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Gilles Goyer Travail présenté à : Nathalie Delli-Colli Avril 2011 Faculté des lettres et sciences humaines UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE Les personnes aînées homosexuelles Dans le cadre du cours : Intervention en gérontologie SES-756 Par: Département de service social

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Gilles Goyer

Travail présenté à :

Nathalie Delli-Colli

Avril 2011

Faculté des lettres et sciences humaines

UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

Les personnes aînées homosexuelles

Dans le cadre du cours : Intervention en gérontologie SES-756

Par:

Département de service social

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Table des matières

Introduction p.3

1. Leur histoire p.3

2. Les données démographiques des personnes aînées homosexuelles p.4

3. La réalité des personnes aînées homosexuelles p.6

4. Les impacts de leur réalité p.8

5. L’organisation de services p.11

Conclusion p.15

Bibliographie p.18

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Introduction

La majorité des personnes homosexuelles aînées n’a jamais dévoilé publiquement son

orientation sexuelle. Ce fut la réalité de leur époque. D’ailleurs, les hommes et les

femmes homosexuels (les) appartiennent à une panoplie de communautés ;

ethnoculturelles, rurales, urbaines, religieuses, handicapées et autres. Par ce fait, un

élément crucial est commun à leur expérience de vie. En effet, la plupart des personnes

homosexuelles aînées sont nées à une époque où être gai était illégal et sujet à

l’emprisonnement.

Ce travail portera sur les évènements que ces personnes ont vécus en plus de voir les

impacts vécus. De plus, les conséquences sur la santé physique seront énumérées. Pour

terminer, un regard sera porté sur l’organisation de services qui accueille ces personnes.

1. Leur histoire

Les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres (LGBT) aînées d’aujourd’hui

ont connu de multiples révolutions sociétales qui les affectent encore aujourd’hui même

s’ils n’en sont pas les principaux acteurs. En effet, les aînées ont encore le souvenir très

douloureux d’une époque où les personnes homosexuelles étaient victimes d’une

stigmatisation extrême (allant parfois jusqu’à la lobotomie). Être gai, à cette époque, était

illégal et sujet à emprisonnement. Les valeurs de société à cette époque mentionnaient

que l’homosexualité était une perversion morale parce que contre nature et contraire à

l’enseignement biblique. Ainsi, être gai était criminel et contraire aux lois sur l’obscénité

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et la sodomie en plus d’être pathologique parce qu’il constituait une déviation de la

sexualité normale. Par conséquent, les conséquences associées à cette réalité durant cette

époque furent la perte d’emploi, le manque de soutien familial, les menaces de violence,

les arrestations et la marginalisation (Brotman et coll. 2006).

De ce fait, ces personnes ont appris à faire preuve d’une très grande discrétion au sujet de

leur homosexualité et à ne recourir qu’avec une très grande prudence aux prestataires de

soin. En effet, selon une enquête (CFR, The University of Edinburgh, 2004 cité dans le

mémoire de la Fondation Émergence (2010) menée auprès des personnes aînées en 2004

en Écosse stipule que :

« 23 % des femmes et 37 % des hommes interrogés avaient vécu dans le placard

par peur de représailles et pensaient que le risque de subir de la discrimination

ou du rejet pourrait être encore plus grand avec l’âge. De plus, 53 % des

répondants avaient déjà senti de l’hostilité, reçu un traitement différent, ou

rencontré un manque de compréhension de la part des professionnels de la santé.

La perception de leur propre orientation sexuelle, la perception sociale de

l’homosexualité ainsi que les expériences de discrimination et de rejet vécues par

les personnes aînées LGBT joueraient sur leur perception du degré d’acceptation

des réalités LGBT dans les services traditionnels pour aînés » (p.33).

De plus, selon la fondation Émergence (2010), dans la population aînée certains sont

moins instruits, plus conservateurs, plus attachés à des valeurs religieuses et moins

ouverts aux questions de sexualité. Ils ont été plus imperméables à l’évolution des réalités

homosexuelles1.

1 Ceci peut se questionner. En effet, certaines personnes âgées selon leur trajectoire respective démontrent

une ouverture à la différence soit à cause d’un lâcher-prise, de leur priorité ou du « vivre et laisser vivre ».

