Leschampions2016 delatransformationdigitale · 2016-10-18 · LaurentGuez @lguez « Je suis...

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Laurent Guez @lguez « Je suis vraiment heureuse que nos efforts soient récompensés. C’est un long chemin pris depuis plusieurs années et le fruit d’un gros travail d’équipe, car la transformation digitale touche aux processus inti- mes de l’entreprise. » C’est avec une visible émotion qu’Isabelle Kocher, directrice générale d’Engie, recevait jeudi dernier le premier prix des Trophées du eCAC40, au cours d’une soirée qui a réuni au Pavillon Champs-Elysées les principaux acteurs de la transformation digi- tale. « Pour Engie, il est aussi impor- tant de maîtriser le numérique que les métiers de l’énergie eux-mê- mes ! » a carrément déclaré Isabelle Kocher. Selon l’enquête réalisée pour la troisième année de suite par « Les Echos Business » et Gilles Babinet, entrepreneur et Digital Champion de la France auprès de la Commission euro- péenne, Orange et Société Générale se classent aux deuxième et troi- sième rangs. Stéphane Richard, le PDG d’Orange, s’est dit « fier de recevoir un prix digital, car les équi- pes sont très mobilisées pour réussir cette transformation ». Le réveil de l’industrie Plusieurs tendances émergent de notre enquête, qui prend en compte cinq grandes familles de critères (lire page 2). D’abord, le niveau général des sociétés du CAC40 a progressé depuis l’an dernier. La moyenne s’établit à 11,35 points (sur 20), contre 10,51 en 2015. Seules 9 sociétés obtien- nent une note inférieure à 10. Ensuite, on assiste à un réveil spec- taculaire de l’industrie. L’an der- nier, AXA et BNP Paribas occu- paient respectivement les première et troisième places du podium. Les industriels purs et durs parais- saient à la traîne. Cette fois-ci, ils signent les plus belles remontées de l’année : Total passe de la 24 e à la 7 e place ; Sanofi grimpe dans le tableau, en 24 e position cette année contre 35 e en 2015. Cette percée n’est pas étonnante. Le digital change la manière de produire des biens industriels : objets connectés, capteurs, « usine 4.0 » sont en plein développement. LVMH parmi les plus fortes progressions Parmi les plus belles performances, LVMH (propriétaire des « Echos ») grimpe de la 23 e à la 15 e place du classement, alors que le luxe a longtemps paru moins touché par la révolution digitale. Tout s’accé- lère aujourd’hui. Selon une étude du Boston Consulting Group publiée le 22 septembre, six ventes sur dix dans le luxe sont pourtant « influencées » par le digital. Autre- ment dit, elles s’effectuent directe- ment en ligne — ou alors en bouti- que, mais après des recherches effectuées sur Internet. Pour répon- dre à ces nouveaux enjeux, LVMH a embauché l’an dernier Ian Rogers comme patron du numérique, un ancien d’Apple qui a passé vingt ans dans l’industrie musicale : « Mon premier défi, c’est d’apporter plus d’intelligence du client, explique-t-il. Les maisons qui constituent le groupe ont toutes leur propre culture et leur indépendance, mais d’un point de vue technologique (Big Data, réseaux sociaux, sites Web, etc.), l’effet d’échelle est indispensable. Mon second défi, c’est d’accélérer la transformation digitale de nos mai- sons. » Selon le « chief digital offi- cer », une partie de la croissance viendra de nouveaux clients qui n’entrent pas dans les magasins de luxe mais sont susceptibles d’acheter en ligne. D’où l’impor- tance de l’expérience client, qui doit être exceptionnelle s’agissant du luxe. « Internet change le sens du mot “local”, poursuit Ian Rogers. Avant, cela signifiait proximité géographique, aujourd’hui, EXCLUSIF // « Les Echos Business » et l’expert Gilles Babinet publient la troisième édition de l’enquête « eCAC40 », qui mesure l’agilité numérique. Cette année, c’est Engie qui décroche le premier prix. LA GAGNANTE. Isabelle Kocher, CEO d’Engie, a reçu, jeudi dernier au Pavillon Champs-Elysées, à Paris, le Trophée du eCAC40 2016. Photo Bruno Levy pour « Les Echos Business » Les champions 2016 de la transformation digitale Engie Orange Société Générale 1 2 3 Isabelle Kocher Frédéric Oudéa Stéphane Richard oser être Éconoclaste Un monde d’opportunités s’ouvre à vous ! Acteur engagé pour l’économie française, PwC accompagne chaque jour les entreprises dans leur quête de croissance et d’innovation. Dans un monde en mutation permanente, la personnalité de nos collaborateurs et leur regard sur le monde sont déterminants. Rejoignez-nous ! Votre capacité à appréhender différemment les enjeux économiques, culturels et sociétaux vous ouvrira de nouvelles « opportunidées » d’affirmer votre singularité. Auditeurs, consultants, analystes, avocats, experts comptables, rejoignez-nous sur : pwc.fr/opportunidees c’est synonyme d’affinité avec la marque. » Enfin, l’enquête révèle une évolu- tion des comportements managé- riaux. « Pour cette troisième édition du eCAC40, nous avons changé d’époque ! lance Yves Tyrode, direc- teur général digital du groupe BPCE et membre du jury. Les deux précédentes éditions étaient celles de la prise de conscience. Cette phase est terminée. On passe désormais à l’action ! » Même sentiment pour Charlotte Weill, directrice générale de l’agence Equancy, elle aussi membre du jury : « Le digital est devenu un sujet de board. Ce n’était pas le cas il y a encore six mois ! » Moins anxiogènes, les stratégies digitales mettent désor- mais en valeur les opportunités de business, plus seulement les risques de se faire « ubériser ». Certes, le patron de Société Géné- rale Frédéric Oudéa, numéro trois de notre palmarès, reconnaît que l’émergence d’un nouveau géant numérique (par exemple un « TripAdvisor » des banques) serait pour le secteur un cauche- mar. « Mais la nature fondamentale du numérique, nous dit-il, c’est avant tout d’enrichir la relation avec le client. » Et de lui proposer tou- jours plus d’innovation. n LUNDI 10 OCTOBRE 2016 // SUPPLÉMENT GRATUIT AU NUMÉRO 22294 | ISSN 0.153.4831 | NE PEUT ÊTRE VENDU SÉPARÉMENT BUSINESS.LESECHOS.FR

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Laurent Guez@lguez

« Je suis vraiment heureuse que nosefforts soient récompensés. C’est unlong chemin pris depuis plusieursannées et le fruit d’un gros travaild’équipe, car la transformationdigitale touche aux processus inti-mes de l’entreprise. » C’est avec unevisible émotion qu’Isabelle Kocher,directrice générale d’Engie, recevaitjeudi dernier le premier prix desTrophées du eCAC40, au coursd’une soirée qui a réuni au PavillonChamps-Elysées les principauxacteurs de la transformation digi-tale. « Pour Engie, il est aussi impor-tant de maîtriser le numérique queles métiers de l’énergie eux-mê-mes ! » a carrément déclaré IsabelleKocher. Selon l’enquête réaliséepour la troisième année de suitepar « Les Echos Business »et Gilles Babinet, entrepreneuret Digital Champion de la Franceauprès de la Commission euro-péenne, Orange et Société Généralese classent aux deuxième et troi-sième rangs. Stéphane Richard, lePDG d’Orange, s’est dit « fier derecevoir un prix digital, car les équi-pes sont très mobilisées pour réussircette transformation ».

Le réveil de l’industriePlusieurs tendances émergentde notre enquête, qui prend encompte cinq grandes familles decritères (lire page 2). D’abord, leniveau général des sociétés duCAC40 a progressé depuis l’andernier. La moyenne s’établit à11,35 points (sur 20), contre 10,51en 2015. Seules 9 sociétés obtien-nent une note inférieure à 10.Ensuite, on assiste à un réveil spec-taculaire de l’industrie. L’an der-nier, AXA et BNP Paribas occu-paient respectivement les premièreet troisième places du podium. Lesindustriels purs et durs parais-saient à la traîne. Cette fois-ci, ilssignent les plus belles remontées

de l’année : Total passe de la 24e àla 7e place ; Sanofi grimpe dans letableau, en 24e position cette annéecontre 35e en 2015. Cette percéen’est pas étonnante. Le digitalchange la manière de produire desbiens industriels : objets connectés,capteurs, « usine 4.0 » sont en pleindéveloppement.

LVMH parmi les plus fortesprogressionsParmi les plus belles performances,LVMH (propriétaire des « Echos »)grimpe de la 23e à la 15e place duclassement, alors que le luxe alongtemps paru moins touché parla révolution digitale. Tout s’accé-lère aujourd’hui. Selon une étudedu Boston Consulting Grouppubliée le 22 septembre, six ventessur dix dans le luxe sont pourtant« influencées » par le digital. Autre-ment dit, elles s’effectuent directe-ment en ligne — ou alors en bouti-que, mais après des rechercheseffectuées sur Internet. Pour répon-dre à ces nouveaux enjeux, LVMHa embauché l’an dernier Ian Rogerscomme patron du numérique, unancien d’Apple qui a passé vingt ansdans l’industrie musicale : « Monpremier défi, c’est d’apporter plusd’intelligence du client, explique-t-il.Les maisons qui constituent legroupe ont toutes leur propre cultureet leur indépendance, mais d’unpoint de vue technologique (Big Data,réseaux sociaux, sites Web, etc.),l’effet d’échelle est indispensable.Mon second défi, c’est d’accélérer latransformation digitale de nos mai-sons. » Selon le « chief digital offi-cer », une partie de la croissanceviendra de nouveaux clients quin’entrent pas dans les magasinsde luxe mais sont susceptiblesd’acheter en ligne. D’où l’impor-tance de l’expérience client, qui doitêtre exceptionnelle s’agissant duluxe. « Internet change le sens dumot “local”, poursuit Ian Rogers.Avant, cela signifiait proximitégéographique, aujourd’hui,

EXCLUSIF//« Les Echos Business » et l’expert GillesBabinet publient la troisième édition de l’enquête« eCAC40 », qui mesure l’agilité numérique.Cette année, c’est Engie qui décroche le premier prix.

