans sociaux(automobile, pharmacie, chimie),l’aéronautique est la seule filière enpleine forme : les 300 plus grossesentreprises, réunies au sein du Gifas(Groupement des industries françaisesaéronautiques et spatiales), ont créé8000 emplois nets dans l’Hexagone l’andernier, du jamais-vu depuis vingt ans.Mais la France ne profite pas assez decette manne venue du ciel, à cause desdélocalisations, mais aussi des difficul-tés des industriels à recruter. Revue desenjeux d’un secteur-clé.

POURQUOI L’AÉRONAUTIQUEEST ÉPARGNÉE PAR LA CRISE ?Les avionneurs bénéficient d’un doubleeffet d’aubaine. D’abord, la croissancecontinue du trafic aérien (5% par anjusqu’en 2032, selon Boeing), dopée parla mondialisation et le boom des com-pagnies à bas coûts. Ensuite, la flambéedu prix du pétrole. «Le carburant re-présente la moitié du coût d’un vol long-courrier. C’est deux fois plus qu’il y adix ans», souligne Randy Tinseth, vice-président marketing de Boeing. Lescompagnies se débarrassent donc deleurs vieux avions pour acheter des ap-pareils dernier cri, moins gourmands encarburant. A l’image du Boeing 787 et del’A350, qui promettent 25% de consom-mation en moins grâce à leur fuselage encarbone. Résultat: la flotte mondiale de-vrait doubler d’ici vingt ans.Forte de ses 300000 emplois, la filièretricolore a tous les atouts pour surfersur cette vague. Car elle dispose, enplus d’Airbus, de sous-traitants declasse mondiale. Des géants comme Sa-fran (moteurs, équipements) ou Thales(électronique), mais surtout de grossesPME (Zodiac, Liebherr, Latécoère,Daher, Lisi, Mecachrome, etc.) capablesde fabriquer – presque – tous les élé-ments d’un avion, des rivets aux mor-ceaux de fuselage, en passant par lessièges et les câbles électriques. Bref,l’aéronautique est le seul secteur qui aréussi, à l’image du Mit-

Par YANN PHILIPPINL'ESSENTIEL

LE CONTEXTEAlors que le salon du Bourget vas’ouvrir lundi, l’aéronautique esten plein boom.

L'ENJEUAvec son A350, Airbus saura­t­ilassurer son avenir face à Boeing?

Par ALEXANDRASCHWARTZBROD

Moteur

Les sujetsd’autosatisfaction sontsuffisamment rares en cestemps de crise et de doutesexistentiels pour que l’onne boude pas celui-ci :la santé flamboyante del’aéronautique civileeuropéenne, dont laFrance est l’un desprincipaux moteurs. Oui,il existe au moinsune filière qui croît etqui embauche. Et, oui,l’Europe, quand on ledécide et quand on s’endonne les moyens, peutêtre aussi synonymede coopération, dedynamisme et de réussite.A un an d’élections quis’annoncent difficiles,le message vaut d’êtremartelé.Ne nous leurrons pas :Airbus est loin d’être leroyaume des Bisounours.La partie n’est pas toujoursfacile entre partenairesfrançais, allemands,britanniques et espagnols.Mais au moins ces gens-làse parlent et se fabriquentun avenir commun. Et lerésultat est là : ça marche.Si bien même, que lesecteur a bien du mal àpourvoir les postes vacants(les PME, notamment,peinent à trouver descandidats formés), ce quien dit long sur le cheminqu’il reste à parcourir pouradapter le marché dutravail aux besoins du XXIe

siècle. Petit bémol : toutcela n’est pas très vert.L’essor du transport aériena un impact nonnégligeable sur leréchauffement climatiqueet le mode de tourismequ’il promeut, massif et àbas coût, n’est guèredurable. Mais restonsoptimistes et rêvons unpeu : d’un essor couplé dela conscience écologiste etdes progrèstechnologiques, pasforcément incompatibles.

ÉDITORIAL

Des techniciens d’Airbus

AUTRE

MOYEN-ORIENT

CHINE

ASIE-PACIFIQUE

EUROPE

AMÉRIQUEDU NORD

LE TRAFIC AÉRIENpar zone géographique, en milliards de passagers/km

Sour

ce :

Boei

ng 2

013

CM

O

REPÈRES

LE SALON DU BOURGETLe plus grand salon aéronautiquemondial, qui se tient en banlieue parisienne tous les deux ans, ouvre sesportes lundi aux professionnels et devendredi à dimanche au grand public.Il attire plus de 2000 exposants de45 pays, et environ 140000 visiteurs.

3600milliards d’euros, c’est la taille dumarché mondial de l’aviation civiledans les vingt ans à venir (pour35000 avions vendus), selon les prévisions publiées mardi par Boeing. Suite page 4

DÉCRYPTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 20132 • EVENEMENT

Page 3: Lib .pdf

Arnaud Negri, du cabinet Syndexpointe la désaffection, en France,pour les métiers techniques:

«Il y a un vraidéficit deformation»A rnaud Negri est con-

sultant spécialisédans les secteurs de

l’aéronautique et de la dé-fense chez Syndex, un cabi-net qui conseille les repré-sentants des salariés.La filière aéronautique seporte-t-elle bien ?A première vue, oui. Avec310000 emplois à la fin 2012(170 000 directset 140 000 indi-rects), le secteura créé 8000 emplois net de-puis un an en France, ce quiconstitue une vraie perfor-mance au regard du contexteindustriel général. Mais sil’on inclut de plus petites en-treprises, les sous-traitantsde deuxième outroisième rang, lasituation est pluscontrastée. Cesentreprises, par-fois des TPEde 15 salariés tra-vaillant aussi pourd’autres secteurs, commel’électronique ou l’automo-bile, souffrent de la très forteinternationalisation de la fi-lière, qui fait de plus en plusappel à des sous-traitantsest-européens et asiatiques.Mais l’emploi progresse dansles grands groupes…Oui, mais pas autant enFrance qu’à l’étranger. ChezEADS, il a progressé de 20%en France entre 2003 et 2012,alors que le chiffre d’affairesa crû de 90%. Chez Safran,dont l’Etat est le premier ac-tionnaire, le chiffre d’affairesa progressé de 28% sur 2012et l’emploi de 8%, mais il aen réalité reculé de 5% dansl’Hexagone, tandis qu’il aug-mentait de 36% ailleurs. Lasituation est analogue chezThales, dont l’Etat est égale-ment le premier actionnaire.Cette croissance profite-t-elle assez à l’Europe ?Au Bourget, on va se féliciterdes commandes, mais il fautbien constater qu’en propor-tion, le secteur crée moinsd’emplois qu’il n’augmenteson activité, et que ces nou-veaux emplois se créent es-sentiellement hors de Franceet même d’Europe. L’argu-ment classique est que leclient doit être proche de sesfournisseurs. C’est la raison

pour laquelle Airbus a ouvertun site d’assemblage àTianjin, en Chine. Sauf qu’àma connaissance, cela ne luia pas permis d’y vendre plusd’avions que Boeing, qui nedispose pas de site d’assem-blage sur place. Cet argu-ment est donc à relativiser.Qu’est-ce que cela signifie?Aujourd’hui l’aéronautique

fait ce qu’a faitl’automobile il ya vingt-cinq ans,

en internationalisant sa pro-duction sur fond de sous-traitance en cascade etd’externalisations. Cettepression à la baisse sur lescoûts est présentée commeun impératif de compétiti-

vité. Mais, au-delà des argu-ments commer-ciaux, il s’agitavant tout de ré-pondre aux exi-gences de renta-bilité de plus en

plus fortes des actionnaires.Des exigences qui traduisentla financiarisation de ce sec-teur jusqu’ici très intégré, etqui sont dangereuses danscette activité reposant surdes cycles très longs. Les pe-tits acteurs souffrent car ilssubissent les pressions desplus gros afin de satisfaireleurs actionnaires.Les employeurs se plaignentque de nombreux emploisrestent non pourvus enFrance en raison des insuffi-sances de formation…Airbus a même fini par créerson propre lycée profession-nel à Toulouse! Il y a un vraidéficit de formation qui,au-delà du cas spécifique del’aéronautique, s’expliquepar une désaffection pour lesmétiers techniques. L’Etatdoit y remédier vite, sinonles entreprises iront chercherces compétences qui existentailleurs, comme en Asie.L’idée de récupérer des sala-riés de secteurs déclinants,comme l’automobile ou laconstruction navale, est in-téressante, mais cela prendradu temps et nécessite un groseffort de formation. Les mé-tiers ne sont pas directementsubstituables.

Recueilli parCHRISTOPHE ALIX

DR

dans un cockpit d’A350 à Montoir­de­Bretagne, près de Saint­Nazaire, en décembre 2011. PHOTO STÉPHANE MAHÉ REUTERS

INTERVIEW

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 • 3

Page 4: Lib .pdf

Avec l’A350, l’européen compte rattraper son retard sur ce marché porteur.

Airbus-Boeing: la guerredes longs-courriersC’ est le nouveau champ de bataille en-

tre Airbus et Boeing. Au salon duBourget, le sujet brûlant sera la

guerre impitoyable des deux avionneurs surle marché des longs-courriers. Avec en ve-dette les appareils derniers cri, ultra-écono-mes grâce à leur peau en carbone. Chez Air-bus, l’A350, après son premier vol devendredi, pourrait survoler le Bourget ven-dredi prochain, lors de la visite de FrançoisHollande. Tandis que Boeing pourrait y an-noncer le lancement du 787-10, version al-longée de son Dreamliner.Si la bataille est aussi âpre, c’est que les longs-courriers pèsent près de la moitié des recetteset génèrent les plus fortes marges. Et c’estAirbus qui se retrouve sous pression. CarBoeing domine largement ce créneau, grâceau nouveau 787 (890 commandes) et à songrand frère, le 777. Bref, avec l’A350, Airbusn’a pas le droit à l’erreur. Lancé avec deux ansde retard sur le B787, il n’affiche pour l’ins-tant que 613 ventes au compteur. Comme leconfiait la semaine dernière Fabrice Brégier,le PDG de l’avionneur européen, l’objectiffixé est clair : il faut «rattraper Boeing».«Drôle». Mais le pari n’est pas gagné. Car enmatière d’avions de nouvelle génération,Airbus a tout misé sur la famille A350(trois avions de 270 à 365 sièges), optimiséepour les très longs vols (type Europe-Asie).

Tandis que Boeing va aligner deux famillesd’ici la fin de la décennie : son petit 787(trois modèles), calibré pour les vols moyens(Europe-USA), et la version modernisée dutrès long courrier 777, le 777X (deux modèles),qui doit être lancé d’ici à la fin de l’année. Ré-sultat: l’américain va se retrouver en positionde force, voire en monopole, sur certains mo-dèles.Dans la gamme Airbus, «il y a un trou dans laraquette», confirme Philip Moine, expert aé-ronautique au cabinet Kurt Salmon. «Je suisinquiet pour Airbus, ajoute un ancien dirigeantde l’avionneur. Ils auraient dû faire deux fa-milles.» Sur le créneau des «petits», les 787en carbone risquent de tuer d’ici peu le vieilA330 –deux commandes cette année– maisaussi la plus petite version de l’A350 (270 siè-ges), car nombre de compagnies n’ont pasbesoin d’aller très loin avec un avion de cettetaille. Le patron de Lufthansa, ChristophFranz, a ainsi récemment reproché à Airbusde «trop prendre en compte les besoins descompagnies du Golfe qui veulent toujours plusde rayon d’action». Pour l’européen, la solu-tion serait de moderniser l’A330. «C’est cequ’il faudrait dans l’idéal, mais nos ressourcessont limitées», confie un dirigeant d’Airbus.Ray Conner, patron des avions civils deBoeing, se voit déjà vainqueur. «On a beau-coup d’avance sur eux, ça va être drôle», lan-

çait-il fin mai. «Il est prématuré d’affirmer quecelui qui a le plus de produits est le mieux posi-tionné», a répliqué jeudi Thomas Enders lepatron d’EADS, la maison mère d’Airbus. Carsur le créneau des plus gros avions, l’européenaligne un appareil entièrement nouveau(l’A350). Là où Boeing n’aura qu’une versionmodernisée de son 777, actuellement en si-tuation de monopole… Ce qui pourrait fairetrès mal à l’américain «Airbus présente unecontre-offre plus qu’intéressante sur cette nichetrès lucrative pour Boeing», explique PhilipMoine.Crucial. Au-delà de la stratégie, la bataille sejouera dans l’exécution. Le 787 sort à peine latête de l’eau après trois ans de déboires indus-triels, dont le problème de batteries qui acloué les appareils au sol pendant trois mois.Boeing «n’a pas eu d’occasion d’être heureuxdepuis un bon moment», tacle Thomas Enders.Reste à savoir si l’A350 qui affiche deux ansde retard, sera livré à temps, fin 2014. Et siAirbus arrivera à le fabriquer correctement,après le fiasco industriel de l’A380. L’enjeu estcrucial pour Toulouse. D’ici une quinzained’années, la Ville rose va en effet perdre sonusine d’assemblage des moyen-courriersA320, qui seront intégralement fabriqués àHambourg. Vu les ventes décevantes du su-per-jumbo A380, l’avenir industriel de Tou-louse est donc suspendu au succès de l’A350.

Y.P.

telstand allemand, àcréer un tel réseau d’entreprises inno-vantes et exportatrices. «C’est notreprincipale richesse», explique le Gifas.

POURQUOI LA FRANCEPOURRAIT FAIRE ENCORE MIEUX ?Avec 15000 recrutements l’an dernieret autant prévus cette année, l’aéronau-tique est l’une des très rares industriesqui crée encore des emplois en France.Mais cette croissance est très inférieureà celle du chiffre d’affaires, pointait ré-cemment la CFDT lors d’une conférencesur l’aéronautique. Sous la pression desdonneurs d’ordres, «la filière s’interna-tionalise et délocalise», prévenait JeanMauries, secrétaire général adjoint dela Fédération de la métallurgie CFDT.Ainsi, chez Zodiac, entre 2005 et 2012,l’emploi a progressé de 12% en France,mais de 50% à l’étranger. Même phéno-mène chez Thales ou Safran. Ces trans-ferts d’activité restent à ce stade bienmoins importants que dans l’automo-bile, et passent inaperçus vu la crois-sance du secteur. Mais ils pourraientfinir par provoquer des «destructionsd’emplois en cas de retournement écono-mique», redoute Mauries. Les industrielsrépliquent qu’ils doivent réduire leurscoûts, se protéger contre l’euro fort etse rapprocher de leurs clients.Ces délocalisations ne semblent pasémouvoir l’Etat, pourtant actionnaire dela plupart des géants du secteur. L’exé-cutif n’a pas bougé lorsqu’Aerolia, filialed’EADS qui fabrique l’avant des Airbus,a créé en 2010 une usine de 1000 sala-riés en Tunisie. Même indifférence faceaux protestations des syndicats de Tha-les, qui bataillent contre la délocalisa-tion à Singapour d’une partie des calcu-lateurs des Airbus. L’annonce, en avril,de la création d’une usine d’assemblaged’A320 aux Etats-Unis, a même étésaluée par le gouvernement, alors quel’argument d’Airbus (vendre plus d’avi-ons sur place) était très discutable.

POURQUOI L’INDUSTRIEPEINE­T­ELLE À RECRUTER ?Il y a donc là un gisement d’emploisinexploité. Mais à quoi bon se battre sila filière a déjà du mal à pourvoir lespostes ? Si les grands comme Airbusn’ont aucun mal à attirer les candidats,«les PME sont aujourd’hui plutôt en peinepour recruter», explique Philippe Duja-ric, directeur adjoint des affaires socia-les du Gifas. Car les jeunes boudent lesmétiers de production (soudeurs, ajus-teurs, usineurs), jugés pas assez valori-sants. «Certaines formations se videntfaute de candidats, mais aussi parce qu’ily avait moins de débouchés il y a quelquesannées», poursuit Dujaric.La filière entend renverser la vapeur. LeGifas lance pour la première fois auBourget l’«avion des métiers», une ex-position géante où des ouvriers vontprésenter 56 métiers sur de vrais équi-pements. La région Auvergne va an-noncer la création d’un centre de for-mation flambant neuf: l’Aerocampus.D’autres initiatives ont fleuri: transfertdes apprentis que les grands groupes nepeuvent pas recruter vers les sous-trai-tants, ou programme de reconversionvers l’aéronautique des anciens salariésde l’automobile. Mais il s’agit de com-bats de longue haleine, notammentpour séduire les femmes. Comme leregrette Philippe Dujaric, «une moitié dela population nous échappe». •

Suite de la page 2

L’A350 veut concurrencer le Boeing 787, dont une version améliorée sera présentée au Bourget. PHOTO ÉRIC CABANIS AFP, ROBERT GALBRAITH REUTERS

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 20134 •

Page 5: Lib .pdf

Malgré les promesses de Hollande sur le maintien du budget de la défense, les industriels s’attendentà des coupes dans les programmes. La prime ira à ceux qui ont un pied dans le secteur civil.

Armée: l’industrie sur la défensiveL es visiteurs du salon du Bourget, la se-

maine prochaine, n’auront guère depeine à différencier les industriels de

l’aéronautique civile des fabricants d’armes.Ce sera champagne pour les uns, soupe à lagrimace pour les autres. Une nouvelle loi deprogrammation militaire est attendue pourl’été sur le bureau du Premier ministre (pourprésentation à l’automne devant le Par-lement) et les industriels de l’armementtremblent pour leurs commandes, conscientsde la détermination des pouvoirs publics àtailler dans la masse en cette période de res-trictions drastiques. Et c’est valable pour laplupart des pays d’Europe.Moyens. Dans ce contexte, les plus chanceuxsont ceux qui peuvent afficher une activité«duale» – à la fois civile et militaire –, àl’image du géant franco-allemand EADS, tirévers le haut par les performances d’Airbus oudu groupe Safran qui motorise les avions decombat et surtout les avions de ligne. En re-vanche, les entreprises vivant essentielle-ment du militaire ont du souci à se faire, telsNexter (fabricant de blindés et de canons),MBDA (filiale d’EADS dans les missiles) ou,dans une moindre mesure, Thales, qui réalise55% de son chiffre d’affaires dans la défense.Encore que la situation aurait pu être bien

pire. Grâce, peut-être, à l’engagement fran-çais au Mali, le chef de l’Etat –et chef des ar-mées– a voulu maintenir le budget de la dé-fense, 31,4 milliards d’euros annuels alorsque Bercy militait un temps pour une baissefranche. François Hollande a aussi promis,le 24 mai devant l’Institut des hautes étudesde défense nationale qu’aucun grand pro-gramme d’équipement ne serait remis encause et que l’emploi serait pré-servé. Paraphrasant de Gaulle, ila ce jour-là assuré que la Francevoulait «toujours être une grandenation» et qu’elle y mettrait lesmoyens, en préservant le niveaude sa force de dissuasion nu-cléaire, dont le coût est jugé ex-horbitant par certains experts, y comprismilitaires. L’industrie d’armement françaiseest en effet l’une des rares industries quis’exporte, elle est donc doublement straté-gique.«Les promesses n’engagent que ceux qui ycroient», tempérait ces derniers jours un in-dustriel du secteur. «Il va y a avoir des coupes,tout n’est pas maintenable.» De fait, beaucoupne sont pas dupes. Si l’on en croit le tout nou-veau livre blanc, le contrat opérationnel desarmées va être révisé, avec une nouvelle

chute des effectifs (de 24000 personnes d’icià 2019) et un plan de projection des forceshors de l’Hexagone revu à la baisse. Tout celaaura forcément des conséquences sur les fer-metures de sites et les équipements militaires.Drone. Les industriels de l’armement ter-restre devaient être les principales victimes,mais ils ne seront pas les seuls. Même Das-sault devrait avoir du mal à préserver son

statut d’intouchable puisque la flotte d’avi-ons de combat prévue par le livre blanc de-vrait passer de 300 à 225. Le ministre de laDéfense, Jean-Yves Le Drian, n’a pas cachéque Dassault, qui a pris la fâcheuse habitudede se reposer sur les 11 commandes annuellesde Rafale par l’Etat français, devait impérati-vement trouver un relais à l’export à partirde 2016-2017. Or le Brésil ne semble plus êtreintéressé par l’avion de combat et l’Inde lenégocie toujours ardemment.On aurait pu penser que l’engagement au

Mali sanctuariserait les commandes. Il a plu-tôt mis en lumière certains manques criants,notamment sur les drones. Force est de cons-tater que les industriels du secteur sont com-plètement passés à côté de ce besoin-là. Etquand ils s’en sont préoccupés, ils se sont li-vrés à une guerre franco-française qui les aépuisés. Résultat, la France souhaite com-mander 12 drones Reaper aux Américainspour plusieurs centaines de millions d’euros.L’industrie européenne vise maintenant ledrone de 3e génération, qui sera une sorted’avion de chasse sans pilote.Autre interrogation: que va devenir la Délé-gation générale de l’armement (DGA) censéegérer tous les programmes d’armement àl’époque où beaucoup d’entreprises étaientpubliques ?«Même si le scénario du pire estévité, les budgets vont dépendre de recettes ex-ceptionnelles qui ne sont pas assurées», noteun expert évoquant des ventes d’immeublesou de fréquences appartenant à l’armée.Une bonne nouvelle tout de même: au salondu Bourget, on verra voler l’avion de trans-port militaire européen A400M, dont le pre-mier exemplaire devrait être livré bientôt. Ilcorrespond à un vrai besoin opérationnel etil a le mérite d’être européen.

T.H. et A.S.

Dassault, qui a pris l’habitudede se reposer sur les onze commandesannuelles de Rafale par l’Etat français,devra impérativement trouver un relaisà l’export à partir de 2016-2017.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 • 5

Page 6: Lib .pdf

Par LORRAINE MILLOTCorrespondante à Washington

B arack Obama a «pris sa dé-cision», a annoncé la Mai-son Blanche. Il ne lui resteplus qu’à préciser la-

quelle… Une «assistance renforcée»va être apportée aux combattants

syriens, a fait sa-voir la présidenceaméricaine jeudi

soir, mais sans parler ouvertementencore de livraisons d’armes. En«off», plusieurs officiels ont ajoutéqu’Obama a bel et bien donné son

l’Atlantic Council. Mais une fois en-core, l’administration Obama sembleopter pour de petits pas en Syrie. Onpeut douter que cela fasse la diffé-rence sur le terrain.»Neuf jours après la France, lesEtats-Unis ont reconnu jeudi soirque le régime de Bachar al-Assad a«utilisé des armes chimiques, notam-ment du gaz sarin», «à petiteéchelle» et à «de multiples reprisesces derniers mois». Le régime syriena ainsi pratiquementfranchi «la lignerouge» qu’Obamaavait tracée en août:l’emploi massifd’armes chimiquesen Syrie «changerait[son] équation» avaitmenacé le Président. Tout en an-nonçant que ce moment étaitmaintenant arrivé et que le «cal-cul» américain a «changé», la Mai-son Blanche a pris tant de précau-tions qu’elle étale surtout saréticence à s’engager sur le terrain.«Au moment où on reconnaît que lerégime syrien a eu recours à l’armechimique, on répond qu’on va envoyerquelques fusils, relève Barry Pavel.On aurait pu attendre une réponseplus significative.» Les armes chi-miques ont tué 100 à 150 person-nes, a précisé la présidence, rap-portant ce chiffre aux «plusde 90000 morts» décomptés depuisle début de la guerre en Syrie.A défaut de détailler ses intentions,la Maison Blanche a rappelé cequ’elle n’est pas prête à faire: en-voyer des troupes américaines oumême instaurer une zone de pro-tection aérienne, comme le récla-ment le sénateur républicain JohnMcCain et quelques autres. Une«no fly zone» coûterait extrême-ment cher et serait plus difficile àréaliser qu’en Libye, a souligné BenRhodes, le conseiller adjoint à la sé-curité nationale qui était chargé deprésenter la réponse américaine auxarmes chimiques syriennes.

«UNE MAUVIETTE». Ce qui fait réa-gir Washington est certainementmoins le recours aux armes chimi-ques, constaté depuis des moisdéjà, que les récents revers de l’op-position: la perte de la ville straté-gique d’Al-Qoussayr et la crainted’une prochaine débâcle à Alep.Après avoir longtemps observé lestueries fratricides, la Maison Blan-che se manifeste parce qu’elle voitla partie qui lui est la plus adverse,celle du Hezbollah, prendre le des-sus. «L’offensive sur Alep est immi-nente, c’est une question de jours oude semaines», indique un diplomateà Washington. Les Etats-Unis y re-doutent un nouveau «triomphe» durégime syrien et de ses alliés, russesou iraniens. Surtout après la prési-dentielle iranienne de ce vendredi,au moment où les Américains sontenfin censés persuader Téhéran derenoncer à l’arme nucléaire.Ces annonces devraient permettreà Barack Obama de «ne pas arriveren short» face à Vladimir Poutinelundi et mardi au sommet du G8 enIrlande du Nord, décrypte un diplo-mate: «Les Russes seront obligés àleur tour de prendre parti sur les ar-

mes chimiques.» La réactiond’Obama répond au SOS du généralsyrien déserteur Salim Idriss, passédans le camp de l’Armée syriennelibre, dont l’appel au Congrès a finipar trouver des relais à Washington.Le président américain va passerpour «une mauviette» ou «un imbé-cile complet», a lancé Bill Clintonmardi, expliquant que son succes-seur à la Maison Blanche ne peut selaisser dicter sa politique par les

sondages, selon lesquels la plupartdes Américains refusent une inter-vention en Syrie. Sur le fond,l’administration Obama ne voitpourtant pas encore très «claire-ment» ce qu’elle veut faire, indiqueun diplomate. Même les Français nele lui reprochent plus trop : aprèsavoir poussé sur cette question desarmes chimiques, Paris se ditmaintenant tenu par l’engagementeuropéen de ne pas livrer d’armesavant le 1er août. •

«Une fois encore, Barack Obamasemble opter pour de petits pas enSyrie. On peut douter que cela fassela différence sur le terrain.»Barry Pavel analyste à l’Atlantic Council

REPÈRES

LES FAITS DU JOURw L’Otan a demandé vendrediaux autorités syriennesde laisser l’ONU enquêtersur le terrain sur l’usaged’armes chimiques.w L’Allemagne a «prisconnaissance avec respect»de la décision des Etats Unisde soutenir militairement lesrebelles syriens, tout enréaffirmant qu’elle ne livreraitpas d’armes.w La Suède craint que la promesse américaine provoqueune «course à l’armement».w En Jordanie, la situation desfemmes et des enfants syriensréfugiés «ne peut qu’empirer»en l’absence d’aide urgente,a alerté l’Unicef.

«Augmenterle nombre d’armesen circulation des deuxcôtés n’amélioreraitpas la situation.»Ban Ki­moon secrétaire généralde l’ONU, hier

L’ARSENALCHIMIQUE SYRIENConsidéré comme l’un desplus importants du MoyenOrient, il continue à fairel’objet de supputations, lesdonnées publiques étant quasiinexistantes. Son existencea éte officiellement reconnuepar Damas en juillet 2012.

Un combattant de l’Armée syrienne libre, jeudi, près d’Idlib. PHOTO ABDALGHNE KAROOF REUTERS

FaceàAl-Assad,ObamadosaumurRedoutantune débâcle desrebelles sous lescoups du régimesyrien etdu Hezbollah, laMaison Blanche adécidé d’armerl’opposition.

aval cette fois-ci à la livraison d’ar-mes de «petit calibre» et de muni-tions. Selon le New York Times, quicite certains de ces officiels, il pour-rait s’agir de matériel antichars,mais pas de missiles antiaériens,que réclament les insurgés. La CIAa été chargée de la mission, ce quipermet de la garder secrète.

RÉTICENCE. «Il semble bien qu’on sedirige vers l’armement des rebelles,résume Barry Pavel, ancien con-seiller des gouvernements deGeorge W. Bush et de BarackObama, aujourd’hui analyste à

ANALYSE

Un rebelle syrien tentant d’éviter les tirs de sniper, jeudi à Deir el­Zor. PHOTO KHALIL ASHAWI REUTERS

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 20136 • MONDE

Page 7: Lib .pdf

MONDEXPRESSO • 7

tion, totalement inattendueil y a encore un mois, va pro-fiter au candidat des conser-vateurs modérés et desréformistes, le religieux Has-san Rohani, ancien respon-sable des négociations nu-cléaires avec l’Occident, quidevrait arriver en tête aupremier tour. MohammadReza Aref, le «vrai» candidat

réformiste, qui s’était désistésous la pression de l’état-major de sa faction, a finale-ment appelé à voter pour Ro-hani, ce qui devrait encore lerenforcer. Vendredi soir, lessix candidats ont appelé aucalme leurs partisans dansl’attente des résultats.

Envoyé spécial à TéhéranJEAN-PIERRE PERRIN

Un film deAntonin PERETJATKO

« Resplendissant. Une joie communicative et une audace dans la blague qui connaît peu de limites…

bienvenue chez les fous ! » LES INROCKS

« Hyper jouissif ! » TÉLÉ CINÉ OBS

« Une ode à la légéreté et à l'aventure. »

SO FILM

« Singulière et craquante, une comédie qui fait du bien à la vie. »

20 MINUTES

« Drôle. Très drôle. Une pépite d'humour décalé. »

L'EXPRESS

« Une folie plus que bienvenue dans

le cinéma. » EVENE.FR

« Givré ! » LIBÉRATION

« Hilarious Vincent Macaigne ! » HOLLYWOOD REPORTER

« Un road movie complètement barré. Réjouissant ! »

FRANCE INTER

ACTUELLEMENT

Emm nuel Chaumet présente

Vimala PONS Vincent MACAIGNEGrégoire TACHNAKIAN Marie-Lorna VACONSIN

ET AUSSI SERGE TRINQUECOSTE, THOMAS SCHMITT, ESTEBAN, PHILIPPE GOUIN, LUCIE BORLETEAU, PIERRE MEREJKOWSKI, CLAUDE SANCHEZ, YOANN REY ET LA PARTICIPATION AMICALE DE ALBERT DELPY ET BRUNO PODALYDÈS

« Si j'étais encore vivant j'irais voir ce film. »

GROUCHO MARX

« Craquante Vimala Pons, hilarant Vincent Macaigne,

on jubile, on savoure. » LE MONDE

« Se foutre carrément de tout ! » STENDHAL

« La comédie en or ! » ELLE

« Jolie façon de rentrer dans l'été. Une petite pépite. »

STUDIO CINÉLIVE

« Jubilatoire ! » TGV MAGAZINE

C’ est vraiment la find’une époque: si lessix candidats, pre-

nant exemple sur le Guidesuprême, l’ayatollah Ali Kha-menei, sont tous allés votertôt vendredi matin, le prési-dent sortant, Mahmoud Ah-madinejad, ne s’est renduaux urnes que dans l’après-midi, à 16 h 30. Un vote ra-pide et sans commentaire.Une façon de lancer un der-nier défi à celui qui avaitlancé sa carrière, à la faveur

de la présidentielle de 2005,lui avait permis de survivreaprès la fraude massive à saréélection de 2009 et la con-testation dans la rue qui s’enétait suivie, avant de l’élimi-ner du jeu politique –le Con-seil des gardiens de la Consti-tution n’a pas permis à sondauphin, Esfandiar RahimMashaie, de se présenter.Mais c’est aussi une fin demandat sans gloire pour unhomme qui avait occupépendant huit ans la scènemédiatique iranienne et in-ternationale par la violencede ses menaces, mais dontl’anticléricalisme et l’indé-pendance ont fini par lasserKhamenei.Le Guide, qui, pendant toutela campagne, s’est gardé de

dire quel candidat il préfé-rait, déclarant que même safamille ne savait pas quelétait son choix, a fini parlaisser percer une certaineinclination pour Saïd Jalili,l’actuel chef des négociateurssur le nucléaire et le plus fon-damentaliste des six, en re-commandant de voter pourla fermeté face à l’impéria-lisme.Le bassidj, la puissante miliceislamique, s’est donc mobi-lisé pour aider à son élection,

comme ellel’avait fait lesfois précédentespour Ahmadi-nejad. Cela nedevrait pas suf-fire pour lui per-mettre de rat-

traper son retard surMohammed Bagher Qalibaf,autre candidat «principa-liste» (fondamentaliste), etactuel maire de Téhéran.Même si les événementsde 2009, dont l’échec de larévolution verte (l’équivalentdes futurs printemps arabes),ont traumatisé les électeursqui veulent le changement, laparticipation semble être im-portante –l’heure de ferme-ture des bureaux de vote a étérepoussée à 22 heures. Le faitque les Iraniens élisent enmême temps leurs conseilsmunicipaux, un scrutin po-pulaire en particulier dans lespetites villes où les enjeux nesont pas politiques, la favo-rise également.Dans ce cas, cette participa-

Le Guide a laissé percer uneinclination pour Saïd Jalili,l’actuel chef des négociateurssur le nucléaire et le plusfondamentaliste des six.

Présidentielle: ledernierpieddenezd’AhmadinejadIRAN Inattendu, le fort taux de participation au scrutin a profité aucandidat modéré qui rassemble le camp réformiste, Hassan Rohani.

L’ancien président pakistanais Pervez Musharraf a été unenouvelle fois arrêté, vendredi, pour son implication dansle meurtre d’un leader indépendantiste baloutche, tuéen 2006 dans une opération militaire. Le général Musharraf, qui était arrivé au pouvoir (1999 2008) après un coupd’Etat, avait déjà été interpellé à la mi avril, juste aprèsson retour d’exil. Poursuivi dans deux autres affaires, lerenvoi illégal de juges en 2007 et le meurtre de l’ex Première ministre Benazir Bhutto, il avait toutefois obtenu laliberté sous caution. Sa nouvelle arrestation a pour effetde le maintenir en résidence surveillée. PHOTO REUTERS

PERVEZ MUSHARRAF ARRÊTÉUNE NOUVELLE FOIS POUR MEURTRE

LES GENS

PHILIPPINES Le naufrage aularge de l’archipel d’un ferrytransportant 57 personnes afait deux morts et 13 dispa-rus, vendredi. PHOTO AFP

SOUDAN Un Casque bleu aété tué et deux autres ont étéblessés dans le pilonnaged’une base de l’ONU dans leKordofan du Sud, zone deconflit entre le régime deKhartoum et les rebelles.

AUSTRALIE La mention«transgenre» sur les docu-ments officiels vient d’êtreautorisée.

VIETNAM Un blogueur a étéarrêté pour ses articles con-tre le régime communiste.C’est la deuxième arrestationde blogueur en un mois.

RDC Le Dr Denis Mukwege,gynécologue congolais assis-tant des femmes violées,s’est indigné vendredi de la«recrudescence de viols sur dejeunes enfants au Sud-Kivu».

MALI Le pouvoir malien et larébellion touareg ont reprisvendredi des négociations àOuagadougou en vue du re-tour de l’armée malienne àKidal, dans le nord du pays.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013

Page 8: Lib .pdf

EnTunisie, lajustices’acharneSept soutiens du rappeur Weld El 15, condamné jeudi à deux ans de prison, seront jugés lundi.

D eux ans de prison fermepour une chanson. La jus-tice tunisienne a eu lamain lourde à l’encontre

du rappeur Weld El 15. Elle veutmaintenant frapper ses sympathi-sants. Jeudi, le tribunal de BenArous a condamné l’artiste de25 ans pour «outrage à un fonction-naire», «imputation de faits illégauxà un agent de la fonction publiquesans en prouver la véracité» ou en-core «atteinte aux bonnes mœurs età la morale publique». Dans BouliciaKleb («les flics sont des chiens»),Weld El 15, Alaa Yacoub de son vrainom, dénonce les violences desagents et la persistance de l’Etatpolicier, malgré la chute de Ben Ali.Lui-même en a été victime :en 2012, il a passé neuf mois en pri-son pour simple consommation decannabis, à l’image de milliers dejeunes Tunisiens. «Je rêve d’égorgerun policier comme on égorge unagneau le jour de l’Aïd», chante-t-il,provocateur, dans le morceau dif-fusé sur YouTube quelques semai-nes après sa sortie. Le réalisateur etune figurante sont arrêtés par la po-lice et écopent de six mois de prisonavec sursis. Weld El 15, lui, prend lafuite. Il est condamné par contu-mace à deux ans ferme, tout commequatre de ses amis rappeurs, ausimple motif que leurs noms appa-raissaient dans les remerciementsdu générique de fin. Ils sont relaxésquelques semaines plus tard.

TRIBUNE. Weld El 15 se présentealors à la justice, espérant récolterla clémence du juge. Dans les mé-dias, il plaide la métaphore, la li-berté de la création et de l’expres-sion artistique. A la barre, jeudi, sesavocats ont aussi rappelé lesconventions internationalessignées par la Tunisie avantde souligner le rôle des rappeursdans la révolution et tenté de prou-ver que, sur la forme, les chefsd’accusation ne tenaient pas. «Maisle juge ne s’est même pas retiré pourdélibérer, il a rendu le verdict au boutde dix minutes», raconte ThameurMekki, l’un des animateurs du co-mité de soutien. Pour ce jeune jour-naliste, comme pour l’avocat GhaziMrabet, «le verdict était déjà prêt».L’annonce du jugement a fait l’effetd’un choc. Selon les témoignages,

plusieurs proches du jeune hommeont alors crié leur indignation,d’abord dans la salle d’audience,puis devant les marches du palaisde justice. La police a réagi avecbrutalité : le tribunal a été évacuémanu militari. Des amis du rap-peur, ainsi que des journalistes, ontété malmenés, frappés et pour-chassés dans les environs du tribu-nal. Sept d’entre eux ont même été

arrêtés, puis relâchés. Ilscomparaîtront devant leprocureur lundi matin pour

«outrage à agent de police». Cer-tains craignent de voir les chargesalourdies, sous la pression de la po-lice, qui les accuse d’être à l’originedes violences.Parmi la nouvelle fournée d’accu-sés, la journaliste franco-tuni-sienne Hind Meddeb, auteure d’undocumentaire sur les rappeurs tu-nisiens. Le matin même du procès,elle signait une tribune dans Libé-ration, appelant les artistes à soute-nir Weld El 15. «Aujourd’hui, à Tu-

nis, les rappeurs sont la voix dupeuple, de la jeunesse, des plus dé-munis qui n’ont pas les moyens de ré-sister à l’appareil d’Etat qui broiechaque jour des vies. Au lieu de jeter

en prison les rappeurs, l’Assembléeconstituante devrait se soucier de ré-former le corps de la police et le mi-nistère de l’Intérieur», écrivait lajeune femme, rejointe par JoeyStarrou encore Oxmo Puccino.

