Les Echos - 09 12 2020

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MERCREDI 9 DÉCEMBRE 2020 ISSN0153.4831 113 e ANNÉE NUMÉRO 23344 40PAGES Antilles Réunion 4,10 €. Belgique 3,60 €. Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 3£80. Grèce 4,20 €. Italie 4,40 €. Luxembourg 3,80 €. Maroc 35 DH. Suisse 5,90 FS. Tunisie 5,50 TND. Zone CFA 3100 CFA. People first. Solutions follow. * *C’est avec l’Humain que se révèlent les solutions. SUR L’ÉCLAIRAGE ÉCO À 7H15 DANS LE 7H-9H DE MATTHIEU BELLIARD RETROUVEZ NICOLAS BARRÉ Défense Un nouveau porte-avions nucléaire remplacera le « Charles de Gaulle » en 2038 // P. 22 Télécoms Orange sacré meilleur réseau mobile pour la dixième année de suite // P. 25 iStock La France redoute une vague de faillites l’an prochain Boris Johnson à la sortie du 10, Downing Street, mardi, à Londres. Photo Daniel leal-Olivas/AFP Pourquoi Wall Street bat tous les records l Les actions américaines sont aussi chères que pendant la bulle du début des années 2000. l La faiblesse historique des taux d’intérêt va conti- nuer de porter les marchés. l L’euphorie boursière a bénéficié aux particuliers. // PAGE 30 ET L’ÉDITORIAL D’ELSA CONESA PAGE 15 Mark Lennihan/AP/Sipa NÉGOCIATIONS Boris Johnson se rend ce mercredi soir à Bruxel- les pour y dîner avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Au menu, le déblocage des négociations sur le Brexit pour tenter d’arracher un accord encadrant la relation future entre le Royaume-Uni et l’UE. Mais les deux camps affi- chaient mardi leur pessimisme, le négociateur en chef européen, Michel Barnier, allant jusqu’à esti- mer les chances d’un « no deal » désormais supérieures à celles d’un accord. Londres et Bruxelles ont pourtant trouvé, mardi, un compromis pour appliquer ce qu’ils avaient décidé l’an dernier dans l’accord de retrait. // PAGE 6 mecalux.fr/logiciel 01 60 11 92 92 Logiciel de gestion d’entrepôt . Contrôle du stock en temps réel . Baisse des coûts . Préparation de commandes . Adaptable à l’ e-commerce . Élimination des erreurs Software Solutions Mathématiques : les élèves français cancres de la classe européenne ÉDUCATION L’enquête internatio- nale Timss, consacrée au niveau des élèves en mathématiques et en sciences, publiée mardi, est acca- blante pour la France. Parmi les pays de l’Union européenne et de l’OCDE, l’Hexagone occupe l’avant- dernière place. Les collégiens ont perdu l’équivalent d’une année scolaire depuis 1995, date de la pré- cédente comparaison. La part des élèves les plus avancés n’y est que de 2 %, contre 11 % dans l’UE et 50 % à Singapour. Le plan mis en place en 2018, centré sur la formation des enseignants, a été conçu pour « remonter la pente », assure le ministre de l’Education, Jean- Michel Blanquer. // PAGE 3 Médicaments : le casse-tête du juste prix L’analyse d’Etienne Lefebvre Le débat autour des futurs vaccins anti-Covid le montre : la fixation du prix des médica- ments est le fruit d’un rapport de force entre pouvoirs publics et laboratoires pharmaceuti- ques. Si atteindre le « juste prix » semble illusoire, une « juste négociation » s’impose pour éviter que la facture s’envole. // PAGE 10 Brexit : Bruxelles et Londres affichent leur pessimisme CONJONCTURE Tout le monde les redoutent mais le risque ne s’est pas encore matérialisé. Mal- gré une chute de l’activité écono- mique sans précédent en 2020, sur les douze derniers mois, les défaillances d’entreprises ont baissé d’un tiers. Au cours des trois derniers mois, la chute atteint même 37 %, selon le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. Le sou- tien public apporté aux entrepri- ses et l’indulgence des Urssaf expliquent cette accalmie, qui ne devrait cependant pas durer. Avec la fin progressive des dispo- sitifs d’aides, la vague de faillites devrait se concrétiser d’ici à l’été prochain. // PAGE 2

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MERCREDI 9 DÉCEMBRE 2020

ISSN0153.4831 113e ANNÉENUMÉRO 23344 40PAGES

Antilles Réunion 4,10 €. Belgique 3,60 €.Espagne 4,40 €. Grande-Bretagne 3£80.Grèce 4,20 €. Italie 4,40 €. Luxembourg3,80 €. Maroc 35 DH. Suisse 5,90 FS. Tunisie5,50 TND. Zone CFA 3100 CFA.

People first.Solutions follow.**C’est avec l’Humain que se révèlent les solutions.

SUR

L’ÉCLAIRAGE ÉCO À 7H15DANS LE 7H-9H DE MATTHIEU BELLIARD

RETROUVEZ NICOLAS BARRÉ

Défense Un nouveau porte-avions nucléaire remplacera le « Charles de Gaulle » en 2038 // P. 22

Télécoms Orange sacré meilleur réseau mobile pour la dixième année de suite // P. 25

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La France redoute une vague de faillites l’an prochain

Boris Johnson à la sortie du 10, Downing Street, mardi, à Londres. Photo Daniel leal-Olivas/AFP

Pourquoi Wall Street bat tous les records

l Les actions américaines sont aussi chères que pendant la bulle du début des années 2000.l La faiblesse historique des taux d’intérêt va conti-nuer de porter les marchés.l L’euphorie boursière a bénéficié aux particuliers.

// PAGE 30 ET L’ÉDITORIAL D’ELSA CONESA PAGE 15

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NÉGOCIATIONS Boris Johnson se rend ce mercredi soir à Bruxel-les pour y dîner avec la présidentede la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Au menu, le déblocage des négociations surle Brexit pour tenter d’arracher un accord encadrant la relation future entre le Royaume-Uni et l’UE. Mais les deux camps affi-

chaient mardi leur pessimisme, le négociateur en chef européen, Michel Barnier, allant jusqu’à esti-mer les chances d’un « no deal » désormais supérieures à celles d’un accord. Londres et Bruxellesont pourtant trouvé, mardi, un compromis pour appliquer ce qu’ils avaient décidé l’an dernier dans l’accord de retrait. // PAGE 6

mecalux.fr/logiciel 01 60 11 92 92

Logiciel degestiond’entrepôt

. Contrôle dustocken temps réel

. Baissedescoûts

. Préparationdecommandes

. Adaptable à l’e-commerce

. Éliminationdeserreurs

Software Solutions

Mathématiques : les élèves français cancres de la classe européenne

ÉDUCATION L’enquête internatio-nale Timss, consacrée au niveau des élèves en mathématiques et en sciences, publiée mardi, est acca-blante pour la France. Parmi les pays de l’Union européenne et de l’OCDE, l’Hexagone occupe l’avant-dernière place. Les collégiens ont perdu l’équivalent d’une année scolaire depuis 1995, date de la pré-cédente comparaison. La part des élèves les plus avancés n’y est que de 2 %, contre 11 % dans l’UE et 50 %à Singapour. Le plan mis en place en 2018, centré sur la formation desenseignants, a été conçu pour « remonter la pente », assure le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer. // PAGE 3

Médicaments : le casse-tête du juste prixL’analyse d’Etienne Lefebvre

Le débat autour des futurs vaccins anti-Covid le montre : la fixation du prix des médica-ments est le fruit d’un rapport de force entre pouvoirs publics et laboratoires pharmaceuti-ques. Si atteindre le « juste prix » semble illusoire, une « juste négociation » s’impose pour éviter que la facture s’envole. // PAGE 10

Brexit : Bruxelles et Londres affichent leur pessimisme

CONJONCTURE Tout le monde les redoutent mais le risque ne s’est pas encore matérialisé. Mal-gré une chute de l’activité écono-mique sans précédent en 2020, sur les douze derniers mois, les défaillances d’entreprises ont baissé d’un tiers. Au cours des trois derniers mois, la chute atteint même 37 %, selon le

Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. Le sou-tien public apporté aux entrepri-ses et l’indulgence des Urssaf expliquent cette accalmie, qui ne devrait cependant pas durer. Avec la fin progressive des dispo-sitifs d’aides, la vague de faillites devrait se concrétiser d’ici à l’été prochain. // PAGE 2

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« LES ÉCHOS » / SOURCE : XERFI / PHOTO : SIPA

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au travail. Après ce qui devait être un ultime rendez-vous, vendredi dernier et un autre rajouté lundi en fin d’après-midi.

Des avancéesLes évolutions du texte annoncées par le patronat en fin de soirée ont été reprises dans une nouvelle ver-sion du projet d’accord. Les syndi-cats ont transmis par écrit mardi leurs observations et le patronat doit leur faire une nouvelle proposi-tion. Ultimes échanges avant la conclusion d’un accord interprofes-sionnel national ? En tout cas, aprèsde nombreux mois de surplace, « lanégociation a enfin démarré ven-dredi dernier », a souligné Serge Legagnoa de FO. Lundi, la discus-

sion « s’est focalisée sur les points durs », a souligné Catherine Pin-chaut de la CFDT. Le patronat a fait alors des gestes d’ouverture, ont reconnu plusieurs syndicats, « même s’il reste beaucoup à faire ». « Le texte reçu dernièrement apporteun certain nombre d’avancées, je suisassez confiante », soulignait ainsi Mireille Dispot, de la CFE-CGC.

La volonté de la CPME d’obtenirl’inscription dans le Code du travaild’une disposition réduisant à une stricte obligation de moyens de pré-vention la responsabilité des employeurs sur la santé de leurs salariés constituait un casus belli pour tous les syndicats. Lui a été substitué un « rappel » du contenu de « la jurisprudence » qui « a admis

qu’un employeur et ses délégataires pouvaient être considérés comme ayant rempli leurs obligations s’ils ont mis en œuvre des actions de prévention ».

L’épouvantail de la médecine de villeLes syndicats ont, eux, accepté de discuter d’un sujet qui faisait figure d’épouvantail : la participation des médecins de ville au suivi des sala-riés, à laquelle l’U2P tient particuliè-rement.

La CFDT est cependant « scepti-que » sur «l’usinage» du dispositif inscrit pour l’instant dans l’accord. « Ça peut se faire, mais ça ne peut pasêtre open bar », explique Catherine Pinchaut, qui insiste sur la nécessité

d’une vision collective de la santé des salariés d’une entreprise via le service de santé au travail. Serge Legagnoa veut d’abord une « expé-rimentation », ce que le patronat exclut a priori.

L’autre point dur des discussionsdémarrées mi-juin portait sur la gouvernance des services de santé au travail, justement, aujourd’hui dans les mains du patronat et plus particulièrement du Medef. La commission de contrôle interne que les représentants des entrepri-ses voulaient supprimer a été réta-blie dans la dernière version, mais ses pouvoirs n’ont pas été étendus. En revanche, le texte acte désor-mais que si la présidence du conseild’administration des services de

santé au travail continuera à être assurée par le patronat, la vice-pré-sidence, qui lui était jusque-là aussi réservée, sera désormais occupée par un représentant des salariés. Il n’y aura pas de présidence tour-nante, mais celle-ci divisait les syn-dicats de toute façon.

L’issue des négociations au menudesquels va figurer aussi le volet consacré à la prévention est très attendue. Le gouvernement avait adressé il y a plus de six mois un document d’orientation précisant aux partenaires sociaux ses atten-tes. Et dans la majorité, la députée Charlotte Parmentier-Lecocq a déjàdit qu’à défaut d’accord d’ici à la fin de l’année, elle déposerait une pro-position de loi sur le sujet. n

Leïla de Comarmond @leiladeco

La treizième sera-t-elle la bonne ? Les partenaires sociaux vont se retrouver ce mercredi en fin d’après-midi pour une nouvelle séance de négociation sur la santé

SOCIAL

Le patronat et les syndicats se retrou-vent ce mercredi en fin de journée pour la treizième fois pour discuter d’une réforme de la santé au travail.

buable – se traduira par moins des faillites qu’en 2019. En tout, les défaillances devraient baisser de 15.000 cette année par rapport à l’an passé. Du jamais-vu.

Mais évidemment, « cette accal-mie ne pourra pas durer », estime leConseil national des greffiers des tribunaux de commerce dans son baromètre publié ce mercredi. « Aujourd’hui, les chefs d’entreprise sont en attente. Ils savent que cet étatest transitoire. Une fois que le passif sera exigible, alors la bulle dans laquelle se trouvent les entreprises éclatera », prévient Sophie Jonval, présidente du Conseil national des greffiers des tribunaux de com-merce. La fin des aides publiques etles remboursements des prêts garantis par l’Etat font craindre une explosion des défaillances l’an prochain.

Moment décisif au deuxième trimestre 2021Si le scénario est certain, l’ampleur de la vague et le calendrier restent à définir. « Cette vague de procédurescollectives touchera en premier lieu les entreprises déjà en difficulté avantla pandémie du Covid-19 et mainte-nues artificiellement hors de l’eau par ces mesures gouvernementa-les », explique le Conseil national.

Pour les économistes d’EulerHermes, le moment décisif pourraitintervenir au deuxième trimestre 2021 lorsque les entreprises françai-ses paieront les impôts de produc-tion et les acomptes trimestriels d’autres taxes. « La politique budgé-taire devra faire plus pour éviter une vague de licenciements et d’insolva-bilité en France », concluent les éco-nomistes de l’assureur-crédit dans une étude récente.

« Il faudra tout faire pour que laréduction du filet de sécurité apportépar l’Etat aux entreprises se fasse petit à petit, que cette réduction des dispositifs de soutien public soit pro-gressive », insiste Sophie Jonval. Il faut l’espérer car au-delà des seu-les conséquences économiques, le plongeon de l’activité fait des dégâts humains. « Au tribunal de commerce, je rencontre chaque semaine des chefs d’entreprise en dif-ficulté. Leur état de délabrement psy-chique et moral est pire que d’habi-tude. Ils ne voient pas d’issue à cette crise et ont l’impression d’avoir tout fait, tant sur le plan des mesures sani-taires qu’économiques », dit Sophie Jonval. Le Numéro Vert de l’associa-tion Apesa, qui vient en aide aux patrons en détresse, est submergé d’appels. n

l Cet automne, les défaillances d’entreprises ont encore chuté de près de 40 % par rapport à la même période de l’an passé.l Les aides publiques et le refus des Urssaf d’assigner en justice les mauvais payeurs expliquent cette baisse.

Covid : la vague de faillites est décalée à l’année prochaine

Comment continuer à soutenir lesentreprises en difficulté au cours des prochains mois, quand l’éco-nomie continuera à tourner en sous-régime ? La question se pose car, comme le dit Gilles Moëc, cheféconomiste d’AXA Investment Managers, « le véritable redémar-rage de l’activité ne devrait interve-n i r q u ’ e n d e u x i è m e p a r t i e d’année 2021, avec l’immunité col-lective produite par les vaccins, cettefois-ci de manière permanente. Le second semestre 2021 devrait mar-quer la fin du stop-and-go ». Pour « faire la soudure, les politiques éco-nomiques accommodantes vont rester cruciales ». Il sera impossibled’arrêter du jour au lendemain tous les dispositifs publics, mais

aussi de continuer à aider tout le monde pour des raisons compré-hensibles de coût. L’Etat va devoir remettre au pot, mais, mécanique-ment, la Banque centrale euro-péenne (BCE) va aussi devoir agir puisque sans son aide, les charges d’intérêt de l’Etat – pas seulement français – exploseraient.

Des prêts de consolidationPlusieurs solutions existent pour permettre aux entreprises de résis-ter jusqu’à l’arrivée du vaccin. Les prêts garantis par l’Etat ont déjà étéallongés, cependant il n’est pas cer-tain que cela suffise. En France, François Asselin, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), propose des prêts de consolidation.Il s’agirait de regrouper une partie ou tous les emprunts contractés par l’entreprise. Ces emprunts seraient transformés en un prêt unique allongé, via le concours des banques et de l’Etat.

L’idée est d’étaler dans le tempsles engagements des entreprises

pour leur permettre d’y faire face. Avec un problème : demander aux banques de porter ces « nouveaux »prêts créés paraît difficile. Leurs bilans en seraient fragilisés et, en retour, elles pourraient avoir ten-d a n c e à m o i n s c o n s e n t i r d’emprunts à l’avenir, ce qui est la dernière chose dont l’économie aura besoin l’an prochain.

Sans compter que les dettes quebeaucoup d’entreprises ont accu-muléesdurant la pandémie n’ont pas servi à investir mais à assurer leur survie. Elles ne produiront aucun revenu futur, et beaucoup auront du mal à les rembourser. « Il

serait préférable que ce soit la BCE qui porte ces dettes privées avec une maturité allongée », estime Gilles Moëc.

Les autorités monétaires et bud-gétaires vont devoir travailler main dans la main pendant de longs mois pour cicatriser les bles-sures de la crise sur le tissu pro-ductif. Il s’agit incontestablement d’un des grands changements entraîné par le Covid-19 dans la façon de concevoir la politique économique.

Autre possibilité, comme lesmesures sanitaires vont continuerà peser sur la productivité des entreprises dans certains secteurs et qu’une partie de celles-ci ne seront pas viables, en fonction de l’importance de leurs coûts fixes, l’Etat pourrait prendre une partie des salaires à sa charge pendant quelques mois. L’économiste Jean Pisani-Ferry a émis plusieurs fois cette idée à Bercy. Les Allemands, eux, ont préféré faire une subven-tion directe aux coûts fixes des entreprises. — G. C.

Les pistes pour aider les entreprises à tenir en attendant les vaccinsLa véritable reprise de l’économie ne devrait intervenir que dans la seconde moitié de l’année prochaine, avec le plein effet attendu des vaccins. D’ici là, il va falloir aider les entreprises à passer le cap.

Impossible d’arrêter du jour au lendemain tous les dispositifs publics, mais aussi de continuer à aider tout le monde pour des raisons de coût.

Santé au travail : sur quoi bute encore la négociation

Guillaume de Calignon @gcalignon

Elle n’est toujours pas là. Tout le monde la redoute, mais personne ne l’a vu. La vague de faillites d ’e n t r e p r i s e s a n n o n c é e c e t automne n’a pas encore eu lieu. Selon les données recueillies par lesgreffiers des tribunaux de com-merce de France, sur la période du 1er septembre au 30 novembre 2020,7.465 ouvertures de procédures collectives ont été enregistrées, soit une baisse de 37 % par rapport à la même période de 2019 ! Les tribu-naux de commerce ont aussi vu moins de chefs d’entreprise arriver. Sur les douze derniers mois, le nombre de défaillances a chuté d’un tiers en France.

Même si l’activité a plongé avec leCovid-19 et les restrictions sanitai-res, les entreprises ont d’abord été soutenues par l’Etat. Le dispositif d’activité partielle, les exonérations de charges sociales et le fonds de solidarité ont permis à beaucoup d’entre elles de résister jusqu’ici. Ensuite, comme le dit François Asse-lin, le patron de la Confédération despetites et moyennes entreprises (CPME), « les Urssaf n’assignent plus aucune entreprise au tribunal ».

L’accalmie ne pourra pas durerEt finalement, en 2020, l’année d’une crise économique sans précé-dent avec une chute du PIB de l’ordre de 9 %, le « quoi qu’il en coûte » d’Emmanuel Macron et la solidarité nationale – financée par endettement, donc par le contri-

CONJONCTURE

« Au tribunal de commerce, je rencontre chaque semaine des chefs d’entreprise en difficulté. Leur état de délabrement psychique et moral est pire que d’habitude. »SOPHIE JONVALPrésidente du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce

FRANCE Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 FRANCE // 03

de 4e d’aujourd’hui est égal à celui des élèves de 5e d’il y a vingt-quatre ans. »

« Nous avons une pente à remonteret je suis le premier à le dire depuis queje suis arrivé, le niveau de mathémati-ques est beaucoup trop faible », a admis le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, mardi, sur RMC. On tire tout le monde vers le haut et cela prend du temps. » Pour leministre, les mauvais résultats justi-fient le plan qu’il a lancé en 2018, fondé sur « des méthodes pédagogi-ques qui fonctionnent et un plan de formation continue pour les profes-seurs des écoles pour permettre un rebond ».

Formation continue des professeurs des écoles« Le ministère a pris la mesure des enjeux, il y a une forme d’urgence col-lective, le taureau a été pris par les cor-nes », insiste aussi le numéro deux du ministère, Edouard Geffray. Un plan mathématiques, copiloté par ledéputé Cédric Villani et le mathéma-ticien Charles Torossian, a été lancé en février 2018. C’est « trop tôt »pour que les effets se voient sur les élèves testés dans TIMSS, plaide-t-on au ministère : ils étaient entrés en CM1 en septembre 2018.

Le premier volet du plan porte surla formation continue des profes-seurs des écoles avec un système en cascade : 1.600 référents mathéma-tiques de circonscription ont reçu une formation poussée pour, ensuite, former localement les pro-fesseurs du premier degré. Au total, 40.000 enseignants doivent être concernés cette année, sur les

classe où élèves et professeurs se retrouvent pour faire des mathéma-tiques. Avec seulement 2 % d’élèves très avancés contre 11 % pour la moyenne européenne et 50 % à Sin-gapour, les écoles d’ingénieurs qui recrutent les meilleurs élèves scien-tifiques ont du souci à se faire.

Faire des maths à la maisonL’Education nationale balaie que les programmes scolaires puissent être en cause dans les mauvais résultats. Elle insiste sur la forma-tion initiale, notamment pour les professeurs des écoles qui viennent« massivement » de filières non scientifiques. « Quand ils arrivent en master MEEF [métiers de l’ensei-gnement, de l’éducation et de la for-mation, NDLR], premier lieu de recrutement, ces jeunes étudiants ontsouvent une distance par rapport aux mathématiques, ils n’en ont pas fait depuis le lycée », argue Edouard Geffray. La formation initiale a été modifiée « pour que 55 % minimumdu temps de formation soit dédié au français et aux mathématiques », précise-t-il.

Que dire aux parents face à cesmauvais résultats ? « J’espère qu’ils ne vont pas prendre peur, rétorque Edouard Geffray lorsqu’on lui pose la question. Il conseille aux familles de « faire utilement des mathémati-ques à la maison », pour aider les enfants à « se familiariser » avec les mathématiques dès le plus jeuneâge et, surtout, de ne « pas véhi-culer » le fait que tel ou tel enfant n’aurait pas « l’esprit mathéma-tique ». n

Marie-Christine Corbier @mccorbier

Le constat est sans appel. Comme en2015, l’enquête internationale TIMSS, publiée mardi, pointe du doigt les élèves français pour leurs mauvais résultats en mathé-matiques et en sciences. D’autres études récentes avaient illustré les difficultés, notamment l’enquête Cedre, en octobre dernier.

En mathématiques, la Francefigure en bas de tableau des pays développés, juste devant le Chili. D’autres pays sont plus mal classés encore, mais hors OCDE. « Cette baisse tendancielle de long terme de niveau en mathématiques n’est pas une surprise, estime Thierry Rocher,qui a participé à l’étude TIMSS. Elle ne date pas d’il y a quelques années. Les élèves français de 4e ont perdu l’équivalent d’une année scolaire en vingt-quatre ans. Le niveau des élèves

ÉDUCATION

Les élèves français sont les cancres de la classe européenne en maths et en sciences, montre une nouvelle étude publiée mardi.

Pour redresser le niveau, le ministre de l’Education a lancé un plan spécifique en 2018.

Le plan de Blanquer pour « remonter la pente » en maths

250.000 professeurs des écoles qui exercent du CP au CM2, selon le ministère. « Ils travaillent ensemble pour améliorer et partager leurs pra-tiques pédagogiques, c’est un modèle de formation complètement diffé-rent », avance Edouard Geffray.

Le deuxième volet du plan portesur les objectifs pédagogiques, avecla mise en place de « repères de pro-gression attendus », publiés en 2019.Les opérations complexes doivent être acquises plus tôt, affirme-t-on au ministère. « On a trop longtemps vécu » sur le fait qu’il fallait retarderle moment où on apprend la divi-sion et la multiplication ou la maî-trise des quatre opérations, déploreJean-Michel Blanquer. L’Education nationale publie aussi des guides de ressources à disposition des enseignants.

Dans les collèges, le ministèreveut, par ailleurs, créer 150 labora-toires de mathématiques par an – 250 sont déjà en place – pour « don-ner le goût, stimuler, aller plus loin », et créer des lieux en dehors de la

« Le niveau des élèves de 4e d’aujourd’hui est égal à celui des élèves de 5e d’il y a vingt-quatre ans. »THIERRY ROCHERParticipant à l’étude TIMMS

LES CHAMPIONS DE L’IMMOBILIER INVESTISSENT À REIMS :

Fabrice ALLOUCHEPrésident

Charles BOUDETDirecteur général

Daniel DORCHIESPrésident directeur général

C A M PA G N E D E C O MM U N I C AT I O N R É A L I S É E A V A N T L A C R I S E D E L A C O V I D - 1 9 , A V R I L 2 0 1 9 . R E S P E C T E Z L E S G E S T E S B A R R I È R E S E T P R E N E Z S O I N D E V O U S .

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04 // FRANCE Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Sécurité : le « Beauvau » qui parle

LE FAIT DU JOUR POLITIQUECécileCornudet

O ù est passé GéraldDarmanin ? Il s’estdécommandé

quinze minutes avant les questions d’actualité à l’Assemblée nationale. Il était l’ombre de lui-même à sa réunion hebdomadaire avec les préfets mardi matin. S’il leur a détaillé ses orientations sur le séparatisme, il n’a répondu à aucune question concernant le « Beauvau de la sécurité » annoncé à l’aube par l’Elysée.Et pour cause, le président ne l’en avait pas averti. Si ce nouveau Grenelle est censé libérer la parole des forces de l’ordre, il est aussi très éloquent sur le fonctionne-ment d’Emmanuel Macron. Message numéro 1 : aucun ministre n’est en sécurité, pour le coup. Une semaine après s’être vu imposer la mort de l’article 24, Gérald Darmanin subit un nouveau désaveu. « J’y interviendrai personnellement », précise Emmanuel Macron dans sa lettre aux syndicats, au cas où le message n’aurait pas été assez clair. Un ministre peut être une caution (de droite) et un exécutant, ce n’est pas lui qui fixe la ligne. « Avec sa méthode, Darmanin nous a explosés », justifie un proche du président.Une reprise en main débute par un débat, message numéro 2. Grand ou petit qu’importe, l’opération

« Beauvau » le confirme. Moins d’un mois après la présentation du Livre blanc sur la sécurité et trois mois après celle du Schéma du maintien de l’ordre, l’heure est moins à un état des lieux, connu, qu’à un signal politique. Faire retomber la pression, « remettre les policiers au cœur de la société », dit un proche, et essayer de clore la polémique ouverte sur Brut avant que ne démarre la « séquence » loi contre le séparatisme. La politique ne se renouvelle pas toujours. L’équilibre, lui, reste la plus difficile des postures. Trop à droite, disait la majorité en regardant œuvrer Darmanin. Trop à gauche, se sont offusqués les syndicats de policiers en écoutant Emmanuel Macron dénoncer les contrôles au faciès et reprendre, même pour le « déconstruire », le terme de « violences policières ». Et maintenant, nouveau coup de volant pour éviter la rupture avec les forces de l’ordre. Le pragma-tisme présidentiel est un système, message numéro 3. « C’est surtout un mal de mer », souffle un conseiller. Sila droite dénonce un Macron « caméléon », l’interrogation se diffuse même chez des macronistes. Le « en même temps » est-il un équilibre entre des idées contraires ou une absence d’idées ? A moins qu’il ne soit le produit des hésitations d’un président qui se nourrit du dernier qui a parlé, comme le décrit Corinne Lhaïk dans son étonnant portrait paru chez Fayard ? « Président cambrioleur » en est le [email protected]

Le Grenelle de la sécurité a été concocté par le chef de l’Etat pour clore le malentendu avec les policiers, né de son interview sur Brut. Darmanin n’en savait rien.

en bref

Séparatisme : les HLM évacués du textePOLITIQUE Les HLM, alliés de la lutte affichée par l’Etat contrel’islamisme radical ? Le logement social était parti pour figurerdans le projet de loi présenté ce mercredi, mais le gouvernementy a renoncé au dernier moment. « Il n’y a pas de dispositions surle logement », a-t-on annoncé mardi à Matignon. Le texte pré-senté ce mercredi vise à défendre les « principes républicains »,mais s’inscrit surtout dans la lutte affichée par l’Etat contre les« séparatismes », en premier lieu l’islamisme radical. Il couvreun vaste champ, de l’encadrement de la haine en ligne à l’inter-diction quasi totale de l’éducation à domicile en passant par uncontrôle accru des associations. Par ce renoncement, l’Etatéchappe à une polémique avec plusieurs acteurs du monde dulogement, pas ravis de figurer au programme de cette loi.

Affaire des « écoutes » : quatre ans de prison requis contre Nicolas SarkozyJUSTICE Au lendemain des dénégations de l’ex-président de laRépublique, le Parquet national financier a requis mardi quatreans de prison, dont deux avec sursis, à l’encontre de NicolasSarkozy, jugé pour corruption et trafic d’influence dans l’affairedite « des écoutes ». L’accusation a demandé les mêmes peinespour son avocat historique, Thierry Herzog, et l’ancien hautmagistrat Gilbert Azibert. « Un ancien chef de Etat a des droitsmais il a aussi [...] l’impérieux devoir de respecter lui-même ledroit », a souligné le chef du parquet financier, Jean-FrançoisBohnert, démentant toute « vengeance » dans cette affaire.

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testée avec la Convention citoyenne pour le climat ou dans le cadre du futur vaccin contre le Covid. Le chefde l’Etat a indiqué vouloir s’impli-quer « personnellement » dans le processus. « Emmanuel Macron a envie de rappeler qu’il est sur tous les sujets », constate un conseiller de l’exécutif. Pour preuve : la semaine dernière, les tensions autour de l’article 24 du projet de la loi « sécu-rité globale » se sont réglées à l’issued’une réunion dans son bureau, après plusieurs jours de confusion.

Première pierre d’une loi Ce Beauvau de la sécurité sera aussi« la première pierre de la grande loi de programmation de la sécurité intérieure, que les forces de l’ordre méritent depuis longtemps », a indi-qué le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Il n’en a cepen-dant pas précisé le calendrier, alors que l’agenda parlementaire est déjàbien rempli pour le premier semes-tre 2021. Après avoir listé la semainedernière les « sept péchés capi-

les propos tenus par le président sur la stigmatisation du policier et ne se contentera pas de séminaires ou commissions pour enterrer la colère policière », a réagi Fabien Vanhe-melryck, le secrétaire général du syndicat Alliance, majoritaire chez les policiers en uniforme. Patrice Ribeiro, secrétaire général de Synergie Officiers était exactement sur la même longueur d’onde : « Ce n’est pas avec un séminaire avec des élus et des citoyens triés sur le volet qu’on va régler le problème. »

Il faut aller chercher chez UnitéSGP Police-FO pour trouver une tonalité plus positive. Yves Lefebvrea salué la « réponse rapide » d’Emmanuel Macron. La droite a une fois de plus dénoncé l’inaction du gouvernement pour protéger lespoliciers. « Nous verrons ce qu’il en sortira. Ce qui m’importe, ce sont les actes, pas le palabre. J’ai l’impressionque Beauvau, Ségur, Grenelle, grand débat, c’est un peu la géographie de l’impuissance », a dénoncé le députéLR Eric Ciotti. n

Projet de loi climat : les sujets les plus sensibles restent à trancher

Muryel Jacque @MuryelJacque

Les citoyens de la Convention pour le climat devront encore patienter. Au cours des cinq réunions organi-sées par le ministère de la Transi-tion écologique lundi et mardi pourprésenter, en présence des députés, les ambitions du projet de loi qui doit intégrer plus d’un tiers de leurs propositions, plusieurs arbitrages espérés sur les mesures les plus débattues sont restées en suspens. « Les grands sujets totem sont encoreen discussion », confirme l’un des 150 membres de la Convention, Gré-goire Fraty. De « très bonnes annon-ces » ont été faites sur des mesures

« consensuelles », comme l’éduca-tion au développement durable. Lespublicités pour les énergies fossiles devraient aussi se voir interdites, même si, dans les faits, elles sont déjà très peu présentes dans les médias. Une mesure avant tout symbolique, donc.

Loin de l’ambitionPour bon nombre de questions sen-sibles, « le sujet reste ouvert », cons-tate un député. C’est le cas de l’obli-gation de rénovation des bâtiments ou de la définition de ce qu’est une rénovation performante, mais ausside la généralisation du forfait mobi-lité durable (qui permet la prise en charge par l’employeur des frais de trajet des salariés qui se rendent au travail à vélo ou par covoiturage).

L’arbitrage sur la taxation desengrais azotés pourrait, lui, être renvoyé au niveau européen. Le gouvernement n’irait pas non plus vers l’obligation d’un menu végéta-rien quotidien dans les cantines. Pour l’heure, si la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, n’est pas contre l’idée d’unerégulation progressive de la publi-cité sur les produits les plus pol-luants, il n’est pas question de l’inter-

dire. « Là, on est loin de l’ambition dela Convention », regrette un citoyen. En revanche, l’interdiction pour les propriétaires bailleurs de louer des passoires thermiques après 2028 a été actée. Mais les propriétaires n’auront pas d’obligation de faire des travaux s’ils ne louent pas.

Pour le député écologiste Mat-thieu Orphelin, « les mesures les plus fortes et impactantes ne sont pas arbitrées. Seuls les points secon-daires sont tranchés. » Il estime que « le compte n’y est pas » pour respecter le mandat donné par le président de la République, qui doitréunir ministres et membres de la Convention en début de semaine prochaine. Le Réseau Action Cli-mat assure que si les mesures les plus structurantes n’étaient pas reprises, l’objectif de « cette loi spéci-fique » serait « complètement décré-dibilisé ». A l’heure où se multi-plient les critiques sur la méthode du gouvernement et sur le fond, cer-tains membres de la Convention avaient choisi de boycotter les réu-nions de ce début de semaine. Quel-ques arbitrages pourraient encore se faire d’ici à l’envoi du projet de texte au Conseil d’Etat ce jeudi. Sur-tout, le projet de loi pourra être

modifié jusqu’en début d’année pro-chaine, Barbara Pompili devant le présenter en Conseil des ministres seulement en janvier. Certains députés ont déploré de ne pas avoirété davantage associés en amont, d’autres voient le verre à moitié plein, avec un petit espace pour les parlementaires. « Le gouvernement

est venu avec des projets de mesures, nous avons le temps de coconstruire, nous avons un mois et demi pour revenir sur des propositions non arrêtées », juge ainsi l’élue Valérie Petit (Agir).

Mais, pour Jean-Luc Mélenchon,« plus du tiers des propositions de la Convention Citoyenne sont déjà abandonnées ou amoindries ». « Le projet de loi censé les mettre en œuvreest prévu pour mars 2021. On se demande bien ce qu’il restera à y mettre », écrit sur son blog le chef defile de La France insoumise. n

ENVIRONNEMENT

Lors des réunions, lundi et mardi, entre les ministres et les groupes de travail formés de citoyens de la Convention climat et de députés, certaines mesures consensuelles ont été arrêtées.

L’arbitrage sur la taxation des engrais azotés pourrait être renvoyé au niveau européen.

Grégoire Poussielgue @Poussielgue

Il y a urgence à recoller les mor-ceaux avec la police. L’Elysée a annoncé mardi matin le lancementd’un « Beauvau de la sécurité » visant à réformer la police. Il s’agit d’apaiser les policiers, dont le cour-roux ne faiblit pas depuis l’inter-view vendredi dernier du chef de l’Etat chez Brut. S’en faisant le relais,les syndicats policiers ont dénoncé leur « lâchage » par le président de la République, après que ce derniera prononcé les mots de « violences policières » – affirmant cependant que de tels mots étaient désormais devenus un slogan – et reconnu l’existence de contrôles au faciès. Les deux principaux syndicats de gardiens de la paix avaient immé-diatement réagi en appelant à la cessation des contrôles d’identité.

Dans une maison où le taux desyndicalisation atteint selon la der-nière étude du ministère du Travail49 % (polices nationale et munici-pale confondues) – plus de deux foissupérieur au taux moyen de syndi-calisation dans la fonction publi-que –, les syndicats sont très écou-tés. Yves Lefebvre, secrétaire général du syndicat Unité-SGP-FO, avait fait part de la « colère » des policiers, après cette interview, dans une lettre à Emmanuel Macron et consultée par l’AFP. Cette colère a depuis été amplifiée par les violences dont ont été victi-mes les policiers samedi dernier, à l’occasion de nouveaux heurts en marge d’une manifestation contre le projet de loi « sécurité globale ».

La réponse du président tientdonc dans ce Beauvau de la sécurité,qui sera composé de représentants des forces de l’ordre, d’élus, mais aussi de citoyens, selon une formule

SÉCURITÉ

L’Elysée a annoncé mardi la tenue d’un « Beauvau de la sécurité » en janvier prochain.

Mais les syndicats laissent planer le doute sur leur participation.

Macron tente à nouveau de calmer la colère des policiers

Les syndicats policiers dénoncent leur « lâchage » par le chef de l’Etat. Photo Isa Harsin/Sipa

taux » de la police et proposé les premières pistes pour améliorer la formation des policiers ou encore leur encadrement, ce dernier rece-vra dans les prochains jours les syn-dicats policiers. Ceux-ci ne sont pasencore convaincus.

« Nous ne répondrons pas à l’invi-tation tant que le président Macron ne donnera pas suite à nos revendica-tions sur la protection du policier. Alliance ne peut accepter et oublier

« Ce n’est pas avec un séminaire avec des élus et des citoyens triés sur le volet qu’on va régler le problème. »PATRICE RIBEIROSecrétaire général de Synergie Officiers

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 FRANCE // 05

C’est dans la rencontre entre les femmes, les hommeset la technologie que se trouvent solutions et innovations.

People first. Solutions follow.*

*C’estavec

l’Hum

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révèlent

lessolutions.

bearingpoint.com

compliquées, car il faut organiser un circuit dans l’établissement et désinfecter après chaque passage ; en revanche, il est envisagé d’orga-niser des visioconférences depuis lachambre.

Par ailleurs, les établissementsattendent avec impatience les tests salivaires, moins douloureux, et plus faciles à administrer à des patients qui n’ont pas toutes leurs facultés mentales. « L’écouvillon, c’est difficile quand vous en êtes à votre vingtième test », souligne Flo-rence Arnaiz-Maumé, qui pense aussi au personnel.

Les tests antigéniques naso-pha-ryngés sont en effet massivement diffusés dans les Ehpad depuis deuxsemaines, pour des campagnes pré-ventives hebdomadaires. Notant que certains pays ont commencé à déployer les tests salivaires, la délé-guée générale du Synerpa souligne qu’en la matière, « il y a une grande demande pour que les pouvoirs publics accélèrent ». n

Solveig Godeluck @Solwii

Royaume-Uni, Etats-Unis, Qué-bec… alors qu’une série de pays ont annoncé un démarrage de la vacci-nation contre le Covid-19 dès ce mois-ci, les délais vont être un peu plus longs en France. Car les mai-sons de retraite, dont les pension-naires doivent être vaccinés en prio-rité dans l’Hexagone, ne seront pas prêtes au tournant de la nouvelle année.

Lors d’une conférence de presse,mardi, Florence Arnaiz-Maumé, la déléguée générale du syndicat des acteurs privés du champ du grand âge, le Synerpa, a expliqué qu’il serait « plus correct » de viser « mi-janvier, 20 janvier » pour le lance-ment des opérations.

Le vaccin Pfizer/BioNTech, quisera livré aux Ehpad, devrait être autorisé par l’agence européenne du médicament au plus tard le 29 décembre, et les livraisons pour-ront intervenir très rapidement. La logistique se met déjà en place, avecdes supercongélateurs achetés par Santé publique France et deux cir-cuits de distribution. Cependant, lesEhpad n’ont eu leur première réu-nion officielle sur le sujet avec la ministre déléguée à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, que lundi dernier.

Recueil du consentementLes travaux ne font que commen-cer, pour ce qui s’annonce comme une campagne complexe. Il va tout d’abord falloir recueillir le consen-tement des patients à vacciner. Or les établissements ne veulent pas que les décisions puissent être contestées et demandent donc au gouvernement un formulaire offi-ciel de consentement. « Le Synerpa a déjà sa doctrine ; nous enverrons notre note vaccination au gouverne-ment avant la fin de la semaine », indique Florence Arnaiz-Maumé.

De plus, quand 30 % à 50 % despensionnaires sont atteints de maladies neuro-dégénératives, le recueil du consentement se corse. Ilfaut en théorie s’adresser au tuteur nommé par le tribunal, « mais il n’ya pas assez de tuteurs dans ce pays »,rappelle-t-elle. Elle réclame que l’onse contente de l’accord de la « per-sonne de confiance » instituée par la loi ASV de 2016, « sinon il n’y aura pas de vaccination dans les Ehpad ».

COVID-19

Les 7.000 Ehpad doivent organiser une campagne de vaccination complexe, qui ne commencera pas avant la mi-janvier.

En attendant d’immu-niser les pensionnai-res, les établissements préparent un proto-cole assoupli pour Noël, mais sans visite dans les chambres.

Le casse-tête de la vaccination dans les Ehpad

Budget : le Sénat adopte un projet remaniéPOLITIQUE Après l’Assemblée nationale, le Sénat à majorité de droite aadopté mardi, en première lecture, le projet de budget hors norme pour2021 du fait du Covid-19, après l’avoir marqué de son empreinte, notam-ment sur la compensation des pertes de recettes pour les collectivitéslocales et la suppression du nouveau « malus au poids » pour les voitu-res de plus de 1,8 tonne. Le texte a été voté par 211 voix pour et 96 contre.Députés et sénateurs tenteront dès ce mercredi de se mettre d’accordsur un texte commun. En cas d’échec, fort probable, le projet de loirepartira à l’Assemblée nationale lundi prochain, avec l’objectif d’uneadoption définitive avant le 18 décembre. Le ministre des Comptespublics, Olivier Dussopt, a confirmé que le gouvernement travaillait « àl’intégration de quelques crédits consacrés à l’urgence ».

en bref

Il faudra ensuite organiser lesconsultations prévaccinales, et décider qui, du médecin traitant ou du médecin coordinateur d’Ehpad, doit les mener. « Dans beaucoup d’Ehpad, il n’y a pas de médecin sala-rié, il faut donc que les agences régio-nales de santé désignent un médecin référent », estime Marc Bourquin, responsable du secteur des Ehpad publics à la Fédération hospitalière de France. Selon lui, pour économi-ser les doses encore rares du vaccin,il faudra peut-être faire des tests sérologiques aux patients afin de s’assurer qu’ils n’ont pas déjà été immunisés.

Manque de médecins coordinateursLes l iv ra is ons de d oses aux 7.000 établissements, pour vacci-ner 750.000 personnes âgées, devront se faire à 21 jours d’inter-valle entre les deux injections, avec des produits qui seront inutilisablesau bout de cinq jours, car ils aurontété décongelés…

Autre complication : à partir dela décongélation, ils ne doivent pas être trop secoués, donc ils ne devront pas voyager plus de douze heures. Une fois à destina-tion, les responsables d’établisse-ment espèrent que le gouverne-ment autorisera la vaccination par les infirmières, en raison du man-que de médecins coordinateurs.

Par ailleurs, le gouvernements’apprête à dévoiler un protocole assoupli pour les Ehpad, afin de permettre aux résidents de se déconfiner un peu plus. « Nous sommes sur un fil, nous avons l’œil rivé sur les chiffres », a cependant signalé Florence Arnaiz-Maumé, au lendemain d’une conférence de presse où le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, a exprimé ses inquiétudes sur un risque élevé de rebond de l’épidémie.

L’enjeu, pour les personnesâgées, c’est évidemment de pouvoirfêter Noël avec leurs proches. Le Synerpa a proposé que les résidentspuissent être autorisés à sortir de leur établissement, si le contexte sanitaire est favorable dans l’Ehpadet alentours. La famille d’accueil sera encouragée à se faire tester et lerésident devra être dépisté et isolé pendant quelques jours à son retour. Les visites en chambre sont

Les livraisons de doses aux 7.000 établissements, pour vacciner 750.000 personnes âgées, devront se faire à 21 jours d’intervalle entre les deux injections.

Avec des produits qui seront inutilisables au bout de cinq jours, car ils auront été décongelés.

L’enjeu à court terme, pour les personnes âgées, c’est évidemment de pouvoir fêter Noël avec leurs proches. Les résidents devraient être autorisés à sortir de leur établissement, si le contexte sanitaire est favorable dans l’Ehpad et alentours. Photo Lionel Bonaventure/AFP

Page 6: Les Echos - 09 12 2020

RETROUVEZ DOMINIQUE SEUXDANS « L’ÉDITO ECO »À 7H45DU LUNDI AU VENDREDI

SUR

la grande question pour les 15.000 travailleurs transfrontaliers (parmilesquels 10.000 Espagnols) qui cha-que jour se rendent à Gibraltar.

Le risque d’isolement de la petiteenclave britannique, à la pointe sudde la péninsule Ibérique, préoccupeses voisins d’Andalousie qui se pré-parent à l’impact local du Brexit, dans la perspective d’une sortie sans accord à partir du 1er janvier prochain. Et l’un des effets inatten-dus du Brexit est sans doute de rap-procher plus que jamais Gibraltar de ses voisins espagnols.

Le plan de contingence dessinépar les autorités du Rocher prévoit

la possibilité de deux à six heures d’attente à l’entrée du territoire et le risque de rupture d’approvision-nement. Mais les autorités locales comptent sur les négociations de dernière minute entre Madrid, Londres et Gibraltar pour éviter l’effondrement économique et maintenir la libre circulation. Car, dans les faits, la dépendance est mutuelle entre le petit territoire britannique de 6,8 kilomètres car-rés et ses voisins andalous.

Manœuvrer avec prudencePour éviter la perspective d’une rupture brutale au-delà du Brexit, le ministre principal de Gibraltar, Fabian Picardo, souhaite l’intégra-tion du territoire dans l’espace Schengen, une évidence selon lui. Mais il doit manœuvrer avec pru-dence car il s’agit de se rapprocher de l’Europe sans jamais se démar-quer de Londres…

Avec l’idée, toujours, que la moin-dre fissure avec le gouvernement britannique pourrait raviver les appétits espagnols sur le Rocher. « L’ironie est que le Brexit risque de déboucher sur une intégration plus grande de Gibraltar dans l’espace européen et un resserrement de ses

liens avec le voisin espagnol », cons-tate un observateur local. A Madrid,le gouvernement de Pedro Sánchez a adopté une position pragmatique. « Nous cherchons des solutions pour préserver la prospérité partagée », affirme la ministre des Affaires étrangères, Arancha González Laya.

« Jamais sans doute les positionsn’ont été aussi proches », relève l’analyste Ignacio Molina, expert enaffaires européennes de l’Institut royal Elcano, à Madrid. Selon lui, unaccord bien mené pourrait débou-cher, à moyen terme, sur le projet de« souveraineté partagée » caressé par l’Espagne. Mais à Gibraltar, Fabian Picardo est formel : il n’en est pas question. « Etre britanni-ques, c’est ce que nous sommes, c’est le sang qui coule dans nos veines. » n

Le Brexit rapproche Gibraltar de l’Europe

Cécile Thibaud @CecileThibaud

—Correspondante à Madrid

Sur combien de kilomètres de bou-chons va-t-on tomber en allant tra-vailler le 2 janvier prochain ? Et sur quels contrôles à la frontière ? C’est

L’enclave britannique craint la fermeture de sa frontière avec l’Espagne qui asphyxie-rait l’économie. Elle compte sur une entrée dans Schen-gen pour faciliter la libre circulation des personnes et des marchandises.

Tout en se disant « toujours optimiste », Boris Johnson a reconnu que « la situation en ce moment [était] délicate ». Photo Daniel Leal-Olivas/AFP

continuent de lui objecter qu’il n’estpas possible de commercer sans tarif ni quota avec l’UE sans rester proche de ses règles. « Nous ne sacri-fierons jamais notre avenir au prix du moment présent », a affirmé Michel Barnier, en prévenant que « l’accès à notre marché implique desconditions ».

Tout en se disant « toujours opti-miste », Boris Johnson lui-même a reconnu que « la situation en ce moment est délicate » et insisté sur lefait que les Européens « doivent comprendre que le Royaume-Uni a quitté l’UE pour pouvoir exercer un contrôle démocratique ». « Nous en sommes encore loin », a-t-il tranché. « Il peut arriver un moment où nous

devons admettre que l’heure est venue de siffler la fin de la partie et c’est ainsi », a ajouté le Premier ministre britannique. Et de préciserque si son pays devait se contenter d’un « no deal », ce serait « bien aussi ».

Un geste de bonne volontéLa journée de mardi a pourtant été marquée, sur un autre front, par undéveloppement positif. Londres et Bruxelles ont ainsi trouvé un com-promis… pour appliquer pleine-ment ce qu’ils avaient décidé l’an dernier, au moment du divorce.

Le numéro deux du gouverne-ment britannique, Michael Gove, a ainsi annoncé mardi qu’il renonçait

aux clauses si décriées du projet de loi sur le marché intérieur, un accord de principe ayant été concluavec la Commission européenne sur la manière exacte d’appliquer leprotocole nord-irlandais du traité de retrait.

C’est la fin d’un bras de fer quiaura suscité la colère à Bruxelles, oùl’on s’était offusqué que Boris John-son puisse revenir sur sa parole, l’encre de l’accord de retrait à peine sèche. La polémique avait aussi enflé à Londres, où de nombreuses voix s’étaient élevées pour regretter que le Premier ministre foule ainsi aux pieds le droit international, au risque d’affaiblir la voix du Royau-me-Uni. n

l Alors que Boris Johnson et Ursula von der Leyen se rencontrent ce mercredi, le négociateur en chef de l’UE, Michel Barnier, reconnaît que la probabilité d’un échec des négociations est désormais plus élevée que celle d’un succès.l Le Premier ministre britannique ne cache pas, lui non plus, la difficulté de la situation.

Londres et Bruxelles face au spectre du « no deal »

Alexandre Counis @alexandrecounis

—Correspondant à Londres Gabriel Grésillon

@Ggresillon —Bureau de Bruxelles

Une nette poussée de pessimisme. Après de longues journées de négo-ciations stériles au sujet du Brexit, lenégociateur en chef de l’UE, MichelBarnier, a déclaré aux ministres desAffaires européennes des Vingt-Sept, mardi, que la perspective d’un« no deal » était désormais, à ses yeux, plus probable que celle d’un succès des négociations.

D’après nos informations, lesdernières rencontres entre négo-ciateurs n’ont rien donné, Londres ne faisant pas le moindre geste en direction des Européens, en parti-culier au sujet des futures condi-tions d’une concurrence équitable. Le coup de téléphone entre Ursula von der Leyen et Boris Johnson, lundi soir, a débouché sur ce cons-tat. La présidente de la Commissioneuropéenne a insisté, malgré tout, pour que ses équipes demeurent disponibles. Une rencontre en face-à-face entre les deux dirigeants est prévue ce mercredi soir, lors d’un dîner à Bruxelles.

Logiques antagonistesPlus que jamais, la confrontation entre deux logiques antagonistes semble difficile à dépasser. Là où Londres entend bien récupérer uneentière souveraineté, les Européens

EUROPE

« Nous ne sacrifierons jamais notre avenir au prix du moment présent. »MICHEL BARNIERLe négociateur en chef de l’Union européenne

« Il ne fait pas l’ombre d’un doute qu’il faut un accord »Propos recueillis parVirginie Robert

virginierg

Le Royaume-Uni a subi une contraction très forte de l’économie au deuxième trimestre 2020. Doit-il se préparer à un nouveau choc ?Le choc a été particulièrement fort au deuxième trimestre parce que la gestion de la pandémie a étéplus tardive qu’ailleurs, obligeant à un confinement plus long et plus strict. Le rebond au troisièmetrimestre a d’ailleurs été limité : sur un an au T3 la baisse du PIB britannique est deux fois plus fortequ’en France. Si jamais les Britan-niques parviennent à négocier un accord commercial avec l’Union européenne, il sera de toute façon de qualité médiocre. Nous avons prévu que même en cas de deal, l’économie au premier semestre subira un choc de 1,5 % du PIB lié au Brexit. Hors Covid, cela serait vécu de façon extrêmement dou-loureuse. Ce qui les sauve « cosmé-tiquement », c’est que 1,5 % dans lecontexte actuel, avec des varia-tions entre – 15 % et + 15 % liées à l’impact de la pandémie sur l’éco-nomie, c’est à peine visible.

Et dans le cas où les négociations échouent…Quelle que soit l’issue, l’impact du Brexit sera assez limité sur la croissance en zone euro l’an pro-chain si on le compare au choc pandémique. En revanche, pour les Britanniques, l’absence d’un accord post-Brexit avec l’Union européenne les placerait dans une position très défavorable en termes de croissance. Il y aurait inévitablement une hausse des prix avec l’imposition des droits

de douane. Au départ, les Brexi-ters s’étaient engagés à ne pas en mettre en place sur les impor-tations en provenance de l’UE pour éviter justement de créer del’inflation et de diminuer le pou-voir d’achat des consommateurs britanniques. Mais ils auraient dû alors le faire pour tout le monde, et pas qu’envers les Euro-péens. C’est une règle fondamen-tale de l’OMC. Ce n’était pas possi-ble sans mettre en danger de larges pans de l’économie britan-nique, d’où la publication de leurstarifs douaniers. Faute d’accord, l’agroalimentaire serait particu-lièrement impacté, avec de nou-veaux tarifs entre 10 % et 15 %. Cela se combinerait à une dépré-ciation de la livre sterling pour produire un choc inflationniste.

