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Principales sources : Service de l’urbanisme, BRGM La prévention des risques est une compétence du Pays, tandis que les problèmes de sécurité civile sont de la compétence de l’Etat. Les risques naturels constituent les principaux facteurs de risques pour les populations de Polynésie française, les risques technologiques étant très limités. L’ensemble du territoire polynésien est exposé, à des degrés divers, à des aléas naturels tels que les mouve- ments de terrain, les inondations, la houle et les marées de tempête, liées aux cyclones, et les tsunamis (raz-de- marée). L’aléa sismique est à priori négligeable et ne fait pas l’objet, pour l’instant, d’une prise en compte réglementaire. Ces évènements ont, par le passé, été à l’origine de nombreux dommages ; depuis 1996, ils ont provoqué la mort de 22 personnes et plus de dix-neuf milliards de francs pacifiques de dégâts. La législation des PPR (Plans de Prévention des Risques) émane de ce constat et d’une volonté de renforce- ment de la prévention des risques naturels prévisibles. L’ensemble des communes de Polynésie disposent, ou sont en passe de disposer, d’un projet de PPR. LES RISQUES NATURELS En raison de sa situation géographique, du contexte climatique et géologique et de la morphologie des îles polynésiennes, l’ensemble du territoire polyné- sien est concerné à des degrés divers par différents phénomènes naturels à risque comme, les mouve- ments de terrain, glissements, éboulements, les crues de rivière et inondations, les cyclones (houle, submersion marine, vent) et les tsunamis. Bien que peu marquées, les variations saisonnières mettent en évidence une saison chaude et pluvieuse de novembre à avril et une saison plus fraîche et relativement sèche de mai à octobre. La température annuelle moyenne varie entre 27° aux Marquises et 21° à Rapa au sud des Australes. Les pluies fortes et brutales, fréquentes pendant l’hiver austral et le relief très escarpé des îles volcaniques entraînent les débordements de rivières et les inondations. La structure géologique des îles hautes et la forte altération des formations géologiques favorisent les mouvements de terrain. Les atolls, généralement de faibles altitudes sont très sensibles aux fluctuations du niveau de la mer et aux surcotes marines. Ces trente dernières années, la forte croissance démographique a contraint la population, essentiel- lement des îles du Vent et des îles Sous-le-Vent, à occuper des zones plus sensibles aux risques naturels : pentes raides, zones de réception de chutes de blocs, lits majeurs des rivières. Aidée par une mécanisation toujours plus puissante des moyens de terrassement, cette urbanisation, souvent “ sauvage “, conduit à la multiplication de ces aménagements et des interven- tions en zones sensibles : constructions et routes en montagne, sur des pentes de plus en plus fortes… Des phénomènes météorologiques exceptionnels, tels que le cyclone Alan en 1998 ont mis en évidence les conséquences dangereuses de ces pratiques dans un milieu fragile. L’épisode pluvieux des 19 et 20 décembre 1998 sur Tahiti particulièrement dévasta- teur est exemplaire à cet égard. LES RÉSEAUX DE SURVEILLANCE Prévention des tsunamis Responsable du centre polynésien de prévention des tsunamis, le laboratoire de Géophysique (LDG), antenne du CEA, surveille l’activité sismique de la Polyné- sie française et du Pacifique et détecte les tsunamis. Les risques et le changement climatique 9 LES PRINCIPAUX ÉVÈNEMENTS AYANT AFFECTÉ LA POLYNÉSIE DATE Cyclones 28-03 mar 2001 RITA 23-01 mar 2000 KIM 30-04 nov 1997 MARTIN 21-27 nov 1997 OSEA 02-10 dec 1997 PAM 31-02 fev 1998 URSULA 31-04 fev 1998 VELI 31-04 fev 1998 WES 20-26 avr 1998 ALAN 29-01 mai 1998 BART Tsunamis 21 fév 1996 Pérou 13 sept.1999 Fatu Hiva (Marquises) 23 juin 2001 Pérou Mouvements de terrain De 1987 à 1999 6 glissements de terrain importants 1998 Coulées de boues à Raiatea 1999 Eboulement à Fatu Hiva En 2003 2 écroulements vallée de la Punaruu 1

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Principales sources : Service de l’urbanisme, BRGM

La prévention des risques est une compétence du Pays, tandis que les problèmes de sécurité civile sont de la compétence de l’Etat.

Les risques naturels constituent les principaux facteurs de risques pour les populations de Polynésie française, les risques technologiques étant très limités.

L’ensemble du territoire polynésien est exposé, à des degrés divers, à des aléas naturels tels que les mouve-ments de terrain, les inondations, la houle et les marées de tempête, liées aux cyclones, et les tsunamis (raz-de-marée). L’aléa sismique est à priori négligeable et ne fait pas l’objet, pour l’instant, d’une prise en compte réglementaire. Ces évènements ont, par le passé, été à l’origine de nombreux dommages ; depuis 1996, ils ont provoqué la mort de 22 personnes et plus de dix-neuf milliards de francs pacifiques de dégâts.

La législation des PPR (Plans de Prévention des Risques) émane de ce constat et d’une volonté de renforce-ment de la prévention des risques naturels prévisibles. L’ensemble des communes de Polynésie disposent, ou sont en passe de disposer, d’un projet de PPR.

Les risques natureLsEn raison de sa situation géographique, du contexte climatique et géologique et de la morphologie des îles polynésiennes, l’ensemble du territoire polyné-sien est concerné à des degrés divers par différents phénomènes naturels à risque comme, les mouve-ments de terrain, glissements, éboulements, les crues de rivière et inondations, les cyclones (houle, submersion marine, vent) et les tsunamis.

Bien que peu marquées, les variations saisonnières mettent en évidence une saison chaude et pluvieuse de novembre à avril et une saison plus fraîche et relativement sèche de mai à octobre. La température annuelle moyenne varie entre 27° aux Marquises et 21° à Rapa au sud des Australes. Les pluies fortes et brutales, fréquentes pendant l’hiver austral et le relief très escarpé des îles volcaniques entraînent les débordements de rivières et les inondations. La structure géologique des îles hautes et la forte altération des formations géologiques favorisent les mouvements de terrain. Les atolls, généralement de faibles altitudes sont très sensibles aux fluctuations du niveau de la mer et aux surcotes marines.

