Les Mondes Du Roman Hachette

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76 77 3. LES MONDES DU ROMAN À la découverte La société française au XIX e siècle 78 Lire et s’exprimer 1. Un jeune arriviste Le Père Goriot, Balzac 80 1. Les espérances d’un jeune homme 2. L’ambition de Rastignac 2. Une bourgeoise de province Madame Bovary, Flaubert 83 1. Les rêves d’une jeune fille 2. Les désillusions d’une femme 3. La fortune de M. Grandet Eugénie Grandet, Balzac 86 4. La rénovation de Paris La Curée, Zola 88 Lecture d'œuvre intégrale Jean Valjean dans Les Misérables 90 Parcours comparé Le roman historique 94 Bilan Le roman du XIX e siècle 98 Propositions de lecture Lire des romans du XIX e siècle 99 Histoire des arts Arts de l’espace Le Paris d’Haussmann 100 ZOOM f Les travaux d’Haussmann Méthode Arts du visuel La composition d’un tableau 102 Statut du narrateur et point de vue 103 3 Les mondes du roman 1 À quelle classe sociale appartient, selon vous, la famille Bellelli ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur des éléments du décor ou sur les vêtements des personnages. 2 a. Quelle impression donne la mère, par son attitude, ses vêtements et l’expression de son visage ? b. Décrivez la position du père. c. Quelle attitude le père a-t-il vis-à-vis de sa famille ? 3 a. L’organisation des axes verticaux et horizontaux et le choix des couleurs contribuent-ils, selon vous, à créer de la profondeur ? Justifiez votre réponse. b. Pourquoi le peintre a-t-il fait un tel choix ? 1800 1900 LES AUTEURS DU XIX e SIÈCLE Quelles images de la société présentent les romans du XIX e siècle ? Vocabulaire La ville et ses habitants 104 Langue Écrire des narrations 105 Écrire à partir de notions de langue Améliorer son expression écrite Écriture Écrire des narrations 106 Écrire à partir des thèmes romanesques Écrire à partir de textes de Zola, de Flaubert et de Balzac Écrire à partir d’images Évaluation Vers le brevet 108 Le Comte de Monte-Cristo, Dumas 12. Révisions : temps, modes et personnes 304 13. Révisions : les voix 307 36. Les connecteurs spatiaux et temporels 360 Leçons et exercices LANGUE Prosper Mérimée 1803-1870 Gustave Flaubert 1821-1880 Émile Zola 1840-1902 Victor Hugo 1802-1885 Honoré de Balzac 1799-1850 Walter Scott 1771-1832 Alexandre Dumas 1802-1870 Hilaire Germain Edgar de Gas, dit Edgar Degas (1834-1917), La famille Bellelli, 1858-1867, huile sur toile, 250 x 200 cm, Musée d’Orsay, Paris.

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76 773. LES MONDES DU ROMAN

■ À la découverte La société française au XIXe siècle 78

■ L ire et s ’ expr imer1. Un jeune arrivisteLe Père Goriot, Balzac 80

1. Les espérances d’un jeune homme2. L’ambition de Rastignac

2. Une bourgeoise de provinceMadame Bovary, Flaubert 83

1. Les rêves d’une jeune fi lle2. Les désillusions d’une femme

3. La fortune de M. Grandet Eugénie Grandet, Balzac 86

4. La rénovation de ParisLa Curée, Zola 88

■ Lecture d 'œuvre intégra le Jean Valjean dans Les Misérables 90

■ Parcours comparé Le roman historique 94

■ Bi lanLe roman du XIXe siècle 98

■ Propos i t ions de l ecture Lire des romans du XIXe siècle 99

■ Histo ire des artsArts de l’espace

Le Paris d’Haussmann 100

ZOOM Les travaux d’Haussmann

■ MéthodeArts du visuel

La composition d’un tableau 102

Statut du narrateur et point de vue 103

3 Les mondes du roman

1 À quelle classe sociale appartient, selon vous, la famille Bellelli ? Justifi ez votre réponse en vous appuyant sur des éléments du décor ou sur les vêtements des personnages.

2 a. Quelle impression donne la mère, par son attitude, ses vêtements et l’expression de son visage ? b. Décrivez la position du père. c. Quelle attitude le père a-t-il vis-à-vis de sa famille ?

3 a. L’organisation des axes verticaux et horizontaux et le choix des couleurs contribuent-ils, selon vous, à créer de la profondeur ? Justifi ez votre réponse.

b. Pourquoi le peintre a-t-il fait un tel choix ?

1800 1900

LES AUTEURS DU XIXe SIÈCLE

Quelles images de la société présentent

les romans du XIXe siècle ?

■ Vocabu la i reLa ville et ses habitants 104

■ LangueÉcrire des narrations 105

Écrire à partir de notions de langue

Améliorer son expression écrite

■ Écr i ture Écrire des narrations 106

Écrire à partir des thèmes romanesques

Écrire à partir de textes de Zola, de Flaubert et de Balzac

Écrire à partir d’images

■ Éva luat ionVers le brevet 108

Le Comte de Monte-Cristo, Dumas

12. Révisions : temps, modes et personnes 304

13. Révisions : les voix 307

36. Les connecteurs spatiaux et temporels 360

Leçons et exercices

L A N G U E

Prosper Mérimée 1803-1870

Gustave Flaubert1821-1880

Émile Zola1840-1902

Victor Hugo 1802-1885

Honoré de Balzac 1799-1850

Walter Scott 1771-1832

Alexandre Dumas 1802-1870

Hilaire Germain Edgar de Gas, dit Edgar Degas (1834-1917), La famille Bellelli, 1858-1867, huile sur toile, 250 x 200 cm, Musée d’Orsay, Paris.

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La société française au xIxe siècle

La Révolution, sujet de roman

La société dans les grands cycles romanesques

Certains écrivains se sont engagés politique-ment durant le XIXe siècle, en particulier Victor

Hugo (1802-1885), Alphonse de Lamartine (1790-1869) et Émile Zola (1840-1902). Hugo et Lamartine ont été élus à des fonctions diverses, Zola s’est engagé au moment de l’affaire

Dreyfus. Le statut de l’écrivain change : de moins en moins dépendant du pouvoir politique, il est aussi contraint de gagner sa vie, soit en publiant beaucoup, notamment dans la presse, soit en exer-çant un second métier.

Les écrivains dans leur siècle

La Révolution de 1789 a profondément bouleversé la société française.

La société d’Ancien Régime était fondée sur trois ordres : la noblesse, qui dirigeait le pays politique-ment et économiquement (environ 1% de la société) ; le clergé, puissant et organisé (0,5% de la société) ; et le tiers état, regroupant toutes les autres compo-santes sociales. La société d’Ancien Régime disparaît progressivement à partir de la Révolution. La richesse se répartit autre-ment, en particulier au profi t d’une classe ascendante, la bourgeoisie, qui conquiert peu à peu le pouvoir poli-tique. Les idées républicaines se diffusent.Ces changements sont au cœur de romans comme Les Chouans (1829), d’Honoré de Balzac (1799-1850), ou Quatrevingt-treize (1874), de Victor Hugo (1802-1885).

Au cours du XIXe siècle, la noblesse, affaiblie, s’allie avec la bourgeoisie enrichie pour tenter

de conserver ses privilèges. Ces alliances se font par les affaires et par les mariages. Une séparation se crée entre une haute bourgeoisie, au pouvoir, et une moyenne et une petite bourgeoisie, qui aspi-rent à davantage d’aisance. Les pauvres ne sont plus seulement des paysans ou des artisans, mais aussi des ouvriers. Balzac, dans le cycle de La Comédie humaine, ainsi que Gustave Flaubert (1821-1880) et plus tard Émile Zola (1840-1902), avec Les Rougon-Macquart, situent l’action de leurs romans dans cette société en mouvement.

AVEZ-VOUS BIEN LU ?

1 Quel pourcentage de la population la noblesse et le clergé représentent-ils à la veille de la Révolution française ?

2 Dans quel pays la révolution indus-trielle a-t-elle commencé ?

3 Sur quoi la richesse se fonde-t-elle après la révolution industrielle ?

4 Quels écrivains ont décrit les chan-gements industriels de la société ?

5 Quel est le principal sujet des romans de Zola ?

6 Comment se nomme le grand cycle romanesque de Balzac ?

Alexandre Steinlen (1859-1923), affi che pour L’Assommoir de Zola, adapté au Théâtre de la Porte Saint-Martin, Musée Carnavalet, Paris.

Affi che de la Révolution française, 1792, Musée Carnavalet, Paris.

Adolf von Menzel (1815-1905), Laminoir, 1875, huile sur toile, 253 x 153 cm, Nationalgalerie, Berlin.

Grandville (1803-1847), La grande course au clocher académique, 1839, Musée Balzac, Paris. De gauche à droite, on reconnaît A. de Vigny, devant la porte de l’Académie, V. Hugo, couronné par Notre-Dame de Paris, A. Dumas et enfi n H. de Balzac.

Le grand tournant économique est la révolution industrielle : au Royaume-

Uni, puis dans le reste de l’Europe, les progrès technologiques permettent la nais-sance d’une industrie, là où n’existait qu’un artisanat. De nombreux romans de Zola décrivent ces changements techniques. La richesse dépend désormais des indus-tries naissantes et des productions manu-

facturières, qui créent une nouvelle forme de pauvreté. Victor Hugo a consacré une partie de son œuvre à la description des plus pauvres, en particulier dans Les Misérables (1862). Zola décrira plus tard la classe ouvrière, ou les manipulations fi nancières du Second Empire.

■ Révolution de 1789 : la Révolution de 1789, commencée le 14 juillet par la prise de la Bastille, a mené à l’abolition de la royauté (Louis XVI a été guillotiné le 21 janvier 1793), et à la mise en place de la Ire Répu-blique. Elle sera suivie par le Premier Empire, puis par le rétablisse-ment de la royauté.■ Ancien Régime : nom sous lequel on désigne le régime politique anté-rieur à la Révolution de 1789.■ La Comédie humaine : c’est sous ce titre que Balzac a regroupé 137 œuvres dont 95 romans. De nombreux personnages apparaissent ainsi dans plusieurs romans, comme Eugène de Rastignac. Le titre a été choisi par l’écrivain en référence à la Divine Comédie (1314-1321) de Dante (1265-1321).■ Les Rougon-Macquart : le projet de Zola n’est pas le même que celui de Balzac ; il s’agit là de l’histoire d’une famille, observée sur cinq géné-rations, à travers les différences d’hérédité, de milieu social et de moment historique. Cet ensemble regroupe 20 romans de l’auteur écrits entre 1871 et 1893.■ révolution industrielle : on parle aussi aujourd’hui de « première industrialisation ». C’est l’émergence des industries manufacturières dans l’Europe des XVIIIe et XIXe siècles.■ affaire Dreyfus : le capitaine Dreyfus fut injustement accusé de tra-hison, à cause de ses origines juives. L’affaire divisa l’opinion française entre 1894 et 1906.

VOCABULAIRE

À la découverte

3. LES MONDES DU ROMAN

La révolution industrielle et les changements économiques et politiques

Page 3: Les Mondes Du Roman Hachette

Un jeune arriviste1

1. effrénés : sans frein, sans limite.2. se crotter : se salir.3. Talleyrand : ministre de Napoléon connu pour ses mots d’esprit.4. gens : domestiques, « gens de maison ».5. pimpants : de couleur vive.6. dissipatrice : dépensière.7. félicités : bonheurs.

1. Delphine de Nucingen : fi lle du père Goriot, épouse d’un riche banquier et sœur d’Anastasie de Restaud.2. lice : espace où se déroulaient les tournois.3. suaves : délicieuses4. franchir le Rubicon : prendre une décision hasardeuse, irrévocable et lourde de consé-quences. Le Rubicon est un petit fl euve formant la limite entre l’Italie et la Gaule qu’il était interdit de passer à la tête d’une armée et que César franchit avec ses troupes.5. la veille : Delphine de Nucingen a installé Eugène dans un appartement qu’elle lui offre.6. joli boudoir : petit salon décoré avec goût.7. lorgnant : observant.

1 Les espérances d’un jeune homme

Eugène de Rastignac, jeune noble de province sans fortune, veut réussir à tout prix. Il rend visite à la comtesse de Restaud, jeune et jolie femme rencontrée peu de temps auparavant dans un bal.

