Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

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ALPHONSE-DONALD NZE-WAGHE LES ERREURS ET LES STRATEGIES D'ORTHOGRAPHE CHEZ LES ÉLÈVES DU PREMIER CYCLE DU SECONDAIRE DU GABON Thèse présentée à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programme de doctorat en didactique pour l'obtention du grade de Philosophiae doctor (Ph. D.) DEPARTEMENT D'ETUDES SUR L'ENSEIGNEMENT ET APPRENTISSAGE FACULTÉ DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC 2011 ©Alphonse-Donald Nze-waghe, 2011

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ALPHONSE-DONALD NZE-WAGHE

LES ERREURS ET LES STRATEGIES D'ORTHOGRAPHE CHEZ LES ÉLÈVES DU PREMIER CYCLE DU SECONDAIRE

DU GABON

Thèse présentée à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programme de doctorat en didactique

pour l'obtention du grade de Philosophiae doctor (Ph. D.)

DEPARTEMENT D'ETUDES SUR L'ENSEIGNEMENT ET APPRENTISSAGE FACULTÉ DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION

UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC

2011

©Alphonse-Donald Nze-waghe, 2011

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«L'orthographe persiste et signe: bête noire des élèves et des pédagogues. Qu'elle soit d'usage (normes lexicales) ou d'accord (conventions morphologiques fondées sur les règles de la grammaire), elle demeure, en effet, la principale pierre d'achoppement de la maîtrise de la langue. »

M. Séry

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RÉSUMÉ 1

Dans le domaine éducatif, le phénomène des erreurs d'orthographe est l'une des

préoccupations majeures dans les pays francophones. Au Gabon, où nous avons réalisé

notre investigation, les élèves éprouvent de difficultés à orthographier correctement des

mots. C'est au constat de leurs faibles performances en orthographe que nous sommes

parvenu à poser la problématique des erreurs d'orthographe au premier cycle du

secondaire. Cette recherche vise à identifier et à classer, à partir de la typologie des

erreurs de Catach (1980), les différentes erreurs d'orthographe que les jeunes scripteurs

commettent dans leurs écrits.

Pour, y parvenir, nous avons organisé, pour un échantillon de 783 élèves de 6e (lere année

secondaire au Québec) et de 3 e (4eme année secondaire au Québec) de niveau collège du

Gabon, une dictée et un entretien métacognitif tel que le conçoit Jaffré (1999 et 2003). Il

en ressort, comme l'avaient déjà, ailleurs, démontré certaines études (Bétrix, 1991), que

la zone morphogrammique, notamment la grammaire, reste celle qui serait la moins bien

maîtrisée chez les jeunes scripteurs gabonais.

n

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RÉSUMÉ 2

Cette recherche nous a permis de cerner les difficultés d'apprentissage de l'orthographe,

d'identifier les différents types d'erreurs existants ainsi que les stratégies orthographiques

des élèves du premier cycle du secondaire du Gabon.

Pour traiter cette problématique, nous nous sommes servi de la typologie des erreurs

d'orthographe de Catach (1980) et de l'entretien métacognitif conçu par Jaffré (1981)

dont le but est de donner la possibilité aux élèves de pouvoir justifier leurs graphies à

l'issue d'une dictée.

Notre recherche concerne 783 élèves issus des établissements des provinces de l'intérieur

du pays et de Libreville à qui nous avons fait passer une dictée comprenant différents

points du système orthographique. 59 d'entre eux ont ensuite passé un entretien

métacognitif au cours duquel ils se sont prononcés non seulement sur les difficultés

auxquelles ils font face en orthographe, sur ce qu'ils pensent de l'orthographe mais aussi

sur les stratégies orthographiques qu'ils déploient à l'écrit. Une analyse du discours des

élèves sur l'orthographe a été réalisée. Les 724 autres élèves des classes de 6e et de 3e

n'ont participé qu'à la dictée.

La recherche montre que les erreurs d'orthographe les plus fréquentes dans les écrits des

élèves gabonais sont d'ordre morphogrammique. Ces erreurs morphogrammiques

regroupent les erreurs grammaticales et lexicales. Parmi les erreurs morphogrammiques

recensées, la proportion des erreurs grammaticales se montre plus élevée. Parmi ces

erreurs grammaticales, la part belle revient aux erreurs d'accord et aux erreurs de

conjugaison. Les erreurs de morphologie lexicale touchent surtout l'ignorance de la

famille lexicale.

En deuxième position arrivent les erreurs dites phonogrammiques, suivies des erreurs

phonétiques, logogrammiques, idéogrammiques et, enfin, non fonctionnelles. Toutes ces

erreurs ont été analysées statistiquement afin de déterminer leur proportion, leur moyenne

et leur écart type.

m

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Grâce aux logiciels SPSS, SAS et Excel, adaptés aux recherches statistiques, un certain

nombre d'analyses a été réalisé. Des comparaisons entre différentes variables, notamment

sur l'âge, le sexe, le niveau d'études et le degré de compétence ont été établies. Enfin,

certaines corrélations significatives ont été observées entre différents types d'erreurs.

iv

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AVANT-PROPOS

La production d'une thèse de doctorat exige une discipline personnelle, du temps, du

courage, de la persévérance et d'un entourage marqué des femmes et des hommes

exceptionnels. C'est ce monde qu'il me revient de remercier présentement.

Cette thèse n'aurait pu être possible sans l'appui de mes professeures et professeurs de la

Faculté des Sciences de l'Éducation, et particulièrement des membres du jury qui se sont

rendus disponibles pour suivre, lire et évaluer ce travail.

Nous voudrions d'abord exprimer notre profonde gratitude à Claude Simard, directeur

peu commun de cette recherche. Sa rigueur, ses conseils, ses remarques et ses

encouragements stimulants nous ont permis de nous remettre en cause et d'intégrer de

nouveaux paradigmes, notamment la posture neutre d'un chercheur. Nous tenons de

manière particulière à le remercier pour la patience dont il a su faire preuve et pour la

confiance qu'il a bien voulu nous accorder tout au long de ce périple. L'intérêt réel qu'il

a manifesté durant ces quatre années nous a servi de stimulus pour mener à terme ce

travail.

Nous remercions ensuite Martine Mottet, co-directrice de cette thèse. Grâce à sa

prodigieuse expérience d'enseignante et chercheure, et à sa maîtrise de l'outil

informatique, cette thèse a pu avoir la forme finale qu'elle présente maintenant. Malgré

ses multiples occupations, elle a pu nous donner le meilleur d'elle-même en nous

accordant le temps nécessaire qui nous a conduit vers le bout du tunnel.

Nos remerciements vont aussi à l'endroit de Pauline Sirois, examinatrice de cette thèse.

Ses enseignements, ses suggestions constructives nous ont amené à enrichir certains pans

de notre travail. Merci Pauline.

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À Éric Falardeau, examinateur de cette thèse. Sa rigueur nous a fait relire le texte plus de

six fois en vue d'échapper aux mailles de son filet. Merci d'avoir donné de votre temps et

de votre méthode à travers d'innombrables suggestions pour bonifier ce travail et enrichir

notre réflexion.

Notre reconnaissance va également à l'endroit de Marie France Morin qui nous a fait

l'honneur d'accepter d'agir en tant qu'évaluatrice externe de cette thèse. Son prodigieux

travail sur l'enseignement de l'orthographe au primaire a été d'un grand apport à cette

thèse. Nous vous en remercions particulièrement.

Que Jacques Désautels, Simon Larose, professeurs à la Faculté des Sciences de

l'Éducation, trouvent ici l'expression de notre déférence.

Nous tenons également à exprimer toute notre reconnaissance à Hélène Crépeau,

consultante statisticienne à l'Université Laval, qui nous a aidé dans les calculs statistiques

de nos données et nous a permis un tant soit peu de nous familiariser avec quelques

fonctions du logiciel SAS.

Nous adressons nos remerciements au Programme Canadien de Bourses de la

Francophonie (PCBF) dans son volet de l'ACDI qui a financé et a suivi de bout en bout

le cheminement de ce travail, ainsi que le Ministère de l'Éducation Nationale du Gabon

pour avoir autorisé son agent à relever de nouveaux défis.

Pour leur participation et leur implication remarquables, qu'il nous soit permis de

remercier toute la communauté scolaire du Gabon, notamment les lycées Bantsatsa de

Port-Gentil, Eugène Amogo de Franceville, Charles Mefane de Lambaréné, Richard

Nguéma Békalé d'Oyem; à Libreville, les lycées National Léon Mba et Nelson Mandela,

et les CES Alenakiri et Angondjé.

Nos remerciements vont également à l'endroit de tous nos compatriotes à Québec et

particulièrement à Célestin Andzang, Didier Kaba, Mélari Boucka, Bernard Segna,

vi

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Édgard Bissélou, Ghislain Olui, Liliane Mbazogue, Clotaire Assoume, etc. Leur chaleur

et leurs conseils pendant nos moments de solitude et de stress nous ont toujours revigoré.

Enfin, nous ne saurions terminer notre propos sans exprimer notre reconnaissance à

Aboui Ondo Sonia Edwige, notre épouse. Tu as su conduire le bateau familial en période

de houle comme d'accalmie, qui ont émaillé ces moments d'absence. Pour ton soutien, ta

compréhension et ton sens de l'humour auprès de tes enfants en manque de leur père,

daigne trouver ici notre profonde gratitude. Bily, Lévy, Ronald et Arlain... merci pour

votre soutien. Que ce travail, réponse à vos incessants « papa, tu rentres quand! », et

raison de mon absence prolongée au foyer, vous serve d'exemple pour la réalisation de

vos rêves.

vu

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TABLE DES MATIERES

RESUME 1 II

RÉSUMÉ 2 m

LISTE DES GRAPHIQUES XI

LISTE DES TABLEAUX „ XII

INTRODUCTION 1

CHAPITRE I _ : 6

PROBLÉMATIQUE ET CADRE THÉORIQUE 6

1. PROBLÉMATIQUE „ 6

1.1. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES 6

1.2. PROBLÈME DE RECHERCHE : LA FAIBLESSE EN ORTHOGRAPHE DES ÉLÈVES GABONAIS DU PREMIER CYCLE DU SECONDAIRE 7 1.3. BUT DE LA RECHERCHE 1 0 1.4. QUESTIONS DE RECHERCHE i l 1.5. PERTINENCE DE LA RECHERCHE 12

2. CADRE THÉORIQUE 13

2.1. DÉFINITION DES CONCEPTS D'ORTHOGRAPHE ET D'ERREUR 13 2.1.1. Définition du concept d'orthographe 14 2.1.2. Définition du concept d'erreur 16

2.2. LE CHAMP DE LA DIDACTIQUE DE L'ORTHOGRAPHE 20 2.3. STRUCTURE DE L'ORTHOGRAPHE FRANÇAISE ACTUELLE , 22

2.3.1. Les travaux de Blanche-Benveniste et Chervel 22 2.3.2. Le plurisystème de l'orthographe française de l'équipe HESO 24

2.4. ACQUISITION DE L'ORTHOGRAPHE :. 27 2.4.1. L'importance du contexte morphologique et du type de tâche mis en lumière par les travaux en psychologie cognitive sur la gestion de l'attention 28 2.4.2. Les conceptions des élèves révélées par l'entretien métagraphique 28 2.4.3. Les débuts d'apprentissage 29 2.4.4. Le développement de la conscience métalinguistique 30 2.4.5. Le développement de l'orthographe au fil de la scolarité 31

2.5. MODÈLES DE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES ORTHOGRAPHIQUES CHEZ LES ENFANTS 32 2.5.1. Le modèle à trois pas de Frith 32 2.5.2. Le modèle à six pas de Frith 36

2.6. TRAVAUX SUR LE COMPORTEMENT DU SCRIPTEUR ADULTE 38 2.7. ANALYSE DES ERREURS 40

2.7.1. L'effet de régularité ... 40 2.7.2. L'effet de fréquence 42

2.8. BREF EXAMEN DE QUELQUES TYPOLOGIES EXISTANTES EN LANGUE FRANÇAISE 44 2.9. TYPOLOGIE DES ERREURS PROPOSÉE PAR NINA CATACH 48

CHAPITRE II 58

MÉTHODOLOGIE .....58

Vl l l

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1. TYPE DE RECHERCHE 58

2. POPULATION À L'ÉTUDE 59

2.1. POPULATION CIBLE 59 2.2. ÉCHANTILLONS ET MÉTHODES D'ÉCHANTILLONNAGE 60

2.2.1. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour la dictée 60 2.2.2. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour l'entretien métagraphique 64

3. INSTRUMENTATION ET COLLECTE DES DONNÉES 66

3.1. DICTÉE 67 3.1.1. Texte de la dictée : Une route périlleuse 67 3.1.2. Présentation de la dictée 67 3.1.3. Déroulement de la dictée 70

3.2. ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 71 3.2.1. Entretien métagraphique 71 3.2.2. Déroulement de l'entretien métagraphique 73 3.2.3. Protocole de l'entretien métagraphique 74

4. TRAITEMENT, ANALYSE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES 76

4 . 1 . ANONYMAT DES PARTICIPANTS 7 6 4.2. TRAITEMENT DES DONNÉES DE LA DICTÉE 77

4.2.1. Correction des copies 77 4.2.2. Élaboration de la base des données 78 4.2.3. Validation de la codification des données 81 4.2.4. Analyse statistique des données 81

4.3. TRAITEMENT DES DONNÉES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 81 4.3.1. Enregistrement des données 81 4.3.2. Transcription des données 82 4.3.3. Analyse des données 82 4.3.4. Validation de la codification des données 83

5. FORCES ET LIMITES MÉTHODOLOGIQUES 83

5.1. FIABILITÉ 84 5.2. VALIDITÉ INTERNE 86 5.3. VALIDITÉ EXTERNE 87

6. CONSIDÉRATIONS ÉTHIQUES 87

7. MODE DE PRÉSENTATION DES RÉSULTATS 88

CHAPITRE i n : ........90

ANALYSE DES RÉSULTATS : 90

ANALYSE DES DONNÉES QUANTITATD/ES ISSUES DE LA DICTÉE 90

1. RÉSULTATS GÉNÉRAUX 90

2. INFLUENCE DES VARIABLES DU SEXE ET DU NIVEAU SCOLAIRE 111

3. CORRÉLATIONS ENTRE LES DIFFÉRENTS TYPES D'ERREURS 115

CHAPITRE IV 120

ANALYSE DES DONNÉES QUALITATIVES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTACOGNITIF. 120

1. RAPPEL DES BUTS DE L'ENTRETIEN 120

IX

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1.1. RAPPEL DES MODALITÉS MÉTHODOLOGIQUES ET DU PROTOCOLE D'ENTRETIEN 121

2. RAPPEL DES CARACTÉRISTIQUES DES ÉLÈVES DE L'ÉCHANTILLON RESTREINT 122

3. SÉLECTION DES ÉLÈVES POUR L'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 124

4. PERCEPTION DE LA COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE DES ÉLÈVES 125

4.1. PERCEPTION DES ÉLÈVES À L'ÉGARD DE LEUR COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE 126 4.2. PERCEPTION DES ENSEIGNANTS À L'ÉGARD DE LA COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE DE LEURS ÉLÈVES 130

5. OPINION DES ÉLÈVES SUR LE DEGRÉ DE DIFFICULTÉ DE L'ORTHOGRAPHE. 135

6. RELATION ENTRE LA PERCEPTION DES ÉLÈVES DE LEUR COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE, LEUR OPINION FACE À LA DIFFICULTÉ DE L'ORTHOGRAPHE ET LEURS RÉSULTATS À LA DICTÉE.™ 138

7. LES STRATÉGIES DÉCLARÉES 141

7.1. LISTE DES STRATÉGIES ET GRILLE DE CODAGE 142 7.1.1. Liste de stratégies d'ordre général 142 7.1.2. Liste de stratégies d'ordre spécifique 145

7.2. ANALYSE DES STRATÉGIES DÉCLARÉES 148 7.2.1. Analyse des stratégies d'ordre général 148 7.2.2. Analyses des stratégies citées en lien avec les sous-systèmes de l'orthographe 155

8. COMPARAISON DES ÉLÈVES FORTS ET DES ÉLÈVES FAIBLES 161

8.1. COMPARAISON DES MOYENNES DES FORTS ET DES FAIBLES 162 8.2. COMPARAISON DES STRATÉGIES DES FORTS ET DES FAIBLES 163

CONCLUSION GENERALE „ ...170

ANNEXES _. .. 183

ANNEXE 1 : PROTOCOLES D'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 184

ANNEXE 2 : DEUX EXEMPLES DE DICTÉE CORRIGÉE 189

ANNEXE 3 : DEUX EXEMPLES DE VERBATIM COMPLET ..192

ANNEXE 4 : DOCUMENTS OFFICIELS 203

BIBLIOGRAPHIQUES „ 208

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LISTE DES GRAPHIQUES

Graphique 1. Distribution générale des erreurs d'orthographe 88

Graphique 2. Les erreurs phonétiques 94

Graphique 3. Les erreurs phonogrammiques 96

Graphique 4. Les erreurs morphogrammiques 98

Graphique 5. Les erreurs morphogrammaticales 100

Graphique 6. Les erreurs lexicales 102

Graphique 7. Les erreurs logogrammiques 103

Graphique 8. Les erreurs idéogrammiques 105

Graphique 9. Les erreurs non fonctionnelles 106

xi

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1. Modèle à six pas de Frith (1985) 34

Tableau 2. La typologie de Catach (1985)... 52

Tableau 3. Établissements scolaires de Libreville et des provinces 59

Tableau 4. Niveau scolaire des sujets 60

Tableau 5. Répartition des sujets selon le sexe 61

Tableau 6. Age des élèves de 6e , 62

Tableau 7. Âge des élèves de 3e 63

Tableau 8. Questions posées au cours du premier volet de l'entretien métagraphique 72

Tableau 9. Plan de codification 76

Tableau 10. Nombre total des erreurs (toutes catégories confondues) 87

Tableau 11. Moyenne des erreurs par catégorie 89

Tableau 12. Les erreurs phonétiques 93

Tableau 13. Les erreurs phonogrammiques 95

Tableau 14. Les erreurs morphogrammiques 97

Tableau 15. Les erreurs morphogrammiques grammaticales 99

Tableau 16. Les erreurs morphogrammiques lexicales 101

Tableau 17. Les erreurs logogrammiques -. 103 r

Tableau 18. Les erreurs idéogrammiques 104

Tableau 19. Les erreurs non fonctionnelles 106

Tableau 20. Comparaison des moyennes selon le sexe 108

Tableau 21. Comparaison des moyennes selon les niveaux d'enseignement 110

Tableau 22. Les corrélations entre les différents types d'erreurs .. 113

xii

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Tableau 23. Caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint 119

Tableau 24. Caractéristiques des élèves de l'échantillon complet 119

Tableau 25. Classement des élèves selon la moyenne du groupe 121

Tableau 26. Perception des élèves très forts et forts à l'égard de leur compétence orthographique 122

Tableau 27. Perception des élèves moyens à l'égard de leur compétence orthographique 123

Tableau 28. Perception des élèves faibles et très faibles à l'égard de leur compétence orthographique 124

Tableau 29. Perception des élèves et compétence réelle en orthographe 124

Tableau 30. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves très forts et forts ....'. 127

Tableau 31. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves moyens. 128

Tableau 32. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves faibles et très faible 129

Tableau 33. Perception des enseignants à l'égard de la compétence réelle des élèves en orthographe 130

Tableau 34. Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe en fonction de leur niveau d'habileté 131

Tableau 35. Compétence des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe 134

Tableau 36. Rendement des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe 136

Tableau 37. Les stratégies générales (pour la correction de l'ensemble d'un texte ou sur la résolution d'un problème relatif à un mot) 139

Tableau 38. Les stratégies spécifiques aux différentes composantes du plurisystème de l'orthographe 142

Tableau 39. Stratégies d'ordre général en lien avec la question de « Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible? » 145

Tableau 40. Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un problème en orthographe? » , 148

xiii

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Tableau 41. Stratégies spécifiques en lien avec les sous-systèmes orthographiques ....152

Tableau 42. Comparaison des moyennes selon le niveau de compétence (faible ou fort) 158

Tableau 43. Comparaison des stratégies des forts et des faibles 159

xiv

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INTRODUCTION

L'échec scolaire constitue un phénomène préoccupant dans la plupart des pays africains

et particulièrement au Gabon. Pourtant, la loi 16/66 du 9 août stipule, entre autres, que :

l'enseignement est obligatoire et gratuit de 6 à 16 ans, sur toute l'étendue du territoire, que celui-ci vise à permettre l'épanouissement de l'enfant et de l'adulte aux plans intellectuel, moral et physique, sans distinction de sexe, d'origine sociale, de nationalité, d'appartenance ethnique ni religieuse ou de race [ . . . ] .

Ainsi le Gabon atteint-il le taux de scolarité parmi les plus élevés d'Afrique

subsaharienne, avec plus de 90 % à la fin des années 1970, et une parité filles/garçons

quasi parfaite, alors que certains pays, anciennes colonies françaises, eux aussi, n'en sont

qu'à 30 ou 40 % du taux de scolarisation, avec un très grand écart entre filles et garçons2.

Un certain nombre de moyens tant matériels (l'octroi gratuit des fournitures scolaires),

organisationnels (l'entrée obligatoire à l'internat des élèves en classe d'examens, mesures

actuellement abrogées) que financiers (l'octroi des bourses,, encore d'actualité, à tous les

élèves admis en classe supérieure du secondaire au supérieur) sont également mobilisés

pour rendre possible l'accès aux différents savoirs que véhicule l'école.

Dans son volet relatif aux objectifs, l'enseignement du français au second cycle du

secondaire au Gabon vise:

en premier lieu à donner à tous les enfants et adolescents la maitrise de l'expression orale et écrite de la langue utilisée de nos jours et leur permettre ainsi de communiquer, c'est-à-dire d'écouter, de parler, de lire et d'écrire avec rigueur et profit [...]3. (p. 1)

1 Loi cadre sur le système éducatif au Gabon reprise dans États Généraux de l'Éducation et de la Formation, tenus du 17 au 23 décembre, Libreville, 1983 2 Ibidem 3 L'enseignement du français au premier cycle du secondaire, Ministère de l'Éducation Nationale, Institut Pédagogique National, Libreville, 1983

1

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Cette volonté officielle de l'État gabonais à créer des conditions favorisant la maitrise du

français par ses citoyens reste cependant au stade des vœux pieux. Même si depuis 1990

le Gabon a connu un changement notoire sur le plan politique (il est passé d'un système à

parti unique à un multipartisme démocratique), la loi 16/66 réglementant l'éducation n'a

pas du tout changé, en dépit de séminaires, de réformes (approche par objectif versus

approche par compétence au cycle primaire, l'avènement du système turn-over au

second cycle, etc.) et de l'organisation d'états généraux de l'éducation (1982 et 2010).

Beaucoup d'efforts restent à consentir dans l'acquisition de l'écrit. Le constat que nous

faisons dans ce domaine est malheureusement décevant en classe de français où le

problème des erreurs d'orthographe est sérieux.

Certaines études menées par des chercheurs gabonais corroborent cette situation dans

différentes matières d'enseignement (Dadoté, 20045, Endamane, 2004 ; Ndemba, 2004 ;

Nguimbi, 2004 et 20078.)

En français, le problème d'orthographe demeure l'une des sources des difficultés chez les

élèves tant au primaire qu'au secondaire. Mais qu'est-ce que l'orthographe?

Le mot orthographe dérive des éléments d'origine grecque ortho et graphia : ortho

« correct » et graphie « écrire ». C'est la manière d'écrire un mot qui est considérée

comme la seule correcte, selon le Petit Robert9. L'orthographe intervient en lecture

4 Pour pallier le phénomène des effectifs pléthoriques lié au manque de structures, le gouvernement gabonais a mis en place un système rotatif des élèves dans les plus grands établissements scolaires de Libreville. Ce système dénommé turn-over favorise la mobilité des élèves qui n'avaient plus de salles de classe fixes. 5 DADOTÉ, A. D. K. (2004). Le commentaire composé : difficultés de sa mise en œuvre chez les élèves de second cycle et pistes de solutions didactiques. Actes du colloque, Université Laval, (p. 20-23) 6 ENDAMANE, R. (2004). L'enseignement de l'écriture du récit dans les lycées et collèges de Libreville : problèmes de méthodologie. Actes du colloque, Université Laval, (p. 24-26)

NDEMBA, J-J. (2004). Les causes du redoublement : points de vue d'élèves d'un lycée gabonais. Actes du colloque, Essai de maîtrise, Université Laval, (p. 126-129)

8 NGUIMBI, A. (2004). L'enseignement des œuvres intégrales dans les lycées et collèges publics du Gabon : analyse d'une pratique. Actes du colloque, Essai de maîtrise, Université Laval, (p. 30-33) NGUIMBI, A. (2007). Les représentations des enseignants de français et des élèves du secondaire à propos de l'enseignement des textes littéraires. Thèse de doctorat, Université Laval.

Le Nouveau Petit Robert (2007), Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 40e

édition.

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comme en production. Dans le premier cas, elle conditionne la reconnaissance des mots

et évite qu'ils soient confondus les uns avec les autres (saint, sein, ceint...). Dans le

deuxième cas, elle renvoie à la nécessité pour celui qui rédige de retrouver une à une et

dans l'ordre toutes les lettres qui constituent le mot graphique selon la norme adoptée

(Erhi, 1997). L'orthographe recouvre deux dimensions principales reconnues

traditionnellement : l'orthographe d'usage ou lexicale « graphie usuelle des mots », c'est

l'orthographe qui concerne la partie fixe des mots, telle que donnée dans un dictionnaire;

et l'orthographe de règle ou grammaticale « graphie variable des mots selon leur rôle et

leurs relations dans la phrase ».

À cause de ses multiples subtilités et irrégularités, l'orthographe française est considérée

comme l'une des plus compliquées. Les scripteurs francophones doivent acquérir des

connaissances orthographiques toute leur scolarité durant. C'est une compétence

rarement complètement acquise, selon Éric Lambert10. Il n'est donc pas étonnant de

constater que beaucoup d'élèves éprouvent de véritables difficultés tant en production

écrite (rédaction, argumentation, dissertation) qu'en orthographe proprement dite dont le

rite essentiel reste la dictée. Au Gabon, de la 6e à la 3e du secondaire, la note zéro sur

vingt (00/20) est celle qui est généralement décernée aux trois quarts des apprenants en

orthographe. Il faut dire cependant que ce système de notation ancien présente des failles

docimologiques importantes.

Le manque d'archives au ministère de l'Éducation nationale ne nous permet pas d'avoir

des données chiffrées précises sur le phénomène de l'orthographe. Cependant, les

conseillers pédagogiques en matière de français reconnaissent, pendant des séances

d'animations pédagogiques ou lors des corrections d'examens, que le problème de

l'orthographe est très préoccupant au Gabon.

Les études montrent que le problème d'orthographe est quasi général dans le monde

francophone. Au Québec par exemple, les résultats aux épreuves de français du ministère

10Éric Lambert, Professeur à l'I.U.F.M d'Orléans-Tours, lors d'une conférence donnée à l'espace Mendès France, dans le cadre des animations « d'écriture à Poitiers » sur / 'acquisition de l'orthographe et les problèmes qui accompagnent cet apprentissage, février 1986

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de l'Éducation en 3e année et 6e année du primaire indiquent année après année que les

élèves éprouvent des difficultés dans le maniement du code de la langue et que la maîtrise

de l'orthographe est l'élément de l'épreuve de français où les résultats sont les plus

faibles. D'après une étude datant de 1995, 52,6 % des élèves sont classés fragiles ou

incompétents11.

Le contexte gabonais s'avère assez particulier par rapport à des pays francophones

comme la France ou le Québec. Le Gabon évolue dans un contexte bilingue, en ce sens

que le français est une langue seconde pour les élèves. Ils ont pour la plupart une autre

langue maternelle (fang, mpongwé, mbédé, punu, kota...), ce qui pourrait augmenter les

difficultés d'apprentissage du français écrit,

L'objectif premier de notre recherche est de cerner les types d'erreurs que commettent les

élèves du secondaire gabonais. Pour y parvenir, nous nous sommes inspiré de la grille de

Catach (1980) qui nous a permis de classer les différentes erreurs enregistrées et de les

analyser. Nous avons voulu aussi cerner les stratégies orthographiques de nos sujets. À

cette fin, nous avons eu recours à l'entretien métagraphique tel que le conçoit Jaffré

(2003). Cet outil a permis aux élèves de verbaliser et de justifier leurs graphies au sortir

d'une dictée.

Le premier chapitre de ce document est consacré à la problématique et au cadre

conceptuel. La problématique présente le contexte de crise de l'orthographe dans lequel a

germé notre réflexion, et précise les objectifs, les questions de notre recherche ainsi que

sa pertinence. Le cadre conceptuel, quant à lui, présente d'abord de façon synthétique les

concepts d'orthographe et d'erreur, recense ensuite les différentes études menées ces

dernières années sur l'acquisition de l'orthographe, résume enfin la théorie du

plurisystème orthographique de Catach (1980) qui constitue la base référentielle de notre

travail.

11 Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec (2001).

Page 20: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Le deuxième chapitre se focalise essentiellement sur la méthodologie empruntée dans

cette recherche. Celle-ci se veut descriptive et est fondée sur une approche mixte, vu

qu'elle s'intéresse à des données à la fois quantitatives et qualitatives.

L'analyse quantitative nous a permis de relever et de classer les erreurs d'orthographe

chez 724 élèves de 6e et de 3 e secondaire, et nous a amené à faire des comparaisons à

partir des variables sexe, classe et degré de compétence des élèves. Ces résultats sont

vérifiés par des tests statistiques à partir des logiciel SPSS et SAS.

L'analyse qualitative, pour sa part, s'est intéressée à l'analyse du discours recueilli lors

de l'entretien métacognitif organisé avec 59 élèves issus du grand échantillon, à leurs

perceptions et à celles de leurs enseignants sur leurs habiletés en orthographe ainsi

qu'aux stratégies qu'ils ont pu mettre en place en situation d'écriture.

Les troisième et quatrième chapitres présentent les résultats de cette étude. Le chapitre III

est consacré à l'analyse des données quantitatives issues de la dictée et regroupant tout

l'échantillon, soit 783 participants. Le chapitre IV fait état de l'analyse des données

qualitatives recueillies à partir de l'entretien métagraphique organisé avec 59 sujets, forts

ou faibles.

La conclusion fait la synthèse, résume les faits saillants de notre étude. Elle met

également en exergue les retombées et les limites de cette recherche tout en proposant

quelques pistes didactiques susceptibles d'aider les membres de la communauté éducative

dans le processus de renouvellement ou de recadrage des stratégies d'enseignement.

Page 21: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

CHAPITRE I

PROBLÉMATIQUE ET CADRE THÉORIQUE

1. PROBLEMATIQUE

1.1. Considérations générales

Le problème des erreurs d'orthographe constitue un phénomène récurrent qui n'a cessé

de susciter des commentaires et l'intérêt des membres du secteur éducatif dans bon

nombre de pays francophones. En plus des constats faits, les commentaires font émerger

des débats parfois passionnés affirmant, à tort ou à raison, que le niveau des élèves en

orthographe a considérablement baissé.

L'intérêt, quant à lui, se manifeste par la diversité des recherches consacrées en

orthographe ces dernières décennies tant sur la nature ou l'origine des erreurs

d'orthographe que sur les mécanismes d'acquisition-apprentissage du code graphique

chez les jeunes scripteurs. Peuvent en témoigner, les travaux de Fayol et Largy (1992),

Fayol et Perfitti (1997), Simard (1997), Cogis (1998), Gombert (1990), Erhi (2000),

Brissaud (2000), Jaffré (2003), etc.

Page 22: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Par ailleurs, d'autres chercheurs se sont intéressés aux modèles théoriques pour le

classement des erreurs en orthographe, notamment en vue d'élaborer des instruments

diagnostiques, qui pourront servir de guide pour la préparation de procédés correctifs

adéquats. À cet effet, un certain nombre de typologies ont été élaborées par des

chercheurs tels que Debyser, Houis, Rojas (1967), Guion (1973 et 1979), Bartout,

Piacere, Brunelle (1977), Catach (1980), Farid (1983), etc.

Malgré les avancées significatives dans la compréhension des procédés d'acquisition-

apprentissage de l'orthographe, le problème des erreurs orthographiques reste

préoccupant dans la plupart des pays francophone et singulièrement au Gabon. C'est au

constat d'un tel phénomène que nous sommes parvenu à poser la problématique des

erreurs d'orthographe au premier cycle du secondaire du Gabon.

1.2. Problème de recherche : la faiblesse en orthographe des élèves gabonais du premier cycle du secondaire

Nous avons pris pour point de départ de notre recherche un constat relatif à la baisse de

niveau en orthographe fait par la quasi-totalité des enseignants de français réunis au cours

d'une animation pédagogique tenue au lycée Nelson Mandela en 2005. En général, ces

enseignants ont observé que la plupart des élèves du premier cycle éprouvent des

difficultés en orthographe tant en orthographe d'usage (rédaction correcte des mots de

vocabulaire) qu'en orthographe grammaticale (accord des mots dans la phrase). De la 6e à

la 3e, la note zéro sur vingt (00/20) est celle qui est décernée aux trois quarts des

apprenants en orthographe lexicale et grammaticale. Sans jeter l'anathème sur les seuls

élèves car cette situation pourrait s'expliquer par bien d'autres facteurs (mode

d'évaluation approximatif, enseignement inadéquat, complexité du système

orthographique...), nous voulons surtout cerner les différents aspects liés directement aux

erreurs qu'ils commettent.

Page 23: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Avant d'entreprendre notre recherche doctorale, nous avons organisé une collecte de

données sur l'orthographe (expression écrite et dictée) à travers différents établissements

(publics et privés) de la capitale Libreville : deux dictées (une en 6e D du lycée National

Léon Mba sur un texte de huit lignes du niveau 6e tiré de l'œuvre romanesque de Joseph

Owono intitulée Tante Bella, où il y avait dix mots ou groupes de mots fautifs à corriger;

une autre en 3e du collège privé St-André sur un texte de dix-sept lignes du niveau 4e tiré

de Maimouna12 d'Abdoulaye Sadji). Les résultats enregistrés sont parlants : sur 48 élèves

de 3e, 44 ont eu 00/20 et aucune note supérieure ou égale à 10/20; en 6e D par contre, 12

élèves ont obtenu la note 00/20 et 6 ont pu dépasser la barre de 10/20, et ce, pour une

dictée pourtant préparée trente minutes auparavant. Précisons que dans le système

scolaire gabonais, en dictée comme en expression écrite, les devoirs sont notés sur vingt.

Seules les erreurs d'orthographe lexicale et grammaticale sont sanctionnées : en dictée,

l'erreur d'orthographe lexicale enlève un point, alors que l'erreur grammaticale en retire

deux.

Pour ce qui est de l'expression écrite, la 5e G (lycée national Léon Mba), la 3e F (lycée

Nelson Mandela) et la 3e (collège St-André) étaient concernées. Les notes, très faibles

pour le collège St-André, sont les suivantes : sur 46 élèves, 6 seulement ont pu franchir la

barre de 10/20. En 3e F du lycée Nelson Mandela, 9 élèves ont pu dépasser 10/20. Au

lycée national Léon Mba, par contre, la poire a été sectionnée en deux : 20 élèves ont des

notes inférieures à 10, les 20 autres ont obtenu plus de 10.

Même si notre faible échantillonnage ne nous permet pas de généraliser cette situation à

l'ensemble du pays, notre expérience sur le terrain nous a permis de mesurer également

l'ampleur du problème qui touche la quasi-totalité des établissements de Libreville.

Pourtant, ceux-ci sont, de loin, les mieux pourvus du Gabon puisqu'ils sont mieux

équipés en matériel didactique (manuels scolaires, ordinateurs, bibliothèques...) et en

12 Sadji, A. (1958). Maïmouna, Présence Africaine, p. 38-39. Ce roman est un « classique africain » étudié en classe de quatrième dans le programme préconisé par le ministère gabonais de l'Éducation nationale.

8

Page 24: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

personnel enseignant, vu que beaucoup d'entre eux préfèrent exercer dans la capitale. Les

établissements de l'intérieur du pays restent quelque peu oubliés et le pourcentage

d'échec y est plus élevé.

Au cours des séances de correction d'examens (BEPC1 , BET14, BAC15...), les plaintes

des enseignants quant aux erreurs que commettent les élèves sont récurrentes. En dépit

des séminaires, des séances d'animation, des concours d'orthographe organisés

respectivement par les autorités ministérielles, l'Unesco et la Francophonie chaque année,

le problème de l'orthographe reste entier dans le système éducatif gabonais.

Une réforme sur l'évaluation en orthographe serait même amorcée actuellement par les

autorités du ministère de l'Éducation nationale. L'on se demande sur quoi exactement

évaluer : sur des compétences enseignées, c'est-à-dire vérifier des connaissances acquises

sur des points grammaticaux ou orthographiques bien précis, ou sur des connaissances

générales en sanctionnant systématiquement toutes les erreurs.

Cette situation interpelle donc tous les acteurs de l'enseignement du français et nous

amène, en tant qu'enseignant, à réfléchir sur le sujet et à prendre des initiatives visant à

l'améliorer. C'est pour cela que nous nous sommes penché sur ce problème. Ainsi,

contrairement aux autorités ministérielles qui ont tendance à se focaliser directement sur

l'évaluation, nous souhaiterions d'abord identifier les raisons qui expliquent ce

phénomène, les analyser dans la perspective d'améliorer les performances des élèves en

orthographe.

13 BEPC : Brevet d'Études du Premier Cycle. 14 BET : Brevet d'Études Techniques. 15 BAC : Baccalauréat (Dernier diplôme de l'enseignement secondaire, qui donne accès aux études supérieures)

Page 25: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

13. But de la recherche

L'orthographe désigne l'ensemble des normes qui règlent la façon d'écrire dans une

langue. Dès qu'une langue dépasse le simple cadre dialectal ou régional, son nombre de

locuteurs devenant plus important et son statut se renforçant, on est contraint de fixer des

règles afin de faciliter la compréhension mutuelle des locuteurs. C'est le cas de la langue

française dont les règles d'orthographe ont été établies clairement.

Or, l'application de ces règles d'orthographe semble tellement approximative chez les

élèves qu'on s'interroge sur la véritable origine de cette situation, chez les concepteurs de

règles, chez les enseignants qui assurent l'acquisition-apprentissage ou chez les élèves

appelés à se les approprier. L'orthographe française pose un problème fondamental chez

les apprenants lié à ces deux aspects essentiels : la compréhension des règles et leur

application en production écrite.

Au Gabon, comme on vient de le souligner, dans une classe de cinquante élèves environ,

on peut enregistrer une trentaine d'élèves ayant la note zéro sur vingt (00/20), et moins de

quinze celle de dix sur vingt (10/20). Nous avons aussi remarqué qu'à l'annonce d'un

devoir relatif à l'orthographe (rédaction, texte argumentatif, dictée, etc.), les élèves

exprimaient une sorte d'angoisse, de stress indescriptible. Cette situation ne peut nous

laisser insensible. C'est pour cela que nous avons jeté un regard sur le phénomène de

l'orthographe, à notre avis très important dans le processus d'appropriation d'une langue.

Le but de notre réflexion est de savoir comment un élève qui a eu l'occasion

d'appréhender les règles d'orthographe pendant les cours peut être incapable de les

appliquer correctement lors des devoirs et/ou des interrogations écrites. Plus précisément,

10

Page 26: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

nous voulons mieux connaître l'ampleur du problème en cernant la nature et la fréquence

des erreurs commises.

Notre étude vise une meilleure compréhension des erreurs d'orthographe chez les élèves

du premier cycle du secondaire gabonais. Autrement dit, notre objectif est d'étudier la

non-maîtrise de l'orthographe chez ces jeunes scripteurs, en relevant les différentes

erreurs qu'ils commettent, en les analysant, en les classifiant et en les comparant à celles

commises par les élèves d'autres pays francophones. Nous voulons donc adopter une

perspective surtout descriptive d'analyse d'erreurs. Nous y reviendrons dans la partie

méthodologique.

1.4. Questions de recherche

La question des erreurs d'orthographe est complexe du fait qu'elle pose le problème de

l'apprentissage, de la compréhension et de la mémorisation des règles et de leur

réutilisation en contexte de production. Ce problème touche surtout les principaux acteurs

du système éducatif en l'occurrence les enseignants, les élèves et leurs parents pour le

suivi à la maison, et l'État à travers les programmes qu'il élabore, les priorités qu'il se

fixe et les méthodes pédagogiques qu'il recommande.

Dans notre étude, nous nous concentrerons sur les élèves. Nos questions et sous-questions

de recherche sont les suivantes :

- Quels sont les types d'erreurs que les élèves gabonais du premier cycle du

secondaire commettent dans leurs écrits ? Quelle est la fréquence par type d'erreur?

11

Page 27: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

- Quelle est l'influence des facteurs du sexe et du niveau scolaire sur la fréquence et

les types d'erreurs?

- Quelle est la perception des élèves gabonais du premier cycle du secondaire quant

à leur propre compétence orthographique et quant à la complexité de l'orthographe

française?

- Quelles sont les stratégies qu'ils déploient pour orthographier? Quelles sont celles

que déclarent les élèves forts et les élèves faibles?

1.5. Pertinence de la recherche

L'importance de l'orthographe ne peut plus être remise en cause de nos jours. Elle est une

nécessité dans le cadre de la communication écrite. La norme orthographique facilite

l'intercompréhension dans la mesure où elle est connue et respectée par l'ensemble des

sujets. Les exemples suivants sur les cas d'homonymie (l'attente, la tente, la tante; ou

mer, mère, maire, etc.) sont parlants à ce sujet. La moindre erreur d'orthographe peut

dérouter le lecteur. En clair, l'orthographe conditionne la reconnaissance des mots et

évite qu'ils soient confondus les uns avec les autres (Erhi, 1997).

