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LES VRAIS NOUVEAUX MEDICAMENTS POUR LE MEDECIN GENERALISTE EN 2008 INFORMATIONS RECENTES DE PHARMACOVIGILANCE UTILES POUR LE MEDECIN GENERALISTE J.L. Montastruc, A. Sommet, G. Durrieu, P.Olivier, H. Bagheri Service de Pharmacologie Clinique du CHU Centre Midi Pyrénées de PharmacoVigilance de PharmacoEpidémiologie et d’Information sur le Médicament Faculté de Médecine 37 allée Jules Guesde 31000 Toulouse Courriel : [email protected] http://www.bip31.fr

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LES VRAIS NOUVEAUX MEDICAMENTS POUR LE MEDECIN GENERALISTE EN 2008

INFORMATIONS RECENTES DE

PHARMACOVIGILANCE UTILES POUR LE MEDECIN GENERALISTE

J.L. Montastruc, A. Sommet, G. Durrieu, P.Olivier, H. Bagheri

Service de Pharmacologie Clinique du CHU

Centre Midi Pyrénées de PharmacoVigilance de PharmacoEpidémiologie et

d’Information sur le Médicament

Faculté de Médecine

37 allée Jules Guesde

31000 Toulouse

Courriel : [email protected]

http://www.bip31.fr

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BIP 2007, 14, (3), Page 16

Bulletin d’Informations du Service de Pharmacologie Clinique et du Centre de Pharmacovigilance du CHU de Toulouse

Faculté de Médecine, 37 allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse, France

� Centre Midi-Pyrénées de Pharmacovigilance, de Pharmacoépidémiologie et d’Informations sur le Médicament (CRPV)

Tel : 05 61 25 51 12 (permanence téléphonique) ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Centre Midi-Pyrénées d’Evaluation et d’Informations sur la Pharmacodépendance (CEIP)

Tél : 05 62 26 06 90 ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Site Internet : www.bip31.fr

À Paul Montastruc Physiologiste et Pharmacologue, décédé le 30 juin 2007

Cher Paul,

Ainsi tu nous as quittés fin juin, subitement, dans ton jardin. Tu étais âgé de 80 ans. J’imagine que tu n’as pas souffert, ni eu le temps de beaucoup sentir le grand plongeon auquel tu t’étais préparé. En tout cas, tu n’as pas connu ce que tu redoutais : une longue phase de déchéance, de douleurs, d’exaspération et d’impuissance, à la merci d’un acharnement thérapeutique inutile et inhumain. Jusqu’au dernier instant, tu es resté “brillantissime” comme tu aimais qualifier tes élèves les plus chers. À vrai dire bien mieux que “brillantissime”, tu es resté jusqu’au bout époustouflant d’intelligence, de capacité intégrative, de perception des évolutions du monde. Ton esprit est resté jeune, décapant, en avance sur son temps comme tu l’as toujours été lors des différentes époques que tu as traversées. Tous ceux qui t’ont approché ont été subjugués par l’étendue de ta culture, tes capacités de mémorisation hors du commun, la “tranversalité” de ton esprit, capable de picorer dans toutes les sciences humaines, l’économie, la jungle boursière, la sociologie, l’histoire, la géographie, compléments indispensables à la physiologie et la pharmacologie qui occupèrent près de 60 ans de ta vie ; subjugués par ta culture mais aussi par ta vivacité, ton anticipation, ton enthousiasme pour les idées nouvelles, celles qui aident l’humain à progresser, ou tout au moins à ne pas rester enlisé dans l’aveuglement. Profondément attaché à ton terroir, aux valeurs de ceux qui t’ont vu naître, à la médecine insérée dans l’aventure humaine dont ton père fut le prosélyte, tu n’as jamais séparé la science “dure” et la vie. Ce fut là ton principal message. La physiologie fut ton premier champ d’expérimentations et de réflexions. Tu en as vécu l’apogée, puis tu en as ressenti le recul, au profit de disciplines parfois artificielles. Tu as participé activement à la naissance et au développement de la pharmacologie française que tu as ardemment défendue, avec ton équipe, à la moindre occasion. Mais tu as aussi assisté à l’enlisement de cette discipline, prise dans les filets médiocrisants des sirènes industrielles.

Les idées et projets que tu as échafaudés, relatifs à la mise sur pied d’un tronc commun de formation et des passerelles professionnelles entre les médecins, les infirmiers, les kinésithérapeutes, voire les professeurs de gymnastique n’ont pas abouti en leur temps. De même que la valorisation de la recherche sur les cures thermales, et bien d’autres idées et projets qui verront tôt ou tard le jour, quand les évidences apparaîtront à un plus grand nombre. Durant ces dernières années, tu as promu le concept de “pharmacologie sociale” selon lequel le médicament ne doit pas être pensé sans sa dimension culturelle, sociale, économique, humaine. Encore une idée majeure en avance, que beaucoup découvriront plus tard. Sur la fin de ta vie, tu regrettais que bon nombre de tes idées novatrices n’aient pas été concrétisées. Nous te rassurions en te montrant combien de graines de pensée tu avais plantées dans la tête de tes élèves, et comment elles poussent, d’une manière ou d’une autre. Car tu fus un véritable maître à penser, à réfléchir, à concevoir. Un digne représentant d’une université indépendante, aiguillon de la société, formatrice des générations futures, à laquelle tu te référais. Tu respectais et encourageais les enthousiasmes. Tu profitais de la moindre occasion pour élargir et approfondir les perspectives. Ne serait-ce qu’au travers du sens des mots que nous banalisons trop souvent. Tu as très vite reconnu ton aventure dans l’aventure de la revue Prescrire. Et nous avons reconnu la nôtre dans la tienne. Ce fut là la démonstration, s’il en était besoin, que la recherche du mieux est toujours partagée, par delà les générations et les structures. Tu as fait mieux que soutenir Prescrire, tu l’as ensemencé au fil des années. Ainsi, cher Paul, ton cœur s’est arrêté de battre. Mais ton esprit, ta perception des choses se sont immiscés au sein de tous ceux qui t’ont côtoyé. Les structures comme les corps peuvent vieillir puis mourir, mais les pensées restent, se transmettent, rebondissent, s’enrichissent, s’adaptent au monde qui change. Tu n’as pas perdu une minute de ton temps, Paul. Tu as donné à tous, chaque jour, de quoi continuer l’avenir. Repose-toi bien maintenant. Nous t’aimons très fort.

Gilles Bardelay

Co-fondateur de la revue Prescrire

BIP 2007, 14, (3), 16-24

BIP fait partie de l'ISDB (International Society of Drug Bulletins), réseau International

de revues indépendantes de formation et d'informations sur

le médicament.

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Pharmacologie Clinique

Du nouveau concernant les médicaments hypoglycémiants

J.L. Montastruc

Un rapport de la très sérieuse « Agence Américaine pour la Pratique Clinique Fondée sur l’Evidence » de l’Université John Hopkins de Baltimore (Maryland, USA) a revu les 216 études cliniques concernant les médications orales du diabète de type 2 chez l’adulte, en évaluant, non seulement leurs bénéfices (comme habituellement), mais aussi leurs risques et leurs coûts. Ce travail a concerné 10 médicaments : des sulfamides hypoglycémiants (glibenclamide, glipizide, glimépiride), un glinide (répaglinide), des glitazones (pioglitazone, rosiglitazone), des inhibiteurs des alphaglucosidases (acarbose, miglitol) et enfin la metformine. A coté de leurs différents effets sur les critères intermédiaires (glycémie, Hb1Ac, pression sanguine artérielle, LDL cholestérol), ce rapport rappelle que seuls 2

médicaments ont une vraie efficacité clinique démontrée, c’est-à-dire une réduction des critères cliniques: la metformine (avec réduction de la mortalité totale et de ses complications cliniques liées au diabète chez les patients en surpoids) et, à un moindre degré, le glibenclamide (avec réduction des complications cliniques du diabète, sans effet démontré sur la mortalité). Le rapport rappelle également le risque cardiovasculaire (insuffisance cardiaque, infarctus du myocarde), récemment mis en évidence avec les glitazones (voir le précédent numéro de BIP 2007). Il conclut en recommandant, tout d’abord metformine ou sulfamides comme « best buys » par voie orale chez les diabétiques de type 2 en 2007, puis la pratique d’études futures comparatives entre les divers hypoglycémiants oraux avec un suivi sérieux de pharmacovigilance pour préciser la sécurité de ces classes pharmacologiques, et notamment les glitazones, qui inquiètent tant actuellement (SCRIP, 2007,

3278, 18). BIP n’aurait pas dit mieux !

Ne pas confondre : Hypoglycémiants et Antidiabétiques !

L’excellent rapport américain et la présentation ci-dessus des 6 grandes classes pharmacologiques soulignent bien la différence entre les médicaments Antidiabétiques et Hypoglycémiants : seuls metformine, glibenclamide et insuline sont des « antidiabétiques », alors que tous les autres sont seulement des « hypoglycémiants », c’est-à-dire des produits réduisant seulement l’Hb1Ac sans que l’on connaisse leur vrai effet sur l’évolutivité de la maladie diabétique. Cette distinction ne doit pas seulement être considérée comme l’expression pointilleuse d’un pharmacologue : elle est de la plus haute importance pratique. Que vaut-il mieux en effet prescrire ? Un produit dont on ne connait que l’efficacité sur un paramètre biologique (discutable et discuté*) (c’est-à-dire un « hypoglycémiant ») ou au contraire, un remède modifiant le cours évolutif de la maladie (c’est-à-dire un « antidiabétique ») ?

*Consciente des insuffisances de l’évaluation de ces

médicaments sur la seule Hb1Ac, la FDA américaine a d’ailleurs

récemment recommandé d’étudier les effets de ces médicaments

sur des paramètres cliniques (comme, par exemple, la réduction

des complications cardiovasculaires ou micro vasculaires liées au

diabète). BIP ne peut qu’approuver une telle initiative !

Un peu de Pharmacodynamie: les grandes classes d’Hypoglycémiants Oraux

On compte actuellement, en France, 6 familles pharmacologiques de médicaments hypoglycémiants oraux : 1-les sulfamides hypoglycémiants (alias sulfonylurées), glibenclamide (ou glyburide, Euglucan®, Daonil®…), glipizide (Glibinese®…), glimépiride (Amaril®) qui stimulent la sécrétion d’insuline par les cellules béta pancréatiques ; 2-les biguanides dont la metformine (Glucophage®) reste le chef de file, diminuent la néoglucogenèse hépatique tout en majorant la sensibilité à l’insuline ; 3-les méglitinides (alias glinides) comme le répaglinide (Novonorm®) ralentissent l’absorption intestinale des hydrates de carbone ; 4-les glitazones (pioglitazone Actos®, rosiglitazone Avandia®) majorent la sensibilité à l’insuline, au niveau musculaire notamment. On discute actuellement largement le rapport bénéfice/risque de ces glitazones, avec le rappel par la FDA américaine du risque d’insuffisance cardiaque et la mise en évidence d’accidents ischémiques cardiaques (voir le précédent BIP). Fin juillet 2007, la FDA a estimé qu’entre 1999 et 2006, entre 66 000 et 205 000 effets indésirables cardiovasculaires graves pouvaient être attribués chez le diabétique à la rosiglitazone (SCRIP 2007,

3282, 19). 5-les inhibiteurs des alpha-glucosidases (acarbose Glucor®, miglitol Diastabol®) inhibent l’action de ces enzymes qui assurent l’absorption intestinale des sucres. 6-Les analogues des incrétines. Les incrétines (GLP-1 Glucagon-Like Peptide 1 ou GIP Glucose dependant Insulinotropic Polypeptide) sont des hormones intestinales, stimulant la sécrétion postprandiale d’insuline. L’exatinide (Byetta®) est un analogue du GLP-1, utilisable par voie SC (car détruit par les peptidases per os), récemment commercialisé. Etudié uniquement sur des critères intermédiaires (HbA1c…), on ne connait pas les conséquences cliniques (en termes de morbi-mortalité) de son utilisation. L’exatinide abaisse l’Hb1Ac en ajout de la metformine ou d’un sulfamide (d’où son indication « dans

le diabète de type 2 en association avec la metformine et/ou

un sulfamide hypoglycémiant »). Ses effets indésirables, encore mal connus, sont dominés par une mauvaise acceptabilité digestive (10% de nausées) et le risque de développement d’anticorps anti-exatinide. A la différence des autres hypoglycémiants (y compris l’insuline), l’exatinide ne semble pas responsable de prise de poids. Son ASMR a été jugée « mineure » (niveau IV) dans le diabète de type 2. Méthotrexate et maladie de Horton : un effet d’épargne

cortisonique probable mais limité

L. Sailler

Plus de 50 ans après leur découverte, les dérivés de la

cortisone restent les seuls médicaments validés de la maladie de Horton. Ceci est à l’origine de nombreux effets indésirables, d’autant que seulement environ 50% des patients sont sevrés au bout de 2 ans d’évolution. Le méthotrexate, à des posologies de 10 à 15 mg/semaine, a été

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évalué comme médicament d’épargne cortisonique, avec des conclusions divergentes, au cours de 3 essais avec tirage au sort en double insu contre placebo. Une méta-analyse de ces 3 essais, faite à partir du recueil de données de 161 patients inclus (84 sous méthotrexate et 77 sous placebo) suivis en moyenne 54 semaines indique les résultats suivants : 1) le risque relatif de survenue dans le temps de première ou deuxième rechute était respectivement de 0.65 (p=0,04) et 0.49 (p=0,02) chez les patients sous méthotrexate; 2) Il faut traiter 3,6 patients pour éviter une première rechute au cours des 48 premières semaines, et 4,7 patients pour prévenir une deuxième rechute. (RR=2,84, p=0,001) ; 3) La probabilité de ne pas rechuter au cours des 6 mois suivant le sevrage en corticoïdes était plus élevée dans le groupe méthotrexate (RR=2,84, p=0,001) ; 4) L’utilisation de méthotrexate permettait une réduction des doses cumulées de prednisone de 842 mg au cours des 48 premières semaines (p<0,001) ; 5) Il n’y avait pas de différence significative entre les 2 groupes pour le nombre de sortie d’étude ou d’évènements indésirables. En revanche, le méthotrexate ne permet pas de réduire significativement le risque de rechutes céphaliques (céphalée, complications ischémiques…), alors que c’est essentiellement ce risque qui justifie le maintien de la corticothérapie prolongée (Arthritis Rheum. 2007, 56, 2789).

Cette méta-analyse, avec toutes les limites de ce type d’étude, donne un faisceau d’arguments en faveur de l’utilisation du méthotrexate comme médicament d’épargne cortisonique au cours du Horton. Ce médicament possède cependant une efficacité limitée, et ne permet pas de réduire le risque de rechute céphalique. Retrouvez ces informations (et bien d'autres) sur notre site internet

www.bip31.fr, site gratuit d'informations indépendantes et validées sur le Médicament rédigé par le Service de Pharmacologie

de la Faculté de Médecine de Toulouse ainsi que sur www.pharmacovigilance-toulouse.com.fr

Discussions à propos de la substitution des

génériques d’antiépileptiques

J.L. Montastruc

Les génériques sont des (vrais) médicaments de composition en principes actifs et de forme pharmaceutique identiques au princeps : ils possèdent une biodisponibilité comprise entre 80 et 125 % du princeps. Leur utilisation est largement encouragée pour des raisons de prix mais aussi de sécurité : les génériques concernent des « vieux » médicaments, c’est-à-dire des produits bien connus, bien évalués avec (le plus souvent) un rapport bénéfice risque favorable. Il vaut donc mieux prescrire un générique que la dernière « nouveauté » récemment commercialisée. A contre courant de ces points de vue, l’Académie Américaine de Neurologie (Neurology 2007, 68, 1245 et 1249) et l’Association des Neurologues Libéraux de Langue Française (Rev Neurol 2007, 163, 455) ont fait part de leur inquiétude vis-à-vis de la substitution, en l’absence d’avis du médecin traitant, des antiépileptiques. Les américains s’opposent même à une telle substitution pour ces médicaments à faible marge thérapeutique pour lesquels une faible variation de biodisponibilité peut faire redouter la récidive des crises comitiales. Il reste cependant à réellement documenter ce risque par des observations cliniques et des notifications de pharmacovigilance, ce qui

n’est pas vraiment le cas aujourd’hui. Restons vigilants et pensons à déclarer au CRPV.

Pourquoi la FDA a refusé le rimonabant Acomplia®

J.L. Montastruc

Le rimonabant, anorexigène antagoniste compétitif des récepteurs cannabinoïdes CB1 (présents dans le cerveau mais aussi au niveau du foie, muscle, tractus intestinal, cellules immunocompétentes…), n’a pas obtenu d’avis favorable pour sa mise sur le marché aux Etats-Unis d’Amérique. L’Agence américaine (FDA) a retenu le risque d’effets indésirables centraux : comitialité, manifestations d’anxiété ou troubles du sommeil, mais surtout troubles de l’humeur, avec notamment des états dépressifs et un risque

suicidaire. A partir de 14 études, on a pu montrer que le risque suicidaire avec cet anorexigène était doublé par rapport au placebo (Rapport de Côtes RC=1,9). Dans une autre étude chez les fumeurs, le RC atteignait 16,7 ! En France, ce médicament est uniquement remboursé chez les sujets obèses (IMC≥30) et diabétiques de type 2 insuffisamment contrôlés par metformine ou sulfamide (c’est-à-dire des conditions plus strictes que la seule AMM !). Le rimonabant est donc contre-indiqué chez les patients dépressifs (ou traités par les antidépresseurs) et ne doit pas s’utiliser en cas d’antécédents dépressifs ou suicidaires. La recherche de ces symptômes psychiatriques doit être régulière sous ce médicament. Rappelons enfin qu’en l’absence de données, le rimonabant ne doit pas s’utiliser au dessous de 18 ans ou encore chez la femme enceinte ou allaitante. Prudence donc avec ce médicament pour lequel on ne dispose ni d’un recul suffisant (seuls 400 malades ont été, à ce jour, traités plus de 24 mois), ni d’étude de morbi-mortalité (seul critère important pour justifier la prescription d’un tel produit) (SCRIP 2007, 3269, 22).

Pharmacologie Sociale

La pharmacie mondiale forcée de se réinventer

J.L. Montastruc

Sous ce titre, La Tribune (18 avril 2007) propose un bilan de la situation des firmes pharmaceutiques fin 2006. L’article souligne le taux de croissance (7%) à un seul chiffre pour 2006 (loin des résultats antérieurs à 2 chiffres), le rééquilibrage géographique en faveur des pays émergents, le déplacement des médicaments pour les généralistes vers des produits de spécialités (au marché plus étroit), l’accélération des fusions entre grandes firmes… Confrontée à la panne de productivité de sa recherche, l’industrie pharmaceutique insiste désormais davantage sur les progrès réalisés sur des médicaments déjà connus (« nouvelle » forme galénique, amélioration de la formulation, association avec un autre produit pour réduire les effets indésirables…) que sur les innovations radicales (en fait désormais de plus en plus rares). Face à la panne de réelles innovations, la tendance est aux extensions d’indications plutôt qu’à la découverte de nouvelles molécules. L’histoire des statines en reste un excellent exemple.

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BIP 2007, 14, (3), Page 19

Face à la perte des brevets de leurs médicaments vedettes, « les firmes intensifient leur programme d’économie » (La

Tribune, 2 Août 2007) : suppression d’emplois chez Bristol-Myers Squibb, Astra Zeneca ou Johnson & Johnson, réduction de 11 % du nombre des commerciaux Sanofi aux USA… Les firmes sont à l’affût des rachats de petits entreprises de biotechnologie (« start up ») ou de partenariat divers dans l’espoir de s’approprier les produits de demain. La bataille économique fait rage… A suivre, sans se laisser détourner des enjeux véritables pour nos malades : des médicaments bien connus, au rapport bénéfice risque bien évalué et sans se laisser séduire par le dernier produit à la mode, nécessairement mal étudié, tant dans son efficacité que dans ses effets indésirables (même si son mécanisme d’action est « nouveau »).

Perception du risque lié aux médicaments chez les

étudiants en médecine : influence d’une année d’enseignement de la Pharmacologie.

G. Durrieu

La perception du risque médicamenteux diffère entre

médecins généralistes, spécialistes, pharmaciens et non-professionnels de santé (BIP 2007, 14, 13). Une étude, réalisée en début et en fin d’année universitaire chez des étudiants en troisième année de Médecine à Toulouse, a mesuré l’influence de l’enseignement de Pharmacologie sur la perception du risque lié à des médicaments tels que antibiotiques, anticoagulants, antidépresseurs, hypoglycémiants oraux, antihypertenseurs, AINS, aspirine, corticoïdes, hypocholestérolémiants, hypnotiques, contraceptifs oraux, traitement hormonal substitutif (TSH) et tranquillisants (Br J Clin Pharmacol, 2007, 64, 233). Lors de la première évaluation, avant tout enseignement de Pharmacologie, les étudiants percevaient les hypnotiques comme les médicaments les plus dangereux, suivis par les antidépresseurs et les anticoagulants. Les contraceptifs oraux venaient en dernière position. Ce classement rappelle les résultats observés auprès des non-professionnels de santé (Br J Clin Pharmacol, 2002, 54, 433). A la fin de l’année universitaire, la perception globale du risque lié aux médicaments avait augmenté. Pour les hypoglycémiants, les antihypertenseurs, les tranquillisants, les corticoïdes et les hypnotiques, le score restait inchangé. Les antidépresseurs prenaient la première place suivis par les anticoagulants. Les contraceptifs oraux, les AINS et l’aspirine présentaient les augmentations de perception du risque les plus importantes. Durant cette année universitaire, les étudiants ont pris conscience du risque potentiel d’effet indésirable médicamenteux, y compris pour des médicaments tels que les AINS, l’aspirine ou les contraceptifs oraux considérés comme « sans danger » par le grand public.

J’ai la mémoire qui flanche !

J.M. Sénard

Depuis la mise en place de la Charte de la Visite

médicale, la remise d’échantillons au médecin n’est possible que sur demande express du prescripteur. Cette disposition ne concerne que les médicaments listés.

Pour les autres médicaments, aucune réglementation ne s’applique et c’est sans doute ce qui explique que j’ai reçu

il y a quelques jours, sans l’avoir sollicité, un échantillon gratuit d’un pseudo médicament dont je ne citerai pas le nom, sensé lutter contre le déficit cognitif « notamment chez la personne âgée fragile ». La lecture de la notice de ce pseudo médicament, qui est en fait un complément alimentaire, est éloquente. Il s’agit d’un document purement publicitaire qui met en avant plusieurs essais cliniques ayant démontré l’amélioration de la fonction cognitive sous l’effet d’une supplémentation vitaminique, minérale et en oligo-éléments. Mes fonctions cognitives étant tellement détériorées je n’ai pu trouver trace de ces publications dans les bases de données courantes!

Je vais tout de suite commencer le traitement comme recommandé dans la notice car il est certain que le fait d’avoir reçu cet envoi est un signe, une preuve que pour certains industriels du médicament tout est bon, tout est permis. Même de prendre les médecins pour des imbéciles à la cognition déficiente, mais cela ce n’est pas une nouveauté !

