L'homme est une femme comme les autres,. et vice-versa!

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Dossier L'homme est une femme comme les autres,. et vice-versa! L'image de l'homosexuel(le) au cinéma Au cinéma, la plus ancienne image de deux hommes dansant entrelacés remonte à l'un des tous premiers films d'Edison en 1895. Durant près de 60 ans, l'homosexualité a ensuite dû avancer masquée. Vilipendée, associée aux perversions ou telle vedette montrent bien que la mérite de s'assumer avec un certain sexuelles, l'homosexualité s'est cachée chose est encore loin d'aller de soi. aplomb ! Dans de récentes productions dans ce due les Américains appellent lehollywoodiennes, elle reste, comme Le rire- faisant p asser beaucoup de 'subtext', entre des images et sous des dLins les comédies d'antan, LihnLible, choses, c'est dans les comedies (Ndale diLilogues apparemment Lmodins. Du inoffensive et cLiche souvent un grLind douce, Gabriel Aghion, France 1996; fLimeux diLdogue dans Red River coeur à l'instar du voisin de JLick Go ou maudit, Josiane BalLisko, France (Howard ilLiwks, USA 1948) entre deux Nicholson dLins As Good As It Gets 1995; Der bewegte Mann, S6nke Wort- hommes échangeant leurs colts Ldors (J Limes L.Brooks, USA 1997). Plus mann, Allemagne 1994; Echte Kerle, que leurs regards complices et leur Rolf r Allem ne 1 996 ln Out s étonnant est [Lipp . arition d'une sissy Silbe, Lig; , mines :1111usées ne laissent guère de dans le film frLinois Le derriere (VLde- FrLink Oz, 1997) quel 'on trouve 'aujour- doute quant all véritable objet de leur rie Lemercier, France 1999). Le copain d'hui le plus de protagonistes homo- désir, Liu 'subtext' homosexuel de Ben sympLi qui héberge VLdérie Lemercier sexuels présentés sous un jour résolu- Hur de Willi a m Wyler (USA 1959) pour dLindine du derrière, mais le film offre ment fi,tvorLible - mais pas toujours lequel le scénariste Gore Vickil imagina ensuite une gLimme plus viiiriee dénués de tout cliché! Dans les produc- Cille Ben HUE et son ami ML',', il avaient d'irrniges de l'homosexuel avec les per- tions plus modestes ou indépendantes été. Limants dL ms leur , jeunesse (le très sonnages de ClLiude Rich et de Dieu- des grands studios en revanche, les per- conservLiteur Charlton Heston ne fut pas donné. qui ne rilLinquent pa s d'ironie. sonnLiges de g'ays et de lesbiennes sont mis Liu courant de ce petit dékUl!), il fal- DLins le film Martin (HacIH(Adolfo plus diversifiés, plus nuLincés et nette- lait faire preuve d'une perspicacité AristLirLiin, Espagne 1997), [Licteur ment plus réalistes. digne de Sherlock Holmes pour décou- Dante - le personnage le plus positif du vrir des allusions a l'homosexualité film - exhibe fièrement sa différence qui dans certaines remarques, un geste La 'sissy' est pour lui le gage de sa liberté. fugace ou méme un seul regard un peu nt. a st nsi Le personnage que les Américains dési- i gnent comme `sissy' est l'homosexuel La L-;sb:enne Depuis quelques années, le phénomène un peu guindé, qui marche en se dandi- du film “ politiquement correct» impose nant, lève haut le petit doigt, discute de Si la sissy est exagérément efféminée, la une image plus ouverte et positive du Préférence chiffons et aime sa maman et femme 'masculine', de Queen Christine gay et de la lesbienne mais l'affaire de la son petit chien. La siss y a suscité beau- (Rouben Mamoulian, USA 1933) a très populaire actrice Ellen de Generes coup de réactions de colère chez les Johnn .v Guitar (Nicholas Ray, USA (star de la sitcom Bien) qui a choqué homosexuels qui n'ont pas apprécié 1954), a été associée a des notions telles Hollywood en déclarant publiquement d'être réduits dans l'imagerie populaire que l'autorité, le pouvoir, l'ambition et sa liaison avec la comédienne Anne à cette figure un peu ridicule, mais elle parfois la violence. indifférente par Heche ainsi que les incessantes rumeurs fut la première figure homosexuelle nature à l'homme, la lesbienne y gagne sur l'homosexualité éventuelle de telle tolérée à l'écran et elle a au moins le tille liberté et une indépendance qui ne 70 forum 193