De plus, elle est investie d'une valeur sociale marquée. En effet, pour quelqu'un qui

adresse une lettre d'embauché à un chef d'entreprise par exemple, il aura plus de chance

d'êtreretenu, si sa lettre est dépourvue d'erreurs que si elle en était truffée. Dans un

curriculum vitae ou dans un rapport que l'on est amené à rédiger, on doit toujours faire

attention à l'orthographe.

Il appert que l'orthographe joue un rôle fondamental dans les échanges par écrit, et l'on

peut dire que s'appliquer en orthographe c'est, non seulement s'engager, s'affirmer

comme scripteur conscient, mais aussi faciliter la tâche de celui qui va vous lire. On

12

Page 28: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

comprend mieux alors l'importance avérée de l'orthographe dans notre société où l'écrit

joue un rôle majeur.

Par ailleurs, d'après les informations que nous avons reçues du ministère de l'Éducation

nationale, notre ministère de tutelle, il n'y a pas encore eu de recherche à proprement

parler au niveau du Gabon sur les erreurs d'orthographe au premier cycle du secondaire.

Notre étude viendra combler ce manque d'information.

2. CADRE THÉORIQUE

Dans la seconde partie de ce chapitre, nous présenterons les données théoriques sur

lesquelles notre étude s'appuie. Nous définirons d'abord les concepts d'orthographe et

d'erreur. Nous situerons la didactique de l'orthographe dans laquelle s'inscrit notre

recherche. Nous examinerons ensuite la structure du système orthographique du français

contemporain. Nous exposerons les principales données issues des travaux sur

l'acquisition-apprentissage de l'orthographe, sur le comportement du scripteur adulte

ainsi que sur l'analyse des erreurs. Enfin, nous présenterons diverses typologies d'erreurs

proposées pour le français et nous justifierons le choix de la grille de Catach (1980) que

nous avons retenue.

2.1. Définition des concepts d'orthographe et d'erreur

La maîtrise du français à la fois à l'oral et à l'écrit constitue l'un des objectifs

fondamentaux inscrits dans les programmes d'enseignement de cette discipline dans les

pays francophones.

13

Page 29: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Au Gabon, les différentes matières d'enseignement sont dispensées en français. On

comprend alors le caractère central qu'occupe le français dans le système éducatif

gabonais.

Dans cette section, nous définissons les concepts d'orthographe et d'erreur.

2.1.1. Définition du concept d'orthographe

Définir le concept d'orthographe semble à première vue facile. Mais quand on demande

aux gens de dire ce qu'ils entendent par l'orthographe, personne n'y parvient clairement.

C'est ce qui ressort d'une étude16 citée par Catach (1991) où de nombreuses personnes

ont été interrogées (enseignants, secrétaires, gens du livre, élèves du CM2 aux classes

terminales) et où les réponses les plus significatives se ramènent à celles-ci :

« Y'a un code et ce code orthographique il faut le connaître.»

« L'orthographe pour moi...c'est...j'allais dire : c'est comme ça. »

« Y'a un code bon ben il existe. » (p.8)

On constate que les trois énoncés montrent la difficulté de formuler une définition élaborée,

cohérente et significative de l'orthographe au point où l'on parle de « définition impossible ».

Dans ces trois énoncés, nous retenons également la récurrence d'un mot qui apparait dans

deux des trois définitions, c'est le mot code. Le code, de manière générale, renvoie à un

ensemble des lois et dispositions, un ensemble de règles, de préceptes, de prescriptions

16 MILLET, A., LUCCI, V., BELLIEZ, J. (1990). Orthographe mon amourl Presses universitaires de Grenoble, France, cité par Catach (1991), p. 8

14

Page 30: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

relatives à une matière, à un domaine. Celui qui nous concerne est le domaine orthographique.

C'est donc un système rigoureux de relations structurées entre signes, ensemble de signes et

contenu. Dans cette veine, Catach (1980) considère que l'orthographe est une :

Manière d'écrire les sons ou les mots d'une langue, en conformité d'une part avec le système de transcription graphique adopté à une époque donnée, d'autre part suivant certains rapports établis avec les autres sous-systèmes de la langue (morphologie, syntaxe, lexique). Plus ces rapports secondaires sont complexes, plus le rôle de l'orthographe grandit, car un tissu d'antagonismes se crée entre les relations phonie-graphie et les autres considérations entrant en ligne de compte. L'orthographe est un choix entre ces diverses considérations, plus ou moins réglé par des lois ou des conventions diverses, (p. 16)

Pour revenir sur la notion de code que d'aucuns semblent assimiler à l'orthographe française,

Catach (1978) précise que :

L'orthographe n'est pas seulement un code ou une institution sociale, mais un ensemble complexe de signes linguistiques. Trois éléments sont reconnus comme indissociables: les phonogrammes, les morphogrammes et les logogrammes. À côté de ces trois éléments essentiels au système graphique, arrivent les lettres étymologiques et historiques, (p. 53-57)

Nous y reviendrons plus en détail dans la section relative au système orthographique

établi par Catach et toute l'équipe HESO (Histoire et structure des systèmes d'écriture).

Retenons ici que le concept d'orthographe renvoie à l'idée de plurisystème, aux rapports

grapho-phonétiques et à d'autres aspects, grammaticaux, lexicaux, étymologiques et

historiques.

15

Page 31: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.1.2. Définition du concept d'erreur

De manière générale, on entend par erreur tout écart à une norme, ici la norme

orthographique. Une erreur orthographique peut toucher les divers plans du système

linguistique, phonologique, morphologique, lexical.

En pédagogie autrefois, l'erreur avait une connotation foncièrement négative. Elle était

considérée comme une « faute » qu'il fallait absolument sanctionner. De même, dans le

courant de pensée behavioriste, l'erreur est considérée comme ce qu'il faut

nécessairement corriger, voire punir. Dans le modèle d'enseignement préconisé par les

behavioristes, l'erreur doit être évitée à tout prix. Cet enseignement/apprentissage basé

sur les exercices, les répétitions et le renforcement positif ou négatif doit amener l'élève à

produire seulement des formes correctes (l'apprentissage programmé de Skinner).

Cette conception de l'erreur a été repensée durant les dernières décennies par bon nombre

de chercheurs tel que Reuter (2005). Sans nous attarder sur la distinction que l'auteur

établit entre le concept d'erreur et celui de dysfonctionnement, nous signalons tout de

même que Reuter (2005) préfère la terminologie dysfonctionnement à celle d'erreur car,

selon lui,

la notion d'erreur est trop restrictive (elle réfère plutôt à ce qui est localisable et faux) alors que le terme dysfonctionnement serait moins réducteur et établirait un lien plus étroit avec celui de fonctionnement, manifestant ainsi qu'ils sont associés et participent de l'activité même.

Nous n'insistons pas sur cet aspect purement terminologique, nous revenons, dans le

cadre de la clarification des concepts convoqués dans notre étude, sur la définition de

l'erreur que l'auteur considère comme un dysfonctionnement. Reuter pense que :

16

Page 32: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

un dysfonctionnement (à valeur) didactique est une partie ou la totalité d'un produit, situé dans et relevant d'un espace d'enseignement et d'apprentissage disciplinaires, estimée problématique (inadéquate / inappropriée), en fonction d'un code de référence didactique déterminé.

Autrement dit, une erreur est un écart, une situation qui se démarque de la norme établie

ou du code unanimement respecté par les usagers de la langue française.

Reuter pense, en outre, que l'importance de l'erreur varie selon un certain nombre de

paramètres : le statut (enseignant / élève), la tâche mise en place (dictée / rédaction) et la

discipline (orthographe / mathématique). Il convient donc de tenir compte de tous ces

paramètres et de préciser qu'un dysfonctionnement est toujours non seulement situé,

c'est- à -dire en lien avec son espace social rigoureusement limité et précisé, mais aussi

construit dans la mesure où il est basé sur des valeurs, des normes jugées importantes

d'une institution donnée (ici l'école).

Enfin, en lien avec les théories didactiques préconisées par la forme scolaire (espace d'apprentissage structurant de manière formelle la relation maître/élèves) qui les autorise, Reuter avance que :

d'une certaine manière, les dysfonctionnements justifient l'enseignement. Pourquoi enseignerait-on des savoirs ou des savoirs faire qui ne poseraient aucun problème aux élèves? Dans la perspective des théories actuelles de l'apprentissage, ils sont encore considérés comme des modalités de fonctionnement : on apprend avec / contre ses difficultés, via des tâtonnements, des restructurations, des régressions... Ils (les dysfonctionnements) constituent enfin, pour les maîtres notamment, des outils de guidage pour déterminer des objectifs, des démarches ou des situations de travail ou déterminer niveau et classement des élèves.

Cette conception de l'erreur comme outil de guidage pour les enseignants est

également celle d'un grand nombre de chercheurs qui pensent aussi que l'erreur est

un outil qui permettrait à l'enseignant de mesurer la compréhension de ses élèves

(Astolfi, 1975). En didactique par exemple, la conception constructiviste considère

que l'erreur est forcément présente dans l'apprentissage scolaire perçu comme un

17

Page 33: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

processus au cours duquel les connaissances nouvelles émergent des connaissances

anciennes sur la base d'une remise en cause ou d'une complexification de celles-ci.

L'erreur est donc le signe des difficultés que l'élève doit résoudre pour avoir une

connaissance nouvelle. On parle ainsi du conflit cognitif que l'élève doit résoudre.

La correction d'une erreur par un élève montre qu'il est venu à bout des difficultés

qui l'empêchaient d'accéder à de nouvelles connaissances en construisant de

nouvelles stratégies.

À cet effet, Bachelard (1938) pense « qu'il n'y a pas de vérité sans erreur rectifiée ». On

pourra dire que l'erreur est le point de départ d'une vérité qui, elle-même, est la forme

finie des erreurs rectifiées. Bachelard explique encore qu' « on connaît contre une

connaissance antérieure, en détruisant des connaissances mal faites, en surmontant ce qui,

dans l'esprit même fait obstacle ». Cette notion d'obstacle se trouve au cœur de sa

réflexion épistémologique.

Sans entrer dans les grandes théories développées par Bachelard (1938) et reprises par

Fabre (1995) sur les caractéristiques des obstacles, nous nous limitons à la définition

étymologique, non moins équivoque, selon laquelle l'obstacle, « obstare » en latin,

évoque « ce qui se tient devant, ce qui obstrue le passage ». Or sur le plan intérieur,

« l'obstacle n'est pas ce contre quoi viendrait buter la pensée, mais il réside dans la

pensée elle-même, dans les mots, dans l'expérience quotidienne... ». Autrement dit

l'erreur - considérée comme un obstacle à la connaissance - fait partie de l'acte de

connaître et, selon Bachelard (1938), elle est « l'ombre portée de la raison ».

Quant à Piaget (1975), il pense également qu'au lieu de rejeter les erreurs des élèves, on

doit plutôt les exploiter. Il insiste cependant sur le fait « qu'on ne doit pas brusquer les

étapes ». À la suite de l'idée d'obstacle développée par Bachelard (1938), Piaget met

l'accent sur celle de « scheme », centrale dans sa réflexion scientifique. Le mot scheme,

18

Page 34: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

du grec skhêma, signifie forme ou figure; les deux aspects ayant un statut abstrait et

s'opposant à l'action. Les schemes désignent la structure générale commune à un

ensemble d'actions. Ils correspondraient à une schématisation des actions ou des

opérations par la répétition, par les diverses répliques de la même action. « Ils se

caractérisent par le fait qu'ils se conservent dans leurs répétitions, se consolident par

l'exercice et tendent à se généraliser au contact du milieu, donnant alors lieu à des

différenciations et des coordinations variées. D'où l'apparition de nouvelles conduites,

qui s'élaborent à partir des schemes initiaux et de leurs interactions adaptatives avec le

milieu » (Legendre-Bergson, 1980). Les schemes pourraient donc être considérés comme

les moyens qui permettraient à l'élève de pouvoir appréhender les situations et les objets

auxquels il est confronté. À cet sujet, Rabardel (1995) écrit : « les schemes répondent à

« une organisation active de l'expérience qui intègre le passé », à « une structure qui a

une histoire et se transforme au fur et à mesure qu 'elle s'adapte à des situations et des

données plus variées ».

On peut donc interpréter les erreurs des élèves chez Piaget comme la manière dont les

schemes sont organisés à différents moments de leur évolution, de leur âge puisque ces

schemes se transforment en fonction des interactions, des contextes, des milieux, etc.

Conclusion sur les concepts d'orthographe et d'erreur

Nous abordons le concept d'orthographe dans la perspective de Catach (1978 et 1980),

qui soutient que l'orthographe est un système de signes indissociables de nature diverse

(phonologique, morphologique...) régulé par des conventions sociales.

Quant au concept d'erreur, nous retenons que deux postures se dégagent principalement.

Les positivistes (Skinner), qui pensent que l'erreur est « une faute » donc à bannir dans le

19

Page 35: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

processus d'enseignement/apprentissage, et les constructivistes, à l'instar de Piaget

(1975), qui expliquent que l'une des sources du développement des connaissances est liée

au déséquilibre (erreurs) né des interactions de l'enfant avec l'expérience et son milieu.

Piaget affirme que : « la source réelle du progrès est à rechercher dans la rééquilibration,

non pas naturellement d'un retour à la forme antérieure d'équilibre, dont l'insuffisance

est responsable du conflit auquel cette équilibration provisoire a abouti, mais d'une

amélioration de cette forme précédente. Néanmoins, sans le déséquilibre, il n'y aurait pas

eu de rééquilibration majorante ».

Ainsi, dans notre travail, nous avons orienté notre réflexion selon la perspective de

Reuter (2005), d'Astolfi (1975), de Bachelard (1938), de Piaget (1975), qui considèrent

que l'erreur est un outil pour enseigner, et qu'il faut non pas la rejeter mais la prendre en

compte pour construire de nouvelles connaissances. Dans le cadre de l'orthographe qui

nous concerne, l'erreur nous permettra d'apprécier l'évolution de l'élève dans son

processus d'apprentissage.

Nous allons maintenant nous intéresser au champ de la didactique de l'orthographe.

2.2. Le champ de la didactique de l'orthographe

La didactique de l'orthographe se situe dans le champ général de la didactique du

français. C'est un domaine encore jeune mais en plein essor.

La didactique de l'orthographe se fonde sur les travaux en lien avec les recherches

relatives à l'étude du système d'écriture du français et de son appropriation. Celles-ci ont

connu un développement important ces dernières années. On pense, par exemple, aux

20

Page 36: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

recherches de Jaffré (1992), de Haas (1999), de Sautot (2002), de Morin, Parent et

Montésinos-Gelet (2006), etc.

Les études se concentrent tantôt sur les méthodes d'enseignement ou les stratégies

d'apprentissage, tantôt sur l'analyse du traitement des erreurs d'orthographe, etc.

Les recherches sur l'acquisition de l'orthographe initiées au primaire (Fayol et Perfitti,

1997; Jaffré, 2003; Brissaud et Jaffré, 2003) se sont étendues au secondaire (Alain Delsol

1998; 2003). Ces travaux seront commentés dans une partie subséquente.

De même, un certain nombre d'outils de référence ont vu le jour dans le domaine de

l'orthographe, à l'instar de l'Échelle d'orthographe lexicale (Pothier et Pothier, 2003)

dont le rôle est de préciser les pourcentages de réussite orthographique à chaque niveau

de la scolarité élémentaire pour plus de 11 000 mots. Citons le cas du MANULEX (Lété,

2004) capable de fournir la fréquence de 48 900 formes orthographiques différentes.

En dépit du manque de recherches en didactique de l'orthographe destinées à tester, par

exemple, l'efficacité d'un dispositif didactique innovant, quelques propositions

didactiques se sont tout de même signalées. C'est le cas des travaux de Cogis (2005), de

Pelletier et de Deun (2004) et de Morin et Montésinos-Gelet (2007).

Un autre problème important concerne l'intégration des réformes orthographiques dans le

système scolaire, notamment des rectifications de 1990 . Ces rectifications

orthographiques ont fait l'objet d'une publication récente (Contant, 2009).

17 Organisées en France par le Conseil supérieur de la langue française, les réformes orthographiques de l'orthographe française ont été adoptées dans toute la francophonie, mais comme recommandations officielles simplement. Le rapport du conseil supérieur de la langue française a été publié dans les documents officiels le 6 décembre 1990.

21

Page 37: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Nous passons maintenant aux principales études sur la structure du système

orthographique du français contemporain.

2.3. Structure de l'orthographe française actuelle

23.1. Les travaux de Blanche-Benveniste et Chervel

Blanche-Benveniste et Chervel (1968) ont été parmi les premiers linguistes français à

s'intéresser à la description de l'orthographe. Ils ont fait une étude approfondie de la

valeur phonique des lettres. Ils distinguent la valeur de base, la valeur de position, la

valeur auxiliaire, la valeur zéro et la valeur de digramme.

La valeur de base est la valeur phonique générale d'un graphème. La valeur de base de c

est /k/ et non /s/, parce que sa valeur Isl est limitée au cas où il est suivi des graphèmes e

et /, alors que sa valeur /k/ est possible dans tous les autres cas : ca, co, eu, cl, cr, ch, etc.

La valeur de base d'un graphème est donc liée à un certain nombre de contraintes.

La valeur de position concerne la position du graphème dans un mot. Entre les valeurs de

base et les valeurs de position, il y a des relations d'ordre phonétique. Par exemple, le

graphème s, dont la valeur de base est Isl, vaut /z/ entre deux voyelles : poison s'oppose à

poisson. De même, le s de liaison a toujours la valeur de position : quels ennuis; le s final

du premier mot devient phonétiquement /z/.

22

Page 38: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

On parle de valeur auxiliaire quand un graphème influe sur la valeur d'un graphème

voisin sans être lui-même prononcé. C'est le cas de u de guérir. Le caractère auxiliaire de

u suppose que le graphème précédent est susceptible de valeurs de position. Il y a donc

complémentarité entre les deux phénomènes.

La valeur zéro est, quant à elle, attribuée à un graphème qui ne se prononce pas dans un

mot. C'est le cas de h dans rhume et humide, de d dans lard, etc. Les graphèmes à valeur

zéro peuvent occuper n'importe quelle position dans un mot.

Les valeurs de digramme concernent l'amalgame de deux lettres au moins. Cela touche

en français particulièrement les voyelles. C'est le cas de e et w dans le mot feu. Dans leur

fonctionnement phono-graphique, les deux segments restent inséparables puisque ni e ni

u ne peuvent avoir séparément la valeur loi qui résulte de leur juxtaposition. Il y a

environ une trentaine de groupes de ce type qui peut réunir aussi des lettres

consonantiques (ai, au, oi, ei, œ, ph, etc.). Sont également classés dans cette catégorie les

trigrammes (-ill- dans le mot mouiller /muje/, la valeur de 1)1 correspond à l'ensemble du

segment), et les tétragrammes, qui sont plutôt rares (-illi- dans le mot quincaillier

/kekaje/), etc.

Au terme de cette analyse du code phonographique menée en 1968, Chervel et Blanche-

Benveniste n'ont pas hésité à faire des propositions de simplification du système

orthographique français. Ils ont en quelque sorte devancé les rectifications 19.

orthographiques de 1990 dont les plus importantes concernent d'abord le trait d'union,

le pluriel des mots composés, l'accent circonflexe, le participe passé de laisser suivi d'un

18 Rectifications orthographiques de 1990, Orthographes nouvelles et rectifiées publiées au Journal officiel du 6 décembre 1990. Source : Conseil international de la langue française, 11 rue de Navarin, 75009, Paris; http://www.sdv.fr/orthonet

23

Page 39: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

infinitif (exemple : elle s'est laissé mourir). Toutes ces rectifications ont été validées par

l'Académie, et beaucoup de lexicographes les ont intégrées dans leurs dictionnaires.

Nous nous appesantirons surtout sur les travaux de l'équipe CNRS-HESO, qui ont mis en

évidence plusieurs systèmes dans l'orthographe française à la suite des travaux du

linguiste russe V. Gak (1975).

2.3.2. Le plurisystème de l'orthographe française de l'équipe HESO

Ainsi que nous l'avons déjà indiqué, selon Catach (1980) et ses collaborateurs de l'équipe

H.E.S.O (Histoire et structure des systèmes d'écriture), l'orthographe peut se définir non

seulement comme un code ou une institution sociale, mais aussi comme un ensemble

complexe de signes linguistiques. L'orthographe française est vue ainsi comme un

système structuré mettant en jeu les diverses composantes de la langue : la phonologie, la

morphologie, la syntaxe, le lexique.

Les phonogrammes

Les phonogrammes servent à la transcription des sons. Ils correspondent aux graphèmes

qui représentent les phonèmes. Ils ont donc une fonction essentiellement phonique. Par

exemple, le phonogramme p a pour fonction d'assurer la prononciation du phonème /p/.

Ils constituent pour le français les fondations du système. Cependant, l'usage des

phonogrammes est irrégulière, un phonème pouvant être transcrit par plusieurs

phonogrammes (loi par o, au, eau...), et peut être soumis à certaines règles de la position

et au contexte (e devant double consonne transcrit le phonème /e/). Mais il y a aussi,

24

Page 40: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

auprès de ces graphèmes centraux, d'autres graphèmes secondaires appelés

morphogrammes.

Les morphogrammes

Ce sont les graphèmes qui ont une fonction essentiellement morphologique. On en

distingue deux types : les morphogrammes grammaticaux et les morphogrammes

lexicaux. Les premiers renvoient aux graphèmes qui s'ajoutent aux mots pour marquer le

genre et le nombre, notamment des noms et des adjectifs, ou pour marquer les diverses

flexions verbales. C'est le cas du s du pluriel étendu à la série des noms et des adjectifs,

qu'il soit prononcé ou non (des jeunes insouciants). Dans les femmes jouent, trois

morphogrammes grammaticaux, inaudibles, traduisent le nombre dans le groupe nominal

et la marque du pluriel (-ent) dans le groupe verbal.

En ce qui concerne les morphogrammes lexicaux, on les reconnaît à partir de la marque

graphique dérivationnelle. On parle ainsi des mots de la même famille morphologique.

Par exemple, la lettre p du mot camp trouve sa justification dans la formation des mots

comme camper, campement. À côté des morphogrammes, il y a également les

logogrammes dans le système orthographique français.

Les logogrammes

Encore appelés « figures des mots », les logogrammes sont des graphies globales

permettant la distinction de certains homophones. Parmi eux, on distingue les

homophones-hétérographes (pin/pain; mots/mata; vert/ver/vers/verre, etc.) et les

homophones-homographes (par exemple les mots timbre/timbre : verbe timbrer et timbre

25

Page 41: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

vocal, pêche/pêche « verbe pêcher et le substantif désignant un fruit, etc./ Les

homophones-hétérographes se prononcent de la même façon, mais se distinguent à l'écrit

sur le plan formel comme sur le plan sémantique. Alors que les homophones-

homographes s'écrivent de manière identique, mais ont de sens différents.

Le système orthographique français est complété par des graphies qui rappellent l'origine

et l'histoire des mots qui constituent son répertoire.

Les lettres étymologiques et historiques

L'orthographe française a été marquée par une longue tradition conservatrice et

étymologisante qui explique la présence d'un nombre important de graphies anciennes

héritées de l'histoire de la langue ou rappelant des langues sources et dont la maîtrise

suppose une certaine érudition. Sur le plan étymologique, c'est le cas des graphies dites

« grecques » telles que : théâtre, rhume; ou « latines » comme le maintien dxxp dans loup

(dérivé du mot latin lupus). Sur le plan historique, la double transcription de /s/ dans les

verbes en -eler, -eter (redoublement de la consonne : j'appelle, accent grave : je pèle)

s'explique par le fait qu'avec l'apparition de l'accent à la Renaissance certaines séries

verbales ont été accentuées alors que d'autres ont conservé l'ancien mode de transcription

par la double consonne.

De façon générale, on peut dire que l'orthographe française est dans l'ensemble

phonogrammique. Plusieurs recherches menées par l'équipe HESO se sont accordées à le

démontrer. En effet, le premier sondage statistique réalisé en 1972 sur un total de 3346

mots (cinq textes différenciés sur le plan de la langue ou du type de discours) relève

16 347 graphèmes. Les résultats montrent que les phonogrammes représentent 83% des

mots repérés et classés. Quant à la deuxième enquête, réalisée pour compléter la

première, elle présente les résultats statistiques à partir des 3724 mots de l'Échelle

26

Page 42: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Dubois-Buyse19 . Ces résultats montrent aussi que 83 % des graphèmes utilisés sont des

phonogrammes. Quant aux morphèmes lexicaux et grammaticaux, ils représentent

respectivement 3 ou 4 % des graphèmes et des logogrammes ont la même proportion

(Honveault, 1995). Toutefois, selon Véronis (1986), les règles phonographiques ne

permettent d'écrire correctement que 50 % des mots en français en raison de l'existence

de plusieurs irrégularités.

Ainsi, le plurisystème de l'orthographe française est fort complexe et par conséquent

difficile à maîtriser. Catherine Brissaud (2003), Marie-France Morin (2006) et beaucoup

d'autres chercheurs se sont penchés sur la question de son acquisition.

2.4. Acquisition de l'orthographe

Bon nombre de chercheurs ont effectué des travaux dans le domaine de l'acquisition de

l'orthographe. On relève, entre autres, les travaux de Fayol et Largy, 1992 ; Fayol et

Perfetti, 1997; ceux de Jaffré, 2003; Brissaud et Jaffré, 2003; Nunes et Bryant, 2004;

Malatesh Joshi et Aron, 2005, etc. Ces recherches sont centrées sur les savoirs, les

procédures et les difficultés de l'apprenant.

Loin de nous l'idée de prétendre à la présentation exhaustive des recherches dans le

domaine de l'acquisition de l'orthographe. Nous nous limiterons, en nous référant

notamment à la synthèse de Fayol et Largy (1992) et Largy (1995), à dégager les traits

essentiels de ces recherches.

19 L'Échelle Dubois-Buyse a été réalisée, entre autres, par Ters, F., Meyer, G., Reichenbach., D. (1977)., liste de fréquence particulièrement importante, puisque prise en grande partie dans le vocabulaire le mieux connu des enfants.

27

Page 43: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.4.1. L'importance du contexte morphologique et du type de tâche mis en lumière par les travaux en psychologie cognitive sur la gestion de l'attention

Un certain nombre de travaux comme ceux de Fayol et Largy (1992) et de Largy (1995)

ont montré que les performances orthographiques dépendent largement des conditions de

production et des structures morphosyntaxiques, et que la mise en œuvre de l'accord à

l'écrit n'est pas facile. Dans ces études, on demande par exemple aux participants

d'écrire des phrases comme Le chien des voisins arrive, où deux noms de nombre

différent peuvent être des sujets possibles, ce qui peut induire un conflit d'accord. Les

phrases sont de plus présentées sous plusieurs modalités : exercice à trous, dictée de

phrases, dictée de phrases avec tâche secondaire, etc., le but étant de voir, à partir du

niveau de surcharge cognitive qui pèse sur le scripteur, comment il parvient à partager

son attention sur plusieurs tâches à là fois. Des manipulations sur d'autres structures ont

été effectuées telles que la place du verbe, le contexte sémantique, la place des

homophones, etc. On a constaté entre autres que les élèves de 13 ou 14 ans font des

accords dits de proximité {il les mangent) ; ceux de 10 ans connaissent le phénomène de

surgénéralisation du - s nominal au verbe (il les manges), surtout quand le verbe a un

homophone nominal (il les timbres). Ainsi il est apparu que le type de structure

linguistique où doit se faire la réalisation de l'accord ainsi que le type de tâche qui

l'accompagne exercent une influence décisive dans le comportement orthographique de

tout scripteur.

2.4.2. Les conceptions des élèves révélées par l'entretien métagraphique

D'autres travaux ont porté moins sur les facteurs externes comme les structures

linguistiques que sur les raisonnements et les conduites internes de l'apprenant. Pour ce

faire, le groupe de linguistes dénommé LEA (Linguistique de l'Écrit et Acquisition) que

dirige Jean-Pierre Jaffré a utilisé l'entretien métagraphique. Il s'agit d'un entretien au

cours duquel l'élève est amené à justifier ses choix graphiques après avoir écrit un texte

28

Page 44: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

(Jaffré, 2003; Jaffré et David, 1999). La méthode de l'entretien métagraphique a révélé

une variété de conceptions mises en place par l'élève dans le processus de réalisation des

accords en dehors de l'enseignement reçu; par exemple, chez de jeunes sujets, la lettre e

est la marque de fille, ce qui donne une sexualisation de l'énoncé (Cogis, 1998).

L'entretien métagraphique permet donc d'apprécier la parole du sujet, les procédures et

les stratégies personnelles mises en œuvre pour résoudre ses problèmes orthographiques.

2.4.3. Les débuts d'apprentissage

À la suite des travaux de Ferreiro (Ferreiro, Gomez Palacio, 1998), certains chercheurs

francophones se sont intéressés à l'acquisition du lire/écrire chez les tout-petits

(maternelle et première année primaire), à la conceptualisation du système d'écriture chez

les jeunes scripteurs. Pour voir comment le jeune enfant s'approprie le système

d'écriture, les chercheurs ont eu recours à des tâches diverses et variées.

À Lyon, Jean-Marie Besse a mené des recherches sur l'écriture du prénom (Besse, De

Gaulmyn et Luis, 1993; Bess, 1993). Montésinos-Gelet (1999) a observé, elle, la

construction phonogrammique de l'écriture chez des enfants de la maternelle. En Suisse,

les stratégies d'apprentissage de l'écriture et de copie de mots en situation de production

de texte ont été le but de l'étude qu'ont menée Laurence Rieben et Madelon Saada-

Robert (1997). Au Québec, Marie-France Morin (2004) a travaillé avec les enfants de la

maternelle et de la première année du primaire sur la conceptualisation de la dimension

morphogrammique de l'écriture (le nombre plus précisément). De cette étude, il ressort

que les élèves de lere primaire sont capables d'utiliser les marques du nombre en lecture;

toutefois, ils ne justifient pas clairement leur choix, ayant une conscience

métamorphologique peu avancée. Une des propositions didactiques issues de ces

recherches concernent la pratique des orthographes approchées en début d'apprentissage

de la lecture et de l'écriture (Rieben, 2003; Montésinos-Gelet et Morin, 2006).

29

Page 45: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.4.4. Le développement de la conscience métalinguistique

Depuis longtemps, il a été démontré que les habiletés métalinguistiques sont intimement

reliées à l'apprentissage réussi de la lecture (Lundberg, Frost & Peterson, 1988; Gombert,

1990; Lecocq, 1991; Rieden & Perfitti, 1989). Les habiletés métalinguistiques sont

définies comme étant la capacité de réfléchir sur la langue, d'en identifier les

composantes et de pouvoir les manipuler de manière contrôlée (Gombert, 1990). Parmi

les habiletés métalinguistiques, l'habileté métaphonologique (ou la conscience

phonologique) correspond à la capacité d'identifier les phonèmes inclus dans les mots et

à les manipuler de façon consciente.

Le lien entre la conscience phonologique et l'écrit s'explique par le système alphabétique

que nous utilisons. La mise en œuvre du principe alphabétique nécessite d'être en mesure

de segmenter le langage oral pour y repérer les phonèmes, puis de les associer aux

graphèmes correspondants. En fonction de cette caractéristique, on peut aisément

concevoir qu'une certaine sensibilité à la structure phonologique des mots facilite

l'acquisition de l'écrit. Ainsi, des études longitudinales ont montré que des lacunes en

conscience phonologique en lre année entraînent un retard dans l'apprentissage de la

lecture (Juel, 1988; Sprenger-Charolles, Béchannec & Lacert, 1998). Par ailleurs, un

entraînement en conscience phonologique à la maternelle augmente les performances en

lecture en lre année (Lecocq, 1991). Un minimum de conscience phonologique est donc

utile pour lire.

De plus, le contact avec l'écrit favorise le développement des capacités

métalinguistiques. Nombre d'études ont ainsi rapporté une augmentation considérable du

niveau de la conscience phonologique des élèves après quelques mois d'enseignement

formel à la lecture et à l'écriture (Délisle, 2003; Sprenger-Charolles et al, 1997). Cette

augmentation ne peut être attribuée à un effet de la maturité, puisque les adultes illettrés

éprouvent de grandes difficultés dans les tâches de conscience phonologique (Morais,

1994). La conscience phonologique pourrait être à la fois un préalable et une

30

Page 46: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

conséquence de la langue écrite (Tunmer, 1989) et exercerait donc une influence dans

l'acquisition du système d'écriture et de l'orthographe.

2.4.5. Le développement de l'orthographe au fil de la scolarité

Plusieurs études longitudinales ont été conduites auprès de populations scolaires de la 2e

primaire au secondaire, notamment sur la dimension homophonique du français écrit.

À Toulouse, la recherche menée par Alain Delsol (1998, 2003) a porté sur l'homophonie

en /se/ ou /sel (ses/ces, c 'est/s 'est, sais/sait). Le but de cette étude était de voir comment

peut se faire l'acquisition des différentes graphies de cette syllabe orale, du CE2 à la 4e

du collège français. Il en ressort que les erreurs des élèves vont en diminuant et qu'à la

dernière étape de leur apprentissage ils ne commettent plus d'erreurs quel que soit le

contexte.

Dans une recherche franco-québécoise (Chevrot, Brissaud et Lefrançois, 2003; Brissaud,

Chevrot et Lefrançois, à paraître) sur l'acquisition des flexions verbales en ld de la 3e

primaire à la 3 e secondaire, les chercheurs ont tenté de mettre en évidence le problème

fréquent de l'opposition modale -é/-er. Les chercheurs relèvent que les élèves de la 3e

primaire sont plus portés vers la graphie -er. Ils constatent aussi que la forme en -é

devient plus disponible chez une majorité d'élèves de la 4e primaire, et que

l'augmentation des erreurs en -é est liée à une surgénéralisation de l'accord avec le sujet

(les erreurs du genre les filles ont/vont 'mangées augmentent en 4e et 5e primaire, que la

cible soit -é ou -er). Cette tendance à souvent accorder avec le sujet laisse penser que les

élèves, à partir de la 4e primaire, ont plus de facilité à accorder le participe passé avec

l'auxiliaire être, alors qu'ils ont des difficultés à ne pas l'accorder quand il suit avoir.

31

Page 47: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Il apparaît donc que l'orthographe du verbe n'est pas acquise en fin de scolarité primaire

et qu'il convient de limiter ses exigences durant les premières armées de l'apprentissage

de l'écriture. Toutes ces études montrent que l'apprentissage de l'orthographe française

est semé d'embûches, et que son acquisition ne peut s'effectuer que sur une longue

période pendant tout le primaire et le secondaire, et même au niveau supérieur.

2.5. Modèles de développement des compétences orthographiques chez les enfants

En plus des études sur des points particuliers relatifs à l'acquisition de l'orthographe dont

il vient d'être fait mention, plusieurs modèles généraux de, développement des

compétences orthographiques ont été proposés. Nous allons présenter les travaux de Frith

(1985), qui décrivent comment les enfants utilisent différentes procédures en orthographe

au cours de leur apprentissage. Cette auteure postule que les apprenants passeraient par

une série de stades. Chaque stade est caractérisé par un certain nombre de procédures qui

doivent être maîtrisées avant de passer au stade suivant. L'auteure propose deux modèles,

à savoir : le modèle à trois pas et celui à six pas.

2.5.1. Le modèle à trois pas de Frith

Frith (1985) a été l'une des premières chercheuses à proposer que la lecture et

l'orthographe suivraient le même schéma de développement en trois phases, à savoir :

logographique, alphabétique et orthographique. Chaque phase correspond à une stratégie

dominante.

32

Page 48: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

La phase logographique

Elle renvoie à l'usage des logos comme moyen de faire des associations directes entre

une forme visuelle et un sens. En effet, avant tout apprentissage formel, les jeunes enfants

âgés entre trois et six ans peuvent reconnaître certains mots par le biais de certains traits

visuels et du contexte dans lequel les mots se trouvent. La reconnaissance de ces formes

se réalise à partir d'indices divers à la fois inhérents au mot lui-même (Byrne, 1989/1991)

et au contexte (Gough et Juel, 1989/1991). C'est le cas des couleurs vert et blanc qui sont

indispensables à l'identification dePerrier, tout comme rouge et blanc le sont pour Coca-

cola (Morton, 1989). Les enfants utiliseraient pour reconnaître ces mots familiers la

procédure logographique, encore appelée stratégie visuelle (Goswani & Bryant, 1990),

qui consisterait à retenir par cœur les premières lettres ou groupes de lettres saillants, par

exemple, la présence d'un P suffit à lire Paul, même si c'est Pierre qui est écrit.

Par ailleurs, certaines contraintes telles que le nombre et l'ordre des lettres ne sont pas

considérées dans cette phase. Ainsi, ppaa, pap, paap, ...pourront être identifiés comme

correspondant à papa. À cette phase, les enfants n'effectueraient pas encore un traitement

linguistique des mots mais auraient recours à un traitement pictural, et cette procédure

serait la même que celle qui permettrait de distinguer deux dessins (Dermont & Gombert,

2004).

Dans ce modèle de Frith, durant la phase logographique, l'aspect orthographique n'est

pas précisément défini (Martinet, Bosse, Valdois & Tainturier, 1999). Cette étape pré­

alphabétique correspondrait au moment où l'enfant est encore incapable d'écrire « par

cœur » son prénom et quelques mots familiers tels que maman, papa et les prénoms de

certains de ses amis.

33

Page 49: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

La phase alphabétique

Encore appelée phase phonologique, la phase alphabétique est caractérisée par

l'exploitation systématique des correspondances entre phonies et graphies (grapho-

phonologiques). Cette phase commence quand les enfants découvrent que l'écriture

transcrit la langue orale. Cette découverte est favorisée soit par la maturité ou

l'expérience de l'enfant, soit par la régularité du système orthographique. Les mots

seraient décodés lettre à lettre. Cette procédure permet de prononcer tous les mots. En

revanche la prononciation obtenue n'est pas nécessairement conventionnelle, surtout

lorsque la graphie du mot est éloignée de sa prononciation (cf femme, chaos).

Cette phase alphabétique comporterait deux voies de traitement de l'orthographe (Bary,

1994). L'une effectuerait des appariements sons-lettres (assemblage); l'autre procéderait

par récupération directe des items stockés en mémoire (adressage). Les orthographes

dites opaques soulèvent des problèmes lors de l'apprentissage chez l'enfant et même, en

cours de rédaction, chez certains adultes. Ces difficultés proviennent des irrégularités

dans les appariements sons-lettres. Ces irrégularités se manifestent tant en lecture,

lorsque les mêmes suites de lettres se prononcent différemment (par exemple, ch dans

arche et orchidée) qu'en orthographe lorsque la même configuration sonore se transcrit

par différentes suites de lettres (/àV—► an, en, am, em). Cependant, le poids cognitif

nécessaire à l'assemblage par l'adulte expert est différent de celui de l'apprenant, dont

l'apprentissage de l'écrit peut être lent et fastidieux. Pour l'adulte expert, cette procédure

est déjà automatisée et nécessite moins d'attention pour traiter les mots, ce qui n'est pas

le cas chez l'apprenant qui doit mobiliser toute son attention pour être capable de lire et

d'écrire un texte. Toutefois, la procédure phonologique ne suffit pas pour être capable de

lire tous les mots écrits en français ou de les orthographier. D'autres procédures

s'imposent nécessairement au lecteur/scripteur francophone.

.34

Page 50: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

La phase orthographique

La phase orthographique ne succède pas brusquement à la phase alphabétique. Toutes les

deux s'interpénétrent très tôt et conduisent au fonctionnement en parallèle chez l'adulte

des procédures d'assemblage et d'adressage en lecture/écriture (Kreiner, 1996) comme

on le verra plus loin. Cette phase s'amorce et se développe chez l'enfant lorsque les

règles d'usage de la procédure phonologique sont bien acquises, autrement dit lorsque la

lecture et.l'écriture conventionnelles ne s'effectuent plus par associations simples et

régulières entre configuration sonore et configuration de lettres. Ainsi, Henderson et coll.

(Beers, 1975, 1980; Gentry, 1977; Beers, 1980; Beers, Beers et Grant, 1977; Beers et

Henderson, 1977; Henderson, 1980, 1981, 1992; Henderson et Beers, 1980; Schlagal,

1989; Templeton et Beers, 1992) ont relevé que les orthographes des enfants évoluaient

très progressivement de la grande section maternelle aux dernières années du primaire.

Elles passent notamment d'une notation phonétique à l'intégration régulière des marques

orthographiques. De la sorte, les enfants sont capables d'analyser les mots en différentes

unités orthographiques de taille diverse et de fonction différente. Ces unités dont ils

tiennent maintenant compte peuvent être les morphèmes flexionnels (les verbes en er font

leur imparfait en ais, ait, aient...), les morphèmes dérivationnels (sabot —» sabotier,

galop —* galoper) et les consonnes doubles.

De plus, ce stade se caractérise par l'apparition des traitements analogiques, c'est-à-dire

écrire des mots nouveaux par analogie à ceux qui ont été rencontrés précédemment

(Martinet et al , 1990).

En somme, le modèle de développement proposé par Frith (1985) suggère que

l'acquisition/apprentissage en lecture et en orthographe se déroule en trois phases,

corrélativement liées, en ce sens que la maîtrise de l'une donne accès à la suivante. Aussi,

la complémentarité de l'apprentissage de la lecture et de l'orthographe reste l'une des

données majeures de la recherche.

35

Page 51: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.5.2. Le modèle à six pas de Frith

Pour aller plus loin dans l'analyse du développement des stratégies à l'écrit chez les

enfants, Frith (1985) propose une deuxième version du modèle, cette fois, à six pas,

comme nous pouvons le voir dans le tableau ci-après.