Nous vous donnons rendez-vous pour les IXèmes Rencontres de Pharmacologie Sociale, le 21 novembre 2007, à 19h00, au

Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine de Toulouse (37 allées Jules-Guesde). Le conférencier sera le Professeur

Claude Got, Spécialiste de l'expertise en Santé Publique,

Professeur Honoraire à la Faculté de Médecine de Paris-Ouest.

"L'expertise en Santé Publique : travaux pratiques appliqués au médicament"

Pharmacovigilance

Retrait du véralipride Agreal® par l’Agence Européenne : une décision trop tardive !

J.L. Montastruc

BIP (2006, 13, 24) a déjà évoqué le risque d’états dépressifs, de manifestations d’anxiété et de dyskinésies tardives observées avec le neuroleptique « caché » véralipride Agréal®, utilisé dans les bouffées de chaleur chez la femme (!). Ces effets indésirables « graves » (rappelons que les dyskinésies, une fois installées, sont irréversibles et non curables) s’expliquent par les propriétés pharmacodynamiques (antagonisme des récepteurs dopaminergiques D2) de ce médicament. L’Agence Européenne a revu l’ensemble des données disponibles (11 études incluant 600 patients le comparant au placebo et 2 travaux avec 100 femmes versus estrogènes combinés). La conclusion s’avère claire : les risques dépassent largement le bénéfice (qui reste plus que modéré). L’Agence recommande donc (en date du 27 juin 2007) le retrait de l’AMM de ce neuroleptique caché. Une attitude qu’auront adoptée depuis longtemps les lecteurs vigilants de BIP !

Fin de l’obligation vaccinale contre la tuberculose

A Sommet

Depuis le mois de juillet dernier, la vaccination par le BCG n’est plus obligatoire pour les enfants accueillis en collectivité (Décret du 17 juillet relatif à l'obligation vaccinale

par le vaccin antituberculeux BCG, Journal officiel du 19 juillet,

texte 34). Elle reste toutefois fortement recommandée pour certaines populations considérées à risque (BIP 2006, 13, 18). Cette décision, attendue depuis plusieurs mois, repose sur

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BIP 2007, 14, (3), Page 20

plusieurs arguments : diminution de l’incidence de la maladie en France ces dernières années, mauvaise protection de la vaccination contre la forme pulmonaire, interprétation difficile des tests tuberculiniques à visée diagnostique après la vaccination. Enfin, depuis la mise sur le marché de la forme intradermique en janvier 2005, on a rapporté de nombreuses difficultés techniques ainsi que des effets indésirables locorégionaux (abcès). La PharmacoVigilance peut donc aider à prendre des décisions de Santé Publique ! On attend encore des améliorations concernant ce vaccin : optimisation du conditionnement (présentation actuelle en flacon multidoses) et aiguille adaptée à l’injection intradermique.

Colorations Dentaires d’origine médicamenteuse

J.L. Montastruc

La Revue Prescrire a inauguré une nouvelle série

intitulée « Troubles d’origine médicamenteuse ». Le premier chapitre concerne les colorations dentaires. A coté des étiologies traumatiques ou métaboliques (hyper bilirubinémie intense néo natale, porphyrie), on doit aussi penser aux médicaments. La coloration peut avoir eu lieu pendant la période de minéralisation : elle est dite alors intrinsèque et s’avère irréversible. Il peut s’agir du fluor (« fluorose » des eaux de boisson, du sel supplémenté, des médicaments riches en fluor) ou des cyclines (contre indiquées pendant la grossesse, l’allaitement et chez les enfants de moins de 8 ans) ou encore de la ciprofloxacine Ciflox®. Les colorations extrinsèques, observées quand les dents sont visibles dans la bouche, correspondent généralement à des dépôts du médicament sur la dent, éliminables par brossage. On peut les retrouver avec la chlorhexidine (Collunovar® et autres), les médicaments contenant du fer et certains antibiotiques, comme la minocycline Mynocine® (Rev Prescrire 2007, 27, 673).

Vaccin de l’hépatite B et risque de survenue des

maladies auto-immunes de la thyroïde

N.Tavassoli

On a suspecté le vaccin de l’hépatite B comme une cause

éventuelle de maladies auto-immunes, y compris thyroïdiennes. Quelques cas de Basedow ou de thyroïdite de Hashimoto après vaccination hépatite B ont été signalés au « Vaccine Adverse Events Reporting System » (VAERS) aux Etats-Unis. Pour valider cette hypothèse, une équipe américaine a réalisé une étude cas-témoin étudiant l’association entre vaccination hépatite B et risque de survenue de Basedow ou de thyroïdite de Hashimoto (Pharmacoepidemiol Drug Saf 2007, 16, 736). Les auteurs ont aussi étudié le risque de survenue de la maladie auto-immune de la thyroïde chez les patients vaccinés depuis moins d’un an, depuis 1 à 5 ans et depuis plus de 5 ans. 773 cas (355 Basedow et 418 thyroïdites de Hashimoto) et 1102 témoins, appariés par sexe, année de naissance et région d’étude, ont été inclus. Cette étude ne montre pas d’association entre la vaccination hépatite B et le risque de survenue de Basedow (OR, 0,90 ; IC95%, 0,62-1,32) ou de thyroïdite (OR, 1,23 ; IC95%, 0,87-1,73).

Syndrome d’hypersensibilité médicamenteuses ou DRESS syndrome

N.Tavassoli

Bien que la plupart des toxidermies soient considérées

comme des réactions d’hypersensibilité, on réserve le terme de syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse [ou DRESS (Drug Rash with Eosinophilia and Systemic Symptoms) syndrome] à une réaction idiosyncrasique spécifique sévère associant une éruption cutanée généralisée sévère à une atteinte viscérale (adénopathies, hépatite, pneumopathie…), une hyperthermie et une hyperéosinophilie (souvent supérieure à 1500/mm3). Les atteintes systémiques graves sont responsables d’une mortalité de 10%. Le délai d’apparition des symptômes par rapport au début du traitement médicamenteux est de 2 à 8 semaines, plus long que dans les autres toxidermies. Le tableau peut persister plusieurs semaines ou mois, malgré l’arrêt du médicament. Les médicaments les plus fréquemment en cause sont les antiépileptiques aromatiques (phénytoïne, carbamazépine, oxcarbazépine, phénobarbital et lamotrigine), les sulfamides (sulfones, sulfasalazine, triméthoprime-sulfaméthoxazole), la minocycline, l’allopurinol et certains antirétroviraux (zalcitabine et névirapine). Les réactions croisées entre les divers antiépileptiques aromatiques sont très fréquentes, ce qui contre-indique le remplacement de ces médicaments entre eux. Le mécanisme de cet effet indésirable est peu connu et multifactoriel. Il impliquerait des mécanismes immunologiques ou de détoxification (les sujets « acétyleurs lents » ou de race noire sont les plus sensibles). Au cours des dernières années, une quinzaine d’observations a été rapportée évoquant un lien entre ce syndrome et une réactivation virale HHV6 (Human Herpes Virus Type 6).

Perte de poids sous levetiracetam (Keppra®)

H. Bagheri

Le levetiracetam alias Keppra®, chimiquement proche du piracetam (Nootropyl®, utilisé comme nootrope) est indiqué depuis 2002 dans les épilepsies partielles en association avec d’autres anticomitiaux. Son mécanisme d’action reste non précisé. Parmi les effets indésirables de ce médicament, on retrouve l’anorexie décrit comme fréquent sans mention de perte de poids. Une publication française récente rapporte 19 cas de perte de poids imputable au levetiracetam (Epilepsia, 2007, in press). Les auteurs ont distingué 3 groupes de patients : le groupe 1 a inclus 12 patients (dont 9 femmes et 3 patients avec surpoids) avec une perte de poids de 8,1% à 28,6% nécessitant l’hospitalisation chez 1 patient. Trois patients ont reçu le levetiracetam en monothérapie. Sept patients ont rapporté une réduction de l’apport alimentaire, malgré la sensation de faim, du fait de la « baisse de plaisir à s’alimenter ». Les explorations diverses n’ont pas retrouvé d’étiologies particulières à l’origine de l’amaigrissement. Le groupe 2 comprenait 7 femmes avec une perte de poids de 10 à 26,6% et des facteurs de risque (association topiramate, arrêt des médicaments entrainant une prise de poids comme le valproate de sodium, dépression,…). Cependant, l’ajout

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du levetiracetam s’est avéré compatible avec la survenue de perte de poids. Deux patientes se plaignaient d’anorexie. Enfin le groupe 3 a concerné la notification de perte de poids importante dans la Base Nationale de Pharmacovigilance chez 2 jeunes patientes : 7 kg sur 3 mois chez l’une et 20 kg sur 2 ans chez l’autre. Les données d’essais cliniques ou d’études de phase IV ne mentionnent pas la survenue de cet effet indésirable. Cependant, une étude chez 97 sujets âgés rapporte une baisse importante de poids (20-30 kg) chez 4 patients.

Ces différentes données suggèrent l’existence d’un lien entre l’exposition au levetiracetam et perte de poids en particulier dans le sexe féminin et/ou chez le sujet âgé. Le mécanisme d’action de cet effet indésirable reste mal élucidé et au contraire du topiramate, la perte de poids peut survenir chez des patients sans excès de poids. Le signalement par les patients de sensation d'« absence de plaisir » suggère une médiation dopaminergique dans la genèse de cet effet indésirable.

Maladies musculaires chroniques révélées par les statines : existe t-il un lien de causalité ?

L. Sailler

La toxicité musculaire aigue des statines est bien connue. Un nombre croissant de travaux conduit à penser que les statines peuvent contribuer à révéler des maladies musculaires chroniques, inflammatoires (dermatomyosites, polymyosites) ou génétiquement déterminées (Muscle Nerve

2006, 34,153). Toutefois, la grande fréquence de prescription des statines dans la population générale et la rareté de ces maladies ne permettent pas d’exclure une association fortuite.

Un travail de l’unité de Pharmacoépidémiologie de Toulouse renforce la suspicion du rôle joué par les statines dans la survenue de ces maladies musculaires chroniques. Ce travail a montré, dans une étude rétrospective menée au CHU de Toulouse, que l’exposition aux statines était clairement plus fréquente chez 37 patients ayant développé une maladie musculaire chronique (40,5% d’exposition) que celle attendue dans la population Midi-Pyrénées (185 témoins appariés sur l’âge, le genre et le département d’origine, fréquence d’exposition de 20%). Le rapport de côte (RC) d’exposition était de 2,73 [1,21-6,14]), et de 4,36 [1,86-10,22], si on ne considérait que les consommateurs réguliers de statine. Parmi les 21 patients atteints de polymyosite ou dermatomyosite, le RC était de 3,86 [1,30-11,57], et de 5,91 [1,89-18,67] pour les consommateurs réguliers. Le risque de maladie musculaire chronique se majore significativement avec la co-prescription d’inhibiteurs de la pompe à proton (IPP). L’interaction avec les IPP peut s’expliquer par la compétition entre statine et IPP au niveau du Cytochrome P450 3A4, et peut être par un effet musculaire propre des IPP (Eur J Clin Pharmacol 2006,

62, 473). Cette étude est une preuve supplémentaire en faveur d’un

lien de causalité entre statines et maladies musculaires chroniques, et un argument de plus pour peser très soigneusement les bénéfices attendus et les risques avant la mise en route de ces médicaments.

Pensez à déclarer vos effets indésirables au CRPV : vous contribuez ainsi à une meilleure connaissance des médicaments (anciens comme nouveaux). Vos déclarations sont pour nous le

seul moyen de vous informer en retour !

Pharmacodépendance

Cannabis et états psychotiques : oui ou non ?

J.L. Montastruc et M. Lapeyre-Mestre

La relation entre prise de cannabis et survenue d’états psychotiques reste discutée. Certains acceptent une telle association. D’autres la nient en indiquant que l’état psychiatrique sous-jacent favoriserait la consommation abusive. Une récente revue systématique de la littérature (Lancet 2007, 370, 319) contribue à cette discussion. L’analyse de 35 études trouve un risque majoré d’épisode psychotiques chez les sujets consommateurs de cannabis [RR=1,41 (1,20-1,65)]. Le risque semble dose-dépendant, avec des valeurs plus élevées chez les utilisateurs les plus assidus [RR=2,09 (1,54-2,84)]. Les résultats concernant les états dépressifs, les pensées suicidaires ou les épisodes d’anxiété restent moins probants. Les auteurs concluent : « il existe maintenant suffisamment d’arguments pour

avertir les sujets jeunes que la consommation de cannabis

peut majorer leur risque de développer un état psychotique

dans leur vie future ». Dans le commentaire, le journal (Lancet 2007, 370, 293) indique que, d’après cette étude, le cannabis serait responsable de la survenue de 14 % des états psychotiques en Grande Bretagne.

Les symptômes de sevrage au cannabis sont-ils différents de ceux du sevrage tabagique ?

A. Roussin

Agressivité, colère, anxiété, irritabilité, agitation, troubles

du sommeil, diminution de l’appétit et du poids corporel et épigastralgies sont les symptômes de sevrage au cannabis décrits dans la littérature. Ces signes débutent 24h après l’arrêt, avec une intensité maximale au cours de la première semaine et durent 1 à 2 semaines.

Une étude expérimentale portant sur des fumeurs quotidiens de cannabis également fumeurs de tabac (20 cigarettes par jour depuis 10 ans) a comparé la nature et l’intensité des symptômes de sevrage au cannabis à celui provoqué par le tabac (Drug Alcohol Depend 21July 2007). Il s’agissait d’une étude croisée avec tirage au sort où chaque sujet était alternativement évalué pour la quantification des symptômes de sevrage pour des périodes d’abstinence de 5 jours, respectivement au cannabis, au tabac, ou aux 2 substances. Ces périodes d’abstinence survenaient après une période de consommation habituelle de 9 jours pour chaque sujet. Sur les 42 sujets inclus, seuls 12 ont terminé les 3 périodes de l’étude. Certains signes de sevrage étaient communs et d’intensité similaire au cannabis et au tabac : anxiété/nervosité, irritabilité et perturbations du sommeil. Les difficultés de concentration n’étaient observées que lors du sevrage au cannabis. La fréquence cardiaque était augmentée après arrêt du cannabis et diminuée après arrêt du tabac. Une diminution du poids corporel était observée

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après arrêt du cannabis et, à l’inverse, l’arrêt du tabac entraînait une prise de poids. Enfin, les symptômes n’étaient pas plus intenses lors de la consommation conjointe (tabac + cannabis).

En dépit du faible nombre de participants, d’une forte proportion d’abandons, ou encore d’un biais possible de l’essai croisé, les résultats de cette étude tendent à montrer que chez des sujets consommateurs importants de cannabis (3,8 ± 2,1 joints par jour), la sévérité du syndrome de sevrage au cannabis déterminé pendant 5 jours après l’arrêt est comparable à celle engendrée par le tabac.

Pharmacoépidémiologie

Qu’en est-il vraiment du risque cardiovasculaire sous coxib ?

J.L. Montastruc

Depuis le retrait du rofecoxib Vioxx°, on discute de la réalité des effets indésirables thrombotiques sous coxibs. Une équipe anglaise a réalisé une méta analyse de 55 essais cliniques (plus de 99 000 patients) pour quantifier le risque d’infarctus du myocarde (IM) sous coxibs. Quel que soit le coxib, le risque relatif (RR) d’IM par rapport au placebo s’élève à 1,46 (IC 95% 1,02-2,09). Cette valeur élevée a été retrouvée non seulement avec le rofecoxib, mais aussi avec étoricoxib, valdecoxib, lumiracoxib (non commercialisés en France) ou celecoxib (Celebrex° dans notre pays) ! Par rapport aux AINS « classiques », le RR de chaque coxib égale 1,45 (1,09-1,93). On ne trouve pas de différence entre les divers coxibs (Pharmacoepidemiol Drug Saf 2007, 16, 762). Ce travail confirme le risque d’IM sous coxibs par comparaison au placebo mais aussi aux autres AINS. Il montre l’intérêt des méta analyses pour confirmer les données des études pharmacoépidémiologiques.

Pharmacologie Fondamentale

Vers une nouvelle « taxonomie » des médicaments ?

C. Gales et J.M. Senard

La notion de « classe pharmacologique » reste ancrée dans les esprits. Cette commodité est un sophisme qui conduit à étendre, à tort, le rapport bénéfice/risque d’un médicament à tous ceux rangés dans le même groupe du fait d’un mécanisme d’action supposé identique. Ainsi, si on s’intéresse par exemple au détail des propriétés pharmacodynamiques de médicaments agissant sur un même récepteur membranaire, et donc faisant partie d’une même « classe pharmacologique », on se rend vite compte que la nature et l’intensité des évènements intracellulaires, découlant de leur interaction avec le récepteur, diffèrent.

Ces observations ont conduit au concept de « ligand-

directed trafficking » selon lequel chaque molécule, en déterminant des modifications conformationnelles particulières du récepteur, induit une signalisation intracellulaire qui lui est propre. Ainsi par exemple, un médicament agoniste de la voie de signalisation X peut également se comporter comme un antagoniste ou comme un agoniste inverse sur les voies Y et Z. Un autre médicament de la même « classe » peut par contre se

comporter comme un agoniste des voies X et Y et comme un antagoniste de la voie Z ! Ce phénomène, déjà démontré pour les ligands du récepteur bêta adrénergique ou dopaminergique par exemple, devrait à terme déboucher sur une nouvelle façon de classer les médicaments, non seulement en fonction de leur affinité pour un récepteur, mais également en fonction de leur profil de signalisation.

Dopage

Adrafinil et Modafinil : des médicaments utilisés comme dopants !

J.L. Montastruc et M. Biboulet

La grande presse s’est faite, depuis plusieurs années, l’écho de l’utilisation détournée de ces deux médicaments. Une athlète américaine avait été contrôlée positive avec ces médicaments, aux championnats du monde à Paris en 2002.

Mécanisme d’action

L’adrafinil (Olmifon®) a été découvert par un pharmacologue français, Francis Rambert de la firme Lafon. Ce chercheur fut frappé des propriétés psycho stimulantes de ce médicament chez l’animal. Sa surprise fut encore plus grande lorsqu’il s’aperçut que ce produit n’obéissait à aucun des mécanismes d’action connus à cette époque pour les « psycho stimulants ». En particulier, ce médicament ne partage pas le mécanisme d’action des amphétamines. Bien plus, son effet comportemental est aboli par le bloc alpha 1-adrénergique central (bien que, curieusement, l’adrafinil ne se fixe pas sur les récepteurs alpha 1 centraux). L’adrafinil reproduit donc les effets de la stimulation alpha 1-

adrénergique centrale (sans interagir, non plus, avec les récepteurs alpha périphériques). Le modafinil (Modiodal®) est un métabolite de l’adrafinil : il possède donc le même mécanisme d’action. Ces médicaments augmentent également le taux extracellulaire de la dopamine dans le système nerveux central (en modifiant la recapture de la dopamine) : ce dernier effet rend compte aussi probablement des leurs propriétés centrales stimulantes.

Propriétés Pharmacodynamiques

Ces médicaments ont été largement étudiés par le Professeur Michel Jouvet de Lyon. Ce neurophysiologiste, connu pour la description princeps du sommeil paradoxal, qualifiait ces médicaments d’« eugrégoriques » (littéralement permettant d’être « bien éveillé »), puisqu’ils augmentent l’activité motrice chez l’animal, diminuent le sommeil barbiturique, sans entraîner de stéréotypies (mouvements anormaux) ou les autres manifestations motrices classiquement observées sous amphétaminiques. Chez l’homme, l’adrafinil et le modafinil majorent l’activité d’éveil. Ils modifient les paramètres électro-encéphalographiques, augmentant de façon dose dépendante les latences d’endormissement et s’opposant à la diminution des performances cognitives et psychomotrices induites par la privation de sommeil. Cet effet ne s’accompagne pas de modification de l’appétit, comme on l’observe avec les amphétamines classiques. Dans tous les cas, ces effets pharmacodynamiques s’avèrent plus marqués avec le modafinil (joliment

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BIP 2007, 14, (3), Page 23

dénommé Provigil® aux USA !) qu’avec l’adrafinil. Pharmacocinétique

L’adrafinil possède une très courte demi-vie (1 heure environ) ce qui rend compte de la brièveté des ses actions. La demi-vie d’élimination du modafinil s’avère plus longue (15 h), permettant un effet plus soutenu. Par contre, le modafinil est un inducteur enzymatique (iso enzymes CYP3A4, CYP1A2 et CYP2D6 du cytochrome P 450) ce qui rend compte d’un risque d’interactions médicamenteuses (par exemple avec les contraceptifs oraux dont il peut réduire l’efficacité ; attention donc à son utilisation chez les jeunes sportives !). Effets indésirables

Les effets indésirables les plus communs correspondent à des céphalées, diarrhées ou nausées, bénignes et le plus souvent transitoires. Parmi les effets indésirables « fréquents », on retrouve des manifestations d’anxiété, de nervosité, d’insomnie, d’anorexie voire d’élévation de la pression sanguine artérielle (prudence chez l’hypertendu). Ces derniers effets témoignent de l’action stimulante centrale. Utilisation comme produit dopant

L’adrafinil se prescrit dans le ralentissement idéomoteur et les troubles cognitifs du sujet âgé (son efficacité reste mal validée et dans tous les cas modeste et latérale). Le modafinil s’utilise dans les maladies du sommeil (narcolepsie, apnées du sommeil…). L’adrafinil et le modafinil font partie de la liste des

produits dopants, en tant que « stimulants ». En effet, à coté de leurs effets « normalisateurs » de l’éveil, ces produits peuvent déterminer (chez certains sujets prédisposés et/ou à fortes doses) euphorie, stimulation psychique mais également motrice. Des cas d’abus ont été rapportés avec le modafinil. L’effet psychostimulant et la majoration des activités motrices est donc l’effet recherché par le sportif. Celui-ci utilisera de préférence le modafinil, plus puissant que l’adrafinil, mais très difficile à obtenir (puisque sur prescription restreinte et surveillée). Il aura recours avec plus de facilité à de fortes doses d’adrafinil, médicament disponible sur simple ordonnance. Cet adrafinil se transformera dans l’organisme en modafinil, responsable des effets stimulants recherchés. Ces produits s’utilisent seuls ou en association avec d’autres psychostimulants. Conclusion

Ce résumé souligne, une fois encore, l’habileté des fraudeurs de tous poils, sportifs ou non, pour détourner de leur usage médical des médicaments bien ciblés pour des maladies définies (à partir de propriétés pharmacodynamiques). Leur imagination n’a d’égale que leur compétence pharmacologique !

Pour toute information sur le dopage ou pour toute consultation médicale en rapport avec les pratiques dopantes,

allo Antenne Médicale de Prévention du Dopage Tél : 05-61-77-79-83,

Courriel : [email protected]

Médicaments & Grossesse

Inhibiteurs calciques et FIV : Prudence !

