LES PREMIERS ENREGISTREMENTS - HEMU...Le complément de cette étude est le travail de recherche de...
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LES PREMIERS ENREGISTREMENTS
DES
24 PRELUDES OP. 28 DE CHOPIN
(ENTRE 1920 ET 1948)
PAR
BUSONI - CORTOT- LORTAT - KREUTZER
KOCZALSKI - PETRI - RUBINSTEIN - MOISEIWITCH
ETUDE COMPARATIVE
PAR
JEAN-FRANÇOIS ANTONIOLI
HEMU VAUD VALAIS FRIBOURG
HAUTE ECOLE DE MUSIQUE DE LAUSANNE
2017
INSTITUT DE RECHERCHE EN MUSIQUE ET ARTS DE LA SCÈNE
HAUTE ECOLE SPECIALISEE DE SUISSE OCCIDENTALE
HES-SO DOMAINE MUSIQUE
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1
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS ................................................................................................................... 2
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 4
L’OPUS 28 PRESENTE PAR LES PIANISTES EN TANT QUE CYCLE ............................. 6
QUELQUES DATES HISTORIQUES D’EXECUTIONS COMPLETES ................................ 8
VERSIONS INTEGRALES ENREGISTREES AVANT 1950 ............................................... 11
AVERTISSEMENT CONCERNANT LES ENREGISTREMENTS DES 24 PRELUDES op.
28 PAR BUSONI ..................................................................................................................... 15
ETUDE SYSTEMATIQUE ...................................................................................................... 20
PRÉLUDE n° 1 .......... 20
PRÉLUDE n° 2 .......... 24
PRÉLUDE n° 3 .......... 28
PRÉLUDE n° 4 .......... 32
PRÉLUDE n° 5 .......... 36
PRÉLUDE n° 6 .......... 40
PRÉLUDE n° 7 .......... 44
PRÉLUDE n° 8 .......... 48
PRÉLUDE n° 9 .......... 52
PRÉLUDE n° 10 ........ 56
PRÉLUDE n° 11 ........ 60
PRELUDE n° 12 ........ 64
PRÉLUDE n° 13 ........ 69
PRÉLUDE n° 14 ........ 75
PRELUDE n° 15 ........ 78
PRELUDE n° 16 ........ 86
PRÉLUDE n° 17 ........ 91
PRELUDE n° 18 ........ 97
PRELUDE n° 19 ...... 102
PRELUDE n° 20 ...... 106
PRELUDE n° 21 ...... 110
PRÉLUDE n° 22 ...... 116
PRÉLUDE n° 23 ...... 121
PRÉLUDE n° 24 ...... 125
QUELQUES REFLEXIONS DE SYNTHESE SUR L’APPORT DE CHAQUE
INTERPRETE ........................................................................................................................ 130
ANNEXE I .............................................................................................................................. 150
ANNEXE II ............................................................................................................................ 151
ANNEXE III ........................................................................................................................... 167
ANNEXE IV ........................................................................................................................... 172
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................. 174
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2
REMERCIEMENTS
Certains documents ont été particulièrement difficiles à dénicher. Ainsi, chercher des
informationssurLeonidKreutzer,pianisteaujourd’huipresqueoubliéenEurope,ainsique
sesenregistrementsquine sontplusdistribuésdepuis longtemps,ne futguèreaisé.C’est
finalementau Japon,à l’UniversitédesArtsdeTokyo (appeléeaussiGeidai),où se trouve
déposé le fondsNozawa,dunomd’unmusicologuecollectionneurquidétenaitencore les
exemplairesd’époque(78toursdelaNipponColumbia),qu’ilaétépossibled’yaccéder.Je
voudraisdoncremercierM.KazunoriYamanaka,directeurdelabibliothèquedel’Université,
ainsi que ses deux conservateurs, Mme Akio Ohtahara et M. Tomoyo Nishiyama, pour
l’extrêmeamabilitéetladiligencedontilsontfaitpreuveenmerecevantpourécouterles
documentsoriginauxenoctobre2016;ettoutparticulièrementMmeHiromiLinnarsonnée
Ina, pianiste, quim’amis en contact avecMadame Yukiko Hagiya, disciple deNozawa et
musicologue auteure d’une biographie toute récente consacrée à Leonid Kreutzer
(http://www.amazon.co.jp/dp/463692830X/)ainsiqu’avecM.IsaoHorota,bibliothécaireet
passionnédemusique,d’avoirbienvouluconfectionneràmonintentionunreportsurCDde
cesprécieuxenregistrements.DesremerciementsvontégalementàM.Pierre-YvesTribolet,
ancien directeur de l’Union Européenne de Radiodiffusion, pour les premières recherches
auprèsdelaradioNHKdeTokyo,quandbienmêmecelles-cisesontavéréesinfructueuses.
Demême,obtenircopiedes24PréludesdeChopindansl’éditionUllstein(révisiondeLeonid
Kreutzer)parueàBerlinen1924(en4volumes)n’apasétéplusfacile.Jeremerciedonctout
particulièrement M. Paolo Boschetti, musicologue et bibliothécaire scientifique à l’HEMU
pour ses recherches incessantesdedocumentationdansdespays aussi diversque l’Italie,
l’AllemagneoulesEtats-Unis.
Jeneremercierai jamaisassezJean-JacquesEigeldinger,professeuréméritede l’Université
deGenève,MembreduComitédelaSociétéChopindeVarsovieetmoninterlocuteurpour
l’autrevoletdecetterecherche,celuiconsacréauxquestionséditoriales,pourleslongueset
régulièresconversations,toujoursimmensémentenrichissantes,surunsujetinépuisable.
Jeremercieaussideuxdemescollèguesdudépartementdepianodel’HEMU,PascalGodart
et Christian Favre, pour les échanges fructueux et la mise à disposition de certains
documents,ainsiquelesséancesdetravailquiontpermisdeprésenterauxétudiantsdenos
classesrespectivescertainsdesaspectslesplussurprenantsdecesenregistrements.
Enfin je remercie l’IRMAS (Institut de Recherche en Musique et Arts de la Scène) et le
Directeurgénéraldel’HEMU,M.HervéKlopfenstein,dem’avoiraccordésaconfiance,ainsi
que Mme Angelika Güsewell, coordinatrice de la recherche, pour son assistance dans
l’établissementdestravauxpréliminaires.MareconnaissancevaégalementàMmeTiziana
Franchi(Turin)pourl’assistanceinformatiqueàlamiseenpages.
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3
QUELQUES PHOTOS
PRISES AU JAPON EN OCTOBRE 2016
A L’UNIVERSITE DES ARTS DE TOKYO,
EN ENQUETANT SUR LEONID KREUTZER
Figure1
AVECMMEHAGIIYA,BIOGRAPHEDELEONIDKREUTZER
Figure2
AVECLESCONSERVATEURSDUFONDSNOZAWA
Figure3
SEANCED'ECOUTECOLLECTIVE
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4
INTRODUCTION
L’objectif de cette recherche est de confronter, sur la base des tout premiers
enregistrementsintégrauxdes24Préludesop.28,lerapportdeshuitinterprètesauxtextes
musicaux dont ils disposaient. Il s’agit de tenter de reconstituer la succession des
événementsaufildesparutionssuccessives,afindecomprendrecommentlespianistesont
abordécesœuvres,enontfaçonnélaconsciencequenousenavons.
Inès TaillandierGuittard, dans sa thèseAlfred Cortot interprète de Frédéric Chopin1,parle
opportunémentdeladifficultéàdéfinirletextemusicalàprendreenconsidération.Carque
faut-il choisir comme partition authentique: le manuscrit? l’une des premières éditions
(française, allemande ou anglaise)? une partition annotée de la main du compositeur?
Autrementditquelstadedelacompositionfaut-ilconsidérercommelebon?AcesujetJohn
Rinksouligneeneffetque l’œuvredeChopinpeutêtreenvisagéesous l’angledu«work in
progress».Endépitdetoutletravailphilologiqueeffectué,ilparaîtimpossiblededéterminer
quelleversionprévaut;car«pourChopin,postérieurn’estpasnécessairementsynonymede
meilleurmaisdedifférent2»
Auvudecequiprécède, laprésenterecherche,siellesedoitd’allerchercher l’originede
certainsdétailsd’exécutionrelevésdansleséditionsdisponibles,n’apas,strictosensu,une
fin musicologique. Elle vise plutôt à retracer les étapes qui, dans la conscience des
interprètes, contribuèrentàdéfinir leur compréhension intimede l’œuvreet,par-delà,du
monde sonore si particulier de l’auteur; certaines indications ont pu revêtir des sens
différentsselonlestraditions,lesculturesetlesépoques.
Ladémarcheestchronologique,partantdel’enregistrementdeBusoni(1920)jusqu’àcelui
de Moiseiwitch en 1948, soit cent ans après la mort de Chopin et 110 ans après la
compositionducycle.N’ontétéretenuspourl’étudesystématiquequelesenregistrements
intégraux; denombreux enregistrements depréludes isolés oude florilèges existent (une
liste les mentionne mais celle-ci ne saurait être exhaustive, tant furent nombreuses les
compagnies qui éditèrent des rouleaux. Un inventaire s’avèrerait tâche aussi ardue
qu’indéfinimentprolongée).
LecomplémentdecetteétudeestletravailderecherchedeJean-JacquesEigeldingersurles
premières éditions des 24 Préludes et celles qui ont suivi (jusqu’au début du XXe siècle).
1TAILLANDIERGUITTARDInès,AlfredCortotinterprètedeFrédéricChopin,(Thèsededoctorat),UniversitéJeanMonnet,SaintEtienne2013.2 RINK, John, «Work in progress», l’œuvre infini(e) de Chopin, dans EIGELDINGER, Jean-Jacques, (éd.)InterpréterChopin,actesducolloque,CitédelaMusique,Paris,25-26mai2006,Paris:MuséedelaMusique,CitédelaMusique,2006.p.83.
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5
pour la présente étude, les éditions suivantes ont été consultées pour tenter de trouver
l’originedesdiversesvariantesremarquéesdanslejeudesinterprètes:
• Manuscrit,Cracovie,PWM1951
-Premièreséditions:
• Catelin,Paris,1839
• Breitkopf&Hærtel,Leipzig,1839
• Wessel,Londres1839
• Lucca,Milano1840
-Editionscritiques:
• HermannScholtz(1845-1918),Peters,Leipzig,1879
• KarlKlindworth(1830–1916)Berlin,Bote&Bock,1880
• TheodorKullak(1818–1882)Berlin:Schlesinger'scheBuch-undMus.,1882,NewYork,G.Schirmer,1882.
• CarlMikuli(1819-1897)NewYork:G.Schirmer,1895,réédition1915.
• RaoulPugno(1852–1914)Vienne,UniversalEdition,1905environ
• RafaelJoseffy(1852-1915)NewYork,G.Schirmer,1915.
• ClaudeDebussy(1862-1918)éditionclassiqueA.Durand&fils1915.
• LeonidKreutzer(1884-1953)UllsteinVerlag,Berlin,1924
• AlfredCortot(1877-1962),éditionsMauriceSenart,Paris1926.
• AlfredoCasella(1883-1947),Milan,Curci,1947
• Muzyka,Moscou,sansdate.Lesmouvementsmétronomiquesn’ontpasététoujoursmesurésetmentionnés. Ils’avèresouventimpossibledelesétablirdufaitdelaductilitédulangagedeChopinetdel’approchedesinterprètes.
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L’OPUS 28
PRESENTE PAR LES PIANISTES EN TANT QUE CYCLE
LesPréludesn’ontpastoujoursétéenvisagésentantquecycle.Certes,Chopinlesapubliés
au nombre de 24 et dans le fameux ordonnancement par tonalités selon le cycle des
quintes; il faut néanmoins attendre assez longtemps pour voir des interprètes enchaîner
touteslespiècesenconcert.
Onsaitqu’aucoursdescentansquisuivirent lamortdeChopin(1849), laviemusicale, la
pratiqueinstrumentale,lesusagesduconcertontconsidérablementévolué.Lesconcertsse
donnaientrarementsousformederécital,bienqueLisztait inaugurésapratiqueen1839.
Jusquevers1870environ,lesconcertssedonnaientdemanièrevariée;onnecraignaitpas
le mélange des genres et il pouvait y avoir alternance entre musique d’orchestre, de
chambrevocaleetsoliste3.