Cela serait un problème pour la Banque d’Angleterre ?Si le choc inflationniste persiste et s’accompagne d’une devise qui s’écroule, la banque centrale ris-que de voir assez vite les limites possibles à son action, même si à court terme une intensification dustimulus monétaire serait inévita-ble. Dans cette affaire, le primat dupolitique dans son acception la plus étroite est impressionnant. Il ne devrait pas faire l’ombre d’un doute qu’il faut un accord post-Brexit avec l’UE, compte tenu de l ’ impact très négatif sur la consommation des ménages à un moment où l’économie est encore sous l’effet du Covid. On rajoute unproblème. n

GILLES MOECChef économiste chez AXA Invest-ment Managers

« Etre britanniques, c’est ce que nous sommes, c’est le sang qui coule dans nos veines. »FABIAN PICARDOMinistre principal de Gibraltar

MONDE Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 MONDE // 07

car la situation s’est aggravée, ces der-nières semaines, avec une propaga-tion du virus plus rapide que prévu et une seconde vague de confinement. » Les cinq organisations patronales demandent par ailleurs que le plan de relance ainsi que le nouveau cadre budgétaire, qui au total pèsentprès de 2.000 milliards d’euros, « deviennent opérationnels sans plus de retard ». Elles espèrent un com-promis au Conseil européen, où le sujet sera débattu jeudi et vendredi.

Déjà échaudées par le Brexit – quine s’est toujours pas concrétisé qua-tre ans et demi après le référendum britannique, et dont personne ne sait s’il se conclura par un accord de libre-échange dûment négocié ou par un saut dans l’inconnu avec le Royaume-Uni –, les entreprises européennes sont dans le flou au sujet des aides dont elles vont pou-voir bénéficier afin de surmonter le choc économique inédit qu’elles ont subi, du fait des mesures de lutte contre la pandémie.

Près de 18 millions d’emplois perdus« Il est impératif que les décideurs éco-nomiques soutiennent nos écono-mies, exhortent les représentants des entreprises. […] Une réponse rapide est indispensable, notamment à ceux qui ont dû fermer temporairement leurs activités, aux travailleurs inquiets pour leur travail, aux person-n e s d o n t l e m o d e d e v i e e s t menacé. » Le PIB devrait reculer de 7,8 % cette année, selon la Commis-sion européenne, et si les courbes del’emploi ne marquent pas encore de net décrochage, « la diminution des heures travaillées correspond à 18 millions d’emplois à plein temps perdus au troisième trimestre 2020 », notent les organisations patronales dans leur lettre.

Fait nouveau : depuis un premierappel à l’urgence début novembre, lepatronat polonais s’est cette fois joint

au chœur des pétitionnaires. La forte personnalité de Maciej Witucki, président de Lewiatan, fait qu’il ne craint pas d’interpeller son propre gouvernement. Il y a une semaine, il a signé avec neuf organi-sations patronales (lesquelles repré-sentent 75 % de l’industrie de son pays) une autre missive, adressée cette fois au Premier ministre, Mateusz Morawiecki, et dans laquelle il demandait la levée immé-diate du veto gouvernemental.

« Le fait que la Pologne soit associéeau refus de l’Etat de droit est désas-treux pour nos entreprises. Le dom-mage est irréversible », assure-t-il. Pour lui, la Pologne doit profiter sanshésiter des 60 milliards d’euros d’aide que lui réserve le plan de relance européen, afin notamment d’accélérer la transition énergétique et numérique du pays – et ce même sila propagande des autorités laisse entendre qu’elles peuvent se passer des aides bruxelloises.

« Les deux pays qui bloquent sontceux qui sont le moins touchés par la crise du Covid. Cela donne d’une part l’impression fausse que la Pologne n’apas besoin de cet argent européen, et cela révèle aussi une absence de soli-darité envers les pays qui ont un besoin bien plus urgent de ces fonds »,ajoute-t-il en pensant à l’Italie et à l’Espagne. n

Catherine Chatignoux @chatignoux

Les organisations patronales com-mencent à trouver le temps long. Le gigantesque plan de relance euro-péen, qui doit aider les économies européennes à se relever de la tor-nade sanitaire et économique pro-voquée par le Covid-19, a été adopté par les Vingt-Sept en juillet dernier, et depuis plus rien. A quelques semaines de leur mise en œuvre projetée (soit le 1er janvier 2021), plande relance et budget pluriannuel sont bloqués par le veto des gouver-nements polonais et hongrois, qui refusent le mécanisme liant la distri-bution des fonds au respect de l’Etat de droit.

Se gardant bien d’entrer dans ledébat de fond – lequel a conduit à une impasse –, cinq des plus grandesorganisations patronales européen-nes (Medef en France, CEOE en Espagne, BDI en Allemagne, Confin-dustria en Italie et Lewiatan en Polo-gne) ont adressé mardi aux diri-geants européens une lettre dans laquelle elles se disent préoccupées par le fait que les blocages n’aient pasencore été surmontés . « Les citoyens et les entreprises européens attendent le feu vert pour le plan de relance. Le temps presse, écrivent-ils,

EUROPE

Les patronats des cinq principaux bénéficiai-res du plan de relance européen (dont la Pologne) exhortent, dans une lettre, les dirigeants de l’UEà surmonter leurs blocages et à mettre en œuvre l’aide européenne sans plus attendre.

Plan de relance : les entreprises européennes tirent la sonnette d’alarme

« Le fait que la Pologne soit associée au refus de l’Etat de droit est désastreux pour nos entreprises. Le dommage est irréversible. »MACIEJ WITUCKIPrésident de Lewiatan

Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, et son homologue hongrois, Viktor Orban, bloquent depuis plusieurs semaines le plan de relance européen. Photo Zoltan Fischer/Hungarian Prime Minister’s Press Office/Handout via REUTERS

Les sociétés civiles hongroise et polonaise se mobilisent pour le respect de l’Etat de droitLes sociétés civiles hongroise et polonaise ne restent pas inactives face au blocage par leurs gouvernements du plan de relance européen. Les mouvements civiques aHang en Hongrie et Akcja Demokracja en Pologne affirment avoir recueilli plus de 300.000 messages réclamant aux décideurs politiques de l’UE de ne pas céder au chantage des deux chefs de gouvernement polonais et hongrois. Selon ces deux organisations, les sondages mon-trent qu’une large majorité de citoyens,

74 % des Hongrois et 72 % des Polonais, approuvent le lien qui a été fait entre le verse-ment des fonds européens et le respect par l’Etat qui les reçoit de la règle de droit et de la démocratie. « Si les dirigeants européens cèdent maintenant, cela ne fera que renforcer la posi-tion d’Orban et Morawecki contre l’Etat de droit et cela ouvrira la voie à d’autres dirigeants autocratiques qui voudront affaiblir l’Europe » a commenté Piotr Cykowski du groupe de citoyens Akcja Demokracja.

Alexandre Counis @alexandrecounis

— Correspondant à Londres

Elle s’appelle Margaret, elle aura 91 ans la semaine prochaine, et danscet hôpital de Coventry, au cen-tre l’Angleterre, elle est devenue mardi, à 6 h 31 du matin, la premièrepatiente au monde à recevoir le vac-cin de Pfizer/BioNTech, autorisé outre-Manche la semaine dernière. Quant au deuxième vacciné,i l h a b i t e , s e l o n l a B B C , l e Warwickshire et s’appelle… WilliamShakespeare ! Le Royaume-Uni a lancé mardi sa vaste campagne de vaccination contre le coronavirus, lapremière au monde, en commen-çant par le personnel des maisons deretraite et leurs pensionnaires. Un véritable tournant dans la lutte con-tre le virus : les Britanniques parlentde « V-Day ».

Les cinquante hôpitaux qui vacci-nent en Angleterre (soixante-dix dans l’ensemble du Royaume-Uni) ont commencé ce week-end à rece-voir de Belgique les 800.000 doses destinées à la première semaine,à conserver à – 70 °C. Quelque1.000 centres de vaccination seront créés pour leur prêter main-forte.

Le Royaume-Uni a commandé40 millions de doses du vaccin Pfi-zer, permettant de vacciner, à raison

ROYAUME-UNI

Les premiers patients ont commencé à être vaccinés mardi matin.

Londres met en scène sa campagne de vaccination anti-Covid-19

de deux doses par personne, 20 mil-lions de Britanniques. S’y ajoutent surtout les 100 millions de doses commandées à AstraZeneca et l’uni-versité d’Oxford, mais qui sont tou-jours en attente d’autorisation. Au total, ce sont 357 millions de doses qui ont été commandées à sept fabri-cants. La majorité des Britanniques devra néanmoins attendre, pour être vaccinés, les trois premiers mois de l’an prochain – le gouverne-ment compte sur 4 millions de dosesd’ici à la fin de l’année.

Des effets différentsUn essai devrait être mené en janvierpour voir dans quelle mesure mêler les différents vaccins entre eux ren-force la réponse de l’organisme, a annoncé Kate Bingham, la prési-dente sortante de la Vaccine Task Force. Une dose du vaccin de Pfizer pourrait être ainsi administrée, avant une autre de celui d’AstraZe-neca, si celui-ci est d’ici là autorisé. Leurs effets sont en effet différents : le premier tend à générer davantaged’anticorps, le second à tuer plus de cellules infectées.

En ciblant les plus de 50 ans et lespersonnes vulnérables, les autorités espèrent vacciner d’ici au printempsles neuf catégories de Britanniques prioritaires – celles qui représentent99 % des décès. Les seconds sur la liste, après les pensionnaires des maisons de retraite, seront le per-sonnel soignant et les plus de 80 ans.

Le lancement de cette campagnede vaccination, la plus grande qu’ait jamais eue à organiser le système public de santé, est d’autant plus célébré que le Royaume-Uni est le

pays le plus endeuillé d’Europe, avecprès de 61.500 morts. Elle flatte d’autant plus l’ego national que le Royaume-Uni ouvre la voie – une première depuis le début de la pan-démie. Sa réussite s’annonce en tout cas cruciale pour le gouvernement de Boris Johnson, particulière-ment critiqué sur sa gestion, parfois désordonnée, de la crise sanitaire, etles restrictions qu’il a dû imposer à son économie.

Mais elle s’apparente « plus à unmarathon qu’à un sprint », a rappelé le directeur médical du National Health Service, Stephen Powis. « La vaccination de masse prendra du temps », a lui aussi prévenu Boris Johnson, tandis que son ministre de la Santé, Matt Hancock, appelait les 66 millions de Britanniques à conti-nuer leur effort pour limiter la diffu-sion du virus.

Outre les évidentes difficultéslogistiques à surmonter, l’un des défis sera de convaincre la popula-tion de se faire vacciner. Selon un sondage Yougov, 23 % des Britanni-ques se disent « pas très » ou « pas dutout confiants » quant à la sûreté du vaccin. Le ministre de la Santé s’est dit prêt à se faire vacciner en direct àla télé. La reine Elizabeth II et son mari le prince Philip, 94 et 99 ans, pourraient eux aussi se faire vacci-ner en public. n

Au total, 357 millions de doses ont été commandées à sept fabricants.

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08 // MONDE Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

LEADERSHIP & MANAGEMENTCHRONIQUES · DECRYPTAGES · TENDANCES

ISABELLE BARTH,PROFESSEURE EN SCIENCES DU MANAGEMENT

ALEX OSTERWALDER,THÉORICIEN DU MANAGEMENT

EMMANUELLE DUEZ,FONDATRICE DE THE BOSON PROJECTET DE L’ASSOCIATION WOMEN’UP

SI ON EN PARLAIT AVEC DES LEADERS INSPIRANTS ?Chaque jeudi dans les Echos.

©StrategyzerA

G/Barbara

Hess.

Virginie Robert @virginierg

et Y. B.

Grandeur et déchéance. Désigné il y a dix ans par un panel d’orga-nisations financières internatio-nales comme l’économie émer-gente la mieux gérée d’Afrique, la Zambie se trouve aujourd’hui au bord du défaut de paiement offi-ciel. Ce qui serait une première surle continent depuis quinze ans. Elle y est d’ailleurs déjà technique-ment, puisque ayant manqué une échéance de remboursement de 33,7 millions d’euros mi-octobre. Un drame, puisque ses besoins d’emprunt pour payer ses fonc-tionnaires sont considérables. Sondéficit, gonflé par la crise du Covid,atteint actuellement 12 % du PIB.

EffondrementLa responsabilité de cet effondre-ment incombe largement à lapolitique suivie par le présidentEdgar Lungu, qui a fait fuir lesinvestisseurs par ses menacesd’expropriations, alors que cepays de 17 millions d’habitantsregorge de ressources minières,dont le cuivre et le zinc. Depuisson arrivée au pouvoir, en 2015, ladette publique est passée de 36 %du PIB à presque 90 % en 2019. Lacroissance est tombée en 2019 à1,5 %, le tiers de la moyenne de ladécennie écoulée. Une présiden-tielle est prévue en août prochainmais on peut douter qu’elle soitlibre et transparente au vu de larépression des opposants lors duscrutin de 2016.

AFRIQUE

Les déboires de la Zambie illustrent la difficulté croissante des pays émergents à payer les intérêts de leur dette.

Une trentaine de pays émergentsont vu la note de leur dette dégra-dée par Standard & Poor’s cette année. La Zambie illustre bien cettetendance, elle qui peine non pas à rembourser le principal de la dette mais bien les intérêts. La charge des intérêts représentait 12 % des revenus du pays en 2014 et pourraitdépasser les 50 % en 2023 ! « Avec lapandémie, les pays émergents vont moins creuser leur dette que les paysdéveloppés mais, contrairement à ces derniers, la charge des intérêts dela dette monte car ils ne bénéficient pas de l’aide de banques centrales », explique Irina Topa-Serry, écono-miste senior chez AXA-IM.

Absence de réformesLa Zambie paie l ’absence de réformes, notamment fiscales et budgétaires, du temps des vaches grasses, qui la laisse sans moyens après la baisse des prix du cuivre. Ce minerai représente 70 % des exportations du pays quand le totaldes exportations équivaut à 30 % des revenus.

« Le pays est très endetté auprèsde la Chine, cela va être intéressant de voir s’il est obligé de céder des actifs ou s’il pourra rééchelonner la dette, et comment il va négocier avec les entreprises chinoises », observe Irina Topa-Serry qui note un man-que de transparence sur les créan-ciers du pays.

« Les besoins en financement despays émergents seront encore accrusen 2021. Si les banques locales ont faitl’effort cette année, il est nécessaire que les investisseurs étrangers reviennent. Mais pour cela, il faudraque les devises émergentes remon-tent, surtout si le dollar est faible », explique-t-elle. Pour la Zambie, la solution serait encore une fois le cuivre. La multitude de projets d’infrastructures annoncés dans le monde est de bon augure. « Ce serait le bon moment de faire des réformes, mais la proximité de l’élec-tion présidentielle les rend diffici-les », souligne l’économiste. n

La Zambie, symbole malgré elle de l’impuissance à gérer la dette

ves dans un pays ayant déjà connutrois alternances politiques paci-fiques depuis l’instauration dumultipartisme en 1992. Un climatpolitique qui contraste avec celuide nombre de voisins de ce paysd’Afrique occidentale, tels que laCôte d’Ivoire, la Guinée ou leTogo, aux élections contestées.

Deux vieilles connaissancesLe résultat s’annonçait serréentre le président sortant, NanaAkufo-Addo, soixante-seize ans,candidat pour le Nouveau Partipatriotique, et son prédécesseur,John Mahama, soixante-deuxans, leader du Congrès démocra-tique national. Selon des estima-tions communiquées par la prési-dence mardi midi, portant sur91 % des bureaux de vote ayantdéjà effectué le dépouillement,Nana Akufo-Addo aurait rem-porté 52,25 % des voix, contre46,44 % pour John Mahama, lesdix autres candidats étant crédi-tés de scores insignifiants.

Le Ghana bénéficie en effetd’une classe entrepreneurialeinnovante, qui s’appuie sur lerobuste Etat de droit en vigueurdans cette ancienne colonie bri-tannique, ainsi que sur d’amplesressources naturelles. I l estnuméro deux mondial du cacaoet numéro un africain de l’or, ensus de disposer de réserves pro-metteuses en diamants et manga-nèse ou, plus récemment, depétrole. De quoi nourrir unecroissance parmi les plus fortesau monde durant la décennieécoulée. Mais le Covid-19 l’a faitchuter à 0,9 % en 2020, selon lesprévisions du Fonds monétaireinternational.

Une réduction de l’extrême pauvretéLe président sortant peut se tar-guer d’un certain rayonnementdiplomatique, illustré par lesmédiations d’Accra dans les crisespolitiques au Togo et au Mali, ainsique de bons résultats économi-ques et sociaux. L’accès à l’électri-cité ou à l’enseignement a notam-ment nettement progressé. Maisl’extrême pauvreté frappe encoreun Ghanéen sur quatre, même sile taux a été divisé par deux depuisle début du siècle. La lutte contrela corruption fait aussi du sur-place et le chômage des jeunesdemeure préoccupant. Ce thèmesensible, puisque la moitié des 30millions de Ghanéens a moins detrente-cinq ans, a d’ailleurs été aucentre de la campagne. n

Yves Bourdillon @yvesbourdillon

Un exemple rafraîchissant. LeGhana a défendu son titre dechampion africain de la paix, dela stabilité et de la démocratie lorsdes scrutins présidentiel et légis-latif de lundi. Cet exercice s’estdéroulé quasi sans incidents gra-

AFRIQUE

C’est un exemple de démocratie, de paix et de stabilité en Afrique où se sont déroulés des scrutins présidentiel et législatif lundi.

Le résultat s’annonce serré entre l’actuel président du Ghana et son prédécesseur.

Le Ghana peut se concentrer sur les défis économiques post-Covid

Les élections se sont déroulées sans incident lundi au Ghana,Nana Akufo-Addo aurait remporté 52,25 % des voix, contre 46,44 % pour John Mahama. Photo Francis Kokoroko/Reuters

Les deux hommes avaientsigné vendredi, lors d’une céré-monie, un « pacte de paix » lesengageant à reconnaître lesrésultats de la commission élec-torale et à appeler leurs militants

à la retenue en cas de victoirecomme de défaite. Ils se sont déjàaffrontés à deux reprises à la pré-sidentielle, avec une victoire pourchacun : 50,7 % des voix pourJohn Mahama en 2012 et 53,8 %pour Nana Akufo-Addo en 2016.

L e u r p r o g r a m m e e s t , p a railleurs, très proche et censé atti-rer les investisseurs, la seule dif-férence notable portant surl’ampleur des chantiers d’infras-tructures et le rythme de réduc-tion du déficit budgétaire. Ce der-nier a été gonflé par la crise duCovid, à 11,4 % du PIB en 2020. Ladette publique est montée à 71 %du PIB, un niveau qui demeuretoutefois gérable pour un paysémergent, compte tenu en outredu dynamisme du pays.

Le chef de l’Etat sortant, Nana Akufo-Addo, peut se targuer d’un bilan convenable, mais la croissance est presque tombée à zéro en raison du Covid.

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 MONDE // 09

« marketé » à 73.600 milliards de yens (584 milliards d’euros). Un planqui devrait inclure 40.000 milliards de yens de dépenses fiscales desti-nées à des investissements publics, des prêts à des institutions ou des entreprises, ainsi que des dépenses publiques directes. « Nous avons compilé ces mesures pour maintenir l’emploi, soutenir les entreprises et restaurer l’économie tout en ouvrant la voie à une croissance plus axée sur les technologies vertes et numéri-ques », a insisté Yoshihide Suga.

Si les détails exacts de ce planseront dévoilés plus tard, Tokyo a déjà promis d’utiliser une partie desfonds pour financer la digitalisa-tion de l’administration nippone, pour subventionner la décarboni-sation de certains secteurs ou pour mettre en place des mesures de

lutte contre l’épidémie de Covid-19 qui n’a eu, pour l’instant, qu’un impact sanitaire limité dans l’archi-p e l d e 1 2 6 m i l l i o n s d ’ h a b i -tants. Malgré une récente accéléra-tion des infections, le pays, quin’a jamais confiné sa population,n’a recensé jusqu’à présent que 163.000 contaminations et seule-ment 2.259 décès liés au virus.

Pour alimenter sa relance, quivient s’ajouter à deux autres plans de dépenses d’un montant total de 186 milliards d’euros, orchestrés plus tôt dans l’année par le précé-dent Premier ministre Shinzo Abe, le cabinet de Yoshihide Suga va devoir faire voter une troisième ral-longe à son budget accompagnant l’année fiscale qui s’achèvera en mars 2021. Il va aussi demander au Parlement une avance sur le budget

matin, que le PIB avait rebondi, selon les dernières estimations, de 5,3 % en glissement trimestriel sur la séquence allant de juillet à sep-tembre. Mais il craint que cette dynamique de sortie de récession – le PIB chutait au Japon dès la fin de 2019 – ne soit brisée par l’aggrava-tion de l’épidémie.

Le pouvoir redoute notammentune nouvelle chute de la demande intérieure si les familles, qui avaientbeaucoup dépensé au troisième tri-mestre, venaient à restreindre de nouveau leurs sorties et leurs achats de peur d’être touchées par la troisième vague de l’épidémie de Covid-19. Sans anticiper de nouvellecontraction, les analystes de la BoJ estiment que la croissance sera trèsfaible sur le dernier trimestre et res-tera fragile début 2021. n

de l’exercice fiscal courant entre avril 2021 et mars 2022. Des finance-ments qui s’appuieront essentielle-ment sur l’émission de nouvelles obligations souveraines rachetées,

sans que cela ne fasse débat, par la Banque du Japon (BoJ). La banque centrale détenant désormais plus de 40 % de toute la dette de l’Etat.

Tokyo affirme vouloir rapide-ment déployer les nouvelles « aides » pour éviter un autre refroi-dissement de l’activité sur le terri-toire. L’exécutif a indiqué, mardi

Le pouvoir redoute une nouvelle chute de la demande intérieure.

« LES ÉCHOS » / SOURCE : FMI / PHOTO : ISTOCK

La dette publique du Japon En % du PIB

31 déc.1981

31 déc.1985

31 déc.1990

31 déc.1995

31 déc.2000

31 déc.2005

31 déc.2010

31 déc.2015

31 déc. 2020

0

50

100

150

200

250

Prévision du FMI 266,2 %

48,8 %

Joe Biden aurait choisi Lloyd Austin à la Défense

Nicolas Rauline @nrauline

—Bureau de New York

Jusqu’ici, Joe Biden a privilégié le consensus. Fidèle à son image de rassembleur, il a opté pour des noms susceptibles de remporter l’adhésion de tous – tel celui de Janet Yellen – pourcomposer son prochain gou-vernement. Les choses pour-raient toutefois se compliquer s’agissant son secrétaire à la Défense. S elon plusieurs médias américains, le prési-dent élu devrait annoncer avoirchoisi Lloyd Austin pour diri-ger le Pentagone.

Ce général de l’armée de terreâgé de 67 ans a combattu en Iraket en Afghanistan. Il pourrait devenir le premier Afro-Améri-cain à prendre la tête de l’armée,après avoir été le premier Afro-Américain à diriger l’US CentralCommand, qui super vise notamment les opérations mili-taires au Moyen-Orient.

Issu de la prestigieuse acadé-mie militaire de West Point, Lloyd Austin a plus de quaranteans de carrière dans l’armée. Il apris sa retraite il y a quatre ans pour se reconvertir dans l’armement, rejoignant le con-seil d’administration de Ray-theon Technologies. Et c’est bien là le problème : la loi amé-ricaine exige d’un général qu’il soit à la retraite depuis au moins sept ans avant d’être en mesure de diriger le Pentagone.

Les parlementaires peuventaccorder une dérogation, comme ils l’avaient fait il a qua-tre ans pour Jim Mattis, le secrétaire à la Défense de Donald Trump. Mais plusieurs d’entre eux, y compris des démocrates, ont déjà indiqué qu’ils n’y étaient pas favorables.

Un casse-têteLe choix du secrétaire à la Défense pose décidément bien des problèmes à Joe Biden. Son premier choix, Michèle Flour-noy, était critiqué par l’aile gau-che du parti démocrate, qui jugeait trop proche de l’indus-trie de la Défense celle qui aurait pu devenir la première femme à occuper un tel poste.

Joe Biden aurait finalementopté pour Lloyd Austin, dont le profil discret collerait davan-tage avec ses convictions. Lors-qu’il était vice-président de Barack Obama, le président élu aurait peu apprécié l’influence des généraux à la Maison-Blan-che, qui auraient joué un rôle dans les interventions améri-caines ainsi que dans l’augmen-tation du nombre de soldats en Afghanistan. Alors qu’il sou-haite limiter l’action améri-caine sur le terrain, Joe Biden privilégierait donc un Penta-gone à l’influence réduite.

Le président élu souhaiteraitaussi nommer un Afro-Améri-cain à ce poste, alors que 43 % des effectifs de l’armée sont noirs, mais que les responsablessont presque exclusivement blancs. Le « black caucus », qui regroupe les parlementaires afro-américains, demandait à Joe Biden un poste clé – à la Défense, ou à la Justice. n

ÉTATS-UNIS

La confirmationpar le Sénat de cet ancien généralest incertaine, mais le symbole serait fort : Lloyd Austin deviendrait le premierAfro-Américainà occuper ce poste.

Légère embellie de l’économie sud-africaine, qui reste très fragile

Claire Bargelès @ClaireBargel

—Correspondante à Johannesburg

Avec une diminution du nombre decas de Covid et la reprise progres-sive des activités depuis août der-nier, l’Afrique du Sud a pu stopper lachute de son économie au troi-sième trimestre.

Le PIB a progressé de 13,5 % parrapport à un deuxième trimestre marqué par un confinement très strict. En rythme annualisé, la croissance a connu un rebond de 66,1 %, après s’être effondrée de 51,7 %.

Ces résultats, obtenus grâce à lareprise de l’industrie manufactu-rière, du secteur des mines et du commerce permettent au pays de sortir d’une longue période de récession.

Plus de 4.000 nouveaux cas de Covid-19 par jourMais ils sont à relativiser, selon l’Agence nationale des statistiques, car ils interviennent après des « résultats très faibles enregistrés au deuxième trimestre. » L’économie « reste en retrait de 5,8 % par rapportà fin 2019 », et la banque centrale dupays estime que, sur l’ensemble de l’année 2020, l’activité pourrait se contracter de 8 %.

Par ailleurs, le pays n’est pas àl’abri d’une deuxième vague de con-taminations, alors que débutent les grandes vacances d’été et que se profilent les fêtes de fin d’année.

« Le virus ne prend pas de vacances »,a récemment rappelé le président Cyril Ramaphosa, inquiet de voir leshôpitaux être à nouveau engorgés et les efforts pour relancer l’écono-mie être anéantis.

Avec plus de 4.000 nouveaux caspar jour, le nombre quotidien d’infections a désormais doublé parrapport au mois de septembre, et les régions du Cap-Occidental et duCap-Oriental inquiètent particuliè-rement les autorités. La métropole de Nelson Mandela Bay, qui englobe la ville de Port Elizabeth, sevoit notamment imposer de nou-velles restrictions avec une exten-sion du couvre-feu.

Et même si le pays s’organisepour avoir accès à de futurs vaccins,les premières doses ne devraient pas être disponibles avant le deuxième trimestre 2021, selon le président.

L’Afrique du Sud a confirmé saparticipation au programme Covax, mis en place par l’Organisa-tion mondiale pour la santé (OMS), et qui devrait dans un premier temps lui permettre de vacciner 3 %de sa population, puis 10 % sur le long terme.

Pour le reste, le gouvernementest pour l’instant très discret sur sa stratégie et n’a confirmé aucune précommande. n

AFRIQUE

Le pays est sorti de la récession au troisième trimestre, grâce à une levée des restrictions sanitaires.

Mais les difficultés demeurent, alors que les premières doses de vaccins contre le Covid-19 ne devraient pas être disponibles avant la mi-2021.

Yann Rousseau @yannsan

—Correspondant à Tokyo

Selon les dernières projections de l’agence Fitch Ratings, la dette publique japonaise équivaudra cette année à… 260 % de son pro-duit intérieur brut. Un ratio qu’aucune nation développée n’avait jusqu’ici expérimenté dans l’histoire moderne.

Malgré ces montants gigantes-ques dépassant, au total , les 10.000 milliards d’euros – soit qua-tre fois la dette de la France –, le gou-vernement conservateur du Pre-mier ministre, Yoshihide Suga, devait annoncer, dans la journée de mardi, le déploiement d’un énième plan de relance, financé par la dette.

Dans la matinée, le chef de l’exé-cutif avait indiqué qu’il finalisait avec ses ministres un programme de soutien à l’activité économique

ASIE

Pour entretenir le rebond constaté depuis l’été, le gouver-nement conservateur de Yoshihide Suga a présenté les contours, mardi, du troisième plan de relance de l’année dans l’archipel.

Malgré une dette éléphantesque, un nouveau plan de relance au Japon

13,5 %LA PROGRESSION DU PIBau troisième trimestre par rapport à un deuxième trimestre marqué par un confinement très strict en Afrique du Sud.

« Nous avons compilé ces mesures pour maintenir l’emploi et soutenir les entreprises »YOSHIHIDE SUGAPremier ministre du Japon

Page 10: Les Echos - 09 12 2020

DLes points à retenir

•Avec l’arrivée d’innovations thérapeutiques majeures depuis les années 2010, la pression financière s’est accrue sur les systèmes d’assurance-maladie.•Les tarifs réclamés par les laboratoires pour les médicaments à haute valeur ajoutée – traitement contre le cancer ou l’hépatite C – sont sans rapport avec leurs coûts, d’ailleurs impossibles à établir précisément.•Ceux-ci soulignent qu’un haut niveau de prise en charge favorise l’innovation en attirant des investisseurs prêts à mettre des milliards sur certaines molécules sans garantie de succès.•Le Comité consultatif national d’éthique apporte des pistes de réponse, comme l’exigence d’une plus grande transparence de la part des laboratoires.•Et une évaluation davantage médico-économique des bénéfices des médicaments.

LA CHRONIQUE DU CERCLE DES ÉCONOMISTES

d’Emmanuelle Auriol

La jeunesse, victime de l’épidémie

A lors que le taux de chômagea bondi au troisième tri-mestre de 2020, de nou-

veaux licenciements sont à craindreà l’issue de la crise sanitaire. Les jeu-nes seront les plus touchés. Com-ment éviter une génération sacrifiée? Le Cercle des économistes pose la question ce jeudi 10 décembre, lors d’une journée de débats consacrée àla jeunesse.

En régime de croisière, le tauxd’emploi des jeunes en France est très inférieur à celui des Danois, desBritanniques, des Américains ou des Allemands. Cette faiblesse s’explique en partie parce qu’ils sontpeu nombreux à travailler en paral-lèle de leurs études. D’autre part, elles’explique par le fait qu’un million d’entre eux ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en étude. On les appelle sinistrement les NEET (Not

in Education, Employment or Trai-ning). Si le chômage des jeunes est ledouble de celui de la population, le taux d’emploi des diplômés du supé-rieur – il est à plus de 80 % trois ans après l’obtention du diplôme – est comparable à celui des actifs plus expérimentés. En revanche, ce taux chute à 30 % pour ceux qui n’ont pasdépassé le collège, ce qui est le cas de42 % des NEET. Parmi eux sont sur-représentés des jeunes sans qualifi-cation, issus de l’immigration et ayant des parents au chômage.

Entre la contraction de l’offred’emploi et l’arrivée simultanée de deux cohortes, celle de 2020 (750.000 primo-arrivants) et celle de 2021 sur le marché du travail, l’entrée dans la vie active de la géné-ration Covid-19 va être compliquée. L’expérience de 2008 montre qu’ellese fera par le biais de conditions

liers et des diplômés du supérieur, seront, comme en 2008, moins impactées par la crise que les hom-mes. Avec le plan « 1 jeune, 1 solu-tion », le gouvernement veut pren-dre en compte l’hétérogénéité de la jeunesse française. Au-delà d’une intention louable, se pose la ques-tion de sa capacité à le faire.

Avant la crise, Pôle emploi peinaità appareiller les demandeurs d’emploi avec les offres de secteurs sous tension. Quant à l’Education nationale, elle ignore le plus souvent le monde de l’entreprise et est inca-pable de gérer la diversité. Il est cho-quant, à l’heure où l’algorithmique permet d’offrir une expérience indi-vidualisée de l’accès à la culture ou à la consommation, qu’elle n’ait pas mis à profit ces nouvelles technolo-gies pour suivre en continu et de manière personnalisée les progrès

de chaque élève français. Les décro-chages se font très tôt, dès la mater-nelle et le primaire. Et ils sont prévisi-bles. Les garçons, surtout ceux issus de milieux défavorisés, sont plus à risque que les autres. Ils coûtent cherau contribuable (minima sociaux, délinquance). Injustes, ils sont aussi inefficaces car ils privent la société detalents qui ne s’épanouissent jamais, la contraignant à choisir son élite parmi le groupe restreint des enfantsde milieux favorisés. Epaulés par leur famille, ces derniers surmonte-ront la crise sans trop de difficulté. Cen’est pas le cas pour les jeunes moinsbien nés.

Emmanuelle Auriol est professeur à la Toulouse School of Economics, membre du Cercledes économistes.

salariales dégradées et que les jeu-nes sans diplôme seront les plus impactés. Or notre pays se distinguepar un système scolaire très inégali-taire, le pire de l’OCDE en science notamment. La crise sanitaire n’a rien arrangé. Du fait de la fracture numérique beaucoup, parmi les plus modestes, ont décroché des études pendant le confinement.

Outre l’origine sociale, le sexejoue un rôle déterminant dans l’échec scolaire, et donc dans le ris-que d’être au chômage. Les femmes,qui représentent 60 % des bache-

Les décrochages se font très tôt, dès la maternelle et le primaire.

Vaccins et médicaments : la quête du juste prixEtienne Lefebvre

@e_lefebvre

Nombre de chefs d’Etat le martè-lent : le vaccin contre le Covid doit être considéré comme un bien commun de l’humanité et être vendu à prix coûtant. Mais combienvaut un vaccin et, plus générale-ment, combien vaut un médica-ment ? Il n’y a pas de réponse simpleà cette question. Un médicament n’est pas un bien comme un autre, lemarché dépendant du niveau de prise en charge des systèmes d’assurance-maladie.

La fixation du prix résulte ainsid’une négociation complexe entre des entités publiques ou des assu-reurs d’un côté, et des laboratoires privés de l’autre, avec des intérêts convergents parfois – soigner le plus grand nombre, soutenir l’inno-vation et la production –, mais plus souvent divergents – obtenir le plusbas prix pour les Etats, la plus forte marge pour les laboratoires.

La problématique n’est pas nou-velle. Au cours des années 2000, la pression financière est allée crois-sant sur les systèmes d’assurance-maladie, conduisant les gouverne-ments à imposer des baisses de prixet à favoriser des génériques beau-coup moins chers. Les industriels, en panne d’innovations majeures, ont bataillé pour éviter que leurs brevets ne tombent trop vite dans ledomaine public, et poussé de nou-veaux traitements n’apportant qu’une faible plus-value médicale.

Mais la pression s’est inverséedans la décennie 2010 avec l’arrivée d’innovations majeures liée à l’essor des biotechs. La course au vaccin contre le Covid-19 en est l’illustration : les premiers traite-ments efficaces (via l’ARN) sont issus de recherches sur les théra-pies géniques et pourraient révolu-tionner toute l’industrie du vaccin.

A quel prix ? C’est tout le pro-blème. Si les tarifs des vaccins anti-Covid font débat (entre 3 et 20 eurosla dose en Europe), ils vont rester très abordables pour les systèmes de santé, au regard des bénéfices économique et sanitaire attendus. La France prévoit 1,5 milliard pour les vaccins en 2021, soit moins de 1 %des dépenses d’assurance-maladie. Le véritable enjeu sera l’accès au vaccin pour les pays pauvres.

Au-delà des vaccins, les tarifsréclamés par les laboratoires pour les médicaments à haute valeur ajoutée donnent le vertige : de plu-sieurs dizaines de milliers d’euros jusqu’à 2 millions pour certaines thérapies géniques. D’autant qu’il

ne s’agit plus seulement de mala-dies rares mais de traitements, en particulier contre le cancer, concer-nant un grand nombre de patients.

Le premier épisode fut l’arrivéed’antiviraux contre l’hépatite C en 2014. Très efficaces, ils ont d’abord été réservés à certains patients (le traitement coûtait 40.000 euros), avant de voir leur prescription éten-due, les laboratoires acceptant des baisses de prix contre un accroisse-ment des volumes.

Ces prix sont sans rapport avecles coûts de production, et même derecherche et développement ou de marketing. Des coûts du reste impossible à établir précisément, secret industriel oblige. En outre, les laboratoires soulignent avec rai-son qu’une innovation majeure per-met d’amortir les nombreux échecssur d’autres molécules. Assurer un haut niveau de prise en charge favo-rise l’innovation, en attirant des investisseurs prêts à mettre des mil-liards sans garantie de succès.

Plus que d’une rencontre entreoffre et demande, le prix relève doncd’un rapport de force entre un ven-deur (le laboratoire) et de grands acheteurs publics. Un rapport désé-quilibré car un Etat peut difficile-ment résister à la pression de son opinion publique, réclamant la miseà disposition rapide et la plus large possible d’un nouveau traitement. D’autant que les industriels jouent de la concurrence entre les Etats, comme l’illustre la course au vaccin.

Faut-il, en privilégiant un traite-ment pour quelques milliers de malades, réduire la prise en charge de médicaments plus anciens, en pénalisant des millions d’assurés ? Faut-il rationner l’accès à des traite-ments extrêmement chers, voire dire « non » à un laboratoire ?

Dans un avis publié la semainedernière, le Comité consultatif national d’éthique apporte des pis-tes de réponse, comme l’exigence d’une plus grande transparence de la part des laboratoires pour assu-rer, si ce n’est le juste prix, au moinsune « juste négociation ». L’écheloneuropéen pourrait également être davantage mis à profit : les labora-toires discutent des tarifs Etat par Etat, alors que le pouvoir de l’ache-teur serait bien plus grand dans unenégociation mutualisée.

Un autre chemin serait de pous-ser davantage l’analyse médico-économique en mettant en balancele prix d’un traitement et les gains d’espérance de vie, mais aussi les dépenses épargnées voire les pertesde productivité évitées. Pour le trai-tement anti-hépatite C, qui permet

une guérison totale, le rapport bénéfice-coût reste ainsi favorable.

Cet arbitrage est bien plus diffi-cile quand un traitement anti-can-cer permet en moyenne de gagner quelques mois de vie en bonne santé. Le Royaume-Uni fixe des

seuils : pas de prise en charge au-delà d’un coût additionnel supé-rieur à 20.000 ou 30.000 livres par année de vie (ajustée par la qualité de vie). Cela met une limite à l’infla-tion des prix, mais cela heurte le principe d’accès aux soins et sou-

lève des questionnements éthiques très lourds : quel est le prix d’un mois de vie gagné, qui soigner en priorité ? La quête du juste prix place les Etats sur un terrain glis-sant. Il faudra pourtant se donner les moyens de la mener. n

L’ANALYSE DE LA RÉDACTION La fixation du prix des médicaments est le fruit d’un rapport de force entre pouvoirs publics et laboratoires phar-maceutiques, dont les intérêts sont le plus souvent divergents. Si le « juste prix » semble impossible à atteindre pour de tels biens, une « juste négociation » s’im-pose si les Etats ne veulent pas voir la facture s’envoler.

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idées&débats

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 11

opinions

Quelle sera la facture socialede la pandémie ?

mais la Suisse, le Royaume-Uni, l’Italie, le Portugal, la Corée du Sud et les Etats-Unis sont à cinq, les Pays-Bas, le Japon, la Belgique, la Grèce et l’Espagne à qua-tre, la Norvège, la Finlande et la Suède àtrois et le Danemark à deux. Notre per-formance moins que moyenne est incompréhensible pour un pays qui se targue si fort de sa volonté d’égalité.

Ce paradoxe a une explication sim-ple. Le taux d’inégalité primaire en France, mesuré avant toute redistribu-tion, est du même ordre de grandeur que ceux des pays de capitalisme pur, Etats-Unis et Royaume-Uni. Mais, grâceà une politique de transferts fiscaux et sociaux, qui est sans doute parmi les plus intenses au monde, notre taux d’inégalité après redistribution devient très bas, seuls les pays scandinaves et lesPays-Bas faisant mieux que nous.

Arrive une récession profonde. Lapartie de la population située au-dessusdu revenu médian est relativement pro-tégée de ses méfaits, par ses fonctions et,si nécessaire, l’importance de son patri-moine. Les pauvres (jeunes à la recher-che d’emploi, travailleurs non qualifiés ou à statut précaire, chômeurs) sont frappés de plein fouet. L’expérience de la crise économique de 2008, beaucoupmoins sévère que l’actuelle, laisse pen-ser que le taux de pauvreté (pourcen-tage de la population dont les revenus sont inférieurs à 60 % du revenu médian), égal à 14,5 % en 2019, soit 9 millions de personnes, va augmenter de plus de deux points en 2020 et 2021. Quinze pour cent de pauvres en plus, 1,5 million de personnes supplémentai-res en difficulté extrême, cela nous pro-met une rupture sociale bien pire que celle incarnée par les « gilets jaunes ».

Dans ces conditions, affirmer que lesimpôts n’augmenteront pas jusqu’à la fin du quinquennat est une faute politi-que majeure. Dans une crise aussi pro-fonde, le principe de solidarité devrait être proclamé comme prioritaire par rapport à l’égoïsme individuel, et un appel lancé à une contribution excep-tionnelle des citoyens relativement aisés. Disons ceux qui paient l’impôt surle revenu, que l’on pourrait majorer de 10 % pour les trois ans à venir. Seul un effort de ce type permettra de préserverl’unité d’une société menacée de décomposition.

Jean Peyrelevade est économiste.

l’utilité commune et qu’il serait donc injuste de les remettre en question. Ceux d’en haut, s’adressant à ceux d’en bas, leur disent : nos avantages sont légi-times, car ils résultent de nos mérites. Les textes de la République vous pro-mettent une égalité des chances, pas une égalité matérielle. Ce sont les apti-tudes des individus qui expliquent les différences de positions sociales.

La fracture sociale naît ainsi dumythe d’une méritocratie sélective, fac-teur supposé de stabilité d’une société où chacun, compte tenu de ses talents, serait installé à sa juste place. Ce schéma idéal impliquerait que la mobi-lité sociale soit forte, d’une génération àla suivante, les qualités individuelles étant également réparties sur la totalitéde la population. Le concours, vache sacrée de la République, serait l’instru-

ment censé consacrer la réussite des citoyens, traités suivant leurs mérites etnon pas leur naissance.

Or le mythe ne marche plus : l’ascen-seur social est en panne. L’égalité des chances est une illusion, tant le destin de chacun est prédéterminé par la placede sa famille sur l’échelle sociale. On a remplacé une société d’ordres par une société de rangs, selon l’expression de Philippe d’Iribarne, pour ne pas dire de castes élitistes. Des voies royales réser-vées ouvrent à leurs enfants un par-cours vers les sommets. Dès leur sortie de telle grande école, alors qu’ils ont à peine dépassé les vingt ans, leur car-rière est tracée : elle relève de la néces-sité plus que du hasard. A l’inverse, quand on est pauvre (donc, pour être précis, que l’on appartient au décile le plus bas de la distribution de revenus), ilfaut en moyenne six générations pour atteindre le niveau de vie de la classe moyenne (contre quatre et demie pour l’ensemble des pays de l’OCDE). Certes, l’Allemagne ne fait pas mieux que nous

L’expérience de la crise économique de 2008 laisse penser que le taux de pauvreté, égal à 14,5 % en 2019, va augmenter de plus de deux points en 2020 et 2021.

La crise économique risque de déboucher sur une crise sociale majeure, estime Jean Peyrelevade. D’autant plus importante qu’elle frappe en majo-rité les moins aisés. On voit mal comment l’on pourra faire face à l’explo-sion du nombre de pauvres sans augmenter les impôts.

DANS LA PRESSEÉTRANGÈRE

Or, d’après le think tank Overseas Develo-pment Institute, « Pékin est en train de com-prendre que sa conception pour accorder des prêts n’est pas soutenable », car ils compor-tent trop de risques d’échec sans garantie.

Les deux institutions étudiées par l’uni-versité de Boston ont prêté 462 milliards dedollars entre 2008 et 2019, soit presque autant que la Banque mondiale (467 mil-liards). Or la faible conditionnalité sur les prêts chinois a déclenché nombre de scan-dales et des plaintes des pays endettés comme au Pakistan, où le coût d’un projet de centrale électrique a été gonflé de plu-sieurs milliards de dollars.

Ce qui devrait remettre en question lathéorie selon laquelle l’initiative chinoise est l’équivalent du plan Marshall américainpour l’Europe. On en est loin.— J. H.-R.

Routes de la soie : la Chine réduit la voilure

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A près la pandémie, puis la criseéconomique qu’elle a provo-quée, la France va selon toute

vraisemblance connaître une révolte sociale de grande ampleur, plus intense que chez les autres pays développés. Pour une raison qui nous est spécifique. Nous vivons dans une contradiction per-manente entre, d’un côté, l’affirmation de l’égalité comme valeur fondatrice de la République et, de l’autre, l’inégalité structurelle qui régit l’organisation de notre société. La France est exagéré-ment égalitaire, tel est le jugement portésur notre pays par nombre de nos citoyens appartenant aux milieux favo-risés. Que veut dire cette critique ? Que les intéressés souffrent que leurs méritesne soient pas reconnus par tous et se considèrent comme victimes de jalou-sies injustifiées.

N’ont-ils pas raison ? L’article 1 de laDéclaration des droits de l’homme et du citoyen déclare (première phrase) : « Leshommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » La deuxième phrase estsouvent ignorée : « Les distinctions socia-les ne peuvent être fondées que sur l’utilitécommune. » A première vue, elle ren-force le principe égalitaire puisqu’elle met une limite théorique à l’inégalité sociale. Sauf que les élites concernées retournent aisément le raisonnement. Les distinctions sociales existantes sont nécessairement conformes à la Déclara-tion puisque « la souveraineté nationale appartient au peuple », qui « proclame solennellement son attachement aux droits de l’homme ». Comment le peuple souverain pourrait-il tolérer des diffé-rences de conditions sociales qui ne seraient pas fondées sur l’utilité com-mune ? D’autant que cette dernière n’est pas définie : le critère est en principe puissant, mais de fait inapplicable.

Dès lors, les classes favorisées, soit entermes de pouvoir, soit en matière de revenus ou de patrimoine, sont con-vaincues que leurs privilèges apparentssont justifiés par leur contribution à

LA CHRONIQUEde Jean Peyrelevade

LE LIVREDU JOUR

Le progrès n’est plus ce qu’il étaitLE PROPOS Le progrès ne fait plus rêver. La quatrième révolution industrielle, portée par le numérique et les biotechnologies, crée autant sinon plus d’angoisses que d’espoirs. L’optimisme des Trente Glorieuses s’est évanoui, et la pandémie de Covid-19 attise plus encore les craintes et les défiances de tous bords, contre la 5G, les vaccins ou l’intelligence artificielle. Mais comment réinventer le progrès ? Cet ouvrage rassemble les réponses d’une vingtaine de personnalités, scientifiques, politiques, entrepreneurs, responsables d’ONG ou universitaires.

L’INTÉRÊT Le thème est passionnant, et la diversité des textes permet de le traiter sous de multiples angles, souvent avec talent. On peut saluer, entre autres, les contributions d’Etienne Klein (sur les liens entre science et progrès), d’Alain Clot (sur la notion d’innovation, qui tend à remplacer celle de progrès chez les acteurs du numérique), d’Emmanuel Bloch (sur l’éthique) ou de Najat Vallaud-Belkacem (sur le besoin de gouvernance mondiale). D’autres,

comme Othman Alaoui ou Luc Ferry, passent, hélas, à côté du sujet

LA CITATION « Nous allons devoir prendre acte qu’en matière de sciences, tous les discours ne se valent pas. Si imparfaits soient-ils, ceux des chercheurs ont le mérite d’être étayés, contrairement aux élucubrations des populistes de tout poil. » (Etienne Klein)— Benoît Georges

Réinventons le progrèsOuvrage collectif sous la direction de François Miquet-Marty, Editions de l’Aube, 176 pages, 18 euros.

SERVICE ABONNEMENTS LES ECHOS 4, rue de Mouchy 60438 Noailles Cedex. Tél. : 01 70 37 61 36 du lundi au vendredi de 9h à 18h. IMPRESSION L’Imprimerie (Tremblay-en-France), Midi Libre (Montpellier). TIRAGE DU 8 DÉCEMBRE 2020 : 53.450 exemplaires. Origine du papier : France. Taux de fibres recyclées : 56%.Ce journal est imprimé sur du papier porteur de l’Ecolabel européen sous le numéro FI/37/002. Eutrophisation : P

tot0.01kg/tonne de papier Membre de membre ACPM OJD CPPAP : 0421 c 83015. Toute reproduction, même partielle, est interdite sans l’autorisation expresse de l’éditeur (loi du 11 mars 1957)

Elsa Conesa (Finance et Marchés)Daniel Fortin (Magazine, Opinionset Innovation)Muriel Jasor (Leadership et Management)Arnaud Le Gal (Les Echos Entrepreneurset opérations spéciales)Etienne Lefebvre (France et international)Clémence Lemaistre (Information digitale)Lucie Robequain (France, Internationalet Enquête)Marie-Christine Sonkin (Patrimoine)

DIRECTEUR DE CRÉATIONFabien LabordeDIRECTRICE ARTISTIQUE Marion MoulinEDITORIALISTESCécile CornudetJacques Hubert-RodierEric Le BoucherJean-Francis PécresseJean-Marc VittoriSabine DelangladeLaurent Flallo, Sylvie Ramadier (Le Crible)

LES ECHOS WEEK-ENDDIRECTEUR DE LA RÉDACTIONHenri GibierRÉDACTEURS EN CHEF Laura Berny,Karl De Meyer et Mariana RealiDIRECTRICE ARTISTIQUE Cécile Texeraud

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Ce numéro comporte un 3e cahier de 08 pages « Les Echos Entreprises & Collectivités »

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• Xi Jinping est-il en train de recalibrer sa grandiose initiative des routes de la soie qui devait ouvrir des voies commerciales à tra-vers le monde ? Selon le « Financial Times »,la Chine a décidé une forte réduction de ses crédits aux infrastructures dans des pays étrangers. Les prêts de la Banque de déve-loppement et de l’Eximbank de Chine se sont élevés à 4 milliards de dollars en 2019, contre un record de 75 milliards en 2016, d’après des chiffres de chercheurs de l’uni-versité de Boston et publiés par le quotidien.« L’initiative des routes de la soie a été critiquéedans le monde en raison de ses points faibles, comme celui d’endetter des pays déshérités aux finances fragiles, sans aucune transpa-rence ni études environnementales sur les projets financés », écrit le journal.

L’autre raison de ce repli, d’après KevinGallagher, chercheur de l’université de Bos-ton, est le déclenchement par Donald Trump d’une « guerre commerciale » avec la Chine qui a créé de fortes incertitudes dans le monde.D

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12 // IDEES & DEBATS Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

opinions

LE POINTDE VUE

de Vincent Champain

2040 : ce qui est écrit, ce qu’il faut changer

C eux que l’on appelle les « “up-and-down” economists » sefocalisent sur les évolutions

immédiates de l’économie, telles les fluctuations de la Bourse ou des prévi-sions de croissance. Ils hantent les chaî-nes d’information pour expliquer le sens d’évolutions pour certaines aléa-toires, pour d’autres d’une portée très limitée sur notre bien-être. A l’échelle d’une génération, ce sont avant tout les leviers de long terme qui influenceront notre bien-être : passage de la science à l’innovation, rééquilibrage entre zones économiques, évolutions démographi-ques ou qualification de la force de tra-vail. Or une même situation appellera des actions différentes selon le prisme par lequel elle sera observée. Les défi-cits d’il y a quarante-cinq ans pouvaientsembler être une faiblesse passagère, qu’un recours à la relance par la dette suffirait à régler. Les leviers de long terme de la croissance (prix de l’énergie,démographie ou fin du rattrapage éco-nomique de la France) conseillaient l’inverse : adapter la France et ses méca-nismes d’indexation à une croissance structurellement réduite.

D’ici à 2040, la Chine connaîtra unecroissance équivalant au double de la nôtre et deviendra la première puis-sance économique mondiale. Il est, par ailleurs, probable que les taux de change suivront la hausse du pouvoir d’achat des pays émergents. Au Japon, la hausse du pouvoir d’achat s’était ainsiaccompagnée d’un triplement de la valeur du yen – tempérant nettement lacrainte de voir le « made in Japan » à

innovation technologique dynamique, si la demande s’oriente plus fortement en faveur des services, moins touchés par les gains de productivité. Un autre risque majeur concerne le climat : nousperdrons un dixième de notre crois-sance d’ici à trente ans si nous échouonsà modérer les effets du réchauffement.