«SOUS TUTELLE». Mais la lourdecondamnation de Weld El 15 montreau contraire «la continuité du sys-tème Ben Ali», critique ThameurMekki. «Le ministère public et l’insti-tution sécuritaire font la preuve,comme avant, d’une parfaite entente,

les deux institutions sont solidairesl’une de l’autre.» Peu osent affirmerque des ordres ont été formellementdonnés par le gouvernement enplace, dominé par les islamistes

d’Ennahda. «Rienn’indique qu’unetelle consigne ait étédonnée. Mais au mi-nimum, ils sont cou-pables de ne pasavoir engagé les ré-formes», tranche

Thameur Mekki. C’est surtout lefonctionnement de la justice quipose question. «Le parquet est en-core sous tutelle du ministère, rappellele président de la Ligue des droits del’homme, Abdessatar Ben Moussa.Quant aux juges, leur indépendancen’est pas assurée. Ils ont peur d’êtrelimogés, comme les 72 écartés par leprécédent ministre. Ils ne sont pas se-reins, ressentent la pression de plu-sieurs parties, ici celle de l’institutionsécuritaire.» Il n’existe toujours pasd’instance chargée de gérer la ma-

gistrature, même si sa création estdans les tuyaux. Et le code pénal,resté en l’état depuis le départ deBen Ali, est particulièrement ré-pressif.Beaucoup soulignent aussi le carac-tère sélectif de la justice tunisienne:les appels quotidiens à la haine et àla violence contre les opposants, enparticulier sur Facebook, ne sontjamais punis. Alors que les trois Fe-men européennes ont écopé mer-credi de trois mois de prison fermeet que de lourdes charges pèsent surleur camarade tunisienne Amina.Les ONG internationales font partde leur inquiétude. «Ces condam-nations à des peines de prison fermesont totalement disproportionnées,écrit la Fédération internationaledes droits de l’homme dans uncommuniqué. Elles accréditent noscraintes de voir la justice instrumen-talisée pour restreindre l’espace dé-mocratique et l’exercice des libertésen particulier, la liberté d’expres-sion.» •

Par ÉLODIE AUFFRAYCorrespondante à Tunis

«Les juges ont peur d’être limogés.Ils ne sont pas sereins, ressentent lapression de l’institution sécuritaire.»Abdessatar Ben Moussa président de la Liguetunisienne des droits de l’homme

RÉCIT

Weld El 15, avant son procès, le 13 juin. Le rappeur a été condamné pour son morceau Boulicia Kleb («les flics sont des chiens»). PHOTO FEHTI BELAID AFP

LES FEMENLe 19 mai, une jeune Tunisienne(photo) est arrêtée pour avoirtagué «Femen» sur le muret d’uncimetière. En réaction, trois Européennes manifestent seins nus àTunis. Elles ont écopé mercredide quatre mois de prison.

REPÈRES «Vous avez des armeset des menottes, nousavons le rap, des microset un crayon pour diremille et une insultes.»Lâchez Weld El 15 morceau de rapdiffusé vendredi par un collectifRE

UTE

RS

Le syndicat des journalistestunisiens a demandé vendrediaux autorités d’enquêter sur uneattaque de la police contre desjournalistes après le procès deWeld El 15. Les forces de l’ordreont aussi évacué avec brutalitédes partisans du rappeur quiprotestaient contre le jugement.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 20138 • MONDE

Page 9: Lib .pdf

«O n ne s’est pasbattu seulementpour des ar-

bres», clame l’un. «C’estl’avenir de la Turquie qui est enjeu», insiste un autre. Celadiscute ferme sous les tentesdu parc Gezi, épicentre de lacontestation qui défie le Pre-mier ministre turc, RecepTayyip Erdogan, depuisquinze jours. Pour la pre-mière fois, le leader du partiislamo-conservateur AKP, aupouvoir depuis 2002, a faitune concession dans la nuitde jeudi à vendredi en rece-vant des représentants de laplateforme «Taksim Solida-rité» ainsi que des artistes etdes intellectuels proches dumouvement afin de trouverun compromis pour une éva-cuation du parc.«Pas positif». Ses promes-ses restent floues mais il anotamment proposé de sus-pendre le projet de destruc-tion du parc, qui devait êtreremplacé par la reconstruc-tion à l’identique d’une an-cienne caserne d’artillerieottomane, tant que la justice– qui a bloqué les travauxle 31 mai– n’aura pas tran-ché, ce qui pourrait prendredes mois. «C’est un pas posi-tif», a estimé Tayfun Karha-man, urbaniste, tout en sou-

lignant la nécessité d’unengagement clair et précis dupouvoir à renoncer au projet.Outre la préservation duparc, les représentants dela plateforme exigeaientl’ouverture d’enquêtes surles dirigeants des forces del’ordre responsables des vio-lences, point sur lequel ilsont obtenu des assurancesverbales mais aussi la recon-naissance du droit à mani-fester librement sur desgrandes places comme Tak-sim à Istanbul, ou Kizilay àAnkara, ainsi que la remiseen liberté de toutes les per-

sonnes arrêtées. En fait, les1500 personnes interpelléesdepuis le début de la contes-tation ont toutes été relâ-chées, mais les procédures àleur encontre continuent.«Elles pourraient être arrêtéesdans un mois, voire plus tard,au titre de la législation anti-terroriste qui prévoit des peineslourdes», s’inquiète MuratÇekic, d’Amnesty Interna-tional. Les médecins qui ont

aidé les manifestants pour-raient également subir desmesures de rétorsion, selonleur association profession-nelle qui s’inquiète des pres-sions du ministère de laSanté. 7 500 personnes ontété blessées, dont une cin-quantaine grièvement, dansces deux semaines de trou-bles qui ont fait quatre mortsdont un policier.Contre­offensive. Cetteébauche de compromis di-vise le mouvement. C’estseulement samedi en fin dematinée que la plateformedevrait annoncer sa position.

Les autoritésd e m a n d e n tque l’occupa-tion du parccesse au plusvite. Con-vaincu d’avoirle soutien de la

majorité silencieuse etd’avoir fait de réelles con-cessions au «dialogue»,comme le demandaient lesEuropéens, Recep TayyipErdogan prépare sa contre-offensive politico-médiati-que avec deux grands mee-tings ce week-end, l’un àAnkara, l’autre à Istanbul,devant des centaines de mil-liers de ses partisans.

MARC SEMO

TaksimdécrocheunsursispourleparcGeziTURQUIE Le mouvement est divisé sur le compromisd’Erdogan, qui prépare une riposte médiatique.

Au Japon, la réinsertiondes anciens yakuzas netient parfois qu’à un doigt.Les anciens membres de lamafia japonaise portentun signe distinctif : il leurmanque l’auriculaire, coupéquand ils décident dequitter les rangs del’organisation. Certainsanciens yakuzas sontmêmes dépourvus deplusieurs doigts, qu’ils sesont amputés eux mêmesen cas de manquementau code de l’honneur trèsstrict de la mafia: lesphalanges coupées sontalors offertes au parrainen signe de repentance.Pour dissimuler ces stigmates révélateurs d’un passégênant, certains anciensmafieux ont recours auxservices d’une société deprothèses qui leur confectionne de faux doigts enrésine. Pour 300000 yens(2300 euros) en moyenne,les yakuzas repentispeuvent ainsi obtenir denouvelles phalanges et,enfin, montrer patteblanche.

FAUX DOIGTPOUR PATTEBLANCHE CHEZLES YAKUZAS

L’HISTOIRE

Par SABINE CESSOU

«Carte cannabis»:l’Etat sommé de comblerle manque des coffee-shop

L’ Etat néerlandais a eula malheureuse idéede laisser certaines

villes interdire, à partir demai 2012, l’accès de leurscoffee-shop aux touristesétrangers. Aujourd’hui, legouvernement va devoir dé-dommager les patrons de cesbars à joints pour les pertessubies à cause de la fameuse«carte cannabis». Cettecarte de membre est stricte-ment réservée aux résidentsnéerlandais, dans certainesvilles des régions sud dupays, frontalières avec l’Al-lemagne et la Belgique. L’ob-jectif consistait à limiter lesnuisances liées au tourismede la drogue –embouteilla-ges et tapage nocturne. Descohortes de jeunes Français,Belges et Allemands vien-nent en effet s’approvision-ner en drogues douces leweek-end, à Maastricht,Venlo ou Arnhem.

Or, un tribunal de La Haye aconsidéré le 6 juin que les«coffee-shop du sud du paysont souffert financièrementpendant plusieurs mois, carleurs clients ont été intimi-dés». Faire de ces établisse-ments des clubs privésreprésente une «atteinte dis-proportionnée aux intérêts desvisiteurs», estiment les juges.Le montant des indemnitésque l’Etat devra verser resteà déterminer : il ne porteraque sur les boissons nonvendues, et pas les joints, to-lérés aux Pays-Bas depuis1976 mais pas encore consi-dérés comme des produits de

consommation courante.Mais le tribunal n’a rientrouvé à redire sur le fond dela restriction de l’accès desbars à joints aux étrangers,comme l’espéraient les pa-trons de coffee-shop qui ontporté plainte. Du coup, per-sonne n’est satisfait. Les gé-rants de coffee-shop vontfaire appel, tout comme leministre néerlandais de laJustice, Ivo Opstelten, quiestime qu’une politiqueadoptée par le Parlement nepeut pas être contredite parun tribunal.

De fait, la carte cannabis aposé beaucoup plus de pro-blèmes qu’elle n’en a réso-lus. Le deal a explosé dansles rues des villes qui ont dé-cidé de la maintenir, commeMaastricht. Quant au nou-veau gouvernement libéral ettravailliste, sorti des urnesen septembre, il a fait mar-che arrière. Au lieu de géné-raliser la carte cannabis surtout le territoire nationalau 1er janvier 2013, commeprévu au départ, il a décidéde laisser les villes déciderde la meilleure politique àadopter. Des villes réfractai-res comme Amsterdam, quimilitaient contre la cartecannabis, peuvent donc gar-der ouvertes à tous les étran-gers l’une de leurs principa-les attractions touristiques.Et voir prospérer un tou-risme de la drogue qui rap-porte chaque année quelque200 millions d’euros auTrésor public, sous forme detaxes. •

VU D’AMSTERDAM

33C’est le nombre de victi­mes du coronavirus dansle monde jusqu’à présent,selon l’Organisation mondiale de la santé. La plupart de ces cas concernentl’Arabie Saoudite, où sontdécédées 28 personnes.

«Il n’y a aucuneindication quantà [la] durée [despourparlers de paixavec Bangkok].Nous espérons quel’ensemble desparties fera preuvede patience.»Hassan Taib représentantde la rébellion séparatistemusulmane active dansle sud thaïlandais

Le Premier ministre grec, Antonis Samaras, a proposé vendredi soir un compromis surla télévision publique fermée sans préavis, mardi, par ses soins. «Une commissiontemporaire bénéficiant d’un large soutien des partis peut être nommée pour engagerun petit nombre d’employés afin que la diffusion de programmes d’information puissereprendre immédiatement», a annoncé le chef du gouvernement. La fermeture d’ERT,diffusée depuis lors sur Internet par ses salariés, a provoqué la colère de la populationet engendré un mouvement de soutien dans la capitale. PHOTO LOUISA GOULIAMAKI AFP

GRÈCE LE PREMIER MINISTRE PRÊT À RALLUMER LA TÉLÉ

Les contestataires exigeaientdes enquêtes sur les dirigeantsdes forces de l’ordre à l’originedes violences, ils ont obtenudes assurances verbales.

A lire: «Comment latélé grecque a piégéle gouvernementà son tour.»

• SUR LIBÉ.FR

L’ancien président argentin Carlos Menem a été condamné jeudi à sept ans de prison pour trafic d’armesà destination de la Croatie et de l’Equateur. Actuellementsénateur, Carlos Menem, 82 ans, est protégé par sonimmunité parlementaire. Mais dans son jugement, le tribunal a ordonné que celle ci soit levée afin que la peinesoit purgée. Au total, 6500 tonnes d’armes, dont descanons et roquettes antichars, destinées au Panama etau Venezuela, avaient été détournées et envoyéesnotamment en ex Yougoslavie de 1991 à 1995. PHOTO AFP

ARGENTINE : L’EX­PRÉSIDENT MENEMTOMBE POUR TRAFIC D’ARMES

LES GENS

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 MONDEXPRESSO • 9

Page 10: Lib .pdf

Furosémide:tempêtedansunverred’eauL’enquête sanitaire n’a pas démontréde lien entre les quatre décès signaléset le contenu des boîtes du diurétique.

U n, deux, trois, quatremorts? Et si c’était fina-lement zéro mort ? Etsi l’affaire du Furosé-

mide 40 mg, produit par lelaboratoire Teva, se résumait àdeux pauvres cachets desomnifère égarés sur lecomptoir d’une pharmacie?Et s’il n’y avait jamais eu, ensomme, d’erreur de fabrication, nide confusion entre ce diurétique etun somnifère ?Car plus d’une semaine après le dé-clenchement de ce nouveau «scan-dale sanitaire», il n’y a rien, ou sipeu. Ainsi, parmi les quatre per-sonnes décédées –et chez qui on aévoqué un éventuel lien avec lediurétique en cause–, aucune desautopsies réalisées n’a fait état demort liée à une embolie pulmo-naire, qui aurait pu être consécu-tive à l’arrêt d’un traitement. «Iln’y a aucun décès dont l’imputabilitéest établie», insiste-t-on à l’Agencenationale de sécurité des médica-ments (ANSM). Pour deux d’entreeux, des analyses toxicologiquessont certes encore en cours, pourrechercher d’éventuelles traces de

somnifère dans le sang. Mais pourles autres, le résultat est négatif :il n’y en avait pas. Enfin, et c’estl’élément le plus étonnant, surles 3000 boîtes de Furosémide quiont été rappelées, toutes étaientnormales, aucune ne contenant detraces de somnifère.Alors, que diable s’est-il passé ?Est-on face à un emballement poli-tico-médiatique, comme c’est de-venu la règle en matière d’affairessanitaires en France ? Une erreurd’appréciation? C’est dans la cité

des corsaires, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), que tout commence. En finde semaine dernière, un pharma-cien, étonné par l’état de l’un deses clients, lui prend sa boîte de mé-dicaments : il s’agit du Furosé-mide 40 mg, un diurétique. Aprèsavoir lui-même sorti les cachets deleur emballage, il s’aperçoit que

deux comprimés seraient enfait des hypnotiques (dessomnifères). Se trompe-t-il?

Toujours est-il qu’il appelle l’entre-prise Teva, le fabricant, qui prévientl’ANSM. «Il y avait un risque, il étaitlogique de prendre une décision im-médiate», explique l’Agence de sé-curité des médicaments, qui réagiten demandant publiquement lerappel des deux lots du Furosémide.

LIMIERS. Depuis? Rien, si ce n’estune tempête qui s’autoalimente.Par principe de précaution, l’ANSMdemande donc à tous les patientsde ramener leurs boîtes de Furosé-mide, d’abord celles venant desdeux lots indiqués, puis de tous leslots. Comme pour alourdir le climatsurgissent les annonces des pre-miers morts supposés, d’abord àMarseille, puis à Privas, Toulon,mais aussi à Toulouse. Tout s’accé-lère. La presse embraye, annonçant

en direct les pre-miers décès éven-tuellement liés à uneerreur de condition-nement.Et l’ANSM ? Elle sedémène, occupe leterrain. Envoie dès

lundi quatre de ces plus fins limiersdans l’entreprise de production deSens, dans l’Yonne: pendant qua-rante-huit heures, ces derniers ins-pectent les lieux, se disant quedeux chaînes de production sesont peut-être télescopées. Rien.«Nos enquêteurs ont travaillé à fond,aucune trace d’erreur, ni de possi-bilité d’erreur n’a été notifiée», cons-tate l’agence quand ils ont terminéleur travail.Bizarre… Au même moment re-viennent les premières boîtes de

Furosémide: aucune trace, là en-core, d’erreur de conditionnement,y compris chez les quatre person-nes décédées. «Cela devient étrange.D’un côté, un emballement public et,de l’autre, toutes les informations quiremontent vont dans le sens inverse»,note un proche de la ministre de

la Santé, Marisol Touraine. Al’agence, on s’interroge sur lafiabilité de la pharmacie de Saint-Malo. Nouvelle enquête, mais fina-lement rien de douteux n’apparaît.L’état-major de Teva Monde, le lea-der international des génériques,débarque également en France pour

vérifier les chaînes de production.Sans rien trouver.

CALCUL. Jeudi, à la demande dupôle santé du parquet de Paris, lesgendarmes perquisitionnent l’usinede Sens. L’enquête ayant été ouvertepour «tromperie aggravée, homicideset blessures involontaires, mise endanger de la vie d’autrui et adminis-tration de substance nuisible». Al’agence, on n’ose plus rien dire,tant le dossier «Teva» se vide. Auministère, on fait un bref calcul: enFrance, au moins 150 malades dé-cèdent chaque mois parmi les car-diaques de plus de 70 ans prenantun diurétique. Soit trois par jour: ensomme, les décès signalés sont onne peut plus classiques.Et on constate que huit jours aprèsle début de l’affaire, il n’y a tou-jours pas de témoignages concer-nant des plaquettes intactes quicontiendraient les deux médica-ments. Retour au point de départ:deux comprimés qui se sont… éga-rés. «On sait que, du côté techniquecomme du côté industriel, il n’y a paseu de problème. Maintenant, on vasuivre la piste humaine», a déclaré,vendredi, le président de TevaFrance. Mais laquelle ? •

Par ÉRIC FAVEREAUEnvoyé spécial à Saint Malo

«Cela devient étrange. D’un côté,un emballement public et de l’autre,les informations qui remontent vontdans le sens inverse.»Un proche de Marisol Touraine

RÉCIT

Le laboratoire Teva a rappelé 3000 boîtes de Furosémide. PHOTO LIONEL BONAVENTURE AFP

REPÈRES

Une boîte de FurosémideTeva 40mg contenant descomprimés de somnifèreZopiclone au lieu du diurétique attendu aurait été trouvée dans une pharmacie àSaint Malo (Ille et Vilaine),le 6 juin. C’est de là qu’estparti le scandale.

4C’est le nombre de décèssignalés dans l’affaire duFurosémide. Aucun, à présent,ne semble lié à la prise dece médicament.

«Je ne veux pas affolerles malades, mais s’il ya le moindre doute, ilsdoivent se rendre chezleur pharmacien.»

Marisol Touraine ministre dela Santé, le 9 juin

UN MÉDICAMENTPAS ANODINLe Furosémide est indiqué encas d’hypertension artérielle,en particulier les œdèmesd’origine cardiaque, rénale ouhépatique. Son arrêt brutalpeut présenter des risques.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201310 • FRANCE

Page 11: Lib .pdf

Le parquet de Paris a annoncé avoir ouvert, vendredi, uneenquête préliminaire sur les primes en liquide perçuespar Claude Guéant. Cette décision fait suite à la publication, lundi, d’un rapport d’inspection selon lequel10000 euros mensuels, puisés dans les «frais d’enquête etde surveillance» des policiers, ont été remis à Guéantentre 2002 et 2004. A l’époque, il était directeur du cabinet du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy. Le parquetde Paris a confié l’enquête, qui vise d’éventuels détournements de fonds et recels, à la Division nationale des investigations fiscales et financières. PHOTO AFP

UNE ENQUÊTE EN PRIMEPOUR CLAUDE GUÉANT

LOGEMENT En dépitdes contraintes budgétaires,François Hollande a annoncévendredi une baisse de laTVA de 19,6% à 10% pour lesinvestisseurs institutionnelsqui font construire des loge-ments locatifs intermédiairesavec des loyers à mi-cheminentre le marché et les HLM.

MÉDICAMENT L’Agenceeuropéenne du médicament(EMA) recommande de res-treindre l’utilisation de l’an-tidouleur diclofénac (Volta-rène et génériques) à hautedose (150mg par jour) et entraitement de longue durée,pour limiter les risques decaillots dans les artères.

«Il m’a fallule temps de prendremes marques, maisje me réjouis d’êtrelà aujourd’hui.»

Valérie Trierweilervendredi, sur Europe 1

120000amendements au projetde loi sur la transparencede la vie publique ont étédéposés par le députéJean Charles Taugourdeau(UMP). S’ils sont tousdéfendus, «le débat durerajusqu’en mai 2015, dixheures par jour, cinq jours parsemaine», estime un habitué du Parlement.

L es juges ne vont pasattendre qu’une liste denoms atterrisse sur leur

bureau. A la suite de l’audi-tion de Pierre Condamin-Gerbier (PCG), un ex-ban-quier de chez Reyl & Cie,l’établissement genevois quia abrité le compte de l’ancienministre du Budget JérômeCahuzac, le juge RenaudVan Ruymbeke s’est vu con-fier, fin mai, une nouvelleinformation judiciaire.Ouverte notamment pour«blanchiment de fraude fis-cale», celle-ci vise unique-ment la banque Reyl.Contribuables. Déjà encharge de l’enquête sur Jé-rôme Cahuzac, mis en exa-men début avril, le magistratva tenter de vérifier les diresde l’ancien cadre de chezReyl. Entendu comme té-moin le 18 avril, PCG avaitdéclaré, sans citer de noms,que d’autres contribuablesfrançais avaient dissimulé

des avoirs dans cette banque.Il a détaillé ses propos mer-credi devant une commis-sion d’enquête au Sénat. Etindiqué qu’il disposait depreuves concernant unequinzaine de personnalitéspolitiques de gauche et dedroite. Va-t-il donner desnoms ? «Je n’ai encore prisaucune décision, ni sur le ca-nal, ni sur le timing» de cesrévélations potentiellementfracassantes, a expliqué PCGvendredi à Libération.Dans le cadre de cette infor-mation judiciaire, les enquê-teurs tenteront de percer lessecrets de Reyl, réputée pourabriter les comptes de Fran-çais du show-biz, de sportifset de politiques. Ils pour-raient mener des perquisi-tions plus étendues (certai-nes ont eu lieu dans le cadredu dossier Cahuzac, maisseuls les documents relatifs àl’ex-ministre ont été saisis).Ils peuvent entendre Domi-

nique Reyl, fondateur de labanque, et son fils François,qui a repris les reines.Fortune. Ils vont aussi s’in-téresser aux rôles des ges-tionnaires de fortune, dontcertains peuvent être basésen France, et qui ont pu dé-marcher des clients pour lesinciter à ouvrir un comptechez Reyl. Hervé Dreyfus, legestionnaire de celui de Ca-huzac et demi-frère de Do-minique Reyl, pourrait êtreentendu. Il a déjà été perqui-sitionné dans le cadre del’affaire Cahuzac. Après lesdéclarations de Pierre Con-damin-Gerbier, la banquegenevoise a indiqué dans uncommuniqué qu’elle «n’en-tretient aucune relation decomptes (titulaires ou ayantsdroit) avec des résidents fran-çais exerçant des charges poli-tiques» et a dénoncé des«amalgames» et des «affir-mations erronées».

VIOLETTE LAZARD

LabanquesuisseReylvarendredescomptesBLANCHIMENT Une information judiciaire visel’établissement dont Jérôme Cahuzac était le client.

Le code du travail n’est pasprès de franchir les portesde la prison. Le Conseilconstitutionnel a estiméque l’absence de contrat detravail ne privait pas lesdétenus de leurs droits fondamentaux et n’était doncpas contraire à la Constitution. «C’est une décisionpolitique et pitoyable»,dénonce Philippe Auvergnon, spécialiste du droitsocial au CNRS. En prison,le travail n’est pas soumis àla législation sociale dedroit commun: les détenusne touchent que 20%à 45% du Smic. PhilippeAuvergnon déplore que lesSages n’aient pas saisi cetteoccasion pour «obliger lelégislateur à réfléchir à l’élaboration d’un statut juridique pour rendre le travailen prison décent». Premierimpératif: mettre en placeun vrai contrat de travail,plus transparent que le simple «acte d’engagement»qui lie, depuis la loi pénitentiaire de 2009, le détenu etson employeur.

PRISON : LE DROITDU TRAVAILHORS LES MURS

L’HISTOIRE

LES GENS

Le siège de la banque suisse Reyl & Cie, à Genève. PHOTO BORIS HEGER AFP

Tout juste un an après la création àl’Assemblée du groupe de l’Union desdémocrates et indépendants (UDI), ethuit mois après la fondation du partidu même nom, celui-ci tient son pre-mier conseil national, ce week-end àParis, avec près de 1500 participantsinscrits. Cette réunion du parlementinterne du parti centriste est l’occa-sion de montrer qu’après sa constitu-

tion, en octobre 2012, à la salle de laMutualité, ce rassemblement de diffé-rentes branches du centre droit est enordre de marche. «Nous sommes pré-sents dans 84 départements avec desinstances dirigeantes démocratiquementélues», se félicite son président, Jean-Louis Borloo, ancien ministre del’Ecologie. Ce parlement de l’UDI, re-présentant à peu près toutes ses com-

posantes, devra entériner une série demesures d’urgence pour l’emploi, éla-borées sous l’égide de l’ancien minis-tre de la Défense Hervé Morin, prési-dent du conseil national de l’UDI.Cette formation, qui revendique sa fi-liation avec l’UDF, devrait égalementréunir officiellement son shadow gou-vernement, chargé de rédiger le futurprogramme centriste. C.F.

A RETOUR SUR LA FORMATION DE BORLOO QUI TENTE D’AFFIRMER SON IDENTITÉ

L’UDI tient son premier conseil national

Par FABRICE TASSEL

Vers un titre de séjourpluriannuel pourétudiants et salariés

E n attendant un projetde loi à l’automne,le gouvernement a or-

ganisé pour la première foisun débat sans vote sur l’im-migration professionnelleet étudiante au Parlement.Après les sénateurs fin avril,c’était jeudi au tour des dé-putés.

Quelle a été la principalemesure annoncée ?Le projet de loi que présen-tera le gouvernement, qui aété exposé aux parlementai-res dans ses grandes lignes,créera un titre de séjour plu-riannuel «afin de passer d’unelogique de précarité à une logi-que d’intégration», a expliquéle ministre de l’Intérieur,Manuel Valls. L’étrangerautorisé à entrer en Francebénéficiera d’un visa valableun an, qui pourra être trans-formé en titre de séjour jus-qu’à la quatrième année, lui-même renouvelable jusqu’àla dixième année. En l’étatactuel de la législation, denombreux titres font l’objetd’un renouvellement tous lesans, précarisant leurs titulai-res et les empêchant deconstruire leur avenir. Alorsque 3,7 millions d’étran-gers vivent en France, le paysenregistre 5 millions de pas-sages en préfecture.

Quelle population estprincipalement visée ?Il s’agit des salariés venanten France pour des motifsprofessionnels (20000 par anenviron, à la différence deceux qui sont acceptés dansle cadre du regroupement fa-milial) et des étudiants.L’immigration étudiante re-présente un tiers de l’immi-gration économique enFrance, qui compte prèsde 300000 étudiants étran-gers. Mais peu proviennentdes pays dits émergents(30 000 Chinois, 5 500 Co-réens, 3 000 Indiens). «Lemonde ne nous attendra pas,or la France est en perte de vi-tesse», explique un con-seiller du ministre de l’Inté-rieur, inquiet de la baissede 10% d’étudiants étrangersen France en 2012, en raisonde la circulaire Guéant que lenouveau gouvernement aabrogé dès le 31 mai 2012.

Dans quel climat s’estdéroulé ce débat ?Jeudi, seuls dix députésétaient présents… Désabusé,Thierry Mariani (UMP) a ad-mis «l’échec de la droite» surl’immigration choisie, prô-née jadis par Sarkozy. •Lire aussi «Le débatsur l’immigration en voied’apaisement», sur Liberation.fr

DÉCRYPTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 FRANCEXPRESSO • 11

Page 12: Lib .pdf

Jean­Victor (de dos) et Vincent Edin, à Paris, au jardin du Luxembourg, un endroit où les deux frères d’origines différentes venaient souvent jouer durant leur enfance.

L’adoptionmalmenéeparlediktatdelafiliation

Alors que pendant des moisles manifs anti-mariage pour tous

ont colporté des clichés, un colloquetente de remettre la question de la

parenté à plat lundi, à Paris.

Par ANNE­CLAIRE GENTHIALONPhoto RÉMY ARTIGES

T ouchées en plein cœur. Brutalisées,stigmatisées par les débats sur lemariage pour tous et la filiation. Lesfamilles adoptantes et les adoptés

n’ont pas été épargnés par les remises encause de l’adoption plénière et la vision de la

«famille biologique» érigée par les opposantsà la loi. C’est dans ce contexte que se tientlundi le colloque «Sur un air de famille: res-semblances, dissemblances, vraisemblan-ces.» (1) «L’adoption est trop souvent perçueà travers le prisme d’un certain nombre de sté-réotypes négatifs et réducteurs», explique YaëlHalberthal, coprésidente de l’association Lilit(Liens, Libertés, Transmissions) et organisa-

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201312 • FRANCE

Page 13: Lib .pdf

trice du colloque. D’un côté, les adoptés, àqui l’on colle l’étiquette d’éternels orphelinstraumatisés. Et à qui l’on demande toujoursqui sont leurs «vrais» parents. De l’autre, lesadoptants, scrutés, évalués surleurs capacités à être de bons pa-rents. Et, au milieu, l’adoption,désignée comme cause de problè-mes, source de mal-être. «On as-siste à une évolution du discoursmettant en avant les situationsd’échec qui, certes, peuvent exister, mais quisont loin d’être la seule réalité. Notre souhaitest, au moyen d’une large réflexion issue dessciences humaines, de décrypter ces clichés, cesreprésentations ancrées dans la pensée com-mune, mais aussi chez certains professionnelsde l’adoption», poursuit Yaël Halberthal.

FILIGRANE. Doit-on se ressembler pour avoirun lien de filiation ou pour s’aimer? S’aime-t-on moins quand on se ressemble peu? So-ciologues, anthropologues, psychiatres et

philosophes, pas forcément spécialistes del’adoption, vont questionner ce qui, au final,fait la famille. En filigrane, c’est surtout l’ob-session du biologique qui sera décortiquée.

Et il y a du travail. «L’adoption, en favorisantles couples hétéros dans une certaine catégoried’âge, tend à renforcer ce primat du biologique,expose Bruno Perreau, chercheur au Massa-chusets Institute of Technology (MIT). On estdans le mimétisme de cette filiation. C’est unedangereuse illusion qui expose celles et ceux quin’ont pas accès à leurs origines. Plutôt que depenser la naissance comme un fondementabsolu, pourquoi ne pas montrer la diversitédes filiations qui contribuent à enrichir lasociété ?»

Avec le développement de l’adoption interna-tionale se pose la question de la différencephysique entre parents et enfants, de la mobi-lité, du multiculturalisme, des origines… Sedessinent alors d’autres ressemblances.«Souvent, la première demande des candidatsà l’adoption c’est “un enfant qui nous ressem-ble”, explique Sophie Nizard, chercheuseen sociologie et en anthropologie. Alors quese ressembler, c’est apprendre à aller dansle même sens. Les différences se retrouvent peu àpeu gommées dans une communauté de destin.»

«MOROSE». Hasard du calendrier ou symp-tôme de cette urgence à repenser l’adoption,le week-end dernier se tenaient les premiersétats généraux des adoptés. «Le contexte del’adoption est morose», déplore Cécile Février,présidente du Conseil national des adoptés.Depuis plusieurs années, leur nombre baisserégulièrement. Environ 750 enfants sont lé-galement adoptables en France pour un totalde 25000 candidats. Côté adoption interna-

tionale, le constat n’est pas rose non plus.Alors que 2000 enfants venaient de l’étran-ger en 2011, ils n’étaient plus que1569 en 2012. Et de plus en plus de pays res-treignent leurs conditions. Comme la Colom-bie, qui a suspendu ce mois-ci l’adoption desenfants de moins de 6 ans.«On est en train de renverser trente ans de tra-vail, regrette Cécile Février. Nous sommes ac-tuellement dans une inadéquation entre le profildes enfants et le désir des parents. Il faut ac-compagner ceux-ci dans l’idée d’adopter desenfants plus grands, voire des fratries…» Enbref, c’est tout le modèle qui est à repenser.«Changer le regard sur l’adoption permettra delui redonner sa véritable place, clame Yaël Hal-berthal. Elle est trop souvent vue comme unefiliation “bis”, un ultime recours alors qu’elleest avant tout un mode de protection de l’enfantet de filiation à part entière.» •(1) A la Maison du barreau de Paris, placeDauphine, 4, rue de Harlay, 75001.Rens.: www.lilit­adoption.com

Vincent, fils biologique, et son frère adopté Jean-Victor racontent leur lien familial, évident et fort.

«Notre socle commun est plus richequ’une différence de pigment»P etits, quand Jean-Victor et Vin-

cent Edin jouaient ensemble, lesrôles étaient bien définis. A Vin-

cent, celui du cow-boy. A Jean-Victor,celui de l’Indien. Mais comme dans leswesterns qui se terminent bien, ilsétaient «frères de sang» : Jean-Victora taillé la main de Vincent pour échan-ger le leur.Né en 1975, Jean-Victor a été adoptéà 2 mois dans un orphelinat de Bogotá.La Colombie vient tout juste de s’ouvrirà l’adoption internationale. «Je suisle vingt-quatrième enfant colombienadopté», crâne Jean-Victor. «Tu étaisgris à cause de la dénutrition», complèteVincent. Lui est né quatre ans plus tard.Enfant biologique, tout comme leursœur aînée. «Nos parents ont toujoursvoulu des enfants biologiques et adoptés»,raconte Vincent. «Ce n’était pas parconviction religieuse: ce sont de profondslaïcards. Mais pour eux, l’adoption con-siste à donner une famille à un enfant quin’en a pas», précise Jean-Victor.Boulimie. Bien sûr, il y a des contrastesentre eux. La carrure et la couleur depeau. Baraquée et brune pour Jean-Vic-tor, 38 ans. Plus fine et pâle pour Vin-cent, 34 ans. Il y a les différences maissurtout les ressemblances. «Notre soclecommun est plus riche qu’une différencede pigment», affirme Vincent. Leursmains qui s’agitent de concert quand ilsparlent. Les proverbes et les citationsd’auteurs –Hemingway par-ci, Saint-Exupéry par-là – dont ils ponctuentleurs phrases. Leur boulimie d’engage-ments citoyens: l’enfance, le handicap,les discriminations. Leur goût pour labonne bouffe, la cave à vin, la fête oules Tontons flingueurs. Et surtout, cetteparole dont ils s’emparent, se coupant,se chamaillant pour mieux se raconteret «sortir de la vision caricaturale etcompassionelle à la Madonna» del’adoption. «Etre adopté, c’est une

chance incroyable parce que tu sais quetu as été très désiré. La gestation est justeun peu plus longue», s’enthousiasmeJean-Victor. «La tienne a été celle d’unéléphant», blague Vincent.Leurs parents ont dû attendre trois anset passer devant une batterie de psysavant de pouvoir adopter. «Lorsqu’ona fait notre demande, l’adoption était in-terdite aux parents qui avaient déjà desenfants biologiques, raconte Michèle,leur mère. Nos motivations semblaientlouches, il y avait ce soupçon de vouloirexploiter le tiers-monde…» les deux frè-res grandissent dans un milieu intellode gauche, entre les VIe et XIVe arron-dissements de Paris. «Il n’y a pas eu unseul point sur lequel notre éducation a étédifférenciée, explique Jean-Victor. Nosparents ont toujours été super doux et su-per compréhensifs.» Leur père est hautfonctionnaire à la Sécu. Leur mère, uneAméricaine issue d’une famille juiveashkénaze, tient une librairie de livres

anciens. «On a été éduqués dans cettepluriculturalité, dans l’idée de familleélargie et que l’on est riche de nos diffé-rences», ajoute Jean-Victor.«Goldorak». Dans l’appartement fa-milial où l’on parle quatre langues dif-férentes, défilent les copains réfugiéspolitiques brésiliens. L’été, directionl’Italie pour les vacances. En bon petitfrère, Vincent a toujours admiré «Jean-Vic»: «Quand j’étais petit, c’était Goldo-rak ! Il m’a toujours protégé.» A 5 ans, ildemandera à ses parents pourquoi ilsn’ont pas la même couleur de peau. «Ilsm’ont expliqué. Finalement, c’était telle-ment normal qu’on n’en parlait jamais.»L’adolescence accentue, pendant untemps, les dissemblances. Vincent fré-quente des «fils de», ne sort pas, joueaux jeux vidéo. Tandis que Jean-Victora l’adolescence un peu bagarreuse, trèssportive (taekwondo, capoeira) et trèsbringueuse. Mais de révolte contre sesparents, jamais: «Je n’ai jamais dit qu’ils

étaient cons!» Seule ombre: des contrô-les d’identité à répétition. «Comme enFrance on ne connaît pas trop les Latinos,on me prenait pour un Arabe !» raconteJean-Victor. «C’était dur de le voir sefaire contrôler quand moi, les flics ne meparlaient que pour me demander si j’allaisbien», dit Vincent.C’est à cette période que Jean-Victorcommence à fantasmer sur la Colom-bie, «les odeurs, les gens». Il lit GarcíaMárquez, découvre les peintures de Bo-tero et la musique. A sa majorité, il dé-cide de s’y rendre seul. «J’avais besoinde voir d’où je venais.» Il retourne dansl’orphelinat où il a été adopté, mais necherche pas à rencontrer ses géniteurs.«Il y a une citation qui dit :“Je suis lepéché de ta jeunesse dont jamais tu nevoudrais te souvenir.” Je leur suis recon-naissant de m’avoir mis au monde mais,pour moi, être parent, c’est tisser desliens d’amour.» Depuis, Jean-Victorn’a cessé de bâtir des ponts entreles deux pays, comme pour «renvoyerl’ascenseur». D’où son engagementdans de multiples associations humani-taires, notamment en Colombie.Quand les deux frères se parlent, leursyeux rigolent. «Jean-Vic m’a rendumoins con», affirme Vincent. «Toi, tum’as adouci : d’un dur bœuf limousin,je suis devenu un tendre bœuf de Kobe»,répond son frère. Tous deux sont mariés,aucun n’est encore père. Mais la femmede Jean-Victor est enceinte. Chamboulépar sa future paternité? Plutôt sereinau contraire. «Je pense que ça s’ap-prend», dit-il. Les frangins envisagentd’adopter. «Disons qu’on a des a prioripositifs», glisse en souriant Vincent,devenu prof de com. Tandis que Jean-Victor, animateur scolaire, s’enflamme:«L’adoption, c’est comme une bouture quiva donner une nouvelle fleur, un nouveaufruit et enrichira la sève de votre arbre.»