OnsaitaussiqueChopinajouéunsoird’octobre1839toussesPréludesàMoschelesetà
Meyerbeer.Lorsqu’ilenprésentaenpublicdanssonconcertdu21avril1841,suscitant le
commentaire de Liszt resté célèbre, ce fut un florilège dont on ne connaît pas la
composition4.Demêmepourd’autresdesesraresconcerts-onsaitqu’iljoualen°15le21
février1842àParis(SallePleyel),circonstancedontparlevonLenzdansdes lignesrestées
célèbres5puisquelquespréludesle16février1848àParis(SallePleyel);unseulPréludele
27septembre1848àGlasgow(Merchant’sHall)etle4octobre1848àEdinburgh(Hopetoun
Room).
Attesté par l’ouvrage de George Kehler6, Charles Valentin Alkan (1813-1888) joue à Paris
(SalonsErard)lesn°15,19et24le19février1874.
Liszt,dontlesleçonssouventdonnéessurcertainspréludes,furentamplementdécritespar
plusieurs de ses élèves, n’a joué en public de Chopin, le plus souvent, qu’une ou l’autre
Mazurka,oualorsdesEtudes.
SonélèveRafaelJoseffyenjoualesn°7,8et15àBostonen1880.
Sesprochesenont jouéquelques-unsçàet là,telHansvonBülowle19novembre1874à
Hastings, (MusicHall) ou le 10décembre 1874 àGlasgow (Queen’s Room);mais lorsqu’il
3GOULD,John:Whatdidtheyplay?:thechangingrepertoireofthepianorecitalfromthebeginningsto1980.Themusicaltimes,vol.146,no.1893(winter,2005),pp.61-76.4BELOTTI,Gastone:ChopinTurin,EDT,1984.
5LENZ,Wilhelmvon:Lesgrandsvirtuosesdupiano:Liszt,Chopin,Tausig,Henselt,souvenirspersonnels,textesréunisetadaptésparJ.-J.Eigeldinger,Paris,Flammarion1995.6KEHLER,George:Thepianoinconcert(page19)MetuchenN.J.etLondres,TheScarecrowpress,1982.
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7
présenteunprogrammeentièrementconsacréàChopin,commele7avril1875àLondres
(StJamesHall),seullen°13estprésenté.
Le grand Anton Rubinstein, dans son panorama de la littérature pianistique en 7
programmes, joualesn°4,7,6,15et24àNew-Yorken1873et les4,7,17,6,15et24à
Vienneen18857.
D’innombrables exécutions partielles eurent lieu pendant longtemps. Elles n’ont d’ailleurs
jamaiscessé,bienquel’usagesoittombéprogressivementendésuétude.
Parmicelles-cionpeutmentionner:
René Chansarel (1899, Paris), Raoul Koczalski, (1892, Leipzig) et (1893, Berlin) Ossip
Gawrilovitch(1898),FannyDavies(1904),MarkHambourg(Milan1906),ErnovonDohnanyi
(1907,Budapest),GottfriedGalston(1908),TinaLerner(1908,Londres),MauricyRosenthal
(1913,Milan),WilhelmKempff(1919,Copenhague),FriedaKwast-Hodapp(1926,Milan).
En 1933,Myra Hess joua à New-York et à Londres les n° 1,4,8,16,15,23,24, intercalant le
Préludeop.45-quinefaitpaspartieducycle-entrelesn°8et16!
Pendant longtemps,Wilhelm Backhaus fit précéder d’autres morceaux de Chopin par un
Prélude de l’op. 28 dans le même ton; ainsi pouvait-on entendre, comme sur certaine
gravurededisque,le1erPréludeop.28précédantla1èreEtudeop.10;maisaussi,commeà
Budapest en 1911: lePrélude en la b op. 28 précède l’Impromptu en la b op. 29; ou au
JordanHalldeBoston(1912)lePréludeenlabprécèdelaBalladeenlabop.47ouencore
auTownHalldeNew-York(1922):lePréludeenfamajeurprécèdeleNocturneenfamajeur
puislaBalladeenfaop.38.
Figure4
PREMIERPRELUDEETPREMIEREETUDEPARWILHELMBACKHAUS
7RATTALINO,Piero:PianistieFortisti(p.24)Milan,Ricordi/Giunti1990.
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8
QUELQUES DATES HISTORIQUES D’EXECUTIONS
COMPLETES
Lepremierpianisteayantprésentél’œuvreintégraldeChopinsembleavoirétéEdouard
Risler8(1903),suiviparRobertLortaten19119.
Figure5
EDOUARDRISLER
MaisilsembleraitqueFerruccioBusoniaitétélepremieràjouerlecyclecompletdel’opus
28dansdesprogrammesde conceptionmodernequi tranchaient radicalement avec ceux
des concerts traditionnels, lesquels étaient ordinairement composés de petites pièces, de
mouvements isolés ou d’extraits. Ainsi, le 5 mars 1889, son programme à Helsinki ne
présenterienmoinsqueles12Etudesop.10,les24Préludesop.28etles12Etudesop.25!10. Il rejouera l’op. 28 d’innombrables fois jusqu’à la fin de sa vie, notamment à Berlin
(Beethovensaal)le24janvier1907etle27mars1908),àMilan(SocietàdelQuartetto)le10
avril1908,àHelsinki(YiliopistonJuhlasalissa)le29octobre1912,àMoscou(GrandeSallede
l’AssembléedesNoblesdelaRussie)le19octobre1912.
Quelquestempsplustard,lediscipledeLiszt,ArthurFriedheim(1859-1932)jouel’op.28à
Londresen1898.11
Parlasuite,onpeutreleverlesexécutionshistoriquessuivantes:
• RichardBuhlig(1880-1952):New-York(MendelssohnHall),16novembre1907.
• MariePanthès(1871-1955):Berlin,BechsteinSaal,1907.
• CellaDelavrancea(1887-1991):Munich,1911.
• HenrikMelcer(1869-1928):Varsovie,1912.
• WesleyWeyman(1877-1931):Londres,1912.
• LeopoldGodowski(1870-1938):Vienne(27novembre1911);Milan(7décembre1913).
8KEHLER,George:Thepianoinconcert.MetuchenN.J.etLondres,TheScarecrowpress,1982.
9NECTOUX,Jean-Michel,GabrielFauré,Lesvoixduclair-obscurParisFayard2008.
10RATTALINO,Piero:PianistieFortisti(p.31)Milan,Ricordi/Giunti1990.
11KEHLER,op.cit.
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9
• WalterGieseking(1895-1956):Hannover(Konservatorium),printemps1915,poursonépreuvedefin
d’études;Rome,1925.
• RobertLortat,(1885-1938):New-York(AeolianHall),2novembre1916.
• LeonidKreutzer(1884-1953):Berlin(Beethovensaal),19octobre1918.
• AlfredCortot (1877-1962):New-York(AeolianHall),11novembre1918;Philadelphie,1918;Londres,
1920;Milan,1924et1933.
• PaulRoes(1889-1955):Bâle,Casino,1919.
• AlexanderBrailowski(1896-1976):Paris(SalledesAgriculteurs)4mai1921.
• DirkSchaefer(Hollande,1873-1931):Berlin,BechsteinSaal,1921.
• EgonPetri:Cracovie,StaryTeatr,1922.
• PaulLoyonnet(1889-1988)Rome,1922;etMilan,1923.
• MieczslawMunz:(1900-1976):CarnegieHall,New-York,1923.
• JosefSlivinski:Cracovie,StaryTeatr,1923.
• VictorSchioler(Danemark,1899-1967):Copenhague,1924.
• FranzWagner(?):DenHaag,1925.
• JanSmeterlin(Pologne1892-1967):Paris,1926.
• ZbigniewDrzewiecki(Pologne,1890-1971):Cracovie(StaryTeatr),28mars1926.
• BennoMoiseiwitch:Rome,SocietaFilarmonicaRomana,1931.
• NicolaiOrloff(1892-1964):TownHall,New-York,1931.
• JosefHofmann(1876-1957):New-York,18décembre1927,1936.
• IrmeUngar:Cracovie,StaryTeatr,1936.
• AlexandreGeorges(1850-1938):Paris,(SalledesConcertsduConservatoire),14novembre1928.
• MieczyslawHorszowski(1892-1993):Berlin,1930;Basel,1939.
• JosefLhévinne(1874-1944):New-York,1933.
• IgnazFriedmann(1882-1948):New-York,CarnegieHall,1935;Vienne,1937;Cracovie,1938.
• EdwinFischer(1886-1960):Rome,FilarmonicaRomana,1937.
• LeoNadelmann(1913):Bâle,1937.
• GunnarJohansen(1906-1991):Chicago,1938.
• FrancisMoore(1886-1946):TownHall,New-York,1938.
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10
• StanleyHummel(1908-2005):New-York,1938.
• VladimirPadwa(?):TownHall,New-York,1941.
• SusiDressler-Narbeshuber(1904-?):Vienne,1941.
• GeraldTracy:New-York,TownHall,1942
• ArturRubinstein:Toronto,1946
• CordeGroot(1914-1993):Copenhagen,1948
• RudolfSerkin:New-York,CarnegieHall,1948
• GuiomarNovaes:TownHall,New-York,1949
• JoanRowland:TimesHall,New-York,1949
Onvoitdonc,enconsultantcettelisteindicative,quiétaientlesartistesquiévoluaientaveccerépertoiredanslemondeinternationalduconcert.
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11
VERSIONS INTEGRALES ENREGISTREES AVANT 1950
FerruccioBUSONI(1920):
Enregistréle7juillet1920
Lieu:Londres,NewBondStreet(studio3èmeétage)AeolianCompany.
Système:AeolianDuo-Art,13rouleauxnumérotésentre014à040.
Ingénieur:ReginaldReynolds.
Pianod’enregistrement:Weberde7pieds(voirphoto).
Editéàl’origineparAeolianpuisparFoné
Figure6UNERECLAMED'EPOQUEVANTANT
LESPIANOSWEBER
Figure7BUSONIETREYNOLDSDURANTL'ENREGISTREMENT
AlfredCORTOTI(1926):
Enregistréles22marset4avril1926
Lieu:Hayes,Middlesex(UK)StudioA.
Son:GeorgeDillnut&EdwardFowler.
Piano:Steinway?
Editéàl’origineparHMV
rééditéparWarnerClassics,2012.
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12
RobertLORTAT(1928):
Enregistréle5mai1928
Lieu:Paris,
Columbia(LX355)9568.
Ingénieur:nonmentionné.
Piano:nonmentionné.
Edité à l’origine par Columbia (France)rééditéparDanteàlafindesannées1990.
AlfredCORTOTII(1933-34):
Date:le5juillet1933etle20juin1934
Lieu:Londres,AbbeyRoad,Studio3.
Ingénieur:nonprécisé
Piano:Steinway?
Editéàl’origineparHMV
RééditéparWarnerClassics,2012.
LeonidKREUTZER(1938):
Date:inconnue
EnregistréàTokyo
Ingénieur:nonprécisé
Piano:Steinway?
Editéàl’origineparNipponColumbia
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RaoulKOCZALSKI(1939):
Enregistréles10et12juin193912
Lieu:BerlindanslesstudiosdePolydor/DGG
Ingénieur:Ehrlich
Piano:Bluethner?
Editéàl’origineparPolydor,
PuisDG675005-09,
CDsurSelene
EgonPETRI(1941-1942):
Enregistréendiverses sessions le2 juillet etle4août1941,le24juin1942
Lieu:New-York,LiederkranzHall
Ingénieur:nonmentionné
Piano:Steinway&Sons(?)
Editéàl’origineparColumbia,
rééditéparAppianPublications
AlfredCORTOTIII(1942):
Enregistréle2décembre1942
Lieu:Paris,StudioAlbert.
GramophoneW1541/4
Ingénieur:EugèneRavenet
Piano:Pleyel?
Edité à l’origine HMV, réédité par WarnerClassics,2012.
12D’aprèsMarstonRecords.
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14
ArthurRUBINSTEIN(1946):
Enregistréles10,11et20juin1946
Lieu:New-York,RCAStudio2.
Ingénieur:nonmentionné
Piano:Steinway&Sons
Edité à l’origine par Victor et aussitôt reprispar HMV, disponible dans The ArturRubinstein Collection (94 CD, volume 16).ReparudanslacollectionNaxos.
BennoMOISEIWITSCH(1948):
Enregistré les29et30décembre1948et20septembre1949
Lieu:Londres,AbbeyRoadStudion°3HMV
(C3905-06et3907-08)
Ingénieur:HaroldDavidson
Piano:Steinway&Sons(?)