Tableau 1

Modèle à six pas de Frith (1985)

Phase Lecture Écriture

la

lb

2a

2b

3a

3b

Logographique 1

Logographique 2

Logographique 3

Alphabétique 2

Orthographique 1

Orthographique 2

(Symbolique)

Logographique 2

Alphabétique 1

Alphabétique 2

Alphabétique 3

Orthographique 2

Ce modèle à six pas développe le premier modèle en distinguant la lecture et l'écriture. Il

a été exploité par Sirois (2004) dans une étude sur les enfants malentendants. Frith pense

qu'une stratégie n'est pas adoptée simultanément en lecture et écriture. Elle définit

plusieurs degrés ou différents niveaux d'expertise pour chacune des stratégies, et suppose

qu'un certain niveau de maitrise doit être atteint dans l'un des deux domaines, la lecture

et l'écriture, pour que la stratégie soit adoptée dans l'autre domaine (Casalis, 1995; Frith,

36

Page 52: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

1985; Sprenger-Charolles & Casalis, 1996). À chacun des stades, il y aurait d'abord

divergence entre stratégies utilisées en lecture et en écriture, puis convergence :

En bref, la stratégie nous apprend qu'à chaque phase il y a une première étape où il y a divergence entre les stratégies utilisées pour lire et écrire, puis une étape où il y a convergence. Le progrès développemental est envisagé comme un équilibre entre l'écriture et la lecture. La lecture est déterminante pour la stratégie logographique, alors que l'écriture l'est pour la stratégie alphabétique et, de nouveau, la lecture l'est pour la stratégie orthographique. (Frith, 1985, p. 311).

Le modèle développemental de Frith soutient que l'apprentissage de la lecture et de

l'écriture s'effectuent en trois principales étapes et que chacune dépend de la maitrise de

la précédente. Il appert donc que la lecture et l'écriture se réalisent de manière

complémentaire, « chacune agissant à certains moments précis comme stimulateurs de

l'autre » (Laplante, 1998 : 35).

Cependant, s'il est vrai que nombre de travaux appuient le modèle de Frith (1985) et

soutiennent toute sa description, il n'en demeure pas moins que d'autres le critiquent. En

effet, le modèle de stade suppose que le passage d'un stade au stade suivant ne peut se

faire que si les compétences liées au stade antérieur sont parfaitement maîtrisées. Ainsi,

les enfants n'utiliseraient la procédure lexicale que tardivement puisqu'ils doivent

d'abord maitriser l'étape phonologique.

Or, certains travaux ont montré que les enfants sont sensibles, dès les premiers

apprentissages, aux différents types d'informations orthographiques et morphologiques

(Deacon & Alegria, 1996; Sanguin-Bruckert & Bruckert 2004; Sénéchal, 2000). De plus,

ces auteurs ont insisté sur le recours à l'utilisation d'analogies lexicales plus que les

modèles en stades ne le suggèrent (Gombert, Bryant & Warrick, 1997; Goswami &

Bryant, 1990; Martinet et a l , 1999). Alégria et Mousty (1996) pensent que la procédure

phonologique et la procédure lexicale fonctionneraient simultanément :

37

Page 53: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Il n'existe pas de « lecteur alphabétique » ni de « lecteur orthographique » mais des mots pour lesquels le lecteur possède une représentation orthographique et qui seront probablement identifiés par cette voie et des mots pour lesquels il n'en possède pas et qui seront identifiés par la procédure d'assemblage. Parler de stade introduit une notion incorrecte. Elle renvoie, par exemple, à l'idée qu'un lecteur ayant atteint le stade orthographique se serait débarrassé du processus d'assemblage phonologique, (p. 113).

Parallèlement, de nombreux auteurs ont récemment suggéré que l'apprenti scripteur et le

scripteur expert utiliseraient de façon simultanée la procédure phonologique et la

procédure lexicale en fonction de la fréquence des mots qu'ils ont lus et écrits

auparavant. Par ailleurs, comme l'orthographe renvoie pour celui qui rédige à l'exigence

de respecter l'ordre des lettres qui constituent le mot (Erhi, 1997), certains chercheurs ont

du mal à concevoir l'utilisation d'une procédure logographique en orthographe (Goswami

& Bryant, 1990; Sprenger et Charolles et a l , 1997).

2.6. Travaux sur le comportement du scripteur adulte

Beaucoup de chercheurs se sont penchés sur la question du traitement de l'écrit chez le

scripteur expert. Ces études ont mis en lumière une variété de modèles éclairant le

comportement du scripteur adulte, dont le modèle à double voie qui a été mentionné

précédemment.

Le modèle à double voie

Les recherches menées en psychologie cognitive et en neuropsychologie indiquent que le

traitement de l'écrit par l'adulte expert s'effectuerait selon deux voies. Cette théorie,

encore appelée dual-route model, a d'abord été élaborée en lecture (Coltheart, 1978) et a

38

Page 54: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

été adaptée par la suite en écriture (Barry, 1994). Les promoteurs de ce modèle

soutiennent qu'il existerait deux procédures distinctes susceptibles d'amener les

apprenants à traiter récriture, à savoir : une procédure lexicale et une procédure

phonologique.

La procédure lexicale, appelée aussi procédure d'adressage, est une opération à partir de

laquelle le scripteur adulte parvient à récupérer l'orthographe du mot connu stocké dans

sa mémoire. Nous disposerions ainsi, d'un lexique mental, stock de représentations

phonologiques ou orthographiques récupérables en fonction des besoins du scripteur.

Tout se passe en fait comme si le scripteur cherchait la représentation graphique du mot

dans sa mémoire de la même manière qu'il le fait dans un dictionnaire. Selon ces

chercheurs, seule la procédure lexicale permet d'écrire correctement les mots irréguliers,

à l'instar de femme, chorale, schéma, etc., dont certains graphèmes doivent être

mémorisés en bloc.

Les chercheurs ont postulé l'existence d'une autre procédure que le scripteur expert

emploierait surtout pour les mots peu familiers ou inconnus. Cette deuxième procédure

repose sur la conversion des phonèmes en graphèmes. Le mot à écrire est d'abord

segmenté à l'oral en phonèmes. Ensuite, ces derniers sont mis en correspondance avec les

graphèmes directement reliés à la mémoire graphémique. Une fois ces relations réalisées,

les segments sont immédiatement assemblés puis traduits en mots écrits. Cette procédure,

dite d'assemblage, ne traite efficacement que les mots réguliers, dont la transcription se

fonde sur des correspondances graphophonétiques courantes. Quand il s'agit des mots

irréguliers comme chorale, les sujets peuvent avoir tendance à se tromper, par exemple

écrire * coral, ignorant la graphie grecque particulière ch.

39

Page 55: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.7. Analyse des erreurs

L'analyse des erreurs orthographiques a mis en évidence deux facteurs intervenant dans

le comportement orthographique des scripteurs : l'effet de régularité et l'effet de

fréquence.

2.7.1. L'effet de régularité

L'analyse qualitative des erreurs orthographiques permet de déterminer la procédure qui

a été appliquée par le scripteur lors du traitement des mots. Les erreurs commises sont

généralement classées en deux ordres : soit phonologiques, soit phonographiquement

acceptables. En effet, quand la prononciation d'un mot conduit à une forme phonologique

différente du mot dicté, on parle d'une erreur phonologique. C'est le cas des erreurs de

substitution de graphèmes représentant des phonèmes différents telles que (vache pour

tache), d'omission (brache pour branche), d'ajout (prorte pour porte) et de déplacement

(talbe pour tablé). Ces erreurs phonologiques indiquent que l'élève éprouve des

difficultés de traitement phonologique. Par contre, une erreur est dite

phonographiquement acceptable lorsqu'elle conduit à une chaîne de lettres pouvant être

prononcé comme le mot dicté, à partir de l'application des règles de correspondances

phonologiques (Tumner, 1989). Il s'agit des erreurs de régularisation observées dans la

production de mots irréguliers tels que *fam pour femme qui, phonographiquement, est

acceptable. Selon les chercheurs, les élèves qui commettent des telles erreurs

comprennent le principe alphabétique, maîtrisent la procédure phonologique pour

orthographier, mais ils ont des difficultés à pouvoir traiter les unités orthographiques. En

revanche, les élèves qui font plusieurs erreurs phonologiques semblent utiliser une

stratégie orthographique plutôt qu'une stratégie phonologique axée sur les règles de

correspondances phonographiques (Frith, 1980; Launey & Valdois, 2004).

40

Page 56: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Pour étudier le développement des procédures utilisées par les élèves en vue de pouvoir

lire et orthographier, Sprenger-Charolles, Siegel et Béchenec (1997) ont suivi une

cinquantaine d'élèves francophones de la lre à la 4e année. Ces élèves ont participé à des

séances de lecture (lecture des mots et des pseudomots) et d'orthographe (dictée des mots

et des pseudomots). Les mots et les pseudomots (mots inventés) retenus pour ces séances

ont été rigoureusement contrôlés selon leur fréquence, leur régularité et leur lexicalité.

Les chercheurs ont émis les hypothèses suivantes : si les enfants ont recours à la

procédure phonologique pour traiter les mots, ils éprouveront des difficultés avec les

mots irréguliers ; de plus, la fréquence d'un mot ne pourra pas influencer la lecture et

l'écriture d'un enfant qui utilise cette procédure; par contre, si un mot fréquent tel que

femme est mieux lu ou mieux orthographié qu'un mot rare comme nœud, ou si un mot

(porté) est mieux traité qu'un pseudomot (lorté), peu importe sa régularité entre les

phonèmes et les graphèmes qui le composent, c'est un indice que l'enfant utilise la

procédure lexicale.

L'analyse des performances des élèves montre que la plupart des élèves francophones

utilisent la procédure phonologique après le quatrième mois d'enseignement de la lecture

et de l'écriture, car les mots réguliers ont été mieux lus et écrits que les mots irréguliers

dans l'étude. On a relevé des erreurs de régularisation (album a été lu [albym] ou écrit

*albomé). Les mots fréquents et les pseudomots n'ont pas été mieux traités que les mots

rares ou l'ensemble des vrais mots. Ces résultats montrent que les enfants francophones

ne transitent pas par la phase logographique comme le suggère le modèle de Frith (1985)

avec les anglophones, mais entrent immédiatement dans la phase alphabétique. Selon les

résultats obtenus lors de la deuxième prise de mesure à la fin de lre année scolaire, il

apparaît qu'un lexique orthographique se met en place progressivement, notamment pour

ce qui concerne la lecture. Mais, cette procédure ne peut remplacer totalement la

procédure phonologique puisque la tendance à mieux lire les mots réguliers et à faire des

erreurs de régularisation sur les mots irréguliers s'est avérée plus forte à la fin de la lre

année.

41

Page 57: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

D'autres chercheurs ont voulu identifier l'utilisation par les enfants des informations

phonologiques, orthographiques, morphologiques ou visuelles contenues dans les mots

pour les orthographier correctement (Waters, Bruck et Malus-Abramovitz, 1988). Ils ont

administré une dictée, dans laquelle les mots avaient été choisis, à plus d'une centaine

d'élèves anglophones de la 3e à la 6e année du primaire. Cinq classes de mots ont été ainsi

dictées aux élèves, à savoir : les mots réguliers (must), les mots réguliers dont certains

phonèmes peuvent être écrits de différentes façons (street ou streat), les mots

orthographiques pouvant s'écrire selon les règles orthographiques (patch), les mots

morphologiques (grammar) et les mots étranges (ocean). Les résultats indiquent que tous

les élèves, quel que soit le niveau scolaire, ont un meilleur rendement dans l'écriture des

mots réguliers, suivis respectivement des mots réguliers avec différentes graphies

possibles, des mots orthographiques, des mots morphologiques et des mots étranges. On

peut donc dire qu'en orthographe les élèves utilisent plus efficacement la procédure

phonologique.

Toutefois, l'effet de régularité n'est pas le seul aspect dégagé par l'analyse des erreurs

produites par les élèves. Certains chercheurs ont aussi observé l'effet de fréquence.

2.7.2. L'effet de fréquence

La fréquence est considérée comme une variable importante dans le cadre des études sur

les connaissances orthographiques tant chez les scripteurs adultes que chez les apprentis

scripteurs. Selon les modèles à double voie (Barry, 1994; Coltheart, 1978), un mot

fréquent, connu du scripteur, est souvent mieux orthographié qu'un mot rare grâce à

l'utilisation de la procédure lexicale pouvant lui permettre de retrouver sa représentation

orthographique stockée en mémoire.

Share (1999) a suggéré que le processus par décodage en lecture fonctionne comme un

mécanisme d'auto-apprentissage qui permet à l'enfant d'acquérir des connaissances

42

Page 58: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

orthographiques spécifiques nécessaires pour être habile en lecture et en orthographe.

Ainsi, même un jeune scripteur peut avoir des connaissances orthographiques bien

précises (spécifiques) pour des mots auxquels il a été fréquemment exposé. Share (1999)

a montré que des élèves hébreux de 2e année du primaire étaient capables de reconnaître

plus rapidement et d'orthographier aisément des pseudomots qu'ils avaient lus six ou huit

fois dans un texte trois jours auparavant. Ce résultat a également été observé en anglais

par Cunningham, Pery, Stanivitch et Share (2002). Ainsi, la fréquence d'exposition d'un

mot se révèle comme un facteur important dans le développement des compétences

orthographiques.

De même, Sprengher-Charolles, Siegel, Bechennec et Serniclass (2003) ont mené une

étude longitudinale auprès d'élèves francophones de la lre année. Ils n'ont pas obtenu

l'effet de fréquence au milieu de la lre année, suggérant que les élèves n'utilisent que la

procédure phonologique pour écrire les mots, qu'ils soient fréquents ou rares. Ce n'est

que lors de la deuxième prise de mesure à la fin de la première année scolaire que l'effet

de fréquence des mots est devenu significatif. Cet effet était plus grand pour les mots

irréguliers que réguliers. On a constaté que les élèves étaient sensibles à la fréquence des

mots après dix mois d'apprentissage de l'écrit.

Martinet, Valdois et Fayol (2004) ne retrouvent pas ce résultat pour les élèves de la lre

année. Les chercheurs reprochaient à l'étude de Sprenger-Charolles et al,. (2003) d'avoir

classé les mots avec des échelles de fréquence utilisées pour les scripteurs adultes (Trésor

de la langue française, 1971). Dans leur étude, la fréquence relative des mots choisis

pour la dictée a été cette fois-ci rigoureusement contrôlée par l'analyse des livres de

lecture des élèves. Une bonne moitié des mots était considérée comme étant de haute

fréquence (maison, trois, vert) et l'autre moitié, de basse fréquence (sortie, épée, loup).

Les résultats de cette étude indiquent que les mots irréguliers fréquents ont été mieux

orthographiés que les mots irréguliers de plus basse fréquence après trois mois et neuf

mois d'apprentissage.

43

Page 59: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

On constate que si les mots sont véritablement connus par l'apprenti scripteur, il est

capable de mobiliser des connaissances orthographiques pour les orthographier

correctement.

Conclusion sur les compétences orthographiques chez les élèves

Les différents modèles de développement de compétences orthographiques chez les

apprenants que nous avons parcourus montrent une opposition évidente entre les

partisans des modèles classiques d'acquisition de l'orthographe (Frith, 1985, et al.), qui

postulent que l'utilisation de la procédure lexicale (stade orthographique) ne surviendrait

qu'une fois la procédure phonologique maîtrisée, et les autres chercheurs, qui suggèrent

qu'un scripteur peut bien passer à l'étape orthographique avant d'avoir maîtrisé la

stratégie alphabétique (Snowling, 1994, Alegria «fe Mousty, 1997, Cassar & Treiman,

2004).

Les travaux sur l'analyse des erreurs ont eu recours à différents instruments de

classification des erreurs. Nous examinerons quelques typologies en nous concentrant sur

celle de Catach, qui nous servira pour notre recherche.

2.8. Bref examen de quelques typologies existantes en langue française

Comme nous l'avons déjà indiqué, le problème des erreurs d'orthographe est un

problème récurrent. Il se pose à tous les niveaux (maternel, primaire, secondaire et

universitaire), à tous les cycles et à tous les secteurs de l'enseignement (privé et public).

Son impact est tellement important qu'il ne laisse aucun membre du système éducatif

indifférent.

44

Page 60: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Par ailleurs, beaucoup de chercheurs se sont penchés sur ce phénomène et ont proposé

des outils pour recenser et analyser les erreurs d'orthographe. Parmi ces chercheurs se

trouvent, par ordre chronologique des travaux, Debyser, Houis et Rojas (1967), Guion

(1973 et 1979), Bartout, Brunelle, Piacere (1977, Farid (1983), et Catach (1985).

Dans le but d'analyser les erreurs d'orthographe commises par les élèves du secondaire

des lycées et collèges du Gabon, nous procédons, dans cette partie, à une présentation

globale des différentes grilles d'analyse, avant de cerner celle que nous retiendrons pour

les fins de notre étude.

Nous avons d'abord analysé la typologie de Debyser et al. (1967), axée sur la langue

seconde que nous aurions bien voulu exploiter. Mais celle-ci présente des aspects qui

dépassent largement notre objet d'étude, par exemple des erreurs de construction

syntaxique ou d'impropriétés lexicales. Nous remarquons, en outre, que le classement

proposé n'est pas toujours juste. Prenons par exemple les phrases suivantes : le carreau e±

cassé; je suis voyagé; s'était beau; le jour ou je viens, etc. Ces phrases sont classées par

les auteurs comme faisant partie des erreurs de structure. Pour notre part, nous pensons

que ce sont des erreurs phonologiques, car « et » est simplement confondu à « est » dans

la première phrase. De même, la phrase s'était beau n'a rien à voir avec la structure à

partir du moment où l'ordre syntaxique est bien respecté. C'est encore une confusion

homophonique. Par contre, je suis voyagé pose moins un problème de structure que celui

de la non maîtrise des auxiliaires. C'est donc un classement somme toute hétérogène.

Nous avons ensuite examiné la grille d'erreurs proposée par Guion (1973 et 1979). Cette

typologie recense principalement cinq catégories d'erreurs à partir de codes permettant

une identification rapide, à savoir : les erreurs d'oreille (O), les erreurs d'accents et de

signes (A/S), les erreurs d'usage (U), les erreurs d'accord (Acc) et les erreurs de sens

(Sens), pour ce qui est de la grille élaborée en 1973 et destinée essentiellement au cycle

45

Page 61: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

primaire. Quant à la typologie élaborée par le chercheur en 1979 et adressée au cycle

secondaire, les catégories sont ramenées à quatre : Usage (U), Homophones

grammaticaux (H/G), Marques du genre et de nombre (GN) et enfin Formes verbales

(FV). On relève encore dans cette grille une certaine imprécision, comme on le verra un

peu plus loin.

Nous avons aussi examiné la typologie de Farid (1983). En dépit de ses nombreuses

classes (9 au total), elle ne se démarque pas considérablement de celles de Guion. Il

ressort de ces deux typologies que le classement adopté par les chercheurs est un

classement traditionnel. Elles présentent aussi un certain nombre de confusions.

Chez Guion par exemple, les erreurs dues à une mauvaise prononciation (journal//'ow«a/,

proprdprope), les erreurs dues à des règles de lecture mal maîtrisées (vaisselle/vawe/Ze)

et les erreurs d'individualisation des mots (Yarmo'xrellarmoire, l'écrevisse//es crévisses )

sont rangées dans la catégorie des erreurs d'usage. Pour notre part, nous pensons que les

deux premières catégories devraient être classées comme erreurs d'ordre phonologique;

alors que les erreurs d'individualisation des mots ne sont rien d'autres que des erreurs

d'ordre idéographique.

Chez Farid, les erreurs de signes auxiliaires sont toutes des erreurs qui signalent un cas de

confusion (père/pére), d'omission (mere/mère), ou d'ajout (achat/achat) des signes

d'orthographe (accent aigu, accent grave, accent circonflexe; la cédille; l'apostrophe; le

tréma; le trait d'union). Cet ensemble est quasiment identique à celui proposé par Guion

(1973 et 1979) et il recouvre exactement les mêmes réalités. Nous reviendrons plus tard

sur toutes les critiques formulées à ce sujet. Rappelons simplement que la dite catégorie

serait plus explicite si les erreurs étaient réparties en fonction des diverses composantes

orthographiques dont elles dépendent précisément : composantes phonologique,

morphologique, idéographique.

46

Page 62: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Nous avons aussi examiné la typologie de Barthout et al. (1977), qui est surtout

linguistique, mais qui comporte elle aussi quelques confusions. Par exemple, j ' a i écrit à

ma tente/tante; l'élève répond à son mètre/maître; il fallait nous mètre en position/mettre,

etc. Ces erreurs sont rangées dans la catégorie des erreurs au plan syntaxique ou

relationnel (p. 63). À notre avis, ces erreurs pourraient, bien sûr, entraîner des

modifications de sens si on ne s'arrête qu'à l'orthographe du mot homophone.

Cependant, nous pensons que l'enfant ne confond pas en réalité la signification des mots

homophones s'il les connaît déjà, il y a confusion de graphies mais non de sens. On

devrait donc ranger ces erreurs dans la catégorie des erreurs lexicales et non au plan

syntaxique ou relationnel. Pour plus de détails sur ces différentes typologies, nous vous

renvoyons au mémoire de Sabine Brunet (1987).

Tous ces auteurs emploient le terme « faute » dans leurs typologies. Pour ce qui nous

concerne, nous retenons, dans notre recherche, le vocable d' « erreur », car la faute

comporte une connotation morale; alors que l'erreur orthographique, terme plus neutre,

n'a rien à voir avec la morale, c'est tout simplement un écart par rapport à une

convention graphique.

Enfin, nous avons examiné la typologie de Catach (1980). C'est une typologie fortement

linguistique qui nous a servi de guide. Les critères d'analyse de cette typologie reposent

principalement sur deux aspects essentiels : la nature des erreurs et les causes de ces

dernières. L'intérêt que présente cette typologie tient en plus à ce qu'elle suggère des

mesures correctives. Ainsi, les erreurs à dominante phonétique peuvent indiquer les

lacunes relatives à la discrimination auditive chez les élèves; les erreurs à dominante

phonogrammique montrent l'ignorance de la transcription des sons; les erreurs à

dominante morphogrammique sont susceptibles de signaler les difficultés d'accord

47

Page 63: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

grammatical ; enfin, les erreurs sur les homophones, sur les idéogrammes et sur les lettres

non fonctionnelles sont des indices de confusion ou d'oubli.

Cette grille théorique peut être appliquée à tous les ordres d'enseignement et à plusieurs

formes d'activités d'écriture telles que la dictée ou/et la production libre. Cette souplesse

d'adaptation fait de cette typologie un outil que nous avons retenu pour le classement des

erreurs d'élèves gabonais du premier cycle du secondaire.

Toutefois, dans la typologie proposée par Catach, nous ne nous sommes pas intéressé à

tous les idéogrammes. Nous n'avons retenu que la majuscule, l'apostrophe et le trait

d'union qui ont une incidence certaine sur les erreurs d'orthographe liées à notre

recherche. Nous présentons ainsi la typologie proposée par Catach (1980).

2.9. Typologie des erreurs proposée par Nina Catach

La typologie des erreurs proposée par Nina Catach s'appuie essentiellement sur la

description élaborée par l'auteure du système orthographique de la langue française, que

nous avons résumée plus haut.

Deux typologies des erreurs d'orthographe ont été élaborées par Catach. La première,

(Catach, 1980 a) regroupe les différentes erreurs d'orthographe en deux grandes parties.

1. les erreurs extragraphiques traitant des problèmes d'ordre phonique ou phonétique

(oral), d'ordre calligraphique (absence ou adjonction de jambage, inversion de lettres,

etc) et des problèmes concernant la discrimination et le découpage de mots. 2. les erreurs

graphiques proprement dites relevant des autres niveaux du système graphique,

48

Page 64: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

notamment les erreurs d'ordre phonogrammique, morphogrammique, logogrammique,

idéogrammique et non fonctionnel.

Sans revenir sur la distinction bipartite des erreurs, la deuxième typologie de Catach

(1980 b), celle que nous avons retenue pour les fins de notre recherche, présente les

différents types d'erreurs en six catégories, à savoir: 1. les erreurs à dominante

phonétique, 2. les erreurs à dominante phonogrammique, 3. les erreurs à dominante

morphogrammique, 4. les erreurs concernant les homophones, 5. Les erreurs concernant

les idéogrammes et 6. les erreurs concernant les lettres non fonctionnelles. Cette

typologie et assigne à chaque catégorie ou sous-catégorie un code d'identification

facilitant grandement l'identification des erreurs. Sans entrer dans les détails illustrés

dans chaque catégorie d'erreurs, nous nous limitons dans notre présentation succincte aux

aspects globalisants.

Les erreurs à dominante phonétique

Ce sont des erreurs qui relèvent de la reconnaissance ou de la mauvaise prononciation des

sons. Plusieurs causes peuvent expliquer ces erreurs. Il peut arriver que l'élève ne

perçoive pas la différence phonique entre sa prononciation et la prononciation normale du

mot (*tortoir/dortoir; *pormenade/promenade). Tout comme il pourrait s'agir d'une

mauvaise articulation du mot par l'enseignant. Dans cette catégorie, on trouve des erreurs

d'omission ou d'adjonction de lettre (*maitenantl*arbruste pour maintenant/'arbuste), de

syllabes (*bienteur pour bienfaiteur); des erreurs de confusion (s*puplierlpublier;

*carlcal; *quillerlcuiller, etc.). Si l'élève appréhende bien les sons des mots, les

reconnaît et les discrimine, il pourra assurément les orthographier avec plus de facilité.

La lecture peut aider à résoudre ce genre de problèmes puisqu'elle permet à l'élève de

visualiser les sons afin de pouvoir établir leurs rapports avec les graphies

correspondantes.

49

Page 65: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Les erreurs à dominante phonogrammique

On appelle erreurs phonogrammiques, les erreurs phoniques dues à une mauvaise

transcription des sons. L'élève qui commet ce type d'erreurs connait généralement les

sons, les discrimine parfaitement, mais n'arrive pas à les transcrire correctement. Il existe

deux types d'erreurs phonogrammiques : les erreurs qui altèrent la valeur phonique des

mots et celles qui ne l'altèrent pas. Parmi les erreurs qui altèrent la valeur phonique, nous

avons les cas d'omission (* mer itel mérite; *brilerl briller; *gér iri guérir; *asislassis) ou

d'adjonction (s*cheuveulcheveu; *exciste/existe; *sçorelscore, etc.). Nous avons ensuite

les cas de confusion (*oisisl oasis; *paillelpaye; * serai/serrai), etc. Nous avons enfin les

cas d'inversion (idoitlidiot; èlévelélève; vielle/veille), etc.

Les erreurs phonogrammiques n'altérant pas la phonie regorgent également de cas

d'omission ou d'adjonction (*sin/sein; *crillerlcrier; *guorillelgorille; *pensser/penser),

et de confusion (*invantairelinventaire; *noillerlnoyer; *pharmatie/phamacié), etc.

Il s'agit dans cette catégorie, comme dans la précédente, de problèmes de reconnaissance

des sons (cheuveu pour cheveu) et d'ignorance des règles qui régissent les rapports entre

les sons et les graphies correspondant à ces sons. Si l'élève ne sait pas que le yod se note

ill; que devant e, i Igl se note gu et qu'entre voyelles Isl se note ss, il aura du mal à venir à

bout de ces erreurs phonogrammiques.

Les erreurs à dominante morphogrammique

Cette catégorie d'erreurs rassemble à la fois des erreurs grammaticales et lexicales. Sur le

plan grammatical ou encore des morphèmes grammaticaux, l'auteure évoque des

50

Page 66: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

problèmes portant sur les marques du genre, du nombre et des flexions verbales.

Précisément, elle aborde la relation mal établie entre les éléments d'une même phrase (les

maison *incendiés), les confusions dans les formes du pluriel (*caillous, *bijous), entre

le nom et le déterminant (la routes, les passager), etc.

Notons que cette catégorie présente une variété de cas d'accord grammatical (adjectifs,

noms, sujets, verbes). Elle intègre également les problèmes de conjugaison et d'accord

des participes passés, etc. Compte tenu de la densité de cette catégorie, nous ne pourrons

pas présenter tous les cas qui l'illustrent dans le tableau synthèse présenté plus loin.

Toutefois, nous avons ajouté un cas d'accord dont le numéro est 30111 concernant

l'accord des mots invariables (*nerveusements, *brutalements). Ce cas d'accord,

apparaissant dans notre dictée, ne figure pas clairement dans la typologie de Catach (1980

b), à moins de l'insérer dans la rubrique autres (30123).

En parlant de morphèmes lexicaux, l'auteure insiste sur cinq cas susceptibles de causer

des problèmes d'orthographe aux élèves : la non-reconnaissance des mots (un *névier/un

évier); l'ignorance de la famille lexicale (*inabituellinhabituel), l'ignorance des préfixes

et des suffixes (*anterremantlenterrement), l'ignorance du maintien ou non du radical

(*insupor table/insupportable) et l'ignorance des lettres finales justifiables

(*instinl instinct).

Nous pouvons dire de manière générale que les erreurs de cet ensemble qui concernent

les morphogrammes grammaticaux sont principalement dues à la non-maitrise et à la

non-application des règles d'accord. Les erreurs concernant les morphogrammes lexicaux

résultent, quant à elles, des confusions dues aux difficultés de pouvoir discriminer

51

Page 67: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

distinctement des mots, et à la non-reconnaissance des signes dérivatifs, des graphies

figées de préfixes et de suffixes, etc.

Les erreurs concernant les homophones

Encore appelées erreurs logogrammiques, les erreurs concernant les homophones sont les

erreurs de confusion graphique. Autrement dit, ce sont les erreurs portant sur les mots qui

se prononcent de la même façon mais qui s'écrivent de manière différente. On en

distingue trois types principalement : les homophones de discours (/ 'arme/larme, encore

sage/en corsage), les homophone lexicaux (voie/voix, chant/champ, bout/boue, fond/font,

maitre/mètre, etc.) et les homophones grammaticaux (a/à, et/est, ce/se, ces/ses, s'est/ces,

son/sont, on/ont, leurs/leur, etc.). Les erreurs de cette catégorie sont dues à

l'incompréhension du texte, à l'ignorance du mot et de la graphie dénotant son sens, et à

la non-prise en compte du contexte dans lequel ce mot est employé.

Les erreurs concernant les idéogrammes

Sont appelées erreurs idéogrammiques, toutes les erreurs concernant les signes

diacritiques, à savoir : les accents, l'apostrophe, le trait d'union, tous les signes de

ponctuation (le point, la virgule, le point-virgule, etc.), la majuscule en tête de paragraphe

ou après un point ou au début d'un nom propre. Ce sont des signes qui ne sont pas en fait

orthographiques en tant que tels puisqu'ils n'appartiennent pas à l'alphabet. Les

idéogrammes relèvent d'un aspect beaucoup plus stylistique, typographique ou

syntaxique.

52

Page 68: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Dans notre étude, nous ne nous sommes pas intéressé à tous ces signes diacritiques, nous

nous sommes limité à ceux qui ont une incidence sur les erreurs d'orthographe, tels que

le nom propre (Toyota et Libreville), la majuscule en tête de phrase ou après un point (Le

chemin formait un passage...) et l'apostrophe (l'épaisse/*lépaisse). Le choix des ces

signes dans notre étude tient à leur rôle éminemment informatif dans un texte. La

majuscule permet de pouvoir distinguer des sens dans une phrase (l'État/l'état).

L'apostrophe éclaire sur la délimitation des syntagmes ou sur le sens des mots

(d'instinct/*dinstinct, l'arme/larme), etc.

Les erreurs concernant les lettres non fonctionnelles

Dans cette catégorie, nous trouvons les consonnes grecques (*téâtrel théâtre), les

consonnes latines (*sculterlsculpter), les consonnes simples ou doubles difficilement ou

non justifiables (combatif 'avec un t mais combattre avec deux t), les fausses etymologies

(s*domterldompter), les finales particulières (*abrit/abri, *peure/peur) et quelques

voyelles (douçâtre/*douceâtre). Beaucoup de lettres de cette catégorie sont jugées

farfelues et compliquent inutilement les graphies de certains mots. Nous pensons que

cette dernière catégorie mérite d'être restructurée car certaines situations ou certains cas

signalés devraient se retrouver ailleurs. C'est le cas de la voyelle numéro 60 (douceâtre)

qui illustre bien ce qu'on peut appeler la surcharge visuelle, et qui serait mieux dans la

catégorie des erreurs phonogrammiques, puisque nous avons un cas d'adjonction de la

cédille et d'omission de la lettre e. Nous comprenons que l'attention de l'auteure s'est

plus focalisée sur la surcharge graphique notée par l'adjonction e, a et l'accent

circonflexe sur â. Selon Catach, ces lettres ne servent strictement à rien sur le plan du

système, et ne constituent qu'une inutile surinformation optique.

Pour conclure, nous pouvons dire que cette typologie des erreurs orthographiques

élaborée par Catach touche l'ensemble de structures linguistiques et constitue un outil

53

Page 69: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

pertinent pour le classement des erreurs d'orthographe. La quasi-totalité des erreurs

répertoriées dans notre étude y sont illustrées. Pour cela, comme nous l'avons déjà

signalé, nous faisons de cette typologie (voir tableau ci-dessous) la base référentielle de

notre étude. Pour notre recherche, nous avons utilisé la grille de Catach (1985 b)

intégralement, sauf pour la catégorie des mots invariables, que nous avons ajoutée.

54

Page 70: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau.2

TYPOLOGIE DE CATACH (1980 b)

I. E R R E U R S À D O M I N A N T E P H O N É T I Q U E ... (L'élève peut entendre mal ou mal prononcer les sons.)

10 . Omission ou adjonction

100 lettre maitenanl ; arbrusle

101 syllabe bienteur fi bienfaiteur

M Confusion 110 soûrde-sonore 1100 p b p u p l i e r

. 1101 t-d tortoir 1102 f-v valfe 1103 autres

111 liquides 1-r car f= cal

112 nasales m-n nimer

113 semi-voyelles quiller fi cuiller

114 voyelles défini fi défunt

I L . E R R E U R S À D O M I N A N T E P H O N O G R A M M I Q U E (L'élève connaît les sons sans connaître leur transcription) '

■ • . »

20 Altérant la valeur phonique

voyelle digr.vocal.(l) accent

semi- . voyelle

consonne -igr.conson.(2) cédille

consonne •'•• simple ou- •

'double

2 0 0 . Omission ou adjonction .. .'■'

2000 bœf mérite cheuveu suite

2001 briter piaille fi paille

2002 exès gérir reçu

,exciste score

2003 énui fi ennui asis f assis sossie fi sosie

201 . Confusion

2010 " oisis y oasis . n i j£ né

2011 paille jt paye

2012 (Cf. 11}

2013 serai fi serrai

Z0? Inversion

2020 tdo'tt ?f idiot élève

2021 vielle , fi veille

2022 dantné ceuillir

(1) Digramme vocalique : couple de lettres-voyelles correspondant a un seul son. (2) Digramme cohsonantique : couple de lettres-consonnes correspondant a un seul son

55

Page 71: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

j

IL ERREURS À DOMINANTE PHONOGRAMMIQUE (L'élève connaît les sons sans connaître leur transcription

21 voyelle semi- consonne consonne simple N'altérant pas la digr. vocal. voyelle digr.conson. ou double, phonique accent cédille justifiable

210 2100 2101 2102 2 1 0 3 ^ Omission ou sin fi sein joailler fiket pensser adjonction il ut ; ab'tme criller guorille enffermer

' ■ < œuil ; éteau fumer 21000 binette

pingoin récit 21030 aléger allourdir

211 2110 2111 2112 Confusion blême noiller pbarmatie

. invantère ■ L ' v

III. ERREURS À DOMINANTE MORPHOGRAMMIQUE (L'élève ne respecte pas l'orthographe des éléments non phonétiques)

30 Les morphèmes grammaticaux " . . •

300 Relation mal établie entre : ■ ' ■ • ■ • .

3000 Les catégories gram. 3002 adj. et nom 3004 P.P. et nom Des ombres passes. . 30020 juxtaposés " sans auxil.(3002)

3001 Confusion dans lès 30021 non juxtaposés 30040 avec être formes du pluriel 3003 sujet-verbe 30041 avec avoir

- chevaus, v.erroux 30030 juxtaposés ; '- . , sans C.O.D 3010 Nom et déterminant 30031 inversés 30042 OO.D: après

Nom 30032 non juxtaposés 30043 C.O.D. avant la routes, lés rue 30044 verbe pronominal les gens....il... "* : « , . ■ •

3011 Nom, ad}. 3012 Mode 3013 Groupe-désinence + complém. . 30120 inf.-part. Il crit, geind -•-'""'

Soin f^^Ct, .«.vrtr.«b\cj 30121 inf.-ind: sac de bille 30122 ind.-cond. 3014 Temps .. .pleine de truite 30123 autres criai.fi criais

31. Les morphèmes lexicaux

310 Non-reconnaissance 312 Ignorance 314 Ignorance des des mots des pré/suffixes lettres finales un névier anlerremant justifiables

un marchant couvefs, blan

3 1 1 . Ignorance de la 313 Ignorance du famille lexicale maintien ou

. ïnabité non du radical -. : ■ nous vogons 1

56

Page 72: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

IV. ERREURS CONCERNANT LES HOMOPHONES

40 Homophones de discours

41 Homophones lexicaux

42 Homophones grammat

* l'arme fi larme chant-champ 420 a/à encore sage fi ■ • vote-voix 421 et/est en corsage vain-vin 422

423 424 425 426

ce/se ces/ses ou/où on/ont son/sont

• *. " V 427

428 ni/n'y

. autres

V. ERREURS CONCERNANT LES IDÉOGRAMMES

50 Omission ou adjonction 500 Majuscule 501 Apostrophe 503 Ponctuation 5000 M' propre/commun 502 Trait d'union 5030 Le point 5001 En tête de § ou 5031 La virgule

après/un point - '•• ■. - 5032 Autres signes 51 Confusion 510, Erreurs de signes

VI. El ÎIREURS CONCERNANT DES LETTRES NON FONCTIONNELLES

: r 612 Fausse étymologie

4>0 Voyelle 61 Consonne domtef (domitare). douçâtre 610 Çons. grecque 613 Cons, simple ou

'*?'■■■ ' .-•■; (douceâtre) téâtre double difficilement * # •611 Cons. Latine justifiable

combatif, imbécilité, :fJ*À | '*' . . ' . sculter justifiable combatif, imbécilité,

s * .- boursouffler i 614 . Finales particulières

abriti frai, petere

57

Page 73: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

CHAPITRE II

METHODOLOGIE

Nous exposons, dans ce chapitre, la démarche méthodologique sur laquelle repose cette

étude. Nous présentons le type de la recherche que nous avons menée; la population à

l'étude; l'instrumentation et la collecte des données; le traitement, l'analyse et la synthèse

des données; les forces et limites méthodologiques; les considérations éthiques; et, enfin,

le mode de présentation des résultats.

1. Type de recherche

Notre étude consiste en une recherche exploratoire descriptive et mixte. Son caractère

exploratoire tient du fait qu'elle traite d'un sujet encore peu exploré par les chercheurs.

Son aspect descriptif, quant à lui, repose sur le fait que nous avons effectué la recension

d'erreurs d'orthographe commises par des élèves gabonais, ainsi que le relevé des

perceptions, opinions et stratégies dont ils nous ont fait part à l'égard de l'orthographe.

Par approche mixte, nous entendons une approche où des données qualitatives sont

jumelées à des données quantitatives afin d'enrichir les perspectives (Tashakkori et

Teddie, 1998) et les résultats de la recherche. Moss (1996) souligne d'ailleurs que ces

deux approches, lorsqu'elles sont jumelées, permettent effectivement « d'avoir une vision

plus complète et plus nuancée d'un phénomène qu'on cherche à comprendre » (p. 22).

Comme le signale Van der Maren (1997), nous souhaitons privilégier le croisement

d'instruments de collecte des données, afin de tirer profit de leur avantageuse

complémentarité. Ainsi, notre étude s'appuie d'abord sur l'approche quantitative, soit

58

Page 74: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

l'analyse statistique des erreurs d'orthographe recueillies à la suite d'une dictée, mais

aussi sur l'approche qualitative, soit l'analyse des transcriptions des entretiens

métagraphiques menés après la dictée.

2. Population à l'étude

Le problème des erreurs d'orthographe concerne, sans nul doute, tous les acteurs du

système éducatif d'un pays, à savoir les élèves, les enseignants, les personnels de

l'administration scolaire (conseillers et inspecteurs pédagogiques), les parents d'élèves et

les politiques. Cependant, pour aborder notre problématique, nous nous intéressons

principalement aux élèves, ainsi que nous allons le voir dans les sections suivantes où

nous présentons la population cible, les échantillons et les méthodes d'échantillonnage

que nous avons adoptés dans cette étude.

2.1. Population cible

Notre étude porte sur les élèves de 6e année (l re année secondaire au Québec) et de 3e

année (4e année secondaire au Québec) d'établissements secondaires de Libreville et des

provinces du Gabon. Le choix de ces classes tient à leur situation particulière dans le

système éducatif gabonais. En effet, la classe de 6e marque la fin du primaire et le début

du secondaire. Nous souhaitons donc vérifier la maitrise d'un certain nombre de

connaissances à cette étape du cheminement scolaire des élèves. La classe de 3e, quant à

elle, constitue la fin du premier cycle du secondaire. C'est aussi la classe où

l'enseignement systématique de la grammaire prend officiellement fin puisqu'on suppose

que les élèves de ce niveau sont suffisamment outillés à cet égard.

59

Page 75: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

2.2. Échantillons et méthodes d'échantillonnage -

Notre recherche comporte deux phases : 1. la dictée à laquelle ont été soumis tous les

sujets de notre étude; 2. l'entretien métagraphique auquel ont participé un sous-groupe

des élèves ayant fait la dictée. Nous présentons dans les pages qui suivent l'échantillon et

la méthode d'échantillonnage pour la dictée, puis nous faisons de même pour l'entretien

métagraphique.

2.2.1. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour la dictée

Nous avons recruté 783 élèves pour la dictée. Ces élèves faisaient partie de classes de 6e

et de 3e dans des établissements situés à Libreville et dans les provinces du Gabon.

Notons que le nombre des participants n'était pas déterminé d'avance. Tous les élèves

volontaires des classes choisies faisaient partie de facto de l'étude.