LA GAGNANTE.Isabelle Kocher,CEO d’Engie, areçu, jeudi dernierau PavillonChamps-Elysées,à Paris, le Trophéedu eCAC40 2016.Photo Bruno Levy pour« Les Echos Business »

Leschampions2016delatransformationdigitale

Engie

OrangeSociétéGénérale1

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Isabelle Kocher

Frédéric OudéaStéphane Richard

oser être

Éconoclaste

Un monde d’opportunités s’ouvre à vous !

Acteur engagé pour l’économie française, PwC accompagnechaque jour les entreprises dans leur quête de croissanceet d’innovation.

Dans un monde en mutation permanente, la personnalitéde nos collaborateurs et leur regard sur le monde sontdéterminants.

Rejoignez-nous ! Votre capacité à appréhender différemmentles enjeux économiques, culturels et sociétaux vous ouvrirade nouvelles « opportunidées » d’affirmervotre singularité.

Auditeurs,consultants, analystes, avocats,

experts comptables,rejoignez-nous sur :pwc.fr/opportunidees

c’est synonyme d’affinité avec lamarque. »Enfin, l’enquête révèle une évolu-tion des comportements managé-riaux. « Pour cette troisième édition

du eCAC40, nous avons changéd’époque ! lance Yves Tyrode, direc-teur général digital du groupeBPCE et membre du jury. Les deuxprécédentes éditions étaient celles dela prise de conscience. Cette phaseest terminée. On passe désormais àl’action ! » Même sentiment pourCharlotte Weill, directrice généralede l’agence Equancy, elle aussimembre du jury : « Le digitalest devenu un sujet de board. Cen’était pas le cas il y a encore sixmois ! » Moins anxiogènes, lesstratégies digitales mettent désor-

mais en valeur les opportunités debusiness, plus seulement lesrisques de se faire « ubériser ».Certes, le patron de Société Géné-rale Frédéric Oudéa, numéro troisde notre palmarès, reconnaît quel’émergence d’un nouveaugéant numérique (par exempleun « TripAdvisor » des banques)serait pour le secteur un cauche-mar. « Mais la nature fondamentaledu numérique, nous dit-il, c’estavant tout d’enrichir la relation avecle client. » Et de lui proposer tou-jours plus d’innovation. n

LUNDI 10OCTOBRE2016 // SUPPLÉMENTGRATUITAUNUMÉRO22294 | ISSN0.153.4831 |NEPEUTÊTREVENDUSÉPARÉMENT BUSINESS.LESECHOS.FR

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Florian Dèbes@FL_Debes

I sabelle Kocher parlait déjà numéri-que le jour de sa prise de fonctionà la tête d’Engie. Dès ce 4 mai, lanouvelle CEO signait un partenariat

avec Accenture. Au matin, l’organi-gramme propulsait au comité de direc-tion un ex-entrepreneur créateur de lastart-up Solairedirect et le DSI, devenuchief digital officer. Signe que l’implica-tion des dirigeants joue pour beaucoupdans la transformation numérique,l’entreprise énergétique décroche cetteannée la première place de notre palma-rès eCAC 40. Depuis mai, Engie a signéd’autres partenariats, avec Thales ouencore Microsoft. Sur le sujet, l’ex-GDFSuez entend multiplier les interlocuteurspour garder la main sur son avenir enmégaoctets. « Pour Engie, il est aussiimportant de maîtriser le numérique queles métiers de l’énergie », affirme IsabelleKocher dans un entretien aux « EchosBusiness ». L’un et l’autre sont d’ailleursliés dans son plan de transformation dugéant français.

La chasse aux futures licornesest ouverteSans bascule numérique, un énergéticiendoit s’attendre à une mort lente, consi-dère la dirigeante. Pour partie à l’originede tendances de long terme, commela décarbonation et la décentralisationde la production d’énergie, le numériqueserait aussi une condition sine qua nonpour répondre à ces bouleversementsmondiaux. « Notre croissance en dépend,dans trois ans elle sera basée sur des tech-

nologies qui ne sont pas toutes maturesmais dans lesquelles nous investissonsdès maintenant », pose-t-elle. Déjà, lebesoin d’innovation se fait sentir quand,en dix ans, le marché a divisé par dix lemontant des appels d’offres pour lephotovoltaïque.« Nous investissons dans des technologiesqui nous permettront d’enrichir nos offresexistantes, poursuit Isabelle Kocher,mais aussi dans des solutions disruptivesqui, pour certaines, pèseront un jour unmilliard de dollars. » Ouverte cetteannée, la structure Engie Fab chasse etélévera ces futures licornes internes,sous la direction de Thierry Lepercq,fondateur de Solairedirect. Les domai-nes de l’hydrogène et de la mobilité vertefigurent dans sa ligne de mire.

Le numérique irrigue l’énergieEn parallèle, Engie fait le tri dans sesactivités. L’organisation ferme ou revendles centres de production polluants etcherche maintenant à fournir de l’énergieen émettant le moins de CO2 possible– sans prétendre au tout-renouvelable.Pour optimiser, l’entreprise recourt auxlogiciels. « Le numérique irrigue déjà nossystèmes énergétiques », note IsabelleKocher. Au sein d’Engie Digital, l’usine àlogiciel-métier du groupe, les équipes duDSI-CDO, Yves Le Gelard, ont, par exem-ple, développé une plate-forme de gestiondes parcs éoliens. L’adaptation desréseaux à la décentralisation nécessitedes outils de monitoring à distance.« Les patrons de business units viendrontà Engie Digital pour inventer à l’aide deséquipes les logiciels dont ils ont besoin »,explique Isabelle Kocher. L’antenne

regroupe des développeurs, des desi-gners, des spécialistes des données etdes experts de l’Internet des objets.En parallèle, Engie décentralise sonorganisation, pour mieux répondre à sesclients avec du sur-mesure. Là encore, lenumérique s’impose pour la réussite del’opération. « Notre plus grand atout étantla taille, dès lors que nous sommes capablesde fonctionner en réseau et répliquer par-tout et vite les meilleurs pratiques locales »,a réalisé la dirigeante. Plus proche desclients et des partenaires, chaque salariéfait office de capteur pour le groupe.L’organisation s’est donc dotée d’unréseau social d’entreprise, déployéen express auprès de 100.000 salariésen six mois. « Grâce à Yammer, chaquecollaborateur peut échanger les bonnespratiques. Ce réseau collaboratif est devenuune plate-forme d’expériences », poursuit-elle. Dans la même logique d’une visioncommune pour tous, Isabelle Kocher etses équipes réfléchissent à un autre sys-tème structurant : « Si nous décidons demettre en place un système unique degestion partout dans le groupe, ce ne serapas un acte de centralisation, précise-t-elle.Au contraire. Il sera plus facile de décentra-liser si nous disposons d’une architecturede gestion de l’information unique, fiable,fluide et transparente. »Claire, la stratégie numérique doitmaintenant séduire. L’ensemble dessalariés est sensibilisé aux enjeux grâceà des formations en ligne. Quant auxactionnaires, ils n’ont pas fui le jour oùEngie a décidé de réduire les dividendespour 2017 et 2018 afin de financer desinvestissements incertains. « Un signedes temps », conclut la patronne. n

STRATÉGIE//L’industriel de l’énergie prend la tête du palmarèseCAC40 sur la maturité numérique des grands groupes français.Isabelle Kocher, directeur général, s’appuie sur le numérique pourdécentraliser l’organisation et décarboner le modèle économique.

«VeniràEngieDigitalpourinventer»

L a surprise vient des acteurs industriels. Ilsremontent très fortement dans le classementeCAC 40, troisième édition. L’an dernier, il

était manifeste qu’ils n’avaient pas encore mis enœuvre leur révolution digitale. Cette fois, Engie, entête du classement, Schneider Electric (1er il y a deuxans), et Total sont dans le Top 10. Air Liquide,Michelin, Safran et Saint-Gobain progressent.

Une vaste majorité de sociétés du CAC 40 sembleconfirmer les tendances observées précédemment :elles se sécurisent et collaborent avec les entreprisesinnovantes. Nouveauté du cru 2016, la thématique« culture digitale » gagne des points : les sociétés quise sont classées en tête font justement la différencepar le management qu’elles ont mis en œuvre pouraccompagner leur transformation numérique. n

L’industrieprogresseLACHRONIQUEdeGilles BabinetDigital champion de la Franceauprès de la Commission européenneet concepteur de l’enquête

Isabelle Kocher, CEO d’Engie, guette les futurs business à 1 milliard d’euros.Photo Bruno Delessard/ « Challenges »-RÉA

LA MÉTHODOLOGIEPour la troisième année d’affilée, « Les Echos Business » et Gilles Babinet (voir chro-nique ci-dessus) se sont associés afin de réaliser ce palmarès exclusif des sociétés duCAC 40 selon leur maturité digitale. Les entreprises ont été invitées à répondre à unquestionnaire très détaillé. La méthodologie, conçue par Gilles Babinet et validéepar un comité d’experts de haut niveau, s’appuie sur plus de cent critères, répartis endifférents thèmes : la communication externe et les réseaux sociaux, le niveau demaîtrise technologique, l’ouverture sur un écosystème numérique, la culture digi-tale (autrement dit, l’organisation managériale du numérique en interne, le degréd’implication des collaborateurs), la sécurité. Plus discriminante, la culture digitalea été surpondérée. Par ailleurs, la pondération a été révisée dans certains cas enfonction du secteur d’activité. Ainsi, les entreprises n’opérant qu’en B to B ont bénéfi-cié d’une moindre pondération sur le thème « communication externe et réseauxsociaux ». Le questionnaire comportait aussi des questions ouvertes, qui ont donnédroit à des points « bonus », lorsque les réponses étaient pertinentes. Des points qui– assortis de l’avis du comité d’experts – ont permis de départager les entreprisesayant obtenu des résultats proches. Pour cette édition 2016, 32 entreprises sur 40ont répondu à notre enquête.