Editéàl’origineparHisMaster’sVoice,reprisdanslacollectionTestament
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AVERTISSEMENT CONCERNANT LES ENREGISTREMENTS
DES 24 PRELUDES OP. 28 PAR BUSONI
Pour diverses raisons, il semble presque impossible de ne pas inclure dans cette étude
l’enregistrement intégral de Busoni, quand bienmême celui-ci fut réalisé sur rouleaux et
non, comme les autres document, avec la technique qui allait suivre, l’enregistrement
électriqueenvued’unepublicationen78tours.Commeiladéjàétémentionnéplushaut,il
estplausiblequeBusoniaitétélepremierpianisteàinscrirelecyclecompletdel’opus28à
sesprogrammes.Ilajouéles24Préludesjusqu’àlafindesavie,lesconsidérantcommele
plushautpointdelaproductiondeChopin.Maissoninterprétationaété,depuistoujours,
trèscontroversée.VoicicequeditRubinsteindansle1ervolumedesesmémoires:
FerruccioBusoni,avecsonbeauvisagedeChristetsatechniquediabolique,étaitdeloin le
pianiste vivant le plus intéressant. Lorsqu’il jouait Bach, son toucher mystérieux pouvait
reproduiretantôtlessonoritésd’unorgue,tantôtcellesd’unclavecin...(…)sonBeethovenet
son Chopin, je l’admets, me laissaient de marbre. (…) Son Chopin, toujours brillant
techniquement, perdait cette chaleur et cette affabilité qui sont si significatives dans ses
pages.Enrésumé,jediraisqueBusoniétaitunepersonnalitésurprenante,unexemplepour
tous les musiciens; en tant qu’interprète il n’acceptait aucun compromis et comme
compositeurilsesituaitàunniveautrèsélevé;duresteildisposaitd’unerareet immense
érudition13.
ClaudioArrauenparleéloquemmentdanssesentretiensavecJosephHorowitz14:
Les Préludes de Chopin par Busoni étaient incroyables. Ce n’était pas l’habituel Chopin
parfumé.Maisc’étaittrèsbeau.Unpeuchoquant,certes,maissiexcitantetinédit…
On a été jusqu’à dire que Busoni n’avait pas de réelle affinité avec Chopin. Et pourtant,
jusqu’en1900,Busonienajouédanslaplupartdesesprogrammes;illuiamêmeconsacré
des récitals entiers comme -par exemple-l’imposant contenu du 31 janvier 1900, à la
BeethovenSaaldeBerlin15:
Sonateop.35-Etudesop.25-Balladeop.23-Nocturneop.62-Nocturneop.48-
Balladeop.52-Barcarolleop.60-Impromptuop.36-Polonaiseop.44-Polonaiseop.53
13RUBINSTEIN,Arthur:Lesjoursdemajeunesse,Paris,RobertLaffont,1976.
14HOROWITZJoseph:Arrauparle,conversationsavecJosephHorowitz,Paris,Gallimard,1985.
15KEHLER,op.cit.
-
16
Siparlasuite,pourdesraisonsquinesontpastrèsclaires,lesœuvresdeChopinsontmoins
présentes dans les programmes de Busoni, elles ne disparaissent pas pour autant. On a
énormément commenté son approche du texte musical qu’il s’approprie littéralement,
n’hésitantpasàréécrirecertainsdétails,àen intellectualiser la lecture,à leurdonnerune
dimensionpresquemétaphysique.
Le9 juillet1920,soitdeux joursaprès l’enregistrementdesPréludes,Busoniécrivaitàson
futurbiographeEdwardJ.Dent:
PourcequiestdeChopin,ilestvraiqu’ilrésistevictorieusementavecletemps;maislechoix
desesœuvressefaitdeplusenplusrestreint.Sesdansesdisparaissent,ainsiqu’unegrande
partiedesNocturnes.Pourmoi, sonœuvreprophétiqueestconstituéepar les24Préludes,
quicontiennentlegermedetoutcequisuivit-demanièreplusoumoinsdéveloppée.
Dansuneautre lettrede1922àsonamiparisien IsidorePhilipp,pianisteetprofesseurau
Conservatoire,ilécrit16:
Chopinmihaattrattoerespintopertuttalavita;etroppospessohosentitolasuamusica:
prostituita,profanata, involgarita.Eun’isolettaattornoacui leacquesalgonosemprepiù,
sinchénonsenesporgonochedueotrecime:gliStudieiPreludieforse,leBallate.
Aucoursdesavie,BusoniaenregistrédesPréludesdeChopinendiversescirconstances:
• PourWelte-Mignon(16mars1907)àFreiburg-in-Breisgau:
-Préluden°15
• PourLudwigHupfeldàLeipzig,le30mai1908(seuledatedontonaitconnaissance) :
-Préludes4-5-6-7-8-9(Ceux-cisont-ilsperdus?Onneparvientpasàselesprocurer)
16RODONI,Laureto:Toutesupérioritéestunexil,LeLettereaIsidorPhilipp.Rome:ISMEZ,2005.
-
17
-Préludes11-12-14-17-18-21
-Prélude24
CesenregistrementsapparurentenPhonolaetAnimatic(entre1909et1916),
Phonoliszt(dès1911),enfinenTri-Phonola(dès1928environ)
• Pour lamaisonAeolianCompany(systèmeDuo-Art)NewBondStreetàLondres(petitstudioau3
ème
étage)le7juillet1920:
-Enregistrementintégral(en14rouleauxdont1dontonaperdulatracesansque
manqueunprélude).
• PourColumbia(enregistrementélectrique):Londres,27février1922
-Préluden°7enlamajeur(avecl’Etudeensolbmajeurop.10n°5)
Matricen°75060.2(avecmention:«take1rejected»)[la1èrepriseayantété
éliminée].
-
18
Dans le livre d’Antonio Latanza17, tout le processus de ces sessions est reconstitué; on y
trouve décrites -avec une grande clarté- les différences techniques des méthodes
d’enregistrement(Welte,Hupfeld,Aeolian)ainsiqueleurchronologie,ycomprisdeparution
etderéédition.OnyapprendqueBusoniaccueillitd’abordavec intérêt lespossibilitésde
reproductionsonore,orientéqu’ilétaitversl’inconnuetanticipantsurlefuturjusqu’àlafin
de sa vie. Ses encouragements prodigués à Schönberg, son intérêt -dont témoigne une
correspondancequivade1920àsamortenjuillet1924-quantàladémarchedechercheurs
(JörgMageretGeorgSchünemann),visantlaconstructiond’uninstrumentdivisantl’octave
entiersdeton,sontbienconnus.Iln’hésitadoncpasàsignerdesdéclarationsd’admiration
pourlesystèmeWelte(juinetoctobre1905puisjuin1907)puispourlamaisonHupfeld(mai
1908)etmêmeDuca18(mai1912).
Malheureusement, l’enregistrement intégral desPréludes parBusoni -qui pourrait êtreun
documenthistoriquedepremièreimportance-esttotalementdéconcertantdeprimeabord.
Celui qui s’attend à la révélation d’un art suprême ne manquera pas d’être horrifié par
instants, pour des raisons qui ne tiennent pas seulement aux retouches du texte par
l’interprète ou à la répétition non écrite d’une section. Il s’avère que cette réalisation a
cruellement pâti d’une absence de collaboration avec le technicien, Reginald Reynolds. Il
fautsavoirtoutd’abordquecederniern’approuvaitpaslechoixd’enregistrerlesœuvresde
Chopin,préférantlesauteursdontlenomcommenceparB:Bach,Beethoven,Brahms19.Or
un important travail de ce qu’on appellerait aujourd’hui editing, consécutif à
l’enregistrement, était indispensable pour régler divers aspects, dont la vitesse de
déroulement (qui pouvait passer de 90 tours à 110 par minute), la pédale, les nuances,
certainesattaquesplusmarquées,et lesrapportsdedosageentre lesregistres.OrBusoni,
lassé par l’insatisfaction ressentie à chaque enregistrement –tous eurent lieu dans les
dernièresannéesdesonexistence-voulutéviterdepasserdenombreusesheures sur ces
tâches et obtint de la maison Aeolian, par contrat, d’en être dispensé. Tout le matériel
résultantdesséancesfutdoncremisautechnicienReynoldsquis’acquittadesatâcheenne
pouvants’appuyerquesursonseulniveaudecompréhensionmusicale.
Les enregistrements antérieurs pourront certes constituer une ressource permettant de
relativisercertainsaspects,commeonleverraplustard.Celapermetdeconfirmercertaines
constatationsetaussidecomprendrequelatechniqued’enregistrementdePianolaDuo-Art
étaitloind’êtresatisfaisante,notammentsurleplandelasimultanéitédesattaquesdansles
accords et aussi dans le débitmusical qui apparaît souvent claudiquant, voire heurté. Les
pédalesoriginalesdeChopinsemblentn’êtrequasiment jamaisvraimentprisesencompte
parBusoni.Lesnuancesonpeudereliefdanscetterestitution.
17Latanza,Antonio:FerruccioBusoni,Realtàeutopiastrumentale,AntonioPellicani,Rome,2002.
18CrééparPhilips.
19LATANZA,op.cit.
-
19
Maisdéjàlesenregistrementsréalisésen1908nesemblentpasavoirététrèsexaltantspour
Busoni,commeentémoigneunelettreàsafemmeécriteaulendemain(30mai):
BeidiesemnervösenZustandvongestern,warendieStundenFahrenundSpieleneine
schlechteKur.AlsichnämlichamsogenanntenBerlinerBahnhofinLeipzigausstieg,gingich
direktzurPhonola...AlsichdortfürdasfestgesetzteHonorardasProgrammgespielthatte,
mehreineZugabe,einZeugnisausgestellt,2Photographienunterschrieben,Godowskyund
michselbstinderMaschineangehörtundnochzueinerphotographischenAufnahme“ander
Phonola”gesessen,wares1/25Uhr,alsorundsechsStundenseitichdenAnhalterBahnhof
verlassen.Beidem“drückenden”Wetter,Resultat:Kopfweh.DasZeugnis,dasichzu
unterschreibengebetenwurde,warschonfertig“getippt”undlautete:“Ichhaltedie"DEA"
fürdieKronederSchöpfung”.-Ichsagte:daswürdemirkeinMenschglauben,undschrieb
natürlicheineigenes...20
L’attitudedeBusonifaceautextedeChopinposeproblème,particulièrementàlalumière
decequ’écrivaitAntoineMarmontel,danssonlivreLesPianistesCélèbres21:
Soitprofondamourdel’art,soitexcèsdeconsciencepersonnelle,Chopinnepouvait
souffrirqu’ontouchâtautextedesesœuvres.Lapluslégèremodificationluisemblaitune
fautegravequ’ilnepardonnaitmêmepasàsesintimessansenexcepterLisztson
admirateurfervent.(…),jesouffraisàlapenséedeblesserlecompositeurquiconsidéraitces
altérationscommeunvéritablesacrilège.
20FerruccioBusoni:Briefe[1895-1923]anseineFrau.Hg:F.Schnapp,Zürich,Rotapfel1935.
21Marmontel,Antoine:LesPianistesCélèbres,Paris,ChaixetCie,1878.
-
20
ETUDE SYSTEMATIQUE
PRÉLUDE N° 1
enutmajeur
Agitatoà2/8
Danslamêmetonalité:Etudesop.10n°1et7,Rondoàdeuxpianosop.73,
Mazurkaop.68n°1
ÉgalementAgitato:1erthèmedelaSonateop.35,CodadelaBalladeop.38,
sectioncentraleduNocturneop.62n°2
Parusenenregistrementsséparés22:
1907 Schelling,Ernest (1876-1939) Suisse/USA avecn°21 Welte1908 Backhaus,Wilhelm (1884-1969) Allemagne avecEtuden°1 ?1926 Backhaus,Wilhelm (1884-1969) Allemagne avecEtuden°1 Gramophone1931 Radwan,Augustede (1867-1957) Pologne/France avecn°3,24 Ultraphone1931 Levitzki,Misha (1898-1941) Pologne? avecn°7,23 Gramophone1933 Elinson,Iso (1907-1964) Russie/GB isolé ColumbiaAllemagne1934 Backhaus,Wilhelm (1884-1969) Allemagne avecEtude1 Gramophone1937 Kreutzer,Leonid (1884-1953) Russie avecn°3,6,15,20 NipponColumbiaJapon1941 Chasins,Abraham (1903-1987) USA avec3 Master-ClassRecordingsUSA1945 Foldes,Andor (1913-1992) Hongrie/CH isolé ContinentalUSA1945 Orloff,Nikolai (1892-1964) Russie avecn°2,3,4 Decca1946 Schioler,Victor (1899-1967) Danemark avecn°3,7,16,22,23 TonoDK
Cepréludeest l’undesplusdélicatsàenvisagersousl’angledel’interprétationcarsisanotation
est trèsclaireapriori, il recèleunemultituded’enjeux; l’interprètedoit fairedeschoixcruciaux
quantàlabattue,àl’accentuation,àl’équilibredesvoixetàlagestiondel’élan.Plusieursauteurs,
dontlestextessontcomplémentaires,onttentéd’enpercerlessecrets:GiorgioPestelli23 ,Narcis
Bonet24,RaoulKoczalski25.