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Dossier

L'homme est une femmecomme les autres,.et vice-versa!L'image de l'homosexuel(le) au cinémaAu cinéma, la plus ancienne image de deux hommes dansant entrelacés remonte à l'un des touspremiers films d'Edison en 1895. Durant près de 60 ans, l'homosexualité a ensuite dû avancermasquée.

Vilipendée, associée aux perversions ou telle vedette montrent bien que la mérite de s'assumer avec un certainsexuelles, l'homosexualité s'est cachée chose est encore loin d'aller de soi. aplomb ! Dans de récentes productionsdans ce due les Américains appellent lehollywoodiennes, elle reste, comme

Le rire- faisantp asser beaucoup de'subtext', entre des images et sous des dLins les comédies d'antan, LihnLible,

choses, c'est dans les comedies (NdalediLilogues apparemment Lmodins. Du inoffensive et cLiche souvent un grLind

douce, Gabriel Aghion, France 1996;fLimeux diLdogue dans Red River coeur à l'instar du voisin de JLick

Go ou maudit, Josiane BalLisko, France(Howard ilLiwks, USA 1948) entre deux Nicholson dLins As Good As It Gets

1995; Der bewegte Mann, S6nke Wort-hommes échangeant leurs colts Ldors (J Limes L.Brooks, USA 1997). Plus

mann, Allemagne 1994; Echte Kerle,que leurs regards complices et leur

Rolf r Allem ne 1 996 ln Outs étonnant est [Lipp .arition d'une sissy

Silbe, Lig; ,mines :1111usées ne laissent guère de dans le film frLinois Le derriere (VLde-

FrLink Oz, 1997) quel 'on trouve 'aujour-doute quant all véritable objet de leur rie Lemercier, France 1999). Le copaind'hui le plus de protagonistes homo-désir, Liu 'subtext' homosexuel de Ben sympLi qui héberge VLdérie Lemerciersexuels présentés sous un jour résolu-Hur de Willi am Wyler (USA 1959) pour dLindine du derrière, mais le film offrement fi,tvorLible - mais pas toujourslequel le scénariste Gore Vickil imagina ensuite une gLimme plus viiirieedénués de tout cliché! Dans les produc-Cille Ben HUE et son ami ML',', il avaient d'irrniges de l'homosexuel avec les per-tions plus modestes ou indépendantesété. Limants dL ms leur ,jeunesse (le très sonnages de ClLiude Rich et de Dieu-des grands studios en revanche, les per-conservLiteur Charlton Heston ne fut pas donné. qui ne rilLinquent pa s d'ironie.sonnLiges de g'ays et de lesbiennes sontmis Liu courant de ce petit dékUl!), il fal- DLins le film Martin (HacIH(Adolfoplus diversifiés, plus nuLincés et nette-lait faire preuve d'une perspicacité

AristLirLiin, Espagne 1997), [Licteurment plus réalistes.digne de Sherlock Holmes pour décou- Dante - le personnage le plus positif duvrir des allusions a l'homosexualité film - exhibe fièrement sa différence quidans certaines remarques, un geste La 'sissy' est pour lui le gage de sa liberté.fugace ou méme un seul regard un peu

nt.astnsi Le personnage que les Américains dési-ignent comme `sissy' est l'homosexuel La L-;sb:enne

Depuis quelques années, le phénomène un peu guindé, qui marche en se dandi-du film “ politiquement correct» impose nant, lève haut le petit doigt, discute de Si la sissy est exagérément efféminée, la

une image plus ouverte et positive du Préférence chiffons et aime sa maman et femme 'masculine', de Queen Christine

gay et de la lesbienne mais l'affaire de la son petit chien. La siss y a suscité beau- (Rouben Mamoulian, USA 1933) a

très populaire actrice Ellen de Generes coup de réactions de colère chez les Johnn.v Guitar (Nicholas Ray, USA