Face à ces incertitudes, la sagesseimpose de construire un plan capable de s’adapter aux évolutions possibles. Ilserait ainsi aventureux de tout miser sur une inflation et un coût de la dette éternellement faibles.

Il sera de plus en plus insoutenable deconstruire des politiques énergétiques fondées sur une double subvention : une aide visible à l’installation des renouvelables, complétée par une aide cachée mais croissante, liée au fait d’imposer aux autres énergies – et doncau consommateur – le coût de l’inter-mittence des renouvelables. Une pro-grammation énergétique visant une réduction des émissions au moindre coût de long terme, compte tenu du prixdu carbone, serait préférable.

De même notre stratégie de crois-sance doit à la fois développer le secteurtechnologique ainsi que celui des servi-ces, appelé à constituer une part crois-sante de notre consommation. Ces choix, et bien d’autres, auront un impact durable pour les Français. Il reste à en expliquer les implications et àdébattre en toute transparence des options qui en découleront.

Vincent Champain est président de l’Observatoire du long terme.

bas coût menacer notre industrie. In fine, c’est Renault qui a sauvé Nissan. Dela même façon, les naissances qui feront la démographie de 2040 sont déjà là. Elles induiront une hausse du nombre de consommateurs français de7 % et une légère baisse du nombre d’actifs – laquelle en Chine et en Europede l’Est dépassera 10 %. L’effet sera infla-tionniste : plus de consommateurs pour moins de producteurs ici, et beau-coup moins en Chine ou à l’est.

Il reste bien sûr des inconnues.L’impact de la technologie sur la pro-ductivité sera-t-il suffisant pour com-penser les effets inflationnistes décrits ci-dessus ? Dans ce cas, salariés quali-fiés et inactifs seront gagnants, à l’inverse des moins qualifiés, qui expri-meront probablement leur frustration. Au contraire, si la productivité est insuf-fisante – notamment à cause du vieillis-sement de la population active – l’infla-tion et les taux augmenteront alors queles profits et le pouvoir d’achat moyens baisseront, au même titre que les coûts de tous ceux qui devront refinancer leurdette – dont l’Etat, c’est-à-dire nous tous.Ce scénario reste possible avec une

Nous perdrons un dixième de notre croissance d’ici à trente ans si nous échouons à modérer les effets du réchauffement.

La stratégie à tiroirs de Donald Trump pour renverser l’élection

S elon un sondage publié auxEtats-Unis (Reuters-Ipsos), 68 %des républicains pensent que les

élections présidentielles ont été tru-quées et 53 % en concluent que Donald Trump a, en fait, gagné les élections. C’est le résultat d’une intense campagnede communication du président que l’on aurait tort de réduire aux caprices infantiles d’un mauvais perdant. La mise en œuvre rigoureuse d’une straté-gie à tiroirs, parfaitement planifiée, aurait pu conduire à un véritable « coupd’Etat légal », au sens où le maréchal Pétain a pu obtenir « légalement » les pleins pouvoirs de l’Assemblée natio-nale le 10 juillet 1940.

La campagne de tweets rageursn’était qu’une première étape. Elle a été un franc succès : la majorité des républi-cains, chauffés à blanc, restera long-temps persuadée que les élections ont été « volées ». Quant aux élus du Parti républicain, lucides mais prudents, ils ont fait preuve d’une parfaite docilité.

Le véritable objectif était de bloquerla machine en empêchant de finaliser ledécompte des voix. C’est le sens des dizaines d’actions en justice qui ont été intentées. Les multiples allégations ont été nourries par une ligne verte de dénonciation des fraudes : vote des morts et des non-résidents, absence d’observateurs républicains, machines de vote défectueuses, procédures illéga-les… Le principe rhétorique a toujours été de présenter quelques exemples iso-lés comme le signe de l’existence d’une

été menée. Parvenir à cette étape était lebut officiel de la stratégie trumpienne. Qu’auraient fait les élus républicains s’ils avaient eu à se prononcer ?

Si, une fois désignés, les grands élec-teurs ne parviennent pas à désigner un candidat à la majorité, il existe une autrerègle méconnue : la Chambre des repré-sentants tranche en dernier ressort. Sa majorité est démocrate. Mais, sur ces questions, le vote se fait non par député, mais par Etat (fédéralisme oblige). Or, sur 50 Etats, au moins la moitié est con-trôlée par les républicains… Ce n’est que,si aucune majorité ne se dégage à la datelimite du 20 janvier 2021, le « speaker » dela Chambre des représentants – démo-crate – deviendrait président. Enfin, un ultime verrou existe : l’ensemble du pro-cessus se déroule sous le contrôle de la Cour suprême, dont six juges sur neuf ont été désignés par les républicains (et deux par Trump lui-même).

On savait que le système électoralaméricain permettait l’élection de « pré-sidents minoritaires », comme Bush en 2000 et Trump en 2016. Les dernières élections ont montré qu’il était ouvert à des manipulations plus sombres. Forts de plus de deux siècles de démocratie, etgrâce à un légalisme si souvent décrié, les États-Unis ont tenu bon. Mais le niveau élevé de polarisation politique pose question pour l’avenir.

Christophe Clerc est avocat au cabinet Descartes Legal et enseignant à Sciences po.

machination occulte, énorme et mons-trueuse. C’est la grande innovation de cecontentieux : tenter de judiciariser le conspirationnisme.

Cela a été un échec. Faute de preuves,les tribunaux ont rejeté les demandes desuspension des décomptes. Une autre manœuvre a donc été tentée. Dans cha-que Etat, les résultats des élections doi-vent être certifiés par des commissions techniques bipartisanes. Des républi-cains ont ainsi refusé de valider le vote

du comté de Wayne (Michigan), comp-tant 1,7 million d’habitants, largement démocrates, au prétexte de quelques dizaines d’erreurs (mais qui, bien sûr, faisaient « signe »). Le tollé a été tel qu’ilsont dû reculer. L’électeur américain n’aime pas qu’on anéantisse son vote.

En l’absence de certification dudécompte final dans les délais (le 8 décembre au plus tard), une disposi-tion peu connue s’applique : les cham-bres des représentants de chaque Etat fédéré, les « législatures » (State Legisla-tures), procèdent elles-mêmes à la dési-gnation des grands électeurs qui vote-ront au nom de leur Etat. Or, les législatures sont tenues par les républi-cains dans tous les Etats où la bataille a

Une majorité d’électeurs républicains sont persuadés qu’on leur a volé le scrutin.

tasmer le désastre de Pavie. Mais il s’agissaitde contester leurs interprétations, non d’en protéger les lecteurs, conscients des aléas dela liberté de plume. On peut fort bien déga-ger, au travers des fantaisies d’une narra-tion, l’essence d’un moment : « Apocalypse Now » n’est-il pas la vérité de la guerre du Vietnam ? Encore faut-il, pour que puisse advenir ce jeu de l’observant et de l’observé, des mots et des choses, que chacun en connaisse d’instinct les limites et en appré-cie la portée esthétique. Comme l’expliquait Alexandre Dumas, spécialiste du détourne-ment historique : « On peut violer l’histoire à condition de lui faire de beaux enfants. »

Se donner des coups de réelNotre postmodernité semble inapte à faire ainsi la part des choses. Jean Baudrillard l’avait pressenti en forgeant sa théorie de la simulation, qui « remet en cause la différencedu vrai et du faux, du réel et de l’imaginaire ». L’intermédiation d’un écran dans la plupart de nos échanges sociaux, commerciaux, professionnels voire amoureux a renforcé cette tendance inhérente à la société de consommation. Les lubies sur l’intelligence artificielle, la « superintelligence » annon-cée par Nick Bostrom, sont fondées sur

l’équivalence entre virtuel et réel, digital et analogique, comme si les data avaient une existence propre, comme si elles n’étaient pas seulement une forme (certes sophisti-quée) de représentation du monde. Les sophistes dénoncés par Platon sont de retour, embrouillant notre perception de l’être et du non-être. Etant perpétuellement dans le doute, nous demandons avec une énergie d’autant plus désespérée des distinc-tions tranchées et impossibles : algorithmespour repérer les « fake news » ou « dis-claimers » sur les séries historiques…

Face aux sophistes cherchant à le persua-der qu’il portait des cornes, Diogène se tapa le front et répondit : « C’est pourtant de quoi je ne m’aperçois point. » Pour éviter les confusions, il faut se donner régulièrement des coups de réel. Sans aller jusqu’à parcou-rir l’Europe à cheval, on pourra utilement faire un tour devant Buckingham Palace, marcher dans les bois, ou même parler à sesvoisins… avant de s’effondrer devant Netflix.

Gaspard Koenig est philosophe et président du think tank GenerationLibre.

Etant perpétuellement dans le doute, nous demandons avec une énergie d’autant plus désespérée des distinctions tranchées et impossibles .

LE POINTDE VUE

de Christophe Clerc

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« Les Echos » est issu de fibre recyclée.

Savons-nous encore ce qu’est une fiction ?

C omme 29 millions d’internautes, jeme suis précipité sur la nouvelle sai-son de « The Crown ». Produite et

diffusée par Netflix, la série de Peter Morganimagine de l’intérieur les péripéties de la monarchie britannique sous Elizabeth II. Lavivacité de l’écriture, la précision des recons-titutions historiques, le traitement des ques-tions politiques et bien sûr l’appel sournois au paparazzo tapi en chacun d’entre nous font de « The Crown » un divertissement bienvenu en ces temps de confinement, reconfinement, dé-reconfinement partiel, quarantaines et Noël en famille. La saison 4, consacrée à la relation entre Charles et Dianasur fond de thatchérisme, ne déçoit pas.

Naturellement, plus la série se rapprochede notre présent, plus elle attire les critiques.Les défenseurs de la monarchie tradition-nelle s’indignent du portrait peu flatteur du prince Charles (ainsi que de sa technique depêche, apparemment peu royale). La famillede Diana se plaint à son tour d’inexactitudes.Les férus d’histoire mettent en doute les cos-tumes portés pour la revue des troupes ou lerôle joué par la reine dans l’imposition des sanctions au régime d’apartheid sud-afri-cain. Quant à moi, je retiens mal mon indi-gnation à voir Margaret Thatcher ainsi cari-caturée en idéologue sans cœur, à la fois pleurnicharde et assoiffée de pouvoir : heu-reusement, un nouveau documentaire de laBBC sur la Dame de fer, « A Very British Revolution », vient à point nommé pour rétablir une vérité plus nuancée.

Les aléas de la liberté de plumeLa sensibilité de toutes les affaires ayant traità la monarchie a poussé le ministre de la Culture britannique à demander à Netflix l’introduction, avant chaque épisode, d’un avertissement rappelant le caractère imagi-naire de la série. Netflix a platement refusé, sûr de son bon droit sur le plan juridique : « The Crown » relève du « drama », soit une œuvre de fiction inspirée d’événements his-toriques. La polémique ne fait donc que commencer. Elle témoigne d’une tendance troublante de notre époque : l’incapacité à distinguer le réel de l’illusion. De même quel’on ne sait plus trier entre informations exactes et fausses nouvelles, va-t-on avoir besoin de signer une décharge de vérité avant d’ouvrir un roman ?

On a certes pu reprocher à Shakespearede malmener Richard III ou Henry V, à Vic-tor Hugo de livrer une vue partiale de la bataille de Waterloo ou à Jean Giono de fan-

LIBREPROPOS

Par Gaspard Koenig

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 IDEES & DEBATS // 13

art&culture

« Zero Dark Thirty », de Kathryn Bigelow, un film magistral sur la tra-que d’Oussama Ben Laden par la CIA, et « LeGrand Jeu », d’Aaron Sorkin, où elle campait Molly Bloom, la chef-taine du jeu clandestin à Los Angeles audébut du siècle.

En roue libreDans « Ava », un film diffusé sur Netflix etproduit par ses soins, Jessica Chastain sedéchaîne et campe une femme qui, au service d’une obscure officine d’espion-nage, use de ses charmes et de ses perru-ques pour séduire ses ennemis avant de les zigouiller avec une hargne venge-resse. Suite à une mission en Arabie saoudite qui tourne mal, Ava deviendra

elle-même la proie deses patrons patibulaireset verra en outre ressur-gir son ténébreux passé.Un passé marqué au ferrouge par l’incompré-hension de sa mère, parune séparation doulou-

reuse et par l’alcoolisme. Instigatrice et actrice omniprésente de ce film d’action décliné au féminin – une nouvelle ten-dance à Hollywood depuis l’avènement du mouvement #Metoo –, Jessica Chas-tain, grâce à son énergie et à son humour,assure la qualité du spectacle pendant lapremière demi-heure d’« Ava ». Une fic-tion qui, entre Boston, la France et le Golfe, semble vouloir déjouer les clichésinhérents à ce genre de production en misant sur l’ironie et sur un féminisme àla fois offensif et décontracté. Hélas, le

FILM AMÉRICAINAvade Tate TaylorAvec Jessica Chastain, John Malkovich, Colin Farrell… 1 h 36.Disponible sur « Netflix ».

Olivier De Bruyn @OlivierBruyn

Depuis sa révélation, il y a une décennie,dans deux films majeurs du cinéma américain – « Take Shelter », de Jeff Nichols et « The Tree of Life », de Ter-rence Malick –, l’excellente Jessica Chas-tain ne se lasse pas d’incarner des héroï-nes volontaires en lutte contre les diktats liberticides de toutes sortes. Parmi ses principaux titres de gloire :

L’actrice produit ce film d’action diffusé sur « Netflix » où elle incarne le rôle princi-pal. Une nouvelle démonstra-tion de son désir de féminiser les codes du cinéma de genre. Le résultat, hélas, n’est pas à la hauteur de ses ambitions.

Adrien Gombeaud @AdrienGombeaud

Y a s u j i r o O z u e s t m o r t l e12 décembre 1963, jour de sonsoixantième anniversaire. Il

avait réalisé plus de cinquante films, or àpeine une demi-douzaine de copies étaient en circulation. L’Occident com-mençait tout juste à découvrir ce cinéaste prodigieux, qui avait su, comme nul autre, saisir le flux incons-tant de l’existence, les sentiments non dits, les relations entre générations… Sur sa tombe, il ne laissait en épitaphe qu’un simple caractère : « néant ». Qui était Ozu ? Carlotta édite pour la pre-mière fois en français l’intégralité de sonjournal dans une traduction entière-ment révisée. Plus de 1.200 pages qui, discrètement, lèvent le voile sur l’art du maître japonais.

Lorsqu’il entame son journal, Ozu adéjà 26 films derrière lui. Le 1er jan-vier 1933, il n’explique pas ce besoin sou-dain de prendre la plume pour jeter ces

qui fleurissent, décrit la saveur d’un mochi, un paysage qui défile derrière la vitre d’un train… Qinsi, tel un rémou-leur, le cinéaste affûte son regard.

Avec ces carnets, Carlotta édite uncoffret regroupant ses derniers travaux :six œuvres en couleurs tournées entre 1958 et 1962. On y redécouvre « Herbes flottantes » (1959), récit d’une troupe de kabuki qui débarque dans un village de pêcheurs. Un dialogue face à la mer paraît tiré des carnets : « Le ciel estd’un bleu tragique », lance un person-nage lyrique. Et l’autre de répondre : « J’ai envie d’une côtelette. » « Dernier Caprice » (1961) relate l’été d’une famille de distilleurs de saké. « Tout est éphé-mère », constate une femme face au corps sans vie du grand-père. Un vol de corbeaux, les cigales qui continuent de chanter, la vie qui se poursuit. Ozu, lui-même n’a plus qu’un an devant lui, le temps de tourner, comme un au revoir, « Le Goût du saké ». Le 29 janvier, il écrit :« Dans la nuit, une pluie fine s’est mise à tomber, mais cela n’a pas duré. » n

mots : « L’auberge située dans la région de Shi-nano, au pied des mon-tagnes, est couverte de neige. » Sur des milliers de notes, au fil de trois décennies, il évoquera rarement les événe-ments qu’il traverse, à part durant les années de guerre où il est mobi-lisé en Chine, et très épi-s o d i q u e m e n t s o n métier. Naturellement, on file à l’hiver 1953, dans ces mois mythiques où Ozu écrit « Voyage à Tokyo », l’un des plus grands films de tous les temps. Quel peut être le quoti-dien d’un créateur qui cisèle une pièce majeure de son art ?

Mercredi 18 février : « Temps froid, cielcouvert. Pour me réchauffer ce matin, disons plutôt à midi, ai versé du saké dansmon bouillon de poulet. » Le lendemain :« Un peu de saké quand je me suis levé versmidi. Ryôsuké et Ashizawa étaient partis

aux studios. HayashiBunzaburô est venu avecdeux bouteilles de saké.[…] On n’a absolumentpas touché au scénarioaujourd’hui. ». Fatale-ment le lendemain :« Me suis levé à midi enmauvaise forme et avecun léger mal de tête. » Etnous voilà déjà samedi :« Légère chute de neige.Bouillon de poulet ausaké. » Est-ce donc à

cela, la recette d’un chef-d’œuvre ?

Tout est éphémèreAu fil de notes désarmantes, lacunaires ou hilarantes… Ozu, sans jamais donnerle mode d’emploi d’un film, écrit pour-tant bien l’un des plus beaux livres de cinéma qui soit. Ces carnets, mieux qu’un manuel de tournage, nous racon-tent l’art de regarder le monde. Chaque phrase trace un croquis, un haïku arra-ché à l’ordinaire. Ozu observe les arbres

LIVRE-FILMSCarnets 1933-1963Yasujiro OzuTraduction du japonais et annotations : Josiane Pinon-Kawataké.Carlotta, 1.262 pages, 50 euros.Ozu en couleursCoffret collecteur de 6 Blu-ray (avec 4 films en bonus), Carlotta, 50 euros.

Ozu, au fil des jours

CINÉMA // Longtemps introuvables, les « Carnets » de Yasujiro Ozu ressortent dans une édition intégrale. Considérations sur la météo, la cuisine, saynètes du quotidien, drôles ou touchantes… le regard du réalisateur sur la vie qui passe. A retrouver aussi dans un splendide coffret Blu-ray.

« Dernier Caprice » (1961) relate l’été d’une famille de distilleurs de saké. Photo Carlotta Films

FILM BRITANNIQUEThe Singing Clubde Peter Cattaneo, avec Kristin Scott Thomas, Sharon Horgan, Jason Flemyng.1 h 52. Première diffusion sur Canal+ le 9 décembre à 21 heures.

film, avec son scénario « purement » mécanique, s’abîme rapidement dans les invraisemblances, dans les surenchè-res prévisibles et dans une sensiblerie qui nuit à son charme initial.

Avec sa mise en scène sans imagina-tion signée Tate Taylor (le réalisateur de« La Couleur des sentiments », dans lequel Chastain joue, déjà) et les presta-tions en roue libre des acteurs qui accompagnent Jessica dans ses pérégri-nations musclées – mention spéciale à John Malkovich qui, dans une scène quasi culte, pêche à marée basse sur la plage de Barneville-Carteret –, le film s’enlise dans son académisme ronflant et, au final, ne retient l’attention que pour la partition de l’actrice, qui réussit tant bien que mal à tirer son épingle du jeu. Un jeu qui, en l’occurrence, n’est pasà la hauteur de son talent précieux. n

Jessica Chastain dans de sales draps• Initialement prévu pour une sortie dans les salles de cinéma le 11 novembre, « The Singing Club » est finalement diffusé en exclusivité sur le petit écran etles antennes de Canal+. Dans son nouveau film, l’Anglais Peter Cattaneo, auteur en 1997 d’un immense succès avec « The Full Monty », sa comédiesociale sur des chômeurs désabusés reconvertis en strip-teasers conquérants, plante sa caméra dans une caserne du Yorkshire, en 2011, alors que les sol-dats du cru abandonnent l’Angleterre pour une périlleuse mission à l’étranger.

Pour conjurer leurs angoisses et leur ennui, lescompagnes des militaires décident de monter une chorale, dirigée par l’épouse du colonel, la très aus-tère Kate Barclay (Kristin Scott Thomas, impecca-ble), qui révélera peut-être des facettes inattendues de sa personnalité… Entre film musical et « feel-goodmovie », Peter Cattaneo met en scène cette histoire d’émancipation mélodique avec un savoir-faire incontestable, mais il n’échappe pas, tant s’en faut, aux pièges du déjà-vu. Une partition agréable, mais bien trop convenue. — O. D. B.

Film en bref

En 1988, Jean-Luc Godard entame un gigantesque long-métrage qui racontera une histoire, ou des his-toires, du cinéma. À sa table de montage, le cinéastesuisse assemble bouts de films, photos, tableaux, textes… Démiurge et Dédale, il bâtit, plan par plan, un labyrinthe où le cinéma non seulement s’inscrit dans l’histoire de l’art mais en devient l’aboutisse-ment. Le metteur en scène du « Mépris » va consa-crer une décennie à sa cathédrale. Le film s’accom-pagnera d’un livre (éd. Gallimard) et donc de ces CD.Bien entendu, cette bande-son n’est pas un objet en soi. Il convient d’avoir vu « Histoire(s) du cinéma » avant de l’écouter. Au casque, les yeux clos, l’expé-rience auditive ravive des souvenirs de spectateurs. Nous voilà plongés dans un océan de voix, on recon-naît Juliette Binoche et Julie Delpy, André Malraux et Alfred Hitchcock, auxquelles se mêlent les cou-rants puissants de Stravinsky, Bach ou Coltrane. Godard lui-même tresse tous ces extraits de son tim-bre métallique nappé de nicotine.

Raccord CoccianteÉrudits, drôles, mystérieux, ces nœuds de sons et musique dessinent une tapisserie d’idées et sensa-tions. Certains instants prennent tout leur sens sousce curieux format aveugle. Ainsi, lorsque Godard s’interroge : comment le cinéma italien a-t-il pu prendre une telle dimension dans l’après-guerre « puisque tous, de Rossellini à Visconti, d’Antonioni à Fellini, n’enregistraient pas le son avec les images ? Uneseule réponse, la langue d’Ovide et Virgile, de Dante et de Leopardi était passée dans les images. » Monte alorsune chanson de Richard Cocciante, ode à l’italien, « Langue des osterie, du vin et des putains, langue qui projette à travers le monde, le grand cinéma italien. »

Stupéfiant « raccord Cocciante » qui nous rap-pelle que l’évolution de la musique annonce toujourscelle du cinéma. Lorsque Godard entame son travail,les musiciens pratiquent le « sample » depuis long-temps. Deux ans auparavant, les Run DMC ont par exemple sculpté le puissant « Walk this Way » en cal-quant leur « flow » sur un vieil accord électrique d’Aerosmith. En écoutant ces « Histoire(s) », on se souvient que leur production est contemporaine de l’album du Wu-Tang Clan « Enter the Wu-Tang (36 Chambers) », clé de voûte de l’histoire du hip-hopoù des pans de soul s’entrechoquent avec des extraitsde films de kung-fu. Godard ne travaillait pas autre-ment qu’un rappeur. Parvenu au bout du XXIe siècle,le génial JLG devenait un MC ! — A. G.

COFFRET Histoire(s) du cinéma Boite de 5 CD etlivrets, éditions ECM, 89 euros. Egalement disponibles : la bande-son de « Nouvelle Vague » (2 CD), 28 euros. « Del’origine du XXIe siècle », « The Old Place », « Liberté et Patrie, « Je vous salue, Sarajevo ». Quatre courts-métra-ges en DVD accompagnés d’un livre. 33,90 euros.

MC GodardUn film sans images, drôle d’idée ! Pour fêter les 90 ans de Jean-Luc Godard, ECM réédite en 5 CD la bande-son de ses « Histoire(s) du cinéma », accompagnée d’un livret. Réservée aux aficionados, l’expérience sonore de quatre heures trente s’avère enivrante et stimulante.

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SOCIÉTÉ // Le projet de loi visant à « conforter les principes républicains » est présenté ce mercredi en Conseil des ministres. C’est un des derniers textes marquants du quinquennat qui permettent au président d’afficher son tournant régalien. Mais il suscite des réserves de la part des cultes et des collectivités.

Séparatisme : la loi de tous les dangers pour Macron

Grégoire Poussielgue @Poussielgue

C ’est une loi très attendue et le derniergrand texte du quinquennat. PourEmmanuel Macron, elle doit

d’abord réaffirmer avec force l’un des grandsprincipes de la République, la laïcité. Elle doitaussi marquer sa volonté de lutter plus effi-cacement contre l’islamisme et le sépara-tisme musulman qui gangrènent certains quartiers, et le terrorisme qui en découle. Elle doit, enfin, inscrire l’islam de France dans la République. Son ambition est forte puisqu’il s’agit de lutter contre ceux quimettent les lois de la religion au-dessus de celles de la République. Présenté ce mer-credi en Conseil des ministres, le projet de loicontre le séparatisme – rebaptisé « projet de loi confortant les principes républicains » – est aussi un texte qui doit marquer le quin-quennat.

Emmanuel Macron l’a dit, il veut en faireun texte de reconquête républicaine, cent quinze ans exactement après la loi fonda-trice sur la laïcité, promulguée le 9 décembre1905. « L’objectif est de lutter contre ces grou-pes et associations qui, au nom d’une idéologie,veulent sortir de la République », a-t-il répété la semaine dernière lors de son interview à Brut. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Dar-manin, va plus loin et veut, avec ce projet de loi, s’attaquer au « terreau du terrorisme ». Selon le ministère de l’Intérieur, il y a en France 76 lieux de culte soupçonnés de sépa-ratisme sur 2.500 lieux de culte musul-mans. « Ce texte est un marqueur politique carle séparatisme est un sujet qui traverse notre société. Emmanuel Macron se sait très attendu », note Raphaël Gauvain, député LREM et membre de la commission des lois au Palais-Bourbon.

Polémiques annoncéesLa loi comporte de multiples entrées : beau-coup de dispositions font consensus, commele renforcement de la laïcité dans le service public et les entreprises qui en sont déléga-taires ou la protection accrue des agents publics lorsqu’ils sont menacés. La lutte con-tre la polygamie ou les mariages forcés, tout comme l’interdiction des certificats de virgi-nité font partie des dispositions qui ne susci-tent pas de forte opposition. L’Etat pourra aussi plus facilement dissoudre une associa-tion accusée de séparatisme et, pour mon-trer qu’il entend agir avant la mise en œuvre de la loi, Gérald Darmanin a déjà annoncé ladissolution de deux associations controver-sées, BarakaCity et le Collectif contre l’isla-mophobie en France, plus connu sous son acronyme CCIF.

D’autres dispositions suscitent déjà lapolémique. A l’origine, Emmanuel Macron voulait interdire purement et simplement l’école à domicile en rendant l’école obliga-toire dès trois ans, sauf pour raisons de santé.Devant la fronde des écoles hors contrat et des partisans de l’école à domicile et

devant les réticences du Conseil d’Etat, l’exé-cutif a entamé un recul.

Autre point d’achoppement, la volonté del’Etat d’accroître son contrôle sur les collecti-vités en cas de manquement à leur neutralitéest contestée par les intéressées. Le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN), chargé d’analyser les normes applicables aux collectivités, a émis un avis défavorable sur ce texte. « La rédaction de certaines dispo-sitions du projet de loi applicables aux collecti-vités territoriales […] donne le sentiment d’unedéfiance à l’égard de ces dernières », a-t-il estimé dans un avis rendu fin novembre. L’encadrement plus ferme des subventions destinées aux associations, qui devront signer un « contrat d’engagement républi-cain » visant notamment au respect de la dignité humaine et à l’égalité hommes-fem-mes, est mal perçu du côté des associations religieuses. « Il y a une possible neutralisationreligieuse de la société », s’inquiète le pasteur François Clavairoly, président de la Fédéra-tion protestante de France.

En parallèle à la loi, l’exécutif a entamé uneréorganisation de l’islam de France, chantierouvert en 2003 par Nicolas Sarkozy lorsqu’il était ministre de l’Intérieur (création du Con-seil français du culte musulman, CFCM) pour tenter de limiter les influences étrangè-res. Mais le projet d’Emmanuel Macron de créer un « conseil national des imams » sus-cite de fortes réticences, l’Etat étant accusé devouloir s’immiscer dans l’organisation du culte musulman. Mais, surtout, ce qui est perçu comme un contrôle accru des associa-tions religieuses – même si l’exécutif s’en défend – passe mal.

La question du financementSur le fond, le texte fait en sorte d’inciter les associations loi 1901 essentiellement musul-manes à passer sous la loi de 1905, qui régit les associations cultuelles et dont le régime est toiletté. Les associations concernées ne s’y retrouvent pas. « Le risque est celui d’une stigmatisation des associations cultuelles car les associations loi 1901 sont suspectées aujourd’hui de ne pas respecter les règles », estime Mohammed Moussaoui, président

et des associations qu’ils contrôlent », disait cerapport axé sur l’éducation –, étant de plus en plus prégnantes et plus visibles, Emma-nuel Macron s’est mis dès le début de son mandat sur le sujet. « Le séparatisme n’avait pas été un thème de campagne, mais il est devenu un sujet important », note Sylvain Fort, ancienne plume d’Emmanuel Macron à l’Elysée. « La question s’est ensuite focalisée sur le séparatisme islamiste ». L’exécutif a d’abord visé 15 quartiers sensibles puis a étendu sa politique à l’ensemble du terri-toire, via notamment la création des cellulesdépartementales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire. Rapidement, le besoin de nouveaux outils législatifs s’est fait sentir.

Le cheminement pour arriver à l’actuelprojet de loi a été long et difficile. La réflexiondu président français a mis du temps à mûriret les changements de ministres de l’Inté-rieur n’ont pas aidé. Elu sur des thématiqueséconomiques et sociales, il a peu à peu fait samue, aidé en cela par des ministres adeptes d’une ligne « dure » sur la laïcité, comme Jean-Michel Blanquer.

Un calendrier percuté par la crise sanitaire Le 3 octobre 2018, en quittant le ministère del’intérieur, Gérard Collomb avait quand même tenu à faire passer un message fort sur ceux qui s’éloignent de la République. « Aujourd’hui, on vit côte à côte. Je crains que demain, on vive face à face », avait-il déclaré avec un ton crépusculaire depuis le perron de la Place Beauvau. Quelques semaines plus tard, une première version de l’avant-projet de loi sort dans le quotidien « L’Opi-nion ». Le projet n’est pas jugé satisfaisant.

Il faut attendre 2020 pour atteindre la der-nière ligne droite. En février, à Mulhouse, Emmanuel Macron se veut plus offensif dans un premier discours à Mulhouse. « Notre ennemi est, à ce titre, le séparatisme, c’est-à-dire ce phénomène que nous observonsdepuis des décennies qui est une volonté de quitter la République, de ne plus en respecter les règles, d’un mouvement de repli qui, en rai-son de croyances et d’appartenance, vise à sor-

tir du champ républicain et ça, ce n’est pas acceptable », dit-il alors. Mais le calendrier qu’il prévoit est percuté par la crise sanitaire.En septembre, profitant d’un discours sur les150 ans de la République prononcé depuis lePanthéon, il revient sur le sujet. Enfin, début octobre, aux Mureaux, en banlieue pari-sienne, un nouveau discours vient poser le projet de loi. « Il fallait que l’on soit robuste surle plan juridique. La question de la fin de l’école à domicile est ainsi arrivée sur la fin », note un proche. Emmanuel Macron estime alors avoir trouvé son positionnement sur le régalien.

L’assassinat de Samuel Paty, ce professeurdécapité par un terroriste après un cours surles caricatures, le conduit à durcir le texte. Un nouvel article, créant un délit de mise en danger de la vie d’autrui en cas de diffusion d’informations relatives à la vie privée ou professionnelle est ajouté. Prenant vivementla défense de la liberté de caricaturer, le prési-dent s’attire les foudres d’une partie de la gau-che, des pays musulmans, avec des manifes-tations antifrançaises au Pakistan ou au Bangladesh, mais aussi, plus inédit, de plu-sieurs éditorialistes de journaux anglo-saxons. Il se pose en défenseur de la laïcité à la française, un concept difficilement com-préhensible en dehors de nos frontières, et cetexte vient le montrer, estime l’Elysée.

La droite à l’offensiveMais le débat politique est encore à venir, et les tensions s’annoncent déjà. La loi sur le séparatisme arrive juste après la propositionde loi sécurité globale, dont l’article 24 a crispé les relations entre l’exécutif et la majo-rité parlementaire. Une fois de plus, les dépu-tés de la majorité sont prêts à se déchirer, comme ils le font (presque) à chaque fois surles sujets régaliens. « La grande difficulté de ceprojet de loi est de déterminer une vérité ou unecertitude, car on est sur une matière sociétale et humaine, subjectivable par chacun », note la députée LREM Coralie Dubost, membre de la commission des lois.

De son côté, la droite attaque déjà le texteen l’accusant d’être trop faible. Xavier Ber-trand, le président de la région Hauts-de-France a trouvé un angle d’attaque contre Emmanuel Macron alors qu’il ne cache pas sa velléité d’être candidat en 2022. « Il aura fallu attendre pratiquement la dernière année du quinquennat pour qu’on puisse avoir un texte contre l’islamisme, qu’on ne dénomme même pas comme tel », a-t-il souligné sur BFMTV. A gauche, LFI dénonce une loi « islamophobe » et entend aussi en faire un marqueur politique face à Emmanuel Macron. Le PS est sur un ton plus mesuré. S’ilsalue les grands principes du projet, le parti dirigé par Olivier Faure pointe le manque enmatière de lutte contre les discriminations. « Aux Mureaux, le président avait évoqué un projet contre les séparatismes. Le projet déposédevant le Conseil d’Etat n’a pas repris cette ambition », avance-t-il. De quoi nourrir de vifs débats. n

Emmanuel Macron, le 2 octobre dernier,

aux Mureaux. Le présidentestime avoir trouvé le ton

juste sur le projet de loi.Puis survient l’attentat

contre Samuel Paty.

du CFCM. « On a le sentiment d’être contraintd’aller vers le statut d’association loi 1905 sansincitation. » Cette approche, qui pourrait êtrequalifiée par le financement, est assumée. « Macron a déplacé la question religieuse sur leterrain économique et social. Il a voulu mettre le débat sur le terrain pratique. Le financementest la clé », estime un proche.

Plus globalement, les représentants descultes accueillent ce projet de loi avec une certaine défiance. « La loi a deux objectifs politiques : le premier est sécuritaire et le second relatif à l’organisation de l’islam. Or, ces deux objectifs sont difficilement concilia-bles dans le même discours », ajoute François Clavairoly.

Le gouvernement se retrouve accusé devouloir nier le fait religieux. « Nous ne som-mes pas demandeurs de ce projet de loi, mêmesi nous comprenons les intentions du gouver-nement de lutter contre le séparatisme. Mais cette loi ne sera pas suffisante pour permettre aux différents cultes de trouver leur place dansla société et contribuer au bien commun », pré-cise le père Hugues de Woillemont, secré-taire général de la Conférence des évêques deFrance. Les protestants se font le relais de cesdoutes. La Fédération protestante de France estime que c’est une loi « peu attractive pour l’islam, limitante et intrusive pour le protes-tantisme ». « Ce que cette loi demande, c’est quetoutes les religions se mettent au format pro-testant, c’est-à-dire une foi individuelle rame-née à une opinion », note le philosophe Oli-vier Abel, professeur à la faculté de théologieprotestante de Montpellier.

S’il est perçu comme brutal, ce texte esttout sauf improvisé. Les manifestations et menaces liées au séparatisme, qui avaient été décrites dans le rapport Obin sur l’école en 2004 – « Certains quartiers nous ont été décrits, par des chefs d’établissement et des élus, comme’’tombés aux mains’’ des religieux

Le débat politique est encore à venir, et les tensions s’annoncent déjà.

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14 // Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

enquête

Page 15: Les Echos - 09 12 2020

Passée la sidération du mois de mars, les marchés se sont montrés étonnamment résistants aux symptômes économiques du Covid. Wall Street, en particulier, a très vite effacé le mauvais souvenir de la crise, et affiche aujourd’hui des valorisations inédites depuis la veille de la Dépression de 1929. Rien ne semble devoir ébranler la confiance des investisseurs, sous perfusion des banques centrales et galvanisés par la découverte des vaccins et le dénouement de la campagne électorale américaine. Ignorant les vagues de contamination, les chiffres de l’emploi ou ceux de l’endettement des entreprises, ceux-ci semblent avoir développé tous les anticorps nécessaires pour une reprise qu’ils imaginent imminente. Mais le pire est-il vraiment passé ? Aux Etats-Unis comme en Europe, de vrais facteurs de risque demeurent, au premier rang desquels la capacité politique des Etats et banques centrales à maintenir dans la durée leurs

politiques de soutien, dont laprolongation est jugéeindispensable par tous leséconomistes. Le blocage duCongrès, incapable des’entendre autour d’unenouvelle enveloppe d’aides, etl’incapacité des députéseuropéens à adopter le plan derelance conçu au printemps,n’ont à cet égard rien derassurant. L’urgence ne joueplus son rôle de catalyseur. Et àmesure que la situationsanitaire va s’améliorer, l’unionsacrée, qui a permis demobiliser des moyensexceptionnels pour faire face àla crise, va se fissurer.

Contrairement à Obama en2009, l’administration Bidenn’aura probablement pas lescoudées franches pour prendre

les mesures budgétaires qu’elle ambitionne, malgré la présence de Janet Yellen au Trésor. Le nouveau président, si soucieux de maîtriser son aile gauche, pourrait au contraire se retrouver bridé au Sénat par des républicains décidés à se refaire une virginité budgétaire après avoir fermé les yeux face aux 1.000 milliards de dollars de baisses d’impôts voulues par Trump. Silencieux ces dernières années, certains recommencent déjà à entonner la petite musique de la rigueur. En Europe aussi, la sortie de la pandémie va raviver des divisions mises en sommeil ces derniers mois. Même si ce ne sont pas les pays « frugaux » qui font aujourd’hui obstacle à l’adoption du plan de relance européen, il serait naïf de croire que ces derniers seront prêts à taire leurs convictions durablement, notamment au sein de la BCE, dont les mesures soutiennent au moins autant les marchés que les économies. Une réalité que les investisseurs préfèrent sans doute ignorer.

(Lire nos informationsPage 30

L’ÉDITORIAL DES « ÉCHOS »

Le monde d’après, selon Wall Street

Aux Etats-Unis comme en Europe, de vrais facteurs de risque demeurent.

Par Elsa Conesa

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VENISE SOUS LES EAUX La célébrissime place Saint-Marc de la Sérénissime a été submergée par les inondations, mardi. Un phénomène récurrent, connu sousle nom de « alta acqua », dans cette cité inscrite au patrimoine mondial de l’humanité. Le dispositif sous-marin expérimental de murailles à levée électromagnétiquedestiné à protéger la ville de Venise n’avait pas été activé. Photo Andrea Pattaro/AFP

DERNIÈRE HEURE

Des militants thaïlandais inculpés

'POLITIQUE – Quatorzereprésentants du mouve-ment pro démocratie en

Thaïlande ont été inculpés mardi de « lèse-majesté », accusés d’avoir diffamé la royauté lors des mani-festations pour demander une réforme de la puissante et richis-sime monarchie. Ils ont été laissés en liberté sous caution. Face au vent de fronde qui secoue le royaume, les autorités ont ressorti l’article 112 du Code pénal qui n’était pas utilisé depuis plus de deux ans et punit jusqu’à 15 ans de prison les insultes, diffamations et critiques envers le roi Rama X.

Le Nigeria réplique aux Etats-Unis

'RELIGION – Le Nigeria aexprimé mardi son « désac-cord cordial » avec Washing-

ton, qui vient de l’ajouter à sa liste noire des pays « particulièrement préoccupants » en matière de liberté religieuse, aux côtés de 9 autres (Arabie saoudite, Birmanie, Chine, Corée du Nord, Erythrée, Iran, Pakistan, Tadjikistan et Turkménistan). Le gouvernement du Nigéria, pays moitié chrétien moitié musulman, a déclaré que « les victimes de l’insécurité et du terrorisme sont à la fois chrétien-nes, musulmanes et d’autres reli-gions ».

Giscard : hommage des députés avantle deuil national

'POLITIQUE – L’Assembléenationale a rendu hommagemardi à l’ex-chef de l’Etat,

Valéry Giscard d’Estaing, décédé la semaine dernière, en observant une minute de silence, à la veille d’une journée de deuil national. Député du Puy-de-Dôme à de nombreuses reprises, entre 1956 et 2002, VGE fut l’initiateur, au début de son mandat présidentiel, des séances de questions au gou-vernement, devenues rituelles. Une minute de silence sera organi-sée à midi, ce mercredi, dans plusieurs institutions.

Nouvel an : Jean-Michel Jarre en concert dans Notre-Dame numérisée

'FESTIVITÉS – Pour fêter lepassage à 2021, Jean-MichelJarre donnera un concert en

réalité virtuelle dans Notre-Dame numérisée. L’événement, organisé avec la ville de Paris, sera à suivre en direct notamment sur Youtube et Facebook. Le musicien apparaî-tra sous la forme d’un avatar dans la cathédrale qui avait été entière-ment numérisée avant l’incendie d’avril 2019. Ce spectacle étant 100 % virtuel, il ne se passera rien sur place.

« La terrasse », par Antonio Giovanni Pinna pour « Les Echos »

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Gamme Taycan (28/10/2020) - ValeursWLTP : Conso. électrique combinée : de 21,0 à 26,6 kWh/100km -Émissions de CO2 : 0 g/km. Plus d’informations sur le site www.porsche.fr. Porsche France - RCS Nanterre B348 567 504.

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Mercredi 9 décembre 2020www.lesechos.fr

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Apple s’invite sur le marché du casque audio haut de gammela marque des producteurs de musique Jimmy Iovine et Dr. Dre occupait jusqu’ici seule le terrain pour Apple sur le marché de l’audio, à des prix bien plus abordables.

Reste à voir comment Apple compte évi-ter la confrontation directe entre ces deux marques. Uniquement compatibles avec desappareils Apple (iPhone, Apple TV, Mac, iPad, etc.), les AirPods Max semblent s’adres-ser aux clients déjà acquis à la marque à la pomme, quand les casques Beats fonction-nent aussi avec des appareils sur le système concurrent Android. n

(comme des batteries sur mesure) alors que ses rivaux doivent se fournir sur un marché de sous-traitants. Disponible à partir du 15 décembre, le nouveau casque embar-quera une puce électronique spécialement conçue pour Apple, à l’image des iPhone et des derniers MacBook.

La question BeatsLes AirPods Max marquent aussi la com-plète intégration des compétences de sa filiale Beats au sein des équipes Apple. Rachetée pour 3 milliards de dollars en 2014,

nomade, voient aussi arriver un concurrent redoutable dans leur gamme de prix.

Pour Apple, cette nouvelle offensive dansl’audio doit lui permettre de capitaliser sur lesuccès de sa marque AirPods. L’entreprise californienne a ainsi vendu l’an dernier plus de 60 millions de ces paires d’oreillettes sansfil – de 179 à 279 euros –, qu’elle n’avait conçues que comme un simple accessoire del’iPhone. Avec de tels volumes et des prix aussi élevés, Apple arrive à se démarquer de la concurrence. Le groupe peut en particu-lier faire fabriquer ses propres composants

pomme croquée sur l’emballage. Avec un tarif de 629 euros, la firme californienne s’inscrit tout droit dans la tendance inflation-niste du marché. Système de réduction des bruits extérieurs, coussinets à mémoire de forme autour des oreilles, spatialisation du son, acier inoxydable… tout est bon pour jus-tifier un prix qui place ses AirPods Max à plu-sieurs longueurs des modèles concurrents de Bose, Sony ou Sennheiser vendus entre 300 et 400 euros. Les marques de hi-fi, comme Focal ou Bower & Wilkins, qui inves-tissent depuis peu le marché de l’audio

nCAC 405.560,67 points-0,228 % J

DOW JONES30.165,63 points0,3187 % J

EURO/DOLLAR1,2111 $0,0041 % J

ONCE D’OR1.868,15 $0,4409 % J

PÉTROLE (BRENT)48,78 $0,2466 %

DEVISES EUR/GBP 0,907 EUR/JPY 126,115 EUR/CHF 1,0762 GBP/USD 1,3354 USD/JPY 104,14 USD/CHF 0,8887 TAUX EONIA -0,47 LIFFE EURIBOR 3 MOIS -0,534 OAT 10 ANS -0,4108 T-BONDS 10 ANS 0,9311

Florian Dèbes @FL_Debes

La montée en gamme du marché des cas-ques audio sans fil n’a pas échappé à Apple. Alors que le prix moyen pour ce type d’équi-pements ne cesse de grimper depuis quel-ques années, l’entreprise de Cupertino vient de dévoiler les AirPods Max, son premier casque à arceau vendu avec le logo de la

AUDIO

A Hambach, le 4×4 d’Ineos va remplacer la Smart de Daimler

Anne Feitz @afeitz

et Lionel Steinmann @lionelSteinmann

« Smartville » ne sera bientôt plus « Smar-tville ». Comme attendu, Daimler a vendu le site de production de la Smart à Hambach, en Moselle, au groupe pétrochimique Ineos,qui va y produire un 4×4 baptisé « Grena-dier ». Après la signature officielle, qui a eu lieu lundi soir, les deux groupes ont confirmél’information mardi via des communiqués.

« Cette acquisition est la plus grande étape àce jour dans le développement du Grenadier. En parallèle du programme d’essai exhaustif auquel sont actuellement soumis nos prototy-pes, nous pouvons désormais entamer les pré-paratifs à Hambach pour produire notre 4×4 dès la fin de l’année prochaine, afin de livrer nos clients dans le monde entier », a com-menté le PDG d’Ineos Automotive, Dirk Heilmann.

Daimler sous-traitera à Ineos la produc-tion de la Smart jusqu’en 2024, ainsi que cer-tains composants de Mercedes-Benz (dans

un premier temps, la face avant de la Merce-des GLA). « Cet engagement, associé aux prévi-sions d’Ineos pour le Grenadier, se traduit par 1.300 emplois environ à Hambach, y compris les sous-traitants sur place », indique aussi Ineos. Alors que le site emploie aujourd’hui 1.500 personnes, la production du Grenadier(entre 25.000 et 30.000 véhicules par an en rythme de croisière, après 2025) devrait per-mettre à elle seule de préserver environ 1.000emplois, selon une expertise du cabinet Roland Berger commandée par Bercy.

500 millions d’euros de travauxLe groupe allemand Daimler avait créé la surprise, pour ne pas dire la consternation, début juillet en annonçant son intention de céder son usine mosellane, alors même qu’ilvenait d’engager 500 millions d’euros dans des travaux d’extension pour y installer la chaîne de production d’un nouveau SUV électrique.

Le groupe britannique Ineos, dirigé par lemilliardaire Jim Ratcliffe, a alors saisi l’occa-sion. Lui qui envisageait jusqu’alors d’instal-ler pour son futur Grenadier une usine au pays de Galles et une autre au Portugal, il a jugé plus intéressant de récupérer une ligne de production existante. Les deux parties

n’ont pas divulgué les conditions financièresde l’opération.

Les salariés du site n’étaient pas trèsenthousiastes à l’idée de voir un 4×4 à l’ancienne, fortement émetteur de CO2, rem-placer un véhicule électrique (même si les ventes de la Smart sont en chute libre). Ils se

sont toutefois fait une raison, le projet du groupe britannique étant le seul en lice. Le CSE avait donné un avis favorable au projet, ily a trois semaines. « L’arrivée d’Ineos Auto-motive, forte d’un investissement propre, a le mérite – et non le moindre – de sauvegarder lesemplois du site, même si une partie d’entre eux

resteront tributaires des commandes de Daimler », avait expliqué l’intersyndicale.

A Hambach, une page d’histoire va doncse tourner, plus de vingt ans après l’inaugu-ration du site, en 1997, par le chancelier alle-mand Helmut Kohl et le président français Jacques Chirac. n

La signature officielle du rachat de l’usine de Smart à Hambach par Ineos a eu lieu lundi soir. Photo Jean-Christophe Verhaegen/AFP

AUTOMOBILE

Téléconsultation : les start-up s’engagent dans la santé mentaleL’utilisation de la visioconférence pour lasanté psychologique a explosé à la suitede la crise du Covid-19. // P. 27

l’essentielLes Etats-Unis s’apprêtent à livrer les premiers vaccins anti-Covid-19L’Agence américaine du médicament,pourrait donner un premier feu vertà l’utilisation du vaccin de Pfizeret BioNTech après une réu-nion prévue jeudi. ChaqueEtat a commencé à définirles publics prioritaires.// P. 18

Bruxelles appelle à la prudence sur les dividendes La Commission européenne estime justifié

de maintenir le gel imposé aux ban-ques au printemps pour faire face

aux incertitudes persistantesliées à la pandémie. // P. 32

L’immobilier vert,nouveau défi du secteur tertiaire

Construire des bureaux et descommerces plus vertueux sur

les plans environnemental et éner-gétique est dans l’air du temps. Pouvoirspublics et acteurs privés développent dessolutions innovantes. // PP. 36 À 39iSto

ck

Alstom 40Amazon 23Aurora 20BioNTech 18BMW 21Bouygues Telecom 25Caisse des Dépôts 24Carrefour 23Chantiers de l’Atlantique 22Crédit Agricole SA 40CYCL-ADD 29

DFDS 29Doctolib 27Enaco 29Famille Mary 29Free 25General Atomics 22Gohenry 27HBO Max 26Livi 27McAfee 26Moderna 18

Nissan 21Orange 25Pfizer 18PSA 21Qare 27Renaissance 31SFR 25Sinopharm 18Sinovac Biotech 18Société Générale 40Stirling Ultracold 18

Suez 20Swania 24TechnicAtome 22Teleperformance 40Tereos 24Tesla 20, 31Toyota 21Uber 20, 34UPS 18Veolia 20, 40Vivendi 40

= LES ENTREPRISES CITÉES

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res semaines (à Shanghai, Qingdao, Urumqi, Tianjin, en Mongolie inté-rieure) témoigne de la difficulté à éradiquer totalement le virus. Cha-que fois, la réaction des autorités est immédiate et massive, avec la mise en place de coûteuses campagnes dedépistage.

Parallèlement, les autorités pro-vinciales de tout le pays passent commande de vaccins dans la pers-pective d’un déploiement XXL. Les autorités du Sichuan, qui compte 85 millions d’habitants, ont annoncélundi qu’elles achetaient déjà des vaccins, rapporte l’agence Associa-ted Press. La semaine dernière, le gouvernement du Jiangsu (79 mil-lions d’habitants) a publié un avis d’achat de vaccins de Sinovac et Sinopharm pour une utilisation d’urgence. La province de l’Anhui passe également commande tandis que des dizaines de milliers de dosesont déjà été livrées à Pékin.

Contrairement aux pionniersoccidentaux Pfizer et Moderna, aucun des développeurs de vaccins chinois n’a encore publié de donnéessur l’efficacité de ses vaccins dans le cadre de ses essais de phase III. Et Pékin n’a pas encore dévoilé les

modalités de la campagne de vacci-nation auprès de 1,4 milliard de Chi-nois. Mais la Chine n’est pas en reste dans la course aux vaccins. Trois entreprises chinoises sortent du peloton : CanSino Biologics, labora-toire privé mais proche de l’Acadé-mie militaire des sciences médica-l e s , S i n o v a c B i o t e c h , a u t r e entreprise privée basée à Pékin, et Sinopharm, bras pharmaceutique de l’Etat chinois.

« Bien public mondial »Leurs essais cliniques de phase III ont lieu dans une quinzaine de paysétrangers, choisis pour leur grande population infectée ainsi que pour des considérations stratégiques. « Les laboratoires accélèrent les der-niers tests », a indiqué Wang Yi, le ministre des Affaires étrangères chinois lors d’une récente confé-rence de l’ONU. Jusqu’à présent, seul Sinopharm a effectué une demande de mise sur le marché en Chine, a rapporté la presse offi-cielle. En novembre, l’entreprise avait révélé que près d’un million depersonnes avaient été vaccinées dans le cadre d’une campagne d’urgence (personnel médical, tra-

vaillant dans les aéroports, se ren-dant à l’étranger,...), avant même la fin des essais cliniques.

Parallèlement, la distributionmassive de vaccins chinois com-mence à l’étranger. Un avion trans-portant 1,2 million de doses du vac-cin fabriqué par Sinovac s’est posé dimanche soir à l’aéroport de Jakarta et une livraison de 1,8 millionde doses supplémentaires est atten-due le mois prochain en Indonésie, où le laboratoire chinois mène des essais cliniques. Le Brésil a aussi reçu plus de 1 million de doses du vaccin Sinovac et la Turquie a « pré-commandé 50 millions de doses » de vaccins chinois, selon le « Wall Street Journal ». Le président chi-nois, Xi Jinping, a promis que le vac-cin serait « un bien public mondial », conscient que le sérum pourrait con-tribuer à redorer l’image du pays.

Les fournisseurs chinois se prépa-rent à élargir leur capacité de pro-duction : Sinovac Biotech a levé 424 millions d’euros pour doubler celle de son vaccin. Pékin avait dit précédemment être en mesure de produire 610 millions de doses d’ici àla fin de l’année et jusqu’à 1 milliard l’année prochaine. n

Frédéric Schaeffer @fr_schaeffer

—Correspondant à Pékin

Branle-bas de combat à Chengdu, mégapole de 16 millions d’habitants à l’ouest de la Chine. Une campagne massive de tests a été lancée mardi dans la capitale du Sichuan après la découverte de trois nouveaux cas deCovid-19, s’ajoutant aux deux recen-sés lundi. Les personnes contami-nées ont été placées en quarantaine dans une clinique de la ville tandis que les résidents du quartier sont interdits de sortir de chez eux sans autorisation spéciale.