1FERRUCCIOBUSONI1920(0:41aveclareprisenonnotéeparlecompositeur)
Chaque mesure paraît contractée sur elle-même, comme sous l’effet d’un stretto presque
spasmodique; lesmesures se succèdentavecdepetits interstices. Telle sembleêtre la logiquede
22Pourcequiestdel’inventairedesenregistrementsisolés,jesuisredevableaulivredePanigel-Beaufils:
L’œuvredeF.Chopin,Discographiegénérale.Paris,EditiondelaRevuede Disques,1949ainsiqu’àdiversessourcesdontleCHARMCentrefortheHistoryandAnalysisofRecordedMusic,quiestunpartenariatentretroisuniversités(RoyalHolloway,UniversityofLondon,King’sColledgeLondon)etl’UniversityofSheffield,ainsiqu’aucataloguecompletWelte,consultableenligne:http://www.welte-mignon.de/kat/index.php?action=List%20of%20WELTE%20MIGNON%20Piano%20Rolls&spracheZumLesen=english.23PESTELLIGiorgio:SulPreludioop.28no1(ActaMusicologica,1991Vol.LXIII).
24BONET,Narcís:Questionssurlepremierpréludedechopinin
Teoria.comhttp://www.teoria.com/res/pdf/articles/bonet/QUESTIONS_PRELUDE_CHOPIN.pdf.25KOCZALSKI,Raoul:FrédéricChopin,Conseilsd’InterprétationParis,BuchetChastel,1998.
-
21
l’agitatopratiquéparBusoni.Lavoixmédianenevibreréellementquesurlesmesures5et6oul’on
remarquelesappogiatures.Onneperçoitpasderéelledifférenced’écrituresur18-19et20(pouces
sur le temps). A 25, Busoni reprendda capo et cette fois-ci le stretto indiqué entre 17 et 20 est
nettement plus perceptible. Curieusement, Wilhelm Backhaus avait enregistré à Londres le 19
octobre 1908 une version «préludante» à la 1ère étude op. 10 endomajeur, avec exactement le
mêmeplan,soitenrépétantlesmesures1-24unedeuxièmefoisavantl’enchaîneraveclasectionde
25àlafin.Ilrécidiverale30octobre1933pourHisMaster’sVoice(voiravertissement).L’originede
cetusageprovientdeKleczinsky:DasPréludeinC-durmusszweimalgespieltwerden,dasersteMal
mitweniger, das zweite imMittelteilmit grösserer Eile. Gegen das Endewird dieGeschwindigkeit
geringer26.
1ALFREDCORTOT1926(0:36)
Danscetteversion, l’agitato est rendupar laduréevariabledesnotesdupoucede lamaindroite
(voixmédiane) au sein du phrasé construit par périodes de 8mesures. C’est la voixmédiane qui
conduit le tout, sauf de 29 à la fin, où intervient une décélération assortie d’appuis sur les
contretemps. La voix supérieure est discrète, la basse également. La pulsation est à un tempspar
mesure, onneperçoit pasundeuxième temps. Lapériodequi vade9 à 16est pluspressante au
départavantdecédersur14-15-16avantunstrettoabrupt,perceptiblesurtoutsur17et18. Ilya
peudedifférenceentre lesmesures25-26et27-28. Lesdeuxdernièresmesures sontégrenéeset
tenuesparlesdoigts,sanspédale.Lacoïncidenceentrepouceetbasseà18,19,20puis23,25et26
n’estpascomplète.
1ROBERTLORTAT1928(0:33)
Lestroisniveaux(basse,mediumetvoixsupérieure)sontpresqueàparité,sauf lorsdustrettodès
17;lanuancemezzofortevautdoncpourchaquevoix.Chaquegroupedemaindroiteestquasiment
arrachésursadernièrenote.Laphrasedehuitmesuresfléchitsurlesdeuxdernières.Laconduitede
la basse est peu perceptible, non seulement en raison des contraintes de la technique de
reproduction sonore de l’époquemais aussi parce que l’interprète ne prend pas le temps de les
installer ni de les dilater. 27-28 se présentent en écho à 25-26. La décélération finale est presque
régulière.L’agitatoestrenduparlefluxdesgroupesdenotessurchaquemesure.
1ALFREDCORTOT1933(0:38)
Cortotrestefidèleàsesoptionsde1926;toutauplusprend-ilunpeuplusdetempsçàet là:à la
mesure1,àlafindechaquepériode(15-16,24,32).Ledernierminerésonnepasdanslespectrede
lamesureprécédente.
26KLECZINSKY,Jan:Chopin’sgrössereWerke(Breitkopf&Härtel,1898),p.27.
-
22
1LEONIDKREUTZER1938(0:48,duréelapluslongue)
C’estlaversionlapluslente;letexteyapparaittrèsétiréetchaloupétoutàlafois.Lanuancemezzo
forteperdure,ycomprisà25oùunpianoestpourtantnoté.Lepoucedelamaindroitenecoïncide
pasaveclabasseà18,19,20,23,25et26,ainsiquede29à32.Lafinestenrésonnancespectrale.
1RAOULKOCZALSKI1939(0:35)
Dans ses conseils publiés, Koczalski voit dans ce premier prélude un préambule d’une tendresse
infinie.Ilditnotamment:Chopin,enécrivantagitato,avouluindiquersimplementl’expressiondece
morceaumaisnonlemouvement.Onferadoncmieuxdelejouerplutôtlentementetdemodérerla
sonorité.Nous sommes ici les témoinsde l’insuffisancedes indicationsdonnéesparChopin et déjà
mentionnéeparKarolMikuli27. L’agitationestdueàunprocédédestringendo/allargandopolarisé
par lemilieu de chaquemesure. Il s’agit donc d’une pensée à un temps légèrement subdivisé. Le
débutesttrèslarge,lesdeuxpremièresmesuresaffirmentlabasse.Lestroisniveaux(basse-medium
etsuperius)restentrelativementégauxjusqu’austretto.A29,lesdodelavoixsupérieuresonttrès
légers,nullementappuyés;lapédaleestenlevéeenlibérantlesdeuxdernièresdouble-croches.
1EGONPETRI1942(0:36)
LedébutestassezprochedelaversionCortotde1926maisenmoinsardent;ilyalàquelquechose
de plus placide. Le stretto, très actif, n’en est que plus agissant. La nuance piano de 25 ne se
remarquepas.Entre29et32,ladécélérationestassezneutre,sanspointd’appuisurledodelavoix
supérieureetsansl’effetdepédaleindiqué(libérationdesdeuxdernièresdouble-croches).
1ALFREDCORTOT1942(0:35)
Ils’agitvisiblementdumêmeprojetqu’en1933maisavecpeut-êtreunpeuplusdenatureletune
présenceaccruedelalignedebasse.Latechniqued’enregistrementyest-ellepourquelquechose?
1ARTHURRUBINSTEIN1946(0:45)
C’estenfaitlaseuleversionàdeuxtemps,quivadanslesensdecequepréconiseNarcisBonetdans
son analyse28. C’était déjà l’optionpriseparRosenthal dans sonenregistrementde1929. Lepoint
d’appuiest ici,systématiquement, lavoixsupérieure;avecunarrêtsur lemilieude lamesure.Les
coïncidencesentrepouceetbassesonttrèsexactes,lesmesures25-26s’opposentà27-28,mêmesi
l’indicationpianoneseremarquepasvraiment.L’avant-dernièremesureesttrèsdécélérée.
1BENNOMOISEIWITCH1948(0:29)duréelapluscourte
Lepoucede lamaindroite est ici ressenti comme le véritablepremier temps, la basse semble en
levée.Lanuancemezzoforte tendau forte.Toute lapageest jouéed’unseul jet,Lescoïncidences
27KOCZALSKI,Raoul:FrédéricChopin,Conseilsd’InterprétationIntroductionparJean-JacquesEigeldingerParis,
BuchetChastel,1998.28http://www.teoria.com/res/pdf/articles/bonet/QUESTIONS_PRELUDE_CHOPIN.pdf.
-
23
entrebasseetpoucenesontconstatéesqu’à23,25et26;maisilyatellementpeud’espaceentre
lesdeuxdoublescroches!
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°1:
• Lapulsationest-ellepenséeàunouàdeuxtemps ?
• Parquelmoyenl’interprètetraduit-ill’indicationagitato ?
• Y-a-t-il coïncidence des basses et des pouces de la main droitequand il y a lieu et
inversement ?
• Lesmesures22-23-24sont-ellescomprisesendiminuendoousempreforte ?
• Quelestl’usagedelapédaledanslesdernièresmesures ?
• Y-a-t-ilrésonancespectraledesdeuxdernièresmesures ?
QUESTIONSEDITORIALESPOURN°1:
1) Au lieu du mezzo forte original, à la mesure 1, les éditions Breitkopf 1839, Kullak et
Klindworth fontapparaître l’indicationdenuance : forte, (avantunsoufflet sur3et4,puis
piùfortesur6etenfinmenoforteà9pourcedernier):Mikulirestefidèleaumezzoforte.
2) Auxmesures18-19-20,oùdans l’original lepoucecoïncidepourcesmesuresavec labasse
(cequiestlecasdepresquetoutesleséditionstellesqueMikuli,Joseffy,Debussy,Breitkopf
Pugno),l’éditionBreitkopf1878(assuméeenl’occurrenceparLiszt)faitapparaîtreenossiale
textedeChopinetmaintientconstamment le rythme initialdans le texteprincipal!Cortot
quipublieletexteoriginalindique-àtort-queMikuliferaitlecontraire,parunenoteenpied
depagedesonédition:Dansl’éditionMikuli,lerythmesyncopéinitialestconservéaucours
decestroismesures);orilconfondMikuliavecLiszt…KullakditqueBreitkopfpoursuitdans
lanotationdespremièresmesures,cequin’estentoutcaspasexactpourl’éditionoriginale
de1839; dans l’éditionde1878, lesdeux versions apparaissent.Dans l’éditionUllsteinde
LeonidKreutzer, lepoucenecoïncide jamaisavec labasse, reprenant le textearbitraireet
fautifdeLiszt.
3) A22-23-24:ces3mesuresportent l’indicationnonoriginaledecrescendodans leséditions
Ullstein/Kreutzer,Joseffy,Kullak,Klindworth,Pugno,Scholtz(avecunsouffletsur3mesures)
Kullak (soufflet sur 2 mesures). Cortot fait de même mais pour les mesures 23 et 24
seulement.DansBreitkopf1839,lecrescendoseprolongejusqu’à24etl’indicationstrettode
17nes’ytrouvepas;defactolepianode25seraainsicompriscommeunenuancesubite.
4) A29-30-31-32,lesignedefindepédaleestplacédediversesmanièresdansleséditions:au
milieude lamesuredansBreitkopf1839,sur l’avant-dernièredouble-crochedansd’autres,
sur la dernière double-croche de la main droite pour d’autres encore…sous la dernière
double-croche.
-
24
PRÉLUDE N° 2
enlamineur
Lentoà
Danslamêmetonalité:Etudeop.10n°2,Valseop.34n°2,Mazurkaop.67n°4
EgalementLento:Préluden°13,Valseop.34n°2,Etudeop.25n°7;Mazurkaop.63n°2
Parusenenregistrementsséparés:
1907 Zadora,Michaelvon (1882-1946) Pologne avec4,9,13,22 Welte
1924 Chernikoff,Vladimir (1882-1940) Russie/France) isolé Columbia
1945 Orloff,Nikolai (1892-1964) Russie avec1,3,4 Decca
L’expressionpolyphoniquedesdouble-notesdelamaingauche,sadéambulation,l’écritureélargie
posentdenombreuxproblèmesàl’exécutant.Quelrapporty-a-t-ilentrelesdeuxénoncés,enmi
mineurpuisensimineur?FrankMartin,lorsqu’ilécrirason3èmePrélude(dédiéàDinuLipatti)en
1948saurasesouvenirdel’écrituresiparticulièredecettepage.
2FERRUCCIOBUSONI1920(1:50)
Tout-oupresque-estnimbédepédaledanscetteversionclairementpenséeallabreve,dontlecours
fluctueçàetlà.Lesnotesenpetitscaractèressontrenduesdemanièrediscrètementlyrique,quand
bienmêmeellesnesontpastoutestraitéesàl’identique,certainesétantplusbrèvesqued’autres.A
3,5et15ladernièrecrochedelamesureestfortementprolongée.Onconstateunecésureentre7
et 8, soit avant de passer à la proposition en simineur. Lamesure 6 est pensée à 4 temps (pour
détaillerrythmiquementavantdereconquérirlemouvementallabrevepuisd’élargirfortementlors
deladeuxièmemoitiéde7.Entre18et19, lescrochessontcommerelancées.Lefa (ronde)de16
resteseulaprèsl’extinctiondelamaingauche,suspendu,avantdepoursuivreenmonodie.A21,les
accordsnerépètentpaslesnotesdesiautantausopranoqu’en-dessous.Seuleslestiercesmobiles
sont entendues. L’avant-dernier accord est arpégé de bas en haut; le dernier accord n’est pas
arpégé.