A.-C.G.

«L’adoption est avant tout un modede protection de l’enfant et de filiationà part entière.»Yaël Halberthal coprésidente de l’association Lilit

REPÈRES

«AIRES DE RESSEMBLANCE»En résonance à son colloque de lundi, l’association Lilit organise dans lasoirée, avec le soutien de France Culture, une soirée artistique autourde l’adoption et de la ressemblance. Au programme: projectionsde trois courts métrages, lectures de textes inédits d’auteurs, de cinéastes, et de dramaturges comme Rémi De Vos ou Olivier Py.Rens.: www.journeedeladoption.com

1569C’est le nombre d’enfants arri­vant de l’étranger qui ont étéadoptés en 2012 en France contre2000 l’année précédente.

27000C’est le nombre de couples oude célibataires de l’Hexagoneayant un agrément leur permettantd’adopter.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 FRANCE • 13

Page 14: Lib .pdf

Cahuzac:unvotepouroublierDimanche a lieu le premier tour de la législative partielle dans la troisième circonscription du Lot-et-Garonne. Et dans le fief du ministre déchu, les candidats l’affirment: ils ont «tourné la page».

L e candidat de l’UMP Jean-Louis Costescroise celui du FN Etienne Bousquet-Cassagne devant un étal d’oignons et deradis sur le marché de Monsempron-Li-

bos (Lot-et-Garonne). Bernard Barral, le can-didat du PS, s’amuse de voir François Bayrousoutenir la candidate du Modem, Yamina Kichi,entre deux trombes d’eau de pluie sous la portede Paris, à Villeneuve-sur-Lot.En tout, ils sont dix-sept à se marcher sur lespieds, en campagne pour le premiertour de la législative partielle de latroisième circonscription du Lot-et-Garonne, ce dimanche. Les trois premiers citéssont d’accord sur un point: celui par qui cetteélection est arrivée est définitivement absentdu paysage. «La page est tournée», disent-ilsavec les mêmes mots. L’ex-maire, ex-député,et ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac a an-noncé le 19 mai qu’il renonçait à se représenter

au suffrage de ses ex-électeurs. Et en villecomme dans les bourgs, tout se passe commes’il n’avait jamais existé. «Je ne suis pas en cam-pagne contre Jérôme Cahuzac», affirme Costes,les mains ouvertes comme pour dire une évi-dence. Le candidat visité hier par Jean-FrançoisCopé vise les électeurs «qui se sentent trahis parFrançois Hollande et qui se sont laissé enfumer par

ses promesses». Il ne s’agit plus de parler desmensonges et tricheries du très solaire person-nage élu en juin 2012 avec plus de 60% des voixdes 75000 électeurs de sa circonscription.

«PEIGNÉES». La partielle de dimanche est par-tie pour ressembler à toutes les autres partiellesou élections intermédiaires : des occasionsde sanctionner ou non le pouvoir en place.Tout à cet enjeu, Bousquet-Cassagne, 23 ans,explique qu’il serait plus utile à «une véritableopposition à l’Assemblée», avec Marion Maré-chal-Le Pen et Gilbert Collard, qu’un «énièmedéputé UMP». Pour lui, Cahuzac ne mérite pas

plus d’attention que Bernard Tapieou Claude Guéant. La «débâcle duPS et l’inutilité de l’UMP» sont ses

arguments. Il développe au pays des pruneauxd’Agen les thèmes dont parlent les amis de Ma-rine Le Pen dans toute la France. «Un député estun élu de la nation, insiste-t-il. Une législativen’est pas une élection locale.»S’il en est un qui a tout à perdre, c’est BernardBarral, le candidat du pouvoir que le ministre

de l’Intérieur en personne est venusoutenir. Il est aussi l’héritier malgrélui de l’homme qui a séduit puis co-cufié ses administrés. «Je suis le can-didat désigné par tous pour être battu,résume-t-il. Et ça me fait bien rire.»

Choisissant ses mots, l’UMP Costes dit de Bar-ral qu’il n’est «peut-être pas le mieux placé pourcombattre le désamour des électeurs pour la viepolitique». Bousquet-Cassagne le comparemême à une «cacugne», un vieux tacot en lan-gage local. Barral n’en perd pas son sourire: la«faute majeure» de ses concurrents de droiteet d’extrême droite ? «Si on les écoute, ils ont

gagné avant même d’avoir joué. Tout le monde leleur dit tellement qu’ils le croient.»L’homme est serein. Attablé à la terrasse d’uncafé, il enregistre en direct le soutien d’un ex-rugbyman, avec qui il s’est «flanqué des pei-gnées» quand il jouait à Monflanquin il y aquarante ans, et d’un entrepreneur immobi-lier, avec lequel il était en affaires quand il diri-geait son entreprise de plats cuisinés. Le socia-liste ne promet pas qu’il sera présent au secondtour: «Il ne faut jamais jurer de rien.» Lui qui aaffronté «seul, sans l’aide de Solférino», le GrandJournal de Canal+ et Pascale Clark sur FranceInter dit que cette campagne lui aura permisde «passer un bon moment». Si cette partielledoit être une sanction du pouvoir en place, ilaffirme qu’il aura fait son job et ne pourra êtretenu pour responsable. Son imposant gabaritaidant, il la joue «force tranquille». «Je suisincrevable, dit Barral. J’ai rajeuni de vingt ans.»

«FARFELUS». Le candidat UMP, lui, n’envisagepas sa non-qualification pour le second tour.Mais il insiste sur la nécessité de ne pas se lais-ser aller à l’abstention et de «voter utile». Eneffet, la météo promet un soleil susceptible dedétourner le citoyen de son devoir électoral, lescentristes ne sont pas de son côté, le FN a re-cueilli 16% des voix de cette circonscription enjuin 2012 et «les candidats farfelus du type BepeGrillo» ne manquent pas. Pour passer les qua-lifs, Costes n’a d’autre solution que de taperplus fort sur les socialistes que son concurrentFN. Ce qui n’effraie pas Bousquet-Cassagne.Pas plus que la perspective d’un front républi-cain face à lui le 23 juin: «Ils vont bien tenter deme faire le coup. Mais ce genre de chose ne mar-che plus. Ils vont finir de se décrédibiliser.» •

Par GILBERT LAVALEnvoyé spécial à Villeneuve sur LotPhotos CHRISTIAN BELLAVIA

«Je suis le candidat désigné par touspour être battu, et ça me fait bien rire.»Bernard Barral du Parti socialiste

REPORTAGE

Bernard Barral, le candidat du PS et «héritier» de Cahuzac. Jean­Louis Costes (UMP) vise ceux qui se sentent «trahis». Etienne Bousquet­Cassagne (FN) se voit déjà au second tour.

LOT

TARN ETGARONNEGERS

LANDES

LOT-ET-GARONNE

DORDOGNE

Agen

25 km

Villeneuve-sur-Lot

DES MACHINESÀ POTS­DE­VIN?Mediapart affirmait vendrediapporter de nouveaux élémentsdans l’affaire Cahuzac, renvoyantà l’époque où celui ci était conseiller du ministre de la SantéClaude Evin, de 1988 à 1991.Il s’occupait alors des questionsde médicaments et d’équipements médicaux. Mediapart ditavoir mis une possible corruptionen lumière: «Des dessous de table auraient été versés à l’époquepour obtenir des décisions favorables de la part du ministèredans l’attribution de scanners etd’IRM à des établissements desanté», dit le site, livrant le témoignage d’un ancien dirigeant d’unesociété israélienne qui assureavoir versé ses pots de vin.Claude Evin a toujours démenti.

REPÈRES

SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201314 • FRANCE

Page 15: Lib .pdf

MET

Musique Benjamin Britten, chefs-d’œuvre et dissonances Page VIII

Tunisie Des cartes et des plans pour la jeunesse Page XII

Télé Le Dr Garriberts entre dans la maison de «Secret Story» Page XVIII

SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16JUIN 2013

www.liberation.fr

CambodgeDes

statuesremisessur pied

leMag

Le Metde New Yorkva restituer

deux grès duXe siècle qui y

étaient exposésdepuis près

de vingt ans.Retour sur la

piste des pillardsjusqu’au

royaume khmerdes frèresPandava.

Page 16: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013II • LE MAG SOMMAIRE

ENQUÊTE

Eric BourdonneauAu cœur de lafratrie des PandavaDès 2009, l’archéologuefrançais partait sur lestraces des statues khmèresque le Met de New York varestituer au Cambodge.DR

CÉLÉBRATION

Benjamin BrittenLe Suffolk festif

De Lowestoft à Aldeburgh,déambulation et rencontreavec les proches ducompositeur, mort en 1976et dont on fête lecentenaire de la naissance.ROLAND HAUPT

COMPRENDRE

Jean­YvesMoisseronLes jeunes en plansCartes sur table, legéographe du Cist analyseles impacts électoraux etterritoriaux du printempstunisien.DR

LA SEMAINE DE L’ÉCRIVAIN

François RivièreLinda, son doubleet le magicienHergé a la cote, JulesVerne est dans l’impasse.Royan affiche ses villasmajestueuses, mais pas letemps de voir l’océan…NICOLAS PERGE

BOURRE­PAF

FlorineLes 17 secretsde la saison 7Est­elle une blonde Nabillaou la réincarnation duDr Garriberts, qui a enfinréussi à s’immiscer dans leloft de Secret Story ?P DUVAL JLPPA

LIRE

Jules CésarIls sont fous,ces Européens!Dans le Déclin, l’historienDavid Engels comparela fin de la Républiqueromaine à la crise quetraversent les Vingt­Sept.DEAGOSTINI LEEMAGE

LE CASTING DU 15 JUIN 2013PAGE VIIIPAGE IV PAGE XII PAGE XV PAGE XVIPAGE XVIII

«VU DES ÉTATS­UNIS» SÉLECTIONNÉ PAR PETER KUPER

«J’avais 20 ans. Je nelaisserai personne dire quec’est le plus bel âge de lavie.» En 1931, Paul Nizancommence ainsi sonpremier roman, AdenArabie. Il ne se doute pasque cette réflexion culte vaêtre arrangée à tout boutde champ, à toutes lessituations et toutes lesnationalités. La vitalité ounon d’un pays se mesured’abord à l’aune de sanatalité. Naturellement,l’état de ces enfantsparvenus à l’âge crucialde 20 ans constitue unbaromètre de bonne oude mauvaise santé. Et passeulement économique.Une populationmajoritairement jeuneouvre des perspectivesd’ouverture morale,sociale, culturelle,politique, quand les paysde vieux cultivent le repli,le conservatisme, l’effroide la nouveauté. Pour

autant, les jeunes n’ont pasvocation à baigner dansun bonheur béat et voilàpourquoi Nizan a raison.Vingt ans ouvrent tousles champs des possibles àcondition tout de même dene pas buter sur des mursà chaque pas. Quoique !Ces murs – le plus souventd’incompréhension –peuvent devenir deformidables prétextesà une révolte salvatricemajeure. Si 20 ans n’estpas le plus bel âge de la vie,c’est au moins celui surlequel on peut fonder tousles espoirs. Quelle terriblepression exerce-t-on surcette génération censéeéclairer les ténèbres !Et qui fait souvent les fraisde révolutions par natureinopinées, récupérées pardes professionnels de lapolitique bourrés de trèscrapuleuses intentions.Désespérer la jeunesse estle pire des crimes.

L’âge des passibles

ÉDITO

Par BÉATRICE VALLAEYS

Artiste: Peter Kuper, inédit. «Prism: le programme américain de surveillance électronique des citoyens.»

Page 17: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CHRONIQUES LE MAG • III

VOX POPULI

Par MATHIEU LINDON

A bon écouteur,salut

Ç a fuite chez le plombier. C’est uncomble pour des espions d’êtrevictimes d’indiscrétions. Devant lescandale des gigantesques écoutes,il ne manquerait plus que les

Américains fassent la sourde oreille. Faut-ilpaniquer face à la découverte de l’ampleurdes investigations de la NSA ? Rappelons-nousle temps qu’a mis l’amicale des fins limiers etdes grandes oreilles, avec toute sa technologie,pour retrouver Oussama ben Laden. Alors onimagine la difficulté quand, comme dans undessin de Sempé, il s’agira de trouverquelqu’un d’aussi anonyme que M. Lambert.Bon, tout ça ne va pas aider les paranoïaques.«Allô, maman, c’est moi, je t’appelle d’unecabine. Comment ça va ?» Si ces contrôles sontréellement indispensables à la sécuritéinternationale, ça veut dire que chacun de nousest un terroriste potentiel. A bon entendeur,salut, on peut aussi en profiter pour s’épancherau téléphone, menaçant. «Si mon boucherpersiste à me servir si mal, j’envisage derépondre par un attentat aux petits oignons.»La CIA fera le nécessaire.Cet espionnage généralisé porte ses bonnesnouvelles. Ça va diminuer l’arbitraire.On croyait qu’on nous avait refusé sans motifun prêt bancaire, une augmentation ou unerelation sexuelle –il y avait en fait d’excellentesraisons. C’est comme si on avait un radar à lamaison. Dommage qu’il ne soit pas utilisé pourdes tâches plus nobles: «Non, plus de gâteau,votre cholestérol est déjà inquiétant.»Ça raccourcira les interrogatoires. Plus besoinde poser des questions comme: «Où étiez-vousmardi 18 à 21h34?» «Ça ne sert à rien de nier.Vous avez commandé à 19h51 un D8, un T12 etun V29 au chinois du coin. Vous n’étiez pas àjeun.» Tout ce qu’on dira et écrira pourra êtreutilisé contre nous. «L’analyse de vos courrielset SMS nous informe que vous avez déjà mentià votre mère, à votre patron et à vos enfants.Nous avons donc toutes les raisons de penserque vous n’êtes plus à un mensonge près.»Le patron: «Alors, Martin, ma femme vousplaît plus que mon humour.» Devantl’administration: «Mon dossier n’est pascomplet? Mais vous devez avoir cette piècedans vos archives, sinon à quoi ça sert que vousvous décarcassiez?»Tout le monde a quelque chose à cacher,au pire le fait qu’il n’a rien à cacher. Il devraity avoir un numéro direct pour joindre lesespions, un SOS Solitude géant, pour ceuxqui n’ont personne à qui parler. Quand ontéléphonera, il y aura une voix électronique :«Si vous ne voulez pas être écouté, tapez 1.»On sera obligé de prendre des précautions.«Allô, je jure de dire la vérité, toute la vérité,rien que la vérité. Chérie, je prends combien debaguettes ?» Pour une démocratie de l’écoute,il devrait y avoir l’accès libre de toutes lesdonnées à tous. On n’aura plus à demander«t’es où ?» au portable. Ce dispositif semblecependant inefficace pour traquer leblanchiment d’argent, l’évasion fiscale,l’escroquerie en bande organisée.Ils communiquent par signaux de fumée, tam-tams et pigeons voyageurs, les banquiers ?Ça marche comment, le téléphone suisse ? •

REGARDER VOIR

Par GÉRARD LEFORT

Un secret bien gardéC’ est une photographie qui

a priori ne sert à rien si-non à fixer un imposantgroupe d’immeubles du

début du XXIe siècle. Comme on en voitun peu partout dans le monde à la péri-phérie des villes. Comme on aimerait envoir moins, leur monumentalité censé-ment moderne étant généralement lesymbole manifeste de quelque chosed’énorme qui a à voir avec le capita-lisme et sa visibilité : siège d’une ban-que, d’une compagnie d’assurances,d’une multinationale. Mieux luné, onpourrait aussi supputer quelque palaced’une chaîne intercontinentale auxalentours d’un aéroport.Que la photographie soit aérienne estcependant l’indice d’une certaine dis-tance entre l’objectif et son sujet, une

sorte de prudence qui, partant, contra-rie l’insignifiance présupposée. C’est unbâtiment qu’on peut approcher de loin,par les airs, mais pas forcément survo-ler. Et pour cause. Il s’agit du siège dela National Security Agency (NSA) amé-

ricaine, à Fort Meade, dans le Mary-land. Dont la photographie est cestemps-ci recherchée pour illustrermoult articles sur les défaillances decette NSA dont un ancien employé a ré-vélé qu’elle ne se gêne pas pour espion-ner téléphones et Internet privés des ci-toyens américains.Du coup, c’est d’un autre œil qu’onscrute ce nid d’espions. Pour constaterqu’il est sans doute mieux protégé quel’on croyait, entre autres parce qu’on ledécouvre ceinturé par une voie auto-routière déserte et parsemée de lampa-daires. Sur le modèle médiéval, c’estune sorte de douve mais qui n’a plus be-soin d’être un fossé. Sa platitude est aucontraire la garantie d’une visibilitémaximale pour les détecteurs électroni-ques dont on l’imagine truffée. Ce genred’autoroute sécuritaire existait autrefoisdu côté Est du mur de Berlin. Sur lemême modèle, on en voit en quantitéaux abords des sites dits sensibles: cen-trale nucléaire, base militaire, voire,autre genre de retranchement, plus civilmais pas moins militarisé, aux alentoursdes quartiers résidentiels «sécurisés».

Ce qui frappe aussi, c’est l’allure des bâ-timents principaux. Un architecte a for-cement pensé cette construction : saforme parallélépipédique et surtout lacouleur de sa façade, noire et réfléchis-sante. Ce dernier aspect était-il inscrit

dans le cahier des charges?Ou relève-t-il d’une proposi-tion originale? L’effet produitest celui d’un miroir. Mais àla façon d’une glace sanstain: voir sans être vu, per-mettre la réflexion mais en

piégeant ce qui se reflète. Autrement dit,la définition même de l’espionnage,coulée dans le verre et le béton. Les pa-trons de la NSA devaient jubiler quandils ont touché leur nouveau siège, siopaque dans sa fausse transparence.Alors qu’y voit-t-on «apparemment»?Le reflet des centaines d’automobilesgarées sur les parkings qui, à perte devue, cernent les bâtiments. Ce quidonne une petite idée du nombre d’em-ployés de la NSA. On suppose aussi, fa-çon Jacques Tati, qu’il faut intriguer fé-roce auprès des responsables de la NSApour gagner le privilège de garer sonvéhicule le plus près possible de l’entréeet éviter ainsi le choc thermique entrela climatisation de sa voiture et celle desbâtiments (peut faire très chaud l’étédans le Maryland et très froid en hiver).On imagine alors le bonheur desditsresponsables qui, derrière leur façaded’hommes invisibles, tout à la joie deleur pouvoir discrétionnaire, voientsans être vus que ce trou du cul de Rod-ney doit chaque matin (et chaque soir!)se taper un kilomètre de marche à piedpour rejoindre son poste de travail. •

L’empiredusecrethorsdecontrôleLes révélat ons d’Edward Snowden sur les services de renseignement amér ca ns llustrent lad fficulté de l’administration à contrôler une industrie de l’esp onnage devenue tentaculaire

«N us s mmes en l inoup d E a » onne

R sh L mbau h unes p us ameux é

no s d la r i e am r c ine «D ns1 84 e oman d O we l au m i ses c o ens n va e t p s be o n de

pa er eu s é ra s» en hé it àg uch le i éa te M c ae Moo eDe l ex r me ro e à l x rêmega che es év l t ons d E wardSn wden ur l e p onn ge ys éma i ue d s c mm ni a i ns é éph n qu s et n e net uq el e iv e a Na onal ec r ty Ag ncy(N A) c nt n e de us t r l po émi ue d ns es m d as m r c i s« e m t en s à un é at d am l urau C ng è et a s l pu l c o se vePe e Swi e anc en on e l e desadm n s r t o s C i ton t Ob ma

Une d s qu s onssé eu es q e pos nt es é é a i ns

e t de a o r s a co e te y t ma iqu de r l v s t ép on q es mé ic i s n ex é a t p s ce ui s pr vupa la oi l ou r i y av i de act o s en u t e » ou ce q i e t del e p on age ur n er et l dmin s ra on Obama a s re qu l nev sa t ue es u a er «é r ng rs»et « on r s d nt » de Fa eb okGoo l et ep au r s f ur i se rsamé i a ns d se v ces C qui er i l ga d un po n de vu amé ic in r ppe e e pr f s eur wi e:«La on t u i n am r c i e ne app i ue as à l t an er »To t en as ur nt se « é ou r del o ve t re de e dé at» Ba ackObama t s s c ns i er fo t t utl ur os bl pou é ou f r e s anda e Depu s on i st l a on à laMa s n l nc e en 2 09 Obama af i le n ce s i e po r ga an i lame l e re « r n pa en e» p s i lede se v ce se r ts t s n pa fa tco t ô e par e Con r s a s ra tl nd s n po te p r le ay C rn y:«Un b n é ui b e a é é r uvé n ren s i t r t de é ur é n t o a e e lap o ec on de a v e p vée » P u ôtque de s nd gn r des p a i uesma s ve d es i nn ge év l es arSn wden a démo r te D anneFe n t in pr s de te de a commi s on du én t s r e r ns i nement a xp qué vo r ep nsé esde n ers ou s aux a t nt ts du1 se t mbr 200 et aux o ps uis u a en » du Wo ld ra e Ce t r

HAWA La NSA po r q i t a a l a tde n è eme t Edw rd nowd n adem ndé l o ve tu e d ne enqu te c im ne e con re e j unehomme Ava t même qu l ne évè e s n de t té ce we k ndda s une nt r i w au uo id enb i an i ue e Gu r i n e en uê

t u s amé ca ns t i nt é à s r sap s e i i an mer r di d rn e lav l a à Hawa qu il va t h bi éeusqu u 1 mai I ne f it as de

do te q e nowd n ou ra ê repo r u vi our r h s n i ce n stpo r es i nna e au p of t d unepu s an e é r ngè e ay nt q i tél s E ats Un s e 20 mai p ur ser fu i r à H ngk ng S n mp oy ur l gr upe B oz A en Hami t n a nno cé h er on i enc eme t pour « i l t on du odede ét i ue e l e t ep i e»Sn wden r va l a t epu s mo nsde t o s mois our l nt ep i epo r un s l i e i é à 1 2 000 d lar par n ( 23 0 eu o ) pr c sée gr upe au Gu r ian S owden

a a t dé l ré ag er 2 0 000 d lars ar a ) e qui ou ie e p us

l a m n s r t on amé ic i e st

qu un eu e n o m t c en re ev nt d un ous r i an ex é eur àa NSA a u ac éd r à des ocu

men s us i on i en e s que euxr v l s la ema ne d rn è eComme à ha ue p éc de t s and le no ammen lo s de af a re

Wi i eak ( a pu l c t on n 0 0de en a nes de m l ers e té ég amme di l ma i ues op é parun mode te a a ys e m l t i eB ad ey M nn ng) es Am r ca nsedé ou r nt à que e rs e v ces

de e se g emen se on dé e op

p s à un y hme t l em nt é i antd pu s 2 01 que es on r l s iner es ne u ven pl s La N A a

d ub é en a l e c s de n èr s ann es Son s è e b sé à une inq ant ine de k l m t es eWa h ng on es au s g ga t sq e

q e e Pe ta one et0000 n uv aux m

p o és o ven en o ey ê re re ru és cesq i ze ro ha n s ann es av nç i hi r eWa h ng on ostP us de 1 9 0 ous

ra an s r va l e t us i pourc t emp re u se r t armi uxBo z Al en Hami t n quic mpt 250 0 emp o és à u se lD bo dé pa ce or en d mbau

hes e go ve n m nt mé i a n amême on ié d pu s 2 06 exa

men d s no ve es r cr es à d sous r i an s qu ont c é ér l sro é ur s Edw rd S owd n av tin i té u é ap e à r va l r po res s rv c s se re s l rs qu il

n va t m m pas e d p ôme d f ne l cée

ACCE TA LE L s p em er sonag s e f ct és es d rn e s ou s

mo tr nt l s Amé i a ns eubr n és ar es év at o s e touou s p us ou i ux du e ro i meue de a p o e t on d l ur v e riée D p ès ne e qu te u ce t ee re he ch Pew 6% déc a e t

a c l e te y t mat q e p r la SAe l u s r l vé t l ph n qu s «acep a e» ve Obama à a Ma on

B a che l s d m c at s se monr nt ea co p p us nd l en s ene s c s p a i ues u i s n l é a e tu emps de B sh es r pub ia ns en ev nc e enn nt à u e

n uv l e o ca i n d sp yx er ar s de ce Ob ma s us e sc nda

es P ur es i er a i ns ou e T aar y a l r i ue au g uv r eme téd r l c es une n uv l e p eu eue l a min s r t on O ama «enah » e r v e M m Ri k Pe rye g uv r eu ré ub c in du e as

a e r uvé ne o ca i n de e f i ent nd e: J au a s a en u c la e

a Ch ne éno ce t l pas d sta s Un s » •

Pa LORRA NE MI LOTCo re po da te à W sh n t n

La NSA a doub é n ai le cesdern ères nn es et a recou s àplus de 1900 sou -t ai antsDepuis 2006 el e dél gue mêmel examen des nouve les r crues

ANA YSE

Le i ge de a N t o al ec r t Age cy am r c i e à Fo t Me de da s e Mar and e t a s i g a d que e P nt go e PH TO R U E S

62%es Amé i a ns uge t «p us

mpo t nt» d nqu ter ures m nac s t rr r s es p u ôtue de p é er er a v e p i éees c oy ns se on n on ageu Pew Re ea ch Ce t r

REPÈRES

«La sécu i é na ion le nepeut ê re gar nt e i lesse rets ur nos mé hodesde ren eignementne sont pas g rdés »B l Ne on s na eu démo r teav r b e à l x r d t on d E wa d

S owd n

Le at i t Act p omu guép r l dmi i t at on B sh à au te d s a te t ts du 1 epemb e l r it e pou o rs deur e l a ce du ou er ementon re e t r or sme l p rmet

d n er ep er ou ty e deommun c t on su mand t

d un r b na se re déd é a xé ou es

L BÉRA ION MER REDI 2 JU N 20 38 • MONDE

Les patrons de la NSA devaientjubiler quand ils ont touché leurnouveau siège, si opaque danssa fausse transparence.

REU

TERS

Libération du mercredi 12 juin.

Page 18: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013IV • LE MAG ENQUÊTE

I ls ne fêteront pas leur vingtième anni-versaire à New York. Ce dimanche, à Ph-nom Penh, les deux hommes agenouillésqui ont accueilli dix-neuf ans durant lesvisiteurs de l’aile asiatique au Metropoli-tan Museum sont restitués au Cambodge,dans une cérémonie présidée par le Pre-mier ministre, Hun Sen. Leur sourire dé-

sarmant cache une blessure longtemps gardée se-crète. Pour ceux qui y prêtaient attention, ilsportent des marques de burin: les traces laisséespar les pillards quand ils ont arraché ces personna-ges grandeur nature d’un temple dans la forêtcambodgienne, il y a une quarantaine d’années.Le 3 mai, le musée new-yorkais a jeté un certaintumulte à travers les Etats-Unis en annonçant sonintention de rendre ces grès sculptés au Xe siè-cle. Ce geste est le résultat d’un processus danslequel l’histoire de l’art tient le beau rôle. Il témoi-gne aussi de la radicalisation de la position améri-caine envers le trafic d’art. Embarrassé par unpassé qu’il aimerait bien solder, le musée a expli-qué, dans un communiqué laconique, sa décisionpar «de nouvelles données de recherche», prenantsoin d’ajouter que «ces informations n’étaient pasdisponibles quand il acquit ces sculptures», il y a plusde vingt ans. Le Cambodge, qui avait déposé uneréclamation en mai 2012, s’était immédiatementfélicité de ce «comportement éthique».Les événements se sont accélérés au printemps.En mars, la directrice juridique, Sharon Cott, s’estrendue à Phnom Penh flanquée du conservateurde l’Asie du Sud-Est, John Guy. Il leur a été fourniune preuve difficilement réfutable: des fouilles surle site royal de Koh Ker ont permis de dégager lessocles correspondants aux deux statues, dans untemple dévasté lors de la guerre civile, autourde 1972. La restitution a été consentie de manièrevolontaire. Mais le musée était sous pression.Quelques semaines plus tôt, deux magistrats

Par VINCENT NOCE

Statues khmères

Un volépourun rendu

étaient venus de New York. Le 27 février, SharonLevin et Alexander Wilson s’étaient même rendussur place, dans le Nord, résolus à faire aboutir uneenquête fédérale ouverte sur d’autres trésors venusde ce temple appelé Prasat Chen. Déterminés àcontrecarrer un trafic qui ravage la planète, lesEtats-Unis ont placé sous haute surveillance lesbiens issus de plusieurs pays qui en sont victimes,comme le Cambodge. Ces dernières années ontainsi vu se succéder les restitutions au Pérou ou àl’Irak, mais aussi à l’Italie ou la Grèce. Même laFrance a bénéficié de restitutions de tableaux volésdans ses musées ou enlevés aux familles juives sousl’Occupation.

Police du patrimoineD’après Anne Lemaistre –qui représente l’Unescoà Phnom Penh et a joué un rôle discret de conseildans cette affaire–, le vaste ensemble de Koh Ker,capitale éphémère du royaume khmer, a été litté-ralement massacré, dépouillé d’une statuaire por-tée au sommet: «Le pillage archéologique du Cam-bodge est sans précédent; il s’est développé à partirde la fin des années 60, pour ne plus s’arrêter.» Lesconvois, éventuellement escortés par des mili-taires, acheminaient ces trésors en Thaïlande, d’oùils étaient proposés aux riches Occidentaux. «Nousavons trouvé des photographies de trafiquants posantà côté des bas-reliefs pour en montrer la taille. Si lesmarchands leur passaient commande, ils revenaientles faire sauter des murs.»Longtemps, collectionneurs, marchands d’artmais aussi conservateurs ont préféré fermer lesyeux. La prise de conscience est récente. Il a falluattendre 2008 pour que l’association des direc-teurs des musées américains réclame une vérifica-tion scrupuleuse des acquisitions. Ils sont censésrefuser tout objet sans preuve d’exportation légi-time, surtout s’il est sorti du pays depuis 1970, an-née de la convention internationale de l’Unescocontre le trafic des biens culturels, qui fournit unsocle juridique.

Page 19: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 ENQUÊTE LE MAG • V

De son côté, le Cambodge s’est mobilisé, obtenantde premières restitutions. Les grands temples ac-cessibles ont été sécurisés. Aidé par l’Unesco et laFrance, le gouvernement a constitué une police dupatrimoine et formé les douaniers. Mais il demeuredifficile de protéger un pays recensant 3 000 lieuxarchéologiques de toute nature, souvent isolés.«Ces dernières années, après avoir dévalisé les sculp-tures, s’indigne Anne Lemaistre, les pillards se sontattaqués aux éléments d’architecture. Les inscriptionsgravées dans la pierre sont coupées en morceaux et

vendues comme œuvres d’art, empêchant toute étude.En 2011, l’Unesco a envoyé une mission dans un trèsgrand temple difficile d’accès, Preah Khan de Kom-pong Svay. C’est à pleurer. Dans les années 2000,sans doute jusqu’en 2006, il a été sauvagement dé-mantelé au burin, avec des essais ratés, des têtes àdemi-brisées. Comme si cela ne suffisait pas, despans ont été dynamités pour desceller des reliefs. Letemple est réduit en poudre à certains endroits.»

Décapitation systématiqueLa première méthode systématiquement pratiquéeest la décapitation, les têtes étant particulièrementprisées par les amateurs. Le Met lui-même a dûrecoller les deux personnages à partir de quatremorceaux, acquis de 1987 à 1993. Trois lui ont étéapportés par un Britannique de Bangkok, DouglasLatchford, associé à une société de Londres spécia-lisée dans l’Extrême-Orient, Spink’s (devenue unefiliale de Christie’s). Une des têtes a été cédée parun couple californien… qui l’avait achetée aumême Latchford, par l’entremise de la galerie lon-

donienne. Curieusement, la fiche de cette pièceau Met ne comporte pas d’historique. Aucune no-tice scientifique n’apparaît non plus pour ces deuxpersonnages, sommairement décrits comme des«servants agenouillés». Il est quand même extraor-dinaire qu’une institution aussi prestigieuse ne sesoit pas inquiétée de voir arriver des sculptures enmorceaux, qui proviennent tous de la mêmesource.Agé de 81 ans, teint brique et grand sourire, Latch-ford est une figure de Bangkok, et se définit

comme un «amateur aventurier». Néd’un couple anglais à Bombay, ayantprospéré dans le négoce pharmaceuti-que et la promotion immobilière, il pré-side une association sportive de body-building. Il pense être la réincarnationd’un dignitaire khmer. «Après tout, cesobjets ont été les miens dans une autrevie», a-t-il lancé à un reporter du New

York Times. Dans sa résidence encombrée debouddhas et de divinités du Siam ou de Birmanie,il raconte comment, il y a une cinquantaine d’an-nées, il s’est mis à parcourir en jeep les pistes deThaïlande et du Cambodge pour visiter les sanc-tuaires envahis par les gigantesques fromagers eten rapporter des souvenirs. Il était un habitué du«marché aux voleurs» de Bangkok quand apparu-rent les premières sculptures sorties du Cambodge,plongé dans la guerre. Fort de sa connaissance duterrain, partageant son temps entre Londres etBangkok, Latchford s’est imposé comme un spé-cialiste de l’art khmer, rédigeant des ouvrages deréférence, et l’un de ses principaux fournisseurssur le marché mondial. Il nie s’être livré au trafic,mais ne peut s’empêcher de justifier le pillage :«Ces œuvres, sinon, auraient servi de cibles auxKhmers rouges.»Il est même devenu mécène, jusqu’à Phnom Penhoù il a fait des dons au musée national quiparadoxalement, accueille aujourd’hui lesdeux statues venues du Met. Rien d’inno-

Les Cambodgiens ont obtenula restitution de deux grèssculptés, exposés depuisprès de vingt ans au Metde New York. Un retour à la terrenatale exceptionnel qui révèlel’ampleur et les arcanes du traficd’œuvres archéologiques.

Le Met avait dû recoller les deuxpersonnages à partir de quatre morceaux.Trois lui ont été apportés par DouglasLatchford, un Britannique de Bangkok,qui se définit comme un «amateuraventurier».

Ci­contre: les deuxgrès rendus par leMet au Cambodge.PHOTOS METCes personnages,membres de lafratrie des Pandava,étaient représentésen train d’assisterau duel de leur frèreBhima (ci­dessousà gauche) avecDuryodhana(à droite).PHOTOS NORTON SIMONART FOUNDATIONARCHIVES DU MUSÉEGUIMET ET ÉRICBOURDONNEAU

Page 20: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013VI • LE MAG ENQUÊTE

servi de prototypes à l’art du grand Xe siècle: à sesyeux, «aucun autre groupe sculpté n’illustre de façonaussi spectaculaire la créativité des artistes» del’époque. En comparant ces œuvres aux bas-reliefsdu temple de Banteay Srei, à une centaine de kilo-mètres de distance, Eric Bourdonneau a pu mon-trer que les deux hommes agenouillés étaient nonpas des serviteurs ou des gardiens de temple, maisdes membres de la fratrie guerrière des Pandava,en train d’assister au duel de leur frère Bhima avecDuryodhana (1), représenté dans le pavillon ouestd’entrée du temple. Ce sont les éléments de cetteétude, confortés par les fouilles, communiqués auxautorités cambodgiennes et américaines par l’en-tremise de l’Unesco, qui ont orienté les investiga-tions en cours.

Car les deux héros manquants du Mahabharata ontpu être localisés. Bhima, sur le point de briser lesjambes de son adversaire d’un coup de masse, setrouve en Californie, à la Fondation Norton Simonde Pasadena, qui dit «collaborer à l’enquête fédé-rale». L’issue ne fait guère de doute: là encore, unconservateur, travaillant avec le centre internatio-nal d’études des monuments (Iccrom), SimonWarrack, a découvert sur place le piédestal, surlequel figurent les pieds brisés.Le cas de Sotheby’s est bien plus épineux. En 2011,sur protestation du Cambodge, la société a dû à ladernière minute retirer d’une vente à New Yorkune statue taillée dans le même bloc: Duryodhanas’envolant dans les airs, mise à prix à 2,5 millionsd’euros. Sotheby’s s’est empressé d’affirmer quela décision du Met «n’apportait aucune lumière» àson propre procès. Ses avocats ont plaidé que,même si l’œuvre a été pillée, le Cambodge n’avaitpas de fondement juridique pour réclamer des sta-tues «du temple de Prasat Chen, abandonné à la jun-gle il y a cinquante générations», ni se considérercomme l’héritière d’un défunt royaume du Xe siè-

cle. C’est donc toute la politique du patrimoine quiest en jeu dans ce procès… Un juge de New Yorkvient cependant de rejeter ces arguments en con-firmant la saisie. Il doute fort que l’œuvre ait puêtre achetée de bonne foi par le couple belge quil’a acquise à Londres en 1975. Déjà, à l’époque,personne ne voulait toucher à cet objet venu denulle part. Encore une fois, la tête avait été coupéepuis recollée. Et, là encore, la statue avait été miseen vente par Spink’s et Latchford. Ce dernier sedéfend en proclamant avoir simplement servi definancier et de consultant dans cet échange.La justice américaine estime ainsi posséder «suffi-samment d’éléments» pour reprocher à Sotheby’set sa cliente belge, Decia Ruspoli di Poggio Suasa,d’avoir introduit l’œuvre sur le sol américain en

avril 2010 «en sachant qu’elle était vo-lée». Sotheby’s conteste. Mais les jugesont sous la main des échanges embar-rassants de mails avec son experte,Emma Bunker. Elle est une amie intimede Latchford, avec lequel elle a signéquatre ouvrages. Elle a aussi favorisé sestransactions avec le musée de Denver,où elle servait de conseillère. Et ils ont

été en contact étroit à propos de cette vente, Lat-chford n’hésitant pas à donner par son entremisedes conseils à Sotheby’s, finissant de boucler unlien entre le principal suspect dans ces trafics etla prestigieuse société de ventes.