Le lendemain Rastignac s’habilla fort élégamment, et alla, vers trois heures de l’après-midi, chez madame de Restaud, en se livrant pendant la route à ces espérances étourdiment folles qui rendent la vie des jeunes gens si belle d’émotions : ils ne calculent alors ni les obstacles ni les dangers, ils voient en tout le succès, poétisent leur existence par le seul jeu de leur imagination, et se font malheureux ou tristes par le renversement de projets qui ne vivaient encore que dans leurs désirs effrénés1 ; s’ils n’étaient pas ignorants et timides, le monde social serait impossible. Eugène marchait avec mille précautions pour ne se point crotter2, mais il marchait en pensant à ce qu’il dirait à madame de Restaud, il s’approvisionnait d’esprit, il inventait les reparties d’une conversation imaginaire, il préparait ses mots fi ns, ses phrases à la Talleyrand3, en supposant de petites circonstances favorables à la déclaration sur laquelle il fondait son avenir. Il se crotta, l’étudiant, il fut forcé de faire cirer ses bottes et brosser son pantalon au Palais-Royal. « Si j’étais riche, se dit-il en changeant une pièce de trente sous qu’il avait prise en cas de malheur,

je serais allé en voiture, j’aurais pu penser à mon aise. » Enfi n il arriva rue du Helder et demanda la comtesse de Restaud. Avec la rage froide d’un homme sûr de triompher un jour, il reçut le coup d’œil méprisant des gens4 qui l’avaient vu traver-sant la cour à pied, sans avoir entendu le bruit d’une voiture à la porte. Ce coup d’œil lui fut d’autant plus sensible qu’il avait déjà compris son infériorité en entrant dans cette cour, où piaffait un beau cheval richement attelé à l’un de ces cabriolets pimpants5 qui affi chent le luxe d’une existence dissipatrice6, et sous-entendent l’habi-tude de toutes les félicités7 parisiennes. Il se mit, à lui tout seul, de mauvaise humeur. Les tiroirs ouverts dans son cerveau et qu’il comptait trouver pleins d’esprit se fermèrent, il devint stupide.

Honoré de Balzac, Le Père Goriot, I, 1835.

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2 L’ambition de Rastignac

Devenu riche, Rastignac espère devenir l’amant de Delphine de Nucingen1.

Mais Rastignac, semblable à la plupart des jeunes gens, qui, par avance, ont goûté les grandeurs, voulait se présenter tout armé dans la lice2 du monde ; il en avait épousé la fi èvre, et sentait peut-être la force de le dominer, mais sans connaître ni les moyens ni le but de cette ambition. À défaut d’un amour pur et sacré, qui remplit la vie, cette soif du pouvoir peut devenir une belle chose ; il suffi t de dépouiller tout intérêt personnel et de se proposer la grandeur d’un pays pour objet. Mais l’étudiant n’était pas encore arrivé au point d’où l’homme peut contempler le cours de la vie et la juger. Jusqu’alors il n’avait même pas complètement secoué le charme des fraîches et suaves3 idées qui enveloppent comme d’un feuillage la jeunesse des enfants élevés en province. Il avait conti-nuellement hésité à franchir le Rubicon4 parisien. Malgré ses ardentes curiosi-tés, il avait toujours conservé quelques arrière-pensées de la vie heureuse que mène le vrai gentilhomme dans son château. Néanmoins ses derniers scrupules avaient disparu la veille5, quand il s’était vu dans son appartement. En jouissant des avantages matériels de la fortune, comme il jouissait depuis longtemps des avantages moraux que donne la naissance, il avait dépouillé sa peau d’homme de province, et s’était doucement établi dans une position d’où il découvrait un bel avenir. Aussi, en attendant Delphine, mollement assis dans ce joli boudoir6 qui devenait un peu le sien, se voyait-il si loin du Rastignac venu l’année dernière à Paris, qu’en le lorgnant7 par un effet d’optique morale, il se deman-dait s’il se ressemblait en ce moment à lui-même.

Honoré de Balzac, Le Père Goriot, III, 1835.

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813. LES MONDES DU ROMAN

Représentation de la mode masculine, publiée dans La Fashion, 1841, lithographie couleur,

Musée Carnavalet, Paris.

LECTURE DE L’IMAGE

1 Que signifi e le titre anglais de cette lithographie ?2 Pourquoi les trois personnages ne sont-ils pas

représentés sous le même angle ? Qu’est-ce que cela permet de mettre en valeur ?

3 a. Qu’y a-t-il de caractéristique dans la coupe des manteaux ? b. Comment les pantalons sont-ils taillés ? c. D’après cette lithographie, comment défi niriez-vous le mot « dandy » ?

Jean Béraud (1849-1935), Sur le boulevard, Scène parisienne sur les Grands Boulevards parisiens à la Belle Époque, huile sur toile, 25 x 33 cm, Musée Carnavalet, Paris.

LA FASHION

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82 833. LES MONDES DU ROMAN

1. postillons : conducteurs des voitures de poste ou des diligences.2. nacelles : petites embarcations à rames.3. urnes : vases dans lesquels on conserve les cendres des morts.4. Walter Scott : écrivain écossais (1771-1832), auteur de romans historiques comme Ivanhoé (1819).5. bahuts : meubles de forme ancienne.6. ménestrels : musiciens ambulants du Moyen Âge.7. trèfl e des ogives : sculpture en forme de trèfl e.8. keepsakes : albums romantiques pour les jeunes fi lles.9. aumônière : sorte de bourse.

1 Les rêves d’une jeune fi lle

Emma, jeune provinciale élevée au couvent, a lu beaucoup de romans sentimentaux.

Ce n’étaient qu’amours, amants, amantes, dames persécutées s’évanouis-sant dans des pavillons solitaires, postillons1 qu’on tue à tous les relais, chevaux qu’on crève à toutes les pages, forêts sombres, troubles du cœur, serments, sanglots, larmes et baisers, nacelles2 au clair de lune, rossignols dans les bosquets, messieurs braves comme des lions, doux comme des agneaux, vertueux comme on ne l’est pas, toujours bien mis, et qui pleurent comme des urnes3. Pendant six mois, à quinze ans, Emma se graissa donc les mains à cette poussière des vieux cabinets de lecture. Avec Walter Scott4, plus tard, elle s’éprit de choses historiques, rêva bahuts5, salle des gardes et ménestrels6. Elle aurait voulu vivre dans quelque vieux manoir, comme ces châtelaines au long corsage, qui, sous le trèfl e des ogives7, passaient leurs jours, le coude sur la pierre et le menton dans la main, à regarder venir du fond de la campagne un cavalier à plume blanche qui galope sur un cheval noir. […]

Quelques-unes de ses camarades apportaient au couvent les keepsakes8 qu’elles avaient reçus en étrennes. Il les fallait cacher, c’était une affaire ; on les lisait au dortoir. Maniant délicatement leurs belles reliures de satin, Emma fi xait ses regards éblouis sur le nom des auteurs inconnus qui avaient signé, le plus souvent, comtes ou vicomtes, au bas de leurs pièces.

Elle frémissait, en soulevant de son haleine le papier de soie des gravures, qui se levait à demi plié et retombait doucement contre la page. C’était, derrière la balustrade d’un balcon, un jeune homme en court manteau qui serrait dans ses bras une jeune fi lle en robe blanche, portant une aumônière9 à sa ceinture ; ou bien les portraits anonymes des ladies anglaises à boucles blondes, qui, sous leur chapeau de paille rond, vous regardent avec leurs grands yeux clairs. On en voyait d’étalées dans des voitures, glissant au milieu

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Une bourgeoise de province

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LIRE

Un jeune homme devant le monde

1 Qu’y a-t-il de commun dans la situation d’Eugène dans les deux textes ?

2 a. À quel problème Eugène est-il confronté dans le texte 1 ? b. Qui le lui fait sentir ?

3 Par quel moyen Eugène espère-t-il briller dans le texte 1 ?

4 En quoi la situation d’Eugène est-elle différente dans le texte 2 ?

Deux portraits de Rastignac5 a. Qui observe le « Rastignac venu

l’année dernière à Paris » (texte 2, lignes 19-20) ? b. Que constate-t-il ?

6 a. Quelle était la première ambi-tion de Rastignac ? b. Quel « bel avenir » (texte 2, ligne 18) Rastignac peut-il maintenant envi-sager ?

7 Quels noms désignent Rastignac dans les deux textes ?

8 L’opinion du narrateur sur Rasti-gnac a-t-elle évolué entre les deux textes ? Justifi ez votre réponse.

ENRICHIR SON VOCABULAIRE

Relevez, dans les deux textes, les six adverbes formés sur le modèle de « étourdiment » (texte 1, ligne 3) ; à partir de quels adjectifs sont-ils formés ?

ÉCRIRE

Faites le récit de la rencontre avec Mme de Restaud, en vous souvenant qu’Eugène « devint stupide » (texte 1, ligne 31), puis celui de la rencontre avec Mme de Nucingen.Consignes : Les deux textes, d’une dizaine de lignes chacun, mettront en valeur l’évolution du personnage. Vous emploierez les temps du récit (imparfait et passé simple).

S’EXPRIMER À L’ORAL C1 Participer à un débat, Socle

communà un échange verbal

Au XIXe siècle, les mariages sont arran-gés en fonction de critères sociaux. Pensez-vous que ce soit encore le cas aujourd’hui ?

Un regard sur la société du XIXe siècleLes romans du XIXe siècle décri-vent souvent des personnages jeunes qui font leurs débuts

dans la vie. Promotion sociale et vie amoureuse sont mêlées. Afi n de porter un regard critique sur les individus et la société dans laquelle ils évoluent, les roman-ciers prennent de la distance

avec leurs personnages. La nar-ration est assumée par un nar-

rateur externe au point de vue

omniscient, c’est-à-dire qui est extérieur à l’action du récit et qui sait tout de ses personnages. Rastignac est le type même du

jeune ambitieux. Ne supportant plus de dépendre d’une famille provinciale aisée, sans être riche, il décide de réussir vite : les femmes serviront ses ambi-tions.

RETENIR

Georges Callot (1857-1903), L’Attente, 1886, huile sur toile, 93 x 145 cm, Musée d’art et d’histoire, Cholet.

1. Quel procédé donne au tableau de la profondeur ? Que voit-on à l’arrière-plan ?

2. D’où vient la lumière ? Que permet-elle de mettre en valeur ?

Extrait du téléfi lm Le Père Goriot, de Jean-Daniel Verhaeghe, 2004, avec Rosemarie La Vaullée (Mme de Restaud) et Florence Darel (Mme de Nucingen).

Page 5: Les Mondes Du Roman Hachette

par vous-même, choisissez trois synonymes de l’adjectif « roma-nesque » qui, selon vous, corres-pondent à Emma Bovary. Justifi ez votre choix.

ÉCRIRE

C1 Rédiger un texte bref, cohérent et ponctué Socle communà partir de consignes données

Emma Bovary rencontre une amie qui devient sa confi dente, quelque temps après son mariage. Cette amie écrit à Charles pour l’aider à comprendre sa femme. Consignes : Dans une lettre d’une vingtaine de lignes, elle lui explique le caractère d’Emma, lui raconte ses lectures et argumente afi n que Charles change de comportement.

S’EXPRIMER À L’ORAL

C1 Développer de façon suivie un propos Socle communen public sur un sujet déterminé

Votre point de vue sur le monde ou la société a-t-il déjà été modifi é par une lecture ou un fi lm ? Vous justifi erez votre réponse à l’aide d’un exemple et d’un argument.

LIRE

Rêves et réalité1 a. Comment Emma Bovary ima-

ginait-elle sa lune de miel ? b. Quels modèles nourrissent l’ima-gination d’Emma ? Justifi ez votre réponse.

2 Relevez, dans les deuxième et troisième paragraphes, les emplois du conditionnel. Quelle est la valeur de ces conditionnels ?

3 Comment Charles déçoit-il son épouse ?

Emma et Charles4 a. Quel portrait est fait d’Emma,

dans les lignes 1 à 18 ? b. Qu’y a-t-il d’ironique, dans ce por-trait, à l’égard d’Emma ?

5 a. À qui peut-on attribuer la des-cription de Charles ? b. À qui peut-on attribuer le portrait d’Emma ?

ENRICHIR SON VOCABULAIRE B2i Dans un dictionnaire de syno-

nymes en ligne que vous trouverez

Les pensées des personnagesDans les romans du XIXe siècle, l’opinion du narrateur sur la société est souvent mélangée avec les rêves ou les illusions des personnages. En employant le point de vue interne, le narrateur donne accès aux pensées du

personnage. Mais au moyen de son regard ironique, le narra-

teur externe juge aussi ses per-sonnages et permet au lecteur de prendre ses distances. Flaubert décrit les rêves et les désillusions d’Emma à la fois en adoptant le regard de cette der-nière, par exemple sur Charles, et en se moquant d’elle.

RETENIR

853. LES MONDES DU ROMAN

1. escarpées : en pente.2. cottage : petite maison élégante de la campagne anglaise ou écossaise.3. basques : parties découpées du vêtement qui descendent au-dessous de la taille.4. espalier : arbres fruitiers plantés le long d’un mur et dont les branches sont palissées.

des parcs, où un lévrier sautait devant l’attelage que conduisaient au trot deux petits postillons en culotte blanche. D’autres, rêvant sur des sofas près d’un billet décacheté10, contemplaient la lune, par la fenêtre entrouverte, à demi drapée d’un rideau noir.

Gustave Flaubert, Madame Bovary, chapitre VI, 1857.

2 Les désillusions d'une femme

Emma vient d’épouser Charles Bovary.

