Les échelles d'observation de Dominique Desjeux

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La méthode des échelles d’observation de D. Desjeux Comment réconcilier les SHS avec elles-mêmes ? par Gaëtan Brisepierre, doctorant Décembre 2007

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La méthode des échelles d’observation de D. Desjeux

Comment réconcilier les SHS avec elles-mêmes ?

par Gaëtan Brisepierre, doctorantDécembre 2007

Plan

Introduction

1. Les caractéristiques de la méthode

2. Les échelles d’observation : l’exemple de la consommation

Conclusion

Introduction : qu’est-ce que c’est ?

Un découpage de la réalité sociale en fonction des points de vue.

Une stratégie de rigueur pour expliquer et comprendre les mécanismes des phénomènes sociaux.

Une typologie des recherches en SHS pour en déterminer la zone de pertinence.

Le principe

Quand on change d’échelle d’observation on ne voit pas la

même chose !

Analogie avec : la carte en géographie, le microscope en biologie, le macro et le micro en économie, la focale en photographie.

En sociologie c’est pareil, mais c’est moins habituel !

Echelle macro sociale

Echelle meso sociale

Échelle micro sociale

Échelle micro individuelle

Échelle neurobiologique

1- Ce que l’on voit à une échelle disparait à une autre

2- On ne peut pas dire que ce que l’on ne voit pas n’existe pas

Caractéristiques (1/2)

Point de départ empirique : la découverte des échelles est liée à la variabilité des enquêtes de terrain. Contre la « querelle des méthodes », pour la

complémentarité. Contre les « …ismes », l’approche par les Ecoles de pensée. Contre les approches disciplinaires.

Une réponse au paradoxe de l’observation du social : L’observation discontinue d’une réalité continue. « On ne peut pas mesurer à la fois la position et le

déplacement ».

Caractéristiques (2/2)

Un « relativisme méthodologique » tempéré et pas absolu.

Un modèle transdisciplinaire et interdisciplinaire.

Un modèle explicatif multifactoriel et pas de cause unique ou première.

Il n’y a que des « généralisations limitées » à une échelle et pas d’approche globale ou holiste.

La recherche du « vrai » plutôt que de la vérité.

Cumuler l’information plutôt qu’additionner.

Une VI devient une VD en changeant d’échelle.

A une échelle correspond plusieurs techniques de recueil des données

Micro-individuel

Micro-social

Meso-social

Macro-social

Echelle des Individus

Echelle des appartenances sociales

Echelle des espaces domestiqueset des petits groupes

Echelle des organisations et des systèmes d’action

neurobiologiqueÉchelle du cerveau

Rappel du plan

Introduction

1. Caractéristiques de la méthode2. Les échelles d’observation :

l’exemple de la consommation

Conclusion

Généralités

Un phénomène social peut s’analyser à plusieurs échelles.

Exemple du pouvoir : La domination et sa légitimité Macro-

social Les relations de pouvoir Méso et micro-

social L’autorité Micro-individuelle

L’exemple de la consommation La consommation comme phénomène social

dont il faut expliquer et comprendre les mécanismes.

On n’aborde pas la consommation pour elle-même (marketing) car le choix individuel est aussi une construction sociale.

On s’intéresse : à la consommation comme analyseur de la

société aux usages sociaux de la consommation

Macro-social

C’est l’échelle des appartenances sociales : sexe et genre, âge et génération, strate et classe sociale, culture et communauté.

Principe explicatif : la corrélation statistique entre deux variables.

Objets : lien social, structure sociale, mode de vie, classe sociale, culture et valeurs, grands imaginaires, tendances sociales.

La société dans son ensemble, l’individu n’est pas visible.

TRD quantitative : questionnaire…

Disciplines : macro-économie, anthropologie, démographie…

Consommation : macro-social La consommation est un mécanisme d’échange

social et symbolique entre classes, genres, générations, ethnies…

La décision d’achat devient une boite noire, les comportements des consommateurs sont agrégés, ce que l’on regarde c’est le résultat.

Ex : Bourdieu et la théorie de « l’habitus » : lien entre appartenance sociale et goût esthétique. La consommation est un moyen de différenciation entre classes sociales : la photographie est un art moyen. (La Distinction, 1979)

Méso-social

C’est l’échelle des systèmes d’action c’est-à-dire des interactions entre acteurs sociaux.