Ces trente dernières années, la forte croissance démographique a contraint la population, essentiel-

lement des îles du Vent et des îles Sous-le-Vent, à occuper des zones plus sensibles aux risques naturels : pentes raides, zones de réception de chutes de blocs, lits majeurs des rivières. Aidée par une mécanisation toujours plus puissante des moyens de terrassement, cette urbanisation, souvent “ sauvage “, conduit à la multiplication de ces aménagements et des interven-tions en zones sensibles : constructions et routes en montagne, sur des pentes de plus en plus fortes…

Des phénomènes météorologiques exceptionnels, tels que le cyclone Alan en 1998 ont mis en évidence les conséquences dangereuses de ces pratiques dans un milieu fragile. L’épisode pluvieux des 19 et 20 décembre 1998 sur Tahiti particulièrement dévasta-teur est exemplaire à cet égard.

les réseaUx de sUrveillanCe

Prévention des tsunamis

Responsable du centre polynésien de prévention des tsunamis, le laboratoire de Géophysique (LDG), antenne du CEA, surveille l’activité sismique de la Polyné-sie française et du Pacifique et détecte les tsunamis.

Les risques et le changement climatique

9

lEs principaux évènEmEnts ayant affEcté la polynésiE

dAte

Cyclones

28-03 mar 2001 RITA

23-01 mar 2000 KIM

30-04 nov 1997 MARTIN

21-27 nov 1997 OSEA

02-10 dec 1997 PAM

31-02 fev 1998 URSULA

31-04 fev 1998 VELI

31-04 fev 1998 WES

20-26 avr 1998 ALAN

29-01 mai 1998 BART

Tsunamis

21 fév 1996 Pérou

13 sept.1999 Fatu Hiva (Marquises)

23 juin 2001 Pérou

Mouvements de terrain

De 1987 à 1999 6 glissements de terrain importants

1998 Coulées de boues à Raiatea

1999 Eboulement à Fatu Hiva

En 20032 écroulementsvallée de la Punaruu

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Dans le cadre de l’alerte et de la prévention des séismes, le Réseau Géophysique Polynésien RGP) comprend actuellement une dizaine de stations sismi-ques, réparties sur les archipels. Le signal enregistré à Tahiti est traité en temps réel pour localiser tout tremblement de terre qui pourrait donner naissance à des tsunamis et pour déclencher au besoin une alerte. Pour la prévention des tsunamis, un marégra-phe a été installé à Hiva Oa, aux Marquises, qui sont les plus exposées.

Entre 2001 et 2005, dans le cadre du projet PLUME (Polynésienn Lithosphere and Upper Mantle Experi-ment) un réseau temporaire de 10 stations sismolo-giques a été déployé sur l’ensemble des archipels pour compléter le réseau sismologique régional du LDG/CEA (voir schéma). Des stations sismologiques ont également été déposées en fond de mer pour complé-ter le dispositif. L’ensemble des données est utilisé pour étudier la sismicité locale et régionale, mais aussi pour imager les zones d’alimentation des points chauds qui ont donné naissance aux différents archipels.

Suivi des risques

Entre 2003 et 2006, le Bureau de Recherche Géolo-gique et Minière (BRGM), établissement public de l’Etat, était présent en Polynésie pour mettre en place le programme ARAI (Aléas et Risques naturels, Infor-mation et Aménagement) relatif à la prévention des risques naturels. Ce programme visait à définir les

zones à risques de la Polynésie française en étudiant les phénomènes naturels susceptibles d’affecter le territoire. La finalité principale était l’élaboration des Plans de Prévention des Risques naturels prévisibles. La gestion du programme a été assurée par le Servi-ce de l’Urbanisme (SAU) et la réalisation encadrée localement par 2 instances, le Comité de Pilotage (Polynésie, Etat et BRGM), et le Comité de Suivi (Polynésie et BRGM). Outre l’aspect réglementaire, le programme ARAI prévoyait différentes actions d’information préventive en faveur notamment des élus et des populations.

le risqUe CYCloniqUe

En Polynésie française, le risque cyclo-nique est jugé moyen. Les phénomènes cycloniques se produisent assez réguliè-rement dans un couloir privilégié Cook – Australes – Rapa ou dans son voisinage. Les phénomènes cycloniques sont en majeure partie des cyclones tropicaux (vents compris entre 118 et 179 km/h). En Polynésie, les cyclones ont une durée moyenne de vie de 7 jours.

Depuis l’année 1831, 61 cyclones sont répertoriés, 39 d’entre eux se sont produits durant les 34 dernières années (1970 – 2004), soit 64% des cyclones inventoriés. Huit cyclones ont été meurtriers durant les derniers 133 ans (1843, 1878, 1903, 1905, 1906, 1983, 1997, 1998), dont 2 dans la période 1996-2006 ; le dernier en date, le cyclone Alan, a fait 21 victimes.

Les archipels sont différemment menacés :

aux Marquises, le risque de subir une dépression tropicale forte ou un cyclone semble très faible ;

les atolls des Tuamotu et la Société sont menacés de subir un cyclone

9Les risques et le changement

climatique

localisation dEs stations sismologiquEs plumE (Source : LDG/CEA)

Le programme ARAI

Action 1 : Synthèse sismotechnique et risque sismiqueAction 2 : Modélisation de l’aléa hydrologiqueAction 3 : Etablissement des PPR

Cartographies des aléas (mouvements de terrain, inondations, tsunamis houle cyclonique)Information préventiveFinalisation des PPR

Action 4 : Observatoire des risquesAction 5 : Communication et valorisation

(Source des données : BRGM)

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tous les dix à vingt cinq ans en moyenne, c’est à dire 4 à 10 cyclones par siècle (DUPON J.F.) ;

aux Australes enfin, c’est une fois tous les deux à trois ans que se produirait un événement cyclo-nique de forte intensité.