Elle songeait quelquefois que c’étaient là pourtant les plus beaux jours de sa vie, la lune de miel, comme on disait. Pour en goûter la douceur, il eût fallu, sans doute, s’en aller vers ces pays à noms sonores où les lendemains de mariage ont de plus suaves paresses ! Dans des chaises de poste, sous des stores de soie bleue, on monte au pas des routes escarpées1, écoutant la chanson du postillon, qui se répète dans la montagne avec les clochettes des chèvres et le bruit sourd de la cascade. Quand le soleil se couche, on respire au bord des golfes le parfum des citronniers ; puis, le soir, sur la terrasse des villas, seuls et les doigts confon-dus, on regarde les étoiles en faisant des projets. Il lui semblait que certains lieux sur la terre devaient produire du bonheur, comme une plante particulière au sol et qui pousse mal tout autre part. Que ne pouvait-elle s’accouder sur le balcon des chalets suisses ou enfermer sa tristesse dans un cottage2 écossais, avec un mari vêtu d’un habit de velours noir à longues basques3, et qui porte des bottes molles, un chapeau pointu et des manchettes !

Peut-être aurait-elle souhaité faire à quelqu’un la confi dence de toutes ces choses. Mais comment dire un insaisissable malaise, qui change d’aspect comme les nuées, qui tourbillonne comme le vent ? Les mots lui manquaient donc, l’occasion, la hardiesse.

Si Charles l’avait voulu cependant, s’il s’en fût douté, si son regard, une seule fois, fût venu à la rencontre de sa pensée, il lui semblait qu’une abondance subite se serait détachée de son cœur, comme tombe la récolte d’un espalier4

quand on y porte la main. Mais, à mesure que se serrait davantage l’intimité de leur vie, un détachement intérieur se faisait qui la déliait de lui.

La conversation de Charles était plate comme un trottoir de rue, et les idées de tout le monde y défi laient dans leur costume ordi-naire, sans exciter d’émotion, de rire ou de rêverie. Il n’avait jamais été curieux, disait-il, pendant qu’il habitait Rouen, d’aller voir au théâtre les acteurs de Paris. Il ne savait ni nager, ni faire des armes, ni tirer le pistolet, et il ne put, un jour, lui expliquer un terme d’équitation qu’elle avait rencontré dans un roman.

Gustave Flaubert, Madame Bovary, chapitre VII, 1857.

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• Comment Madame Bovary est-elle mise en valeur sur cette image ?

Extrait du fi lm Madame Bovary, de Claude Chabrol, 1991,avec Isabelle Huppert.

Extrait du fi lm Madame Bovary, de Claude Chabrol, 1991, avec Isabelle Huppert.

LIRE

L’infl uence des romans sur une jeune fi lle

1 a. Selon les éléments évoqués dans les lignes 1 à 12, quel est le genre de roman lu par Emma ? b. Quels clichés, énumérés dans les lignes 31 à 41, constituent l’imaginaire d’Emma ?

2 a. Relevez les quatre comparaisons des lignes 9 à 12.b. Citez deux éléments comparés et les deux éléments comparants qui leur corres-pondent.c. À quelle forme d’humour appartient la dernière comparaison ?

3 Quelle image Emma se fait-elle de son avenir, selon vous ? Justifi ez votre réponse.

10. billet décacheté : lettre sortie de son enveloppe.

Page 6: Les Mondes Du Roman Hachette

LIRE

Un opportuniste1 Quelles sont les étapes de la for-

tune du « père Grandet » ?2 a. À quelle occasion Grandet fait-

il des achats judicieux ? Lesquels ? b. Quelle différence y a-t-il entre « légalement » et « légitimement » (ligne 12) ?

3 Comment Grandet se fait-il payer le vin qu’il vend « aux armées répu-blicaines » (ligne 20) ?

4 Quel avantage Grandet tire-t-il d’avoir été maire ? Justifi ez votre réponse.

Un notable de province5 a. Quels sont les différents titres

donnés à Grandet ? b. Montrez comment chaque titre correspond à une étape de sa for-tune.

6 De quels événements Grandet tire-t-il son dernier titre ?

7 a. Jusqu’où s’étend la réputation de Grandet ?b. Pourquoi Grandet fait-il tellement parler ?

L’avènement de la bourgeoisieLes romans réalistes démontent souvent les mécanismes qui ont permis la construction de gran-des fortunes. Leur analyse de la

société est à la fois financière, politique, sociale et humaine. Ils montrent comment, économi-

quement d’abord, politiquement ensuite, la bourgeoisie a sup-planté la noblesse. Cette muta-tion profonde est décrite dans de très nombreux romans de La Comédie humaine de Balzac. Le portrait du père Grandet est l’un des nombreux portraits de spéculateurs que l’on trouve dans les romans de Balzac. Mais c’est aussi le portrait d’un type humain : l’avare.

RETENIR

873. LES MONDES DU ROMAN

La fortune de M. Grandet3

1. biens du clergé : les biens du clergé ont été nationalisés en 1789. Dans le district de Saumur, ils sont mis en vente, pour l’essentiel, en 1790 et 1791.2. Le tonnelier… venait d’épouser : la concordance des temps voudrait aujourd'hui que l'on dise « le tonnelier épousa ».3. louis d’or : monnaie d’or appelée ainsi depuis Louis XIII ; la somme est déjà très importante pour l’époque.4. métairies : exploitations agricoles.5. ci-devant : nom donné aux nobles durant la Révolution.6. Consulat : période historique (1799-1802) qui précède l’Empire ; Napoléon est premier Consul.7. avoir porté le bonnet rouge : avoir été partisan de la Révolution.

8. prodigalité : excès de dépense.

Les origines de la fortune de M. Grandet sont exposées au début du roman.

Monsieur Grandet jouissait à Saumur d’une réputation dont les causes et les effets ne seront pas entièrement compris par les personnes qui n’ont point, peu ou prou, vécu en province. Monsieur Grandet, encore nommé par certaines gens le père Grandet, mais le nombre de ces vieillards diminuait sensiblement, était en 1789 un maître-tonnelier fort à son aise, sachant lire, écrire et compter. Dès que la République française mit en vente, dans l’arrondissement de Saumur, les biens du clergé1, le tonnelier, alors âgé de quarante ans, venait d’épouser2 la fi lle d’un riche marchand de planches. Grandet alla, muni de sa fortune liquide et de la dot, muni de deux mille louis d’or3, au district, où, moyennant deux cents doubles louis offerts par son beau-père au farouche républicain qui surveillait la vente des domaines nationaux, il eut pour un morceau de pain, légalement, sinon légitimement, les plus beaux vignobles de l’arrondissement, une vieille abbaye et quelques métairies4. Les habitants de Saumur étant peu révolutionnaires, le père Grandet passa pour un homme hardi, un républicain, un patriote, pour un esprit qui donnait dans les nouvelles idées, tandis que le tonnelier donnait tout bonnement dans les vignes. Il fut nommé membre de l’administration du district de Saumur, et son infl uence pacifi que s’y fi t sentir politiquement et commercialement. Politiquement, il protégea les ci-devant5 et empêcha de tout son pouvoir la vente des biens des émigrés ; commercialement, il fournit aux armées républicaines un ou deux milliers de pièces de vin blanc, et se fi t payer en superbes prairies dépendant d’une communauté de femmes que l’on avait réservée pour un dernier lot. Sous le Consulat6, le bonhomme Grandet devint maire, administra sagement, vendangea mieux encore ; sous l’Empire, il fut monsieur Grandet. Napoléon n’aimait pas les républicains : il remplaça monsieur Grandet, qui passait pour avoir porté le bonnet rouge7, par un grand propriétaire, un homme à particule,

un futur baron de l’Empire. Monsieur Grandet quitta les honneurs munici-paux sans aucun regret. Il avait fait faire dans l’intérêt de la ville d’excellents chemins qui menaient à ses propriétés. Sa maison et ses biens, très avantageuse-ment cadastrés, payaient des impôts modérés. Depuis le classement de ses diffé-rents clos, ses vignes, grâce à des soins constants, étaient devenues la tête du pays, mot technique en usage pour indiquer les vignobles qui produisent la première qualité de vin. Il aurait pu demander la croix de la Légion d’Honneur. Cet événement eut lieu en 1806. Monsieur Grandet avait alors cinquante-sept ans, et sa femme environ trente-six. Une fi lle unique, fruit de leurs légitimes amours, était âgée de dix ans. Monsieur Grandet, que la Providence voulut sans doute consoler de sa disgrâce administrative, hérita successivement pendant cette année de madame de La Gaudinière, née de La Bertellière, mère de madame Grandet ; puis du vieux monsieur La Bertellière, père de la défunte ; et encore de madame Gentillet, grand’mère du côté maternel : trois successions dont l’importance ne fut connue de personne. L’avarice de ces trois vieillards était si passionnée que depuis longtemps ils entassaient leur argent pour pouvoir le contempler secrètement. Le vieux monsieur La Bertellière appelait un place-ment une prodigalité8, trouvant de plus gros intérêts dans l’aspect de l’or que dans les bénéfi ces de l’usure. La ville de Saumur présuma donc la valeur des économies d’après les revenus des biens au soleil. Monsieur Grandet obtint alors le nouveau titre de noblesse que notre manie d’égalité n’effacera jamais : il devint le plus imposé de l’arrondissement.

Honoré de Balzac, Eugénie Grandet, 1833.

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E T S ' E X P R I M E RL I RE

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Extrait du téléfi lm Eugénie Grandet, de Jean-Daniel Verhaeghe, 1994, avec Jean Carmet dans le rôle du père Grandet.

1. D’après le décor et les costumes des personnages, peut-on identifi er la classe sociale à laquelle appar-tient cette famille ? Justifi ez votre réponse.

2. a. Pourquoi M. Grandet porte-t-il une écharpe à l’intérieur ?b. Qu'est-ce que cela révèle de son caractère ?

ENRICHIR SON VOCABULAIRE

Qu’est-ce que « l’usure » (ligne 45) dans le texte ? Quel synonyme de ce mot utiliseriez-vous aujourd’hui (vous pouvez vous aider d’un dictionnaire de synonymes) ? Quel est le sens habi-tuel de ce mot aujourd’hui ?

ÉCRIRE

C1 Rédiger un texte bref, cohérent et ponctué Socle communà partir de consignes données

Un habitant de Saumur décrit M. Gran-det à un Parisien. Il raconte comment il a fait fortune, précise son caractère. Il donne également son opinion sur M. Grandet. Consignes : Votre texte fera une tren-taine de lignes. Vous emploierez des types de phrases variés. Vous pourrez commencer par : « Si vous pensez qu’en province, il n’y a pas de grande fortune, vous vous trompez… »

S’EXPRIMER À L’ORAL

C5 Être sensible aux enjeux esthétiques Socle communet humains d'un texte littéraire

Comment imaginez-vous la vie de fa-mille de M. Grandet ? Vous étayerez votre opinion à partir d’éléments du texte et de la photographie (p. 86).

Page 7: Les Mondes Du Roman Hachette

7 Qu’espère Saccard pour être tel-lement enthousiaste ? Justifi ez votre réponse en vous appuyant sur des éléments du texte.

ENRICHIR SON VOCABULAIRE 1 Le texte parle de « boulevard »

(ligne 4) et de « faubourgs » (ligne 9). Quelle est la défi nition exacte de ces mots ?

2 Qu’est-ce qu’une avenue, une impasse, une contre-allée ?

ÉCRIREC5 Avoir des connaissances et des repères, Socle

communrelevant de la culture artistique

Imaginez une importante transfor-mation du quartier où vous habitez, et décrivez les changements inter-venus.Consignes : Vous emploierez la voix passive, et vous veillerez à utiliser aussi des connecteurs spatiaux. Votre texte fera une vingtaine de lignes.

LIRE

La ville découpée1 Lignes 2-3, 9-10 : comment la

ville va-t-elle être réorganisée ?2 À quel champ lexical appartien-

nent les mots employés pour décrire la ville, dans les lignes 10 à 35 ? Jus-tifi ez votre réponse par le relevé d’au moins quatre mots.

3 a. Quelle fi gure de style est em-ployée pour présenter Paris dans les lignes 14-15 ? b. Quel est l’effet de l’emploi de cette même fi gure de style à partir de la ligne 42 ?

Le saccage4 a. À quoi la main de Saccard est-

elle comparée, aux lignes 2 et 18 ? b. Qui fait ces comparaisons ?

5 Que pensez-vous du nom du per-sonnage principal ?

6 Qui désigne le pronom « ils », à la ligne 6 ?

Le monde des affairesEn racontant l’histoire des for-

tunes et des faillites, les roman-ciers du XIXe siècle expliquent le fonctionnement des affaires. Le roman devient ainsi un révéla-

teur de la société, et permet des prises de position politiques.Zola a décrit les travaux engagés sous le Second Empire, et les malversations financières qui les ont accompagnés, dans plu-sieurs romans des Rougon-Macquart. Saccard est le type même du spéculateur sans morale, prêt à toutes les mani-pulations fi nancières et immobi-lières.

RETENIR

893. LES MONDES DU ROMAN

La rénovation de Paris4

1. Les tronçons agoniseront dans le plâtre : les anciens bâtiments seront ensevelis par les nouveaux.2. forts : restes des fortifi cations qui entouraient Paris.