2ALFREDCORTOT1926(2:05)
Labattueestclairementà4tempsenunfluxrégulierdecroches.Lepianistesoigne lapolyphonie
(explicitée par Chopin au moyen d’une graphie indiquant qu’il y a croisement des voix) mais les
rencontresdessolenoctavesonnentplustenduesquelereste.L’entréedelamaindroitealeson
plombéd’unvéritableglas.Lesnotesenpetitcaractèresontvocalisées,étiréesetorganiséescomme
deux doubles croches. L’exposé de 8 (simineur) est plus intense. Cortot brise parfois les doubles
notes de samain gauche, souvent lesmains ne sont pas simultanées. Le soufflet de 11 n’est pas
réalisébienqu’ilsoitimpriméentrelesdeuxsystèmesdanssonéditiondetravail);parcontrecette
mesureestjouéeriten.A12ilmanquelesdeuxièmeettroisièmetemps.Lamesure13,présentéeen
nuancemeno,estaussiincomplète.Entre16et17ilyasuspensionmalgrélaliaisonsur5mesures.
Lapédaleoriginalede18manque.Alafin,l’arpégésurmivadelanotelaplusgraveàlaplusaigüe.
-
25
L’indicationsostenutonesemblepasserefléterparticulièrementdansl’exécution.Lepointd’orgue
estinexistant.
2ROBERTLORTAT1928(1:48)
La polyphonie est prise en compte. Les deux premières mesures s’organisent en un
stringendo/allargando. Les notes en petits caractères sont traitées en levée de la suivante. Le
décalagedesmains est presque constant. CommeCortot, Lortat confèreun sonde glas à lamain
droite.Lamesure8(deuxièmepropositionautondeladominante)n’estpasdansuneintensitéqui
diffère de ce qui précède. A 11, le soufflet indiqué semble se refléter plutôt a posteriori dans
l’évolutiondelamaingauche.Mêmeconstatà16.A19,lapauseestécourtée.L’arpègementsurle
mipart,commechezCortoten1926,depuislanotelaplusgrave.
2ALFREDCORTOT1933(2:16)duréelapluslongue
C’estsensiblementlemêmeprojetqu’en1926,toutefoissanslestempsmanquantsde12et13!Le
souffletde11estpeuperceptible.Lamesure17survienttoujoursaprèsunesuspension;cequisuit
est plus étiré qu’en 1926. A 14 et 15, puis 18 et 19, les notes graves fa et mi ressortent
particulièrement.Onconstateunecésureavantl’arpègementdel’avant-dernièremesure.
2LEONIDKREUTZER1938(1:56)
Lamaingaucheestclaudicante, lessolprennent l’aspectd’unesyncopeoffrant résistance.Tout le
parcours est très fluctuant, tantôt accélérant (13, début de 14) tantôt retardant (fin de 16). On
constatepeudedécalagesentrelesmains.A7,Kreutzerdiminueetralentitpouratteindrel’exposé
ensimineur.Lesouffletde11n’estpasprisencompte.A18,leslentandon’estpasperceptible.Le
dernieraccordn’estpasarpégé.A19,lapauseestécourtée.Lepointd’orguedelafinestinexistant.
2RAOULKOCZALSKI1939(1:25)duréelapluscourte
Iciils’agitclairementd’unCbarré(allabreve):Koczalskiconduitlediscoursàdeuxtemps.Ledébit
est régulier, les décalages entre main gauche et main droite sont fréquents. La polyphonie est
soignée. Lesnotesenpetit caractère sont en levéede la suivante. Lamesure8estdans lamême
nuance que ce qui précède. Lesmesures 16 et 17 s’enchaînent sans la suspension pratiquée par
Cortot.Lapédalede18estpriseencompte.Lediminuendonotéde13à18sevoitinterrompuà16.
Lesdeuxsouffletssontperceptibles,surtoutà11.Onperçoitl’indicationsostenutoparuneintensité
rehaussée.Lesarpègementsdelafinsonttrèsserrésetenrythme.
2EGONPETRI1942(1:35)
Peut-être inspiré par Koczalski, Petri tient compte du et adopte un tempo plus rapide que la
plupart de ses collègues. Il ne pratique pas les décalages entre les mains mais ralentit en fin de
période.Lesouffletde11nes’entendpas.A13,aulieud’undiminuendo,ilyaplutôtaugmentation
del’intensité.16-17sontenchaînées,sanssuspension.Lesnotesenpetitscaractèressontenlevée
-
26
mais vocalisées. Le slentando est observé. La pédale originale également. Le sostenuto ne se
remarquepasparticulièrement.L’arpègementestconformeàlanotationoriginale.
2ALFREDCORTOT1942(2:01)
Cetteversionest trèsprochedecellede1933.Cequi ladistingueest lesointoutparticuliermisà
conduirelediminuendoquivade13à18.
2ARTHURRUBINSTEIN1946(1:52)commeMoiseiwitch
Rubinsteinconduitsonpréludeà4temps(àlanoire).Ledébitestrégulier,moinsrapidequedansles
versionsdeKoczalskietPetri.Iln’yapasdedécalages.Danslapériodeensimineur,lamaindroitese
faitplusintense,presquecuivrée.Lesouffletn’apparaîtpas.Lediminuendoquicommenceà13n’est
agissant que depuis le fa grave aumilieu de lamesure 14. Les notes en petits caractères sont en
levéeetplutôtserrées.Lesostenutonesemblepasseremarquer.L’arpègementestavantletemps.
A 14, on entend un si # au lieu d’un si ♮ sur la dernière croche. 16 et 17 s’enchaînent sans
suspension.Lapédaleoriginalede18-19n’estpaspriseencompte; lepointd’orguede la finnon
plus.
2BENNOMOISEIWITCH1948(1:52,commeRubinstein)
Moiseiwitch pense à la noire et semble moins soucieux de polyphonie que de faire amplement
sonnerdesquintesàvidecaverneuses,exaltéesparunepédalegénéreuse.Lanuanceestquasiforte
au début puis più dolce dès 8 (si mineur). Les notes en petit caractère sont en levée serrée. Le
souffletde11estprisencompte.Leslentandoesttraitéenrinforzando.A20,piùpiano,cequifait
apparaître lesostenutoparcontrasteaveccequivientd’êtrejoué.Lamesure17estforte.A19, la
pause est couverte par la résonance de ce qui précède. L’arpègement de l’avant-dernièremesure
partdelanotelaplusgravemais,commedansl’enregistrementdeKreutzer,Moiseiwitchplaquele
dernieraccord.
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°2:
• Labattueest-elleà (allabreve)ouàlanoire ?
• Lapolyphonie(voixcroisées)est-elleexpriméeauplansonore?
• Ya-t-ildifférenced’intensitéà9,etsiouidansquelsens?
• Lessouffletsde11et16sont-ilsperceptiblesetdequellemanière?
• Commel’indicationsostenutosemanifeste-t-elle?
• Commentestorganisélediminuendode13à18?
• Commentleslentando(18)est-iltraduit?
• Laseulepédaleoriginale(18-19)est-elleobservée?
-
27
• Depuisquellenotedel’accordl’arpègementa-t-illieu?
• Ledernieraccordest-ilplaquéouarpégé ?
QUESTIONSEDITORIALESPOURN°2:
1) Lapolyphoniede lamain gaucheestnotéeparChopindemanièreexplicitedans lesdeux
premièresmesuresenfaisantsecroiserlesvoix,cequisevoitparladirectiondesqueuesde
chaquecroche.Ceciestvisibledansla1èreéditionBreitkopf1839(reprisparPugno,Debussy,
KreutzeretCortot)maispasdans la1èreéditionfrançaise(A.Catelin)de lamêmeannéeni
dans la 1ère édition anglaise (Wessel) de 1840. La notation polyphonique n’apparaît ni
dansMikulinidansJoseffy.
2) Lesnotesenpetitscaractèresprésentesà5,10,17et19apparaissentparfoisassortiesd'un
trait (non original) qui barre la hampe de la croche, suggérant une exécution serrée
(acciaccatura).C’estlecasdeBreitkopf,Kullak,Pugno,Joseffy,Debussy,Pugno,Kreutzeret
Cortot(danscederniercasavecconseild'exécutioncommedeuxdoublescroches).
3) De14à19setrouveunelongueliaison,cequiestlecasdansBreitkopfetMikuli.Parcontre,
dansKullak, Joseffy,Debussy,Pugno,KreutzeretCortot,unenouvelle liaison commenceà
17.
4) Seules deuxmesures (18-19) contiennent une indication de pédale, dans le texte original
(repris par Breitkopf Mikuli Joseffy Debussy Pugno Cortot). Mais Ullstein/Kreutzer fait
d’autrespropositions.Pugnoproposeunepédaleàlafin.
5) Toutesleséditionsn’indiquentpasl’arpègementdel’avant-dernieraccord,parexempleles
1èreséditionsCatelinetWessel(reprisparJoseffy,Debussy,Cortot).
-
28
PRÉLUDE N° 3
ensolmajeur
Vivaceà
Danslamêmetonalité:Andantespianatoop.22,Nocturneop.37n°2,Mazurkaop.50n°1
EgalementVivace:Préludes11et19,Etudeop.25n°5etn°8,Valseop.34n°3
Parusenenregistrementsséparés:
1918 Avani-Carreras,Maria (1872-1966) Italie/USA avec6 Welte1927 Bowen,York (1884-1941) GB avec20et23 VocaltonGB1928 Kartun,Léon (1895-1981) France isolé OdéonFR1929 Pachmann,Vladimirde (1848-1933) Ukraine avec6 Gramophone1930 Hambourg,Mark (1879-1960) Russie avec6,7,15puis17 Gramophone1931 Brailowski,Alexander (1896-1976) Ukraine avec6puis15 Polydor1931 Radwan,Augustede (1867-1957) Pologne/France avec1et24 Ultraphone1933 Niedzielski,Stanislas (1905-1975) Pologne avec3 Gramophone1936 Rosenthal,Moritz (1862-1946) Pologne avec6et7 Gramophone1937 Kreutzer,Leonid (1884-1953) Russie/Allemagne/Japon avec1,6,15,20 NipponColumbia1939 Bor,Hilda (1910-1993) Angleterre isolé Columbia1940 Stary,Liesl (?) Autriche/Inde avec16 HMV1941 Chasins,Abraham (1903-1987) USA avec1 Master-ClassRec1945 Orloff,Nikolai (1892-1964) Russie avec1,2,4 DeccaGB1946 Schioler,Victor (1899-1967) Danemark avec1,7,16,22,23 TonoDK1949 Scheyne,Mikhail (?) USA avec4,13,22 AllegroUSA1949 Spagnolo,Paolo (1930-2012) Italie avec4,6,7,10,14 Cetra
Lemotifdelamaindroiteest issudescrêtesquiaffleurentdanslamaingauche.Ceprélude,qui
portel’indicationleggieramente(sic)necontientaucuneindicationdepédaled’origine.
3FERRUCCIOBUSONI1920(1:33avecreprisenonnotéeparlecompositeur)
L’écoute de cet enregistrement conduira à un constat plutôt surprenant: les deux mesures
d’introduction(soitlepremiermotifdemaingauche)sontaunombredetrois;idemà27,avantde
reprendredacapo!
Pensée à C barré, la main gauche ne vise pas l’égalité absolue mais plutôt une impression de
tourbillonnement.Lefluxn’estdoncpasstrictementréguléetimpressionneparsonélan.Lesmains
semblent peu soucieuses de simultanéité absolue: est-ce dû à la technique de reproduction par
rouleaux?Lamesure30estdupliquée.L’avant-dernieraccordestarpégédebasenhaut;ledernier
n’est pas arpégé. Busoni récidive donc puisqu’il s’agit du même traitement qu’à la fin du 2ème
Prélude.