Danseur, guerrier ou athlète?Dès le 1er juin 2010, l’experte s’alarmait des «preu-ves réunies par les Cambodgiens, qui démontrent quel’œuvre a sans conteste été volée à Prasat Chen». Enajoutant: «Ne montrer ce message à personne horsde Sotheby’s!» Plus tard, elle demande «d’éviter dementionner dans le catalogue que les pieds de la statuese trouvent toujours in situ». Et elle s’oppose à l’idée,suggérée par le département juridique, de soumet-tre sa notice au directeur cambodgien de la protec-tion du patrimoine, Hab Touch, par ailleurs qualifiéde «bureaucrate» auquel il serait impossible de sefier: «Ce serait comme agiter un chiffon rouge devantun taureau.» Dans ce message du 9 août, l’expertes’irrite que la responsable de Sotheby’s, AnuGhosh-Mazumdar, se trompe systématiquementsur l’œuvre en lui parlant d’un «danseur khmer»:

Arjuna

Yudhisthira

Balarama

Drishth

a-

dyumna ?

Krishna

Bhima

Duryodhana

Nakula

Sahadeva

4,20

m

4,20 m

Interprétation du dispositificonographique

Arjuna Sahadeva Nakula

Les frères Pandava assistant au duel de Bhima contre Duryodhana

Bhima

Duryodhana

Phnom Penh

Bangkok

Merde Chine

CAMBODGE

THAÏLANDE

500 kmLAOS VIETTNVIET

Koh Ker(Prasat Chen)

Siem Reap

cent dans ces donations. Outre le créditqu’un personnage à la réputation sulfu-

reuse peut en retirer comme invité d’hon-neur, elles sont assorties en Amérique de remisesfiscales. Et peuvent toujours favoriser les affairesen parallèle: il en va ainsi de la tête qu’il a vendueau couple californien, avant d’offrir le corps cor-respondant au Met. A Denver (Colorado), il adonné quatre sculptures. En même temps, il en anégocié deux autres à la vente avec le musée. Il luiest également arrivé de prêter des objets à des ins-titutions, qui en sortent légitimés, dotés d’un pe-digree officiel.

Recherches épigraphiquesEt les musées en ont largement profité. Ses dona-tions au Met ont été réalisées «en l’honneur deMartin Lerner», le conservateur de l’époque, aveclequel, manifestement, Latchford était en excel-lents termes. Maintenant qu’il prépare une grandeexposition sur le royaume khmer pour l’an pro-chain, le musée de Central Park fait amende hono-rable. Il a ainsi invité des conservateurs cambod-giens à venir examiner sa collection, ce quipourrait conduire à reprendre des études de prove-nance sur une vingtaine de pièces. Dont plusieursproviennent de Latchford et Spink’s…Cet affichage de bonne volonté ne fait pas l’affairede tous. Car le puzzle à recomposer s’avère bienplus ample. A l’origine se trouvent les recherchesiconographiques et épigraphiques menées de-puis 2009 par un maître de conférences de l’Ecolefrançaise d’Extrême-Orient, Eric Bourdonneau,qui dirige sur place une mission archéologique. Ila su identifier dans les pavillons d’enceinte de Pra-sat Chen deux épisodes majeurs des grandes épo-pées indiennes, le Mahabharata et le Ramayana.Dans ce temple dédié à Vishnou, les sculpteursavaient mis en scène les deux principaux avatarsdu dieu cosmique, Rama et Krishna.Le chercheur français a ainsi permis de relier entreelles une quinzaine de statues dispersées dans desmusées et collections privées, qui formaient de vé-ritables théâtres de pierre. Ces chefs-d’œuvre ont

Le cas de Sotheby’s est bien plus épineux.En 2011, sur protestation du Cambodge,la société a dû à la dernière minute retirerd’une vente à New York une statue:Duryodhana s’envolant dans les airs, miseà prix à 2,5 millions d’euros.

Piédestaux des frères Pandava. PHOTO BOURDONNEAU EFEO

Pied et piédestal de Bhima. BOURDONNEAU EFEO

STATUES KHMÈRES:UN VOLÉ POUR UN RENDU

Page 21: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 ENQUÊTE LE MAG • VII

Eric Bourdonneau,sur le site de Koh

Ker en février 2010.Le chercheur

français, qui dirigeune mission

archéologique auCambodge, a permis

de relier entre ellesune quinzaine de

statues disperséesdans des musées etcollections privées.

PHOTO JOHN VINKMAGNUM

«Arrêtez, il n’est pas en train de danser, il s’agit d’unguerrier qui affronte un adversaire, lequel se trouveau Norton Simon.» Son interlocutrice a manifeste-ment un peu de mal à suivre, car un peu plus tardelle en parle comme d’un «athlète». La confusionet la nervosité au sein de la maison de ventes crois-sent à l’approche de la vente. La mise aux enchèresprocède d’une grosse erreur d’appréciation: la cer-titude que Phnom Penh ne bougera pas. Le 8 sep-tembre 2010, l’experte dit s’attendre «à une réac-tion négative de la presse américaine, émanant desscientifiques et des adorateurs de temples, mais nondes Cambodgiens». Deux semaines plus tard,Ghosh-Mazumdar envoie un mail alarmé à ses su-périeurs: «Il y a trois ans, notre athlète khmer a étéproposé à des clients de Chicago, comme provenantde Latchford. Ils ont immédiatement décliné, ne vou-lant rien avoir à faire avec un objet auquel son nom estattaché.» Ce qui, apparemment, n’émeut personneà la direction de Sotheby’s.A plusieurs reprises est émis le vœu de pouvoir re-pousser la provenance «avant 1970», année de laconvention de l’Unesco, faute de quoi les grosclients et les musées ne peuvent pas enchérir. Unspécialiste de Sotheby’s, David Weldon, lance, enparlant de Zara Porter-Hill, directrice du départe-ment de l’Asie du Sud-Est, et de Latchford : «Jesuis sûr que Zara peut obtenir de lui qu’il signe unpapier disant qu’il avait la statue en sa possessiondans les années 60, avant de la vendre en 1975 viaSpink’s.» Emma Bunker aurait même livré une at-

testation, assurant avoir vu la statue à la fin desannées 60 à Londres (2).

Bible des œuvres pilléesDans leur dernier livre, en 2004, Adoration andGlory, the Golden age of Khmer Art, Bunker et Lat-chford avaient surpris les spécialistes en révélant«de très nombreuses œuvres inédites et de grandequalité, malgré les problèmes suscités par le manqued’informations sur leur provenance», comme l’écri-vait alors la revue Arts asiatiques, sous la plume dedeux responsables parisiens du musée Guimet,Pierre Baptiste et Thierry Zéphir.Les défenseurs du patrimoine s’en servent désor-mais comme d’un outil précieux pour retrouverdes œuvres pillées. «Il est devenu notre bible», es-time l’un d’eux. La traque aux objets Latchford estlancée à travers le monde. Eric Bourdonneau a déjàrepéré plusieurs pièces dans des collections privéesainsi qu’un dieu à tête de singe et une image del’archer Rama (3) aux musées de Denver et de Cle-veland qui, suggère-t-il, proviennent de l’entréeEst du Prasat Chen. Quatre autres statues, dont unGanesh, dieu à tête d’éléphant, issu également dela cité de Koh Ker, ont été vues au musée asiatiquede Berlin, qui reconnaît aujourd’hui avoir manquéde vigilance en acceptant de les emprunter poursa réouverture en 2000.Chasing Aphrodite, un blog surveillant le traficd’art ouvert par deux journalistes du Los AngelesTimes, évoque d’autres acquisitions par des musées

comme le Kimbell, à Fort Worth (Texas), de sculp-tures passées par l’homme de Bangkok, provenantdu reste du continent, du Pakistan au Népal.Se profile ainsi un scandale majeur, analogue à ce-lui du trésor romain de Sevso –qui avait longtempsabîmé la réputation de Sotheby’s–, ou de l’affaireMedici (4) –qui ont abouti à des restitutions spec-taculaires en cascade à l’Italie et la Grèce. •

(1) Grand souverain cruel du Mahabharata, doté d’uneforce exceptionnelle, que seul son cousin Bhima, aînédes frères Pandava, est à même de défier. Leur duel, enprésence de Krishna, est un sommet d’une successionde hauts faits ponctués de batailles, contenue en unrecueil de dix­huit livres sacrés: le plus grand poèmejamais écrit, il est formé de 250000 vers en sanskrit.(2) Contacté, Sotheby’s s’est refusé à tout commentaire.(3) Ce roi, ici identifiable à son carquois, est le héros dela légende du Ramayana, souvent représenté avec sonfidèle dieu singe Hanuman. Le chercheur françaissuggère que cette autre grande épopée hindouistefaisait l’objet de la représentation du pavillon côté Estdu sanctuaire. L’ensemble de cette décoration dutemple, sous l’égide de Vishnou, était censé offrir uneprotection au rayonnement du royaume khmer.Cf. «Nouvelles recherches sur Koh Ker», publiées parEric Bourdonneau dans la revue de l’Académie«Monuments et mémoires» (2001).(4) En 1990, Sotheby’s a dû retirer de la vente un trésord’argenterie romaine pillé, appartenant au marquis deNorthampton, dont l’origine géographique n’a jamaispu être établie. Giocomo Medici est un gros trafiquant,condamné à Rome en 2004 pour avoir alimenté lesgrands musées américains en sculptures antiquesvolées dans les tombes.

Page 22: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013VIII • LE MAG CÉLÉBRATION

Le monde cruel etlyrique de Britten

Benjamin Britten et EricCrozier, sur la plaged’Aldeburgh, en 1949.PHOTO KURT HUTTON PICTUREPOST GETTY IMAGES

Page 23: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CÉLÉBRATION LE MAG • IX

Texte et photos ÉRIC DAHANEnvoyé spécial dans le SuffolkDe Lowestoft où il est né

il y a cent ans, à Aldeburghoù il s’est éteint le 4 décembre1976, des membres de safamille, des amis et desinterprètes de sa musiqueévoquent le compositeuranglais majeur du XXe siècledont l’œuvre est hantéepar la guerre, l’injusticeet la souillure morale.

est né le 22 novembre 1913, c’est parceque le plus important compositeur an-glais depuis Henry Purcell a vécu et crééson festival dans un village portuairevoisin, Aldeburgh. Pour le centenaire desa naissance, Lowestoft s’est toutefoisfendu d’une nouvelle plaque commé-morative au 21 Kirkley Cliff Road,adresse de la Britten House en briquerouge où il a grandi, désormais trans-formée en hôtel.

Tennis et croquetLe maire a également bataillé pour quela fontaine municipale s’anime à inter-valles réguliers, au son des Sea Interlu-des de l’opéra Peter Grimes et autre Sim-ple Symphony, une pièce ludique etvirtuose écrite par Britten entre ses 9 et13 ans. Son père, chirurgien-dentiste, recevait ses clients aurez-de-chaussée et, depuis sa fe-

M algré les nomsfamiliers desgrandes sur-faces aper-çues sur laroute, visiterle comté deSuffolk, sur la

côte Est de l’Angleterre, c’est aussivoyager dans le temps. Il y a d’abord lepremier train, aux allures de micheline,qui part de la gare de Liverpool Street àLondres. Puis le second, deux wagonsà peine, qu’on attrape à Ipswich. Enfin,les passagers comme le contrôleur par-lent un anglais affable, lui aussi d’unautre âge.Si Lowestoft n’a jamais développé letourisme en rapport avec Britten qui y

Le moulinoù Britten,ci­dessous en1946, écrira PeterGrimes, son pluscélèbre opéra.PHOTOS É DAHANGEORGE RODGERTIME LIFE PICTURESGETTY IMAGES

The Red House,la dernièredemeure ducompositeur,(ci­dessus)au volant,en juin 1964.PHOTOS ÉRIC DAHANLEBRECHT, RUE DESARCHIVES

Page 24: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013X • LE MAG CÉLÉBRATION

nêtre, Britten pouvait voir lamer du Nord et les bateaux des

pêcheurs qui allaient prendreune place considérable dans son œuvre.Est-ce le ciel gris, le fait que la ville etla plage aux couleurs délavées semblentégalement abandonnées? On croit en-tendre la Sinfonia di Requiem, à la mé-lancolie toute mahlérienne, créée enmars 1941 par le New York Philharmo-nic sous la baguette de John Barbirolli.Les biographes prétendent qu’hormisla cravache scolaire qui aurait déter-miné son orientation pacifiste, l’en-fance de Britten fut insouciante, mar-quée seulement par un talent précocepour la composition – il commence à5 ans ! – et le piano que lui a appris samère, secrétaire de la Lowestoft MusicalSociety. Malgré une pneumonie con-tractée à trois mois et qui lui laissera desséquelles cardiaques, le jeune Brittenexcelle également en sport et sera un fé-roce joueur de tennis et de croquet.Célébration du centenaire oblige, laBritten Pears Foundation, associant aunom du compositeur celui du ténor Pe-ter Pears qui partagea les quarante der-nières de sa vie, est très active: de NewYork à Pékin, en passant par São Pauloet Tel-Aviv, des dizaines de maisonsd’opéra vont monter du Britten. A Mos-cou, le musée Pouchkine consacreraune grande exposition au compositeurqui eut des liens très forts avec Richter,Rostropovitch et Chostakovitch, le dé-dicataire de The Prodigal Son, en 1968,qui dédiera en retour à Britten sa Sym-phonie n°14.

«Friday Afternoon» chantépar 100000 écoliers

L’industrie du disque n’est pas en reste:Decca publie un coffret commémoratifde 65 CD tandis qu’EMI Classics a déjàlivré un nouvel enregistrement du Rapeof Lucretia et les deux premiers de sixcoffrets thématiques à paraître jusqu’àl’automne. La liste des manifestationsen Angleterre est interminable, maisnul doute que l’intégrale des mélodiesdu cycle Friday Afternoon –composé en1935 par Britten pour Clive HouseSchool, l’école dirigée par son frère Ro-bert, et que plus de 100000 écoliers detout le pays chanteront le jour de sanaissance – fera événement.En attendant, c’est à Aldeburgh quecela se passe. La Britten Pears Founda-tion a cassé sa tirelire : 5 millions etdemi d’euros sur les plus de 7 consacrésaux célébrations du centenaire, ont étéinvestis dans la restauration de la RedHouse, dernière demeure du couple, etdans la construction d’un centre d’ar-chives adjacent, le plus complet dévoluà un compositeur. Partitions, livres,manuscrits, maquettes de décors etcostumes de productions d’opéra y sontdéjà conservés et mis à disposition desmusicologues et chercheurs. La RedHouse va devenir un musée où sera re-constitué le studio du compositeur etrecréée la cabane de pêcheur de PeterGrimes, son plus célèbre opéra. Hormisla piscine, désormais recouverte par lesol d’un pavillon, la propriété donnant

sur un golf et comprenant un court detennis n’a pas beaucoup changé depuis1957, année où Britten et Pears y trou-vèrent refuge. Avant cela, ils habitaientdans la Crag House, acquise par Brittenen 1947 et donnant d’un côté sur CrabbeStreet, du nom du poète ayant inspiréPeter Grimes, et de l’autre sur la plage oùse passe l’action de l’opéra qui y seradonné cette année pour la première fois,en plein air.

Dans la Crag House, Britten travaillaavec le romancier E.M. Forster au livretde Billy Budd d’après Melville, autre his-toire de héros vulnérable, injustementaccusé par une société toujoursprompte à condamner ceux qu’elle necomprend pas. Le lieu semble égale-ment intact depuis l’époque où, lasd’être observé par les passants, celui quiétait devenu une superstar mondiale,proposa à son amie Mary Potter qui ha-bitait la Red House d’échanger leurspropriétés. Sur cette même plage, oùBritten aimait se promener, pique-niquer et nager cinq fois par jour, sedresse toujours le Moot Hall, fleuron del’architecture Tudor qui servit d’hôtelde ville et où il reçut une décoration.

«Dévoué et un peu coquin»En fin d’après-midi, on prend le théchez Alan Britten, fils de Robert Britten,le frère aîné du compositeur. Il raconteque c’est suite au décès de son grand-père, en 1934, que son père et son oncleont quitté Lowestoft. Lui-même y est néen 1938 et n’a rencontré son oncle Ben-jamin qu’en 1944, à son retour desEtats-Unis où il s’était exilé avec PeterPears. «Je pensais que l’Europe était finie,il me semblait que le Nouveau Monde étaitsi neuf, si prêt à accueillir de nouvelleschoses», expliqua le compositeur en1959. A New York, il se liera d’amitiéavec des musiciens et artistes, commeCarson McCullers, Paul et Jane Bowles,Kurt Weill et Lotte Lenya, Golo Mann et

Salvador Dali, et composera son Con-certo pour violon. Mais avant son départ,il avait acquis, à la mort de sa mère, unmoulin réhabilité en maison. C’est làqu’il écrira Peter Grimes, le premier deses opéras à questionner – comme lapoésie de son ami Wystan HughAuden– l’amour, la morale, la politiqueet la place de l’homme dans la nature.«Ce moulin était une chose impensablepour l’époque, une bizarrerie incompré-

hensible», nousracontera, le len-demain, son ac-tuelle propriétairequi l’a transforméen bed & break-fast. «Benjamin,comme ses frères et

sœurs, avait reçu 3000 livres en héritageet tenait à investir dans du dur. Il a tou-jours aimé l’idée d’appartenir à une terre,et c’est pour cela qu’il était relativementmalheureux en Amérique, où il restait unétranger, poursuit Alan Britten. Avecmon oncle, je jouais aux cartes, au jeu dessept familles. Il était dévoué et un peu co-quin : il m’emmenait au pub boire descoups quand j’avais 6 ans, ce qui était illé-gal. Après, je suis allé à Cambridge et ilest devenu une célébrité. Mes camaradesme disaient: “Tu vas passer le week-endchez Benjamin Britten dans sa RedHouse? Tu te rends compte de ce que tudis ?” En fait, c’est l’entourage qui atransformé nos relations. Les mères ducoin venaient voir mon oncle : “Mon filsest si brillant vous devriez l’entendre.”Du coup, il est devenu un peu distantcomme toutes les célébrités qui souffrentd’être sollicitées en permanence.»On lui demande comment dans l’An-gleterre où l’homosexualité était passi-ble de prison jusqu’en 1967, le coupleBritten-Pears s’est imposé, de surcroîtdans un village de pêcheurs, et il ré-pond: «Ils étaient très discrets, au pointque, jusqu’à leur mort, je n’imaginais pasqu’ils puissent être amants. Ils ne faisaientpas tout un plat de leur homosexualitécomme les gens d’aujourd’hui. Du coup,personne n’en parlait. Beaucoup ont pré-tendu que mon oncle était attiré par lesjeunes garçons, mais je n’ai jamais eucette impression. Il aimait les enfantsparce qu’ils le voyaient comme quelqu’un

de normal et non comme une célébrité.»Selon Eric Crozier, librettiste d’AlbertHerring, Britten aurait été abusé dansson enfance, mais le comédien et réali-sateur David Hemmings, qui chanta à12 ans dans le Tour d’écrou, opéra évo-quant en filigrane la pédophilie, affirmeque le compositeur, malgré une évi-dente passion amoureuse pour lui, nepassa jamais à l’acte.

«J’ai fait de beaux bruits»Après sa majorité, Alan Britten a faitcarrière dans une compagnie pétrolière,fondé une famille et vécu dans onzepays. Mais il se souvient de la vie deBenjamin Britten à la Red House, où ilcomposa son War Requiem dont le pre-mier enregistrement avec Peter Pears etDietrich Fischer-Dieskau se vendit à300000 exemplaires l’année de sa sor-tie, et dont Chostakovitch déclara quec’était l’œuvre la plus importante duXXe siècle.«Après quelques longueurs dans la pis-cine, raconte Alan Britten, mon oncleprenait le petit-déjeuner vers 9 heures,puis montait travailler dans son studiojusqu’à 12h30. Pendant ce temps Heatherou Miss Hudson préparait le déjeuner: desfishcakes ou bien une viande avec deux lé-gumes, car il détestait les plats sophisti-qués. A table, il disait : “J’ai eu unebonne matinée, j’ai fait de beauxbruits.” Puis, après le déjeuner, une mar-che de deux heures, seul la plupart dutemps. Il revenait composer, jouait au ten-nis ou au croquet, puis on dînait vers20 heures, et à 22 heures, tout le mondedormait.»Le lendemain matin, on part sillonnerle pays, visiter les églises, dont la Alde-burgh Parrish, où Britten est enterré aucôté de Peter Pears, et celles de St Bart-tholomew et Blythburg: le festival, crééavec Pears et Eric Crozier, y prit sesquartiers avant que Britten n’investisseSnape Maltings, une ancienne malterieau bord de la rivière Alde, pour en faireune salle de concerts.Parmi les nombreux événements decette saison commémorative, des fes-tins inspirés de son opéra Albert Herringsont organisés dans la campagne. Lesautochtones pique-niquent sur une ta-ble en bois de plusieurs dizaines de mè-

A Aldeburgh, en1959 (à gauche).The Crag House,acquise parBritten en 1947,semble intactedepuis l’époqueoù, las d’êtreobservé par lespassants, celui quiétait devenu unesuperstarmondiale,proposa à sonamie Mary Potter,qui habitaitla Red House,d’échanger leurspropriétés.PHOTOS HANS WILDET ÉRIC DAHAN

Parmi les commémorations, des festinsinspirés de l’opéra Albert Herring sontorganisés. Les autochtones pique-niquentsur une table en bois. Certains offrent leurcidre, d’autres font rôtir un mouton.

LE MONDECRUEL

ET LYRIQUEDE BRITTEN

Page 25: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CÉLÉBRATION LE MAG • XI

doute stimulé la créativité de Britten. Maisil avait également une voix très particu-lière, inimitable et typique de son époque.Les chanteurs de ma génération, qui n’ontpas connu ni rencontré Britten et Pears,ont perdu quelque chose, mais égalementgagné une certaine distance avec cettemusique et la possibilité de porter unéclairage nouveau sur elle.»Bostridge n’est pas la seule vedette dufestival dirigé par Jonathan Reekie etdont la programmation artistique estconfiée depuis quelques années au pia-niste français Pierre Laurent Aimard.Pour cette 66e édition, ils ont invité lasoprano Sandrine Piau, le MonteverdiChoir de John Eliot Gardiner, le QuatuorMosaïques, le Tokyo Quartet et le pia-niste Christian Zacharias. De grandscompositeurs comme Oliver Knussenet Michael Gandolfi donneront égale-ment des masterclasses, rappelant àquel point l’auteur de Young Persons’sGuide To The Orchestra fut un pionnieren matière de pédagogie.

Initié au gamelan balinaisTous les ans, pas moins de 300 élèvesdes conservatoires anglais sont audi-tionnés afin d’être invités à se perfec-tionner à Aldeburgh, tandis qu’avec leBritten Pears Orchestra, des jeunes de8 à 18 ans font leurs premières armes demusiciens d’orchestre. Parmi les nou-veautés de cette édition, le festival offrel’occasion de visiter le pays de Brittenavec un casque audio pour guide, etd’entendre ses Church Parables, soitCurlew River, The Burning Fiery Furnaceet The Prodigal Son, dans les églises oùelles furent créées. De toutes ces Para-boles d’église, Curlew River, adaptée duconte médiéval japonais Sumidagawa deJuro Motomasa, et créée à Aldeburgh en1964, est sans doute la plus connue. Elleraconte l’histoire d’une femme dévoréede chagrin après la perte de son enfant.Depuis son séjour aux Etats-Unis, à lafin des années 30, Britten cultivait,comme Debussy avant lui, une passionpour la musique extrême-orientale etle gamelan balinais, auquel l’avait initiéle compositeur canadien Colin McPhee.Cet intérêt s’est amplifié avec la tour-née que Britten fit avec Pears en 1957,où en plus de visiter l’Indonésie, il dé-couvrit le théâtre nô japonais. Le re-

cours à des modes extra-européens ouanciens permettait, à la suite de De-bussy et Ravel, d’élargir le système to-nal à une époque où l’avant-gardeeuropéenne prétendait qu’il avait at-teint ses limites. Même des composi-teurs comme Boulez, qui, dans ses Le-çons de musique et Regards sur autrui, nementionne pas une seule fois le nom deBritten, sacrifièrent alors à une fascina-tion pour l’instrumentarium asiatique;et cela, du Marteau sans maître à Rituelin memoriam Bruno Maderna.S’ouvrant par une succession de cro-ches et triolets caractéristiques du théâ-tre japonais, Curlew River utilise desinstruments européens (orgue, cor,flûte, harpe et contrebasse) mais les faitsonner comme des koto et shakuhachi.Neuf ans plus tard, cette écriture conci-liant pointe sèche et enluminures se dé-ploiera dans le dernier chef-d’œuvrelyrique de Britten : Death in Venice.En 1953, suite à la croisade anti-homo-sexuels menée par le secrétaire d’EtatDavid Maxwell Fyfe, la police avait dé-barqué chez Britten et l’avait interrogéde façon humiliante. Peu avant sa mort,le 4 décembre 1976, la Chambre deslords lui conférait le titre de baron Brit-ten d’Aldeburgh. En mars 1977, une cé-rémonie nationale était organisée àl’abbaye de Westminster en présence dela reine Elizabeth.Avant de quitter Aldeburgh, on rend vi-site à Pat Nicholson qui rencontra Brit-ten en 1942 et chanta pour ses funé-railles. «Durant trente ans, je l’ai aidépour le chœur du festival ; c’était un chefmerveilleux, il nous hypnotisait, on faisaittout ce qu’il demandait. Il était très patientavec les amateurs, mais dur avec les pro-fessionnels, car ses standards étaient éle-vés. Au début, les gens d’ici se moquaientdes festivaliers venus de Londres avec leurprogramme sous le bras. Puis, tout Alde-burgh s’est mis à participer. Mes troisgarçons aimaient beaucoup Britten. Ils leconduisaient, l’aidaient et, en échange, ilsassistaient aux répétitions avec les plusgrands musiciens.»En reprenant le train de Saxmundhampour Londres, on se dit que Britten nementait pas quand il déclara: «Je pensequ’un artiste devrait faire partie de sacommunauté, travailler pour elle, avecelle, et être utilisé par elle.» •

matin, la mer miroite de reflets argent,évoquant The Sea, de Frank Bridge,l’œuvre qui scella la vocation de Brit-ten. Le compositeur suivit, jusqu’en1939, les conseils de ce maître avant delui dédier l’un de ses chefs-d’œuvre, àla fois dansant, pastoral, lyrique et mé-ditatif : Variations on a Theme of FrankBridge, op.10.On retrouve Ian Bostridge à Snape Mal-tings où la troupe de Canticles fait desraccords pour la captation vidéo duspectacle. Après avoir figuré au prin-temps dans une nouvelle intégrale del’opéra le Viol de Lucrèce et livré un belalbum de mélodies de Britten, le ténorest au générique d’un nouvel enregis-trement attendu du War Requiem quepubliera EMI Classics à l’automne. «Lesuccès de la musique de Britten vient dufait qu’il avait un très grand métier decompositeur, pianiste et chef. Mais égale-ment du fait qu’il a continué à composerde la musique tonale à une époque oùl’avant-garde, en Allemagne et en France,prétendait que l’on n’avait plus le droit dele faire. Sa musique, du coup, a touchébeaucoup d’auditeurs par sa capacité àexprimer une gamme très riche d’émo-tions. Britten est un compositeur de mélo-dies fantastiques, modernes, mais acces-sibles, sans pour autant sombrer dans lafacilité. Il était très proche des chanteurs,ce qui en fait un compositeur remarquablepour la voix humaine», explique celui quifut un mémorable Quint dans le Tourd’écrou au festival d’Aix et un Aschen-bach pas moins saisissant dans Death inVenice à la Monnaie de Bruxelles.A Aldeburgh, où il a été révélé, grâce auprogramme d’insertion professionnelledes jeunes créé par Britten et dont bé-néficièrent également Thomas Adès etSimon Keenlyside, Bostridge va animeravec le pianiste Julius Drake une mas-terclass pour chanteurs: «Pour bien in-terpréter Britten, il faut une capacité às’investir dans le texte. Ne pas penser qu’àsa voix, garder à l’esprit que toute musi-que est théâtre.» Dans ce décor bucoli-que où Britten et Pears ont été tant defois photographiés, difficile de ne pasdemander à Bostridge comment on faitpour succéder au ténor pour qui Brittencomposa presque toutes ses œuvres vo-cales. Il répond que «Pears était un ar-tiste plein d’idées originales, ce qui a sans

tres, qui semble échappéedes Canterbury Tales deChaucer. Certains offrentleur cidre, d’autres font rôtirun mouton: l’esprit commu-nautaire d’Aldeburgh tantvanté par Britten est intact.Si le festival fondé en 1948 nedure que trois semaines enjuin, il y a toute l’année des

concerts à Aldeburgh. En août, les Al-deburgh Proms permettront d’entendremusique ancienne, baroque, classique,jazz et world. En novembre, on donneraà Snape Maltings, où il fut créé en 1973,Death in Venice, dans la production si-gnée Yoshi Oïda, que les Français ont puvoir à l’Opéra de Lyon en 2007.

Avec Menuhin auprès dessurvivants de Bergen­BelsenDurant le week-end de notre visite, onprésente un spectacle de Neil Bartlett,transfuge du Théâtre de Complicité,basé sur les Canticles de Britten. La pro-duction tire un grand parti poétique demouvements dansés, projection defilms, rares accessoires et ombres por-tées, et c’est Ian Bostridge, le plus célè-bre interprète contemporain de Brittenqui chante ces poèmes d’inspirationsdiverses, dont l’un raconte l’épisode bi-blique du «sacrifice d’Isaac».Les presque 900 places de cette salle àl’acoustique remarquable, inauguréedeux fois par la reine d’Angleterre –en1967 puis, suite à un incendie, en1970–, sont comme pour tous les évé-nements programmés cette année à Al-deburgh, prises d’assaut. Beaucoup demusiciens célèbres se sont produits icià l’invitation de Britten: Richter, avecqui il joua du piano à quatre mains, Ros-tropovitch, pour qui il composa notam-ment ses Suites pour violoncelle seul et saSonate pour violoncelle, et enfin YehudiMenuhin. Au lendemain de la SecondeGuerre mondiale, le violoniste emmenaBritten donner un concert pour les sur-vivants du camp nazi de Bergen-Belsenqui laissera ce dernier profondémentchoqué, au point de refuser d’en parlerà Pears.Après le spectacle, certains dînent surplace, d’autres vont admirer les sculp-tures de Henry Moore et BarbaraHepworth dans le parc. Le lendemain

Aldeburgh

Lowesto

Merdu

Nord

200 km

ROYAUME-UNI

Londres

Britten et soncompagnon PeterPears, en 1969,devant SnapeMaltings.L’anciennemalterietransformée ensalle de concertspar lecompositeuraccueilleranombre defestivités de soncentenaire dontDeath in Venice,en novembre.PHOTOS HANS WILDET ÉRIC DAHAN

Page 26: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013XII • LE MAG COMPRENDRE

d’un mauvais œil le célibat, notammentquand il est féminin, et limite les possibilitésde rencontres entre les jeunes. Ces derniersperçoivent très douloureusement les restric-tions des espaces de liberté à l’intérieur dupays, d’autant que se développent des espa-ces d’expression a priori sans limite dans lecyberespace. De même, alors que l’ouverturesur l’Occident n’est plus corsetée par le con-trôle interne de l’information, les possibilitésde voyager ou de s’expatrier sont restreintespar les politiques migratoires frileuses desEtats européens.Le printemps arabe se traduit aussi par uneplus grande diffusion de pratiques alcooli-ques et même le développement de l’usagede stupéfiants. Ces dynamiques coïncident

Par JEAN­YVES MOISSERONdossier coordonné pour le Collègeinternational des sciences du territoire (Cist)

Deux ans aprèsla révolutionde jasmin, desgéographes du Cistse penchent sur sesimpacts électoraux,territoriaux… dansun pays où lajeunesse peine àtrouver sa place.

L’essor ou la révolte

C ette carte donne la propor-tion des jeunes (20-34 ans)dans la population locale et

leur évolution en nombre en-tre 1994 et 2010. Une forte pré-sence ne signifie pas que les jeunesaient nécessairement du travail nique le territoire soit attractif, carla jeunesse d’une population peutrésulter d’une installation anté-rieure de personnes qui ont eu desenfants arrivant à présent sur lemarché du travail. Mais cela en ditbeaucoup sur le potentiel des ter-ritoires et sur l’enjeu politique queconstituent ces populations.Comme la plupart des pays arabes,la Tunisie termine sa transitiondémographique. Elle entre danscette période clé où les jeunes ar-rivent nombreux sur le marché dutravail, avec encore peu de per-sonnes âgées à charge et peu d’en-fants ; ils sont dès lors ouverts audéveloppement ou prêts pour larévolte s’ils ne trouvent pas lesemplois nécessaires. Un grandnombre de pays en développe-ment ont accéléré leur essor ou aucontraire ont connu des crises po-litiques à la fin de leur transitiondémographique.L’étincelle du printemps tunisienl’illustre : Sidi Bouzid est localisédans le centre, pauvre et délaissé,et Mohamed Bouazizi, déclen-cheur de la «révolution de jas-min», était un jeune de 26 anssans emploi stable.La carte montre trois grands en-sembles. Le Sud, surtout la partieintérieure (Tataouine), laissé pourcompte et resté traditionnel avecnotamment un nombre élevéd’enfants par famille. Ensuite, lecentre, dont le profil est assez pro-che de celui du sud à l’exception

du gouvernorat de Gafsa, du faitde sa tradition minière. Puis lecentre-nord, sous l’influence deTunis, et dont les jeunes (surtoutles hommes) sont depuis long-temps allés travailler sur le littoral,d’où une proportion élevée depersonnes âgées dans les gouver-norats de Jendouba, Beja, Silianaet le Kef. Et enfin, «la Tunisieutile», comme on l’appelait avantla révolution, constituée de larégion urbaine de Tunis (la villecentre et les trois départementssuburbains : Ariana, Manouba etBen Arous), et des gouvernorats deSousse, Monastir et Sfax.Dans le nord, la carte montre aussiclairement l’opposition entre lelittoral (forte croissance et repré-sentation des jeunes dans la popu-lation) et l’intérieur (l’inverse).Dans le sud, la jeunesse des gou-vernorats intérieurs ne doit pastromper : le marché local du tra-vail n’est pas suffisant, les risquesd’explosion sont grands.Le projet de budget de l’Etat tuni-sien pour 2011 avait prévu d’al-louer 80% des moyens aux gou-vernorats littoraux ; le premiergouvernement révolutionnaire ad’emblée remis en cause ces pers-pectives. Reste à savoir si cettenouvelle vision du développementterritorial s’est traduite dans lesfaits.

PIERRE BECKOUCHEet HUGUES PECOUT

Bizerte

Gabes

Gafsa

Jendouba

Kairouan

KasserineMahdia

La Manouba

Medenine

Nabeul

SfaxSidi Bouzid

Sousse

Tozeur

Tunis

Monastir

ZaghouanSiliana

Tataouine

Kebili

Ariana

le Kef

Beja

Ben Arous

50 km

Ces zones liorales airentles jeunes. Ils y sont plusnombreux que la moyennedu pays, et leur nombrene cesse d'y croître.

Ces régions posent problème:les jeunes qui sont là y restent. Tout en étant moins nombreux, leur proportion y esten augmentation.

Les jeunes sont moins nombreux dans cee région mais, surtout, ils la quient: c'est une formede désertification.

Là, les jeunes sont nombreux, mais ils partent aussi en grand nombre.

Pas de données en 1994

Sour

ce :

Inst

itut n

atio

nal t

unis

ien

de la

sta

tistiq

ue, 2

011

(ESP

ON

-ITA

N p

roje

ct)

Mer

Méditerranée

LES JEUNES TUNISIENSpar département, en 2010

Sicile

Pierre Beckouche (université Paris I), Hugues Pécout (GIS CIST

Avoir 20 ans en

L e printemps arabe a mis lajeunesse au cœur desprocessus de transforma-tions sociales qui traver-sent la Tunisie. Ce n’estpas en soi une surprise,car historiquement lesjeunes mènent les révolu-

tions, même s’ils n’en bénéficient pas néces-sairement in fine. Mais comme l’indiquentles cartes, la Tunisie est dans une phase dé-mographique particulière: de très nombreuxjeunes entrent sur le marché du travail. Cela

peut constituer une opportunité pour le dé-veloppement ou, au contraire, un problèmequand l’absence de perspectives suscite uneforte frustration.

Chômeurs diplômésAvoir 20 ans en Tunisie n’est pas très simple.Les difficultés s’accumulent: trouver un tra-vail décent relève encore du jeu des relationspersonnelles. Non seulement le diplôme n’estplus un passeport pour l’emploi, mais il estpresque un obstacle car, paradoxalement, lechômage touche plus les diplômés que lesnon-diplômés, et ceci est encore plus vraipour les jeunes femmes. Sans travail, sans re-venu, l’âge moyen au mariage recule, tandisqu’un certain conservatisme voit toujours

«Fronts et frontières des sciencesdu Territoire», le second colloqueinternational du Cist, se tiendrales 27 et 28 mars 2014, à Paris.http://cist2014.sciencesconf.org

Page 27: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 COMPRENDRE LE MAG • XIII

avec des transformations profondes de la so-ciété tunisienne, qui s’expriment nettementdans leurs dimensions régionales. La révolu-tion tunisienne laisse s’exprimer des forcessociales bien réelles, mais qui étaient restéescontenues par la dictature. Le mythe d’uneTunisie moderne, européenne, quasi laïquea vécu. L’islam, comme matrice civilisation-nelle ou identitaire, est bien réel. Mais la dé-finition même de la charia donne lieu à desinterprétations contradictoires infinimentplus nuancées et subtiles que pourrait le lais-ser croire notre lecture parfois caricaturalede la loi dite «islamique».