C Damase-Michel

Les inhibiteurs calciques utilisés chez l’homme pourraient être à l’origine d’échec de fécondation in vitro (FIV). Ils provoqueraient une atteinte réversible de certaines fonctions des spermatozoïdes en perturbant leur fixation sur la zone pellucide de l’ovule par dysfonctionnement de la réaction acrosomique, ce qui empêcherait la fécondation. Une dizaine de cas ont été publiés. Cet effet semble réversible après l’arrêt de l’inhibiteur calcique puisque certains patients ont pu concevoir après changement pour un inhibiteur de l’enzyme de conversion. On retrouve le même effet in vitro après incubation de spermatozoïdes en présence de nifédipine (Front Biosci. 200, 12, 1420, Hum

Reprod 1995, 10, 59, BMC Del Biol 2006, 6, 59).

Ces éléments sont encore trop limités pour conclure mais ils apparaissent néanmoins suffisants pour proposer une attitude de prudence vis-à-vis de la prise de ces médicaments chez les couples devant avoir recours à une assistance médicale à la procréation ou désirant procréer (si des difficultés de conception sont évoquées).

IMPORTANT : Ce bulletin sera désormais diffusé gratuitement par courriel. Merci de signaler dès maintenant vos adresses électroniques à [email protected] en indiquant votre spécialité. Cependant, vous pouvez continuer à recevoir le BIP par voie

postale, en nous adressant un chèque de 5,00 € (frais d'édition et d'affranchissement, abonnement annuel) à l'ordre de l'Institut

d'Hydrologie, Faculté de Médecine, Professeur JL Montastruc, 37 Allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse.

Brèves de l'AFSSAPS

A retrouver sur : http://www.bip31.fr/

H. Bagheri

Brèves de Pharmacovigilance

Retrait de clobutinol Silomat®: antitussif de mécanisme d’action inconnu (ni opiacé, ni antihistaminique), indiqué depuis 1964 dans le traitement symptomatique de toux non productives. Les données récentes d’études expérimentales et cliniques rapportent la survenue de l’allongement de l’intervalle QT chez l’animal et le volontaire sain. Par ailleurs, 2 cas de trouble du rythme ont été notifiés à la pharmacovigilance. Le rapport bénéfice/risque jugé défavorable a conduit au retrait du médicament en septembre 2007. Attention au surdosage en métoclopramide Primperan®: des enquêtes de pharmacovigilance avaient mise en évidence des cas de surdosage chez l’enfant et le nourrisson avec survenue d’effets neurologiques (contractures, mouvements anormaux, torticolis,…) liés au passage du métoclopramide (neuroleptique « caché » utilisé comme anti-vomitif) au niveau du système nerveux central. Malgré la disposition d’une forme adaptée pédiatrique afin d’éviter les surdosages, une nouvelle enquête a mis en évidence plusieurs cas de mésusage avec EI graves neurologiques. L’utilisation du

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BIP 2007, 14, (3), Page 24

conditionnement adapté, le respect de la posologie et l’intervalle d’administration permettront d’éviter la survenue de ces EIs. Attention à l’utilisation hors AMM des corticoïdes: plusieurs cas d’endophtalmie, d’augmentation de la pression intra-oculaire et de troubles visuels (voire cécité) ont été répertoriés à la suite de l’administration intra vitréenne d’un corticoïde (Kenacort® retard). Ceci rappelle encore une fois la prudence par rapport au risque d’utilisation des médicaments dans des conditions non correctement évaluées.

ASMR de nouveaux médicaments

A. Pathak

L’A.S.M.R. apprécie l'Amélioration du Service Médical Rendu

par un médicament en le comparant aux autres médicaments

de même classe. La Commission de Transparence de la Haute

Autorité de Santé (HAS) évalue l'A.S.M.R. en 5 niveaux en

termes d'amélioration de l’efficacité et/ou du profil d’effets

indésirables et/ou de commodité d'emploi. On peut consulter

l'A.S.M.R. des médicaments sur le site de l’HAS (www.has-

sante.fr). Voici une sélection des A.S.M.R. récemment

délivrées par l’HAS pour les médicaments récemment

commercialisés.

•••• A.S.M.R. de niveau II (Amélioration "importante") ORFADIN nitisinone, un inhibiteur compétitif de la 4-hydroxyphénylpyruvate dioxygénase, indiqué dans le traitement de patients ayant une tyrosinémie héréditaire de type 1 (HT-1). TEGELINE immunoglobulines humaines, chez les patients ayant une neuropathie motrice multifocale. •••• A.S.M.R. de niveau III (Amélioration "modérée") NOXAFIL posaconazole, anti fongique, en prophylaxie des infections fongiques invasives, en particulier pour la prévention des infections à Aspergillus. TRACLEER bosentan, antagoniste des récepteurs de l’endotheline (classe reconnaissable par le suffixe Sentan) dans la prise en charge de l’hypertension artérielle pulmonaire associée aux cardiopathies congénitales de type shunt gauche - droite avec syndrome d’Eisenmenger. PREZISTA darunavir, co-administré avec le ritonavir, en association à d’autres antirétroviraux, indiqué dans la prise en charge des patients adultes infectés par des souches de VIH-1, lourdement prétraités ayant : - des virus multi-résistants aux inhibiteurs de protéase, - un profil génotypique incluant au moins 1 mutation. DIACOMIT stiripentol, anti convulsivant, indiqué dans la prise en charge des épilepsies myocloniques sévères du nourrisson lorsque l'association valproate de sodium + clobazam ne permet pas un contrôle satisfaisant. PROCORALAN ivabradine, inhibiteur des canaux If. Ce médicament bradycardisant, dérivé chimique du vérapamil, non inotrope négatif (dit bradycardisant « pur ») est indiqué chez les patients ayant un angor stable chronique avec une contre-indication ou une intolérance aux bêta-bloquants et ayant une insuffisance cardiaque systolique (fraction d’éjection < 45%) contre indiquant l’emploi des inhibiteurs calciques bradycardisants.

PLAVIX clopidogrel, indiqué dans l’infarctus du myocarde aigu avec sus-décalage du segment ST, en association à l’aspirine chez les patients traités médicalement et éligibles à un traitement thrombolytique.

•••• A.S.M.R. de niveau IV (Amélioration "mineure") JANUVIA sitagliptine, hypoglycémiant oral appartenant à la classe des inhibiteurs de la dipeptidylpeptidase-4 (DPP-4). Ces médicaments, empêchent la dégradation de composés hypoglycémiants secrétés par l’intestin, les incrétines. L’effet hypoglycémiant observé avec la sitagliptine pourrait s'expliquer par l'augmentation des taux des hormones incrétines actives. La sitagliptine est indiquée dans la prise en charge du diabète de type 2 chez les patients traités par la metformine en monothérapie, lorsque le régime alimentaire, l’exercice physique et la metformine ne permettent pas d’obtenir un contrôle adéquat de la glycémie. Aucune donnée clinique pertinente (morbi-mortalité) n’est actuellement disponible. •••• A.S.M.R. de niveau V (« Absence d’amélioration ») NOXAFIL posaconazole, anti fongique, indiqué dans les candidoses oropharyngées, n’apporte pas d’amélioration par rapport aux autres spécialités. THELIN sitaxentan, un antagoniste des récepteurs de l’endotheline, reconnaissable par le suffixe sentan, n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu par rapport aux spécialités disponibles indiquées dans le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire primitive et l’hypertension artérielle associée à une connectivite. CELEBREX celecoxib (suffixe coxib). Compte tenu des données disponibles n’apportant pas la preuve formelle de moins d’effets indésirables digestifs « graves » par rapport aux AINS non sélectifs (notamment chez les patients à risque et compte tenu d’un risque cardiovasculaire ayant fait l’objet de modifications récentes du RCP par l’EMEA), la commission de la transparence considère que cette spécialité n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu par rapport aux AINS non sélectifs.

A QUOI SERT LE CENTRE REGIONAL DE PHARMACOVIGILANCE ?

QUE PEUT-IL VOUS APPORTER ?

Le Centre de Pharmacovigilance a pour mission de répondre à vos questions sur le médicament (prescription, effets indésirables, efficacité démontrée, interactions médicamenteuses, utilisation

chez le sujet à risque, pendant la grossesse, allaitement…). Le Centre de Pharmacovigilance reçoit et analyse les notifications

d’effets indésirables. La loi rend obligatoire la déclaration de tout effet indésirable

“grave” (entraînant un décès, une hospitalisation, une mise en jeu du pronostic vital ou des séquelles) même connu des médicaments

(ou des médicaments dérivés du sang) ainsi que tout effet indésirable "inattendu" (c'est-à-dire non mentionné dans le Vidal)

par tout professionnel de santé (médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien, sage-femme,...). La déclaration doit se faire au Centre Régional de Pharmacovigilance (Coordonnées en première page).

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 25

Bulletin d’Informations du Service de Pharmacologie Clinique et du Centre de Pharmacovigilance du CHU de Toulouse

Faculté de Médecine, 37 allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse, France

� Centre Midi-Pyrénées de Pharmacovigilance, de Pharmacoépidémiologie et d’Informations sur le Médicament (CRPV)

Tel : 05 61 25 51 12 (permanence téléphonique) ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Centre Midi-Pyrénées d’Evaluation et d’Informations sur la Pharmacodépendance (CEIP)

Tél : 05 62 26 06 90 ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Site Internet : bip31.fr

Billet d'humeur

Critères Intermédiaires : Assez ! Assez !

J.L. Montastruc

Un critère intermédiaire se définit comme la modification

d’un paramètre biologique (glycémie, cholestérolémie…) ou para clinique [pression sanguine artérielle (PSA), électrocardiogramme, imagerie…] sous l’effet d’un médicament. Il doit être opposé aux critères cliniques, c’est-à-dire à des modifications (quantitatives ou qualitatives) de la santé consciente des patients. Parmi les critères cliniques, on doit retenir (seulement) l’amélioration de la qualité de vie, la réduction des complications des maladies (morbidité) ou l’augmentation de l’espérance de vie (morbidité). Ces critères cliniques restent les seuls pertinents pour l’évaluation des médicaments. Les critères intermédiaires s’avèrent utiles pour les phases précoces du développement du médicament (phases I, II). Ils peuvent en outre servir pour l’ajustement individuel de la posologie (exemple : PSA pour un anti hypertenseur, TP pour un AVK…). Mais, ils ne peuvent, en aucune mesure, représenter la pierre angulaire de la démonstration du bénéfice vrai d’un médicament.

L’oubli de cette vérité pharmacologique de base,

largement occultée par les discours marketing des firmes ou des leaders d’opinion, a conduit, ces dernières années à la survenue d’épidémies d’effets indésirables « graves », trop nombreux à notre goût. Citons pèle mêle : la survenue de rhabdomyolyses « graves » sous cérivastatine (un hypolipidémiant inhibiteur de l’HMG CoA réductase) évalué uniquement sur un critère intermédiaire (HDL) et dont l’effet sur la morbi-mortalité de l’hypercholestérolémie reste totalement inconnue ; la constatation, lors des essais cliniques du torcetrapib (un hypolipémiant élevant les taux de HDL cholestérol) d’un excès de mortalité ; l’observation d’un surcroît de décès au cours d’une méta analyse de l’aténolol dans l’HTA…

On pourrait citer encore d’autres exemples comme la

prescription large des anti-arythmiques de classe I après infarctus du myocarde en cas d’extrasystole ventriculaire pour prévenir la mort subite. L’essai CAST (testant cette

hypothèse) a trouvé une mortalité de 9 % sous anti-arythmiques et de … 4 % sous placebo ! On a calculé que ces prescriptions (reposant sur des extrapolations à partir de résultats sur des critères intermédiaires : ici, l’ECG) auraient entraîné aux USA au moins autant de morts que les guerres de Corée et Du Vietnam réunies !

Le dernier exemple d’actualité concerne les glitazones,

ces médicaments connus pour leurs effets hypoglycémiants (et donc prescrits chez le diabétique sans démonstration d’effet favorable sur la morbi-mortalité) mais majorant le risque d’insuffisance cardiaque et d’infarctus du myocarde. Ces constatations ont fait écrire au prestigieux Lancet en page de couverture de son numéro du 29 septembre 2007 la phrase suivante : « Unless limitations on the understanding,

analysis and communication of drug safety issues are

adressed, the thiazolidinediones might simply become the

latest in a series of preventable drug disasters ». Finalement, qu’avons-nous retenu des affaires « coxibs »

ou « cerivastatine » ? Il semble que nous les ayons très (trop) vite oubliées sans vouloir nous interroger sur les responsabilités de chacun… Bossuet avait raison quand il écrivait : « Nous sommes des créatures qui nous affligeons

des conséquences dont nous continuons à adorer les

causes » ! Détestons désormais les critères intermédiaires. Refusons les médicaments évalués seulement sur ces paramètres biologiques. Demandons, exigeons, prescrivons et adorons les médicaments étudiés sur des critères cliniques pertinents : non seulement, nous éviterons de futures catastrophes sanitaires médicamenteuses, mais, surtout, nous ferons profiter à nos malades des grands médicaments véritablement efficaces.

Pharmacologie Clinique

Retrait de l’Insuline inhalée EXUBERA° : BIP avait raison !

J.L. Montastruc

Dans son bilan des vrais nouveaux médicaments 2006, BIP (13, 22) qualifiait l’insuline inhalée de « fausse nouveauté ». Plus d’un ont pensé qu’il s’agissait là d’une

BIP31.fr 2007, 14, (4), 25-32

BIP31.fr fait partie de l'ISDB (International Society of Drug Bulletins), réseau International

de revues indépendantes de formation et d'informations sur

le médicament.

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 26

nouvelle exagération de « pharmacologues peu au courant

de la réalité du terrain ». Nous mettions en garde nos lecteurs sur l’absence de démonstration de supériorité par rapport à l’insuline SC, sur les risques d’effets indésirables (en particulier pulmonaires) ainsi que sur « une

biodisponibilité faible (autour de 10 % ce qui laisse prévoir

des réponses très variables) ». Douze mois plus tard, la firme annonce le retrait de cette insuline inhalée pour ces raisons…

Bénéfices et risques du Traitement Hormonal Substitutif (THS)

E. Guitton et C. Damase

L’étude internationale WISDOM a comparé des femmes

ménopausées traitées par traitement hormonal combiné, placebo ou oestrogènes seuls (femmes hystérectomisées) afin d’évaluer les bénéfices et les risques du THS à long terme.

L’étude a été arrêtée prématurément après publication des

données du Women’s Health Initiative study (WHI). Un article du BMJ (BMJ 2007, 335, 239) analyse ces résultats partiels. 5692 femmes ont été inclues et suivies en moyenne 11,9 mois. Les femmes exposées au THS présentaient plus souvent que celles exposées au placebo des événements cardiovasculaires (p=0,016) ou thromboemboliques (p<10-3). L'étude n'a pas montré de différence significative pour les cancers, les fractures, les AVC ou les décès (autres que cardio-vasculaires). La comparaison entre les femmes exposées au THS et celles exposées aux oestrogènes seuls, n’a pas mis en évidence de différence significative dans la survenue d’événements délétères.

Le THS utilisé chez des femmes ménopausées semble

associé à un risque accru d’accidents cardio-vasculaires ou thrombo-emboliques. Ces résultats confirment ceux du WHI study qui avaient conduit à l’arrêt prématuré des études prévoyant le suivi à long terme des patientes sous THS.

Quels vrais nouveaux médicaments en Médecine de ville

en 2007 ? Tout nouveau n’est pas tout beau !

J.L. Montastruc

Cette année a vu de nombreuses nouveautés proposées à nos prescriptions. Il convient de séparer le bon grain (vrais innovations utiles aux patients et étudiées en terme de qualité de vie et/ou de morbi-mortalité) de l’ivraie (fausses nouveautés évaluées sur des critères intermédiaires, me too…).

1-Deux médicaments trop fortement médiatisés Le rimonabant ACOMPLIA°, antagoniste des récepteurs

cannabinoides CB1 centraux, possède des propriétés anorexigènes et aversives. En majorant la libération pré synaptique des neurotransmetteurs centraux, son mécanisme d’action se rapproche de celui des dérivés des amphétamines (sans en avoir les effets cardiovasculaires). Etudié seulement sur des critères intermédiaires (biologiques : HBA1c, cholestérol, poids…) dont la pertinence clinique reste imprécise, il reste un médicament

symptomatique, sans donnée clinique à long terme. Avant de le considérer comme une innovation, il convient d’attendre les données des études de morbi-mortalité en cours.

La varénicline CHAMPIX°, agoniste partiel des récepteurs nicotiniques, n’a été comparée qu’au placebo ! Heureusement, elle est plus efficace que celui-ci (avec 22 % des patients abstinents après 3 mois sous varénicline versus 8 % sous placebo) !. Mais, la varénicline détermine plus d’effets indésirables que le placebo : insomnie, céphalées, rêves, syndrome de sevrage… Les Agences surveillent particulièrement les effets indésirables cardiaques (accidents ischémiques, troubles du rythme…). Dans tous les cas, son rapport bénéfice risque ne parait pas supérieure à la nicotine, qui reste la référence.

2-Des nouveautés qui ne sont pas des vraies

innovations. L’ivabradine PROCORALAN°, chimiquement proche du

verapamil, est un anti angoreux de seconde ligne évalué seulement par des études de non infériorité sur des critères intermédiaires (tests ergométriques). Il convient de tenir compte de ses effets indésirables potentiels (bradycardie, troubles coronaires, arythmies, vision trouble, phosphènes…), ses risques d’interactions médicamenteuses (métabolisme par le CYP 3A4) et de l’absence de supériorité démontrée par rapport aux anticalciques ou aux bêta bloquants. Le patch de testostérone TESTOPATCH°, indiqué dans l’hypogonadisme masculin, n’a pas été comparé aux autres formes de testostérone. L’anticorps anti-IgE omalizumab XOLAIR° évite, chez l’asthmatique, 1 recours aux soins urgents tous les 2,5 ans pour un risque de réactions anaphylactiques graves et d’angiooedèmes. L’exanitide BYETTA°, analogue du GLP1, une incrétine (hormone intestinale stimulant la sécrétion post-prandiale d’insuline et inhibant celle de glucagon), est indiquée chez le diabétique de type 2 par voie SC en complément des autres hypoglycémiants. (Voir BIP 2007, 4, 17).

3-Trop de Mee-too : acide ibandronique BONVIVA°

(xième diphosphonate, indiqué dans l’ostéoporose) ; époiétine delta DYNEPO°, le 6 ième triptan frovatriptan TIGREAT° ; palipéridone INVEGA° (métabolite de risperidone Risperdal°, neuroleptique qui va tomber dans le domaine public).

4-Trop d’associations à simple visée marketing et non

étudiées sur des critères pertinents . En rhumatologie, l’association à visée antiostéoporotique

diphosphonate (alendronate) + vitamine D3 (colécalciférol) FOSAVANCE°. En cardiologie, aspirine + pravastatine PRAVADUAL° pour « réduire la mortalité cardiovasculaire » ou atorvastatine + amlodipine CADUET° (combinaison à visée préventive n’utilisant pas les médicaments de référence), les xièmes associations d’antihypertenseurs (hydrochlorothiazide + olmésartan ALTEISDUO°, COOLMETEC°, hydrochlorothiazide + éprosartan COTEVETEN°). En ophtalmologie, les collyres antiglaucomateux timolol + prostanglandines [bimatoprost (GANFORT°) ou travoprost (DUOTRAV°)] ou agoniste alpha 2 adrénergique brimodine (COMBIGAN°). En diabétologie, des hypoglycémiants (pioglitazone + metformine COMPETACT°, rosiglitazone + Glipérimide AVAGLIM°, pioglitazone + glipérimide

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 27

TANDEMACT°)… qui ne sont pas des antidiabétiques (Voir BIP 2007, 4, 17)!

5-Un médicament à rejeter : le patch de testostérone,

indiqué dans la baisse du désir sexuel chez la femme post-ovariectomisée et hystérectomisée INTRINSA°, reste trop peu actif pour un risque majeur d’effets indésirables virilisants, cardiovasculaires et autres…

6-Quelques petites avancées à petits pas : l’inhibiteur des

tyrosine-kinases sunitinb STUTENT° indiqué dans certains cancers digestifs ou rénaux (malgré les risques de cette famille pharmacologique), les vaccins rotavirus (ROTARIX°, ROTATEQ°).

7-Des progrés tout de même : le vaccin papillomavirus 6,

11, 16, 18 GARDASIL° assure une prévention de 98 % de ces dysplasies d’origine virale. Il reste à préciser si son action persiste durant toute la vie de la vaccinée ainsi que ses éventuels effets indésirables à long terme. Les anti VEGF (un facteur de croissance des néo vaisseaux) apportent aussi, sans nul doute, un nouveau bénéfice, en seconde ligne, dans certaines formes de DMLA (dégénérescence maculaire). Il faudra très vite préciser le médicament le plus actif (ranibizumab LUCENTIS°, commercialisé dans cette indication ou bévacizumab AVASTIN°, un anticancéreux, moins cher, mais non étudié dans la DMLA). (Résumé de la Conférence au Forum Médical

de Rangueil du 18 octobre 2007)

Quand le trop devient l’ennemi du bien :

l’exemple des Antagonistes des Récepteurs de l’Angiotensine 2 (ARA2)

A.Pathak

L’association IEC+ARA2 est indiquée, à la suite de plusieurs essais cliniques, dans la dysfonction ventriculaire gauche symptomatique. Cependant, le risque d’effets indésirables médicamenteux de cette association reste à ce jour mal évalué. Dans une méta analyse comportant 4 essais cliniques (population totale de 17337 patients insuffisants cardiaque suivis pendant 25 mois), Philips et al (Arch Intern

Med 2007, 167, 1930) montrent que les patients sous l’association IEC+ARA2 arrêtent davantage leur traitement pour cause d’effets indésirables que le groupe comparateur sous IEC seul (RR=1,38 [IC95% : 1,22-1,55] pour les insuffisants cardiaques). Les causes les plus fréquentes d’arrêt étaient la survenue d’une insuffisance rénale, d’une hyperkaliémie ou d’une hypotension orthostatique. L’analyse souligne que le traitement de 25 patients insuffisants cardiaques avec la combinaison entraîne la survenue d’1 de ces effets indésirables. C’est la première fois qu’une étude analyse avec autant de précision les effets indésirables secondaires à une stratégie pharmacologique possédant un haut niveau de preuve. Une façon élégante de rappeler l’importance d’évaluer la balance bénéfice – risque, surtout pour des médicaments diminuant la morbi-mortalité. Essayons donc de parler de bénéfice clinique net afin de tenir compte de l’ensemble des effets (favorables comme fâcheux) d’un médicament.

A propos du mécanisme d’action des hypoglycémiants oraux : rectificatif

J.L. Montastruc

Une malencontreuse erreur s’est glissée dans le texte du

précédent BIP concernant la pharmacodynamie des hypoglycémiants oraux, et plus spécifiquement des glinides. Ces médicaments (chef de file : répaglinide Novonorm®) possèdent un mécanisme d’action voisin de celui des sulfamides hypoglycémiants : ils majorent la sécrétion d’insuline par le pancréas. En fermant les canaux potassiques ATP-dépendants sur les membranes des cellules bêta, ils ouvrent les canaux calciques et favorisent l’entrée du calcium dans la cellule et donc l’insulinosécrétion. Merci aux lecteurs « pharmaco-vigilants » qui auront relevé cette inexactitude malencontreuse.