RENDEZ-VOUSpartenaires

Ce contenu a été réalisé par Grant Thornton

Que ce soit dans des contextes de croissance ou detension, la gestion prévisionnelle est devenue unefigure imposée de la gestion. L’« exigence prospective »dépasse désormais le budget d’exploitation et s’étendà la prévision de trésorerie à moyen et long terme.Comment faire pour y répondre, notamment dans desorganisations de taille moyenne ? Une question deméthode… La prévision de trésorerie est souvent vuecomme un exercice purement technique. Mais elle estplus que cela. Elle implique des savoir-faire particuliers,mais aussi des processus de gestion spécifiques et desoutils dédiés. Or, souvent, une deces trois dimensions fait défaut.Et comme pour un édifice dont ilmanquerait une assise stable, toutela construction conceptuelle de laprévision et sa pertinence mêmes’en trouvent ébranlées.En revanche, si les trois conditionssont réunies la gestion prévision-nelle devient une pratique de ges-tion fondatrice, autant financièrequ’opérationnelle.Premier pilier : les compétences.La prévision de trésorerie est untravail technique qui exige à la foisune aptitude à projeter l’exploitation (attribut du contrôlede gestion) et une habileté dans la lecture du bilan(savoir-faire du chef comptable) ; l’ensemble des servicesfinanciers doivent donc participer à sa réalisation.On notera cependant que la contribution du trésorier estmodeste puisque son horizon est généralement borné aucourt terme.

Deuxième pilier : les process.Conséquence immédiate du premier pilier, la coordinationde travaux associant les équipes financières et lesfonctions opérationnelles constitue la clé de voute dela gestion prévisionnelle. Le prévisionnel de trésoreriematérialise ainsi la chaîne de valeur et l’efficience del’organisation dans son ensemble. A défaut, il manquealors sa vocation opérationnelle et sa portée à long terme.Enfin, troisième pilier : les outils.Ils sont les indispensables vecteurs de l’informationqui drainent la prospective. En outre, ils structurent

hypothèses, calculs et scénarios.Mais,attention!Fonder ladémarcheprévisionnelle que sur l’introductionde nouveaux logiciels se traduit laplupart du temps par un échec.Il existe un autre danger, inhérentà la sophistication constante desoutils : la « mathématisation » quiaboutit souvent à des figurationstotalement abstraites du modèleéconomique de l’entreprise ettotalement inopérantes d’un pointde vue opérationnel. Si la gestionprévisionnelle est bâtie sur cestrois piliers, elle constitue une

source de créativité et d’intelligence pratique. Car elle estalors vue comme un exercice collaboratif, à l’occasionduquel la vision stratégique est confrontée à sa mise enœuvre et à sa contribution en termes de création de valeur(notamment en génération de cash flows). La prévisiondevient alors une pierre angulaire de la gestion, bien au-delà de sa seule utilité en matière de pilotage financier.

ChristoPhEAlquiErAssocié deGrant Thornton ©

DR

« Si les trois conditions sontréunies la gestion prévisionnelledevient une pratique de gestionfondatrice »

Compétences, process, outils : les trois piliers de la gestion prévisionnelle

LE COMITÉ D’EXPERTSDe haut en bas et de gauche à droite :Thierry Happe (cofondateur, Netexplo),Bruno Buffenoir (vice-pré-sident, Hewlett PackardEnterprise),FrançoiseGri (présidente du conseil d’administrationdeViadeo),Flo-rian Dèbes (journaliste aux « Echos Business »), Jean Bourcereau (managing partner, Ventech), GuyMamou-Mani (coprésident, GroupeOpen),GillesBabinet (digital championde la France auprèsde laCom-mission européenne), Ariane Gaudefroy (journaliste aux « Echos Business »), Laurent Guez (directeurdélégué de la rédaction des « Echos Business »), Charlotte Weill (directrice générale, Equancy), Marie-Christine Levet (Les Entrepreneurs Réunis), Alix Debussche (expert en numérique), Christian Buchel(chief digital officer, Enedis – ex-ERDF), Yves Tyrode (chief digital officer, BPCE).Excusées le jour de la photographie : Chloé Bonnet (cofondatrice, Five by Five), Lara Rouyres (cofonda-trice, Selectionnist).

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02//LESECHOSBUSINESS le journal du board Lundi 10 octobre 2016Les Echos

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FÉLICITATIONS !La moyenne générale du palmarès eCAC40 augmente. Elle passeainsi de 10,51/20 en 2015 à 11,35/20 cette année, soit une hausse de0,83 point. Les entreprises du CAC 40 s’arment donc de mieux enmieux pour évoluer dans une économie fortement imprégnée par larévolution numérique. Géants mondiaux, la plupart indiquent d’ailleursne pas craindre la comparaison avec leurs concurrents internationauxtraditionnels. Reste à résister aux nouveaux acteurs du Web de plusen plus tentaculaires, des Gafa aux Airbnb, Uber, Tesla, etc.

PEUTMIEUX FAIREAu sein des 32 entreprises qui ont répondu auquestionnaire eCAC40 2016, seulement 10 chiefdigital officers (CDO) siègent dans un comité exé-cutif. Absents de cette réunion au sommet, lesautres n’ont alors pas la capacité de s’exprimerauprès de la direction générale. Leur légitimitédans l’organisation s’en trouve atteinte. Sept socié-tés n’ont tout simplement pas nommé de CDO.

ENCORE DU TRAVAIL…Si presque toutes les entreprises du CAC 40possède un programme de sensibilisation, 56 %des salariés du panel eCAC40 2016 ne sont niformés, ni sensibilisés aux enjeux du numérique.Bon élève, le Crédit Agricole informe la quasi-to-talité de ses salariés. Le groupe bancaire anotamment mis en place un MOOC sur le digitalen partenariat avec Orange.

RÉSULTATS//Les entreprises du CAC 40 progressent sur le chemin de leur transformation numérique.Classement réalisé par « Les Echos Business », selon une méthodologie imaginée par Gilles Babinet.

LepalmarèsexclusifdessociétésduCAC40lesplusdigitales

Les EchosLundi 10 octobre 2016 le journal du boardLESECHOSBUSINESS//03

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Florian Dèbes@FL_Debes

C hez Orange, le numérique n’est pasl’affaire d’un seul homme. « Les douzemembres du comité exécutif sont les chiefdigital officers de l’entreprise », a précisé,

Stéphane Richard, le PDG de l’opérateur télécoms,sur la scène des Trophées du eCAC 40. Jeudi6 octobre, il recevait le deuxième prix du palmarèsde la maturité numérique.« En tant qu’entreprise, nous sommes un des acteurscritiques de cette transformation digitale, mais c’estaussi un véritable défi en interne », a-t-il également

souligné. De fait, les chausse-trapes ne manquentpas quand il s’agit de changer les habitudes detravail d’un paquebot de 105.000 salariés en France,dont de nombreux managers, qui voient leur rôleévoluer avec la montée des process collaboratifs.

Des partenaires sociaux convaincusOrange fait des efforts en termes de dialogue socialet de formation. « Cette transformation doit permet-tre d’améliorer les conditions de travail des sala-riés », est-il indiqué dans le premier accord entre ladirection et trois organisations syndicales sur lathématique de l’accompagnement des collabora-teurs dans cette période de changement due au

Ariane [email protected]

Les marques de luxe ont longtemps refusé d’inves-tir dans l’e-commerce, considérant le digitalcomme un canal de masse et une menace pourle réseau des boutiques physiques. Le secteur étaitdonc le plus à la traîne dans la transformationdigitale des entreprises du CAC 40. Or luxe et digi-tal ne sont plus incompatibles. Ce n’est donc pasun hasard si LVHM a embauché l’année dernièreIan Rogers, un ancien dirigeant d’Apple Music,au poste de directeur numérique. Un familier dupositionnement haut de gamme adopté par Apple,dont les montres connectées vont même jusqu’àarborer des bracelets fabriqués par Hermès.Quinzième du palmarès eCAC40, le groupe de luxeest l’un des premiers à avoir lancé, en 2000, un sitede vente en ligne, eluxury.com.

De la boutique au champagne connectéAujourd’hui, la plupart des marques du groupeLVMH ont développé leur propre portail et cha-que Maison innove à sa manière. Sephora a lancél’année dernière un concept de boutique connec-tée. Complémentaire de son réseau traditionnel,Sephora Flash permet à l’enseigne de présenterautant de références que son flagship desChamps-Elysées sur de plus petites surfaces. Lesproduits qui ne sont pas disponibles sur placepeuvent être achetés sur Internet, grâce à destablettes et bornes interactives présentes en

magasin. Des puces NFC – technologie utiliséedans le paiement sans contact – reconnaissent leclient dès présentation de la carte de fidélité. Unconcept novateur qui permet d’étoffer le maillagegéographique du réseau.Même les plus petites Maisons du groupe inves-tissent dans le numérique. « Le digital est au cœurde la relation avec notre communauté d’amateurs,estime Olivier Krug, le directeur général épo-nyme de la Maison de champagne . C’est un formi-dable outil pour entrer en contact avec nos clientset renforcer le lien si particulier qui les unit avec lamaison. » Mises à part les visites de caves (et desopérations régulières de présentation dans lesgrands pays), l’entreprise est rarement au contactdu client final, car les ventes s’effectuent par desdistributeurs tiers. Krug a donc décidé d’apposersur les étiquettes de ses bouteilles de champagneun code qui peut être scanné avec un smart-phone. Grâce à une application, les clients accè-dent à des anecdotes, des précisions sur les vinsprésents dans l’assemblage ou des conseils dedégustation. L’expérience s’est enrichie en janviersur Twitter. Sur mention du numéro et d’unhashtag, un robot envoie du contenu personna-lisé, sélectionné parmi 800 réponses. « Avecune cinquantaine de collaborateurs, la MaisonKrug est une entreprise qui s’adapte et où coexisteparfaitement savoir-faire et esprit start-up,tradition et technologie, confie ce dirigeant,6e génération de la famille, surnommé parfoisen interne « le geek ». n

LVMH :àchaqueMaisonsastratégieLUXE//Porté par la nomination de Ian Rogers à la tête de la directionnumérique, le groupe LVMH a gagné huit places en un an. Il privilégieune approche par marque, se refusant à la centralisation.