Outre les habitations, l’économie est également touchée par la destruction des infrastructures, la détérioration des outils de production industrielle,

l’impact sur les réseaux d’eau, de téléphone et d’électricité. On peut distinguer les effets directs (destructions dues aux vents, dommages résultant des inondations, etc.) et les effets indirects (pollutions plus ou moins graves du littoral suite à un naufrage, pollutions à l’intérieur des terres résultant de dégâts occasionnés aux infrastructures de transport, etc.).

la marée de temPête

La marée de tempête se révèle souvent comme un phénomène des plus dangereux parmi ceux qui accompagnent le cyclone tropical. Elle se traduit par un écart plus ou moins important entre le niveau de la mer observé et celui qui est simplement lié au phénomène de marée astronomique. En Polynésie, les îles étant dépourvues de plateau continental et sans baies importantes, les surcotes marines associés aux cyclones sont relativement faibles : pour un cyclone de classe 5, la surcote engendrée au rivage est de l’ordre de 1 à 2 mètres pour des vagues atteignant 10 à 12 mètres de haut. Sans être exceptionnelles, ces houles peuvent avoir des conséquences dommageable.

En 1999 à Huahine par exemple, de nombreux comple-xes touristiques et habitations ont été inondés. A Tahiti, dans la commune de Papenoo, au niveau du trou du souffleur, la houle peut bloquer la circulation pendant plusieurs jours. A Rangiroa lors du cyclone Orama, plusieurs maisons ont été « traversées » par les vagues.

Un épisode de forte houle s’est produit du 9 septembre au 13 septembre 2005 sur l’ensemble de la Polynésie, épisode dû à la présence d’une forte dépression assez large et creuse. Sur la Société et Bora Bora, elle a engendré une houle énergétique d’amplitude 3,50 à 4,50 m. La houle a eu de nombreux impacts sur les littoraux, notamment au niveau de la Pointe Matira et ses environs. Témoin de cette impor-tante montée des eaux, l’îlot de l’hôtel Méridien a été submergé et le niveau du lagon a atteint les planchers des bungalows sur pilotis de l’hôtel Intercontinental Beachcomber. Les conséquences de ce phénomène météorologique exceptionnel au niveau des littoraux sont non seulement la destruction des maisons et des infrastructures hôtelières, mais aussi l’érosion des plages balayées par les vagues qui devront faire l’objet d’un réensablement (source Carex Environnement).

Sur les récifs coralliens, les fortes houles cycloniques provoquent des dégradations en cascade des construc-tions récifales, sur la pente externe notamment.

Source : Service Risques Naturels, Gouvernement de la Polynésie française

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le risqUe d’inondation

Le contexte climatique de la Polynésie est tel que les inondations sont des phénomènes courants dans les îles hautes ; les événements les plus dévastateurs sont souvent associés à l’activité cyclonique. Plusieurs facteurs influencent le risque d’inondation : l’intensité des précipitations, le relief, l’occupation du sol (imper-méabilisation des terrains), les surcotes marines.

Les îles hautes sont les plus exposées. Les reliefs escarpés du centre des îles induisent des vitesses d’écoulement élevées. Par ailleurs, les plaines côtières, parfois larges, ne permettent pas une bonne évacua-tion des eaux. L’aménagement et l’urbanisation ont un impact majeur en modifiant les lits des cours d’eau, en aménageant les zones de divagation des rivières et en imperméabilisant les sols. L’imperméabilisation des terrains entraîne un accroissement des lames ruisselées mais surtout des vitesses de propagation des crues entraînant une concentration plus rapide des écoulements.

Quatre types d’inondations sont susceptibles d’affecter les îles: les inondations dites « pluviales », les

inondations dites « fluviales », les crues torrentielles, les ruptures d’embâcles.

Les inondations pluviales affectent les zones de dépres-sion topographique et les zones planes (ou à pente très faible) où l’évacuation des eaux ne se fait que très lentement ; les plaines urbanisées sont égale-ment affectées lorsque l’état et la capacité du réseau d’eaux pluviales ne permettent pas un bon drainage. Les niveaux d’eau sont d’autant plus importants que les sols sont imperméabilisés (urbanisés).

9Les risques et le changement

climatique

trajEctoirE dEs 13 cyclonEs qui ont touché la polynésiE françaisE au cours d’unE phasE El nino (Source : Atlas climatologique de la Polynésie française)

répartition mEnsuEllE dEs phénomènEs cycloniquEs(Source : Atlas climatologique de la Polynésie française)

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Les inondations par débordement des cours d’eau, crues torrentielles et coulées de boue affectent essen-tiellement les lits majeurs des cours d’eau et les zones voisines. A Tahiti, de nombreux cours d’eau ont été déviés de leur lit naturel au cours des quarante dernières années. Lors d’événements pluvieux importants, les cours d’eau déviés ont tendance à reprendre le cours de leur lit naturel, inondant alors les zones aménagées dans ces zones vulnérables.

Ainsi, en 1998, lors du passage du cyclone Alan aux Iles-Sous-le-Vent, des crues chargées (coulées de boues et de débris divers) se sont multipliées à Raiatea, Tahaa et Huahine dans une moindre mesure. Plus tard à Tahiti, lors des fortes précipitations de décembre 1998, c’est l’ensemble de l’île qui a été affectée avec des inonda-tions plus ou moins sévères sur tous les cours d’eau.

les moUvements de terrain

Un mouvement de terrain est un dépla-cement plus ou moins brutal du sol et du sous-sol. Il est fonction de la nature et de la structure des couches géologi-ques. Il peut résulter d’un ou plusieurs facteurs déclenchant comme la sollicitation sismique, l’action de l’eau (modifi-cation des caractéristi-ques mécaniques des terrains après saturation en eau lors de fortes pluies, érosion liée aux

écoulements), l’action de l’homme (modification des caractéristiques géométriques des terrains, rejets d’eau non contrôlés, etc.), l’altération naturelle des terrains.

Chaque année, les îles hautes de Polynésie sont affectées à des degrés divers par des mouve-ments de terrain (glissements, éboulements, écroulements, chutes de blocs, coulée de

boue…) qui occasionnent parfois des dégâts matériels, et plus rarement des pertes humaines. De 1987 à 1999, on dénombre 6 glissements aux conséquences désastreuses sur les îles de Tahiti, Huanine, Raiatea et Tahaa, coûtant la vie à 31 personnes et provoquant de très nombreux dégâts matériels.