Notre échantillon est un échantillon de convenance (Patton, 1990). Cela signifie que nous

avons recueilli nos données dans des établissements publics et des classes où nous avons

recruté des sujets sur le seul critère de leur accessibilité, autrement dit, dans des

établissements publics et des classes où on nous a permis de le faire.

Établissements d'enseignement

Nous avons ainsi mené notre étude dans des établissements publics, c'est-à-dire des

établissements qui sont complètement sous la tutelle de l'État. En effet, dans l'univers

scolaire gabonais, il y a une variété d'établissements ayant la tâche de dispenser

l'éducation aux élèves : les établissements totalement privés, les établissements

60

Page 76: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

confessionnels à caractère public, c'est-à-dire les établissements auquel l'État gabonais

fournit uniquement du personnel enseignant, et les établissements publics, entièrement

sous la charge de l'État. Signalons toutefois que l'État a un droit de regard sur ce qui se

passe dans les établissements privés, surtout sur le plan curriculaire.

Nous avons sélectionné des établissements publics, car nous appartenons à cet ordre

d'enseignement et que, pendant les dix années d'enseignement que nous avons passées au

secondaire, nous avons régulièrement observé le problème des erreurs d'orthographe sur

lequel nous réfléchissons dans le cadre de cette étude. Il faut préciser aussi que les

établissements publics sont les plus nombreux.

Nous présentons ci-dessous les huit établissements scolaires qui ont participé à notre

étude, à raison de deux classes par établissement (une classe de 6e et une autre de 3e). Ils

sont situés dans cinq des neuf provinces les plus peuplées du Gabon. Quatre

établissements sont à Libreville (Lycée20 National Léon Mba, Lycée d'Application

Nelson Mandela, le Collège d'enseignement secondaire (CES) d'Agondjé et le CES

Alenakiri). Notons que la ville de Libreville constitue, à elle seule, le bassin éducatif le

plus important du pays. Les quatre autres établissements sont de l'intérieur du pays

(Lycée Bantsatsa de Port-gentil, Lycée Eugène Amogo de Franceville, Lycée Charles

Mefane de Lambaréné et le Lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem).

Comme le montre le tableau ci-dessous, les élèves de notre échantillon sont également

partagés entre des établissements de Libreville et de l'intérieur du pays. Nous avons

procédé ainsi, car nous souhaitions obtenir, malgré le fait que nous avions un échantillon

de convenance, une certaine représentativité des élèves de l'ensemble du Gabon.

20 Au Gabon, certains établissements appelés « lycées » peuvent comprendre des élèves de niveau collège (de la 6e à la 3e secondaire) avec de véritables élèves de lycée (de la seconde à la terminale comme en France).

61

Page 77: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 3

Établissements scolaires de Libreville et des provinces

Nom de l'établissement

Situation géographique

Nombre total d'élèves de

l'établissement

Nombre d'élèves

ayant fait la dictée

Pourcentage des élèves

participant à l'étude

Lycée National Léon Mba (LNLM)

Centre de Libreville

5265 88 11,2%

Lycée Nelson Mandela (L.A. N.M)

Centre de Libreville

1593 80 10,2%

CES Angondjé (CESA)

Au sud de Libreville

1574 101 12,9%

CES Alenakiri (CESAL)

Au Nord de Libreville

1760 124 15,8%

Sous-total 4 10 192 393 50,1 % Lycée Batsantsa de Port-Gentil (L.POG)

Est du Gabon (côte Atlantique) 2426 110 14,0 %

Lycée Eugène Amogo de Franceville (L.E.F)

Sud-Ouest du Gabon 2175 85 10,9%

Lycée Charles Mefane de Lambaréné (L.E.L)

Centre du Gabon 1581 97 12,4 %

Lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem (L.E.O)

Nord du Gabon 1488 98 12,5 %

Sous-total 4 7 670 390 49,8 % Total 8 17 862 783 100 %

Même si tous ces établissements bénéficient du statut d'établissements publics du fait

qu'ils reçoivent des subventions de l'État gabonais, les problèmes de logistique restent

importants : manque de photocopieurs, de bibliothèques dignes de ce nom, de manuels

récents, de connexions Internet, etc.

Soulignons que les établissements de l'intérieur du pays, à quelques variantes près (Lycée

Eugène Amogo de Franceville), ne sont pas dans une situation reluisante. La vie scolaire,

liée généralement à celle des populations, est difficile. Celles-ci vivent de l'agriculture de

62

Page 78: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

subsistance, de la pêche et de petits commerces. Le lycée est fréquenté en majorité par les

élèves des familles modestes et par les enfants des fonctionnaires en service dans la

localité. Les moyens d'accès à un certain nombre d'outils pouvant favoriser

l'apprentissage sont donc limités. Les établissements sont dépourvus de la logistique de

pointe et de matériel didactique adapté. Les quelques manuels scolaires usagés, qui

meublent les rayons de ce qui fait office de bibliothèque, datent du siècle dernier. C'est

dans ces conditions qu'étudie la population cible, à quelques différences près.

Niveau scolaire des sujets

Voyons maintenant comment les élèves de notre échantillon se répartissent par année

d'études. Le tableau ci-dessous montre que les élèves du niveau 6e sont un peu plus

nombreux que ceux du niveau 3 e.

Tableau 4

Niveau scolaire des sujets

Élèves de 6e Élèves de 3 e

Nombre Pourcentage Nombre Pourcentage

432 55,2 % 351 44,8 %

Sexe des sujets

Pour ce qui est du sexe des sujets, le tableau ci-dessous présente la proportion des filles et

des garçons ayant participé à la recherche. On constate que l'échantillon est quasiment

équilibré, les filles étant légèrement plus nombreuses que les garçons (51 % contre 49 %).

63

Page 79: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 5

Répartition des sujets selon le sexe

Sexe Nombre Pourcentage

Garçons 384 49%

Filles 399 5 1 %

Total 783 100 %

Voyons maintenant ce qu'il en est pour l'entretien métagraphique.

2.2.2. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour l'entretien métagraphique

Parmi les 783 élèves ayant fait la dictée, 59 ont aussi participé à un entretien

métagraphique. Nous avions demandé à chacun des 16 enseignants de choisir quatre

élèves dans leur classe; cependant, cinq élèves se sont désistés.

Les quatre élèves que l'enseignant de chaque classe devait choisir se répartissaient de la

manière suivante : deux élèves forts et deux élèves faibles. Selon Patton (1990), il s'agit

là d'un échantillon à cas intenses ou échantillon d'intensité :

Intensity sampling involves the same logic as extreme cases sampling but with less emphasis on the extreme. An intensity sample consists of information-rich cases that manifest the phenomenon of interest intensively (but not extremely). Extreme or deviant cases may be so unusual as to distort the manifestation of the phenomenon of interest. Using the logic of intensity sampling, one seeks excellent or rich examples of the phenomenon of interest, but not unusual, (p. 171)

64

Page 80: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Âge des sujets

L'âge faisant partie de la vie privée, plusieurs élèves risquaient de ne pas se sentir à l'aise

de le révéler, surtout les plus âgés qui ont accusé un retard dans leur scolarité. C'est pour

cela que nous nous sommes abstenu de demander l'âge des élèves sur les copies de

dictée. Par contre, à deux, lors de l'entretien métagraphique, il était plus facile d'aborder

le sujet. Les données sur l'âge concernent seulement les élèves interviewés.

Les tableaux suivants présentent l'âge des sujets par niveau d'études. Les élèves de 6e ont

entre 11 et 15 ans. L'âge normal étant pour ce niveau de 11 ou 12 ans, on peut dire que la

plupart des élèves de 6e de notre échantillon (68,9 %) présentent un retard scolaire de un,

deux, voire trois ans. Les élèves de 3e, eux, ont entre 14 et 18 ans. Comme l'âge normal

pour ce niveau est de 14 ou 15 ans, on constate aussi qu'une bonne proportion de nos

sujets de 3e (43,3 %) accuse un retard scolaire de un à trois ans. Ces retards sont courants

dans le système scolaire gabonais en raison de différents facteurs, comme la

fréquentation irrégulière due notamment à des problèmes de transport, les effectifs

pléthoriques, le manque de matériel pédagogique, etc.

Tableau 6 Age des élèves de 6e

Age Nombre d'élèves Pourcentage 11 5 17,2 12 4 14,0 13 10 34,5 14 7 24,1 15 3 10,3

Total 29 100,0

65

Page 81: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 7 Age des élèves de 3

Age Nombre d'élèves Pourcentage 14 6 20,0 . 15 11 36,7 16 4 13,3 17 7 23,3 18 2 6,7

Total 30 100

Conclusion

Notre étude vise les élèves de 6e et de 3e année secondaire de l'ensemble du Gabon, qu'ils

soient de Libreville ou des provinces. Au total, 783 élèves provenant de huit

établissements différents (quatre à Libreville et quatre en province) ont fait la dictée et 59

d'entre eux, considérés par leurs enseignants comme forts ou faibles, ont participé à

l'entretien métagraphique. Dans le premier cas, nous avons sélectionné un échantillon de

convenance et, dans le deuxième, un échantillon d'intensité.

3. Instrumentation et collecte des données

Pour répondre aux questions de recherche, nous avons eu recours à deux outils de

collecte des données, à savoir une dictée et un entretien métagraphique. Nous décrivons

ces instruments dans les pages qui suivent. Nous précisons aussi les conditions dans

lesquelles se sont déroulées les deux phases de la collecte de données.

66

Page 82: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

3.1. Dictée

Nous présentons le texte de la dictée, puis nous décrivons l'intérêt de la dictée en général

et de ce texte en particulier, en tant qu'instrument de collecte des données sur les erreurs

d'orthographe et, enfin, nous faisons état des conditions et du déroulement de la collecte

des données.

3.1.1. Texte de la dictée : Une route périlleuse

Ce texte de 126 mots est un extrait légèrement adapté de l'œuvre intitulée Le bourbier de

l'écrivain gabonais Armel Nguimbi Bissiélou (1995).

Les roues de la Toyota mordaient nerveusement la route tantôt pierreuse, tantôt nue qui

menait vers la capitale Libreville. Le chemin formait un passage étroit dans l'épaisse

forêt vierge qui couvrait la région. La voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant

les montées abruptes. Mes compagnons et moi étions basculés à gauche, puis à droite,

puis réinstallés brutalement sur nos sièges. Les voyageurs à bout et sans voix portaient

d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri. Le chauffeur ralentissait

devant les trous, freinait et repartait pour stopper à nouveau quelques mètres plus loin.

Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie! Il était

insupportable de plonger son regard dans ces gouffres menaçants!

3.1.2. Présentation de la dictée

Nous rappelons que la dictée est un exercice qui a l'avantage d'être bien connu des

élèves. Ainsi, elle ne nécessite pas d'explications particulières, car ils en font

régulièrement dans les classes gabonaises.

67

Page 83: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Par ailleurs, la dictée est un exercice spécifique de contrôle de l'orthographe pouvant

mettre en lumière la compétence orthographique des apprenants, leurs forces comme

leurs faiblesses. C'est dans cette perspective que nous l'avons retenue dans le cadre de

notre étude. Notre objectif consistait à voir quelles sont les différents types d'erreurs

d'orthographe que les apprenants commettent au cours d'une dictée en vue de les relever

et de les classifier de manière appropriée.

Le texte que nous avons choisi est relativement accessible du point de vue de la

compréhension pour les élèves de 6e et de 3e. Il présente en outre l'avantage de pouvoir

intéresser les élèves en raison de son caractère haletant.

De plus, il illustre un éventail de problèmes liés au lexique et à la grammaire en

adéquation avec les prescriptions curriculaires en vigueur au Gabon. Dans l'élaboration

de l'exercice, qui a servi d'épreuve unique pour les deux niveaux, nous avons pris en

compte les besoins de notre recherche, c'est-à-dire que nous avons légèrement modifié le

texte initial, afin de vérifier certaines difficultés orthographiques auprès des élèves.

Ce texte couvre une grande partie des sous-systèmes orthographiques, à savoir :

Les phonogrammes

• phonème [e]: menait, forêt, vierge, freinait, mètre

• phonème [5]: compagnon

• phonème [a]: nerveusement, tantôt, menaçant

• phonème [e] : chemin, main

68

Page 84: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Le mot compagnon nous donne l'occasion de voir si l'élève sait utiliser la règle de

position pour la transcription des voyelles nasales : m devant p, b ou m et n devant les

autres lettres.

Quant aux mots nerveusement et menaçant, ils nous permettent de vérifier si l'élève

distingue bien le [à] du participe présent (-anf) et le [à] de l'adverbe (-ent).

Les morphogrammes grammaticaux

• relation sujet-verbe

o non juxtaposés avec écran : les roues de la Toyota mordaient

o juxtaposés : le chemin formait

o accord avec le relatif qui : des précipices qui bordaient la route

• adjectif épithète

o séparé du nom : la roue ...tantôt nue

o juxtaposé au nom : les montées abruptes

• participe passé avec être : mes compagnons et moi étions basculés

• distinction infinitif-participe : étions...réinstallés,pour réprimer un cri

• déterminant et nom : la route, des bruits, quelle peur!

• distinction des formes de pluriel : des trous et non des *troux

69

Page 85: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Les morphogrammes lexicaux

• famille lexicale : instinct (instinctif)

• connaissance des préfixes et des suffixes : insupportable

• lettre derivative justifiable : étroit, bruits, regard

Les logogrammes (homophones)

• voix/voie, bout/boue

Les idéogrammes

• majuscule : Libreville, Toyota

• apostrophe : l'épaisse, d'instinct

3.1.3. Déroulement de la dictée

La collecte de données portant sur la dictée s'est déroulée dans les salles de classe des

établissements scolaires, aux heures normales de cours. Après le contrôle des élèves par

l'enseignant, nous avons procédé à la distribution des feuilles doubles et des stylos. Nous

avons rappelé aux élèves de s'identifier clairement sur les feuilles de dictée. Puis, nous

avons commencé la dictée proprement dite en lisant d'abord le texte au complet. Ensuite,

nous l'avons relu, une unité de sens à la fois, en reprenant trois fois la même unité. Enfin,

nous avons relu le texte au complet. Nous avons alors laissé aux élèves quelques minutes

pour se relire, se corriger et compléter les espaces laissés éventuellement en blanc.

70

Page 86: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

3.2. Entretien métagraphique

Outre la dictée, nous avons utilisé, pour notre étude, un deuxième instrument de collecte

de données : l'entretien métagraphique.

Nous présentons donc dans cette partie l'entretien métagraphique comme outil

d'enseignement et de recherche, puis le déroulement des entretiens que nous avons menés

et, enfin, les détails du protocole d'entretien métagraphique que nous avons élaboré.

3.2.1. Entretien métagraphique

L'acquisition d'une langue écrite s'avère un travail long et laborieux pour le jeune

apprenant, surtout quand il s'agit de la langue française dont le système orthographique

est complexe (Catach, 1980). La maîtrise de l'orthographe française est un problème qui

n'est jamais totalement résolu. Du primaire au supérieur, l'on s'accorde à reconnaître son

importance et sa difficulté.

Le constat est régulièrement fait : l'orthographe pose des problèmes aux élèves. Ces

problèmes sont bien identifiés et bien connus. En Suisse, par exemple, Bétrix et al.

(1999) ont montré que les erreurs d'orthographe se concentrent dans la zone des

morphogrammes, ces zones silencieuses à l'oral mais qu'il faut cependant noter à l'écrit :

il n'y a que Topaze21 pour prononcer le « s » final de « moutonsss » révélant, ce faisant,

21 Dans la pièce de Marcel Pagnol, intitulée Topaze (1928), Topaze est l'instituteur. Au cours d'une dictée et alors qu'il circule dans sa classe, il s'aperçoit que les élèves commettent l'erreur de mal accorder le pluriel de « mouton ». Il prononce alors « les moutonSS », puis « les moutonSSS » jusqu'à ce que les élèves réagissent. En référence à l'œuvre de Pagnol, l'effet Topaze est une déviance dans la posture d'accompagnement pédagogique du tuteur qui se caractérise par le fait d'émettre des signes conscients et inconscients afin d'éviter que l'apprenant se trouve en échec.

71

Page 87: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

l'un des nombreux problèmes que l'écriture du français pose aux élèves et, d'une manière

générale, aux scripteurs.

L'une des solutions au problème orthographique a été d'associer l'élève à compréhension

du phénomène, de travailler avec lui pour savoir comment il s'y prend pour écrire des

textes. D'où la mise au point de l'entretien métagraphique élaboré par Jaffré (1999) et

son équipe LÉA (Linguistique de l'Écrit et Application). La démarche associe un double

recueil des données : texte écrit par l'élève dans un cadre d'atelier d'écriture et entretien

mené avec l'élève pendant ou juste après la production graphique.

Jaffré (1999 et 2003) s'inscrit dans la lignée de Karmiloff-Smith (1992), qui considère les

enfants comme des informateurs à part entière. Ces auteurs estiment qu'il y a une

interaction entre expérience et connaissance, et que le sujet joue un rôle essentiel dans la

réorganisation de son expérience. Pour Jaffré (1999) et son équipe, les entretiens

métagraphiques apportent des informations sur la « géographie procédurale » des

compétences dont dispose le sujet en orthographe, et les erreurs assorties des

commentaires des sujets sont l'indice immédiat des problèmes que leur pose tel ou tel

aspect linguistique.

L'entretien métagraphique est donc un outil de clarté cognitive d'un double point de vue :

d'abord, c'est un outil qui permet de mieux connaître les démarches orthographiques des

scripteurs; ensuite, on constate qu'il est un outil important pour l'élève lui-même qui est

amené à expliciter les chemins qu'emprunte sa réflexion, à verbaliser son raisonnement

ou ses représentations.

C'est toute l'importance de l'entretien métagraphique, en ce sens qu'il est le moment où

les élèves clarifient leur procédure de résolution des problèmes orthographiques.

72

Page 88: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

L'entretien permet donc de comprendre les erreurs des élèves. Dans la pratique

d'enseignement, grâce à l'entretien métagraphique, on passe du comptage du nombre

d'erreurs à un classement des erreurs (typologie) et, enfin, à la compréhension de l'erreur

par la recherche de son origine (étiologie).

Par conséquent, on peut dire que l'entretien métagraphique est un instrument précieux qui

permet à l'élève de verbaliser la représentation qui sous-tend son erreur et constitue en

même temps une voie vers la résolution du problème. Tant que l'élève croit savoir, il ne

s'interroge pas. Mais dès lors qu'il explique et que, chemin faisant, il peut constater que

la procédure qu'il utilise n'est pas adaptée au problème à traiter, il peut alors se remettre

en cause et s'interroger sur la langue, condition nécessaire à de nouvelles acquisitions.

L'entretien métagraphique au cours duquel l'élève est amené à justifier délibérément ses

choix graphiques après avoir écrit un texte (Jaffré, 2003; Jaffré et David, 1999) permet à

celui-ci de pouvoir réorganiser ses connaissances.

3.2.2. Déroulement de l'entretien métagraphique

Immédiatement après avoir terminé la dictée avec tous les élèves d'une classe, nous

avons réalisé l'entretien métagraphique avec quatre d'entre eux. Rappelons que ce sont

les enseignants qui avaient identifié ces élèves, les classant comme forts ou faibles.

Comme il a été dit, cet entretien métagraphique auprès des élèves avait pour but de nous

aider à mieux connaître les conceptions et les stratégies de ces derniers face aux

différentes erreurs recensées en orthographe, et ce, afin de nous aider à expliquer

certaines graphies erronées produites par les élèves à l'issue de la dictée.

L'entretien s'est déroulé en deux étapes. Nous avons d'abord posé à l'élève des questions

générales qui nous ont renseigné sur ses perceptions quant à l'orthographe française et

sur ses propres comportements orthographiques. Nous sommes ensuite revenu avec

73

Page 89: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

l'élève sur la dictée qu'il venait de faire et nous lui avons posé, à partir des graphies qu'il

avait produites, des questions qui nous ont permis de savoir comment il avait procédé

pour orthographier le texte dicté.

Les silences et les hésitations des élèves nous ont amené à relancer certaines questions, à

les reformùler, afin de permettre aux élèves de mieux comprendre de quoi il était

question. Pour eux, cela représentait, nous semble-t-il, le temps requis pour réfléchir sur

la question posée avant d'y répondre.

3.2.3. Protocole de l'entretien métagraphique

Le protocole comporte deux parties. Dans le tableau ci-dessous figure la liste des

questions que nous avons posées, au cours du premier volet de l'entretien, afin de saisir la

relation des élèves avec l'orthographe, notamment leur perception de leur rendement en

orthographe, leur opinion quant au degré de difficulté de l'orthographe et leurs stratégies

générales dans différentes situations d'écriture.

74

Page 90: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 8

Questions posées au cours du premier volet de l'entretien métagraphique

1. Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe? Pourquoi?

2. Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? Pourquoi?

3. Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?

4. Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?

- pendant que tu écris?

- après avoir fini d'écrire?

5. Que trouves-tu facile en orthographe?

6. Que trouves-tu difficile en orthographe? Note. Si l'élève a de la peine à nommer les différentes zones de l'orthographe, le chercheur pourra lui

fournir des précisions :

- la conjugaison;

- l'accord de l'adjectif;

- l'accord du verbe;

- l'accord du participe passé;

- les lettres que l'on n'entend pas à là fin des mots.

Ces questions sont inspirées de Bétrix-Koehler (1991)

Le deuxième volet du protocole d'entretien a consisté à amener les élèves à justifier leurs

graphies et leurs stratégies spécifiques liées aux sous-systèmes de l'orthographe

française, à savoir : les phonogrammes, les morphogrammes grammaticaux et lexicaux,

les idéogrammes et les logogrammes, à partir des cas qui sont présentés aux pages 67 à

69. Nous avons donc pu recueillir, à chaud, les justifications de certaines graphies -

justes et erronées - produites par les élèves pendant la dictée. Nous donnons en annexe

deux exemples de verbatims.

75

Page 91: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Conclusion

Deux instruments de collecte de données ont été retenus pour cette étude : la dictée et

l'entretien métagraphique. La dictée nous a permis de recueillir les données sur les

capacités orthographiques de l'ensemble des participants. De plus, grâce à l'entretien

métagraphique, nous avons recueilli les déclarations d'une partie d'entre eux sur leur

rapport à l'orthographe et sur leurs conceptions et stratégies face à certaines graphies

illustrant les diverses zones du système orthographique.

Nous allons maintenant voir comment nous avons procédé pour le traitement, l'analyse et

la synthèse des données.

4. Traitement, analyse et synthèse des données

Nous abordons dans cette section les aspects liés au traitement des données recueillies.

Nous décrivons d'abord les mesures prises pour assurer l'anonymat des participants, puis

le traitement des données issues de la dictée et de l'entretien métagraphique.

4.1. Anonymat des participants

Pour garder l'anonymat chez les participants comme ' l'exigent les services de

réglementation des questions éthiques, il a fallu attribuer un code à chaque sujet.

76

Page 92: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Pour les élèves n'ayant fait que la dictée, ce code est composé de ce qui suit : le numéro

du sujet, son sexe, sa classe et son établissement. En voici un exemple : 2. F. 6. L.EO (2e

élève, fille, de la classe de 6e du lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem).

Pour les élèves ayant aussi participé à l'entretien métagraphique, ce code est composé de

ce qui suit : le numéro du sujet, son sexe, sa classe, son statut ou degré de compétence

estimé par l'enseignant (F majuscule pour fort ou f minuscule pour faible), son

établissement et son âge. En voici un exemple : 21. G. 3. F. L.POG - 18 ans (21e élève,

garçon, de la classe de 3e, fort en orthographe, du lycée Batantsa de Port-Gentil).

4.2. Traitement des données de la dictée

Nous présentons dans cette section, la manière dont les copies de dictée ont été corrigées,

d'une part, et les différents éléments qui ont prévalu dans le processus d'élaboration de la

base des données, d'autre part.

4.2.1. Correction des copies

Guion (1973) considère qu '« un mot est juste ou faux; dès qu'il n'est plus

rigoureusement juste, il est faux ». C'est dire que tout mot analysé du point de vue

orthographique est juste ou faux, il ne peut être à moitié juste ou à moitié faux. Ce

principe ne veut pas dire pour autant qu'on doit compter seulement une erreur par mot. Il

importe de relever toutes les erreurs contenues dans un mot erroné afin de les répartir

dans les catégories auxquelles elles correspondent. C'est ce principe qui nous a guidé tout

au long de cette étape réservée à la correction des copies.

77

Page 93: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Comme nous l'avons signalé plus haut, la grille utilisée pour le classement et la

codification des erreurs lors de la correction des copies est celle de Catach (1980 b), qui

reconnaît divers types d'erreurs dont les principales sont en lien avec les phonogrammes,

les morphogrammes grammaticaux ou lexicaux, les logogrammes et les idéogrammes.

Nous donnons en annexe deux exemples de copies corrigées et codifiées.

La correction des copies s'est déroulée en deux temps. Les copies des élèves retenus pour

passer l'entretien métagraphique ont été corrigées séance tenante, c'est-à-dire

immédiatement après la dictée. Puisqu'il s'agissait de corriger quatre copies par classe

(deux copies d'élèves forts et deux copies d'élèves faibles), la tâche prenait peu de temps.

Les autres copies ont été corrigées plus tard, une fois toutes les données collectées.

Une deuxième correction, considérée comme une validation interjuge, a été réalisée par

deux doctorants de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université Laval pour

assurer la validité de la correction. Chacun d'eux a corrigé une dizaine de copies. Le

degré de validité a tourné autour de 95 %.

4.2.2. Élaboration de la base des données

Grâce au logiciel SPSS, nous avons ensuite élaboré une base des données des 783

participants. Nous tenons ici à remercier chaleureusement M. Simon Larose, professeur à

la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université Laval, pour sa précieuse

collaboration.

Toutes les données ont été codifiées à l'aide des variables suivantes : le sujet, le sexe,

l'habileté en orthographe, la classe, le nom de l'établissement d'attache et la ville de

78

Page 94: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

l'établissement, de même que les différents types d'erreurs. La variable âge n'y figure

pas parce qu'elle ne concerne que les élèves ayant passé l'entretien métagraphique. Elle a

été introduite plus tard dans le processus de traitement des données. Rappelons que les

variables statut (niveau d'habileté) et âge concernent exclusivement les élèves ayant

passé l'entretien métagraphique.

Le tableau suivant présente le plan de codification.

79

Page 95: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 9

Plan de codification

Variable Valeurs de la variable

Sujet Numéro de l'élève

Sexe 1 = garçon

2 = fille

Statut l=fort

2 = faible

Classe 1 = classe de 6e

2 = classe de 3e

Etablissement 1 = Lycée Batsantsa de Port-Gentil (L.POG)

2 = Lycée Eugène Amogo de Franceville (L.E.F)

3 = Lycée Charles Mefane de Lambaréné (L.E.L)

4 = Lycée Richard Nguéma d'Oyem (L.É.O)

5 = Lycée National Léon Mba de Libreville (LNLM)

6 = C.E.S Agondjé de Libreville (C.E.S. A)

7 = Lycée d'Application Nelson Mandela Libreville (L.A.N.M)

8 = CES Alenakiri de Libreville (C.E.S.A.L)

Ville 1 = Port-Gentil

2 = Franceville

3 = Lambaréné

4 = Oyem

5 = Libreville

Type d'erreur Erreurs phonétiques

Erreurs phonogrammiques

Erreurs morphogrammiques

Morpho-grammaticales

Morpho-lexicales

Erreurs logogrammiques

Erreurs idéogrammiques

80

Page 96: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Variable Valeurs de la variable

Erreurs non fonctionnelles

4.2.3. Validation de la codification des données

Un autre chercheur a vérifié la justesse de la codification des données. C'est d'ailleurs au

cours de l'une des ces séances de vérification que nous nous sommes aperçu de l'absence

de la variable classe, qui a été ajoutée dans une deuxième étape de codification.

4.2.4. Analyse statistique des données

Avec l'aide d'une statisticienne de l'Université Laval, nous avons procédé à l'analyse

statistique des données à l'aide des logiciels SPSS et SAS et à la production des tableaux

et des graphiques présentés dans cette thèse.

4.3. Traitement des données issues de l'entretien métagraphique

Dans cette section, nous décrivons comment nous avons procédé pour l'enregistrement,

la transcription et l'analyse des données issues de l'entretien métagraphique.

4.3.1. Enregistrement des données

Étant donné que nous faisions les entretiens métagraphiques pendant les heures de cours,

il n'était pas rare que des élèves des classes voisines, à ce moment-là sans surveillance,

fassent du bruit, ce qui a un peu nui à la clarté de nos enregistrements sonores même si

81

Page 97: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

nous avons utilisé un enregistreur numérique performant. Cependant, ces faiblesses

mineures n'ont pas compromis l'analyse des données.

43.2. Transcription des données

Nous avons transformé le discours oral en discours écrit de la manière la plus classique

qui soit, c'est-à-dire en transcrivant mot à mot le discours des élèves, et ce, afin de

rassembler tout le matériel verbal de la manière la plus fidèle possible. Pour cela, nous

avons gardé les silences, les hésitations et les répétitions des élèves, en fait tout l'univers

verbal dans lequel se sont déroulés les entretiens métagraphiques. Nous voulions par là

garder toutes les conditions dans lesquelles se sont produits les discours.

43.3. Analyse des données

Pour analyser les données issues des entretiens métagraphiques, nous avons procédé en

deux étapes, selon en gros les deux parties de l'entretien. À l'aide d'un tableau où nous

avons consigné les réponses de chaque sujet par question (voir annexe), nous avons

d'abord analysé les réponses aux premières questions d'ordre général concernant les

perceptions des élèves quant à leur propre habileté orthographique et à leur opinion face à

la complexité de l'orthographe française. Nous avons ensuite analysé les stratégies

orthographiques qu'ils ont déclarées, les stratégies générales en premier lieu puis les

stratégies spécifiques en relation avec les sous-systèmes orthographiques. Pour l'analyse

des stratégies, nous avons utilisé une liste codée qui a été établie d'après les études

antérieures et les verbatims des sujets. Pour plus de précision sur l'analyse des entretiens,

nous renvoyons le lecteur au chapitre IV.

82

Page 98: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

43.4. Validation de la codification des données

Nous avons vérifié l'analyse et le classement de nos données de l'entretien avec un autre

chercheur de l'Université Laval.

Conclusion

Nous avons corrigé les copies de la dictée, avons élaboré le plan de codification des

données et codifié l'ensemble des données issues de la dictée. Une validation interjuge a

montré la justesse de la correction. La codification des données a également été vérifiée

par un tiers. Nous avons procédé ensuite au traitement statistique des données.

Pour ce qui est de l'entretien métagraphique, nous avons transcrit fidèlement les

enregistrements sonores et analysé les verbatims à l'aide d'un tableau classant les

réponses de chaque élève aux deux parties de l'entretien (performance orthographique

estimée par l'enseignant, rendement réel d'après les résultats, opinion face à

l'orthographe, stratégies générales et stratégies spécifiques).

5. Forces et limites méthodologiques

Toute recherche comporte des forces et des limites méthodologiques. Voyons-en d'abord

les forces.

Nous avons soumis un nombre très imposant d'élèves à la dictée (N=783). De plus, nous

avons procédé à des entretiens métagraphiques avec un nombre appréciable d'élèves

(N=59).

83

Page 99: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Nous nous sommes par ailleurs fondé sur une approche méthodologique mixte dont

plusieurs auteurs mettent en évidence les bénéfices, notamment Mark et Shotland (1987),

ainsi que Caracelli et Greene (1993). Reichardt et Gollob (1987) préconisent même

l'utilisation de méthodes aux « faiblesses opposées » pour que la synthèse des résultats

soit plus révélatrice. Par exemple, dans le cadre de notre étude, les données provenant de

la dictée réalisée avec un grand nombre d'élèves ont révélé des résultats qu'il serait

difficile d'expliquer sans, au minimum, aller interviewer les élèves, afin de mieux

comprendre leurs réponses. Les entrevues effectuées sont venues appuyer les résultats

statistiques obtenus, rendant ainsi « vivantes » les statistiques établies.

Il nous est cependant impossible de généraliser les résultats obtenus à l'ensemble des

élèves du Gabon étant donné que la technique d'échantillonnage que nous avons dû

adopter (soit l'échantillon de convenance) rend, par définition, la généralisation des

résultats plus difficile. Nous estimons par contre que nos résultats sont certainement de

bons indicateurs des compétences orthographiques des élèves du Gabon, étant donné la

taille de notre échantillon pour la dictée.

5.1. Fiabilité

On parle généralement de fiabilité d'une étude quand il y a une certaine cohérence entre

les objectifs de la recherche, son déroulement et les résultats obtenus. Cette cohérence

n'est possible que si la technique ou l'instrument de collecte des données est apte à

recueillir les mêmes informations à chaque fois que les mêmes phénomènes investigués

se manifestent. C'est ce qu'affirment Karsenti et Savoie Zajc (2004, p. 143) qui pensent

que le critère de fiabilité porte sur la cohérence entre les questions posées au début de la

recherche, l'évolution qu'elles ont subies, la documentation de cette évolution et les

résultats de la recherche.

84

Page 100: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Partant de ce principe, nous pensons que nos instruments (la dictée et l'entretien

métagraphique) nous ont permis de recueillir des informations fiables, des données

cohérentes sur les erreurs d'orthographe à chaque fois que le besoin s'est fait sentir. Tout

comme nous sommes convaincu que nos questions de recherche sont en lien avec les

résultats de cette étude. La première question et sous-question de recherche (quels sont

les types d'erreurs que les élèves gabonais du premier cycle du secondaire commettent

dans leurs écrits?) trouve sa réponse dans le chapitre III qui recense avec précision les

différents types d'erreurs d'orthographe auxquels les élèves gabonais sont confrontés. La

sous-question de recherche (quelle est la fréquence par type d'erreur ?) a fait également

l'objet d'un traitement minutieux puisque les résultats de notre étude indiquent par ordre

d'importance numérique les erreurs les plus en cause dans les écrits des élèves gabonais.

La deuxième question de recherche (quelle est l'influence des facteurs du sexe et du

niveau scolaire sur la fréquence et les types d'erreurs?) a été examinée avec attention

puisque les résultats de notre étude montrent clairement, dans le chapitre III, que les

comparaisons établies entre ces différentes variables sont en relation avec le phénomène

des erreurs d'orthographe. La troisième question (quelle est la perception des élèves

gabonais du premier cycle du secondaire quant à leur compétence orthographique et

quant à la complexité de l'orthographe française?) a fait, elle aussi, l'objet d'un

traitement rigoureux puisque les résultats de notre étude présentent, dans le chapitre IV,

les perceptions des élèves à l'égard de leur compétence orthographique et leur opinion

sur le degré de difficulté de l'orthographe française. La quatrième question et sous-

question de recherche (quelles sont les stratégies qu'ils déploient pour orthographier?

Quelles sont celles que déclarent les élèves forts et les élèves faibles?) sont aussi en lien

avec les résultats de notre étude, qui donnent, à partir des analyses pertinentes, les causes

du phénomène des erreurs orthographiques, et classifient dans le chapitre IV les

différentes stratégies déclarées par les apprenants gabonais interrogés.

85

Page 101: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

5.2. Validité interne

La notion de validité interne renvoie, selon Legendre (1993), au fait de « bien mesurer ce

qu'on veut mesurer ».

Ainsi, dans le but d'assurer la validité interne de notre étude, nous avons d'abord testé

notre texte de dictée auprès d'une dizaine d'élèves de notre ancien établissement

secondaire, qui ne faisaient pas partie des établissements retenus pour notre recherche.

Les erreurs relevées étaient pratiquement les mêmes que celles que nous avons recueillies

pendant la collecte des données proprement dite.

Ensuite, nous avons fait un essai d'entretien métagraphique avec les mêmes élèves.

L'objectif de cet essai était de mesurer la validité interne de nos différents outils de

collecte de données en vérifiant le degré de difficulté de notre dictée, le degré de clarté du

protocole d'entretien, en identifiant les questions et les termes qui pourraient poser

problèmes, afin de les reformuler au besoin. Vu que les questions s'adressaient à des

élèves de 6e et de 3e, il n'était pas rare que les participants gardent le silence ou nous

disent « qu'entendez-vous par là? ». Par exemple, la question formulée de la manière

suivante : « Que trouves-tu facile en orthographe? » a été jugée par plusieurs comme trop

générale. Il fallait ajouter : l'accord des déterminants, des adjectifs, des verbes, la

conjugaison, etc., ce qui nous a permis de reformuler certaines questions, de clarifier

certains points en ajoutant « c'est-à-dire » ou encore « autrement dit ».

D'autres questions ont nécessité l'ajout de mises en situation pouvant permettre d'éclairer

l'élève. C'est le cas de la question sur le mot « insupportable » formulée originellement

de la manière suivante : « Que représente in dans le mot insupportable? » qui est devenue

simplement « pouvez-vous me décomposer le mot insupportable? ou encore « comment

86

Page 102: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

ou de quoi est formé le mot insupportable? ». Les élèves ont en effet trouvé ces

formulations plus simples.

53 . Validité externe

Il est question de validité externe ou intrinsèque lorsque les résultats d'une recherche

scientifique peuvent être transposables dans un autre milieu, à d'autres populations ou à

d'autres contextes. Les chercheurs se préoccupent habituellement de cet aspect dans le

but de pouvoir généraliser les résultats de la recherche. Notons au passage que la validité

interne et externe sont liées. « Les spécialistes de recherche appliquée doivent vraiment

s'assurer de la validité interne de leurs résultats, s'ils ont l'intention d'en généraliser

l'application à d'autres populations ou à d'autre situations » (Martella et al, 1999, p. 47).

Dans le cadre de notre étude, si les résultats donnent un éclairage valable et pertinent sur

les erreurs d'orthographe d'élèves de 6e et de 3e de l'ensemble du Gabon, ils ne peuvent

être généralisés dans tout le pays pour les raisons que nous avons invoquées plus haut.

6. Considérations éthiques

Le comité d'éthique de l'Université Laval assure la protection des personnes contre les

risques de la recherche. La défense de l'intégrité physique et morale des participants à

l'étude en est l'objectif fondamental.

Avant d'effectuer le voyage sur le Gabon où devait se passer la collecte des données,

notre étude a été soumise à l'appréciation du comité d'éthique de l'Université Laval afin

d'avoir son approbation. Étant donné que notre recherche impliquait la participation de

mineurs, nous avons rédigé des formulaires de consentement à l'intention de leurs parents

87

Page 103: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

ou représentants légaux (mandataires légalement désignés, tuteurs). D'autres formulaires

ont également été rédigés à l'intention des étudiants majeurs. Tous ces formulaires ont été

dûment remplis soit par les participants eux-mêmes ou encore par leurs parents ou

représentants légaux. (Voir en annexe l'attestation d'approbation livrée par le comité

d'éthique).

Nous nous sommes aussi conformé aux règles d'éthique relatives à la protection et à la

conservation des données relatives aux participants à l'étude, y compris leur anonymat.

7. Mode de présentation des résultats

Nous présentons dans les chapitres III et IV les résultats de notre recherche, ainsi que

l'analyse des données et l'interprétation que nous en avons faite. Pour faciliter la lecture

et la compréhension de nos travaux, nous exposons les résultats obtenus pour chaque

instrument de collecte de données en suivant la chronologie de notre travail. Ainsi, dans

le chapitre III, nous commençons d'abord par les résultats issus de l'approche

quantitative, c'est-à-dire les résultats de la dictée. Nous abordons ensuite, dans le chapitre

IV, les résultats issus de l'approche qualitative, qui ont été recueillis lors de l'entretien

métagraphique.

Enfin, chaque fois que cela était possible et pertinent, nous avons ajouté des tableaux

pour simplifier la lecture des résultats.

88

Page 104: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Conclusion du chapitre sur la méthodologie

Rappelons que nous avons présenté le type de recherche que nous avons menée, la

population à l'étude, ainsi que les échantillons et techniques d'échantillonnage liés à

chacune des deux grandes phases de notre recherche, soit la dictée et l'entretien

métagraphique. Nous avons de plus décrit nos instruments de collecte de données, ainsi

que le déroulement de chacune des étapes de recueil de données. Nous avons aussi fait

état des forces et limites méthodologiques de notre recherche, et nous avons rappelé les

considérations éthiques auxquelles nous nous sommes soumis. Enfin, nous avons

brièvement exposé le mode de présentation des résultats que nous avons choisi. Voyons

maintenant quels sont les résultats de notre recherche.

89

Page 105: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

CHAPITRE III :

ANALYSE DES RESULTATS :

ANALYSE DES DONNÉES QUANTITATIVES ISSUES DE LA DICTÉE

Nous procédons dans cette partie à l'analyse statistique, axée sur les données

quantitatives et réalisée à partir des résultats issus de la correction des copies de dictée.

Nous faisons d'abord une présentation générale des différentes erreurs ciblées dans cette

étude, avant d'entrer dans les détails concernant les différents sous-systèmes

orthographiques et les relations des erreurs avec les variables comme le sexe et le niveau

scolaire. Enfin, nous bouclons ce chapitre en présentant les corrélations entre les

différents types d'erreurs ainsi que le seuil observé pour indiquer si elles sont

significativement différentes de zéro.

Pour l'analyse des résultats globaux et par sous-système, nous fournissons d'abord un

tableau présentant les résultats des élèves, puis un histogramme montrant la distribution

des erreurs.

>

1. Résultats généraux

Le tableau 10 présente le nombre d'erreurs d'orthographe commises par les élèves. Ce

nombre varie entre 1 et 92 par élève, pour une dictée de 126 mots.