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2. Les données démographiques des personnes aînées homosexuelles au

Québec

Selon l’institut de la statistique du Québec (ISQ) en 2008 il y avait 1 551 541 personnes

de 65 ans et plus au Québec. Par contre, il n’existe aucune donnée démographique

tangible sur le nombre de personnes LGBT dans la population québécoise. Généralement,

en ce qui concerne l’orientation sexuelle on se réfère à l’échelle de Kinsey qui

l’estimerait plus ou moins à 10 % de la population. Ainsi, il y aurait au Québec plus de

150 000 personnes LGBT de plus de 65 ans et plus.

Échelle de Kinsey (http://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Kinsey#.C3.89chelle_de_Kinsey)

Score Explication

0 Exclusivement hétérosexuel (le)

1 Prédominance hétérosexuelle, expérience homosexuelle

2 Prédominance hétérosexuelle, occasionnellement homosexuelle

3 Bisexuel sans préférence

4 Prédominance homosexuelle, occasionnellement hétérosexuelle

5 Prédominance homosexuelle, expérience hétérosexuelle

6 Exclusivement homosexuelle

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3. La réalité des personnes homosexuelles gaies

Le dévoilement :

Les aînés ont affirmé qu’ils ne dévoileraient pas leur orientation sexuelle que si on leur

posait la question. Autrement, ils ne divulgueraient pas cette information. Selon Brotman

et coll. (2006), c’est la loi du « Ne pas demander/ne pas dire ». Par ce fait, ils veulent

protéger les sentiments et les expériences des proches ou garantir leur propre sécurité et

confirment le fait que de cacher son orientation sexuelle pour réduire ou éviter la

discrimination fait partie des expériences fréquemment vécues par cette génération. De

plus, selon Beausoleil (1996) :

« Un certain nombre de personnes aînées gardent des séquelles de leur passé

difficile, clandestin et parfois ostracisé. Ils gardent d’eux-mêmes une image

négative. Ils s’isolent. Ils n’arrivent pas à saisir la beauté de l’univers et à établir

des liens affectifs enrichissants. Certains deviennent clairement misogynes et leur

sexualité est à la merci de la compulsion » (p.3).

Le VIH :

Avec la venue des traitements antirétroviraux hautement actifs, l’espérance de vie des

personnes avec le VIH/sida a considérablement augmenté, ce qui avec le temps pourrait

mener à une croissance continuelle de ce groupe de personnes avec le VIH/sida. De plus,

on assiste aujourd’hui à un vieillissement prématuré des personnes avec le VIH sida. En

effet, selon Émergence (2010) :

«Depuis le début des années 2000, la communauté scientifique aussi bien que les

médecins et les organismes VIH/sida se penche sur la question du vieillissement

prématuré ou accéléré qui se traduit par l’apparition de maladies chez les

personnes séropositives suivant un traitement ou non à partir de la cinquantaine

alors que généralement ces maladies touchent la population qu’à partir de

65ans » (p.36).

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Au 31 décembre 2006, 12.2 % ou 2525 personnes de tous les cas déclarés de sida étaient

survenus chez les personnes de 50 ans et plus. D’ailleurs, les contacts sexuels constituent

le principal facteur de risque d’infection au VIH chez les personnes âgées au Canada. En

2006, la catégorie d’exposition des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres

hommes (HRSH) représentait 35.1 % et la catégorie hétérosexuelle 31.6 % des rapports

de test positif pour le VIH chez les personnes âgées de 50 ans et plus, Fondation

Émergence (2010). Par conséquent, pour les nouveaux cas de séroconversion par tranche

d’âges, celle des plus de 50 ans est en augmentation et touche dans une forte proportion

les hommes gais.

Le milieu gai; deux mondes :

La jeunesse est davantage valorisée dans le milieu gai et la plupart des hommes gais ont

plus d’amis homosexuels qu’hétérosexuels qui créeront des services ou des demandes de

services, tandis qu’un groupe d’homosexuels aînés aura tendance à vivre dans l’anonymat

puisque c’est ce qu’on leur a appris, Cassidy (2007). Toutefois, les femmes

homosexuelles sont plus acceptées causées par l’inclusion créée par le mouvement

féministe. De plus, vous verrez des hommes et des femmes homosexuels en

établissement, mais la plupart d’entre eux n’apprécient pas leur vie actuelle puisqu’ils

sont coupés des communautés gaies, Cassidy (2007). Les femmes et les hommes

homosexuels de plus de 60 ans semblent préférer participer aux activités sociales

séparément, en raison de leur style de vie.