« Ladigitalisation,unevaguequivatrèsvite »

23 %DESSERVEURSVIRTUALISÉScomptabilisés par les socié-tés répondantes au eCAC402016 sont hébergés chez destiers, via le cloud dit public.

15 %DES SALARIÉSdu CAC 40 opèrent entélétravail. Capgeminiest le groupe le plusavancé en 2016, loindevant Danone.

numérique. Signé fin septembre, ce texte est nédans la douleur. Fin mai, seules CFDT et FO (soit39 % des voix aux dernières élections profession-nelles) l’avaient soutenu au terme d’une premièrenégociation. Longtemps suspicieuse sur les ques-tions de l’utilisation des données personnelles dessalariés par les services des ressources humaineset sur le délicat point du droit à la déconnexion, laCGT a apporté ses voix au texte à la rentrée. « C’estimportant d’embarquer toutes les parties prenantesde l’entreprise, et notamment les partenairessociaux, a souligné Stéphane Richard. Cet accordtraite les questions que se posent beaucoup de sala-riés sur le sujet du numérique. »

Le collaboratif pour b.a.-baL’accord entend encourager le travail collaboratifen formant les managers à ces méthodes d’orga-nisation de projet. 80 % d’entre eux devraientbénéficier de ce soutien d’ici à 2018. A terme,le réseau social d’entreprise, baptisé « Plazza »,doit devenir central. « La digitalisation du fonc-tionnement de l’entreprise est une vague qui vatrès vite », constate Stéphane Richard. Vis-à-visde certains salariés, la direction est moteur duchangement. Pour d’autres, elle doit suivre l’appa-rition de nouvelles pratiques.

L’enjeu est d’assurer un socle commun à tous.En 2014, le lancement de la Digital Academy allaitdans ce sens. Ce programme de formation vidéosensibilise l’ensemble des salariés au b.a.-ba de latransformation numérique. « A l’époque, c’étaitl’une des premières actions de ce genre », rappelleStéphane Richard. Depuis, 80.000 salariésd’Orange ont obtenu ce « passeport digital »et le principe a notamment été repris dans nombrede grands groupes français.Ces actions doivent permettre à l’entreprise derépondre aux nouvelles attentes de ses clients.Le plan stratégique Essentiels 2020 va dans ce sens.Déjà, 45 % des interactions entre la marque etles clients passent par le numérique. Voilà pourla stratégie défensive.A l’attaque, Orange profite aussi des opportunitésnumériques pour s’inviter sur de nouveaux mar-chés. Orange Bank, des services bancaires en ligne,doit être lancé dans la première moitié de l’année2017. « C’est un vrai pari stratégique et un projetmajeur pour nous », clame Stéphane Richard,loin de considérer cette nouveauté comme unesimple activité additionnelle. « On se donne lesmoyens pour réussir, nous adoptons une organisa-tion quasi militaire », poursuit-il. Comme quoi,le collaboratif n’empêche pas la rigueur. n

Frédéric OudéaDirecteur général,

SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

le jeudi 6 octobre 2016, au Pavillon Champs-Elysées,

[ Retrouvez le dossier de la rédaction sur les lauréats et le classement :portraits – vidéos – interviews sur business.lesechos.fr ]

ont été décernés à :

3 ème

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Frédéric Oudéa

• www.lesechos-events.frUne production

isabelle KOcherDirecteur général,

ENGIE

isabelle KOcher

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ORANGE

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En partenariat avec :

Mobility partner

Orange

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Stéphane Richard

MANAGEMENT//L’opérateur télécoms n’oublie pasle dialogue social et la formation des salariés danssa transformation numérique. Pour Stéphane Richard,le PDG d’Orange, il est capital d’embarquer toutesles parties prenantes sur le sujet.

Stéphane Richard, PDG d’Orange, personnellement en charge du numérique… comme tous les membresdu comex. Photo Denis Allard/RÉA

04//LESECHOSBUSINESS le journal du board Lundi 10 octobre 2016Les Echos

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Véronique Le Billon@VLeBillon

—A San Francisco et Boston

Les bureaux de RocketSpace ont accueilli 17 futureslicornes, dont Uber et Spotify en leur temps. L’accélé-rateur, spécialisé dans le rapprochement entregrands groupes et start-up, héberge aussi le « SiliconValley Innovation Program » de Schneider Electric,lancé au printemps dernier à San Francisco. « Lesstart-up nous apportent des opportunités de crois-sance. Nous avions donc sévèrement besoin de nousimplanter dans la Silicon Valley pour trouver de nou-velles pistes de technologies que nous pourrions rapide-ment valider et commercialiser », explique Paul Cam-pbell, directeur de l’Open Innovation du groupe.Habitué des meilleures places du classementeCAC40, le spécialiste de la gestion de l’énergie, quivend à la fois des équipements (transformateurs,prises, disjoncteurs…) et des services d’efficacitéénergétique, 4e cette année, a aussi ajouté cette bri-que californienne pour améliorer sa visibilité enmatière de transition digitale. « La Silicon Valley, c’estun creuset d’innovation exceptionnel, où le système estoptimisé pour la disruption », note Jean-Pascal Tri-coire, le PDG de Schneider Electric, de passage à SanFrancisco pour une conférence de Salesforce, avecqui le groupe est partenaire. Chez RocketSpace,Schneider Electric a notamment rencontré Ohm-Connect, une entreprise qui notifie à ses abonnésquand les prix de marché de l’électricité vont grim-per, pour qu’ils réduisent leur consommation contrerémunération. Schneider Electric lui vend désormaisson thermostat connecté Wiser Air, ce qui lui permetd’explorer un nouveau canal de commercialisation.

Sur sa feuille de route, Paul Campbell s’était donnépour objectif de nouer dix partenariats d’ici à la fin2016, et vingt fin 2017. Le dernier en date vient d’êtreannoncé, avec Curb, une start-up qui permet de suivrechaque consommation d’équipement de la maison endirect sur une application, via un module connectésur le tableau électrique. « Notre R&D interne était entrain de développer le même produit mais celui de Curbest moins cher et meilleur », constate Paul Campbell.Le produit sera prochainement testé, et chacun verraalors s’il veut s’engager plus avant avec son parte-naire. « Jusqu’à présent, notre R&D était autosuffi-sante, ce n’est plus le cas. Et il ne serait pas raisonnablede croire que nos ingénieurs vont tout faire par eux-mê-mes. Le principal avantage des start-up est qu’elles n’ontpeur de rien », analyse Emmanuel Lagarrigue, direc-teur général de la stratégie du groupe. Lui est basé àBoston, où le groupe profite d’un autre écosystème,celui de Harvard et du MIT.Outre RocketSpace et tous les contacts informelsnoués dans la Valley, l’un des canaux privilégiés poursourcer ces start-up reste le fonds Aster Capital, lancéen interne par Schneider Electric dans les années2000. Il est basé à Paris et se développe en ce momenten Chine, mais il a aussi installé une antenne avecdeux personnes dans le centre de San Francisco afinde remonter quantité d’informations sur les tendancesdu secteur. « Nous regardons 1.700 dossiers par an etnous en sommes à notre quatrième investissement cetteannée », note Kevin Deneen, senior associé du fonds. n

SchneiderElectrics’activedanslaSiliconValleySTART-UP//Le groupe,spécialisé dans la gestion de l’énergie,a créé en début d’année le « SiliconValley Innovation Program » poursourcer de nouvelles technologieset accroître sa visibilité digitale.

Ariane [email protected]

A lors qu’elle a fêté voilàdeux ans son 150e anni-versaire, la Société Géné-rale est plus que jamais

dans l’air du temps. Le groupeaccède, cette année, à la troisièmeplace du palmarès eCAC40, aprèsavoir occupé deux ans durant lequatrième rang. Fier de recevoir untrophée, le directeur général Frédé-ric Oudéa salue le travail effectuépar les salariés. « Notre plus grandchallenge stratégique et opérationnelest d’embarquer toute l’entreprisedans la transformation digitale.Personne ne doit être laissé sur lebord de la route », rappelle-t-il.Un objectif d’autant plus difficileà atteindre dans un univers aussiréglementé et codifié que la banque.« Notre champ d’action est limité parles réglementations, les taux d’intérêtou les incertitudes politiques. Ledigital est le seul domaine pour lequelnous avons les cartes en main pour

agir. C’est une formidable opportu-nité pour conquérir de nouveauxclients et les fidéliser, en apportantdes services plus souples et personna-lisés. A condition d’agir vite et bien »,prévient le directeur général.L’institution bancaire mène cettelogique tambour battant, pours’adapter à des clients qui se rendentmoins dans les agences physiques.Elle opère la mutation de sa marquehistorique Société Générale et sesert de sa banque 100 % digitaleBoursorama comme d’un « aiguillonpositif sur les métiers et réseauxtraditionnels qui doivent s’adapter »,selon le souhait du directeur géné-ral. Pour se rapprocher des clientset mieux répondre à leurs attentes,sa méthode prend à la fois appui surune importante communauté declients et des réseaux sociaux.Depuis 2012, Société Générale bous-cule les codes du secteur, s’enga-geant à répondre aux demandes desclients en moins de 30 minutes surTwitter, dans l’heure sur Facebooket en direct sur Messenger.