3. moellons : pierres de construction.

Saccard, fi nancier avide, décrit à sa femme Angèle les projets de rénovation de Paris dont il espère tirer profi t.

Regarde là-bas, du côté des Halles, on a coupé Paris en quatre…Et de sa main étendue, ouverte et tranchante comme un coutelas, il fi t signe

de séparer la ville en quatre parts.– Tu veux parler de la rue de Rivoli et du nouveau boulevard que l’on perce,

demanda sa femme.– Oui, la grande croisée de Paris, comme ils disent. Ils dégagent le Louvre et

l’Hôtel de Ville. Jeux d’enfants que cela ! C’est bon pour mettre le public en appétit… Quand le premier réseau sera fi ni, alors commencera la grande danse. Le second réseau trouera la ville de toutes parts, pour rattacher les faubourgs au premier réseau. Les tronçons agoniseront dans le plâtre1… Tiens, suis un peu ma main. Du boulevard du Temple à la barrière du Trône, une entaille ; puis de ce côté, une autre entaille, de la Madeleine à la plaine Monceau ; et une troi-sième entaille dans ce sens, une autre dans celui-ci, une entaille là, une entaille plus loin, des entailles partout. Paris haché à coups de sabre, les veines ouvertes, nourrissant cent mille terrassiers et maçons, traversé par d’admirables voies stratégiques qui mettront les forts2 au cœur des vieux quartiers.

La nuit venait. Sa main sèche et nerveuse coupait toujours dans le vide. Angèle avait un léger frisson, devant ce couteau vivant, ces doigts de fer qui hachaient sans pitié l’amas sans bornes des toits sombres. Depuis un instant, les brumes de l’horizon roulaient doucement des hauteurs, et elle s’imaginait

entendre, sous les ténèbres qui s’amas-saient dans les creux, de lointains craquements, comme si la main de son mari eût réellement fait les entailles dont il parlait, crevant Paris d’un bout à l’autre, brisant les poutres, écrasant les moellons3, laissant derrière elle de longues et affreuses blessures de murs croulants. La petitesse de cette main, s’acharnant sur une proie géante, fi nis-sait par inquiéter ; et, tandis qu’elle déchirait sans effort les entrailles de l’énorme ville, on eût dit qu’elle prenait un étrange refl et d’acier dans le crépuscule bleuâtre.

– Il y aura un troisième réseau, continua Saccard, au bout d’un silence, comme se parlant à lui-même ; celui-là est trop lointain, je le vois moins. Je n’ai trouvé que peu d’indices… Mais ce sera la folie pure, le galop infernal des millions, Paris soûlé et assommé !

Il se tut de nouveau, les yeux fi xés ardemment sur la ville, où les ombres roulaient de plus en plus épaisses. Il devait interroger cet avenir trop éloigné qui lui échappait. Puis, la nuit se fi t, la ville devint confuse, on l’entendit respi-rer largement, comme une mer dont on ne voit plus que la crête pâle des vagues. Çà et là, quelques murs blanchissaient encore ; et, une à une, les fl ammes jaunes des becs de gaz piquèrent les ténèbres, pareilles à des étoiles s’allumant dans le noir d’un ciel d’orage.

Émile Zola, La Curée, chapitre II, 1895.

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Hilaire Guesnu (1820-1868), Carte de Paris pendant la période des grands travaux d’Haussmann, 1864, gravure colorisée, Bibliothèque historique de la Ville de Paris.

Photographie de Philippe Guignard, le Palais Garnier et l’avenue de l’Opéra, Paris.

Page 8: Les Mondes Du Roman Hachette

913. LES MONDES DU ROMAN

Jean Valjean dans Les Misérables

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D ' Œ U V RE I N TÉ G RALELE C T U RE

1. lieues : anciennes unités de mesure, équivalant à environ 4 kilomètres.2. passeport jaune : indique qu’il sort du bagne.3. Madame Magloire : servante de Mgr Bienvenu.

1. Montreuil-sur-Mer : ville du Nord-Pas-de-Calais.2. choisi : précis. 3. tendue de noir : dans laquelle on célèbre un enterrement.4. psalmodies : textes religieux récités sur une seule note.5. galetas : chambre misérable.

1 Jean Valjean chez Monseigneur Bienvenu

Jean Valjean vient d’être libéré du bagne et arrive un soir de 1815 dans la ville de Digne. Épuisé par le voyage entrepris à pied, il cherche un gîte pour la nuit. Il entre par hasard chez Monseigneur Bienvenu, évêque de la ville.

– Voici. Je m’appelle Jean Valjean. Je suis un galérien. J’ai passé dix-neuf ans au bagne. Je suis libéré depuis quatre jours et en route pour Pontarlier qui est ma destination. Quatre jours que je marche depuis Toulon. Aujourd’hui, j’ai fait douze lieues1 à pied. Ce soir, en arrivant dans ce pays, j’ai été dans une auberge, on m’a renvoyé à cause de mon passeport jaune2 que j’avais montré à la mairie. Il avait fallu. J’ai été à une autre auberge. On m’a dit : Va-t’en ! Chez l’un, chez l’autre. Personne n’a voulu de moi. J’ai été à la prison, le guichetier n’a pas ouvert. J’ai été dans la niche d’un chien. Ce chien m’a mordu et m’a chassé, comme s’il avait été un homme. On aurait dit qu’il savait qui j’étais. […] Je suis très fatigué, douze lieues à pied, j’ai bien faim. Voulez-vous que je reste ?

– Madame Magloire3, dit l’évêque, vous mettrez un couvert de plus. L’homme fi t trois pas et s’approcha de la lampe qui était sur la table. – Tenez, reprit-il, comme s’il n’avait pas bien compris, ce n’est pas ça. Avez-

vous entendu ? Je suis un galérien. Un forçat. Je viens des galères. Il tira de sa poche une grande feuille de papier jaune qu’il déplia. – Voilà mon passeport. Jaune, comme vous voyez. Cela sert à me faire chasser

de partout où je suis. Voulez-vous lire ? Je sais lire, moi. J’ai appris au bagne. Il y a une école pour ceux qui veulent. Tenez, voilà ce qu’on a mis sur le passeport : « Jean Valjean, forçat libéré, natif de... – cela vous est égal... – Est resté dix-neuf ans au bagne. Cinq ans pour vol avec effraction. Quatorze ans pour avoir tenté de s’évader quatre fois. Cet homme est très dangereux. » – Voilà ! Tout le monde m’a jeté dehors. Voulez-vous me recevoir, vous ? Est-ce une auberge ? Voulez-vous me donner à manger et à coucher ? Avez-vous une écurie ?

– Madame Magloire, dit l’évêque, vous mettrez des draps blancs au lit de l’alcôve.

Victor Hugo, Les Misérables, 1re partie « Fantine », livre 2, chapitre III.

2 Monsieur Madeleine

Jean Valjean a pris le nom de Monsieur Madeleine, afi n de cacher qu’il est un ancien bagnard. Il est devenu industriel, puis maire de Montreuil-sur-Mer.

Il prenait ses repas toujours seul, avec un livre ouvert devant lui où il lisait.

Il avait une petite bibliothèque bien faite. Il aimait les livres ; les livres sont des amis froids et sûrs. À mesure que le loisir lui venait avec la fortune, il semblait qu’il en profi tât pour cultiver son esprit. Depuis

qu’il était à Montreuil-sur-Mer1, on remarquait que d’année en année son langage devenait plus poli, plus choisi2 et plus doux. […]

Quand il voyait la porte d’une église tendue de noir3, il entrait ; il recher-chait un enterrement comme d’autres recherchent un baptême. Le veuvage et le malheur d’autrui l’attiraient à cause de sa grande douceur ; il se mêlait aux amis en deuil, aux familles vêtues de noir, aux prêtres gémissant autour d’un cercueil. Il semblait donner volontiers pour texte à ses pensées ces psalmodies4 funèbres pleines de la vision d’un autre monde.

L’œil au ciel, il écoutait, avec une sorte d’aspiration vers tous les mystères de l’infi ni, ces voix tristes qui chantent sur le bord de l’abîme obscur de la mort.

Il faisait une foule de bonnes actions en se cachant comme on se cache pour les mauvaises. Il pénétrait à la dérobée, le soir, dans les maisons ; il montait furtivement des escaliers. Un pauvre diable, en rentrant dans son galetas5, trou-vait que sa porte avait été ouverte, quelquefois même forcée, dans son absence. Le pauvre homme se récriait : quelque malfaiteur est venu ! Il entrait, et la première chose qu’il voyait, c’était une pièce d’or oubliée sur un meuble. « Le malfaiteur » qui était venu, c’était le père Madeleine.

Victor Hugo, Les Misérables, Partie 1, livre 5, chapitre III.

3 Le seau de Cosette

Cosette, fi lle de Fantine, ouvrière morte d’épuisement, a été placée en pension chez les Thénardier. Elle travaille durement ; un soir, ils l’envoient chercher de l’eau à une source éloignée. Un homme surgit, qui lui prend le seau des mains.

Cosette, nous l’avons dit, n’avait pas eu peur.L’homme lui adressa la parole. Il parlait d’une voix grave et presque basse.– Mon enfant, c’est bien lourd pour vous ce que vous portez là.

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1 Pourquoi Jean Valjean est-il rejeté, dans le récit qu’il fait aux lignes 1 à 9 ? Cela vous paraît-il juste ?

2 Pourquoi les paroles de l’évêque sont-elles surprenantes aux lignes 12 et 25 ?3 Quelle est la réaction de l’ancien forçat à l’invitation de l’évêque, lignes 14 à

24 ? Quels sentiments peut-il éprouver envers l’évêque et la société ?

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

« Jean Valjean », personnage des Misérables, gravure colorisée, début du XXe siècle.

1 Donnez un exemple prouvant que M. Madeleine a bon cœur.2 Pourquoi M. Madeleine aime-t-il les livres ? 3 Pourquoi M. Madeleine se cache-t-il pour donner une pièce d’or ?

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

Extrait du fi lm Les Misérables, de Billie August, 1998, avec Liam Neeson.

• Comment la bien-veillance de M. Madeleine envers les déshérités est-elle représentée, sur cette image ?

Page 9: Les Mondes Du Roman Hachette

933. LES MONDES DU ROMAN92

1. chétive : frêle, à l’aspect fragile.

1. Aimez-vous bien toujours : Jean Valjean s’adresse à Cosette et à Marius.2. je ne t’ai pas vue tous ces temps-ci : Jean Valjean n’était pas le bienvenu chez Marius, depuis qu’il lui avait avoué être un ancien bagnard.

Cosette leva la tête et répondit :– Oui, monsieur.– Donnez, reprit l’homme. Je vais vous le porter.Cosette lâcha le seau. L’homme se mit à cheminer près d’elle.– C’est très lourd en effet, dit-il entre ses dents.Puis il ajouta :– Petite, quel âge as-tu ?– Huit ans, monsieur.– Et viens-tu de loin comme cela ?– De la source qui est dans le bois.– Et est-ce loin où tu vas ? – À un bon quart d’heure d’ici.L’homme resta un moment sans parler, puis il dit brusquement :– Tu n’as donc pas de mère ?– Je ne sais pas, répondit l’enfant.Avant que l’homme eût eu le temps de reprendre la parole, elle ajouta :– Je ne crois pas. Les autres en ont. Moi, je n’en ai pas.Et après un silence, elle reprit :– Je crois que je n’en ai jamais eu.L’homme s’arrêta, il posa le seau à terre, se pencha et mit ses deux mains sur

les deux épaules de l’enfant, faisant effort pour la regarder et voir son visage dans l’obscurité.

La fi gure maigre et chétive1 de Cosette se dessinait vaguement à la lueur livide du ciel.

– Comment t’appelles-tu ? dit l’homme.– Cosette.L’homme eut comme une secousse électrique. Il la regarda encore, puis il ôta

ses mains de dessus les épaules de Cosette, saisit le seau, et se remit à marcher.

Victor Hugo, Les Misérables, Partie II, livre 3, chapitre VII.

4 La mort de Jean Valjean

Le roman se termine. Cosette et Marius, son époux, viennent voir Jean Valjean qui agonise. Il parle.

Ce sont là des choses du passé. Les forêts où l’on a passé avec son enfant, les arbres où l’on s’est promené, les couvents où l’on s’est caché, les jeux, les bons rires de l’enfance, c’est de l’ombre. Je m’étais imaginé que tout cela m’apparte-nait. Voilà où était ma bêtise. Ces Thénardier ont été méchants. Il faut leur pardonner. Cosette, voici le moment venu de te dire le nom de ta mère. Elle s’appelait Fantine. Retiens ce nom-là : – Fantine. Mets-toi à genoux toutes les fois que tu le prononceras. Elle a bien souffert. Elle t’a bien aimée. Elle a eu en malheur tout ce que tu as en bonheur. Ce sont les partages de Dieu. Il est là-haut, il nous voit tous, et il sait ce qu’il fait au milieu de ses grandes étoiles.