Il existe un choc de culture entre les jeunes gais et les personnes aînées homosexuelles.

En effet, la volonté d’être en contact avec de jeunes gais par les personnes aînées

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homosexuelles peut se voir entravée par la crainte d’une perception d’âgisme. D’ailleurs,

les personnes aînées, selon la revue Fugues (2011), disent qu’il « est mieux de rester

entre vieux, de toute façon on est disqualifié devant les jeunes » (p.8). Pour d’autres, le

jeunisme généralisé de la part des jeunes deviendrait une justification à l’impossibilité de

nouer des rapports intergénérationnels. Par conséquent, jeunes et vieux gais deviendraient

deux solitudes qui ne peuvent se côtoyer. D’ailleurs, les jeunes ne sont pas intéressés aux

« vieux » que pour des raisons pathologiques (recherche du père), ou matérielles (se faire

entretenir, pour ne pas dire se prostituer). Ainsi, le fossé entre les générations est lié à une

perception et une façon de vivre trop différentes.

Les enjeux : L’unification des deux solitudes par la mise en place d’activités ciblées

permettant de connaitre les deux solitudes. En effet, certains des aînés pointent le manque

de reconnaissance de la jeune génération gaie. L’insouciance, voire l’ignorance, serait à

l’origine d’une rencontre compromise entre les générations. Par contre, le désir ressenti

de vouloir briser les préjugés entre ces deux communautés existe, mais chaque personne

rejette la responsabilité sur l’autre.

4. Les impacts de leur réalité

Le rejet par la famille et par les pairs entraine une démotivation, une consommation

abusive d’alcool. De plus, le manque de soutien et le fait de vivre de l’isolement amènent

parfois la dépression chez les personnes aînées homosexuelles. Par conséquent, conduire

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aux idéations suicidaires par la combinaison de ces trois facteurs, Dorvil, et coll. (2001)

qui citent La Ruche 1999).

La prévalence de la dépendance aux substances psycho actives (drogue, alcool et tabac)

selon Global Action on Agin, 2006 dans Émergence (2010) est plus importante dans les

populations LGBT. Par conséquent, expliquerait une consommation plus grande de

drogues et d’alcool causée d’une part à l’influence des premières expériences sexuelles

exécutées généralement sous l’influence de l’alcool ou de la drogue et qui serait par la

suite indispensable à toutes relations sexuelles et d’autre part, aux espaces de

socialisation qui ont été longtemps pour les personnes LGBT, les bars et les discothèques.

De plus, selon Otis et coll. (2006), une corrélation existerait entre la consommation

d’alcool et de drogue et l’augmentation du risque de relations sexuelles non protégées,

donc de l’explosion à la transmission du virus du sida et à d’autres infections transmises

sexuellement et par le sang (ITSS).

L’isolement :

La vision de la personne LGBT vieillissante seule et sans soutien de proches est dans tous

les esprits. En effets, la propension pour les personnes aînées LGBT à vieillir dans la

solitude et l’isolement est plus importante que pour les aînés hétérosexuels. Selon la

fondation Émergence (2010) :

« La propension pour les personnes aînées LGBT à vivre seule était deux fois et

demie plus élevée que pour les hétérosexuels (Keogh, 2006) 20 % des répondants

disaient qu’ils ne pouvaient compter sur personne en cas de crise ou de

difficulté ». (p.34)

De plus, 50% des aînées de la ville vivraient seuls, le pourcentage s’élève à 80% pour les

personnes aînées LGBT et que 25 % de ces personnes ont des enfants comparativement à

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75% pour les aînés hétérosexuels. Pour résumer, les personnes aînées LGBT ont moins

d’enfants, sont moins souvent en couple et entretiennent des relations parfois plus

distantes avec leur famille (frère sœur, neveux, nièces). Par conséquent, la réticence à

vouloir compter sur les autres amène les personnes aînées LGBT à se percevoir comme

étant en bonne santé malgré des problèmes de santé et ainsi permet de garder leur

indépendance et autonomie qui constitue des facettes importantes de l’identité des

personnes aînées, Brotman et coll. (2006).