Photos : Phénomène de hou-le australe dans les Tuamotu (Crédit : © IRD, B. Marty)

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L’analyse des sites affectés par les mouvements de terrain a montré que si les causes naturelles ont été importantes dans le déclenchement des instabilités de versants, des causes anthropiques agissent souvent en facteur aggravant des situations déjà précaires ou déclencheur de ces phénomènes. Plusieurs facteurs contribuent à aggraver les conséquences des phéno-mènes de glissements de terrain et augmentent considérablement leurs probabilités d’occurrence :

la modification de la morphologie généralement par terrassement. Cette cause fortement aggra-vante est devenue prépondérante à l’échelle de la Polynésie ;

la modification des régimes d’écoulement des eaux, qui crée dans le sol des pressions qui déstabilisent les versants. Les origines de ces modifications sont multiples : imperméabilisation des surfaces (routes, parkings…), modifications des modes de cultures et des espèces végétales, surpression ou manque d’entretien des réseaux de drainage (superficiel ou profond), feux de forêts.

Par ailleurs, le remplacement d’espèces végéta-les endémiques, adaptées aux conditions pluvio-métriques et morphologiques locales, par des espèces allochtones peut parfois contribuer à modifier les écoulements, les conditions hydri-ques ou la composante minéralogique des sols. (Exemple du Miconia).

Quelques évènements majeurs

1988 (Raiatea) : nombreuses coulées de boues et laves torrentielles ; rupture d’embâcle au niveau de Tapioi, qui a inondé une partie de la ville d’Uturoa.

Décembre 1998 (Tahiti) : éboulement dans la commune de Papara (Onohea) qui a provoqué un embâcle. La rupture de ce barrage quelques heures après l’éboulement a entraîné la propa-gation d’une lave torrentielle qui a endommagé quelques habitations en aval.

Septembre 1999 (Marquises) : phénomène d’éboulement en grande masse (volume supérieur au million de m3) à Fatu Hiva aux Marquises, provoquant un tsunami ayant causé des dégâts dans l’île.

Fin mars 2003 (Tahiti) : 2 écroulements localisés dans le fond de la vallée de la Punaruu à proxi-mité du Mont Orohena. Pour le plus important, le volume mobilisé a été au moins de l’ordre de 2 millions de m3. La lave torrentielle engendrée s’est propagée sur une dizaine de kilomètres. A proximité de l’éboulement, les versants du cours d’eau ont été “décapés” sur 20 à 30 m de haut.

9Les risques et le changement

climatique

Les différents types de mouvements de terrain

Les glissements de terrain : il s’agit du déplacement d’une masse de terrain cohérente, le long d’une ou plusieurs surfa-ces de rupture de géométrie variable. Suivant la géométrie, on distingue généralement les glissements plans et les glissements circulaires. Dans de nombreux cas, les glisse-ments affectent des remblais mis en place dans des zones en pente, pour l’édification de routes et de bâtiments divers. Les glissements et coulées sur fortes pentes sont fréquents à l’intérieur des îles hautes aux reliefs escarpés et affectent des versants à très forte pente. Ils se produisent en général lors de fortes précipitations. Ces événements sont suscepti-bles de créer des embâcles représentant une menace pour les aménagements et les habitations situées en aval.

Les éboulements ou écroulements affectent les talus rocheux ou les falaises ; en septembre 1999 à Fatu Hiva (Marquises) un éboulement fut à l’origine d’un tsunami local causant de nombreux dégâts.

Les laves torrentielles résultent du transport de matériaux en coulées visqueuses dans le lit des torrents.

Les ruptures d’embâcles : un embâcle consiste en l’obstruc-tion d’un ouvrage ou d’une section d’un cours d’eau par la formation d’une digue naturelle constituant ainsi une retenue d’eau en amont. La digue peut être constituée soit par des éléments solides (arbres et blocs) arrachés à l’amont et charriés par le cours d’eau, soit par obstruc-tion du cours d’eau suite à un glissement de terrain. Les écoulements peuvent alors entraîner la rupture brutale de la digue et générer ainsi la propagation d’une onde de crue destructrice.

Les coulées de boue concernent la mobilisation des matériaux issus de glissements ou d’éboulements. Il s’agit d’un phéno-mène de crue particulier qui consiste en la propagation d’un volume considérable de boue dense charriant des blocs. Elles ont un pouvoir destructeur plus important qu’une crue torrentielle de débit équivalent en raison essentiellement de la quantité de matériaux charriés ainsi que de la densité du fluide qui les transporte.

Photo : Eboulement en grande masse Tohiea (haut) et éboulement à Fatu Hiva (bas) (Crédit : SAU)

Photo : Coulée de boue sur l’île de Tahae en avril 1998 (Crédit : LTPP)

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le risqUe volCano-sismiqUe

Toutes les îles de Polynésie française sont d’origine volcanique. L’ensemble du Territoire repose sur une grande plaque située à 4 000 m de fond, engendrée à l’est par la dorsale du Pacifique qui se déplace vers le Nord-Ouest à raison de 11 cm par an. Sur cette plaque naissent 2 types de volcans. Le premier concerne les plus vieux d’entre eux qui ont un âge très proche de la plaque sur laquelle ils reposent (40 à 60 millions d’années) comme les volcans des Tuamotu. Le deuxième type de volcan, issu d’un volcanisme de point chaud, concerne toutes les autres îles de Polynésie.

La sismicité des îles de la Société se trouve principa-lement localisée à l’est de Tahiti. Deux autres zones sismiquement actives actuellement se trouvent l’une au nord de Bora Bora, l’autre au sud-ouest de Tahiti. Les zones de fortes concentrations de séismes, autour de Tahiti, correspondent aux points chauds de la Société, à partir desquels se forment les volcans sous-marins qui sont à l’origine des îles. L’archipel des Australes, tout au sud de la Polynésie française, a été créé par le point chaud du Mac Donald.