90

Page 106: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 10

Nombre d'erreurs (toutes catégories confondues)

Nombre Nombre Nombre Nombre

d'erreurs d'élèves % d'erreurs d'élèves •/. 1 3 4 48 12 1,5

2 1 1 49 11 1,4

3 10 1.3 50 8 1,0

4 8 1,0 51 7 0,9

5 9 1.1 52 10 U . 6 6 0,8 53 4 0,5

7 14 1,8 54 5 0,6

8 13 1,7 55 7 0,9

9 19 2,4 56 4 0,5

10 12 1,5 57 11 1,4

11 20 2,6 58 6 0,8

23 19 2,4 . 59 5 0,6

24 13 1,7 60 9 1,1

25 10 U 61 6 0,8

26 9 1,1 62 3 0,4

27 14 1,8 63 7 0,9

28 21 2,7 64 2 0,3

29 10 1,3 65 3 0,4

30 13 1,7 66 4 0,5

31 18 2 3 67 2 0,3

32 17 2,2 68 4 0,5

33 8 1,0 69 2 0,3

34 12 1,5 70 4 0,5

• 35 9 1,1 71 5 0,6

36 16 2,0 72 5 0,6

37 17 2J2 73 3 0,4

38 17 2,2 74 1 0,1

39 6 0,8 75 1 0,1

40 13 1,7 76 2 0 3

41 8 1,0 78 2 0JÎ

42 15 1,9 81 1 0,1

43 11 1,4 82 1 0,1

44 8 1,0 84 1 0,1

45 13 1,7 88 1 0,1

46 12 1,5 92 1 0,1

47 11 1,4

Total 783 100

91

Page 107: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Graphique 1: Distribution générale des erreurs d'orthographe

100-

80-

! t 60-

O

ë LU

40-

20-

Moyenne =31,33 Ecart type =18,51

N=783

- , - , ■ ■ ■ ■ , ■ ■ ■ ■ , ■ ■ ■ ^ - ^ r

0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 100,00

Erreurs

Comme le montre le tableau 10, aucun élève n'a eu zéro erreur. On s'aperçoit que trois

élèves, soit 4 % des élèves, ont commis une seule erreur d'orthographe. Il ressort

également que 12,1 % des élèves se trouvent dans la tranche de 1 à 10 erreurs ; 23 % dans

la tranche de 11 à 20 erreurs; 17,5 % dans la tranche de 21 à 30 erreurs ; 17 % dans la

tranche de 31 à 40 erreurs; 13,9 % dans la tranche de 41 à 50 erreurs; 8,7 % dans la

tranche de 51 à 60 erreurs; 4,7 % dans la tranche de 61 à 70 erreurs ; 2,8 % dans la

tranche de 71 à 84 erreurs et 0,2 % dans la tranche de 88 à 92 erreurs.

Quant au graphique 1, il présente la distribution générale des erreurs d'orthographe

enregistrées dans cette étude. Cette distribution ne suit pas tout à fait la courbe normale.

On constate que le sommet du graphique se trouve dans l'intervalle de 0 à 20 erreurs.

92

Page 108: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Une grande concentration se situe autour de la moyenne générale des erreurs

d'orthographe, soit M = 31,33. Il apparaît que la montée de la courbe (de 0 à 20) se fait

de manière plutôt abrupte. Cela s'explique par le nombre réduit d'élèves ayant enregistré

peu d'erreurs d'orthographe. La descente est, par contre, progressive. Cela est attribuable

au grand nombre d'élèves ayant eu un nombre important d'erreurs d'orthographe, et au

fait qu'à mesure que le nombre des erreurs augmente, celui des élèves diminue

graduellement.

Voyons maintenant les moyennes des erreurs par catégorie.

Tableau 11

Moyenne des erreurs par catégorie

Variable Moyenne

E. phonétiques

E. phonogrammiques

E.morphogrammiques

• d'ordre grammatical

• d'ordre lexical

E. logogrammiques

E. idéogrammiques

E. non fonctionnelles

3,03

11,68

12,53

9,98

2,55

2,72

1,11

0,359

Moyenne générale des erreurs

31,33

À la lecture du tableau 11, il apparaît que les erreurs morphogrammiques obtiennent la

moyenne la plus élevée en dictée chez nos sujets, soit 12,5. Elles sont talonnées par les

erreurs phonogrammiques avec une moyenne de 11,7. À l'intérieur des erreurs

morphogrammiques, ce sont les erreurs de type grammatical qui présentent la moyenne la

plus élevée par rapport aux erreurs de type lexical (10 contre 2,5). La moyenne générale

des erreurs est élevée, soit 31,33 pour une dictée de 126 mots.

93

Page 109: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Dans la région de Québec, Boilard-Gameau (1985) a mené une recherche auprès d'un

échantillon de 118 élèves de cinq classes de sixième année primaire de 11 à 12 ans. Elle

compare deux méthodes de français au primaire : la méthode dite nouvelle et la méthode

traditionnelle. L'approche nouvelle est centrée sur la production et la compréhension de

discours. L'ancienne approche, par contre, accorde une place de choix à la grammaire et

à l'analyse grammaticale. L'épreuve employée par la chercheuse était une composition

libre (un texte au choix parmi divers types de textes, dans une période normale de classe,

c'est-à-dire 50 minutes). L'auteure a choisi elle aussi la typologie de Catach pour

classifier les erreurs des élèves. L'étude montre, comme pour notre échantillon gabonais,

que les erreurs concernant les morphogrammes et les homophones grammaticaux sont les

plus fréquentes avec 45,5 %, devant les idéogrammes (28 %) et les erreurs d'orthographe

lexicale (16 %). La moyenne des erreurs est cependant nettement moindre (14,3 sur 100

mots écrits contre 24,9 chez nos élèves gabonais si on ramène leur moyenne d'erreurs sur

100). Il faut remarquer cependant que cette étude porte sur des élèves du primaire et non

du secondaire ainsi que sur des compositions libres et non sur une dictée, ce qui constitue

une situation d'écriture laissant plus de liberté aux sujets scripteurs de choisir les mots et

les structures qu'ils maîtrisent.

Toujours au Québec, Conrad Bureau (1985) a observé que les élèves du cours secondaire

font, en moyenne, 37 erreurs par copie, soit environ 18 erreurs par « page composée. »

L'auteur ne signale pas cependant le nombre de mots équivalant à une page composée, ce

qui rend la comparaison de ces moyennes difficile. On peut imaginer malgré tout qu'une

page composée est sans doute aussi longue sinon plus que le texte de notre dictée, ce qui

permet d'avancer que les sujets du secondaire québécois étudiés par Bureau ont commis

moins d'erreurs que nos sujets du secondaire gabonais. La grammaire représente encore

une fois la source principale des erreurs, et ce, pour toutes les années du secondaire (35,8

%). Précisons cependant que le terme « grammaire », même s'il renvoie pour l'ensemble

aux accords, recouvre également des faits de langue qui ne ressortissént pas tous à

l'orthographe comme la concordance temporelle et modale. Par ailleurs, l'étude de

Bureau porte sur des compositions et non sur une dictée.

94

Page 110: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

D'autres études sont parvenues à des résultats similaires, c'est-à-dire où les erreurs

morphogrammiques, notamment grammaticales, sont plus importantes. C'est le cas de

Roberge (1984), de Ouellet (1997) et de Bétrix (1989), dont nous présentons brièvement

les résultats.

Roberge a mené une étude comparative entre deux groupes d'élèves : un groupe d'élèves

de septième année, le groupe de 1961 (groupe I), et un autre d'élèves de première année

du secondaire, celui de 1982 (groupe II). La question qui a servi de point de départ à cette

étude comparative était de savoir si l'orthographe des élèves québécois était meilleure ou

pire qu'avant. Une dictée de 117 mots a été administrée aux deux groupes. Cette

comparaison a permis à l'auteur de constater que l'orthographe a subi une chute verticale

à quelques vingt ans d'intervalle. Pour ce qui concerne la similitude de cette étude à la

nôtre, il ressort que pour les deux sexes « Les erreurs grammaticales sont plus

nombreuses que les erreurs d'usage» (p. 30).

Les rapports du ministère de l'Éducation du Québec, Résultats des élèves à l'épreuve

obligatoire d'écriture de sixième année primaire (Ouellet et Provost, 1997a) et Résultats

des élèves à l'épreuve obligatoire d'écriture de troisième année secondaire (Ouellet et

Provost, 1997b) ont aussi révélé que la grammaire était au centre des difficultés

auxquelles les élèves des deux ordres étaient confrontés en orthographe. Pour la 3e

secondaire, ordre qui concerne plus spécifiquement notre étude, le rapport québécois

révèle que 91,7 % des élèves atteignent le seuil de réussite en orthographe d'usage contre

seulement 50,8 % en orthographe grammaticale. C'est en fait l'orthographe grammaticale

qui constitue le critère le moins réussi des 9 critères analysés. Par ailleurs, il est difficile

de comparer les résultats de ces rapports du ministère de l'Éducation du Québec avec les

nôtres sur le plan de la moyenne générale des erreurs. En effet, les deux épreuves sont

différentes (texte/dictée), les erreurs ne sont pas classifiées à l'aide des mêmes

instruments, et les calculs effectués ne sont pas les mêmes, le nombre d'erreurs dans la

95

Page 111: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

grille du MEQ par copie étant converti en pourcentage de réussite et non pas calculée en

soi.

En Suisse, Bétrix Koehler (1991) rappelle qu'une étude qu'elle a menée en 1987 a permis

de constater que les élèves de 3e et 4e primaire commettent le plus grand nombre

d'erreurs dans la morphogrammie grammaticale. Dans son étude sur les élèves vaudois

de 5e et 6e primaire pour laquelle elle a utilisée aussi la grille de Catach (1980), elle arrive

à la même conclusion :

Dans l'ensemble, on peut dire que le profil des erreurs varie peu entre la 5e et la 6e. En terme (sic) de proportion, les erreurs concernant les morphogrammes grammaticaux sont de loin les plus nombreuses. Chez les 6e, quasi une erreur sur deux est de ce type (sur 15 erreurs, les 6e font en moyenne 7 erreurs en grammaire) et chez les 5e, deux cinquièmes des erreurs sont également grammaticales (en moyenne 9 erreurs sur environ 23). (p.27)

C'est dire que la zone morphogrammique, notamment grammaticale, reste celle qui est la

plus touchée par le phénomène des erreurs d'orthographe tant en Occident (Europe et en

Amérique du nord) qu'en Afrique. Le problème des erreurs grammaticales concerne

même les meilleurs élèves, car les rares erreurs qu'ils commettent relèvent pour la plupart

de ladite zone. D'autre part, Bétrix-Koehler (1991), comme Boilard-Garneau (1985), a

trouvé une moyenne générale d'erreurs nettement moins élevée que la moyenne de notre

échantillon (15,4 sur 118 mots, soit 13 sur 100, contre 24,9 sur 100 pour notre

échantillon). L'étude suisse concerne l'ordre primaire et non secondaire, mais elle a porté

sur une dictée comme dans le cas de notre recherche. Par contre, l'étude comparative

québécoise menée par Roberge a trouvé une moyenne du groupe de 1982 de première

secondaire de 33,10 sur 117 mots, contre 31,33 sur 126 mots pour notre étude. Il faut dire

que les sujets de l'étude de Roberge ont deux ans de scolarité de moins que la moitié des

nôtres environ et que le texte à la base de la dictée de cette étude montre un niveau de

difficulté, notamment de vocabulaire, un peu plus élevé que le nôtre par rapport à l'âge

des sujets.

96

Page 112: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

De façon générale, on observe que, toutes choses égales par ailleurs, les élèves gabonais

seraient globalement plus faibles en orthographe que les élèves du secondaire et, même

dans certains cas, du primaire, qui ont participé à des études sur l'orthographe au Québec

et en Suisse et que les erreurs qu'ils commettent le plus fréquemment touchent les

morphogrammes grammaticaux.

Examinons maintenant les erreurs des élèves par sous-système orthographique, en

commençant par les erreurs phonétiques.

Les erreurs selon les sous-systèmes orthographiques

Tableau 12

Les erreurs phonétiques

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 176 22,5 1 145 18,5 2 116 14,8 3 97 12,4 4 75 9,6 5 36 4,6 6 42 5,4 7 29 3,7 8 6 2,0 9 8 1,0 10 7 0,9 11 7 0,9 12 6 0,8 13 7 0,9 14 2 0,3 15 3 0,4 16 2 0,3 17 6 0,8 18 1 0,1 20 2 0,3

Total 783 100

Ce tableau présente les statistiques des erreurs phonétiques du type * destin au lieu

d'instinct. On constate qu'une proportion assez élevée d'élèves (22,5 %) n'ont commis

97

Page 113: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

aucune erreur dans cette catégorie. De leur côté, 72,9 % des élèves ont eu entre 1 et 10

erreurs de type phonétique. Le reste, soit 5,5 %, se situe entre 11 et 20 erreurs.

-5,00

Graphique 2: Les erreurs phonétiques

Moyenne =3,04 Ecart type =3,392

N=783

0,00 5,00 10,00 15,00 20,00 25,00

Erreurs phonétiques

Ce graphique est d'un genre assez particulier par rapport à la courbe normale. On

constate que le nombre d'élèves n'ayant pas beaucoup d'erreurs d'orthographe est

important, le sommet du graphique étant en effet placé sur zéro. La majorité des erreurs

de cet ordre se trouvent dans l'intervalle allant de 0 à 4 erreurs. On remarque une forte

concentration d'erreurs autour de la moyenne (M = 3,04). La distribution des erreurs est

plus progressive à partir de 5 erreurs jusqu'au maximum de 20 erreurs. Le nombre peu

élevé d'erreurs dans cette catégorie indique que la dictée ne comportait pas beaucoup de

mots pour lesquels les élèves auraient pu hésiter sur le plan de la discrimination auditive.

98

Page 114: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Comme ils étaient en situation de dictée, ils pouvaient s'appuyer, pour la transcription

des mots, sur la prononciation de l'enseignant.

Tableau 13

Les erreurs phonogrammiques

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 16 2 1 14 3,1 2 24 3,1 3 29 3,7 4 42 5,4 5 43 5,5 6 44 5,6 7 45 5,7 8 37 4,7 9 38 4,9 10 40 5,1 11 38 4,9 12 48 6,1 13 32 4,1 14 26 3,3 15 33 4,2 16 39 5,0 17 35 4,5 18 28 3,6 19 20 2,6 20 29 3,7 21 11 1,4 22 19 2,4 23 9 1,1 24 12 1,5 25 6 0,8 26 7 0,9 27 7 0,9 29 3 0,4 30 2 0,3 31 1 0,1 32 3 0,4 33 1 0,1 35 1 0,1 36 1 0,1

Total 783 100

À la lecture de ce tableau sur les erreurs phonogrammiques (par exemple, *épaice), on

constate que seulement 2 % des élèves n'ont commis aucune erreur dans cette catégorie.

99

Page 115: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Cependant, 45,5 % des élèves se trouvent dans la tranche de 1 à 10 erreurs et 48,9 % dans

la tranche de 11 à 20, et on relève même 7,1 % dans la tranche de 21 à 30 erreurs.

Graphique 3: Les erreurs phonogrammiques

50-

40-

Sr 30-«-• U ë UJ

20-

10-

42,00

24,00

il n

32,00

n 35,00

29,05

1 1200

T -10,00 0,00 10,00 20,00 30,00

Erreurs phonogrammiques

- H - j , z-rcrtluinjijinnl

40,00

Moyenne =11,68 Ecart type =6,904

N=783

Ce graphique présente des bâtonnets de hauteur irrégulière. Cette irrégularité pourrait

s'expliquer par le fait que la maitrise des phonogrammes par les élèves varie selon les

correspondances graphophonétiques en cause, qui sont très diverses en français. Certains

élèves peuvent bien connaitre les graphies pour tel phonème, mais hésiter encore pour le

choix de la graphie pour tel autre phonème. On remarque une forte concentration autour

de 10, la moyenne des erreurs de ce type étant de M = 11,67. La courbe, légèrement

abrupte à la montée (de 0 à 10) par rapport à la courbe normale, est plus progressive à la

descente.

100

Page 116: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 14

Les erreurs morphogrammiques

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 4 0,5 1 23 2,9 2 25 3,2 3 48 6,1 4 46 5,9 5 47 6,0 6 33 4,2 7 31 4 8 34 4,3 9 32 4,1 10 34 4,3 11 31 4,0 12 41 5,2 13 33 4,2 14 28 3,6 15 29 3,7 16 29 3,7 17 40 5,1 18 17 2,2 19 16 2 20 28 3,6 21 17 2,2 22 20 2,6 23 13 1,7 24 9 Ul 25 11 1,4 26 15 1,9 27 13 1,7 28 6 0,8 29 6 0,8 30 7 0,9 31 2 0,3 32 2 0,3 33 5 0,6 35 4 0,5 36 1 0,1 37 2 0,3 39 1 0,1

Total 783 100

101

Page 117: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Graphique 4: Les erreurs morphogrammiques

Moyenne =12,53 Ecart type =8,052

N=783

-10,00 0,00 10,00 20,00 30,00 40,00

Erreurs morphogrammiques

Le tableau 14 et le graphique 4 présentent le nombre d'erreurs et la distribution des erreurs morphogrammiques à la fois d'ordre grammatical (type : la route *nu) et lexical (type : *instin). Très peu d'élèves n'ont commis aucune erreur dans cette catégorie, soit 0,5 % ; c'est le taux pour zéro erreur le plus bas que nous ayons enregistré de tous les types d'erreurs. On constate sur le tableau que la tranche de 1 à 10 erreurs comprend 45,1 % des élèves, celle de 11 à 20 erreurs 37,8 % et celle de 21 à 39 erreurs 15,6 % des élèves.

Quant au graphique, relativement similaire au premier, on relève la présence des bâtonnets d'une hauteur en dents de scie comme dans le cas des phonogrammes. Cette

102

Page 118: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

irrégularité pourrait tenir à la diversité des règles morphogrammiques du français, qui ne

seraient pas maîtrisées également par les élèves. Le sommet se situe entre quatre et six

erreurs. On constate une forte concentration autour de la moyenne, la plus élevée de

l'étude, soit M =12,53.

Tableau 15

Les erreurs morphogrammaticales

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves % 0 11 1,4 1 39. 5 2 64 8,2 3 49 6,3 4 52 6,6 5 39 5 6 39 5 7 45 5,7 8 36 4,6 9 41 5,2 10 38 - 4,9 11 37 4,7 12 27 3,4 13 32 4,1 14 28 3,6 15 35 4,5 16 20 2,6 17 29 3,7 18 17 2,2 19 22 2,8 20 18 2,3 21 16 2 22 U 1,4 23 7 0,9 24 7 0,9 25 4 0,5 26 4 0,5 27 7 0,9 28 3 0,4 29 1 0,1 30 2 0,3 32 1 0,1 33 1 0,1

Total 783 100

Parmi les erreurs morphogrammiques, on constate, à travers ce tableau, que seulement

1,4 % des élèves n'ont commis aucune erreur grammaticale. La tranche de 1 à 10 erreurs

103

Page 119: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

comprend 56,5 % des élèves, la tranche de 11 à 20 comprend 33,9 % des élèves, celle de

21 à 33 comprend 8,4 % des élèves.

Graphique 5: Les erreurs morphogrammaticales

Moyenne =9,98 Ecart type =6,841

N=782

0,00 10,00 20,00 30,00

Erreurs morphogrammaticales

La forme de ce graphique sur les erreurs morphogrammaticales ressemble à celle du

précédent sur la morphologie en général. La courbe, qui devrait avoir la forme d'une

cloche régulière, a plutôt une montée abrupte avec des bâtonnets de hauteur assez

irrégulière. Le nombre d'élèves ayant enregistré peu d'erreurs grammaticales est réduit,

ce qui explique cette situation. On constate une forte concentration dans l'intervalle de 0

à 10 erreurs. Comme dans le premier graphique, la courbe présente aussi une descente

plus progressive du fait d'un nombre important d'erreurs enregistrées à l'intérieur de ce

104

Page 120: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

sous-système. La similitude entre la forme du graphique 1 et 4 est sans doute liée au fait

que les erreurs grammaticales sont les plus nombreuses chez les sujets.

Tableau 16

Les erreurs morpholexicales

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves % 0 87 11,1 1 184 23,5 2 168 21,5 . 3 134 17,1 4 101 12,9 5 45 5,7 6 33 - 4,2 7 14 1.8 8 11 1,4 9 3 0,4 11 1 0,1 12 1 0,1 15 1 0,1

Total 783 100

Contrairement au tableau précédent où nous avons une forte proportion d'erreurs

grammaticales dans plusieurs tranches de 10, ce tableau des erreurs lexicales présente des

tranches d'erreurs beaucoup plus limitées. On constate que 11,1 % des élèves n'ont

commis aucune erreur dans cette catégorie. La tranche la plus dense (de 1 à 10 erreurs)

comprend 88,6 % des élèves, alors que celle de 12 à 15 n'en a que 0,2 %.

105

Page 121: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Graphique 6: Les erreurs lexicales

Moyenne =2,55 Ecart type =1,96

N=783

10,00

Erreurs morpholexicales 15,00

La moyenne des erreurs lexicales (M = 2,55) est l'une des plus faibles de cette étude. Les

erreurs enregistrées se trouvent concentrées dans l'intervalle de 0 à 4, le sommet du

graphique se situant autour d'une erreur uniquement. Encore une fois, la descente de la

courbe est plus graduelle, en escalier, que ne l'est la montée.

Les résultats des élèves en morphologie lexicale sont nettement meilleurs qu'en

morphologie grammaticale. La dictée présentait bien sûr beaucoup plus de cas concernant

des règles grammaticales, mais elle comportait quand même une dizaine de mots dont la

transcription demandaient des connaissances d'ordre morpholexical (étroit, bruit,

instinct, insupportable, regard, menaçant, etc.).

106

Page 122: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 17

Les erreurs logogrammiques

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 115 14,7 1 161 20,6 2 151 19,3 3 116 14,8 4 81 103 5 55 7 6 51 63 7 25 3,2 8 16 2 9 9 1,1 10 1 0,1 11 2 0,3

Total 783 100

Graphique 7: Les erreurs logogrammiques

20C-

150-

O O t t 100-lU

50-

T 0,00 3,00

" ^ l - T ô o l —

l 6,00

T 9,00

Moyenne =2,72 &arttype=2,213

N=783

12,00

Erreurs logogrammiques

107

Page 123: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Ce tableau et ce graphique présentent les statistiques et l'allure de la courbe des erreurs

logogrammiques de type les voyageurs sans *voie. Il ressort du tableau que 14,7 % des

élèves n'enregistrent aucune erreur dans cette catégorie. La tranche la plus importante,

allant de 1 à 10 erreurs, comprend 85 % des élèves.

Sur le graphique, on remarque, comme dans la situation précédente, une forte

concentration d'erreurs autour de 2, où nous avons le sommet des bâtonnets. La

distribution de la descente du graphique est encore progressive. La moyenne des erreurs,

relativement faible, est de M = 2,72. Il s'agit donc d'une catégorie qui causerait peu de

problèmes aux élèves. Il faut dire cependant que la dictée ne comportait que deux cas

d'homonymie. Nos résultats devraient être vérifiés avec plus de cas.

Tableau 18

Les erreurs idéogrammiques

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 305 39 1 234 29,9 2 158 20,2 3. 53 6,8 4 19 i 2,4 5 7 0,9 6 3 0,4 7 2 03 8 1 0,1 9 1 0,1

Total 783 100

108

Page 124: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Graphique 8: Les erreurs idéogrammiques

400-

TU rrzn Fôôl

300-

H -

TU rrzn Fôôl

Effe

ct

O

TU rrzn Fôôl

1305,001

TU rrzn Fôôl TU rrzn Fôôl

|234.00|

TU rrzn Fôôl

100-

TU rrzn Fôôl

| l 58 .00 |

TU rrzn Fôôl TU rrzn Fôôl 153,001

TU rrzn Fôôl T««ilQT_rp!_ rr. TU rrzn Fôôl 0 r I 1 1 UJ | i,uu| I ' ' T l

Moyenne =1,11 Ecart type =1,243

N=783

-2,00 0,00 2,00 4,00 6,00 8,00 10,00

Erreurs idéogrammiques

Ce tableau et ce graphique présentent les statistiques et la courbe des erreurs

idéogrammiques de type les roues de la *toyota. On constate, sur le tableau, que 39 %

des élèves n'ont aucune erreur dans cette catégorie. La tranche de 1 à 9 erreurs comprend

une proportion assez élevée, soit 61 % des élèves. On remarque, pour ce qui est du

graphique, que le sommet se trouve au niveau de 0. La moyenne des erreurs pour ce type

est de seulement M = 1,10, avec une forte concentration dans l'intervalle de 0 à 2.

Comme pour les logogrammes, les idéogrammes poseraient donc peu de problèmes aux

élèves.

109

Page 125: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 19

Les erreurs non fonctionnelles.

Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %

0 617 78,8

1 128 163 2 32 4,1 3 4 0,5

26 1 0,1 51 1 0,1

Total 783 100

Graphique 9: Les erreurs non fonctionnelles

600-

t j 400-

ë LU

200-

1 __*__ 1 20,00 40,00

Erreurs non fonctionnelles

+4*84- T 60,00

Moyenne =0,36 Ecart type =2,106

N=783

110

Page 126: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Ce tableau et ce graphique très particulier par rapport aux autres donnent des

informations face aux erreurs non fonctionnelles (du type quelle *peure de regarder...).

Il se dégage à la lecture du tableau qu'un fort taux d'élèves n'a commis aucune erreur

dans cette catégorie, soit 78,8 %. C'est le pourcentage le plus élevé de réussite pour tous

les types d'erreurs présentés dans cette étude. Les élèves qui ont commis des erreurs dans

cette catégorie se retrouvent principalement dans la tranche de 1 à 3 erreurs, soit 20,5 %.

La moyenne des erreurs du type non fonctionnel est de M = 0,36 comme c'est indiqué sur

le graphique. C'est la moyenne la plus faible de notre étude. Il faut dire que cette

catégorie touche des graphies hors-système qui concernent un nombre relativement limité

de mots.

2. Influence des variables du sexe et du niveau scolaire

Après cette partie réservée à l'analyse statistique des différents types d'erreurs liées aux

sous-systèmes de l'orthographe, nous allons maintenant analyser les variables sexe et

niveau scolaire des élèves. Nous faisons des comparaisons entre ces différentes variables

afin de déterminer si elles sont en relation avec le phénomène des erreurs d'orthographe.

Le test t de Student22 a été appliqué afin de déterminer si la différence entre les moyennes

des élèves, selon les variables précitées, est significative ou non. Le seuil critique de

signification a été généralement fixé à 0,05.

Le test de Student avec variance inégale a été utilisé lorsque c'était approprié.

111

Page 127: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 20

Comparaison des moyennes selon le sexe

Sexe N Moyenne Écart- type t dl Seuil observé

E.phonét garçon 384 3.3099 3.57030 fille 399 2.7744 3.19300 2.209 764 .027*

E.phonogr garçon 384 12.0234 7.30478 fille 399 11.3459 6.48583 1.371 762 .171

E.morphogr garçon 384 13.1120 8.36663 fille 399 11.9774 7.70610 1.975 781 .049*

Morpho.gram garçon 383 10.6005 7.12195 fille 399 9.3784 6.51320 2.501 767 .013*

Morpho.lexical garçon 384 2.5339 2.01402 fille 399 2.5739 1.90975 -.286 781 .775

E.logogram garçon 384 2.8620 2.28269 fille , 399 2.5890 2.13877 1.728 781 .084

E.idéogram garçon 384 1.0625 1.20324 fille 399 1.1554 1.28028 -1.045 781 .296

E.non.fonct garçon 384 .2995 .58386 fille 399 .4160 2.89469 -.774 781 .439

TotaLerreurs garçon 384 32.6380 19.42628 fille 399 30.0752 17.51595 1.936 765 .053

* I I L'astérisque indique une différence significative.

Ce tableau compare les erreurs selon le sexe, c'est-à-dire entre les filles et les garçons. Il

ressort que les filles, de manière générale, commettent moins d'erreurs que les garçons en

dictée.

Le test statistique, dont le seuil critique est fixé à (p< 0,05), montre des écarts significatifs

pour les erreurs de types phonétique et morphogrammatical.

Ce résultat rejoint celui de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler (1991) selon laquelle

les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons pour l'ensemble des catégories

en orthographe, la différence étant statistiquement significative (t =-5,72 p<0,01).

112

Page 128: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C'est également le cas de l'étude comparative menée par Chervel et Manesse (1989).

Cette recherche sur la compétence en orthographe des jeunes Français du XIXe et du XXe

siècle révèle entre autres que les filles des années 1873 et 1987 se montrent plus

performantes en orthographe que les garçons. Cette étude compare les filles et les garçons

de différents établissements, de différents niveaux (CM2, 6e, 5e, 4e, et 3e) et de différents

âges (de 9 à 17 ans). Il ressort, selon ces auteurs, que :

La supériorité des filles est en moyenne de trois points et demi. Leur taux de supériorité s'élève à 1,25. Cette supériorité est attestée dans toutes les classes, mais elle s'affirme particulièrement en 6e et 5e, où l'écart entre les deux sexes est de cinq points. Elle est au contraire minime en CM2 (un peu plus d'une demi-faute). L'atténuation de cet écart en 4e est due essentiellement à l'orientation en fin de 5e, qui frappe surtout les garçons, (p. 96).

Au Québec, Franchie Olivier (1989) montre aussi dans son étude sur Le scripteur de

sixième année et ses stratégies en orthographe lexicale que les performances sont

supérieures chez les filles, cette fois-ci en orthographe lexicale. Les filles font en

moyenne 2,51 erreurs d'ordre lexical pour les dix-sept mots de la dictée, alors que les

garçons font en moyenne 3,29 erreurs. La différence n'a cependant pas fait l'objet d'un

test de signification.

Le chercheur Bureau (1985), dans son étude sur des élèves québécois du secondaire, fait

la même constatation. Il affirme en citant d'autres études québécoises portant sur le cégep

et l'université :

On doit conclure que le paramètre sexe a une influence sur la qualité de la grammaire écrite et de l'orthographe au deuxième cycle du secondaire. Fait intéressant, on a observé des différences significatives analogues en faveur des personnes du sexe féminin et pour les mêmes catégories dans deux autres enquêtes : EFEC au niveau collégial et EFEL au niveau universitaire, (p.68)

Après cette comparaison entre la moyenne des filles et celle des garçons en orthographe,

113

Page 129: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

nous allons maintenant voir ce qui en est entre les niveaux 6e et 3e

Tableau 21 Comparaison des moyennes selon les niveaux d'enseignement

Classe N Moyenne Écart -type

T dl Seuil observé

E.phonét classe de 6e 432 4.2824 3.76932 . classe de 3 e 351 1.5043 1.98404 13.229 678 .000*

E.phonogr classe de 6e 432 15.3356 6.40192 classe de 3 e 351 7.1766 4.37951 21.101 760 .000*

E.morphogr classe de 6e 432 16.9282 7.39423 classe de 3 e 351 7.1254 4.93457 22.146 754 .000*

Morpho.gram classe de 6e 432 13.5856 6.44895 classe de 3 e 351 5.5229 4.16608 21.111 745 .000*

Morpho.lexical classe de 6e 432 3.3032 2.00884 classe de 3 e 351 1.6325 1.43983 13.530 770 .000*

E.logogram classe de 6e 432 3.6898 2.23058 classe de 3 e 351 1.5328 1.49797 16.118 756 .000*

E.idéogram classe de 6e 432 1.5255 1.37066 classe de 3 e 351 .5983 .81479 11.737 720 .000*

E.non.fonct classe de 6e .432 .4375 2.51137 classe de 3 e 351 .2621 1.45787 1.159 781 .247

TotaLerreurs classe de 6e 432 42.0278 16.56427 classe de 3 e 351 18.1681 10.61415 24.401 743 .000*

*L'astérisque indique une différence significative.

À la lecture de ce tableau, on constate que la moyenne générale des erreurs en classe de 6e est nettement plus élevée que celle de la classe de 3e. Les élèves de 6e commettent beaucoup plus d'erreurs d'orthographe que leurs aînés de 3e. Les moyennes des deux groupes (6e et 3e) sont significativement différentes pour toutes les catégories, sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas de différence significative (.247 en 6e et .223 en 3e). On peut donc dire que la scolarité a un effet bénéfique sur le rendement orthographique des élèves.

Nos résultats rejoignent ceux de l'étude suisse de Bétrix Koehler (1991). Il ressort en effet de cette étude que les élèves de 6e année primaire réalisent de meilleures performances en orthographe que les élèves de 5e année primaire :

114

Page 130: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Nous voyons donc que les élèves de 5e font en moyenne 23 erreurs, alors que ceux de 6e n'en font « plus que » 15. On peut donc parler d'une amélioration sensible des résultats moyens des élèves de 6e. En d'autres termes, les élèves de 6e font un tiers d'erreurs en moins que les 5e. (p.10)

3. Corrélations entre les différents types d'erreurs

Enfin, nous bouclons cette partie en présentant, à l'aide du tableau 22, les corrélations

entre les différents types d'erreurs examinés dans cette étude, ainsi que le seuil observé

pour indiquer si elles sont significativement différentes de zéro.

Comme le montre le tableau 22, les corrélations entre les différentes variables sont assez

élevées, variant en effet de .40 à .97. Seule la catégorie des erreurs non fonctionnelles ne

semble pas être en lien avec les autres catégories.

Les plus fortes corrélations sont notamment observées entre les erreurs

phonogrammiques et les erreurs morphogrammiques (.738) et morphogrammiques

grammaticales (.729), autant de secteurs fondamentaux de l'orthographe, et entre les

erreurs morphogrammiques grammaticales et les erreurs logogrammiques (.612), sans

doute à cause du nombre assez élevé de cas d'homonomie grammaticale en général et

dans la dictée en particulier (une dizaine environ). Les corrélations sont cependant moins

fortes entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs morphogrammiques lexicales

(.474), ce qui peut s'expliquer du fait que les phonogrammes sont liés à la transcription

des sons alors que les morphogrammes lexicaux sont en général muets. La corrélation est

également modérée entre les erreurs logogrammiques et les erreurs morphogrammiques

115

Page 131: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

lexicales (.410). Dans la dictée, il n'y avait que deux cas d'homonomie lexicale ; dans le

système orthographique, il existe par contre un nombre assez important de cas

d'homonymie lexicale, dont la distinction ne repose pas cependant systématiquement sur

des éléments de morphologie lexicale.

116

Page 132: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 22

Corrélations entre les différents types d'erreurs

E.non E. phonét. E.phono. E.morpho Morpho.gr Morpholex E.logog E.idéog fonct. Total des e

E.phonét Correlation Pearson 1 .463.**) .604.**) .573.**) .510(**) .354.**) .311.**) .010 .684.**)

Sig. .000 .000 .000 .000 .000 .000 .785 .000 N 783 783 783 783 782 783 783 783 783

E.phono Correlation Pearson .463(**) 1 .738.**) .729.**) .474.**) .614.**) .449(**) .121.**) *) Sig. .000 .000 .000 .000 .000 .000 .001 .000 N 783 783 783 783 782 783 783 783 783

E.morpho Correlation Pearson .604.**) .738.**) 1 .970.**) .691.**) .621.**) .472.**) .094(*

*) *) Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .008 .000

N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 Morpho.gr Correlation

Pearson .573.**) .729.**) .970.**) 1 .532.**) .612.**) .466{**) .025 .911(**)

Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .487 .000

N 782 783 783 783 782 783 783 783 783 Morpholex Correlation

Pearson .510.**) .474.**) .691.**) .532.**) 1 .410(**) .271.**) .074.*) .646.**)

Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .039 .000

N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 E.logog Correlation

Pearson .354.**) .614(**) .621.**) .612.**) .410.**) 1 .392.**) .059 .714(**)

Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .101 .000

N 783 783 783 782 782 783 783 783 783 E.idéog Correlation

Pearson .311.**) .449.**) .472.**) .466.**) .271.**) .392.**) 1 .080.*) .549.**)

Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .026 .000

N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 E.non.fonc t

Correlation Pearson .010 .121.**) .094.**) .025 .074.*) .059 .080.*) 1 .119.**)

Sig. (2-tailed) .785 .001 .008 .487 .039 .101 .026 .001

N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 Total.des erreurs.

Correlation Pearson .684.**) .891.**) .934.**) .911(**) .646(**) .714.**) .549.**) .119.**) 1

Sig. (2-tailed)

.000 .000 .000 .000 .000 .000 .000 .001

N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 ** La corrélation est significative au niveau 0.01. * La corrélation est significative au niveau 0.05.

117

.-

Page 133: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Conclusion

Au terme de cette analyse des résultats du troisième chapitre, issus des données

quantitatives, nous rappelons que ces résultats relèvent de l'échantillon général, et que

nous ne revenons que sur des aspects qui nous permettent d'avoir une vision globale de

ces derniers.

D'abord, les statistiques globales des erreurs d'orthographe examinées dans cette étude

montrent que l'intervalle regroupant le plus grand nombre d'élèves, soit 23 %, se situe

entre 11 et 20 erreurs. La moyenne des erreurs est de 31,33 pour un texte de 126 mots.

Ensuite, en présentant la moyenne des erreurs par catégorie, il apparait, comme l'avaient

déjà montré nombre d'études, que la moyenne des erreurs morphogrammiques

(grammaticale et lexicale) est la plus élevée, soit 12,53. Elle est suivie de la moyenne des

erreurs phonogrammiques avec 11,68. La moyenne des erreurs non fonctionnelles est la

plus faible avec 0,35.

Les graphiques de ces différentes variables montrent de façon générale qu'une grande

concentration de sujets se situe autour de la moyenne, la montée de la courbe se fait de

manière abrupte, alors que sa descente est plus progressive, ce qui révèle qu'il y a peu

d'élèves ayant commis un nombre réduit d'erreurs, les sujets assez rapidement se

regroupant autour de la moyenne puis s'en éloignant progressivement.

En comparant les moyennes des variables sexe, il apparait que les filles commettent

moins d'erreurs d'orthographe que les garçons en dictée. Le test statistique dont le seuil

118

Page 134: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

est fixé à 0,05 montre des écarts significatifs pour les erreurs de types phonétique et

morphogrammique.

Nous avons également comparé les moyennes selon les niveaux d'enseignement des

sujets. Il ressort que les élèves de 3e s'en sortent mieux en orthographe que leurs cadets

de 6e. Les moyennes des deux groupes sont significativement différentes pour toutes les

catégories, sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas

de différence significative (0,240 en 6e et 0,223 en 3e).

Enfin, nous avons présenté les corrélations observées entre les différentes variables. Il

apparait que celles-ci sont assez élevées variant de 0,40 à 0,97, sauf la catégorie des

erreurs non fonctionnelles qui ne semble pas être en lien avec les autres catégories.

Nous présentons, dans le chapitre subséquent, le deuxième volet des résultats de notre

étude.

119

Page 135: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

CHAPITRE IV

ANALYSE DES DONNEES QUALITATIVES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTACOGNITIF

Dans ce chapitre, nous procédons à l'analyse des données qualitatives issues de

l'entretien métacognitif au cours duquel les élèves ont pu expliquer leurs choix

graphiques après la dictée. Rappelons que notre échantillon est de 59 élèves de 6e et de 3e

de lycées et collèges du Gabon.

Après avoir précisé de nouveau certains aspects méthodologiques, nous examinons

d'abord les perceptions des élèves, ensuite celles des enseignants sur les habiletés

orthographiques de leurs élèves, et enfin, l'opinion des élèves quant à la difficulté de

l'orthographe française. Nous présentons par la suite les stratégies d'ordre général qu'ils

mettent en place en situation d'écriture, d'une part, et celles qui sont en relation avec les

sous-systèmes de l'orthographe, d'autre part. La comparaison des moyennes des élèves

forts et des élèves faibles, et celle des stratégies déclarées par ces mêmes élèves (forts et

faibles) bouclent ce chapitre.

1.' Rappel des buts de l'entretien

Comme le dit Jaffié (1999), l'objectif général de l'entretien métagraphique est de donner

à l'élève l'opportunité d'expliquer ses choix graphiques. C'est dans cette perspective que

nous avons organisé des entretiens métacognitifs auprès d'un petit nombre d'élèves

choisis parmi tous ceux qui ont participé à notre étude.

120

Page 136: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

De manière plus spécifique, nous voulions, au cours de ces entretiens, cerner les

perceptions des élèves à l'égard de leur compétence orthographique; recueillir leur

opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe; faire l'inventaire des stratégies

générales auxquelles ils recourent en situation d'écriture (rédaction ou dictée); et enfin,

faire l'inventaire des stratégies spécifiques qu'ils emploient en lien avec les différents

sous-systèmes de l'orthographe, soit les phonogrammes, les morphogrammes

(grammaticaux et lexicaux), les idéogrammes et les logogrammes. Mais comment se sont

déroulés ces entretiens métagraphiques?

1.1. Rappel des modalités méthodologiques et du protocole d'entretien

L'entretien comportait deux étapes.

La première consistait à poser aux élèves six questions réparties en trois blocs. Le

premier bloc comprend deux questions (1 et 2) d'ordre général portant sur les perceptions

des élèves quant au niveau de difficulté de l'orthographe française et leur propre maitrise

de cette orthographe. Ces questions avaient pour but de mettre l'élève à l'aise et de mieux

connaître sa relation avec l'orthographe française.

Le deuxième bloc comprend également deux questions (3 et 4) qui portent sur les

stratégies générales qui pourraient être mobilisées en situation d'écriture.

Le troisième bloc enfin, comprenant lui aussi deux questions (5 et 6), se focalise sur

l'identification des rubriques que les élèves trouvent plus difficiles en orthographe

(conjugaison, accord du sujet, accord du verbe, accord du participe passé, etc.).

121

Page 137: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

La deuxième étape de l'entretien porte spécifiquement sur des mots de la dictée et amène

les élèves à verbaliser sur leur manière d'orthographier. Le questionnaire utilisé est centré

sur les problèmes liés aux sous-systèmes de l'orthographe. Dix questions ont été posées

aux élèves pour examiner ces problèmes répartis en quatre groupes :

A. Les phonogrammes (2 questions)

B. Les morphogrammes grammaticaux (4 questions)

C. Les morphogrammes lexicaux (2 questions)

D. Les logogrammes (2 questions)

Pour plus de détail sur cette étape de l'entretien, le lecteur voudra bien se référer au

chapitre II sur la méthodologie.

Nous mettons en annexe quelques extraits de l'entretien métagraphique et présentons,

dans la section ci-dessous, les caractéristiques des sujets ayant participé à l'entretien.