La santé physique et psychologique :

Les cancers sont plus grands chez les populations LGBT que dans la population générale

même en excluant les cancers qui apparaissent chez les personnes séropositives au

VIH/sida de plus de 50 ans. En effet, selon la fondation Émergence (2010), les risques

plus élevés de cancers sont en lien avec le style et les habitudes de vie chez les personnes

aînées LGBT comme la consommation plus élevée de tabac, d’alcool et de drogue

(illicites). De plus, l’obésité, une maladie associée à un taux important de cancer, est plus

fréquente chez les lesbiennes et chez les femmes bisexuelles que dans la population

féminine générale.

Les hommes gais avaient deux fois plus de risques de souffrir de problèmes mentaux que

les hommes hétérosexuels. Les lesbiennes, trois fois plus de risques que les femmes

hétérosexuelles, pouvant aller de la dépression aux troubles d’anxiété jusqu’aux idéations

suicidaires.

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Les facteurs de protection :

Toutefois, la marginalisation subie et l’adaptation à un contexte social peu accueillant

rendraient les personnes ainées LGBT mieux outillées à faire face aux épreuves du

vieillissement. En effet, le fait d’avoir vécu une marginalisation sociale toute leur vie, les

populations LGBT ont développé des formes de résilience qui les aident à s’adapter à la

vieillesse. De plus, il faut souligner l’importance des amis. En effet, ceux-ci se

substituent à la famille biologique et occupent une place prépondérante dans la vie des

personnes ainées LGBT. En effet, selon Émergence (2010) qui cite The university of

Edingburgh (2004), l’amitié était considérée comme très importante pour 96 % des

hommes et 93 % des femmes et 67 % des hommes et 75 % des femmes vivaient près de

leurs amis. Ainsi, la notion de famille choisie est un concept nouveau et qui devrait être

pris en compte par ceux et celles qui œuvrent auprès des aînés. Certains membres de la

famille choisie peuvent devenir de proches aidants.

5. L’organisation de services

L’Hébergement :

Les questions que se posent les personnes ainées LGBT en ce qui concerne le placement

en maison d’hébergement sont la peur de ne pouvoir partager leurs expériences de vie

avec les autres résidents. En effet, la peur du rejet par les résidents si ceux-ci apprenaient

leur orientation sexuelle en plus de la peur de ne pas avoir la même attention de la part du

personnel et des intervenants en raison de leur orientation sexuelle ou de leur genre.

D’ailleurs, le type de résidences ne fait pas l’unanimité chez les personnes aînées LGBT.

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Par contre, tous s’entendent pour un environnement sécuritaire et exempt d’homophobie

représente une préoccupation essentielle pour les personnes aînées homosexuelles.

Les intervenants qui étaient eux-mêmes homosexuels faisaient une analyse riche et

approfondie de la discrimination envers les personnes aînées gaies et lesbiennes et

mentionnaient particulièrement les problèmes de visibilités, d’isolement et l’impact de la

pauvreté. Ainsi, ces intervenants étaient plus enclins à rapporter des histoires très

difficiles, voire pénibles, qui n’étaient pas présentes dans les récits des personnes aînées.

Comparativement aux intervenants hétérosexuels qui affirmaient qu’ils n’avaient pas des

clients qu’ils identifiaient comme gai ou lesbienne. Ceci démontre le manque de visibilité

des personnes aînées gaies et lesbiennes dans le système de santé. De plus, plusieurs

intervenants ont affirmé que l’orientation sexuelle de leurs clients n’avait pas à être prise

en considération dans leur plan de soin, Brotman et coll. (2006). Nous pourrions dire que

la loi du « Ne pas demander/ne pas dire » semble fonctionner aussi pour les intervenants,

n’est-ce pas?

Les enjeux sur l’hébergement : Pour favoriser une universalisation des services et une

conscientisation sur les réalités homosexuelles, une sensibilisation sur la marginalité

devrait se faire systématiquement auprès des différents intervenants dans tous les

établissements. Ainsi empêchera qu’une ghettoïsation des individus et une discrimination

selon le genre et l’orientation s’installent.