Retrouvez ces informations (et bien d'autres) sur notre site internet

www.bip31.fr, site gratuit d'informations indépendantes et validées sur le Médicament rédigé par le Service de Pharmacologie

de la Faculté de Médecine de Toulouse ainsi que sur www.pharmacovigilance-toulouse.com.fr

Pharmacovigilance

Bilan 2007 de PharmacoVigilance

J.L. Montastruc

L’année qui s’achève a été riche en réévaluations du

rapport bénéfice risque de nombreux médicaments. Ces divers points ont été régulièrement présentés dans BIP.

En France, l’actualité a porté sur le risque d’effets

indésirables neuropsychiatriques (agitation, délires, états dépressifs…) et cardiovasculaires (hypertension artérielle pulmonaire, valvulopathies) du benfluorex MEDIATOR° (un amphétaminique « caché »), les valvulopathies sous l’agoniste dopaminergique antiparkinsonien pergolide

CELANCE°, les dangers hémorragiques de l’héparinoïde anti-thrombotique, inhibiteur du facteur X activé, fondaparinux ARIXTRA° (prudence chez le sujet âgé, insuffisant rénal et/ou avec faible poids corporel… comme avec les HBPM). Les études ont conduit à la suspension de l’obligation de vaccination BCG chez l’enfant ou le nourrisson. L’AFSSaPS a aussi restreint les indications du macrolide télithromycine KETEK° et a retiré la chlorproéthazine NEURIPLEGE° (pour effets cutanés graves et efficacité non démontrée).

L’Agence Européenne du Médicament (EMEA) a

réévalué le risque thrombotique des AINS (y compris les coxibs) et a rappelé spécifiquement les effets indésirables digestifs et cutanés du piroxicam FELDENE° ainsi que les hépatites imputables au nimésulide NEXEN°. Elle a (enfin !) conclu au rapport bénéfice risque défavorable du neuroleptique caché véralipride AGREAL° (pour syndromes dépressifs et extrapyramidaux … attendus) et du clobutinol

SILOMAT° (pour allongement du QT). Elle a décrit la possibilité d’insuffisance cardiaque sous imatimib GLIVEC° et de « syndrome de l’iris flasque » sous tamsulosine

JOSIR° (avertir les sujets âgés traités par les alpha

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 28

bloquants avant toute intervention ophtalmologique) ainsi que les effets neuropsychiques de l’oseltamivir TAMIFLU°.

La PharmacoVigilance Internationale a étudié les

caractéristiques et les facteurs de risque des ostéonécroses de la mâchoire sous biphosphonates, les effets indésirables nombreux (fractures, cancers de la vessie, oedèmes maculaires, insuffisance cardiaque, infarctus du myocarde) sous glitazones (pioglitazone ACTOS°, rosiglitazone AVANDIA°). Les risques dépressifs sous rimonabant

ACOMPLIA° ont été largement rappelés. Bien d’autres points ont été discutés… Rappelons

simplement que la majorité de ces informations vient de la déclaration spontanée, méthode de base irremplaçable, peu coûteuse et effective, d’évaluation des effets indésirables médicamenteux : déclarez aux Centres Régionaux de PharmacoVigilance !

La rosiglitazone encore montrée du doigt

J.L. Montastruc

Depuis quelques mois, on discute des risques cardiovasculaires des glitazones (BIP 2007, 4, 17). Une nouvelle étude conduite sur une base de données américaine (Ingenix Research Database) a étudié le risque d’infarctus du myocarde (IM) sous pioglitazone (ACTOS° et autres) et rosiglitazone (AVANDIA° et autres) chez prés de 30 000 patients diabétiques de type 2. Après ajustement, le risque relatif (RR) d’hospitalisation pour IM sous pioglitazone a été de 0,78 (0,63-0,96) par rapport à la rosiglitazone (soit une réduction de 22 % du RR) (Pharmacoepidemiol Drug Saf

2007, 16, 1065). Une confirmation des précédentes données et une raison de plus pour ne pas retenir ces médicaments hypoglycémiants par ailleurs insuffisamment évalués.

Effets indésirables (EI) des Inhibiteurs de la pompe à Protons

J.L. Montastruc

Les EI habituels des IPP (suffixe: prazole) sont bien

documentés : diarrhées, céphalées fréquentes et « non graves », réactions d’hypersensibilité, rares mais « graves »… Les études pharmacoépidémiologiques récentes ont permis de préciser certains autres EI des IPP. La survenue d’ostéoporose [RR=1,44 (1,30-1,59)], dépendant de la durée d’exposition et de la dose, pourrait s’expliquer par une malabsorption intestinale du calcium, secondaire à la majoration du ph gastrique déterminé par les IPP. Le risque de surinfections [pneumonies (RR=1,89 par rapport aux sujets ayant cessé l’IPP), infections gastro intestinales à Clostridium difficile (RR=2,9) ou à d’autres germes] serait dû à une réduction de la sécrétion stomacale acide, favorisant la prolifération microbienne (ou à une action directe des IPP sur les leucocytes). On discute aussi du lien entre IPP et néphrite tubulo-interstitielle (Rev Med

Suisse 2007, 3, 1934). A suivre…

Hypertrophie des glandes salivaires : un effet indésirable méconnu des glitazones

H. Bagheri

Les effets indésirables des glitazones sont très

largement discutés (voir encore ce numéro de BIP). Le Centre de PharmacoVigilance hollandais a rapporté 3 cas de parotidites (1 sous pioglitazone, 2 avec rosiglitazone). Le délai de survenue a été de 5 semaines à 7 mois et l’effet a régressé à l’arrêt du médicament. En 2006, le Bulletin Canadien de PharmacoVigilance rapportait une série de 5 cas de parotidites associées à la prise de rosiglitazone. Dans la base de données de l’OMS, on retrouve 24 notifications d’hypertrophie des glandes salivaires (21 avec rosi et 3 avec pio) et 6 cas de sialoadenites. Ces observations, comme d’autres effets indésirables déjà rapportés avec ces médicaments, peuvent s’expliquer par leur effet activateur des PPAR gamma (peroxisome proliferator activated receptor gamma). En effet, les PPAR gamma sont présents au niveau de nombreux tissus comme le tissu adipeux, le foie, le muscle squelettique, les glandes salivaires…L’activation des PPAR gamma au niveau des glandes salivaires augmente la synthèse de la mucine salivaire et pourrait entraîner une hypertrophie des glandes. Tout ceci incite à la vigilance par rapport à la survenue d’autres effets indésirables, encore méconnus, au niveau des organes ou tissus exprimant les PPAR gamma (cerveau, poumon,,...).

Pancréatites médicamenteuses

N. Tavassoli

La pancréatite d’origine médicamenteuse est une entité

rare, mais de plus en plus fréquemment décrite avec une incidence en hausse. Les médicaments sont la cause d’environ 2% des pancréatites aiguës dans la population générale. Dans des groupes à risque comme les patients séropositifs pour le VIH, une origine médicamenteuse peut représenter jusqu’à 44% des pancréatites aiguës. La pancréatite médicamenteuse est malheureusement souvent sous-déclarée pour plusieurs raisons : la pathologie n’est pas souvent recherchée ; l’élévation modérée des enzymes pancréatiques sériques est souvent banalisée ; il peut s’écouler parfois une longue latence (jusqu’à plusieurs mois) entre l’effet indésirable et l’introduction du médicament ; le diagnostic est souvent celui d’une étiologie biliaire ou alcoolique parce qu’il n’existe pas de sémiologie permettant de distinguer une pancréatite médicamenteuse d’une autre origine.

Les médicaments les plus fréquemment incriminés sont :

les antirétroviraux (didanosine), les antibiotiques (tetracycline, sulfamides, cotrimoxazole), les diurétiques (furosémide, hydrochlorothiazide), les AINS (sulindac), les dérivés du 5-aminosalicylates (sulfasalazine, mésalazine), les IEC (énalapril, captopril, lisinopril), les immunosuppresseurs (asparaginase, azathioprine, corticoïdes), les antiépileptiques (valproate, carbamazépine) et les œstrogènes. Deux mécanismes pharmacodynamiques

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 29

sont évoqués : effet direct du médicament (ou l’un de ses métabolites) par un mécanisme toxique (tétracycline) ou immunoallergique (sulfamides) ; effet indirect, conséquence d’un autre effet indésirable du médicament comme hypertriglycéridémie, hypercalcémie (thiazidiques), angiooedème localisé (IEC), spasme du sphincter d’Oddi (opiacés), ischémie (diurétiques, azathioprine), thrombose intravasculaire (oestrogènes) ou augmentation de la viscosité du suc pancréatique (diurétiques, stéroïdes) (Rev

Med Suisse 2007, 3, 1942).

Effets psychiatriques des glucocorticoïdes

N. Tavassoli

Les effets indésirables psychiatriques des

glucocorticoïdes sont multiples, fréquents et imprévisibles. On retrouve des troubles de l’humeur, des états anxieux, dépressifs, psychotiques avec manie, des idées suicidaires ou des hallucinations. La possibilité du développement de troubles cognitifs (en particulier de la mémoire verbale et déclarative) reste souvent méconnue. Dans une méta-analyse portant sur 935 adultes traités par glucocorticoïdes, environ ¼ ont présenté un effet psychiatrique, grave dans presque 6% des cas. La dose de glucocorticoïdes est le principal facteur de risque. Par contre, la dose ne permet pas prédire ni le début, ni la durée ni la sévérité des symptômes psychiatriques. Une anamnèse antérieure de troubles psychiatriques ou l’âge du patient ne sont pas de facteurs prédictifs. L’euphorie, l’agitation ou la décompensation maniaque se développent plutôt après un court délai de traitement alors que les troubles dépressifs apparaissent après une prise prolongée. Il est donc important d’informer les patients des effets indésirables psychiatriques potentiels des glucocorticoïdes (Rev Med Suisse 2007, 3, 2472).

Pensez à déclarer vos effets indésirables au CRPV : vous contribuez ainsi à une meilleure connaissance des médicaments (anciens comme nouveaux). Vos déclarations sont pour nous le

seul moyen de vous informer en retour !

Pharmacologie Sociale

Encore un triste exemple de médicamentation de la société

A. Senard

Samedi 29 septembre 2007, péage autoroutier, direction Montpellier. Un panneau à hauteur de mes yeux vante les bienfaits du Fluidifil®, symbolisé par une boîte ressemblant à s’y méprendre à une boîte de médicament, d’où sort à moitié une carte bleue … Stupéfaite, je suis restée perplexe. Qu’est-ce que cela veut dire ? Quels sont les enjeux de cette publicité ? La représentation d’un médicament est associée à un moyen de paiement rapide et à un passage autoroutier !

Certes, quand nous parlons de circulation, nous pouvons penser à circulation du sang comme des voitures et à la possibilité de fluidifier le débit. Quand nous pensons à faciliter le transit, nous pouvons l’appliquer au transit

intestinal ou bien aux péages. Nous pourrions même croire que Fluidifil® possède des vertus lubrifiantes et pourrait prévenir ainsi l’apparition des irritations d’humeur dues aux impatiences d’un passage au compte goutte. Dans cette publicité, la carte bleue sortant de la boîte est bien le médicament, et elle aurait donc les propriétés pharmacodynamiques des anticoagulants, des laxatifs et des anxiolytiques à la fois !!!

Par curiosité, je suis allée sur le site internet (www.asf.fr) et j’ai trouvé les détails de la publicité avec le dépliant correspondant. Dans les indications et les conseils d’utilisation, la carte bleue apparaît comme le remède modèle, la solution magique, « le médicament idéal » : sans effet indésirable, sans contre-indication, sans interaction, sans limite de posologie, voire à consommer sans modération, sans horaire, sans mise en garde ni précaution d’emploi et avec comme seule caractéristique pharmacodynamique le fait d’appartenir à la famille des « facilitateurs de passage ».

En dehors des aspects humoristiques, il apparaît dans le contenu de cette publicité une banalisation dangereuse du médicament. Cela s’appelle, la médicamentation de la société ! Cette banalisation est à l’opposé des objectifs de la pharmacologie qui se soucie d’éduquer la société au bon usage du médicament.

Le rimonabant rend triste les patients, mais aussi… les

actionnaires !

G. Durrieu

Le rimonabant (ACOMPLIA°), un anorexigène

antagoniste compétitif des récepteurs cannabinoides, commercialisé en Europe dans l’obésité et le surpoids, a vu sa mise sur le marché américain refusée par la FDA (Food Drug Administration) en juin 2007. La fréquence d’effets indésirables psychiatriques (anxiété, épisodes dépressifs, tentatives de suicide) observée au cours des essais cliniques sous rimonabant a été jugée trop élevée par l’agence américaine (26 % versus 14% sous placebo). En juillet 2007, l’Agence Européenne du Médicament (EMEA) a décidé de laisser le médicament sur le marché européen en ordonnant cependant une contre-indication aux personnes présentant une grave dépression ou déjà traitées par antidépresseurs. En novembre 2007, une méta-analyse, portant sur quatre essais cliniques, montre un risque majoré sous rimonabant d’effets indésirables graves [RC = 1,43 ; 95% IC: 1,03-1,98] et un nombre plus important d’arrêt du médicament pour troubles dépressifs [RC = 2,51 ; 95% IC: 1,23-5,12] ou pour anxiété [RC = 3,03 ; 95% IC: 1,09-8,42] (Lancet 2007, 370, 1706). Soulignons que les patients inclus dans ces études ne présentaient pas d’antécédents psychiatriques !

Les effets indésirables du rimonabant ne sont pas

uniquement rapportés chez les patients ! Des manifestations d’humeur ont été aussi observées chez les actionnaires qui viennent de déposer contre le fabricant une « class-action » (ou recours collectif) devant la cour de l’Etat de New-York pour « informations trompeuses diffusées auprès des marchés financiers ». Un bel exemple de Pharmacologie sociale !

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 30

TARCEVA° : vous avez de l’acné, vous avez tout gagné !

H Bagheri

TARCEVA°, erlotinib, est un inhibiteur de tyrosine

kinase du récepteur EGF (Epidermal Growth Factor) impliqué dans la croissance tumorale. Il est indiqué dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules comme traitement de 2° ou 3° ligne (AMM européenne). Les résultats des essais cliniques ont montré un gain de

survie de 2 mois par rapport au placebo (après échec d’autres alternatives chimiothérapiques) sans amélioration de la qualité de vie du patient. L’ASMR est évaluée à V (absence d’amélioration) pour le traitement en 2° ligne et à IV (amélioration mineure) en 3° ligne. Il s’agit d’un médicament à prescription restreinte (réservée aux spécialistes d’oncologie hospitaliers) et disponible en pharmacie de ville. Le coût journalier est estimé à 72 euros (pour une ASMR mineure ou absente !). Son profil d’effets indésirables est proche du géfitinib (IRESSA° disponible uniquement en ATU) avec essentiellement des effets digestifs (54%), cutanés parfois graves nécessitant l’arrêt du médicament (75%) et oculaires type conjonctivite (12%).

Deux interrogations se posent pour ce médicament.

D’abord, le mode de dispensation à l’officine pour un cytotoxique avec nombreux effets indésirables. Il s’agit d’une nouvelle tendance puisque 2 autres cytotoxiques ont ce même statut (Busulfan oral dans la leucémie myéloïde chronique mais son utilisation reste très limitée et l’UFT associant tégafur+uracil oral, dans le cancer colorectal métastasé). La promotion du TARCEVA° s’appuie d’une part, sur le mode d’administration par voie orale entraînant moins de contrainte pour le patient (par rapport à l’hospitalisation) et donc meilleur qualité de vie (au prix des effets indésirables non négligeables et un bénéfice clinique discutable!),… et d’autre part sur l’éventuelle économie des établissements hospitaliers (au prix d’un coût élevé non justifié à la charge de la sécurité sociale!). Y a t-il un suivi des patients en ambulatoire exposés à un médicament « sans bénéfice pertinent», avec des effets indésirables fréquents ? Par ailleurs, plusieurs publications suggèrent une corrélation entre le degré de sévèrité de l’acné et la durée de survie sous TARCEVA° : en d’autres termes plus l’acné est important plus la chance de survie augmente ! (J Am Acad Dermatol,

2007, 56, 500). Ceci est suggéré pour d’autres médicaments de cette classe comme le sunitinib (SUTENT°) indiqué dans le cancer du rein où la survenue d’hypertension artérielle s’avère être un indicateur de réponse au médicament (Ann

Oncol, 2007, 6, 1117). Il s’agit d’hypothèses nécessitant confirmation sur des critères cliniques pertinents et non uniquement sur des théories physiopathologiques. Pourquoi ne pas avancer ce type de raisonnement pour d’autres médicaments : vous avez une bouche sèche importante sous ANAFRANIL° (antidépresseur imipraminique avec des propriétés atropiniques), vous allez donc guérir de votre dépression ! Finalement, l’effet indésirable devient désirable et pourrait constituer un espoir. Au moins, un atout pour les médecins face à leurs patients désespérés.

Pharmacodépendance Addiction et pseudoaddiction aux analgésiques opioïdes

A. Roussin

Dans une revue sur l’addiction aux opioïdes chez les

patients douloureux chroniques, les auteurs soulignent la difficulté à établir un tel diagnostic (Eur J Pain, 2007, 11,

490). En effet, dans le cadre d’une consommation au long

cours, tous les analgésiques opioïdes sont susceptibles d’entraîner tolérance et dépendance physique. Le patient peut également être confronté à l’impossibilité d’arrêter ou diminuer sa consommation d’opioïdes malgré une ou plusieurs tentatives. Alors que ces signes de dépendance aux analgésiques opioïdes sont généralement médicalement acceptés et pris en compte, il n’est pas normal que le patient consomme l’analgésique de façon compulsive au détriment de sa santé physique et/ou psychique et/ou de ses activités sociales et professionnelles. Si le patient présente ces signes supplémentaires d’addiction, il est important de déterminer s’ils sont plutôt attribuables à un soulagement insuffisant de sa douleur (on parle alors de pseudoaddiction), ou s’ils sont liés à la recherche des effets psychotropes des opioïdes (euphorie, bien être ou effets normothymiques). Cette distinction ne peut se faire que lorsque ces symptômes comportementaux d’addiction disparaissent quand la douleur est traitée efficacement, permettant alors de distinguer une pseudoaddiction d’une véritable addiction à l’analgésique opioïde qui, elle, persiste même lorsque la prise en charge de la douleur est efficace.

Pharmacoépidémiologie

Ne pas confondre significativité statistique et intérêt clinique !

L’exemple des antibiotiques

A Sommet

Certains critiquent les campagnes visant à optimiser

l’usage des antibiotiques en avançant le risque d’augmentation des infections bactériennes. Des travaux se sont précédemment intéressés à ce sujet (BIP 2005,12, 15). Une nouvelle étude sur le même thème (BMJ 2007, 335,982) peut aboutir à des conclusions différentes selon son interprétation. Elle s’intéresse aux infections respiratoires communes (angine, otite moyenne aiguë, infections des voies aériennes) et à leurs complications infectieuses dans le mois suivant (respectivement phlegmon amygdalien, mastoïdite, et pneumonie) à partir des données de la base de données de prescription des médecins anglais, la GPRD. Au total, plus de 2,5 millions d’infections respiratoires communes ont été recensées entre 1991 et 2001. L’utilisation d’antibiotiques permet de diminuer de façon statistiquement significative le risque de développer une complication infectieuse dans le mois suivant leur prise. Toutefois, en raison de la faiblesse du risque en l’absence d’antibiothérapie (9 complications pour 10 000 patients), il faudrait traiter plus de 4 000 patients pour éviter 1 seule complication. Vu sous cet angle, le bénéfice de traiter par

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 31

antibiotique une infection respiratoire commune paraît moins évident !

Cancers et contraception orale : des données rassurantes

E. Guitton et C. Damase

Une étude anglaise, débutée en Mai 1968, a comparé le

risque relatif ajusté de cancers entre les femmes exposées et non exposées à une contraception orale (BMJ 2007; 335:651).

D’une part, 1.083.000 femmes/année ont été incluses à

partir des registres nationaux de santé. Cette étude a montré, chez les femmes exposées à une contraception orale, une réduction significative du risque de survenue de tout cancer (RR ajusté=0,88 et IC95%[0,83-0,94]), des cancer du colon et rectum (RR ajusté=0,72 et IC95%[0,58-0,90]), de la cavité utérine (RR ajusté=0,58 et IC95%[0,42-0,79]), ou des ovaires (RR ajusté=0,54 et IC95%[0,40-0,71]). D’autre part, 555.000 femmes/année ont été incluses auprès de médecins généralistes. Cette 2ème étude, incluant un nombre de femmes plus restreint, n’a pas montré de réduction significative du risque de survenue de cancer chez les femmes exposées à une contraception orale. En revanche, la réduction du risque de cancer de l’ovaire et de la cavité utérine était retrouvée.

En conclusion, ces études n’ont pas montré

d’association entre contraception orale et augmentation du risque de cancer.

Médicaments & Grossesse

Médicaments et femmes enceintes : Pensez à informer sur les risques de l’automédication !

C. Damase-Michel

Plusieurs études réalisées en Haute Garonne montrent une prescription moyenne de médicaments par femme au cours de la grossesse d’environ 14 spécialités différentes (avec des extrèmes allant de de 0 à 76 médicaments différents prescrits au cours de la grossesse). Une étude réalisée au CHU durant l’été 2005 auprès de 166 femmes enceintes ayant rendez-vous pour une consultation montre qu’environ 1 patiente sur 7 s’automédique. Cette automédication concerne dans plus de la moitié des cas des antalgiques (paracetamol). Puis, on retrouve par ordre décroissant des médicaments homéopathiques, antiacides ou de la motricité digestive, des antibiotiques et antifungiques, des antispasmodiques. Interrogées sur les dangers au troisième trimestre de grossesse des médicaments disponibles sans ordonnance (comme l’aspirine ou l’ibuprofène), près de la moitié des femmes ignorent les risques pour leur enfant de la prise de ces médicaments. Ces résultats montrent qu’en plus des médicaments qui leur sont prescrits, bon nombre de femmes enceintes n’hésitent pas à s’automédiquer et que la majorité d’entre elles ne connaissent pas les risques de certains médicaments courants en vente libre.