3ALFREDCORTOT1926(0:56)
L’exécution est clairement à , leggiermente comme indiqué par l’auteur. Tout est ici volubile,
frémissant, jaillissant; c’est dû àune réactivationpermanentede l’élan; nous sommesà l’opposé
d’unasservissementmécanique.Lamaingauche,enrobéed’unepédaleparcimonieuse,atteintàune
-
29
bellemaîtrisedufluxetduson.Lesnotessol-si-mi-résedistinguentdufluxgénéral;ellesaffleurent
délicatement.A11,Cortotcèdelégèrement,avantderéactiverà12(commeilleferaaussià26);à
16,ladouble-noteenintervalledetritonestbrisée;suitunépanchementà17,presqueà4temps;
élargi sur 24-25-26; le soufflet de 18 n’est pas pris en compte. Les arpègements vont du grave à
l’aigu,delamaingaucheàlamaindroiteetnonparallèlement,voiresimultanémententrelesmains.
3ROBERTLORTAT1928(0:50)
Trèsrapide,Lortatmetmanifestementtoutesonambitionàfairepreuved’unedextéritéaccomplie;
ilenrésulteunactequisembleplussportifquepoétique.Lesattaquesde7etde9sontfortement
accentuées. Le soufflet de 18 n’apparaît pas. Il cède à 25. CommeCortot, Lortat arpège entre les
deuxmainsetrenforcelesongravesurledernieraccord.
3ALFREDCORTOT1933(0:59)duréelapluslongue
Mêmeprojet,sensiblement,qu’en1926.PourtantCortotsembleéprouverdeladifficultéàmaîtriser
lesongénérépar lamaingauche; ilsepeutque leréglagede l’instrumentde1933nesoitpasde
natureàfavoriserl’égalitéetlecalibragedesdouble-croches.De20à26,unegrandeattentionest
accordée au timbre du superius; le débit perd en volubilité. L’arpègement finalmélange plus les
deuxmainsqu’antérieurement.
3LEONIDKREUTZER1938(0:58)
La main gauche de Kreutzer est bien dominée; elle vise l’égalité autant dans le débit que dans
l’émission. A 7-8-9-10, les accords de main droite sont posés en prenant le temps d’évaluer la
pressionquisiedàleursfonctionsharmoniquesrespectives.Lesoufflets’entendclairement,Kreutzer
estl’undesraresquirendjusticeàcetindice.Lorsdelarepriseàdeuxmains(28-31)l’égalitésonore
estmoinsbiendominée.Kreutzerrajouteunsolgraveavantledernieraccord.
3RAOULKOCZALSKI1939(0:56)
Koczalski débute ici avec fort peu de pédale; il y en aura pourtant de plus en plus jusqu’à la fin.
L’exécutionsembleunpeuproblématiqueicioulà,particulièremententre28et31,lorsdesdoubles
croches où les deuxmains sont à l’unisson. Koczalski brise le triton de 16 comme l’avait déjà fait
Cortot avant lui. Les arpèges de la fin sont serrés et rigoureux, sans point d’orgue.Durant tout le
morceau, les anacrouses en double-croche semblent soucieuses de chanter, ce qui affaiblit leur
vivacité.
3EGONPETRI1942(0:53)
L’exécutionesticitrèsdominéeetassurée,sanstoutefoisquel’onseprenneàsongerspontanément
à l’indicationvivace. Il ya réactivationdu tempoà12;à17et18,Petridiminueetnesemblepas
avoir vu de soufflet dans son édition. A 20, les accords sont arpégés. De 28 à 31, un soin tout
particulier est accordé à l’alchimie sonore de cette reprise à deux mains: l’usage de la pédale,
-
30
intermittent, permet de faire moduler le son lors de ses déplacements en divers registres.
L’arpègementfinalesteffectuésimultanémentauxdeuxmains.
3ALFREDCORTOT1942(0:58)
Dans cette nouvelle version, la vivacité est certes moindre qu’en 1926 mais les intentions n’ont
généralement guère changé. La réalisation est problématique: Cortot oscille entre le quasi senza
pedaleetunepédaleplusabondante;àchaquefoisqu’ilrecourtàcettedeuxièmemanière,leson
pâtitd’unsurcroîtd’expansionindésirable,peut-êtreamplifiéparlesmicrophones.
3ARTHURRUBINSTEIN1946(0:49,duréelaplusrapide)
Très à l’aise dans cette écriture, Rubinstein semble avancer sans avoir à se préoccuper. Il rend
sensible la variété de la pression harmonique, opposant les mesures 8 (accord parfait) et 10
(septièmededominante). Ilpratiquequelquesalanguissementssur lesdouble-crochesà11,17et
25.Lesouffletde17-18n’estpasprisencompte, ilyaclairementdiminuendo.Entre28et31,son
briosemblequelquepeutourneràladémonstrationsportive,cequinuitaudiminuendo.Lesaccords
delafinsontserrés,lesmainssemélangeant.
3BENNOMOISIEWITCH1948(0:54)
Cetteexécutionnereflètepasprécisémentl’indicationoriginale: leggieramente.Lesanacrousesen
double-crochessonticitrèsincisives.Moiseiwitchopposeluiaussilesaccordsde8etde10(moins
fortsurcettedernièremesure).CommeKreutzer,iltientcomptedusouffletde17-18etnediminue
pas. Il arpège l’accord de 21. A 31, le diminuendo est bien venu; mais pourquoi isoler par une
articulationlederniersonsidecequiprécède?A32,l’arpègementestsubitopiùforte;unebasse
estrajoutéeàladernièremesure.
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°3:
• Lapulsationest-elleà ouà4noires?
• Commentl’indicationVivaceest-ellerestituée?
• Leggieramente(sic):letoucherl’est-il?
• Ledébitdesdouble-crochesest-ilmesuréouflexible,égaloujaillissant?
• Y-a-t-ildifférenciationentrelesdeuxcasharmoniquesquesont8et10?
• Perçoit-onlesouffletà17-18?
• L’unissonàdeuxmainsprivilégie-t-ill’unedesmains?
• Arpègementfinal:commentest-ilréalisé?Debasenhaut,simultanémentauxdeuxmains?
-
31
QUESTIONSEDITORIALESPOURN°3:
1) Certainséditeurs(commeKullakouScholtz)publient l’indicationCplutôtque (soit:alla
breve).
2) Cortot,plutôtquel’accentcouchésur3,placedestiretssurlesdeuxpremièresattaquesde
lamaindroite.
3) Cortotplacedessouffletssur9-10;Pugnoseulementsur9.
4) A17,Kreutzerréécritlerythmedespetitesnotes.
5) A 17-18, le soufflet en crescendo conduisant à l’accord de do majeurn’existe pas dans
l’éditionCatelinnidansKullak,Pugno,Debussy(quirajouteunaccentsurl'accord),Kreutzer,
Cortot.
6) Lalongueliaisonde28à32estfragmentéechezPugnoetbeaucoupd’autres.
7) Rajoutd’unepédaleàlafin:c’estlecasdeKullak,MikulietJoseffy,
8) Deuxpédalessuccessives:Kreutzer,Cortotsurdeuxdernièreslignes.
9) Breitkopf,DebussyetPugnosont fidèlesà l’originalquin’apasunseulsignedepédaleau
coursdumorceau.
-
32
PRÉLUDE N° 4
enmimineur
Largoà
Danslamêmetonalité:1erConcertoop.11,Nocturneop.72n°1,Valseposthume
EgalementLargo:Préludesn°9et20,1èreBalladeop.23(début),Sonateop.58,3èmemt.
Parusenenregistrementsséparés:
1907 Zadora,Michaelvon (1882-1946) Pologne avec2,9,13,22 Welte
1920 Hallock-Greenewalt,M.-E. (1871-1950) Syrie avec7,20 Columbia1937 Kraus,Lily (1903-1986) Hongrie isolé Parlophone1937 Mayerl,Billy (1869-1947) Angleterre avec6,20 Columbia1945 Orloff,Nikolai (1892-1964) Russie avec1,2,3 Decca1948 Stompka,Henrik (1901-1964) Pologne avec7,8 MuyaPologne1949 Scheyne,Mikhail (?) USA avec3,13,22 AllegroUSA1949 Spagnolo,Paolo (1930-2012) Italie avec3,6,7,10,14 Cetra
Une exécution non avisée ne songera qu’à la pression harmonique (verticale) de cette piècecélèbre,quifutexécutéelorsdesfunéraillesdesonauteur.Icilepoidsdifférenciédechaquevoixcompte pour exprimer la pression horizontale qui vient en compléter la réalisation, un peu à lamanièred’unquatuoràcordes.AlfredCortotfaisaitunrapprochemententrecettepageetl’Ariosodolentedel’op.110deBeethoven.
4FERRUCCIOBUSONI1920(2:09,duréelapluslongue)
Nousne sommespasalla breve, la battueest à 4 temps. Les crochesdemain gauche sontplutôt
égales,nonregroupéesparquatre.Ellessontparfoisunpeuélargiesquandsurvientunenoireà la
maindroite.Alamesure2,ilsembleyavoirunsoucid’accentuerlepremiermidemaingauche.A9,
lefluxsefaitsubitementplusallantetunpeudétaché,lemélismedemaindroiteinsistantsurréqui
estappoggiature.De10àlafinde11,retourprogressifautempo initial.A12,lederniertrioletest
trèsétiré.Lestretto,indiquédèslemilieude16(ouseperçoitunfortritenuto),n’intervientquedès
ledeuxièmetempsdenoirede17.Letempoprincipalrevientà19.Onconstateà21desaccordsde
trois sons dans la main gauche (do-mi-sol) puis des liaisons de deux en deux, à cheval sur les
changementsharmoniques.
4ALFREDCORTOT1926(1:54)
Cortotarpègelespremiersaccordsdemaingauchedechaquemesureetfaitoccasionnellementde
mêmesouscertainesnoiresdemaindroite(à3).Nombreuxsontlesdécalagesentrelesmains.A9,
lessouffletssontassortisd’unimportantallargando.A11, ilreproduit lamaingauchede10.A12,
l’avant-dernièrenotedutrioletestpenséetenuto.A13,larepriseestpiùforte.A17,lamaingauche
vauneoctaveplusbas.A19, lanoteenpetitcaractère formeavec lasuivanteungroupededeux
croches. L’indication smorz. équivaut ici à un élargissement. Lors des trois derniers accords, la
résonancedelamaingaucheestinterrompueavantterme,presqueaussitôtaprèsl’émission.Point
-
33
destrettode16à18maislesouffletde20-21estprisencompte.Lepointd’orguesurlesilencede
23nel’estpas,pasplusqueledernier.
4ROBERTLORTAT1928(1:43)
Ici les décalages entre les mains sont légion; par contre les accords ne sont pas arpégés,
contrairementà laversiondeCortot. Lesnotesenpetit caractères (11et19) sont jouéesavant le
temps,enlevée.A14-15,grandcrescendodemaingauche.Lesouffletde20-21n’esttraduitquepar
la main droite. Le point d’orgue sur le silence de 23 est omis; celui du dernier accord dure 3
blanches.
4ALFREDCORTOT1933(1:49)
Cetteversionestentoutpointsemblableàcellede1926.Seuledifférence:lestrettode16à18est
iciperceptible.
4LEONIDKREUTZER1938(1:51)
La pulsation est pensée à la noire. La levée est prise in tempo. Il n’y a pas dedécalages entre les
mains.Lesouffletde12estjouéàl’inversedelanotation,soitendiminuant.A15,lamaingauche
augmente fortement. Le stretto de 16 à 18 est pris a contrario, soit allargando. La note en petit
caractère de 19 est en levée avant le temps. Le soufflet de 21 n’est pas pris en compte. Le point
d’orguesurlesilenceestignoré,celuisurledernieraccorddure3blanches.
4RAOULKOCZALSKI1939(1:20,duréelaplusrapide)
Koczalski joueà ,nettementplusrapidementquesescollèguesétudiésprécédemment.La levée
du début est presque in tempo. Des décalages entre lesmains sont constatés assez souvent. Les
souffletsde9n’affectentpasletempo.A11,lanoteenpetitcaractère,prisesurletemps,estbrève.
Lestretto de16n’estpasprisen compte; il estpourtant sur toutes leséditions…En revanche, le
smorz.l’est,assortid’unrallentando.Lesouffletde20-21estagissant.Lesdeuxpointsd’orguesont
ignorés.
4EGONPETRI1942(1:48)
Sobre,mesuré,sansdécalages,Petriplacelanoteenpetitcaractèresurletemps,toutenluidonnant
unebrèvedurée.A15,samaingauchefaituncresc.Lestrettode16à18apparaît.Lesouffletde20-
21n’estpasprisencompte.Lepointd’orguesurlesilenceestignoré,celuisurledernieraccorddure
3blanches.
4ALFREDCORTOT1942(1:34)
Visiblementinfluencéparl’enregistrementdeKoczalski,Cortotadopteiciuntempoplusrapideque
danssesdeuxversionsantérieures.Ultérieurement,sestempide1955et1957renouerontavecles
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34
langueurs de 1926… Pour le reste, tout est semblable, si ce n’est que les décalages et les
arpègements de main gauche sont ici beaucoup plus discrets. Le stretto, absent en 1926, qui
affleuraiten1933esticinettementprisencompte.