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L’hétérosexisme :

L’hétérosexisme, ou la discrimination systémique envers les lesbiennes, les gaies et

souvent les personnes bisexuelles, opère comme une idéologie naturalisée. Par ce fait,

l’hétérosexisme peut se résumer comme la supposition que tout le monde est et devrait

être hétérosexuel et que l’hétérosexualité est la seule forme morale, d’expression sexuelle

pour les personnes matures et responsables! Ainsi, l’homosexualité est considérée comme

un comportement déviant, contre nature. En effet, encore aujourd’hui pour certaines

personnes l’homme et la femme sont faits pour s’accoupler et pour se reproduire. La

transgression de cette règle trouble. Des sentiments homophobes peuvent s’écouler de ce

trouble. En effet, de la peur que l’organisation sociale du sexe et de sa morale s’écroule.

D’ailleurs, un homme qui répondrait qu’il n’a pas de blonde par ce qu’il aime les

hommes risque de se faire agresser. Les demandes répétées à une lesbienne sur les

raisons de son célibat, alors qu’elle pourrait être mariée (à un homme) et avoir des

enfants, illustrent les attentes hétérogénistes prônées par le conformiste social, selon une

conception biopsychologique de la réalisation personnelle.

Par ce constat, les personnes homosexuelles aînées ne se sentent pas à l’aise de se confier

aux professionnels de la santé, Dorvil (2001), qui cite Junot et Charest (1993). Celles qui

ont fait confiance aux professionnels rapportent des bris de la confidentialité, des

examens gynécologiques brusques, des sarcasmes ainsi que des questions personnelles

inquisitrices. Par conséquent, selon Émergence (2010) qui cite Brotman et coll. (2006) :

« Plusieurs aînés homosexuels ont subi de l’homophobie et de l’hétérosexisme

tout au long de leur vie. Ceci, parfois, limite leur capacité et volonté d’accéder

aux différents services de santé et de faire valoir leurs besoins dans une étape de

leur vie où s’accroît leur dépendance vis-à-vis du soutien professionnel. ». (p.33)

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La sexualité :

Dans nos représentations, la sexualité reste réservée à ceux qui sont jeunes et beaux. La

sexualité des personnes âgées est limitée dans son expression par le vieillissement

cognitif et celui de l’ensemble des fonctions physiologiques de l’organisme a, parfois, été

stigmatisé par nos sociétés natalistes. Notre inconscient collectif entretient une image

hollywoodienne de la sexualité, éternellement figée dans le destin de ceux qui resteront à

jamais jeunes et beaux. La sexualité des personnes âgées est déplacée, ridicule,

transgressive, voire dangereuse pour la santé, Colson (2007). Pour les personnes

homosexuelles, la sexualité est une majeure partie de leur vie, particulièrement chez les

hommes. De plus, selon la fondation Émergence (2010), les relations ouvertes sont plus

fréquentes chez les hommes homosexuels âgés étant en couple depuis plusieurs années.

Par contre, ne veut pas dire qu’il n’y a pas des relations monogames. Le fait que la

sexualité chez les personnes aînées en général soit un sujet tabou amènera-t-il un retour

dans « le placard » pour les personnes ainées LGBT?

Les enjeux pour les intervenants : Ceux-ci devraient en lien avec leur fonction ouvrir le

dialogue avec les personnes aînées homosexuelles. Dans la mesure du possible, le rôle du

travailleur social est de favoriser une intégration sociale des personnes aînées sans subir

des discriminations et privilèges, d’éliminer les obstacles environnementaux sociaux et

physiques dans une perspective d’égalité des chances et de répondre, le plus

adéquatement possible, à leurs besoins. Des activités (par des sexologues) de

sensibilisation et de conscientisation sur la sexualité des personnes aînées, peu importe le

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genre, auprès des bénéficiaires et les intervenants, permettraient de défaire le mythe du

« Ne pas demander/ne pas dire ».

De plus, un enjeu concernant la sexualité des aînés homosexuels s’impose. En effet, le

sentiment, que les aînés sont davantage attirés par les plus jeunes, est partagé par la

majorité des aînés. Encore une fois, le regard des jeunes sur leurs aînés est disqualifié et

souvent perçu comme le besoin pour le jeune de trouver un père défaillant ou absent. De

plus, la suspicion pédophile est largement avancée par les aînés gais. Ainsi, un travail de

démystification et de recadrage, sur la sexualité des personnes aînées homosexuelles afin

de défaire ces préjugés, doit être considéré lors des interventions.

Selon Colson (2007) :

« Avec l’âge, la sexualité devient moins physique, mais acquiert aussi davantage

de résonnance émotionnelle. Par conséquent, la sexualité devient différente,

moins physique et plus relationnelle, moins sexuelle, mais plus sensuelle. Une

sexualité qui prend le temps des caresses et des émotions de chacun » (p.80).