Alors que l’épidémie est large-ment endiguée en Chine depuis le printemps, l’émergence de quelquespetits foyers disparates ces derniè-

La Chine se prépare à une campagne de vaccination XXLLa Chine n’est pas en reste dans la course aux vaccins. Les provinces chinoises passent déjà commande et la distribution commence à l’étranger, même si aucun développeur n’a encore publié de données sur l’efficacité de ses vaccins en phase III.

Des supercongélateurs de l’usine de Pfizer installée à Kalamazoo, dans le Michigan. C’est là que sont préparés les premiers millions de doses du vaccin anti-Covid-19 développé avec l’allemand BioNTech. Photo Pfizer/Reuters

précises. Pour les conserver jus-qu’à six mois, il faut des supercon-gélateurs, à basse température. Dans les réfrigérateurs classi-ques, disponibles dans tous les hôpitaux, les doses ne peuvent survivre que cinq jours (entre 2 et 8 degrés Celsius). Les établisse-ments de vaccination pourront aussi utiliser les conteneurs envoyés par Pfizer pour conserverles doses une quinzaine de jours, àcondition de renouveler la neige carbonique qui y est utilisée.

Du matériel coûteuxCes exigences particulières ont entraîné une véritable ruée vers laneige carbonique et les « super-congélateurs ». Les autorités ten-tent de mieux anticiper les besoins qu’ils ne l’avaient fait lors de la première phase de la pandé-mie avec les masques et les lits d’hôpitaux. C’est ainsi que l’Etat del’Ohio estime qu’il devra se procu-rer près de 7.000 kilogrammes de glace carbonique par semaine. Pfizer avait prévenu depuis plu-sieurs mois que son vaccin néces-siterait une conservation à l’ultra-froid, ce qui a permis à beaucoup d’anticiper. Mais ce matériel est coûteux : environ 25.000 dollars (plus de 20.000 euros) pour un modèle de la taille d’un réfrigéra-teur, et 7.000 dollars pour le plus petit, de la taille d’une glacière. Et l’on craint déjà que les produc-teurs ne puissent pas suivre.

Les ventes de Stirling Ultracold,un spécialiste du froid, se sont envolées de 250 % par rapport au premier trimestre. Cette entre-prise, qui produit de la neige car-bonique et des appareils de stoc-kage, a dû augmenter ses effectifs de 30 % pour faire face à la demande. Elle a aussi passé un partenariat avec UPS pour assu-rer le transport des vaccins. Elle fournira des congélateurs porta-tifs qui assureront une conserva-tion au frais et seront capables de contenir plusieurs milliers de doses. n

Nicolas Rauline @nrauline

—Bureau de New York

Les défis logistiques de la distribu-tion d’un vaccin à l’échelle mon-diale sont nombreux. Et ceux concernant celui contre le Covid-19 davantage encore. Depuis l’annonce de l’efficacité des vaccins de Pf izer et de Moderna, une véritable course contre la montre a été lancée aux Etats-Unis, en particulier pour les professionnels du froid. Le vaccinde Pfizer doit en effet être stocké àune température de – 70 degrés Celsius.

Pour cela, il faut s’assurer qu’ilbénéficie des mêmes conditions de conservation depuis sa sortie de l’usine jusqu’au client final. « Nous avons conçu sur mesure desconteneurs thermiques à tempéra-ture contrôlée utilisant de la neige carbonique pour maintenir les conditions recommandées de –70 degrés Celsius, à plus ou moins10 degrés, pendant dix jours maxi-mum », a fait savoir Pfizer, qui s’appuiera pour la distribution surses partenaires habituels, soit des transporteurs routiers ou aériens.

Afin de contrôler le bon ache-minement des produits, Pfizer équipera ses envois de GPS ther-miques qui indiqueront à tout moment la température du trans-port. Si celle-ci vient à dévier, le laboratoire sera ainsi en mesure d’identifier et d’éliminer les doses concernées. Une fois livrées, les doses devront également être stockées dans des conditions bien

Les conditions de stockage du vaccin de Pfizer obligent les autorités locales, les transporteurs ou encore les centres de vaccination à investir dans des « supercongéla-teurs » ou de la neige carbonique. Une aubaine pour les quelques spécialistes américains.

La ruée vers le froid pour le transport et la conservation des doses

Warp Speed, ont bâti avec la société de données de masse Palantir une plateforme chargée de prévoir notamment les allocations de doses,baptisée « Tiberius ».

Colis fictifPour préparer tous les acteurs de la chaîne de distribution, compte tenu des conditions de conservation au froid (– 70 °C) exceptionnelles requi-ses par le vaccin de Pfizer, quelques Etats ont participé à des tests, avec l’envoi d’un colis fictif de vaccins et d’un kit de vaccination. Le régula-teur aérien américain a aussi été démarché afin d’autoriser le trans-port de davantage de glace sèche dans les soutes des avions.

Pour réduire le nombre d’interve-nants, Pfizer a d’ailleurs décidé de traiter directement avec ses trans-porteurs habituels, notamment UPS, qui construit une « ferme de congélateurs » à Louisville (Ken-tucky) près de l’un de ses hubs aériens. Le gouvernement a de son

côté noué un partenariat avec le répartiteur McKesson.

L’administration fédérale a pro-mis de livrer tous les lieux accréditéspar les gouvernements locaux – hôpitaux, maisons de retraite, cen-tres de soins, pharmacies… Seul impératif : pouvoir utiliser les doses sans les gâcher, alors que la livraisonminimale de Pfizer sera de 975 dosespar lot, à écouler en vingt jours, et celle de Moderna de 100 doses. Des kits contenant seringues, aiguilles ettampons d’alcool ont aussi été pro-duits et sont livrés en parallèle.

Dans les maisons de retraite, lesrésidents pourront être vaccinés pardes praticiens venus de Walgreens ou CVS, deux chaînes de pharmaciesavec lesquelles le gouvernement a noué un accord. Selon Moncef Slaoui, en charge du volet scientifi-que de l’opération Warp Speed, 20 millions d’Américains pour-raient être vaccinés en décembre, et 100 millions à fin février, soit 40 % des adultes aux Etats-Unis. n

l La FDA, l’Agence américaine du médicament, pourrait donner un premier feu vert à l’utilisation du vaccin de Pfizer et BioNTech après une réunion prévue jeudi.l Les premières allocations de doses sont faites, et chaque Etat a commencéà définir les publics prioritaires.

Covid-19 : les Etats-Unis s’apprêtent à livrer les premiers vaccins

Véronique Le Billon @VLeBillon

— Bureau de New York

Dans le Michigan, la petite ville de Kalamazoo a déjà gagné en noto-riété. A mi-chemin entre Chicago et Detroit, elle héberge l’usine de Pfi-zer, laquelle prépare pour les Etats-Unis les premiers millions de doses du vaccin développé par son parte-naire allemand BioNTech, qui n’attendent que le feu vert de la FDA,l’agence américaine du médica-ment, pour être distribuées dans le pays. « L’administration se prépare à livrer ce vaccin historique et vital à tous les codes postaux des Etats-Unis dans les 24 heures suivant l’approba-tion de la FDA », a assuré un porte-parole de la Maison-Blanche.

La réunion d’un comité consulta-tif de l’agence, jeudi, sera la dernière étape annoncée avant une éven-tuelle autorisation d’utilisation d’urgence (EUA) pour ce premier vaccin. Une autre réunion est pro-grammée le 17 décembre pour celui de Moderna.

Au prorata de la populationLa première semaine, 6,4 millions de doses du vaccin Pfizer/BioNTech seront distribuées aux 50 Etats, huit territoires américains, six grandes villes et cinq agences fédérales, au prorata de leur population, a indi-qué le général Gus Perna, en charge de la logistique au sein de l’opérationWarp Speed (une référence à «Star Trek»), la cellule qui a financé pour le gouvernement américain le déve-loppement et/ou l’achat des futurs vaccins. Pour le vaccin de Moderna, un premier paquet de 12,5 millions de doses pourra être distribué dès après son autorisation.

SANTÉ Avec deux doses nécessaires,à respectivement trois et quatre semaines d’intervalle, une moitié des doses sera en réalité envoyée et l’autre conservée, « pour être sûrs de les avoir et ne pas encombrer les stockages locaux », a indiqué Gus Perna. En rythme de croisière, une douzaine de camions et une ving-taine d’avions devraient envoyer chaque jour les vaccins dans le pays depuis l’usine de Kalamazoo, selon le site Supply Chain Dive.

Chaque Etat commence à com-muniquer sur le nombre de vaccins qu’il recevra et les publics qu’il sou-haite vacciner en priorité : 38.000 par exemple pour le Kentucky. Le gouverneur, en charge de la politi-que sanitaire, prévoit de les allouer en majorité aux établissements de soins de longue durée, où sont enre-gistrés les deux tiers des décès dans son Etat. Un tiers des doses ira aussi dès le début aux personnels de santé.

Un panel d’experts conseillant lesCentres de prévention et de contrôledes maladies (CDC) a recommandé, début décembre, de vacciner en priorité les 21 millions d’employés du secteur de la santé et les 3 mil-lions de résidents des établisse-ments de longue durée. Dans l’Etat de New York, le gouverneur AndrewCuomo a insisté aussi sur la priorisa-tion des Afro-Américains et des His-paniques, proportionnellement plus touchés.

Afin de gérer cette complexité, leministère de la Santé et celui de la Défense, qui cogèrent l’opération

21MILLIONS D’EMPLOYÉSdu secteur de la santé devraient être vaccinés en priorité.

ENTREPRISES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Page 19: Les Echos - 09 12 2020

Aujourd’hui plus que jamais,il est essentiel de travailler tousensemble face au COVID-19Facebook collabore avec près de 100 gouvernements et organismes àtravers le monde, comme l’Organisation mondiale de la Santé ou le Centreeuropéen de prévention et de contrôle des maladies, pour partager desinformations fiables sur le COVID-19 à travers nos plateformes. Ensemble,nous développons des ressources qui offrent à tous des informationsprécises en temps réel, pour mieux lutter contre la pandémie.

• En Espagne, la Banque mondiale utilise les cartes de prévention desmaladies de Facebook pour planifier les besoins de tests COVID-19 etde lits d’hôpitaux.

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Page 20: Les Echos - 09 12 2020

20 // ENTREPRISES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

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valeur suffisante. L’ajout d’une injec-tion de 400 millions de dollars est sûrement ce qui a convaincu Aurora, qui, de son côté, avait peut-être du malà lever de nouveaux fonds », estime Sam Abuelsamid, analyste chez Guidehouse Insights. Même dia-gnostic pour Sasha Ostojic, ancien vice-président de l’entreprise de conduite autonome Cruise Auto-mation, pour qui « Uber est chan-ceux de simplement trouver un acheteur ».

L’avance de Waymo et TeslaAu début septembre, un manager d’ATG avait envoyé au PDG un cour-riel tirant la sonnette d’alarme : « Lavoiture ne se conduit pas bien et a desdifficultés avec des routes et des manœuvres simples. ATG a simple-ment échoué à évoluer et à produire des progrès significatifs depuis telle-ment longtemps que quelque chose doit être dit avant qu’un désastre n’arrive », avait écrit le salarié dans un message obtenu par The Infor-mation. ATG a subi plusieurs revers

qui lui ont fait prendre du retard, tandis que Tesla et surtout Waymo ont consolidé leur avance. La filiale d’Alphabet (la maison mère de Goo-gle) a même ouvert son propre ser-vice de VTC autonome au grand public en octobre à Phoenix, la capi-tale de l’Arizona.

La division avait été créée en 2015par Travis Kalanick, le cofondateur et PDG d’Uber, qui estimait que le développement d’un robo-taxi était « existentiel » pour la société, notamment face à la menace de Google.

Après avoir débauché unecinquantaine de chercheurs de la Carnegie Mellon University, il avait investi plus de 200 millions de dol-lars dans Otto, une start-up fondée par Anthony Levandowski, l’un des créateurs du programme de conduite autonome de Google.

Mais, dès février 2017, Uber avaitété plombé par des poursuites judi-ciaires engagées par Google pour vol de secrets commerciaux. Si le conflit a été réglé à l’amiable entre

les deux sociétés l’année suivante, Anthony Levandowski a été condamné à dix-huit mois de prisonl’année dernière. L’entreprise a ensuite été confrontée à un accidentmortel, provoqué par l ’un deses véhicules à Tempe, en Ari-zona. « Leurs tests sur les routes ont été interrompus pendant un an aprèscet accident. Il est difficile de faire des progrès, d’embaucher ou de motiver des ingénieurs dans ces conditions », souligne Sasha Ostojic.

L’objectif d’équilibre financier s’éloigneDepuis, la pandémie de Covid-19 a provoqué un recul des transports depassagers d’Uber, sa seule activité rentable, éloignant encore son objectif d’équilibre financier à la fin 2021. « Pour espérer avoir un succès modéré dans les véhicules autono-mes, ils auraient dû investir encore des milliards en R&D, ce qui les ame-nait dans la direction opposée de la rentabilité », estime Dan Ives, inves-tisseur chez Wedbush, qui salue

la conduite autonome d’Uber, une opération qui quadruple sa valori-sation pour la faire monter à 10 mil-liards de dollars.

Pour le cofondateur et PDGd’Aurora, la boucle est bouclée. En 2009, ce chercheur réputé de l’uni-versité Carnegie-Mellon est recruté par Google pour mettre sur pied une division dédiée à la conduite autonome. Il est nommé à sa tête quatre ans plus tard. Une décision qui pousse un autre membre de

l’équipe, Anthony Levandowski, à vouloir créer sa société, et à la revendre à Uber… après avoir volé des documents confidentiels à Google.

Quatre ans plus tard, la divisiond’Uber basée sur ce rachat et la majorité de ses effectifs reviennent dans le giron de Chris Urmson. « Avec l’addition d’ATG, Aurora auraune équipe et une technologie incroyablement fortes, un chemin clair vers plusieurs marchés et les res-sources pour accomplir ses objec-tifs », a réagi l’intéressé dans un communiqué.

700 millions de dollarsEn 2016, le Canadien a quitté Googleet joint ses forces avec deux autres vétérans de l’industrie, Sterling Anderson, ex-directeur du pro-gramme Autopilot de Tesla, et DrewBagnell, qui a dirigé le centre de recherche d’Uber dédié à la conduiteautonome à Pittsburgh, pour créer Aurora. Leur objectif ? Développer un logiciel de conduite autonome pouvant être déployé dans différentsmodèles de véhicules.

« Un joli coup. » C’est ainsi que ChrisUrmson a qualifié le rachat par sa start-up d’ATG, la division dédiée à

L’entreprise américaine a été créée en 2017 par l’ancien directeur de Waymo, l’ex-directeur du programme Autopilot de Tesla, et l’ancien directeur du centre de recherche d’Uber dédié à la conduite autonome.

TRANSPORT

Anaïs Moutot @AnaisMoutot

—Correspondante à San Francisco

Après cinq ans d’efforts et plus de 2,5 milliards de dollars engloutis, Uber renonce à développer sa pro-pre voiture autonome afin d’accélé-rer son retour à la rentabilité. Lundi,le numéro un des voitures de trans-port avec chauffeur (V TC) a annoncé revendre Advanced Tech-nologies Group (ATG), sa division spécialisée dans les robo-taxis, à Aurora, une start-up américaine créée en 2017 par plusieurs vétéransde Google, Tesla et Uber.

En échange du transfert de sestechnologies et de la majorité de sonéquipe, Uber détiendra 26 % du capital de la jeune pousse. Certains investisseurs et employés d’ATG récupéreront 14 % supplémentai-res, faisant monter le total à 40 %, selon le « Financial Times ». Uber, qui prévoit de déployer les solutionsd’Aurora, investira également 400 millions de dollars dans la start-up. Celle-ci récupérera au moins la moitié des 1.200 salariés d’ATG, doublant ainsi ses effectifs, etDara Khosrowshahi, le PDG d’Uber,siégera au conseil d’administration.

Le deal, très avantageux pourAurora qui ne paie rien en cash pourcette acquisition, se fait sur la base d’un recul de la valorisation d’ATG, de 7,25 milliards de dollars, lors de sa levée de fonds de 1 milliard auprèsde Toyota et SoftBank en avril 2019, à4 milliards de dollars. Si Dara Khosrowshahi a présenté l’accord comme une manière de placer Uberen « pôle position » dans la conduite autonome, il représente en réalité un échec pour la société, qui pré-voyait il y a quatre ans d’avoir 75.000robo-taxis sur les routes en 2019.

« D’autres entreprises de conduiteautonome se sont intéressés à la divi-sion ATG d’Uber et ont décidé de pas-ser leur tour, n’y voyant pas une

Il y a quatre ans, Uber prévoyait d’avoir 75.000 robo-taxis sur les routes en 2019.

Laurence Boisseauet Myriam Chauvot

La guerre entre Veolia et Suez s’enfonce sur le terrain juridi-que, sur lequel Suez gagne la manche du jour. Veolia a été débouté de sa dernière action endate, laquelle concernait la sus-pension des effets de son acqui-sition de 29,9 % du capital de Suez. Cette suspension imposée par la justice a pour effet de gelerles droits de vote de Veolia dans Suez tant que le groupe dirigé par Antoine Frérot n’aura pas informé et consulté les instan-ces du personnel de son rival surson projet de fusion des deux groupes – décision confirmée enappel le 19 novembre, à la suite de quoi Veolia a entamé un pourvoi en cassation.

Le jugement en cassation estattendu début février. D’ici là, « Suez précise que le projet porté par Veolia a un impact direct sur l’ensemble des entités du groupe, et [qu’il] nécessite l’information-consultation de 99 comités sociaux et économiques [CSE] », souligne le groupe assiégé.

99 CSE à informerIl n’était précédemment ques-tion que de 3 CSE à informer. En montant le total à 99, Suez joue la montre afin de maintenir le gel des droits de vote de Veolia. Le risque, si ce gel perdure, est que Suez tienne son assemblée générale annuelle sans que Veolia soit capable de voter, notamment sur les sujets ayant l’accord de la Commission euro-péenne, qui surveille les rap-ports entre concurrents. Plus précisément, l’enjeu pour Veoliaest de détricoter la fondation néerlandaise qui bloque la ces-sion de l’activité Eau France de ce dernier – et par là même la fusion, qui ne peut plus remplir les critères antitrust.

Les instances du personnel nepeuvent pas bloquer indéfini-ment une opération : le Code du travail fixe à trois mois le délai légal d’information-consulta-tion. D’après l’avocat des salariésde Suez, le point de départ varie selon que l’information donnée est suffisante ou pas. Les CSE de Suez, qui ont considéré qu’elle ne l’était pas, ont ainsi adressé à Veolia, le 30 novembre, une listede documents qu’ils souhai-taient leur voir être transmis.

Veolia estime que le délai adébuté avec les informations déjà transmises et a demandé son interprétation au juge. C’est sur ce point qu’il vient d’être débouté. « Veolia va saisir les juri-dictions compétentes afin qu’ellesconfirment que le délai a com-mencé à courir au plus tard le 5 novembre », a réagi le groupe, qui compte bien récupérer ses droits de vote le 5 février 2021. Deson côté, l’intersyndicale de Suez évoque un « objectif ambi-tieux [que celui] de rendre les avis demandés au terme de la consultation – au plus tard le 31 mai 2021 ». Soit à une date pos-térieure à celle l’assemblée géné-rale de Suez, durant laquelle Veolia ne pourrait alors pas voter… n

Les droits de vote de Veolia dans Suez restent gelés

ENVIRONNEMENT

Le juge a refusé de trancher quant à la demande de Veolia, dont les droits de vote dans Suez sont gelés tant que ses instances sociales n’auront pas été informées du projet de fusion.

dans cette vente « un mouvement stratégique intelligent ».

Sur les neuf premiers mois del’année, ATG et les autres program-mes futuristes de la société, comme Elevate, son laboratoire consacré aux voitures volantes, ont provoqué une perte de 303 millions de dollars.Entre 2016 et 2019, ils ont englouti 2 milliards de dollars en investisse-ments R&D.

La division est la dernière à faireles frais de la chasse aux dépenses engagée par Dara Khosrowshahi. En mai, l’entreprise de San Franciscoa revendu Jump, son activité de vélosélectriques, à Lime, dans le cadre d’un investissement de 170 millions de dollars préfigurant la forme de son deal avec Aurora. L’entreprise a aussi vendu une part dans sa divi-sion spécialisée dans le fret routier àdes investisseurs. Selon Axios, elle envisagerait une vente partielle ou des partenariats pour Elevate.

(Lire « Crible »Page 40

Pourquoi Uber a échouédans la voiture autonomel Afin d’accélérer son chemin vers la rentabilité, Uber abandonne ses efforts pour développer sa propre voiture autonome.l Il va revendre cette activité à Aurora, une entreprise américaine créée en 2017 par plusieurs vétérans de Google, Tesla et Uber, contre 26 % de son capital.

cant sud-coréen annonce en même temps lui préférer l’américain Aptiv pour monter une coentreprise dédiée à la conduite autonome près de Boston.

Une vague de consolidationdéferle alors sur l’industrie, d’Apple qui met la main sur Drive. ai à Ama-zon qui rachète Zoox, laissant Aurora avec le risque de n’avoir per-sonne à qui vendre sa technologie. Son accord avec Uber et ses investis-seurs, qui prennent 40 % de son capital, lui garantit de larges débou-chés, avec la flotte de VTC la plus large du monde, même si l’entre-prise compte d’abord se concentrer sur les logiciels pour poids lourds, plus faciles car conduisant principa-lement sur les autoroutes.

Avec cet accord, Aurora réussitaussi à obtenir un investissement de400 millions de dollars d’Uber, tout en ne déboursant pas un centime. Lerachat lui permettra aussi « peut-être de se rapprocher de Toyota », un des actionnaires d’ATG, souligne Sasha Ostojic, ancien vice-président de l’entreprise de conduite auto-nome Cruise Automation. — A. M.

Le champion du VTC fait le pari de la start-up Aurora

Uber a créé Advanced Technologies Group, sa division spécialisée dans les robo-taxis, en 2015 et y a investi plus de 2,5 milliards de dollars. Photo Angelo Meredino/AFP

L’entreprise, qui mise davantagesur les simulations virtuelles que sur les tests sur route, passe des accords avec Fiat Chrysler et Volk-swagen. Mais les deux européens lui préfèrent finalement d’autres partenaires. En juin 2019, Volkswa-gen se tourne vers Argo AI, une jeune pousse américaine dans laquelle le géant allemand investit 2,6 milliards de dollars. Puis l’été dernier, Fiat Chrysler signe un accord exclusif avec Waymo, la division de Google, afin d’utiliser sa technologie dans tous ses véhicules.

L’entreprise réussit bien à leverplus de 700 millions de dollars, avec une série B de 600 millions de dol-lars menée par Sequoia et Amazon en février 2019 et complétée par Hyundai et Kia en juin. Mais le fabri-

10MILLIARDS DE DOLLARSLa valorisation d’Aurora, quadruplée par le rachat d’ATG.

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 ENTREPRISES // 21

Anne Feitz @afeitz

Les constructeurs automobiles retiennent leur souffle. Pour eux, lesnégociations serrées qui se dérou-lent cette semaine sur le Brexit sont cruciales, et pas seulement parce qu’un « no deal » conduirait à impo-ser des droits de douane de 10 % sur les échanges de véhicules avec le Royaume-Uni. Leur attention se porte également sur un autre point, passé relativement inaperçu, mais presque aussi important : celui des « règles d’origine », qui affectera lourdement le secteur même si un accord de libre-échange est trouvé.

« On ne sait toujours pas où nousallons atterrir sur de nombreuses questions pratiques, notamment quelles règles d’origine devront être suivies », déplorait ainsi il y a quel-ques jours le directeur de Toyota Europe, Johan van Zyl, au cours d’un entretien avec les « Echos ».

Minimum de valeur ajoutéeCette disposition des « règles d’ori-gine » est classique dans les accords de libre-échange : elle stipule que, pour être considérés originaires d’un pays et, de ce fait, exempts de droits de douane, les produits doi-vent comporter un minimum de valeur ajoutée issue de ce pays. « Pour les véhicules, la part locale de valeur ajoutée doit généralement être au moins de 55 % », explique-t-on auComité des constructeurs français d’automobiles (CCFA). Ce pourcen-tage inclut les pièces produites dansl’ensemble des pays concernées par l’accord de libre-échange.

Dans le cadre du Brexit, lesconstructeurs ont tenté d’obtenir que cette disposition soit assouplie. Pour les véhicules thermiques, les positions des négociateurs ne sont pas très éloignées : le Royaume-Uni prône un recul à 50 %, au lieu de 55 %. « Sur ce point, une position commune devrait pouvoir être trou-vée », estime une source industrielle.

Mais pour les véhicules électri-fiés, on est loin du consensus. Le Royaume-Uni souhaite réduire la part locale à 30 %, avec une montée progressive à 50 % pendant une période de transition de six ans, tan-dis que l’Union européenne veut la maintenir à 55 %. Et selon nos infor-mations, elle reste ferme sur ce point. La question n’est pas neutre, car les batteries représentent entre

AUTOMOBILE

Même si les négocia-teurs du Brexit par-viennent à un accord de libre-échange, les véhicules électrifiés seront soumis à des droits de douane.

Leur contenu local ne sera pas suffisant car les batteries large-ment importées d’Asie les empêcheront de satisfaire les règles d’origine.

Brexit : le casse-tête des « règles d’origine » pour les véhicules automobiles électrifiés

Des véhicules neufs à la sortie de l’usine Vauxhall (groupe PSA) de Liverpool, en Angleterre. Photo Paul Ellis/AFP

*Offre valable en France métropolitaine. Voir modalités complètes sur www.nespresso.comNESPRESSO France SAS - SIREN 382 597 821 - RCS Paris 27 rue du Colonel Pierre Avia, 75015 Paris.

30 % et 40 % de la valeur de ces véhi-cules et le marché est en plein décol-lage. Or, pour l’instant, la quasi-tota-lité des batteries est importée d’Asie.

« Qu’on arrive ou pas à conclure unaccord de libre-échange, les voitures électriques et les hybrides rechargea-bles seront concernées par les règles d’origine », a ainsi souligné la direc-trice générale de PSA au Royaume-Uni, Alison Jones, lors d’une confé-rence la semaine dernière. Ces véhicules seront donc soumis à des droits de douane, qui renchériront nécessairement leur prix de vente à l’export, a-t-elle insisté. Ces droits de douane concerneront tous les industriels implantés au Royaume-Uni, comme Toyota, PSA, BMW ou Nissan, ainsi que le constructeur local Jaguar Land Rover.

En adoptant une position stricte,les négociateurs européens veulent éviter que le Royaume-Uni devienneun « cheval de Troie » pour les batte-ries asiatiques, alors que l’Union européenne tente de se doter d’une industrie locale pour ce composant clé de la voiture de demain. Mais en attendant que les « gigafactory » européennes soient sorties de terre, les constructeurs basés dans l’UE seront eux aussi pénalisés s’ils sou-haitent vendre leurs voitures électri-fiées outre-Manche. « Nous nous pri-vons d’un marché d’exportation important, sur lequel nos véhicules électrifiés ont un certain succès », regrette-t-on ainsi au CCFA.

En 2019, 80 % de la productionautomobile britannique a été exportée, dont plus de la moitié dans l’UE. A l’inverse, 88 % des voi-tures neuves achetées au Royaume-Uni ont été importées, dont 78 % depays de l’Union européenne. n

Les négociateurs européens veulent éviter que le Royaume-Uni devienne un « cheval de Troie » pour les batteries asiatiques.

L’Autorité de la concurrence autorise le rachat de Camaïeu par FIBDISTRIBUTION Le groupe Financière Immobilière Bordelaise,propriétaire de galeries marchandes et de 22 Galeries Lafayetteen province, avait notifié à l’Autorité de la concurrence l’acquisi-tion de 511 magasins Camaïeu, dans le cadre d’une procédure deredressement judiciaire. Le gendarme de la concurrence aestimé, mardi, que l’opération ne restreignait pas la concur-rence sur les marchés des vêtements et des chaussures demoyenne gamme pour femmes. Le rachat est autorisé.

à suivre

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22 // ENTREPRISES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Le porte-avions « Charles de Gaulle » aura un successeur en 2038

2.000 marins, dont 1.100 pour l’équipe de conduite et 500 pour le groupe aéro-embarqué. Il restera attaché au port de Toulon, ce qui réclamera des travaux afin d’adap-ter les infrastructures. Sa vitesse, de 27 nœuds, sera identique et son mode de propulsion sera aussi nucléaire.

Un nouveau modèle de chaufferie nucléaireNéanmoins, le bateau étant plus gros, les ingénieurs du nucléaire auront un défi à relever : fabriquer une chaufferie plus puissante. Actuellement, le porte-avions se déplace avec deux réacteurs nucléaires K15, des chaufferies très compactes de 150 MW de puissance.Demain, il y aura aussi deux chauffe-ries mais de modèle K22, dotées d’une puissance de 220 MW. Il ne faudra recharger le cœur du réac-teur que tous les dix ans contre sept à huit ans actuellement. Ainsi, le navire doit garder un taux de dispo-nibilité de 65 % minimum sur toute sa durée de vie. La propulsion nucléaire devrait représenter au basmot quelque 20 % du coût du porte-avions, voire 25 %.

L’autre équipement majeur, quicoûte une fortune, est le système de catapultage des avions. Mais cette fois-ci, la France fait appel à des com-pétences américaines. C’est General Atomics, qui développe un nouveau système de catapultage électroma-gnétique à la place de catapulte à vapeur, qui sera sollicité. Les discus-sions doivent encore être finalisées pour ce système qui vient de se quali-fier sur le porte-avions américain Ford. Là, certains évoquent un coût de l’ordre du milliard d’euros. Paris ne confirme ni n’infirme. Rappelonsque tout l’art d’un porte-avions est depouvoir catapulter à toute vitesse sesavions de chasse. A ce jour, les Rafalequittent une piste de 75 mètres de long en deux secondes.

Au ministère des Armées, on évo-que un projet qui va mobiliser quel-que 2.000 emplois à temps plein surtoute la durée du projet, dont 400 personnes à Saint-Nazaire pourla construction de la coque aux Chantiers de l ’Atlantique et 1.400 personnes chez Naval Group et TechnicAtome. L’on insiste égale-ment sur la défense d’une maîtrise unique en Europe : la propulsion nucléaire navale, indispensable à l’autonomie stratégique française. Le « Charles de Gaulle » est « l’éten-dard de la souveraineté française », mais on peut rêver qu’en 2040, avec des avions non plus franco-français à bord comme le Rafale, mais euro-péens comme le futur SCAF, il pourra aussi jouer un rôle d’agréga-teur de volonté et politique euro-péennes. n

l En visite au Creusot, mardi, le président de la République a donné le coup d’envoi à la conception et à la construction du successeur du « Charles de Gaulle ». La propulsion nucléaire devrait représenter quelque 20 % du coût final.l Une enveloppe de 900 millions est prévue d’ici à 2025.

Anne Bauer @annebauerbrux

La France n’en a qu’un, mais elle y tient. Son porte-avions « Charles de Gaulle » est un outil diplomatique sans équivalent. Il lui permet de jouer dans la cour des grands, quandseuls les Etats-Unis, la Chine, la Rus-sie et maintenant la Grande-Breta-gne possèdent de telles plateformes. On compte aujourd’hui 28 porte-avions ou porte-aéronefs dans le monde, dont 11 appartiennent aux Etats-Unis, la Chine étant en train deconstruire son quatrième porte-avions. Au vu des déclarations des uns et des autres, on peut tabler sur une petite quarantaine de navires dece type à l’horizon 2040. Chacun connaît la formule : « un porte-avi-ons c’est 42.000 tonnes de diploma-tie », mais il s’agit bien d’un outil de maîtrise des espaces aéromariti-mes, de renseignement et de projec-tion au service du politique. Commele remarque l’ex-pacha Marc-An-toine de Saint Germain, « mettre unefrégate dans une région contestée ou mettre le “Charles de Gaulle”, ce n’est pas le même signe que vous envoyez ».

La fin de vie de l’actuel porte-avions français à propulsion nucléaire étant programmée dans les années 2040, il est temps de lan-cer le développement de son succes-seur. Les avant-projets mèneront jusqu’à 2025 et devraient réclamer une première tranche de 900 mil-lions d’euros, dont 117 millions de budget en 2021. Au-delà, on parle d’un bâtiment qui coûterait quelque 450 millions d’euros par an pendantla durée de sa construction, soit un investissement global d’au moins 5 milliards d’euros. Selon le minis-tère des Armées, la construction devrait s’achever en 2036 pour une entrée en service en 2038.

2.000 marinsLes grandes lignes du futur « Char-les » sont définies : le navire sera un tiers plus imposant avec une masse de 75.000 tonnes contre les 42.000 actuelles, avec une longueur de 300 mètres capable d’emporter 30 avions de chasse et d’en catapul-ter 25 par pontée. Il s’agira des Rafale, lesquels seront progressive-ment remplacés par l’avion de chasse franco-allemand de nouvellegénération actuellement à l’étude. Ce SCAF (système de combat aérien du futur) devrait être plus lourd que l’actuel Rafale, ce qui explique la nécessité d’un pont et d’un navire plus massif, « à l’américaine ».

Pour le reste, le nouveau porte-avions doit rester au « format » actuel avec un équipage de quelque

DÉFENSE

tributeur chimique allemand Brenntag et son ancienne société mère Deutsche Bahn à des amendesrespectives de 47 et 5,2 millions d’euros pour entente anticoncurren-tielle dans la distribution de commo-dités chimiques (solvants, soude, javel, acides, etc.) en France.

La filiale française et des sociétésdu leader mondial de la distribution des produits chimiques, au chiffre d’affaires de 13 milliards d’euros en 2019, ont enfreint le Code de com-merce « en mettant en œuvre une entente anticoncurrentielle unique et complexe visant à stabiliser leurs parts de marché et à augmenter leurs marges par le biais de réparti-

tions de clientèles et de coordina-tions tarifaires », selon la cour d’appel. Les faits ont été commis entre 1998 et 2005 en Rhône-Alpes, en Bourgogne, dans le nord et l’ouestde la France notamment. Brenntag aun mois pour introduire un pourvoien cassation, non suspensif.

Dénonciation du cartelLa dénonciation des faits est venue du distributeur toulousain, Gaches Chimie (360 salariés pour un chiffred’affaires de 155 millions d’euros en 2019), victime du cartel. « Brenntag aproposé de nous racheter à la fin 1999et, comme nous avons refusé, il nous afait une guerre des prix dans le Sud-

Ouest, alors qu’il vendait cher dans les autres régions ! Il a aussi fait pres-sion sur des fournisseurs, qui ont refusé de nous livrer… », se souvient le PDG de la PME, Pierre Gaches. Cedernier a déposé une plainte pour abus de position dominante en 2003 et une autre pour entente en 2006. Dès la menace de l’action pourentente, Solvadis, Brenntag et Uni-var se sont empressés de dénoncer leur cartel à l’Autorité de la concur-rence. Le premier, Solvadis, a ainsi été exonéré d’amende.

L’Autorité de la concurrence avaitdéjà condamné pour entente anti-concurrentielle, en mai 2013, les quatre premiers distributeurs

– Brenntag, Univar, Solvadis et Cal-dic Est –, qui détenaient ensemble 80 % du marché, dont 50 % pour Brenntag. Le gendarme de la concurrence leur avait infligé 73 millions d’euros d’amendes, dont53,1 millions pour Brenntag et Deutsche Bahn. « Les représentants se réunissaient secrètement pour se répartir la clientèle et se coordonner sur les prix », relevait-elle. Le cartel truquait les appels d’offres en fai-sant des offres de couverture.

« Obstruction à la justice »Brenntag avait fait appel, et la cour d’appel de Paris avait annulé la sanc-tion contre lui en 2017 pour un vice

de procédure. Rejugeant l’affaire sur le fond, elle lui a infligé une amende aussi lourde. Une autre plainte déposée en 2003 pour « abusde position dominante » est tou-jours en cours d’instruction par l’Autorité de la concurrence, qui a infligé une amende de 30 millions d’euros à Brenntag en 2017 pour « obstruction à la justice » dans cetteenquête. Le distributeur a déjà été condamné en Allemagne et en Nor-vège en 2008, et en Autriche en 2010.

Le délai de prescription étant decinq ans, les centaines de clients lésés dont Veolia, Saint-Gobain et des hôpitaux ne devraient pas pou-voir demander réparation. n

Laurent Marcaillou—Correspondant à Toulouse

Le 3 décembre dernier, la cour d’appel de Paris a condamné le dis-

CHIMIE

La cour d’appel de Paris a condamné le premier distributeur mondial de produits pour la chimie pour entente anticoncur-rentielle en France, entre 1998 et 2005.

L’allemand Brenntag condamné en appel pour entente

« La propulsion nucléaire donne une réelle souplesse d’utilisation »Quels sont les avantages d’un porte-avions à propulsion nucléaire ?Les avantages pour le futur porte-avions seront les mêmes que pour le « Charles-de-Gaulle », dont les chaufferies nucléaires sont plébis-citées. La propulsion nucléaire donne une réelle souplesse d’utili-sation, une grande sûreté et apporte un niveau d’exigence et dequalité qui fait monter en gamme l’ensemble des opérations sur le bateau. Si on exclut les périodes d’arrêt pour la maintenance, le porte-avions actuel a une très fortedisponibilité opérationnelle et sonsuccesseur en aura encore davan-tage, puisque les réacteurs des nouvelles chaufferies ne devront être rechargés que tous les dix ans.

Grâce au nucléaire, le bateauréduit ses besoins de ravitaille-ment au seul carburant des avionsembarqués, et peut donc naviguer davantage et plus loin. La propul-sion nucléaire a aussi l’avantage den’émettre aucune fumée et d’être silencieuse, et enfin de ne pas émettre de CO2.

Quels sont les défis à relever pour TechnicAtome ?

une histoire 100 % française, qui s’écrit de génération en généra-tion. Le calendrier est exigeant, il nous faut terminer l’avant-projet sommaire en deux ans, puis l’avant-projet détaillé en trois ans pour lancer la réalisation dès 2026en vue d’une première sortie à la mer dix ans plus tard.

L’entreprise devra-t-elle embaucher ?Nous étudions ce futur réacteur depuis déjà quelques années et sommes donc sur un départ lancé.Mais le nombre d’ingénieurs mobilisés avec notre cotraitant Naval Group et sous la maîtrise d’ouvrage du CEA (Commissariat

à l’énergie atomique) et de la DGA (Direction générale de l’arme-ment) va évidemment augmenter.

TechnicAtome se porte bien etcompte aujourd’hui quelque 1.700 salariés, contre 1.500 salariés en 2018. Nous avons l’intention de reprendre les embauches dès 2021.J’espère que nous serons bientôt 2.000. TechnicAtome est une ETI p e r f o r m a n t e ave c q u e l q u e 400 millions d’euros de chiffre d’affaires et une marge de 12 % depuis trois ou quatre ans.

Y a-t-il des retombées possi-bles pour le nucléaire civil ?Entre le nucléaire civil et la propul-sion nucléaire navale, il y a des points communs techniques, ne serait-ce que parce que nous avonschoisi la filière des réacteurs à eau pressurisée. Mais les tailles et les cœurs des réacteurs sont très diffé-rents. En revanche, les deux filiè-res font travailler un réseau com-mun de quelque 200 PME et sont soumises à des règles de sécurité similaires. Maintenir les compé-tences de la filière de défense a donc de possibles retombées pour l’avenir du nucléaire civil aussi.— Propos recueillis par A. B.

Il nous faut concevoir des chauffe-ries K22 d’une puissance d’environ220 mégawatts thermiques, contre 150 mégawatts aujourd’hui.Concevoir un cœur plus impor-tant est en soi un défi, car il faut modéliser et configurer les élé-ments du combustible de façon différente et repenser les circuits primaire et secondaire. Ce seront les plus gros réacteurs compacts que nous ferons.

N o u s œ u v r o n s d a n s d e scontraintes de place et de sûreté, extrêmement exigeantes et diffé-rentes du nucléaire civil. La nou-velle chaufferie s’inscrit néan-moins dans une continuité afin de minimiser les risques. Pour com-parer, le défi technique est simi-laire à celui posé dans les années 1980 lorsqu’on a changé de classe de sous-marins, en passant de la classe des Rubis à celle des Triom-phant, équipés de la chaufferie K15. Rappelons que l’aventure de lapropulsion nucléaire navale est

LOÏC ROCARD PDG de TechnicAtome

« Le calendrier est exigeant, il nous faut [...] lancer la réalisation dès 2026 en vue d’une première sortie à la mer dix ans plus tard. »

Le navire qui remplacera le « Charles de Gaulle » sera un tiers plus imposant, avec une masse de 75.000 tonnes, contre les 42.000 actuelles, et une longueur de 300 mètres. Il sera capable d’emporter 30 avions. Photo Naval Group

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 ENTREPRISES // 23

ric Duval, le directeur général d’Amazon en France, a affirmé sur une autre antenne que l’entreprise américaine n’avait jamais fait un aussi bon Black Friday dans l’Hexa-gone. Il n’empêche, la Fevad (Fédé-ration du e-commerce et de la venteà distance) indique qu’au cours du troisième trimestre 2020, de juillet à septembre, les ventes en ligne des chaînes de magasins ont grimpé de29 % (par rapport à la même période de 2019), quand celles des cybermarchands « purs » n’ont pro-gressé que de 11 %.

Le « drive » tireson épingle du jeuLes déclinaisons numériques des enseignes étaient déjà les vain-queurs du premier confinement. Lephénomène s’est prolongé avec intensité lorsque les magasins ont rouvert. Le Covid-19 aura para-chevé leur mutation numérique. Le« drive », l’originalité de l’e-com-merce alimentaire français, a tiré son épingle du jeu. Grâce à lui, les ventes en ligne de produits de grande consommation ont gagné

46 % en août, contre 26 % pour le non-alimentaire.

Le classement Médiamétrierange à nouveau la FNAC au troi-sième rang des sites marchands les plus fréquentés, derrière Amazon et Cdiscount. Carrefour se classe sixième, Leclerc huitième et Leroy Merlin neuvième. « Depuis le mois de janvier, l’augmentation du canal Web des magasins est trois fois plus importante que pour la même période en 2019 (+41 %, contre +13 %) », écrit la Fevad.

« L’e-commerce a bien joué sonrôle d’amortisseur de crise, même s’ilne permet pas de compenser la tota-lité du manque à gagner des maga-sins fermés », estime le président de la Fevad, François Momboisse, qui évoque « un coup d’accélérateur énorme pour les ventes en ligne ». Depuis le début du second confine-ment, l’activité « on-line » a grimpé de 84 %, toujours par rapport à la même période l’an passé. L’effet reconfinement a été immédiat, contrairement à mars, quand tous les acteurs avaient adapté leur chaîne logistique et que les Français

Philippe Bertrand @Bertra1Philippe

Le PDG de Carrefour s’est emporté contre Amazon. Et pourtant, les chiffres montrent qu’en matière d’e-commerce, la crise du Covid-19 a favorisé les sites des enseignes tra-ditionnelles. « Vous êtes Amazon, vous rê vez d’avoir une année pareille ! Le tapis rouge leur a été déroulé », a écrit Alexandre Bom-pard sur Twitter après son inter-view sur RTL, mardi matin. Frédé-

E-COMMERCE

Leurs ventes en ligne connaissent une plus forte croissance que celles des purs cybermarchands.

La chute des voyages provoquele ralentissementdu secteur dansson ensemble.

Enrique Moreira @EnriqueMoreira

Face à la crise sanitaire et à ses conséquences (sur l’emploi, notamment), Carrefour entend prendre ses responsabilités. Le groupe, qui se revendique pre-mier employeur privé de Franceavec 100.000 employés, va recruter 15.000 jeunes en 2021.

« Cette année, pour la “généra-tion Covid”, c’est d’une com-plexité folle », a constaté ce mardi Alexandre Bompard, PDG de Carrefour, au micro de RTL. « On ne peut pas rester les bras croisés, et ce que j’ai décidé, c’est de tendre la main à cette jeu-nesse », a-t-il ajouté.

Dans le détail, Carrefour varecruter 8.000 jeunes en alter-nance, par le biais de contrats en apprentissage ou bien en professionnalisation. Le distri-buteur va par ailleurs embau-cher 7.000 autres jeunes en CDI, dont une bonne partie d’étudiants. L’enseigne recrute généralement 5.000 étudiants par an, le plus souvent sur des contrats à temps partiel, que ce soit en caisse, à l’accueil ou à la mise en rayon.

Au total, Carrefour augmen-tera le recrutement de jeunes travailleurs en faisant passer leur nombre de 10.000 en 2020 à 15.000 l’an prochain. « Sur les seuls contrats en alternance, nous doublons le nombre de recrutements par rapport à 2019et à 2020 [4.000, NDLR]. Nous sommes en cela bien au-delà de l’obligation légale, qui est de 5 % de l ’effectif », précise aux « Echos » le directeur des res-sources humaines du groupe, Jérôme Nanty.

DISTRIBUTION

Le géant françaisdu secteura annoncé mardi son intentiond’embaucher, en 2021, 8.000 jeunes en alternance et 7.000 autres en CDI.

Carrefour va recruter 15.000 jeunes

Carrefour précise que cesrecrutements viseront en prio-rité des personnes de moins de 26 ans, issues des quartiers « difficiles ». Le DRH pose ainsi la problématique suivante : « Les jeunes devant rentrer sur lemarché de l’emploi en 2021, et parmi eux ceux des quartiers prioritaires de la politique de la ville, vont être les premiers tou-chés par les conséquences de la crise sanitaire. »

Carrefour estime dès lorsqu’il est « de [sa] responsabilité »d’agir. Notamment parce que l’enseigne a eu la possibilité de maintenir son activité là où d’autres secteurs habituelle-ment pourvoyeurs d’emplois en alternance, mais qui n’ont puexercer, se retrouveront proba-blement dans l’impossibilité de recruter, cette année, en raison de la crise sanitaire.

Le groupe, bien qu’il negarantisse pas que les 8.000 recrutés en alternance seront embauchés à l’issue de leur for-mation de deux ans, veut croire que ces derniers « seront mieux armés, mieux préparés pour allerchercher du travail ensuite », tel que l’affirme Jérôme Nanty.

Carrefour se dit par ailleurspersuadé que « l’alternance est une ressource qualitative », et que le surcoût engendré par cette annonce « sera com-pensé ». La grande distribution, activité d’ordinaire très saison-nière, fait régulièrement appel à des armées d’intérimaires et de contrats courts (moins de trois mois), qui en 2021 seront remplacés par les alternants.

Avec le recrutement de ces15.000 jeunes, le géant français de la grande distribution entenddès lors « poursuivre un objectif social, […] ce qui n’est pas incom-patible avec le fait de faire pro-gresser [son] personnel en maga-sin », conclut Jérôme Nanty. n

Les moins de 26 ans issus des quartiers difficiles seront prioritaires.

avaient hésité avant de dépenser sur la Toile. Une orientation per-siste : en novembre, le chiffre d’affai-res des enseignes de magasins a explosé de 193 % sur Internet. Les pure players n’ont gagné que 33 %.

Les services plongentLes sites des enseignes sont d’autant plus les gagnants de la période que l’e-commerce dans sonensemble voit son développement ralentir, à contre-courant des appa-rences. Les biens matériels surper-forment, mais les services plon-g e n t . L e c o n f i n e m e n t e t l e s quarantaines limitent les voyages, dont les ventes en ligne ont baissé de 39 % au troisième trimestre. Au total, le marché français de l’e-com-merce a progressé de 8 % de juillet àseptembre. La hausse était de 11 % en 2019. La Fevad anticipe une croissance de 6 % sur l’année 2020 entière, avec 110 milliards de chiffred’affaires. Elle était de 11,6 % en 2019et de 13, 4 % en 2018.

Année après année, la courbe dubusiness sur le Web monte moins vite. n

Sur le Web, les enseignestraditionnelles défient Amazon

Amazon reste le leader du e-commerce en France, mais FNAC, Carrefour, Leclerc et Leroy Merlin se classent désormais parmi les dix premiers sites marchands de l’Hexagone. Photo Brendan McDermid/Reuters

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24 // ENTREPRISES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Alexis Duval, le président du direc-toire. La tension monte d’autant plus que le 11 décembre doit avoir lieu l’élection du président du conseil de surveillance, un poste occupé par Jean-Charles Lefebvre, candidat à sa réélection.

« Casse sociale »Pour Thierry Baillieu, délégué CFDT, membre du comité de groupe de Tereos, il ne fait pas de doute que « Gérard Clay brigue le poste de président du conseil de sur-veillance. Sur les 25 membres, une dizaine lui est acquis. Quatre sont hésitants ». Le comité de groupe, qui a appelé à la grève générale, affirme qu’« un changement brutal et radical d’équipe et de stratégie » conduirait à « un démantèlement dela coopérative, la vente de ses actifs etla fermeture d’usines et de sucre-ries » . Alors même, souligne encore Thierry Baillieu, que « la stratégie menée par Alexis Duval [président du directoire] a permis de sauver les emplois et de dégager

des résultats quand la concurrence restructure. Nous ne voulons pas être dirigés par des gens que la justicea reconnus coupables et condamnés.Ce serait la honte pour Tereos », dit encore Thierry Baillieu. Les syndi-cats préviennent les frondeurs que « si leur seul projet est de remplacer le directoire pour démanteler Tereoset fusionner » avec Cristal Union l’autre grande coopérative sucrièrefrançaise, « pour la renflouer en fer-mant les sucreries de Tereos avec la casse sociale qui ira avec », ils s’y opposeront « avec une détermina-tion que le conseil de surveillance ne peut même pas imaginer ».

Interrogé par « Les Echos »,Alexis Duval a confirmé sa grande inquiétude face à la radicalisation des positions et à leur caractère « irrationnel ». A vrai dire beaucoupdépend de l’élection du président duconseil de surveillance. Car les sta-tuts de la coopérative lui donnent, sila majorité le suit, la possibilité d’exclure de la coopérative un adhé-rent qui aurait intenté aux intérêts

Marie-Josée Cougard @CougardMarie

La tension est à son comble chez Tereos. Après des mois de retour aucalme et malgré une nette amélio-ration de sa situation financière, le deuxième sucrier mondial est à nouveau secoué par de violentes perturbations. Le renouvellement partiel du conseil de surveillance intervenu le 30 novembre fait pla-ner la menace d’un éclatement du groupe coopératif. A l’issue du vote,Gérard Clay, un des huit planteurs condamnés le 26 novembre par le tribunal correctionnel de Paris pour « dénonciation calomnieuse envers leur coopérative » et « fausses accusations » d’actes de terrorisme en lien avec Daech, a été élu mem-bre du conseil de surveillance. Gérard Clay s’est fait connaître il y atrois ans comme le leader de la fronde dirigée contre la gouver-nance de Tereos.

Condamnés et élusAprès la toute nouvelle élection deGérard Clay, le conseil de sur-veillance, qui compte 25 mem-bres, a désormais en son sein troisdes huit frondeurs qui ont étécondamnés par la justice (XavierLaude et Jérôme Hary). Les huitcoopérateurs exercent un mandatélectif dans le groupe. Une situa-tion qui peut paraître étonnante etqui a provoqué « l’indignation »des salariés. « Cela pose un pro-blème d’éthique et d’image dugroupe pour l’ensemble des sala-riés, des partenaires et des clients »,souligne l’intersyndicale.

Sollicité sur ce point particulier,Daniel Chéron, président du Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA), a fait valoir que le tribunal correctionnel n’a « condamné les coupables qu’à une amende de 1.500 euros mais n’a pas prononcé depeine d’inéligibilité ». Tereos n’avait « pas demandé plus qu’une condam-nation symbolique », a précisé

AGROALIMENTAIRE

Les salariés redoutent une nouvelle offensive des frondeurs qui attaquent la gouver-nance depuis trois ans malgré leur condam-nation par la justice.

Christophe Palierse @cpalierse

Ce sont des montagnes russes dont la Compagnie des Alpes (CDA) se serait bien passée : un an après avoir enregistré de nouveaux résultats records, le numéro un mondial de la gestion de domaines skiables – et l’un des principaux opéra-t e u r s e u r o p é e n s d a n s l e domaine des parcs de loisirs – abasculé dans le rouge au terme de son exercice 2019-2020 (clos le 30 septembre).

La CDA, qui exploite lesremontées mécaniques de onze stations alpines (parmi lesquel-les La Plagne, Les Arcs, Serre-Chevalier, Tignes, ou encore Val-d’Isère) ainsi que treize complexes ou sites de loisirs en France et à l’étranger (tels que leParc Astérix, le Futuroscope, le musée Grévin ou les parcs Walibi), a annoncé mardi avoir enregistré une perte annuelle nette (part du groupe) de 104,3 millions d’euros. Un chiffre à comparer à un profit de62,2 millions sur 2018-2019, pour un chiffre d’affaires de 615,6 millions, en repli de quasiment 28 %.

Charges exceptionnellesInédite dans l’histoire d’uneentreprise, cette perte intègretoutefois un montant decharges exceptionnelles deq u a s i m e n t 7 0 m i l l i o n sd’euros, pour l’essentiel – unpeu plus de 65 millions – desdépréciations d’actifs et desécarts d’acquisition, concer-n a n t p r i n c i p a l e m e n t s abranche parcs de loisirs. Cettedernière est la plus affectéepar les conséquences de lacr ise sani t a ire des de uxgrandes activités de la CDA.