(star de la sitcom Bien) qui a choqué homosexuels qui n'ont pas apprécié 1954), a été associée a des notions tellesHollywood en déclarant publiquement d'être réduits dans l'imagerie populaire que l'autorité, le pouvoir, l'ambition etsa liaison avec la comédienne Anne à cette figure un peu ridicule, mais elle parfois la violence. indifférente parHeche ainsi que les incessantes rumeurs fut la première figure homosexuelle nature à l'homme, la lesbienne y gagnesur l'homosexualité éventuelle de telle tolérée à l'écran et elle a au moins le tille liberté et une indépendance qui ne

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Déçues par les hommes hétérosexuels,certaines femmes se tournent résolu-ment... vers les gays, supposés être plussensibles et attentifs! Plusieurs comé-dies viennent d'être construites sur leschéma de la fille qui tente de séduireou (l'aimer un homosexuel (Ohject of

My Affection, Nicholas Hytner, USA1998: The Opposite of ,S'ex, Don Ross,USA 1999; L' homme est une ffer11111C

Con/Me alltre, Jean-Jacques Zilber-mann, France 1998).

Dans d'autres films récents, l'hommegay se contente de jouer le rôle demeilleur ami. L'exemple le plus réussi acet égard est M y Best Friend's Wedding

(P.J. Hogan, USA 1997) dans lequelRupert Everett interprète avec beaucoupd'humour et un charme fou le confidentet consolateur de Julia Roberts. Dans/Vice et Martin (André Téchiné, France1998), c'est Mathieu Amalric quiconsole sa colocataire Juliette Binoche.

Le protagoniste malheureux de Chasing

Am y (Kevin Smith, USA 1997)s'éprend d'une fille ouvertement les-bienne et bien entendu, des homo-

Homo' --cualität

sont pas toujours sans effrayer le male.C'est le vieux -ftntasme de la lesbiennecastratrice qui ressurgit dans Primarv

Colors (Mike Nichols. USA 1998) sousles traits de Kathy Bates menaçant unhomme de lui couper le sexe pour lefaire parler.

Mais quand les femmes s'aiment dansles films, c'est parfois par besoin desolidarité plus que pour des raisonsdirectement sexuelles. Trahies par leshommes, les femmes se serrent lescoudes et parfois un peu plus dansThelma and Louise (Ridley Scott, USA1991), Boys on the Side (Herbert Ross.USA 1995) ou Fried Green Tomatoes(Jon Avnet, 199!). des films dans les-quels les possibles amours entrefemmes sont suggérées avec d'infiniesprécautions. Plus direct est par contreFlic (Deepa Mehta, Inde/Canada 1997)dans lequel deux femmes indiennesdélaissées par leur mari respectif seconsolent mutuellement, ce qui a causéun énorme scandale en Inde.

..r. J ours contrirr es

sexuels tombent aussi amoureux de

hétérosexuels dans des films tels que

Der bewegte Mann, déja cite, Boogie

Nights (Paul Thomas Anderson, USA1997) (côté hommes) ou Elles (Luis

Galvao Teles, Luxembourg 1998) (côtéfemmes) ...et recueillent dans le

meilleur des cas un refus désolé.

Il en est en revanche qui n'y regardentpas de trop près quant au sexe de leurpartenaire. Personnage troublant parcequ'insaisissable, le bisexuel se révèlesouvent un grand séducteur. Anaïs Nin aune relation avec Henry Miller et safemme June dans le film Henry and

,lune (Philip Kaufman, 1990) teintéd'un érotisme très esthétique. DansL'école de la chair (Benoît Jacquot,France 1998), Vincent Martinez per-turbe gravement Isabelle Huppert en ladélaissant régulièrement pour desamants de passage. Dans Nettoyage a

sec (Anne Fontaine, France 1997). unjeune homme s'infiltre dans un couple

banal et séduit aussi bien l'homme quela femme. Insaisissable est aussi MariaSchrader dans Aim&, Und J(Iglair (MaxFarberbOck, Allemagne 1999). ,Juive etbisexuelle (elle couche avec le marid'Aimée), elle est avant tout éprise de

liberté. La plus troublante dans le genrefut cependant Marlene Dietrich dansMorocco (Josef von Sternberg, 1930)qui fait tourner la tête des hommescomme des femmes et embrasse unedame sur la bouche avant de séduireGary Cooper.