Conclusion

Selon leur expérience de vie, la plupart des personnes aînées LGBT, qu’elles aient ou non

de la difficulté à dévoiler leur orientation ou leur identité sexuelle et de genre, qu’elles

soient à l’aise ou non avec le fait d’en parler, ont peur que leur fin de vie soit marquée par

un retour à la clandestinité et au silence en plus de lutter pour faire respecter leurs droits.

De plus, il existe un fossé entre les personnes ainées LGBT et les acteurs du milieu des

aînés. Ce fossé est maintenu par l’appréhension des personnes ainées LGBT de ne pas

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être traitées avec respect et dignité et par l’ignorance des réalités LGBT de la part des

acteurs du milieu des aînées. Ainsi, il apparait important de modifier les formulaires

d’évaluation pour qu’une préoccupation de l’orientation sexuelle de la personne aînée

soit prise en considération. En effet, le fait de connaitre l’histoire de vie des personnes

ainées LGBT permettra de défaire la loi du silence de chacun des côtés (individu et

intervenants) et être encore plus près de la réalité vécue des personnes aînées.

Malgré les changements ayant amélioré les droits et le traitement des gais et lesbiennes

au Canada, les antécédents historiques de discrimination et de manque de visibilité qui les

entoure placent les aînés homosexuels dans une situation à risque et de vulnérabilité

lorsqu’ils ont besoin d’avoir accès aux systèmes de santé et de services sociaux.

Pour conclure, rappelons l’importance d’amener une autonomisation pour les personnes

aînées, qui se traduit par un pouvoir d’agir sur leur vie et sur leur environnement, par un

gain de leur perspective égalitaire et par le développement de leurs capacités et de leurs

actions. Le respect des choix et des besoins de ces personnes ressort également comme

facteur important pour amener à une situation de participation sociale des individus.

Encore faut-il être à l’écoute des choix et besoins de ces personnes, n’est-ce pas?

Le rôle de l’intervenant social vise à favoriser l’expression de l’autonomie des individus

et l’exercice de leur citoyenneté. Par ce fait, il est essentiel d’offrir aux personnes aînées,

une expertise et un accompagnement. Dans notre rôle professionnel, il nous faut

constamment passer de l’individu à la collectivité et réussir à trouver ce point d’équilibre

où sont juxtaposées ces deux dimensions. D’ailleurs, le jugement professionnel et la

pratique consciente qui laisse place à la réflexivité prennent ici toute leur importance. Par

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conséquent, une volonté d’atteindre une société plus inclusive, tout en faisant face à une

population vieillissante et des perspectives de manque de ressources humaines dans les

domaines de la relation d’aide, légitime l’intervention des professionnels dans ce

domaine des personnes aînées sans égard à l’orientation sexuelle.

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Bibliographie

Beausoleil, J. (1996). Homosexualité et vieillissement. Conférence donnée au colloque le

vieillissement et la santé mentale, association canadienne de santé mentale Montréal

(ACSM), 6p.

Brotman, S., Ryan, B., Meyer, E. (2006). Les besoins en santé et services sociaux des

aines gais et lesbiennes et de leurs familles au Canada. École de service social de

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Cassidy, D.F. (2007). L’intimité chez les hommes et les femmes homosexuels âgés.

Gérontologie et Société no 122, pp.233-245.

Colson, M.H. (2007). Âge et intimité sexuelle. Gérontologie et Société, no 122, pp.63-83

Dorvil, H., Mayer, R. (2001). Problèmes sociaux, Tomes II: Études de cas et

interventions sociales. Presse de l’Université du Québec, 679p.

Fondation Émergence en partenariat avec Gai-Écoute (2010). Pour que vieillir soit gai :

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Montpetit, C. (2009). L’homosexualité des personnes âgées : briser le mur du silence.

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Otis et coll. (2006). Drogues, sexes et risques dans la communauté montréalaise : 1997-

2003.Drogue, Santé et Société, volume 5 no 2 pp. 161-197.

Internet :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Kinsey#.C3.89chelle_de_Kinsey

Revue :

Fugues. Vol. 27, no 12, mars 2011. www.fugues.com

Note de cours :

SES-744. (2010). Pratiques de protection sociale. Annie Lambert