Exposition en fin de grossesse à des substances psychoactives : Etude NENUPHAR

I. Lacroix

Nous avons réalisé une étude observationnelle concernant l’état de santé de nouveau-nés exposés aux substances psychotropes en fin de grossesse (cas inclus par le laboratoire de Toxicologie lors de recherche de toxiques dans les urines). Cette étude étudiait les psychoactifs les plus souvent détectés chez ces nouveau-nés et décrivait les conséquences de ces expositions. 53 nouveau-nés ont été inclus. Ils ont été exposés majoritairement aux benzodiazépines (55%), aux opiacés (51%) et au cannabis (40%). Nous observons une polyconsommation de produits psychotropes : 68% des femmes de notre échantillon ont consommé au moins 2 substances psychotropes différentes. Cette polyconsommation semble associée à un risque de pathologie néonatale élevé. Les nouveau-nés avaient des poids et taille moyens inférieurs à ceux de la population générale (2790 ± 600 g, 47,1 ± 3,0 cm) avec un taux de prématurité également plus élevé (19% versus 7% en population générale d’après l’enquête périnatale 2003). 92,5% ont présenté une pathologie néonatale : syndromes de sevrage (52,8%), pathologies respiratoires (45,3%), hypotonie (30,2%), hypotrophie (28,3%) et pathologies cardio-vasculaires (26,4%) étant les plus fréquentes. Dans 79% des cas de syndrome de sevrage, la mère avait consommé un opiacé en fin de grossesse, dans 43% une benzodiazépine (dans 4 cas seulement non associée aux opiacés). Les cas de détresse respiratoire sont survenus plus souvent lors d’exposition in utero aux benzodiazépines (7 cas). Les benzodiazépines retrouvées dans les urines des nouveau-nés avaient dans plus de ¾ des cas une longue demi-vie d’élimination. Ce travail montre la nécessité de rappeler aux prescripteurs que les benzodiazépines de demi-vie intermédiaire et de puissance d’action modérée comme l’oxazépam sont préférables en fin de grossesse. La présence fréquente de cannabis dans les urines des nouveau-nés présentant une pathologie néonatale (40%) conduit à s’interroger sur un éventuel rôle potentialisateur de cette substance (notamment dans la survenue de syndrome de sevrage). (Thérapie, 2007, 62, 177).

IMPORTANT : Ce bulletin sera désormais diffusé gratuitement par courriel. Merci de signaler dès maintenant vos adresses électroniques à [email protected] en indiquant votre spécialité. Cependant, vous pouvez continuer à recevoir le BIP par voie

postale, en nous adressant un chèque de 5,00 € (frais d'édition et d'affranchissement, abonnement annuel) à l'ordre de l'Institut

d'Hydrologie, Faculté de Médecine, Professeur JL Montastruc, 37 Allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse.

Brèves de l'AFSSAPS

A retrouver sur : www.bip31.fr/

H. Bagheri

Protelos® (ranélate de strontium). Seize cas de

réactions allergiques graves (syndrome DRESS – Drug Rash with Eosinophilia and Systemic Symptoms), dont 13 en France, ont été rapportés avec ce médicament indiqué dans l’osteoporose chez des patients traités par Protelos®

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BIP31.fr 2007, 14, (4), Page 32

dont 2 cas ayant entraîné le décès du patient. Le syndrome DRESS est une réaction allergique grave entraînant l’atteinte d’un ou plusieurs organes, notamment le foie et le rein. En cas de survenue d’une éruption cutanée, le médicament doit être arrêté immédiatement et définitivement.

Keppra® (lévétiracétam). Plusieurs cas d’erreurs médicamenteuses (liées à une mauvaise interprétation des informations portées sur l'étiquetage des flacons et administration d’une dose (X5) plus importante) ont été notifiés avec cet antiépileptique en France. Dans 1 cas, ce surdosage s’est accompagné de nausées, vomissements et sensations vertigineuses. Afin d’améliorer la lisibilité des étiquettes, une modification des mentions de l’étiquetage des flacons et de la boîte du médicament est en cours.

Trasylol® (aprotinine), un antifibrinolytique (inhibiteur de la plasmine), indiqué dans les syndromes hémorragiques en chirurgie cardiaque, chez les patients à très haut risque de saignements. La firme a suspendu sa commercialisation à la suite de l’arrêt de l’étude BART (au Canada) montrant une mortalité plus élevée dans le groupe de patients traités par aprotinine par rapport aux autres groupes (traités par l’acide tranéxamique ou l’acide aminocaproïque). Dans l’attente des résultats, la Commission d’AMM a considéré que le recours à Trasylol® est nécessaire dans certaines situations cliniques sans autre alternative (patients adultes à haut risque hémorragique en chirurgie cardiaque et population pédiatrique en chirurgie cardiaque) pour laquelle l’utilisation est établie et un vrai besoin spécifique identifié. ASMR de nouveaux médicaments

A. Pathak

L’A.S.M.R. apprécie l'Amélioration du Service Médical Rendu

par un médicament en le comparant aux autres médicaments

de même classe. La Commission de Transparence de la Haute

Autorité de Santé (HAS) évalue l'A.S.M.R. en 5 niveaux en

termes d'amélioration de l’efficacité et/ou du profil d’effets

indésirables et/ou de commodité d'emploi. On peut consulter

l'A.S.M.R. des médicaments sur le site de l’HAS (www.has-

sante.fr). Voici une sélection des A.S.M.R. récemment

délivrées par l’HAS pour les médicaments récemment

commercialisés.

� ASMR de niveau III (Amélioration « modérée »)

REVLIMID, gélules de lénalidomide indiqué, en association à la dexaméthasone, dans le myélome multiple chez les patients ayant déjà reçu au moins un traitement antérieur. Le lénalidomide est structurellement proche du thalidomide. Le mécanisme d’action du lénalidomide s’appuie sur des propriétés anti néoplasiques, anti-angiogènes, proérythropoïétiques et «immunomodulatrices ». •••• A.S.M.R. de niveau IV (Amélioration « mineure ») DUODOPA, gel pour perfusion intra-duodénale continue de lévodopa/carbidopa. indiqué chez les patients à un stade

avancé de la maladie de Parkinson idiopathique avec fluctuations motrices et dyskinésies sévères en situation d’échec malgré un traitement optimisé par les thérapeutiques médicamenteuses disponibles par voie orale. Le traitement par Duodopa pourra être envisagé : -chez des patients non éligibles à la stimulation cérébrale profonde, -en cas de contre-indication, d’intolérance, d’échec à l’apomorphine en perfusion sous-cutanée. KEPPRA, comprimés ou solution de lévétiracetam indiqué dans la prise en charge des crises généralisées tonico-cloniques primaires chez les patients atteints d’épilepsie généralisée idiopathique. Donezepil (ARICEPT), galantamine (REMINYL), rivastigmine (EXELON), inhibiteurs de l’acétylcholinestérase («anti-cholinestérasiques ») et memantine (EXIBA), antiglutamatergique, indiqués dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer dans ses formes légères à modérément sévères : ASMR mineure dans le cadre de la prise en charge globale de la maladie. Attention aux interactions avec les médicaments atropiniques (souvent cachés). •••• A.S.M.R. de niveau V (Absence d’amélioration) ACTONELCOMBI associe, dans la même présentation - des comprimés pelliculés contenant 35 mg de risédronate - des sachets de granulés effervescents contenant chacun 1000 mg de calcium et 880 UI de vitamine D3. Cette spécialité est indiquée dans le traitement de l’ostéoporose post-ménopausique chez des patientes qui nécessitent une supplémentation vitamino-calcique. Ce médicament n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu par rapport aux trois principes actifs pris séparément. Note : nous faisons le choix de présenter une sélection de

spécialité dont l’usage est le plus large possible. Ainsi, les

spécialités réservées à l’usage en collectivités sont rarement

retenues dans ce paragraphe.

A QUOI SERT LE CENTRE REGIONAL DE

PHARMACOVIGILANCE ? QUE PEUT-IL VOUS APPORTER ?

Le Centre de Pharmacovigilance a pour mission de répondre à vos

questions sur le médicament (prescription, effets indésirables, efficacité démontrée, interactions médicamenteuses, utilisation

chez le sujet à risque, pendant la grossesse, allaitement…). Le Centre de Pharmacovigilance reçoit et analyse les notifications

d’effets indésirables. La loi rend obligatoire la déclaration de tout effet indésirable

“grave” (entraînant un décès, une hospitalisation, une mise en jeu du pronostic vital ou des séquelles) même connu des médicaments

(ou des médicaments dérivés du sang) ainsi que tout effet indésirable "inattendu" (c'est-à-dire non mentionné dans le Vidal)

par tout professionnel de santé (médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien, sage-femme,...). La déclaration doit se faire au Centre Régional de Pharmacovigilance (Coordonnées en première page).

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BIP31.fr 2008,15 (1), Page33

Bulletin d’Informations du Service de Pharmacologie Clinique et du Centre de Pharmacovigilance du CHU de Toulouse

Faculté de Médecine, 37 allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse, France

� Centre Midi-Pyrénées de Pharmacovigilance, de Pharmacoépidémiologie et d’Informations sur le Médicament (CRPV)

Tel : 05 61 25 51 12 (permanence téléphonique) ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Centre Midi-Pyrénées d’Evaluation et d’Informations sur la Pharmacodépendance (CEIP)

Tél : 05 62 26 06 90 ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Site Internet : www.bip31.fr

Compte rendu des IXièmes Rencontres de Pharmacologie Sociale

Nous étions plus de 400 autour du Professeur Claude Got, le

21 novembre 2007, pour écouter (et apprécier) sa conférence sur « L’expertise en Santé Publique : travaux pratiques

appliqués au médicament ». Durant plus d’une heure, le conférencier a présenté son expérience et ses réflexions sur l’expertise et les activités expertales, en illustrant son propos d’exemples issus de son expérience à propos des médicaments (les anorexigènes) et de la sécurité routière. Retenons sa dernière diapositive : « Les problèmes du Médicament sont ceux de la Société, avec une absence de maîtrise des produits et objets nouveaux, une soumission aux méthodes de la publicité (envahissement quantitatif, vision partielle et partiale des problèmes, la séduction remplace la raison) et au pouvoir économique ».

Retrouvez l’intégralité de cette brillante intervention sur www.chu-toulouse.fr/IMG/pdf/compte_rendu_du_mercredi_21_novembre_2007.pdf

Rendez vous pour le dixième anniversaire de ces rencontres

le Mercredi 19 Novembre 2008 à 19 heures à la Faculté de

Médecine des Allées Jules-Guesde : le conférencier sera le

Professeur Alain Ehrenberg, directeur du Centre de Recherche

« Psychotropes, Santé Mentale, Société » à Paris.

Billet d'humeur Multiples noms commerciaux des Médicaments : trop c’est

trop !

J.L. Montastruc

L’acte de baptême des médicaments est riche en patronymes

variés: numéro d’enregistrement, dénomination chimique, Dénomination Commune Internationale (DCI)… A ces noms, s’ajoutent désormais non plus un, mais souvent plusieurs noms de marque. Ainsi, le béta-bloquant timolol correspond, selon le Vidal 2007, à 18 noms de marque (dont 6 en association) ! Ce chiffre égale 22 (20 associations) pour la codéine pour s’élever à 53 (37 associations) pour le paracétamol ! Ces noms multiples sont des facteurs majeurs d’erreurs pour les soignants et les soignés.

Le comble de l’absurde est atteint lorsqu’un même principe actif possède deux noms de marque, un par indication : ainsi, l’agoniste dopaminergique ropinirole est dénommé REQUIP° quand il est prescrit chez un parkinsonien et ADARTREL° dans le syndrome des jambes sans repos ! Si on comprend l’intérêt commercial des firmes, on perçoit moins bien la position des Agences délivrant les AMM et autorisant ainsi la multiplication des noms de marque. Certains diront que les posologies des 2 présentations de ropinirole ne sont pas identiques. Cet argument ne tient pas. En fait, cette multiplication est, avant tout, un artifice commercial visant à priver le prescripteur de sa réflexion pharmacologique et de son libre arbitre de prescripteur.

Un autre exemple alarmant concerne les gammes

« ombrelles », c’est-à-dire des spécialités de composition différentes selon les spécialités mais présentées sous un même nom commercial (voir p 3).

La DCI doit désormais devenir pour tous (soignants et soignés) notre langage commun à propos du médicament. Rappelons, encore une fois, que la prescription en DCI est, non seulement tout à fait légale, mais largement recommandée (par la Faculté !) pour de multiples raisons : elle permet de s’affranchir des pressions commerciales, de mieux prescrire en reconnaissant la classe pharmacologique du médicament grâce aux segments clés* de la DCI (-pril pour un IEC, -olol pour un béta-bloquant…) évitant ainsi les interactions et les surdosages. Prescrire en DCI c’est aussi rendre au pharmacien son rôle de conseil en médicaments, et faciliter les approvisionnements des patients (et les erreurs de délivrance) lors de leurs déplacements à l’étranger…

Oui, la DCI doit être désormais, selon le beau mot de la Revue Prescrire, « le vrai nom du Médicament » ? Pensons en DCI, prescrivons en DCI pour notre liberté de professionnel de santé responsable et indépendant et le bien de nos patients.

NB. *Une liste des segments clés est disponible sur notre site

www.bip31.fr ou directement à www.chu-

toulouse.fr/IMG/pdf/LEXIQUE_PARTIE_II-2.pdf

BIP31.fr 2008, 15, (1), 1-8

BIP31.fr fait partie de l'ISDB (International Society of Drug

Bulletins), réseau International de revues indépendantes de

formation et d'informations sur le médicament.

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 34

Pharmacologie Clinique

Recommandations anglaises pour la prescription des fibrates

J.L. Montastruc et A. Pathak

L’Agence Anglaise du Médicament rappelle les règles de

bonne prescription des fibrates. Ces hypolipidémiants ne doivent pas être prescrits dans les dyslipidémies ou la prévention cardiovasculaire. Ils ne sont des médicaments de première intention qu’en cas d’hypertriglycéridémie sévère.

En effet, aucun bénéfice (clinique) n’a été clairement démontré dans les 5 essais versus placebo étudiant l’efficacité et la sécurité des fibrates [malgré l’abaissement des taux plasmatiques des lipides (critère intermédiaire)]. Dans ces études, on retrouve plus de décès sous fibrates que sous placebo ! Chez les sujets hypercholestérolémiques, les fibrates doivent se prescrire uniquement en cas d’inefficacité, de contre-indication ou d’effets indésirables sous statine (ou autre médicament). L’association statine + fibrate doit seulement s’envisager lorsque le prescripteur sera sûr que le bénéfice attendu sera supérieur aux risques (musculaires notamment) (SRIP 2007, 3311, 3).

Quelle est la place de la digoxine dans le traitement de

l’insuffisance cardiaque ?

Professeur Claude Thery (Lille)

NDLR : Il est de bon ton, à l’heure actuelle de dénigrer

l’intérêt et la place des digitaliques dans l’insuffisance

cardiaque. BIP31.fr a demandé au Professeur Claude Thery de

Lille, cardiologue, de rappeler les données de base issues des

grands essais cliniques. Nous le remercions vivement de ce

texte court, clair, synthétique et si bien argumenté.

L’efficacité de la digoxine chez les patients en insuffisance cardiaque chronique, en rythme sinusal, et avec altération de la fonction systolique, repose sur des bases scientifiques solides. Il est utile de rappeler ces faits souvent injustement oubliés. Les bêta-bloquants et les IEC améliorent la survie, mais les IEC ont peu d’effets sur les capacités fonctionnelles à l’effort. Quant aux bêta-bloquants, ils les diminuent, au moins de façon transitoire. A l’inverse, l’étude RADIANCE avait montré que l’arrêt de la digoxine diminuait fortement les possibilités d’effort et augmentait d’un facteur 5 la fréquence d’aggravation de l’insuffisance cardiaque malgré la poursuite des diurétiques et IEC. Mais il était nécessaire de connaître l’effet de la digoxine sur l’espérance de vie, car les autres inotropes, comme les catécholamines ou les inhibiteurs de la phosphodiestérase, augmentent la mortalité s’ils sont administrés de façon chronique. La grande étude DIG avait donc tiré au sort (digoxine contre placebo) 6800 patients avec fraction d’éjection (FE) <0,45, recevant par ailleurs diurétiques et IEC. Après un suivi de 3 ans, cette étude a montré que, contrairement aux autres inotropes, la digoxine exerce un effet neutre sur la mortalité globale, avec par ailleurs une diminution significative de 25% de la mortalité par insuffisance cardiaque et des hospitalisations pour insuffisance cardiaque (p<0,001). Cette diminution est

d’autant plus importante que l‘insuffisance cardiaque est plus sévère (classe III ou IV de la NYHA) ou que la FE est basse : diminution de 32% lorsque la FE était < 0,25. Dans cette étude, la digoxinémie était en moyenne de 0,86 ng/ml. Il est d’autre part important de souligner le fait que dans toutes les études récentes portant sur le traitement de l’insuffisance cardiaque, les patients étaient très majoritairement sous digoxine : 50 à 92% des patients étaient sous digoxine dans les essais sur les bêta-bloquants, 68 à 94% dans ceux avec les IEC, 50 à 67% avec les ARA 2, et 75% avec la spironolactone. Tous ces essais ont donc été réalisés « à base de digoxine ». La digoxine est donc le seul produit, avec les diurétiques, qui améliore les symptômes, diminue le nombre d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque et augmente les possibilités à l’effort, en particulier si la FE est basse, sans diminuer l’espérance de vie. Elle est actuellement certainement très sous-utilisée.

Médicaments inappropriés chez le sujet âgé : un consensus

français

J.L. Montastruc

Le Centre de PharmacoVigilance de Limoges propose une

liste de médicaments à éviter chez la personne de plus de 75 ans. Ce magnifique travail repose sur un consensus d’experts (pharmacologues, gériatres et pharmaciens) utilisant la méthode Delphi (Eur J Clin Pharmacol 2007, 63, 725). Trois types de médicaments ont été retenus : 1-Médicaments au rapport bénéfice/risque défavorable

-certains AINS, comme l’indométacine [en raison d’effets indésirables (EI) neurologiques) ou la phénylbutazone (EI hématologiques)]. Proscrire aussi l’association de 2 (ou plus) AINS,

-tous les médicaments atropiniques : antidépresseurs imipraminiques, neuroleptiques phénothiaziniques, certains hypnotiques (doxylamine DONORMYL°, alimémazine THERALENE°…), antiH1 de première génération, certains antispasmodiques urinaires (oxybutine DITROPAN°…) ou digestifs, antiparkinsoniens (trihexyphenidyle ARTANE°…)… (Liste non exhaustive). Bien sûr, ne pas associer 2 atropiniques,

-les benzodiazépines à demi-vie longue (≥ 20h) comme le bromazépam LEXOMIL°, diazépam VALIUM°, clorazépam TRANXENE°, flunitrazépam ROHYPNOL°… pour leurs risques de chute, de troubles mnésiques ou de confusion,

-certains antihypertenseurs, comme les centraux (clonidine CATAPRESSAN°…), les alpha1-bloquants (prazosine ALPRESS°, urapidil EUPRESSIL° pour leurs EI à type d’hypotension orthostatique ou d’aggravation de l’incontinence urinaire), ou les anticalciques d’action courte (nifédipine ADALATE°… pouvant déterminer baisse tensionnelle, infarctus du myocarde ou AVC par un effet vasodilatateur trop marqué),

-les laxatifs stimulants (CONTALAX°…) pour leur EI à type de syndrome du colon irritable,

-les sulfamides hypoglycémiants d’action longue (GLUCIDORAL°, glipizide DIABINESE° : hypoglycémie prolongée),

-certains myorelaxants (baclofène LIORESAL), tétrazépam MYOLASTAN° en raison du risque de chute ou de sédation…),

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 35

-mais aussi, la réserpine, la digoxine (à posologie > 0,125mg/j ou à concentration > 1,2 ng/ml), le disopyramide RYTHMODAN° (risque d’insuffisance cardiaque et EI atropiniques), la ticlopidine TICLID° (EI hématologiques et hépatiques) ou la cimétidine TAGAMET° (confusiogène). 2-Médicaments d’efficacité discutable : les « vasodilatateurs »

cérébraux*. 3-Médicaments au rapport bénéfice/risque défavorable et à

l’efficacité discutable -les benzodiazépines à demi-vie courte ou

intermédiaire, prescrites comme hypnotiques ou sédatifs, -les atropiniques prescrits comme antivertigineux, antiémétiques, antitussifs, -mais aussi, le dipyridamole PERSANTINE° et la nitrofurantoïne FURADOINE°… 4-Certaines interactions médicamenteuses : 2 psychotropes de la même famille ou encore les anticholinestérasiques chez l’Alzheimer (donépézil ARICEPT°…) trop souvent prescrits en association avec un atropinique. *Bip31.fr rappelle que l’efficacité des « vasodilatateurs »

cérébraux n’a jamais été démontrée !

Que nous cachent les marques « ombrelles » ?

P. Olivier

En marketing, une marque (ou gamme) « ombrelle » sert à

désigner un nom de marque unique sous lequel est commercialisé un ensemble hétérogène de produits, de composition et d’utilisation différentes. L’objectif est toujours de faire bénéficier le produit de la notoriété et éventuellement de l’image de la marque ombrelle. Appliquées au médicament, ces gammes rassemblent des spécialités de composition, d’indication et de forme pharmaceutique différentes. Au nom de marque se rajoute alors une mention différentielle évoquant l’indication, comme « rhume », « expectorant », « mal de gorge » etc (ex : Gammes Humex®, Ergix®, Rhinathiol®).

Un même nom pouvant renfermer différents principes actifs, ces gammes « ombrelles » sont sources potentielles d’erreurs, de surdosages et donc d’effets indésirables parfois graves : récemment, le Bulletin Canadien des effets indésirables (2007,

17, 3) rapportait le cas d’une femme de 64 ans, ayant acheté par erreur un décongestionnant à base de pseudoéphédrine (vasoconstricteur sympathomimétique), de diphénhydramine et de paracétamol (Bénadryl Total®) alors que son médecin lui avait conseillé Bénadryl Allergies® (diphénhydramine seule). Après 2 jours d'utilisation, la patiente a été victime d'un accident vasculaire cérébral avec troubles de la vision et de la parole. Aucun facteur de risque d'accident vasculaire cérébral, autre que l'âge et l'usage de la pseudoéphédrine, n'a été signalé.

Dernier exemple éloquent : en France, vient d’apparaître devant le comptoir des pharmacies une nouvelle gamme « ombrelle » Humex Reflex® (pour les premiers signes du rhume) sans autorisation de mise sur le marché (AMM). Comment les autorités de santé ont-elles pu autoriser cette gamme Humex Reflex® sans AMM (8 produits !) EN PLUS de la gamme Humex® avec AMM (au moins 12 produits !) déjà existante ????

En ces temps d’automédication facilitée par un futur libre accès des patients aux médicaments sans prescription, l’intérêt de ces marques « ombrelles » est surtout de nous « cacher » la vraie composition des produits et donc le bon usage du médicament.

Littérature scientifique : bon reflet de l’efficacité des médicaments ?

G. Durrieu

Depuis plusieurs années, on dénonce le biais de publication :

les essais cliniques négatifs ne sont pas (ou peu) publiés, ce qui peut conduire à une surestimation du rapport bénéfices/risques du médicament.

Une étude récente (N Eng J Med 2008, 358, 252) a analysé les essais cliniques de 12 antidépresseurs publiés dans la littérature scientifique. Les auteurs ont comparé les conclusions de ces articles aux jugements portés par la Food & Drug Administration (FDA). Sur les 74 essais enregistrés par la FDA pour ces antidépresseurs, 23 (31%) n’ont pas été publiés. Sur les 38 études considérées comme positives par la FDA, 37 ont été publiées. Sur les 36 études jugées comme non concluantes ou négatives par la FDA, 22 n’ont pas été publiées. Parmi les études négatives publiées, 11 ont été présentées de façon positive pour le médicament. Ainsi selon la littérature, 94% des essais cliniques présentaient des résultats positifs alors que pour la FDA, ce pourcentage est à 51%. La taille de l’effet, calculé à partir des méta-analyses des essais, est significativement plus élevée pour les essais publiés comparés aux essais enregistrés par la FDA. Cette augmentation varie de 11% à 69% selon l’antidépresseur, avec une augmentation médiane de 32%.