Clivages profondsEn même temps, le parti islamiste Ennahdasemble en perte de vitesse dans un processusde rééquilibrage des forces en faveur des par-tis de gauche ou progressistes. Quels intellec-tuels, quels artistes, quelles forces vives a-t-il réussi à rallier ? La condamnation de laviolence politique et l’acceptation –plus oumoins honnête et sincère– des règles du jeudémocratique, où doivent s’affronter les con-flits d’idées ou d’intérêts, semblent en passed’être gagnées par la vigueur même de la so-ciété civile et l’héritage d’une tradition répu-blicaine ancrée dans la réalité d’une classemoyenne dominante.Le résultat est donc à la fois contradictoire etnuancé. La Tunisie construit un avenir dé-mocratique malgré des clivages profonds.Dans une large mesure, le résultat du proces-sus dépendra de la capacité ou non des pro-chains gouvernements, quels qu’ils soient,à intégrer une jeunesse qui peine toujours àtrouver sa place. •

L’enjeu social dans les urnes

L e 23 octobre 2011, la Tunisie a connu ses pre-mières législatives postrévolutionnaires quiont permis l’établissement d’une Assemblée

constituante. C’est à l’aune de ces résultats quel’on pourra mieux comprendre les évolutions dela cartographie électorale, après les élections an-noncées pour la fin 2013, maintenant qu’un accordsur la Constitution semble acquis. La participationavait été de l’ordre de 50%, score honorable–même s’il variait entre 39% à Tataouine, au sud,et 63% à Ariana, du district de Tunis – dans unpays caractérisé par des vraies fausses électionssous l’ancien régime. Il révèle les zones de frac-tures: une répartition inégalitaire entre le littoralet l’intérieur et une opposition entre les zones ur-baines et rurales. La géographie du vote a été mar-quée par la victoire d’Ennahda, avec des nuancesrégionales qui font apparaître une opposition entreun centre –les zones métropolitaines côtières– etdes périphéries, en particulier le centre-ouest,berceau de la révolution. Les partis au cœur du jeupolitique, islamistes ou «modernistes», ont étéplébiscités dans les grandes villes côtières.Mais, depuis ces élections, le rapport de force ausein de l’Assemblée ne reflète plus vraiment la réa-lité. D’abord parce certains partis, qui ont vu lejour à la faveur de la confusion, ont quasiment dis-paru. Mais, surtout, il révèle la grande difficultédes islamistes à répondre à la question sociale. Leszones désindustrialisées et délaissées du centre necroient que faiblement au projet social d’Ennahda.Ce sont plutôt les partis de gauche qui capitalisentsur le mécontentement. Il y a là une grande diffé-rence avec l’emprise des partis islamistes enEgypte ou ailleurs, notamment en Iran, où les pro-jets politiques islamistes s’articulent avec un projetsocial en faveur des plus défavorisés. Cela conduiraprobablement à une baisse de l’influence d’Enna-hda, comme l’anticipent déjà plusieurs sondagesd’opinion.

MAHER BEN REBAH

Des visions intérieures et littoralesL a révolution tunisienne étant

partie des gouvernorats – dé-partements– les moins déve-

loppés du centre-ouest (Sidi-Bou-zid, Kasserine, Gafsa…), l’une despremières tâches du nouveau gou-vernement a été de commander undiagnostic sans complaisance desinégalités économiques et socialesà l’échelon territorial le plus fin pos-sible : celui des 264 délégations,équivalents des arrondissements oudes cantons français.Selon des données mises en ligne en2011-2012 par le ministère tunisiendu Développement et de la Coopéra-tion internationale, un indicateurrégional signale le niveau de déve-loppement de chaque délégation.L’échelle allant de 0 pour la déléga-tion la moins développée (Hassi Fe-rid, entre Kasserine et Sidi Bouzid)à 1 pour la plus développée (Bab el-Bahr, au cœur de Tunis).Les critères de développementprennent en compte l’éducation, lacommunication, l’emploi, la ri-chesse, la fécondité, la délinquanceet la parité. Cet indicateur de bien-être est inspiré de celui du démo-graphe américain Robert Prescott-Allen, élaboré en 2001. Il recoupe

des critères sociaux, mais aussienvironnementaux (diversité etqualité des terres, des espèces vi-vantes, disponibilité en eau, pollu-tion atmosphérique, consommationd’énergie).La carte met tout d’abord en valeurla profondeur des inégalités régio-nales opposant le littoral et l’inté-rieur. Mais elle montre aussi desphénomènes plus inattendus, telsque l’existence de forts contrastes àl’intérieur de l’agglomération deTunis et surtout, inversement,l’existence de pics de développe-ment non négligeable dans les zonesintérieures du pays. Un héritagecontradictoire de la période anté-rieure à la révolution. D’un côté, letournant libéral du pays à partir desannées 90 a favorisé la concentra-tion des investissements sur la côte,en particulier autour des grandesplateformes portuaires d’exporta-tion : Bizerte, Tunis, Sousse, Sfax,mais aussi dans les zones touristi-ques desservies par des aéroportsinternationaux (Djerba, Monastir,Nabeul). De l’autre, le pouvoir amaintenu un contrôle étroit sur leterritoire à travers le maillage des24 gouvernorats qui ont vu leurs

chefs-lieux concentrer les équipe-ments publics (hôpitaux, lycées…).L’écart de développement est trèsvisible entre les chefs-lieux de délé-gations de l’intérieur (Kasserine, Si-di-Bouzid, Béja, Kairouan…) et lesespaces ruraux environnants.La réforme régionale qui doit ac-compagner la nouvelle Constitutionest donc confrontée à des dilemmesterritoriaux particulièrement re-doutables.Faut-il remplacer les vingt-quatregouvernorats par cinq ou six ré-gions, au risque de détruire le ré-seau des vingt-quatre chefs-lieuxqui assurent le maintien de servicespublics répartis sur le territoire ?Faut-il définir des régions pure-ment littorales et purement inté-rieures en prévoyant un système deredistribution entre les deux ? Oufaut-il plutôt rassembler dans unemême région des espaces littorauxet intérieurs comme le propose leLivre blanc du ministère du Déve-loppement ? Autant de questionsredoutables qui ne sont pas encoretranchées par l’Assemblée consti-tuante.

FRANCE GUÉRIN-PACEet CLAUDE GRASLAND

0,50

100 000 h.

Maximum

Minimum

0,40

0,30

0,20

0,10

Indicateur de développementrégional en 2011

LES INÉGALITÉS DE DÉVELOPPEMENTEN TUNISIE ET LES DILEMMESDE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Populationdes délégationsen 2010

25 000 h.

SFAX

SOUSSE MONAST R

NABEUL

TUNIS

Sidi Bouzid

GAFSA

KASSERINE

GABES

Tozeur

KAIROUAN

BIZERTE

El Kef

Jendouba

Si iana

Béja

Dj rba

Mede ne

Sour

ce :

min

istè

re tu

nisi

en d

u D

ével

oppe

men

t et

de la

Coo

péra

tion

inte

rnat

iona

le (2

012)

, h

p://

ww

wm

dcig

ov.tn

/

Conception et réalisation GIS CIST hp //wwwgis cist frF Guérin Pace (Ined) C Grasland, A Sauques, M Baron (université Paris Diderot), A Bennasr (université de Sfax), S de Ruffray (université de Rouen)

59,3 %

67,8 %

50,3 %

42,4 %

34 %

25,6 %

17,1 %

8,7 %

0,2 %Absence d'information

Vote exprimé

LE VOTE D’ENNAHDApar délégations

50 km

Car

te d

e M

aher

Ben

Reb

ah(U

MR

U55

7, In

serm

) So

urce

: G

ana

A e

t al.

(201

2), G

éogr

aphi

e él

ecto

rale

et d

ispa

rités

soc

io-te

rrito

riale

s, L

espa

ce P

oliti

que

n°18

201

2

Tunisie

Page 28: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013XIV • LE MAG LIRE

Week-end

I l est propice de lire l’essai de RaphaëlLiogier sur «le mythe de l’islamisation»au moment où le meurtre sauvage dusoldat britannique, comme l’agression

du militaire français, ont réveillé les peurs del’islamisme en Europe. Sous-titré «essai surune obsession collective», ce pamphlet estbrillant, incisif, souvent convaincant surcette phobie de l’islam qui traverse le VieuxContinent, et particulièrement la France.Professeur à l’Institut d’études politiquesd’Aix-en-Provence, Liogier, qui y dirigel’Observatoire du religieux, aime et pratiqueavec talent la polémique. Sa thèse: «Il règneen Europe une atmosphère paranoïde et nauséa-bonde envers l’islamisation.» Le professeurbretteur pourfend avec entrain Caroline Fou-rest, Claude Guéant, Jean Raspail, Riposte laï-que, Michèle Tribalat, Oriana Fallaci, IvanRioufol ou Eric Zemmour. Il dénonce aussi lesthèses conspirationnistes exposées et popula-risées par l’écrivaine britannique Bat Ye’or.Dans son best-seller Eurabia, l’axe euro-arabe,

elle allègue que la France, achetée à coups depétrodollars, sert de cheval de Troie à la con-quête par l’islam de l’Europe qu’elle «entraî-nera dans la dhimmitude» (de dhimmi, statutde sujétion enterres d’islamdes non-mu-sulmans). Desécrits qui ontinfluencé letueur norvégienAnders BehringBreivik, maisaussi de nom-breux intellec-tuels anglo-saxons.Liogier dégonfle les obsessions de ces théori-ciens de l’islamophobie. Non, il n’y a pasd’invasion par les musulmans d’Europe, toutcomme il n’y a pas de surnatalité de ces com-munautés si leur taux de fécondité est com-paré à ceux de populations de conditions so-ciales similaires. Il attaque aussi le lien

systématique entre islam et islamisme etl’amalgame entre islamisme et terrorisme.«Le musulman serait ainsi solidaire de tous sesfrères en religion sur la surface de la Terre»,

écrit le profes-seur. Selon Lio-gier, qui se ha-sarde souventdans la psycha-nalyse, «lesmusulmans sontotages du senti-ment d’impuis-sance, de lablessure narcis-

sique du Vieux Continent, présumés coupablesd’un déclin irréversible».Mais, à trop vouloir prouver, Liogier, qui re-connaît avec humour jouer à «l’idiot utile»,comme ses ennemis l’en accusent, parfoiss’égare. Sa défense de Tariq Ramadan et deses idées sur la lapidation est rhétorique. Leport du voile a-t-il vraiment «des aspects hy-

permodernes»? L’islamisme est-il «un corpsagonisant» que «l’angoisse de l’islamisationmaintient en vie»? Manger halal est-il com-parable à manger bio ? Il reste que cet essaistimule autant qu’il dérange et interroge surle rapport de nos sociétés autrefois chrétien-nes à cette religion active et dynamique.Liogier a raison de condamner les discrimi-nations et amalgames dont sont victimes lesmusulmans en Europe, mais il demeure quel’islam doit apprendre à trouver sa place dansun continent laïc et sécularisé, comme lesautres religions ont dû et su le faire. •

république décentralisée. Unmodèle à la française», qui luiconvient.Reste que l’application estdifficile. Le projet de loi, pré-senté en une pièce au Conseildes ministres, est discuté auParlement coupé en trois.Passées les premières au Sé-nat, les métropoles revendi-quent elles aussi un rôle actifdans le développement éco-nomique. Malvy admet que«l’une des difficultés à résou-dre sera le partage des respon-sabilités». Reste les ressour-ces. Elles seront débattuesdans la loi de finances 2014,à l’automne, quand viendraaussi le volet régions de laréforme de la décentralisa-tion. Le moment de véritésera, comme toujours, ce-lui-là.

SIBYLLE VINCENDON

LA FRANCE DÉCOINCÉEDevançant la réforme, le président de Midi-Pyrénées etun économiste s’emparent de la décentralisation.

P our la première foisdans l’histoire de ladécentralisation, une

réforme intervient en pé-riode de vaches maigres.L’Etat n’a plus de carottes àdistribuer pour encourager àla mutualisation et à la coo-pération, tout juste le retourde la clause de compétencegénérale, que Sarkozy leuravait enlevée. Mais, vu la pé-nurie qui s’annonce, les col-lectivités savent qu’elles nepourront guère s’en servir.Fini de s’occuper de tout, ilva falloir affirmer plus nette-ment encore la spécialisationde chaque étage.Dans ce contexte, MartinMalvy, président socialistede Midi-Pyrénées, prononceun véritable plaidoyer pourune région clairement chefde file du développementéconomique. Dans un livrede dialogue avec l’écono-miste libéral Nicolas Bouzou,il rappelle que ces institu-tions font déjà le maximumavec le minimum, à savoirune autonomie fiscale nulle.Leur donner de vrais outilsde pilotage –et même la ges-tion de Pôle Emploi– est ca-pital aux yeux de Malvy. Lafeuille de route fixée au gou-vernement par François Hol-lande pour réformer la dé-centralisation lui va. «Je n’ai,comme président de région,pas un mot à changer.» Le«nouveau cap» pointé par lechef de l’Etat «est celui d’uneLors des états généraux de la démocratie territoriale au Sénat, en octobre 2012. PHOTO ALBERT FACELLY

POUR DÉCOINCERLA FRANCE,DÉCENTRALISONS!de MARTIN MALVYet NICOLAS BOUZOUEditions Privat. 95pp., 6,90€.

LE MYTHE DEL’ISLAMISATION, ESSAISUR UNE OBSESSIONCOLLECTIVEde RAPHAËL LIOGIERSeuil, 212pp., 16€.

Islam: toute la gammedes amalgames

Par FRANÇOIS SERGENT

LA CITÉ DES LIVRES

Page 29: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 LIRE LE MAG • XV

ÉTÉ 1944SUR LE FRONT DELA LIBÉRATION

Les chars de la 2e DB arrivant dans lesfaubourgs de la capitale. Les combatsde rue, la résistance de la préfecture depolice, les premiers drapeaux tricoloreshissés sur les bâtiments, les ponts mi-nés, les hurlements du führer et sonapocryphe «Paris brûle-t-il ?» DeGaulle descendant les Champs-Elyséesau milieu d’une foule en liesse. «Parismeurtri, Paris outragé, Paris brisé… MaisParis libéré…» Les scènes et les anecdo-tes concernant la libération de la capi-tale durant l’été 1944 se comptent parcentaines, entretenues par le film-fleuve réalisé par René Clémenten 1966. Un livre d’historien vient ré-tablir la vérité, racontant au passagetoute la complexité et les enjeux cachésde cette bataille épique qui fut bienplus qu’un simple épisode victorieuxde la fin de la Seconde Guerre mon-diale.Car la bataille de Paris fut avant tout unsymbole. Sur le plan militaire, l’enjeuétait quasi anecdotique, comme en té-moignent les faibles forces engagées :côté alliés, moins de 10% des troupesdébarquées; côté allemand, une grossedivision mal armée, privée de ses chefshistoriques (compromis dans le putschraté contre Hitler). Le bilan fut d’ail-leurs minime : près de 3 000 morts.En revanche, dans l’ombre, que d’en-jeux! Tension entre de Gaulle et les al-liés, rivalités entre forces françaises,méfiance vis-à-vis des communistes aubord de l’insurrection, débats sur l’uti-lisation de la division du général Leclerc–préalablement «blanchie» car, selonles critères raciaux américains, il n’étaitpas question de confier une divisionblindée, arme technique par excellence,à des soldats de couleur… Exit donc lestirailleurs sénégalais! Et, in fine, l’arri-vée au pouvoir des gaullistes, avec l’avald’Eisenhower, deus ex machina decette pièce à grand budget.

FABRICE DROUZY

LA LIBÉRATIONDE PARISde JEAN­FRANÇOISMURACCIOLETallandier, 296 pp., 20,90 €.

FRANÇOISRIVIÈRENé en 1949, àSaintes, FrançoisRivière n’a pasfréquentél’université.Il aborde lacritique dansles Nouvelleslittérairesen 1973. Il publie,en 1977, sonpremier roman,Fabriques, dansla collection«Fiction & Cie»du Seuil.Scénariste debandesdessinées, il estl’auteur de plusde 60 albums àce jour. En 1981,il fait paraîtreAgatha Christie,duchesse de lamort (Seuil).Suivront desbiographiesconsacrées àEnid Blyton,James MatthewBarrie, FrédéricDard, PatriciaHighsmith.Dernier roman,le Mariage deKipling (Laffont,2011). Vient deparaître à laTable ronde,avec desillustrationsde Floc’h, Villamauresque,une fictionautour de la viede SomersetMaugham.

Tous les samedisdans LeMag,l’actualité vuepar un écrivain,un artiste…La semaineprochaine:Didier Decoin.

LA SEMAINE DE… FRANÇOIS RIVIÈRE

SAMEDI PEIGNÉ EN ARRIÈREJe quitte Paris pour Royan comme tous les mois et demià peu près. Dans le TGV, une voix douce annonce la pré-sence d’un défibrillateur cardiaque à bord du convoi.Moi, ce qui me fait mal au cœur, c’est que plus personne(ou presque) ne lit plus dans le train. Je suis plongé dansle nouveau roman d’Alan Hollinghurst, l’auteur troprare de The Swimming-Pool Library (1988). Je débarqueencore hanté par le souvenir du portrait du poète RupertBrooke au profil sublime, accroché au mur du vestibule,à Lamb House, la maison de Henry James, à Rye. «Alors,en vacances?» me crie la voisine au caniche blanc. Oui,si l’on veut. Même pas le temps d’apercevoir l’océanavec les courses urgentes à faire et le coiffeur qui mepeigne en arrière, ce qui n’était plus arrivé depuisdix ans. Mais tout va bien. Le ciel est du bleu intense quevénérait Gustave Courbet, lequel le comparait à celuide la Grèce.

DIMANCHE GOD SAVE MY QUEENEn juin 1953, la jeune reine Elizabeth d’Angleterre étaitcouronnée. Enfant, je feuilletais longuement l’album-souvenir à couverture rouge et or publié par Paris Match.Pour moi, cette reine était comme un personnage deconte de fées. Son pays devait être un royaume en-chanté. Ce que je découvrais de Londres, en couleurset sur papier glacé, en témoignait. A l’intérieur, Buckin-gham Palace devait ressembler au palais de Dame Tar-tine. Longtemps après, je suis toujours aussi infatuéd’elle. J’admire son flegme et son humour digne de Je-rome K. Jerome. Je me suis laissé dire qu’un jour, lorsd’une visite rituelle en province, le portable d’une damequ’elle honorait de sa conversation s’est mis à sonnerde manière irrespectueuse. Alors, la reine a dit: «Décro-chez, c’est peut-être quelqu’un d’important.» Au journaltélé régional: deux hommes à l’air sérieux, la quaran-taine, annoncent qu’ils vont se marier en septembredans un petit village de Charente. La chose amusante,et qui devrait bien agacer cette pauvre Madame Boutin,c’est que l’un deux est le maire du patelin !

LUNDI LE CHAT GRIS SOURISLes chats dorment au soleil. Enfin, quelques-uns deceux qui pullulent, presque sauvages, dans les jardinsderrière chez moi. Une voisine me dit qu’ils sont la ter-reur des oiseaux. Dame ! Le petit couleur marmeladegrimpe comme pas deux à l’acacia où nichent les tour-terelles. Et le gris souris (un comble!), sûrement le plusjoli de la bande, a des yeux verts qui me feraient trèspeur si j’étais un moineau. La dernière fois que nos re-gards se sont croisés, c’était encore un chaton. S’il a dela mémoire et songe que depuis ce jour-là bien du tempss’est écoulé, il doit se demander aujourd’hui pourquoije ne suis pas vieux et courbé sur une canne. Les yeuxdes chats sont impitoyables, cruels comme leurs jeuxavec leurs pauvres proies. N. leur préfère les chiens etrêve d’en avoir, «grands et fidèles». J’allais dire: commelui. Pendant des lustres, aucun dictionnaire français n’asu donner de traduction de l’expression, très usitée cheznos amis anglo-saxons: french kiss. On l’avait sur le boutde la langue mais ça ne venait pas… Dans sa plus récenteédition, le Petit Robert propose piteusement «galoche».Un moment de honte est vite passé.

MARDI PAUVRE JULES VERNEIl y a quelques jours à Marseille, François Hollande ainauguré un porte-conteneurs – le plus grand dumonde, dit-on– baptisé Jules-Verne. On aura vraimentfait tous les affronts à l’auteur du Tour du monde en80 jours, davantage célébré de l’autre côté de l’Atlan-tique où Ray Bradbury le comparait à Melville. PauvreJules! Modeste compensation: l’un des bateaux qui, de-puis le port de Royan, effectue un circuit jusqu’au phare

de Cordouan, est baptisé Jules Verne III (les deux pre-miers auraient-ils fait naufrage?). Un gentil hommageà celui qui fréquentait la station balnéaire, affirmant:«Je suis fou d’Royan!» N. partage mon sentiment: ondonne facilement des noms de généraux ou de notablespeu intéressants à de larges et belles avenues, reléguantles écrivains d’importance aux rues sombres, voire auximpasses les plus sinistres. Songez à Baudelaire, sansdoute le plus mal loti (avec Pierre !).

MERCREDI LA MER AÈREYourcenar le dit dans ses entretiens avec le cher, le re-gretté Matthieu Galey : «Et puis, la mer aère, tout demême. On a l’impression d’être sur une frontière, entrel’univers et le monde humain.» H.G. Wells, dans son ro-man Miss Waters, imaginait qu’une sirène était venues’échouer sur les côtes anglaises lors des élections géné-rales. Du coup, un jeune candidat à la Chambre descommunes y perdait son baratin, devenu éperdumentamoureux de la jolie créature aquatique. Je me demandesi les jeunes loups qui hantent aujourd’hui les rangs despartis politiques français seraient sensibles au charmed’une sirène ? Tout dépend de la nature de ladite…

JEUDI HERGÉ, MINE D’ORCe week-end a eu lieu une énième vente aux enchèresd’originaux d’Hergé. Surenchère sur un génie sans pa-reil, appliqué longtemps à rendre irrésistible une formede narration jusqu’alors assez brouillonne, même si depurs talents la pratiquaient depuis des décennies. MaisHergé a donné sa vie en échange d’une œuvre dont lesmérites n’ont pas tardé à être reconnus justement parcequ’il s’ingéniait à rendre son travail facile à reconnaître.Certains imbéciles ont peut-être vu de la facilité là oùil y avait cette vision du monde de l’enfant qu’il étaitresté en dépit des tracas du monde. Nul ne doute plusde la valeur artistique d’Hergé, mais c’est semble-t-ilsous le manteau des commissaires-priseurs que s’évaluela cote de ses dessins, à l’encre de Chine, comme de trèsrares gouaches atteignant des sommes astronomiques,pour ne rien dire de ses planches crayonnées à la minede plomb, aujourd’hui d’or. Je pense qu’il en serait da-vantage agacé que flatté lui qui, délaissant un tempsl’incessant labeur de l’auteur de petits Mickey, s’étaitmis à la peinture abstraite. Je me suis laissé dire quel’unique toile proposée à la vente sur la trentaine réali-sées par H. de Van Lint, dernier maître du groupe Cobra,n’avait jusqu’ici tenté aucun spéculateur.

VENDREDI DÉMONIAQUE ARTISANLe Daily Mail m’apprend le nom du spécialiste des effetsspéciaux dont le savoir-faire a fait tourner à 360 degrésla tête de Linda Blair dans l’Exorciste. Il s’agit de MarcelVercouters, natif de Detroit, décorateur et expert en ex-plosifs, arrivé à Hollywood en 1954. La fausse Linda doità ce magicien son caractère expressif, tellement trou-blant que, lors du tournage, l’actrice ne pouvait suppor-ter la vue de ce double, né dans l’atelier du démoniaqueartisan. J’achève la relecture du premier roman d’AlanHollinghurst, cette Piscine-Bibliothèque dont son nouveléditeur français proposera l’an prochain dans une tra-duction nouvelle – enfin ! L’un des passages les plusémouvants du roman est celui où est évoquée la figure,camp à l’extrême, de Ronald Firbank (1886-1926). Ducoup, je relis la version Gallimard de Mon piaffeur noir,parue en 1938, conte exotique plutôt olé olé dans lequels’épanouit la fascination de l’écrivain pour les peauxnoires. Je m’arrache à la lecture et file vers la plage.Longue promenade sous un ciel serein. A droite, les va-guelettes du flux paisible, à gauche le défilé des villas.Entre deux majestueuses survivantes fin de siècle desbombardements alliés de 1945, un modèle 1950 rappe-lant furieusement le domicile de Spirou et Fantasio.•

Des jeunes loups et des sirènes

NC

OLA

SPE

RGE

Page 30: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013XVI • LE MAG LIRE

LE DÉCLIN: LA CRISEDE L’UE ET LA CHUTEDE LA RÉPUBLIQUEROMAINEde DAVID ENGELSéd. du Toucan, 380 pp., 20€.

UNION EUROPÉENNE: ILFAUT RENDRE À CÉSAR…L’historien belge David Engels dresse un parallèle entrela crise des Vingt-Sept et la fin de la République romaine.

L es grandes fresquescomparatives sur la findes civilisations furent

un genre florissant, commeen témoigne l’impact dansl’imaginaire européen del’Histoire du déclin et de lachute de l’Empire romain,d’Edward Gibbon. Tombé endésuétude, l’exercice refleu-rit sous la plume d’un jeunehistorien belge, David En-gels, titulaire de la chaired’histoire romaine à l’Uni-versité libre de Bruxelles, quidresse un éclairant parallèleentre la Rome de la fin dela République – l’époquede Sylla, Pompée, César,Auguste – et l’UE.«Aussi déplorable qu’elle soitsur le plan humain, ce n’est pasla crise économique que tra-verse aujourd’hui l’UE qui meten danger son existence: c’estla crise identitaire latente de-puis des décennies qui met enpéril la survie de l’institution»,écrit David Engels, con-vaincu que la comparaisonavec le monde méditerranéendu Ier siècle avant J.-C. «ren-ferme les clés de la compréhen-sion de notre situation contem-

poraine ainsi que desparadigmes de solution». Cepartisan de la constructioneuropéenne ne se berce pasd’illusions: «Il y a des épo-ques dans l’histoire humaine oùtout optimisme n’est que lâ-cheté et aveuglement irrespon-sable alors que le pessimismepermet de faire face –honora-blement– à l’inévitable.» Et sedésole de l’impuissance et del’absence de vision des poli-tiques des Vingt-Sept et, sur-tout, de l’indifférence crois-

sante, voire de l’hostilité, desopinions publiques.L’une de ses critiques majeu-res porte sur le caractère«désincarné» de cette cons-truction européenne, quicraint de faire les comptesavec sa propre histoire. Elleveut se présenter comme«une nouveauté absolue» avecune «identité à inventer ex ni-hilo», alors que dans le passéd’autres institutions ont déjàenglobé la quasi-totalité desterritoires européens, qu’ils’agisse des empires romainou carolingien et de ceux deCharles Quint ou de Napo-léon. «On veut rarement ad-mettre que l’Union européennesoit seulement l’une des nom-breuses formes politiques querevêt l’Occident durant sonhistoire pour donner corps àune identité beaucoup plusprofonde que l’identification àun seul drapeau et à une seulemonnaie», remarque l’histo-rien, plus que jamais con-vaincu que l’UE aujourd’hui,comme jadis la Républiqueromaine, est avant tout me-nacée parce que ses citoyensn’y croient plus. «Syncré-

tisme multiculturel de plus enplus problématique, démogra-phie des citoyens romains enchute libre, tension de la cohé-sion sociale entre le peuple etles élites», relève Engels, rap-pelant comment l’ordre so-cial est maintenu aujourd’huivaille que vaille par la distri-bution d’allocations socialesde plus en plus massives…Dans un chapitre final, il sedémet de son costume d’his-torien pour revêtir celui duprospectiviste et du polé-miste inquiet d’un possible«revirement autoritaire» faceà la demande croissante d’unpouvoir fort. «Il y a fort à pa-rier, pour autant que les ana-logies esquissées dans cetouvrage soient acceptables,que l’Europe connaisse undestin comparable», souligneEngels. Et de rappeler com-ment l’instabilité sociale,politique, économique d’unerépublique en crise a pousséles citoyens à accepter un ré-gime autocratique. AvecAuguste naissaient l’empireet une Pax Romana longue dequatre siècles.

MARC SEMO

ALPINISMELA CORDE SENSIBLEDE JEAN BOURGEOISJean Bourgeois n’est pas seulement un alpinisteremarquable et remarqué, c’est un passionné,«aveugle et déterminé», un amant ardent de la na-ture et de ses espaces immenses. Il n’est pas seule-ment «en quête de plus grand» – le titre de sonouvrage–, il est à la recherche du sublime, du sen-

sationnel à l’extrême, d’unevie rien qu’à lui.On l’aura compris, l’exis-tence de Jean Bourgeois, néen 1938 en Belgique, ap-pelle les superlatifs. Commeen témoigne son autobio-graphie retraçant un demi-siècle d’aventures peucommunes dans l’Hima-laya, à la découverte desdernières terres nomadesafghanes dans les an-nées 70, dans l’Antarcti-que… Naturellement acco-lées au rythme de sa vie, cesexplorations illustrent leparcours d’un amoureux dugigantesque et des éléments

déferlants. Il n’aura de cesse de marcher, grimper,naviguer… Car l’auteur est un de ces aventuriers,solitaires et solidaires, dans la lignée des Bouvier,Kerouac ou Kessel; «un ouvreur de chemin» commele qualifie Robert Paragot dans la préface del’ouvrage.Doté d’une belle plume, Bourgeois fait partager aulecteur ses instants de joie ou de doutes, revenantparticulièrement sur sa disparition, en 1982, ausommet de l’Everest, puis sa réapparition miracu-leuse côté tibétain, plusieurs semaines plus tard.Une épopée qui marquera le reste de sa vie. Le livres’achève sur une quête philosophique et spiri-tuelle: «Le plus grand maintenant, je le cherche dansla dimension humaine. Il est là, autour de moi, à maportée, en moi.»

LOU BENOIST

MÉMENTO

LES CHOIX DUCAHIER LIVRESHauteurs platoniciennes de la mode : le Corpsglorieux de la top­modèle, par la philosopheVéronique Bergen (Nouvelles Editions Lignes).Tradition insurrectionnelle: le Chartisme, auxorigines du mouvement ouvrier britannique1838­1858, de Malcolm Chase (Publications de laSorbonne). Repos pour tout le monde: le Diman­che, une histoire, Europe occidentale 1600­1830, d’Alain Cabantous (Seuil).Italo Svevo ou l’Antivie: la nouvelle biographiedu diplomate et écrivain italien Maurizio Serra(Grasset). Œuvres autobiographiques com­plètes: deux tomes de Blaise Cendrars, le bourlin-gueur manchot, dans «la Pléiade» (Gallimard).Contrecoup: la romancière Rachel Cusk raconteson divorce en appelant les mythes à la rescousse(l’Olivier). La Baie vitrée, nouvelles: SébastienBrebel et les femmes qui passent (P.O.L).Du Polar : entretiens de Philippe Blanchet avecFrançois Guérif, grand éditeur du genre (Payot).

EN QUÊTE DEPLUS GRANDde JEANBOURGEOISEditions Navicata,366 pp., 22€.

La fin de César sonna celle de la République. Image extraite de la série «Figures du pouvoir» d’Olivier Roller. PHOTO O ROLLER

Page 31: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 LIRE LE MAG • XVII

KRACH MACHINEde FRANÇOISLELIÈVRE etFRANÇOIS PILETCalmann­Lévy,231 pp., 17 €.

LA BOURSE À LA VITESSE DE L’ÉCLAIRUne enquête édifiante sur l’univers du High Frequency Trading et ses dangers.

T out va décidément deplus en plus vite sur lesmarchés financiers. Le

23 avril, un faux tweet signéde la mystérieuse SyrianElectronic Army annonce«deux explosions à la Maison-Blanche, Obama blessé». Enmoins d’une minute, l’indiceDow Jones de la Bourse deNew York subit un krachéclair et perd 0,9%, soit130 milliards de dollars,avant de les récupérer enmoins de… trois minutes.Bienvenue dans le mondevertigineux des traders àhaute fréquence, ces algo-rithmes capables de réaliserleurs transactions en0,037 milliseconde, 6756 foisplus vite qu’un clin d’œil.Quand ces machines àl’écoute du moindre bruisse-ment des réseaux associentles mots «Obama» et«blessé», leur réaction estinstantanée : ils tiltent enmode vente et font s’écroulerles cours. D’où ce premier«#Hash-crash», pulvérisantpar sa vitesse le précédentrecord du 6 mai 2010, lors-que Wall Street avait perdu700 milliards de dollars (10%de sa valeur) en moins dequinze minutes.Des histoires de ce genre, lesurréaliste Krach Machine– des journalistes FrançoisLelièvre et François Pilet, quiofficient respectivement auTemps de Genève et à l’heb-domadaire helvète Matin Di-manche– en regorge. Car cesalgorithmes conçus par despetits génies matheux –no-tamment russes et indiens–,afin de capter des revenusdans les plus infimes décala-ges du marché produisent deplus en plus d’incontrôlablesréactions en chaîne poten-tiellement catastrophiquespour l’ensemble de l’écono-mie. Un bug informatique ouune simple rumeur sur laToile et voilà les «algos» quis’emballent à la vitesse de lalumière sans que l’humainn’y puisse plus rien ou pres-que, sauf à les débrancher.Dans certains cas, de plus enplus fréquents, ces HFT (highfrequency trading) sont spé-cifiquement programméspour prendre par surpriseles marchés. Leurs ordresd’achats et de ventes – an-nulés au final dans 90% descas!– servent alors à mani-

puler les cours en toute im-punité en piégeant des bour-sicoteurs infiniment pluslents que leurs calculs.D’une écriture soignée, im-peccablement vulgarisée etmise en scène, cette plongéeau cœur de ce très angois-sant univers se lit comme unroman d’anticipation. Elle nefait pourtant que décrire uneréalité déjà omniprésente :40% des transactions bour-sières en Europe et 60% auxEtats-Unis sont comman-dées par ces pilotes informa-tiques repoussant sans cesseles limites du temps afin deréaliser le plus vieux rêve desspéculateurs : gagner à tousles coups. De Basildon dansla banlieue de Londres, gi-gantesque Datacenter del’opérateur boursier NyseEuronext, au désert du Nou-veau-Mexique, des pionniersparisiens de l’éconophysiqueà New York en passant parAmsterdam, siège de la so-ciété de trading à haute fré-quence Optiver, leur enquêtenous fait découvrir unmonde finalement assez ré-duit (une vingtaine d’ac-teurs) mais dont l’emprisesur la finance ne cesse degrandir.Un monde dont la sophisti-cation croissante est devenuele cauchemar de régulateursà la fois dépassés par lacourse à l’armement desHFT et manquant cruelle-ment de moyens pour lessurveiller. «2 CV contre Fer-rari», résument les auteurs,en évoquant les amendes dé-risoires infligées au terme deplusieurs années d’enquêteet des rapports de quinze pa-ges nécessaires pour recons-tituer à peine 20 millisecon-

des de manipulation decours.Accusés d’exacerber la vola-tilité des marchés et de faireplaner la menace d’un krachfinal en cas de dérèglement,ces initiés de l’ère technolo-gique, grâce à leur vitesseéclair, se défendent commeils peuvent. Ils expliquent

qu’ils apportent au marché laliquidité dont il a impérati-vement besoin et que l’on nesaurait se passer d’une telleforce d’innovation. Alors quela France, dans sa nouvelleloi bancaire, est en passe deleur interdire pour son seulterritoire le négoce HFT surenviron 20% de leurs activi-

tés, le débat au niveau euro-péen se focalise désormaissur la possibilité de fixer un«temps de repos» pendantlequel un ordre ne pourraitêtre annulé ou modifié.La conclusion des expertslaisse rêveur: une période delatence de 500 millisecondesréduirait déjà considérable-

ment les possibilités de spé-culation des HFT. Dans la fi-nance, les quelques douxrêveurs qui militent pour ra-mener le temps boursier à laseconde sur toute la surfacede la planète doivent passerpour des contemplatifs del’éternité…

CHRISTOPHE ALIX

FORUM DEL’EUROMETROPOLE

Inscriptions sur liberation.fr

À LILLE AU THÉÂTRE DU NORD LES 28 ET 29 JUIN LA CULTURE, UNEVALEUR AJOUTEE?DEUX JOURS DE DÉBATS AVEC JOACHIM LAFOSSE, ODILE DECQ,MICHAEL GOLDMAN, PATRICK ROEGIERS, CAROLINE BOURGEOIS,CATHY DE ZEGHER...

Page 32: Lib .pdf

BENJIVRAIOups, mais voilà qu’on s’aperçoit que,dans l’article ci-contre, nous avons to-talement oublié d’évoquer le présenta-teur de Secret Story (TF1), BenjaminCastaldi. Toutes nos excuses, Benji.Heureusement, le site Puremédias s’estfendu d’un entretien en profondeur(23300 caractères espaces compris). Etil y a tant de choses là-dedans qu’on nesait que choisir. Ah si. Benjamin nouspromet une saison sans tensions entreles candidats: «Je ne crois pas que, dansle contexte social et politique actuel, lesgens aient envie de voir ça.»

BENJICLÉEt de notre même désarmant Benjamincette saillie qui nous déclenche rétros-pectivement tant de regrets: «Si j’avaisdirigé TF1, c’est à moi que j’aurais confiéSplash.» C’est sûr qu’au concept crétin(plonger du 10 mètres) et aux invitéssoldés (Gégé de Koh-Lanta pétochantsur le plongeoir du 1 mètre dans sonmaillot sur l’arrière duquel était inscritson prénom en lettres de feu), ne man-quait que Benji.

BENJIBOULETMais que voulez-vous, Benjamin Cas-taldi, on ne peut pas s’empêcher d’avoirune petite tendresse pour lui. «Nous, lesanimateurs, on est de la merde», avait-ilun jour benoîtement déclaré à Libéra-tion. Il est comme ça, Benji. Là où lesautres emberlificotent et louvoient, luilâche d’emblée la vérité. «A part pourSecret Story, on vous voit peu sur TF1…»l’interroge prudent Puremédias. Et no-tre Castaldi, tout de go: «On ne me voitplus du tout, vous voulez dire !» Et demême, au lendemain du lancement deSecret Story, a-t-il lâché le morceau di-rect sur Twitter : «Pas bonnes du toutles audiences… Les plus basses depuissept ans !!!» Benji, Benji, Benji…

BONNENOUVELLEDe Benji toujours : «Si j’étais présidentde France Télévisions…»

MAUVAISENOUVELLEDe Benji encore : «J’aime la télé.»

INSTANTS TÉLÉ

JLPP

A

Ici la voix: quel est le secret du Dr Garriberts?