Je vais donc m’en aller, mes enfants. Aimez-vous bien toujours1. Il n’y a guère autre chose que cela dans le monde : s’aimer. Vous penserez quelquefois au pauvre vieux qui est mort ici. Ô ma Cosette ! ce n’est pas ma faute, va, si je ne t’ai pas vue tous ces temps-ci2, cela me fendait le cœur ; j’allais jusqu’au coin de ta rue, je devais faire un drôle d’effet aux gens qui me voyaient passer, j’étais comme fou, une fois je suis sorti sans chapeau. Mes enfants, voici que je ne vois plus très clair, j’avais encore des choses à dire, mais c’est égal. Pensez un peu à moi. Vous êtes des êtres bénis. Je ne sais pas ce que j’ai, je vois de la lumière. Approchez encore. Je meurs heureux. Donnez-moi vos chères têtes bien-aimées, que je mette mes mains dessus.

Cosette et Marius tombèrent à genoux, éperdus, étouffés de larmes, chacun sur une des mains de Jean Valjean. Ces mains augustes ne remuaient plus.

Il était renversé en arrière, la lueur des deux chandeliers l’éclairait ; sa face blanche regardait le ciel, il laissait Cosette et Marius couvrir ses mains de baisers ; il était mort.

La nuit était sans étoiles et profondément obscure. Sans doute, dans l’ombre, quelque ange immense était debout, les ailes déployées, attendant l’âme.

Victor Hugo, Les Misérables, Partie V, livre 9, chapitre V.

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1 Quels éléments du texte montrent la détresse de Cosette ?2 a. Pourquoi « l’homme » prend-il le seau des mains de Cosette ?

b. Sait-il qui elle est ?3 Qui peut être cet « homme » ? Justifi ez votre réponse.

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

François Pompon (1855-1933), Cosette 1888, sculpture de plâtre, Maison de Victor Hugo, Paris.

• Quels signes montrent la faiblesse de Cosette face à la tâche qui l’attend ?

PISTES POUR L'ÉTUDE COMPARÉE DES EXTRAITS1 Comment la société se comporte-t-elle vis-à-vis

de Jean Valjean, même après sa sortie du bagne (textes 1 et 4) ? Qu’en pensez-vous ?

2 Quelle est l’attitude de M. Madeleine dans la ville de Montreuil-sur-Mer (texte 2) ? Désire-t-il s’intégrer ou rejette-t-il la société qui l’a condamné ?

3 a. Pourquoi et comment le langage de M. Made-leine change-t-il (texte 2) ? b. Où Jean Valjean a-t-il pu commencer cet appren-tissage (texte 1) ?

4 En quoi le personnage de Jean Valjean illustre-t-il la phrase de Victor Hugo « Quand vous ouvrez une école, vous fermez une prison » ?

5 Quelles qualités Jean Valjean possède-t-il, d’après l’ensemble des textes ?

6 Recopiez le tableau ci-dessous. À l'aide du tableau, résumez l’évolution de Jean Valjean durant son existence.

ENRICHIR SON VOCABULAIRE 1 Quel est le sens du suffi xe -ette, employé dans

le prénom Cosette ? Citez trois mots que vous connaissez formés avec le même suffi xe.

2 Quel est le sens du suffi xe -ard, employé dans le mot « bagnard » ? Citez trois mots que vous connaissez formés avec le même suffi xe.

ÉCRIREJean Valjean fait le bilan de sa vie.Consignes : Écrivez ce récit en une vingtaine de lignes, en employant la première personne, et en vous appuyant sur les textes étudiés. Vous emploie-rez le passé composé et le plus-que-parfait.

S’EXPRIMER À L’ORAL C1 Développer de façon suivie un propos Socle

communen public sur un sujet déterminé

Une fois qu’un prisonnier a été libéré, considérez-vous qu’il a payé sa dette envers la société ? Justi-fi ez votre propos.

texte identité place dans la société épreuves rencontrées réaction face aux épreuves

texte 1 Jean Valjean bagnard libéré rejeté par la société colère et surprise

texte 2 M. Madeleine

texte 3 bagnard évadé

texte 4 sainteté

1 Quelle partie du texte est un rappel du texte précédent ?2 a. Pourquoi Jean Valjean dit-il qu’il faut « pardonner » aux Thénardier (lignes 4-5) ?

b. Pourquoi demande-t-il à Cosette de se mettre à genoux chaque fois qu’elle pro-noncera le nom de Fantine (lignes 6 à 8) ?

3 Comment Hugo suggère-t-il que Jean Valjean meurt comme un saint ?

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

Page 10: Les Mondes Du Roman Hachette

9594 3. LES MONDES DU ROMAN

Le roman historique

CO M PA RÉPA RCO U RS

1. Desdichado : « déshérité » en espagnol. 2. maréchaux : domestiques chargés de s’occuper des chevaux. Le terme prendra ensuite une valeur honorifi que dans le domaine militaire.3. lice : espace entouré de palissades où se déroulaient les tournois au Moyen Âge.4. Guillaume de Wyvil : seigneur anglais.5. Bauséant : nom de la bannière des templiers, qui était moitié blanche, moitié noire.6. Temple : l’Église anglaise.

1. Saint-Barthélemy : le 24 août 1572, Charles IX, roi de France, ordonna le massacre de tous les protestants présents dans Paris.2. arquebusade : tir d’arquebuses, armes à feu de l’époque.3. huguenots : nom donné aux protestants.4. abjures : « abjurer » signifi e renoncer à sa foi.

Walter Scott (1771-1832) a inventé le genre du roman historique, dont la première fonction est de divertir le lecteur. Il a été suivi par Alexandre Dumas (1802-1870), Théophile Gautier, Prosper Mérimée et Victor Hugo. À travers la description des époques passées, ils ont bâti un imaginaire de l’Antiquité, du Moyen Âge ou du Grand Siècle, parfois bien éloigné de la vérité historique.

1 Un tournoi de chevalerie

En 1194, en Angleterre, le prince Jean tente de conquérir le trône de son frère, Richard Cœur de lion, alors que celui-ci participe aux croisades. Jean organise un tournoi durant lequel un mystérieux chevalier, Desdichado1, se fait remarquer pour son courage.

C’était un spectacle splendide et terrible en même temps que de voir un si grand nombre de vaillants adversaires, bravement montés et richement armés, se tenir prêts à une rencontre si formidable, assis sur leur selle de guerre comme autant de statues de fer, et attendant le signal du combat avec la même ardeur que leurs généreux coursiers, qui signalaient leur impatience par les hennisse-ments et en frappant la terre du pied.

Jusque-là, les chevaliers avaient tenu leurs lances verticalement placées : leurs pointes brillantes scintillaient au soleil, et les banderoles dont elles étaient déco-rées fl ottaient au-dessus des panaches des casques. Ils restèrent ainsi pendant que les maréchaux2 du camp inspectaient leurs rangs avec la plus grande minutie, de crainte que l’un ou l’autre parti ne comptât plus ou moins de chevaliers que le nombre fi xé.

Le compte fut trouvé exact. Alors les maréchaux sortirent de la lice3, et Guillaume de Wyvil4 donna le signal en prononçant d’une voix de tonnerre ces mots :

– Laissez aller !Les trompettes retentirent à ces paroles ; aussitôt les champions baissèrent

leurs lances et les mirent en arrêt ; ils enfoncèrent les éperons dans les fl ancs de leurs chevaux, et les deux rangs les plus avancés de chaque parti s’élancèrent au grand galop l’un contre l’autre, et se heurtèrent au milieu de la lice dans un choc dont le bruit fut entendu à un mille de là. Le deuxième rang de chaque parti s’avança d’un pas plus lent, pour contenir les vaincus ou raffermir le succès des vainqueurs ; les conséquences du choc ne furent pas visibles sur-le-champ, car la poussière soulevée par le piétinement de tant de chevaux obscurcit l’air, et il fallut quelque temps avant que les spectateurs inquiets pussent apprécier l’issue de cette rencontre. Quand le combat devint visible, la moitié des cheva-liers de chaque côté étaient démontés, les uns par l’adresse de la lance de leurs adversaires, les autres par le poids et la force supérieure de leurs ennemis, ayant abattu chevaux et hommes ; les uns gisaient sur le sol comme s’ils ne devaient plus se relever ; d’autres étaient déjà remis sur pied et combattaient corps à corps ceux de leurs adversaires qui se trouvaient dans la même condition. Enfi n,

des deux côtés, plusieurs combattants, ayant reçu des blessures qui les mettaient hors de combat, étan-chaient leur sang avec leurs écharpes, et tâchaient de se retirer de la mêlée.

Les chevaliers montés, dont les lances avaient été presque toutes brisées par la violence du choc, étaient maintenant étroitement engagés avec leurs épées, poussant leur cri de guerre et échangeant des coups aussi pressés que si l’honneur et la vie dépen-daient de l’issue du combat.

Le tumulte fut bientôt augmenté par l’arrivée des chevaliers composant le second rang des deux partis, qui, agissant comme réserve, s’élançaient maintenant au secours de leurs compagnons. Ceux qui tenaient pour Brian de Bois-Guilbert criaient :

– Bauséant ! Bauséant5 ! Pour le Temple6 ! pour le Temple ! Le parti opposé répondait à ce cri par celui de :

– Desdichado ! Desdichado ! mot de ralliement qu’ils empruntaient à la devise de l’écu de leur chef.

Walter Scott, Ivanhoé, chapitre XII, traduction Alexandre Dumas, 1819.

2 Le massacre de la Saint-Barthélemy

Bernard de Mergy, jeune protestant, se trouve chez sa maîtresse catholique, Diane de Turgis, le soir de la Saint-Barthélemy 1.

La comtesse s’était élancée vers la fenêtre, qu’elle avait ouverte.Alors le bruit, que les vitres et les rideaux n’arrêtaient plus, arriva plus

distinct. On croyait y démêler des cris de douleur et des hurlements de joie. Une fumée rougeâtre montait vers le ciel et s’élevait de toutes les parties de la ville aussi loin que la vue pouvait s’étendre. On eût dit un immense incendie, si une odeur de résine, qui ne pouvait être produite que par des milliers de torches allumées, n’eût aussitôt rempli la chambre. En même temps, la lueur d’une arquebusade2 qui semblait tirée dans la rue éclaira un moment les vitres d’une maison voisine.

– Le massacre est commencé ! s’écria la comtesse en portant les mains à sa tête avec effroi.

– Quel massacre ? Que voulez-vous dire ?– Cette nuit on égorge tous les huguenots3 ; le roi l’a ordonné. Tous les

catholiques ont pris les armes, et pas un seul hérétique ne doit être épargné. L’Église et la France sont sauvées ; mais tu es perdu si tu n’abjures4 ta fausse croyance.

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1 Dans le premier paragraphe, relevez les termes qui insistent sur l’aspect specta-culaire du tournoi.

2 Quelles sont les quatre étapes qui constituent le tournoi (lignes 17 à 45) ?3 Comment le narrateur décrit-il la violence du tournoi (lignes 23 à 41) ?4 Dans les lignes 26 à 35, un des deux groupes de chevaliers semble-t-il l’em-

porter ? Justifi ez votre réponse.

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

Extrait du fi lm Ivanhoé, de Richard Thorpe, 1952, avec Robert Taylor et Elizabeth Taylor.

Extrait du fi lm Ivanhoé, de Richard Thorpe, 1952.

• Observez l’attitude du chevalier. Comment la qualifi eriez-vous ?

1. Quelle scène est représentée ici ?

2. Quels éléments du décor et des costumes montrent qu’il s’agit d’une scène médiévale ?

Page 11: Les Mondes Du Roman Hachette

9796 3. LES MONDES DU ROMAN

1. Athos, Porthos, Aramis : mousquetaires du Roi. 2. Jussac, Cahusac et Biscarat : gardes du cardinal de Richelieu. Jussac est le chef.3. émulation : désir de surpasser les autres.4. blessé de nouveau : Athos était blessé avant d’engager le combat.

Mergy sentit une sueur froide qui se répandait sur tous ses membres. Il considérait d’un œil hagard Diane de Turgis, dont les traits exprimaient un mélange singulier d’angoisse et de triomphe. Le vacarme effroyable qui retentissait à ses oreilles et remplissait toute la ville lui prouvait assez la vérité de l’affreuse nouvelle qu’elle venait de lui apprendre. Pendant quelques instants la comtesse demeura immobile, les yeux fi xés sur lui sans parler ; seulement, un doigt étendu vers la fenêtre, elle semblait vouloir s’en rapporter à l’imagination de Mergy, pour lui représenter les scènes sanglantes que laissaient deviner ces clameurs et cette illumination de cannibales. Par degrés, son expression se radoucit ; la joie sauvage disparut, et la terreur resta. Enfi n, tombant à genoux, et d’un ton de voix suppliant :

– Bernard ! s’écria-t-elle, je t’en conjure, sauve ta vie, convertis-toi ! Sauve ta vie, sauve la mienne qui en dépend !

Prosper Mérimée, Chronique du règne de Charles IX, chapitre XXI, 1829.