Le travesti

Si la sissy amuse, le travesti fait rire, engénéral grassement. De Main' =clic

Charlot (USA 1915) a la Zaza deMichel Serrault (La cage aux

Edouard Molinaro, France 1978) lecinéma burlesque fit grand usagecomique de norme qui s'habille enfemme, gommant généralement au pas-sage toute allusion directement

Photo: Aimée & Jaguar, Max Färberböck, avec Maria Schrader et Juliane Köhler

Juli 1999 71

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Dossier

sexuelle. Encore 1982, Dxv^ü (Syd-

ney Pollack, USA \9M2) comme Mrs.

Doobty^x (Chris Columbus, U8& 1993)s'en tiennent püui l'essentiel ù utie his-Loire d'amour hétérosexuel pour leurhem travesti. Sm//r Like // 8o/ ( BillyWilder, USA )959) est moins timide acet égard. Lorsque le milliardaire 'amou-reux de Jack Lemmon lance son fameux«personne n'est parfait», les frontièresentre hommes et femmes. hétérosexuelsu homosexuels, s'estompent dangereu-sement. Près de 30 ans plus un]. Ber-trand Blier filmera rencontrestrès troublantes entre Gérard Depardieuet Michel Blanc grimés en femmes(Tenue J, soirée, France | g86). Dans unautre genre, la mésaventure de JeremyIrons (laus M. Buireifiv ( David Cronen-berg, USA 1993) est encore plus étrangepuisqu 'il tombe passionnément amou-reux d'une femme sans s'apercevoirqu'il s'agit en réalité d'un travesti!

Aujourd'hui, le travelo d'antan estdevenu 'drag queen' et met les rieurs dcson côté dans y/iu///u, ()m'en of theDeseii ( Stephan Elliott, Australie 1994)ou Ma r/, o/ rose (Alain Berliner, Bel-gique 1997) dans lequel un petit garçonest irrésistiblement attiré par les jupesde sa mère.

Mais le travesti peut aussi révéler unenature beaucoup plus inquiétante, suici-daire (Le locataire, Roman Polanski,France 1976), voireAlfred Hitchcock, USA |um); Dressed

to Kill, Brian De Palma, USA 1900; TheSilence o/ the Lambs, Jonathan Demme,USA 1991). Dans d'autres ucuvos, ilest associe ü la décadence d'uneépoque, quand les valeurs sûres s'envont ü vau-l'eau (Helmut Berger dansLes Dom/' 6, dc Luchino Visconti, Italie1969; Adieu ma concubine, ChenKaige, Chine 1993). La liquidation desanciennes valeurs se fait parfois dans labonne humeur et les travestis sont alorsles reines de |u fête (Cabaret, BobFosse, USA 1972; The Rock y Horror

Picture Show, Jim Sharman, GB 1975).

Naturellement associé aux femmes, letravesti est parfois amené ü partagerleur sor . Dans le film indien Daayra, |aronde brisée (&m"| Pu|ckur,|ndc 1996)un acteur qui ‘joue des rôles de femmes(et s'habille en femme dans la vie cou-

rame) sillonne le pays avec une jeunevillageoise répudiée par sa famille. Cesdeux êtres marginalisés vont finalements'unir et s'aimer mais leur liaison estvouée au drame.

Quand une femme essaie de se fairepasser pour un homme, ce n'est généra-lement pas pour des raisons sexuellesmais pour pénétrer un monde qui lui estfermé, comme le font Sv/rie S'a'le//(George Cukor, USA 1935). Victor, Vic-

toria (Blake Edwards, USA 1982). X,otlqui veut étudier la Thora (Barbra Strei-sand, USA 1983) et plus près de nousl'héroïne (le Shiakespeare iii Loue (JohnMadden, USA/GB 1998). Dans tous lescas, un homme ressent une attirance trèspeu virile pour les jeunes éphèbes maisle malentendu est toujours balayé.