BOURRE­PAF

Par RAPHAËL GARRIGOS et ISABELLE ROBERTS

Un Dr se cache peut­être derrière Florine,Jamel, Emilie, Ben ou Sonja. P DUVAL JLPPA

G ünter Wallraff, FlorenceAubenas ou, dans un autregenre de transformisme, PatrickSébastien… C’est un prestigieux

club que vient de rejoindre le Dr Garriberts:celui des journalistes infiltrés qui, au prixdérisoire de leur vie en regard de l’inesti-mable devoir d’informer, se travestissentet se glissent dans des zones dangereuses,des endroits isolés. Nous vous écrivons deSecret Story. Oui, après des années d’ap-proches ratées, de manœuvres subrepticeset de graissages de pattes en pure perte,nous avons réussi. En 2002, on se faisait je-ter du casting de Loft Story 2 (Libération du9 février 2002); en 2004, on se glissait der-rière les vitres sans tain des Colocataires(Libération du 29 mai 2004), mais cette fois,nous y sommes. Nous. Y. Sommes. Dans leLoft, enfin, dans la maison de Secret Story,c’est pareil. Au cœur de l’usine à saucissesà audience de TF1. Quoique, vu les 3,3 pau-vres millions de téléspectateurs, le plusmauvais lancement pour cette septièmesaison inaugurée il y a une semaine, ce sontplutôt des saucisses cocktail. Mais on ne vapas faire nos fines gueules: ces deux candi-dats parmi les autres, hé ben, c’est nous.

Que sommes­nous?Mais qui sommes-nous? On n’est pas asseztrompette pour avoir choisi comme secret«Nous sommes journalistes à Libération». Etpuis comme les trois quarts des secrets sontplus ou moins bidonnés, on n’allait pas secasser la nénette. Sommes-nous Tara, la gi-ronde Tibétaine à qui on prédit un destin deNabilla demi-sel? Peut-être. Ou alors, onest Eddy –il prononce «Edgy»–, créaturetransgenre à qui le secret «Je suis manne-quin homme-femme» va comme un gant.Sur le même thème, peut-être sommes-nous les jumelles Sabrina et Morgane, l’unegarçonne, l’autre garce. Ou bien détenons-nous ce terrible secret : «J’ai vécu jusqu’àl’âge de 14 ans avec mon jumeau parasite.»Un peu léger, le coup du gonze avec son ex-croissance jumelle incrustée dans le bide,on trouve, nous. On aurait arrangé ça en:«jumeau parasite nazi». Gauthier? Ca va,

vous nous imaginez avec des cheveux quigriffent les murs comme dans la pub pourle gel? Ou comme l’autre nigaud de Jamelavec la touffe qu’il arbore sur la tête ?En revanche, il nous reste quelques lam-beaux de street-credibility: nous vous as-surons que nous ne sommes pas «la familledu public», ces quatre candidats dont lesinternautes ont décidé qu’ils devaient par-tager ce secret-là. Ni le vieux Ben (48 ans),ni sa prétendue femme Sonja, ni les deuxfaux enfants Anaïs et Julien. De même, nesommes-nous pas Florine, 28 ans, tirantsur les 52 botoxés, et son minable secret(«Je communique avec les animaux»). Enfin,parce que nous avons le respect de nos vio-ques persos (on le parle bien, le Secret Story,hein?), on vous jure que notre secret n’estpas «Je suis le fils / la fille d’une star des an-nées 80». D’autant que la star en questionn’est autre que le Jonathan de David et Jo-nathan (oui, ceux qui venaient pour les va-ca-ances, qui n’avaient pas changé d’adre-esse), merci bien, nous, on préférait Co-rynne Charby (bisous, maman, promis onpasse dimanche).

D’où venons­nous?On sait, bien sûr, que l’important, c’est derester soi-même, que dehors, c’est que dubonheur et on sait aussi kiçékapété. Maisune pratique assidue de la télé-réalité n’apas suffi à faire de nous de la bonne chairà Endemol. Il nous a fallu donner de nospersonnes: fréquenter les zones de chassedes casteurs de Secret Story, vêtus qui dejupe ras la fouffe, qui de tee-shirt moule-pecs. S’affirmer originaires de Nice / Can-nes / Antibes / Montpellier / Marseille, lesbouillons où se cultive le candidat de télé-réalité. S’inventer des secrets à la mesurede ceux, crétins, que débitent Endemol etTF1 depuis sept ans: «j’ai le QI de Nonce Pa-olini», «je suis le futur pape», «j’ai votéFrançois Hollande», «je suis noir», «je n’aipas de jambes», «je meurs comme MarionCotillard», «je travaille à la télé publiquegrecque». En vain, jusqu’au secret qu’ons’est trouvé mais qu’on ne vous dira pas.Et puis, il nous a fallu réapprendre à parler.

Oubliés, notre art de la dialectique, notregénie de la narration, désormais, c’est «na-nani-nanana». C’est ainsi que nous avonsraconté à Florine notre fâcherie de l’autrejour avec Anaïs : «C’te grosse mytho, ellem’a dit “vas-y, nanani-nanana”. Attends,j’lui dis, c’est pas toi qui vas me dire nanani-nanana.» Pas facile, d’autant que, commenous venons de Nice / Cannes / Antibes /Montpellier / Marseille, il nous faut ajouterdes «ch» aux «t» et des «j» aux «d»:«mytho» se dit ainsi «mytcho», «attends»se prononce «attchends» et «j’lui dis» de-vient «j’lui djis». Et attention aux contre-sens: dans la phrase «Tara, elle voudjrait queVincent soit un peu son tchoutchou», Tara neveut pas faire de Vincent son chouchou, nimême sa locomotive, mais bien son petitchien.

Où allons­nous?Neuf jours à peine et déjà nos organismesse dégradent. Les migraines dues aux pro-jecteurs allumés en permanence, les lunet-tes noires n’y pallient plus. Le bruit sanscesse. Le bruit de «la Voix», vous savez, ceBig Brother en carton qui nous serine sesordres à longueur de journée, qui nous con-voque à des jeux débiles, genre 45 minutesde sport pour remporter 500 euros. Le bruitdes autres, les hurlements, les engueulos,les crises de nerfs. Le bruit des caméras sedéplaçant sur les rails derrière les miroirs;à force, on discerne même le son du zoomsur nos fesses. Et autant vous dire que l’or-ganisme, le régime champagne de marquedistributeur à gogo-pâtes de 4 heures dumat-Nutella à même la louche au lever à15 heures, fraises Tagada à l’apéro, il n’aimepas trop. Et puis le bordel qui s’accumulepartout; la vaisselle qu’on ne fait déjà plus;la piscine qui vire saumâtre. L’épidémie demycoses gagne. Depuis les toilettes cradin-gues où nous tapotons ces mots sur un dis-cret smartphone tentant d’échapper à lasurveillance de la caméra antisuicide, uneseule pensée nous tient encore debout :tchirer un max de fric à TF1 et décrocher lecastching des Anges de la téléréalité surNRJ12 nanani-nanana. •

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013XVIII • LE MAG REGARDER

Page 33: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CHRONIQUES LE MAG • XIX

N ous avons tendance à penser quesi la population avait une cons-cience morale plus développée,elle commettrait beaucoup moins

de crimes. Cette conscience ferait naître enchacun d’entre nous le si salutaire sentimentde culpabilité chaque fois que l’idée d’en-freindre la loi viendrait hanter nos esprits.Nous croyons aussi que l’un des rôles majeursde la justice est de venir en aide à ceux dontla conscience morale était défaillante au mo-ment où ils ont commis un crime. Puniraurait cette fonction de créer par les tour-ments réels que l’on inflige aux condamnésl’enfer que la conscience morale produit chezles honnêtes gens. Transformer les cellulesimmondes où on les place en une consciencequ’ils finiront par internaliser.Aujourd’hui, ces croyances sont tellement àla mode dans les pays occidentaux que la fi-gure du criminel la plus redoutable et la plusparadigmatique est celle du pervers. Celui-ciest décrit comme un être incapable d’éprou-ver des remords même lorsqu’il commet lescrimes les plus atroces. C’est pourquoi onconsidère très important que les personnesjugées reconnaissent leurs méfaits, qu’ellesse repentent, qu’elles assument la souffrancedes victimes et de leurs familles. Les romanspoliciers sont souvent construits à partir decette hypothèse du criminel dissimulateuret habile sans aucune conscience de la valeurd’une vie humaine. Ou plutôt d’un individuqui devient criminel parce qu’il octroie à sespropres intérêts, économiques, personnels,

sexuels ou autres, une importance plusgrande qu’à la vie des autres. Et le fait que ledétective découvre le coupable est une ma-nière de montrer que l’Etat est capable de ré-parer le scandale qui constitue aux yeux dela société l’existence des êtres humains dé-pourvus d’une vraie conscience morale.C’est entre autres pour réfuter ces croyancesabsurdes qu’il faut aller voir les deux partiesde Shokuzai : Celles qui voulaient se souvenir,Celles qui voulaient oublier, de Kiyoshi Kuro-sawa. Ce dernier montre que le fait d’avoirune conscience morale trop développée estla chose la plus criminogène qui soit.Quatre jeunes filles assistent à l’enlèvementd’une cinquième, Emili, violée et tuée parson ravisseur. Parce qu’elles se sentent tropcoupables de ne pas avoir aidé leur amie, dene pas avoir été tuées à sa place, elles refu-sent de contribuer à identifier l’assassin.Comme si signaler ce dernier à la justice lesdélivrerait de l’enfer de la culpabilité auquelelles ne souhaitent pas renoncer. Si elles setaisent, c’est parce qu’elles savent qu’ellesvont profiter de cette occasion pour connaî-

tre des vies hantées par leurs souffrancesmorales. Des vies horribles et infernales, devéritables théâtres de leur cruauté envers el-les-mêmes. Elles tuent alors des innocentsparce qu’elles leur trouvent des traits com-muns avec l’assassin de leur amie et elles sedébrouillent pour être tuées par la justice oupar quelqu’un d’autre.Kurosawa décrit d’une manière magistrale unphénomène qui devrait nous faire bien réflé-chir dans une période comme la nôtre, où laplupart des crimes de sang sont commis entreles membres d’une même famille ou entreproches. Shokuzai démontre le voisinage qu’ily a entre le fait de tuer quelqu’un et de se tuersoi-même par culpabilité. Plus l’être qu’ontue nous est proche, nous ressemble, plusl’acte de tuer est une manière de se dénigrer,de se déshonorer, de se suicider. L’on voit àl’œuvre ici quelque chose que le moralismecherche toujours à cacher: la haine de soi quele sentiment de culpabilité attise et les consé-quences désastreuses qui s’ensuivent. Unehaine de soi qui fonctionne de manière terri-blement égoïste. L’obsession de se détruire est

telle que tout le reste ne compte guère. L’ap-pareil judiciaire ne fonctionne que commeoutil pour la propre destruction de ceux quise haïssent jusqu’à en mourir.On dira que ce sont des problèmes de Japo-nais, que Lacan avait accusés d’être dépour-vus d’inconscient, à la différence des chiensqui en seraient dotés. Or, cette manière devoir les choses semble trop courte. Tant quenos sociétés continueront à penser que laconscience morale peut être positive pourquoi que ce soit, nous attiserons, nous favo-riserons, nous ne pourrons pas éviter decréer des humains qui se haïssent eux-mê-mes. Et si nous ne devenons pas tous des cri-minels, nous nous débrouillerons pour avoirdes vies tristes et serviles qui n’iront pasdans le sens de la promotion de nos intérêtsvitaux les plus élémentaires. Dans ce monde,l’amour envers autrui ne peut être que petit,destructeur, mesquin, parce qu’il est étroite-ment lié à celui que nous éprouvons pournous-mêmes.Si, au lieu de développer notre consciencemorale, les institutions nous apprenaientavant toute chose à éprouver un immenseamour pour nous-mêmes, il y aurait beau-coup moins de crimes. Nous traiterions ceuxqui nous sont proches et moins proches aussiavec un amour semblable. La masse de bon-heur augmenterait parce que nous serionstoujours prêts à nous révolter pour protégernos intérêts au lieu de donner raison à ceuxqui nous oppriment et de bénir la lame quinous arrache l’âme. •

Sans crime ni raison

À CONTRESENS

Par MARCELA IACUB

Dans Shokuzai, Kiyoshi Kurosawa montre qu’avoir une conscience morale trop développée est la chose la plus criminogène qui soit. PHOTO DR

Page 34: Lib .pdf

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013XX • LE MAG JE ME SOUVIENS

Pourtant, la mesure n’est pas impopulaire: selon un sondageIpsos-Journal du dimanche, 63% des Français l’«approuvent».Et hier, les députés socialistes expliquaient tous qu’elle avaitété fort bien accueillie sur le terrain.Mais voilà. Le gouvernement a réussi à faire d’une mesuresymbolique au nom de la «solidarité» un pataquès laissantpenser qu’il faisait, sur la seule annonce précise du discoursde politique générale, le contraire de ce que Lionel Jospinpréconise. Le Premier ministre ne cesse d’expliquer qu’il fautprendre le temps de la décision, de la concertation et respec-ter la solidarité gouvernementale. La gestion du dossier a étémarquée par l’impréparation, le manque de concertationpréalable et les propos contradictoires de plusieurs ministres.Dimanche, quand Martine Aubry (Emploi, Solidarité) assuraitque tout pouvait être soumis à concertation, Catherine Traut-mann (porte-parole du gouvernement) affirmait que la me-sure ne concernait que les familles de deux enfants. Lundi,les représentants associatifs et syndicaux sortaient de chez

Martine Aubry avec des propositions de relèvement du pla-fond de 25 000 à plus de 30 000 francs.L’opposition s’est engouffrée dans la brèche, non sans dé-ployer des trésors de mauvaise foi. Force démocrate, présidéepar François Bayrou, a fait circuler des tracts dénonçant «lasuppression pure et simple des allocations familiales». Quantà Louis de Broissia (RPR, Côte-d’Or), il a ironisé, hier, ens’adressant au Premier ministre lors des questions d’actualitéà l’Assemblée nationale: «Compte tenu des déclarations dis-cordantes, voire cacophoniques, quelle est la position,aujourd’hui à 15h20, de votregouvernement ?»C’est Martine Aubry qui lui arépondu : «Il faut bien évi-demment discuter, mais paspour revenir sur le principe des25 000 francs – le chiffre estacquis –, mais pour en mesu-rer les adaptations, soit enfonction du nombre d’enfants,soit de la structure des familleset du nombre de parents quitravaillent.» Passablementagacée, elle a souligné que«plus de 90% des familles»continueraient à toucher lesallocations familiales. Lessocialistes l’ont applaudie. Ilétait temps. Depuis troisjours, ils ne s’étaient guèremanifestés. Quant au PCF, ilest contre le plafonnement,comme l’a rappelé hier leurprésident de groupe, AlainBocquet.Le gouvernement a d’autantplus besoin de soutien que,du côté syndical, c’est levide sidéral. La CFTC (chré-tiens) est montée la premièreau créneau. Normal, elle gèrecomme un patrimoine laCaisse nationale des alloca-tions familiales. FO avaitdéjà fait savoir son opposi-tion à la mesure. La CGC re-fuse «que les salariés moyensservent de victimes expiatoi-res». La CGT ne veut pas en-tendre parler de plafond, etveut qu’une prestation de1500 francs soit ouverte dèsle premier enfant. Par-des-sus tout, elle craint que laméthode Jospin ne soit éten-due à l’ensemble de la pro-tection sociale. Mais le coupde grâce est venu de NicoleNotat (CFDT). Dans Libéra-tion (6 juin 1997), elle décla-rait pourtant: «Il faut plus dejustice dans l’attribution et leniveau des allocations.»Le gouvernement va devoir se sortir de ce mauvais pas.La porte la plus facile serait celle de la négociation – maisMartine Aubry a contre elle la quasi-totalité de ses interlocu-teurs. L’autre solution, suggérée par certains, dont la CGT,consisterait à réformer le quotient familial de l’impôt sur lerevenu qui favorise les familles avec enfants les plus aisées.Cela se ferait au prix d’un recul sur une promesse de Jospinau profit d’une réforme fiscale d’ampleur aux résultats tou-jours hasardeux. •

L’ occasion était trop belle. Logiquement, l’opposi-tion s’en est emparée. Du discours de politiquegénérale de Lionel Jospin, prononcé jeudi, il nereste quasiment plus que cela dans le débat public:

une polémique sur la suppression des allocations familialespour les foyers aux revenus supérieurs à 25000 francs. Hier,la secrétaire générale de la CFDT, Nicole Notat, a cru devoirréclamer la «suspension» de la mesure, alors que le matinquelques centaines de personnes –surtout des mères de fa-mille accompagnées de leurs enfants– manifestaient devantle Palais-Bourbon à l’appel de plusieurs associations familia-les. La droite y était évidemment, et aussi le député commu-niste Maxime Gremetz (Somme). Et, en fin d’après-midi,200 personnes manifestaient dans le fief du Premier minis-tre, à Cintegabelle.

Par NICOLE GAUTHIER et HERVÉ NATHAN(Libération du 25 juin 1997).

Dans lesarchives de«Libé», il ya seize ans.

Au nom de la«solidarité»,Lionel Jospin

décide desupprimer les

allocationsfamiliales aux

foyers ayantdes revenus

mensuelssupérieurs à

25000 francs,déclenchant

l’ire desorganisationsfamiliales, de

syndicats etde la droite.

Un nerf de familles

DES PRESTATIONSINTOUCHABLESLa gauche aurait­elleun blocage avec lafamille ? Seize ansavant Hollande,Jospin avait déjà tentéde mettre fin àl’universalité des allocsen les supprimant,de manière trèséphémère, pour lesrevenus excédant32 000 francs par mois(le plafond avait étérevu à la hausse entre1997 et 1998). Malgrél’opposition de ladroite, du PCF,des syndicats et desassociations familiales,qui avaient mobilisé60 000 personnesà Paris, le Premierministre poursuivit savision «redistributive»en coupant les allocsà 350 000 famillesà partir d’avril 1998.Peine perdue.Bien qu’approuvémajoritairementdans les sondages,Jospin renonce deuxmois plus tard enéchange, commeen 2013, d’unabaissement – alorsmodeste – du quotientfamilial des plus aisés.Avant lui, Juppé avaitdéjà échoué en 1995à soumettre à l’impôtces intouchablesallocs, nées en Franceen 1916 et généraliséesà partir de 1945. C.Al.

LA MATINALE LA VOIXEST

LIBREFABRICE DROUELLE ET PATRICIA MARTIN

RETROUVEZ SYLVAIN BOURMEAU DU JOURNAL LIBÉRATION À 8H47

POUR LE DÉBAT DES CHRONIQUEURS CULTURELS.

DU WEEK-END

Page 35: Lib .pdf

SAMEDI 22 JUIN AU MAC/ VAL

L’ÉCOLE, C’EST MIEUX AILLEURS ? 3 CINÉS ROBESPIERRE Avec la participation d’un membre du Conseil Régional des Jeunes

10H30 - 12H00

Peter Gumbel journaliste, auteur de On achève bien les écoliers George Pau-Langevin ministre déléguée auprès du ministre de l’Education nationaleJessica Shepherd journaliste spécialiste de l’éducation, e Guardian

CULTURE POUR TOUS, UN LEURRE? Alexia Fabre directrice du MAC/VAL Vincent Eches directeur de la Ferme du BuissonFrédéric Hocquard directeur d’Arcadi Zahia Ziouani chef d’orchestre, directrice du Conservatoire de musique et dedanse de Stains

Jean-Paul Huchon président du conseil régional d’Île-de-FranceYves Bigot journaliste musique, directeur général de TV5 MondeMademoiselle K chanteuse de rock

QUEL VISAGE POUR LE MUSÉE DE DEMAIN? 3 CINÉS ROBESPIERRE Jean-Louis Lesage président de l’agence digitale NovacomPierre-Yves Lochon créateur et coordinateur du Club Innovation & Culture Albertine Meunier artiste numérique

YOU ROCK !

LE LIVRE, UN LUXE? Philippe-Louis Coudray directeur du MOTif, observatoire du livre et de l’écrit en Île-de-FranceSylvie Vassalo directrice du Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil Geneviève Brisac écrivaine et éditrice

16H00 - 17H30LES SCIENCES, PAS SI SORCIER ? Avec la participation d’un membre du CRJ 3 CINÉS ROBESPIERRE Marie-Françoise Chevallier-Le Guyader directrice de l’Institut des Hautes Etudes Science et TechnologieClaire Le Moine directrice adjointe d’Exploradôme, responsable des actions éducativesJean-Claude Ameisen auteur de l’émission Sur les épaules de Darwin sur France Inter, président du Comité consultatif national d’éthiqueDavid Lowe scientifique, présentateur de l’émission On n’est pas que des cobayes !

PIQUE-NIQUE : FOODTRUCK «LE CAMION QUI FUME» ET FANFARE

2.0, QUE DU VIRTUEL? Avec la participation d’un membre du CRJBruno Patino en charge des programmes et du numérique à France Télévisions Serge Tisseron psychiatre et psychanalyste

ATELIER D’INITIATION À L’ÉCRITURE JOURNALISTIQUE( pour les 12 - 25 ans)

12H30 - 14H00

13H30 - 15H00

LE CHOC DES CULTURES ? Alain Finkielkraut philosophe Mokobé rappeur du groupe 113Talila chanteuse yiddish

14H00- 15H30

12H00 - 12H30 DÉFILÉ DE MODE AVEC LES ÉLÈVES DU LYCÉE CAMILLE-CLAUDEL

DIMANCHE 23 JUIN AU MAC / VAL

16H00 - 17H30LES (TROP) GRANDES ÉCOLES?Stéphanie Grousset-Charrière sociologue, auteure de la Face cachée de HarvardIsabelle is Saint-Jean vice-présidente chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche de la Région Île-de-FranceFlorence Noiville journaliste, auteure de J’ai fait HEC et je m’en excuse

GENRE POLICIER, POURQUOI TANT D’ENGOUEMENT? Avec la participation d’un membre du CRJJean-Bernard Pouy auteur de roman noir Dominique Manotti romancière, Grand prix de littérature policière 2011Christophe Gavat ancien chef de la PJ de Grenoble

10H30 -11H30 ARCHITECTURES RECYCLABLES? LA BRIQUETERIEDaniel Favier directeur de la BriqueteriePhilippe Prost architecte de la BriqueterieClaire Gueysse et Antoinette Robain architectes DPLG réhabilitation du Centre National de la DansePaul Ravaux architecte de la Manufacture des Œillets Alain Amédro vice-président chargé de l’aménagement du territoire de la Région Île-de-France

11H30 -13H00 4 BALADES ARCHITECTURALES DANS VITRY-SUR-SEINEParcours 1 : « La Briqueterie et ses alentours » avec Daniel Favier, Philippe Prost et Paul RavauxParcours 2 : « L’art est dans la ville » avec Catherine Viollet, conseillère aux arts plastiques et chargée de commande publique à Vitry-sur-Seine Parcours 3 : « Vitry ville Street art » avec Nath Oxygène et Brigitte Silhol, photographesParcours 4 : « L’architecture d'une ville » avec Anne-Marie Monnier, architecte conseil au CAUE94

LE CINÉMA, ÇA S’APPREND? 3 CINÉS ROBESPIERRE Projection du film «Donoma» puis débat avec Djinn Carrenard 13H30 -17H30

11H00 - 12H30DEMAIN, DES INSECTES DANS L’ASSIETTE? Jean Boggio Pola réalisateur du documentaire Des insectes au menu Cédric Auriol éleveur d’insectes bioChristian Hervy maire de Chevilly-Larue

#LANGUEDEMOLIERE? Avec la participation d’un membre du CRJ Claude Hagège linguiste, professeur au Collège de France Darina Al-Joundi comédienne libanaise, auteure de la pièce Ma Marseillaise Ina Mihalache Solange te parle, actrice et vidéaste canadienne Alain Bentolila auteur de la Langue française pour les nuls

14H00 - 15H30L’ÉCOLE IDÉALE, MON ŒIL ! Avec la participation d’un élève du microlycée de VitryMartin Hirsch président de l’Agence du Service Civique Henriette Zoughebi vice-présidente du conseil régional d’Île-de-France en charge des lycées Florence Lhomme coordinatrice et professeur de français au microlycée de Vitry-sur-Seine

TOUS MÉCÈNES? Vincent Ricordeau cofondateur de Kiss Kiss Bank Bank, plateforme de financement participatifCorinne Rufet ancienne présidente de la commission culture de la Région Île-de-FranceAnn d'Aboville chargée de mission au Pôle Culture de la Fondation BNP ParibasSébastien Fumaroli directeur de la communication de la Société des amis du Louvre

VA VOIR, VA SAVOIR! ÎLE-DE-FRANCE : QUELLE RÉGION EN 2030?

17H30 - 18H30 RENCONTRE AUTOUR DE L’ACTUALITÉ AVEC NICOLAS DEMORAND ET LA RÉDACTION DE «LIBÉ»

17H30 - 18H30 PROJECTION DU FILM «NOSTALGIE DE LA LUMIÈRE» DE PATRICIO GUZMÁN 3 CINÉS ROBESPIERRE

TOUTE LA JOURNÉE : PERFORMANCE DU GRAFFEURSUPSONER SUR LE PARVIS DU MAC/VAL

En partenariat avec

Entrée libre et gratuite, réservation conseillée sur www.liberation.fr/forumidf

Page 36: Lib .pdf

Retraites: lespistesprudentesdurapportMoreauLe rapport remis vendredi à Matignon propose notamment de baisserles pensions et de poursuivre l’allongement de la durée de cotisation.

Q ue les Français se rassu-rent: «les efforts à faire»pour redresser lescomptes du système

de retraites ne «seront pasécrasants», a promis ven-dredi le Premier ministre,Jean-Marc Ayrault, lors de la remisedu rapport de la conseillère d’EtatYannick Moreau. D’autant qu’ilsseront réalisés «dans un esprit dejustice et d’efficacité», a assuré, deson côté, le président de la Républi-que. Pas de panique, donc, semblevouloir dédramatiser l’exécutif, quipromet, pour combler les 20 mil-liards d’euros de déficit attendusen 2020, un projet de réforme à la

fin de l’été, après concertation avecles partenaires sociaux.Cependant, le gouvernement a déjàquelques idées sur la question (Libé-ration du 14 juin): pas touche auxrégimes spéciaux, grande prudencesur le rapprochement public-privé,

allongement de la durée decotisation, et surtout solli-citation des retraités, par

une baisse relative des pensions (viaune désindexation par rapport àl’inflation et/ou une suppression decertains avantages fiscaux etsociaux). Le tout parfumé d’un li-vret de pénibilité, permettant auxsalariés d’y noter leurs conditionsde travail (de nuit, debout…), etouvrant droit à une formation ou àun congé de fin de carrière.Difficile, néanmoins, d’ignorer to-

talement le rapport de Yannick Mo-reau, que le gouvernement lui acommandé, et qui servira de baseaux discussions entre partenairessociaux sur les retraites, lors de laconférence sociale. Et qui seront

animées, qui plus est, par cettemême Yannick Moreau.

ESPÉRANCE DE VIE. L’exécutif de-vrait d’autant moins le snober quele rapport contient la plupart despistes envisagées par le pouvoir.Avec un premier objectif : assurer

l’équilibre des comptes à courtterme, c’est-à-dire d’ici à 2020.Pour ce faire, il envisage toutd’abord de faire contribuer les re-traités. En alignant leur taux de CSG(6,6%) sur celui des actifs (7,5%),

pour un gain de deuxmilliards d’euros, et enréformant certainsavantages (fiscalisa-tion de la majorationde pension pour troisenfants et plus, sup-

pression de l’abattement fiscalde 10% pour frais professionnels),permettant de dégager entre 1,5 et2,5 autres milliards. Mais c’est sur-tout la sous-désindexation «excep-tionnelle» des retraites pendanttrois ans qui pourrait faire le pluscouiner. Le document propose, du

coup, de la réserver aux plus hautespensions.Du côté des actifs, la commissionMoreau envisage une hausse descotisations (0,1 point par an pen-dant quatre ans), partagée entreemployeurs et salariés, pour unmontant de 2,6 milliards. A pluslong terme, le rapport propose dejouer sur l’allongement de la duréede cotisations. Et de prolongerainsi, au-delà de 2020, le principedu partage du gain d’espérance devie entre le temps passé au travail(deux tiers) et la retraite (un tiers),prévue par la loi Fillon de 2003. Cequi conduirait à passer d’une duréede cotisations pour une retraite àtaux plein de 41,75 ans en 2020,à 43 ans en 2035 et à 44 ansen 2050. En cas de dégradation dela conjoncture, serait alors envisa-gée une accélération de ce calen-drier, qui ferait évoluer la durée decotisation à 43 ans dès 2024 età 44 ans en 2028. Prudente, et sur-tout réaliste quant aux intentionsdu gouvernement, la commissionécarte l’idée de repousser l’âge lé-gal de départ, déjà reporté de 60à 62 ans, par la droite dans sa ré-forme de 2010.

ÂGE LÉGAL. Dernier point délicat,enfin, le rapprochement des règlesde calcul de la pension entre le pu-blic et le privé. Aujourd’hui, lemontant de la retraite pour lesfonctionnaires est établi sur la basedes six derniers mois de salaire,contre les vingt-cinq meilleuresannées pour le privé. La commis-sion Moreau suggère, non pas unalignement, mais un élargissementde cette période de référence pourles agents publics «sur une périodeplus longue», en y en intégrant unepartie des primes. Une mesure quin’a pas pour objectif de générer desrecettes, rappelle le document.A peine remis au Premier ministre,le rapport Moreau n’a pas vraimentsuscité l’adhésion de la CGT et,pour d’autres raisons, du Medef.«Les principales pistes évoquéesdans le rapport n’augurent rien debon», estime ainsi la confédérationde Montreuil, qui fustige l’allonge-ment de la durée de cotisation, labaisse des pensions et l’alignementdu public sur le privé. Le patronat,de son côté, réclame un report del’âge légal, et dénonce toute haussedes cotisations. Quant à Forceouvrière, elle considère que si cespistes étaient retenues, «elles se-raient écrasantes et inacceptables».Seule la CFDT ne semble pas s’op-poser frontalement aux conclu-sions du rapport, tout en réclamant«une réforme de fond». Reste deuxmois au gouvernement pour con-vaincre… •

Par LUC PEILLONPhoto SÉBASTIEN CALVET

En cas de dégradation dela conjoncture, serait envisagéeune durée de cotisation de 43 ansdès 2024 et de 44 ans en 2028.

ANALYSE

Le Premier ministre, Jean­Marc Ayrault, et la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, vendredi à Matignon.

7milliardsd’euros, c’est le déficit attenduen 2020 du seul régime généralet des régimes alignés, selonle rapport Moreau.

REPÈRES «Si François Hollande faitune réforme courageuse,qui vient dans la droiteligne de ce que nos avionsfait, il doit savoirque je serai à ses côtés.»Jean­François Copé vendredi

«Nous voulons une réformestructurante» : Jean LouisMalys, en charge des retraitesà la CFDT, a répondu auxquestions des internautes.

• SUR LIBÉ.FR«Bien que l’équilibrefinancier des retraitessoit aujourd’hui menacé,les socialistes veulentêtre les garantsde ce système.»Communiqué du PS vendredi

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201316 • ECONOMIE

Page 37: Lib .pdf

+0,19 % / 3 805,16 PTS2 284 965 393€ -18,93%

MICHELINUNIBAIL RODAMCOVALLOUREC

Les 3 plus fortesALSTOMGEMALTOVIVENDI

Les 3 plus basses

-0,46 %15 105,89-0,40 %3 431,42+0,06 %6 308,26

SOCIAL Les syndicats de laSaur, numéro 3 de l’eau enFrance, se disent «opposés»à l’offre de reprise des ban-ques, à quinze jours de ladate butoir avant une possi-ble liquidation judiciaire.

SUISSE Un rapport d’expertsmandaté par le gouverne-ment préconise l’échangeautomatique d’informationsavec les Etats étrangers enmatière fiscale, ce qui sonne-rait le glas du secret bancaire.

L a «bande organisée» seréunissait parfois àl’Elysée. Après moult

circonvolutions, Bernard Ta-pie a fini par admettre avoirparticipé à une réunion à laprésidence de la République,en juillet 2007, en vue demettre en place le processusd’arbitrage qui, un an plustard, lui accordera 403 mil-lions de dommages et inté-rêts (dont 220 devraient luirevenir en net). Mais Dieuque l’aveu fut rude.On savait que ClaudeGuéant, alors secrétaire gé-néral de l’Elysée, avait «con-voqué» au Château Jean-François Rocchi, présidentdu Consortium de réalisation(héritier du litige entre leCrédit lyonnais et BernardTapie) et Stéphane Richard,directeur de cabinet au mi-nistère des Finances (tutelledu CDR), pour les convaincre«d’aller à l’arbitrage». Maisau cours de leurs récentesauditions, Rocchi et Richardauraient mentionné, selonl’AFP, la présence incongruede Bernard Tapie.Le contre-buzz se met illicoen place. A Libération, Tapieconfie dans un premiertemps: «Si cette réunion étaitaussi cruciale, je m’en sou-viendrais.» Puis au Figaro :«Etais-je présent? Peut-être,s’ils le disent.» Et enfin auParisien : «Objectivement, jene me souviens pas. Mais je nepeux pas croire que StéphaneRichard puisse se tromper.» Ilen était donc.L’Express croit égalementpouvoir affirmer que, cejour-là, Tapie aurait aussirencontré Nicolas Sarkozy enpersonne. Il se base sur lescarnets de l’ex-président,révélés le mois dernier parl’hebdomadaire. Ils font étatd’un tête-à-tête daté et at-testé au 30 juillet 2007, suivid’une «réunion de travail con-sacrée à l’épineux dossier»,hors de la présence deSarkozy. La date ne coïncidepas avec celle évoquée parRichard ou Rocchi, qui évo-quent le 24 ou 25 juillet. Peuimporte : si Tapie affirmen’avoir jamais plaidé direc-tement sa cause devantSarkozy (et pourquoi ne pasle croire sur ce point, l’un etl’autre adorant causer footou politique), il a su le faireauprès de ses proches. Car cegenre de dossier sensible se

sous-traite généralement.Qui donc, alors, a décidéd’entrer en arbitrage? Tapiedans le texte, en son contre-buzz : «Une décision commecelle-là ne peut se faire sansque toute la chaîne de com-mandement soit d’accord»(Reuters); Sarkozy «a donnéson feu vert après de nombreu-ses réunions» (le Figaro); «ni

Richard, ni Lagarde, ni Guéantn’avaient le pouvoir de déci-der». L’entourage de Chris-tine Lagarde, témoin assistéet qui assumait seule, jusqu’àprésent, la décision, indiquequ’elle ne «changera en riensa ligne de défense», sanschercher, donc, à ouvrir leparapluie élyséen.

RENAUD LECADRE

Visitesàl’Elysée:TapieretrouvelamémoireADIDAS L’homme d’affaires a reconnu avoir été reçuau Château pour décider de la procédure d’arbitrage.

3,4%C’est le recul estimé del’activité de la construc­tion en 2013 en Franceselon la Fédération dubâtiment, qui anticipe laperte de 40000 emploisdans le secteur.

Opération rabibochage.La directrice générale duFonds monétaire international (FMI), ChristineLagarde, s’est dite vendredi«très satisfaite» du degréde coopération avec lesEuropéens. «Je suis personnellement très satisfaitedu degré de coopération etdu niveau de compréhension que nous avons avecles partenaires de latroïka», a t elle déclaré.Composée du FMI, de laBanque centrale européenne et de la Commission de Bruxelles, la troïkaest chargée de quatreplans de sauvetage dans lazone euro. Un rapport duFMI publié début juin critiquait notamment les Européens pour s’être opposésà une restructuration de ladette grecque dès le premier plan d’aide en 2010.Bruxelles avait vivementréagi, se disant en «désaccord fondamental» avecses conclusions. Jeudi,le président de la Commission européenne, JoséBarroso, a estimé quel’Europe pourrait à l’avenirse passer du FMI.PHOTO REUTERS

POUR LAGARDE,LA TROÏKA FAITPREUVE D’UNION

LES GENS

LE SUP RETRO RETRO LE SUP

CHAQU RETRO

PPLÉME OUVEZ EC OUVEZ EC

PPLÉME

UE LUND OUVEZ EC

ENT DE COFUTU COFUT

DI, , CO UR,

LE SUP LE SUP É L’ÉCON PPLÉME PPLÉME

NOMIE IN ENT DE ENT DE

NNOVAN NTE

ECOFUTURTECHNOL

OGIES

LE VIN BOUGEDRONES

SATELLITES

ROBOTSSONDAGE

DESSOLSETDES

GRAPPESANALYSE

S

ETDOSAGES

ULTRAPRÉCIS DE

LOPTIMISATIONDES

VENDANGESÀLA

LUTTECONTRELA

CONTREFAÇON LA

HIGHTECH INVESTIT

LESBOUTEILLES

ENQUÊTE

Sur le domaine

Lafon Rochet

dans le Médoc

INTERVIEWGAZDESCHISTE: INT

ÉRÊTZÉROPOURTHO

MASPORCHERPAGE IV

DEMAINLADEUXIÈMEVIEDEL’ÉLECTRON

IQUEPAGE VIII

LUNDI 17 JUIN 2013

«La relocalisationd’activité estun mouvementpas massifmais prometteuret en coursd’augmentation etde généralisation.C’est le momentd’appuyer surl’accélérateur.»Arnaud Montebourgvendredi, lors de laprésentation du logicield’aide à la relocalisation«Colbert 2.0», à Bercy

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 ECONOMIEXPRESSO • 17

Page 38: Lib .pdf

Europe-Etats-Unis: lelibre-échangeentoutediscrétionLes débats entre les 27 sur l’ouverture d’une négociation commerciale s’éternisaient vendredi soir.

U n deal arraché en catiminiqui risque (bientôt) defaire du bruit? Ou un vetoqui pourrait hystériser les

Etats-Unis et sonoriserles coulisses de la diplo-matie commerciale ?Après onze heures de discussions,les 27 ministres européens du Com-merce bataillaient toujours, ven-dredi soir, à Luxembourg, pourtenter de se mettre d’accord sur unmandat de négociation pour unméga-accord de libre-échangeentre l’Union européenne etles Etats-Unis. La France, ap-paremment inflexible dans son dé-sir de sortir l’audiovisuel du «pack-age», tenait tête, notamment, àl’Allemagne et au Royaume-Uni,fervents avocats d’un rapproche-ment transatlantique.Jusqu’au bout, les partisans d’unaccord ont vanté le besoin de réé-quilibrer l’irrésistible déplacementde la production et des échangesvers l’Asie et le Pacifique, au détri-ment du pôle Etats-Unis-Unioneuropéenne, qui pèse pourtant40% des échanges mondiaux. Lesopposants redoutaient déjà uneeuro-abdication préjudiciable au

modèle (ou ce qu’il en reste) conti-nental. «L’exclusion de l’exceptionculturelle des négociations est un belarbre qui ne doit pas cacher la forêtdes renoncements potentiels des Etatsmembres – et de la France – sur de

nombreux choix de société»,plaidait dans la soirée Yan-nick Jadot, eurodéputé

Europe Ecologie-les Verts et vice-président de la commission ducommerce international.