3 Un duel sanglant

En 1625, d’Artagnan, jeune gentilhomme gascon, vient à Paris pour devenir mousquetaire du roi Louis XIII. Il est pris dans un duel.

Et les neuf combattants se précipitèrent les uns sur les autres avec une furie qui n’excluait pas une certaine méthode.

Athos1 prit un certain Cahusac2, favori du cardinal ; Porthos1 eut Biscarat2, et Aramis1 se vit en face de deux adversaires.

Quant à d’Artagnan, il se trouva lancé contre Jussac2 lui-même.Le cœur du jeune Gascon battait à lui briser la poitrine, non pas de

peur, Dieu merci ! il n’en avait pas l’ombre, mais d’émulation3 ; il se battait comme un tigre en fureur, tournant dix fois autour de son adversaire, changeant vingt fois ses gardes et son terrain. Jussac était, comme on le disait alors, friand de la lame, et avait fort pratiqué ; cependant il avait toutes les peines du monde à se défendre contre un adversaire qui, agile et bondissant, s’écartait à tout moment des règles reçues, attaquant de tous côtés à la fois, et tout cela en parant en homme qui a le plus grand respect pour son épiderme.

Enfi n cette lutte fi nit par faire perdre patience à Jussac. Furieux d’être tenu en échec par celui qu’il avait regardé comme un enfant, il s’échauffa et commença à faire des fautes. D’Artagnan, qui, à défaut de la pratique, avait une profonde théorie, redoubla d’agilité. Jussac, voulant en fi nir, porta un coup terrible à son adversaire en se fendant à fond ; mais celui-ci para prime, et tandis que Jussac se relevait, se

glissant comme un serpent sous son fer, il lui passa son épée au travers du corps. Jussac tomba comme une masse.

D’Artagnan jeta alors un coup d’œil inquiet et rapide sur le champ de bataille.

Aramis avait déjà tué un de ses adversaires ; mais l’autre le pressait vivement. Cependant Aramis était en bonne situation et pouvait encore se défendre.

Biscarat et Porthos venaient de faire coup fourré : Porthos avait reçu un coup d’épée au travers du bras, et Biscarat au travers de la cuisse. Mais comme ni l’une ni l’autre des deux blessures n’était grave, ils ne s’en escrimaient qu’avec plus d’acharnement.

Athos, blessé de nouveau4 par Cahusac, pâlissait à vue d’œil, mais il ne recu-lait pas d’une semelle : il avait seulement changé son épée de main, et se battait de la main gauche.

D’Artagnan, selon les lois du duel de cette époque, pouvait secourir quelqu’un ; pendant qu’il cherchait du regard celui de ses compagnons qui avait besoin de son aide, il surprit un coup d’œil d’Athos. Ce coup d’œil était d’une éloquence sublime. Athos serait mort plutôt que d’appeler au secours ; mais il pouvait regarder, et du regard demander un appui.

D’Artagnan le devina, fi t un bond terrible et tomba sur le fl anc de Cahusac en criant :

« À moi, monsieur le garde, je vous tue ! »

Alexandre Dumas, Les Trois Mousquetaires, chapitre V, 1844.

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1 Qu’est-ce qui provoque une lueur d’incendie, dans les lignes 2 à 9 ?2 Pour quelles raisons Diane demande-t-elle à Bernard de se convertir ?3 Pourquoi les « traits » de Diane expriment-ils « un mélange singulier d’an-

goisse et de triomphe » (lignes 18-19) ? Quelles expressions du texte reprennent ces deux aspects ?

4 Par quel procédé le narrateur évoque-t-il le massacre ?

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

1 Par quels termes le narrateur met-il en valeur la jeunesse de d’Artagnan ? Dans quel but ?

2 Quelles sont les qualités de d’Artagnan dans le combat ? En quoi sont-elles surprenantes ?

3 D’Artagnan est-il un « héros » ? Justifi ez votre réponse.4 Pourquoi Athos serait-il « mort plutôt que d’appeler au secours » (ligne 37) ?

AVEZ-VOUS BIEN LU CE TEXTE ?

Alexandre-Évariste Fragonard (1780-1850), Scène du massacre de la Saint-Barthélemy, huile sur toile, 133 x 179 cm, Musée du Louvre, Paris.

Eugène Damblans (1865-1945), couverture des Trois Mousquetaires, dans Journal des romans populaires illustrés, 1905, lithographie couleur, Bibliothèque nationale de France, Paris.

• Cette statue correspond-elle à l’image que vous vous faites de d’Artagnan ? Justifi ez votre réponse.

Gustave Doré (1832-1883), statue de d’Artagnan, sculpture en bronze, faisant partie du monument à Alexandre Dumas, place du Général-Catroux, Paris 17e.

PISTES POUR L'ÉTUDE COMPARÉE DES EXTRAITS1 Recopiez et complétez le tableau ci-dessous

pour comparer les trois extraits.

époque lieux décrits personnages

texte 1

texte 2

texte 3

2 Les extraits présentés vous ont-ils appris quel-que chose sur l’époque à laquelle ils sont censés se dérouler ?

3 Le renvoi à un événement historique réel (texte 2) change-t-il la façon de raconter, par rapport à des événements imaginaires (textes 1 et 3) ? Justifi ez votre réponse.

4 D’après les connaissances que vous en avez, quelle différence faites-vous entre le roman

historique et le roman d’aventures ? Justifi ez votre réponse.

ENRICHIR SON VOCABULAIRE

Relevez, dans chaque texte, le vocabulaire qui ren-voie à l’époque décrite.

ÉCRIREÉcrivez, au choix, la suite du texte 2 ou du texte 3.Consignes : Votre texte fera une vingtaine de lignes. Vous respecterez le cadre historique en employant des mots renvoyant à l’époque. Si nécessaire, vous effectuerez une recherche préalable afi n d’appuyer votre récit sur des événements historiques réels.

S’EXPRIMER À L’ORAL

Avez-vous déjà vu l’adaptation d’un roman histo-rique au cinéma ? Cette adaptation vous a-t-elle donné envie de lire le livre ? Justifi ez votre réponse.

Page 12: Les Mondes Du Roman Hachette

Pr opo s i t i on s de l e c t u r e

Lire des romans du XIXe siècle

1 Romans réalistes

Honoré de Balzac, La Fille aux yeux d’or, Mille et une nuits, 1998.

L’histoire d’un homme envoûté par une femme mystérieuse, et prêt à tout pour la conquérir.

Guy de

Maupassant, Pierre et Jean, Librio.

Émile Zola, La Bête humaine, Éditions Pocket, 2009.

La passion, la jalousie, le meurtre. Ou comment un conducteur de locomotive est entraîné sur les rails de son destin.

2 Romans historiques

Théophile Gautier, Le Roman de la momie, Folio Junior, © Éditions Gallimard Jeunesse, 2010.

Alexandre Dumas, La Tulipe noire, Le Serpent à plumes, 2006.

Les aventures de Cornélius, un jeune Hollandais, qui cherche à créer une tulipe noire, en plein XVIIe siècle.

Henryk

Sienkiewicz, Quo Vadis, Le Livre de Poche, 2008.

En 64 après J.-C., les aventures d’un Romain amoureux d’une belle chrétienne, sous Néron.

3 Romans étrangers

Léon Tolstoï, Anna Karénine, Le Livre de Poche, 1997.

L’histoire d’une faute et d’une déchéance, dans la Russie du XIXe siècle.

Yvan Tourguéniev, Pères et fi ls, Folio Junior, © Éditions Gallimard Jeunesse, 2008.

Les ambitions et les illusions

de la jeunesse, dans un contexte de fortes oppositions idéologiques.

Giuseppe Tomasi

di Lampedusa, Le Guépard, Points, © Éditions du Seuil.

Les bouleversements de l’aristocratie sicilienne à la fi n du XIXe siècle.

Histoires d’argent, d’héritage, d’amour. La jalousie entre deux frères.

Des explorateurs découvrent une momie de femme. Celle-ci raconte son histoire, dans l’Égypte ancienne.

3. LES MONDES DU ROMAN 99

B I L A N

LE ROMAN DU XIXe SIÈCLE

L’apogée du roman

On appelle d’abord « roman » des récits écrits en langue romane, par opposition

au latin. Puis le terme se spécialise pour désigner des récits en prose, relativement longs. Le XIXe siècle est le grand siècle du roman, considéré auparavant comme un genre mineur.

Le réalisme

Les romanciers du XIXe siècle décrivent la réalité de façon à « faire vrai ». Ce qui

défi nit le réalisme, c’est donc le vraisem-

blable, et non le fait que l’histoire racontée soit vraie ou soit une fi ction.Le réalisme est fondé sur des effets de réel : l’action se déroule dans des lieux connus et les personnages sont plausibles.

La description de la société

La société est le sujet principal des romans. Balzac (p. 80 et p. 86) décrit les

différentes classes sociales et leurs ambi-tions. Il oppose la vie parisienne et la vie en

province. Flaubert peint les désirs de la bourgeoisie (p. 83), tandis que Hugo décrit les pauvres (p. 90).L’exploitation de la misère des uns par l’avi-

dité des autres est au centre des romans de Zola (p. 88).

L’analyse psychologique des personnages

L’observation de la société passe par le biais de personnages dont l’analyse psy-

chologique est fouillée. Le narrateur détaille et explique leurs sentiments, soit en les décrivant de l’extérieur, soit en les faisant parler eux-mêmes.Le lecteur peut ainsi facilement s’identifi er aux personnages.

1. Distinguer

Citez deux différences entre les notions suivantes :– roman / romanesque.

2. Défi nir

À quelle défi nition correspond la notion étudiée ?• réalisme : a. reportage réel – b. récit fondé sur des effets de réel – c. capacité à voir la réalité en face.• fi ction : a. récit fondé sur le rêve – b. récit inventé – c. récit invraisemblable.

3. Argumenter

Par quels procédés l’artiste a-t-il mis en scène le personnage de Cosette ?

Gabriel Guay, Cosette, d’après la peinture du Salon de 1882, Maison de Victor Hugo, Paris.

Page 13: Les Mondes Du Roman Hachette

Arts de l’espace Le Paris d’Haussmann

Le renouveau architectural

au XIXe siècle

Situer les œuvres dans le temps

et l’espace

La rénovation de Paris sous le Second Empire donne aux rues une grande unité architecturale : on parle d’un style « haussmannien ». D’autres bâti-ments s’inscrivent dans le mouvement néoclassique engagé dès le début du XIXe siècle, avec des colonnes et des frontons comme dans les temples grecs (église de la Madeleine, Bourse de Paris). Un peu plus tard, appa-raissent les premières architectures métalliques (ponts, gares, puis la tour Eiffel). Le Paris actuel est très marqué par ces constructions du XIXe siècle.

Plan de Paris aujourd’hui avec les limites du XIXe siècle et les travaux d’Haussmann.

DOCUMENT 3

La place de l’Étoile, aujourd’hui.

1 Quel objectif poursuivi par Haussmann est visible dans les documents 3 et 5 ?

2 Quelles sont les fonctions respectives des monuments ou des aménagements urbains dans les documents 1, 2 et 4 ?

3 À quel type d’architecture peuvent faire penser l’Arc de Triomphe (docu-ment 3) et les colonnades de l’Opéra (document 4) ?

COMPARAISON DES DOCUMENTS

100 1013. LES MONDES DU ROMAN

Les travaux d’HaussmannLe baron Haussmann (1809-1891), préfet de la Seine sous Napoléon III, de 1853 à 1870, a pro-fondément transformé et modernisé Paris. Le premier objectif de ces travaux est une amélio-

ration de la vie citadine : des parcs et des jardins sont créés. On veille aussi à une meilleure

hygiène grâce aux égouts et aux réservoirs d’eau. Des normes de construction strictes sont établies pour les immeubles : les cours doivent faire au moins 30 m2, les étages doivent être d’au moins 2,60 m. Les loyers augmentent donc et les classes populaires sont éloignées du centre. Le second objectif est de rendre la circulation

beaucoup plus fl uide. De nombreux boulevards et avenues sont créés ou élargis. Par ailleurs, les communes limitrophes sont annexées à Paris. Cette rénovation fait de Paris une ville

moderne au prestige international.

DOCUMENT 1

La gare de l’Est, carte postale du début du XXe siècle.

DOCUMENT 2

Le parc des Buttes-Chaumont, aménagé en 1866-1867 par Halphand et Barillet, vers1895.

DOCUMENT 5

Dumont, Percement de la rue de Rivoli, 1859, gravure, Bibliothèque nationale de France, Paris.

DOCUMENT 4

L’Opéra de Paris, dit Palais Garnier, carte postale, 1915.

