les Cris de Laure

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les Cris de Laure éDITIONS LES CAHIERS

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Poèmes, fragments et correspondance inédits de Laure (Colette Peignot) - Mai 2014 - 14x21 cm - 120 pages - ISBN : 978-2-9534806-6-5 - 20 euros

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éDITIONS LES CAHIERS

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COLLECTION HORS-CAHIERS

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Colette Peignot naît en 1903 dans une famille d’illustres typographes français. Adulte, elle rompt avec son milieu bourgeois et conservateur, fréquente Jean Bernier qui col-labore à l’Humanité. Après un séjour de 1930 à 1931 en URSS pour partager le quotidien des moujiks, elle devient membre du Cercle communiste démocratique de Boris Souvarine, écrit des articles pour la Critique Sociale qu’elle finance partiellement. Dans les dernières années de sa vie, elle participe à l’aventure de la société secrète Acéphale. À sa mort en 1938, ses proches découvrent dans ses papiers l’exis-tence de nombreuses lettres, fragments, poèmes et un récit autobiographique (« Histoire d’une petite fille »). L’année suivante, Georges Bataille et Michel Leiris décident, sans autorisation, de publier hors-commerce un premier recueil : le Sacré. Trois autres suivront : écrits de Laure (1971), écrits retrouvés (1987), Une rupture. 1934 (1999). Les Cris de Laure rassemblent ses derniers textes inédits. – N.D.É

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éditions les cahiers

LAuRE

les Cris de Laurefragments, poèmes

suivis de

Correspondance1926-1936

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les Cris de Laurefragments, poèmes

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LAURE MerdedieuGosse de riches deLaure Sainte-Marie-Mère-de-Dieu

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Les lieux saints et les lieux infâmes se côtoient, se confondent car les entrées également sombres, mys-térieuses sont éclairées lampes, lueurs identiques et je suis [illisible]

À la faveur des portes entrouvertes je crois recon-naître les mêmes visages troubles, blafards ou bien enluminés les prostituées de Carpaccio ont ce regard plus lointain plus profond plus perdu d’extase que ces vierges rubicondes et offertes de la Renaissance.

À cette époque je côtoie tout sans entrer nulle part une arrière-cour dans telle rue près du canal déchire le voile d’enfance. Là une femme plus vieille que la vieillesse plus sale que la saleté.

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Je me souviens aussi d’une promenade de famille dans un omnibus à impériale la route montait, encaissée entre les arbres touffus, il faisait très chaud, les che-vaux n’avançaient pas. Pour me distraire, mon frère me récita la fable de La Fontaine sur la mouche du coche et puis enfin nous arrivâmes au sommet de la côte il n’y avait plus de bois mais une plaine qui me parut immense. Mon père m’expliqua que la limite était la ligne d’horizon et que cette plaine était aussi bleue que la mer, puis il recommença sans le savoir l’histoire de la rotondité de la terre et son perpétuel mouvement. J’étais reprise d’une forte angoisse.

À cette même époque, à Paris, je passais également de longs moments sans que personne s’en doutât, dans le cabinet de toilette de ma mère où deux grandes glaces se faisaient vis-à-vis. Je m’efforçais de compter les représentations de moi-même — quelquefois j’en trouvais 100 d’autres fois bien plus.

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LAURE

Une sorte de rêve intérieurTourner le dos à son étoile

Réviser Notion de la valeur de la vie humainePlus on va vers l’Orient plus la notion de nombred’individus se perd. La vie ne va pas sans crimeDésespoir

vieconditionne {

suicide

Ceux qui ne sentent pas les silencesil leur fautcomprendre, enregistrer, cataloguer d’après des données exactes, des supputations logiques

Ceux avec lesquels c’est tout le contraire —

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Je sais seulement

Le temps me gagne de tristesse.La force physique me manque à chaque instant.Quelque chose me « vitriole » moralement.Je deviens tout à fait autre. J’ai des réactions étranges

que j’aurais détestées ailleurs ou chez d’autres.J’ai les mâchoires contractées à force de serrer les

dents.Les « fins sourires » des autres, c’est presque une

délectation.« Si vous saviez à quel point je vous vois tous jouer

la comédie et je regarde comment vous faites et cela m’intéresse beaucoup » —

Non je ne me laisserai pas bouffer par mon métier.