Cas un peu à part. le transexuel apparaîtencore plus étrange que le travesti. La

Pedro Almodovar estimeque les seuls hommes

dignes de considérationsont ceux qui ont décidé ea

porter des seins.

femme qui se transforme en homme apeu inspiré les cinéastes mais l'hommechangé en femme reste un sujet fasci-nant. Que la transformation soit gros-sière ou parfaitement réussie, PedroAlmodovar estime que les seulshommes dignes de considération son/ceux qui ont décidé de porter des seins

( Tout sur nia iiièi'', Espa gne |VoV). Cer-tains cinéastes jouent sur l'ambiguïté etréservent une grosse surprise aux spec-tuocumquunJcoux'dnrdécouvon/quctardivement dans The Ü?///g Game

(Neil Jor un.GB |o92), Midnight /xtheûooCo of Good and /5`7 (C|in/ East-wood, USA 1998) ou Ceux qui m'ai-ment prendront le train (Patrice Ché-reau, France |VVN). que telle personnecharmante qu'ils prenaient pour unel'emnie est en réalité un homme... ou lesdeux ù la fois! Le film anglais Different/O, Girls (Richard Spence, 1996)raconte avec beaucoup de sensibilitél'histoire entre un homme et soli anciencopain devenu une timide jeune femmedont il va tomber amoureux.

L'artiste

La version romantique de |u sissy est ledandy. Distingue, intel-ligent, généralement artiste, il est tolérépar la société a condition qu'il n'afficheP' trop ses penchants. Le prototype dece personnage fut sans doute OscarWilde, récemment interprété par Ste-phen Fry dans le film Wilde ( Brian Gil-bert, GB 1997). Une version plus tra-gique de l'artiste homosexuel est celledu couple Rimbaud/Verlaine (TotalEclipse, Agnicsca Holland, |995),celled'un musicien ressemblant ù Mahlerfrappé a mort par |u beauté d'un adoles-cent dans Mort Venise (iuchinu Vis-conti, Italie \97|)oucelle du cinéasteJames Whale (l'auteur des premiersfilms de Frankenstein) -également fas-ciné par un jeune homme dans .Godsom/M/xsms (Bill Condon, 1998). Ilexiste même des constellations plusconipl iquées communie la relut ion durableentre la femme peintre Dora Cuninê/on(plutôt garçon manqué) et l'écrivainhomosexuel Lytton Strachey ([o/,i \y-mx, [h,ixt"phc,Hum[o"n,OH 1995).

L'artiste homosexuel n'est cependantpas toujours aussi attrayant. L'Alle-mand Rainer Werner Fassbinder (Que-relle, RFA 1982) Ou l'Italien Pier PaoloPasolini (II flore delle titille 'xvonette,Italie/France 1974) furent dans leuroeuvre et dans leur ,\c des cinéastesprofondément dérangeants, projetantune image [nnusma/iquc, agressiveet/ou fortement &o/ixéc de l'homo-sexuel. Or, si les spectateurs apprisdepuis les années 60 tolérer l'exis-tence des homosexuels, les scenesd'amour, quelques P'5 (le dansc, voiremême un simple baiser échange entredeux hommes ü l'écran provoquent: tou-jours une certaine nervosité dans lessalles (le cinéma, Des cinéastes commele Belge Frédérique Fonteyne (Max ,/Bobo, 1998) ont su utiliser ce malaisepour réaliser (les scènes qui heurtent lespectateur. En revanche, le spectacle (ledeux femmes faisant l'amour passeinieux, ce genre (le scènes faisant partiedepuis toujours de l'inventaire ducinénia érotique ()ii elles font le plussouvent figure d'intermède entre deuxapparitions du male, comme c'est aussile cas duos Wik/ /h/'(«^ (johnMcNuo g hmn,USA |ogw).