La filiale cotée de la Caissedes Dépôts enregistre un recul de 39 % de son chiffre d’affaires pour ses parcs et sites de loisirs (à 232,1 millions), la baisse avoi-sinant 19 % pour les domaines skiables (à 360,2 millions). Alors que le premier confine-ment a brutalement mis fin à lasaison de ski 2019-2020 à la mi-mars, il s’est aussi traduit par la fermeture immédiate des six parcs de la CDA alors ouverts, eta retardé de près de trois mois lelancement de la haute saison de

TOURISME

L’exploitant de domaines skiables et de parcs de loisirs accuse une perte nette (part du groupe) de 104,3 millions d’euros au titrede son exercice 2019-2020.

Le Covid fait plongerla Compagnie des Alpes dans le rouge

En fonction du nombre de per-sonnes au foyer, la livraison aura lieu tous les deux ou trois mois, avecun prix moyen de 15 euros mensuel.« L’intérêt est d’offrir un ensemble deproduits, nettoyants ménagers, lessi-ves… afin de rendre le modèle écono-mique viable », souligne le directeurgénéral Daniel Chassagnon. Origi-nalité : le renouvellement se fera viades recharges, ce qui permettra de réduire la part des emballages.

Modèle économique viableLa PME, propriété du fonds Miles-tone, veut profiter de l’essor du mar-ché depuis la crise sanitaire. Malgré des ruptures face à l’emballement, lesecteur de l’entretien était en pro-gression de 5,5 % à la fin octobre, à plus de 6 milliards d’euros (sacs-poubelle, éponges…). Outre les désinfectants, les produits écolos en ont profité. « Avant le Covid, la hausseétait de 14 %. Après, la demande a bondi de 25 %, se réjouit le dirigeant. La pandémie a remis l’hygiène au cœur des préoccupations. » Consé-quence, Swania vise une hausse de 20 % de son chiffre d’affaires en 2020,

à plus de 50 millions d’euros, tiré parMaison Verte et YOU (+42 %). Ce pôlereprésente les trois quarts des ven-tes, à côté des marques historiques, O’Cédar (+6 %) et Baranne. Les cira-ges, victimes du confinement, ont vuleur activité reculer de 20 %.

Le groupe va poursuivre sa stra-tégie centrée sur l’écologie et l’inno-vation. S’étant constitué jusque-là via des acquisitions, il vient de créersa première marque de produits d’entretien, C’est Clair. Un label qui vise les magasins bios. Un nouveau circuit, alors que jusque-là les ven-tes de Swania étaient concentrées dans la grande distribution.

Le concept de C’est Clair est inédit :il parie sur la transparence vis-à-vis du consommateur. « Nous allons tes-ter dans chaque lot de produits finis une quarantaine de substances à ris-que pour s’assurer qu’il n’y en a pas, comme les pesticides, les allergènes oules perturbateurs endocriniens », explique Daniel Chassagnon. La marque se dit sûre des composants utilisés. Mais « on n’est pas à l’abri chez un fournisseur d’un résidu même infime qui se glisse dans un fla-

Dominique [email protected]

Après les abonnements pour rasoirs, couches-culottes ou encore cartouches filtrant l’eau, c’est au tourde la lessive et du liquide vaisselle. Maison Verte, la marque du françaisSwania (YOU, Baranne, O’Cédar), va lancer en janvier Mamaison-verte.shop pour une offre du « sol auplafond ». De jeunes pousses propo-sent déjà ce type de formules. Dans la grande distribution, Swania, numéro deux des produits d’entre-tien écologiques, derrière L’Arbre Vert, fait figure de pionnier.

BIENS DECONSOMMATION

La marque écologique du groupe Swania proposera de se faire livrer des lessives ou d’autres produits de vaisselle via des recharges.

du groupe. Alexis Duval alerte les planteurs sur la nécessité de « tran-cher » ce point car « il en va de l’imagedu groupe auprès de ses clients, de sespartenaires financiers et des ban-quiers. Je ne vois pas comment nous pourrions expliquer que nous avons dans notre conseil de surveillance despersonnes condamnées par la justice pour dénonciation calomnieuse envers la société. Nous nous devons d’être irréprochables d’un point de vue éthique ».

Retour des bénéficesAlexis Duval déplore en outre que ces problèmes politiques ne vien-nent « télescoper la reprise de Tereos », qui, après deux années dif-ficiles, a renoué avec les bénéfices etretrouvé des résultats proches de cequ’ils étaient avant la suppression des quotas en 2017. Le groupe a réa-lisé un résultat opérationnel de 66 millions d’euros au premier semestre de l’exercice 2020-2021 pour un chiffre d’affaires de 2,05 milliards d’euros. n

Tereos : les salariés craignent un démantèlement du sucrier

con ». Ces tests seront réalisés par des laboratoires indépendants. Cette démarche a déjà été engagée pour YOU, fabriqué à partir d’actifs issus de matière végétale. Son slogan« YOU vous dit tout » met en avant latraçabilité. Une application permet en rayon de vérifier ces données via un QR code. Si l’efficacité perçue desproduits écolos et leur prix sont un frein aux achats, les consomma-teurs deviennent aussi méfiants sur leur composition.

Aiguillon du marchéD’autant que tous les géants mon-diaux des biens de consommation ont pris le virage vert. Et revendi-quent, pour leurs grandes marques, cette vitrine verte. « Il est capital de nepas tromper le consommateur, insistele patron de Swania. Nous voulons aller un cran plus loin dans la transpa-rence et devenir un aiguillon du marché pour aller vers plus santé et derespect de la planète. » Afin de finan-cer ces projets, le groupe, qui a relocalisé 70 % de sa production, a renégocié sa dette en 2019. Elle s’élève à 26 millions d’euros. n

Maison Verte lance un abonnement pour ses produits d’entretien

Après deux années difficiles, Tereos a renoué avec les bénéfices et retrouvé des résultats équivalents à ce qu’ils étaient avant la suppression des quotas sucriers en 2017. Photo Denis Charlet/AFP

Le Conseil d’Etat rejette le recours des restaurants contre leur fermetureRESTAURATION Le Conseil d’Etat a rejeté, mardi, le recours enréféré demandant la suspension de la mesure de fermeture descafés et restaurants et leur réouverture immédiate, déposé le20 novembre par l’Umih, la principale organisation pro-fessionnelle, conjointement avec ses antennes de Nouvelle-Aquitaine et de Gironde. Pour motiver cette action, elles poin-taient la rupture d’égalité avec les restaurants collectifs, qui,eux, peuvent poursuivre leur activité, ainsi que « la dispropor-tion de la mesure » portant sur tout le territoire national. Uneaction au fond se poursuit cependant mais l’audience n’auralieu que… dans un an environ. Pointant « une injustice de plus »,le président de l’Umih, Roland Héguy, appelle à un rassemble-ment de la profession le 14 décembre aux Invalides à Paris pourfaire entendre sa voix.

à suivre

cette même branche parcs de loisirs. En outre, le déconfine-ment, qui a donné lieu à une ouverture de l’ensemble des sites entre la fin mai et début juillet, s’est accompagné de capacités d’accueil réduites. En dépit des nouvelles contraintes sanitaires, la société a réalisé une saison d’été plus qu’hono-rable, engrangeant 70 % du chiffre d’affaires de la période.

Maîtrise des chargesLe manque à gagner de la CDA aaussi été pour partie compensé par la maîtrise des charges, avecnotamment la réduction des investissements et des frais de personnel avec le recours au chômage partiel. La baisse de son excédent brut opérationnelest toutefois sévère : –59,6 %, à 93,8 millions.

Le PDG du groupe, Domini-que Marcel, reste confiant en sa« capacité de rebond ». Rappe-l a n t q u e l a C DA é t a i t e n croissance dans ses deux métiers au moment où le pre-mier confinement est mis en œuvre, ce dernier souligne que l’entreprise est bien armée pourrepartir de l’avant compte tenu de la qualité de ses actifs, et la politique d’investissement m e n é e d e p u i s p l u s i e u r s années, soit plus d’un milliard depuis 2014.

La situation financière de laCDA a été sécurisée avec l’obtention d’un prêt garanti parl’Etat (PGE) de 200 millions et laconfirmation de lignes de créditde 147 millions. Par ailleurs, et c’est une autre première, la CDAne versera pas de dividende au titre de son exercice 2019-2020. Dominique Marcel admet ne pas avoir « beaucoup de visibi-lité » quant à l’exercice en cours,sachant qu’il débute par des pertes de chiffre d’affaires. Leurmontant s’élève à 100 millions d’euros dans l’hypothèse du démarrage de la saison de ski en janvier, conformément au calendrier prévisionnel fixé parle gouvernement. S’y ajoute un manque à gagner de 50 mil-lions avec la fermeture des parcs traditionnellement ouverts pour Halloween et les fêtes de Noël.

L’exercice 2020-2021 serad’autant plus une étape char-nière qu’il sera marqué par l’installation d’une nouvelle gouvernance, Dominique Mar-cel devant lâcher la direction générale mais conserver la pré-sidence du conseil. n

Le PDG croit en la « capacité de rebond » du groupe.

Il rappelle la qualitédes actifs de CDA.

Page 25: Les Echos - 09 12 2020

Les opérateurs télécoms vont finale-ment pouvoir allumer un premier paquet d’antennes 5G près des aéro-ports français. Après des études techniques, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) – qui doit don-ner son feu vert avant l’installation de tout nouveau site mobile par Orange, SFR, Bouygues Telecom ou Free – a validé une partie des pylônes5G au cœur d’une vive polémique opposant, depuis des semaines, les opérateurs télécoms à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).

L’aviation civile redoutait que cesantennes 5G ne brouillent les alti-mètres à bord des avions. Ce petit appareil est le seul à pouvoir mesu-rer la distance des avions par rap-port au sol ou aux obstacles. Man-que de chance, il emprunte des bandes de fréquences proches de celles nécessaires… à la 5G. Autre problème : en plus d’être parfois anciens, les altimètres sont très variés et réagissent donc différem-ment aux antennes 5G, qui, elles, sont construites par « seulement » trois fournisseurs : Huawei, Erics-son et Nokia.

Un rapport américain poin-tait un « risque majeur »Après un rapport américain pointant un « risque majeur », la DGAC avait donc demandé à l’ANFR de mener des « analy-ses techniques complémentaires » sur la douzaine d’antennes poten-tiellement problématiques.

L’ANFR a mené son enquête et aconclu, pour certaines antennes, qu’il n’y avait pas de risque de brouillage. Ayant validé ce qui ne posait pas problème, le nombre d’antennes 5G potentiellement à risque est passé de 5 % du total à 2 %. Ce reliquat, sur lequel l’ANFR n’avait pas encore suffisamment de données, pourrait être validé dans les prochaines semaines ou les pro-chains mois dans le pire des cas.

« L’objectif, désormais, c’est demieux comprendre les altimètres qui n’ont pas suffisamment de protectionpar rapport aux bandes de fréquen-ces, explique Gilles Brégant, le direc-teur de l’ANFR. N’oubliez pas qu’à tout moment nous pouvons suspen-dre une antenne. Par ailleurs, nous sommes plutôt confiants, car ce pro-blème qui était abordé jusqu’à pré-sent pays par pays est en train d’être abordé continent par continent. »

Mais les opérateurs restent trèsvigilants. A la mi-novembre, l’affaire

les avait mis très en colère puisque leproblème était apparu après les enchères pour les précieuses fré-quences 5G, pour lesquelles ils avaient dépensé presque 3 milliards.

Zones d’exclusion« Même si au final 1 % des antennes n’ont pas le feu vert de l’ANFR, ça représente quand même 30 millions d’euros, rappelle un acteur du sec-teur. Cela ouvre la voie à du conten-tieux indemnitaire. Pour les opéra-teurs, ce dossier est loin d’être fini. »

Les opérateurs redoutent notam-ment des contraintes locales voire nationales, comme des zones d’exclusion autour des aéroports ou l’obligation de réduire la puis-sance de leurs antennes. Vendredi 4 décembre, les opérateurs ont plaidé leur cause devant deux direc-tions de la Commission européenne(Move et Connect), en attendant queBruxelles apporte une réponse har-monisée au problème. — R. Ba.

L’ANFR valide les premières antennes 5G dansles aéroports, mais les opérateurs restent vigilantsLes opérateurs télécoms vont finalement pouvoir allumer un premier paquet d’antennes 5G près des aéroports, sans risquede brouillage pourles avions, contrairementà ce que redoutait l’aviation civile. Le dossierest cependant loin d’être clos pour les opérateurs.

visiblement davantage pénalisé Bouygues Telecom. Les performan-ces de son réseau mobile ont reculé aussi bien dans les villes que dans lescampagnes, où l’opérateur avait réussi à se détacher du lot en 2019. Orange, au contraire, a fortement progressé sur toutes les zones et affi-che des débits supérieurs de 30 % à ceux de la concurrence dans les campagnes et deux à trois fois plus rapides dans les grandes villes.

L’Arcep insiste sur la nécessitépour les consommateurs de regar-der ces indicateurs en fonction de leurs usages et de leur localisation précise. Son outil Monreseaumo-bile.fr offre pour cela des cartes, dontle degré de fiabilité a été sensible-ment amélioré cette année. Ainsi, sur l’autoroute A711, entre Clermont-Ferrand et Pont-du-Château, par exemple, le réseau d’Orange ne parvient à charger une page Web en moins de dix secondes que deux fois sur trois, alors que ses trois concurrents affichent près de

100 % de réussite. Au contraire, un utilisateur régulier du TGV Paris-Lyon n’est susceptible de passer un appel ininterrompu de deux minu-tes que dans 56 % des cas s’il est client de Free, contre 70 % chez SFR,82 % chez Bouygues Telecom et 92 % chez Orange.

Un nouveau terrain d’affrontementLe prochain terrain d’affrontement des opérateurs est naturellement la5G. Seul Free n’a pas encore allumé son réseau. L’opérateur de Xavier Niel a fait à lui seul les deux tiers desdemandes d’autorisation à l’ANFR (Agence nationale des fréquences) pour émettre en 5G depuis ses pylônes, en demandant notam-ment à réutiliser largement ses fréquences basses de la bande 700 MHz (l’une des trois bandes utilisables pour la 5G).

L’opération lui permettrait decouvrir une large portion du terri-toire là où ses concurrents n’en cou-

vrent pour l’instant qu’une partie, sans toutefois offrir les débits spec-taculaires réservés à la bande hautedes 3,5 GHz. Autrement dit, il four-nirait à plus de Français une 5G de moins bonne qualité. « Selon les bandes utilisées, on n’aura pas le même service, ce ne sera pas la même5G, prévient Hugues Ferrebœuf, du think tank The Shift Project. Offrir des débits trois à cinq fois supé-rieurs, ce n’est pas possible avec la bande des 700 MHz. » « La 5G est une technologie polycarburante, nuance Gilles Brégant, patron de l’ANFR. Dans les campagnes, une 5Gsur la bande 700 MHz peut quand même offrir un débit meilleur que dans les grandes villes. »

L’Arcep, elle, se dit ravie que lesopérateurs utilisent différentes ban-des de fréquences pour la 5G, mais prévient qu’elle sera vigilante quant aux informations communiquées aux consommateurs. Le régulateur publiera un premier observatoire de la 5G la semaine prochaine. n

l La dernière enquête du régulateur des télécoms montre une amélioration générale de la couverture et des débits 4G.l En tête du classement depuis dix ans, Orange se détache encore plus nettement de SFR, Bouygues Telecom et Free.

Le réseau mobile d’Orangecreuse l’écart avec ses concurrents

Sébastien Dumoulin @sebastiendmln

et Raphaël Balenieri @RBalenieri

Et de dix. Le trophée du meilleur réseau mobile français revient encore une fois à Orange. La vaste campagne annuelle de mesures publiée mardi par l’Arcep (le régu-lateur des télécoms) ne laisse pas de place au doute. « Orange a creusé l’écart avec les autres opérateurs », relève Guillaume Decorzent, de l’unité couverture et investisse-ments mobiles à l’Arcep.

En France métropolitaine, ledébit moyen descendant (c’est-à-dire la vitesse de l’Internet mobile pour télécharger une photo ou affi-cher une page Web sur son télé-phone, par exemple) atteint 74 Mb/schez l’opérateur historique – contre 47 Mb/s chez SFR, 40 chez Bouy-gues et 33 chez Free. Alors que Bouygues Telecom s’était assuré une place sur la deuxième marche du podium l’an dernier, il termine derrière SFR en 2020. Quant à Free, parti plus tard que ses concurrents dans le déploiement de son réseau, il réduit progressivement l’écart.

Une améliorationqui marque le pasLa bataille féroce pour avoir le meilleur réseau a eu pour corollaireces dernières années une améliora-tion générale de la connexion Inter-net mobile en France, laquelle a presque triplé en cinq ans en métro-pole pour atteindre 49 Mb/s. « Nousétions en 26e position sur 28 dans l’Union européenne en 2016. La France atteint [en 2020] le milieu de tableau, et on espère entrer progressi-vement dans le peloton de tête », se réjouit Sébastien Soriano, le prési-dent de l’Arcep.

En 2020, cet indicateur a toutefoismarqué le pas. Alors qu’il avait fait un bond de 50 % l’an passé, il n’affi-che qu’une modeste hausse de 9 % sur les douze derniers mois. La crisesanitaire, qui a empêché les opéra-teurs d’intervenir autant que d’habi-tude sur leurs réseaux, a selon l’Arcep pu jouer un rôle, au même titre que le durcissement du proto-cole de mesures. Ces facteurs ont

TÉLÉCOMS

retenus et apporteront des connexions de plus de 1 Gb/s à 85 % des locaux concernés, et plusde 100 Mb/s à la quasi-totalité. Le tout pour 9,2 milliards de dollars, ce qui permettra à la FCC de mus-cler un deuxième programme public, en direction de zones mal connectées, qui disposera de plus de 11 milliards de dollars.

Parmi les 180 bénéficiaires dessubventions de la FCC, on comptede nombreuses petites associa-tions rurales ou des opérateurs locaux qui connecteront de quel-ques dizaines à quelques milliers de foyers. A l’opposé, le géant du câble Charter connectera, quant àlui, plus de 1 million d’Américains.Il recevra pour cela 1,2 milliard dedollars, ce qui en fait le deuxième plus important bénéficiaire der-rière LTD Broadband, qui tou-chera pour sa part 1,3 milliard en reliant 500.000 foyers avec du THD radio (4G ou 5G fixe).

La FCC n’a pas souhaité privilé-gier une technologie par rapport àune autre. Des acteurs du câble, dela fibre, du THD radio ou du satel-lite ont été retenus. SpaceX, la société d’Elon Musk qui veut pro-poser une connexion Internet depuis une myriade de petits satellites en orbite basse, va ainsi recevoir 886 millions pour propo-ser ses services à 640.000 Améri-cains dans 35 Etats. — S. Dum.

Les Etats-Unis ont beau avoir inventé et développé Internet, des millions d’Américains restentdépourvus d’une connexion digne de ce nom. Pour résorber cette énorme fracture numéri-que, difficile à supporter en tempsde crise sanitaire pour ceux qui ont besoin de haut débit pour le télétravail ou l’école à distance, lesautorités mettent le paquet.

La Federal CommunicationsCommission (FCC) vient d’annon-cer l’octroi de plus de 9 milliards de dollars de subventions pour apporter le très haut débit à plus de 5 millions de foyers et d’entreprises américaines sur les dix prochaines années. Selon le régulateur, il s’agit du « pas le plusimportant pour réduire la fracturenumérique » – en dépit d’inves-tissements cumulés de plus de 35 milliards de dollars depuis 2012 dans la couverture Internet rurale au seul niveau fédéral, sansmême comptabiliser les subven-tions des Etats.

Enchère inverséeLa FCC disposait en réalité de 16 milliards de dollars pour finan-cer ce nouveau programme. Au terme d’une enchère inversée (l’opérateur qui demande la sub-vention la plus faible l’emporte), 180 fournisseurs d’accès ont été

Face à la fracture numéri-que qui se creuse dans le pays, le régulateur a alloué des fonds à 180 opérateurs. Ils doivent apporter, sur les dix prochaines années, le très haut débit à plus de 5 millions d’Américains qui en sont privés. Une seconde enveloppe de 11 milliards sera allouée dans une deuxième phase.

Les Etats-Unis déboursent 9 milliards de dollars pour le haut débit en zone rurale

De nombreuses petites associations rurales et des opérateurs locaux bénéficient des subventions de la FCC.

HIGH-TECH & MEDIASLes Echos Mercredi 9 décembre 2020

Page 26: Les Echos - 09 12 2020

26 // HIGH-TECH & MEDIAS Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

ming », a-t-il déclaré, ajoutant que cette décision n’avait « aucun sens économique » et qu’il y avait une « différence entredisruption et dysfonction ».

D’autres sont prêts à entamerun bras de fer. Adam Aron, patron d’AMC, premier exploi-tant de salles de cinéma au monde, cherche à négocier avecWarner et menace de ne pas dif-fuser ses films en salles outre-Atlantique, à l’instar de son rivalCinemark.

De son côté, le studio hol-lywoodien Legendary pourrait contester en justice la décision de Warner Bros., croit savoir le site Deadline. Ce groupe a notamment produit et financé l’essentiel du budget de produc-tion de « Dune » et « Godzilla vs Kong », dont le distributeur est Warner Bros., et qui se retrou-vent ainsi concernés au pre-mier plan par cette décision. Legendary juge que cette sortie concomitante au cinéma et en streaming pourrait menacer la rentabilité de ces deux fran-chises à long terme.

« Tout le monde devrait respirer un grand coup »Certains craignent aussi que la décision de Warner fasse tache d’huile chez les autres géants du divertissement, tout particu-lièrement Disney, leader mon-dial du cinéma et acteur majeurde la SVoD avec Disney+. Et quece modèle devienne le nouveau standard du secteur.

« C’est très dur de faire reren-trer le dentifrice dans le tube, a fait valoir le producteur Jason Blum (« Get Out », « Whi-plash »). Vous ne pouvez pas direau consommateur : “Maintenantla pandémie est terminée, vous devez attendre quatre mois pour regarder ce film sur HBO Max.” »

Que répond l’accusé à cettevolée de bois vert ? « Tout le monde devrait respirer un grand coup », a réagi en fin de semaine dernière Jason Kilar, lepatron de WarnerMedia qui va d’ailleurs sortir son blockbuster« Wonder Woman 1984 » le 25 décembre dans les salles et sur HBO Max aux Etats-Unis.

Jason Kilar assure que cettenouvelle stratégie est unique-ment due à la pandémie. Il refuse en revanche d’indiquer si ce modèle de distribution pourrait s’étendre, ou pas, au-delà de la seule année 2021. n

Nicolas Richaud @NicoRichaud

Action. Réactions. Un déluge de cr i t iques s’abat sur la plateforme de streaming vidéo HBO Max et Warner-Media, sa maison mère. Jeudi, son studio hollywoodien, War-ner Bros., a annoncé que tous ses longs-métrages prévus en 2021 allaient être proposés en même temps – aux Etats-Unis – au cinéma et sur son offre de SVoD. Ce qui concerne des blockbusters comme « Matrix 4 », « Dune » ou « God-zilla vs Kong ». Une façon de doper l’attractivité de HBO Max,lancé en mai et qui tente de riva-liser avec Netflix et Disney+.

Mais le coup porté à l’indus-trie du septième art est très rude. Les exploitants améri-cains de salles sont en très grande difficulté avec la crise et ont besoin de la fenêtre de diffusion exclusive – aussi res-treinte soit-elle aux Etats-Unis (AMC et Universal ont négocié un délai de dix-sept jours pour les films de ce dernier avant diffusion sur d’autres canaux) –des superproductions afin d’attirer les spectateurs dans les salles obscures.

La bombe déposée par War-nerMedia a fait beaucoup bruit dans le Landerneau hollywoo-dien. Depuis quelques jours, tout l’écosystème du cinéma tombe à bras raccourcis sur le groupe et HBO Max.

Pourtant partenaire de lon-gue date de Warner Bros., le réa-lisateur mondialement connu Christopher Nolan (« Incep-tion », « Interstellar », « Tenet »)n’a pas fait dans la demi-me-sure. « Certains des plus grands réalisateurs de l’industrie […] sont allés se coucher la nuit d’avant en pensant qu’ils tra-vaillaient pour le plus incroyable studio de films et se sont réveillés en découvrant qu’ils travaillaient pour le pire des services de strea-

CINÉMA

Warner a annoncé qu’en 2021 tous ses films sortiraient en même temps au cinéma et sur son offre de streaming aux Etats-Unis.

Pour Christopher Nolan, HBO Max est le « pire des services de streaming » Le rapport de force entre les

défenseurs et les attaquants est par ailleurs inéquitable. Sur les 1.000 milliards de dollars de coûts identifiés par McAfee, 145 milliardsde dollars correspondent aux dépenses en sécurité informatique. Mais, déjà submergés par un flot continu de vulnérabilités à réparer, les spécialistes de la sécurité infor-matique font aussi face à des orga-nisations criminelles de plus en plus rodées. « Le cybercrime aug-mente parce qu’il paie, cela peut être facile, et le risque pour les cybercri-minels peut être faible », ajoute l’étude, alors que la traque de ces réseaux éparpillés partout dans le monde reste complexe.

Dans leurs calculs, les cher-cheurs distinguent les coûts directsliés au cybercrime et toute une sériede coûts cachés. Dans la première catégorie, l’espionnage économi-

que et la fraude financière coûtent encore bien plus cher aux entrepri-ses que la menace montante des attaques par logiciels rançonneurs (les fameux « ransomware », qui chiffrent les données d’une entre-prise et permettent aux cybercrimi-nels d’exiger un paiement contre le rendu des données en clair).

18 heures d’arrêtaprès une attaqueMais pas besoin d’en arriver à ces scénarios catastrophes pour que le cybercrime pèse sur les comptes d’une société. Alors que deux tiers des 1.500 entreprises interrogées en 2019 par McAfee et le CSIS rap-portent avoir eu à affronter un inci-dent de cybersécurité, il ressort qu’elles ont dû arrêter leurs activitésp endant dix-huit heures en moyenne après la découverte de ce type d’événement.

Bien après l’attaque en elle-même, l’entreprise subit aussi un impact en termes de réputation, ainsi que sur le moral et la produc-tivité des salariés, et, in fine, sur ses ventes. Enfin, l’étude constate que les entreprises victimes rognent souvent après coup leurs dépenses d’innovation et leurs perspectives de profits futurs pour investir dans la cybersécurité.

Les chiffres de McAfee et du CSISsont peu ou prou les mêmes que ceux avancés en début d’année dernière par Accenture, qui estimait la facture du cyber-crime à 5.200 milliards de dollars en cinq ans, entre 2020 et 2025. Mais d’autres calculs sont encore p l u s p e s s i m i s t e s . L e f o n d s d’investissement Cybersecurity Ventures anticipe pour 2025 une addition de 10.000 milliards de dollars annuels… n

ralisées de publicité pour de nom-breux produits polluants comme l’automobile, le diesel, l’essence, certains voyages longue distance, des produits électroménagers consommateurs d’énergie. Finale-ment, selon nos informations, pour l’heure, seul le secteur des énergies fossiles (pétrole, gaz, etc.) serait interdit de publicité par la loi.

Un moindre mal, donc, l’éner-gie pesant moins de 2 % de la pression publicitaire brute sur les cinq médias historiques (presse, radio, télévision, affichage, cinéma),selon les données de Kantar.

Deux scénarios possiblesDeux scénarios restent sur la table : l’un porte sur des engagements volontaires, l’autre sur des inter-dictions plus franches. L’ambition étant de diminuer la publicité sur les produits les moins « verts », il a été décidé d’apposer sur ceux-ci unemention environnementale, cal-quée sur l’idée du « carbone score » imaginé par les citoyens. Les pre-miers biens et services « marqués »,notamment dans l’agroalimentaire,le seront à partir de début 2022. « L’objectif est que les groupes soient moins incités à faire de la publicité sur les produits les plus mal notés », explique un proche du dossier.

la loi sera plus dure », dit un bon connaisseur du dossier.

Concernant l’affichage, il auraitété décidé de donner un pouvoir plus grand aux maires pour le régu-ler dans les vitrines. Un point qui émeut le monde de l’affichage, qui s’inquiète de la complexité que cela pourrait générer pour les commer-çants, agents immobiliers, etc. qui changent très souvent leurs vitrines.

Interdictions dans l’affichageParallèlement, les panneaux de plusde 10,5 m2 seraient interdits, tout comme la publicité lumineuse entre 1 heure et 6 heures du matin. « L’interdiction des panneaux est une mesure forte, puisqu’il en reste plu-sieurs milliers. Plus largement, notre secteur souffre d’une insécurité juri-dique », regrette Stéphane Dotte-londe, président de l’Union de la publicité extérieure. Les acteurs ont jusqu’à la présentation de la loi en Conseil des ministres, fin janvier, pour convaincre le gouvernement. D’ores et déjà, les médias ont com-mencé à montrer patte blanche en annonçant la mise en place d’un contrat « média climat » il y a quel-ques jours. Mais leurs mesures res-tant floues, il n’est pas certain qu’ellessoient estimées suffisantes… n

Deux tiers des 1.500 entreprises interrogées en 2019 par McAfee et le CSIS déclarentavoir eu à affronter un incident de cybersécurité. Photo Getty Images

Florian Dèbes @FL_Debes

Un pour cent du PIB mondial ! Voilàce que coûtent à l’économie, en cumul sur un an, les virus informa-tiques et les vols de données, d’aprèsune étude de l’éditeur de logiciels decybersécurité McAfee et du Centre d’études stratégiques et internatio-nales (CSIS). Au total, la cybercrimi-nalité, avec ses réseaux de plus en plus organisés, laisse derrière elle une note de plus de 1.000 mil-liards de dollars.

Plus inquiétant encore, la fac-ture ne cesse de s’alourdir. Elle a même plus que doublé en cinq ans. En 2015, les chercheurs esti-maient le coût de la cybercrimi-nalité à 445 milliards de dollars, puis à 600 milliards de dollars en 2018. Et rien n’incite à l’opti-misme pour la suite…

Le cybercrime paie« La gravité et la fréquence des cyberattaques contre les entreprises continuent d’augmenter à mesure que les techniques évoluent et que le travail à distance s’impose », indique ainsi Steve Grobman, le directeur des technologies de McAfee, qui fut l’un des pion-niers des antivirus et qui vient de signer son retour en Bourse. De plus en plus numérique – et encore davantage après les périodes de confinement liées à l’épidémie de Covid-19 –, le monde est aussi de plus en plus sensible aux cyberattaques.

INFORMATIQUE

En cinq ans, les coûts liés aux virus informa-tiques et aux vols de données ont plus que doublé pour dépasser 1.000 milliards de dollars par an, selon une étude de McAfee.

Des coûts cachés apparaissent aussi après les attaques elles-mêmes.

La facture de la cybercriminalité ne cesse de s’alourdir

Loi Pompili : les médias échappent au pire sur la publicité

Marina Alcaraz @marina_alcaraz

Les médias et annonceurs ont, sem-ble-t-il, échappé au pire, mais ne peuvent pas encore pousser un ouf de soulagement. Présentés à des citoyens et députés mardi matin, les premiers arbitrages sur le volet publicitaire de la loi de la ministre de la Transition écologique, Bar-bara Pompili, devraient finalement limiter les interdictions de publicité,même si tout n’est pas encore figé.

Cette loi, inspirée des proposi-tions de la Convention citoyenne pour le climat, inquiète depuis plu-sieurs mois le secteur des médias et de la communication. Alors qu’à l’automne, certains professionnels craignaient des interdictions géné-

PUBLICITÉ

Les premiers arbi-trages sur le volet publicitaire de la loi de Barbara Pompili ont été présentés mardi.

Seule la publicité pour les énergies fossiles devrait être interdite.

nDonnées de santé & Big Data

Pourquoi le Big Data bouleverse autant lemonde de la santé ? Médecine prédictive,pharmacovigilance, épidémiologie. Quelsdéfis techniques, humains, éthiques etréglementaires ? Au cours de la journée :

un exemple détaillé de projet Big Data Santé mené dans un hôpital.Comment intégrer les clés de réussite d’un projet Big Data Santé ?Rendez-vous le 16 décembre 2020 à distance ou en présentiel au choixEn savoir plus sur www.lesechos-formation.fr/big-data-sante.htm

Un service proposé par Les Echos Solutions

LES ECHOSFORMATION

Nouveau répit pour TikTok aux Etats-UnisRÉSEAUX SOCIAUX Un deuxième juge américain a bloquélundi soir les restrictions du département du Commerce sur leréseau social chinois TikTok. Découlant de l’ordonnance deDonald Trump du mois d’août, ces sanctions auraient de factoempêché TikTok de continuer ses activités dans le pays dès le12 novembre. Le juge, Carl Nichols, a estimé que le départementdu Commerce avait « outrepassé » ses droits.

en pixelsToute la question est de savoir

si les produits « rouges » seraient interdits ou pas de publicité, à terme.Barbara Pompili pousserait pour cette voie. Mais, au ministère de l’Economie comme au ministère de la Culture, on estime que cela pour-rait fragiliser les médias et l’éco-système de la communication, déjà mis à mal par la crise sanitaire et desdifficultés plus structurelles. « Il y a peu de chances que l’on arrive à des interdictions franches ou alors cela prendra tellement de temps qu’on pourra s’organiser », croit savoir un professionnel de la télévision.

Une option évoquée serait d’exi-ger que les médias et annonceurs publicitaires s’engagent devant le Conseil supérieur de l’audiovisuel à réduire la publicité pour les pro-duits les plus nocifs. Par exemple, l’automobile a annoncé qu’elle aug-menterait les publicités pour les voi-tures électriques et hybrides. « Il fau-drait des engagements forts, à défaut,

Médias et annonceurs vont devoir prendre des engagements volontaires devant le CSA.

Page 27: Les Echos - 09 12 2020

« Le praticien doit s’assurer que le contexte du patient est favorable à l’échange. Le patient doit se sentir à l’aise avec l’outil, être sûr qu’il est sécurisé, mais aussi se trouver dans un lieu où il n’est pas entendu. »CAROLINE DELANNOYPsychologue et membre du Comité médical et professionnel de Doctolib

Guillaume Bregeras @gbregeras

Fondé au Royaume-Uni par un Anglais, Gohenry a pourtant une coloration tricolore. La fintech, quiest dirigée depuis 2015 par le Fran-

chiatres. Livi a, de son côté, recrutéune équipe de psychiatres au débutde l’été, à la suite du premier confi-nement. Cette dernière est compo-sée de 12 médecins, alors que la start-up suédoise en compte plus de 300 en France au total, toutes spécialités confondues. « Nous avons décidé d’accélérer car il y avaiténormément de souffrance psychi-que liée à la crise », indique MaximeCauterman, directeur médical de Livi. Cette équipe a vocation à s’agrandir, mais Livi souhaite dans un premier temps travailler à la définition des bonnes pratiques de prise en charge des patients con-cernant la santé mentale.

Des résultats concluantsSelon les études existantes sur le sujet, la télémédecine psychologi-que présente des résultats con-cluants. « L’alliance thérapeutique se fait, indique Fanny Jacq. Et on note même une légère amélioration de l’observance. » Elle représente enoutre une opportunité pour les patients ne trouvant pas de spécia-listes disponibles près de chez eux. « La téléconsultation permet à tous ceux qui sont isolés, qui ont des difficultés à se déplacer, ou qui sont à risque face au Covid, de trou-ver un espace où ils peuvent être

plateforme a augmenté de 50 % durant cette période. Doctolib en compte aujourd’hui 6.000, et 20 % des rendez-vous pris chez eux sont aujourd’hui réalisés en consulta-tion vidéo.

En février, Qare a annoncé lerachat de Doctopsy, une jeune pousse spécialisée dans les télécon-sultations pour psychiatres etpsychologues, cofondée par la psy-chiatre Fanny Jacq. « Qare souhai-tait ouvrir une verticale santé men-tale importante, indique-t-elle. La téléconsultation n’est qu’une bri-que de cette offre. » Doctopsy a, en plus de son offre de consultations en visioconférence, développé l’application Mon Sherpa, visant à accompagner les patients en dehors des séances. « Elle a connu plus de 300 % d’augmentation des téléchargements durant le premier confinement », indique Fanny Jacq.

Un outil communChez Doctolib, en revanche, on ne souhaite pas développer d’outil spécifique pour la santé mentale. « Notre produit est imaginé comme un produit commun, que chaque professionnel peut paramétrer comme il le souhaite », indique Celeste Gormand, chargée du pro-duit pour les psychologues et psy-

écoutés », abonde Caroline Delan-noy, psychologue et membre du Comité médical et professionnel deDoctolib.

Si les outils de visioconférenceutilisés par les professionnels de la santé mentale sont les mêmes que ceux utilisés par les autres méde-cins, le suivi psychologique demande des précautions particu-lières. « Le praticien doit s’assurer que le contexte du patient est favora-ble à l’échange, souligne Caroline Delannoy. Le patient doit se sentir à l’aise avec l’outil, être sûr qu’il est sécurisé, mais aussi se trouver dans un lieu où il n’est pas entendu. »

La question du remboursementest, elle aussi, un enjeu important pour le développement de cette pratique. Fortement conditionné – en dehors de la crise du Covid, pourlaquelle des ajustements ont été faits – ce dernier est appelé à être élargi par les jeunes pousses du sec-teur. « 60 % des psychiatres sont en Ile-de-France et à Marseille - Aix en Provence, fait remarquer Fanny Jacq. Le fait de devoir consulter un professionnel basé dans son départe-ment pour être remboursé est un non-sens, car ces médecins ont du temps disponible alors que dans cer-taines régions de France les patients n’en trouvent pas. » n

Déborah Loye @Loydeborah

La télémédecine a explosé avec la crise du Covid-19, et pour assurer lacontinuité des soins, les start-up enproposant ont étendu leur offre en matière de santé mentale. Chez Qare, le nombre de téléconsulta-tions psychologiques a augmenté de 250 % aux mois d’avril et mai. Doctolib indique, de son côté, que 70 % des psychologues de la plate-forme n’avaient jamais utilisé la téléconsultation avant le premier confinement, et que le nombre de psychologues utilisateurs de la

SANTÉ

Les start-up de la télémédecine ont étendu leurs offres, cette année, aux professionnels de la santé mentale.

L’utilisation de la visioconférence pour la santé psychologique a explosé à la suite de la crise du Covid-19.

Téléconsultation : les start-up s’engagent dans la santé mentale

Au-delà du confinement, la télémédecine psychologique représente aussi une opportunité pour les patients ne trouvant pas de spécialistes disponibles près de chez eux.

Gohenry, la fintech pour enfants se renforce avec un fonds d’investissement français

çais Alex Zivoder et le fonds Gaia Capital Partners, vient de partici-per à son nouveau tour d’investis-sement de 40 millions de dollars aux côtés d’Edison Partners et de City Ventures.

Malgré cela, il faudra certaine-ment attendre 2022 avant de voir lajeune pousse enrichir le paysage français des néobanques pour enfants et adolescents. Avec cette opération, Gohenry veut d’abord serenforcer aux Etats-Unis, territoirede conquête prioritaire où elle compte déjà 10 % de ses utilisateurs(1,2 million). Outre-Atlantique, un nouvel acteur, Step, vient par ailleurs de réunir 50 millions de dollars auprès de célébrités.

« Nous y sommes présents depuis2018 et nous avons beaucoup testé, raconte Alex Zivoder. Nous avons validé que notre produit était le bon par rapport à ce marché, ainsi que

les canaux d’acquisition pour y acquérir des clients. Nous étions donc prêts à lever des fonds et à démarrer d’autres démarches, comme la distribution via des ban-ques, par exemple. »

Le pari de l’abonnement payantLa particularité de Gohenry est d’adapter son outil en fonction des tranches d’âge qui l’utilisent. Pour le reste des services, l’offre est clas-sique, avec des notifications aux parents pour chaque paiement réa-lisé par leur enfant, la possibilité deleur allouer un budget ou un paie-ment à la tâche, ou des incitations àl’épargne. Le tout contre un abon-nement de 2,99 livres par mois (3,99 dollars outre-Atlantique). « Avant d’imaginer d’autres services,il faut d’abord créer de la valeur et une marque qui parle aux enfants,

mais aussi aux parents », prévient ledirecteur général.

Contrairement à certaines néo-banques qui visent la même cible, notamment en France, Gohenry n’e nv i s a g e a b s o l u m e n t p a s d’accompagner les jeunes une fois

qu’ils basculent dans la vie d’adulte.Alex Zivoder estime qu’il est préfé-rable de se concentrer sur une population spécifique et réfute le tout gratuit : « Faire de l’enfant le produit est compliqué… Je ne crois

pas au modèle gratuit ni à celui de l’accompagner plus tard dans sa vie.Nous nous focalisons sur le bon apprentissage de l’argent, ce qui est déjà très important. »

Profitable depuis mars, lastart-up porte une attention parti-culière à l’acquisition de ses nou-veaux clients. Elle y consacre entre 20 % et 25 % de son chiffre d’affairesen 2020, avec une préférence pour les réseaux sociaux, même si elle démarre aussi des campagnes télé aux Etats-Unis. « Nous avons beau-coup essayé et échoué, mais nous savons désormais ce qui ne marche pas et ce qui peut fonctionner, admetle dirigeant. Nous donnons la prio-rité aux canaux où l’attribution d’unnouveau client est claire. » Une méthode qui, en temps voulu, sera appliquée au marché français afin d’y trouver une place parmi la myriade d’acteurs déjà présents. n

NÉOBANQUE

La start-up britanni-que boucle une levée de 40 millions de dollars pour se renfor-cer aux Etats-Unis.

Elle envisage de s’implanter en France vers 2022 avec le soutien de Gaia Capital Partners.

Profitable depuis mars, le britannique porte une attention particulière à l’acquisition de ses nouveaux clients.

Adrien Lelièvre @Lelievre_Adrien

Depuis sa création, le Big Data fascine. Mais alors qu’il faisait la fortune des géants du Web (Google, Facebook, Amazon, Microsoft), capables d’exploiter des milliards de données en temps réel à l’aide de gigantes-ques data centers, il a laissé dansl’ombre les petits jeux de don-nées. Or, le potentiel du « small data », ces données produites auquotidien dans les services des entreprises et administrations, demeure inexploité. « 80 % des données collectées ne sont pas traitées », répète à l’envi Alain Blancquart. C’est pourquoi il a fondé MyDataModels.

Simplicité du logicielCette start-up a développé une plateforme, Tada, qui fonc-tionne à l’aide des outils de l’intelligence artificielle et du « machine learning ». Cette der-nière analyse des jeux de don-nées, tirés, par exemple, de fichiers Excel ou du logiciel Tableau, et les exploite afin de fournir des modèles prédictifs. L’ambition de MyDataModels est d’aider les professionnels dans leurs prises de décision et, ainsi, de doper leurs performan-ces. La jeune pousse met en avant la simplicité de son logi-ciel, qui peut être utilisé par des salariés n’ayant aucune compé-tence dans le domaine de l’IA.

« Tous les secteurs d’activitésont impactés par les “small data”, vante le patron. A partir denotre logiciel, on peut, par exem-ple, aider les médecins spécialistesdu cancer du sein à définir si leurspatients souffrent d’une maladie bénigne ou maligne. » La start-upest également capable d’aider des géants industriels à détermi-ner la qualité de production d’unproduit.

Alain Blancquart a com-mencé à travailler sur ce logicielen 2012. Mais il a fallu attendre 2018 avant qu’il cofonde la société avec son partenaire, Denis Bastiment. Un an plus tard, MyDataModels commer-cialisait sa plateforme et levait 1 million d’euros auprès du fonds allemand Earlybird.

Stratégie internationalePour accélérer son développe-ment, la jeune pousse basée à Sophia Antipolis annonce ce mercredi avoir réalisé un nou-veau tour de table, cette fois-ci de2,5 millions, auprès de Speedin-vest, Earlybird et Région Sud Investissement (RSI). Ces nou-veaux fonds vont permettre à la société, qui compte 30 salariés, de recruter des nouveaux talents, notamment dans le domaine commercial.

MyDataModels a misé sur lemodèle du SAAS (Software as a Service) et propose sa plate-forme en ligne au tarif de 80 euros par mois. Elle assure avoir déjà séduit des sociétés tel-les que Thales ou Sanofi.

« On a un plan de développe-ment très agressif à l’internatio-nal », poursuit Alain Blancquart.Faire le pari des « small data » n’interdit pas de voir les choses en grand. n

MyDataModels le petit génie des « small data »

DONNÉES

La jeune pousse, basée à Sophia Antipolis, lève 2,5 millions d’euros pour sa plateforme d’analyse prédictive à partir de jeux de données.

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START-UP Les Echos Mercredi 9 décembre 2020

Page 28: Les Echos - 09 12 2020

Le décret interministériel qui per-mettra aux jeunes majeurs d’accé-der à la conduite de véhicules de transport de voyageurs est entre lesmains du Conseil d’Etat. Loïc Char-bonnier, président délégué d’Aftral, le principal acteur français de la for-mation aux métiers du transport, seprépare donc à communiquer aux entreprises et aux jeunes.

Il estime que de nouvelles possi-bilités vont s’ouvrir à eux, car, à l’âge

Le principal acteur de la formation aux métiers du transport affine son maillage territorial en prenant des participations majoritaires dans des PME. Il se prépare à accueillir plus de jeunes.

À l’automne 2019, il manquait 6.000 conducteurs aux entreprises du secteur. Photo ANDBZ/Abaca

du groupe ECF Pro (Ecole de con-duite française). Pour atteindre l’objectif de 86 alternants formés en 2020, 136 l’année prochaine, 268 en 2022 et 500 en 2023, Transdev a prévu d’aller dès l’an prochain au-devant de publics éloignés de l’emploi, via des clau-ses sociales et d’insertion lors de la phase de sélection des candi-dats. Il proposera un CAP d’agent d’accueil et de conduite routière sur une durée d’un an.

Dans toutes les régionsLe groupe, « qui compte 34.000 salariés, dont 24.000 conducteurs, recrute chaque année 5.000 sala-riés », rappelle Edouard Hénaut, qui a commencé le déploiement hors d’Auvergne Rhône-Alpes de la Transdev Académie. Cette ini-tiative ouverte aux moins de 30 ans pour les former en internepar la voie de l’apprentissage a pris pied ces dernières semaines dans les Pays de la Loire, en Nor-mandie, en Bretagne et dans les Hauts-de-France. Avant d’attein-dre l’Ile-de-France en décembre, puis d’être étendue à l’ensemble des régions françaises.

Corinne Elfassy, directrice for-mation France de l’entreprise, souligne que les débouchés natu-rels pour les personnes ainsi for-mées et embauchées en CDI sont en priorité ses multiples filiales gestionnaires de réseaux de transports publics pour le compte de collectivités territoria-les. « Mais aussi les PME à qui nousdéléguons l’exploitation de lignes affrétées. » — D. M.

Un petit espoir de féminisation du métier très masculin de chauf-feur de cars ? Edouard Hénaut, directeur général de Transdev France, a salué « la quasi-parité » au sein de la quinzaine de jeunes inscrits lors de la première ses-sion de formation, gratuite pour les candidats, lancée depuis fin septembre à Saint-Etienne.

Une deuxième session vadémarrer mi-décembre, enca-drée par des conducteurs volon-taires de la Société des transportsen commun de l’agglomération stéphanoise (Stas, filiale de Trans-dev) préalablement formés pour devenir maîtres d’apprentissage. Au bout d’un semestre sanc-tionné par la délivrance du per-mis D et du titre professionnel de conducteur de transport en com-mun sur route, leurs élèves pour-ront prendre le volant d’un auto-bus, dans un premier temps. Par la suite d’un trolleybus ou d’un tramway.

500 apprentis en 2023Le dispositif, qui utilise des véhi-cules de la Stas ainsi que des simulateurs de conduite, s’appuieaussi sur l’Institut des métiers de Saint-Etienne et des formateurs

Le spécialiste du trans-port de voyageurs sur route en France a créé une Mobilité Académie pour assurer lui-même le recrutement et la forma-tion d’une partie des conducteurs de ses multiples filiales.

Transdev multiplie ses CFA d’entreprise

solution viendra de l’arrivée de plus de femmes, qui ne représentent actuellement que 12 % des conduc-teurs, car, « avec elles, on constate surle transport scolaire moins de conflitsqu’avec les hommes ».

Pyramide des âgesLe recrutement constitue un pro-blème structurel de ce secteur d’activité, où sont surreprésentés lessalariés de 50 à 60 ans et qui a en ligne de mire la perspective d’un grand nombre de départs à la retraite. Une situation due aux nom-breux temps partiels dans les trans-ports scolaires, surtout en zone rurale, avec un service le matin et unautre le soir. D’où la présence de per-sonnes à la recherche d’une activité complémentaire, parfois des mères

de famille et souvent de jeunes retraités. Car le métier est sans limite d’âge supérieur, il exige juste un encadrement médical plus fré-quent. « En somme, nos recrues sont souvent des personnes en reconver-sion professionnelle. La législation, qui interdit de passer le permis D de transport de voyageurs avant 21 ans, constitue une exception française qui nous pénalise. Car, à cet âge, il est troptard pour le recrutement de candi-dats à un premier emploi », estime leprésident de la FNTV.

Tutorat dégressifUn décret, en attente de validation par le Conseil d’Etat, l’abaissera à 18 ans. Avec un tutorat dégressif surun semestre, afin que les jeunes conducteurs ne soient pas immé-

diatement lâchés seuls au volant. L’accidentologie à l’étranger n’est pas supérieure assure la profession.« Le jour du redémarrage de toutes nos activités, y compris celles liées autourisme très impacté par la crise sanitaire, cela sera compliqué d’avoirles effectifs suffisants », pronostique le président de la FNTV, qui aime-rait que l’Education nationale crée une filière de formation pour le transport de voyageurs, à côté de celles proposées par les structures de formation privées.

A l’automne 2019, il manquait6.000 conducteurs aux entreprises du secteur, certaines se voyaient parfois contraintes d’afficher : « aujourd’hui pas de transport sco-laire, car pas de conducteur disponi-ble », souligne-t-il. n

Denis Meynard—Correspondant à Saint-Etienne

Le métier en tension de conducteurde transport de voyageurs va pou-voir toucher un public plus jeune dans les prochains mois. Cette évo-lution demandée par la profession sera possible dès la parution, annoncée comme imminente, d’un décret interministériel autorisant de façon dérogatoire la conduite des autocars et autobus à partir de 18 ans, contre 21 ans actuellement.

« Il y a une vraie attente. Cette évo-lution, c’est nous qui l’avons deman-dée car on est en manque de conduc-teurs. La barrière de 21 ans nous fait perdre beaucoup de jeunes qui par-tent vers le transport de poids lourd »,explique Jean-Sébastien Barrault, le président de la Fédération natio-nale des transports de voyageurs, qui représente 1.500 entreprises et plus de 100.000 salariés.

Manque d’attractivité« Pour certains, le métier manque d’attractivité, avec des salaires, il est vrai, peu élevés, le fait de parfois com-mencer tôt le matin et travailler le week-end, avec des plannings qui peu-vent changer d’une semaine sur l’autre », admet Denis Collomb, diri-geant de la société stéphanoise CarsSRT. « A la Maison de l’emploi de Saint-Etienne, lors des présentations mensuelles des métiers du transport et de nos formations, 5 % du public aumaximum se montre intéressé par le transport voyageurs », abonde Franck Bejoint, directeur du centre de formation Aftral de la Loire, qui forme entre 80 et 100 conducteurs

par an. Tout en nuançant : « le renouvellement de l’effectif ne peut pas reposer que sur des jeunes. Il y a un gros travail à faire sur l’image. » Cogérant des Transports Flouret, à Roche-La Molière (Loire), David Mengis pense qu’une partie de la

l Anticipant la reprise économique, les entreprises de transport en commun sur route attendent avec impatience la parution du décret qui permettra de former les conducteurs à partir de 18 ans. l Pour mieux répondre aux difficultés chroniques de recrutement d’une profession qui veut également infléchir sa pyramide des âges.

Les transporteurs de voyageurs se préparent à rajeunir leurs conducteurs

TRANSPORT

Le recrutement constitue un problème structurel de ce secteur d’activité.

plancher actuel de 21 ans, « beau-coup, parmi ceux qui sortent tôt du système scolaire, se sont déjà orientésvers une autre filière ». Pour lui, c’est un métier sur lequel on va pouvoir développer de la formation initiale, y compris en apprentissage. « Aujourd’hui, nous avons principa-lement des personnes en reconver-sion ou retraitées, avec un finance-ment de Pôle emploi, des conseils régionaux et de l’Opco Mobilité pour le titre professionnel de conducteur detransport en commun sur route, soit 4.000 formations par an, ou le CAP d’agent d’accueil et de conduite rou-tière », détaille le patron de l’Aftral.

Cette structure associative, dontle conseil d’administration situé à Paris est constitué d’une quinzaine de fédérations professionnelles, a

réalisé en 2019 un chiffre d’affaires de 255 millions d’euros. Elle emploie 2.600 salariés, répartis sur 120 centres en France, dont une Ecole nationale supérieure de transport de voyageurs.