Il existe 5 volcans actifs en Polynésie française : le MacDonald situé aux îles Australes, à 500 km au sud-est de Rapa, et le complexe volcanique de la région de Mehetia au sud-est de Tahiti, avec les volcans sous-marins Mehetia, Moua Pihaa, Rocard et Teahitia. Mehetia située à 110 km au large de la presqu’île de Tahiti est la plus jeune des îles de Polynésie française.

cartE dEs évènEmEnts survEnus sur la communE dE punaauia (Source : BRGM )

zzonEs volcaniquEs activEs (mac donald, mEhEtia, rurutu) (Source : Clouard et Belleville)

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les tsUnamis

Les tsunamis sont dus à des mouvements des fonds marins ou des côtes. En plein océan les vagues des tsunamis n’excèdent que rarement 2 m à cause de leur grande longueur d’onde (qui peut varier de 50 à 200 km) et de leur vitesse de plusieurs centaines de km/h. C’est au voisinage des côtes qu’elles devien-nent très dangereuses.

En Polynésie, les pentes des côtes plongeant dans l’océan sont importantes et souvent, l’existence d’une barrière de récif, à bonne distance du littoral, atténue les effets des tsunamis. Ce « talus » escarpé, ainsi que la forme convexe arrondie des petites îles a tendance à réfléchir et disperser l’énergie au lieu de la concentrer. Mais il y a des exceptions. Le cas des îles Marquises est nettement plus défavorable. Les grandes baies à faible pente, ne bénéficiant pas de la protection de barrières récifales, piègent et concentrent l’énergie propagée. La mer envahit alors le rivage et les plaines côtières sur plusieurs centaines de mètres, lorsque les altitudes sont faibles. Dans les autres îles, le tsunami se traduira par une montée des eaux, sans vague déferlante, provoquant des inondations de la plaine littorale.

De 1830 à nos jours, 18 tsunamis ont touché les côtes polynésiennes. Les tsunamis les plus forts sont ceux de 1946 et 1960, qui ont provoqué d’importants dégâts un peu partout en Polynésie française. La hauteur paroxys-male a été atteinte lors du tsunami du 23 mai 1960 suite au séisme du Chili, plus fort séisme jamais enregistré,

entraînant des dégâts importants, sur la côte nord et un peu partout dans l’île de Tahiti. A Papeete et Arue, plusieurs maisons du bord de mer, construites en bois, ont été déplacées (Schindele et alii, 2005).

Si les tsunamis sont provoqués par des mouvements du sol liés à des séismes au niveau du plancher océanique ou au proche voisinage des côtes, des tsunamis locaux peuvent être provoqués par des éboulements importants sur la frange littorale : ainsi le 13 septembre 1999, un tsunami généré par un éboulement de falaise sur la côte sud de Fatu Hiva aux Marquises avait gravement endommagé la commune de Omoa.

Parmi les archipels les plus cités, les Iles Marquises le sont systématiquement, la Société et les Australes l’étant dans environ 25% des cas (CEA, 2005).

Le changement cLimatiqueLa Polynésie française fait partie des territoires qui sont les plus susceptibles de pâtir des effets négatifs de l’évo-lution climatique : remontée du niveau de la mer, plus forte occurrence des tempêtes, fortes houles et cyclo-nes tropicaux, avec les conséquences décrites plus haut, réchauffement de la mer et blanchissement corallien. Par leurs caractéristiques géographiques, les plaines côtières des îles hautes mais surtout les atolls sont vulnérables aux phénomènes climatologiques extrêmes.

répartition Et détErmination dE l’âgE dEs volcans dE la polynésiE françaisE. (Source : BRGM)

9Les risques et le changement

climatique

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L’augmentation de la température

Dans les territoires français du Pacifique sud-ouest, le réchauffement climatique devrait être moindre que celui attendu pour l’hémisphère Nord, du fait du volant thermique de l’océan. Il devrait être de l’ordre de 2°C. En Polynésie française, les météorologues ont constaté un réchauffement de la température de l’ordre de 1°C au cours des 30 dernières années (source Atlas climatologique), sur la majorité du territoire, avec toutefois une augmentation moins sensible dans l’archipel des Australes.

La remontée du niveau marin

Les risques induits par la remontée du niveau de la mer résultant des changements climatiques font l’objet d’études, en Polynésie, dans le cadre des travaux du sous-groupe « Gestion des zones côtiè-res » du Groupement Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC). La France s’est engagée auprès de ce groupe, à réaliser une estimation des conséquences de l’élévation du niveau de la mer pour la Polynésie française.

Les projections du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) établies selon divers scénarios, situent l’élévation du niveau moyen des mers entre 0,10 et 0,88 m d’ici 2100. Le littoral des îles du Pacifique risque d’être être significativement impacté par la transgression marine dont l’amplitude prévisible à la fin du siècle serait de l’ordre de 30 à 50 cm.

Une étude sur l’impact du réchauffement climati-que (« l’impact du réchauffement climatique sur les petites îles du Pacifique, modélisation et perception du risque: application au littoral de l’agglomération de Papeete, Polynésie française ») a été financée par le Ministère de l’Outre-Mer. Elle aborde 3 sujets :

Évolution climatique et élévation du niveau de la mer ;

Perception du risque par les communautés locales ;

Modélisation de l’élévation du niveau de la mer.

L’étude a porté sur 3 sites : Papeete, Pirae-Arue, Nord Faa’a et sud Faa’a. Une simulation des zones touchées par la remontée des eaux a été réalisée. Un SIG comme outil de gestion du risque a été proposé. Mais les résultats de cette étude, notamment les hypothèses de base à +3m, sont controversés et les travaux du BRGM ont permis de cartographier les aléas « surcôte marine ».

Sur les atolls, les hypothèses divergent, soit qu’elles prédisent des submersions, voire la disparition de certains atolls, soit qu’elles prédisent une adaptation de la croissance corallienne et algale venant compen-ser la remontée du niveau marin. Ainsi, d’après Salvat et Aubanel, (2002), sur la base d’une prédiction d’élé-vation du niveau de la mer de 30 cm sur une période de 30 ans, l’élévation du niveau de la mer ne devrait pas menacer l’existence des atolls. La croissance des algues calcaires du récif côté océan devrait suivre cette

nivEaux d’Exposition à l’aléa tsunami pour la polynésiE françaisE (Source : CEA)

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légère élévation. Et par ailleurs, le platier corallien devrait avoir une population corallienne plus dense par suite de sa submersion.