Attention donc aux biais de publication qui nuisent à une connaissance exacte de l’efficacité des médicaments !

La rosuvastatine ne diminue pas la morbi–mortalité cardiovasculaire des insuffisants cardiaques…….

A. Pathak

On attendait beaucoup du premier essai de morbi-mortalité

avec la rosuvastatine. Dans l’essai CORONA (NEJM 2007, 357,

2248), 5010 patients, âgés d’au moins 60 ans avec une insuffisance cardiaque d’origine ischémique ont reçus soit 10 mg de rosuvastatine soit un placébo. Le suivi de 32 mois montre une réduction significative, mais attendue, du taux de LDL-Cholestérol de 45%. Cependant, l’étude ne montre pas de différence entre les deux groupes sur la survenue du critère combiné (associant décès cardiovasculaire, infarctus du myocarde et AVC non fatals) (rapport de cote: 0.92; IC95%: 0.83-1.02). Pas de différence non plus sur les décès cardiovasculaires seuls (rapport de cote: 0.95; IC95%: 0.86-1.05)

Encore une fois, l’action d’un médicament sur un critère intermédiaire (ici le LDL- cholestérol) ne se traduit pas toujours par un bénéfice clinique pour nos patients. C’est l’éternelle histoire du développement du médicament.

…et augmenter le HDL-Cholestérol n’est pas forcément toujours bénéfique chez le patient à haut risque

cardiovasculaire.

A. Pathak

La lutte pharmacologique contre le cholestérol porte

désormais sur les stratégies capables d’augmenter le HDL-Cholestérol. La CETP est une enzyme permettant le transfert des esters de cholestérol des HDL vers d’autres lipoprotéines. Son inhibition (par le torcetrapib) entraîne une augmentation du

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 36

HDL-Cholestérol et une réduction du LDL-Cholestérol, la cible idéale pour un médicament hypolipémiant !

Dans l’essai ILLUMINATE (NEJM 2007, 357, 2109), 15067 patients à haut risque cardiovasculaire ont reçu l’atorvastatine, soit seule, soit en association avec le torcetrapib. Le critère d’évaluation combinait la survenue d’un décès d’origine coronarienne, un IDM non fatal, un AVC ou une hospitalisation pour syndrome coronarien. Le lipidogramme indiquait une réduction de plus de 20% du LDL et une augmentation de 70% du HDL-Cholestérol. Mais, l’essai a été arrêté prématurément au bout de 12 mois pour une augmentation du risque d’évènements cardiovasculaire (rapport de côte : 1.25, IC95% : 1.09-1.44) et de la mortalité globale (rapport de côte : 1.58, IC95% : 1.09-1.44) dans le bras association. L’analyse plus fine montrait une augmentation de la pression artérielle systolique de 5.4 mm de Hg, une tendance à l’hypokaliémie et l’hypernatrémie, association pathognomonique de l’activation du système rénine angiotensine aldostérone. D’ailleurs, l’aldostérone plasmatique était augmentée dans le bras atorvastatine+torcetrapib.

Deux messages pharmacologiques à retenir: 1) l’augmentation du HDL-Cholestérol par un médicament ne s’associe pas forcément à une protection cardiovasculaire (la sempiternelle notion de critère intermédiaire), 2) la pharmacodynamie d’un médicament dans un essai clinique est en général connue à l’exception des situations ou un effet dit « latéral » est démasqué, ici la stimulation du SRAA par un médicament agissant sur les voies du cholestérol. La preuve par deux que les essais cliniques constituent « l’étalon standard » dans l’évaluation des médicaments chez l’homme.

Retrouvez ces informations (et bien d'autres) sur notre site internet www.bip31.fr, site gratuit d'informations indépendantes et validées

sur le Médicament rédigé par le Service de Pharmacologie de la Faculté de Médecine de Toulouse ainsi que sur

www.pharmacovigilance-toulouse.com.fr

Pharmacologie Sociale

Firmes pharmaceutiques : 2 fois plus d’argent dans la pub que dans la recherche

Marc-André Gagnon (Département de Sociologie de

l’Université du Québec à Montréal), et Joel Lexchin (School of Health Policy and Management, York University, Toronto) rapportent que les dépenses promotionnelles de l’industrie pharmaceutique aux Etats-Unis ont été, en 2004, 2 fois supérieures aux dépenses de recherche et développement, atteignant 57,5 milliards de dollars, contrairement aux affirmations de l’industrie (lien internet). Une estimation qui renvoie, en France, au récent rapport de l’IGAS sur "L’information des médecins généralistes sur le médicament" appelant à "une action vigoureuse des pouvoirs publics qui doit s’accompagner d’une régulation du volume de l’effort promotionnel des laboratoires" (lien internet, document pdf).

Va-t-on lever l’anonymat des relecteurs des grandes revues

médicales ?

M. Lapeyre-Mestre

C’est une première, le laboratoire Pfizer est en train d’essayer

de forcer les grandes revues médicales à divulguer l’identité et

le contenu des commentaires des relecteurs qui ont analysé des articles sur deux des médicaments commercialisés par le laboratoire, celecoxib (Celebrex) et valdecoxib (Bextra). En effet, poursuivi en justice pour réparation des dommages subis par des patients après traitement par ces deux médicaments, Pfizer a assigné à comparaître des journaux tels que le New England Journal of Medicine, le JAMA, le BMJ et le Lancet. Pour l’instant, ces journaux ont « résisté », ne donnant à Pfizer que quelques éléments de correspondance entre les auteurs et le groupe éditorial, alors que le laboratoire argumente que certaines informations inclues dans les manuscrits soumis pourraient servir à argumenter la défense du laboratoire. Le recours des plaignants des deux parties (industrie pharmaceutique, patients…) à une assignation à comparaître de ces grands journaux fait craindre aux éditeurs et aux chercheurs la fin de l’indépendance et de la confidentialité du système de relecture (BMJ 2008, 336, 575).

Le gouvernement britannique envisage de renforcer la loi

sur l’obligation de transparence sur les données de pharmacovigilance au cours des études cliniques

M. Lapeyre-Mestre

Le laboratoire GlaxoSmithKline connaissait l’augmentation

du risque de suicide chez les sujets de moins de 18 ans traités par paroxétine ou autres antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine plusieurs années avant l’alerte lancée en 2003 par l’Agence du Médicament Britannique : c’est ce que révèlent les résultats d’une enquête approfondie menée pendant 4 ans auprès du laboratoire. Les données des études cliniques détenues par le laboratoire contenaient cette information de façon très précoce. Cette enquête a surtout mis en exergue les insuffisances de la loi sur la sécurité des médicaments. En effet, au moment des faits, la loi n’imposait pas à un laboratoire d’informer les autorités de régulation sur les données d’études cliniques dans des populations ou le médicament n’était pas indiqué. La seule « faute » aurait été que le laboratoire ait promu l’utilisation hors AMM de la paroxétine chez l’enfant et l’adolescent, mais cela, c’est bien plus difficile à prouver ! (BMJ 2008, 336, 575)

Influence d’un financement industriel sur les conclusions

des méta-analyses

J.L. Montastruc

Des auteurs américains ont recherché l’existence d’une

relation entre les conclusions de méta-analyses et leur financement par les firmes (BMJ 2007, 335, 1202). 124 études ont été retenues, dont 40% avec un lien industriel. Les études financées par les firmes ont 55% de chance de présenter des résultats positifs (résultat non significatif). Par contre, de telles études s’associent significativement à des conclusions favorables avec un rapport de côte (OR) de plus de 4 ! Une raison de plus pour développer notre compétence en Lecture Critique d’Articles !

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 37

Pharmacodépendance

« Musique et drogue : les dernières tendances ! »

M. Lapeyre-Mestre

Des auteurs américains ont récemment étudié les références à

l’utilisation de substances psychoactives (tabac, alcool et autres drogues) dans la musique populaire, à partir d’une analyse approfondie des citations concernant l’usage et les motivations des 279 chansons les plus populaires de l’année 2005, selon le magazine « Billboard » (Arch Pediatr Adolesc Med 2008, 162,

169).

Un tiers de ces chansons contenait au moins une référence aux substances psycho actives, correspondant environ à 35 références par heure de musique : cette fréquence variait selon le style de musique : 9% dans la pop, 14% dans le rock, 20% dans le R&B/hip-hop, 36% dans la musique country et 77% dans le rap. Les références concernaient en priorité l’alcool (24%), le cannabis (14%), d’autres drogues (11%, cocaïne, opiacés, hallucinogènes, et même des médicaments), et enfin le tabac, avec moins de 3% de citations. Seules 4 chansons « rock » (sur 279) véhiculaient des messages « anti-drogues », aucune ne rapportait un refus de substance. La plupart des chansons rapportait des conséquences « positives » de l’usage, le plus souvent sur un aspect social, sexuel, financier ou émotionnel.

Les auteurs soulignent donc qu’un adolescent américain moyen serait ainsi chaque jour exposé à au moins 84 références explicites aux drogues, avec de grandes différences selon son type de musique préféré. Ces références étant quasi exclusivement associées à une image positive (inclusion dans le groupe, prouesses sexuelles…), on peut s’interroger sur leur impact en termes de santé publique. Nous n’avons pas d’analyse équivalente sur la chanson française. Nous n’avons plus qu’à espérer que nos enfants restent nuls en anglais !

Pharmacovigilance

Nicorandil : des ulcérations pas seulement buccales !

J.L. Montastruc

On connait le risque ulcérogène buccal du nicorandil (IKOREL° ou ADANCOR°), un activateur des canaux potassiques déterminant vasodilatation artérielle et coronaire. Plus récemment, on a décrit d’autres localisations de ces ulcérations, tout le long du tube digestif notamment.

En dehors de la bouche, on les retrouve ainsi sur la langue, l’œsophage, le pharynx, l’intestin, le colon ou l’anus (et même quelquefois la vulve). Parfois, ces ulcérations muqueuses s’associent à des atteintes du même type au niveau cutané. Leur reconnaissance précoce doit éviter le recours à la chirurgie puisque cet effet indésirable « grave » régresse en quelques semaines après l’arrêt du nicorandil.

Ainsi, avec une efficacité modeste et une probabilité d’effets indésirables « graves », le nicorandil n’apparait pas comme un médicament de première intention dans l’angor (Rev Prescrire

2007, 27, 910).

Surdité brutale sous inhibiteurs de la phosphodiestérase du type 5 : sildénafil (VIAGRA°) vardénafil (LEVITRA°) et

tadalafil (CIALIS°)

N. Tavassoli

A la suite de la publication d’un cas de surdité bilatérale et

profonde induite par sildénafil (J Laryngol Otol 2007, 121, 395), la FDA (Food and Drug Administration) a lancé une recherche dans sa base de données de notification spontanée pour les cas de surdité sous inhibiteurs de la phosphodiestérase du type 5 indiqués dans les troubles de l’érection (sildénafil, vardénafil et tadalafil) ou dans l’hypertension artérielle pulmonaire (sildénafil).

29 cas de surdité brutale depuis la commercialisation de ces médicaments avaient été rapportés. Les effets étaient survenus dans un délai inférieur ou égal à 3 jours après la dernière prise. Dans certains cas, la surdité était associée à des acouphènes ou des sensations vertigineuses. Cet effet indésirable avait aussi été rapporté au cours des essais cliniques de ces produits chez un nombre limité des patients.

Après ces observations, la FDA a demandé la modification du RCP de ces produits pour faire apparaître le risque potentiel de surdité brutale (http://www.fda.gov/cder/drug/InfoSheets/HCP/ED_HCP.htm).

Inhibiteurs de l’acétylcholinesterase : allongement du QT, syncope et delirium

H. Bagheri

Les inhibiteurs de l’acétylcholinesterase (donepezil,

galantamine et rivastigmine), sont indiqués dans la maladie d’Alzheimer. Compte tenu de leurs propriétés cholinomimétiques, certains effets indésirables (notamment gastro-intestinaux : diarrhées, nausées, vomissements…) s’avèrent fréquents.

Plus rarement, surviennent des effets cardiaques de type bradycardie, bloc auriculo-ventriculaire ou syncope.

L’analyse des notifications spontanées à la pharmacovigilance australienne (ADRAC) a permis de recenser plusieurs cas de délire ou confusion (56 pour le donepezil, 21 pour la rivastigmine et 18 pour la galantamine), d’effets cardiovasculaires incluant arythmie, syncope ou bradycardie (61 pour le donepezil, 31 pour la galantamine et 18 pour la rivastigmine). L’évolution a été fatale dans 19 cas dont 9 cas de mort subite (Ann Pharmacother, 2008,42, 278).

L’instauration de ces médicaments peut donc favoriser la survenue d’effets cardiaques graves et une évaluation de leur rapport bénéfice/risque s’avère nécessaire avant leur prescription, en particulier chez les patients à risque.

Rappelons la décision de juin 2007 de la Commission de Transparence : baisse du niveau d’ASMR de ces 3 médicaments avec ASMR « mineure » (niveau IV) dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer (formes légères à modérément sévères).

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 38

Médicaments et déficit en G6PD

V.Duhalde

Le déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD) (encore appelé favisme) est une affection récessive liée au chromosome X qui touche environ 420 millions de personnes dans le monde, en grande majorité les hommes, avec une fréquence plus élevée dans les pays du pourtour méditerranéen, d’Afrique tropicale, du Moyent-Orient et d’Asie tropicale et sub-tropicale. La G6PD est une enzyme cytoplasmique présente dans toutes les cellules, essentiellement dans les globules rouges, qui catalyse la première réaction de la voie des pentoses-phosphates générant du NADPH, indispensable aux réactions réductrices de biosynthèse. En l’absence de NADPH, toute agression oxydative entraîne une altération de la membrane et de l’hémoglobine conduisant à l’hémolyse. Suite à l’hémolyse, les globules rouges sont dégradés dans le foie où l’hémoglobine est transformée en bilirubine, pouvant former des calculs biliaires à l’origine d’un ictère. Dans certains cas, l’hémoglobine peut aussi être éliminée dans les urines et provoquer une hémoglobinurie. Si l’hémolyse est importante elle entraîne une anémie (aiguë ou chronique).

Les principales causes d’hémolyse aiguë sont les infections virales ou bactériennes, l’acidocétose chez les diabétiques ainsi que de nombreux médicaments. Il s’agit surtout des sulfamides (sulfaméthoxazole, sulfasalazine…), des antipaludéens (chloroquine), de la nitrofurantoïne et de l’acide nalidixique. Globalement, le risque et la sévérité de l’hémolyse sont dose-dépendants. Le traitement est surtout préventif en excluant quelques aliments (fèves, boissons contenant de la quinine, produits riches en vitamine C) et les médicaments pouvant être responsables d’hémolyse. En cas de forme sévère une transfusion sanguine voire une exsanguino-transfusion peuvent être nécessaires.

L’AFSSAPS a rédigé un livret d’aide à l’utilisation ou à la prescription de certains médicaments ayant un risque potentiel ou avéré de provoquer une anémie hémolytique chez les sujets déficitaires en G6PD. (http://afssaps.sante.fr/)

Interactions médicamenteuses : attention au nombre de médicaments prescrits !

N. Tavassoli

Les interactions médicamenteuses (IM) sont à l’origine

d’effets indésirables parfois graves. Pourtant, la plupart des IM sont prédictibles et évitables. Dans une étude suédoise publiée dans Drug Safety (2007, 30, 911), les auteurs ont analysé la relation entre le nombre de médicaments prescrits aux patients de plus de 75 ans et la probabilité de survenue d’IM selon le nouveau registre suédois de prescription médicamenteuse (Swedish Prescribed Drug Register) pour plus de 600 000 prescriptions. La prévalence des IM était de l’ordre de 26% pour les associations déconseillées et de 5% pour les associations contre-indiquées. Les IM les plus rencontrées étaient furosémide + IEC (risque d'hypotension artérielle brutale et/ou d'insuffisance rénale aiguë), aspirine + AINS (ou warfarine), diurétiques épargneurs potassiques + potassium (risque d'hyperkaliémie). Les auteurs trouvent une association positivement significative entre le nombre de médicaments

prescrits et la probabilité de survenue des IM, surtout celles avec des conséquences graves.

Pensez à déclarer vos effets indésirables au CRPV : vous contribuez ainsi à une meilleure connaissance des médicaments (anciens comme nouveaux). Vos déclarations sont pour nous le

seul moyen de vous informer en retour !

Médicaments & Grossesse

Alcool et grossesse : Encore plus d’informations !

I. Lacroix

L’alcool est un des plus grands agents tératogènes connus. Il est responsable notamment du syndrome d’alcoolisation fœtale associant malformations du visage, retard mental et retard de croissance. Il touche chaque année entre 700 et 3000 enfants en France. Pour une consommation de l’ordre de 2 à 4 boissons alcoolisées par jour (30 à 60 ml d’alcool absolu), des anomalies mineures, un retard de croissance, des déficits intellectuels et des troubles comportementaux sont observés. Aucune étude n’a permis de déterminer s’il existe une augmentation de ces risques pour des consommations quotidiennes inférieures d’où la recommandation « zéro alcool pendant la grossesse ».

Nous avons réalisé une enquête, auprès de 200 femmes enceintes, sur leur consommation d’alcool pendant la grossesse et leur perception du risque lié à cette consommation. Même si la majorité des femmes enceintes sont sensibilisées au risque de l’alcool pendant la grossesse, leurs connaissances restent imprécises. Seules 58% des femmes interrogées savent que c’est l’option zéro alcool qui prévaut. 5% des patientes interrogées pensent que l’on peut boire de l’alcool tous les jours sans risque. Seulement la moitié des femmes savent que l’alcool est dangereux pendant toute la durée de la grossesse. Plus de la moitié des femmes enceintes ont consommé de l’alcool même si le plus souvent cette consommation était occasionnelle. Il s’agit plutôt d’une alcoolisation sociale concernant les femmes de niveau socioprofessionnel plutôt « élevé ». La prévention doit donc toucher toutes les catégories socioprofessionnelles. La prévention doit concerner également les femmes en âge de procréer. En effet, 6% des femmes interrogées ont été exposées à l’alcool alors qu’elles ignoraient leur grossesse. Peu de femmes disent avoir été sensibilisées par un professionnel de santé (27% par leur généraliste, 1% par leur pharmacien).

L’alcool chez la femme enceinte est responsable d’effets

graves évitables. Les professionnels de santé doivent informer toutes leurs patientes enceintes sur ces risques et proposer une aide au sevrage pour les femmes dépendantes.

AINS et Grossesse : le risque existe aussi en application

cutanée !

C Damase-Michel

Plusieurs cas d’atteintes cardio-pulmonaires et rénales

fœtales et néonatales ont été décrits lors d’utilisation maternelle d’AINS appliqués par voie cutanée (http://afssaps.sante.fr/htm/1/pharmaco/cr-pv-080101.pdf). Les observations imputent l’acide niflumique (Niflugel°, Nifluril pommade°) et le diclofenac (Voltarene gel°). Un dossier

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BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 39

concerne une exposition professionnelle chez une femme enceinte exerçant la profession de masseur-kinésitherapeute et pratiquant des massages à mains nues avec un gel contenant de l’acide niflumique. Les données pharmacocinétiques montrent une absorption cutanée pouvant atteindre 20% de la dose d’AINS administrée après une application unique. La résorption est d’autant plus importante que la zone traitée est large, bien vascularisée, lésée, sous occlusion.

Une étude de prescription des AINS réalisée en Haute-Garonne montre qu’en 2005 1,8% des femmes enceintes se sont vues prescrire et délivrer des AINS par voie cutanée au 3ème trimestre de grossesse, ce qui correspond à plus de 200 femmes par an recevant une prescription à risque (Presse Med 2008, 37,

727). Compte tenu de l’efficacité « toute relative » des AINS par

voie cutanée, gardons nous de ces prescriptions et délivrances potentiellement dangereuses et informons sur le risque d’exposition professionnelle !

NDLR : il y a longtemps que les AINS en application cutanée

ne sont plus admis (et donc plus utilisés au CHU de

Toulouse) pour ces raisons !

Grossesse : ni « pril » ni « sartans »!

C. Damase-Michel

Une observation récente de Pharmacovigilance concernant

l’exposition à un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) en fin de grossesse nous conduit à rappeler la contre-indication absolue de ces médicaments à partir du second trimestre de grossesse (cf BIP 2003, 9, 6).

Tous comme les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), les ARA II (identifiables par leur suffixe « sartan ») peuvent entraîner des atteintes rénales fœtales conduisant à un oligoamnios (voire anamnios) parfois mortel. Cet effet s’explique par une réduction du flux sanguin foetoplacentaire et une hypotension fœtale, conduisant à une hypoperfusion rénale fœtale. La plupart des expositions rapportées en France ou publiées dans la littérature internationale concernent des expositions longues (depuis le début de la grossesse). Des atteintes histologiques rénales s’expliquant par le rôle du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) dans la néphrogénèse et des retards d’ossification des os du crâne, qui seraient dues à l’action des sartans sur les ostéoblastes, ont été rapportées dans plusieurs cas.

A titre indicatif, en Haute-Garonne en 2005, la prescription des médicaments du SRAA (IEC et ARA II) a concerné 15 patientes sur 10 000 femmes enceintes. Tous les médicaments ARA II sont représentés. Les prescriptions au second et 3ème trimestre de grossesse concernent l’irbesartan (n=2), le losartan (n=1), l’olmesartan (n=1) et le valsartan (n=3). Ces prescriptions ont été délivrées.

Evitons donc la prescription de médicaments du SRAA chez les jeunes femmes désirant une grossesse et efforçons nous de vérifier grâce aux suffixes évocateurs de la Dénomination Commune Internationale (« sartan », « pril ») que l’antihypertenseur habituellement utilisé ne renferme pas ces produits dangereux pour le fœtus.

IMPORTANT : Ce bulletin sera désormais diffusé gratuitement par courriel. Merci de signaler dès maintenant vos adresses électroniques à

[email protected] en indiquant votre spécialité. Cependant, vous pouvez continuer à recevoir le BIP par voie postale,

en nous adressant un chèque de 5,00 € (frais d'édition et d'affranchissement, abonnement annuel) à l'ordre de l'Institut

d'Hydrologie, Faculté de Médecine, Professeur JL Montastruc, 37 Allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse.