« Pour bouger l’entreprise, il fauts’appuyer sur l’énergie de tous pourinnover, insiste Frédéric Oudéa. Celanécessite de mener des expérimenta-tions à petite échelle et d’accepterl’échec, ce qui n’est pas aisé dans lesgrandes entreprises et dans la culturefrançaise. » Le programme Digital forall, qui a permis en un an le déploie-ment de 60.000 tablettes tactiles ausein du groupe, et notamment auprèsdes conseillers bancaires, participe àune évolution des mentalités.

Des opérationnels en contactavec les start-upUne cellule centrale dirigée parFrançoise Mercadal-Delasalles,directrice des ressources et del’innovation, s’assure que les condi-tions de l’innovation sont rempliesau sein des différents métiers. Ellefacilite le contact des start-up avecles entités opérationnelles et orga-nise des « learning expeditions »en Chine ou sur la côte Ouest desEtats-Unis, afin d’inspirer le topmanagement. « Dans un mondeoù rien n’est sûr, il est impératifd’ouvrir les esprits et de faire tomberles tabous pour mieux innover,martèle le directeur général. Tester,acheter, nouer des partenariats ouprendre des tickets minoritaires, ilne faut rien s’interdire ! » Il s’agit làd’une question de survie, car le

paysage bancaire est en efferves-cence. « Dans les cinq ans, la recon-naissance du client sera plus sécuri-sée que jamais, assure le dirigeant.Elle s’effectuera par le biais de tech-nologies plus automatisées, parexemple par des techniques de recon-naissance biométriques. »D’autres leviers de croissance pour-raient aussi émerger de l’unité deBangalore, qui emploie 6.000 per-sonnes, et travaille entre autres surl’intelligence artificielle. Le directeurgénéral considère en effet qu’elledeviendra un foyer d’innovationexceptionnel. Il lorgne les opportu-nités, notamment en matière degestion de flotte automobile, unmétier que pratique déjà la filialeALD Automotive. Dans ce domaine,pourquoi ne pas attaquer le marchédes particuliers ? En revanche, lepire cauchemar de Frédéric Oudéaserait la désintermédiation totaledes banques. « Je me méfie des éco-systèmes qui rendent le client captifet lui délivrent différents services »,avoue-t-il. Il surveille de près lesactions menées en Chine par la placede marché Alibaba et l’applicationde messagerie instantanée WeChat.Les deux marques ont lancé dessystèmes de paiement intégré etWeChat, qui compte 800 millionsd’utilisateurs, offre même un servicede prêt aux particuliers. n

Florian Dèbes@FL_Debes

Le cordonnier est-il bien chaussé ?« Capgemini est un groupe technolo-gique, rappelle Pierre-Yves Cros,membre du comité exécutif et direc-teur de la stratégie et du développe-ment, nous digitalisons dans toutel’entreprise, c’est du suivi de marchépour nous. » Ainsi, les logicielsdéployés chez les clients sont sou-vent aussi intégrés dans le systèmed’information de l’entreprise. Maisla transformation numérique n’estpas qu’une affaire d’outils. Capge-

mini ne se classe qu’au dixième rangdu palmarès eCAC 40 2016. Mais sonbond de neuf places en un an souli-gne qu’il se passe quelque chose.D’abord, le champ des possibless’élargit : Capgemini s’engage mainte-nant avec ses clients sur des marchés« digitaux et émergents à fort potentiel,comme par exemple notre offre com-mune avec Valeo, présentée ce lundi»,expose Stéphane Régnier, directeurassocié senior en charge du digitalchez Capgemini Consulting France.Pour l’équipementier, Capgemini adéveloppé une plate-forme de servicesaux loueurs et assureurs automobiles,

basée sur la technologie de clef devoiture sur smartphone du sous-trai-tant automobile. La collaborationpourrait aller plus loin qu’un simpletravail dans des bureaux communs.Embarqué dans la transformationnumérique de ses clients, la sociétéde services juge ce type de partena-riat de plus en plus stratégique.« Désormais, cette notion de co-busi-ness peut devenir un modèle économi-que à part entière », poursuit Sté-phane Régnier. Il y a un an, legroupe a même créé une division« Business Services » qui abrite cespartenariats d’un nouveau genre etsouvent confidentiels.

Jeu égal avec les Gafa ?Capgemini se voudrait plus proched’un Google ou d’un Amazon qued’une entreprise traditionnelle.Comme eux, le groupe estime ne pasavoir besoin de chief digital officer.Comme eux, il entend se nourrir destoutes dernières technologies. Sonréseau de lab – quarante localisa-tions à travers le monde – lui remon-

Capgeminiélargitsonchampdespossibles

CONSULTING//La société de servicesinformatiques pense à réviser son modèle économiqueà la faveur de la transformation de ses clients.

STRATÉGIE//Pour sa mutation digitale,le groupe Société Générale bousculeles codes du secteur. Rencontre avecle directeur général, Frédéric Oudéa.

« Fairetomberlestabouspourinnover »

LA MEILLEUREPROGRESSION22e l’an dernier, Totalgagne quinze placespour se hisser au7e rang du eCAC402016. Ses effortsen direction desstart-up paient.

22DES ENTREPRISESdu panel eCAC40 2016proposent à leurs sala-riés de travailler avecleur matériel informati-que personnel.

11GROUPESsur 32 entreprises n’ontinvité aucune personna-lité du monde de l’entre-preneuriat ou de l’inno-vation dans leur board.

terait les meilleures informations etopportunités. Et pour nourrir soncœur de métier – déployer du per-sonnel qualifié auprès de clients –, legroupe mise sur l’intelligence artifi-cielle de Watson. L’équipe, qui assi-gne les consultants sur chaque pro-jet, interroge le système « cognitif »d’IBM pour faire le tri entre200.000 CV à partir des critères desclients et des souhaits des ingénieurs.S’il manque une compétence, Capge-mini tire avantage de sites de free-lances comme celui d’Upwork, où10 millions de professionnels, tousmétiers confondus, sont disponi-bles. Serait-ce un nouveau concur-rent ? « Nous regardons de près lesstart-up, car elles peuvent nous aiderà transformer nos clients, mais peupeuvent transformer notre métier-même », considère Pierre-Yves Cros.A l’occasion d’une étude avec le MIT,les consultants du groupe aiment àrappeler qu’ils avaient été les pre-miers à parler de « transformationnumérique » en… 2009. Sûrs d’eux,ils n’ont pas dit leur dernier mot. n

Frédéric Oudéa, directeurgénéral de Société Générale.

Photo Marlene Awaad/Bloomberg

L’accélérateur RocketSpace accueille le programmed’innovation de Schneider Electric, à San Francisco.

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SociétéGénérale

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Frédéric Oudéa

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Les EchosLundi 10 octobre 2016 le journal du boardLESECHOSBUSINESS//05

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PUBLI-COMMUNIQUÉ

La gestiondes risques :un enjeudedéveloppementdurable pour le GroupePénaGroupe industriel familial aquitain, le Groupe Péna estspécialisé dans le recyclage des déchets industrielset ménagers.

Acteur engagé de l’économie circulaire, le GroupePéna intervient à la fois dans le traitement des déchetset dans leur valorisation au plus près des besoins desentreprises et des collectivités locales. A la pointe del’innovation, le Groupe Péna propose à ses clients denouvelles solutions de gestion des déchets et d’opti-misation de leur taux de valorisation.

Sur les recommandations de notre courtier, le cabi-net De Bechade, nous avons accepté l’offre QBERisk Profile proposée par QBE. Cette offre, à la foiscartographie des risques et outil de pilotage et deprévention des risques, nous a permis d’engager undialogue très constructif sur la gestion de nos risquesavec notre courtier, l’assureur QBE et Arengi, le cabi-net spécialisé en gestion des risques, en charge de laréalisation de cette étude.

Deux raisons ont motivé notre intérêt pour cette offre.Premièrement, elle s’inscrit parfaitement dans notredémarche quotidienne d’introspection et d’amélio-ration de l’entreprise, et deuxièmement, sa mise enœuvre est simple et peu consommatrice de temps.

Les principaux services de l’entreprise ont été inter-rogés : Direction générale, Gestion, RH, Qualité-Sé-curité-Environnement, Gestion de l’information, Ex-ploitation, Responsables métiers. Ces interviews ontpermis d’identifier les sujets prioritaires en termes

de gestion des risques. Chaque personne a ensuiteété réinterrogée individuellement afin de pouvoir prio-riser les risques de son service par rapport à la vi-sion globale des risques de l’entreprise et cela en sebasant sur 3 critères essentiels : leur probabilité desurvenance, leur impact et les axes d’améliorationspossibles.

Grâce à cette concertation collégiale, cette carto-graphie des risques nous a permis de prioriser et dedimensionner nos risques afin de pouvoir mettre enplace un plan d’actions optimal de gestion des risques.

La mise en œuvre de QBE Risk Profile s’inscrit dansla continuité de nos principes d’entreprise respon-sable et dans le cadre de la maîtrise de notre impactsur notre territoire.