Elle dispose d’un maillage terri-torial serré, densifié ces dernières années par la prise de participa-tions majoritaire au sein de PME régionales de formation, permet-tant de mieux répondre aux appels

d’offres sur l’ensemble d’une région.Après les Vosges et les Landes,

elle vient de participer à la reprise de Gaillard Formation, dans le Can-tal, au côté de son nouveau diri-geant, Sébastien Riou. L’entreprise d’Aurillac, qui intervient sur l’ouest d’Auvergne Rhône-Alpes, « inves-tira l’année prochaine 2,3 millions d’euros dans un nouveau centre de formation au Chambon-Feugerolles (Loire), près de Saint-Etienne, pour mieux répondre à la demande ».

L’ouverture de ce site, qui seranotamment « doté d’une piste en résine avec système d’arrosage pour former à la conduite à risque », sui-vra l’implantation, début 2020, de son concurrent ECF sur la com-mune voisine de Roche-la-Molière (Loire). — D. M.

L’Aftral s’allie à des entreprises de formation pour doper son offre dans les transports

255MILLIONS D’EUROSLe chiffre d’affaires réalisé par l’Aftral en 2019.

PME & REGIONS Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 PME & REGIONS // 29

innovateurs

Olivier Ducuing—Correspondant à Lille

« Le business plan que j’avais prévu pour 2024 sera réalisé en 2022 voire en 21. » Même si l’école de commerceen ligne Enaco à Roubaix (Nord) connaît une croissance continue depuis des années, sa fondatrice et dirigeante Hélène Lejeune n’avait pas anticipé l’énorme coup d’accélé-rateur de 2020. L’école devrait dépas-ser les 20 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre 13,2 millions un an plus tôt. La crise sanitaire a poussé un grand nombre d’organismes et depersonnes du présentiel vers le vir-tuel, entraînant un engouement pour les 56 formations – jusqu’à bac + 5 – proposées par l’école nordiste. Celle qui se revendique comme la première école de commerce en ligne française a attiré cette année 6.000 étudiants, d’abord en forma-tion initiale ou professionnelle.

Usine textileM ais elle a aussi bénéficié d’un dis-positif spécifique de formation à dis-tance mis en place par Pôle emploi pour la crise sanitaire : Enaco avait

Date de création : 2020Présidente : Chloé ZaiedEffectif : 2 personnesSecteur : Energie

Paul Molga— Correspondant à Marseille

Le premier navire de plaisance àpropulsion électro-hydrogène s’apprête à sortir des chantiers navals de Marseille. L’initiative en revient à une novice de cette technologie, Chloé Zaied, aujourd’hui à la tête d’une société charter de visite des Calanques à la journée. « Ce parcnational exceptionnel mérite tous les soins », explique la jeunefemme qui s’est associée au cabinet EODev, l’ingénieriste d’Energy Observer, pour cons-truire ce pilote. L’engin est un «tender boat», une catégorie de navire à coque ouverte généra-lement utilisé comme annexe sur les superyachts.

S o n p r o t o t y p e m e s u r e40 pieds (12,65 m sur 4 de large) et embarque 22 kg d’hydrogène contenus dans trois bombonnes logées dans la coque. Il est équipéd’une pile à combustible stan-

dard de 80 kW – le module T de laToyota Mirai – destinée à faire atteindre une vitesse proche des performances des moteurs ther-miques, soit 26 nœuds (47 km/h)à plein régime. Sur le papier, son autonomie peut couvrir les 90 miles nautiques (150 km), en utilisant la totalité de l’énergie délivrée par la pile et les batteriesqui l’accompagnent. Mais il suf-fit d’une heure et demie au mouillage pour que le système serecharge. L’ensemble a été mari-nisé et conçu pour naviguer par gros temps.

Homologation en coursEnviron 2 millions d’euros, apportés par un investisseur privé, ont été nécessaires à la réalisation du démonstrateur qui pourrait obtenir son homo-logation de navigation d’ici à quelques semaines. « Ce navire atous les atouts pour voguer dis-crètement et sans laisser de trace dans les plus beaux lieux du globe », défend Chloé Zaied. Aucun risque de fuite de carbu-rant, ni bruit de moteur… Les seuls rejets sont de l’eau douce produite par l ’électrolyse inverse dans la pile. Une société,baptisée «Hynova», a été créée pour commercialiser ce navire. Son prix, supérieur de 30 à 40 %à un modèle thermique équiva-lent, le réserve à certains usa-ges : bateau utilitaire, visite de lieux sensibles, annexe de luxe…L’entreprise, qui assure avoir déjà enregistré des précom-mandes, projette de vendre 10 unités par an. n

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LA TECHNOLOGIE HYNOVA

Le premier yacht à hydrogène au monde

Léa Delpont—Correspondante à Lyon

Contrairement aux apparences, les masques jetables ne sont pas en papier, mais en polypropy-lène. Et Hervé Guerry ne peut se résoudre à les voir partir à la poubelle au bout de quatre heu-res. Le président de Cycl-add a imaginé avec des partenaires de l’Ain une filière complète de recyclage qui aboutit à un tee-shirt en textile technique de haute tenue. Cette entreprise spécialisée dans le recyclage des matières plastiques a organisé une collecte de masques usagés auprès d’industriels qui en usentjusqu’à deux tonnes par mois. Hervé Guerry estime le gise-ment français hebdomadaire à 500 tonnes. « Même après le Covid, la filière demeurera pérenne avec les hôpitaux, l’agroalimentaire et l’électroni-que, grands consommateurs de masques, blouses et charlottes ».

La PME effectue le recyclagedu polypropylène non tissé en petites billes bleues, après avoir

ôté élastiques et barrette puis lavé les masques, pour obtenir un matériau pur et qualifié. Le polypropylène part chez Ain Fibres, l’unique filateur français de fibres synthétiques à multifi-laments continus. Becher Al Awa a déposé sa marque de fil enpolypropylène, Dynalen, aux qualités supérieures au polya-mide et au polyester. Il est 33 % plus léger, thermorégulant, très doux, hydrophobe et fonction-nalisable dans la masse, sans uti-lisation d’eau ou de produits chi-miques. En plus de la teinture oud’anti-UV, il accepte des traite-ments anti-odeurs, antibacté-riens et antiviraux, ce qui en fait un produit idéal pour le sport et le milieu hospitalier.

EvénementielTroisième pivot de la filière, Thierry Emin est actionnaire minoritaire d’Ain Fibres et prési-dent du tricoteur Billon, où se déroule l’étape de la fabrication textile, des rouleaux de maille. Son autre société, Aura Evolu-tion, supervise la confection en sous-traitante « 100 % fran-çaise ». L’ancien directeur géné-ral d’Emin Leydier, vendu en 2018, s’est reconverti dans le tex-tile en rachetant Billon en 2019, Entreprise du patrimoine vivant dans l’univers du maillot de bain.Le président du club de rugby d’Oyonnax vise pour ses premiè-res séries des tee-shirts promo-tionnels « développement dura-ble » pour les entreprises ou l’événementiel. n

Cycl

-Add

L’INITIATIVE CYCL-ADD

Recycler les masques jetables en tee-shirts

Frank Niedercorn @FNiedercorn

—Correspondant à Bordeaux

« Si cela n’avait pas été à Lea Nature,je n’aurais sans doute pas vendu. » Lorsqu’en 2019 Benoit Mary se met

Nicole Buyse—Correspondante à Lille

DFDS ouvre le 2 janvier prochain une ligne entre Rosslare, dans le sudde l’Irlande, et Dunkerque, dans le nord de l’Hexagone. Avec trois navi-res, qui pourront transporter cha-cun 150 camions (avec remorques etchauffeurs), la compagnie maritimedanoise assurera six départs hebdo-madaires par port. Les bateaux sontéquipés de cabines pour les chauf-feurs, car la traversée dure entre 22

Brexit : DFDS ouvre une ligne de fret entre la France et l’Irlande

et 24 heures. Ce service est pour l’instant réservé au fret.

La compagnie maritime danoisevient contourner là le Brexit pour ses clients européens commerçant avec l’Irlande qui s’y rendaient via laGrande-Bretagne depuis Dunker-que. Avec le Brexit, ils seront con-frontés dès le 1er janvier prochain à laréapparition de deux nouvelles frontières et de formalités douaniè-res risquant de générer des temps d’attente dans les ports.

Cette nouvelle ligne, ouverte à lademande de ses clients, permet à DFDS de garder ce f lux avec l’Irlande, un trafic que la compa-gnie maritime ne peut toutefois pasévaluer, car il est actuellement noyédans les volumes anglais. DFDS s’est d’ores et déjà assuré le partena-riat de gros transporteurs irlandais.« Notre objectif est d’être vite à l’équi-libre, et, pour cela, il faut remplir à 60 % », annonce Jean-Claude Charlo, directeur général de DFDS France.

Ce nouveau service n’affecterapas l’exploitation de ses trois autreslignes françaises, que ce soit Calais-Douvres (2,1 millions de passagers et 602.000 camions en 2019), Dun-kerque-Douvres (2,3 millions de passagers et 583.000 camions) et Dieppe-Newhaven (376.000 passa-gers et 38.000 camions). « Cela vienten complément », a assuré Jean-Claude Charlo.

Baisse des traficsL’activité de DFDS est bien sûr affec-tée par la crise sanitaire, mais diffé-remment selon les types de trafic. D’après ses projections, l’année devrait se solder par une baisse limitée sur le fret, se situant entre 10 % et 15 %. « Les Anglais font, en effet, en ce moment pas mal de stocksjustement en prévision du Brexit », explique le dirigeant. La compagniemaritime s’attend en contrecoup à une chute du fret dès le début de l’année prochaine. Le trafic passa-gers, lui, devrait accuser un recul de

près de –66 % en 2020. Conséquen-ces de cette crise, la société qui emploie 1.000 personnes en France,dont 850 marins travaillant sur les cinq navires sous pavillon français, avait annoncé en août dernier la suppression de 142 postes sur cet effectif. Le PSE a été ramené récem-ment, à l’issue des négociations avec les partenaires sociaux, à 70 suppressions de postes (58 marins, 12 sédentaires). Il ne devraitpas y avoir de licenciements secs, puisqu’il y a, par ailleurs, 80 deman-des de départ volontaire. n

HAUTS-DE-FRANCE

Pour pallier les consé-quences du Brexit, la compagnie maritime danoise assurera à partir du 2 janvier six rotations hebdomadai-res entre Dunkerque et Rosslare.

remporté un appel d’offres en 2019, que la crise a brutalement accéléré. Au total, l’école aura accueilli, en 2020, 8.000 demandeurs d’emploi en formations qualifiantes, prises en charge par l’Etat.

Entre marchés publics et crois-sance organique, Hélène Lejeune sedit ainsi capable de monter, à court terme, à 35.000 étudiants dans l ’a n n é e , a v a n t d e p a s s e r à 60.000 personnes à plus long terme. Des perspectives vertigineu-ses pour l’établissement né il y a moins de quinze ans, et implanté

depuis 2018 dans une ancienne usine textile.

Ingénieurs pédagogiquesCette montée en régime s’accompa-gne de recrutements en nombre, soit 40 personnes en CDI cette année. « Il y a un tel développement du marché de la formation à distancequ’on n’a aucune inquiétude », lâchela dirigeante. Enaco emploie à ce jour 150 personnes soit 100 équiva-lents temps plein, parmi lesquels des enseignants bien sûr, mais aussides ingénieurs pédagogiques, qui

gèrent les outils d’e-learning, et 8 coachs, pour accompagner l’assi-duité et la progression des étu-diants. Résultat, le niveau de réus-site de l’école atteint 82 %.

Le modèle d’Enaco avait déjàséduit plusieurs fonds d’investisse-ment (IRD et Audacia) et des busi-ness angels. Pour cette nouvelle étape de développement, les action-naires historiques se retirent, au pro-fit du seul fonds régional Re-SourcesCapital. Au terme de l’opération, Hélène Lejeune demeure largementmajoritaire avec 73 % des parts. n

HAUTS-DE-FRANCE

La crise du présentiel donne des ailes à l’école de commerce roubaisienne en ligne Enaco, qui ouvre son capital au fonds Re-Sources.

A Roubaix, l’envolée du virtuel dope l’école de commerce en ligne Enaco

L’école devrait dépasser les 20 millions d’euros de chiffre d’affaires. Photo Enaco

Le miel Famille Mary cédé à Léa Natureen quête d’un repreneur pour Famille Mary, l’entreprise créée par son grand-père apiculteur, il necontacte qu’une seule personne : Charles Kloboukoff, le fondateur du champion français de l’alimen-tation et de la cosmétique bio, qui pèse 500 millions d’euros de chiffred’affaires pour 1.800 employés. « J’ai souhaité anticiper le processusde transmission de l’entreprise. Mes enfants n’étaient pas intéressés, j’ai donc choisi de rejoindre un grand acteur français, indépendant, solide,ayant la même culture que nous et lesouci de l’alimentation naturelle », assure Benoit Mary.

Le holding Léa Compagnie Biodi-versité a ainsi racheté 94 % de Famille Mary, pour un montant quin’a pas été divulgué, deux managersde l’entreprise conservant les 6 %

restants. Benoit Mary va désormaisse consacrer au développement de Meltonic, l’entreprise qu’il a fondée en 2014 sur le créneau de la nutri-tion sportive bio et naturelle, à basede miel et de gelée royale.

Plus de ruchesAve c c e t t e a c q u i s i t i o n , L é a Nature, qui était absent du marché du miel, met la main sur un poids lourd du secteur, au modèle écono-mique original. L’entreprise, qui compte 125 personnes, est basée à Saint-André-de-la-Marche, dans les Mauges à côté de Cholet (Maine-et-Loire). Elle s’est historiquement développée grâce à la vente par cor-respondance, puis sur Internet. Cela représente désormais la moitiéd’un chiffre d’affaires qu’elle ne divulgue pas. L’autre moitié pro-

vient des ventes réalisées via un réseau d’une trentaine de boutiquesdéveloppé en propre depuis 1997. L’entreprise, qui dispose de 700 ruches, réalise, toutefois, l’essentiel de ses ventes, soit environ 250 ton-nes par an, grâce à une centaine d’apiculteurs partenaires.

A côté de sa gamme FamilleMary, qui génère 85 % des ventes, l’entreprise a donné naissance à trois autres marques. Hédène et MaRuche Bio s’adressent respective-ment aux épiceries fines, et aux réseaux bio et spécialisés, tandis qu’Abellie est spécialisé sur les pro-duits cosmétiques. Les produits bione sont pas majoritaires chez Famille Mary, la volonté est désor-mais de porter cette part à 80 % à l’horizon de trois ans et d’augmen-ter le nombre de ruches. n

2,1MILLIONSLe nombre de passagers sur la ligne Calis-Douvre, et 602.000 camions.

NOUVELLE-AQUITAINE

L’entreprise familiale angevine est rachetée par le groupe agroalimentaire de La Rochelle, qui a désormais l’ambition d’augmenter la part du bio chez le produc-teur de miel.

Page 30: Les Echos - 09 12 2020

C’est l’heure des comptes pour les investisseurs particuliers. Aux Etats-Unis, ils ont profité de l’embellie des marchés pour céderdes actions. Pour la première fois en huit mois, les ventes de titres ont dépassé en novembre les acquisitions pour les clients de TD Ameritrade, l’un des princi-paux courtiers en ligne pour parti-culiers outre-Atlantique. Alors que les indices boursiers améri-cains enregistraient de nouveaux records, portés par la vague d’opti-misme liée aux vaccins, les parti-culiers cristallisaient leurs gains.

« Beaucoup ont bien réussidepuis mars, et ils sont nombreux à vouloir réduire leur prise de ris-que », a déclaré JJ Kinahan, stra-tégiste chez TD Ameritrade à l’agence Bloomberg. Après un millésime exceptionnel sur les marchés, la tentation est grande de sécuriser leurs gains et d’atten-dre la suite.

Souvent moqués pour leur ten-dance supposée à investir lorsqueles cours sont au plus haut et à céder à la panique lorsque les prixsont au plus bas, les particuliers ont réalisé un sans-faute cette année. La dernière fois qu’ils ont vendu plus d’actions qu’ils n’en ont acheté remonte à février, le précédent pic des indices bour-

siers. Ils sont redevenus ache-teurs suite au crash des marchés en mars, profitant des opportuni-tés offertes par le mouvement de panique des investisseurs.

L’engouement des particulierspour la Bourse a été tel qu’il a eu unimpact sur la structure des mar-chés. Le nombre d’opérations d’achat et de vente de moins de 10 titres a dépassé courant mars les opérations de volumes impor-tants avant d’atteindre un pic en octobre, d’après des données com-pilées par Barclays. Les particu-liers américains sont restés inves-tis pendant le rebond des derniers mois, bénéficiant de la hausse de plus de 60 % du Dow Jones et du S&P 500 depuis mars, et de l’envo-lée de plus de 80 % du Nasdaq 100.

PrudenceDésormais, la prudence semble avoir pris le dessus. Les titres les plus vendus au cours des derniè-res semaines sont ceux qui ont le plus bénéficié du rebond. Les par-ticuliers ont réduit leur expositionaux secteurs financier, industriel et de l’énergie. Parmi les titres les plus vendus, on retrouve JP Mor-gan et Bank of America, tous deuxen hausse de plus de 20 % sur le mois. A l’inverse, les particuliers ont profité de la sous-perfor-mance du secteur technologique pour acheter Alibaba, qui accuse un recul de plus de 13 % en novem-bre, et Amazon, qui reste en retraitde près de 10 % par rapport à son pic début septembre. — B. B.

Après avoir profité de la chute des marchés au printemps, les particuliers ont commencé à vendre leurs titres en novembre.

Les particuliers prennent leurs gains

du bilan ou encore à la génération de cash. Pas de raison de paniquer pour autant : les actions restent intéressantes pour les investis-seurs, car elles offrent un meilleur rendement potentiel que les actifs « sûrs », à commencer par les obli-gations d’Etat.

La prime de risque des actions estmême proche de ses plus hauts his-toriques, estime dans une récente note l’économiste Robert Shiller, qui a développé l’utilisation du ratioCape, aussi appelé Shiller PE, avant la bulle des années 2000. « Par rap-port aux obligations, les actions sont très attractives et leur potentiel de rendement excédentaire pourrait être élevé », insiste-t-il.

Une conséquence de la chute destaux d’intérêt, une tendance de longterme accentuée par la réponse des banques centrales à la crise. « La politique monétaire non convention-nelle a clairement joué un rôle impor-tant dans la réévaluation du ratio cours sur bénéfices », observent les analystes de Barclays. La hausse des

ratios de valorisation est « structu-relle », indiquent-ils. « L’environne-ment de faible croissance conjugué à des taux d’intérêt atones signifie que les investisseurs sont prêts à payer cher pour une croissance nominale qu’ils trouvent sur le marché des actions. Jusqu’à ce que nous assis-tions à une hausse spectaculaire des taux, les actions resteront attractives sur une base relative », concluent-ils.

Or, les banquiers centraux ontété très clairs sur leur volonté et leur capacité à maintenir des con-ditions de financement favorables pour les Etats, ce qui implique de contenir toute hausse des taux longs. Seul un rebond brutal et suf-fisamment large de l’inflation pourrait potentiellement leur for-cer la main et les pousser à relever les taux.

Un scénario « difficile à défendre »pour 2021, selon Christian Parisot d’Aurel BGC, qui s’attend toutefois àce que le débat sur un retour de l’inflation prenne de l’ampleur l’an prochain. « Pour le moment, les actions devraient rester “bon mar-ché” par rapport aux obligations, ce qui ne milite pas pour une brutale correction des indices boursiers et unajustement drastique de leur valori-sation » au cours des mois qui vien-nent, estime-t-il.

(Lire aussi l’éditorial d’Elsa ConesaPage 15

l La belle performance des Bourses le mois dernier a tiré les valorisations des actions vers de nouveaux sommets.l Pas de raison de paniquer pour la plupart des professionnels, qui y voient la conséquence de la faiblesse des taux.

Wall Street confrontée à des valorisations vertigineuses

Bastien Bouchaud @BastienBouchaud

Le rebond historique des marchés en novembre a porté les indices boursiers américains vers de nou-veaux records et ravivé dans le même temps les inquiétudes sur lesniveaux de valorisation des actions.« Si les marchés ont bien réagi aux nouvelles relatives aux vaccins, ils frôlent ou dépassent les niveaux atteints avant la pandémie, lorsque se posaient déjà des questions au sujet des valorisations excessives », s’est ému Claudio Borio de la Ban-que des règlements internationaux (BRI) dans le rapport trimestriel de la banque des banques centrales. « Un certain degré d’écart entre les valorisations des actifs risqués et les perspectives économiques semble persister », a-t-il averti.

Plus élevées qu’en 1929Le principal indice boursier améri-cain, le S&P 500, a marqué un nou-veau record vendredi 4 décembre à 3.699 points. Il s’agissait de son troi-sième en une semaine. En dépit de l’impact économique massif de la pandémie, l’indice des 500 premiè-res capitalisations de Wall Street s’inscrit en hausse de plus de 14 % depuis le début de l’année.

Mécaniquement, avec desactions plus chères et des profits enberne pour la majorité des entrepri-ses, les valorisations sont reparties en forte hausse. Le ratio du cours sur les bénéfices de long terme des entreprises du S&P 500 (ratio Cape,« Cyclically-Adjusted Price-to-Ear-nings »), calculé à partir de la moyenne des bénéfices des dix années passées, a désormais dépassé son niveau de 1929, à la veille de la Grande Dépression, d’après Deutsche Bank. Seule la période de la bulle Internet a connudes niveaux plus extrêmes.

Les valorisations des actionssont historiquement élevées sur la plupart des critères habituelle-ment regardés par les profession-nels de l’investissement : par rap-port aux profits passés et à venir, aux ventes, à la valeur comptable

BOURSE

Guillaume Benoit @gb_eco

On n’avait pas vu ça depuis la mi-mars. Le taux des Treasuries – les obligations d’Etat américaines – à 10 ans a touché 0,98 % en séance ven-dredi dernier. S’il est retombé depuis, le rendement américain à 10 ans a souvent flirté avec le seuil symbolique de 1 % ces dernières semaines. Sa remontée est particu-lièrement spectaculaire, quand on se souvient que, le 4 août, il était des-cendu à 0,50 %, un plus bas histori-que. Bien sûr, les nouvelles rassuran-tes concernant le vaccin contre le Covid et l’amélioration des perspec-tives économiques à court terme pour les Etats-Unis ont pu pousser les investisseurs à se détourner de

Au plus haut depuis mars, le taux à 10 ans américaina quasi touché 1 % la semaine dernière, contre 0,5 % au début août. Une poussée principalement due au bond des attentes des marchés vis-à-vis de l’inflation.

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En dépit de l’impact économique massif de la pandémie, l’indice des 500 premières capitalisations de Wall Street s’inscrit en haussede plus de 14 % depuis le début de l’année.

cette valeur refuge par excellence qu’est la dette d’Etat américaine pourse porter vers des actifs plus risqués.

Mais ce mouvement haussiersemble bien plus durable. « Ce qui faitmonter les taux américains, à l’heure actuelle, ce sont avant tout les antici-pations d’inflation qui ont progressé ces dernières semaines sur les mar-chés », analyse Stéphane Déo, res-ponsable de la stratégie de marchés chez Ostrum AM. Elles sont à leur plus haut en dix-neuf mois. Face à des perspectives de forte hausse des prix à la consommation – qui rédui-sent mathématiquement les rende-ments des produits à taux fixe –, les investisseurs tendent à demander une rémunération plus importante. Comme le souligne le stratégiste, si letaux des Treasuries à 10 ans a grimpéde 50 points de base depuis août, les anticipations d’inflation à 10 ans ont pour leur part grimpé de 55 points debase. « Autrement dit, le taux réel américain à 10 ans a baissé », expliqueStéphane Déo.

Signe que la Réserve fédérale esten passe de remporter son pari ? La banque centrale américaine a réviséson objectif l’été dernier, à l’issue de

sa revue stratégique. « La Fed a annoncé qu’elle visait désormais une cible moyenne d’inflation, et qu’elle la laisserait évoluer au-dessus de son objectif pendant assez longtemps sansmonter ses taux directeurs, afin de compenser la période où la hausse desprix était bien au-dessous de ses attentes », explique Stéphane Déo. Les marchés semblent convaincus, ce qui entraîne une pentification de la courbe des taux américaine.

Le plan de relance de l’économieaméricaine, dont l’adoption paraît de plus en plus probable si l’on en croit les échanges entre les deux chambres américaines et l’équipe du président élu Joe Biden, devrait lui aussi alimenter cette hausse de l’inflation. D’un montant annoncé de 900 milliards de dollars, il creu-sera le déficit outre-Atlantique, ren-forçant par ricochet les pressions inflationnistes.

Le mouvement semble donc iné-luctable. « Un rendement à 10 ans de 1 à 2 % est certainement possible, a confié un stratégiste de Mizuho Bank à Bloomberg. La question n’est pas de savoir si les taux vont augmen-ter, mais quand. » Une perspective qui pourrait plomber d’autres clas-ses d’actifs. C’est le cas de l’or, qui est vu comme une bonne protection contre l’inflation. Mais, comme il n’affiche pas de rendement, il perd de son attrait lorsque les taux repar-tent significativement à la hausse.

Reste à savoir jusqu’où la Fed estprête à voir remonter les taux longs, qui servent de référence pour une large gamme d’emprunts, qui va desprêts immobiliers aux finance-ments des entreprises, en passant par les crédits auto. La banque cen-trale américaine devrait donc sur-veiller l’évolution du « 10 ans » améri-cain comme le lait sur le feu. En cas de hausse brutale, elle pourrait intervenir dès sa réunion de la semaine prochaine, par exemple en décidant d’augmenter la maturité moyenne des titres qu’elle achète dans le cadre de son programme de soutien à l’économie. n

L’inflation fait repartir les taux américains à la hausse

La Fed pourrait réagir en cas de hausse brutale.

FINANCE & MARCHES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Page 31: Les Echos - 09 12 2020

Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 31

Nessim Aït-Kacimi @NessimAitKacimi

Déboussolé par la pandémie, Renaissance, le plus grand et le plusperformant des fonds quantitatifs (qui fonctionnent à l’aide de modè-les), est en passe de connaître sa pireannée depuis une décennie. Son seul fonds à gagner de l’argent cette année (+ 58 % au premier semestre)est le mystérieux Medallion Fund, cas unique dans la gestion mon-diale, réservé uniquement aux col-laborateurs de Renaissance ainsi qu’à son fondateur, James Simons. La fortune personnelle de ce der-nier est estimée cette année à 23,5 milliards de dollars par « For-bes » – en tête du classement mon-dial des hedge funds les plus riches.

Les fonds destinés aux clientssont en revanche nettement dans lerouge, incapables qu’ils ont été de profiter de la forte hausse de Wall Street en novembre. Les autres hedge funds investis sur les actions ont connu leur meilleur mois (+ 8,7 %) depuis le sommet de la bulle Internet (février 2000), selon Hedge Fund Research (HFR).

Pour le meilleur et pour le pireLe fonds de Renaissance qui inves-tit sur les actions (et qui gère 27 mil-liards de dollars) abandonne 22,5 %sur les onze premiers mois de l’année, alors qu’il a gagné en moyenne 15,3 % par an entre 2015 et 2019. Son fonds diversifié

L’envolée de Tesla sonne la revan-che d’Elon Musk sur les sceptiques et critiques. Son cours a été multi-plié par 7,5 cette année, de 86 à 642 dollars. Les spéculateurs (parti-culiers, hedge funds…) qui ont pariésur la chute du titre grâce à la venteà découvert ont perdu 35 milliards de dollars cette année, selon les esti-mations de S3 Partners. Le quart deleurs pertes s’est produit en novem-bre, quand le cours de Tesla a bondide 46 %. Les vendeurs à découvert ont dû racheter en catastrophe les actions qu’ils avaient cédées aupa-ravant. Ils les ont acquises à un cours bien plus élevé, entraînant delourdes pertes.

Malgré les risquesLeur pari sur la chute d’une des locomotives de Wall Street s’est retourné contre eux. Les positions vendeuses à découvert sur Tesla ontdiminué de 63 % cette année, selon la chaîne CNN. Certains continuent donc à anticiper une correction du

cours malgré les risques. Son envo-lée historique a causé sept fois plus de pertes aux vendeurs à découvertque la progression du titre Apple cette année (+65 %).

« Age d’or de la fraude »Ce bond du titre Tesla a « été claire-ment douloureux » a admis James Chanos, du hedge fund Kynikos, spécialisé dans la vente à décou-vert, lors d’une interview à l’agenceBloomberg. Depuis cinq ans, il parie sur la chute du cours de Tesla.Il a été contraint de réduire cette année la taille de sa position ven-deuse sur le titre après son envo-lée. Les valorisations du groupe sont devenues stratosphériques, met-il en garde. Son cours équivaut

à 900 fois les résultats de ses 12 der-niers mois et 150 fois ses bénéfices àvenir. Dans l’euphorie actuelle à la mesure des espoirs de sortie de la crise mondiale, les marchés font grimper les cours de sociétés aux pratiques financières et compta-bles « contestables », et préparent l’avènement d’un « âge d’or de la fraude ».

Entre le groupe dirigé par ElonMusk et les vendeurs à découvert, lecourant n’est pas passé dès le départ. Les spéculateurs à la baisse ont rapidement jugé son dirigeant mégalomane, incontrôlable, coupé des réalités et sa société un gouffre financier sans fond.

Ils ont parfois gagné de l’argenten spéculant sur la baisse du titre, comme en 2018. « La vente à découvert a toujours été difficile, ris-quée et chère à mettre en œuvre. Cetteannée, les plus profitables ventes à découvert ont rapporté moins de 10 % aux hedge funds mais leurs meilleurs investissements boursiers quatre fois plus, autour de 40 %, selon les indices de Goldman Sachs. D’ailleurs, davantage de hedge funds vont se concentrer sur les investisse-ments à l’avenir et délaisser la vente àdécouvert », estime Andrew Beer, directeur associé de la société de gestion alternative Dynamic Beta Investments. — N. A.-K.

Tesla pulvérise les vendeurs à découvert après son bond de 646 % en 2020Les spéculateurs et hedge funds qui ont parié sur la chute du groupe d’Elon Musk ont perdu près de 35 milliards de dollars cette année, sept fois plus que ceux qui ont spéculé sur la baisse du titre Apple.

FONDS

James Simons, fondateur de Renaissance Technologies, a une fortune personnelle estimée cette année à 23,5 milliards de dollars par « Forbes ». Photo Andrew Toth/Getty Images/AFP

La crise du Covid-19 assomme le hedge fund le plus performant de l’histoire

Alpha perd quant à lui le tiers de sa valeur, en 2020. Cette mauvaise passe rappelle la crise de 2007. Le leader des fonds quantitatifs est aussi nettement à la traîne par rap-port à ses concurrents, qui pour 2020 gagnent 11,3 %, ayant sauvé leur année grâce au mois de novem-bre (10,6 %), selon HFR. Les hedge funds investis sur les valeurs tech-nologiques et le secteur de la santé progressent respectivement de 21 %et de 17,7 %.

« Il n’est pas surprenant que nosfonds, qui dépendent de modèles fon-dés sur des données historiques, aientdes performances anormales – pour le meilleur et pour le pire – lors d’une année tout sauf normale », a avancé Renaissance, qui a ainsi tenté se jus-tifier par le biais d’une communica-tion adressée à ses clients et révélée par l’agence Bloomberg. Renais-sance admet qu’il n’a pas été assez prudent lors de la tempête du mois de mars et trop prudent, trop scepti-que au moment où le rebond des marchés s’est produit, entre avril et juin. Il a été ainsi incapable de rattra-per le terrain perdu, mais assure queredresser les performances est sa « priorité numéro un ».

Il a pu aussi enregistrer des con-tre-performances dans son trading de court terme. Renaissance fonc-tionne à partir de « signaux », des configurations de marché qui entraînent des achats ou des ventes automatiques de titres. Les investis-seurs des fonds de Renaissance, qui sont essentiellement des institution-nels (fonds de pension, fonds souve-rains, universités, banques, fonda-tions…), ont des attentes élevées à

l’égard du fonds quantitatif. Certainspourraient retirer leur argent et le placer dans des fonds quantitatifs plus performants tels que D. E. Shaw.

Les principaux investissementsboursiers de Renaissance sont en hausse, cette année, tels Zoom (télé-conférence), Vertex Pharmaceuti-cals, Novo Nordisk (pharmacie), Chipotle Mexican Grill (chaîne de restauration rapide) , Baidu

(moteur de recherche chinois), Atlassian (logiciels), Monster Beve-rage (boissons énergisantes), Microsoft… Le fonds, modestementinvesti sur certaines « locomotives »du marché américain (Facebook, Alphabet, Netflix), a cédé cette année ses participations dans Ali-baba, JP Morgan, Snap et Shopify.

Le fonds détient plus de 3.000actions, parfois des petites et moyennes valeurs. Près d’une société détenue sur deux est améri-caine, et une part d’environ 20 % duportefeuille boursier est investie dans le secteur de la santé (Biogen, GlaxoSmithKline, AbioMed, Molina Healthcare, Gilead Scien-ces…). Les valeurs de son porte-feuille ont elles une capitalisation boursière moyenne de près de 12 milliards de dollars. n

l Renaissance, le plus grand des fonds quantitatifs, est en passe de connaître sa pire année depuis une décennie.l La firme américaine n’a pas bien anticipé la gravité de la crise sanitaire ni le rebond consécutif des marchés.

Le fonds de Renaissance qui investit sur les actions abandonne 22,5 % sur les onze premiers mois de l’année.

Bridgewater encore sous l’eau

Le plus grand hedge fund au monde (140 milliards de dollars) a remonté la pente en novembre. Son fonds « Pure Alpha I » ne perd plus que 10,6 % sur les 11 premiers mois de l’année, après avoir perdu plus du double en 2020 au plus fort de la crise. Il gère 70 milliards de dollars diversifiés sur tous les grands marchés, soit la moitié des capi-

taux de Bridgewater. Entre 2015 et 2019, il a enregistré un rendement annuel moyen faible de seulement 3,3 % et aucune année de performance à deux chiffres. Son fonds « all weather » (53 milliards de dollars) censé être adapté à toutes les configurations de marché résiste mieux à la crise du Covid-19 avec une hausse de 6 % sur 11 mois.

Les spéculateurs (particuliers, hedge funds…) qui ont parié sur la chute du titre grâce à la vente à découvert ont perdu 35 milliards de dollars cette année, selon les estimations de S3 Partners.

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32 // FINANCE & MARCHES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

35 heures pour vous préparer à lacertification de la CNIL (Examen inclus)5 Session 1 :du Lundi 4 janvier 2021 au Mardi 02février 2021 (à Paris ou à distance)

5 Session 2 :du Mercredi 03 mars au Lundi 05 avril2021 de 14h à 17h (à distance)

Informations et inscriptions :www.lesechos-formation.fr/competences-dpo.htm

Cycle CertifiantCompétences du DPO

avaient libéré 120 milliards d’euros de fonds propres –, la BCE avait recommandé à la fin mars que ces derniers ne versent aucun divi-dende jusqu’au 1er octobre. A la fin juillet, elle avait prolongé cette recommandation jusqu’au 1er jan-vier 2021, protégeant de facto 30 milliards de capital supplémen-taires.

ProjectionsmacroéconomiquesLa BCE veut décider de la suite sur labase des projections macroécono-miques qu’elle doit actualiser jeudi. Le sujet fait l’objet d’un débat intense au sein de l’institution et entre les représentants des gendar-mes bancaires nationaux. La déci-sion pourrait tomber le 15 décem-bre, à l’occasion d’une réunion du Comité européen du risque systé-mique, lié à la BCE.

Pour les uns, il est urgent de main-tenir cette recommandation pour que les banques conservent leurs fonds propres et continuent à soute-nir l’économie face à la crise la plus grave depuis 1929. Pour les autres, à commencer par les banquiers inquiets de leurs cours de Bourse déprimés, l’interdiction de verser des dividendes risque d’effrayer un peu plus les investisseurs et d’obérerla capacité des banques à lever du capital à l’avenir. « Nous sommes conscients des arguments des deux côtés, insiste un haut fonctionnaire européen. La raison pour laquelle nous avons déjà recommandé et recommanderions probablement

Thibaut Madelin @ThibautMadelin

Quelques jours avant une décision très attendue de la Banque centrale européenne (BCE) sur le sujet, la Commission européenne a, à son tour, appelé mardi à la prudence sur les dividendes bancaires, esti-mant justifié de maintenir le gel imposé aux banques au printemps dernier pour faire face aux incerti-tudes persistantes liées à la pandé-mie de Covid-19.

« Je pense qu’il faut encore s’entenir à ces lignes directrices concer-nant le dividende, a déclaré MaireadMcGuinness, la nouvelle commis-saire européenne aux Services financiers, lors d’un séminaire de presse en ligne. Là où nous pour-rions changer d’avis, c’est si le déploiement de la vaccination est réussi et si, d’ici au milieu de l’année prochaine, nous constatons une reprise. » En contrepartie de mesu-res extraordinaires de soutien aux établissements de crédit – qui

BANQUE

La Commissioneuropéenne estime justifié de maintenirle gel imposé aux banques au printemps dernier pour faire face aux incertitudes persistantes liées à la pandémie.

La Commission européenne appelleà la prudence sur les dividendes bancaires

le premier semestre de leur exer-cice fiscal (avril 2020-mars 2021)dans le rouge. Et trente-neuf sontmaintenant déficitaires depuisplus de deux ans. Partout, lesdemandes de prêt fondent avec levieillissement de la population etles fermetures de PME localesdont les patrons de plus de 70 ansne trouvent pas de successeurs.« Et les intérêts sur ces crédits ontbaissé de 23 % entre 2009 et 2019du fait de la réduction des écartsentre les taux d’intérêt sur les prêtset ceux sur les dépôts », rappelleTomoya Suzuki, un analyste deMoody’s Japan. Dans le cadre desa politique de relance, la Banquedu Japon (BoJ) a fait plonger lestaux à court terme à – 0,1 % et lestaux à long terme à zéro.

Une prime de 0,1 % sur les dépôtsInquiet de la dégradation de sesréseaux régionaux, le gouverne-ment japonais vient de lancer,avec la BoJ, une grande campa-gne pour les convaincre de se res-tructurer. « Face au déclin de lapopulation et à cet environnementcommercial difficile, les banquesrégionales doivent accélérer lesréformes structurelles », a marteléYoshihide Suga, le nouveau Pre-mier ministre nippon, qui a faitde ce chantier l’une des prioritésde son mandat.

La banque centrale a ainsi pro-mis de verser 0,1 % supplémentaired’intérêt annuel sur les dépôts faitsauprès d’elle par ces banques régionales. Mais pour profiter de

ce programme, elles devront bais-ser drastiquement leurs coûts de fonctionnement ou accepter de fusionner avec d’autres banques locales. Pour accélérer ce mouve-ment, Tokyo envisage de subven-tionner une partie des frais liés à des rapprochements et notam-ment la coûteuse intégration des réseaux. L’exécutif a aussi amendéla loi antimonopole qui aurait pu freiner les fusions dans certaines régions où une poignée d’acteurs tiennent le marché.

Des états-majors sceptiques« Ce changement a été décidé aprèsla fusion de deux banques dans lapréfecture de Nagasaki. Il avaitalors fallu plus de deux ans pourobtenir l’approbation des autori-tés de la concurrence », rappelleTomoya Suzuki. Une étude del’autorité des services financiersa, depuis, montré que, même ensituation de monopole, ces ban-ques régionales ne parvenaientplus à être rentables.

L’enclenchement de ces grandesmanœuvres a plutôt ravi les investisseurs. Les titres des établis-sements régionaux cotés à Tokyo ont progressé. Mais les états-ma-jors de ces banques se montrent moins enthousiastes. Le président de la petite Toho Bank, qui avait ouvert au pic de sa gloire dans les années 1990 des bureaux à New York et Hong Kong, a déjà indiqué qu’il ne se laisserait pas séduire par le bonus de 0,1 % proposé par la banque centrale. n

Yann Rousseau @yannsan

— Correspondant à Tokyo

Depuis la mi-novembre, les princi-pales agences de la Fukushima Bank, une petite banque régionale du nord-est du Japon, ferment tous les après-midi. Et ses conseillers partent en voiture dans les villages environnants à la recherche d’hypothétiques clients.

Entre 2010 et 2020, le nombre depersonnes visitant les établisse-ments de la banque a plongé de… 40 %. Si la population âgée de la zone a limité ses sorties pendant l’épidémie de Covid-19 et s’est un peu convertie aux paiements élec-troniques, c’est surtout l’effondre-ment démographique qui pèse sur l’activité du réseau et fait plonger sarentabilité. Entre avril et septem-bre, la Fukushima Bank a encaissé une perte nette de 2,27 milliards de yens (18,3 millions d’euros).

Sur les 102 banques régionalesjaponaises, soixante ont terminé

BANQUE

Le gouvernement nippon a enrôlé la Banque du Japon dans une grande campagne visant à pousser les petites banques locales à accepter de fusionner ou de réduire leurs activités.

Tokyo tente de consolider une centaine de banques régionales

toujours que les dividendes ne soient pas distribués est due au fondement de notre stratégie, qui consiste à per-mettre aux banques d’accorder le maximum de crédits possible. »

La BCE se méfieLa BCE n’a pas fermé la porte à une reprise des dividendes, mais son président chargé de la supervision bancaire, Andrea Enria, semble

méfiant. Dans un courrier envoyé vendredi aux dirigeants de grandes banques européennes, il s’inquiète des différences de niveaux de provi-sions entre les établissements pour faire face aux impayés et leur demande de fournir des explica-tions d’ici au 31 janvier 2021.

Le débat divise la zone euro. Si legouverneur de la Banque de France,François Villeroy de Galhau, s’est montré à la fin novembre favorableà « une ouverture prudente vers une distribution » des dividendes, Claudia Buch, vice-présidente de la Bundesbank, s’y oppose.

La discussion dépasse toutefoisla zone euro. Au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, les régulateurs ont aussi gelé les dividendes cette année. « Les actionnaires ne sont

peut-être pas très heureux, mais vousdevez adopter une perspective plus large, a déclaré lundi Claudio Borio,directeur du département moné-taire et économique à la Banque desrèglements internationaux, considérée comme la banque des banques centrales. Si les banques devaient avoir des problèmes plus graves, ce serait mauvais pour les actionnaires. »

Les investisseurs suivent ce débatcomme le lait sur le feu. Si les ana-lystes de Credit Suisse sont optimis-tes sur le fait que certaines banqueseuropéennes pourront renouer avec les dividendes, ils n’excluent pas qu’elles doivent attendre les résultats des tests de résistance de juillet prochain ou respecter un plafond général de versement. n

Pour la commissaire européenne aux Services financiers, Mairead McGuinness, la recommandation faite aux banques de ne pas verser de dividendes a encore du sens. Photo Kenzo Tribouillard/AFP

« Là où nous pourrions changer d’avis, c’est sile déploiementde la vaccination est réussi et si,d’ici au milieu de l’année prochaine, nous constatons une reprise. »MAIREAD MCGUINNESSCommissaire européenneaux Services financiers

Page 33: Les Echos - 09 12 2020

Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 33

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IA X TRANSFO DIGITALE = 6 LAURÉATS NETEXPLOL’intelligence artificielle comme accélérateur de la transfo dans les grandes entreprises ?C’est le sujet de cette édition Netexplo Change 2020.

BOUYGUES, ERAMET, MAIF, MICHELIN, PSA, RATP DEV :le 9 décembre, en live, 6 grandes entreprises vous présentent leurs initiatives boostées par l ’ IA.6 idées inspirantes, 6 aventures humaines, 6 projets de transformation réussis.Lequel va vous inspirer ?

Laurence Boisseau @boisseaul

Vendredi soir dernier, Elie Cohen, directeur de recherche émérite au CNRS, a reçu une sommation inter-pellative à son domicile, lui laissant 48 heures pour répondre sur ses liens avec Suez. Dans plusieurs médias, il s’était montré critique sur la fusion Veolia-Suez. Elie Cohen, quia assuré n’avoir aucun lien avec Suezet être un observateur indépendant, s’est indigné : « mes analyses leur ont fort déplu. Ils veulent me bâillonner. »

Lundi, c’est au tour de Julien Icard,professeur de droit privé à l’univer-sité d’Assas, de recevoir une visite d’huissier. Sur Twitter, il s’offusque : « je suis sommé, sous menace judi-ciaire, par Veolia de déclarer mes lienséventuels avec Suez parce que j’ai eu l’audace de faire mon boulot, c’est-à-dire de commenter l’arrêt de la cour d’appel dans l’affaire Suez et de répon-dre aux questions juridiques d’une journaliste. »

AccusationsVeolia indique avoir adressé des sommations à d’autres intervenantset experts, sans en dire le nombre. Legroupe dirigé par Antoine Frérot explique sa démarche, affirmant avoir vu fleurir des prises de positionhostiles à son projet, de la part d’experts dans les journaux, à la télévision ou à la radio. « Nous avonstenté de comprendre comment autantd’experts indépendants pouvaient ainsi relayer des raisonnements qui semblaient directement tirés des arguments diffusés par Suez. Et nous avons eu la surprise de découvrir faci-lement que nombre de ces personnes

JUSTICE

Après avoir écrit des tribunes critiquant la fusion Suez-Veolia, des experts ou interve-nants ont été sommés par Veolia de déclarer leurs éventuels liens avec Suez.

étaient peut-être des experts mais pas des indépendants. »

Suez n’a pas manqué de réagir àces accusations. « Nous sommes très surpris d’apprendre que des positionslibres et raisonnées exprimées à l’occasion de la tentative de prise de contrôle hostile de Suez par Veolia puissent donner lieu à des intimida-tions de la part de Veolia mettant en cause l’intégrité des universitaires et chercheurs reconnus qui les portent. La liberté d’expression démocratique est aussi un pilier du capitalisme responsable », a indiqué un porte-parole aux « Echos ».

Un sujet complexeAvant cette affaire, d’autres entre-prises ont tenté des actions en justiceplus ou moins similaires. Xavier Nielavait attaqué, en 2013, un professeurd’économie, Bruno Deffains, ensei-gnant à l’université de Paris-II Pan-théon-Assas, pour dénigrement à la suite d’une étude qui concluait que lelancement d’un quatrième opéra-teur mobile allait détruire des dizai-nes de milliers d’emplois en France. Ses fichiers informatiques avaient été saisis. La justice avait débouté le fondateur d’Iliad.

Le sujet est complexe. Si l’ons’extrait de l’affaire Veolia-Suez, « très souvent dans ces tribunes, on ne sait pas si l’expert qui parle a ou non un intérêt à parler », remarque un fin observateur. Et pour cause, enFrance, rien n’oblige un professeur qui s’exprime sur un sujet à déclarers’il a un intérêt quelconque, ni à s’abstenir si c’est le cas. Il n’est pas rare que certains défendent des inté-rêts privés sans l’indiquer. A l’inverse, dans d’autres pays, il est obligatoire de déclarer tout conflit d’intérêts. « Chacun décide, selon sa propre morale. C’est dommage, cela manque de standard commun en termes de déontologie », explique un professeur de droit. En même temps, certains observateurs s’inter-rogent sur l’initiative consistant à bâillonner la parole d’experts qui seraient indépendants par des menaces de représailles juridiques. Pour eux, il s’agit d’une atteinte manifeste à la liberté d’expression. n

Veolia somme des experts de déclarer d’éventuels liens avec Suez

Gabriel Nedelec @GabrielNedelec

et Edouard Lederer @EdouardLederer

Un métier qui manquait jusque-là àsa panoplie. Crédit Agricole SA (CASA) va prochainement se lanceren direct dans la location de véhicu-les longue durée, a annoncé sa filiale de crédit à la consommation (CACF), lors d’une conférence investisseurs, mardi. Le groupe a déjà un pied dans ce métier via sa coentreprise FCA Bank en Italie, mais la banque verte ouvre ici une nouvelle branche d’activité : elle va créer une nouvelle entité, baptisée «CA Rent », qui sera opérationnelle dès juin 2021.

Avec cette annonce, Crédit Agri-cole vise à « réparer » une forme d’anomalie, puisque, deux de ses

principaux concurrents, Société Générale et BNP Paribas, sont déjà actifs sur ce créneau très lucratif. Leurs filiales respectives, ALD et Arval, visent une flotte de 2,3 mil-lions de véhicules pour l’une et de 2 millions pour l’autre, d’ici à 2025. Le gâteau est appétissant : ALD toutcomme Arval sont particulière-ment rentables.

Impact de la crise sanitaire« Nous n’avons pas la prétention de concurrencer les plus grands dès la première année, mais nous sommes persuadés que CA a besoin de cette corde à son arc », précise Stéphane Priami, le patron de Crédit Agricole Consumer Finance. A l’instar des filiales de Société Générale et de BNP Paribas, CA Rent réservera unepartie de sa flotte aux particuliers.

Avec cette démarche, CréditAgricole veut accompagner « l’évo-lution du monde de la mobilité », précise le groupe. « L’un des ensei-gnements de la crise du Covid-19, c’est l’accélération d’une réflexion entermes de propriété à une réflexion en termes de mobilité. La location, qu’il s’agisse de location avec option d’achat ou de location longue durée, peut répondre à cette évolution », détaille Stéphane Priami.

Le développement de cette offretombe aussi à point pour répondre aux conséquences économiques dela crise sanitaire. Selon le dirigeant,elle n’a pas provoqué de dégrada-tion majeure du risque « avéré » surses crédits. Le confinement a, en revanche, pesé sur la production.

Sur les neuf premiers mois del’année, CACF a enregistré 1,49 mil-liard d’euros de revenus (sous-jacent), en recul de 8 % sur un an. Son résultat net part du groupe a chuté de 23 % sur la période (tou-jours en sous-jacent) à 375 millions d’euros.

C o n s é q u e n c e : l e g r o u p erepousse d’un an, à 2023, son objec-tif de parvenir à 108 milliards d’euros d’encours de crédit, contre 88 milliards d’euros actuellement. Pour y parvenir, il compte donc pousser les feux, notamment dans

le financement automobile. Et pourcause : c’est la branche la plus dyna-mique du crédit à la consomma-tion. Selon les chiffres de l’associa-tion professionnelle du secteur (ASF), elle a enregistré une produc-tion en hausse de 26 % au troisièmetrimestre (sur un an), là où le mar-ché dans son ensemble ne gagnait que 2,6 %.

Autre levier que CACF compteactionner : le déploiement « dans l’ensemble des pays du modèle de ser-

vices déjà éprouvé au sein des ban-ques de proximité du Groupe Crédit Agricole ». Autrement dit assurer la contraction du prêt, son suivi, voireaccompagner son recouvrement, pour le compte d’un établissement prêteur. Un service qu’il rend déjà aux banques du groupe mutualiste.

De même à l’international, ilvisera une dizaine de nouveaux partenariats bancaires. Le sujet est notamment sensible en Espagne, où Bankia – en raison de son

mariage avec CaixaBank – a décidé d’interrompre son partenariat dansle « crédit conso » avec Crédit Agri-cole. Les deux établissements avaient récemment créé une coen-treprise, SoYou, dont l’avenir dépend des discussions en cours entre les deux anciens partenaires. Sur le papier, trois pistes restent possibles : une gestion extinctive, lepassage à 100 % sous la houlette de Crédit Agricole ou l’arrivée d’un nouveau coactionnaire. n

BANQUE

Crédit Agricole va créer une entité, CA Rent, pour couvrir le segment de la location longue duréedans l’automobile.