Brèves de l'AFSSAPS

Moxifloxacine Izilox® Une réévaluation de cette fluoroquinolone a permis le renforcement de l’information sur 2 types d’effets indésirables : des atteintes hépatiques de type cholestatique ou mixte avec un délai de survenue parfois tardif (5-30 jours après arrêt du médicament), parfois grave (hépatite fulminante) avec évolution fatale (8 cas) et des cas de syndrome de Steven-Johnson (35) ou de Lyell parfois mortels (3 cas). Rappelons qu’une autre fluoroquinolone, la trovafloxacine a été retiré du marché pour son risque hépatique. Génériques des antiépileptiques. Une enquête de pharmacovigilance sur les génériques des antiépileptiques a permis de recenser un certain nombre de cas issus de la notification spontanée suggérant que la substitution pourrait entraîner un déséquilibre chez les patients préalablement équilibrés. Néanmoins, le manque d’informativité des notifications ne permet pas leur validation objective. Compte tenu de la multiplicité des facteurs pouvant favoriser la recrudescence des crises, la Commission Nationale de PV a proposé de rappeler aux prescripteurs que leur droit d’exclusion de la substitution des antiépileptiques pouvait être justifié chez certains patients. Spécialités à base de piroxicam : la réévaluation du rapport bénéfice/risque du piroxicam, AINS de la classe des oxicams a conduit à la restriction de son indication au traitement symptomatique de l’arthrite, la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante. En effet, le risque d’effets indésirables gastro-intestinaux ou cutanés parfois graves, ne justifie pas son utilisation dans des affections post-traumatiques, les radiculalgies … Bosentan Tracleer® Cet antagoniste des récepteurs à l’endotheline est indiqué depuis 2002 dans l’hypertension artérielle pulmonaire. Son AMM a été étendue à la « réduction des nouveaux ulcères digitaux chez les patients souffrant de sclérodermie ». Compte tenu du risque d’effets indésirables essentiellement hépatiques et l’absence de données cliniques dans les ulcères digitaux d’autres origine (Raynaud,…), la nécessité du respect strict de l’indication a été rappelé. ASMR de nouveaux médicaments

A. Pathak

L’A.S.M.R. apprécie l'Amélioration du Service Médical Rendu par un

médicament en le comparant aux autres médicaments de même classe.

La Commission de Transparence de la Haute Autorité de Santé (HAS)

évalue l'A.S.M.R. en 5 niveaux en termes d'amélioration de l’efficacité

et/ou du profil d’effets indésirables et/ou de commodité d'emploi. On

peut consulter l'A.S.M.R. des médicaments sur le site de l’HAS

Page 26: LES VRAIS NOUVEAUX MEDICAMENTS - fmc31200.free.fr

BIP31.fr 2008, 15 (1), Page 40

(www.has-sante.fr). Voici une sélection des A.S.M.R. récemment

délivrées par l’HAS pour les médicaments récemment commercialisés.

ASMR de niveau IV (Amélioration « mineure »)

TRACLEER, comprimés de bosentan, antagoniste des récepteurs de l’endothéline, indiqué dans la réduction du nombre de nouveaux ulcères digitaux chez les patients atteints de sclérodermie systémique et d’ulcères digitaux évolutifs. •••• ASMR de niveau V (« Pas d’amélioration ») INVEGA, comprimés de palperidone, métabolite actif principal du neuroleptique rispéridone, indiqué dans la prise en charge thérapeutique de la schizophrénie. METHADONE, gélule, n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu par rapport à la forme sirop dans le traitement de substitution des pharmacodépendances majeures aux opiacés. Note : nous faisons le choix de présenter une sélection de spécialité dont

l’usage est le plus large possible. Ainsi, les spécialités réservées à

l’usage en collectivités sont rarement retenues dans ce paragraphe.

A QUOI SERT LE CENTRE REGIONAL DE

PHARMACOVIGILANCE ? QUE PEUT-IL VOUS APPORTER ?

Le Centre de Pharmacovigilance a pour mission de répondre à vos

questions sur le médicament (prescription, effets indésirables, efficacité démontrée, interactions médicamenteuses, utilisation chez le

sujet à risque, pendant la grossesse, allaitement…). Le Centre de Pharmacovigilance reçoit et analyse les notifications

d’effets indésirables. La loi rend obligatoire la déclaration de tout effet indésirable “grave” (entraînant un décès, une hospitalisation, une mise en jeu du pronostic

vital ou des séquelles) même connu des médicaments (ou des médicaments dérivés du sang) ainsi que tout effet indésirable

"inattendu" (c'est-à-dire non mentionné dans le Vidal) par tout professionnel de santé (médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien,

sage-femme,...). La déclaration doit se faire au Centre Régional de Pharmacovigilance (Coordonnées en première page).

Page 27: LES VRAIS NOUVEAUX MEDICAMENTS - fmc31200.free.fr

BIP31.fr 2008, 15 (2), page 9

Bulletin d’Informations du Service de Pharmacologie Clinique et du Centre de Pharmacovigilance du CHU de Toulouse

Faculté de Médecine, 37 allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse, France

� Centre Midi-Pyrénées de Pharmacovigilance, de Pharmacoépidémiologie et d’Informations sur le Médicament (CRPV)

Tel : 05 61 25 51 12 (permanence téléphonique) ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Centre Midi-Pyrénées d’Evaluation et d’Informations sur la Pharmacodépendance (CEIP)

Tél : 05 62 26 06 90 ; Fax : 05 61 25 51 16 ; Mel : [email protected] � Site Internet : www.bip31.fr

10es Rencontres de Pharmacologie Sociale

Pour fêter nos 10 ans, nous accueillerons le Professeur Alain Ehrenberg, Directeur du CESAMES, Université René Descartes Paris,

qui nous parlera de "La Valeur Sociale du Cerveau". Rendez-vous le mercredi 19 novembre 2008 à 19 heures au Grand Amphithéatre de la Faculté de Médecine des Allées Jules-Guesde.

Congrès P2T 2008

Le troisième Congrès commun de la Société de Physiologie

et de la Société Française de Pharmacologie et de

Thérapeutique (SFPT) a été organisé par les équipes de

Clermont-Ferrand, du 9 au 11 avril 2008. Nous en avons

extrait quelques présentations utiles pour la pratique.

La notice d’information des essais cliniques : un outil de désinformation ?

J.M. Senard

L’information des patients sur le médicament débute dès la phase des essais cliniques. En effet, avant l’inclusion dans un essai, chaque volontaire sain ou malade doit recevoir une information honnête sur le produit à l’étude, le but et les contraintes de la recherche, les risques éventuels et les alternatives possibles en cas de non participation à la recherche. Lors du congrès P2T, un symposium était consacré au formulaire d’information destiné au aux personnes participant à une recherche biomédicale. On a présenté à cette occasion les travaux ayant mesuré plusieurs paramètres reflétant la qualité des notices et en particulier leur intelligibilité et leur densité. Les résultats ont été comparés à une analyse similaire des autres textes scientifiques de niveau de complexité différents : Science et Vie d’une part, et Science et Vie Junior, d’autre part. Les textes de la première revue sont denses et pas toujours simples à comprendre. Ceux de la version Junior sont peu denses et facilement intelligibles. Qu’en est-il des notices d’information destinées aux patients ? Et bien, cette analyse montre qu’elles ne sont ni denses, ni intelligibles !

Au-delà de la réflexion qui s’impose pour améliorer ces documents, il serait intéressant d’étudier les liens éventuels existant entre les propriétés de la molécule mises en avant

dans la notice et l’efficacité et/ou les évènements indésirables observés dans l’essai.

Pharmacologie des anti-thrombotiques : études de phase II

E. Bondon-Guitton

La posologie des anti-thrombotiques reste difficile à

ajuster : une faible posologie présente un risque d’inefficacité et de mortalité élevée alors qu’une forte posologie s’associe à un risque hémorragique important. Par ailleurs, on peut observer, à posologie égale, des variations intra ou interindividuelles de la concentration plasmatique en anti-thrombotique selon l’âge, le genre, le poids, l’état de la fonction rénale... Les études de phase II n’étudient plus simplement la relation dose-effet mais aussi les relations dose-concentration plasmatique d’une part et concentration plasmatique-effet d’autre part. On administre à des patients présentant la même caractéristique (patients âgés de plus de 70 ans par exemple) différentes posologies d’anti-thrombotiques. L’intersection des courbes représentant le risque thrombotique (courbe 1) et hémorragique (courbe 2) en fonction des concentrations plasmatiques correspond à la concentration plasmatique optimale pour ce groupe de patients. La posologie optimale est déterminée à l’aide des courbes représentant la dose (posologie) en fonction de la concentration plasmatique. Ainsi, on adapte la posologie à chaque type de patient en améliorant le rapport bénéfice/risque. D’après la Conférence de P. Mismetti.

BIP31.fr 2008, 15, (2), 9-16

BIP31.fr fait partie de l'ISDB (International Society of Drug

Bulletins), réseau International de revues indépendantes de

formation et d'informations sur le médicament.

Page 28: LES VRAIS NOUVEAUX MEDICAMENTS - fmc31200.free.fr

BIP31.fr 2008, 15 (2), page 10

Cellulite d’origine dentaire : rôle aggravant des anti-inflammatoires ?

P. Olivier

La littérature est peu abondante sur le rôle aggravant d’une infection dentaire par les anti-inflammatoires (AI stéroïdiens ou non) alors que ceci est généralement accepté par les cliniciens. Afin de vérifier cette hypothèse, Hochart et al. (Fundam Clinical Pharmacol 2008, 22, suppl 1, 21) ont réalisé une étude prospective sur 273 cas de cellulite d’origine dentaire diagnostiqués dans un service de stomatologie. Les données recueillies concernaient à la fois les aspects cliniques et pharmacologiques (prises médicamenteuses). Pour les 267 patients retenus, on a comparé ceux ayant été exposé aux AI (n=141 ; 53%) à ceux non exposés (n=126 ; 47%).

L’analyse des données n’est pas en faveur d’un rôle aggravant des cellulites d’origine dentaire par les AI : en effet, les caractéristiques telles que âge, genre, état dentaire, antécédent tabagique et durée d’hospitalisation du patient, symptômes, prise en charge, durée, localisation et diffusion de la cellulite, sont comparables dans le groupe avec ou sans AI. Parmi les médicaments associés, les antibiotiques avant l’admission étaient plus utilisés dans la population avec AI. Il semble que les patients ayant une infection initiale plus grave avaient consulté plus spontanément avant leur admission à l’hôpital, et avaient reçu plus fréquemment une association antibiotique-AI. Cette étude confirme également l’importance de l’automédication (39% des patients) dans la prise en charge des douleurs dentaires. Contrairement aux idées reçues, cette étude n’est pas en faveur d’un rôle aggravant des AI dans les cellulites d’origine dentaire, même si les résultats méritent d’être confirmés.

Médicaments et cardiomyopathie dilatée

J.L. Montastruc

Le CRPV de Poitiers a recherché dans la Base Nationale de

PharmacoVigilance les médicaments à l’origine de cardiomyopathie dilatée. A coté des anthracyclines (dont le rôle est bien connu), ce travail (utilisant la méthode cas/non-cas) a retrouvé une association avec certains antimitotiques (cyclophosphamide, gemcitabine, fluorouracile), neuroleptiques (clozapine, olanzapine), antidépresseurs (clomipramine, amitriptyline, fluvoxamine), antirétroviraux (lamivudine, zidovudine, abacavir), mais aussi corticoides (prednisone) ou antiacnéiques (isotrétinoine) (Fundam Clin

Pharmacol 2008, 22, suppl 1, 52). Ayons à l’esprit la possibilité de cet effet indésirable, rare mais grave, et sachons l’évoquer en cas de symptômes cardiaques imprévus avec ces médicaments largement utilisés.

Absence de bénéfice de l’hydroxychloroquine dans la

maladie de Horton

L. Sailler

L’hydroxychloroquine (HCQ) (Plaquénil°) s’utilise

parfois, à visée d’épargne cortisonique, dans la maladie de Horton. Cette pratique repose notamment sur des travaux

rétrospectifs. Une étude multicentrique nationale prospective, avec tirage au sort, en double insu versus placebo, incluant 64 patients atteints de Horton non compliqué, avec biopsie d’artère temporale positive, a évalué l’effet de l’HCQ (400 mg) prescrite dès le diagnostic, en association avec une corticothérapie à posologie usuelle. 60 patients ont été suivis au moins 1 an, 43 durant 96 semaines. 14 des 32 patients sous HCQ recevaient moins de 5 mg/j de prednisone depuis plus de 3 mois à la fin du suivi, contre 21 des 32 patients du groupe placebo (différence non significative). 20 patients sous HCQ et 14 sous placebo ont présenté au moins une rechute, et 9 sous HCQ et 3 sous placebo des rechutes multiples (p=0.06). Au-delà des 6 premiers mois (durée supposée nécessaire à l’obtention de l’effet maximal de l’HCQ), le risque de rechute a été plus important sous HCQ (p=0.02). A 96 semaines, les doses cumulées de corticoïdes étaient de 7146 mg (extrêmes: 4643-9493) sous HCQ et de 6687 mg (4563-10444) sous placebo (différence non significative). 8 patients ont dû arrêter l’HCQ en raison d’effets indésirables cutanés (n=6), digestifs (n=1) ou oculaires (n=1) (Fundam Clin Pharmacol

2008, 22, suppl 1, 14). Ces données ne permettent pas de conseiller l’HCG dans la maladie de Horton. Ce travail illustre, une fois encore, l’intérêt des études prospectives, par rapport aux séries de cas rétrospectifs.

Implication du système cannabinoïde endogène dans

l'action analgésique du paracétamol

A. Roussin

Aujourd'hui encore, les mécanismes de l'action analgésique du paracétamol (acétaminophen pour les anglo-saxons) ne sont pas clairement établis. La neuromodulation de la transmission synaptique exercée par le système cannabinoïde endogène a conduit à rechercher si ce système était impliqué dans la cascade d'évènements conduisant à l'action analgésique du paracétamol. Le paracétamol est désacétylé par le foie en p-aminophénol, lui-même transformé dans le système nerveux central en N-arachydonoylphenolamine par la FAAH, enzyme dégradant l'anandamide, le principal ligand endogène du système endocannabinoïde (J Biol Chem, 2005, 280, 31405). Par des approches pharmacologiques et génétiques chez la souris, les Pharmacologues de Clermont Ferrand ont montré que l'inhibition de la production endogène de ce métabolite neuronal du p-aminophénol, de même que le blocage ou la délétion des récepteurs cannabinoïdes CB1, conduisent à une inhibition de l'effet antinociceptif du paracétamol. De plus, leurs travaux suggèrent que ce métabolite neuronal renforcerait l'activité des voies sérotoninergiques bulbospinales inhibitrices de la transmission du message nociceptif (Fundam Clin Pharmacol 2008, 22, suppl 1, 57). Ainsi, le paracétamol agirait (tout du moins en partie) en tant que promédicament et l'activation du système cannabinoïde central serait impliquée dans son action analgésique.

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BIP31.fr 2008, 15 (2), page 11

Divers

J.L. Montastruc

Anti-TNF et Lymphomes : Le CRPV de Bordeaux a étudié le délai entre l’introduction d’un anti-TNF et l'observation d’un lymphome. A partir des données de la littérature, des Sociétés Savantes et la Base Nationale de PharmacoVigilance (BNPV), les auteurs ont identifié 70 observations de lymphome survenant après un délai moyen de 78 semaines: ce délai a été interprété comme un argument en faveur d’un rôle déclenchant des anti-TNF dans la survenue de cet EI grave (Fundam Clin Pharmacol

2008, 22, suppl 1, 75).

Tramadol et Syndrome Sérotoninergique : Le CRPV de Toulouse a recherché dans la BNPV les observations de syndrome sérotoninergique sous cet agoniste opiacé agissant aussi comme inhibiteur de la recapture des monoamines cérébrales. Dans la quasi-totalité des cas, le tableau est apparu en association avec des antidépresseurs (dont on sait qu’ils majorent les concentrations centrales de sérotonine) : antidépresseurs sérotoninergiques (paroxétine, fluoxétine, sertraline, venlafaxine) mais aussi imipraminiques (clomipramine) ou autres (mirtazapine). Des associations à surveiller ! (Fundam Clin Pharmacol 2008, 22, suppl 1, 80).

Hypersensibilité immédiate mortelle médicamenteuse : A partir des observations de la BNPV de 1995 à 2007, l’association des CRPV a voulu préciser les médicaments à l’origine de décès par hypersensibilité immédiate : 116 cas bien documentés ont été retenus. L’âge moyen des patients (autant d’hommes que de femmes) était de 52 ans. Les médicaments les plus fréquemment imputés ont été les antibiotiques (29%, notamment l’association amoxicilline + acide clavulanique), les curarisants (28%, surtout le suxamethonium) et les produits de contraste radiologiques (16%). Dans 14% des cas, le patient recevait aussi un béta-bloquant (dont on sait qu’il masque les signes cliniques). Un effet indésirable rare dont la gravité se majore sous béta-bloquant ! (Fundam Clin Pharmacol 2008, 22, suppl 1, 71).

Pharmacoépidémiologie

Diphosphonates et fibrillation auriculaire : oui ou non ?

J.L. Montastruc

En 2007, un essai clinique a trouvé un surcroît de

fibrillations auriculaires (FA) sous acide zolendronique (Aclasta°). Cet effet indésirable, non expliqué par la pharmacodynamie de ce médicament et apparu 1 mois après la perfusion, s’est avéré 3 fois plus fréquent que sous placebo. On a évoqué un effet dose (avec plus d’observations chez des patients déjà traité par cette classe pharmacologique) (N Engl J Med 2007, 356, 1809). Un excès de FA avait été aussi rapporté en 1997 avec l’acide alendronique oral (Fosamax°) sans atteindre cependant la significativité statistique (Rev Prescrire 2008, 28, 23). Une récente étude cas témoin danoise, avec plus de 13 000 patients et 68 000 témoins, n’a pas retrouvé cette association [RR=0,95 (0,84-1,07)] entre FA (ou flutter) et prise de diphosphonate (BMJ 2008, 336, 813). En attendant d’en

savoir plus, on pourrait proposer la surveillance électrocardiographique des patients à risque de FA ou de flutter sous diphosphonates, et rappeler l’intérêt de la notification de telles observations aux CRPVs !

Pharmacologie Clinique

Quand les critères intermédiaires tuent…

J.L. Montastruc et A. Pathak

Les recommandations actuelles du contrôle du diabète

demandent de viser une HbA1c < 6,5% pour la plupart des patients, sans que l’on ait cependant clairement établi le bénéfice de cette attitude en terme de mortalité ! L’essai « ACCORD », étudiant 2 stratégies de contrôle de la glycémie du diabétique, en terme de prévention des accidents cardiovasculaires, a essayé de répondre à cette question en comparant, chez plus de 10 000 patients, le devenir d’un groupe « traitement intensif » (recherchant une HbA1c < 6%) et un groupe « traitement usuel » (avec une HbA1c entre 7,0 et 7,9%). L’essai a été interrompu prématurément en raison d’un surcroît de décès dans le groupe « intensif » : 1,4% versus 1,1% dans le groupe « usuel ». Ce résultat permet de rappeler 3 vérités pharmacologiques de base :

- les objectifs thérapeutiques ne peuvent concerner un critère intermédiaire (ici biologique l’HbA1c), mais uniquement et seulement des critères cliniquement pertinents : ici, la mortalité. A quoi sert d’avoir une glycémie basse, si le patient diabétique doit mourir plus tôt ?

- méfions nous des propositions continuelles d’abaissement des valeurs biologiques seuils permettant de décider du moment d’introduction des médicaments : ces chiffres sont souvent « définis » par les firmes ou les leaders d’opinion dans le souci de vendre et de soigner « toujours plus ». Tout ceci ne fait que renforcer ce que nous appelons la « médicamentation » de la société (pour une définition voir www.prescrire.org/editoriaux/medicamentation.pdf).

- Enfin, le lecteur avisé sait qu’un résultat isolé d’une étude doit absolument être confirmée par d’autres données cliniques. Restons donc prudents dans un sens comme dans l’autre.

N’empêche ! Nous devons nous montrer plus que jamais réservés et critiques vis-à-vis des critères intermédiaires et des pressions de prescription de tous poils !

Encore un essai négatif : le double blocage ramipril – telmisartan inutile chez les patients à haut risque

cardiovasculaire (essai ONTARGET)

A. Pathak.

Rajouter un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 à un IEC permet-il de réduire davantage la morbimortalité des patients à haut risque cardiovasculaire ? L’essai ONTARGET (NEJM 2008, 358, 1547) répond en comparant le telmisartan (80mg) au ramipril (10mg) seul ou en association au « sartan ». Plus de 8000 patients par

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BIP31.fr 2008, 15 (2), page 12

bras ont été inclus. Il s’agit de prévention primaire (cumulant les facteurs de risque cardiovasculaire) ou secondaire. Le suivi à 56 mois ne montre aucune supériorité de la combinaison par rapport à la monothérapie sur le critère combiné composite comprenant décès cardiovasculaire, AVC, IDM ou hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Au contraire, dans le bras association, on note davantage de syncopes (0.3% vs. 0.2%, P = 0.03), de symptômes d’hypotension artérielle (4.8% vs. 1.7%, P<0.001) et de dysfonction rénale (13.5% vs. 10.2%, P<0.001). La monothérapie telmisartan fait jeu égal avec le ramipril sur le critère combiné composite de morbimortalité cardiovasculaire. En pratique: IEC d’abord, et si nos patients toussent, attendons les résultats de l’essai TRANSCEND comparant telmisartan au placebo chez les patients d’ONTARGET intolérants aux IEC. Encore quelques mois de patience……

Retrouvez ces informations (et bien d'autres) sur notre site internet www.bip31.fr, site gratuit d'informations indépendantes

et validées sur le Médicament rédigé par le Service de Pharmacologie de la Faculté de Médecine de Toulouse

Pharmacologie Sociale

Mai 68 : 40 ans de Pharmacologie Sociale !

J.L. Montastruc

Actuellement, les medias évoquent largement les

« évènements » de Mai 68 en débattant sans relâche sur les conséquences fastes ou fâcheuses de cette période « révolutionnaire ». S’il s’avère bien sûr hors de notre propos de discuter de ces aspects politiques ou économiques, il nous paraît cependant important de rappeler que, parmi les revendications initiales des étudiants de Nanterre, figurait une demande importante en terme de Pharmacologie Sociale : celle de pouvoir disposer (plus) librement de la pilule contraceptive [à une époque où, certes, ces médicaments étaient commercialisés (depuis peu), mais difficilement accessibles pour les jeunes, en raison des contraintes sociales diverses (autorité des parents, qu’en dira t’on, éducation rigoureuse…)].

Cet exemple illustre clairement la place du médicament comme témoin, filtre du changement social et comme objet de demande, de revendication, d’exigence de liberté : ici, de comportement sexuel choisi et de liberté de concevoir. Un nouveau bel exemple montrant toute la dimension sociale du médicament dans le monde d’aujourd’hui…

«L’affaire» de l’héparine: un autre exemple de mondialisation.

A. Pathak, JL. Montastruc

La survenue depuis novembre 2007 de cas

d’hypersensibilité aigue (hypotension artérielle, urticaire, tachycardie) chez des patients dialysés alerte la FDA qui impute l’héparine sodique (NEJM 2008, 358, 1). D’autres cas sont rapportés dans plus de 12 pays et 62 décès sont imputés à ce tableau d’hypersensibilité. Le retrait de l’héparine

ramène le taux d’évènements associés à l’exposition d’héparine, à sa valeur habituelle (bel exemple de pharmaco épidémiologie interventionnelle !). L’analyse des lots d’héparine révèle une contamination par une forme de chondroïtine sulfate. Cet agent active les cascades kinine-kallikréine avec production de bradykinine (un peptide vasodilatateur d’où l’hypotension) et celle du complément avec la formation des fractions C3a et C5a, tout deux puissant agents anaphyllactoïdes.