En revanche, la montée prévisible du niveau moyen de la mer aura pour effet de modifier les limites et le niveau de base des nappes littorales, avec transgression possi-ble des “biseaux d’eau salée”.

les imPaCts dU ChanGement ClimatiqUe sUr les réCiFs Coralliens

Le blanchissement du corail

La température de l’eau de mer sous les tropiques a augmenté d’environ 1°C dans les 100 dernières années et doit encore augmenter de 1 à 2° d’ici 2100. Or les coraux vivent à des températures très proches de leur température létale. Une très faible augmentation de température peut leur être fatale, entraînant une rupture de la symbiose entre les algues et le corail, ce que l’on appelle le blanchissement (voir chapitre « milieu marin »). A l’heure actuelle, le phénomène de blanchissement des coraux est considéré comme l’une des menaces les plus sérieuses qui pèsent sur les récifs coralliens (Hugues et al. 2003). D’après les prévisions pour les 100 années à venir, la température de l’eau devrait atteindre le seuil de blanchissement des coraux dans

tous les océans et, d’ici 2020, l’ensemble des récifs coralliens devrait subir des phénomènes de blanchis-sement annuellement.

En Polynésie, en période normale, les températures de l’eau de surface (SST), peuvent atteindre en été, 27° à l’est de la zone polynésienne et 29° à l’ouest , avec 2 à 3° de moins en hiver ; elles atteignent 26° à 25° sud et 22° à 33°sud, en été, contre 22 et 17° respectivement en hiver. L’étude de l’épisode el Nino de 1997-1998 a montré une augmentation de température des eaux de surface de 2° dans le nord de la zone polynésienne, responsable du blanchisse-ment (Martinez, 2006).

Plusieurs épisodes de blanchissement se sont produits dans les 10 dernières années en Polynésie en 1998, 2002, 2004 affectant diversement les récifs

9Les risques et le changement

climatique

Evolution annuEllE dE la tEmpératurE moyEnnE à tahiti-faaa dE 1958 à 2002 (Source : météo, atlas climatologique)

Evolution du nivEau dE la mEr d’ici 2040 (Source : East West Center)

Réchauffement climatique et flore marine de Rapa (Payri et N’Yeurt, 2005)

Les écosystèmes les plus tempérés des états insulaires du Pacifique Sud (e.g. Lord Howe, Rapa, Pitcairn, île de Paques) sont les plus vulnérables au regard de l’augmentation envisagée de la température de la mer due au réchauffement global de la planète. Ainsi, les espèces qui ont leur limite géographique de répartition au sud de l’archipel pourraient disparaître. La majorité des algueraies d’algues brunes (e.g. Stypopodium australasicum, Lobophora variegata), et d’algues rouges associées (e.g. Gloiosaccion brownii, Phaeocolax kajimurai), le long de la côte de Rapa seront affectées et pourraient disparaître au profit d’espèces indésirables, telles que l’espèce opportuniste Turbinaria ornata déjà présente au nord de l’archipel (île de Raivavae) et qui pourrait envahir la région, comme c’est le cas actuellement dans l’archipel de la Société et des Tuamotu. L’atteinte à la diversité de la flore aura des répercussions sur la faune ichtyologique inféodée aux algueraies et qui sont pour certaines des ressources clés pour les populations locales. Le suivi à long terme de ces groupes d’espèces d’affinité tempérée voire froide, permettra de détecter et de suivre les effets des changements qui s’annoncent, et un site tel que Rapa pourrait devenir un observatoire de ces changements pour la région du Pacifique Sud.

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(voir chapitre «milieux marin»).

Des chercheurs développent actuellement des études pour déterminer si les coraux scléractiniaires, organismes constructeurs des récifs, seraient capables d’une certaine adaptation à cette faible élévation de température.

l’aCidité de l’eaU

Aux problèmes de blanchissement vient s’ajouter

l’augmentation du taux de CO2 dans l’atmosphère, liée à l’effet de serre qui menace directement les récifs coralliens et toute la biodiversité océanique.

Lorsque le CO2 atmosphérique augmente, la concen-tration de CO2 de l’eau de mer augmente aussi, rendant l’eau moins alcaline et entraînant une diminu-tion de la concentration en ion carbonate (CaCO3).

Les organismes calcificateurs se développent alors plus lentement et leur squelette externe est moins

ppr dE punaauia : cartE dEs aléas « surcôtE marinE » (Source : BRGM/SAU)

Dans le corail, 23 000 ans d’histoire du climat

L’expédition Tahiti Sea Level du programme international IODP (Integrated Ocean Drilling Program) d’octobre et novembre 2005, est la plus grosse campagne de forage jamais réalisée dans un récif corallien. Avec pour objectifs la mesure de la fluctua-tion du niveau de l’océan, l’étude de la variabilité du climat et du comportement des récifs coralliens à ces changements, et ce, depuis 23 000 ans.

L’objectif de l’équipe scientifique est de recueillir le maximum d’informations sur les fluctua-tions et la vitesse des variations globales du niveau des mers dans le passé afin d’apporter des éléments pour mieux comprendre comment le réchauffement climatique global actuel pourra affecter le niveau de la mer au présent et dans l’avenir. Depuis le dernier maximum glaciaire, il y a environ 23 000 ans, le niveau global de la mer s’est élevé d’environ 126 mètres, principalement du fait de la fonte des calottes glaciaires et de la dilatation de la masse océanique globale liée à l’augmentation de la température. Les scientifiques pensent que Tahiti, située dans une zone tectoniquement stable, est particulièrement propice pour ce type d’investigations. Les variations du niveau des mers y sont uniquement attribuables aux effets globaux. Les coraux sont écologiquement très exigeants et sont particulièrement sensibles aux changements environnementaux, naturels comme anthropiques.

Ce sont donc d’excellents enregistreurs des changements passés du niveau des mers et du climat.Historique de l’évolution du niveau pour 3 zones du Pacifique Ouest (source : IODP)

Sources : Keyplas et al., 1999

Gattuso et al., 1998, 1999)

L’ensemble des océans aurait “gagné” une acidité accrue de 0,1 unité pH depuis le début du siècle dernier.