2. Rappel des caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint

Afin de bien interpréter les résultats de l'entretien métacognitif mené auprès de notre

échantillon restreint et, surtout, de vérifier s'il est possible de généraliser ces résultats à

notre échantillon complet, nous rappelons les caractéristiques des 59 élèves rencontrés

individuellement, puis les comparons à celles des 724 élèves n'ayant fait que la dictée.

Voici d'abord les caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint.

122

Page 138: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 23

Caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint

Sexe Provenance Niveau scolaire Garçon Fille Libreville Province 6e 3e

Nombre 26 33 29 30 29 30 Pourcentage 44,06 55,93 49,15 50,84 49,15 50,84

On constate que notre échantillon restreint compte plus de filles que de garçons. Par

contre, la provenance et le niveau scolaire ne présentent presque pas de différence : on

note une différence d'un seul sujet de part et d'autre. Qu'en est-il de l'échantillon

complet?

Tableau 24 Caractéristiques des élèves de l'échantillon complet

Sexe Provenance Niveau scolaire Garçon Fille Libreville Province 6e 3e

Nombre 384 399 393 390 432 351 Pourcentage 49,04 50,95 50,19 49,80 55,17 44,82

En ce qui concerne le sexe pour le grand échantillon, les filles sont légèrement plus

nombreuses que les garçons (51 % contre 49 %). Les élèves de Libreville sont légèrement

plus nombreux que ceux de l'intérieur du pays (50,19 % contre 49,80 %). Quant au

niveau scolaire, nous constatons que les élèves de 6e sont plus nombreux que ceux de 3 e

(55,17% contre 44,82%).

Au regard de ce qui précède, nous pouvons dire que notre échantillon restreint ressemble

d'assez près à l'échantillon complet avec quelques différences non marquées. Sur le plan

de la provenance, les chiffres sont à peu près les mêmes. L'échantillon complet présente

un petit écart quant au nombre d'élèves de 6e et ceux de 3e alors que dans l'échantillon

restreint les deux groupes s'équivalent. Sur le plan du sexe, l'échantillon complet

123

Page 139: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

présente sensiblement le même pourcentage entre les filles et les garçons, tandis que dans

l'échantillon restreint on compte environ 11 % de filles de plus que de garçons.

Ces constats nous amènent quand même à interpréter les données issues de l'entretien

métagraphique avec prudence quand à leur généralisation possible, étant donné les

quelques écarts entre les deux groupes de sujets.

3. Sélection des élèves pour l'entretien métagraphique

Pour les fins de l'entretien métagraphique, nous avions demandé aux enseignants de

choisir des élèves forts et des élèves faibles dans leur classe. Afin de vérifier si ces élèves

étaient effectivement forts et faibles, nous avons examiné les résultats qu'ils ont obtenus

pour la dictée. Nous constatons qu'ils ont fait en moyenne 22,12 erreurs. Or, les élèves de

notre échantillon complet ont, pour leur part, commis en moyenne 31,33 erreurs. Les

sujets qui ont participé à l'entretien métagraphique seraient donc dans l'ensemble plus

forts peu rapport aux sujets du grand échantillon. Cette différence nous incite encore à la

prudence quant à la généralisation des résultats obtenus à l'entretien métagraphique.

Nous avons répartis les élèves ayant participé à l'entretien métagraphique en cinq

groupes autour de la moyenne des erreurs comme le montre le tableau suivant.

124

Page 140: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 24 Classement des élèves selon la moyenne du groupe (22,12 erreurs)

Très forts Forts Moyens Faibles Très faibles

Nombre d'erreurs 1-5 6-10 11-25 26-40 41-81 Nombre d'élèves 5 13 23 10 8 Pourcentage d'élèves 8,5 % 2 2 % 39% 17% 13,5 %

Ce classement révèle que cet échantillon restreint a une distribution plutôt normale et

n'est pas divisé en deux groupes contrastés (forts et faibles) comme ce qui avait été

demandé initialement aux enseignants. En effet, la plus grande proportion des élèves

ayant pris part à l'entretien métacognitif, soit 39 %, revient aux élèves se situant autour

de la moyenne générale de l'échantillon restreint. Nous examinerons plus loin la justesse

de l'évaluation des enseignants quant à la compétence de leurs élèves en orthographe.

Même si nous avions demandé aux enseignants de répartir les élèves en deux groupes,

soit les forts et les faibles, conformément aux résultats que nous avons effectivement

obtenus, nous retiendrons désormais trois catégories d'élèves : 1. les très forts et les forts;

2. les moyens; 3. les faibles et les très faibles.

Notons aussi que, en raison des objectifs de notre recherche, nous n'analyserons à

certains moments que les résultats des élèves appartenant aux catégories 1 et 3, soit les

très forts et forts ou encore les faibles et très faibles.

4. Perception de la compétence orthographique des élèves

Voyons maintenant comment les élèves évaluent leur compétence orthographique,

comment les enseignants évaluent la compétence orthographique de leurs élèves et,

125

Page 141: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

surtout, comment ces évaluations sont conformes ou non aux résultats obtenus pour la

dictée.

4.1. Perception des élèves à l'égard de leur compétence orthographique

Pendant l'entretien métagraphique, nous avons posé aux élèves la question suivante :

« Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe?». L'objectif poursuivi était de

savoir ce que l'élève pense de lui-même en orthographe, quel rapport il entretient avec

l'orthographe.

Voici les données que nous avons obtenues pour les élèves très forts et forts :

Tableau 26

Perception des élèves très forts et forts à l'égard de leur compétence orthographique

Elève Perception de l'élève

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'élève

31 Fort 3 'Très fort Estimation juste 43 Fort 4 Très fort Estimation juste 46 Fort 1 Très fort Estimation juste 1 Fort 7 Fort Estimation juste 2 Fort 7 Fort Estimation juste 5 Fort . 7 Fort Estimation juste 19 Fort 9 Fort Estimation juste 23 Fort 8 Fort Estimation juste 10 Moyen 3 Très fort Sous-estimation 15 Moyen 4 Très fort Sous-estimation 12 Moyen 10 Fort Sous-estimation 30 Moyen 9 Fort Sous-estimation 39 Moyen 6 Fort Sous-estimation 47 Moyen 6 Fort Sous-estimation 48 Moyen 10 Fort Sous-estimation 50 Moyen 9 Fort Sous-estimation 57 Moyen 6 Fort Sous-estimation 6 Faible 8 Fort Sous-estimation

Nbre Forts = 8 Moyens = 9 Faibles = 1

18 Surestimation = 0 Estimation juste = 8 Sous-estimation = 10

126

Page 142: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves sont forts au regard des résultats de la dictée,

alors que seulement 8 se percevaient forts. Ainsi, chez les élèves très forts et forts, nous

constatons que 8 élèves ont une estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe

et 10 d'entre eux se sous-estiment.

Voyons maintenant ce qu'il en est de la perception des élèves moyens quant à leur

compétence orthographique.

Tableau 27

Perception des élèves moyens à l'égard de leur compétence orthographique

Elève Perception de l'élève

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'élève

3 Fort 14 Moyen Surestimation 7 Fort 14 Moyen Surestimation 16 Fort 11 Moyen Surestimation 17 Fort 14 Moyen Surestimation 24 Fort 11 Moyen Surestimation 25 Fort 22 Moyen Surestimation 26 Fort 12 Moyen Surestimation 38 Fort 13 Moyen Surestimation 42 Fort 19 Moyen Surestimation 51 Fort 21 Moyen Surestimation 58 Fort 18 Moyen Surestimation 11 Moyen 12 Moyen Estimation juste 54 Moyen 16 Moyen Estimation juste 4 Faible 23 Moyen Sous-estimation 8 Faible 20 Moyen Sous-estimation 9 Faible 15 Moyen Sous-estimation

20 Faible 12 Moyen Sous-estimation 28 Faible 23 • Moyen Sous-estimation 29 Faible 15 Moyen Sous-estimation 34 Faible 25 Moyen Sous-estimation 35 Faible 19 Moyen Sous-estimation 49 Faible 13 Moyen Sous-estimation 53 Faible 22 Moyen Sous-estimation

Nbre Forts = 11 Moyens = 2 Faibles = 10

23 Surestimation = 11 Estimation juste = 2 Sous-estimation = 10

127

Page 143: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

À la lecture de ce tableau, nous constatons que 23 élèves sont moyens. Parmi eux, 11 se

surestiment, 10 se sous-estiment et seulement 2 élèves font une estimation juste de leurs

propres habiletés en orthographe. Enfin, qu'en est-il chez les élèves faibles et très faibles?

Tableau 28

Perception des élèves faibles et très faibles à l'égard de leur compétence orthographique

Elève Perception de l'élève

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'élève

33 Fort 68 Très faible Surestimation 32 Fort 28 Faible Surestimation 52 Moyen 50 Très faible Surestimation 22 Moyen 81 Très faible Surestimation 27 Moyen 27 Faible Surestimation 44 Moyen 26 Faible Surestimation 14 Faible 57 Très faible Estimation juste 18 Faible 47 Très faible Estimation juste 37 Faible 62 Très faible Estimation juste 45 Faible 57 Très faible Estimation juste 56 Faible 59 Très faible Estimation juste 13 Faible 37 Faible Estimation juste 21 Faible 40 Faible Surestimation 36 Faible 29 Faible Estimation juste 40 Faible 33 Faible Estimation juste 41 Faible 34 Faible Estimation juste 55 Faible 36 Faible Estimation juste 59 Faible 33 Faible Estimation juste

Nbre Forts = 2 Moyens = 4 Faibles = 12

18 Surestimation = 7 Estimation juste = 11 Sous-estimation = 0

Il ressort de ce tableau que 18 élèves sont faibles ou très faibles. Parmi eux, 11 ont une

estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe et 7 se surestiment.

Nous allons par la suite comparer les perceptions des élèves et leur compétence réelle en

orthographe.

128

Page 144: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 29 Perception des élèves et compétence réelle en orthographe

Perception de l'élève Justesse de la perception de l'élève Résul­

tats pour la dictée

Fort Moyen Faible Surestimation Estimation juste

Sous-estimation

Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts

8 44% 9 50% 1 6% 0 0% 8 44% 10 56%

Elèves moyens

11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 % 11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 %

Elèves faibles ou très faibles

2 11% 4 22% 12 67% 7 39% 11 6 1 % 0 0 %

Tous les élèves

21 36% 15 2 5 % 23 39% 18 30% 21 36% 20 99%

L'examen du tableau synthèse ci-dessus nous amène à constater que les élèves très forts

ou forts ont tendance à se sous-estimer, et cela, dans une proportion assez importante (56

%). Cependant, 44 % ont une perception juste de leurs habiletés en orthographe.

Pour ce qui est des élèves moyens, la tendance est à la surestimation ou à la sous-

estimation de leurs propres habiletés en orthographe, soit 48 % et 43 %.

Quant aux élèves faibles ou très faibles, on constate qu'un grand nombre d'entre eux ont

une estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe (61 %) et qu'ils ont

également tendance à se surestimer (39 %).

De manière générale, nous constatons donc une variation dans l'auto-évaluation des

élèves en orthographe selon le niveau d'habileté. Les élèves très forts et forts ont souvent

129

Page 145: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

De manière générale, nous constatons donc une variation dans l'auto-évaluation des

élèves en orthographe selon le niveau d'habileté. Les élèves très forts et forts ont souvent

tendance à se sous-estimer. On constate que les élèves moyens se déclarent eux-mêmes

rarement moyens et qu'ils ont plutôt une forte tendance à la surestimation ou à la sous-

estimation. Par contre, les élèves faibles et très faibles ont une perception relativement

bonne d'eux-mêmes en orthographe, même si plusieurs se surestiment également. Si on

ne retient que les deux extrêmes, on peut dire que les élèves faibles se reconnaissent

généralement comme faibles alors que les forts sont plus ambivalents, s'auto-évaluant

moins souvent justement et ayant plus souvent tendance à la sous-estimation.

4.2. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique de

leurs élèves

Pour choisir les élèves de l'échantillon restreint, nous avions demandé aux enseignants

d'identifier les élèves forts et les élèves faibles. Qu'en est-il de la perception des

enseignants à l'égard de la compétence orthographique de leurs élèves?

130

Page 146: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 30 Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves

très forts et forts

Elève Perception de

l'enseignant

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'enseignant

46 Fort 1 Très fort Estimation juste 31 Fort 3 Très fort Estimation juste 10 Fort 3 Très fort Estimation juste 43 Fort 4 Très fort Estimation juste 15 Fort 4 Très fort Estimation juste 47 Fort 6 Fort Estimation juste 39 Fort 6 Fort Estimation juste 57 Fort 6 Fort Estimation juste 1 Fort 7 Fort Estimation juste 2 Fort 7 Fort Estimation juste 5 Fort 7 Fort Estimation juste 6 Fort 8 Fort Estimation juste 23 Fort 8 Fort Estimation juste 30 Fort 9 Fort Estimation juste 50 Fort 9 Fort Estimation juste 12 Fort 10 Fort Estimation juste 19 Faible 9 Fort Sous-estimation 48 Faible 10 Fort Sous-estimation

Forts = 16 Faibles = 2

18

Surestimation = 0 Estimation juste = 16 Sous-estimation = 2

Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves ont un statut très fort ou fort d'après leurs

résultats à la dictée. Leurs enseignants font 16 fois sur 18 une estimation juste des

habiletés de ces élèves en orthographe et seulement 2 d'entre eux sous-estiment leurs

élèves. Que disent-ils des élèves moyens?

131

Page 147: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 31

Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves

moyens

Elève Perception de l'enseignant

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'enseignant

16 Fort 11 Moyen Surestimation 24 Fort 11 Moyen Surestimation 20 Fort 12 Moyen Surestimation 26 Fort 12 Moyen Surestimation 11 Fort 12 Moyen Surestimation 38 Fort 13 Moyen Surestimation 3 Fort 14 Moyen Surestimation 7 Fort 14 Moyen Surestimation 17 Fort 14 Moyen Surestimation 9 Fort 15 Moyen Surestimation 54 Fort 16 Moyen Surestimation 58 Fort 18 Moyen Surestimation 42 Fort 19 Moyen Surestimation 8 Fort 20 Moyen Surestimation

51 Fort 21 Moyen Surestimation 53 Fort 22 Moyen Surestimation 25 Fort 22 Moyen Surestimation 4 Fort 23 Moyen Surestimation 34 Fort 25 Moyen Surestimation 49 Faible 13 Moyen Sous-estimation 29 Faible 15 Moyen Sous-estimation 35 Faible 19 Moyen Sous-estimation 28 Faible 23 Moyen Sous-estimation

Forts = 19 Faibles = 4 23

Surestimation = 19 Estimation juste = 0 Sous-estimation = 4

Nous constatons à la lecture de ce tableau que 23 élèves ont un statut moyen d'après leurs

résultats de la dictée. Les enseignants font 19 fois sur 23 une surestimation des habiletés

de ces élèves en orthographe et 4 d'entre eux les sous-estiment. Qu'en est-il des élèves

faibles?

132

Page 148: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 32 Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves

faibles et très faibles

Elève Perception de

l'enseignant

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Justesse de la perception de l'enseignant

32 Fort 28 Faible Surestimation 59 Fort 33 Faible Surestimation 55 Fort 36 Faible Surestimation 18 Fort 47 Très faible Surestimation 56 Fort 59 Très faible Surestimation

'33 Fort 68 Très faible Surestimation 44 Faible 26 Faible Estimation juste 27 Faible 27 Faible Estimation juste 36 Faible 29 Faible Estimation juste 40 Faible 33 Faible Estimation juste 41 Faible 34 Faible Estimation juste 13 Faible 37 Faible Estimation juste 21 Faible 40 Faible Estimation juste 52 Faible 50 Très faible Estimation juste 14 Faible 57 Très faible Estimation juste 45 Faible 57 Très faible Estimation juste 37 Faible 62 Très faible Estimation juste 22 Faible 81 Très faible Estimation juste

Forts = 6 Faibles = 12 18

Surestimation = 6 Estimation juste = 12 Sous-estimation = 0

Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves ont un statut très faible ou faible d'après leurs

résultats de la dictée. Leurs enseignants font 12 fois sur 18 une estimation juste des

habiletés de ces élèves en orthographe et seulement 6 d'entre eux les surestiment.

Le tableau suivant résume les données relatives à la perception des enseignants quant à la

compétence orthographique de leurs élèves.

133

Page 149: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 33 Perception des enseignants à l'égard de la compétence réelle des élèves en

orthographe

Perception de l'enseignant Justesse de la perception de l'enseignant Résultats pour la dictée

Fort Moyen Faible Surestima­tion

Estimation juste

Sous-estimation

Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts

16 89 % 0 0 % 2 1 1 % 0 0% 16 89% 2 1 1 %

Elèves moyens

19 8 3 % 0 0 % 4 17% 19 8 3 % 0 0% 4 17%

Elèves faibles ou très faibles

6 3 3 % 0 0 % 12 6% 6 3 3 % 12 67% 0 0 %

Tous les élèves

41 69% 0 0 % 18 30% 25 4 2 % 28 47% 6 10%

Nous constatons à la lecture du tableau ci-dessus que les enseignants ont une perception

relativement bonne de leurs élèves forts et très forts en orthographe. Sur 18 élèves forts et

très forts, les enseignants font 16 estimations justes des habiletés de leurs élèves (soit

88,88 %), seulement 2 sous-estimations et aucune surestimation.

De même, dans le cas des élèves faibles et très faibles, les enseignants font 12 estimations

justes de leurs habiletés en orthographe sur 18 (soit, 66,66 %), 6 surestimations et aucune

sous-estimation.

Par contre, chez les élèves moyens, les perceptions des enseignants sont erronées dans

une proportion importante (19 surestimations sur 23, soit 82,60 %).

134

Page 150: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Par contre, chez les élèves moyens, les perceptions des enseignants sont erronées dans

une proportion importante (19 surestimations sur 23, soit 82,60 %).

Les enseignants semblent donc avoir plus de facilité à bien évaluer les élèves qui ont un

rendement contrasté, puisqu'ils arrivent plus souvent à distinguer les forts et les faibles,

groupes d'élèves qui se démarquent naturellement en classe.

Leur difficulté à reconnaître les moyens tient sans doute, en partie tout au moins, à la

consigne qui leur a été donnée de choisir seulement des forts et des faibles. Certains

enseignants ont même affirmé, lors de la sélection des sujets de l'entretien, ne pas avoir

de véritables forts en orthographe, ce qui laisse supposer qu'ils ont dû choisir parmi le

bassin des moyens. En tout état de cause, en dépit du la consigne donnée, on peut dire

que les enseignants ont de la peine à évaluer justement le rendement des élèves moyens.

5. Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe

Dans le souci d'avoir une idée plus précise sur le rapport de l'élève à l'orthographe, nous

avions posé, lors de notre entretien, une question (Q.3) liée au degré de difficulté de

l'orthographe. Cette question sur l'opinion de l'élève en orthographe est formulée de la

manière suivante : « Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? ».

Certains pensent que l'orthographe est facile (1), moyennement facile (2) et d'autres la

trouvent difficile (3). Le tableau ci-après donne les proportions de leurs déclarations.

135

Page 151: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 34 Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe

en fonction de leur niveau d'habileté

Opinion des élèves Résultats

pour la dictée Facile Moyennement

facile Difficile

Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts

12 6 7 % 2 1 1 % 4 22%

Elèves moyens 13 56,52 % 1 4,5 % 9 39% Elèves faibles ou très faibles

7 39% 2 1 1 % 9 50%

Tous les élèves 32 54 % 5 8% 22 37%

Il ressort de ce tableau que, dans l'ensemble, plus de la moitié des élèves interrogés, soit

54 %, trouvent l'orthographe facile, en dépit des résultats plutôt faibles relevés dans

l'échantillon. Nous pensons que, par sentiment de désirabilité sociale, ils voulaient

projeter une image positive d'eux-mêmes auprès du chercheur. Il estpossible aussi que

les sujets croient vraiment que l'orthographe française est plutôt facile, auquel cas ils

n'auraient pas une perception juste de cet objet d'apprentissage surtout quand on

considère leur rendement plutôt faible.

Pour mieux apprécier leurs points de vue sur le degré de difficulté de l'orthographe, nous

avons comparé les élèves en fonction de leur niveau d'habileté (forts, faibles et moyens).

Les élèves forts ont un point de vue relativement cohérent avec leur bon rendement. Sur

18 élèves, 12 pensent que l'orthographe française est facile, soit 67 %; 2 élèves pensent

qu'elle est moyennement difficile et 4 estiment qu'elle est difficile, soit 22 %. Qu'en est-

il des élèves faibles?

Chez les élèves faibles, les points de vue sont plus dispersés. Sur 18 élèves, 7 pensent que

l'orthographe française est facile, soit 39 %; 9 élèves la trouvent difficile, soit 50 %, alors

que seulement 2 élèves pensent qu'elle est moyennement difficile, soit 11 %. Nous

constatons qu'une moitié des élèves faibles reconnaît que l'orthographe est difficile, ce

136

Page 152: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

qui est conforme à leur rendement. Mais l'autre moitié présente un avis qui n'est pas

véritablement en relation avec leur rendement en orthographe.

Pour ce qui est des élèves moyens, leur position face au degré de difficulté de

l'orthographe est plus tranchée. Sur 23 élèves, 13 pensent que l'orthographe française est

facile, soit 56 %, 9 estiment qu'elle est difficile, soit 39 %, alors qu'un seul élève pense

qu'elle est moyennement facile, soit 4,5 %. L'ambivalence de leur opinion tient peut-être

à leur rendement mitigé, ni fort ni faible. On aurait pu aussi s'attendre à plus d'avis

favorables étant donné que les élèves moyens arrivent quand même à s'en sortir avec

l'orthographe.

En définitive, de manière générale, les perceptions des élèves sur le degré de difficulté en

orthographe ne sont pas justes. Plus de la moitié estiment que l'orthographe française est

facile (55,17 %), alors que leurs résultats à la dictée sont plutôt faibles.

Contrairement à nos sujets qui considèrent majoritairement l'orthographe française facile,

des spécialistes comme Catach (1980) et Goosse (1995) affirment pourtant que

l'orthographe française est compliquée et difficile à maitriser.

De même au Québec, dans une enquête menée par Simard (1994) sur la réforme de

l'orthographe, bon nombre d'enseignants de français considèrent que :

L'orthographe française est difficile, tant sur le plan lexical que sur le plan grammatical. Fortement corrélées (r = 0,60, p = 0,0001), les deux dimensions de l'orthographe sont évaluées à peu près de la même façon, sauf qu'on peut noter que l'orthographe grammaticale suscite un plus haut taux de réponses « très difficile» (16,1 % comparativement à 7,7 pour l'orthographe lexicale), (p. 299).

En France, un sondage publié dans la revue Lire, cité par Simard (1994), a, elle aussi

révélé que la population française en général juge difficiles l'orthographe française et la

grammaire du français, et ce, dans une proportion plus forte que pour le groupe

d'enseignants québécois (environ 70 %).

137

Page 153: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Il conviendrait que les élèves gabonais aient une perception plus juste de l'orthographe

française à travers l'enseignement qu'ils reçoivent, ce qui probablement les amènerait à

s'investir davantage dans l'apprentissage de cet objet complexe.

6. Relation entre la perception des élèves de leur compétence orthographique, leur opinion face à la difficulté de l'orthographe et leurs résultats à la dictée

Le tableau suivant compare, pour tous les élèves ayant participé à l'entretien, leur propre

évaluation de leur rendement orthographique avec leur opinion sur le niveau de difficulté

de l'orthographe en tenant compte de leurs résultats à la dictée.

Tableau 35

Compétence des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe (liste de tous les élèves)

Elève Perception de l'élève

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Opinion de l'élève sur l'orthographe

1 Fort 7 Fort Facile 2 Fort 7 Fort Facile 3 Fort 14 Moyen Facile 4 Faible 23 Moyen Difficile 5 Fort 7 Fort Facile 6 Faible 8 Fort Difficile 7 Fort 14 Moyen Difficile 8 Faible 20 Moyen Difficile 9 Faible 15 Moyen Facile 10 Moyen 3 Très fort Facile 11 Moyen 12 Moyen Difficile 12 Moyen 10 Fort Facile 13 Faible 37 Faible Difficile 14 Faible 57 Très faible Difficile 15 Moyen 4 Très fort Facile 16 Fort 11 Moyen Facile 17 Fort 14 Moyen Difficile 18 Faible 47 Très faible Difficile 19 Fort 9 Fort Facile 20 Faible 12 Moyen Facile 21 Faible 40 Faible Difficile

138

Page 154: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Elève Perception de l'élève

Nombre d'erreurs

Résultat pour la dictée

Opinion de l'élève sur l'orthographe

22 Moyen 81 Très faible Facile 23 Fort 8 Fort Facile 24 Fort 11 Moyen Moyennement 25 Fort 22 Moyen Facile 26 Fort 12 Moyen Facile 27 Moyen 27 Faible Difficile 28 Faible 23 Moyen Facile 29 Faible 15 Moyen Difficile 30 Moyen 9 Fort Difficile 31 Fort 3 Très fort Facile 32 Fort 28 Faible Moyennement 33 Fort 68 Très faible Facile 34 Faible 25 Moyen Difficile 35 Faible 19 Moyen Difficile 36 Faible 29 Faible Facile 37 Faible 62 Très faible Moyennement 38 Fort 13 Moyen Facile 39 Moyen 6 Fort Facile 40 Faible 33 Faible Difficile 41 Faible 34 Faible Facile 42 Fort 19 Moyen Facile 43 Fort 4 Très fort Moyennement 44 Moyen 26 Faible Difficile 45 Faible 57 Très faible Difficile 46 Fort 1 Très fort Difficile 47 Moyen 6 Fort Facile 48 Moyen 10 Fort Moyennement 49 Faible 13 Moyen Difficile 50 Moyen 9 Fort Facile 51 Fort 21 Moyen Facile 52 Moyen 50 Très faible Facile 53 Faible 22 Moyen Facile 54 Moyen 16 Moyen Facile 55 Faible 36 Faible Facile 56 Faible .59 Très faible Facile 57 Moyen 6 Fort Difficile 58 Fort 18 Moyen Facile 59 Faible 33 Faible Difficile

Les données du tableau ci-dessus se retrouvent synthétisées dans le tableau suivant, qui

regroupe les élèves forts, moyens et faibles.

139

Page 155: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 36

Rendement des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe

Perception de l'élève à l'égard de sa compétence orthographique

Opinion de l'élève sur le degré de difficulté de l'orthographe

Résultats pour la dictée

Fort Moyen Faible Facile Moyen­nement facile

Difficile

Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts

8. 44% 9 50% 1 6 % 12 67% 2 1 1 % 4 22%

Elèves moyens 11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 % 13 57 % 1 4 % 9 39% Elèves faibles ou très faibles

2 1 1 % 4 22% 12 67% 7 39% 2 1 1 % 9 50%

Tous les élèves 21 36% 15 2 5 % 23 39% 32 54% 5 8% 22 37%

Ce tableau nous montre que les perceptions des élèves quant à leur compétence

orthographique ne cadrent pas totalement avec leurs compétences réelles ni avec leurs

opinions sur le degré de difficulté de l'orthographe.

Sur 18 élèves forts en orthographe, 8 seulement estiment l'être, soit 44 %. Par contre, leur

jugement quant au degré de difficulté de l'orthographe est plus conforme à leurs résultats,

67 % la voyant facile.

Les élèves moyens ont des perceptions très peu justes de leur rendement orthographique,

soit 9 % de bonne estimation, et un jugement sur le degré de difficulté de l'orthographe

plutôt mitigé, 39 % la trouvant difficile et 57 % facile.

140

Page 156: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Par contre, les élèves faibles ont une bonne perception à l'égard de leur compétence en

orthographe, soit 67 %; ce qui n'est pas le cas de leur jugement quant au degré de

difficulté de cette même orthographe puisqu'ils la jugent facile dans une proportion de 39

% malgré leurs faiblesses.

7. Les stratégies déclarées

Dans cette section, nous examinons la nature et la fréquence des différentes stratégies que

les élèves déclarent utiliser dans des situations orthographiques. Cette analyse nous

permettra de compléter les données quantitatives relevées dans le chapitre III

relativement à l'ensemble de l'échantillon, et de mieux comprendre le comportement

orthographique de nos sujets.

En lisant le verbatim des entretiens et en nous référant à des auteurs qui se sont intéressés

aux stratégies orthographiques (Olivier, 1989; Brissaud et Bessonnat, 2001; Brissaud,

2002; Fayol et Jaffré, 2008), nous avons pu relever une trentaine de stratégies chez nos

sujets. Nous avons ainsi travaillé à partir d'une grille de codage mixte, c'est-à-dire

composée en fonction des écrits scientifiques et des thèmes émergeant des déclarations

d'élèves.

Nous avons deux grandes catégories de stratégies : les stratégies d'ordre général, c'est-à-

dire celles qui ne portent pas sur des composantes précises de l'orthographe et que les

élèves disent employer au cours d'une dictée ou d'une rédaction, et les stratégies

spécifiques, celles qui sont directement liées aux sous-systèmes de l'orthographe sur

lesquels les sujets ont été précisément interrogés lors de l'entretien sur la dictée (les

phonogrammes, les morphogrammes, les logogrammes et les idéogrammes). Nous

donnons dans les pages suivantes la liste des stratégies et leurs codes.

141

Page 157: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

7.1. Liste des stratégies et grille de codage

Ainsi que nous l'avons signalé ci-dessus, notre grille comporte deux sections, la première

concerne les stratégies d'ordre général, la seconde, les stratégies spécifiques en lien avec

des sous-systèmes orthographiques.

7.1.1. Liste de stratégies d'ordre général

Pour les stratégies d'ordre général, nous avons posé deux questions aux élèves. La

première, formulée de la manière suivante : « Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est

écrit le plus correctement possible? », devait amener les élèves à indiquer des stratégies

pour la correction globale d'un texte ou d'une dictée (partie A du tableau 37). La

deuxième question, formulée comme suit : «Que fais-tu si tu as un problème

d'orthographe? », devait amener les élèves à indiquer des stratégies concernant la

correction d'un mot donné faisant problème (partie B du tableau 37).

142

Page 158: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 37 Stratégies générales (pour la correction de l'ensemble d'un texte ou la résolution

d'un problème relatif à un mot)

Code Stratégie Exemples de verbatim A- Pour la correction globale d'un texte composé ou d'une dictée

1. Vérifie les accords pendant qu'il écrit J'essaie de voir mes accords pendant que j'écris (Sujet 1).

2. Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois)

Je relis mon texte plusieurs fois en cherchant à voir le sens logique du texte. (Sujet 4). Après avoir rédigé, je relis mon texte. (Sujet 47).

3. Ne se relit pas C'est pendant que je rédige, parce que je ne me relis pas. (Sujet 3) Je ne me force pas souvent. Parfois je ne me relis même pas. (Sujet 49)

4. Fait appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et d'orthographe d'usage)

Je fais appel à toutes mes connaissances d'accord et d'orthographe d'usage. (Sujet 32)

5. Vérifie un certain nombre de points particuliers à la suite comme les accords, les verbes, l'accord du participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le genre, le nombre, la formation des mots

Je surveille d'abord les temps de verbes, les accords par rapport au sujet.(Sujet 7) Je regarde les sujets des verbes, la formation des mots, l'accord des participes passés, les lettres qui ne se prononcent pas (Sujet 38).

6. Essaie de tenir compte de la prononciation du professeur (en dictée)

J'écoute bien quand le prof va relire pour avoir la bonne orthographe. (Sujet 47) A ce niveau, il y a toujours des hésitations, mais on essaie d'écrire par rapport à la prononciation du prof. (Sujet 33).

7. Utilise un dictionnaire Je regarde le dictionnaire. (Sujet 20) Je cherche le mot dans un dictionnaire. (Sujet 34).

8. Suit son instinct [Devant un problème d'orthographe] je suis ce que me dit mon instinct. (Sujet 9) C'est venu comme ça. (Sujet 10).

9. N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction

Si c 'est en rédaction, je n 'utilise que les mots dont je suis sûr de l'orthographe. (Sujet 48)

10. N'emploie aucune stratégie particulière

[Pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible] je ne fais rien de spécial. (Sujet 6)

143

Page 159: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

B- Devant un mot donné 11. Laisse un vide (passe) puis revient à la

fin Je laisse un espace pour ne pas être en retard Je reviens à la fin de la dictée pendant la relecture pour bien réfléchir. (Sujet 50). Je laisse d'abord un espace pour ne pas perdre le fil de la dictée. Puis, je reviens à la fin de la dictée sur ce mot. (Sujet 43).

12. Écrit le mot puis y revient immédiatement

[Pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible] Je corrige les mots immédiatement. (Sujet 56).

13. Ecrit le mot puis y revient à la fin J'écris d'abord le mot et je reviens sur ça à la fin de la dictée. (Sujet 45).

14. Ecrit le mot de différentes manières et choisit celle qui semble la bonne

Quand j ' a i un problème en orthographe sur un mot, je l'écris de plusieurs manières jusqu'à voir celle qui correspond à la réalité. (Sujet 17) J'écris le mot plusieurs fois et je choisis par la suite la bonne orthographe. (Sujet 44).

15. Écrit le mot comme il l'entend J'écris le mot comme j'entends. (Sujet 14) J'écris comme j'entends, même si je ne connais pas le mot, j 'écris quand même. (Sujet).

16. Ecrit le plus simplement possible le mot sur lequel il hésite

J'écris le plus simplement possible les mots sur lesquels j ' a i des hésitations. (Sujet 41)

17. Réfléchit, se concentre pendant qu'il écrit dans le cas d'un mot difficile

Je réfléchis pendant que j'écris. (Sujet 24) Je réfléchis au même moment que je rédige mon texte, s'il y a un problème je le résous au même moment pour ne pas y revenir plus tard. (Sujet 59)

18. Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du mot, dérivation)

Je réfléchis sur l'origine du mot, sur son radical, etc. (Sujet 28)

19. Demande à un pair Je peux le passer à mon grand frère pour corriger. (Sujet 8) Quand j ' a i un problème d'orthographe, j'essaie de demander à ma camarade. (Sujet 36)

144

Page 160: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

7.1.2. Liste de stratégies d'ordre spécifique

Au cours de la seconde étape de l'entretien métagraphique, les élèves ont fait état d'un

certain nombre de stratégies devant des cas plus spécifiques en lien avec les sous-

systèmes de l'orthographe. Afin de distinguer facilement les stratégies qui sont liées aux

sous-systèmes des stratégies de la partie générale de l'entretien, nous avons utilisé des

codes supplémentaires. Les sous-systèmes concernés sont identifiés par des indicatifs

initiaux, soit la valeur 3 qui identifie les phonogrammes, 4 les morphogrammes

grammaticaux, 5 les morphogrammes lexicaux, 6 les idéogrammes et 7 les logogrammes.

Par exemple, la stratégie 320 est la stratégie 20 de la liste des stratégies spécifiques

(« Applique la règle d'usage devant/? et b »), le 3 étant l'indicatif des phonogrammes.

Voici la liste des stratégies déclarées liées aux sous-systèmes orthographiques avec les

codes retenus pour les identifier.

145

Page 161: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Tableau 38

Stratégies spécifiques aux différentes composantes du plurisystème de l'orthographe

Sous-système

Stratégie Exemples de verbatim

320 Applique la règle d'usage devant p et b

[Pour justifier la transcription du son [5] Ben...làj'applique la règle qui dit que n devant p devient m. (Sujet 1) C'est parce que le premier [o] est précédé de p. La règle dit que quand le son [ô] est placé avant les lettres p et b, alors [5] s'écrit om. (Sujet 24)

321 Justifie la graphie -ment par la classe grammaticale du mot (adverbe de manière en -ment) (cas des phonogrammes en [a])

Nerveusement est un adverbe en -ment qui s'écrit généralement m-e-n-t, alors que menaçants est un adjectif qualificatif. (Sujet 12) Nerveusement est un adverbe de manière qui s'écrit toujours en -ment, tandis que menaçants est un adjectif qualificatif, il s'écrit avec - ant parce qu 'il vient du verbe menacer. (Sujet 28)

422 Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur

Nue s'accorde avec la route qui est un nom féminin. C'est pourquoi nue prend e muet à la fin. (Sujet 2) [Pour l'accord de l'adjectif abruptes]. Disons que je l'accorde avec les montées. (Sujet 12)

423 Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet

Mordaient et bordaient, ces deux mots sont des verbes conjugués à l'imparfait de l'indicatif. Leurs sujets sont au pluriel. C'est pour cela que je les ai mis à la 3e personne du pluriel. (Sujet 12) Ah!... alors sur le plan de l'accord, les deux verbes sont à la troisième personne du pluriel, parce que leurs sujets sont au pluriel. Pour mordaient son sujet c 'est les roues de la Toyota,-pour bordaient le sujet c 'est les fonds noirs des précipices. (Sujet 2)

424 Accorde le verbe par la reconnaissance du sujet en posant la question qu 'est-ce qui?

Ici, on dit les roues de la Toyota mordaient ...dépose la question qu 'est-ce qui mordaient? Réponse : les roues. Donc, mordaient s'accorde avec les

146

Page 162: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

roues... (Sujet 1) 425 Justifie l'accord du participe passé

avec être par sa mise en relation avec le sujet

Le participe passé employé avec l'auxiliaire être s'accorde en genre et en nombre avec son sujet. Ici, nous avons un sujet pluriel (nous), donc basculés se met au pluriel. (Sujet 3)

426 Justifie l'accord du participe passé avec avoir par sa mise en relation avec le complément d'objet

Cas qui n'apparaît pas dans la dictée.

427 Justifie l'accord par la distinction de la catégorie grammaticale

Nue 5 'accorde avec la route parce que c 'est un adjectif qualificatif. (Sujet 53) C'est parce que le mot basculés est un participe passé employé avec l'auxiliaire être. // s'accorde en genre et en nombre avec son sujet. Ici, son sujet c 'est mes compagnons et moL Donc, le participe passé se met au pluriel. (Sujet 53)

428 Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une préposition) ou la position du mot (après un verbe conjugué, le second verbe est à l'infinitif)

[Pour justifier la terminaison er du verbe réprimer] C 'est parce qu 'il y a la préposition pour placée avant. (Sujet 4) C 'est à cause de la préposition pour. La règle dit que quand une préposition est placée avant un verbe, ce verbe se met à l'infinitif. (Sujet 9)

429 Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la terminaison erlé

Souvent quand j ' a i des difficultés à écrire ce genre de verbes, les verbes du premier groupe, je remplace ce verbe par un verbe du troisième groupe. (Sujet 5) Je l'ai écrit ainsi (à l'infinitif) parce quej 'ai essayé de le remplacer par le verbe faire, et ça a marché. La phrase devenait ...pour faire. Donc, je me suis dit que le verbe était à l'infinitif. (Sujet 17)

530 Recourt à la famille lexicale ou à la formation du mot

Périlleux. Je ne suis pas sûre de son orthographe. Je suis partie de son radical péril. (Sujet 50) Insupportable est formé du préfixe in-, de la racine support et du suffixe -able. (Sujet 7)

631 Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie, logogrammes)

On peut d'abord dire que ces deux mots sont des homonymes. Le premier mot, il s'agit du timbre vocal, il s'écrit v-o-i-x. Le deuxième mot, c 'est la route, lui, il

147

Page 163: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

s'écrit v-o-i-e. (Sujet 1 ) Je les écris différemment parce que ce sont des homonymes. Le premier mot fia boue) fait allusion à la terre pâteuse, alors que le deuxième mot (à bout) fait allusion au comportement des personnes, la nervosité. Je l'écris avec b-o-u-t (Sujet 2)

732 Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) (cas des idéogrammes)

C'est parce que d'abord, ce mot [toyota écrit avec t minuscule] est un nom commun de voiture. En plus, il est placé au milieu de la phrase... (Sujet 59) J'écris le mot toyota avec t minuscule parce qu 'il est placé au milieu de la phrase. C 'est une marque de voiture...la voiture est une chose. (Sujet 6)

7.2. Analyse des stratégies déclarées

Dans la section qui suit, nous allons présenter, au regard de cette grille, quelles sont les

stratégies déclarées par les' élèves et à quelle fréquence. Nous commençons par les

stratégies d'ordre général.

7.2.1. Analyse des stratégies d'ordre général

En vue de savoir comment pourraient procéder les élèves pour résoudre les problèmes

orthographiques de façon générale, nous leur avons posé deux questions. Ce sont les

réponses à ces questions que nous allons maintenant aborder.

Analyse des stratégies déclarées en lien avec la question « Que fais-tu pour t'assurer

que ton texte est écrit le plus correctement possible? »

En posant cette question très globale, nous voulions voir les différentes stratégies que

pourraient mobiliser les élèves pour orthographier correctement au cours de la production

d'un texte (rédaction, argumentation, etc.) ou au cours d'une dictée.

148

Page 164: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Nous présentons ci-dessous, par ordre de fréquence décroissante, les stratégies que les

sujets ont citées en réponse à cette question.

Tableau 39

Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu pour t'assurer que

ton texte est écrit le plus correctement possible? »

Rang Stratégie

Nbre

d'élèves

% d'élèves

(N= 59)

1 Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) 27 45,76 %

2 Vérifie les accords pendant qu'il écrit 14 23,73 %

3 Essaie de tenir compte de la prononciation du prof (en

dictée) 7 11,86%

4 Fait appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et

d'orthographe d'usage) 6 10,17

5 Utilise un dictionnaire 3 5,08 %

6 Suit son instinct 3 5,08 %

7 Ecrit le mot comme il l'entend 3 5,08 %

8 Vérifie un certain nombre de points particuliers à la

suite comme les accords, les verbes, l'accord du

participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le

genre, le nombre, la formation des mots

2 3,39 %

9 N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction 2 3,39 %

10 Ecrit le mot puis y revient à là fin 2 3,39 %

11. Ne se relit pas. 2 3,39 %

12 Laisse un vide (passe) puis revient à la fin 1 1,69%

13 Ecrit le plus simplement possible le mot sur lequel il

hésite

1 1,69%

14 Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du

mot, dérivation)

1 1,69%

15 Demande à un pair 1 1,69% Note. Le total des pourcentages ne donne pas 100 étant donné qu'un même élève a pu citer plus d'une stratégie et que certains élèves

n'ont cité aucune stratégie.