Tous les ingrédients sont réunis pour faire de cette affaire un cas d’école de Pharmacologie Sociale : Un médicament essentiel entraîne un effet indésirable grave, à l’échelle de la planète. Ce problème illustre la responsabilité des industriels qui en délocalisant les sites de production à l’étranger augmentent leurs gains mais à quel prix ? Cette situation souligne aussi les difficultés des agences sanitaires dans leurs activités de contrôle sur site. Ainsi, moins de 7% des usines délocalisées sont contrôlées par la FDA. Un point positif : la gestion de cette crise avec mise en commun des savoirs, des outils technologiques (méthodes de dosage analytique) pour dépister l’héparine contaminée et mettre en place une stratégie mondiale pour éviter la propagation d’un effet indésirable grave.

Pharmacodépendance

Les médicaments obtenus de façon illégale : données issues de l’enquête OPPIDUM en 2006 et évolution

depuis 1997

A. Roussin

L’enquête pharmacoépidémiologique OPPIDUM

(Observation des Produits Psychotropes Illicites ou Détournés de leur Utilisation Médicamenteuse) coordonnée par le réseau des CEIP (Centres d’Evaluation et d’Information sur la Pharmacodépendance) est un travail observationnel national permettant d’obtenir des données de consommation de substances psychoactives à partir des réponses à un questionnaire de sujets soit pharmacodépendants soit sous traitement de substitution aux opiacés. Le CEIP de Marseille a étudié l’évolution entre 1997 et 2006 des médicaments obtenus illégalement. En 2006, 66% des substances psychoactives consommées par les 3743 sujets inclus étaient des médicaments : parmi ceux-ci, 11% ont été obtenus de façon illégale (achat dans la rue, prescriptions médicales falsifiées ou volées,…) contre 14% en 1997. L’acquisition illégale de buprénorphine a augmenté de 28% à 33% en 10 ans, la plaçant en tête de ce classement 2006. L’obtention illégale de la méthadone a fortement augmenté d’un peu moins de 2% à 14%. Dans ce groupe de médicaments obtenus de façon illégale, on note également l’apparition du clonazépam. A l’inverse, depuis 10 ans, le recul de la première à la dernière place de ce classement du flunitrazépam et la disparition du chlorazépate semblent souligner l’intérêt des mesures réglementaires de prescription et de délivrance.

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BIP31.fr 2008, 15 (2), page 13

Pharmacovigilance

Echecs des antihypertenseurs : penser à une cause médicamenteuse !

J.L. Montastruc

Face à un hypertendu résistant au traitement prescrit, il

faut savoir rechercher une cause médicamenteuse. De nombreux médicaments, en majorant la pression sanguine artérielle, s’opposent aux effets des antihypertenseurs. Il peut s’agir des corticoides (et du tétracosactide Synacthène° surtout dans sa forme « retard »), des AINS (y compris les coxibs) : ces deux classes entraînent une rétention sodée (et les AINS s’opposent aux effets des prostaglandines vasodilatatrices). On doit aussi suspecter les sympathomimétiques [amphétaminiques « cachés » (comme bupropion Zyban°, methylphénidate Ritaline° ou sibutramine Sibutral°), vasoconstricteurs nasaux…], les triptans (qui sont vasoconstricteurs), la lévothyroxine (dont on sait les propriétés « permissives », facilitatrices adrénergiques), les époiétines… mais aussi certains antidépresseurs non imipraminiques (venlafaxine Effexor°, duloxétine Cymbalta°). Penser systématiquement « Et si c’était le Médicament ? » devant tout malade, s’avère souvent utile (et efficient !).

Médicaments modifiant la sudation

J.L. Montastruc

De nombreux médicaments peuvent modifier la sudation

en agissant au niveau central (hypothalamus) ou périphérique (sur les glandes sudorales ou leur innervation autonome).

En raison du rôle majeur sécrétagogue du système parasympathique (et de son médiateur l’acétylcholine), on comprend qu’une hyperhydrose puisse s’observer sous médicament cholinomimétique [comme les anticholinestérasiques (utilisés chez l’Alzheimer) ou encore les agonistes muscariniques (antiglaucomateux ou sialagogues, type pilocarpine)]. Les sudations exagérées sous antidépresseurs imipraminiques relèveraient de la majoration de l’activité adrénergique périphérique (secondaire à l’inhibition de la recapture de la noradrénaline). Sous antidépresseurs sérotoninergiques, on évoque l’augmentation de l’activité sérotoninergique centrale et sous opioides, la libération d’histamine par les mastocytes.

Une réduction de la sécrétion sudorale (hypohydrose) est donc décrite sous atropiniques (atropine, antidépresseurs imipraminiques, antiH1, antispasmodiques urinaires ou digestifs, certains neuroleptiques, certains « antivertigineux »…). Un tel effet indésirable se retrouve aussi avec certains antiépileptiques (notamment le topiramate Epitomax° par inhibition de l’anhydrase carbonique), certains antihypertenseurs (clonidine Catapressan° par effet central), mais aussi la toxine botulique ou même (de façon surprenante) les opioides… (Drug Saf 2008, 31, 109).

Un nouvel effet indésirable (EI) rare mais grave des neuroleptiques : les entérocolites nécrosantes

J.L. Montastruc

Le Centre de PharmacoVigilance de Montpellier a

étudié le risque d’entérocolites nécrosantes sous neuroleptiques. Cet EI, rare mais d’évolution souvent fatale, doit être évoqué devant la survenue de douleurs abdominales avec vomissements et/ou diarrhées chez des patients recevant ces médicaments. Tous les neuroleptiques ont été imputés et le mécanisme implique, au moins en partie leur propriété atropinique (antimuscarinique) latérale. Ainsi, une attention toute particulière doit être apportée aux patients sous neuroleptiques recevant, en plus, des médicaments connus pour provoquer une constipation, et notamment ceux possédant des effets atropiniques : antidépresseurs imipraminiques, anti-H1, antispasmodiques digestifs ou urinaires, antiparkinsoniens « correcteurs » antimuscariniques… (Afssaps, Commission

Nationale de PharmacoVigilance du 28 janvier 2008).

Paracétamol : gare aux effets indésirables hépatiques

aux doses thérapeutiques

N. Tavassoli

Malgré une utilisation reconnue comme inoffensive à

dose recommandée, la marge thérapeutique du paracétamol reste étroite. Son potentiel hépatotoxique est très variable d’un individu à l’autre et dépend fortement de la présence ou non de facteurs de risque pouvant mener aux effets indésirables hépatiques sévères même à dose thérapeutique. Il faudrait toujours rechercher ces facteurs de risque avant toute administration à dose élevée et/ou prolongée, ainsi que devant une élévation inexpliquée des transaminases. Les facteurs de risque pouvant entrainer la survenue d’hépatotoxicité à dose thérapeutique sont : jeûne prolongé ou dénutrition associée à une déplétion majeure des réserves en glutathion (nécessaire à la détoxification et l’élimination du métabolite toxique du paracétamol) ; consommation excessive et chronique d’alcool (>140 g/semaine chez la femme et >210 g/semaine chez l’homme) induisant l’isoforme CYP-2E1 du cytochrome P-450 et une déplétion en glutathion hépatique aboutissant à une production plus importante du métabolite toxique de paracétamol ; consommation régulière de paracétamol induisant un déclin régulier et asymptomatique du stock de glutathion hépatique ; prise concomitante de 2 ou plusieurs préparations à base de paracétamol (à l’origine de 35% des surdosages non intentionnels) ; interactions médicamenteuses (phénobarbital, phénytoïne, tabac,…) ; hépatopathies chroniques et variabilités interindividuelles et interethniques portant sur le pool hépatique de glutathion, l’activité du CYP-2E1 et les phénotypes de glucuronidation du paracétamol rendant certains sous-groupes de la population plus vulnérables au paracétamol (Rev Med Suisse 2007, 3, 2345).

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BIP31.fr 2008, 15 (2), page 14

Les facteurs de risque hémorragique lors d’anticoagulation orale

N. Tavassoli

La complication la plus redoutée de l’anticoagulation

orale est l’hémorragie majeure. L’incidence de cette complication est de 2-3% par année chez les patients anticoagulés dans les conditions optimales d’études cliniques. Toutefois, en dehors du cadre de ces études, l’incidence peut être considérablement plus élevée. Les facteurs influençant le risque hémorragique peuvent être regroupés en 3 catégories : les facteurs liés à l’anticoagulation orale, ceux en rapport avec le patient et la comédication. Facteurs liés à l’anticoagulation orale : de nombreuses études rapportent une association entre l’intensité d’anticoagulation orale et le risque d’hémorragie majeure, en particulier, d’hémorragie intracrânienne (Chest 2004, 126,

287S). Le risque d’hémorragie intracrânienne et sa sévérité augmentent exponentiellement quand l’INR est >4. L’incidence des complications hémorragiques majeures pour un INR entre 2 et 3 est réduite de plus de la moitié par rapport à celle observée avec un INR supérieur à 3. Il est probable que le risque hémorragique soit plus élevé à l’initiation d’anticoagulation orale. Il passe de 3% le 1er mois de traitement, à 0,8%/mois les 11 mois suivants (Am J

Med 1989, 87, 144). Il existe aussi une forte association entre la qualité d’anticoagulation (le pourcentage des INR qui se trouvent dans l’intervalle thérapeutique, par ex. entre 2 et 3) et le risque hémorragique (Chest 2004, 126, 204S). Facteurs liés au patient : la majorité des études cliniques ont trouvé une association indépendante entre l’âge et le risque hémorragique (Chest 2004, 126, 287S). Une étude chez des patients ambulatoires a montré une augmentation significative des hémorragies selon l’âge, passant de 0,5%/an chez les patients <60 ans à 4,5%/an chez les >80 ans (Arch Intern Med 2005, 165, 1527). Des données controversées concernent l’influence du genre sur la survenue de complications hémorragiques majeures. Une étude récente montre un risque 4 fois plus élevé chez les femmes (J Gen Intern Med 2007, 22S, 73). Le risque hémorragique est également associé à plusieurs comorbidités (hypertension artérielle, diabète, maladie cérébrovasculaire, insuffisance rénale…). Contrairement aux croyances répandues, l’anamnèse d’ulcère peptique sans hémorragie précédente ne semble pas s’associer à un risque de saignement accru. Comédication : les antiplaquettaires (aspirine, dérivés de thiénopyridines ou AINS) doublent le risque hémorragique (BMJ 2006, 333, 726). Une multitude de médicaments peuvent aussi interférer avec la pharmacocinétique ou la pharmacodynamique des AVK entrainant une augmentation ou une diminution de l’effet anticoagulant (Thromb Haemost

2005, 94, 537).

Attention aux effets systémiques des médicaments utilisés par voie locale !

P. Olivier

Nombreux sont ceux qui pensent que le risque d’effet systémique grave lié à une administration locale (cutanée, auriculaire, oculaire…) d’un médicament n’est que pure théorie. Un récent article (Lancet 2008, 371, 596) vient contredire de façon éloquente ce postulat : une femme de 28 ans, d’origine africaine, est venue consulter pour une prise de poids de 12kg et une infertilité. L’examen clinique (hirsutisme, faciès lunaire, vergetures, pseudofolliculite…) et biologique (taux d’ACTH et de cortisol effondrés) était tout à fait compatible avec un tableau de Cushing. Après une longue discussion, la jeune femme avouait s’appliquer régulièrement une crème destinée à éclaircir sa peau, et ceci depuis 7 ans (soit 60g par semaine). Cette crème renfermait un corticoïde (clobétasol), vendu de façon illégale dans une « boutique » proposant une large gamme de crèmes de ce type.

Au-delà du problème de vente illégale des crèmes « éclaircissantes », ce cas clinique rappelle un effet connu bien que rare des corticoïdes, même utilisés par voie locale, en particulier dans de mauvaises conditions d’utilisation (longue durée d’action et forte posologie).

Substitution des antiépileptiques : qu’en penser ? que

faire ?

J.L. Montastruc

BIP31.fr (2007, 14, 18) a déjà évoqué les discussions sur la substitution des antiépileptiques, à la suite, notamment, de la position de la Ligue Française contre l’Epilepsie, déconseillant cette pratique. Le 28 janvier 2008, la Commission Nationale de PharmacoVigilance a revu l’ensemble des données. Elle a conclu que « des observations isolées issues de la notification spontanée suggèrent que la substitution pourrait être à l’origine de déséquilibre de l’épilepsie chez des patients préalablement équilibrés. Néanmoins, les données ne sont pas suffisantes pour apporter la démonstration scientifique d’une relation entre la substitution et le déséquilibre de la pathologie épileptique…Les données… ne permettent pas d’affirmer que les cas rapportés sont liés à un défaut de bioéquivalence des génériques par rapport aux princeps ». La Commission a proposé de ne pas restreindre la substitution pour cette classe de médicaments. En revanche, elle a souhaité que « soit rappelé aux prescripteurs la possibilité d’exercer leur droit d’exclusion de la substitution en apposant, sur leurs ordonnances, « non

substituable » avant la dénomination de la spécialité antiépileptique prescrite (qu’il s’agisse d’un princeps ou d’un générique) ». www.afssaps.sante.fr

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BIP31.fr 2008, 15 (2), page 15

Iatrogénie médicamenteuse motivant une hospitalisation aux Urgences Pédiatriques

G. Durrieu

Une étude nationale étatsunienne (J Pediatr 2008, 152,

416), réalisée sur une période d’un an auprès de 63 services hospitaliers d’Urgences de Pédiatrie, a voulu évaluer les caractéristiques des événements indésirables médicamenteux ayant motivé l’hospitalisation d’enfants et d’adolescents âgés de 18 ans et moins. Dans la majorité des cas (88,7%), l’hospitalisation a été inférieure à 24 heures. Presque la moitié de ces événements indésirables (49%) sont survenus chez des enfants âgés de 1 à 4 ans. De 1 à 4 ans, le taux d’hospitalisation supérieure à 24 heures était plus élevé (environ 10 fois plus) que dans les autres groupes d’âge. Les principaux événements indésirables médicamenteux concernaient en premier des effets indésirables [(53%), avec en majorité des réactions allergiques (35%)] suivis par des surdosages involontaires (45%). Les médicaments les plus fréquemment impliqués dans les surdosages involontaires étaient les antalgiques (20%, principalement paracétamol et ibuprofène) et les médicaments du système respiratoire (16%, antihistamiques H1, antitussifs et médicaments contre le rhume). La population la plus à risque dans ces cas de surdosage était encore les enfants âgés de 1 à 4 ans. Pour les effets indésirables médicamenteux, les anti-infectieux (22%, principalement l’amoxicilline) ont été rapportés en premier, suivis par les psychotropes (13%) et les médicaments du système respiratoire (10%). Les taux d’hospitalisation les plus élevés ont été observés avec les anticancéreux et les cardiotropes. Une meilleure connaissance des caractéristiques des événements indésirables chez l’enfant (surdosage ou effet indésirable, population à risque, médicaments suspects…) permettrait une prise en charge plus adéquate de ces jeunes patients et une utilisation optimale des Urgences Pédiatriques.

Pensez à déclarer vos effets indésirables au CRPV : vous contribuez ainsi à une meilleure connaissance des

médicaments (anciens comme nouveaux). Vos déclarations sont pour nous le seul moyen de vous informer en retour !

Médicaments & Grossesse

AINS et Grossesse : le risque existe aussi en application cutanée !

C Damase-Michel

Plusieurs cas d’atteintes cardio-pulmonaires et rénales

fœtales et néonatales ont été décrits lors d’utilisation maternelle d’AINS appliqués par voie cutanée (http://afssaps.sante.fr/htm/1/pharmaco/cr-pv-080101.pdf). Les observations imputent l’acide niflumique (Niflugel°, Nifluril pommade°) et le diclofenac (Voltarene gel°). Un dossier concerne une exposition professionnelle chez une femme enceinte exerçant la profession de masseur-kinésitherapeute et pratiquant des massages à mains nues avec un gel contenant de l’acide niflumique. Les données pharmacocinétiques montrent une absorption cutanée pouvant atteindre 20% de la dose d’AINS administrée après

une application unique. La résorption est d’autant plus importante que la zone traitée est large, bien vascularisée, lésée, sous occlusion. Une étude de prescription des AINS réalisée en Haute-Garonne montre qu’en 2005, 1,8% des femmes enceintes se sont vues prescrire et délivrer des AINS par voie cutanée au 3ème trimestre de grossesse, ce qui correspond à plus de 200 femmes par an recevant une prescription à risque (Presse Med 2008, 37, 727). Compte tenu de l’efficacité « toute relative » des AINS par voie cutanée, gardons nous de ces prescriptions et délivrances potentiellement dangereuses et informons sur le risque d’exposition professionnelle ! NDLR : il y a longtemps que les AINS en

application cutanée ne sont plus admis (et donc plus

utilisés) au CHU de Toulouse pour ces raisons !

IMPORTANT : Ce bulletin sera désormais diffusé gratuitement par courriel. Merci de signaler dès maintenant vos adresses électroniques

à [email protected] en indiquant votre spécialité. Cependant, vous pouvez continuer à recevoir le BIP par voie postale,

en nous adressant un chèque de 5,00 € (frais d'édition et d'affranchissement, abonnement annuel) à l'ordre de l'Institut

d'Hydrologie, Faculté de Médecine, Professeur JL Montastruc, 37 Allées Jules-Guesde, 31000 Toulouse.

Brèves de l'AFSSAPS

H. Bagheri

Antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) et inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et grossesse : les antihypertenseurs antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) et inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), déjà strictement contre-indiqués pendant le deuxième et troisième trimestre de grossesse sont désormais déconseillés lors du premier trimestre. En effet, une faible augmentation du risque de malformations cardiaques a été mise en évidence lors d’exposition au cours du premier trimestre de grossesse dans une étude. Des données complémentaires sont nécessaires pour confirmer ce risque. Rappelons que ces médicaments peuvent être aussi responsables d’atteinte de la fonction rénale fœtale avec oligoamnios et parfois mort in utero ou insuffisance rénale néonatale irréversible lors d’utilisation aux deuxième et troisième trimestres de grossesse. Méthadone gélule : Le chlorhydrate de méthadone a été récemment commercialisé sous forme de gélule (dosées à 1, 5, 10, 20 et 40 mg) dans l'indication substitution des pharmacodépendances majeures aux opiacés. Les gélules de méthadone sont réservées aux patients préalablement traités par le sirop de méthadone. La forme sirop reste la forme utilisée lors de l'instauration du traitement. Seuls les patients stabilisés, notamment au plan médical, et les conduites addictives, pourront bénéficier d'un passage à la gélule. Dans tous les cas, le passage à la gélule ne pourra se faire qu'à l'issue d'une période après au moins un an sous sirop de méthadone. En cas de mésusage de la gélule (tentatives d'ingestion, usages illicites), le médecin devra

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obligatoirement arrêter le traitement par la gélule et prescrire à nouveau au patient la méthadone sous forme sirop ou envisager un autre traitement.

ASMR de nouveaux médicaments

A. Pathak

L’A.S.M.R. apprécie l'Amélioration du Service Médical Rendu

par un médicament en le comparant aux autres médicaments de

même classe. La Commission de Transparence de la Haute

Autorité de Santé (HAS) évalue l'A.S.M.R. en 5 niveaux en

termes d'amélioration de l’efficacité et/ou du profil d’effets

indésirables et/ou de commodité d'emploi. L'avis de la

Commission de transparence est disponible sur le site internet de

la Haute Autorité de Santé (www.has-sante.fr) et doit, selon

l'article R5047-3 du Code de Santé Publique, "être remis en

mains propres lors de la visite médicale". Voici une sélection des

A.S.M.R. récemment délivrées par l’HAS pour les médicaments

récemment commercialisés.

ASMR de niveau III (Amélioration « modérée »)

ISENTRESS, comprimés de raltegravir, anti retroviral appartenant à la classe des inhibiteurs de l’intégrase, apporte une amélioration du service médical rendu modérée en association à un traitement antirétroviral optimisé. [Population limitée aux patients adultes

prétraités, ayant une charge virale détectable sous

traitement antirétroviral en cours et une résistance

confirmée par des tests génotypiques et phénotypiques à :

au moins 1 inhibiteur nucléosidique (IN), 1 inhibiteur non

nucléosidique (INN) et à plus d’un inhibiteur de protéase

(IP).]

A.S.M.R. de niveau V (Absence d’amélioration) LOVENOX (enoxaparine sous cutanée) HBPM indiquée dans l’infarctus du myocarde aigu avec sus-décalage du segment ST, en association avec un thrombolytique, chez les patients éligibles ou non à une angioplastie coronaire secondaire (attention à l’utilisation des HBPM chez le sujet

âgé et insuffisant rénal).

SEROPLEX (comprimés d’escitalopram), inhibiteur de la recapture de la sérotonine, indiqué dans les troubles obsessionnels compulsifs, d’anxiété généralisés et d’anxiété sociale («phobie sociale»). AVAMYS (pulvérisation nasale de fluroate de fluticasone) spécialité à base de corticoïdes par voie intranasale indiquée dans le traitement symptomatique de la rhinite allergique (l’administration par voie locale de corticoïdes peut

entraîner des effets indésirables systémiques).

CERVARIX, vaccin indiqué dans la prévention des néoplasies intra-épithéliales cervicales de haut grade et du cancer du col de l’utérus dus aux Papillomavirus Humains (HPV) de types 16 et 18. FORSTEO, solution pour injection de teriparatide, un dérivé de l’hormone PTH, indiqué dans le traitement de l’ostéoporose masculine chez les patients à risque élevé de fracture. RASILEZ, comprimés d’aliskiren, inhibiteur de l’enzyme rénine, indiqué dans la prise en charge de l’HTA essentielle (le suffixe « kiren » permettra de reconnaître les molécules

de cette classe pharmacologique). Note : nous faisons le choix de présenter une sélection de

spécialité dont l’usage est le plus large possible. Ainsi, les

spécialités réservées à l’usage en collectivités sont rarement

retenues dans ce paragraphe.

A QUOI SERT LE CENTRE REGIONAL DE PHARMACOVIGILANCE ?

QUE PEUT-IL VOUS APPORTER ?

Le Centre de Pharmacovigilance a pour mission de répondre à vos questions sur le médicament (prescription, effets indésirables,

efficacité démontrée, interactions médicamenteuses, utilisation chez le sujet à risque, pendant la grossesse, allaitement…).

Le Centre de Pharmacovigilance reçoit et analyse les notifications d’effets indésirables.

La loi rend obligatoire la déclaration de tout effet indésirable “grave” (entraînant un décès, une hospitalisation, une mise en jeu du

pronostic vital ou des séquelles) même connu des médicaments (ou des médicaments dérivés du sang) ainsi que tout effet indésirable

"inattendu" (c'est-à-dire non mentionné dans le Vidal) par tout professionnel de santé (médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien,

sage-femme,...). La déclaration doit se faire au Centre Régional de Pharmacovigilance (Coordonnées en première page).

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