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Dossier

Une ercreur de '3

Du malaise (lue provoque la sexualité'perverse' de l'homosexuel, il n'y aqu'un pas a sa représentation comme'erreur de la nature' («one of Nature'smistakes, précise un carton dans le filmmuet Wanderer of the 1,17est (*)). Dansl'histoire du cinéma, beaucoup deméchants furent homosexuels et parmiles plus notables, Peter Lorre dans The

Maltese Falcon (John Huston, USA

1941) et les deux étudiants qui commet-tent pour le plaisir un crime gratuit dansThe Rope (Al fre d Hitchcock, USA1948). Aujourd'hui, les homosexuelsrisquent plutOt d'être soupçonnés depédophilie. Trois films récents (Oppo-

site qf Sex: Obiect of My Affection; Hol-Reed d' Angela Pope, GB 1997)

s'opposent fermement 'a cette confusionentre homosexualité et pédophilie. Deshomosexuels, enseignants ou pères defamille, y sont injustement accusésd'avoir abusé de mineurs... ou même depouvoir éventuellement être tentés de leraire!

La lesbienne fut en revanche accusée depervertir l'autour qu'elle n'éprouve paspour un mari et des enfants en une pas-sion malsaine et frustrante pour une

autre femme (Rebecca, Alfred Hitch-cock, USA 1940), ou une ambition pro-fessionnelle démesurée (AH About Ely',

Joseph L. Mankiewicz, USA 1950, danslequel Bette Davis invite une admira-trice a passer la nuit avec elle).

La plupart des religions considèrent

l'homosexualité comme immorale. Lesproblèmes qu'une telle attitude crée auxcroyants homosexuels sont cependantrarement traités au cinéma. On peutciter l'enseignante d'une école catho-lique qui tombe amoureuse d'une artistede cirque dans When Night is Fulling

(Patricia Rozema, Canada 1995) et dansun genre encore plus délicat, le prêtreattiré par les hommes et déchiré entre safoi et ses instincts dans The Priest

d'Antonia Bird (GB 1994).

Beaucoup de régimes politiques ne sontpas en reste et tolèrent mal la libertésexuelle de leurs citoyens. Très peu defilms évoquent le sort d'homosexuelspersécutés par un régime politique.Parmi les exceptions, on se souvient dufilm cubain Fraise et chocolat (TomasGutierrez Alea, Juan Carlos Tabio,1994), du film chinois East Palace,

West- Palace (Zhang Yuan, 1997) ainsique du drame anglais Bent (Sean

Mathias, GB 1997) qui dénonce le sortréservé aux homosexuels dans . lescamps de concentration nazis.

La punition

Dans l'optique d'une morale conserva-trice, la mort est la juste 'punition' pourune vie sexuelle hors des normes, c'est-à-dire hors du mariage. Femmes fatalesou homosexuels, ceux qui ne se confor-ment pas au modèle social dominantdoivent être anéantis. Les exemplessont innombrables. Dans Rebel Without

a Cause (Nicholas Ray, USA 1955), lepersonnage qui meurt est celui de SalMineo dont l'amitié (non partagée) pourJames Dean est fortement teintée d'ho-mosexualité. Quand elle soupçonne queson attirance pour sa collègue n'estpeut-être pas ciu'amicale, l'enseignanteclans The Childrcn's [tour (William

Wyler, USA 19(t1) éprouve LM profonddégoût d'elle-même et se suicide. DirkBogarde a g onise lentement a Venise(Mort ('t Venise). Même dans des filmsplus récents, les homosexuels n'échap-pent pas toujours a ce destin. Dans Pri-

m(Iry Colon' , déjà cité, Kathy Bates sesuicide. James Whale met fin a sa vieclans Gods and Monsters (dans la réa-lité, les conditions de sa mort ne furentjamais élucidées). L'écrivain Joe Ortonest assassiné par son amant (Brick l/pYour Fars, Stephen Frears, GB 1987).La relation entre le peintre FrancisBacon et l'un de ses jeunes modèles setermine tragiquement dans Love is the

Devil (John Maybury, G B 1998) et celleentre Kevin Spacey et son jeune -'pro-tégé' mène a un meurtre dans Midnight

in the Garden of Good and Evil. Dansces trois derniers films, la relation entredeux hommes est dépeinte comme uneaffaire de pouvoir plus que d'amour.