Crédit Agricole se lance dans le leasing automobile

En France, la production de financement automobile a progressé de 26 % au troisième trimestre(sur un an), selon les chiffres de l’ASF. Photo iStock

Page 34: Les Echos - 09 12 2020

34 // FINANCE & MARCHES Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

CAC 40

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

AIR LIQUIDE (AI) R A 135,7 135,1 - 0,81 + 7,05 823748 136,1 - 2,03 144,45 FR0000120073 11/05/20 2,7 473.593.425 135,05 + 10,38 94,86 2AIRBUS GROUP (AIR) R A 94,81 94,73 - 0,5 - 27,4 3,4 1346764 95,85 +35,33 139,4 27,90NL0000235190 15/04/19 1,4 784.149.270 94,11 - 25,43 48,12 1,74ALSTOM (ALO) R A 44,15 44,69 + 1,48 + 14,13 1027568 44,79 +19,8 46,956 FR0010220475 15/07/19 5,5 226.926.854 44,07 + 18,94 27,567 ARCELORMITTAL (MT) R A 17,3 17,218 - 1,33 + 10,08 6727705 17,344 +36,52 17,854 LU1598757687 16/05/19 0,15 1.102.809.772 16,772 + 6,94 5,98 ATOS SE (ATO) R A 74,24 74,04 - 0,3 - 0,38 328136 74,36 +16,93 82,46 FR0000051732 03/05/19 1,7 109.993.166 73,6 - 2,09 43,26 AXA (CS) R A 19,698 19,654 - 0,53 - 21,73 4718578 19,828 +24,93 25,615 FR0000120628 07/07/20 0,73 2.424.373.785 19,502 - 20,91 11,844 3,71BNP PARIBAS (BNP) R A 44,3 44,285 - 0,49 - 16,17 2887032 44,74 +33,27 54,22 FR0000131104 29/05/19 3,02 1.249.798.561 44,035 - 13,06 24,505 BOUYGUES (EN) R A 34,72 34,65 - 0,26 - 8,53 627263 34,92 +16,43 41,32 FR0000120503 09/09/20 1,7 380.702.792 34,42 - 7,23 22,27 4,91CAP-GEMINI (CAP) R A 117,3 118 + 0,55 + 8,36 285556 118,05 + 6,88 121,65 FR0000125338 03/06/20 1,35 165.784.837 116,8 + 10,64 51,78 1,14CARREFOUR (CA) R A 13,665 13,685 + 0,22 - 8,46 2578997 13,69 + 2,05 16,915 FR0000120172 08/06/20 0,23 817.623.840 13,505 - 9,13 12,095 1,68CREDIT AGRICOLE (ACA) R A 10,65 10,445 - 2,66 - 19,19 9485082 10,68 +40,5 13,8 FR0000045072 24/05/19 0,69 2.884.688.712 10,39 - 16,94 5,7 DANONE (BN) R A 51,64 52,2 + 0,73 - 29,36 1700020 52,34 + 5,14 75,16 FR0000120644 14/07/20 2,1 686.629.600 51,08 - 29,91 46,03 4,02DASSAULT SYSTEMES (DSY) R A 153,9 154,8 + 0,55 + 5,63 329336 155,55 + 0,39 164,15 FR0000130650 28/05/20 0,7 264.919.418 153,65 + 6,54 105 0,45ENGIE (ENGI) R A 12,5 12,375 - 1,32 - 14,06 1,21 5537297 12,535 +12,14 16,795 10,26FR0010208488 21/05/19 0,8 2.435.285.011 12,305 - 15,24 8,626 ESSILORLUXOTTICA (EI) R A 127 127,35 - 0,16 - 6,22 534584 127,75 +13,4 145 FR0000121667 21/05/19 2,04 438.611.346 126,45 - 8,22 86,76 HERMES INTL (RMS) R A 830,8 829,8 - 0,24 + 24,56 50315 834,4 - 0,55 865 FR0000052292 28/04/20 3,05 105.569.412 827,4 + 24,63 516 0,37KERING (KER) R A 582,6 584,9 - 0,76 - 0,05 151178 590,1 + 3,07 628,2 FR0000121485 23/06/20 4,5 126.279.322 580,5 + 6,52 348,55 0,77L.V.M.H. (MC) R A 492,05 494,45 + 0,15 + 19,37 323337 496,85 +13,54 500,5 FR0000121014 01/12/20 2 504.757.339 489,9 + 23,2 278,7 0,4LEGRAND (LR) R A 69,9 70,2 + 0,57 - 3,36 419848 70,34 + 1,15 77,94 FR0010307819 01/06/20 1,34 267.447.746 69,56 - 3,68 45,91 1,91L'ORÉAL (OR) R A 303,6 304,8 + 0,26 + 15,45 293805 305,4 + 2,63 321,4 FR0000120321 03/07/20 3,85 559.856.576 301,9 + 18,74 196 1,26

MICHELIN (ML) R A 104,35 104,9 + 0,24 - 3,85 602844 105,6 + 7,92 112,8 FR0000121261 01/07/20 2 178.339.302 103,8 - 3,58 68 1,91ORANGE (ORA) R A 10,21 10,245 + 0,44 - 21,91 7233098 10,255 + 8,69 13,545 FR0000133308 07/12/20 0,4 2.660.056.599 10,12 - 24,61 8,632 3,9PERNOD-RICARD (RI) R A 156,35 156,9 - 0,32 - 1,57 414750 157,5 + 6,34 171,1 FR0000120693 08/07/20 1,18 261.876.560 154,9 - 3,86 112,25 0,75PEUGEOT (UG) R A 20,44 20,43 - 0,44 - 4,08 2490652 20,59 +24,04 22,01 FR0000121501 02/05/19 0,78 894.828.213 20,3 - 5,02 8,878 PUBLICIS GROUPE (PUB) R A 39,35 39,22 - 0,51 - 2,82 1083667 39,48 +24,86 43,7 FR0000130577 07/09/20 1,15 247.748.484 38,59 - 2,17 20,94 2,93RENAULT (RNO) R A 35,38 35,175 - 1,39 - 16,61 1462061 35,915 +54,89 43,365 FR0000131906 18/06/19 3,55 295.722.284 34,885 - 15,89 12,77 SAFRAN (SAF) R A 122,2 122 - 0,2 - 11,37 618787 123,5 +23,06 152,3 FR0000073272 27/05/19 1,82 427.235.939 121,8 - 17,79 51,1 SAINT-GOBAIN (SGO) R A 39,52 39,23 - 0,73 + 7,48 1565140 39,95 + 5,06 40,8 FR0000125007 10/06/19 1,33 532.683.713 39,15 + 4,14 16,408 SANOFI (SAN) R A 82 82,38 - 0,53 - 8,08 1906453 82,59 - 1,13 95,82 FR0000120578 04/05/20 3,15 1.258.964.700 81,16 - 1,41 67,65 3,82SCHNEIDER ELECTRIC (SU) R A 114,3 115,1 + 0,61 + 25,79 945567 115,55 + 1,63 121,8 FR0000121972 05/05/20 2,55 567.068.555 113,3 + 27,07 61,72 2,22SOCIÉTÉ GÉNÉRALE (GLE) R A 17,62 17,522 - 1,53 - 43,5 4675371 17,848 +33,96 32,23 FR0000130809 27/05/19 2,2 853.371.494 17,406 - 40,31 10,774 STMICROELETRONICS (STM) R A 34,5 33,97 - 1,28 + 41,72 0,23 2011490 34,68 +17,22 34,68 149,48NL0000226223 21/09/20 0,04 911.204.420 33,97 + 47,7 13,73 0,12TELEPERFORMANCE (RCF) R A 272,5 277,8 + 2,02 + 27,78 130771 278,4 - 4,9 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 272,1 + 29,93 150,3 0,86THALES (HO) R A 80,1 79,1 - 1,37 - 14,5 287300 80,34 +25 99,96 FR0000121329 01/12/20 0,4 213.364.420 78,86 - 10,07 52,5 0,51TOTAL (FP) R A 36,755 36,95 - 0,57 - 24,9 5193516 37,165 +33,73 50,93 FR0000120271 25/09/20 0,66 2.653.124.025 36,55 - 22,95 21,12 1,79UNIBAIL-R/WFD (URW) R A 60,84 61,88 + 0,88 - 56 689672 62,1 +79,88 142,05 FR0013326246 24/03/20 5,4 138.472.385 60,66 - 56,41 29,08 VEOLIA ENV. (VIE) R A 19,8 19,875 + 0,43 - 16,17 1402739 19,945 +18,69 29,09 FR0000124141 12/05/20 0,5 567.266.539 19,73 - 13,44 15,675 2,52VINCI (DG) R A 86,5 85,92 - 1,08 - 13,21 983026 87,1 +16,83 107,35 FR0000125486 23/06/20 1,25 613.519.218 85,28 - 12,54 54,76 1,46VIVENDI (VIV) R A 24,93 25,14 + 0,96 - 2,63 2964697 25,21 - 1,45 26,65 FR0000127771 21/04/20 0,6 1.185.938.395 24,9 + 1,78 16,6 2,39WORLDLINE (WLN) G A 75,1 74,6 - 0,29 + 18,13 669478 76,82 + 5,37 82,66 FR0011981968 279.122.471 74,56 + 27,52 36,36

A.S.T. GROUPE (ASP) g C 4,13 4,22 + 2,93 + 17,55 16337 4,22 +14,05 4,3 FR0000076887 19/06/19 0,25 12.903.011 4,02 + 34,39 1,82 AB SCIENCE (AB) g B 10,42 10,26 - 1,54 + 90,71 86379 10,54 + 7,21 13,78 FR0010557264 45.145.024 10,12 +101,18 4,81 ABC ARBITRAGE (ABCA) g B 7,34 7,3 - 0,27 + 8,96 14164 7,34 - 2,54 7,58 FR0004040608 08/12/20 0,1 58.512.053 7,3 + 9,12 5,05 1,37ABIVAX (ABVX) g B 22,9 22,5 - 1,75 - 0,22 12024 22,9 +16,58 25 FR0012333284 13.851.239 22,1 + 62,1 10,4 ACCOR (AC) LR A 31,31 31,13 - 0,99 - 25,44 675322 31,53 +35,41 42,24 FR0000120404 10/05/19 1,05 261.288.260 30,94 - 19,69 20,15 ACTIA GROUP (ATI) g C 2,72 2,69 - 0,92 - 37,59 21097 2,72 +32,51 4,625 FR0000076655 21/09/20 0,15 20.099.941 2,69 - 30,58 1,74 5,58ADOCIA (ADOC) g B 8,1 8,08 - 18,38 13357 8,26 +14,94 16,18 FR0011184241 6.977.854 8,04 - 3,46 5,6 AÉROPORTS DE PARIS (ADP) G A 107 106,8 - 0,19 - 39,35 64428 107,6 +23,83 179,2 FR0010340141 06/12/19 0,7 98.960.602 106,1 - 39,76 70,7 AIR FRANCE-KLM (AF) LR A 5,388 5,17 - 3,04 - 47,9 5059835 5,388 +68,13 10,27 FR0000031122 14/07/08 0,58 428.634.035 5,152 - 49,66 2,614 AKKA TECHNOLOGIES (AKA) Gg B 27,45 26,3 - 3,31 - 55,83 101516 27,45 +46,44 62,273 FR0004180537 28/06/19 0,49 20.291.990 25,85 - 50,03 14,54 2,66AKWEL (AKW) g B 21,65 21,2 - 1,17 + 4,95 7206 21,8 +32 22,5 FR0000053027 08/06/20 0,2 26.741.040 21 + 5,47 8,8 0,92ALBIOMA (ABIO) Gg B 41 41,5 + 1,47 + 59,62 66513 41,55 - 6 47,6 FR0000060402 11/06/20 0,35 31.641.910 40,6 + 72,92 22,85 0,84ALD (ALD) G A 11,32 11,44 + 1,06 - 17,34 104199 11,44 +13,49 14,2 FR0013258662 29/05/20 0,63 404.103.640 11,28 - 15,63 6,29 5,51ALPES (CIE DES ) (CDA) g B 19,7 19,64 - 1,8 - 34,2 25381 19,9 +35,08 30,95 FR0000053324 10/03/20 0,7 24.510.101 19,2 - 32,97 13,16 3,56ALTAREA (ALTA) A 136,4 133,4 - 3,33 - 34,12 10069 137,6 +14,41 210 FR0000033219 06/07/20 4,5 17.275.839 132 - 31,38 103,2 ALTEN (ATE) G A 89,6 90,65 + 1,17 - 19,42 27982 90,85 +20,23 119 FR0000071946 20/06/19 1 34.205.863 89,05 - 16,22 54,5 AMUNDI (AMUN) G A 66,2 66,55 + 0,61 - 4,79 EX-DS 15/03/17 104411 66,8 + 8,21 78,55 FR0004125920 24/05/19 2,9 202.585.953 65,75 - 4,04 43,82 ARCHOS (JXR) g C 0,035 0,035 - 1,7 - 67,57 3868704 0,036 + 2,06 0,115 FR0000182479 167.279.961 0,035 - 52,47 0,025 ARGAN (ARG) A 79,6 78 - 2,26 + 0,52 3631 79,6 - 4,18 93 FR0010481960 26/03/20 1,9 22.309.227 77,6 + 7,44 54 ARKEMA (AKE) LR A 93 94,04 + 0,97 - 0,7 176940 94,04 + 7,75 99,52 FR0010313833 25/05/20 2,2 76.736.476 92,68 - 1,36 42,5 2,34ARTMARKET.COM (PRC) g C 7,44 7,52 - 1,57 - 20,93 20408 7,66 +11,57 10,1 FR0000074783 6.651.515 7,36 - 15,6 5,01 ASSYSTEM (ASY) B 25,4 25,35 - 21,52 OPA 24/11/17 1504 25,4 +11,18 34,65 FR0000074148 08/07/20 1 15.668.216 25,05 - 18,49 16,58 3,95ATARI (ATA) g C 0,38 0,383 + 16,21 883679 0,39 + 3,1 0,494 FR0010478248 269.809.814 0,379 + 26,49 0,17 AUBAY (AUB) g C 34,35 35,25 + 2,62 + 5,38 8055 35,7 +13,53 35,7 FR0000063737 06/11/20 0,33 13.208.296 34,35 + 3,22 15,32 0,94AXWAY SOFTWARE (AXW) g B 23,9 24,1 + 0,84 + 94,35 4933 24,4 +15,87 24,5 FR0011040500 02/07/19 0,4 21.316.266 23,6 +105,11 10,55 BAINS MER MONACO (BAIN) B 61,4 62,6 + 2,29 + 9,06 1936 63 + 2,62 67,6 MC0000031187 26/09/14 0,01 24.516.661 61,4 + 14,65 44 BÉNÉTEAU (BEN) g B 8,96 9,07 + 1,23 - 16,25 57492 9,13 +12,18 10,9 FR0000035164 12/02/20 0,23 82.789.840 8,915 - 13,45 4,9 2,54BIC (BB) G A 50,4 50,65 + 0,3 - 18,31 52130 50,85 +19,18 66,05 FR0000120966 01/06/20 2,45 45.532.240 50,1 - 19,02 38,5 4,84BIGBEN INT. (BIG) g C 19,2 19,6 + 2,83 + 22,19 90013 19,6 +30,32 19,8 FR0000074072 24/07/19 0,2 19.969.658 19,08 + 31,9 8,1 BIOMÉRIEUX (BIM) G A 116,8 119,2 + 2,14 + 50,22 90669 119,5 -10,85 144,8 FR0013280286 14/07/20 0,19 118.361.220 116,6 + 45,1 75 0,16BOIRON (BOI) g A 36,75 36,9 - 0,27 + 1,37 6103 37,6 - 4,16 44,8 FR0000061129 02/06/20 1,05 17.545.408 36,75 + 11,14 26,75 2,85BOLLORÉ (BOL) G A 3,242 3,266 + 0,99 - 16,04 1450456 3,312 + 2,06 3,996 FR0000039299 02/09/20 0,02 2.946.208.874 3,24 - 15,08 2,01 0,61BONDUELLE (BON) g B 20,55 20,45 - 0,49 - 12,23 9393 20,6 + 7,97 23,9 FR0000063935 06/01/20 0,5 32.538.340 20,15 - 11,28 16,58 2,45BUREAU VERITAS (BVI) LR A 22,42 22,81 + 1,51 - 1,93 891753 22,83 +13,48 26,01 FR0006174348 20/05/19 0,56 452.204.032 22,23 - 3,8 15,165 BURELLE SA (BUR) A 788 780 - 1,27 - 4,65 162 790 +51,75 842 FR0000061137 03/06/20 15 1.757.623 780 + 1,04 407 1,92CARMILA (CARM) g C 12,42 11,9 - 4,65 - 40,5 158123 12,48 +71,22 20 FR0010828137 03/07/20 1 142.357.425 11,88 - 34,76 6,54 CASINO (CO) G A 25,4 25,35 - 0,35 - 39,21 237121 25,45 +22,05 42,85 FR0000125585 09/05/19 1,56 108.426.230 24,68 - 41,32 19,045 6,15CATANA GROUP (CATG) g C 2,79 2,815 + 0,9 - 34,99 107938 2,89 +34,69 4,49 FR0010193052 30.514.178 2,79 - 11,48 1,7

CGG (CGG) G A 0,898 0,879 - 3,24 - 69,64 18596255 0,912 +83,62 3,121 FR0013181864 711.324.929 0,835 - 63,9 0,443 CHARGEURS (CRI) g C 17,36 17,72 + 1,26 + 2,55 72541 17,9 - 2,85 24,1 FR0000130692 16/09/20 0,28 24.211.232 17,36 + 16,58 7,9 1,58CHRISTIAN DIOR (CDI) A 441,4 441 - 0,27 - 3,46 EX D OP 08/06/17 8409 444,8 + 9,59 479,8 FR0000130403 01/12/20 2 180.507.516 439,2 - 1,61 252,4 0,45CNP ASSURANCES (CNP) G A 13,21 13,32 + 0,15 - 24,87 507941 13,36 +26,38 18,17 FR0000120222 26/04/19 0,89 686.618.477 13,04 - 25,71 5,3 COFACE (COFA) G A 8,53 8,52 - 0,58 - 22,33 170464 8,68 +13,15 12,51 FR0010667147 22/05/19 0,79 152.031.949 8,51 - 19,17 4,448 COLAS (RE) A 119,5 118,5 - 15,84 986 119,5 + 8,72 143 FR0000121634 08/09/20 6,4 32.654.499 118 - 16,31 90 5,4COVIVIO (COV) G A 77,25 77,85 + 0,45 - 23,07 180726 78,65 +45,79 112,2 FR0000064578 27/04/20 4,8 94.544.232 76,95 - 23 38,84 COVIVIO HOTELS (COVH) A 17,65 19,1 + 8,52 - 32,98 12878 19,2 +49,22 30 FR0000060303 13/05/20 1,55 132.547.616 17,5 - 33,45 11,6 DASSAULT AV. (AM) G A 924 919 - 0,65 - 21,45 5242 926,5 +19,82 1192 FR0000121725 22/05/19 21,2 8.348.703 917 - 20,29 624 DBV TECHNOLOGIES (DBV) G B 4,626 4,7 + 1,91 - 76,06 1178557 4,78 +25,07 25,44 FR0010417345 54.927.187 4,52 - 67,16 2,352 DERICHEBOURG (DBG) g B 4,598 4,312 - 5,52 + 18,14 1153339 4,7 +53,78 4,7 FR0000053381 07/02/20 0,11 159.397.489 4,218 + 23,91 2,07 2,55DEVOTEAM (DVT) g C 98 98,1 + 0,2 + 3,81 3604 98,1 + 0,2 99,1 FR0000073793 03/07/19 1 8.332.407 97,9 + 8,64 47,25 EDENRED (EDEN) LR A 47,74 47,2 - 1,03 + 2,39 346616 47,74 +13,84 51,56 FR0010908533 13/05/20 0,7 246.583.351 47,16 + 7,01 29,74 1,48EDF (EDF) LR A 12,845 12,715 - 1,28 + 28,07 EX-DS 7/03/17 2333541 12,92 +21,97 13,61 FR0010242511 26/11/19 0,15 3.099.923.579 12,63 + 34,98 5,978 EIFFAGE (FGR) LR A 83,66 82,46 - 1,58 - 19,16 173300 84 +21,41 111,75 FR0000130452 21/05/19 2,4 98.000.000 82,04 - 16,89 44,65 EKINOPS (EKI) g C 6,68 6,6 - 1,2 - 0,15 40766 6,68 +13,6 7 FR0011466069 25.448.179 6,58 + 37,07 3,67 ELIOR (ELIOR) G A 5,98 5,81 - 2,84 - 55,65 988459 5,98 +63,11 13,83 FR0011950732 07/04/20 0,29 174.147.823 5,745 - 54,57 3,062 4,99ELIS (ELIS) G A 13,8 13,78 - 0,79 - 25,51 255486 14,02 +31,61 19 FR0012435121 27/05/19 0,37 221.807.226 13,74 - 25,03 5,375 EOS IMAGING (EOSI) g C 1,67 1,762 + 5,01 - 20,45 591106 1,772 +31,1 2,9 FR0011191766 26.569.946 1,67 - 13,84 1,18 ERAMET (ERA) G A 39,95 40,6 + 1,5 - 11,43 60498 40,84 +57,43 47,18 FR0000131757 29/05/19 0,6 26.636.003 39,86 + 1 18,665 ERYTECH PHARMA (ERYP) g B 8,84 8,13 - 7,09 + 21,34 348283 8,89 +38,27 11,46 FR0011471135 19.088.731 7,96 + 94,03 2,8 ESI GROUP (ESI) g C 42,3 42,3 + 30,15 6136 42,3 + 8,74 43,6 FR0004110310 6.028.192 41,8 + 46,88 24,6 EURAZEO (RF) G A 54,15 54,05 - 0,55 - 11,39 77803 54,25 +28,45 67,05 FR0000121121 08/05/19 1,25 79.000.522 53,45 - 12,19 35,6 EUROFINS SCIENT. (ERF) LR A 63,03 64,99 + 3,21 + 31,51 379886 65,39 -11,46 75,4 FR0014000MR3 03/07/19 2,45 190.742.750 62,81 + 32,36 39,3 4,43EUROPCAR GROUPE (EUCAR) g B 0,902 0,859 - 3,7 - 80,18 4257577 0,906 +49,13 4,688 FR0012789949 21/05/19 0,26 163.884.278 0,824 - 78,84 0,492 EUTELSAT COM. (ETL) G A 9,484 9,418 - 0,38 - 35 567011 9,49 + 6,15 14,825 FR0010221234 20/11/20 0,89 230.544.995 9,332 - 36,3 7,984 9,45EXEL INDUSTRIES (EXE) B 45,4 47,9 + 5,74 + 2,79 1224 49,1 +23,45 49,1 FR0004527638 13/02/19 1,14 6.787.900 45,4 + 14,32 31 FAURECIA (EO) LR A 40,61 40,88 + 0,44 - 14,89 313422 41,1 +29,04 49,49 FR0000121147 31/05/19 1,25 138.035.801 40,05 - 14,39 20,58 FDJ (FDJ) G A 35,06 35,84 + 2,52 + 50,43 225374 35,84 + 3,94 36,09 FR0013451333 26/06/20 0,45 191.000.000 34,91 + 61,62 18,3 1,26FFP (FFP) g A 92,5 91,1 - 2,57 - 12,4 9295 92,5 +20,66 105,6 FR0000064784 22/05/20 2,15 24.922.589 90,7 - 11,9 42,15 2,36FIGEAC AERO (FGA) g B 4,405 4,4 - 0,11 - 52,69 14399 4,48 +57,71 9,69 FR0011665280 31.839.473 4,385 - 60,92 2,415 FIN. ODET (ODET) A 738 732 + 0,27 - 6,39 60 740 + 3,1 810 FR0000062234 04/06/20 1 6.585.990 732 - 7,34 497 0,14FNAC DARTY (FNAC) G A 47,22 47,56 + 0,47 - 9,92 56341 47,84 +25,42 53,85 FR0011476928 26.608.571 46,6 - 8,19 16,29 FONCIÈRE LYONNAISE (FLY) A 66,2 67 + 1,21 - 9,21 1518 67 +24,54 83,4 FR0000033409 21/04/20 2,65 46.528.974 64,8 - 5,9 51 GECI INTERNATIONAL (GECP) g C 0,017 0,017 + 0,6 - 48,78 5342117 0,017 -25,33 0,07 FR0000079634 01/10/01 0,1 315.583.099 0,017 - 46,67 0,016 GECINA (GFC) LR A 128 128,4 - 1 - 19,55 90596 130,7 +13,73 183,6 FR0010040865 01/07/20 2,5 76.463.771 128 - 17,9 88,5 GENFIT (GNFT) G B 4,55 4,67 + 2,64 - 73,54 586149 4,694 +39,15 20,96 FR0004163111 38.858.617 4,46 - 67,61 3,022 GENSIGHT (SIGHT) g C 6,92 6,81 - 1,87 +174,04 287936 6,96 +70,25 7,8 FR0013183985 39.693.012 6,71 +475,17 1,36

GETLINK (GET) LR A 13,95 13,9 - 0,57 - 10,38 649264 14,01 +14,22 17,04 FR0010533075 23/05/19 0,36 550.000.000 13,78 - 8,85 8,615 GL EVENTS (GLO) g B 10,98 11,62 + 6,41 - 51,68 149945 11,82 +53,3 24,45 FR0000066672 01/07/19 0,65 29.982.787 10,78 - 50,13 6,4 GROUPE CRIT (CEN) g B 61,2 61,5 + 0,49 - 16,44 5789 62,5 +12,84 74,4 FR0000036675 26/06/19 1 11.250.000 60,6 - 13,14 36,15 1,63GROUPE GORGÉ (GOE) g B 13,4 13,4 + 0,45 - 21,36 2945 13,46 + 9,3 19 FR0000062671 01/07/20 0,32 13.502.843 13,32 - 15,3 8,59 2,39GTT (GTT) G A 80,15 80 - 0,25 - 6,32 48357 80,35 - 4,13 102,7 FR0011726835 03/11/20 2,5 37.078.357 79,35 - 1,84 48,76 3,13GUERBET (GBT) g B 32 31,75 - 23,12 6306 32 + 6,54 44,1 FR0000032526 30/06/20 0,7 12.600.874 31,2 - 39,64 24,05 2,21HAULOTTE GROUP (PIG) g B 5,44 5,5 + 1,29 + 3,77 95100 5,6 +40,85 5,78 FR0000066755 15/07/20 0,22 31.371.274 5,4 + 12,02 3,27 4HEXAOM (HEXA) g B 35,3 35,8 + 1,42 - 2,72 2370 35,9 +12,58 39,8 FR0004159473 11/06/19 1,5 6.937.593 35,3 + 7,35 21,7 HIGH CO (HCO) g C 4,98 4,96 - 0,2 - 18,42 5645 4,99 +11,71 6,32 FR0000054231 24/05/19 0,16 22.421.332 4,91 - 17,33 2,95 ICADE (ICAD) G A 67,2 65,4 - 3,61 - 32,61 177914 68 +44,69 106 FR0000035081 06/07/20 1,6 74.535.741 64,9 - 30,05 41,88 ID LOGISTIC (IDL) g A 200 206,5 + 3,25 + 14,47 5640 206,5 - 1,67 220 FR0010929125 5.649.427 199,4 + 7,44 115 IMERYS (NK) G A 37,24 37,32 - 0,11 - 0,96 61299 37,56 +34,34 43,54 FR0000120859 15/05/20 1,72 85.015.055 37 + 2,92 20,68 4,61INNATE PHARMA (IPH) g B 4,476 4,434 - 1,64 - 25,6 294438 4,53 +26,69 7,48 FR0010331421 78.980.640 4,388 - 21,8 2,9 INTERPARFUMS (ITP) g A 42,55 43 + 0,82 + 27,84 10683 43,1 + 4,12 44,65 FR0004024222 02/05/19 0,71 51.988.409 42,3 + 29,59 23,682 IPSEN (IPN) G A 67,2 68,75 + 1,4 - 12,97 246756 68,95 -17,62 95,9 FR0010259150 03/06/20 1 83.814.526 66,6 - 18,2 34,2 1,46IPSOS (IPS) G A 27,95 28,25 + 0,89 - 2,42 53535 28,25 +25,84 32,1 FR0000073298 01/07/20 0,45 44.436.235 27,8 + 1,44 15,82 1,59JACQUET METAL SERVICE (JCQ) g B 12,68 12,6 - 0,47 - 18,29 129105 13,78 +25,5 15,86 FR0000033904 01/07/20 0,2 23.461.313 12,4 - 14,17 7,6 1,59JCDECAUX (DEC) G A 20 19,7 - 1,8 - 28,31 219952 20,1 +47,9 27,74 FR0000077919 21/05/19 0,58 212.902.810 19,48 - 24,69 12,26 KAUFMAN & BROAD (KOF) g B 36 36,9 + 1,51 - 0,27 20144 36,9 + 8,69 41,86 FR0004007813 08/06/20 1,75 22.088.023 36 + 0,22 19,4 4,74KLEPIERRE (LI) LR A 19,565 19,1 - 3,78 - 43,57 1420317 19,86 +67,03 34,66 FR0000121964 07/07/20 1,1 299.939.198 18,945 - 42,17 10,05 KORIAN (KORI) G A 29,8 28,98 - 2,88 - 25,8 125816 29,8 +11,38 42,54 FR0010386334 11/06/19 0,6 105.038.158 28,8 - 24,1 23,441 LAGARDÈRE (MMB) G A 20,66 20,44 - 1,64 + 5,2 119970 20,72 +11,94 28,48 FR0000130213 14/05/19 1,3 131.133.286 20,1 + 3,23 8,14 LDC (LOUP) A 99,8 99,6 - 0,2 - 4,69 1341 100 - 0,4 110,5 FR0013204336 25/08/20 1,2 17.134.471 99,4 - 7,35 74,2 1,21LNA SANTÉ (LNA) g B 48,2 48,2 - 2,72 1225 48,4 + 2,23 53 FR0004170017 08/07/20 0,45 9.705.937 48 - 1,33 31,75 0,93LECTRA (LSS) g B 24,3 24,3 - 0,21 + 8,72 8636 24,6 +31,35 24,85 FR0000065484 06/05/20 0,4 32.347.211 24,25 + 8,48 12,2 1,65LINEDATA SVICES (LIN) g B 26,6 27,3 + 4,6 + 2,25 11977 27,3 + 7,48 30,9 FR0004156297 06/07/20 0,95 6.625.726 26,6 + 5,41 18 3,48LISI (FII) g A 21,1 21,15 - 29,62 10067 21,25 +33,86 32,7 FR0000050353 30/04/19 0,44 54.114.317 21,05 - 32,43 12,5 LUMIBIRD (LBIRD) g C 12,78 13,3 + 4,89 - 11,93 21251 13,32 +26,91 15,499 FR0000038242 22.466.882 12,68 + 4,75 5,365 M6-MÉTROPOLE TV (MMT) G A 13,1 13,3 + 1,84 - 20,74 237603 13,48 +32,47 17,07 FR0000053225 15/05/19 1 126.414.248 13,02 - 15,23 8,55 MAISONS DU MONDE (MDM) G B 14,95 15,28 + 1,66 + 17,81 110507 15,6 +28,73 15,6 FR0013153541 02/07/19 0,47 45.241.894 14,91 + 20,5 5,35 MANITOU (MTU) g B 21,2 21,45 + 0,7 7045 21,65 +14,1 22,3 FR0000038606 17/06/19 0,78 39.668.399 20,9 + 10,23 11,36 MARIE BRIZARD W & S (MBWS) g C 1,44 1,422 - 11,24 7368 1,44 +12,5 1,7 FR0000060873 27/09/07 0,5 44.698.844 1,422 - 27 0,651 MAUNA KEA (MKEA) g C 1,47 1,424 - 1,79 + 4,25 140115 1,476 +24,91 2 FR0010609263 30.558.480 1,38 + 51,17 0,566 MERCIALYS (MERY) G A 7,165 6,975 - 2,86 - 43,43 614434 7,26 +66,39 12,64 FR0010241638 27/04/20 0,48 92.049.169 6,88 - 41,97 3,89 MERSEN (MRN) g B 25,1 25 - 26,79 19185 25,15 + 6,38 35,3 FR0000039620 03/07/19 0,95 20.858.964 24,8 - 26,04 12,38 METABOLIC EXPLORER (METEX) g C 2,62 2,52 - 3,82 + 63,64 411238 2,62 +52,73 2,72 FR0004177046 27.813.800 2,44 + 80,52 0,921 NANOBIOTIX (NANO) g B 12,76 12,4 - 2,67 + 49,76 179071 12,76 +89,31 14,82 FR0011341205 13/05/19 26.037.122 12,22 + 64,78 3,54 NATIXIS (KN) G A 2,678 2,664 - 0,82 - 32,69 6126504 2,695 +31,23 4,411 FR0000120685 31/05/19 0,78 3.155.951.502 2,634 - 28,9 1,471 NEOEN (NEOEN) G A 48,65 48,65 + 0,52 + 57,44 107509 49,05 - 2,7 52,9 FR0011675362 85.490.712 47,85 + 92,29 25,3 NEXANS (NEX) G A 53,95 53,9 - 0,65 + 23,94 80261 54,35 +26,76 54,5 FR0000044448 17/05/19 0,3 44.105.941 53,3 + 37,5 21,55 NEXITY (NXI) G A 33,8 33,4 - 1,77 - 25,41 139986 33,96 +34,35 46,2 FR0010112524 25/05/20 2 56.129.724 33 - 26,53 22,04 5,99NICOX (COX) g B 4,45 4,32 - 3,03 - 0,8 475310 4,45 +12,79 6,27 FR0013018124 33.491.370 4,305 + 11,48 2,53 NRJ GROUP (NRG) B 5,82 5,82 - 0,34 - 13,13 5745 5,82 + 8,18 6,88 FR0000121691 03/06/19 0,17 78.107.621 5,78 - 3,32 4,5 ONXEO (ONXEO) g B 0,76 0,75 - 1,58 + 35,14 71776 0,768 +13,64 0,979 FR0010095596 78.317.810 0,75 + 42,59 0,3 ORPÉA (ORP) LR A 106 105,85 - 0,14 - 7,39 94001 106,05 +15,83 129 FR0000184798 12/07/19 1,2 64.615.837 104,8 - 6,82 69,1 PHARMAGEST INT. (PHA) g B 95,6 94,6 - 1,46 + 56,11 11507 95,7 + 5,94 100,8 FR0012882389 01/07/20 0,9 15.174.125 93,5 + 60,07 41,25 0,95PIERRE & VACANCES (VAC) g B 15,1 14,75 - 2,32 - 26,98 28478 15,35 +35,32 33,9 FR0000073041 19/03/12 0,7 9.893.463 14,3 - 14,04 9,08 PLASTIC OMNIUM (POM) G A 28,7 28,68 - 0,07 + 15,18 121153 28,94 +45,07 31,48 FR0000124570 29/04/20 0,49 148.566.107 28,46 + 14,95 12,01 1,71PLASTIVALOIRE (PVL) g B 6,28 6,15 - 2,07 - 11,13 DIV 8 02/05/17 59607 6,28 +72,75 7,48 FR0013252186 18/04/19 0,2 22.125.600 5,8 - 13,38 2,79 PROLOGUE (PROL) g C 0,368 0,339 - 6,35 - 0,88 206005 0,368 +48,68 0,41 FR0010380626 46.585.630 0,332 - 6,87 0,15 QUADIENT (QDT) g B 16,87 16,63 - 1,42 - 22,94 131657 17,03 +39,05 24,3 FR0000120560 07/09/20 0,35 34.562.912 16,44 - 16,77 9,615 2,11RALLYE (RAL) A 5,93 6,44 + 8,42 - 36,36 207021 6,49 +90,25 10,3 FR0000060618 20/05/19 1 52.373.235 5,82 - 8 3,105 RAMSAY GDS (GDS) A 17,5 18 + 7,14 280 18 + 5,57 21,8 FR0000044471 02/12/14 1,4 110.389.690 17,5 + 7,78 15,2 RECYLEX SA (RX) g C /130520 - 45,57 3,66 FR0000120388 04/07/90 0,61 25.886.482 - 39,21 1,3 RÉMY COINTREAU (RCO) G A 142,3 144,2 + 1,34 + 31,69 56586 144,2 - 4,31 162,8 FR0000130395 28/07/20 1 50.503.106 142,3 + 24,74 79,2 0,69REXEL (RXL) G A 11,945 12,135 + 1,34 + 2,45 891396 12,18 +26,04 13,415 FR0010451203 02/07/20 0,48 304.425.106 11,81 + 3,72 4,921 ROBERTET (RBT) G B 869 858 - 1,38 - 7,04 1057 871 - 9,01 1068 FR0000039091 02/07/20 5 2.172.551 852 - 0,23 662 0,58ROTHSCHILD & CO (ROTH) G A 26,9 27,1 + 1,5 + 5,86 11898 27,2 + 9,94 27,6 FR0000031684 20/05/19 0,79 77.617.512 26,55 + 7,54 14,62 RUBIS (RUI) G A 37,44 37,2 - 0,64 - 32,05 DIV 2 28/07/17 261637 37,48 +19,92 57,45 FR0013269123 17/06/20 1,75 103.560.783 36,96 - 27,63 27,34 4,7SARTORIUS STED. BIO. (DIM) G A 295,8 298 + 0,74 +101,76 DIV 6 10/05/16 47357 299 -16,67 367 FR0013154002 29/06/20 0,34 92.180.190 292,4 +103,69 133,9 0,11SAVENCIA (BH) B 59 59 - 3,91 1854 59,4 +13,9 64,8 FR0000120107 13/05/19 1 14.032.930 58,8 + 0,68 45,1

SCOR (SCR) LR A 27,7 27,46 - 1,93 - 26,62 419761 28,1 +14,13 39,12 FR0010411983 30/04/19 1,75 186.677.576 27,46 - 27,66 15,88

SEB (SK) G A 145,1 144,8 - 0,14 + 9,37 48370 145,5 - 1,16 155 FR0000121709 22/05/20 1,43 50.307.064 142,7 + 6 86,35 0,99

SES-IMAGOTAG (SESL) Gg B 26,75 26,75 - 15,62 2610 26,75 + 4,9 37,5 FR0010282822 25/06/12 0,5 15.758.108 26,6 - 7,92 19,5

SHOWROOMPRIVÉ (SRP) g C 1,63 1,65 + 0,61 +149,57 271770 1,66 +25,95 1,888 FR0013006558 117.461.769 1,618 +106,07 0,243

SOITEC (SOI) G A 153,2 153 + 0,33 + 63,29 EX-DS 13/05/16 REGR.1P20 75197 153,8 +12,5 153,8 FR0013227113 33.278.901 152,1 + 63,29 48,86

SOLOCAL GROUP (PAJ) B 3 2,88 - 3,84 - 89,9 606616 3,043 +42,57 30,115 FR00140006O9 129.505.837 2,88 - 89,9 1,73

SOLUTIONS 30 (ALS30) A 18,86 19,85 + 5,25 + 99,3 407077 19,85 +18,58 19,85 FR0013379484 107.127.984 18,86 +102,86 5,3

SOMFY (SO) A 130,8 131 + 0,46 + 49,71 2064 131,6 + 0,92 145 FR0013199916 30/06/20 1,25 37.000.000 130,2 + 55,77 63,6 0,95

SOPRA STERIA GP (SOP) G A 130 128,3 - 1,46 - 10,59 16412 130,2 +15,48 162 FR0000050809 02/07/19 1,85 20.547.701 128,2 - 5,66 78,15

SMCP (SMCP) g B 5,53 5,255 - 4,97 - 44,39 223693 5,555 +50,14 10,08 FR0013214145 74.117.760 5,195 - 34,48 2,945

SPIE (SPIE) G A 17,14 16,93 - 1,28 - 6,77 217612 17,6 +11,24 19,58 FR0012757854 24/09/19 0,17 157.698.124 16,88 - 7,64 7,805

SQLI (SQI) g C 18,65 19,45 + 5,14 - 20,61 6059 19,45 + 5,14 24,5 FR0011289040 21/07/17 0,88 4.613.975 18,65 + 13,88 13,42

STEF (STF) g B 72 71 - 0,7 - 11,69 1373 72,7 + 5,03 85,1 FR0000064271 17/11/20 1,5 13.000.000 70,6 - 15,38 57,2 4,23

SUEZ (SEV) LR A 16 15,91 - 0,5 + 17,98 1105986 16 - 0,56 16,36 FR0010613471 18/05/20 0,45 628.362.579 15,78 + 20,94 8,046 2,83

SWORD GROUP (SWP) g B 31,5 31,55 + 0,48 - 7,48 7827 31,7 + 0,64 37,15 FR0004180578 10/09/20 2,04 9.544.965 31,35 - 6,52 20,45 7,61

SYNERGIE (SDG) g B 28,5 29,6 + 4,04 + 1,37 4660 29,85 + 8,82 31,4 FR0000032658 19/06/19 0,8 24.362.000 28,45 + 1,2 13

TARKETT (TKTT) G B 14,73 14,95 + 1,01 + 3,82 43812 15,08 +42,52 16,56 FR0004188670 12/06/19 0,6 65.550.281 14,73 + 14,04 7,53

TECHNICOLOR (TCH) B 1,75 1,747 - 0,15 - 86,43 315519 1,792 +41,88 13,735 FR0013505062 218.324.139 1,734 - 86,91 1,1

TELEPERFORMANCE (RCF) R A 272,5 277,8 + 2,02 + 27,78 130771 278,4 - 4,9 297,3 FR0000051807 02/07/20 2,4 58.730.600 272,1 + 29,93 150,3 0,86

TF1 (TFI) G A 6,8 6,975 + 5,05 - 5,74 1089245 7,13 +32,6 7,805 FR0000054900 29/04/19 0,4 210.392.991 6,72 - 11,76 4,062 5,74

TFF GROUP (TFF) B 27,4 26,8 - 1,83 - 26,98 22285 27,4 +17,03 38,2 FR0013295789 06/11/20 0,35 21.680.000 26,7 - 28,34 22 1,31

THERMADOR GROUPE (THEP) B 65,8 65 - 0,61 + 22,64 1258 65,8 + 6,56 66,8 FR0013333432 09/04/20 1,8 9.200.849 65 + 22,18 35,7 2,77

TIKEHAU CAPITAL (TKO) g A 23,7 23,8 + 0,42 + 8,18 EX D S 03/07/17 15074 24 + 5,78 26,4 FR0013230612 22/05/20 0,5 137.114.864 23,7 + 0,85 15,45 2,1

TRANSGÈNE (TNG) g B 1,72 1,708 - 0,35 + 10,19 40406 1,73 +16,99 2,08 FR0005175080 83.841.334 1,708 - 9,53 0,81

TRIGANO (TRI) G A 137,2 136,3 - 0,95 + 44,85 16001 137,2 +10,45 140,5 FR0005691656 14/01/20 2 19.336.269 135,2 + 44,39 41,76 1,47

UBISOFT ENTERTAINMENT (UBI) LR A 77,76 79 + 1,54 + 28,29 332530 79,4 - 1,5 85,14 FR0000054470 123.458.887 77,62 + 36,21 51,16

VALEO (FR) LR A 31,59 31,59 - 0,41 + 0,57 715160 31,93 +18,14 34,05 FR0013176526 29/06/20 0,2 241.717.403 30,98 - 10,38 10,51 0,63

VALLOUREC REG (VK) G A 28,5 28,36 - 0,91 - 74,79 104616 28,695 +129,26 114,68 FR0013506730 11.449.694 27,725 - 70,11 11,186

VALNEVA (VLA) g B 6,32 6,44 + 1,74 +150,58 335334 6,48 +11,03 7,35 FR0004056851 90.954.937 6,18 +161,79 1,784

VERALLIA (VRLA) g A 27,9 27,5 - 0,54 - 9,12 35869 27,9 +11,79 36,01 FR0013447729 15/06/20 0,85 123.272.819 27,4 - 7,84 19,26 3,09

VERIMATRIX (VMX) g B 2,85 2,84 + 0,18 + 43,43 270941 2,89 + 6,37 3,245 FR0010291245 84.927.567 2,82 + 43,87 1,138

VICAT (VCT) g A 35,5 35,6 + 0,42 - 11,77 33666 35,6 +21,71 41,65 FR0000031775 20/04/20 1,5 44.900.000 35,2 - 9,18 22,5 4,21

VILMORIN & CIE (RIN) g A 49,5 48,7 - 1,62 + 0,93 6458 50,1 + 0,31 52,4 FR0000052516 11/12/19 1,35 22.917.292 48 - 2,6 34,25 2,77

VIRBAC (VIRP) G A 215 217,5 + 1,16 - 8,03 4391 218,5 + 2,59 244,5 FR0000031577 26/06/15 1,9 8.458.000 214 - 6,45 132,2

WAVESTONE (WAVE) g B 27,3 27,8 + 2,58 + 6,92 11195 28 + 9,88 29 FR0013357621 19/09/19 0,23 20.196.492 27,15 + 11,2 15,5

WENDEL (MF) G A 95,9 97,25 + 1,2 - 17,93 75483 97,7 +20,28 127,5 FR0000121204 07/07/20 2,8 44.719.119 95,5 - 20,48 54,8 2,88

WORLDLINE (WLN) G A 75,1 74,6 - 0,29 + 18,13 669478 76,82 + 5,37 82,66 FR0011981968 279.122.471 74,56 + 27,52 36,36

XPO LOGISTICS (XPO) A 278 282 + 1,44 + 8,46 16 282 + 8,46 296 FR0000052870 20/06/19 0,6 9.836.241 278 + 10,16 214

AUTRES VALEURS DE LA ZONE EUROEURONEXT (ENX) G A 88,55 88,85 + 0,4 + 22,3 136743 89,3 - 4,31 109,7 NL0006294274 20/05/20 1,35 70.000.000 87,95 + 28,03 52,9 1,79

NOKIA (NOKIA) R A 3,336 3,438 + 2,74 + 3,95 0,3 471772 3,45 +17,48 4,352 11,61FI0009000681 29/07/19 0,02 5.653.886.159 3,33 + 7,94 2,083 1,46

SES (SESG) LR 7,702 7,87 + 1,47 - 37,04 958083 7,87 + 3,99 14,165 LU0088087324 21/04/20 0,34 376.915.302 7,7 - 33,89 4,87 5,08

X-FAB SILICON (XFAB) g A 4,84 4,66 - 3,32 + 11,75 141161 4,86 +40,57 6,08 BE0974310428 130.781.669 4,66 + 12,29 1,868

VALEURS ZONE INTERNATIONALEGENERAL ELECTRIC (GNE) 9,049 9,091 + 0,45 - 7,69 1,29 24359 9,094 +35,08 12,1 US3696041033 USD 25/09/20 0,01 8.759.873.000 8,651 - 9,09 5,02

HSBC (HSB) 4,383 4,404 - 2,79 - 37,23 52,19 125717 4,435 +17,44 7,121 GB0005405286 USD 27/02/20 0,21 20.368.242.460 4,345 - 33,93 3,081

LAFARGEHOLCIM LTD (LHN) A 44,59 44,47 + 0,16 - 9,15 4 34744 44,68 +10,4 49,79 CH0012214059 CHF 15/05/20 2 615.929.059 44 - 5,9 26,89

SCHLUMBERGER (SLB) A 18,8 19,25 + 0,79 - 46,38 3,45 37993 19,3 +44,74 36,9 AN8068571086 USD 01/12/20 0,13 1.385.122.304 18,4 - 40,4 11,05

SRD Suite VALEURS FRANÇAISES SRD Suite VALEURS FRANÇAISES

A : Indicateur acompte, solde ou total du dividende. BPA : Bénfice par action. PER : Price Earning Ratio. Les plus hauts et plus bas ajustés sont sur l’année civile. Les valeurs classées par ordre alphabétique sont regroupées en trois classes de capitalisation signalées par les lettres A pour les capitalisations supérieures à 1 milliard d’euros, B pour les capitalisations comprises entre 1 milliard d’euros et 150 millions d’euros et C pour les capitalisations inférieures à 150 millions d’euros. L : Valeurs de l’indice CACNext20. R : Valeurs de l’indice CACLarge60. G : Valeurs de l’indice CACMid60. g : Valeurs de l’indice CACSmall. Les bénéfices par action : source FacSet JCF Estimates.

VALEURS MNÉMO / INFO / OUV CLOT % VEIL % AN BPAOST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PERISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT

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euronext SÉANCE DU 08 - 12 - 2020CAC 40 : 5560,67 (-0,23 %) NEXT 20 : 12043,46 (-0,31 %)

CAC LARGE 60 : 6159,19 (-0,24 %)CAC ALL-TRADABLE : 4316,46 (-0,20 %)

DATE DE PROROGATION : 28 DÉCEMBRE

SRD VALEURS FRANÇAISES

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Page 35: Les Echos - 09 12 2020

Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 FINANCE & MARCHES // 35

ABBVIEPierre-Claude Fumoleauest promu vice-président, chargé des opérations marketing et commerciales mondiales.

P i e r r e - C l a u d e Fu m o l e a u ,44 ans, titulaire d’un master enmarketing de l’université deDublin (Irlande), est diplômé

Oliver Wild, le goût du risque

Il est l’une des voix derrière les annonces, lundi, par Bruno Le Maire, d’un gel des primes d’assurances pour les entreprises de secteurs meurtris par le Covid. Depuis juillet, Oliver Wild partage son temps entre son bureau àAubervilliers et les coulisses de Bercy. Aux côtés de l’Afep,du Medef, de la CPME, ce quadragénaire a aussi plaidé pour ne pas rendre obligatoire une assurance pandémie.

Car l’homme, directeur des risques et des assurancesde Veolia à la ville, est aussi devenu, l’été dernier, le prési-dent de l’Amrae, cette Association pour le managementdes risques et des assurances de l’entreprise. Diffuser laculture du risque est désormais son combat. « La crise du Covid a mis nos failles en exergue. C’est l’occasion de rebâtir notre économie face à des menaces inédites. Quandles risques sont gérés, l’entreprise est durable », estime ce bon vivant, regard émeraude et barbe à la Edouard Phi-lippe, par endroits plus sel que poivre.

Rien ne semble arrêter ce bosseur, globe-trotteur,capable de se donner corps et âme pour une cause s’il ycroit. Passé par l’ESIAE, ce fils unique de citoyens bri-tanniques n’a-t-il pas, dès 1998, troqué la France pour lesterres australes, le temps de décrocher, à la Macquarie University de Sydney, un master en développement durable avant l’heure ? « Il est entier, sensible et jusqu’au-boutiste. Il ne pourrait pas s’investir dans une activité con-tre sa nature, comme travailler dans le pétrole, par exem-ple », raconte son ami d’enfance, le restaurateur Marwan Rizk.

Son premier employeur, une start-up australienne,envoie Oliver Wild faire du porte-à-porte. A charge pourlui de récolter des fonds pour des associations au profitdes forêts de Tasmanie, des réfugiés… A Sydney, il sera ensuite consultant chez KPMG, empruntant le chemin de son père, une figure, à Paris, de Peat Marwick, ancê-tre du cabinet. « Il m’a appris à me dépasser », dévoile Oli-ver Wild, qui, enfant, parlait anglais à la maison et fran-çais en pension. KPMG Australia lui confie sa branche d’audit et de conseil en développement durable. C’est l’occasion pour lui de traiter tant avec des biologistes marins qu’avec des urbanistes… Et d’éveiller les cons-

ciences parmi des financiers encore insensibles aux blessures de l’environnement. « Je voulais intégrer l’éco-logie dans une équation de développement économique »,dit Oliver Wild, qui a vu son équipe passer de 2 à 40 per-sonnes. « J’ai eu la chance de pouvoir faire bouger les lignes, s’enthousiasme-t-il. Je travaillais avec des ban-ques, des sociétés minières, et j’ai contribué à ce que KPMGappréhende les choses différemment, en résonance avec ses clients. C’est l’effet papillon ! »

Plus jeune risk manager du CAC 40L’heure de revenir à Paris avec son épouse française sonne en 2009 peu après la naissance de leur fils. Le retour est brutal pour ce surfeur aguerri, fou de ski, fin cuisinier et gourmet au point de prolonger ses séjours à l’étranger pour arpenter des gargotes improbables. Avec un flegme britannique, cet amateur de jazz, féru d’inno-vation, d’essais mais aussi de mangas, murmure que les choses, en France, sont « un peu figées ». « Je ne l’ai jamaisvu s’énerver ni être stressé. En même temps, quand il se pas-sionne, c’est un turbo ! », observe Christine Rodwell, avec qui il a construit, à La Nouvelle-Orléans, la stratégie de Veolia pour les villes résilientes. On le dit aussi « convi-vial », « solide », « bienveillant », sans doute plus passionnéque politique et peu enclin à se mettre en avant. « Sa forceest de démontrer. Avec lui, les résultats sont là », poursuit Marwan Rizk. En 2009, Veolia l’accueille à Paris comme directeur de mission. Quatre ans plus tard, il prend la direction des risques et des assurances, jusqu’alors disso-ciées. « Passer du développement durable à l’appréhension des risques était logique », juge Oliver Wild, qui sera ainsi l’un des plus jeunes risk managers du CAC40, devenant membre de l’Amrae dans la foulée. A la tête de cette asso-ciation de 1.500 adhérents, il entend suivre les pas de l’ex-présidente Brigitte Bouquot. Tout en se rapprochant des PME, des régions… l’effet papillon, encore. n

APCO WORLDWIDEJean Bizetdevient conseiller spécial.

Jean Bizet, 73 ans, médecin vété-rinaire, devint sénateur de laManche en 1996. Il a présidé lacommission des Affaires euro-péennes du Sénat durant plus desept ans. Il fut aussi maire duTeilleul et élu départemental.

CONFÉDÉRATION

CGIIsabelle Bernet-Denindeviendra directrice générale de la Confédération du commerce de gros et international le 1er janvier.

Isabelle Bernet-Denin, 47 ans,est titulaire d’un master 2 endroit et pratiques des relationsdu travail (DRPT) de l’Ecole dedroit social de Montpellier. Elleest secrétaire générale de la con-fédération. C’est en 1996 qu’elle arejoint la CGI après une pre-mière expérience à l’UIMM.D’abord, juriste en droit social etdroit économique, elle a été pro-mue responsable du départe-ment social et formation. Elle estmembre du bureau exécutif etdu comité financier de la CGI.

DEKRANicolas Bouvierest nommé executive vice president, chargé de la région South West Europe.

Nicolas Bouvier, 55 ans, diplôméde l’EM Lyon, titulaire d’un MBAde l’université de Californie duSud, a notamment travaillé pourTotal, Yum Foods et NationalCiter. En 2007, il a rejoint DekraAutomotive comme directeurréseau et marketing, membredu directoire de Dekra Automo-tive SA. Il devint président duréseau en 2010 et de Dekra Auto-motive SA en 2014. Depuis 2018,il pilotait la division contrôletechnique de véhicules.

,Envoyez vos nominations à[email protected]

de l’ESC Reims. Il a œuvré pourBristol-Myers Squibb, Abbott etAstraZeneca. Il passa directeurde la division immunologie chezAbbVie France dès 2014, puisgeneral manager d’AbbVie Nor-vège en 2016. En 2017, il étaitdevenu président d’AbbVieFrance, administrateur et mem-bre du bureau du LEEM, et pré-sident de l’Agipharm.

PORTRAIT

par Laurance N’Kaoua @LauranceNKaoua

Char

les d

e Toi

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ENTREPRISES

TILDERJean-Marie Bockelest nommé senior advisor.