Page 14: Les Mondes Du Roman Hachette

1. Le statut du narrateur indique la position du narrateur par rapport à son récit.

a. Il peut être un personnage : c’est un narrateur interne, il s’exprime à la première personne. Exemple : « Mais je me contins encore, et je restai sans bouger. Je respirais à peine. » (E. A. Poe, Le Cœur révélateur)b. Il peut ne pas être un personnage : c’est un narrateur externe. Exemple : « Le lendemain Rastignac s’habilla fort élégamment, et alla, vers trois heures de l’après-midi, chez madame de Restaud. » (H. de Balzac, Le Père Goriot)

2. Le point de vue indique l’angle sous lequel le narrateur raconte.a. Le narrateur observe ses personnages en sachant tout d’eux : il adopte un point de vue omniscient. Un tel narrateur ne peut qu’être externe au récit. Exemple : « Cosette, nous l’avons dit, n’avait pas eu peur. » (V. Hugo, Les Misérables)b. Le narrateur est un témoin extérieur : il adopte un point de vue externe. Ce narrateur est externe au récit ; il faut noter qu’il est très rare en littérature.c. Le narrateur exprime les pensées de l’un de ses personnages : il adopte alors un point de vue interne. Exemple 1 (le narrateur externe exprime les pensées du personnage) : « Elle songeait quelquefois que c’étaient là pourtant les plus beaux jours de sa vie, la lune de miel, comme on disait. » (Flaubert, Madame Bovary). Exemple 2 (le narrateur interne exprime ses propres pensées) : « Ai-je perdu la raison ? Ce qui s’est passé, ce que j’ai vu la nuit dernière est tellement étrange, que ma tête s’égare quand j’y songe ! » (Maupassant, Le Horla)

L E Ç O N

Arts du visuel La composition d’un tableau

Méthode

102

Statut du narrateur et point de vue

1. Identifi er le statut du narrateur

Indiquez le statut du narrateur dans l’extrait qui

suit. Justifi ez votre réponse.

Je venais de regarder longtemps et avec une pro-fonde mélancolie le laboureur d’Holbein1, et je me promenais dans la campagne, rêvant à la vie des champs et à la destinée du cultivateur.

George Sand, La Mare au Diable, chapitre II, « Le Labour », 1846.

1. Holbein : peintre allemand du XVIe siècle.

2. Identifi er le point de vue employé

Indiquez le point de vue dans l’extrait qui suit. Jus-

tifi ez votre réponse.

Dans les premiers jours du mois d’octobre 1815, une heure environ avant le coucher du soleil, un homme qui voyageait à pied entra dans la petite ville de Digne. Les rares habitants qui se trouvaient en ce moment à leurs fenêtres ou sur le seuil de leurs maisons regar-daient ce voyageur avec une sorte d’inquiétude.

Victor Hugo, Les Misérables, livre deuxième, « La Chute », 1862.

3. Identifi er le statut du narrateur et le point de vue

Indiquez le statut du narrateur et le point de vue em-

ployé dans l’extrait qui suit. Justifi ez votre réponse.

Ce fut comme une apparition.Elle était assise, au milieu du banc, toute seule ; ou du moins il ne distingua personne, dans l’éblouisse-

ment que lui envoyèrent ses yeux. En même temps qu’il passait, elle leva la tête ; il fl échit involontaire-ment les épaules ; et, quand il se fut mis plus loin, du même côté, il la regarda.

Flaubert, L’Éducation sentimentale, 1869, I,1.

4. Manipuler

Décrivez la robe portée par cette femme selon deux

points de vue différents :

– le point de vue externe. Vous décrirez la couleur, la forme, le style…– le point de vue interne de la femme. Vous imagi-nerez l’effet recherché par cette jeune femme, si elle est à l’aise ou non dans cette robe, etc.

Méthode

Un tableau est toujours structuré par des lignes horizontales, verticales ou diagonales. Dans le tableau de Monet, ces lignes reprennent les éléments architecturaux de la gare. À ces lignes s’ajoutent celles dessinées par les autres bâti-ments et les rails.Cette structure géométrique s’organise autour de points de fuite qui orientent le regard du spec-tateur, et permettent la séparation d’espaces dif-férenciés. Dans le document 1, deux points de fuite (les cercles) séparent trois espaces différents : l’es-pace extrêmement structuré de la gare, avec le toit en haut et les rails en bas ; l’espace central de la locomotive, entre les deux points de fuite ; l’espace trouble de la vapeur de la machine, qui forme presque un losange. L’espace de la gare est peint dans des teintes brunes, alors que le bleu et le rose dominent l’espace de la vapeur.

L E Ç O N

Questions (document 2) 1 a. Quelles lignes horizontales, verticales et dia-

gonales structurent ce tableau d’Édouard Manet ? b. Qu’est-ce qui vous a permis de les identifi er ?

2 a. Quel effet est recherché par le placement des mains de l’homme ? b. À quoi servent le parapluie vert et l’éventail ocre, du point de vue de la structure du tableau ?

3 Y a-t-il un (ou plusieurs) point(s) de fuite dans ce tableau ?

4 Comment les couleurs se répartissent-elles entre ces espaces ?

5 Donnez un titre à chacun des ensembles que vous avez identifi és dans le tableau.

� Claude Monet (1840-1926), La Gare Saint-Lazare, 1877, huile sur toile, 104 x 75,5 cm, Musée d’Orsay, Paris.

� Édouard Manet (1832-1883), Le Balcon, 1868-1869, huile sur toile, 124,5 x 170 cm, Musée d’Orsay, Paris.

James Tissot (1836-1902), La Robe jaune : couple élégant lors d’une soirée mondaine, 1878, huile sur toile, 50 x 90 cm, Musée d’Orsay, Paris.

L’ESPACE DE LA VAPEUR

L’ESPACE CENTRAL

LES RAILS

LE TOIT

Page 15: Les Mondes Du Roman Hachette

Le mot ville a plusieurs synonymes :– ville se disait urbs en latin, et polis en grec.– l’agglomération comporte la ville et ses alen-tours, ou ses banlieues.– le bourg est un mot vieilli, qui désigne au-jourd’hui le centre d’un village ; il s’opposait aux faubourgs, placés en périphérie des villes.– la cité est un mot vieilli, employé à l’origine pour les villes grecques ; aujourd’hui, il désigne un groupe d’immeubles.– la métropole désigne une très grande ville ou le continent par opposition aux îles (le mot est formé avec la racine grecque polis).– la municipalité est une défi nition juridique, qui correspond en France à la commune. – le village est plus petit que la ville.

Les habitants sont :– les urbains.– les banlieusards habitent en banlieue, mais il n’y a pas de mot pour les habitants de l’agglomération.– les bourgeois ; le mot a changé de sens au-jourd’hui, et désigne une classe sociale.

– les citadins ; aujourd’hui, habitants d’une ville (et non d’une cité HLM).

– les métropolitains désignent les habitants du continent, par opposition à ceux des îles ; le métro-politain est le nom du métro parisien.

– les villageois.

L E Ç O N

La ville et ses habitants

1 Identifi er le sens des mots

Donnez le sens des mots en italique, dans les

phrases suivantes.

1. C’est un véritable citadin qui se comporte avec beaucoup d’urbanité. 2. Bien qu’il habite une cité, en plein milieu de l’agglo-mération, rien ne l’empêche d’avoir des allures de bourgeois.

2 Différencier le sens des mots

Utilisez si nécessaire un dictionnaire pour différen-

cier les couples de mots suivants :

– urbanisme / urbanité– politique / politesse– mégalopole / mégalomane– bourgeois / bourgeon– commune / communisme

3 Utiliser les mots adéquats

Dans le texte suivant, les mots en italique ont été

mélangés : remettez-les dans le bon sens, en recti-

fi ant si nécessaire les accords.

Il y a plusieurs siècles, c’était un petit faubourg isolé. Petit à petit, le village a grossi, est devenu une grosse métropole, qui a englobé ses bourgs pour devenir aujourd’hui une véritable commune.

4 Développer une famille de mots

Faites la liste de tous les mots que vous connais-

sez appartenant à la famille de « commune » et

identifi ez leurs sens. Classez-les ensuite selon les

familles de sens.

5 Écrire

Écrivez, en une quinzaine de lignes, le récit du réa-

ménagement d’un quartier, en employant le plus

grand nombre possible de mots de la leçon.

6 Écrire à partir d’une image

À partir de cette vignette de bande dessinée, écrivez

l’histoire de cette ville en une vingtaine de lignes.

La vignette sera le point d’aboutissement de votre

récit.

VO C A B U L A I RE

Écrire des narrationsune façade dont le luxe étalé arrêtait le monde sur le trottoir. À l’intérieur, c’était une somptuosité, les millions des caisses ruisselant le long des murs. Un escalier d’honneur conduisait à la salle du conseil, rouge et or, d’une splendeur de salle d’opéra.

Émile Zola, L’Argent, chapitre VIII, 1891.

3 Le passif dans la narration leçon 13, p. 307

1. Relevez et classez les verbes à un mode person-

nel selon qu’ils sont à la voix active ou à la voix pas-

sive.

2. Récrivez le texte de manière à transformer les

deux verbes à la voix passive en voix active.

Une fois le pansement fait, le médecin fut invité, par M. Rouault lui-même, à prendre un morceau avant de partir. Charles descendit dans la salle, au rez-de-chaussée. Deux couverts, avec des timbales d’argent, y étaient mis sur une petite table, au pied d’un grand lit à baldaquin revêtu d’une indienne à personnages représentant des Turcs.

Gustave Flaubert, Madame Bovary, chapitre II, 1857.

4 Employer des connecteurs leçon 36, p. 360

Rédigez un texte, d’une dizaine de lignes, pour

décrire l’entrée d’un bâtiment offi ciel (par exemple

la mairie). Vous pourrez commencer par : « Tout

d’abord, en entrant dans la mairie, on voit… ». Vous

utiliserez les connecteurs suivants : à gauche – mais, en haut – mais – là – maintenant – pourtant – alors.Vous enrichirez ensuite votre description, en ajoutant

aux connecteurs spatiaux que vous avez employés,

des connecteurs temporels, indiquant les étapes suc-

cessives de votre regard.

ÉCRIRE À PARTIR DE NOTIONS DE LANGUE

1 Une narration au passé leçon 12, p. 304

1. Identifi ez les modes personnels et les temps

employés dans cet extrait.

2. Écrivez la suite de ce texte, en cinq lignes, en

employant les mêmes temps.

Pour ces esprits étroits, comme pour ces jeunes gens insouciants, la sèche misère du père Goriot et sa stupide attitude étaient incompatibles avec une fortune et une capacité quelconques. Quant aux femmes qu’il nommait ses fi lles, chacun parta-geait l’opinion de madame Vauquer, qui disait, avec la logique sévère que l’habitude de tout supposer donne aux vieilles femmes occupées à bavarder pen-dant leurs soirées : « Si le père Goriot avait des fi lles aussi riches que paraissent l’être toutes les dames qui sont venues le voir, il ne serait pas dans ma mai-son, au troisième, à quarante-cinq francs par mois, et n’irait pas vêtu comme un pauvre. »

Honoré de Balzac, Le Père Goriot, chapitre I, 1835.

2 Une narration au présent leçon 12, p. 304

1. Identifi ez les modes personnels et les temps

employés dans cet extrait.

2. Récrivez le texte au présent.

3. Quels changements de temps avez-vous effec-

tués ?

Et ce fut à la même époque, quinze jours plus tard, que Saccard inaugura l’hôtel monumental qu’il avait voulu, pour y loger royalement l’Universelle. Six mois venaient de suffi re, on avait travaillé jour et nuit, sans perdre une heure, faisant ce miracle qui n’est possible qu’à Paris ; et la façade se dressait, fl eu-rie d’ornements, tenant du temple et du café-concert,

SujetVous êtes invité(e) pour la première fois dans une

soirée. Vous voulez faire bonne fi gure, être remar-

qué(e), mais vous êtes en même temps intimidé(e).

Consignes : Faites-en le récit en une quinzaine de lignes.

Un extrait du devoirÀ peine étais-je entré(e) que tout le monde se tourna vers moi *. Je rougis jusqu’aux oreilles. Mais non ! personne ne me regardait, c’était encore pire que ce que je pensais. J’allais partir quand on me proposa un verre de champagne. Bon, allez ! du courage, il faut y aller.

Compétences à travailler• Améliorer le niveau de langue

Remplacez la phrase en italique par une phrase

d’un niveau de langue plus soutenu.

• Alléger les tournures

Récrivez la phrase en gras de façon à éviter la tour-

nure « que ce que ».

• Développer le récit

Insérez à la place de l’astérisque une description

de quelques lignes qui permette d’imaginer la

scène.

AMÉLIORER SON EXPRESSION ÉCRITE

L A N G U E

104 1053. LES MONDES DU ROMAN

François Schuiten, Benoît Peeters, Voyages en Utopie, © Casterman, 2000.

Page 16: Les Mondes Du Roman Hachette

ÉCRIRE À PARTIR DES THÈMES ROMANESQUES

1 Expliquer les ambitions d’une famille

Deux couples dînent ensemble. Le premier couple

cherche d’abord le bonheur de ses enfants, tandis

que le second fait part de grandes ambitions

sociales.

Consignes : Dans un texte d’une vingtaine de lignes, vous alternerez des moments de récit et de dialogue, et vous soulignerez l’opposition entre les couples au moyen de connecteurs logiques.