Parmi les scènes qui ont durablementmarqué l'imagerie homosexuelle estcelle de l'homme lynché par la roule surune plage clans Suddenly, Last Stimuler(Joseph L. Mankiewicz, USA 1959) quipréfigure celle, bien réelle, du cinéastePier Paolo Pasolini sur Une plage ita-lienne. Dans The Celluloid Closet, les

Midnight in the Garden of Good andEvil, Clint Eastwood, 1998

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dn, /x Last Summer et la scène du lyn-chage du monstre dr Frankenstein dansBride of Frankenstein (James Whale,USA 1935), reprise dans Gods andMonster. Monstre et pourles braves gens', c'est parfois du pareilau même!

Le sida a bien entendu ranimé cetteconnotation morbide de l'homosexua-lité, même si un cinéaste comme CyrilCollard a tenté dans Les //u///ƒbm',^(France 1992) de dépasser cette notionen ^,nmunhsont' maladroitement lamon. En revanche, le sida est perçupour ce qu'il est une maladie et non unchâtiment du ciel ou une preuved'amour dans des films particulière-ment attentifs ù décrire le maladecomme une personne humaine en pre-inic, lieu (Philadelphia, JonathanDemme, USA 1993; One Night Stand,Mike Figgis, USA 1990).

Aujourd'hui, les temps ont toutefoischangé et la présence d'un personnagehomosexuel négatif dans un film améri-cain provoque immédiatement desappels au boycott dc la part des lobbiesh"mo y cxuc|s, provoquant un purita-nisme à l'envers (Basic Instinct Jr PaulVerhoeven, USA 1 992, a ainsi provoquéde violentes réactions aux Etats-Unispour avoir montré une lesbienne perçuecomme particulièrement négative.)Quelques réalisateurs ont néanmoinsréussi ùimposer des personnages extrê-mement complexes, comme 8c,nic,interprété par John Turturro dans Mil-ler's Crossing (Ethan et Joel Coen, USA1990) qui est la fois juif et homo-sexuel. Dans Butterfly Kiss (MichaelWinterbottom, GB), l'un (les rares films

profondément dérangeant sur unefemme Serial killer', la protagonisteentraîne dans sa folle virée meurtrièreune jeune fille rangée qui lui est sexuel-|uncn/ soumise.

L'homosexualité n'est pasun handicap

Le sort peu enviable du gay et de la les-bienne au cinéma explique que l'homo-sexualité peut toujours être considéréecomme un handicap et le moment oùl'adolescent(e) se rend compte de ce quise passe avec elle ou lui, est plus ou

moins traumatisant (All Over Me, AlexSichel, USA |0V7, pour les filles; B,ox'ti/i/ Thing, Hettie MacDonald, GB1996, pour les garçons). La peur de laréaction des parents joue également unrôle (Pourquoi pas moi, StephaneGiusti, France 1998) surtout quandceux-ci sont issus d'une société t,udi/ionnuUytr (ThcUedJ/xx8ux9o,/, AngLcr,D8A/T'xwun |YV3).

Depuis quelques années apparaissentdans les salles des films comme GoFish (Rose Troche, USA 1994) sur deslesbiennes ou Love! Valour! Compas-sion (}oe Mantello, USA 1997) sur ungroupe d'hommes homosexuels quicélèbrent l'homosexualité sans en

cacher pour autant les problèmes. Tain

qu'il faudra drs 0mx 'spéciaux' sur les

homosexuels, le problème ne sera

cependant pas réglé. Comme les Noirs

aux Etats-Unis ou les Maghrébins en

France, les homosexuels seront réelle-

ment intégrés et acceptés quand un per-

sonnage homosexuel ne sera plus défiuii

par une seule caractéristique. C'cs/Jéjö

le cas dans certaines productions indé-

pendantes et des films européens et |'on

peut citer ici a titre d'exemple particu-

lièrement réussi le très beau personnage

de Catherine Deneuve clans Les `v/,ms

d` André Téchiné(France 1997).

Viviane Thill

Juli 1999

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