«LOCH NESS». Pourquoi resserrerdes liens entre deux partenaires quipèsent déjà près de la moitié ducommerce mondial? Car les deuxentités sont déjà très «inclusives».Et les tarifs douaniers entre lesEtats-Unis et l’Union européennepeinent à dépasser les 3%. Le véri-table enjeu ? Les normes et stan-dards –les obstacles non quantita-tifs, dans le jargon économique–,plus ambitieux sur le Vieux Conti-nent qu’outre-Atlantique. Et ils ris-quent bien d’être normalisés… parle bas. Or, ces normes «renvoient àdes préférences collectives ou sociéta-les, sur l’environnement, la santé,l’énergie», mais aussi «la protectionde la vie privée, le principe de précau-tion, les produits financiers à hautsrisques», déplore Pierre Defraigne,

de la fondation Madariaga. Cet ex-directeur de cabinet du commis-saire européen Pascal Lamy (actuelpatron de l’Organisation mondialedu commerce), rappelle la puis-sance des lobbys américains, capa-bles de torpiller bien des «excep-tions commerciales» européennes,à commencer par le gel des OGM.Il note ainsi que «1,4 milliard de dol-lars [1 milliard d’euros, ndlr] ont étédépensés en deux ans pour influencerla loi Dodd-Frank de 2010 sur la ré-gulation financière».Le futur accord, si jamais il aboutit,tiendra-t-il du «monstre du LochNess»? Ou, au contraire, aura-t-illes ailes de l’ange de la rédemption,

comme le vante le Centre for Eco-nomic Policy Research ? Ce thinktank londonien table, lui, sur unboom annuel du PIB européende 68 à 119 milliards d’euros jus-qu’en 2027. Et un bénéfice améri-cain entre 50 et 95 milliards. LaCommission européenne assure, de

son côté, que la love affair commer-ciale avec les Américains permet-trait de booster la croissance en Eu-rope de 0,5% à 1%. Mieux: de créerun million d’emplois. «Tous cescalculs tiennent de l’escroquerie éco-nométrique reprise en boucle par lespromoteurs d’un accord», fustigeYannick Jadot.Reste que la confidentialité qui aaccompagné ce flirt commercialmajeur pour l’Europe ne manquerapas, s’il aboutit, d’élargir le fosségrandissant entre le peuple euro-péen et ses élites. Et les mots deKarel De Gucht, eurocommissaireau Commerce – «L’informationdu consommateur peut parfois être

un obstacle aucommerce» –, nerisquent pas derassurer. La Com-mission auraitainsi multiplié lesplaidoyers prodomo pour un deal

«sans autre débat public qu’un dis-cret caucus parlementaire à Stras-bourg sur un choix fondateur pourl’avenir de l’Europe», écrit PierreDefraigne. Pour mieux limiter toutdébat public, «tout s’est fait, jusqu’àprésent, dans la totale opacité»,ajoute Yannick Jadot :. «La Com-

mission pense que les citoyens vontmettre des bâtons dans les roues del’accord.»

COPYRIGHTS. Un grand nombre deréseaux et d’associations ont rejointce combat pour la transparence.«Les négociations secrètes sont desforums inacceptables pour la concep-tion d’accords contraignants quichangent des lois nationales bien au-delà du champ commercial», assureainsi la Fondation pour une infras-tructure informationnelle libre, quia plaidé – en vain – pour que soitexclus du texte brevets, copyrights,marques ou autres formes de «pro-priété intellectuelle». «Les discus-sions auront un impact sur tous lesaspects de notre vie, rappelle Moni-que Goyens, directrice générale duBeuc, le Bureau européen desunions de consommateurs. La pro-tection des données, la sécurité ali-mentaire ou encore les dispositifs mé-dicaux ne sont pas l’apanage desentreprises et des politiques.»L’accord est peut-être bientôt surles rails, mais le débat public, lui,ne fait que commencer. «Les Euro-péens ont plus faim d’un accord qu’ilsne l’ont été par le passé», a plaidéBarack Obama le 12 mars. Bruxellespeut-être. Mais les citoyens ? •

Par CHRISTIAN LOSSON

ANALYSE

La ministre du Commerce extérieur, Nicole Bricq, vendredi au Luxembourg. PHOTO JOHN THYS AFP

REPÈRES

L’EUROPE DIVISÉEL’idée d’une négociation d’unaccord commercial entre lesEtats Unis et l’Europe a clivéles grands pays du Vieux Continent. D’un côté, le RoyaumeUni, l’Allemagne et l’Espagney étaient favorables. Del’autre, la France, l’Italie ou laGrèce, très réticents.

«Un commerce libreet équitable de part etd’autre de l’Atlantiquesoutiendra desmillions d’emploisaméricains bienpayés.»Barack Obama le 12 février

40%C’est la part des Etats­Uniset de l’Europe dans le commerce mondial.

«Jusqu’à présent, tout s’est fait dansla totale opacité. La Commissionpense que les citoyens vont mettre desbâtons dans les roues de l’accord.»Yannick Jadot eurodéputé EE LV

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201318 • ECONOMIE

Page 39: Lib .pdf

Strasbourg

Dijon

Lyon

Toulouse

Bordeaux

Orléans

Nantes

Caen

Brest

Lille

Paris

MontpellierMarseille

Strasbourg

Dijon

Lyon

Toulouse

Bordeaux

Orléans

Nantes

Caen

Brest

Lille

Paris

MontpellierMarseille

Nice Nice

Strasbourg

Dijon

Lyon

Toulouse

Bordeaux

Limoges

Orléans

Nantes

Caen

Brest

Lille

Paris

MontpellierMarseille

Nice

Ajaccio

NuageuxSoleil Couvert FaibleModéréFort

CalmePeu agitée

AgitéeAverses Pluie

Éclaircies

Orage

0,6 m/12º

LE MMATINN Une faible perturbation vaarriver à traverser le nord du pays endonnant de nombreux nuages maisjuste quelques goues.

L’APRÈÈS-MMIIDI Les nuages dominent dela Bretagne à la Lorraine. Ailleurs, lesoleil s'impose et les températures sontde saison.

-10°/0° 1°/5° 6°/10° 11°/15° 16°/20° 21°/25° 26°/30° 31°/35° 36°/40°

FRANCE MIN/MAX

LilleCaenBrestNantesParisNiceStrasbourg

FRANCE MIN/MAX

DijonLyonBordeauxAjaccioToulouseMontpellierMarseille

SÉLECTION MIN/MAX

AlgerBruxellesJérusalem LondresBerlinMadridNew York

Neige

0,3 m/12º

0,3 m/16º

0,3 m/17º

1 5 m/17º

SAMEDI

Mitigé en Manche. Ailleurs, chaleurdevenant lourde et finalement orageuse en cours de soirée.

DIMANCHE Dégradation pluvio orageuse sur lamoitié nord. Au sud, le soleil sera plusgénéreux. Ressenti souvent lourd.

LUNDI

0,1 m/18°

1 m/13º

13/2212/2712/2418/2715/2215/3018/27

20/279/21

15/2812/1714/2514/3312/25

10/199/17

12/159/2010/2117/2512/25

0,3 m/11º

0,1 m/13º

0,6 m/16º

0,6 m/14º

0,6 m/17º

0,1 m/12º

0,3 m/12º

0,1 m/16º

0,1 m/15º

0,6 m/15º

04 9

1 27

01

16

LIBÉRATIONwww.liberation.fr11, rue Béranger 75154 Pariscedex 03 Tél : 01 42 76 17 89 Edité par la SARLLibération SARL au capital de 8726182 €11, rue Béranger, 75003 ParisRCS Paris : 382 028199Durée : 50 ans à compter du 3 ju n 1991 CogérantsNicolas DemorandPhilippe Nicolas Associée unique SA Investissements Presseau capital de 18 098 355 €

Directoire Nicolas DemorandPhilippe Nicolas Directeur de la publicationet de la rédactionNicolas Demorand Directeur délégué de larédaction par interimFabrice Rousselot

Directeurs adjoints de la rédactionStéphanie AubertSylvain BourmeauEric DecoutyFrançois SergentAlexandra SchwartzbrodDirectrice adjointede la rédaction,chargée du magazineBéatrice VallaeysRédacteurs en chefChr stophe Boulard(technique) Gérard LefortFrançoise Marie Santucci(Next)Directeurs artistiques Alain BlaiseMartin Le ChevallierRédacteurs en chefadjoints Michel Becquembois(édition)Jacky Durand (société)Olivier Costemalle et Richard Poirot(éditions électroniques)Jean Christophe Féraud (éco futur)Luc Peillon (économie)Nathalie Raulin (pol tique)

Mina Rouabah (photo)Marc Semo (monde)Bayon (culture)Sibylle Vincendon etFabr ce Drouzy (spéciaux)Pascal Virot (politique)Directeur administratif et financierChloé NicolasDirectrice de lacommunication Elisabeth LabordeDirecteur commercial Philippe Vergnauddiffusion@liberation frDirecteur dudéveloppement Pierre Hivernat

ABONNEMENTSMarie Pierre Lamotte03 44 62 52 08sceabo@liberation frabonnements liberation frTarif abonnement 1 anFrance métropolitaine : 371€

PuBLICITÉ Directeur général deLibération MédiasJean Michel LopesTél : 01 44 78 30 18

Libération Medias 11, rueBéranger, 75003 Paris Tél : 01 44 78 30 68Amaury médias25, avenue Michelet93405 Sa nt Ouen CedexTél 01 40 10 53 04hpiat@manchettepubfrPetites annoncesCarnet

IMPRESSIONCla (Héric)Cmp (Escalquens)Midi print (Gallargues)Nancy Print (Nancy)POP (La Courneuve),

Imprimé en France Tirage du 14/06/13:132 079 exemplaires

Membre de OJDDiffusion ContrôleCPPP: 115C 80064ISSN 03351793

Nous informons nos lecteursque la responsabilité du jour nal ne saurait être engagéeen cas de non restitution dedocuments « Pour joindre un journaliste,envoyez lui un email initialedu prénomnom@liberationfrex: atoto@liberat onfr

T E

R C S N O

R

S N E R C O

R C E

C T I R

I V R

R S I T

V C S

1 5 7 9

8 9

7 6 3 2 1

9 6 5

1 9 6 7 2

6 3

6 2 9

2 4 6

4 7 8

SUDOKU MOYEN

MOT CARRÉ SUDOKU

Convaincus d’avance

MOT CARRÉ

4 2 6 7 3 9 1 5 8

9 8 5 4 1 2 3 7 6

3 7 1 8 5 6 4 2 9

2 5 7 3 8 4 9 6 1

1 9 8 2 6 5 7 3 4

6 4 3 9 7 1 2 8 5

7 1 2 6 9 8 5 4 3

8 3 9 5 4 7 6 1 2

5 6 4 1 2 3 8 9 7

N S C I M E F O R

I E M O R F S N C

R F O N S C I M E

M I S E C N O R F

C O N F I R M E S

F R E S O M C I N

O N F M E S R C I

E C I R F O N S M

S M R C N I E F O

Abonnez-vous

À découper et renvoyer sous enveloppe affranchie à Libération, service abonnement, 11 rue Béranger, 75003 ParisOffre réservée aux particuliers, si vous souhaitez vous abonner en tant qu’entreprise merci de nous contacter.

Oui, je m’abonne à l’offre intégrale Libération pour 6 mois, au tarif de 109 € au lieu de 254,10€ (prix au numéro). Mon abonnement intégral comprend la livraison de Libération chaque jour par portage* + tous les suppléments + l’accès permanent aux services numériques payants de Libération.fr + le journal complet sur Smartphone et Tablette (formule « web première » incluse).

Signature obligatoire :Carte bancaire N° Expire le ac ac Cryptogramme abc Date ac ac abbc

mo s année les 3 de n e s ch ff es au dos de vot e ca te bancai e

Nom ttttttttttttttttttttttttttt Prénom tttttttttttttttttttttttttttt

Adresse tttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttt

Code postal abbbc Ville tttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttttt

Téléphone ac ac ac ac ac E-mail ttttttttttttttttt@ttttttttttttttttttt

*O e valab e jusqu au 3 décemb e 20 3 exc us vement pou un nouvel abonnement en ance mét opol taine et ése vée aux pa t cu ie s a liv aison du quot d en est assu ée pa po teu avant 7 h 30 dans p us de 500 v lles les aut es communes sont iv ées pa voie pos a e es n o ma ions ecue l ies sont destinées au se v ce de vot e abonnement et e cas échéant à ce taines publicat ons pa enai es Si vous ne souhaitez pas ecevoi de p oposi ions de ces pub ications cochez ce te case

http://abo.liberation.frVous pouvez aussi vous abonner très simplement sur :

O Règlement par chèque.

O Règlement par carte bancaire.

AP003740 ANS

OFFRE SPÉCIALE

6 mois pour 109€

seulementau lieu de 254,10 €

Chaque jour l e quotidien, livré chez vousavant 7h30 par porteur spécial* du lundi au samedi

24h/24 et 7j/7 tous les services et contenusnumériques en accès libre

Les appli Smartphone & Tablette (compatibles Androïd)

Chaque mois le mensuel Next

Abonnez-vous à l’offre INTÉGRALE à tarif anniversaire

57%de réduction

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 JEUX­METEO • 19

Page 40: Lib .pdf

MontBlanc:ascensiontropgoûtéeL’accès au refuge et au sommet va être contrôlé par des gendarmes. Les puristes s’insurgent.

«D o you have amap ?» Appuyésà un rocher, sacsà dos volumineux

posés dans la neige, les deux hom-mes sont souriants mais perdus etfatigués, après 1700 mètres de dé-nivelé. Ils nous ont vus progresserdans la voie d’ascension au montBlanc, le long du glacier de Bion-nassay et nous attendaient. Notreguide leur explique qu’ils sont sousle refuge de Tête Rousse (3200 mè-tres d’altitude), leur indique l’iti-néraire et les alerte : il est déjà18 heures, une heure tardive pourun alpiniste même en ce début juinensoleillé. Ils sont venus de Pologneet espèrent réussir l’ascension dumythique toit des Alpes en une se-maine. Ils envisagent de planterleur tente au moins deux fois sur lavoie.Ces nombreux prétendants au montBlanc, venus de l’Est, avec peud’argent et un esprit d’alpinisme

traditionnel, sont de-venus la bête noire dela vallée. «Avec leurs

gros sacs, ils font prendre des risquesaux autres dans les passages délicats.Ils s’écartent de la voie, ne savent pass’encorder correctement. Ils campentprès du refuge du Goûter et laissenttoutes leurs merdes là-haut!» râlenttrois guides de Saint-Gervais quiredescendent avec leurs clients,épuisés mais ravis d’avoir réussi lesommet.

CAMPING. Depuis dix ans, Jean-Marc Peillex, le maire UMP de lacommune de Saint-Gervais, d’oùpart l’itinéraire le plus fréquenté(95% des ascensions), tempêtecontre cette multitude de tentes quipolluent l’environnement et le pa-norama en altitude. Il martèle quele camping est interdit dans ce siteclassé depuis 1951 et qu’il y a«pourtant eu jusqu’à 43 tentes l’étédernier». Il dénonce aussi la «sur-fréquentation» de la voie d’accèsnormale au mont Blanc, la «banali-sation» d’un sommet que plus de20000 personnes tentent de gravirchaque été. «Quand il fait mauvais,ces alpinistes peu expérimentés fontcourir des risques aux autres en ve-nant s’entasser à 250 dans le refugeprévu pour 100 personnes.» Mais cetété, alors que le nouveau refuge duGoûter va prendre le relais du bâti-ment vétuste, le maire a obtenugain de cause. Le préfet de Haute-Savoie, Georges-François Leclerc,a mis en place un dispositif excep-tionnel : dès ce week-end, deuxgendarmes stationnent près duglacier de Tête Rousse, juste avant

l’entrée dans le délicat couloir duGoûter, pour une mission de «dis-suasion préventive», indique le pré-fet, visant à mettre fin aux «com-portements déplacés et dangereux».«On les incitera à camper à TêteRousse, seul site autorisé, gratuit etdoté de toilettes sèches, ou à y laisserleur tente en consigne», précise lecapitaine Ribes, du Peloton degendarmerie de haute montagne

(PGHM). Les gendarmes ne fouille-ront pas les sacs, ne confisquerontpas les tentes mais rappelleront laréglementation et conseilleront cesalpinistes «dilettantes». Et se ré-servent la possibilité d’interveniren hélico au Goûter pour faire dé-monter les campements. «C’est unebonne initiative parce que le montBlanc et la voie du Goûter, c’est unesituation exceptionnelle avec des pics

de fréquentation qu’on ne voit nullepart ailleurs en montagne, et uneclientèle dont 75% n’a pas le niveaupour faire l’ascension», observePierre Schmidt, guide de hautemontagne à la tête de l’agenceOdyssée, à Chamonix.

SÉCURITÉ. Les puristes de la mon-tagne hurlent face à ce qu’ils consi-dèrent comme une intrusion dans

ce traditionnel «espace de libert黫Espace de liberté, oui, au sens del’esprit alpinistique que l’on trouvedans les livres de Frison-Roche. Maispas zone de non-droit», rétorque lepréfet. «Si une cordée montée avecl’aval des gendarmes meurt plus hautsous une avalanche, que dira-t-on?»s’inquiète un guide de Chamonix.Lui appelle à distinguer le problèmeenvironnemental de celui de la sé-curité qui «en montagne relève de laresponsabilité individuelle.» Le mairede Chamonix, Eric Fournier, par-tage cet avis : il ne fera pas appelaux gendarmes. Sur la voie d’as-cension qui part de sa ville et passepar le col du Midi, il y aura seule-ment un membre de la Chamo-niarde, une société de prévention etde secours locale.De son côté, la Coordination mon-tagne, un collectif d’associationsd’alpinistes, entend redonner sa«valeur alpine» au lieu. Elle lanceune campagne d’informationeuropéenne par le biais des maga-zines spécialisés et des clubs al-pins. Intitulé «L’ascension du montBlanc, une affaire d’alpinistes»,qui résume les consignes pour gra-vir le toit des Alpes et rappelle quesi par beau temps, l’ascension pa-raît peu difficile, le vent, lebrouillard ou la neige la transfor-ment vite en enfer pour des alpi-nistes non aguerris. •

Par ÉLIANE PATRIARCAEnvoyée spéciale à Chamonix

RÉCIT

Un bivouac de tentes à côté du refuge du Goûter, en août. PHOTO PASCAL TOURNAIRE

REPÈRES

15C’est le nombre de mortssur les voies d’accès en 2012.Entre 1990 et 2011, dans la voiedu Goûter, le Peloton degendarmerie de haute montagne a recensé 256 accidents,74 morts et 180 blessés.

230C’est le nombre de person­nes, en moyenne, qui tententl’ascension du mont Blancchaque jour d’été, selon l’officedu tourisme de Chamonix, soitplus de 20000 par saison.

Chamonix-Mont-Blanc

Refuge du Goûter

Saint-Gervais-les-Bains

Mont-Blanc4 810 m

HAUTE-SAVOIE

ITALIE2 km

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201320 • SPORTS

Page 41: Lib .pdf

FOOT Le Brésil ouvrira sa-medi, face au Japon, laCoupe des Confédérationsà Brasilia (à 21 heures enFrance), véritable prélude àla Coupe du monde 2014.Le Mexique et l’Italie com-plètent le groupe A, alors quel’Espagne, l’Uruguay, Tahitiet le Nigeria tenteront de dé-crocher l’une des deux pre-mières places qualificativesdu groupe B. La finale setiendra le 30 juin. A la veilledu coup d’envoi de cetteépreuve qui se tient dans un

contexte économique mo-rose, plusieurs manifesta-tions du mouvement dessans toit se sont tenues àproximité des stades.

FOOT Le président du clubHavrais, Jean-Pierre Louvel,se serait opposé à un con-trôle antidopage de sesjoueurs suite à une rencontreà domicile, selon la commis-sion dopage de la FFF. Sus-pendu six mois, Louvel ré-fute l’accusation et parled’une incompréhension.

«Je n’ai jamais vu un parcours aussi bienpréparé, les trous difficiles le sont encoreplus. Ils ont reculé les départs sur les pluslongs et compliqués, ce qui rend les parsplus complexes! Et j’adore, car cela permetde faire la différence.»Le golfeur Phil Mickelson passé de la théorie à la pratiquejeudi en prenant la tête lors de la 1e journée de l’US Open

85 pointsont été inscrits par le «Big Three» du Miami Heat, quis’est imposé jeudi lors de la finale de basket NBA sur leterrain des Spurs de San Antonio (109 93) pour revenir àhauteur (2 victoires partout) dans une série au meilleurdes sept matchs. 80% des points pour le trio donc, soit33 points pour LeBron James (15 tirs réussis sur 25,11 rebonds, 4 passes, 2 interceptions et 2 contres),32 points pour Dwyane Wade et 20 points pour ChrisBosh, qui a aussi gobé 13 rebonds. Du côté des Spurs,Tony Parker va moins bien: 31 minutes de jeu pour empêcher son élongation à la cuisse droite de se transformeren déchirure. Le prochain match est pour dimancheau Texas.

N’ en déplaise à TonyEstanguet ou Re-naud Lavillenie,

l’image tricolore des derniersJeux de Londres, vu deFrance, avait le profil d’unepetite (1,69 mètre) basket-teuse à houppette; shooteuseà la fois électrique, volontaireet providentielle arrachantles avantages décisifs sur destirs longues distance dans letempo de la sonnerie annon-çant la fin des quart-temps.Ombre. A l’heure où laJSF Nanterre n’en finit plusde fêter son extraordinaire ti-tre de champion de France etoù Tony Parker flambe en fi-nale de la NBA, la meneuseCéline Dumerc et les mé-daillées d’argent des JO re-viennent en pleine lumière àpartir de samedi: elles débu-teront ce jour un champion-nat d’Europe qui, pour êtreorganisé à domicile, peut leurvaloir quelques points de plussur un champ de bataille mé-diatique qui n’obsèdent queceux (ou celles) qui ont prisle pli de vivre dans l’ombre.Dumerc en a parlé : «Ac-cueillir cet Euro est un supercoup, d’autant que nos résul-tats de Londres n’étaient pasprévus [au moment de l’attri-bution, ndlr]. Il ne pouvaitvraiment y avoir de meilleur ti-ming. Quand on a été cham-pionnes d’Europe en 2009,plus personne n’en parlait aubout de deux jours. Là, ça acontinué, encore et encore.Jusqu’à aujourd’hui: les Jeux,c’est planétaire.» Un cham-pionnat d’Europe, moins.

Les Françaises ouvriront lebal à Trélazé (dans le Maine-et-Loire), les vice-cham-pionnes d’Europe turquesouvriront le même dans lecomplexe sportif du Kercado(1700 places!) de Vannes etla moitié du tour principal àMouilleron-le-Captif, dansl’agglomération de La Ro-che-sur-Yon : le small isbeautiful qui a toujours carac-térisé le basket français a étépoussé à une sorte de pa-roxysme, le tour final –desquarts par élimination di-recte jusqu’à la finale, du26 au 30 juin– n’ayant jamaisque les honneurs de la villed’Orchies et de sa sallede 5000 places, vestige de lagrandeur évanouie du clublocal.

Tant mieux pour les basket-teuses françaises: elles pour-ront travailler leur image desportives d’élite à taille hu-maine, dans la foulée d’uneCéline Dumerc qui s’est len-tement construite en tantque joueuse altruiste capablede tous les efforts défensifsavant de se découvrir à30 ans superstar du shoot àla faveur des JO.Pour la meneuse de Bourgescomme pour la plupart deses coéquipières, la vie de-puis Londres a ressemblé à

un été sans fin. Dumerc a ac-cumulé les distinctions indi-viduelles. Bourges a terminéà la 3e place du Final Four, unexploit qui vaut bien celui deLondres dans un contexte oùles clubs russes, aux moyensincomparables, se surarmentde saison en saison. L’inté-rieure Sandrine Gruda a en-fin remporté l’Euroligue avecEkaterinbourg (18 points et8 rebonds en finale pour laFrançaise), en plus de l’habi-tuel doublé Championnat deRussie–Coupe de Russie.Ecarts. Les Bleues ont gagnéleurs neuf matchs de prépa-ration en creusant des écartsextravagants comme ce40-10 à la 22e minute de larencontre contre l’Espagne,le 9 juin. Il faut dire que per-

sonne, à com-mencer par desRusses définitive-ment privées de lalégendaire MariaStepanova, nesemble en mesurede contrarier

l’avancée tricolore vers untroisième titre continental.Qu’est-ce qu’il reste ? LaTurquie. Ou une équipe quise révélerait à elle-même :l’histoire des compétitionsen est rempli. Les Bleues de-vront aussi surveiller leurpropre adresse extérieure,suspecte ; le prix que payeune équipe qui n’est jamaisaussi forte que dans l’exalta-tion défensive, l’intensitéphysique et la dureté. Pas desouci : le public adore ça.

GRÉGORY SCHNEIDER

Euro: lesBleuessurlalancéedesJeuxBASKET Fortes d’une médaille d’argent à Londres, lesFrançaises, à domicile, sont en quête du titre européen.

Céline Dumerc lors de la demi­finale des Jeux de Londres. PHOTO SERGIO PEREZ REUTERS

«Cet Euro est un supercoup, d’autant que nosrésultats de Londresn’étaient pas prévus.»Céline Dumerc meneuse des Bleues

Si le Paris SG cherche toujours un entraîneur pour la saison 2013 2014, le Lille Olympique Sporting Club (Losc)a trouvé le sien: René Girard, champion de France avecMontpellier en 2012, rejoindra le club nordiste. Il aurafallu expliquer la démarche aux supporteurs des«Dogues», certains d’entre eux ayant monté un groupeFacebook contre sa venue. C’est le style de l’homme quiétait en cause: rétif à utiliser les éléments de langage–comme raconter le match que tout le monde vient devoir, histoire de parler pour ne rien dire lors des pointspresse obligés après les rencontres– qui font le miel deses collègues, Girard a parfois eu un comportement unpeu leste; un doigt d’honneur par ci ou une allusionscatologique par là. Lille reprendra le championnatà domicile le 10 ou 11 août contre Lorient. PHOTO REUTERS

RENÉ GIRARD ENTRAÎNERA LILLEMALGRÉ LA GROGNE DE SUPPORTEURS

LES GENS

La reproductionde nos petites annonces

est interdite

Le CarnetEmilie Rigaudias

0140105245

carnet libe@amaurymedias fr

CARNET

Tél. 01 40 10 52 45Fax. 01 40 10 52 35

Vous pouvez nous faire parvenirvos textes par e.mail :

[email protected]

Vous organisezun colloque,un séminaire,une conférence…

Contactez-nous

Réservations et insertionsla veille de 9h à 11h

pour une parution le lendemain

Tarifs 2013 : 16,30 € TTC la ligneForfait 10 ignes 153 € TTC

pour une parution(15,30 € TTC la ligne supplémentaire)

Abonnés et associations : -10%

Le Carnet

Vous organisezun colloque,un séminaire,une conférence…

Contactez-nous

SouvenirS

Stéphan, tu es làet pas là

TunousmanquesDix ans déjà

La famille Aoust et ses ami(e)s

Il y a dix ans, le 15 juin 2003

Georg R.GarnerPsychanalyste à Paris

disparaissait brutalement

A l'occasion de la parutionde l'ouvrage L'étoffe du réel,une journée de rencontres

ouverte à tousautour de sa pensée

et de son travail, se tiendrale 21 septembre 2013,au 83, boulevardArago,

75014 Parissous l'égide de la FédérationdesAteliers de Psychanalyse

contact :corinne alexandre-garner

@u-paris10 fr

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 SPORTS • 21

Page 42: Lib .pdf

IMMOBILIER REPERTOIRE

ENTRENOUS

JOURDE FêTE

MESSAGESPERSONNELS

[email protected] Contact: Tél: 01 40 10 51 66 [email protected] Contact: Tél: 01 40 10 51 66

[email protected]: Tél: 01 40 10 51 66

[email protected] Contact: Tél: 01 40 10 52 11

LoCaTion

RECHERCHE

Salarié Libération recherchepetit appartement(20 - 25m2) à louer auxalentours de République(III, X, XI, XIXe arr.).06 51 23 64 83

venTe

4 PIÈCES

avenDreParis 13ème,Bibliothèque F.mitterrand- Tolbiac.4 pièces, 90m2.Dans petite résidencestanding de 2005,5e ascenseur, soleil doubleexposition, très calme,vue dégagée, balcons à cielouvert. Séjour 33 m² (ouvertsur bureau transformable en3ème chambre), 2 chambres,nombreux placards, cuisineéquipée, salle de bains avecwc, salle d'eau, wc. Accèssécurisé. Cave, parking.Prestations de qualité.Proche bus, métro, RER, tram,commerces, école, lycée.Prix : 820.000€.TeL. [email protected].(Agences s'abstenir)

5 PIÈCES

Paris (xx)M° Alexandre Dumas.Pour amateur des AnnéesTrente et d' ArchitectureModerne, dans un ancien hôtelparticulier de 1934, très belappartement 6 pièces de136,5m2, comprenant3 chambres (4ème possible).Salle à manger avec bas-reliefsigné.Prestations de qualité. Doubleexposition sur rue etcour arborée. Garage double.1 090 000 EurosPart. 06 81 12 00 86

ATYPIQUES

LanGuiDiC (56)Vivez autrement... à 20kms deLorient, à 25kms de Carnac,en pleine nature uneadorable cabane en boisédifiée sur un terrain arboréde 8000 m2 traversé par unerivière.Havre de repos idéal pourdécompresser, la cabane30m2 + mezzanine de15 m2. Grande terrassecouverte exposée plein sud.Tous commerces à 3kms.Vendue meublée.Part. Tél 06 84 91 60 73

IMMEUBLES

(11) urgent particuliervd immeuble 160 m2 surnivx, situé au centre dePort la Nouvelle, donnant surle port de plaisance au coeurdu village.L'immeuble est composé de 4appartements :2 studios de 20 m21 t2 de 48 m21 t3 de 50 m2tous déja loués à l'année etrécemment rénovés(plomberie, électricité,toiture, peinture...)Px : 199000€

GES : D (de 21 à 35)Classe énergie : E(de 231 à 330)AGENCES S'[email protected]. 06.09.27.63.60

LOFTS/ATELIERS

VILLEJUIF (94)Loft de 100 m2 avec studiod'enregistrement, terrasse.Très bon état, calme, lumineux.Grand séjour, cuisine ouverte,2 chambres. Idéal musicien,artiste, son, audiovisuel...Métro Villejuif Léo Lagrange(L7) Prix : 435.000 [email protected]. 06 63 54 44 55

PARIS (XX)Loft dupleix 78m2, dansancienne usine Eiffel. QuartierBelleville Jourdain(à 5 mn des Buttes Chaumont).PoutresEiffel apparentes. Premierétage avec ascenseur. Trèscalme & lumineux, sans visà vis. 730 000 [email protected]

ARGENTEUIL (95)Loft d'architecte 200 m2.Centre ville, à 9mn de ParisSt Lazare. Prestations dequalité, HSP 4,20m. Terrasseplein sud vue tour Eiffel.582 000 €

Part. 06 12 50 83 94

MAISONS DE VILLE

94 - JOINVILLEMAISON/LOFT (9/2013)177m2, 4 ch., Jard. Dépend.1 190 000 E - 06 95 56 25 45

viLLéGiaTure

CAMPAGNE

AUZET (04)grde Maison de caractère8 pers. (4 ch). Tt confort.calme. Idéalerando/découverte.px 450 à 700/sem.Part. 06 15 28 88 73

Quercy Périgord promotionjuillet 30kms Sarlat, 30kmsCahors très jolie maison tourde guet, grande salle de séjour,3 chambres, 2 salles de bain,Parc de 2000 M². Proximitévillage et plan d'eau 800 mlocation 1 200 € les 3 semaineset 900 €

La quinzaine 06 juillet au 03Août Tél 06.86.94.60.21

ÉTRANGER

NEW YORK / EAST VILLAGECharmant 2 pces. Proximitécommerces et métro.4 couchages. 1200 €semaine/190€ nuit. Dispo en Juillet.www.unjourjirai.com

MER

CaLanQuesmarseiLLeLOUE CHARM. PTE MAISONTT CONFORT 5/6 pers.très calme avec patio arboré,4mn à pied de la plage (PointeRouge). Clubs plongée, voile,équestre à proxim. imméd.du 20/07 au 24/08 : 850/sem.Photos sur dem.Cont. : 06 63 7403 51

Particulier loue 15' CANNESà la semaine15/06 au 30/093 villasmeubléestrès grand luxe, 6-7 ch.doubles, avec chacunepiscine, espace spa, fitness,terrasses, jardins arborés,ascens., park.et garage privés.Domaine privatif sécuriséavec conciergerie. Splendidevue mer etmontagne. Proches golfset commerces.2 journées/ sem. yacht privéavec jetski offertes.De5900€

à 12900€/sem.selon villa et pé[email protected] 18 30 52 72Site www.locations-apparts-villas.fr

Belle Ile en mer, studio2 pers. tout confort, jardinprivatif, 350€/sem.06.26.34.03.62

MONTAGNE

savoie :ChaLeT120m2village nature1 400 m ALTITUDE650 € la semaine.TeL : 06 78 99 25 40

Crois en tes rêves Jules, notreamour t'accompagne et quevivent tes 20 ans !Maman Papa Annabelle

I don't know what I would dowithout u, u understand me thebest and are always here forme, love you my FrenchB xoxo

Chloé. Ligne 8, 13 juin 19h45 unclochard nous a mariéj' aimerais vous [email protected]

a voTre serviCe

CASTING

Témoignez votre bonheurYannarthus-Bertrand

Yann Arthus-Bertrand vousinvite à vous livrer devant sescaméras pour les besoins deson nouveau film.Si à travers les épreuves vousavez réussi à trouverle Bonheur et à aller del'avant, votre témoignagenous intéresse.Envoyez-nous voscoordonnées à :[email protected]

DIVERS RÉPERTOIRE

Disquaire sérieux achètedisques vinyles 33t/45t.Pop/rock, jazz, classique,...Grande quantité préférée.Déplacement possible.Tél. : 06 89 68 71 43

ÉVÉNEMENTS

Un poème sous l'eau 4Corbeille de fruitsSirènePruneDans mon scaphandreJe sais l'avenirLa gélatineL'oeilLe bribrabrouLe cisanmageLa mousseLes lignes de vie nouvellesLe cinéma d'horreurLe temps sans les imagesDanphandre jevenir

Clément Rodzielski

LIVRES - REVUES

Ecrivain reconnureCherChepersonnes éprouvant ledésir d'écrire et de fairepublier son vécu,sa biographie, histoireexceptionnelle ou pas.ClauderenauD064706 92 49

CarneT De DéCoraTion

ANTIQUITÉS/BROCANTES

Estimation gratuiteEXPERT MEMBRE DE LA CECOA

[email protected]

06 07 03 23 16

Tous sujets, école de Barbizon,orientaliste, vue de venise,

marine, chasse, peintures degenre, peintres français &

étrangers (russe, grec,américains...), ancien atelierde peintre décédé, bronzes...

XIXe et Moderneavant 1960

Achètetableauxanciens

CommerCiaux

Recherche h/fPersonnes parlant allemand.Tél. 01.47.56.20.81

Divers

YourParisteacher

IsabelleDupondFRENCHLESSONS

Speakquickly french thankstoacreative teacher !

Apprenez rapidementàparler le françaisgrâceàuneprofesseurcréative !

Tél.0681006960www.yourparisteacher.com

ThéâTre

L’Atelier des DéchargeursCours de théâtre

Profs : A-M.Philipe, J.NersonInscriptions : 01 42 36 00 02+ d'info : www.htbillet.com

AUDITION25 juin 2013

Professionnelsdu tourisme

contactez-nous au 01 40 10 51 50

La reproduction

de nos petites annonces

est interdite

Vous souhaitez passer un message dans les rubriquesTRANSPORTS AMOUREUX,

MESSAGES PERSONNELS, JOUR DE FÊTE.Professionnels, contactez-nous au 01 40 10 51 50,

Particuliers au 01 40 10 51 [email protected]

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201322 • ANNONCES

Page 43: Lib .pdf

A LA TELE SAMEDI20h50.JohnnyHallyday en direct deBercy.Le concertanniversaire.Divertissement.23h10.Les experts;Série américaine :La proie du désert (1 & 2/2),A la carte.Avec William Petersen,Marg Helgenberger.1h35. New York PoliceJudiciaire.

20h45.Simplementpour un soir.Best of.Divertissementprésenté par Patrick Sabatier.23h00.On n’est pascouché.Invités : Thierry Marx, le Dr JacquesLeibowitch, IAM…Magazine présenté parLaurent Ruquier.2h05. Hebdo musiquemag.

20h45.Le clan des Lanzac.Deuxième partie.Téléfilm de JoséeDayan.Avec Fanny Ardant,Muriel Robin.22h20.La loi de monpays.Téléfilm de DominiqueLadoge.Avec AlexandreHamidi, NoamMorgensztern.0h00. Soir 3.

20h55.La dame en noir.Drame de JamesWatkins, 95mn, 2012.Avec Daniel Radcliffe,Ciarán Hinds.22h30.Vikings.Série canado-irlandaise :Cap à l’ouest,L’expédition,La pêche miraculeuse.Avec Travis Fimmel,Gabriel Byrne.0h50. Bambi.Documentaire.

20h50.Aux origines del’humanité.1/3 - Les premiers pas,2/3 - La naissance del’homme,3/3 - Homo sapiens,dernier survivant de lalignée.Documentaire.23h20. Birth of rock.Documentaire.0h15. About:Kate (8).L’effet boomerang.Série.0h40. Tracks.