2 Faire parler un personnage

D’Artagnan raconte à des amis son arrivée chez

M. de Tréville, qui dirige les Mousquetaires. Il décrit

les lieux et l’ambiance qui y règne. Il explique pour-

quoi il se sent bien et veut devenir mousquetaire.

Consignes : Vous emploierez des connecteurs spatiaux et chronologiques pour organiser la description. Vous utiliserez le passé composé et l’imparfait. Votre texte fera une trentaine de lignes et sera construit en au moins deux paragraphes. Vous pourrez commencer par : « Quand je suis arrivé dans la cour de M. de Tré-ville, il y régnait une ambiance extraordinaire… »

3 Décrire un personnage et une classe sociale

Décrivez un enfant regardant une vitrine de Noël.

Vous emploierez un point de vue omniscient.

Consignes : Votre texte fera une vingtaine de lignes et sera rédigé aux temps du récit (passé simple et imparfait). Vous pourrez commencer par : « C’était aux environs de la mi-décembre et, invariablement, depuis une semaine, un enfant venait admirer la vitrine du grand magasin… »

4 Exprimer une opinion

Pensez-vous, comme Emma Bovary dans Madame Bovary de Flaubert, que la vie est toujours déce-

vante par rapport au rêve ?

Consignes : Dans un texte d’une vingtaine de lignes, vous défendrez votre opinion, étayée par au moins deux arguments et des exemples.

ÉCRIRE À PARTIR DE TEXTES DE ZOLA, DE FLAUBERT ET DE BALZAC

5 Changer de point de vue

Récrivez le texte suivant en le faisant raconter par

Catherine, une adolescente qui part tous les matins

travailler à la mine.

Consignes : Vous ferez toutes les modifi cations néces-saires. Vous enrichirez votre texte en imaginant ses sentiments sur ses conditions de vie, sur la misère dans laquelle vit sa famille. Vous pourrez commencer par : « Comme tous les matins, quand quatre heures sonnent au coucou… »

ÉCRIRE À PARTIR D'IMAGES

8 Un déjeuner

Racontez le déjeuner qui a réuni les personnages

du tableau.

Consignes : Vous adopterez le point de vue de l’un des personnages, en décidant des liens qui les unissent (déjeuner de famille, scène au restaurant, etc.). Votre texte fera une vingtaine de lignes. Vous exprimerez les sentiments et les réactions du personnage narrateur. Votre récit expliquera la présence des objets posés sur la chaise, à gauche.

9 La pose d’une jeune femme

Imaginez ce que pense cette jeune femme en vous

appuyant sur son attitude, ses habits, le décor.

Vous préciserez également ce que vous inspire son

regard.

Consignes : Vous rédigerez une vingtaine de lignes. Vous pourrez commencer par : « La comtesse d’Haus-sonville m’a regardé(e) ! Quelle pose curieuse elle avait… »

10 Une rêverie parisienne

Vous venez d’arriver à Paris et vous rêvez de votre

avenir en ouvrant la fenêtre.

Consignes : Dans un récit d’une vingtaine de lignes à la première personne du singulier, vous expliquerez d’abord votre satisfaction d’être à Paris, vous décrirez ensuite la vue qui s’offre à vous, en vous inspirant du tableau, puis vous évoquerez vos rêves d’avenir.

Quatre heures sonnèrent au coucou de la salle du rez-de-chaussée, rien encore ne remua, des haleines grêles siffl aient, accompagnées de deux ronfl e-ments sonores. Et brusquement, ce fut Catherine qui se leva. Dans sa fatigue, elle avait, par habitude, compté les quatre coups du timbre, à travers le plancher, sans trouver la force de s’éveiller complè-tement. Puis, les jambes jetées hors des couvertures, elle tâtonna, frotta enfi n une allumette et alluma la chandelle. Mais elle restait assise, la tête si pesante, qu’elle se renversait entre les deux épaules, cédant au besoin invincible de retomber sur le traversin.Maintenant, la chandelle éclairait la chambre, car-rée, à deux fenêtres, que trois lits emplissaient. Il y avait une armoire, une table, deux chaises de vieux noyer, dont le ton fumeux tachait durement les murs, peints en jaune clair.

Émile Zola, Germinal, 1885.

6 Prolonger un texte

Imaginez la demande en mariage faite par Charles,

la réaction d’Emma et de son père.

Consignes : Vous écrivez la suite du texte en deux ou trois paragraphes. Vous pourrez insérer un dialogue. Votre texte fera une quarantaine de lignes.Lorsqu’il [le père d’Emma] s’aperçut donc que Charles avait les pommettes rouges près de sa fi lle, ce qui signifi ait qu’un de ces jours on la lui deman-derait en mariage, il rumina d’avance toute l’affaire. Il le trouvait bien un peu gringalet, et ce n’était pas là un gendre comme il l’eût souhaité ; mais on le disait de bonne conduite, économe, fort instruit, et sans doute qu’il ne chicanerait pas trop sur la dot. Or, comme le père Rouault allait être forcé de vendre vingt-deux acres1 de son bien, qu’il devait beaucoup au maçon, beaucoup au bourrelier2, que l’arbre du pressoir était à remettre :– S’il me la demande, se dit-il, je la lui donne.

Gustave Flaubert, Madame Bovary, 1857.1. un acre : environ 4 000 m2.2. bourrelier : artisan qui fabrique et entretient les harnais des chevaux.

7 Développer un texte

À partir du titre de ce roman et de ses dernières

lignes, imaginez un récit.

Consignes : Dans un texte d’une quarantaine de lignes, vous alternerez des passages narratifs, des passages descriptifs et quelques dialogues.Il retomba sur son lit en rendant le son lourd d’un corps inerte, mourut en poussant un gémissement affreux, et ses yeux convulsés exprimèrent jusqu’au moment où le médecin les ferma le regret de n’avoir pu léguer à la science le mot d’une énigme dont le voile s’était tardivement déchiré sous les doigts décharnés de la Mort.

Honoré de Balzac, La Recherche de l’absolu, 1834.

É C R I T U RE

106 1073. LES MONDES DU ROMAN

Édouard Manet (1832-1883), Le Déjeuner dans l’atelier, 1868, huile sur toile, 154 x 118 cm, Neue Pinakothek, Munich, Allemagne.

� Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867), La Comtesse d’Haussonville, 1827, huile sur toile, 92 x 131,7 cm, The Frick Collection, New York.

Gustave Caillebotte (1848-1894), Jeune homme à la fenêtre, 1875, huile sur toile, 83 x 117 cm, Collection particulière.

Page 17: Les Mondes Du Roman Hachette

Le Comte de Monte-Cristo

Les fi ançailles 1 a. Relevez deux indices prouvant que le père

Dantès semble appartenir à une autre époque. b. Pourquoi est-il le « centre de l’attention géné-rale » (lignes 16-17) ?

2 Dans le deuxième paragraphe, quelle expression désigne Edmond et Mercédès ? Pourquoi le narra-teur emploie-t-il cette expression ?

3 Quel est le point de vue narratif adopté dans cet extrait ? Justifi ez votre réponse.

Les invités4 Comment peut-on qualifi er l’attitude de Danglars,

Fernand et Caderousse ? Justifi ez votre réponse.

5 a. Pourquoi Caderousse est-il venu au mariage (lignes 27 à 31) ?

b. A-t-il, à ce moment du récit, les mêmes motiva-tions que ses complices ? Justifi ez votre réponse.

6 Pourquoi Edmond et Mercédès ne se rendent-ils compte de rien (lignes 6 à 8) ?

Fernand7 Quel sentiment Fernand éprouve-t-il pour Mer-

cédès (lignes 33 à 37) ? Quel est le sens de l’adjectif « désappointé » (lignes 32-33) ?

8 Dans le deuxième paragraphe, quel groupe nominal décrit l’expression du visage de Fernand ? Quel jugement le narrateur porte-t-il sur lui ?

9 Quel est le comportement de Fernand dans les lignes 35 à 40 ? Comment pouvez-vous expliquer ce comportement?

Edmond Dantès et Mercédès s’apprêtent à se marier, mais trois rivaux – Fernand, Caderousse et Danglars – ont écrit une lettre accusant Edmond Dantès de comploter contre l’État.

Près de la future1 marchait le père Dantès, et derrière eux venait Fernand2 avec son mauvais sourire.

Ni Mercédès ni Edmond ne voyaient ce mauvais sourire de Fernand. Les pauvres enfants étaient si heureux qu’ils ne voyaient qu’eux seuls et ce beau ciel pur qui les bénissait.

Danglars3 et Caderousse4 s’acquit-tèrent de leur mission d’ambassa-deurs5 ; puis après avoir échangé une poignée de main bien vigoureuse et bien amicale avec Edmond, ils allèrent, Danglars prendre place près de Fernand, Caderousse se ranger aux côtés du père Dantès, centre de l’at-tention générale.

Ce vieillard était vêtu de son bel habit de taffetas6 épinglé, orné de larges boutons d’acier, taillés à facettes.

Ses jambes grêles7, mais nerveuses, s’épanouissaient dans de magnifi ques bas de coton mouchetés, qui sentaient d’une lieue la contrebande anglaise. À son chapeau à trois cornes pendait un fl ot de rubans blancs et bleus.

Enfi n, il s’appuyait sur un bâton de bois tordu et recourbé par le haut comme un pedum8 antique. On eût dit un de ces muscadins9 qui para-daient en 1796 dans les jardins nouvellement rouverts du Luxembourg et des Tuileries.

Près de lui, nous l’avons dit, s’était glissé Caderousse, Caderousse que l’espérance d’un bon repas avait achevé de réconcilier avec les Dantès, Caderousse à qui il restait dans la mémoire un vague souvenir de ce qui s’était passé la veille, comme en se réveillant le matin on trouve dans son esprit l’ombre du rêve qu’on a fait pendant le sommeil.

Danglars, en s’approchant de Fernand, avait jeté sur l’amant désap-pointé un regard profond. Fernand, marchant derrière les futurs époux, complètement oublié par Mercédès, qui dans cet égoïsme juvénile et char-mant de l’amour n’avait d’yeux que pour son Edmond. Fernand était pâle, puis rouge par bouffées subites qui disparaissaient pour faire place chaque fois à une pâleur croissante.

De temps en temps, il regardait du côté de Marseille, et alors un trem-blement nerveux et involontaire faisait frissonner ses membres. Fernand semblait attendre ou tout au moins prévoir quelque grand événement.

Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo, tome I, chapitre V « Le Repas de fi ançailles », 1844.

Extrait du fi lm Le Comte de Monte-Cristo, de Kevin Reynolds, 2002. Réécriture 4 points

Récrivez l’extrait suivant en remplaçant « ce vieillard » par « ces vieillards ».« Ce vieillard était vêtu […] blancs et bleus. » (lignes 18 à 22)

Rédaction 15 points

Écrivez, en une trentaine de lignes, selon un point de vue omniscient, l’arrestation d’Edmond Dantès par un commissaire accompagné de plu-sieurs soldats. Le futur époux ne comprend pas ce qu’il se passe, Mercédès et son père tentent de le défendre mais les soldats l’emmènent. Les trois complices assistent à l’arrestation. Vous emploierez les temps du récit (imparfait et passé simple).

Dictée 6 points

Edmond Dantès, prisonnier, est persuadé qu’il sera innocenté.Les jours s’écoulèrent, puis les semaines, puis les mois : Dantès attendait toujours, il avait commencé par fi xer à sa liberté un terme de

quinze jours. En mettant à suivre son affaire la moitié de l’intérêt qu’il avait paru éprouver, l’inspecteur devait avoir assez de quinze jours. Ces quinze jours écoulés, il se dit qu’il était absurde à lui de croire que l’inspecteur se serait occupé de lui avant son retour à Paris ; or, son retour à Paris ne pouvait avoir lieu que lorsque sa tournée serait fi nie, et sa tournée pouvait durer un mois ou deux ; il se donna donc trois mois au lieu de quinze jours.

Alexandre Dumas, Le Comte de Monte-Cristo, tome I, chapitre XIV « Le Prisonnier furieux

et le prisonnier fou », 1844.

Questions pour préparer la dictée

1 Relevez et justifi ez les accords des verbes conjugués à l’imparfait et au passé simple.

2 Relevez les verbes conjugués à un temps composé ou à la voix passive, justifi ez l’accord du participe passé selon que l’auxiliaire est « être » ou « avoir ».

3 Justifi ez l’accord du participe passé « écou-lés » (ligne 7).

1. la future : Mercédès, future épouse d’Edmond.2. Fernand : un pêcheur, amoureux de Mercédès.3. Danglars : comptable du bateau, dont il veut devenir le capitaine.4. Caderousse : voisin de Dantès, ivrogne et cupide.5. ambassadeurs : ils ont été chargés d’une mission par Edmond.6. taffetas : tissu soyeux.7. grêles : maigres.8. pedum : bâton symbolisant certaines divinités romaines.9. muscadins : jeunes royalistes particulièrement coquets.

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25

30

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40

5

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15

5

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Questions 15 points

É VALUAT I O N VE RS LE B RE VE T

108 1093. LES MONDES DU ROMAN