Principe explicatif : le contexte c’est-à-dire la situation et ses paramètres.

Objets : marchés, organisations, institutions …

Fait apparaitre : les processus sociaux comme l’innovation, les réseaux, : les intérêts, les rapports de pouvoir, les marges de manœuvre, les « rugosités » sociales…

La société devient un ensemble de systèmes d’action, l’individu n’apparait pas encore.

TRD : entretiens à dire d’experts, analyse stratégique…

Disciplines : sociologie des organisations, sciences politiques…

Consommation : méso-social

La consommation est un système d’action organisé autour d’un marché : Acteurs politico-administratif Groupes de pression Entreprises

La décision d’achat est le résultat des interactions stratégiques (du jeu) entre acteurs sociaux qui luttent pour orienter le marché en fonction de leurs intérêts.

Ex : les marchés de l’énergie le choix du diesel et de l’électricité nucléaire fin des 70’s le choix des biocarburants (versus hybridation) pour la voiture

propre.

Ils sont le résultat de l’interaction stratégique entre acteurs sociaux (Etat, industriels, consommateurs…)

Micro-social

C’est l’échelle du quotidien c’est-à-dire des interactions entre acteurs individuels.

Principe explicatif : le contexte c’est-à-dire la situation et ses paramètres objectifs et subjectifs.

Objets : famille, immeuble, groupe de pairs, entreprise, association…

Fait apparaitre : les pratiques, les usages, les routines, la sociabilité, l’identité…

TRD : entretiens semi-directifs, observation directe, méthode des itinéraires, focus group…

Disciplines : ethnologie…

Consommation : micro-social

La consommation est un élément constitutif du lien social familial, amical, professionnel...

La décision d’achat est le résultat d’une suite d’interactions entre individus (ex : les membres d’une famille).

Ex : la « manipulation » des parents par les enfants commence dans la cours de récrée et finit à table, en passant par la liste de courses et le magasin.

Micro-individuelle

C’est l’échelle de l’individu c’est-à-dire de l’acteur unique.

Principe explicatif : les motivations conscientes ou inconscientes.

Objets : individu, acteur, agent, sujet, personne…

Fait apparaitre : arbitrage, calcul, émotions, normes sociales incorporées, attentes, l’intention, signes.

La société n’apparait plus, on voit seulement l’individu.

TRD : entretien non-directif…

Disciplines : Psychologie, psychanalyse, micro-économie, sciences cognitives, marketing, psychologie sociale…

Consommation : micro-individuelle

La consommation disparaît, on voit seulement le comportement d’achat.

La décision d’achat est un choix individuel à un moment unique en fonction d’arbitrage conscient et de motivations inconscientes : calcul coûts/bénéfices routines ou « tunnels cognitifs » préférences ou indifférence

Ex : le « shopper » devant un linéaire de la grande distribution

Biologique

C’est l’échelle des cellules et du cerveau

Principe explicatif : le déterminisme biologique selon un schéma S-R (stimuli-réponse)

Objets : les processus physiologiques et neurologiques

Fait apparaitre : les besoins, les mécanismes organiques

La société n’apparait pas, ce que l’on voit c’est l’individu comme une machine, d’un point de vue fonctionnel

Disciplines : biologie, neurologie, ergonomie, génétique…

Exemple : le processus de nutrition

Conclusion

Une « tournure d’esprit », un automatisme à acquérir en se posant systématiquement la question : A quelle échelle… ?

Une méthodologie souple à adapter en fonction des cas, et pas un dogme rigide.

Ce qui est intéressant c’est : de changer d’échelle (principe de mobilité de

l’observation), d’étudier le rapport entre les échelles, de trouver les interstices entre échelles.

Bibliographie : D. Desjeux Les Sciences Sociales, Que sais-je ?, PUF, 2004.

Les échelles d’observation de la consommation, Argonautes C&S, 1998.

Echelles d’observation, itinéraire micro-social, Conférence Sciences Po, Argonautes C&S, 2005.

Décisions, rationalité et échelles d’observation, Argonautes C&S, 2005.