«La gestion des risques s’inscritdans notre démarche d’entrepriseresponsable. »

HUGUES SANDEAUDirecteur Général du Groupe Péna

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MICHEL TALYConsultant au seindu cabinet ArsèneTaxand

Quandlessagescorrigentletir…

U ne décision du Conseil constitutionnel,intervenue le 30 septembre dernier,concerne la taxe de 3 % sur les distribu-

tions de dividendes. La contestation portait surle fait que les distributions effectuées par unesociété détenue à plus de 95 % ne sont passoumises à la taxe si elle fait partie, avec sasociété mère, d’un groupe fiscal, alors que lataxe est due si le pourcentage de détention estle même mais qu’il n’y a pas de groupe fiscal.La différence de traitement repose sur unedifférence de situation objective, et on peutessayer de la justifier par le fait que le régimedes groupes fiscaux forme un tout. Mais c’estoublier que le Conseil constitutionnel examinel’égalité de traitement des contribuables impôtpar impôt. Une différence de situation, certesobjective, mais relative à l’impôt sur lessociétés, ne peut justifier une différence detraitement pour la taxe de 3 % que si celacorrespond à la logique interne de cette taxe.Le Conseil constitutionnel a estimé que cen’était pas le cas.Une fois la différence de traitement établie,il y a deux façons de la supprimer : accorderle traitement de faveur à ceux qui n’en bénéfi-ciaient pas, ou en priver ceux qui en bénéfi-ciaient. Aussi étonnant que cela puisse paraî-tre, il faut comprendre que le Conseilconstitutionnel ne peut pas choisir libremententre ces deux solutions. En effet, il n’a pas lamême marge de manœuvre que le législateur.Il peut supprimer un texte (un paragraphe, unephrase, un membre de phrase), mais il ne peutpas écrire un texte nouveau. Au cas particulier,ne pouvant définir une exonération élargie, leConseil ne pouvait que la supprimer pour tous.Si le législateur n’est pas satisfait du résultat,c’est à lui de réécrire le texte. Afin de lui enlaisser le temps, le Conseil constitutionnelprévoit que sa décision aura un effet différé. n

DR

ILSONTBOUGÉ

VincentMigayrou devient chief finan-cial officer d’EasyVista // Elisabethd’Arvieu devient directrice généraleadjointe en charge des financeset de la stratégie de StudioCanal //JérômeArnaud rejoint Intersec commedirecteur financier.

En partenariat avecNomination.fr

=LA PERSONNALITÉDE LA SEMAINE

Jean-ClaudePoupard(Directeurfinancier,Europcar)

J ean-Claude Poupard n’échappepas à la refonte dela gouvernance

d’Europcar. Actueldirecteur financeopérationnelle et risque,il vient d’être nommédirecteur financier dela société de locationqu’il avait rejointe en 2011en tant que directeurgroupe de la trésorerie,après avoir occupéun poste équivalentchez Kering. n Ph

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Espritstart-upaucentredeservicespartagésd’Eramet

Vincent [email protected]

D ’emblée, Xavier Jégard l’avoue : « La miseen place de notre centre de services parta-gés n’a pas été un long fleuve tranquille.Ce fut un projet compliqué où nous

n’avons pas toujours eu bon du premier coup. Mais,aujourd’hui, je crois que nous sommes sur la bonnevoie. » Initié il y a près de deux ans, opérationneldepuis tout juste un an, cette « petite révolution »,comme la qualifiait à son lancement le directeurcomptable-consolidation-fiscalité d’Eramet,commence à porter les fruits que le groupe minieret métallurgique, dans une situation économiquetoujours délicate, espérait récolter.Inscrite dans le cadre d’un plan global de réductionde coûts, cette création visait à regrouper les activi-tés paie, informatique et, pour une large partie,comptabilité des filiales françaises de l’entreprisequi compte près de 14.000 salariés. « Mais nousnous y sommes pris à l’envers par rapport auxcanons habituels en créant un centre de servicespartagés “à la française”, note Xavier Jégard. Plutôtque de débuter par le transfert des activités transac-tionnelles en les localisant à l’étranger, nous avonschoisi de rester en France en intégrant tout de suitel’ensemble de la comptabilité générale, la fiscalité, le

reporting, alors que nos systèmes d’information sont,encore aujourd’hui, loin d’être tous harmonisés. »

Une réduction de coûts de 20 %Auparavant très décentralisées, avec un service adhoc dans chaque unité de production qui ne dépas-sait souvent pas la taille d’une PME, la plupart desactivités comptables sont désormais regroupées àClermont-Ferrand. « Au départ, nous avions ima-giné que 20 % du personnel comptable nous suivraitet, finalement, ce sont 45 % de nos collaborateursqui ont choisi de rejoindre le centre de servicespartagés », raconte le directeur comptable.Résultat : sur les 80 salariés qui travaillent danscette nouvelle structure, 30 officient à la compta-bilité (13 sont d’anciens comptables d’Eramet et17 ont été recrutés dans la région clermontoiseentre mai et septembre 2015). « Même si j’étais unpeu sceptique au départ, je dois reconnaître que nous

avons trouvé un vrai vivier de personnes dequalité disponibles sur place », se réjouit XavierJégard. Surtout, avec la mise en œuvre de cettesolution, le groupe a quasiment atteint sonobjectif de réduction de coûts de 20 %.Plus jeunes, plus paritaires, travaillant en openspace, les équipes de cette « start-up dugroupe », comme la définit le directeur compta-ble, ont su progressivement convaincre leursclients internes pour les persuader de leurutilité. « Il fallait éviter que les différentes socié-tés soient tentées de recréer une informationcomptable par elles-mêmes, souligne-t-il. Celaaurait été à l’encontre de notre volonté de gagneren productivité. » Pour se prémunir de ce ris-que, un salarié a été désigné dans chaque entitépour être l’interlocuteur privilégié du centre deservices partagés. A cela s’ajoutent deux réu-nions mensuelles, avant et après la clôture descomptes, entre les clients et leur prestataireinterne afin de définir les besoins en informa-tions et les pistes d’amélioration à apporter àleur collaboration. « Nous pensions que ce dis-positif pourrait être un peu lourd pour les équi-pes mais, à l’heure actuelle, cela paraît indispen-sable pour les clients », affirme Xavier Jégard.

Un échange de bonnes pratiquesAprès une période de mise en place forcémentcritique d’un ou deux mois, et un nécessairecalage qui en aura duré deux ou trois, la qualitéde l’information financière produite par le centrede services partagés a retrouvé son niveau anté-rieur. « Désormais, nous cherchons à améliorer nosprocess », précise le directeur comptable. Pourcela, le groupe mise sur le partage de bonnespratiques entre les salariés du centre de servicespartagés qui infusent ensuite dans les différentesentités. Pour les arrêtés mensuels, par exemple,ceux qui n’en faisaient pas s’alignent sur lescanons de ceux qui en réalisaient de trèsdétaillés ; quant au paiement des factures fournis-seurs, fini le fonctionnement erratique où chaquestructure les réglait quand bon lui semblait : unprocess commun les oblige maintenant à réaliserdeux paiements par mois. « C’est un gain de temps,et donc de productivité, assez substantiel, se féliciteXavier Jégard. Mais cela n’aurait pas été possiblesans le soutien des directions financières locales quiont été de vrais moteurs. Ils ont compris qu’à terme,ils obtiendraient une meilleure information finan-cière et nous demandent, aujourd’hui, d’incluredans le centre de services partagés d’autres activitéscomptables. » Un sujet sur lequel la direction adéjà commencé à plancher.

4À NOTERPour encourager le partage de bonnespratiques, l’Association des professionnelset directeurs comptabilité & gestion (APDC)a ouvert un club réservé aux directeurs etresponsables de centre de services partagés.

OPTIMISATION//Il y adeux ans, le directeurcomptable du groupeminier, Xavier Jégard,annonçait dans « LesEchos Business » la miseen place d’un CSP.Il dresse aujourd’huiun premier biland’un projet« sur la bonne voie ».

HARMONISATION. Le groupe minier et métallurgique a regroupé, à Clermont-Ferrand, les activités paie,informatique et, pour une large partie, comptabilité de ses filiales françaises. Photo Thomas Truffer/Eramet

DES AUDITEURS ET EXPERTS-COMPTABLES PLUS FIDÈLESAlors que les recrutements visent toujours, essentiellement, àremplacer des professionnels ayant démissionné (76 %), lesauditeurs et experts-comptables se sont montrés plus fidèlesà leurs cabinets cette année. Une étude Hays a constaté untaux de départ de 26 % (contre 29 % en 2015). « Le salairereste le meilleur outil de fidélisation (60 %), avant l’ambiancede travail (55 %) et la conciliation vie privée et vie profession-nelle (38 %) », rappelle Hays. Plus d’info : echo. st/m300436

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RDVLE13 OCTOBREà Bordeaux pour une confé-rence de la DFCG Aquitaine-Charentes consacrée auxbonnes pratiques à adoptercontre la fraude.