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dense. Les conséquences seraient notables à partir de 2050 où l’océan deviendrait sous-saturé pour l’aragonite, avec des effets dissolvants sur la coquille d’un grand nombre d’organismes calcaires comme les ptéropodes. La coquille de ces mollusques planctoniques est menacée. Leur disparition serait catastrophique pour les nombreuses espèces qui les consomment.

La calcification des coraux est également inhibée. D’après certains modèles, le taux de calcification des coraux pourrait décroître de 40 % d’ici à 2100 ; d’autres chercheurs prévoient une décroissance de la calcification des coraux de 22% en moyenne entre 1990 et 2100. Au bout du compte, ce sont les récifs tout entiers qui seraient menacés, et les côtes qu’ils protègent, si la croissance des coraux n’était plus assez rapide pour contrebalancer l’effet de l’érosion.

Une étude controversée, publiée en décembre 2004 dans la revue Geophysical Research Letters, concluait que les coraux pourraient au contraire tirer profit du réchauffement. En effet, si la baisse du pH tend à réduire la teneur de l’eau de mer en aragonite (et donc à ralentir les phénomènes de calcification), l’augmentation de la température de l’eau contrebalancerait cette tendance. Même si ces discussions demeurent dans la commu-nauté scientifique, l’acidification des océans est l’objet d’inquiétudes croissantes. Car elle conduit en outre à la réduction de la capacité océanique à absorber le CO2 d’origine anthropique. Plus l’océan est acide, moins il est capable d’éponger les excès produits par l’homme.

les aUtres tYPes de modiFiCations liées à el nino

L’algue brune Turbinaria ornata n’était présente que dans les îles de la Société ; depuis 1983 elle est apparue dans l’archipel des Tuamotu, au sud de Mururoa et au nord à Rangiroa, Tikehau, Makatea et Mataiva. Les analyses d’ADN n’ont pas permis de conclure quant à l’apparte-nance ou non de ces algues aux populations venant de la Société et des Australes. Les modélisations ont montré qu’en période normale, compte tenu des courants, il était peu probable que les algues de la Société puissent aboutir aux Tuamotu ; en revanche, en période El Nino et La Nina, l’extension des zones tourbillonnaires dans la région est modifiée et les algues semblent s’approcher des Tuamotu nord ; Cependant, ces modélisations ne permettent pas encore de conclure définitivement (Martinez, 2006)

Les réPonsesSuite au cyclone ALAN, en 1998, qui a fait 21 victimes, dont 15 suite à des mouvements de terrain, la mise en place d’une politique globale de prévention des risques naturels en concertation avec le Territoire, l’Etat et les élus locaux a été décidée, en 2001 pour

une durée de 4 ans, s’appuyant sur une antenne BRGM mise en place à cette occasion, (de 2003 à 2006).

Le programme ARAI et sa base de données

Le programme ARAI, développé par le BRGM en collaboration avec le Service de l’urbanisme, concer-ne l’évaluation des aléas et des risques naturels en Polynésie française avec comme finalité opération-nelle principale, l’élaboration des Plan de Prévention des Risques (PPR). Le programme s’est organisé autour de 5 axes principaux :

Collecte et structuration des données (phénomè-nes passés, cartes disponibles, données géologiques et hydrologiques, études sur les risques, …) ;

Traitement des données et production de données nouvelles (élaborer des cartes de risque, étudier des travaux de protection et définir des outils d’aide à la décision en matière d’aménagement) ;

Transcription opérationnelle : c’est à ce stade que sont élaborés les PPR ;

Pérennisation : il s’agit de définir une structure de type “Observatoire”, destinée à poursuivre les actions engagées par le BRGM ;

Valorisation des résultats ;

Pour mettre en œuvre ce programme, une base de données ARAI (BD ARAI) a été mise en place qui rassemble l’ensemble des informations, données, évènements sur les principaux aléas.

La cartographie des aléas

Les cartes des aléas sont les documents de base de l’élaboration des PPR. Ont été pris en compte et cartographiés 3 type d’aléas :

Aléa inondation

9Les risques et le changement

climatique

La base de données ARAI (source : BRGM/SAU)

Objectif : mettre à disposition de manière structurée et organi-sée des données techniques, des informations, des ouvrages… utiles pour la gestion des risques et l’élaboration des Plans de Prévention des Risques

35 tables élémentaires organisées

une structure « parent » sur laquelle se greffent les bases de données propres au projet (BD cyclones, BD houles, BD cours d’eau)

935 ouvrages référencés (dont 53 disponibles à l’observa-toire des risques)

610 évènements saisis (dont 179 dans BDMVT – mouve-ments de terrain)

98 cartes d’aléas répertoriés (hors production ARAI)

232 cartes topographiques

12200 photographies aériennes (337 missions)

20 cartes géologiques

224 photographies prises au sol

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Aléa liés aux cyclones et aux tsunamis : houle et sur cote marine

Aléa mouvement de terrain

les Plans de Prévention des risqUes PPrL’Article D.181-1 (Dél. n° 2001-10 APF du 1er février 2001) mentionne le champ d’application des PPR : « Les plans de prévention des risques naturels prévisi-bles dits P.P.R. sont destinés à délimiter des zones plus particulièrement exposées aux risques naturels prévisi-bles, tels que les inondations, les mouvements de terrain, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes, les cyclones, les raz de marée ou tsunamis ».

Le PPR a pour objet la réalisation d’un zonage régle-mentaire ; par zone de risque, il réglemente les utili-sations et l’occupation du sol. Il édicte notamment les prescriptions ou interdictions s’appliquant aux constructions, aux ouvrages, aux aménagements ainsi qu’aux exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles. Le PPR approuvé vaut servitude d’utilité publique et est annexé au document d’urbanisme de la commune.

L’élaboration de la carte de zonage s’appuie sur l’étude des risques, sur la base de la cartographies des aléas, et des enjeux.

cartographiE dEs aléas du ppr dE punaauia (a) aléa inondation ; (b) aléa mouvEmEnt dE tErrain ; (c) voir cartE dE l’aléa houlE dans lE paragraphE « rEmontéE du nivEau marin » (Source : BRGM/SAU)

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47 PPR sur 48 ont à ce jour été prescrits en conseil des ministres : toutes les communes de Polynésie disposent en effet d’un projet de PPR exception faite de Rapa qui devrait en être pourvu dans le courant de l’année 2007. Aux Tuamotu, seul le risque « houle » a été pris en compte dans les PPR.