Jean-Marie Bockel, 70 ans, avo-cat, ancien étudiant de la facultéde droit, sciences politiques etgestion de Strasbourg, étaitsénateur du Haut-Rhin. Il futaussi député du Haut-Rhin etmaire de Mulhouse entre 1989et 2010. Il a également servicomme ministre du Tourisme etdu Commerce ou encore commesecrétaire d’Etat à la Coopéra-tion et à la Francophonie maisaussi à la Défense et à la Justice.

+Ils sont nésun 9 décembre

•Booba, rappeur, 44 ans.•Emmanuel Carrère, écrivain et réalisateur, 63 ans.•Dominique Ceolin, PDG d’ABC Arbitrage, 53 ans.•Frédéric Cuvillier, ancien secrétaire d’Etat chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, maire de Boulogne- sur-mer, 52 ans.•Judi Dench, actrice, 86 ans.•Sylvain Dhenin, managing partner Europe et Afrique de la practice CEO & Boards, responsable Europe de l’Ouest d’Heidrick & Struggles, 50 ans.•Anna Gavalda, romancière, 50 ans.•Sonia Gandhi, présidente du Congrès national Indien, 74 ans.•Béatrice Jauffrineau, fondatrice de Femmes Business Angels, 62 ans.•Jean-Claude Juncker, ancien président de la Commission européenne, 66 ans.•Jean-Louis Etienne, médecin et explorateur, 74 ans.• Isabelle Kocher, ex-directrice générale du groupe Engie, 54 ans.•Bixente Lizarazu, ancien champion du monde de football, 51 ans.•John Malkovich, acteur, 67 ans.•Alexandre Mars, entrepreneur, 46 ans.•Fabrice Santoro, tennisman, 48 ans.•Catherine Sueur, présidente du directoire de Télérama SA, directrice de la publication de Télérama, 45 ans.

carnet

CHANGES COURS AU COMPTANT VAR. VAR. COURS VEILLE ANNÉE1 EURO EN DEVISE BCE EN % EN %08-12-2020

TAUX MARCHÉS MONÉTAIRES ET EURODEVISES MARCHÉS MONÉTAIRES JOUR 1 MOIS 3 MOIS 6 MOIS 1 AN08-12-2020

ECARTS DE TAUX AVEC L’ALLEMAGNE 6 MOIS 2 ANS 5 ANS 7 ANS 10 ANS08-12-2020

ALLEMAGNE 100,36 -0,74 -0,80 -0,75 -0,61

PORTUGAL 0 5,62 0,24 0,33 0,44

FRANCE -0,09 0,03 0,12 0,12 0,20

ESPAGNE -0,07 0,18 0,29 0,40 0,56

ITALIE -0,12 0,30 -0,03 0,98 1,09

DOLLAR US 1,2111 0,00 7,93LIVRE STERLING 0,907 0,15 7,14FRANC SUISSE 1,0762 -0,26 -0,86COURONNE DANOISE 7,4431 -0,03 -0,40COURONNE NORV. 10,6174 0,24 7,49KUNA CROATE 7,5415 0,30 1,29COURONNE SUEDOISE 10,2617 0,89 -2,23DOLLAR CANADIEN 1,5517 0,08 6,50YEN JAPONAIS 126,115 0,10 3,41DOLLAR AUSTRALIEN 1,6337 0,09 2,15ROUBLE RUSSE 88,9123 -0,48 28,00ROUPIE INDIENNE 89,2414 -0,16 11,54DOLLAR NEO-ZELANDAIS 1,7191 -0,10 3,03COURONNE TCHEQUE 26,3625 -0,53 3,75FORINT HONGROIS 359,215 -0,43 8,49ZLOTY POLONAIS 4,4518 -0,50 4,30LEV BULGARE 1,9549 -0,07 -0,07DOLLAR HONG-KONG 9,3874 0,01 7,45WON SUD COREEN 1315,8482 0,21 1,55PESO MEXICAIN 23,8869 -0,85 12,45REAL 6,1605 -0,23 36,68DOLLAR SINGAPOUR 1,6204 0,09 7,35RAND SUD-AFRICAIN 18,192 -0,84 15,79LIVRE TURQUE 9,4633 0,14 41,77RENMIBI YUAN 7,9122 0,06 1,33RUPIAH 17087,9166 0,04 9,70PESO PHILIPPIN 58,3618 0,01 2,74RINGGIT MALAIS 4,932 0,01 7,39BATH THALANDAIS 36,3629 -0,44 9,10

ZONE EURO -0,43/-0,73 -0,50/-0,80 -0,38/-0,68 -0,37/-0,67 -0,37/-0,67

SICAV/FCP

FR0013341781 2CRSI g C 4,165 4,39 4,16 4,335 + 4,08 75186

FR0013185857 ABEO g C 9,12 9,22 8,72 8,78 - 3,73 8831

FR0012616852 ABIONYX PHARMA g B 0,962 0,962 0,942 0,944 - 2,48 79339

FR0000064602 ACANTHE DEV. C 0,439 0,44 0,432 0,436 - 0,68 10518

FR0000076861 ACTEOS g C 1,765 1,765 1,685 1,685 - 5,34 19635

FR0000062978 ADL PARTNER g C 14,4 14,4 13,85 14,2 - 1,73 2795

FR0012821890 ADUX g C 1,555 1,555 1,47 1,5 - 3,54 5324

FR0004152874 ADVENIS g C 2,08 2,08 2,08 2,08 9389

FR0013296746 ADVICENNE g C 9 10,85 8,98 10,45 + 15,09 118191

FR0000053837 ALTAMIR B 20,2 20,2 20 20 - 0,84 3189

FR0012789667 AMPLITUDE g C 2,15 2,16 2,15 2,16 + 0,47 2885392

FR0011992700 ATEME g C 16,7 16,8 16,5 16,6 - 0,6 6088

FR0000039232 AUREA g C 5,3 6,38 5,08 6,3 + 17,1 16699

FR0013183589 AURES TECHNO g C 23,4 25 23,1 23,4 + 1,74 23399

FR0013529815 AVENIR TELECOM C 0,611 0,648 0,611 0,613 + 0,3 358231

FR0013258399 BALYO g C 1,518 1,57 1,426 1,474 - 2,38 641579

FR0004023208 BASSAC B 46,8 46,8 46,7 46,8 + 0,65 680

FR0000035370 BASTIDE CONF.MED. g C 48,2 48,2 47,4 47,4 - 1,15 3081

FR0011814938 BOOSTHEAT C 3,7 4,04 3,6 3,95 + 7,63 339969

FR0000074254 BOURSE DIRECT C 2,6 2,76 2,58 2,76 + 6,98 102957

FR0000045544 CA TOULOUSE 31 CCI C 99,9 99,9 98 98 - 1,01 757

FR0010151589 CAFOM C 6,9 6,95 6,7 6,95 + 5,3 706

FR0012969095 CAPELLI g C 33,8 34 30,7 32 - 5,88 3918

FR0000072894 CAST g C 4,2 4,25 3,8 4,04 - 3,81 35811

FR0000064446 CATERING INTL SCESg B 10,35 10,55 10,3 10,35 5469

FR0010193979 CBO TERRITORIA C 3,6 3,64 3,6 3,62 + 0,56 8851

FR0000053506 CEGEDIM B 28,3 28,3 27,5 27,7 5177

FR0000054322 CIBOX INTERACTIVE g C 0,208 0,214 0,208 0,212 228684

FR0013426004 CLARANOVA g B 7,475 7,67 7,29 7,32 - 2,53 533190

FR0000053399 CNIM GROUP C 16,95 16,95 15,7 15,7 - 6,83 2838

FR0000185506 CRCAM ATL. VENDEE C 119 121 118,02 120 + 0,84 629

FR0010483768 CRCAM BRIE PIC. CC B 22,4 22,4 22,1 22,32 + 1,22 1204

FR0000045213 CRCAM ILLE-VILAINE C 86,02 87,49 86 86 - 0,58 940

FR0000185514 CRCAM NORD FR. B 21,605 21,63 21,405 21,54 - 1,01 102154

FR0000045528 CRCAM PARIS IDF B 75,5 75,5 74,69 75,45 + 0,6 4032

FR0000045346 CRCAM SUD RHONE B 167,98 169,8 165,02 167 - 0,58 857

FR0007317813 CS GROUP g C 4,16 4,16 3,93 4,05 - 2,64 7083

FR0013283108 DELTA PLUS g B 63,4 64,6 63,2 64,6 + 2,22 889

FR0000073793 DEVOTEAM g C 98 98,1 97,9 98,1 + 0,2 3604

FR0012202497 DIAGNOSTIC MEDICALg C 1,76 1,76 1,675 1,745 + 0,87 27147

FR0010099515 ECA g B 22,8 22,8 22,3 22,4 2183

FR0000072373 EGIDE g C 1,04 1,04 0,99 1,015 - 2,4 83411

FR0012650166 ENGIE EPS g C 12,7 12,7 11,9 12,4 - 0,8 19888

FR0000120669 ESSO g B 12,9 12,95 12,55 12,9 + 0,39 5358

FR0000061475 EURASIA FONC. INV. C 0,334 0,334 0,334 0,334 + 22,79 1215

FR0000054678 EURO RESSOURCES C 3,16 3,2 3,1 3,19 + 1,59 8862

FR0000075343 EUROMEDIS GROUPE C 12,9 13,3 12,7 13 + 0,78 12349

FR0010490920 EUROPACORP g C 0,848 0,848 0,817 0,839 - 0,71 26081

FR0000035784 EVERGREEN C 1,1 1,1 1,1 1,1 1721

FR0011271600 FERMENTALG g C 1,544 1,67 1,544 1,61 + 7,33 1295085

FR0000060824 FINANCIERE MARJOS C 0,236 0,236 0,236 0,236 35139

FR0004076891 FLO (GROUPE) g B 0,165 0,17 0,161 0,161 - 1,53 31925

FR0011277391 FONC. PARIS NORD g C 0,025 0,025 0,024 0,025 193267

FR0000064362 FONCIERE ATLAND C 32,395 33,1 32,31 33 + 1,85 691

FR0013030152 FRANCAISE ENERGIE g C 17,7 17,7 17,55 17,7 5847

FR0010501692 GENERIX g C 6,76 6,84 6,6 6,76 - 1,17 14671

FR0013399474 GENKYOTEX g C 2,97 3,07 2,97 2,98 + 0,68 69492

FR0011799907 GENOMIC VISION g C 0,832 0,915 0,832 0,856 + 3,38 4773566

FR0004010338 GROUPE JAJ C 1,2 1,2 1,2 1,2 2500

FR0004050300 GROUPE OPEN g C 14,98 15 14,96 15 + 0,13 2378

FR0012612646 GROUPE PARTOUCHE B 20,8 21 20,8 21 + 0,96 868

FR0004155000 GROUPE SFPI g C 1,8 1,835 1,76 1,835 + 1,94 99981

FR0000066722 GUILLEMOT g C 8,56 8,6 8,18 8,18 - 4,22 23843

FR0000038531 HF COMPANY C 5,04 5,06 5,02 5,02 707

FR0012821916 HIPAY GROUP g C 14,6 14,9 14,45 14,8 + 4,23 26420

FR0000065278 HOPSCOTCH GROUPE g C 6,34 8,3 6,32 7,84 + 24,44 71667

FR0000071797 INFOTEL g C 40,1 40,3 40 40 1123

FR0000064297 INNELEC MULTIMEDIAg C 5,2 5,3 5,18 5,24 + 1,95 7443

FR0013233012 INVENTIVA g B 10,42 10,56 10,08 10,2 - 0,59 187048

FR0012872141 JACQUES BOGART g C 10,3 10,5 10,05 10,4 + 2,46 12136

FR0004029411 KEYRUS g C 2,98 3,1 2,98 3,08 + 4,41 16157

FR0000032278 LATECOERE g C 2,1 2,12 2,08 2,08 - 0,95 40841

FR0006864484 LAURENT-PERRIER B 78,8 80 78,4 78,4 - 0,76 691

FR0013233475 LYSOGENE g C 2,21 2,21 2,05 2,16 - 2,26 90916

FR0000060196 M.R.M. C 0,965 0,97 0,965 0,97 1983

FR0000032302 MANUTAN INTER. B 68,2 69,2 68 68,6 + 0,29 3448

FR0000051070 MAUREL ET PROM g B 1,676 1,732 1,676 1,71 + 1,91 281589

FR0011742329 MCPHY ENERGY g C 31,95 32,8 31,4 32,05 - 0,31 133761

ACTIONSEURONEXT HORS SRD FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

FR0004065605 MEDINCELL C 10,6 10,85 9,56 10,1 - 3,35 78052

FR0010298620 MEMSCAP g C 1,06 1,06 1,01 1,045 - 0,48 35447

FR0000077570 MICROPOLE g C 1,1 1,18 1,09 1,15 + 4,55 450212

FR0013482791 NACON SAS B 7,99 7,99 7,79 7,85 - 1,75 62872

FR0013018041 NAVYA g B 4,35 4,385 4,05 4,05 - 7,11 1051575

FR0004154060 NETGEM g C 1,02 1,02 0,97 0,994 - 2,07 51819

FR0004050250 NEURONES B 24,1 24,3 24,1 24,3 + 0,83 1582

FR0000052680 OENEO g B 10,8 10,96 10,72 10,84 + 0,93 20327

FR0010428771 OL GROUPE g C 2,23 2,23 2,13 2,18 - 1,8 32236

FR0000075392 ORAPI g C 7,38 7,38 7,04 7,22 - 1,64 16906

FR0010609206 OREGE C 1,21 1,21 1,19 1,2 50813

FR0012127173 OSE IMMUNO g C 7,3 7,4 7,2 7,24 - 1,63 44901

FR0004038263 PARROT B 4,77 4,77 4,64 4,65 - 0,64 3096

FR0000038465 PASSAT g C 5,85 5,95 5,65 5,8 12292

FR0011027135 PATRIMOINE ET COMM B 14,95 14,95 14,6 14,9 - 0,33 2404

FR0000053514 PCAS B 10,2 10,3 10,1 10,3 + 3,52 3529

FR0012432516 POXEL g C 6,73 6,84 6,68 6,75 - 0,15 38904

FR0004052561 PROACTIS C 0,17 0,17 0,162 0,166 - 5,68 9400

FR0012613610 PRODWAYS GROUP g C 2,4 2,4 2,25 2,3 - 3,36 89021

FR0000060329 PSB INDUSTRIES g B 18 18 17,1 17,2 - 2,83 1336

FR0000054199 S.T. DUPONT C 0,08 0,081 0,078 0,08 - 0,25 58739

FR0000060071 SAMSE B 157 157 155 155 - 0,64 862

FR0006239109 SCBSM g C 8,35 8,35 8,2 8,3 1027

FR0000039109 SECHE ENVIRONNEM. g B 40,2 40,2 39,75 40 - 0,62 3769

FR0011950682 SERGEFERRARI GP g C 6,38 6,4 6,26 6,3 - 1,25 3865

FR0000074122 SII g C 23,2 23,7 23,2 23,5 + 1,29 2929

FR0004016699 SMTPC g B 16,85 17,15 16,7 16,75 - 0,3 2376

FR0000065864 SOGECLAIR g C 20 20,3 19,8 20,2 + 1,51 5141

FR00140006O9 SOLOCAL GROUP B 3 3,043 2,88 2,88 - 3,84 606616

FR0000033003 TOUAX g C 8,94 8,96 8,44 8,52 - 4,7 35100

FR0000036816 TOUR EIFFEL g B 31,5 31,5 30,5 31 - 1,59 2030

FR0000034548 UNION FIN.FRANCE g B 19,35 19,35 19,05 19,1 - 1,04 1626

FR0000074197 UNION TECH.INFOR. g C 0,59 0,59 0,555 0,575 - 2,54 23581

FR0004186856 VETOQUINOL B 82,8 85 80,4 84,6 + 2,42 16577

FR0000066680 VIDELIO C 1,69 1,69 1,63 1,64 - 2,96 3476

FR0000050049 VIEL ET CIE C 5,62 5,68 5,56 5,58 - 1,06 7261

FR0004183960 VOLUNTIS g C 4,535 4,62 4,255 4,3 - 5,18 131196

FR0000062796 VRANKEN - POMMERY B 15,3 15,4 15,05 15,35 + 0,66 2992

FR0004034072 XILAM ANIMATION g C 47,95 47,95 46,85 47,95 - 0,42 13127

ISIN VALEUR OUV +HT +BS CLÔT ÉCART VOL

ACTIONSEURONEXT HORS SRD Suite FRANÇAISES

CERTIFICAT/FONDS INVESTIR 10INVESTIR 10 GRANDES VALEURS I10GS - FR0011630474 124,55 0,14

INVESTIR PEA PALATINE FR0013284114 100,95 0,43

Valeur unitaire hors frais : valeur de la part ou de l’action hors droits d’entrée ou de sortie éventuels. Les SICAV éligibles au PEA sont signalées par un astérisque *. Le pictogramme P indique la cotation d’un FCP. Classification des OPCVM : actions françaises (AF), actions de la zone EURO (AE), actions internationales (AI), monétaires EURO (ME), monétaires à vocation internationale (MI), obligations et autres titres de créances libellés en EURO (OE), obligations et autres titres de créances internationaux (OI), sicav luxembour-geoises (LX), diversifiés (DI), garantis ou assortis d’une protection (GP). ** : en euros ou dans la devise indiquée dans la colonne «DÉSIGNATION DES VALEURS».

Banque Cantonalede Genève (France) SATél. 04 72 07 31 50bcgef.fr/fonds

CLA

SSIF

ICAT

ION

CLA

SSIF

ICAT

ION

Mirabaud Asset ManagementTél. +41 058 200 60 [email protected]

LU0704154292 RAM (L) SF EM MKT EQ 207,22 07/12

LU0375629556 RAM (L) SF EUROPEAN EQ 456,47 07/12

LU0705072691 RAM (L) SF GB EQ SUST ALP 100,85 07/12

LU1048876350 RAM (L) SF GB STB INCOME EQ 128,65 07/12

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATE

VAL. UNIT DATE DERNIER DÉSIGNATION HORS FRAIS DE LA DIVIDENDE NETCODE ISIN DES VALEURS EN EUROS** VALOR. EN EUROS** MONT. DATEC

LASS

IFIC

ATIO

N

CLA

SSIF

ICAT

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LU2004923152 SWISS ALL CAPS (EUR) 116,6 07/12 LU1626130063 SWISS SMALL & MID CAPS (CHF) 119,19 07/12 LU1626130816 SILK ROAD ZONE STOCKS (USD) 106,6 07/12 LU0851564038 BALANCED (EUR) 128,86 07/12 LU0851564384 DYNAMIC (EUR) 150,34 07/12 LU1626130220 HIGH DIV. EUROPE STOCKS (EUR) 95,47 07/12 LU0851564541 WORLD EQUITY (EUR) 175,05 07/12

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LU0705071701 RAM (L) SF L/S EUROPEAN EQ 127,54 07/12

LU0375630729 RAM (L) SF US SUST EQ 348,41 07/12

LU0419186167 RAM (L) TF GB BD TOT RET 156,18 07/12

LU0935723782 RAM (L) TF II ASIA BD TOT RET 156,1 07/12

SYNCHRONY (LU)

Page 36: Les Echos - 09 12 2020

36 // Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Eugénie Deloire

V erdir l’immobilier ter-tiaire. C’est, en substance,l’objectif visé par le dispo-

sitif Eco-énergie tertiaire, qui impose aux acteurs de l’immobi-lier une réduction progressive de leurs consommations énergéti-ques (40 % d’ici à 2030, 50 % en 2040 et la neutralité carbone en 2050) dans les bâtiments de plus de 1.000 m2. L’immobilier ter-tiaire chauffé (75 % de bureaux, 15 à 20 % de commerces) compte plusde 1 milliard de mètres carrés et produit un tiers des gaz à effet de serre. Problème, dans une France championne du béton, le secteur bouge lentement.

« Avec une baisse des émissions degaz à effet de serre de seulement 4 % entre 1990 et 2015, l’immobilier ter-tiaire n’est pas du tout sur la trajec-toire fixée par le législateur », cons-tate Jean Carassus, professeur à l’Ecole nationale des ponts et chaussées. Néanmoins, construc-teurs et promoteurs sont de plus enplus poussés par les investisseurs, tout comme les utilisateurs, à pro-poser des bâtiments performants sur le plan énergétique. « L’exigencedes bâtiments bas carbone se retrouve chez les investisseurs insti-tutionnels pour lesquels la liquidité des biens dans le temps et l’obtentionde prêts bancaires sont des sujets majeurs », note Véronique Béda-gue-Hamilius, directrice générale déléguée de Nexity.

Des filières peu structuréesPrésenter un projet de construction labellisé HPE, BBC ou BBCA facilite le montage financier d’une opéra-tion. Mais alors que la vague verte des élections municipales et l’enga-gement des collectivités locales dans la transition énergétique devraient être un levier pour la construction durable, celle-ci doit faire face à un nouveau défi : la dis-ponibilité des matériaux et le prix del’immobilier bas carbone. En effet, peu structurées, les filières de maté-riaux biosourcés ne permettent pas de réaliser des économies d’échelle sur les coûts de production. Face à ces difficultés, les acteurs du ter-tiaire vert se mobilisent.

Lancé en septembre, le Boosterdu réemploi, une initiative collec-tive en faveur du réemploi des matériaux dans le bâtiment, réunit

DÉVELOPPEMENT DURABLE Construire des bureaux et des commerces plus vertueux sur les plans environnemental et énergétique est dans l’air du temps. Face à ce chantier gigantesque, pouvoirs publics et acteurs privés développent des solutions innovantes.

L’immobilier vert, nouveau défi du secteur tertiaire

IMMOBILIER

ainsi plus d’une trentaine de maî-tres d’ouvrage et d’investisseurs (Gecina, Icade, Colliers, etc.), pro-moteurs (Adim, BNP Paribas Real Estate, Bouygues Immobilier, etc.) et grands utilisateurs (Engie, Orange, SNCF…). De quoi faire bou-ger les lignes de la construction ter-tiaire. Face à ce chantier titanesque,plusieurs solutions se dessinent. Etat des lieux.

1 MATÉRIAUX BIOSOURCÉS : LE BOIS, FILIÈRE D’AVENIRPlébiscité pour sa capacité à séquestrer et stocker le carbone b i o g é n i q u e , l e b o i s r é d u i t l’empreinte carbone de la construc-tion de 25 %. A titre de comparai-son, l’énergie grise (la quantité d’énergie consommée lors du cycle de vie d’un matériau ou d’un pro-duit) nécessaire à la fabrication de bois scié est de 350 kWh/m3, contre700 kWh/m3 pour le béton ou 46.000 kWh/m3 pour l ’acier.

L’ossature bois et le bois lamellé collé (collage de plusieurs lamelles en bois) représentent 90 % de la demande du marché.

Autres matériaux biosourcés : lechanvre, la paille (substitut à la laine de verre), la brique de terre oula terre coulée sont également utili-sées dans une démarche architec-turale « low tech », centrée sur les savoir-faire traditionnels et les matériaux non polluants.

1 LE BÉTON BAS CARBONE : MYTHE OU RÉALITÉ ?Décrié par les uns, étudié par les autres, le béton « zéro carbone » cherche encore ses applications. Utilisables dans la construction de fondations, ses propriétés sont encore trop faibles pour des ouvra-ges plus techniques et résistants.

Si les majors du BTP (Lafarge,Vinci) s’activent dans cette voie, les doutes persistent sur la qualité véri-tablement écologique de ces

Aides publiques : un financement axé sur la rénovation énergétiqueLe plan France Relance de 100 milliards d’euros, dévoilé en septembre dernier par le gouvernement, prévoit de consacrer un tiers du budget à la transition écologique, dont 6,7 milliards d’euros affectés à la rénovation énergétique des bâtiments publics et privés. Sur ce budget, 4 milliards d’euros sont alloués aux bâtiments publics. Ces financements devraient permettre la rénovation d’environ 15 millions de mètres carrés sur les 100 millions que compte le parc de l’Etat. Pour le privé, 200 millions d’euros sont destinés à la transition écologique du parc immobilier des TPE-PME, afin que celles-ci atteignent les objectifs fixés par le dispositif Eco-énergie tertiaire. Par ailleurs, un fonds de 300 millions d’euros a été créé pour valoriser le recyclage des friches et la densification des espaces s’inscrivant dans la démarche « zéro artificialisation nette ». Il devrait permettre la réhabilitation d’environ 900 hectares. Enfin, dans le cadre de la densification des villes, les communes bénéficieront d’un dispositif d’aide de 350 millions d’euros sur deux ans. Les conditions d’octroi en seront précisées dans un décret prévu pour mars 2021.

matériaux. Les promoteurs « verts » optent plutôt pour des alliages bois-béton.

1 BIODIVERSITÉ, QUAND LE VÉGÉTAL PROTÈGE LE BÂTIToitures végétalisées, jardins et ter-rasses plantées : les nouveaux pro-jets de construction intègrent le végétal. Isolant thermique naturel, la végétalisation des bâtiments per-met de limiter l’usage de la climati-sation. Remède contre les îlots de chaleur urbains, les toitures végé-talisées retiennent aussi les eaux pluviales et limitent les écoule-ments d’eau potentiellement pol-luants. Enfin, elles réintroduisent la nature en ville en recréant un écosystème favorable à la faune (invertébrés et oiseaux).

Dans un contexte de réchauffe-ment climatique, la question de la résilience de l’immobilier est au cœur des réflexions des acteurs du tertiaire. Le 9 décembre 2019, le règlement européen Disclosure est venu ajouter de nouvelles obliga-tions de reporting aux investisseursinstitutionnels, en complément de l’article 173 de la loi relative à la tran-sition énergétique pour la crois-sance verte (LTE) publiée en 2015. Objectif de ces mesures : faire de l’Europe le premier continent cli-matiquement neutre d’ici à 2050.

1 RÉEMPLOI : UNE PLATE-FORME DES MATÉRIAUXSur les 42 millions de tonnes de déchets par an produites par l’industrie du BTP, moins de 1 % est réemployé, à savoir réutilisé sans être recyclé ou transformé. Pour 1.000 m2 de surface, le réemploi

permet pourtant d’économiser 44 tonnes de déchets, 67 tonnes d’équivalent CO2 et plus de 1 millionde litres d’eau.

Lancé en septembre dernier, leBooster du réemploi engage les signataires du projet à se fournir enmatériaux de réemploi issus d’anciens bâtiments déconstruits sur 150 chantiers (cinq par an cha-cun). Une plateforme en ligne con-çue par Fabernovel va centraliser etstandardiser les besoins en maté-riaux difficiles à identifier pour les fournisseurs : faux plancher, faux p l a f o n d , p o r t e , l u m i n a i r e , moquette, serrurerie, cloison, mobilier, menuiseries, plomberie… Les premiers chantiers à bénéficierdu réemploi seront #Community (Bordeaux), Z5C (Saint Denis), 43-45 avenue d’Iéna (Paris) , 92 Wagram (Paris), Ulteam (Paris) et WP4 (Nanterre).

1 ÉNERGIES VERTES : GÉOTHERMIE, PHOTOVOLTAÏQUECiblant le zéro gaspillage énergéti-que, la future RE2020 généralise le principe de bâtiments à énergie positive (Bepos), dont la consom-mation énergétique minimale est compensée par le recours aux res-sources renouvelables. Les solu-tions touchant à l’autonomie éner-g é t i q u e é m e r g e n t d a n s l e s réalisations immobilières. La future tour The Link, à La Défense (Hauts-de-Seine), sera ainsi équi-pée de 5.000 m2 de panneaux pho-tovoltaïques qui fourniront 25 % de l’éclairage du bâtiment.

Prologis, le numéro un de l’immo-bilier logistique en France, annonce

avoir réduit son empreinte carbone de 80 % en installant, notamment, des panneaux photovoltaïques sur le toit de son entrepôt Moissy 2 Les Chevrons (pour le compte de Samada, filiale logistique de Mono-prix) et en utilisant un système de chaleur par géothermie. Ces équipe-ments coûteux pourraient faire l’objet, à terme, d’une mutualisation avec les collectivités locales.

1 COLLECTER LES DONNÉES DU BÂTIMENTLe décret tertiaire a fixé les modali-tés de mise en place d’Operat, plate-forme informatique de recueil et desuivi des consommations d’énergiefinale du parc immobilier tertiaire.Les propriétaires et preneurs à bailseront tenus de transmettre à par-tir de 2021, au plus tard le 30 sep-tembre, les données relatives à l’année précédente. Les opérateurstertiaires n’ont pas attendu ce reporting réglementaire pour mesurer l’impact énergétique de leurs immeubles.

La française Real Estate Mana-gers (REM) vient de signer un parte-nariat tripartite avec la filiale de Property Management de Nexity et la société Deepki pour établir la stratégie et le suivi de collecte des données énergétiques portant sur un portefeuille de 234 actifs. Via la plateforme Deepki, le gestionnaire d’actifs récupère les données four-nies par ses locataires, qui vont lui permettre d’optimiser la gestion et l’exploitation des bâtiments, sans oublier le volet travaux et mainte-nance. Une démarche vertueuse efficace nécessite l’implication de toutes les parties prenantes. n

Le projet Wood Up (Paris 13e, quartier Bruneseau), dont la livraison est prévue en 2022, sera la toute première tour de 15 étages à 100 % en ossature bois. Photos DR

Page 37: Les Echos - 09 12 2020

Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 // 37

Avec #Curve, le bois déploie tous ses atouts

Cyrille Véran

L e tertiaire vert mise sur lebois. Comme en témoigne lalivraison en septembre, à

Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), d’un immeuble de bureaux en structure bois d’une surface de 24.000 m2, #Curve. Il préfigure le programme ambitieux établi par le pôle Promotion immobilier d’entre-prise de BNP Paribas Real Estate pour diminuer l’empreinte carbonede ses programmes de construc-tion. La cellule Imp’Act, créée par son directeur général, Thomas Charvet, s’y emploie activement.

« Nous étudions les leviers qui per-mettront d’optimiser l’empreinte carbone à toutes les étapes du bâti-ment, de sa conception à son exploi-tation », expliquent Caroline Sain-

derichin et Claude Covo, chargés respectivement des directions opé-rationnelle et technique. S’ap-puyant sur l’expertise de toutes les lignes de métier du promoteur, la cellule s’est aussi entourée d’un écosystème de partenaires, archi-tectes, industriels et bureaux d’étu-des, avec l’objectif de fixer des enga-gements forts pour les années à venir en matière de réduction de consommation énergétique, de diminution des émissions de CO2, de recyclage et réemploi, de con-sommation d’eau… « Notre volonté est de proposer des solutions alterna-tives et concrètes pour concevoir des bâtiments vertueux et résilients », soutiennent-ils.

Montage silencieux et rapideL’immeuble #Curve, occupé princi-palement par la délégation départe-mentale de l’agence régionale de santé d’Ile-de-France, fait partie de cette première génération d’opéra-tions de grande envergure à expéri-menter la structure bois. Le

matériau a été importé d’Autriche, dans l’attente d’une filière structuréeen France. Lors du chantier, les rive-rains ont pu apprécier ce montage àsec, silencieux et rapide, soit qua-tre mois en tout pour monter l’ossa-ture préfabriquée de sept niveaux.

Le promoteur évalue le gain parrapport à une structure béton tra-ditionnelle à 4.150 tonnes de CO2

(réduction des émissions et stoc-kage du carbone). Un chiffre qui devient parlant en équivalents tra-jets : 580 allers-retours Paris-Sydney en avion. Les noyaux des escaliers et ascenseurs, en béton bas carbone, assurent le contre-ventement et l’inertie thermique du bâtiment.

« Ces éléments peuvent être réali-sés en bois, mais dans notre cas, il y avait une complexité technique liée à la forme du bâtiment ainsi qu’à la sécurité incendie », précisent les architectes Pascale Dalix et Frédé-ric Chartier, qui en appellent à l’« intelligence constructive » dans cedébat. Autrement dit, utiliser le bonmatériau au bon endroit.

Chargés de plusieurs comman-des tertiaires à Colombes, Saint-Ouen, Paris et Bordeaux, les archi-tectes considèrent l’emploi du bois comme un moyen incontournable de réduire les émissions carbone, en tenant compte notamment du cycle de vie complet du bâtiment. « Mais le bilan peut être bien meilleurencore si l’on conserve les bâtiments existants en les transformant, car le bilan carbone de la structure a déjà été amorti », constatent-ils.

Jardins en pleine terrePour cette opération neuve située dans la ZAC de Montjoie, le premier enjeu était de limiter l’impact sur l’environnement et au sol. Une im-plantation étirée dans la diagonale de la parcelle a donc été proposée pour minimiser les vis-à-vis, optimi-ser l’ensoleillement et dégager de part et d’autre des jardins en pleine terre, offerts visuellement aux rive-rains. Autant de politesses pour ins-crire cet immeuble tertiaire dans la vie du nouveau quartier et contri-buer au bien-être des usagers. n

Livré en septembre 2020, à Saint-Denis, l’immeuble #Curve est construit en structure bois (CLT). Sa façade est protégée par des brise-soleil en aluminium anodisé plié. Photo Takuji Shimmura

L’immeuble construit par BNP Paribas Real Estate est l’une des premières opérations tertiaires réalisées en structure bois. Une façon de réduire l’impact carbone.

la crise du Covid-19 a fait naître denouveaux désirs, compatibles avec une dépense énergétique maîtrisée. « La proportion de deux tiers d’espaces de travail clas-siques pour un tiers d’espaces com-muns s’est inversée avec la pandé-mie, invitant à produire des valeurs plus domestiques au sein des bureaux », note Walid Gou-diard. La possibilité, par exemple,d’avoir des fenêtres qui s’ouvrent dans une tour de grande hauteur,ou encore la création d’espaces conviviaux ou de terrasses arbo-rées sont appréciées par les colla-borateurs. « En allant moins au bureau, on veut savoir pourquoi on y va », ajoute le directeur.

L’émergence des « cols verts »Pour répondre aux attentes des utilisateurs, la flexibilité des immeubles doit être pensée en amont, dès leur programmation. « Nous avons lancé la réflexion surles services qui seraient présents ausein de la tour Landscape seule-ment un an avant sa commerciali-sation. De plus, nos plateaux sont entièrement modulables, de façon à anticiper une hausse ou une baisse de la demande placée », explique Adrien Blanc, président d’Altarea Entreprise.

Alors que les transactions surles bureaux ont chuté, respective-ment, de 67 % puis de 25 % aux deuxième et troisième trimestres,selon BNP Paribas Real Estate Transaction France, les espaces tertiaires doivent intégrer la notion de mobilité. « Des tiers-lieux vont s’organiser autour des nœuds de transport qui relient l’entreprise au domicile des colla-borateurs », annonce Philippe Chiambaretta, architecte fonda-teur de PCA-Stream. Ces espaces de travail diffus ont vocation à limiter les grandes migrations des salariés à travers les villes, au bilan carbone lourd.

La réflexion est d’autant plusnécessaire que le travail à dis-tance a fait naître une nouvelle classe d’actifs, « les “cols verts”, ces salariés privilégiés qui travaillent plusieurs jours dans la semaine à la campagne », selon Olivier Raf-faëlli, cofondateur de Triptyque Architecture. Afin d’aligner les intérêts de tous, le bureau doit être pensé comme un prolonge-ment des espaces de vie et partici-per plus activement à l’intégra-tion urbaine. — E. D.

Le flex office, la solution miracle pour réduire l’empreinte carbone ?

BUREAUX

Le flex office survivra-t-il à la crise ? Le grand mouvement de « libéralisation » des bureaux quiétait depuis quelque temps à l’œuvre dans les quartiers d’affai-res et les campus se heurte actuellement à la crise sanitaire. Difficile, en effet, d’ignorer les effets bénéfiques du télétravail sur l’environnement : en rédui-sant l’utilisation des transports par les salariés, i l diminue d’autant leur empreinte carbone et les pics de pollution.

Cependant, l’équation écologi-que n’est pas si simple, comme le souligne Beverley Shadbolt, prési-dente de LaSalle France : « L’im-mobilier tertiaire a les moyens d’exploiter de façon performante ses espaces collaboratifs. Il dispose de systèmes de gestion technique dubâtiment sophistiqués et connectés qui vont au-delà du contrôle des consommations énergétiques afin de maximiser le confort des utilisa-teurs grâce à un système de collecte et d’analyse de données. »

A l’inverse, la consommationénergétique des individus en télétravail n’est pas mesurable. En outre, tous les salariés ne bénéficient pas de conditions optimales pour travailler à domi-cile et aspirent à retrouver le con-fort de leur bureau.

Création d’espaces conviviaux« Le paradoxe, c’est que le télé-travail et la fluidité des usages poussent à créer moins de mètres carrés de bureau mais que le besoind’espaces de sociabilité incite à en produire davantage. En clair, il ne faut pas produire moins mais mieux », constate Walid Gou-diard, directeur projets et déve-loppement chez JLL France. La flexibilité ne se limite plus au nombre de salariés au mètre carré et à la possibilité d’avoir, ou pas, un bureau fermé. Désormais,c’est l’ensemble de l’immeuble qui devient le bureau.

Cassant la rythmique habi-tuelle du « métro-boulot-dodo »,

Bouleversée par le récentdéveloppement du télétravail, la vie de bureau se réorganise. Dans ce contexte incertain, la flexibilité des immeubles reste la meilleure arme pour maintenir des objectifs environnementaux.

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38 // IMMOBILIER Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Eugénie Deloire

I ls sont les figures de proue del’immobilier tertiaire vert. Fon-cières, sociétés de gestion (SCPI-

OPCI), promoteurs ou construc-teurs (et souvent les deux), ces acteurs poussent les sujets du bâti-ment durable et de la transforma-tion énergétique depuis des années. L’accélération des réglementations et les objectifs fixés par la loi Energieet Climat ont placé la valeur verte aucœur des stratégies d’investisse-ment immobilier. Le bâtiment de demain devra être robuste, sobre et désirable aux yeux des investisseurs.

1 LES FONCIÈRESAux commandes de 25 millions d’euros de patrimoine, Covivio (ex-

Foncière des régions) est la pre-mière foncière française à avoir reçu, en 2018, l’approbation de l’ini-tiative Science Based Targets (SBTi)sur ses objectifs de réduction de 35 % des émissions de gaz à effet deserre d’ici à 2030. L’entreprise appli-que une démarche innovante de modélisation de l’intensité carbonepar mètre carré à ses immeubles neufs (développements) comme au parc existant (travaux de rénova-tion et de restructuration) ainsi qu’aux actifs en exploitation. « Le bâtiment est au cœur des transitions énergétiques, écologiques, économi-ques et numériques », résume Jean-Eric Fournier, directeur du dévelop-pement durable chez Covivio.

Signataire de la charte Biodiver-City en 2018, Altarea Entreprise

s’engage dans le développement urbain durable en travaillant sur des projets de ville plus dense, diversifiée, connectée, créatrice d’emplois et à l’empreinte environ-nementale réduite. En novembre, le groupe a reçu la note de 90/100 dela part du GRESB (organisme mon-dial d’évaluation ESG dans l’immo-bilier), qui confirme son statut de « Green Star 5 étoiles ».

1 LES CONSTRUCTEURS-PROMOTEURSRécompensé en novembre par le Trophée Fibois, avec une mention spéciale « belle hauteur » pour l’opération Nice Palazzo Méridia, Nexity, premier promoteur bas carbone (BBCA) en France, pour-suit son engagement vert, avec une

exigence : maintenir le continuum de services entre la conception et l’exploitation des bâtiments. « Nous garantissons une présence pendant deux ans via nos activités deproperty management et de syndic pour être certains que la promesse del’immobilier vert se traduise en faits », explique Véronique Béda-gue-Hamilius, directrice générale déléguée de Nexity. En parallèle de son offre « green » restructurée, le groupe défend un projet de bâti-ment frugal au mode de construc-tion visant à réduire, voire suppri-mer, l’utilisation de chauffage ou declimatisation.

De la conception à la gestion, enpassant par la promotion, GA Smart Building cumule les cas-quettes. Le groupe investit dans le

développement de solutions cons-tructives durables et de technolo-gies destinées à améliorer la perfor-mance des bâtiments (liège, alliagesbois-béton, modules d’intelligence artificielle ciblant les meilleures sources d’énergie, etc.). « Nous avons la conviction que le carbone devient un nouveau levier de perfor-mance et de qualité mais à condition que soit prise en compte la totalité de la vie de l’immeuble », affirme Sébas-tien Matty, président de GA Smart Building. Pour ce dernier, la mixité dans l’immobilier est le meilleur chemin vers l’économie de carbone.

1 LES INVESTISSEURS INSTITUTIONNELSAprès avoir inauguré le premier immeuble de bureau HQE en France en 2009 (Eos, siège social deMicrosoft) et livré, en 2012, le pre-mier immeuble de bureaux équipé à 100 % d’éclairage LED, Generali continue d’investir dans les actifs immobiliers marqués d’une forte empreinte verte. « Assurer la péren-nité d’un immeuble avec une pro-grammation de développement durable exigeante, confirmée par notre quadruple certification et labé-lisation, et accroître son attractivité par le biais d’un projet architectural unique sont des éléments détermi-nants de valorisation de nos actifs immobiliers », confirme Sébastien Pezet, directeur général de l’Europede l’Ouest chez Generali Real Estate. Pour coller parfaitement aux attentes de son futur locataire, Generali a mené le projet de la tour Saint-Gobain, dès les premières phases de sa conception, en colla-boration avec l’entreprise.

Troisième investisseur dans lesactifs forestiers, Groupama Immo-bilier développe l’utilisation du boisfrançais comme matériau de cons-truction. En février 2020, le groupe aacquis la forêt de Pacy (641 hectares)pour le compte de la Société fores-tière Groupama qui dispose désor-mais d’un domaine de plus de 800 hectares d’un seul tenant, à moins de 100 km de Paris. Grou-pama Immobilier a été choisi, aux côtés de Nexity, Eiffage Immobilier, CDC Habitat, EDF et Groupe Grou-pama pour la réalisation du sec-teur E du village des athlètes des Jeux Olympiques et Paralympiques

de Paris 2024, à Saint-Ouen-sur-Seine. Soit 54.000 m2 de surface de plancher pour 525 logements, un immeuble de bureaux, une crèche etdes locaux d’activités et commer-ciaux en bois et béton bas carbone.

1 LES GESTIONNAIRES D’ACTIFSLes fonds verts séduisent les épar-gnants… et les sociétés d’investisse-ment. Inovalis, qui vient de livrer lesiège de Danone Convergence, axe sa logique d’investissement et de gestion sur l’immobilier vert. Sa spécialité : restructurer et réhabili-ter des immeubles anciens et les ramener vers une labellisation. « Les investisseurs institutionnels ont conduit les gérants de SCPI à êtreplus rigoureux dans leur choix d’actifs et dans leur approche envi-ronnementale », souligne Khalil Hankach, directeur général délé-gué d’Inovalis SA. Selon ce dernier, si l’avantage financier d’un actif vertn’est pas mesurable en début d’opé-ration, il devient très vite un élé-ment d’adhésion des investisseurs.

Mouvement de fond motivé parles investisseurs, la finance respon-sable soutient l’immobilier vert. La société de gestion Norma Capital alancé en 2018 la SCPI Fair Invest, dont le parti-pris est d’acquérir uni-quement des biens immobiliers ter-tiaires destinés à héberger des acti-vités socialement utiles, rendre les bâtiments moins consommateurs en énergie et en eau et accompagnerles locataires dans l’amélioration deleurs pratiques écologiques. « Il est important de participer à l’améliora-tion énergétique des actifs situés dansun environnement existant et de maintenir la cohésion territoriale », assure Faïz Hebbadj, président de Norma Capital. La SCPI Fair Invest arécemment obtenu le label ISR. n

ENVIRONNEMENT Qui conçoit les immeubles tertiaires de demain ? Foncières, sociétés de gestion, promoteurs, constructeurs… Tour d’horizon de l’avant-garde du bâti durable.

Les fers de lance de la construction verte

De gauche à droite et de haut en bas : la tour Saint-Gobain, bâtie à Courbevoie (Hauts-de-Seine) par Generali ; So Pop, immeuble de bureaux de Covivio entre Paris et Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) ; La Cité universelle, ensemble immobilier construit porte de Pantin, à Paris, par GA Smart Building ; The Link, le futur siège de Total, un projet porté par Groupama ; le projet urbain pour 2024 porte de Montreuil, à Paris, porté par Nexity, Aire (groupe Engie) et Crédit Agricole Immobilier. Photos Generali ; LBB Architecture ; GA Smart Building ; Artefactory/PCA Stream ; Nexity-Aire-Crédit Agricole Immobilier

Un hub numérique mondial, implanté dans un quartierd’affaires ultra-connecté, à Marseille, au cœur du 1er portde France, où le soleil brille 300 jours par an.

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• INNOVATION De plus en plus de start-up s’inté-ressent à l’immobilier de bureaux durable. Zoom sur les proptechs à la pointe dans ce domaine, à retrouver sur lesechos.fr/thema

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Les Echos Mercredi 9 décembre 2020 IMMOBILIER // 39

R É I N V E N T E Z V O T R E ( B U S I N E S S ) L I F E S U R L A C Ô T E D ’ A Z U R

i n v e s t i n c o t e d a z u r . c om

Depuis toujours, la Côte d’Azur est mondialement réputée pour la beautéde ses sites et sa douceur de vivre. De nombreux acteurs du digital,de l’eco tech ou des sciences du vivant ont choisi Sophia Antipolis ouNice Écovallée pour y installer leurs talents et faire prospérer leursentreprises. Comme Amadeus, IBM, Symphony, Bosch, Lundbeck,Symantec, Communigate, SAP et bien d’autres, rejoignez la Côte d’Azuret découvrez un bien-être au travail incomparable.

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40 // Mercredi 9 décembre 2020 Les Echos

Moncler prend un risque calculé en rachetant Stone Island.

Ce n’est pas parce qu’elle a été arborée par des artistes du rap, comme Drake, ou du rock, comme Liam Gallagher, que la griffe italienne Stone Island va troubler la mélodie du luxe résistant de Moncler. Bien sûr, le roi de la doudoune pourrait perdre de son parfum spéculatif avec cette première grosse emplette. Surtout, il n’a pas le « track record » d’intégration ni l’envergure des leaders du secteur. Il n’en satisfait pas moins les investisseurs thématiques, en attente de croissance interne mais aussi externe. Il leur a en effet dégoté un relais de croissance, en provenance du monde non coté, dont la situation ressemble à la sienne il y a dix ans. Cette recrue plus jeune et plus accessible pourra bétonner ses points faibles, par exemple sa faible exposition en Asie et en Chine. Les multiples de valorisation de l’excédent brut d’exploitation (16,6 fois et 13,5 fois) de la cible sont inférieurs à ceux de l’acquéreur (24,1 fois et 18 fois). Ce M&A financé en partie par une augmentation de capital réservée aux vendeurs est aussi l’occasion pour le PDG Remo Ruffini de conforter son holding familial en y accueillant Carlo Rivetti et sa famille. Les experts d’UBS, sans exclure une pression initiale sur les marges, attendent un effet favorable pour le bénéfice par action (+ 9 % à + 11 %), ce qui devrait éviter aux minoritaires de laisser des plumes dans cette alliance à l’italienne.

Alliance à l’italienne

La « dette Covid-19 » ne sera pas qu’un problème de pays riches. Mais chez les nations émergentes, sa mécanique y sera inversée. Irina Topa-Serry, économiste chez AXA IM, observe que bien que restant nettement moins débitrices que leurs homologues avancées (à hauteur de 65 % du PIB en 2021 en moyenne contre 120 %), elles ont vu leur charge d’intérêt augmenter alors que les assouplissements monétaires comprimaient celle-ci dans des grandes économies bénéficiant à plein de taux extrêmement faibles. Leurs besoins de finance-ment, comblés cette année par les banques locales, auront besoin l’an prochain que se confirme plus amplement le retour des capitaux étrangers enclenché depuis novembre avec les bonnes nouvelles vaccinales.

Les pays développés et les marchés émergents ne sont pas égaux face à la dette. Chauffeur éconduitLa voiture autonome n’est plus « hype », Uber en prend acte.

Le comble de l’ubérisation, c’est bien sûr lorsque le VTCiste à l’origine du terme – inventé au pays de Molière par le publiciste Maurice Lévy – la subit à son tour. Cette version de l’arroseur arrosé prend ici la forme du chauffeur sans chauffeur éconduit avant d’avoir pu atteindre sa route. Dans toute entreprise « normale », une activité brûlant 500 millions de dollars de cash par an comme le faisait l’expérience du véhicule autonome n’aurait pas attendu quatre années de vains essais ayant provoqué un mort et un incident en moyenne tous les 800 mètres parcourus pour être mise au rebut. Mais Travis Kalanick, le fondateur d’Uber, l’ayant érigé en « développement existentiel » vu par certains analystes comme le seul moyen de dégager, à terme, une profitabilité significative avec des flottes de robo-taxis, retirer la prise nécessitait un certain doigté. L’épée de Damoclès de la requalification des chauffeurs et livreurs en salariés, levée par la Californie, facilite d’autant plus facilement ce mouvement que le titre a progressé depuis quatre fois et demie plus vite que l’indice Russell 1000. L’actuel patron d’Uber, Dara Khosrowshahi, tire un trait sans trop de fracas sur cette déroute. Les 2,5 milliards de dollars investis se retrouvent opportunément dans la valorisation de sa participation dans sa branche apportée à Aurora, l’un des rares indépendants survivant d’un domaine qui a perdu sa « hype ». Le compteur a fini de tourner.

// Budget de l’Etat et PSR 2021 : 448,8 milliards d’euros (prévisions PLF 2021) // PIB 2020 : 2.223 milliards d’euros// Plafond Sécurité sociale : 3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10,15 euros à partir du 01-01-2020 // Capitalisation boursière de Paris : 1.764,98 milliards d’euros (au 30-11-2020)// Indice des prix (base 100 en 2015) : 104,51 en novembre 2020 // Taux de chômage (BIT) : 9 % au 3e trimestre 2020 // Dette publique : 2.638,3 milliards d’euros au 2e trimestre 2020

= Les chiffres de l’économie

La Corrèze toujours avant le Zambèzecrible

EN VUE

Lloyd Austin

J oe Biden aime les « premièresfois ». Avec Kamala Harris, c’estun doublé : il n’y a jamais eu de

Noir, ni de femme à la vice-présidence des Etats-Unis. Janet Yellen sera la pre-mière femme secrétaire au Trésor. Et, quel que soit le prochain patron du Pen-tagone, il s’agira aussi d’une première. En principe, ce sera l’ex-général Lloyd Austin, soit le premier Noir à la tête de laDéfense. De quoi satisfaire les organisa-tions afro-américaines, qui, ces jours-ci, ont beaucoup rappelé à Joe Biden sa promesse de constituer le gouverne-ment le plus ouvert à la diversité de l’his-toire des Etats-Unis. Il n’est tout de même pas certain que le Sénat passe outre à la condition qui veut qu’un ancien militaire soit à la retraite depuis au moins sept ans pour être nommé. JoeBiden pourrait alors se rabattre sur Michèle Flournoy, ex-numéro trois du Pentagone, pour qui son cœur penchait aussi. Là encore, il aurait sa « première »,

Michèle étant comme son nom l’indiqueune femme. En quarante ans de carrière,Lloyd Austin, 67 ans, n’a pas depuis WestPoint raté une seule épreuve du par-cours du combattant jusqu’au poste suprême de commandement central de l’armée américaine, qu’il quitta en 2016 pour prendre sa retraite et aller pantou-fler chez Raytheon Technologies. Sur leschamps de bataille il a remporté la SilverCross. La plus grande partie de sa car-rière s’est déroulée au Moyen-Orient ; il ya commandé les troupes. On le dit com-pétent mais prudent. Il ne devra pour-tant pas avoir froid aux yeux face à ses défis : la bataille du climat, la réponse aux menaces chinoises, la modernisa-tion de l’arsenal nucléaire américain. Dans l’immédiat, Biden compte sur lui pour assurer la distribution des vaccins.La guerre sanitaire, autre première.

(Lire nos informationsPage 9

Légère baisse à la Bourse de Paris

• A la Bourse de Paris, l’indice phare CAC 40 a reculé mardi de 0,23 %, à 5.560,67 points. Les inves-tisseurs ont joué la prudence alors que les négociations sur le Brexit semblent au point mort. Ils atten-dent également la réunion de la BCEjeudi : l’institution gardienne de l’euro devrait annoncer une nou-velle salve de mesures de soutien. A Wall Street, les marchés sont restés de marbre après un rapport de l’agence américaine des médica-ments : la FDA a pourtant publié desdonnées d’efficacité et de sécurité répondant à ses attentes pour le vac-cin de Pfizer et BioNTech. Plusieurs Etats, dont la Californie et New York,ont renforcé les restrictions.

Du côté des valeurs, les banquesont souffert du recul des rende-ments obligataires. A Paris, CréditA g r i c o l e SA a perdu 2,66 % et S o c i é t é G é n é r a l e 1 ,53 %. Les deux établissements ont enre-gistré les deux plus fortes baisses de l’indice CAC 40.

A l ’autre b out du sp ectre ,Teleperformance a gagné 2,02 %,suivi d’Alstom (+ 1,48 %) et de Vivendi (+ 0,96 %).

Le géant de l’eau Veolia a pro-gressé de 0,43 %, les investisseurs n’ayant pas réagi aux sommations par huissier adressées à plusieurs experts s’étant exprimés sur le dossier, quant à leur éventuel lien, direct ou indirect, avec Suez.