06//LESECHOSBUSINESS le journal du board Lundi 10 octobre 2016Les Echos

directionfinancière

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Congédematernité:délaideprotectionetreprisedetravail

D epuis le 10 août 2016, en application de laloi El Khomri, la salariée est protégée nonplus quatre semaines, mais dix semaines

après la fin de son congé de maternité. Entérinantune jurisprudence remontant à 2014, le législa-teur a précisé que, lorsque la salariée prend sesvacances immédiatement après son congé dematernité, c’est la reprise du travail qui marque lepoint de départ des dix semaines (C. trav., art.L. 1225-4, nouvelle rédaction). Les congés payés, àcondition qu’ils suivent directement le congé dematernité, sont donc dorénavant inclus dans lapériode de protection absolue de la mère, périodependant laquelle on ne peut ni notifier un licen-ciement, ni faire prendre effet à un licenciementprononcé avant le départ en congé de maternité.Que se passe-t-il maintenant si la salariée nereprend pas tout de suite le travail pour une autreraison que la prise de ses vacances ? La Cour decassation avait déjà répondu qu’une absencepour maladie n’avait pas les mêmes effets que lescongés payés. Si la salariée prolonge son congéde maternité par un arrêt de travail pour raisonspathologiques, cela n’interrompt pas le délai deprotection (Cass. soc., 8 juill. 2015).Elle confirme aujourd’hui qu’aucune suspensiondu contrat de travail autre que les congés payés nereporte le démarrage du délai : un employeurrestructurant son entreprise avait demandé à unesalariée de différer son retour de 15 jours, letemps de mettre en place un plan de reclasse-ment. La salariée prétendait que son délai deprotection, alors de quatre semaines, ne partaitque de son retour dans l’entreprise. Faux, répondla Cour de cassation, ce qui a été dit pour lescongés payés ne s’étend pas aux autres absences(Cass. soc., 14 sept. 2016). n

DR

Marie-Sophie Ramspacher@msramspacher

L ’hôpital numérique est devenu une réalitéà Saint-Joseph. Depuis quelques mois,l’établissement parisien a définitivementéradiqué le papier. En dix-huit mois,

7 millions de pages ont été numérisées. Les dos-siers des patients sont tous stockés sur serveur. Al’issue des consultations, les données des examenssont intégrées directement au dossier médicalpersonnalisé. La plupart des appareils de mesurecommuniquent directement avec les systèmesd’information. « A court terme, le personnel n’auraplus aucune saisie manuelle à effectuer, y comprisdans les chambres. Le tensiomètre envoie en tempsréel les valeurs relevées vers le dossier patient, ce quireprésente un gain de temps, une garantie de traça-bilité et de fiabilité. Toute erreur humaine de saisieest impossible », se félicite Jean-Patrick Lajon-chère, directeur général du groupe hospitalierprivé Paris Saint-Joseph.Dès la sortie du bloc, les comptes rendus postopé-ratoires sont, eux aussi, accessibles à de multiplesutilisateurs. Transcrits par un logiciel de recon-naissance vocale puis transférés à qui de droit(spécialistes, médecins traitants, correspondantsde ville, etc.), leur traitement ne monopolise plusles praticiens, qui devaient jusqu’alors dicter leursconclusions au secrétariat puis les relire « pourvérifier l’absence de contresens ». « Au fur et àmesure, ce système intelligent a acquis l’ensemble dujargon médical indispensable à la rédaction decomptes rendus, y compris dans des disciplinespointues comme la gastro-entérologie », souligneNadia Nouvion, directeur du développement dugroupe hospitalier.

Comme dans un aéroportExemptées de tâches fastidieuses et chronopha-ges, les journées de travail des médecins pourtantne se sont pas allégées. Connectés avec les autresservices, sollicités par les confrères des établisse-ments médicaux de la cité hospitalière, ils déli-vrent leur expertise à distance. « En consacrantl’intégralité du temps à la santé des patients, c’estl’ensemble de la qualité de soins qui s’améliore etavec elle l’optimisation financière », résume ledirecteur général.

Les fonctions d’assistante et de secrétaire médicalen’ayant plus de raison d’être, certaines ont quittél’établissement, mais la majorité ont été reconver-ties en assistantes médico-administratives, affec-tées aux formalités d’admission et de sortie des615 lits. A l’image des grands hôtels, check-in etcheck-out s’effectuent en chambre en quelquesclics. « L’administratif est réalisé auprès du patientgrâce à une sorte de bureau mobile connecté »,détaille Jean-Patrick Lajonchère. Les agentsd’accueil, eux aussi, disparaissent progressive-ment car les bornes d’enregistrement numériquesdevraient se généraliser dans les salles d’attentedes consultations, à l’image de ce qui se pratiquedans les aéroports. « L’ambition est de supprimerles actes sans valeur ajoutée tout en améliorant leservice rendu au client », souligne le dirigeant.

De nouveaux profilsSans envisager de copier le modèle des hôpitauxjaponais qui sous-traitent la distribution des médi-caments et des repas à des robots infirmiers, ledirecteur général, décidément visionnaire, n’exclutpas de confier le transfert des brancards vides, descharges lourdes ou encore de la blanchisserie à deshumanoïdes, à l’image de ce que pratique déjà leCHU de Brest. L’arrière-pensée n’est pas de suppri-mer la fonction de brancardier mais de lui confierdavantage de missions variées et valorisantes,telles que l’assistance des patients avant une inter-vention. « Quant au personnel infirmier, déchargéd’une partie de la logistique, il consacrera plus detemps à la relation au patient. »Si la numérisation de Saint-Joseph permet demaîtriser la masse salariale, elle n’a pas allégé leseffectifs, stables, autour de 2.000 employés, tousen CDI « pour éloigner le risque de sous-traiter lasanté à des non-qualifiés ». Doucement, l’introduc-tion de robots et de l’automatisation change toute-fois les métiers de l’hôpital. De nouveaux profilsrejoignent l’établissement : des spécialistes de lalogistique industrielle pour améliorer la circula-tion des flux de patients et l’organisation, desingénieurs afin de peaufiner l’ergonomie des blocsopératoires, sans oublier la directrice du dévelop-pement et du marketing.Fonction atypique à l’hôpital, cette ingénieure,issue de l’industrie chimique, est notammentchargée de définir les objectifs d’activité, d’adap-

ter les capacités à l’activité et de parfaire la per-formance de l’organisation. Au côté du directeurgénéral, Nadia Nouvion a également participé auredressement financier de l’établissement, atteintgrâce à la politique de dématérialisation et dezéro papier, aux économies de consommables(encres, imprimantes, etc.) et à la simplificationdes procédures. A terme, la numérisation dudossier permettra aussi des économies d’actes enévitant la redondance des examens – notammenten matière de biologie médicale –, l’un desdéfauts de la médecine hospitalière française.Dernier étage de l’amélioration, Saint-Joseph aoptimisé le temps de travail, annualisé pourl’ensemble des cadres qui représentent dans cethôpital 70 % des effectifs. n

ORGANISATION//D’abord utilisé pour améliorerla qualité des soins du patient, le digital a accrula disponibilité du personnel de l’hôpital Saint-Joseph,à Paris, dégageant ainsi de substantielles économies.Rencontre avec son directeur, Jean-Patrick Lajonchère.

L’hôpitalnumériqueaccroîtlaproductivitédeséquipes

AUTOMATISATION. A l’hôpital Saint-Joseph, les comptes rendus d’opération sont désormais retranscrits par un logiciel de reconnaissance vocale. Photo Owen Franken

LES 14 MÉTIERS LES PLUS LUCRATIFS EN 2017Une étude Glassdoor rappelle que certaines professions (ingénieur, acheteur, chef deprojet, conseiller financier, développeur logiciel etc.) offrent à la fois des perspectivesd’avenir et des rémunérations confortables, au-delà des 3.000 euros mensuels.Au-delà de la statistique (l’ancien nom pour le Big Data), les bons plans sont toutefoislégion : la logistique, l’économie verte, la petite enfance et le transport recèlent desoffres non pourvues dans des PME et ETI qui promettent aussi de belles évolutionsde carrière. Sans oublier l’armée, la police et la gendarmerie.Découvrir l’intégralité de l’article sur echo.st/drh

Les EchosLundi 10 octobre 2016 le journal du boardLESECHOSBUSINESS//07

directiondesressourceshumaines

Page 8: Leschampions2016 delatransformationdigitale · 2016-10-18 · LaurentGuez @lguez « Je suis vraiment heureuse que nos efforts soient récompensés. C’est un long chemin pris depuis

L a transformation est la grande affaire detous. Celle des grands groupes du CAC 40,ainsi que le soulignent Isabelle Kocher,

Stéphane Richard et Frédéric Oudéa, les diri-geants des entreprises les plus digitaliséesdu CAC 40, comme des entreprises de taillemoyenne et intermédiaire. Un baromètreEurosearch & Associés nous apprend en effetque 60 % des ETI et 37 % des PME envisageraientde se transformer dans les douze prochainsmois. Pour atteindre cet objectif, toutes cessociétés ont besoin de talents : ceux dont ellesdisposent qu’il va falloir faire évoluer, ceux deprofessionnels à débaucher, ceux de startup-peurs avec qui collaborer, de consultants pourles épauler et de jeunes diplômés dont les profilsdevraient fort différer de ceux de leurs aînés.Car l’enseignement du management, lui aussi,doit nécessairement se transformer !Il procèdecependant à petits pas et sans grande rupture.Son évolution est tout à la fois nécessitée parl’émergence d’un monde toujours plus imprévi-sible et par un impérieux besoin de structurer laconnaissance autrement. Pour appréhender lacomplexité du monde, il devient non seulementimpératif de jongler avec codes et algorithmes– un prérequis – mais aussi, et de plus en plus, dese tourner vers les sciences humaines et socia-les, de disposer d’un solide bagage géopolitique,d’un esprit critique acéré et d’une ouverture tantvers l’international que sur les sources les plusdiverses de la créativité. Autant de croisementsdestinés à susciter l’innovation qui sonnent leglas d’un enseignement de type vertical. Cela n’abien évidemment pas échappé aux « businessschools » : chaire Edgar Morin de la complexitéà l’Essec, cours de géopolitique à HEC et Greno-ble Ecole de management, approche interdisci-plinaire via la créativité, l’entrepreneuriat etl’innovation à ESCP Europe, généralisation dedoubles cursus, etc. Même Sciences po s’y metavec la création en son sein d’une école demanagement pour « rêver l’entreprise quin’existe pas encore ». Tous ces établissements depremier rang, sur fond d’enjeux épineux desociété, réhabilitent la curiosité, la collabora-tion, le partage des savoirs, etc. Tous sont bienconscients que, confrontées à une multiplicitéde problématiques, les entreprises n’ont jamaisautant que maintenant besoin d’hybridation desavoirs et de polyvalence. n

BUSINESSLIFEdeMuriel Jasor

@Mljr75112

Nouvelimpératif,enseignerlemanagementautrement

SURBUSINESS.LESECHOS.FR

lEn Europe, seulement 4%despatrons sont des dirigeantes. L’Europeaccuse un retard sur les Etats-Unis,selon une étude S&PGlobalMarketIntelligence. echo.st/m300465lLa SNCF joue la carte de la transpa-rence.Bientôt, elle diffusera le cen-tièmemini-clipmettant à l’honneur sescollaborateurs. echo.st/m300619

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« Maméthode,la“démocrature’’ »

—Propos recueillis parValérie Landrieu

Daniel Harari, vous avez récemment étégratifié d’un prix de l’Entrepreneur del’année. Un comble : Lectra a quarante-trois ans et vous avez repris la société avecvotre frère André, il y a vingt-six ans !Entreprendre, ce n’est pas seulement lancer unestart-up. Reprendre une entreprise et la développer,changer sa stratégie, c’est aussi de l’entrepreneuriat.Lorsqu’en décembre 1990, le patron du Ciri (Comitéinterministériel de restructuration industrielle) nousa dit : « Dommage que vous ne soyez pas des indus-triels », mon frère et moi, deuxièmes actionnaires dela société, avons pris notre décision en quelquesminutes. Nous n’avions qu’une nuit pour rendrenotre copie. En trois ans, nous avons redressé uneentreprise quasi moribonde et, en dix ans, nousl’avons fait passer au rang de numéro 1 mondial. Etreentrepreneur, c’est avoir un projet d’entreprise etsavoir prendre des décisions fortes, en particulier

dans les moments difficiles. C’est ce qu’André et moin’avons cessé de faire chez Lectra.