Le plan de zonage identifie 4 types de zones :

Les zones rouges sont les zones où les niveaux d’aléas sont les plus forts (surcotes marines, mouvement de terrain et inondation). Dans ces zones, il convient de prendre les mesures permettant de ne pas augmenter la population et les biens exposés. Le principe est donc d’y limiter au maximum la constructibilité et de prendre les mesures permettant d’améliorer la sécurité des personnes déjà présentes.

Les zones bleues sont les zones où les niveaux d’aléa sont considérés comme moyens à forts (mouvements de terrain, inondations et surcotes marines). Dans ces zones les aléas naturels ne menacent pas directement les vies humaines en raison de leur niveau ou de leur caractère prévisible. Il convient cependant de prendre des mesures parti-culières non définies par les règlements généraux afin de limiter le risque pour les biens et de préserver la sécurité des personnes présentes.-

Les zones vertes sont les zones où les niveaux d’aléa sont considérés comme faible à moyen

Les zones non colorées (aléa nul à faible) ne font pas l’objet de règles particulières.

La commune de Punaauia a été choisie comme zone test et le plan développé en concertation étroite avec la mairie et les différents services du Pays (Service du développement rural, Ministère et direction de l’Equipement, Ministère et direction de l’environnement…). Il a été définitivement achevé techniquement en mars 2006.

9Les risques et le changement

climatique

L’étude des aléas mouvements de terrain sur Tahiti

A Tahiti, la majeure partie des glissements observés sur la zone d’étude est d’origine anthropique et largement liée à l’urbanisation, et notamment la construction de lotissement de plus en plus en altitude. Parmi les problèmes rencontrés, certains sont liés au remblaiement de talweg, à des remblais mal compactés, à des murs de soutènement mal dimensionnés, non drainés ou non ancrés, ou encore à des terrassements excessifs.

La tendance est à la construction de lotissements à des altitudes de plus en plus élevées ; afin de ne pas accroître les risques de glissements de terrain, un certain nombre de mesures sont à prendre non seulement au niveau des constructions mais surtout au niveau des voies de communication, dans les pentes menant aux plateaux construits. En effet, de nombreux glissements de bords de route ont été observés sur la zone d’étude, glissements liés à la nature des talus, à des problèmes de drainage ou d’érosion superficielle sur des talus non végétalisés.

L’étude conclut que dans tous les cas, que ce soit en zone d’aléa moyen ou fort, des études géotechniques de dimensionnement, préalables à tout nouvel aménagement, doivent être conduites.

Aléas, enjeux et risques

Le risque résulte de la confrontation d’un aléa avec un ou plusieurs enjeux. On entend par aléa la manifestation d’un phénomène naturel dangereux, caractérisé par sa probabi-lité d’occurrence (décennale, centennale,…) et l’intensité de sa manifestation (hauteur et vitesse de l’eau pour les crues, magnitude pour les séismes, largeur de bande pour les glisse-ments de terrain,…).

L’enjeu est l’ensemble des personnes et des biens suscepti-bles d’être affectés par l’événement.

Source : Règlement provi-soire du PPR de la com-mune de Punaauia

Les risques technologiques

Les principaux risques sont les risques de pollution marine par hydrocarbures, (le plan POLMAR date de 1982), d’explosion et d’incendie liés aux dépôts importants d’hydrocarbures et les risques d’inonda-tion résultant de la rupture des barrages des micro-centrales hydroélectrique.s

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Les données essentieLLes

Les Points essentieLs et Les évoLutions 1996-2006

risqUes natUrels

Plusieurs évènements ont marqué la décennie :

10 cyclones, dont un particulièrement destructeur (Alan, 1998)

3 tsumamis, dont 1 issu de Polynésie et 2 du Pérou

Au moins 4 mouvements de terrain très importants

Des avancées très importantes dans la connaissance des risques grâce au programme ARAI et création d’une base de données (BD Arai) recensant l’ensemble des évènements et de très nombreux documents

Des cartes des aléas réalisés pour l’ensemble des communes

47 PPR sur 48 ont à ce jour été prescrits en conseil des ministres

0 PPR approuvé

plan dE zonagE du ppr dE punaauia (Source : BRGM/SAU)

Source 1996-2006

Evolution du nombre total d’évènements ayant eu un impact notable Météo10 cyclones, 3 tsunamis

4 mouvements de terrain importants

Nombre total d’évènements liés à des risques technologiques

Nombre de PPR prescrits ( sur 48 ) SAU 0 47

Nombre de PPR approuvés ( sur 48 ) SAU 0 0

Coût annuel engendré par les dommages 22 milliard FCFP

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ChanGements ClimatiqUes

Des risques de remontée du niveau de la mer de plus forte occurrence des tempêtes, fortes houles et cyclones tropicaux, de réchauffement de la mer et de blanchissement corallien. Par leurs caractéristiques géographiques, les plaines côtières des îles hautes mais surtout les atolls sont vulnérables aux phénomènes climatologiques extrêmes. Les risques de surcotes marines ont été pris en compte dans les PPR.

Plusieurs épisodes de blanchissement se sont produits dans les 10 dernières années en Polynésie en 1998, 2002, 2004 affectant diversement les récifs. Les risques de blanchissement des coraux suite à l’élévation de la tempéra-ture des océans sont accrus . D’après les prévisions pour les 100 années à venir, la température de l’eau devrait atteindre le seuil de blanchissement des coraux dans tous les océans et, d’ici 2020, l’ensemble des récifs coralliens devrait subir des phénomènes de blanchissement annuellement.

Aux problèmes de blanchissement vient s’ajouter l’augmentation du taux de CO2 dans l’atmosphère, liée à l’effet de serre, qui menace directement la calcification des organismes marins, dont les coraux, et donc les récifs coralliens.

Risques également de modification des limites du niveau de base des nappes littorales, avec transgression possible des “biseaux d’eau salée”.

9Les risques et le changement

climatique

Photos : Phénomène de hou-le australe dans les Tuamotu (Crédit : © IRD, B. Marty)

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