4ARTHURRUBINSTEIN1946(1:45)
Rubinsteinadopte iciunpartiparisdegrandesobriété, tantdans l’expressionquedans le rythme.
Point de décalages, d’arpègements ou d’alanguissements. Aucun stretto à 16. La note en petit
caractèrede19estpriseenlevée,commeLortatetKreutzerl’avaientfaitauparavant.Pasdepoint
d’orguesurlesilencede23.Lepointd’orguefinaldure3blanches.
4BENNOMOISEIWITSCH1948(2:02,duréelapluslongue)
Sans décalages,Moiseiwitsch commence forte. Ilmarque fortement les notes demain gauchequi
sont mouvantes (par exemple le ténor 8-9). Il arpège à 10. Son traitement des notes en petits
caractères est circonstancié: à 11, elle est courte etsurvient sur le temps; à 19 elle est en levée
avant le temps. Le stretto n’est pas pris en compte. De 13 à 15, Moiseiwitsch joue più piano
qu’auparavant.A12,ilnefaitquediminuerverslafindelamesure.A16ilpratiquelecercardella
nota29.Lepointd’orgueestignoré,lavibrationseprolongeetenvahitlesilenceinduitparlapause;
ledernieraccordnedurequ’unenoireavantquenecommencelepréluden°5…
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°4:
• Lapulsationest-elleà commenotéouplutôtà4temps?
• Lalevéedudébutest-elleprolongéeouintempo?
• Y-a-t-ildesdécalagesentrelesmains?
• Lesaccordsdemaingauchesont-ilsdifférenciés,exprimantunetramecontrapunctique(horizontal),
oureflètent-ilsplutôtunpotentielharmonique(vertical)?
• Ledoest-ilappuyéà12,exprimantl’accentcouché?
• Lestrettode16est-ilagissant?
• Quelle exécution pour les notes en petit caractères de 11 et 19? Avant ou sur le temps, brève ou
longue?
• Lesouffletde20-21s’entend-il?
• Commentlesmorzandoest-ilexprimé?
29 Ilcercardellanota:unabbellimentovocale 'cacciniano'oltre lesogliedelBarocco,LivioMarcaletti,Rivista
ItalianadiMusicologia,Vol.49(2014),pp.27-53.
-
35
QUESTIONSEDITORIALESPOURN°4:
1) A16, l’indicationstretton’existepasdansUllstein.Elleestpresquepartoutailleurs,parfois
aveclestiretsquiindiquentjusqu’àquelendroitelles’applique(commeBreitkopfetPugno)
parfoissansceux-ci(Mikuli,JoseffyCortot,Debussy).
2) Soufflet de 20-21 : Kullak; Cortot et Kreutzer l’omettent (pour ce dernier, suivi d’un
diminuendo).Laplupartdesautresl’impriment(Breitkopf,Mikuli,Joseffy,Debussy,Pugno).
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36
PRÉLUDE N° 5
enrémajeur
Allegromoltoà3/8
Danslamêmetonalité:Mazurkaop.33n°2
EgalementAllegromolto:Préludesn°10,18
Parusenenregistrementsséparés:
1926 Leginska,Ethel (1886-1970) Angleterre avec15 Columbia
CommeBachl’asouventfait,Chopinlivreiciuntyped’écriturequisembleàdeuxvoixalorsquela
polyphoniequienrésulte -par le jeudes intervallesdisjoints, laperceptionderegistresdiverset
lesnotestenuesdanslesvoixmédianes-esttrèssubtile.
5FERRUCCIOBUSONI1920(0:25,duréelapluscourte)
Aprèsunlégerappuisurlepremiersi,ledéroulementatteintrapidementsonrythmedecroisière.Le
jeu,trèsfuyant,estparticulièrementclairentre5et12,quasisenzapedale.Entre13et20,lesnotes
delavoixintérieuren’affleurentpresquepas(particulièrementlessi).Lesdernièresmesuresde34à
36sontavecpédale,encrescendo.A la finquiesten fortecommeécritparChopin, labassede la
dernièremesureestjouéeaprèsl’accordetnonavantcommenotéparl’auteur.
5ALFREDCORTOT1926(0:32)
Lefluxdesdoublescrochesesticitrèségal,presqueisorythmique.Cortotnerecourtpresquepasàla
pédalequiresteinsoupçonnablelaplupartdutemps.Lesnotestenueslesontde1à14;ellesnele
sont pas de 13 à 16. Les indications cresc et dim, ainsi que les soufflets sont très discrètement
perceptibles.Lafinn’estpasencrescendomaisexactementàl’inverse,endiminuendo.Lefortedes
deuxderniersaccordsesticipiano.Lapédaleoriginalede34à37n’estpasobservée.
5ROBERTLORTAT1928(0:31)
Lefluxestgénéralementégalmaisonconstateuninfléchissementdudébità12,16,20et28.Lortat
fait clairement usage de la pédale. Les notes tenues le sont de 1 à 4 mais pas de 13 à 16. Les
intentionsdecrescendodiminuendosontplusmarquéesquechezCortotIde1926.De33à36,seul
lesouffletendiminuendoestprisencompte.Lafinn’estpasforte:commedanslaversiondeCortot
Ide1926,elleestpiano.
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37
5ALFREDCORTOT1933(0:36)
L’esthétiquesonoredecenouvelenregistrementestpassablementmodifiéeparrapportàcellede
1926.Lefluxn’estplussisystématiquementégal;ils’estquelquepeuassoupli.L’usagedelapédale
apparaîtmais celle qui tient de 34 à 37 n’est pas prise en compte. Les cresc etdim ainsi que les
souffletssontplusperceptibles.Lafinesttoujoursendiminuendoetlesdeuxderniersaccordssont
piano.Ladernièremesuren’estpasdansladispositionoriginale.
5LEONIDKREUTZER1938(0:44,duréelapluslongue)
AécoutercetenregistrementdeLeonidKreutzer,onpeineàcroirequ’ils’agitd’unAllegromolto.Le
flux semble improvisé, en constant réajustement au détour des intervalles disjoints et des
implications harmoniques sous-jacentes. L’exécution n’est pas exempte de scories. Kreutzer fait
usagede lapédale. Il tient lescrochesde1à4etde17à20maisonnediscernepas laprésence
éventuelledenoirestenuessurledeuxièmetempsdechaquemesurede13à16etde29à32.La
pédaleoriginalede34à36estignorée.Lesouffletsurlesmêmesmesuresvaensensinverse:nous
sommes en diminuendo, comme Cortot. Les accords de la fin sont mezzo forte. Kreutzer est
déroutantdansceprélude.Defait,lefortefinalestdanstoutesleséditions;maiscellesdeCortotet
deKreutzer indiquentégalementpentreparenthèses.Or l’éditionUllstein/Kreutzerestde1923et
celledeSenart/Cortotde1926…Sepeut-ilqueCortotaitconnul’éditionUllstein?
5RAOULKOCZALSKI1939(0:38)
Là aussi, l’indicationAllegromolto ne serait pas facile à deviner pour qui ne la connaîtrait pas. Le
tempoadoptéparKoczalskiestmodéré,pournepasdire...prudent.Lefluxestrelativementégalà
partquelqueslégersassouplissements.Lapédaleestabondante.Lescresc./dim.etlessouffletssont
prisencompte.Ilyadesincertitudesquantautextejoué,dontonnesauraitdires’ilestimputableà
unelecturefautiveouàl’exécutiondumoment.Parexemple:à16,onentendunla#surladernière
doublecrocheaulieudela♮;ouencoreà27,unlaaulieudufa#…RaoulKoczalskitientcomptede
la pédale originale de 34 à 37 et esquisse, durant ces mesures, un crescendo discret. Les deux
derniersaccordssontnéanmoinspianoiciégalement,commeCortotetKreutzerl’avaientfait.
5EGONPETRI1942(0:30)
Dans un flux égal, Petri confère une grande pression horizontale au discours. Il adopte un tempo
rapide.Lapédaleestassezabondante,reflétantlanotationdeChopin.Lesindicationscresc./dim.et
lessouffletssontperceptiblestoutenrestantassezdiscrets.Lecrescendofinaletlapédaleoriginale
sur les mêmes mesures sont constatés, bien que la pédale s’interrompe exactement sur la note
d’arrivée dans l’aigu, contrairement à la notation qui prévoyait une résonance générale. Les deux
derniersaccordssontforte.
5ALFREDCORTOT1942(0:34)
Audébutduprélude,Cortotsemblereveniràsonoptionde1926,soituneexécutionsanspédale.De
17à20, il varie l’expression,étirant le fluxpourexalter lesnotesoscillantes (si - laetsib - la)en
recourantàl’esthétiquepratiquéedansl’enregistrementde1933.Pourlereste,l’usagedelapédale
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38
est constaté même s’il n’est pas exactement celui qui apparaît dans les premières éditions. Les
indicationscrescendo/diminuendoet lessouffletssontdiscrètementperceptiblesmais lecrescendo
de la finn’est toujourspasprisencompte; cependant sur lesmêmesmesures lapédaleoriginale
apparaîtpour lapremièrefoisdans lesenregistrementsdeCortot.Lesdeuxaccordsconclusifssont
toujourspiano.Lescrochesnesontpastenuessur1,2et3maislesontde17à20.Lesnoiresde13à
17etde29à32nelesontpas;ellesn’apparaissentquedanspeud’éditions.
5ARTHURRUBINSTEIN1946(0:27)
Ici letempoest,àn’enpasdouter,unAllegromoltoquasipresto!Lefluxestrégulier,c’est leplus
rapidedetouslesenregistrementsanalysés.Ilconfineàladémonstrationetparaîtassezpeuinspiré.
Lapédaleestutiliséemaiscen’estpascelleindiquéeparl’auteur.Lescrochessonttenuesmaisles
noiresnelesontpas.Les indicationscrescetdim.ainsiquelessoufflets indiquéssontperceptibles
surtoutenphaseascendante.Lecrescendode la fin,sans lapédaleoriginalequiestsoncorollaire,
s’entendbienmaisilaboutit,curieusement,surunréaiguplutôtquesurlefa#quiestnoté.
5BENNOMOISEIWITCH1948(0:33)
Ici le tempoestbeletbienunAllegromolto,mêmesiMoiseiwitchcommenceunpeuau-dessous,
dans une manière assouplie qui pourrait -à première écoute- rappeler l’approche de Kreutzer. Il
atteintsonrythmedecroisièreverslamesure5;pours’ytenir,àpartauretourdesquatrepremières
mesures(de17à20).Lescrochestenutosontfortementperceptiblesmaislesnoiresnelesontpas.
Sanslapédaleoriginale,lafinestencrescendo,sansquecelui-cisoitconduitjusqu’aubout.Lesdeux
derniersaccordssontforte.Unrenforcementdesbassesestconstatésurladernièremesure.
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°5:
• S’agit-ild’unAllegromolto?
• Lefluxdesdouble-crochesvise-t-ill’isorythmieouest-ilassoupli?
• Quelestl’usagedelapédaleengénéral?
• Distingue-t-onlesnotestenuesaudébut,àlafinetde13à16?
• Lescresc/dimsont-ilsdiscrets,absentsoutrèspatents?
• Lessouffletsdudébutetde17-20s’entendent-ils?
• Lesouffletfinal(encrescendo)est-ilassuméouesquivé,voirenié?
• Lapédalespectraled’originede34à37est-elleobservée?
• Lesderniersaccordssont-ilsforte?
QUESTIONSEDITORIALESPOURn°5:
1) A13,14,15,16leshampesdenoiressurledeuxièmetempsdelamaindroiten’apparaissent
pasdanslaplupartdeséditionsanciennes.Cedétailfigurenéanmoinsdanslemanuscrit.
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39
2) A 34-37, la longue pédale de la finn’apparaît ni dans Kullak, Ullstein/Kreutzer ou
Senart/Cortot.ElleestprésentedansBreitkopf,Mikuli, Joseffy,Debussy,Pugnoetd’autres
encore.
3) Le forte finalqui se trouvedûmentdansBreitkopf, Kullak,Mikuli, Joseffy,Debussy,Pugno,
estégalementimpriméparCortot(quiproposepianoentreparenthèses)alorsqueKreutzer
imprimepiano(etmetlanuanceoriginaleforteentreparenthèses).
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PRÉLUDE N° 6
ensimineur
Lentoassaià3/4
Danslamêmetonalité:Scherzoop.20,Sonateensimineurop.58
AucunautrecasdeLentoassaidansl’œuvredeChopinidentifié.