149

Page 165: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

À l'examen de ce tableau, il ressort que quatre stratégies générales ont été principalement

déclarées par les élèves (de 6 à 27 occurrences). Les autres stratégies n'ont été citées que

de une à trois fois, ce qui constitue une. occurrence vraiment trop réduite pour être

significative et faire l'objet d'un commentaire.

Parmi les stratégies les plus citées, la relecture apparait de loin comme la plus fréquente.

Environ la moitié des sujets (45,76 %) disent en effet l'utiliser. Cette stratégie est certes

importante, mais demeure très globale et ne permet pas de résoudre des problèmes

orthographiques précis. On peut en effet relire un texte sans pour autant détecter les

erreurs et les corriger. Nous verrons dans la section sur les stratégies spécifiques si nos

sujets pensent à utiliser des moyens de correction vraiment en lien avec des problèmes

orthographiques particuliers.

La deuxième stratégie la plus déclarée est « Vérifier les accords pendant qu 'il écrit »,

(23,73 %). L'indication de cette stratégie montre l'importance de la grammaire dans les

conduites orthographiques d'un certain nombre de sujets. On sait que les graphies

grammaticales sont responsables de la majorité des erreurs chez toutes les populations

confondues. Cette stratégie reste cependant générale et encore une fois on peut se

demander si elle suffit réellement à résoudre un problème orthographique d'accord en

raison de la variété des règles grammaticales particulières à respecter. Nous verrons dans

la section sur les stratégies spécifiques si les sujets disent employer des stratégies

relatives aux différentes règles d'accord (du verbe, du déterminant, de l'adjectif, du

participe passé).

La stratégie qui arrive en troisième position avec 11,86 % est « Essaie de tenir compte de

la prononciation du prof. ». En raison des écarts importants entre phonie et graphie en

français écrit, cette stratégie ne peut guère être efficace si nous considérons notamment le

cas très fréquent des lettres finales qui ne se prononcent pas sur le plan lexical (instinct)

150

Page 166: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

ou grammatical (les désinences verbales : ils parlent). La seule prononciation du

professeur ne peut certes pas venir à bout de ce problème.

La stratégie « Fais appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et d'orthographe

d'usage » se trouve en quatrième position avec seulement 6 occurrences (10,17 %). On

peut penser que l'élève, lorsqu'il orthographie, mobilise l'ensemble de ses connaissances

orthographiques, mais pour en être sûr, il faudrait savoir à quelles stratégies précises en

lien avec les différentes composantes de l'orthographe il peut penser. Nous pourrons

mieux répondre à cette question en examinant les résultats de la section sur les stratégies

spécifiques.

En conclusion, on constate d'abord que les stratégies générales les plus importantes que

cette question a suscitées concernent la relecture et la vérification des accords. Cependant

ces stratégies ne sont pas déclarées par une majorité de sujets, peu à peine la moitié pour

la première et par environ le quart pour la seconde. Les autres stratégies, même celles qui

arrivent en 3e et en 4e position que nous venons de commenter, montrent des occurrences

faibles et même très faibles (de 1 à 7 sur un total de 59 sujets). On pourrait affirmer que

les sujets interrogés ont à l'esprit un nombre limité de stratégies générales.

151

Page 167: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Analyse des stratégies déclarées en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un

problème en orthographe? »

En posant cette question, nous souhaitions que les élèves nous donnent les différentes

stratégies qu'ils pourraient mettre en place lorsqu'ils sont amenés à écrire un mot dont ils

ne maîtrisent pas l'orthographe. Au départ, 19 stratégies générales étaient possibles

d'après le tableau 37, mais trois n'ont eu aucune occurrence à cette question.

Tableau 40

Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un problème

en orthographe? »

Rang Stratégie

Nbre

d'élèves

% d'élèves

(N = 59)

1 Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) 11 18,64%

2 Laisse un vide (passe) puis revient à la fin 10 16,95 %

3 Écrit le mot comme il l'entend 9 15,25%

4 Essaie de tenir compte de la prononciation du prof (en

dictée) 6 10,17%

5 Ecrit le mot de différentes manières et choisit celle qui

semble la bonne 6 10,17%

6 Vérifie les accords pendant qu'il écrit 5 8,47 %

7 Réfléchit, se concentre pendant qu'il écrit dans le cas

d'un mot difficile

3 5,08 %

8 Écrit le mot et y revient immédiatement 3 5,08 %

9 Écrit le plus simplement possible le mot sur lequel il

hésite

2 3,39 %

10 N'emploie aucune stratégie particulière 1 1,69%

152

Page 168: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

11 Utilise un dictionnaire 1 1,69 %

12 N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction 1 1,69%

13 Ecrit le mot puis y revient à la fin 1 1,69%

14 Vérifie un certain nombre de points particuliers à la

suite comme les accords, les verbes, l'accord du

participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le

genre, le nombre, la formation des mots

1 1,69%

15 Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du

mot, dérivation)

1 1,69%

16 Demande à un pair 1 1,69% Note. Le total des pourcentages ne donne pas 100 étant donné qu'un même élève a pu citer plus d'une stratégie et que certains élèves

n'ont cité aucune stratégie.

Il ressort que les stratégies citées pour cette question présentent des occurrences plutôt

faibles, aucune ne dépassant 20 %.

Six stratégies ont enregistré des scores plus ou moins importants, allant de 5 à 11

occurrences. Ce sont ces stratégies que nous examinerons.

La stratégie « Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) » est la plus

déclarée par les élèves, mais seulement dans 18,64 % des cas. Cette stratégie apparaissait

déjà en première position pour la question précédente. Que cette stratégie soit citée à la

suite de l'une ou l'autre question s'explique aisément du fait que la relecture peut porter

sur l'ensemble ou sur une portion limitée du texte. Comme il a été dit plus haut, cette

stratégie de relecture ne donne pas suffisamment d'outils garantissant la résolution de

problèmes orthographiques précis.

153

Page 169: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

La stratégie « Laisse un vide (passe) puis revient » arrive en 2e position avec une

proportion quand même réduite de 16,95 %. Cette stratégie montre que certains élèves

peuvent se placer dans une situation de doute orthographique. Mais moins d'un

cinquième d'élèves l'ont citée.

La troisième stratégie la plus signalée par les élèves est la stratégie « Écrit le mot comme

il l'entend». Ainsi que nous l'avons expliqué ci-dessus, le recours à la prononciation

n'est pas toujours utile pour orthographier en français en raison des écarts marqués qui

existent entre l'oral et l'écrit. Une bonne discrimination auditive est essentielle pour

identifier la nature et la position des phonèmes à transcrire. Cependant, une fois les

phonèmes bien discriminés, la question de leur transcription reste entière, un même son

pouvant être écrit de différentes manières en français. Le problème est aggravé par les

nombreuses graphies morphologiques muettes dont il a été question plus haut.

La quatrième stratégie est la stratégie « Essaie de tenir compte de la prononciation du

professeur (en dictée) » (10,17 %). Cette stratégie renvoie encore une fois au difficile

rapport phonème-graphème en français. Le recours à la prononciation ne peut résoudre

véritablement un problème orthographique comme celui d'instinct/*instin et de

nerveusement/* nerveusemant. Par ailleurs, on comprend pourquoi ces élèves mentionnent

la prise en compte de la prononciation du professeur, car, comme l'a souligné Catach

(1980), plusieurs erreurs d'orthographe à dominante phonétique peuvent être commises

par les élèves qui entendent mal. Certains ont pu écrire par exemple destin au lieu

d'instinct. Signalons que le caractère inconnu du mot instinct pour plusieurs élèves a pu

rendre plus difficile sa discrimination auditive chez ceux-ci.

La cinquième stratégie est la stratégie «Écrit le mot de différentes manières et choisit

celle qui semble la bonne » (10,17 %). Cette stratégie, connue des scripteurs avertis,

permet, à l'examen de plusieurs transcriptions d'un même mot, de récupérer en mémoire

154

Page 170: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

l'orthographe du mot en question. Mais elle n'est employée que sporadiquement par nos

sujets.

La sixième stratégie que nous commenterons est « Vérifie les accords pendant qu 'il

écrit » (8,47 %). La mention de cette stratégie, qui figurait en 2e position à la première

question, montre encore que le problème d'accord est pregnant en orthographe française.

Dans l'ensemble, les élèves, d'après leurs verbalisations, ne semblent pas disposer d'une

grande variété de stratégies générales pour résoudre des difficultés orthographiques face à

un mot donné. Certaines stratégies d'ordre phonétique, qui cumulent le nombre

d'occurrences le plus élevé pour cette question (15 occurrences au total), nous paraissent

même peu fonctionnelles étant donné les différences marquées entre le français oral et le

français écrit.

Si on regarde l'ensemble des réponses fournies pour les deux questions, la relecture

apparait être la stratégie la plus connue des élèves. Nous allons voir, dans la section

subséquente, comment les élèves peuvent s'autocorriger en se relisant, en examinant les

stratégies qu'ils citent face à des problèmes spécifiques d'ordre phonogrammique,

morphogrammique (grammatical ou lexical), idéogrammique et logogrammique.

7.2.2. Analyses des stratégies citées en lien avec les sous-systèmes de l'orthographe

À la suite des questions que nous avons posées durant l'entretien sur des points précis du

texte de la dictée en lien avec les sous-systèmes orthographiques, nous avons recueilli 16

stratégies ayant une certaine fréquence (de 6 à 43 occurrences), dix spécifiques aux sous-

systèmes comme celles qui sont formulées dans le tableau 38, mais aussi six d'ordre

155

Page 171: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

général qu'on retrouve dans le tableau 37, telles que « écrit le mot comme il l'entend » ou

« utilise un dictionnaire ».

Pour tous les sous-systèmes de l'orthographe, nous ne présentons que les stratégies les

plus récurrentes dans le tableau 38. Précisons que dans le tableau ci-dessous, la valeur 0

représente une stratégie non citée et 1, une stratégie citée par les sujets.

Tableau 41

Stratégies spécifiques en lien avec les sous-systèmes orthographiques

Sous-sytème Stratégie citée (1)

ou non citée (0)

Fréquence %

Phonogrammes

Stratégie « Applique la règle devant p et b »

Phonogrammes

0 17 28,81 %

Phonogrammes 1 42 71,19%

Phonogrammes Stratégie « Justifie la graphie -ment par la classe grammaticale du mot (adverbe de manière en —ment),

cas des phonogrammes en [a ] »

Phonogrammes

0 29 49,16%

Phonogrammes

1 30 50,84 %

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet »

Morphogrammes

grammaticaux

0 16 27,12%

Morphogrammes

grammaticaux

1 43 72,88 %

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le sujet »

Morphogrammes

grammaticaux

0 21 35,60 %

Morphogrammes

grammaticaux

1 38 64,40 %

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur »

Morphogrammes

grammaticaux

0 31 52,54 % Morphogrammes

grammaticaux 1 28 47,46 % Morphogrammes

grammaticaux Stratégie « Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une préposition) ou la position du mot (après un verbe

conjugué, le second verbe se met à l'infinitif) »

156

Page 172: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

0 41 69,49 %

1 18 30,51 %

Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »

0 42 71,19%

1 17 28,81 %

Stratégie « Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la terminaison -

er/-é » 0 43 72,88%

1 16 27,12%

Stratégie « Justifie l'accord par la distinction de la catégorie

grammaticale »

0 45 76,27 %

1 14 23,73 %

Morphogrammes

lexicaux

Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »

Morphogrammes

lexicaux

0 31 52,54 %

Morphogrammes

lexicaux

1 28 47,45 %

Morphogrammes

lexicaux

Stratégie « Utilise un dictionnaire » Morphogrammes

lexicaux 0 52 88,13 % Morphogrammes

lexicaux 1 7 11,86%

Morphogrammes

lexicaux

Stratégie « Suit son instinct »

Morphogrammes

lexicaux

0 53 89,83 %

Morphogrammes

lexicaux

1 6 10,16%

Logogrammes

Stratégie « Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie, logogrammes) »

Logogrammes

0 18 30,50 %

Logogrammes 1 41 69,49 %

Logogrammes Stratégie « Essaie de tenir compte de la prononciation

du professeur »

Logogrammes

0 53 89,83 %

Logogrammes

1 6 10,16%

Stratégie « Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale

157

Page 173: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Idéogrammes

du mot (nom propre/nom commun) »

Idéogrammes

0 46 77,96 %

Idéogrammes 1 13 22,03 % Idéogrammes Stratégie « Utilise un dictionnaire »

Idéogrammes

0 50 " 84,74 %

Idéogrammes

1 9 15,25 %

Dans notre analyse, nous examinerons d'abord chaque sous-système puis nous ferons des

remarques générales concernant l'ensemble des données recueillies.

Dans le cadre des phonogrammes, la stratégie « Applique la règle devant p et b» est la

plus citée des élèves, soit dans une proportion de 71,19 %. Pour justifier l'orthographe du

phonème [5] dans compagno/is, près des trois quarts des élèves disent en effet utiliser la

règle de position qui stipule que devant/) et b le son [5] s'écrit om. La deuxième stratégie

la plus déclarée pour les phonogrammes est la stratégie « Justifie la graphie -ment par la

classe grammaticale du mot (adverbe de manière en —ment), cas des phonogrammes en

[a] ». La question était de savoir comment distinguer le phonème [a] dans les mots

nerveusement et menaçant. À la lecture du tableau, il ressort qu'un peu plus de la moitié

des élèves ont déclaré la stratégie de l'identification de la classe grammaticale, soit 50,84

%. Comme le signale le sujet 12 « nerveusement est un adverbe de manière en ment qui

s'écrit généralement m-e-n-t», alors que menaçant est un adjectif qualificatif. » On

remarque que pour les phonogrammes, aucune stratégie générale n'a été citée, même pas

celle qui consiste à prendre en compte la prononciation. Aucune stratégie générale n'est

apparue sans doute parce que les cas soumis étaient très circonscrits. Il faudrait dans une

étude ultérieure explorer davantage les stratégies des élèves en rapport avec les

phonogrammes pour voir notamment s'ils sont capables d'émettre diverses hypothèses

orthographiques pour un même son sans que n'interviennent des règles d'usage comme

celle de p/b pour les voyelles nasales ou la distinction de deux graphies marquant deux

classes grammaticales différentes.

158

Page 174: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

En ce qui concerne les morphogrammes grammaticaux, six stratégies spécifiques ont été

citées. Les trois premières obtiennent des fréquences assez importantes, entre 50 et 75 %

environ. Ces fréquences élevées n'ont rien d'étonnant, car les stratégies en question sont

reliées aux structures de base de la phrase française, soit la relation sujet/verbe et les

relations au sein du groupe nominal. Les trois dernières stratégies spécifiques ont été

citées beaucoup moins souvent, entre 25 et 30 % environ. Deux de ces stratégies

concernent des cas plus ciblés, soit la reconnaissance de l'infinitif en -er et sa distinction

d'avec le participe en -é . La stratégie grammaticale la plus récurrente reste la stratégie

« Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet », avec 72,88 %. Ce

résultat révèle la prégnance de cet accord fondamental dans l'esprit de la grande majorité

des élèves. Curieusement, la stratégie « Écrit le mot comme il l'entend » arrive en

cinquième position sur sept dans ce groupe morphogrammique grammatical, avec près de

29 %. Cette stratégie d'ordre général n'est pourtant pas pertinente pour le traitement des

morphogrammes puisque la plupart de ceux-ci sont muets.

Face à des cas de morphogrammes lexicaux, les sujets ont déclaré utiliser des stratégies

surtout générales. Aucune stratégie spécifique en lien avec cette composante

orthographique n'a été citée de façon significative. La question portait sur l'orthographe

du mot instinct et sur la formation du mot insupportable. Pour instinct, nous voulions voir

si l'élève était capable de trouver par dérivation les lettres finales qui ne se prononcent

pas (instinct!instinctif), et pour le mot insupportable, notre but était de vérifier si l'élève

pouvait expliquer la construction du mot (préfixe -in, base support et suffixe -able).

Seulement trois sujets ont dit employer la stratégie spécifique « Recourt à la famille

lexicale ou à la formation du mot », alors que celle-ci représente l'une des stratégies

appropriées pour régler les problèmes orthographiques de cet ordre. Les sujets ont

curieusement cité surtout la stratégie générale « Écrit le mot comme il l'entend » dans une

proportion de 47,45 %. Comme il a déjà été dit, le recours à la prononciation, même pour

orthographier des unités lexicales, n'est pas pertinent en raison des correspondances

graphophonétiques irrégulières et des lettres derivatives muettes en français. Les deux

autres stratégies générales citées, « Utilise le dictionnaire » et « Suit son instinct », sont

159

Page 175: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

beaucoup moins fréquentes (respectivement 11,86 % et 10,16 %). On peut remarquer que

la vérification dans le dictionnaire n'est pas une conduite à laquelle pense la très grande

majorité des sujets.

En ce qui concerne les logogrammes, la stratégie le plus souvent déclarée est la stratégie

« Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie,

logogrammes) », soit 69,49 %. La deuxième stratégie citée, nettement moins appropriée,

est « Essaie de tenir compte de la prononciation du professeur (en dictée) », dans une

proportion de seulement 10,16 %. La question portait sur la justification de l'orthographe

des logogrammes voie/voix et à bout/boue. Le recours au sens de la phrase est certes

d'une grande utilité pour distinguer les différents logogrammes.

Pour ce qui est des idéogrammes, enfin, la stratégie la plus fréquemment citée est

« Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom

commun), cas des idéogrammes », mais dans une proportion de seulement 22,03 %. La

stratégie qui vient en deuxième place est « Utilise un dictionnaire » (15,25 %). Pour cette

rubrique, la question portait sur les lettres majuscules des mots Libreville et Toyota.

Moins d'un quart des élèves pensent à vérifier la classe grammaticale d'un nom pour

savoir s'il prend une majuscule (les noms propres prennent une lettre majuscule, les noms

communs s'écrivent avec une lettre minuscule). À propos du nom Toyota, plusieurs sujets

ont affirmé que ce mot n'était pas un nom propre parce qu'il désignait une chose,

commentaire qui laisse supposer que dans les représentations de plusieurs élèves le nom

propre est associé seulement aux êtres animés.

D'une manière générale, on constate que, même dans la partie de l'entretien où on

s'attendait à des stratégies plus spécifiques sur des cas bien précis, les élèves déclarent,

dans une proportion variant de 10 à 50 % environ, un nombre non négligeable de

stratégies d'ordre général (six cas sur seize, voir tableau 41) et que certaines de ces

160

Page 176: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

stratégies générales liées à la prononciation sont inadéquates (quatre cas sur six). On peut

émettre l'hypothèse selon laquelle plusieurs élèves ne semblent pas disposer d'un bon

répertoire de stratégies spécifiques capables de les aider à résoudre des problèmes

orthographiques reliés aux différents sous-systèmes du français écrit. Cette faiblesse se

remarque notamment pour la zone des morphogrammes lexicaux où seulement trois

élèves sur 59 ont pensé à la stratégie fondée sur la famille lexicale et la construction du

mot. C'est dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que les élèves citent le

plus des stratégies spécifiques. Par exemple, près de 75 % d'entre eux pensent à la

vérification de l'accord du verbe avec le sujet. Cette prégnance du grammatical est

certainement à mettre en relation avec la tradition pédagogique dans laquelle ils ont

évolué, qui y met. beaucoup d'accent. Il reste que les données recueillies concernent

uniquement le discours tenu par les élèves sur les stratégies qu'ils disent employer, mais

les résultats plutôt faibles obtenus à la dictée laissent croire que dans la pratique de

l'écriture ils mettent plus ou moins en application les stratégies qu'ils peuvent déclarer.

Pour terminer ce chapitre, nous allons comparer les données recueillies pour les 18 élèves

forts et les 18 élèves faibles dans le cadre de l'entretien métagraphique, afin de voir si des

différences significatives existent entre les deux groupes. Signalons que, pour cette partie

de l'analyse, nous avons écarté les données obtenues auprès de 21 élèves moyens.

8. Comparaison des élèves forts et des élèves faibles

Deux étapes principales caractérisent cette phase d'analyse. La première porte sur la

comparaison des moyennes obtenues pour la dictée par les élèves forts et faibles de

l'échantillon de l'entretien métagraphique. La deuxième, quant à elle, se focalise sur la

comparaison des différentes stratégies déclarées par les élèves forts et faibles.

161

Page 177: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

8.1. Comparaison des moyennes des forts et des faibles

Tableau 42 Comparaison des moyennes selon le niveau de compétence (faible ou fort)

seuil Statut N Moyenne Ecart-type T Dl observé

E.phonét Fort 18 1.28 1.27 4.35 18.6 0.0004* faible 18 7.44 5.88

E.phonogr Fort 18 2.22 2.65 5.22 25.9 0.0001* faible 18 9.17 4.99

E.morphogr Fort 18 5.33 5.11 4.65 26.2 0.0001* faible 18 17.06 9.40

Morpho.gram Fort 18 3.28 3.77 4.51 23.9 0.0001* faible 18 12.12 7.20

Morpho. lexical Fort 18 1.83 1.86 4.18 34 0.0002* faible 18 5.33 3.03

E. logogram Fort 18 0.78 1.72 3,29 34 0.0023* faible 18 2.39 1.17

E. ideogram Fort 18 0.44 0.70 0.67 34 0.50 faible 18 0.61 0.77

E.non.fonct Fort 18 0 0 1.46 17 0.16 faible 18 0.11 0.32

Total.erreurs Fort 18 10.56 9.49 5.24 25.1 0.0001* faible 18 36.67 18.9

* L'astérisque indique que la différence est significative.

Ce tableau présente les catégories d'erreurs commises par les élèves dans la dictée selon

le niveau de compétence de ceux-ci. Il compare les moyennes des élèves forts et celles

des élèves faibles ayant passé l'entretien métagraphique sur un total de 18 sujets pour

chaque groupe. Il en ressort que les élèves forts ont commis de façon significative moins

d'erreurs que les faibles au total et pour la majorité des catégories (phonétique,

phonogrammique, morphogrammique grammaticale et lexicale). On remarque cependant

que la différence entre les moyennes des erreurs logogrammiques, idéogrammiques et

non fonctionnelles n'est pas significative. On constate, enfin, que pour les élèves faibles,

les erreurs morphogrammiques sont, de loin, celles qui sont les plus nombreuses et qu'ils

ont plus de problèmes au niveau des morphogrammes grammaticaux. Les données de ce

162

Page 178: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

tableau montrent donc que les deux groupes de sujets sont très contrastés sur le plan du

rendement orthographique.

8.2. Comparaison des stratégies des forts et des faibles

Nous voulons, dans cette section, comparer les stratégies des élèves forts et des élèves

faibles. Nous n'avons retenu que les stratégies les plus citées par les sujets.

Tableau 43

Comparaison des stratégies des forts et des faibles

Sous-sytème Stratégie citée (1)

ou non citée (0)

Élèves très

faibles et

faibles

Élèves très

forts et forts Total

Phonogrammes

Stratégie « Applique la règle devant p et b »

Phonogrammes

0 6

33,33

3

16,67 9

Phonogrammes 1 12

66,67

15

88,33 27

Phonogrammes

Total 18 18 36

Phonogrammes

Stratégie « Justifie la graphie -men grammaticale du mot (adverbe de mai

cas des phonogrammes en

! par la classe tière en -ment), [a]»

Phonogrammes

0 15

83,33

8

44,44 23

Phonogrammes

1 3

16,67

10

55,56 13

Phonogrammes

Total 18 18 36

Stratégie « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation

163

Page 179: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Morphogrammes

grammaticaux

avec le sujet »

Morphogrammes

grammaticaux

0 7

38,89

4

22,22 11

Morphogrammes

grammaticaux

1 11

61,11

14

77,78 25

Morphogrammes

grammaticaux

Total 18 18 36

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le sujet »

Morphogrammes

grammaticaux 0 10

55,56

4

22,22 14

Morphogrammes

grammaticaux

1 8

44,44

14

77,78 . 22

Morphogrammes

grammaticaux

Total 18 18 36

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur »

Morphogrammes

grammaticaux

0 14

77,78

6

33,33 20

Morphogrammes

grammaticaux

1 4

22,22

12

66,67 16

Morphogrammes

grammaticaux

Total 18 18 36

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »

Morphogrammes

grammaticaux

0 9

50,00

15

83,33

24

Morphogrammes

grammaticaux

1 9

50,00

3

16,67

12

Morphogrammes

grammaticaux

Total 18 18 36

Morphogrammes

grammaticaux

Stratégie « Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une

préposition) ou la position du mot (après un verbe conjugué, le

second verbe se met à l'infinitif) »

Morphogrammes

grammaticaux

0 12

66,67

14

77,78 26

164

Page 180: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

1 6

33,33

4

22,22 10

Total 18 18 36

Stratégie « Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la

terminaison -er/-é » 0 15

83,33

11

61,11 26

1 3

16,67

7

38,89 10

Total 18 18 36

Stratégie « Justifie l'accordpar la distinction de la

catégorie grammaticale »

0 15

83,33

13

72,22 28

1 3

16,67

5

27,78 8

Total 18 18 36

Morphogrammes

lexicaux

Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »

Morphogrammes

lexicaux

0 8

44,44

11

61,11 19

Morphogrammes

lexicaux

1 10

55,56

7

38,89 17 Morphogrammes

lexicaux Total 18 18 36

Logogrammes

Stratégie « Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase

(cas d'homonymie, logogrammes) »

Logogrammes

0 9

50,00

1

5,56 10 Logogrammes

1 9

50,00

17

94,44 26

Logogrammes

Total 18 18 36

165

Page 181: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Idéogrammes

Stratégie « Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) »

Idéogrammes

0 14

77,77

15

83,33 29

Idéogrammes

1 4

22,22

3

16,66 7

Idéogrammes Total 18 18 36

Idéogrammes Stratégie «Utilise un dictionnaire »

Idéogrammes

0 13

72,22

16

88,88 29

Idéogrammes

1 5

27,77

2

11,11 7

Idéogrammes

Total 18 18 36

Sur le plan des phonogrammes, la différence pour la stratégie « Applique la règle d'usage

devant p et b » n'est pas significative entre les élèves forts et les élèves faibles (p = 0,

39). Cependant la stratégie « Justifie la graphie -ment adverbe en ment par la classe

grammaticale du mot » est beaucoup plus citée par les forts, la différence, selon le test

statistique, étant significative (p = 0,0060). Cette dernière stratégie suppose effectivement

une connaissance métalinguistique plus poussée.

Pour les morphogrammes, sur sept stratégies citées, une différence significative entre les

forts et les faibles s'observe pour seulement deux stratégies. Les forts citent trois fois plus

souvent la stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en

relation avec le nom donneur » (p = 0,0239), tandis qu'un faible sur deux, contrairement

à environ un fort sur cinq, cite la stratégie dysfonctionnelle «Écrit le mot comme il

l'entend» (p = 0,0552). En ce qui a trait aux autres stratégies grammaticales concernant

les accords du verbe et du participe passé avec être ou la reconnaissance de l'infinitif en -

er, même si les différences obtenues ne s'avèrent pas significatives, on peut remarquer

que les bonnes stratégies sont presque toujours plus fréquentes chez les élèves forts, sauf

166

Page 182: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

dans le cas de la stratégie de la prise en compte de l'entourage et de la position pour la

reconnaissance de l'infinitif en -er, où les élèves faibles l'emportent (33,33 % contre

22,22 %).

Sur le plan des morphogrammes lexicaux, la seule stratégie citée assez souvent par les

sujets est la stratégie « Écrit le mot comme il l'entend ». Elle ne présente pas de

différence significative entre les élèves forts et les élèves faibles (p = 0,60). Comme il a

été dit plus haut, le recours à la prononciation n'est guère approprié pour la morphologie

lexicale. Et pourtant presque autant de forts que de faibles la citent (7 contre 10). Ce

résultat pour le moins surprenant révèle que le sous-système des morphogrammes

lexicaux pourrait être la partie de l'orthographe française la moins bien maitrisée par

l'ensemble des élèves gabonais, quel que soit leur niveau de compétence. Cette hypothèse

pourrait être vérifiée dans une étude subséquente compte tenu des limites de notre

recherche quant aux possibilités de généralisation de nos résultats.

Pour les logogrammes, la stratégie «Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase

(cas d'homonymie, logogrammes) » présente une différence significative en faveur des

forts (p = 0,0128).

Enfin, sur le plan des idéogrammes, aucune différence significative n'est relevée pour les

deux stratégies le plus souvent déclarées, soit la stratégie « Justifie la lettre majuscule par

la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) » et la stratégie «Utilise un

dictionnaire ». Contre toute attente, on relève cependant une plus forte récurrence de ces

deux stratégies dans le discours des élèves faibles.

En conclusion, on peut dire que des différences entre les forts et les faibles sur le plan des

stratégies déclarées existent mais ne sont pas très grandes malgré le fait que l'échantillon

167

Page 183: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

retenu montre des résultats contrastés entre les deux groupes quant aux moyennes

d'erreurs relevées. Seulement quatre stratégies sur douze montrent des différences

significatives. Ces quatre stratégies touchent la plupart des sous-systèmes

orthographiques, soit les phonogrammes dans un cas, les morphogramme dans deux cas

et les logogrammes dans un dernier cas. Dans trois cas, il s'agit de stratégies

fonctionnelles qui sont plus citées par les forts et, dans un cas, il s'agit d'une stratégie

inadéquate relative à la prononciation souvent plus citée par les faibles. Même si les forts

l'emportent pour la plupart des autres stratégies pour lesquelles aucune différence

significative n'a été relevée, il reste que les faibles l'emportent contre toute attente pour

certaines bonnes stratégies comme la prise en compte de l'entourage et de la position

pour la reconnaissance de l'infinitif en -er (domaine des morphogrammes grammaticaux)

ainsi que la prise en compte de la classe grammaticale ou le recours au dictionnaire pour

la lettre majuscule des noms propres (domaine des logogrammes). Quoique les

différences entre les deux groupes ne soient pas marquées, il convient de souligner que la

stratégie dysfonctionnelle du recours à la prononciation pour les morphogrammes

grammaticaux et lexicaux est plus souvent citée chez les élèves faibles.

Conclusion du chapitre

Au terme de cette analyse, nous voulons rappeler que les résultats issus de l'entretien

métagraphique ne peuvent être totalement généralisables, à cause du nombre limité de

l'échantillon (N=59) et des quelques écarts qu'il présente par rapport au grand échantillon

(N=724). Nous devrons donc les considérer avec prudence. Dans cette conclusion, nous

tiendrons particulièrement compte des deux grands groupes forts et faibles.

On retiendra que la perception des élèves en orthographe varie selon leur degré de

compétence. Les forts ont tendance à se sous-estimer, alors que les faibles ont en majorité

une perception plutôt juste de leurs habiletés en orthographe. Quant aux enseignants, ils

ont une perception relativement bonne de leurs élèves dans le cas des deux groupes

contrastés (forts et faibles).

168

Page 184: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Pour ce qui est des perceptions des élèves sur le degré de difficulté en orthographe, plus

de la moitié estime que l'orthographe est facile, alors que les résultats de la dictée sont

plutôt faibles. Cette perception ne correspond pas à la complexité reconnue du système

orthographique du français.

Parlant des stratégies que les élèves déclarent mettre en place pendant des situations

d'écriture, les stratégies générales de la relecture et de la vérification des accords sont les

plus citées, alors que sur le plan spécifique, c'est-à-dire les stratégies liées aux sous-

systèmes de l'orthographe, c'est dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que

les élèves en citent un plus grand nombre et avec des fréquences souvent plus

importantes, à savoir : les stratégies sur l'accord du verbe avec son sujet, l'accord du

participe passé et l'accord de l'adjectif et du déterminant. On note cependant que les

élèves déclarent, là aussi, un nombre non négligeable de stratégies d'ordre général, où on

s'attendait à des stratégies plus spécifiques. C'est dans le domaine des morphogrammes

lexicaux que les élèves, qu'ils soient forts ou faibles, ne semblent guère disposer de

stratégies pertinentes.

Enfin, en comparant les stratégies des élèves forts et celles des élèves faibles, on

s'aperçoit qu'il y a des différences, mais qu'elles ne sont pas importantes. C'est

notamment dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que cette différence est

significative mais avec deux cas seulement sur quatre pour l'ensemble des sous-systèmes.

169

Page 185: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

CONCLUSION GENERALE

Les recherches en orthographe montrent que le domaine connait un essor marqué au

regard du nombre et de l'intérêt des travaux et de l'implication des chercheurs, des

enseignants, des acteurs de la communauté éducative cette dernière décennie. Ces

recherches s'enchainent, se succèdent mais ne se ressemblent pas. Jaffré (1992) avait déjà

prédit l'explosion des recherches en orthographe quand il déclare que : « Dans le

domaine de l'orthographe, le grand chantier des prochaines années concernera

l'acquisition chez les enfants de l'école primaire et du collège. » (p. 142)

Si l'on veut résoudre les problèmes de l'enseignement-apprentissage de l'orthographe

française, nous pensons, comme Jaffré, que c'est depuis le cycle primaire et au premier

cycle du secondaire qu'il faut commencer par focaliser nos efforts. C'est dans cette

perspective que s'inscrit cette recherche.

Dans cette section nous jetons sur l'étude un regard rétrospectif qui consiste à rappeler

nos questions de recherche formulées au début de cette thèse, nous faisons ensuite une

synthèse des résultats enregistrés, tout en mentionnant leurs limites et leurs retombées.

Nous terminerons en rappelant quelques propositions didactiques venant des chercheurs

importants en orthographe et en suggérant des pistes personnelles à la lumière des

résultats recueillis liés au contexte gabonais.

Rappel des questions de recherche

Diverses initiatives ont été prises pour améliorer la qualité du français écrit des élèves.

Enquêtes, études, se succèdent dans le but de favoriser l'acquisition de l'orthographe

chez les élèves. L'on se demande pourquoi bon nombre d'élèves du premier cycle du

secondaire, notamment du Gabon, arrivent à réciter les règles d'orthographe

(grammaticale et lexicale) sans être capables de les appliquer dans leurs productions

écrites ou en dictée. Le triangle didactique qui montre le lien étroit entre les différents

170

Page 186: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

acteurs impliqués dans le processus enseignement-apprentissage nous permet de cerner le

problème des erreurs d'orthographe dans cet espace car une défaillance d'un seul maillon

pourrait avoir des répercussions sur d'autres (Halte, 1992; Simard, 1997; Jonnaert et

Vander Borght, 1999). C'est dans cette optique que nous avons pensé opportun de

questionner les élèves, premiers responsables du phénomène des erreurs d'orthographe,

dans leur rôle d'apprenants de règles d'orthographe et de producteurs de textes écrits.

Comment expliquer que les règles d'orthographe enseignées, renforcées à partir des

séances d'application en classe ne soient pas correctement appliquées dans les travaux

écrits? Quelles sont les erreurs d'orthographe auxquelles les élèves sont réellement

confrontés? Quels sont les types d'erreurs les plus fréquents dans leurs écrits? Quelles

stratégies emploient-ils pour orthographier?

Synthèse des résultats de la recherche

Dans la présente recherche, nous nous sommes intéressé aux différentes erreurs

d'orthographe que commettent les élèves des classes de 6e et de 3e du niveau collège du

Gabon. Nous sommes parti de la typologie de Catach (1980) pour relever et analyser les

diverses erreurs.

Catach présente le système orthographique comme un système mixte constitué de trois

composantes principales : les phonogrammes (la transcription des sons), les

morphogrammes (les morphèmes lexicaux et grammaticaux) et les logogrammes (la

distinction d'unités sémantiques). Nous nous sommes penché sur toutes ces composantes

et même sur les idéogrammes (les signes diacritiques tels l'apostrophe et la lettre

majuscule) et les lettres non fonctionnelles (les lettres d'origine gréco-latine, des fausses

etymologies, les finales particulières).

L'analyse des résultats obtenus de cette étude nous permet de faire un certain nombre de

constats. Le premier est que les élèves gabonais du premier cycle du secondaire ont

réellement des problèmes en orthographe car l'intervalle regroupant le plus grand nombre

171

Page 187: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

d'élèves (23 %) se situe entre 11 et 20 erreurs. La moyenne des erreurs est de 31,33 pour

un texte relativement court de 126 mots.

Ensuite, en présentant la moyenne des erreurs par catégorie, il apparait, comme l'avaient

déjà montré nombre d'études, que la moyenne des erreurs morphogrammiques

(grammaticale et lexicale) est la plus élevée (12,53). Elle est suivie de la moyenne des

erreurs phonogrammiques (11,68) et de la moyenne des erreurs phonétiques (3,04). Les

moyennes des erreurs logogrammique et idéogrammique sont respectivement de 2,72 et

1,11. La moyenne des erreurs non fonctionnelles est la plus faible avec 0,35.

Les graphiques de ces différentes variables montrent de façon générale qu'une grande

concentration de sujets se situe autour de la moyenne (31,33), ce qui révèle que très peu

d'élèves ont commis un nombre réduit d'erreurs.

On constate que les erreurs morphogrammiques sont, de loin, celles qui sont les plus

nombreuses et que les élèves ont plus de problèmes au niveau des morphogrammes

grammaticaux (avec une moyenne de 9,98), comme l'avaient déjà montré d'autres études

antérieures (Bétrix Kohler, 1991, et Monballin et Legros, 2001 )23

Dans le grand échantillon, les filles se montrent plus performantes en orthographe que les

garçons. De manière générale, elles commettent moins d'erreurs qu'eux dans leurs

dictées. Le test statistique, dont le seuil critique est fixé à (p < 0,05), montre des écarts

significatifs pour les erreurs de type phonétique et morphogrammique, notamment

grammatical. Ce résultat rejoint celui de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler.(1991),

de Chervel et Manesse (1989) en France, de Olivier (1989) et de Bureau (1985) au

Québec.

Au niveau des classes (6e et 3e), on constate que la moyenne générale des erreurs en

classe de 6e est nettement plus élevée que celle de la classe de 3e. Les élèves de 6e

commettent beaucoup plus d'erreurs d'orthographe que leurs aînés de 3e. Les moyennes V .

23 . Monballin, M, et Legros, G. (2001). La maîtrise langagière à l'entrée des études supérieures : mythes, constats et essais d'intervention, Correspondance, vol. 6, avril,

172

Page 188: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

des deux groupes (6e et 3e) sont significativement différentes pour toutes les catégories,

sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas de

différence significative (0,24 en 6e et 0,22 en 3e). On peut penser que la scolarité a un

effet bénéfique sur le rendement orthographique des élèves. Nos résultats rejoignent une

fois de plus ceux de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler (1991). Il ressort en effet de

cette étude que les élèves de 6e année réalisent de meilleures performances en

orthographe que les élèves de 5e année.

Nous avons pu faire des corrélations entre les différents types d'erreurs pour pouvoir

mesurer le lien ou l'écart qui existe entre eux. Les corrélations entre les différentes

variables sont assez élevées variant de 0,40 à 0,97. Seule la catégorie des erreurs non

fonctionnelles ne semble pas être en lien avec les autres catégories. Les plus fortes

corrélations sont notamment observées entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs

morphogrammiques (0,738) et morphogrammiques grammaticales (0,729) et entre les

erreurs morphogrammiques grammaticales et les erreurs logogrammiques (0,612). Les

corrélations sont cependant moins fortes entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs

morphogrammiques lexicales (0,474) et les erreurs logogrammiques et les erreurs

morphogrammiques lexicales (0,410).

Au niveau du petit échantillon, c'est-à-dire les 59 élèves qui ont passé l'entretien

métacognitif, nous avons remarqué, de manière générale, qu'il y a quatre groupes

d'élèves : les élèves très forts, les forts, les moyens, les faibles et les très faibles. Les

perceptions des enseignants, pour déterminer les élèves issus de ces différents groupes,

sont relativement justes pour deux principaux groupes (les faibles et les forts). On

constate que les enseignants savent déterminer les élèves forts (89 %) et faibles (67 %),

mais ils éprouvent des difficultés à déterminer les moyens (surestimation dans 83 %),

groupe numériquement le plus important.

Chez les élèves, on rémarque une grande variation dans leurs perceptions de leurs

performances en orthographe. Les élèves très forts et forts se sous-estiment (56 %). On

173

Page 189: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

constate chez les élèves moyens une tendance à la surestimation (48 %) ou à la sous-

estimation (43 %) de leurs habiletés en orthographe. Par contre, les élèves faibles et très

faibles ont une perception généralement juste d'eux-mêmes en orthographe (61 %),

même si une proportion considérable se surestime (39 %).

En ce qui concerne les stratégies déclarées par les élèves en situation orthographique, on

constate que les stratégies d'ordre général comme « Lire et relire son texte, une ou

plusieurs fois, pendant ou après l'avoir rédigé » ont été citées par beaucoup d'élèves. Un

nombre non négligeable de scripteurs expriment également le souci de veiller aux

accords, au lexique et à la sémantique. Ce souci est exprimé à travers la récurrence des

stratégies de la liste des stratégies générales, notamment les stratégies « Vérifie les

accords » et « Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) ».

Au niveau des stratégies en relation avec les sous-systèmes de l'orthographe, on

remarque que les stratégies les plus déclarées sont la stratégie « Applique la règle

d'usage devant p et b » pour les phonogrammes (71,19 %), pour les morphogrammes

grammaticaux, les stratégies « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le

sujet » et « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le

sujet » (72,88 % et 64,40 %), pour les logogrammes, la stratégie « Justifie la graphie par

le sens du mot » (69,49 %) et enfin pour les idéogrammes, la stratégie « Justifie la lettre

majuscule par la classe du (nom propre/nom commun) » (22,03 %).

En ce qui concerne les stratégies déclarées par les élèves forts et faibles, la tendance

générale est que tous ces élèves emploient quasiment les mêmes stratégies, sauf avec les

morphogrammes grammaticaux où la différence se trouve plus ou moins significative en

faveur des élèves forts. - .