Patron entrepreneur et patronmanager,quelle différence pour vous qui les opposez ?Le patron manager est un salarié de luxe, souventpayé cher, sans réelle condition de résultat, et sansprise de risque. Manager, c’est tenter d‘améliorer leschoses dans la continuité. Ce n’est pas mon monde.Je ne me reconnais d’ailleurs pas dans les organisa-tions patronales qui raisonnent trop, à mon avis, defaçon managériale. Ce n’est pas ce dont les entrepri-ses ont le plus besoin en ce moment. Il faudraitdavantage de stratégies de rupture et de personnescapables de les mettre en œuvre.

En un sens, votre stratégie a été « ruptu-riste » : Lectra est resté en France et aaugmenté ses prix, contrairement à sesconcurrents…Au milieu des années 2000, un rapport avait concluqu’en délocalisant, nous économiserions 28 % de

Lect

ra

LAMASTERCLASSDEDANIELHARARI//

ARRÊTSURSOI par Eric Albert

Fondateuret présidentde l’[email protected]

Quandlaformationnesertàrien

L ’étude publiée dans la « Harvard BusinessReview » de ce mois d’octobre est sansappel. Les milliards investis, tous les ans,

dans la formation des managers n’améliorent pas,dans la plupart des cas, l’efficacité des organisa-tions. La grande majorité des managers réadop-tent leur fonctionnement antérieur dès leur retourdans l’entreprise.L’analyse montre que ce n’est pas la qualité desformations qui est en jeu, ni l’envie sincère desacteurs de changer. Deux raisons principalesexpliquent cet échec gigantesque. Il provient,d’une part, de l’absence de cohérence entre ce quiest appris aux acteurs lors des sessions de forma-tion et la réalité du fonctionnement de l’organisa-tion dans laquelle ils reviennent. Et, d’autre part,du décalage entre ce qu’ils ont appris et les prati-ques du top management.La formation est souvent déclenchée à la suite duconstat de dysfonctionnements. L’illusionest d’imaginer qu’elle va régler tous les problè-mes. Ainsi, le boss qui s’exaspère de la tendanceà travailler en silo ou du manque de délégation

somme les ressources humaines de formerles équipes à favoriser la transversalité et àdéléguer. Mais, dès leur retour de séminairede formation, elles sont bien souvent confron-tées à un supérieur hiérarchique qui justemententretient le silo et attend de ses collaborateursdirects qu’ils maîtrisent eux-mêmes tous lesleviers de leur activité. Cela ne gâche pas seule-ment du temps et de l’argent, cela crée de lafrustration, de la démotivation et du cynisme.Peu à peu, les services de formation sont devenusdes technostructures. Ces dernières offrent desproduits standards bien marketés sans vérifiersi le contenu est en décalage ou non avec laréalité et les besoins de l’entreprise. De plusen plus, les spécialistes de la formation duservice RH se limitent à proposer un catalogueoù, comme à La Redoute, chacun fait son marchépour dépenser son budget. Les managers s’ins-crivent en fonction de leurs besoins supposéssans que personne ne s’interroge quant à lafaçon dont pourrait se faire la mise en pratiqueréelle au sein de leur écosystème.

pETAPRÈS ?

Cette étude invite les dirigeants à se questionner surleur capacité à induire de la cohérence dans leurorganisation. Ils considèrent trop souvent la forma-tion comme un service dont ils valident le budget – àcondition qu’il baisse – sans réelle exigence sur lesrésultats. Rares sont ceux qui en ont fait un outil deconduite du changement. Très peu suivent dans ladurée les effets des actions lancées. La plupart desdirigeants non seulement ne s’impliquent pas dansla construction de programmes progressifs surplusieurs années pour faire du changement durable,mais ne s’y intègrent pas non plus, considérant queleur niveau hiérarchique leur confère une exhausti-vité de compétences qui les dispense de touteformation. Ayant réussi plus vite que les autres, toutles pousse à être confortés dans la répétition de leursmodes de management antérieurs. Bien qu’ilssouhaitent le changement, ils en sont souvent lespremiers freins. n

DR

Avec son frère André, ce polytechnicien a faitde Lectra, spécialiste des solutions technologiquespour les entreprises utilisatrices de tissus et textiles,une pépite tricolore au rayonnement international.

69 planches signées Antoine Chereau abordent, unefois n’est pas coutume, toutes les discriminations autravail, y compris celles qui sapent les carrières dessalariés syndiqués, diabétiques, LGBT ou obèses.Mordantes, les situations croquées par ce cartoonist,familier des colonnes de « Libé » et observateur avertide l’entreprise, rappellent que stéréotypes et préjugésse construisent dès le berceau, s’entretiennent à

l’école avant de s’épanouir dans le milieu ô combienfertile de l’entreprise. Si l’album moque sans vergogneles chefaillons, il souligne la responsabilité collectivedes salariés malhabiles et malavisés face à la diffé-rence. Publié avec l’aide de l’Institut Randstad pourl’égalité des chances et le développement durable,l’album rapportera 1 euro aux associations qui font dela diversité leur credo. —Marie-Sophie Ramspacher

LUPOURVOUS

« L’égalitéestunlongfleuvetranquille »

de Chereau(Pixel Fever Editions)

nos prix de revient, mais André et moi avons consi-déré que nous n’avions pas le droit de prendre unetelle décision. Le rôle du patron est de protéger lesemployés. Et puis, né en Egypte, j’ai toujours consi-déré que j’avais une dette envers la France quim’avait accueilli. Nous avons travaillé d’arrache-pied sur un plan B pour rester ici et ne pas licencier.Nous avons décidé d’investir massivement sur laqualité et le service, et aujourd’hui, nous fabri-quons 20 % moins cher que si nous le faisions enChine, grâce au codéveloppement avec nos fournis-seurs et à l’innovation.

De quelle façon entretenez-vous la culturede l’innovation ?Ce choix de rester en France a beaucoup mobiliséles équipes, qui ont compris que l’innovation étaitla solution pour garantir la pérennité de l’entreprise.L’innovation permanente, c’est une culture qui a misdes années à se mettre en place, mais qui estaujourd’hui omniprésente chez Lectra. C’est l’unedes valeurs clefs de l’entreprise. Et notre technologiea entre cinq et dix ans d’avance sur nos concurrents.

Quelle méthode de travail a généré lafeuille de route stratégique de début 2017 ?Ma méthode, c’est la « démocrature », une phase dedémocratie avant la décision, une phase de dictatureaprès. Le consensus amène des décisions molles, etdonc de mauvaises décisions. Pour les virages straté-giques, André et moi rédigeons un plan que nouspartageons par cercles concentriques d’abord avec lecomité exécutif, puis avec de plus en plus de monde.

Du top-down à l’ancienne ?La rupture vient forcément d’en haut mais commenous laissons à chacun les moyens d’exprimer sonavis, c’est un travail collectif. Pour la stratégie 3.0mise en place en 2009, nous avons fait 98 brouillonsdu plan stratégique. Près de 200 personnes ont étéconsultées en interne, en face-à-face ou en groupe.A un moment, il n’y avait plus d’idées nouvelles ; ilfallait appliquer. A ce stade, je n’accepte pas que l’onne respecte pas la décision. Il faut se soumettre ou sedémettre. Il y a eu quelques décisions mémorablesdans l’entreprise, parce que je les ai prises contrel’avis de 100 % du management.

C’est votre processus décisionnairemaison ?Ce fonctionnement est appliqué à toute personneà qui est déléguée la prise de décision. Le devoir decelle-ci est alors d’écouter tous les avis, dont le mien,et ensuite, de décider. Et j’appuie sa décision de lamême manière que si j’en avais été à l’origine et ellepeut décider contre mon avis. Si sa décision se révé-lait malheureuse, jamais je ne dirais « je vous l’avaisbien dit ». Cela fait partie des règles du jeu.

Vous autorisez donc l’échec ?Le vrai danger en entreprise n’est pas d’échouer maisde persister dans l’échec. Pour réussir, il faut savoiréchouer, l’essentiel étant de réussir plus souventqu’on échoue ! n

Les rubriques « Ils ont bougé » présentes dans cenuméro, qui rendent compte des principaux mouvementsà l’intérieur de chaque grande fonction de l’entreprise,nous ont été fournies par notre partenaire Nomination.fr,le service de veille et d’information sur les décideurs.

08//LESECHOSBUSINESS le journal du board Lundi 10 octobre 2016Les Echos

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