Parusenenregistrementsséparés:
1905 Adam-Benard,Eugénie (1861-1925) France/USA avec7 Welte1907 Fryer,HerbertG. (1877-1957) Angleterre avec11 Welte1918 Avani-Carreras,Maria (1872-1966) Italie/USA avec3 Welte1920 Zadora,Michaelvon (1882-1946) Pologne,Allemagne avec7,13,23 VoxoùPolydor1926 Rosenthal,Moritz (1862-1946) Pologne(Lwow) avec7,11,23 EdisonUSA1929 Pachmann,Vladimirde (1848-1933) Ukraine avec3 HMV1930 Hambourg,Mark (1879-1960) Russie avec3,7,15puis17 HMV?1931 Brailowski,Alexander (1896-1976) Ukraine avec3puis15 Polydor1933 Pachmann,Vladimirde (1848-1933) Ukraine isolé HMV1933 Niedzielski,Stanislas (1905-1975) Pologne avec3 Gramophone1936 Kagen,Sergei (1909-1964) Russie avec7et20 Gramophone1936 Rosenthal,Moritz (1862-1946) Pologne(Lwow) avec3,7 EdisonUSA1937 Mayerl,Billy (1869-1947) Angleterre avec4,20 ColumbiaGB1937 Kreutzer,Leonid (1884-1953) Russie avec1,3,15,20 NipponColumbiaJapon1943 Ungar,Imre (1909-1972) Hongrie avec7,17,20,23 RadiolaHongrie1948 Turner,Ray (1903-1976) USA avec7 CapitolUSA1949 Spagnolo,Paolo (1930-2012) Italie avec3,4,7,10,14 Cetra
Commedans l’Etudeop. 25n° 7 endo#mineur, lamain gauchedéploie une formede
lyrismequiévoqueunchantdevioloncelle;maisicilamaindroiterépèteinlassablement
uneliaisondedeuxendeuxcrochesdontlapremièreestaccentuée.
6FERRUCCIOBUSONI1920(2:02,duréelapluslongue,àlalimiteduvraisemblable).
L’indication Lento assai semble ici plus observée qu’on ne l’entend d’ordinaire; de fait, une
comparaisondesminutages le confirme.Engénéral,dans cetteversion, lesquatredouble-croches
ascendantessemanifestentsousuneformederésistanceparétirementalorsquelestroiscrochesà
la fin de lamesure suivante se détendent en sens inverse. Typique desmodifications de texte de
Busoni,l’ajoutd’unréàlamaindroite(troisièmetempsde1)pourexalterlefrottementavecleré#
et-probablement-parsoucid’homogénéitéaveclestempsquiprécèdentetsuivent.Dèsledernier
tempsde6etlorsdesdeuxpremierstempsde7,letempoestsubitementplusallant.A8lefa#de
maingaucheseprolongeau-delàdesadurée,unpeucommeunpointd’orgue,avantd’enchaîner
avec la levée qui suit, très élargie. A 12, le premier temps est fortement accentué, comme pour
marquer une conquête. 13 et 14 sont des mesures très élargies. A 15, le tempo reprend. A 17,
l’indicationsostenutosemblesignifier:pluslargement.A18,ledeuxièmetempsestostensiblement
enrésolution.A21,lemêmedétaildedictionestreproduit(bienqu’iln’yaitpointdesostenuto)et
lesdernièresnotessonttrèsdétaillées,allantjusqu’àdétacherlesdeuxdernièresdouble-croches.A
24,descésuress’intercalententrechaquegroupededeuxcroches(maindroite).
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41
6ALFREDCORTOT1926(1:49)
Dans son premier enregistrement de ce prélude, Cortot livre une conduite de main gauche
particulièrementcontorsionnée,àpeuprèsuniquedanstoutel’histoiredel’interprétationdecette
pièce.Ils’agitd’untempononmesurable,quinesembled’ailleursnullementLentoassai;àchaque
crochepourraitsurvenirunstringendo,unallargando,untenuto.Ilyalàunsoucidedictionquiest
patent. Est-on vraiment sotto voce? On peut en douter, tout en gardant à l’esprit le fait que la
techniqued’enregistrementdel’époqueavaitsescontraintes.A11onentendundiminuendoquiest
àl’opposédusouffletindiquéparl’auteur.A13,forte,puismeno.A14,lemidelamaingauchevibre
jusqu’àlafindelamesure,alorsqu’ilyaunsilencedenoire.L’indicationsostenutode17setraduit
parunallargando.A24,Cortotralentitfortementjusqu’àlafin.
6ROBERTLORTAT1928(1:36)
Si l’onchercheunexemplepour illustrer l’artdudécalageentre lesdeuxmains,de ladissociation
entrechantetaccompagnement,ontient làundocumentàpeuprèsunique.Lànonplus,cen’est
pas à un Lento assai que l’on pense. Les doubles croches accélèrent commemues par un ressort
dissimulésousuneécritured’apparenceégale.Latroisièmeproposition(mesures5à8)quiestde4
mesuressevoitlittéralementpropulséeversl’avant.Parfois(commeà11et12)lavocalisationsefait
aumoyenduprocédéque leschanteursappellent«couvrir» lavoix.Est-onsottovoce?C’estpeu
vraisemblable,tantlasonoritéestcuivrée.A8,lessouffletssemblentindiquercresc.puisdim.mais
Lortatn’enretientquelediminuendo.Entre13et14, lesdeuxarpègessontforte.Lesostenutoest
trèsélargietinsistant.
6ALFREDCORTOT1933(1:49)
C’estsensiblementlemêmeprojetqu’en1926maisavecinfinimentplusdesobriétédansladiction
et dans les intentions. Certains aspects bien reconnaissables persistent néanmoins mais ils
apparaissentbienmodérésencomparaison.
6LEONIDKREUTZER1938(1:48)
Parendroits,onpeutdirequeLeonidKreutzerrestitueunLentoassai.Est-cesottovoce?Nousn’en
sommespas loin. Iln’yapasdedécalagesdanscetteversiontrèsexpressiveoùtoutapparaîtavec
plusdesobriétéquechezCortot.A13,lesarpègesproposentdeuxfoislanuanceforte.Lesostenuto
setraduitparunallargando.L’accentdutroisièmetempsde22nes’entendpas.
6RAOULKOCZALSKI1939(1:32,versionlaplusrapide)
IcileLentoassain’estpasletempoauquelonpenserait.Koczalskiesttrèsallant;c’estleplusrapide
detouteslesversionsanalysées.Letonsottovoceestcrédible,àpartledébutdusouffletquiesttrès
présentàlamaingauche.Lesaccentsdedeuxendeuxnesontpasaudibles.Koczalskipressesurles
troiscrochesde2etde4.Ilyadesdécalages,sansquecelasoitaussifréquentquedanslecasde
Lortat.A13,lesnuancessontsuccessivementfortepuispiano.Lesostenutoestallargando,comme
danslaversiondeKreutzer.Ladeuxièmefois,c’estlamêmeexpressionquiestproposée.Lapédale
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42
delafin,quipourraitindiquer(c’estcertesambigu)qu’elleestàtenirdurantplusieursmesures,n’est
pasenvisagéesouscetangle.
6EGONPETRI1942(1:44)
Cen’estpasvraimentd’unLentoassaiqu’ils’agit.Mais indubitablementlesottovoceaétéprisen
compte.L’accentuationdedeuxendeuxestobservée,ellerestediscrète.Pointdedécalagesentre
lesmains.A11,piùforteetcelapourconduireà13,oùPetrirestedanslamêmenuancefortepour
lesdeuxarpèges.Lesostenuton’estpasiciunallargandomaisuneintensitéaccrue.L’accentde22
est présent. Lapédalede23est prise en compte. La conduitede lamain gauched’EgonPetri est
toutedesobriétéetdelyrismecontenu.
6ALFREDCORTOT1942(1:33)
Danscettenouvelleversion,Cortotestencoreplussobrequ’en1933.Ilyestbeaucoupplusallant.
Faut-ilyvoirl’influencedeKoczalski?
6ARTHURRUBINSTEIN1946(1:47)
ArthurRubinsteinaffiched’embléeunpartiprisdesobriété.Ilcultiveunchantcontenu;c’estavant
toutleclassicismequ’ilretientdecettepage,ced’autantqu’ilnepratiqueaucundécalageentreles
mains.Lesonestpresquesottovoce,mais ilnes’agitpasvraimentd’unLentoassai…mêmesi les
mesures13et14sonttrèsdilatées(enmezzofortepourlesdeuxarpèges).L’accentuationdedeux
endeuxestindiscernable.Lesostenutosereflètedansl’intensitéaccruedelanuance.L’accentde22
estdiscrètementappuyé.
6BENNOMOISEIWITCH1948(1:48)
Comme on pouvait s’y attendre avecMoiseiwitch, nous n’entendons pas un sotto voce, pas plus
qu’unLentoassai,dumoinsaudébut; car lesdeuxdernières lignes (dès19) irontdeplusenplus
lentement.
A 13, 14, 15 et 16 il accentue fortement les notes mi de la main gauche, ce qui souligne
l’enchaînementaveclesarpègesquiprécédaient(oùlemisupérieurétaitlatiercedel’accorddedo).
L’accentde22neseremarquepas.Lesostenutosereflèteparl’intensitéduton.
En conclusion, personne (à part -peut-être- Busoni et Rosenthaldans son enregistrement de
quelquespréludes)nesemblevraimentprendreencomptel’indicationLentoassai,dumoinspasau
début(Kreutzermisàpart).Certainsyparviennentenfindeprélude(Moiseiwitch).Lesostenutoest
pris comme un allargando par tous les interprètes sauf Petri, Rubinstein et Moiseiwitch qui
intensifientleton.
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43
POINTSD’OBSERVATIONPOURN°6:
• Letempochoisipeut-ilévoquerl’indicationLentoassai?
• L’accentuationdedeuxendeuxest-elleperceptible?
• Y-a-t-ildesdécalagesentrelesmains?
• Letongénéralest-ilsottovoce?
• Comment l’indication Sostenuto est-elle comprise? Plus lentement, (comme Busoni), allargando
(commeKoczalskietKreutzer)ouencore:avecuneintensitéaccrue(commePetri)?
• Lorsqu’ilyaretour,à21,dumotifindiquésostenutoà17,l’expressionest-elleidentiqueouvariée?
• A13,lesdeuxarpègesdemaingauchesont-ilsd’abordfortepuispiano?
• L’accentsurletroisièmetempsde22s’entend-il?
• Lapédalede23seprolonge-telleverslafin?
• Le silence de l’avant-dernière mesure équivaut-il à une coupure par-dessus le si tenu de la main
gauche?
QUESTIONSEDITORIALESPOURN°6:
1) Kullakproposelanoireà66danssonédition,cequiestplutôtrapidepourunLentoassai...
2) Alamesure14,lesigned’arrêtdelapédaleapparaîtdiversement:surlederniersilencede
croche (Mikuli), sur la dernière noire (Breitkopf Joseffy Pugno Kreutzer Cortot). L’édition
Debussynel’indiquepas.
3) Surlederniertempsde14,Kullakindiqueunaccentdontonignorelaprovenance.
4) Sur la plupart des éditions apparaît à 23 apparaît un signe de pédale sans ultérieur signe
d'étouffement.Dansla1èreéditionWessel1838,cesigneapparaîtàlafinduPrélude;dans
d’autres-commeKullak-cesigneapparaîtjusteavantledo#demaingaucheà23.
5) A17,Kreutzern'indiquepas:sostenuto.Maisd’autreséditionsindiquentdeuxfoissostenuto
(à17età21),commeBreitkopf1878etKullak.
6) A 15, Pugno indique : tre corde; puis à 22 :una corda. Plusieurs éditions (Klindworth par
exemple)préconisentunppppourlesquatredernièrescroches.
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PRÉLUDE N° 7
enlamajeur
Andantinoà¾
Danslamêmetonalité:Polonaiseop.40n°1
EgalementAndantino:Balladeop.38;Impromptuop.36,Etudeposthumeenfamin.
Parusenenregistrementsséparés:
1905 Adam-Benard,Eugénie (1861-1925) France/USA avec6 Welte1920 Zadora,Michaelvon (1882-1946) Pologne/Allemagne avec6,13,23 Polydor1920 Hallock-Greenewalt,M.-E. (1871-1950) Syrie avec4,20 ColumbiaUSA1920 Liebling,Georges (1865-1966) Allemagne isolé Parlophone1922 Busoni,Ferruccio (1866-1924) Italie isolé Columbia1926 Rosenthal,Moritz (1862-1946) Pologne avec6,11,23 EdisonUSA1930 Hambo