Ehfin, contrairement à l'écart observé dans le grand échantillon entre le rendement des

filles et celui des garçons, nous constatons que la différence n'est pas significative chez

les élèves qui ont passé l'entretien métacognitif. Tout comme la variable sexe n'a aucune

influence au plan des différentes stratégies que déploient les élèves forts et faibles qui se

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Page 190: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

sont prêtés à nos questions. Nous pensons que cette situation pourrait s'expliquer par le

caractère plus réduit de ce sous-échantillon.

Cependant, il y a une différence significative entre les moyennes des résultats à la dictée

des élèves forts et celles des élèves faibles ayant passé l'entretien métagraphique. Les

élèves forts ont commis de façon significative moins d'erreurs que les faibles pour la

majorité des catégories (phonétique, phonogrammique, morphogrammique grammaticale

et lexicale). La différence entre les moyennes des erreurs logogrammique,

idéogrammique et non fonctionnelle n'est pas significative.

Les limites de la recherche

Sans méconnaître l'impératif lié au temps de réalisation de cette étude, le fait de n'avoir

pas questionné les enseignants reste la première limite. En effet, acteurs compétents dans

leur domaine, les enseignants représentent un pôle important, sinon incontournable, du

triangle didactique (Halte, 1999, Simard, 1999, etc.)..Ne pas solliciter leurs points de vue

ni questionner leurs pratiques, en vue d'avoir leurs positions sur le phénomène des

erreurs d'orthographe, laisse une partie inachevée pour la présente recherche.

La deuxième limite de cette recherche peut être le manque de relance sur certaines

questions. Certains élèves, lors de l'entretien métacognitif, se montraient peu bavards,

peu engagés dans la discussion. Nous pensons que nous avons manqué de spontanéité

pour rebondir sur certaines de leurs réponses jugées quelque peu évasives afin de les

amener à parler davantage. Il est vrai que cette situation s'explique en partie par le temps

relativement court alloué à cet entretien métacognitif (de 15 à 20 minutes par élève).

Mais ces limites n'enlèvent en rien la pertinence de cette étude, vu ses spécificités tant

organisationnelles (ou institutionnelles), que contextuelles. Sur le plan organisationnel, la

présente recherche est financièrement soutenue par l'ACDI dans son volet du PCBF.

Cette institution exige la réalisation d'une thèse en quatre ans au plus. Il est donc

impensable dans ces conditions d'organiser une collecte de données encore plus vaste que

celle que nous avons réalisée.

175

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Les retombées

Les retombées de cette étude seront cernées sur deux dimensions principalement : sur le

plan international et national.

Sur le plan international, cette étude révèle les difficultés auxquels les scripteurs gabonais

font face dans leurs dictées, difficultés liées à l'acquisition et à la manipulation de la

langue française, à l'instar des élèves de tous les autres pays de la Francophonie. Cette

recherche, qui se veut pionnière en matière de l'enseignement-apprentissage au Gabon,

permettrait aux institutions internationales telles que la Francophonie et l'Unesco de

repenser leurs méthodes en matière de coopération culturelle, en revisitant certains

procédés qui, pour le moment, se limitent à l'organisation des concours d'orthographe et

à la promotion de la création libre (poèmes notamment).

Sur le plan national, la présente étude pourra servir d'aiguillon dans le cadre des réformes

à venir liées à l'enseignement de l'orthographe. Elle présente, de manière claire, les types

d'erreurs d'orthographe et l'ampleur du phénomène dans le système éducatif et pourra

susciter la relance du débat sur le plan des définitions des priorités du système éducatif

gabonais.

Cette recherche permettra, enfin, à nos collègues d'interroger leurs pratiques - qui n'ont

pas été visitées, de les adapter à quelques méthodes susceptibles de favoriser l'acquisition

des stratégies capables d'améliorer la situation orthographique dans laquelle se trouvent

les élèves gabonais du second cycle du secondaire. Ainsi, avons-nous pensé à quelques

propositions didactiques en vue d'aider les collègues à aider les élèves face au

phénomène des erreurs d'orthographe.

Les propositions didactiques

L'intérêt d'une recherche tient non seulement aux questions examinées mais aussi à ce

qu'elle suggère des mesures correctives (Catach, 1980). C'est dans cette perspective que

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nous faisons quelques propositions didactiques sans prétention d'exhaustivité aucune.

Dans cette section, nous formulons deux types de propositions didactiques : les

propositions didactiques émises par les chercheurs du domaine et nos pistes didactiques

personnelles en lien avec les résultats de la présente recherche et à notre contexte.

Nous présentons d'abord les orientations didactiques de Charmeux (1979), Catach

(1980), David, Guyon et Brissaud (à paraître), Allai, (1997); Allai, Bétrix Kohler,

Rieben, et al, (2001), avant de faire état de nos propres propositions.

Charmeux (1979) définit l'orthographe comme l'entrée dans le fonctionnement de la

langue écrite. L'orthographe est l'épiderme de l'écrit, en ce sens qu'elle est l'aspect

immédiatement perceptible de l'écrit.

L'auteure ne partage pas l'approche préconisée par Benveniste et Chervel qui soutiennent

que la réforme phono-graphique de l'orthographe soit l'unique solution pour résoudre les

problèmes orthographiques. Charmeux trouve qu'il est préférable de faire observer l'écrit,

tel qu'il est, de façon autonome, sans se préoccuper des correspondances

phonèmes/graphèmes. Elle privilégie tout d'abord la réforme de l'enseignement de

l'orthographe et pense que :

Si au lieu de poser que l'orthographe française devrait correspondre à la prononciation, pour découvrir avec tristesse qu'il n'en est rien la plupart du temps, on observait l'écrit tel qu'il est, de façon autonome- quitte à repérer beaucoup plus tard qu'il existe certaines corrélations entre sons du langage oral et les signes de l'écrit- on éviterait aux enfants et aux adultes bien des tourments, (p. 29)

Pour Charmeux l'enseignement de l'orthographe devrait contenir, d'une part, des

situations de communication (textes libres, compositions, etc.) et, d'autre part, des

activités de structuration dont l'objectif serait de permettre l'acquisition de techniques qui

rendraient possible la maîtrise du fonctionnement de l'orthographe. Ces dernières

activités devraient apprendre à l'élève à se servir de l'orthographe et non à savoir

l'orthographe.

177

Page 193: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Charmeux pense ensuite que l'élève s'approprie l'orthographe par des exercices pratiques

de rédaction surtout. C'est pour cette raison qu'elle déconseille la dictée qui est la parole

de quelqu'un d'autre. L'apprenant subit passivement la dictée qui ne favorise pas la

maitrise de renonciation. Si on vise la maitrise de l'orthographe, c'est au travers de

renonciation qu'il faut l'envisager. D'où la nécessité de fournir aux élèves des occasions

nombreuses et variées de communiquer par écrit.

En France, Catach et l'équipe HESO préconisent deux approches : l'approche technique

et l'approche ludique. Face à la réputation d'austérité, d'exigence et de rigueur que les

élèves intègrent sur l'orthographe, les auteurs suggèrent de varier les modes de travail en

proposant toute une batterie d'activités différentes : les combinatoires, les tableaux à

double entrée, les schémas fléchés, les intrus, les ensembles, les vrais ou faux, etc. On

peut, dans le souci de réconcilier rigueur et créativité, « essayer de mettre l'orthographe

en jeux sans rien renier de ses enjeux ». Il s'agit, à partir d'activités en apparence

gratuites, de mobiliser ses compétences en orthographe, de jouer avec les contraintes de

l'orthographe, d'en prendre conscience afin de résoudre un problème d'écriture.

David, Guyon et Brissaud (à paraitre) ont mis en œuvre une séquence didactique en 5e

primaire dont l'objectif était d'apprendre aux élèves à utiliser la procédure analogique qui

consiste à remplacer une forme ambiguë par une autre forme plus transparente

phonologiquement (par exemple prendre/pris à la place de trouver/trouvé). Les auteurs,

qui reconnaissent la persistance de cette difficulté au lycée et même à l'université (Lucci

et Millet, 1994), concluent à l'efficacité de la séquence didactique où alternent exercices

d'écriture et exercices de conceptualisation de procédures par des reformulations orales et

écrites.

En Suisse, une étude comparée, en 2e et 6e primaire, a été menée sur deux approches : une

approche spécifique de l'orthographe et une approche intégrée à des activités de

production écrite ou dans des situations exigeant à la fois écriture et lecture (Allai, 1997;

24 CATACH, N., DUPREZ, D. Et LEGRIS, M. (1980). L'enseignement de l'orthographe, Dossiers didactiques Nathan (non réédité) cité par Brissaud (2001), pp. 115-117.

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Page 194: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Allai, Bétrix Kohler, Rieben, et ai , 2001). On conclut à l'efficacité de l'approche

intégrée chez les plus âgés seulement et on préconise l'utilisation conjointe de deux

méthodes par une articulation entre activités décrochées et démarche globale de lecture-

écriture.

On voit donc que toutes ces multiples façons d'aborder les problèmes d'ordre

orthographique en situation de classe montrent à la fois des principes communs et des

oppositions.

Un premier aspect concerne la relation phonie-graphie. Certains auteurs comme

Charmeux soutiennent qu'il convient d'examiner, du moins en début d'apprentissage,

l'écrit spécifiquement sans relation avec la prononciation en raison des grands écarts qui

existent entre le français oral et le français écrit. Les recherches récentes sur la

conscience phono logique indiquent cependant que les jeunes enfants doivent comprendre

le principe alphabétique assez tôt et avoir une juste perception des unités sonores pour

pouvoir maitriser les correspondances graphophonétiques de l'orthographe française, la

composante phonographique, rappelons-le, réunissant l'essentiel des unités graphiques de

notre langue. Les travaux cités de David et al. révèlent d'ailleurs que l'apprentissage est

facilité quand les élèves peuvent compter sur un appui oral. D'autres auteurs comme

Catach insistent plutôt sur le caractère pluridimensionnel de l'orthographe et proposent

des interventions didactiques variées de prise de conscience et de maniement pour chaque

sous-système orthographique.

Un autre aspect important touche l'opposition entre activités spécifiques d'orthographe et

approche intégrée aux pratiques de discours. Les dernières recherches tendent à montrer

que les deux méthodes doivent être combinées, particulièrement durant les premières

années d'apprentissage.

Quelles sont les pistes didactiques que nous pouvons proposer face à la situation

spécifique du Gabon que nous avons déjà présentée plus haut?

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Page 195: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Pistes didactiques issues de la présente recherche

L'examen des résultats que nous avons obtenus sur la question des erreurs d'orthographe

chez les élèves du premier cycle du secondaire du Gabon nous amène à faire un certain

nombre de propositions didactiques orientées à la fois sur les pratiques d'élèves et des

enseignants. Pour être plus concret, nous ferons souvent un retour sur les résultats

observés à propos des différentes catégories du sous-système de l'orthographe en

fonction de l'ampleur du problème.

Nous avons constaté en effet que les erreurs morphogrammiques, notamment

grammaticales, sont les erreurs auxquelles les élèves du premier cycle du secondaire sont

le plus confrontés au Gabon comme dans le reste de la francophonie. Certains arrivent à

réciter les règles de grammaire mais ne les appliquent pas correctement en situation

d'écriture. Nous pensons que la manière dont l'enseignement de l'orthographe se fait est

en partie responsable de cette situation. Les enseignants devraient mettre plus d'accent

sur la composante grammaticale et aborder son enseignement dans une perspective de

compréhension et d'intégration. L'enseignement au Gabon est un héritage de

l'enseignement traditionnel de la France. L'enseignement de l'orthographe, en France, a

longtemps été focalisé sur la simple mémorisation des règles et des mots. Même s'il y a

pu avoir une amélioration des méthodes d'enseignement dans la métropole,

malheureusement, cette amélioration n'a pas connu le même rythme dans tous les pays de

l'espace francophone, notamment au Gabon. Une grande attention des enseignants

devrait être consacrée aux activités visant la compréhension des principes et des règles

gouvernant le système morphogrammique d'ordre grammatical ainsi qu'aux activités

d'application en classe, soit dans des exercices spécifiques, soit en lien avec la production

de textes, cela pour tenir compte des données de recherche citées ci-dessus montrant

l'importance d'une approche intégrée qui est complétée par des activités spécifiques

d'acquisition.

Le deuxième problème, relevé par ordre d'importance, concerne les phonogrammes, liés

notamment aux géminées (lettres doubles). Beaucoup d'élèves connaissent les mots, les

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Page 196: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

perçoivent bien auditivement, mais n'arrivent pas à les orthographier correctement. C'est

le cas, dans notre texte de dictée, de pierreuses, réinstallés, insupportable, chauffeur,

stopper et gouffres que certains élèves écrivent piereuses, reinstates, insuportable,

chaufeur, stoper et goufres. Les doubles consonnes constituent une grande difficulté pour

l'ensemble des francophones, étant donné que la gemination n'existe pratiquement pas en

français oral. D'après les graphies produites par les élèves, l'appariement

phonèmes/graphèmes est bien réalisé par la majorité d'entre eux. Le problème est

certainement celui de la mémorisation des doubles consonnes comme graphème d'un

phonème consonantique unique. Nous pensons que la connaissance de la famille des mots

est un moyen susceptible de permettre aux élèves de pouvoir mieux mémoriser les

graphies de ces mots à double consonne et d'éviter ainsi ce type d'erreurs d'orthographe.

Le recours à la famille lexicale, à part quelques exceptions, peut aider à retrouver

l'orthographe d'un mot (pierreuse en tant que dérivé de pierre prendra deux r;

réinstallés, dérivé du mot de base installer, s'écrira avec deux l). De plus, l'apprentissage

de règles d'usage permettrait aux élèves de savoir qu'une voyelle ne porte pas d'accent

graphique si elle est suivie d'une consonne doublée (pierreuse et non pierreuse).

Un autre problème concerne aussi les phonogrammes. Les élèves ont du mal à

discriminer les graphèmes transcrivant un même phonème comme an~en. Une étude plus

systématique des correspondances graphophonétiques au primaire à l'aide de l'alphabet

phonétique international (API) pourrait aider les élèves à maîtriser celle-ci.

Il serait souhaitable aussi d'introduire dans le système éducatif gabonais l'entretien

métacognitif que l'enseignant pourra mener individuellement avec des élèves faibles ou

organiser avec toute la classe à l'issue de la rédaction d'un texte ou d'une dictée dans

l'optique de susciter une confrontation entre élèves et de favoriser un questionnement sur

les mécanismes de la langue et sur les difficultés à surmonter (Haas, 1999; Cogis et

Brissaud, 2003; Brissaud et Bessonnat, 2001).

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Page 197: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Actuellement, l'orthographe à l'école gabonaise est évaluée de façon uniquement

sommative (avec le fameux zéro sur 20). Pour diminuer la peur de l'erreur et de sa

notation négative, on pourrait organiser des activités d'évaluation formative centrées

uniquement sur la régulation des apprentissages, en vue de permettre aux élèves de

pouvoir s'exprimer sur leurs graphies, de les justifier devant tous les camarades et, ce

faisant, pouvoir mieux préparer l'évaluation sommative à venir. Jaffré (1999) a envisagé

cette méthode dans le cadre de la recherche, nous la préconisons non plus seulement à des

fins de recherche mais aussi pour l'enseignement-apprentissage. Les contours d'une telle

démarche restent à préciser.

Enfin, l'État gabonais aura un rôle important à jouer en vue de minimiser le problème des

erreurs d'orthographe chez les élèves du secondaire. Le ministère de l'Éducation

nationale devrait davantage tenir compte des réalités contextuelles qui font que le français

est une langue seconde au Gabon. La grande majorité de nos élèves sont en contact avec

le français seulement à l'âge scolaire, soit à partir de 6 ans. La réorganisation par l'État

du cycle préscolaire ou pré-primaire qui, pour le moment, est en grande partie sous la

gestion du privé et est réservé à une minorité permettrait à l'ensemble des enfants de

commencer plus tôt l'apprentissage du français et même de développer une conscience

phonologique plus solide. Le ministère de l'Éducation devrait également revoir ses

programmes à la lumière des avancées de la recherche actuelle en orthographe et soutenir

les enseignants par un programme de recyclage sur les nouvelles méthodes

d'enseignement de l'orthographe

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Page 198: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

ANNEXES

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Page 199: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Annexe 1 : Protocoles d'entretien métagraphique

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Page 200: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Protocole d'entretien

Enregistrement

Chaque entretien sera enregistré au magnétophone. Vérifier avant chaque entretien l'état

du matériel (appareil, pile, cassette...).

Déroulement

- 2 étapes principales :

1) le questionnaire général portant sur les perceptions des élèves quant au niveau de

difficulté de l'orthographe française et de leur propre maitrise de cette orthographe ;

2) la dictée et la verbalisation des élèves sur leur manière d'orthographier

l r e étape : les questions générales

Ces questions doivent permettre de mettre l'élève à l'aise et de mieux connaître sa

relation avec l'orthographe française.

1. Saluer l'élève.

2. Lui expliquer en gros l'objectif de l'entretien en insistant sur le fait qu'il ne sera pas du

tout noté, qu'il s'agit plutôt d'un entretien de recherche qui vise à mieux comprendre

comment les élèves de son âge orthographient, et que les réponses qu'il fournira ne seront

pas connues de son enseignant.

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Page 201: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

1. Lui poser les questions suivantes

1. Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe? Pourquoi?

2. Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? Pourquoi?

3. Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?

4. Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?

- pendant que tu écris?

- après avoir fini d'écrire?

5. Que trouves-tu facile en orthographe?

6. Que trouves-tu difficile en orthographe? Note. Si l'élève a de la peine à nommer les différentes zones de l'orthographe, le chercheur pourra lui

fournir des précisions :

- la conjugaison;

- l'accord de l'adjectif;

- l'accord du verbe;

- l'accord du participe passé;

- les lettres que l'on n'entend pas à la fin des mots.

Ces questions sont inspirées de Bétrix-Koehler (1991)

2e étape : la dictée et l'entretien métagraphique sur celle-ci

1. Donner la dictée ainsi (prévoir papier et crayon) :

- Demander à l'élève de s'identifier sur la feuille de dictée.

- D'abord lire le texte au complet.

- Ensuite relire le texte par unités de sens, chacune reprise 3 fois.

- Enfin relire le texte au complet.

- Donner à l'élève quelques minutes pour se relire et se corriger.

186

Page 202: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Dictée : Une route périlleuse

Les roues de la Toyota mordaient nerveusement la route tantôt pierreuse, tantôt nue qui

menait vers la capitale Libreville. Le chemin formait un passage étroit dans l'épaisse

forêt vierge qui couvrait la région. La voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant

dans la boue les montées abruptes. Mes compagnons et moi étions basculés à gauche,

puis à droite, puis réinstallés brutalement sur nos sièges. Les voyageurs à bout et sans

voix portaient d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri. Le chauffeur

ralentissait devant les trous, freinait et repartait pour stopper à nouveau quelques mètres

plus loin. Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie !

Il était insupportable de plonger son regard dans ces gouffres menaçants !

2. Poser les questions suivantes à l'élève dans cet ordre, sans jamais utiliser de

métalangage et sans jamais lui indiquer si ses graphies sont bonnes ou mauvaises :

A. Phonogrammes

1. Si l'élève a bien écrit compagnon, lui demander pourquoi il a écrit

différemment le premier [5]: de com et le deuxième [5]: gnon.

Si l'élève n'a pas fait la différence entre les deux graphèmes, lui demander s'il est

certain de son orthographe et pourquoi il a écrit le mot de cette façon.

2. À propos de nerveusement et de menaçant, demander à l'élève qui a bien

orthographié de justifier les deux graphies de [â] (-ont et de -ent). À l'élève qui

n'a pas bien fait cette distinction, lui demander s'il est certain de son orthographe

et pourquoi il a écrit les deux mots de cette façon.

B. Les morphogrammes grammaticaux

3. (Sujet-verbe) Demander à l'élève d'expliquer pourquoi il a écrit de cette façon

mordaient dans la phrase Les roues de la Toyota mordaient la route... et

187

Page 203: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

bordaient dans la phrase Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices

qui bordaient la route !

4. (Adjectif épithète) Demander à l'élève pourquoi il a écrit nue de cette façon

dans la première phrase. Même question pour abruptes dans la 3e phrase La

voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant les montées abruptes.

5. (Participe passé avec être) Demander à l'élève pourquoi il a écrit basculés de

cette façon dans la 4e phrase Mes compagnons et moi étions basculés à gauche ,

puis à droite.

6. (Distinction infinitif-participe) : Demander à Félèves pourquoi il a écrit

réprimer de cette façon dans la 5e phrase Les voyageurs à bout et sans voix

portaient d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri.

C. Les morphogrammes lexicaux

7. (Famille lexicale) Demander à l'élève pourquoi il a écrit instinct de cette façon

dans la 5e phrase Les voyageurs à bout et sans voix portaient d'instinct la main à

la bouche, comme pour réprimer un cri et s'il est certain de son orthographe.

8. (Connaissance des affixes) Demander à l'élève pourquoi il a écrit [s] de'cette

façon dans insupportable de la dernière phrase 77 était insupportable de plonger

son regard dans ces gouffres menaçants.

D. Les logogrammes

9. Demander à l'élève pourquoi il a écrit voix de cette façon dans la 5e phrase Les

voyageurs à bout et sans voix portaient d'instinct la main à la bouche, comme

pour réprimer un cri. Et pourquoi il a écrit voie de cette façon dans la 7e phrase

Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie !

10. Même question pour boue dans la 3 e phrase La voiture faisait des bruits

monstrueux en gravissant dans la boue les montées abruptes. Même question

pour bout dans Les voyageurs à bout et sans voix...

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Page 204: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Annexe 2 : Deux exemples de dictée corrigée

Premier exemple : copie d'un élève de 6e

Deuxième exemple : copie d'un élève de 3e

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Page 206: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

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Page 207: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Annexe 3 : Deux exemples de verbatim complet

Premier exemple : verbatim réalisé avec un élève de 6e

Deuxième exemple : verbatim réalisé avec un élève de 3e

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Page 208: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Premier exemple

45.G.6. f -LNLM

12 ans.

C : Est-ce que tu te trouves fort ou faible en orthographe?

E : Je suis faible.

C : Pourquoi?

E : Parce que ce n'est pas ma matière.

C : Ah oui! Quelle est alors ta matière?

E : Les maths.

C : Trouves-tu l'orthographe française facile ou difficile?

E : Oui, c'est difficile.

C : Pourquoi?

E : Euh...comme ça...

C : Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible?

E : Je relis mon texte.

C : Que fais-tu si tu as un problème en orthographe pendant que tu rédiges?

E : J'écris d'abord le mot et je reviens sur ça à la fin de la dictée.

C : Que trouves-tu facile en orthographe?

E : Rien. Tout est difficile.

Nous allons le vérifier avec le texte de dictée de tantôt.

193

Page 209: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

A. Les phonogrammes

C : Prenons le mot compagnons. Nous avons le son [5] à deux niveaux dans ce mot.

Pourquoi l'écris-tu différemment? (L'élève a écrit compagnions).

Ce qui m'intéresse surtout c'est la manière dont tu écris le son [5] à ces deux endroits (-

comp et -gnon). Pourquoi [5] est-il écrit différemment?

E : (Longue hésitation).. .Parce que c'est comme ça que ça s'écrit.

C : Passons à nerveusement et menaçants. Nous avons le son [a] dans ces deux mots.

Pourquoi ce son [a] est écrit différemment?

E : Longue hésitation...

C : Quelle est la nature de nerveusement?

E : Long silence...

C : Quelle est la nature de menaçants?

E : Aucune réponse.

(Les deux mots sont bien écrits mais menaçant n'est pas accordé)

B. Les morphogrammes grammaticaux

C : Regardons mordaient et bordaient. Pourquoi écris-tu ces deux mots de cette façon?

(L'élève a écrit mordait et bordait).

E : J'écris mordait ainsi parce qu'il s'accorde avec Toyota. C'est la Toyota qui mordait.

C : Et bordait, pourquoi l'écris-tu avec ait?

E : Euh...aucune réponse.

C : Passons au mot nue. Pourquoi l'écris-tu ainsi?

E : Bein...il s'accorde avec tantôt.

C : Es-tu certain de son orthographe (l'orthographe de nue)?

(Nue est bien accordé).

E:Oui.

194

Page 210: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C : Passons à basculés. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?

E : Hésitation...

C : Qui sont basculés?

E : Mes compagnons...

C : Alors, est-ce bien écrit?

E : Non.

C : Pourquoi?

E : Il fallait mettre r à la fin.

(L'élève a écrit basculée).

C : Prenons le mot réprimer. (L'élève a écrit déprimer). Que veut dire déprimer?

E : Aucune réponse.

C : Pourquoi as-tu mis déprimer au lieu de réprimer?

E : C'est ce que j 'ai entendu.

C : Passons au mot abruptes. Es-tu certain de l'orthographe de ce mot? (L'élève a écrit

abrupte mais sans s).

E : Oui.

C : Qu'est-ce qui est abruptes?

E : Les montées.

C : Alors, pourquoi écris-tu abrupte sans 5?

E : Aucune réponse.

C. Les morphogrammes lexicaux

C : Prenons le titre de la dictée, une route périlleuse. Pourquoi écris-tu le mot périlleux de

cette façon? (L'élève a écrit périeusé).

E : J'ai écrit comme j 'ai entendu.

C : Quel est le radical de ce mot?

E : Je ne sais pas.

195

Page 211: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C : Regardons le mot cri. (L'élève a écrit crie). Pourquoi l'écris-tu ainsi?

E : Parce que ce mot vient du mot crier.

C : Passons à instinct. (L'élève a écrit destin). Pourquoi écris-tu destin au lieu d'instinct

(de instinct).

E : Je ne pouvais pas savoir que c'était avec l'apostrophe. Moi, j 'ai pensé au mot destin.

C : Et le sens? Et le contexte? Les deux mots ont-ils le même sens?

E : Non.

C : Regardons le mot passage. Pourquoi l'écris-tu de cette façon? (L'élève a écrit

pasage).

E : C'est par rapport à la prononciation du prof. J'écris ce que ce que je comprends.

C : Prenons tantôt. Pourquoi l'écris-tu de cette façon? (L'élève a écrit tanto).

E : Parce que c'est comme ça que ça se prononce.

C : Passons aii mot insupportable. Comment est formé ce mot? (L'élève a écrit

insuportable).

E : Il est formé d'un préfixe insuppor et du radical table.

D. Les logogrammes

C : Prenons vote et voie. (L'élève a écrit sans voir au lieu de sans voix). Pourquoi écris-tu

voir à la place de voix?

E : Je n'ai pas bien compris.

C : Passons à boue et bout. Pourquoi les écris-tu de cette façon? Es-tu certain de

l'orthographe de ces mots? (L'élève a écrit la bout et about).

E : Non, Mr.

C : Pourquoi les écris-tu de cette façon?

196

Page 212: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

E : J'écris comme je connais.

Fin de l'entretien.

Remarque : Même si cet élève déclare des stratégies pertinentes (laisser un espace pour

revenir après, relire le texte plusieurs fois), il reconnaît que son niveau est fragile en

orthographe et l'explique par le manque d'intérêt accordé à cette matière. 58 erreurs

d'orthographe ont été relevées sur sa copie : 26 erreurs morphogrammiques (avec 21

erreurs grammaticales et 5 erreurs lexicales), 15 erreurs phonétiques, 15 erreurs

phonogrammiques, 1 erreur idéogrammique et 1 erreur logogrammique.

197

Page 213: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Deuxième exemple de verbatim

1. F. 3. F-L.POG 17 ans

C : Est-ce que tu te trouves bonne ou faible en orthographe?

E : J'essaie de tenir.

C : C'est-à-dire?

E : Euh...je me trouve quand même bonne.

C : Pourquoi?

E : Parce que j 'ai d'abord de bonnes moyennes...Et puis, parce que j'adore le français.

Donc, je fais tout pour avoir de bonnes notes en orthographe.

C : Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile?

E : Ce n'est pas du tout difficile pour celui qui connaît ses règles d'orthographe et de

grammaire. Et puis, il faut surtout beaucoup lire pour maîtriser les règles et l'orthographe

des mots qui existent, comme c'est ce qui cause beaucoup de problèmes.

C : Est-ce que tu maîtrises ces règles?

E : Non. Juste un peu, pas toutes.

C : Pourquoi?

E : Parce que je suis pas très portée sur la lecture. La plupart du temps, je ne lis que

quand on me donne un livre à lire ou alors si je m'ennuie, je prends un livre et je lis.

C : Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?

E : Euh...je n'ai pas une manière particulière ...euh...j'essaie de voir mes accords...

C : Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?

E : J'essaie de surveiller mes accords pendant que j'écris et après, je me relis pour

surveiller la logique de la phrase.

198

Page 214: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C : Que trouves-tu facile en orthographe?

E : Les accords des participes passés.

C : Que trouves-tu difficile en orthographe?

E : Ce sont des mots, certains mots ne s'écrivent pas comme on prononce. Ces mots-là

trompent. On pense que c'est comme on a prononcé, alors que c'est pas ça.

C : As-tu un exemple de ce genre de mots?

E : Euh.. .non pas en tête.

C : Prenons le texte que nous venons d'avoir en dictée.

A. Les phonogrammes

C : Intéressons-nous d'abord au mot compagnons. Es-tu certaine de son orthographe?

(L'élève a écrit compagnants).

E : Non. Je peux dire que c'est l'un des mots qui me trompent. Quand on dicte le mot

compagnon, on peut penser qu'il y a ant, alors qu'on dit compagnon, donc on.

C : Ok, un autre aspect c'est que dans ce mot, il y a le son [5] à deux niveaux. Pourquoi

l'écris-tu différemment?

E : Bein.. .là j'applique la règle qui dit que n devant/? devient m.

C : Passons à nerveusement et menaçants. On a le son [a] dans ces deux mots. Pourquoi

les écris-tu de manière différente?

E : Pour écrire nerveusement, je me base sur le fait que le mot a déjà son radical...

C : Quel est ce radical?

E : nerveux, nerveuse. Puis après je cherche à mettre le suffixe en rapport avec le mot lui-

même. Ce suffixe c'est ment. C'est pourquoi ça fait nerveusement.

C : Alors, quelle est la nature de ce mot?

E : C'est un adjectif qualificatif.

199

Page 215: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C : Et menaçant?

E : menaçant est un adverbe.

C : Es-tu certain de ce que tu dis?

E : Oui, bon. Je suis pas très bonne en orthographe.

C : Pourquoi l'écris-tu avec an au lieu de en par exemple?

E : c'est parce qu'il y a c cédille.

B. Les morphogrammes grammaticaux

C : Ok. Prenons d'abord le mot voiture. Pourquoi l'écris-tu avec s à la fin? (L'élève a

écrit la voitures).

E : (sourire...) en fait, je suis distraite de nature. Et puis, je n'ai même pas relu ma dictée.

C : Ok, si tu avais relu ton texte, comment tu l'aurais écrit?

E : En fait, il n'y a pas d's.

C : Prenons mordaient et bordaient. Pourquoi les écris-tu ainsi? Es-tu certaine de leur

orthographe?

E : Oui, j ' en suis certaine.

C : Pourquoi les écris-tu de cette façon?

E : Ici, on dit les roues de la Toyota mordaient...je pose la question qu'est-ce qui

mordaient? Réponse : les roues. Donc mordaient s'accorde avec les roues.

De même, je pose la question qu 'est-ce qui bordaient la voie? Réponse : ce sont des

fonds noirs; donc, bordaient s'accorde avec les fonds noirs.

C : Prenons le mot nue. Comment justifies-tu son orthographe? Pourquoi l'écris-tu de

cette manière?

E : nue s'accorde avec la route.

C : Pourquoi?

E : Parce que nue ici est un adjectif qualificatif.

C : Passons au mot abruptes. Es-tu certaine de son orthographe?

200

Page 216: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

E :Non...

C : Pourquoi?

E : Parce que j 'ai d'abord mis a préposition; après, j 'ai effacé. En fait, je ne connais pas

ce mot. Je l'entends rarement, j'avoue.

C : As-tu une idée du sens de ce mot?

E : Euh...on peut dire une voie cabossée, bosselée, dangereuse, selon le contexte.

C : Passons à basculés. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?

E : Parce qu'il s'accorde avec nous.

C : Pourquoi s'accorde - t-il avec nous justement?

E : C'est un verbe conjugué...euh...un participe passé employé avec l'auxiliaire être. Il

s'accorde alors avec son sujet.

C : Lequel?

E : mes compagnons et moi...sujet pluriel.

C : Passons au mot réprimer. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?

E : C'est parce que le verbe est précédé de la préposition pour. Donc, il se met à

l'infinitif.

C. Les morphogrammes lexicaux

C : Regardons le mot instinct. Es-tu certaine de son orthographe?

E : Oui.

C : As-tu déjà rencontré ce mot au cours de tes lectures?

E : Oui.

C : Peux-tu me donner un autre mot de la même famille qu'instinct?

E : Inceste... euh... instinctivement.

C:Ok.

C : Passons à insupportable. Es-tu certaine de son orthographe?

E : Oui.

201

Page 217: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

C : Pourquoi l'écris-tu de cette façon? De quoi est-il formé?

E : Ce mot est formé d'un radical support^ du préfixe in et du suffixe able.

D. Les logogrammes

C : Passons à voix et voie. Pourquoi écris-tu ces deux mots de manière différente?

E : On peut d'abord dire que ces deux mots sont des homonymes. Le premier mot, il

s'agit du timbre vocal; il s'écrit v-o-i-x. Le deuxième mot, c'est la route; lui, il s'écrit

v-o-i-e.

C : Passons à boue et bout. Pourquoi les écris-tu de manière différente?

E : Je les écris différemment parce qu'il y a une différence entre eux. La différence qu'il

y a c'est que la boue c'est la terre mélangée avec de l'eau; il s'écrit b-o-u-e et c'est un

GN.

Alors que à bout est un GNP et signifie fatigué, dépassé; ça s'écrit avec à (préposition) b-

o-u-t.

Fin de l'entretien

Remarques : Cette élève associe lecture et orthographe. Elle a une bonne connaissance

grammaticale, de bonnes stratégies pour éviter des erreurs d'orthographe. Mais ses

explications sont chancelantes. Par exemple quand, elle justifie l'usage dés sons an et en

par la présence de c cédille.

On remarque également qu'elle établit mal la relation entre le nom et le déterminant (la

voitures). On constate, enfin, qu'elle a des problèmes de discrimination phonologique.

Au regard des erreurs d'orthographe qu'elle a commises en dictée (7), elles se

répartissent de la manière suivante : 4 erreurs morphogrammiques essentiellement

grammaticales, 2 erreurs phonogrammiques et 1 erreur phonétique.

202

Page 218: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Annexe 4 : Documents officiels

1. Lettre d'approbation du comité d'éthique de l'Université Laval

2. Lettre du Vice-doyen de la Facultés des Sciences de l'Éducation de l'Université Laval au Secrétaire Général du ministère de l'Éducation nationale du Gabon

3. Lettre du Secrétaire Général du ministère de l'Éducation nationale du Gabon au Vice-doyen de la Faculté des Sciences de l'Éducation de l'Université Laval

4. Autorisation d'accès dans les établissements scolaires du Gabon

203

Page 219: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

UNIVERSITÉ

LAVAL VV^-f^ctorit t U rfcb-nC** *t I U Comrt/ HHMHPHI éi b nÉH-B

Québec, le 26 février 2008

! Monsieur Alphonse-Donald' Nze-Wagbe Monsieur Claude Simard 2096, boul. René-Lévesque Ouest Québec (Québec) G1V2K9

Objet: Projet <de recherche intitulé : Les erreurs d'orthographe dans les productions écrites des élèves du premier cycle du secondaire du Gabon (Numéro d'approbation : 2008-027)

Monsieur, /• . — """• ' . ' • . • • • ; •'-.' -SU '. ïfi¥ï} ■■■■. : . '

Le Comité d'éthique de. la recherche en psychologte'eien scieBèèsde fléë-ieatron a pris connaissance du projet cité en objet ainsi que dc votre réponse à sa correspondance du 20 février 2008 pour laquelle il vous remercie. Le Comité considère que les. précisions apportées et les modifications effectuées au formulaire de consentement satisfont à ses demandes. Par conséquent, le Comité approuve ledit projet pour une période d'un an, soit jusqu'au l " m a r a 2009.

Toutefois, si les entrevues se déroulaient dans un local distinct, le Comité vous demande d'indiquer cette information sur le formulaire de consentement. Il est important de retourner au Comité la version finale du formulaire dé consentement mentionnant le numéro d'approbation (2008-027) suivi de la date d'approbation qui est celle de la présente lettre, faute de quoi le projet pourrait sembler ne pas avoir été approuvé par le Comité.

Le Comité d'éthique devra être informé et devra réévaluer ce projet advenant toute modification ou l'obtention de toute nouvelle information qui surviendrait à une date ultérieure à celle de la présente approbation et qui comporterait des changements dans le choix des sujets, dans la manière d'obtenir leur consentement ou dans les risques encourus; De plus, le Comité doit être avisé si le projet de recherche est interrompu pour une raison quelconque, qu'il soit financé ou non, y compris en raison de la suspension ou de l'annulation d'approbation d'un organisme subventionnaire.

Le projet devra être réévalué un an i partir de cette date d'approbation, te chercheur indiquant brièvement l'évolution et le déroulement de sa recherche, le nombre de participant, recrutés et si le projet se déroule comme prévu. Un formulaire de demande de renouvellement est disponible sur lé site Internet du Comité à l'adresse suivante : http://www.cerul.ulaval.ca.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de nos sentiments les meilleurs. y - .

Armelle Spain, présidente Comité d'éthique de la recherche en psychologie et en sciences de l'éducation Maison MchaeNJohn-Brofjhy 418 656-213lrposte 4506 2241. chemin Siinte-foy Télécopieur : 418 656-2840 Quebec M M 01V 0*6 c e f e v t r . i i - . w _ c _ . . «NAD* www cerul-tarai ca

204

Page 220: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

mom UNIVERSITE m l LAVAL

Faculté des sciences de l'éducation Vice-decanal aux études supérieures, à la recherche età la formation continue

Québec, le 20 novembre 2007

Monsieur Le Secrétaire Général ' y . DU Ministère de l'Éducation nationale De rinstnicjtion civique Et de l'Éducatiorvpopulaire du Gabon

Objet : Cueillette des données

Monsieur |é Secrétaire Général,

La présente est.pour vous demander d'autoriser une cueillette des données dans différents lycées et collèges de votre pays par Monsieur Alphonse-Donald NZE-WÂGHE en vue de la réalisation de son projet de thèse de doctorat à l'Université Laval. Ce dernier désire travailler sur les erreurs d'orthographe dans des productions écrites des élèves. Cette recherche nécessite des enquêtes dans la période de février-mars auprès des acteurs concernés, à savoir ; les élèves et les enseignants du cycle secondaire."

>• L'autorisation sollicitée est exigée par l'Université Laval et le Programme canadien de bourses de la Francophonie (PÇBF) qui veulent s'assurer que les autorités compétentes dans le pays d'origine du candidat apportent les appuis nécessaires à ia réalisation dé son projet de recherche. -" ' V - . . ' \

Lé candidat devra également s'assurer d'obtenir les autorisations rrôcessaires du Comté d'éthique de l'Université Laval. " . ' .

Veuillez agréer, Monsieur le Secrétaire Général, l'expression de ma considération distinguée. . ' - - . . ' •

èrV Pierre Page Vice-doyen aux études supérieures, à la recherche et à la formation continue

PP/nc i i

Pavillon des Sciences de l'éducation Local 234 .

- -ûébec (Québec) 61I.7P4 CANADA

418 656-2131, poste 3421 Télécopieur: 418556-73.7 [email protected] www.fse.u1aval.ca

205

Page 221: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

Ministère de l'Éducation Nationale, de l'Instruction civique, ■.".. chargé de l'Éducation populaire

REPUBLIQUE GABONAISE Union -Travail- Justice

SECRÉTARIAT GÉNÉRAL

NO 5 0 4 0 MENICEP Libreville/le 0 6.DEC. 2007

Objet : Cueillette des données de Alphonse-Donald NZE-WAGHE au Gabon

Le Secrétariat Général

Monsieur Pierre Page Vice doyen à la recherche

et aux études de 2e et 3e cycles Université Laval Québec- Canada

Monsieur le Vice doyen,

J'ai l'honneur d'accuser réception de votre correspondance dû 20 novembre 2007 relative à la collecte des données de Monsieur Alrjhonse-Donald NZE-WAGHE, candidat au doctorat en didactique du français, activité prévue à partir du mois de février 2007.

En conséquence, c'est avec grand plaisir que nous allons accueillir Monsieur NZE-WAGHE et mettrons à sa disposition, dans la mesure de nos moyens, ce dont il aura besoin pour mener à bien sa cueillette des données.

Veuillez agréer, Monsieur le Vice doyen, l'expression de ma considération distinguée.

Sidoine MBOUNAVS

206

Page 222: Les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du ...

MINISTERE DE L'EDUCATION NATIONALE. ET ΠL'INSTRUCTION CIVIQUE

REPUBLIQUE GABONAISE UNION-TRAVAIL^USTrCE

SECRETARIAT GENERAL

DIRECTION GENERALE DES ENSEIGNEMENTS ETDELAPEOAGOGIE

DIRECTICf. DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE GENERAL

N_4_3 /MENIC/SG/DGEP/DE2

AUTORISATION D'ACCES

Je soussigné, Directeur dès Enseignements du Second Degré Général, autorise Monsieur Alphonse-Donald NZE-WAGHE, candidat au doctorat en didactique du français à .'Université Laval Québec, à procéder, dans le cadre de ses recherches, à la collecte des données au sein des établissements cie Libreville et des provinces qu'il aura ciblés. ',."

Eh fot cie quoi, la présente autorisation est établie, sans rature ni surcharge, pour servir et valoir ce que de droit. . • ■ . ■ %. '

Fait à Libreville, le 04/4/08

Gabriel NANG MINTSA ii

i 1

Copies: - SG

} ATCR - DGEP

207

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