20h50.Hawaii 5-0.Série américaine :Imi Loko Ka ‘Uhane,Ua Hala,Loa Aloha,Na Me’e Laua Na Paio,Ma Ke Kahakai,Ho’opa’l.Avec Michelle Borth,Scott Caan.1h50. Supernatural.Souvenirs de l’au delà.Série.2h40. European pokertour.

20h45.Doctor Who.Série britannique :Enfermés dans la toile,Les anneaux d’Akhaten,Destruction mutuelleassurée,Le fantôme deCaliburn,L’invasion des cubes.Avec Matt Smith, Karen Gillan.0h15. Francofolies de laRochelle 2012.General Elektriks.Spectacle.

20h35.Échappéesbelles.Marseille, laméditerranéenne.Magazine présenté parJérôme Pitorin.22h10.Tunisie - L’étoilede l’Afrique.Documentaire.23h05. Paris Dubaï :aller simple.Documentaire.23h55. La mémoire descartes.Documentaire.

20h40.Le grandbêtisier de l’été 2013.Divertissement.22h35.La grandeanthologie del’humour.Le meilleur deshumoristes français dela lettre A à D.Divertissementprésenté par Élizabeth Buffet.0h15.La grandeanthologie del’humour.

20h50.Titanic : de sang et d’acier.Série italo-franco-britannique :La vérité vous libèrera,Enjeux importants,Le poids du pouvoir.Avec AlessandraMastronardi, Kevin Zegers.23h45. X-Files : auxfrontières du réel.4 épisodes.Série.

20h45.Football : Brésil / Japon.Coupe desconfédérations FIFA 2013.Sport.22h55.Suspect n°1.2 reportages.Magazine présenté parJacques Legros.1h05. Suspect n°1.Magazine.3h05. Les filles d’à côté6 épisodes.Série.

20h50.Les Simpson.La chorale despequenots, Mariageplus vieux, mariageheureux, Moe nia Lisa,Marge reste de glace,Simpson Horror ShowXVI, Les experts ami-ami.Série.23h15. Génération w9live.0h45. Relookingextrême : spécial obésité.

20h45.Total wipeoutmade in USA.2 épisodes.Divertissement.22h20.Les vies rêvéesd’Erica Strange.Série canadienne :Amour de jeunesse,Flocons de neige.Avec Erin Karpluk,Tyron Leitso.23h50. Comme desoufs.Magazine.0h00. Dessins animés.

20h50.Femmes de loi.Téléfilm français :Cantine mortelle.Avec Natacha Amal,Ingrid Chauvin.22h40.Femmes de loi.Paroles interdites,La fille de l’air : 1re& 2eparties.Téléfilm.2h00. Touche pas àmon poste !3h20. Programmes denuit.

20h45.Fringe.Série américaine :Résonance,Sam Weiss, dernier dunom,Le jour de notre mort.Avec Joshua Jackson,Anna Torv.23h15. Les mystères deHaven.Les péchés des anciens,Douce nuit.Série.0h55. Démons.

20h50.Le Zap.Divertissement.20h50.Le Zap.Divertissement.23h50. Star story.Gossip, l’histoire d’ungroupe hors norme.Documentaire.0h50. Top rock.Musique.1h50. Nuit Indé.Musique.2h50. Nuit live.Musique.

DIMANCHE20h50.La chance dema vie.Comédie française deNicolas Cuche, 87mn,2009.Avec François-XavierDemaison, Virginie Efira.22h35.Les experts :Manhattan.Série américaine :Meurtres en silence,Obsession,Erreur sur la personne,Voleuse de luxe.Avec Gary Sinise.

20h45.Saint-Jacques...La Mecque.Comédie française deColine Serreau, 111mn,2005.Avec Muriel Robin.22h30.Faites entrerl’accusé.Jean-Luc Sebin, leforcené de Versailles.Documentaire.23h45. Journal de lanuit.0h00. Histoirescourtes.

20h45.Miss Fisherenquête !Série australienne :Meurtre àMontparnasse,Partie avec les fées,La reine des fleurs.Avec Essie Davis.23h30. Soir 3.23h50. Lucia et lesgouapes.Film.2h50. Les Grands du rire.Divertissement.

20h55.Strike back.SérieSomalie - mêmesjoueurs, nouvellesrègles (1re & 2epartie)Avec Philip Winchester,Sullivan Stapleton.22h30.Millénium : Les hommes quin’aimaient pas lesfemmes.Film.1h00. Le journal desjeux vidéo.Magazine.

20h45.Fenêtre surcour.Thriller américaind’Alfred Hitchcock,112mn, 1954.Avec James Stewart,Grace Kelly.22h30.Bartabas et lesamazones deVersailles.À l’Académie duspectacle équestre.Documentaire.23h40. Les salons de musique.

20h50.Capital.La France en panne :comment faire sauterles verrous ?Invité : le Président dela République FrançoisHollande.Magazine.23h00.Enquêteexclusive.Magazine.0h25.Enquêteexclusive.Magazine.1h50. Météo.

20h45.Supermanreturns.Film fantastiqueamméricain de BryanSinger, 154mn, 2006.Avec Brandon Routh,Kate Bosworth.23h20.Super heros.Documentaire.0h30. Astéroïde.Téléfilm.1h55. DST : Dussartsurveille la télé.Magazine.5h10. Highlander.

20h35.Carcassonne,les secrets de lacitadelle.Documentaire.21h30. C’est notreaffaire.Magazine.22h05.La bicyclettebleue.Téléfilm français :Partie 2/3.Avec Laetitia Casta.23h40. États-Unis :chiens et chats sousprozac.

20h40.Les valseuses.Comédie dramatiquefrançaise de BertrandBlier, 155mn, 1974.Avec GérardDepardieu, Miou-Miou,Patrick Dewaere.22h50.Maîtresse.Film érotique.0h50. Earl.5 épisodesSérie.2h40. Programmes dela nuit.

20h50.Tellement Vrai -Édition spéciale.Vive le mariage.Magazine présenté parMatthieu Delormeau.22h40.Tellement Vrai.Prostitution : quels sontcelles et ceux qui viventde leur corps.Magazineprésenté parMatthieu Delormeau.2h10. Poker.3h05. Programmes denuit.

20h45.Football :Mexique / Italie.Coupe desconfédérations FIFA2013.Sport.22h55.New York police judiciaire.Série.23h50. Football :Espagne / Uruguay.Coupe desconfédérations FIFA2013Sport.

20h50.Lie to me.Série américaine :Pour le meilleur…,Rien n'est absolu.Avec Tim Roth, Kelli Williams.22h30.Lie to me.Les affres de latentation,Amnésie morale,Le prix de la perfection.Série.1h10. Météo.1h15. Programmes de nuit.

20h45.Le maître des éléphants.Film d’aventuresfrançais de PatrickGrandperret, 95mn,1995.Avec Jacques Dutronc,Erwan Baynaud.22h25.Le guignolo.Comédie franco-italienne de GeorgesLautner, 90mn, 1980.Avec Jean-PaulBelmondo.0h00. Dessins animés.

20h50.L’été meurtrier.Drame français de JeanBecker, 130mn, 1983.Avec Isabelle Adjani,Alain Souchon.23h15.En quêted’actualité.Plage, excès,délinquance : la facecachée de la Côted’Azur.Documentaire.0h50. Langue de boiss’abstenir.

20h45.Tous différents.2 reportages.Magazine présenté parÉmilie Mazoyer.22h30.Obèses : pertede poids extrême.Jill / Johnny - Kevin et Flor.Documentaire.0h10. Mini-Miss, quisera la plus belle ?Télé-réalité.1h50. Les nouvellesfilles d’à côté.

20h50.Le Zap choc.Divertissement.21h50.Le Zap choc.Divertissement.22h40.Voyageurbeach.Téléfilm d’EricMittleman.AvecRenee Rea.0h00. Nuit live :concert Lou Doillon.Enregistré au Trianonen 2013.Spectacle.

TF1

ARTE M6 FRANCE 4 FRANCE 5

GULLIW9TMCPARIS 1ERE

NRJ12 D8 NT1 D17

FRANCE 2 FRANCE 3 CANAL +TF1

ARTE M6 FRANCE 4 FRANCE 5

GULLIW9TMCPARIS 1ERE

NRJ12 D8 NT1 D17

FRANCE 2 FRANCE 3 CANAL +

SabotageFrance 3, 20h45Alerte au crime de lèse­saga! Le Clan des Lanzac,c’est vraiment pas bien dutout. On n’est même pasallé au bout du premier…

RepassageArte, 20h50Tiens, tiens, ça sent l’été etses redifs à tout va. Maisquand c’est bon… Alors onrepique à la série de docsAux origines de l’humanité.

BachotagePlanète+Bonne idée que cette soi­rée spéciale bachotagePlanète+ bac à base dedocs sur la culture, la poli­tique et la morale en philo.

LES CHOIX

VisionnageArte, 20h45On en revient toujoursà Hitchcock forcément,sauf qu’il faudrait inventerde nouveaux mots pourparler de Fenêtre sur cour.

Premier âgeCiné+ Premier, 22h35Faut bien débuter quelquepart, même quand on estun super­héros, chez lesnazis par exemple. Zou:X­Men: le commencement.

GalopageArte, 22h30Bartabas et les amazonesde Versailles: un long titrequi laisse peu de placepour parler d’un doc quin’a rien de bourrin. Hu hu.

LES CHOIX

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 ECRANS&MEDIAS • 23

Page 44: Lib .pdf

FESTIVAL En vingt ans, la capitale catalanes’est mise au diapason de son rendez-vous des musiques électroniques.

Barceloneau sommetde Sónar

S ónar déménage et c’est toute l’Eu-rope qui en parle. C’est dire à quelpoint le festival catalan de «musiqueavancée» –comprendre principale-

ment électronique– est devenu incontourna-ble en vingt années d’existence, qui ont aussiété celles d’une transformation intense de saville, Barcelone. Sónar, qui fête ça jusqu’à di-

rêter là. Mais des événements comme Sónar l’ontplacé sur l’agenda culturel européen», expliqueMateu Hernández Maluquer, directeur deBarcelona Global, une «plateforme indépen-dante» pour le développement de la capitalecatalane. Ce qui ne s’est pas fait selon unquelconque plan politique. «Pendant quelquesannées, la municipalité se contentait de se de-mander qui étaient ces gens qui jouaient de lamusique techno en plein jour dans le Raval. Lareconnaissance est venue de l’étranger, quandJack Lang est venu à Barcelone [en 1999, ndlr]et a demandé à rencontrer les organisateurs deSónar. La mairie s’est demandée : “Qui ça ?”»Le gouvernement Jospin venait alors toutjuste de reconnaître la place des musiques

électroniques dans le paysageculturel français, après des an-nées de guéguerre entre ravers et

pouvoirs publics, et Sónar faisait déjà figurede phare, par sa nature urbaine et réfléchie.«Tout à coup, notre musique avait le droit d’êtreau cœur d’une ville et pas dans un champboueux», se rappelle Matthew Herbert, musi-cien britannique fidèle au festival barcelonaisdepuis toujours.

DANSEURS ÉCLAIRÉS. «Au début des an-nées 90, le mouvement des free parties n’étaitpas arrivé en Espagne, analyse Ricard Robles,l’autre cofondateur de Sónar avec Sergio Ca-ballero. On avait à la place un gros circuit declubs très commerciaux à Barcelone et Valence.Il n’y avait pas d’événement pour raconter l’his-toire de cette musique», comme le rock a no-tamment su en créer. Le festival s’est donclancé sur cette idée, draguant ouvertement

Par SOPHIAN FANENEnvoyé spécial à Barcelone

Photo PIERRE MERIMEE

Cette année, la programmation de jour s’est déplacée du quartier du Raval, dans la vieille ville, à la Fira Montjuic, vaste espace au pied de la colline qui accueillit une partie des JO de 1992.

manche, a donc déplacé sa programmationde jour, quittant son nid trop étroit du Raval,au cœur de la vieille ville, pour les grands es-paces de la Fira Montjuic, au pied de la collinequi accueillit une bonne partie des compéti-tions des Jeux olympiques en 1992.Comme il y a quelques années, lorsque Sónara échangé ses nuits sur la plage contre la car-casse impersonnelle d’un autre parc des ex-positions plus lointain, des voix s’élèventpour regretter le passé insouciant d’un festi-val qui accueillait 6000 personnes à ses dé-buts et a désormais franchi la barre des100000. C’était avant, dans les années 90. Ledéménagement du Sónar de jour vers la placed’Espagne devrait s’imposer plus souple-ment: on y circule bien mieux en-tre les quatre scènes, le son estmeilleur, les danseurs ont plus deplace pour s’ébrouer sur la fausse herbe et Só-nar en profite pour créer Sónar+D, un salonencore embryonnaire dédié aux nouvellestechnologies de la musique live. Surtout, labelle façon qu’a le festival de mêler «des ar-tistes radicaux et d’autres plus grand public avecune même approche de la fête», comme le ditEnric Palau, cofondateur et programmateur,fonctionne toujours parfaitement durant leprogramme de jour. La nuit est devenue uneautre affaire, une bétaillère moins attirante.Victime de son succès visionnaire, Sónar a dûfaire des sacrifices.Le festival en a vu d’autres, lui qui s’est créédans une ville qui s’inventait une nouvelle vieen transformant son passé industriel en lieuxde culture et d’événements internationaux.«Après les JO de 1992, Barcelone aurait pu s’ar-

REPORTAGE

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201324 •

CULTURE

Page 45: Lib .pdf

est passé de quar-tier pauvre eten marge à attrac-tion touristique entrain de se «bo-boïser» intégrale-ment.Quel rôle Sónarjoue-t-il dans l’histoire desmusiques électroniques ?Le festival a anticipé leur ac-ceptation. En 1994, desartistes essentiels, commeAphex Twin ou Mouse onMars, en étaient à leurs dé-buts, Daft Punk n’avait pasencore sorti d’album. Sónarleur a offert une scène tout

en consacrantdes pionniers duDJing, commeRichie Hawtin etJeff Mills. En fai-sant cela, Sónar acontribué à trans-former l’image

de cette culture, d’un aspectpurement festif –des jeunesqui prennent de la drogue –à une forme artistique perti-nente qui est aujourd’hui unphénomène culturel, maiségalement une économiepuissante.

Recueilli par S.Fa.(à Barcelone)

Le R

oche

r rou

ge P

au C

ézan

ne ©

RM

N -M

usée

de

oran

gerie

/ H

ervé

Lew

ando

wsk

i

Le C

anne

t, Pi

erre

Bon

nard

© F

onda

tion

Bem

berg

Tou

ouse

/ S

auc

esco

m

grandatelierdumidi.com

OUVERT TOUS LES JOURS

9H - 19H SAUF LE JEUDI

12H - 23H

13 JUIN

13 OCTOBRE

2013

RÉSERVEZ DÈS MAINTENANT

mp2013.fr fnac.com

francebillet.com

ticketnet.fr

DE CÉZANNE À MATISSE

MUSÉE GRANET AIX-EN-PROVENCE

DE VAN GOGH À BONNARDMUSÉE DES BEAUX-ARTS PALAIS LONGCHAMPMARSEILLE

EXPOSITION ÉVÉNEMENT

C p od t p r

Pa t n i es m d as P r en i e de l x os i nP r en i e o fi c e s

Pa t na e b l t e ie

O a ge P r e a re n mé i ue d l e p s t on

E p s t on r c n ue d n é êt n t o al

A r F a ce T a sp r e r a r en fi c el

un public de danseurs éclairés et envoyant unmessage fort en s’installant dans le nouveaupôle de pointe créé au Raval, alors en pleinchambardement, par le Centre des culturescontemporaines (CCCB) et le musée d’Artcontemporain de Barcelone (Macba). PourMari Paz Balibrea, professeur au départementdes Etudes ibériques de l’université Birkbeckde Londres, qui a étudié la mutation de lacité (1), «le Macba est depuis ses débuts un lieu

qui questionne politiquement la place du muséeet de la culture dans la ville, et en même tempsun élément central de la régénération de Barce-lone. Ce statut contradictoire explique aussibeaucoup de choses sur l’esprit de Sónar».

GIGANTISME. Même si Jaume Ciurana, l’éluchargé de la culture à la mairie de Barcelone,estime que «c’est la même ouverture à la créa-tivité ayant financé les maisons de Gaudí qui aaccueilli un festival de musique électronique àBarcelone», c’est avant tout la municipalitéqui a fini, au milieu des années 2000, parcomprendre qu’un rendez-vous annuelcomme Sónar, qui rapporte aujourd’hui entre50 et 60 millions d’euros en une semaine etfait venir 60% de son public de l’étranger, sefondait parfaitement dans l’image de moder-nité cool qu’elle veut diffuser dans le mondedepuis 1992. Comme le festival de pop Pri-mavera Sound, qui se tient en mai, Sónar fut«une façon d’amener les habitants de la ville àse rendre dans les quartiers en pleine rénova-tion» du Raval et de Diagonal Mar, car «c’estaussi comme ça qu’on change la géographied’une ville…» Sónar grossit avec Barcelone.On peut s’effrayer de ce gigantisme, maistant qu’il conservera son regard acéré sur lamusique qui se crée aujourd’hui, le rendez-vous catalan restera plus qu’une fête géante.Après vingt ans d’existence, il est devenu cequ’il voulait être : un Woodstock moderne dela culture électronique. •

(1) Mari Paz Balibrea, «Urbanism, Cultureand the Post industrial City: Challengingthe Barcelona Model», in «Journal of SpanishCultural Studies», 2001.

L’édition 2013 de Sónar propose commed’habitude un panorama musicaltrès vaste. Après les vétérans Kraftwerket les dynamiteurs de frontières MajorLazer vendredi, la soirée de samedi inviteles piliers electro pop Pet Shop Boyset 2 Many DJs. Mais c’est entre cesgrosses lignes qu’on ira écouter le trèsbon label allemand 50weapons, quis’installe pour la nuit ce samedi avec latechno texturée d’Anstam et de Phon.o.Dans la journée, outre les jeunes TNGHTet AlunaGeorge, on guettera le triolondonien Darkstar, en pleine mutationpop, et surtout la Sénégalaise Fatima al­Qadiri, qui explore les scènes ghettoaméricaines (grime, footwork) avec unsurprenant sens du théâtral. On verraégalement Dinos Chapman, moitié duduo d’artistes contemporains ChapmanBrothers, qui vient de publier un premieralbum un rien angoissant. S.Fa.Sónar, jusqu’à dimanche. Rens.: www.sonar.es

TECHNO POP NON STOP

Paolo Magaudda, sociologue, analyse commentSónar a accompagné le renouveau urbain:

«Le festival atransformé l’imagede la culture electro»P aolo Magaudda est

sociologue à l’univer-sité de Padoue (Italie).

Dans le cadre de recherchessur «les festivals de musiquecomme expression d’une dé-mocratie participative», ilétudie l’exemple spécifiquede Sónar depuis 2009.Est-ce que Sónar aurait punaître dans une autre villed’Espagne au début des an-nées 90 ?Il y a d’évidentes raisons quiexpliquent pourquoi Barce-lone était le meilleur endroitpour accueillir un festival demusique électronique avecune vision internationale etintellectuelle. Par rapport àMadrid, la culture à Barce-lone a toujours été plus in-ternationale: le Modernismecatalan avait un lien fort avecl’Art nouveau, les artistescatalans étaient proches del’avant-garde française dansles années 20… Il y a doncune continuité, mais ce quiest curieux c’est qu’au débutdes années 90 le centrenévralgique de la musiqueélectronique en Espagne,c’était Valence et sa «Rutadel Bakalao», des dizaines declubs qui attiraient les jeunesdu jeudi au lundi matin. Maisc’était un mouvement trèslocal et, surtout, pas trèscultivé, très différent de l’es-prit branché de Sónar.L’attitude de la municipalitéde Barcelone vis-à-vis de sesfestivals de musique a servide modèle partout en Europepour l’organisation d’événe-ments au cœur des villes,mais est-ce que cela s’est faitde façon réfléchie ?Non, les festivals ont éclairédes changements urbainsdéjà engagés. Et tout ça nes’est pas fait sans tension.Avoir plus de 10000 person-nes en même temps dans lepetit quartier du Raval aentraîné des problèmes devoisinage, ce qui a sûrementjoué dans la décision de dé-placer le Sónar. Dans unsens, ce déménagement il-lustre la façon dont s’esttransformé le centre de Bar-celone depuis vingt ans, qui

DR

Sónar, qui réunissait 6000 personnes à ses débuts, accueille maintenant plus de 100000 festivaliers.

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CULTURE • 25

Page 46: Lib .pdf

ARTS Entretienavec MohamedKahouadji, dontles toiles aciduléeset animalièressont présentéesen galerie à Paris.

à un ordre. Les couleurs emploientune sémiologie précise, d’après lestravaux de chercheurs allemands.Un éventail de symboles naïfs, bi-bliques ou mythologiques, s’invitedans de nombreuses toiles. J’aimeque mon travail donne l’impressiond’être candide.Des chercheurs allemands? Goethe?Des chercheurs ont réalisé uneétude prospective sur la sémiologiedes couleurs. Attendez,je vous cherche ça. Jesuis à l’hôtel à Cholet,j’ai du mal à trouver sur le Net,c’est une étude qui démontre quedans 50-70% des cas, nousassocions le même mot ou adjectifà une couleur précise (sur plus decinquante couleurs).

Cholet? Mieux vaut ne pas savoir ceque vous y faites. Reprenons.Ça roule. Tranquille le chat, pépèrele panda.Les titres de vos toiles sont des titresde chansons…Ça peut mettre dans une ambiance,j’aime mixer les genres, unmash-up peinture-sculpture-mu-sique. Associer des styles opposéscomme ce que je fais en sculpture.

Etre toujours en mouve-ment et ne jamais regar-der derrière soi sont des

leitmotivs dans ma recherche artis-tique. J’essaie, en tout cas.Dans Thugs and Princess, qui estla princesse?Techniquement, le doute persistejusqu’au bout car il y a deux por-

traits de femme dans l’exposition.J’ai une préférence pour VirginiaWoolf.L’autre est Duras…Oui, j’ai hésité avec Rosa Bonheuraussi… mais elle pratiquait la pein-ture animalière, alors la distanceétait difficile.Quelle est votre formation en artsplastiques?J’ai fait de la BD, du graffiti, de lachirurgie maxillo-faciale, de lapeinture, puis de la sculpture. Enfait, tant que ça reste de la contre-culture ou de la «sous-culture»,j’adhère. Si ça devient à la mode,j’arrête et je fais autre chose.Du graf?Oui, au lycée surtout, et avant la fa-culté de médecine. Une bonne ex-

périence pour gérer l’espace et lacouleur.Vous avez suivi des cours ensuite?Non, je voulais que ça reste instinc-tif, brut et à distance de tout cou-rant. Rien de pire que le norma-lisme dans l’art, j’aime les chosesiconoclastes, mais pas frontales.Vous êtes pourtant, ou justement,très attentif à la technique…Oui, cela ne doit pas m’empêcherde rechercher mon identité vi-suelle, en tâtonnant essentielle-ment. J’aime compiler des techni-ques oubliées et des techniquesmodernes non destinées à l’effetproduit. Je cherche ma propre lan-gue, dénuée de mots. Peinture aulatex, verni au tampon, tout estprétexte à la différence.Vos animaux ont un regard trèstroublant. Vous mettez du LSDdedans?Un voyage avec des neurodyslepti-ques, c’est un voyage sans frontièrede temps ou d’espace, sans visa etsans douane. Et surtout, on peut enfabriquer à la maison. En trouverdans des capricornes en Bretagne,pour ceux qui sont nuls en chimie…Vous peignez beaucoup, vite? C’estquoi, la suite?Je peins beaucoup et vite sur decourtes périodes (le temps d’unesérie). Après, je recherche unenouvelle approche, qui sera donnéepar un livre. J’attends de lire le bonlivre.C’était quoi, la bibliothèque deThugs and Princess ?A deux toiles près, il n’y a qu’unpetit livre : Esquisse d’une auto-analyse, de Pierre Bourdieu, pourmoi une porte ouverte vers l’infinid’un des esprits les plus brillantsdu XXe siècle.Un problème d’hexis?Effectivement, j’essaie avec mesmodestes connaissances d’envi-sager la vie comme de la sociologieperformative. J’essaie de lutter,à ma modeste échelle, contre lesviolences symboliques que noussubissons. C’est l’objet de ma rési-lience, que je voudrais partager sije le peux.

Recueilli par ÉRIC LORET

«J’ai commencépar un cochon bleuen tenue de boxe»

O n l’avait remarqué sur Face-book il y a quelques années,sérendipité d’été. Un singe

avec un flingue et une bananegéante. On l’a retrouvé au Salon deMontrouge (Libération du 14 mai),où il vient d’obtenir le prix Kristal,décerné par des enfants. Mainte-nant à la galerie Detais, pour unesérie Thugs and Princess (les voyouset la princesse). Toujours la mêmefascination devant ses toiles mala-des, effrontées, hypersexuées paromission. On tente de percer lesecret par tchat interposé, réaliséle 12 juin entre 22 et 23 heures.Depuis combien de temps peignez-vous des animaux?Depuis cinq ans maintenant. Jecrois que j’ai commencé par un co-chon bleu en tenue de boxe dansune assiette, à l’époque du scandalede la grippe porcine.Au début, vous mettiez des groupesd’animaux en scène. Galerie Detais,il n’y a plus que des portraits…Oui, j’ai limité l’expression à desportraits en plan serré, tous de for-mat carré. J’ai voulu revisiter leportrait animalier dans une postureplus contemporaine. L’art anima-lier est un parent pauvre de la pein-ture. J’avais l’habitude d’une miseen scène narrative avec un premierniveau de lecture évident. J’aivoulu opacifier le plus possible cepremier niveau et éviter de tomberdans une symbolique trop transpa-rente. Je crois que je me lassais demon travail, j’ai voulu me prendreà contre-pied, quitte à ne pas êtrecompris parfois : qu’importe.Une symbolique «trop transpa-rente»?Par exemple, j’ai fait une toile il y aquelques années, où une mère élé-phant pratique une manœuvre deHeimlich à son bébé éléphant quis’étouffe avec une cacahuète (avecPatrick de Bob l’éponge appendu),un autre plan proposait une partiede Tetris… En dessous on pouvaitvoir écrit : «2 vies de gagnées.»C’est une prise nazie, la manœuvrede Heimlich?Presque, c’est un geste de secou-riste. Je mettais en opposition le faitque tout le monde connaît Tetris,mais que peu de gens connaissentles gestes qui pourraient sauver unami qui s’étouffe avec un bretzel.La toile s’appelait Laissés Sans Dé-fenses (LSD). En fait, j’avais toutraté, car le public y voit un gestesexuel. Tant pis.On a le sentiment, même et surtoutavec les portraits, qu’il se passequelque chose d’obscène dans lehors-champ de vos tableaux…Effectivement, les titres obéissent(presque) systématiquement à unniveau de lecture dans une série, et

Docteur en médecine avec unethèse intitulée les Canons dela beauté, Mohamed Kahouadjiest né en 1979 à Alger. On le croitsouvent fils de la Figurationnarrative (Arroyo, Rancillac,Klasen, etc.) mais c’est plutôtla philosophie de l’animalitéqui caractérise son travail.Car quand on représenteles animaux, c’est l’humanitéqu’on questionne: sa nature,son fonctionnement, ce quenous faisons là, la différenceavec le singe, etc. Et lorsqu’il peintdes humains, Kahouadji les mettout entier dans le regard, fenêtrevers le sens ou son absence, versce qui est en deçà du langage. É.Lo.«Thugs and Princess» de MohamedKahouadji. Galerie Detais, 10, rueNotre­Dame­de­Lorette, 75009.Jusqu’au 29 juillet. Entrée libre.

L’HUMANITÉEN QUESTIONS

Alpha beta gaga, 2010. Mohamed Kahouadji a commencé à peindre des animaux il y a cinq ans.

Notorious, 2012 (à gauche) et Gravel Pit, 2013. PHOTOS MOHAMED KAHOUADJI

INTERVIEW

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 201326 • CULTURE

Page 47: Lib .pdf

Adieu et merci, de et par Latifa Laâbissi. PHOTO FRÉDÉRIC IOVINO

L e festival Latitudes con-temporaines est devenutrès people à sa façon.

Les femmes panthères, mère(Pascaline) et fille (Esme-ralda), natives d’Armentièressitôt le rideau de Cannes re-fermé, sont venues animerune soirée après une repré-sentation de François Chai-gnaud et Cecilia Bengolea auVivat, un des théâtres parte-naires de la manifestation.D’autres personnalités ontplanché pour Jonathan Cap-devielle, en fournissant desthèmes pour un match d’im-provisation avec six acteurs,qu’il s’agisse de Madonna,Clarisse Lispector ou MartineAubry. Voilà pour le décor,non sans humour bon enfantdu festival. Qu’on y ait croiséle Sud-Africain Steven Co-hen, en partie établi à Lille,réjouit, preuve de son ouver-ture.Fantômes. Quant aux starsdes plateaux, leurs noms,sans doute moins connus,assurent l’avenir de l’artchorégraphique, toutes gé-nérations confondues. Lapièce Adieu et merci, de LatifaLaâbissi, dont la premièreaura lieu en novembre aufestival Mettre en scène deRennes (Ille-et-Vilaine), estdéjà très avancée. Présentéau Théâtre de l’Oiseau-Mou-che, ce solo est une réflexionsur ce moment emblémati-que du théâtre occidental,le salut, et une convocationd’un certain nombre de fan-tômes qui hantent la scènechorégraphique.La chorégraphe et danseuse

évolue dans une robe couleurlilas, se confondant avec unrideau plein de malice de lascénographe Nadia Lauro.Tout est question d’appari-tion et de disparition, sur leplateau nu éclairé en vert parYves Godin. Latifa Laâbissiprête son corps nu ou defemme à barbe à d’autres quiont fini de saluer, notam-ment à l’un des créateurs dela danse butô, Tatsumi Hiji-kata. Un coucou de la main,façon reine d’Angleterre, desfigures plus grotesques… On

passe d’un état à un autre–rire, désolation– alors quedes revenants viennent habi-ter le plateau désert.L’Ivoirienne Nadia Beugré ré-vèle un autre pan du festival.Dans son spectacle Quartierslibres, elle brave les interditset se réapproprie des espacesa priori confisqués, commecelui de la salle qu’elle ar-pente sans oublier de toucherles spectateurs, en robeprincière découpée dans desbouteilles d’eau.Depuis début 2010, Latitudescontemporaines collaboreavec le service d’héberge-ment de l’Association laïquepour l’education, la forma-tion, la prévention et l’auto-nomie (Alefpa) qui prend encharge des jeunes de 16 à21 ans, dans des situationsfamiliales difficiles, ou qui

débarquent en France seuls.Dix jeunes effectuent desstages professionnels pen-dant la durée du festival. Dixautres ont participé à desateliers avec Nadia Beugré.Celle-ci a mis spécialementau point, au jour le jour, uneméthode de transmission dela danse et de sa philosophie.Groupe. Passée elle-mêmepar des situations drama-tiques ou périlleuses, elle estentrée en contact avec lesjeunes Lillois, Algériens, Ma-liens… Elle a utilisé leur pro-

pre force, leursmanières d’être,leur violence, leurprovocation. Leurdésarroi aussi.Tout ce qu’ils luioffraient lui a per-

mis de constituer un vraigroupe où le regard circule etoù le corps se sent plus àl’aise, plus ouvert. Elle avécu avec eux, décidécomme eux «la façon de sa-border, de taquiner». Ils ontl’air d’avoir apprécié la ren-contre et, de plus, tous sontallés voir les spectacles, dé-sarçonnés parfois, mais éga-lement riches de nouvellesréflexions pour «combattreautrement dans la vie, avecd’autres armes».

Envoyée spéciale à Roubaix MA-RIE-CHRISTINE VERNAY

Latitudes contemporaines,à Lille (50). Jusqu’au 20 juin.«Quartiers libres» de NadiaBeugré, le 18 juin à l’Etre­Lieud’Arras, 20h. Le 14: JonathanCapdevieille (gare Saint­Sauveur), Fanny de Chaillé(la Rose des Vents).

FESTIVAL D’Arras à Lille, la manifestation forme desjeunes et présente des chorégraphes qui montent.

Dans le Nord, la danseen positive Latitudes

Le festival collabore depuistrois ans, avec l’Alefpa,une association qui s’occupede mineurs en difficulté.

On y attendait JuliaVarady. Mais la sopranolégendaire, qui devait animer des master classes aufestival d’Auvers sur Oisece week end a déclaréforfait pour «raisons desanté». Il reste quandmême du beau monde,avec Alexandre Tharaud,Henri Demarquette, MichelDalberto, Philippe Berrod,Slava Chevliakov, Li Siqian,Sandrine Piau ou SaraMingardo. A l’occasion decette 33e édition, notonségalement la sortie d’uneintégrale des EtudesTableaux de Rachmaninoven CD, par la jeune pianiste Sanja Bizjak sur leurlabel DiscAuverS, étoilemontante qu’on suit, avecsa sœur aînée égalementpianiste, Lidija Bizjak.Festival d’Auvers­sur­Oise (95).Jusqu’au 5 juillet.Rens.: www.festival­auvers.com

THARAUD SE METAUVERS SANSVARADY

LE FESTIVAL Vin et Magrez aux Beaux-Arts de ParisL’Institut culturel Bernard-Magrez de Bordeaux passe un ac-cord de mécénat avec les Beaux-Arts de Paris : don de300 000 euros sur trois ans à l’école pour soutenir notam-ment un programme doctoral intitulé SACRe (Sciences-Arts-Création-Recherche). L’Institut accueillera annuellementdeux diplômés de l’école en résidence pour trois à six mois.

Mort du producteur André GintzburgerL’Indifférence et la Curiosité : c’est le titre du (gros) livre demémoires qu’avait publié il y a deux ans André Gintzburger,figure marquante du théâtre des cinquante dernières annéesen tant que producteur et organisateur de tournées. Il jouanotamment un rôle décisif dans l’essor du théâtre de rue.Gintzburger est mort mercredi à l’âge de 90 ans.

Quelque part dans la nuit est une perle grise. Datée(1946, limite pour le genre), témoin le casting anonymeà moustache (John Hodiak…) où ne surnage que la faceen gaufrette vaguement familière de Richard Conte,en noir et blanc carré expressionniste, l’intrigue suit uneamnésie, cas toujours captivant. Partant d’une ouverturesanitaire au front à la Johnny Got His Gun, l’argumenttraumatique (le souffle d’une grenade essuyé de tropprès) entraîne un soldat inconnu de lui même dans undédale à quiproquos de proto thriller, croisant la pistede 2 millions de dollars nazis évanouis –comme lamémoire du héros. L’un dans l’autre, femmes fatales,machos et fétichisme à talons s’en mêlant, dignes deVon Stroheim ou de Hitchcock, le tout brumeux etthéâtral nimbé d’innocence plastique des origines, uneexhumation tout ce qu’il y a de curieux et bath, affichepolarde comprise. BAYON PHOTO SWASHBUCKLER FILMS«Quelque part dans la nuit», de Joseph L. Mankiewicz. 1h50.Cinéma Le Champo, 51, rue des Ecoles, 75005.

«QUELQUE PART DANS LA NUIT»,AMNÉSIE EN NOIR ET BLANC

LE FILM DU DIMANCHE

CATHERINE DENEUVEANNE VERNONNINO CASTELNUOVOMARC MICHEL

UN FILM DE JACQUES DEMYMIS EN MUSIQUE PAR MICHEL LEGRAND

CINÉ-TAMARIS présente

version restaurée en 2013 - Le 19 Juin au CinéMa

Guillaume Perret & ElectricEpic Turbulences rock et fablesurbaines fantasmagoriques denotre sax­bombe Parc floral, boisde Vincennes, 75012 Sam, 15h30(Talents Adami, C Bonacina, 17h)

Fred Wesley Funk trombone del’ex­JB’s New Morning, rue desPetites­Ecuries, 75010 Sam, 21h

Elina Duni L’Albanaise dynamisela tradition en quartet Parc floral,75012 Dim, 15h30

MÉMENTO

LIBÉRATION SAMEDI 15 ET DIMANCHE 16 JUIN 2013 CULTURE • 27

Page 48: Lib .pdf

PARE-BRISEPANORAMIQUE

SERVICES CONNECTÉS (2)ÉCRAN12’’ HD (1)

COMMANDESTACTILES

Modèle présenté : Nouveau Citroën C4 Picasso THP 155 Exclusive avec options jantes alliage18‘’, peinture métallisée, projecteurs directionnels xénon bi-fonction et toit vitré panoramique (LLD entretien inclus sur 48 mois et 40 000 km : 47 loyers de 389 €, après un 1er loyer de 7 500 €, sous condition de reprise). *Exemple pour la LLD sur 48 mois et 40 000 km d’un Nouveau Citroën C4 Picasso HDi 90 Attraction neuf, hors option ; soit 47 loyers de 249 €, après un 1er loyer de 4 900 €, sous condition de reprise d’un véhicule d’occasion, quel que soit son âge, contrat d’entretien 4 ans inclus, au prix de 21 €/mois pour 48 mois et 40 000 km (au 1er des deux termes échu), comprenant l’entretien périodique et l’assistance du véhicule 24 h/24 et 7j/7 (conditions générales du contrat d’entretien disponibles dans le réseau Citroën). Montants TTC et hors prestations facultatives. Offre réservée aux particuliers, valable jusqu’au 30/06/13, dans le réseau Citroën participant, et sous réserve d’acceptation du dossier par CREDIPAR/Citroën Financement, locataire-gérant de CLV, SA au capital de 107 300 016 €, no 317 425 981 RCS Nanterre, 12, avenue André-Malraux, 92300 Levallois-Perret. (1) Équipement de série ou non disponible selon versions. (2) Voir conditions en point de vente. **Selon autorisation préfectorale.

CONSOMMATIONS MIXTES ET ÉMISSIONS DE CO2 DE NOUVEAU CITROËN C4 PICASSO : DE 3,8 À 6,3 L/100 KM ET DE 98 À 145 G/KM.

www.citroen.fr

NOUVEAU CITROËN C4 PICASSOPORTES OUVERTES LES 15 ET 16 JUIN**

NOUVEAU CITROËN C4 PICASSO HDiÀ PARTIR DE 249 € / MOIS* ENTRETIEN 4 ANS INCLUSAPRÈS UN 1ER LOYER DE 4 900 € EN LOCATION LONGUE DURÉE DE 48 MOIS ET 40 000 KM SOUS CONDITION DE REPRISE