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L'EPOUVANTAILIl n'a que 33 ans, mais sa réputation a largementdépassé les frontières de Rhône-Alpes, etle cénacle national du logement social ne taritpas d'observations antagonistes, d'admirationet de diatribes pour cet autodidacte qui proclame« révolutionner le métier» aux commandesdu groupe A/ila (2 600 logements et 272 millionsd'euros de chiffre d'affaires): Hervé Legros,« flamboyant» architecte d'un systèmeopportuniste exploitant un contexte et unerèglementation avantageux, bouleverse lescodes. Ceux de la profession, qui « comprendsons comprendre», ceux de la communication,qu'il veut à son image: d'audacieuse à provocatrice,celle enfin du « comportement», ici résolumenten rupture, narcissique voire arrogant.De quoi questionner la moralité d'une fortuneostentatoire bâtie dons la construction dulogement des plus modestes et avec l'aidedes subsides publics. L'ego constitue le moteurdu « sponsor maillot» de l'Olympique lyonnaiset deuxième actionnaire du champion de Francede basket-bail, l'A5VEL.1I pourrait être aussi sonpiège. Voire son péril. Enquête sur un modèleéconomique et une personnalité disruptifs.

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ENQUÊTE, DENIS LAFAYPHOTOGRAPHIES, LAURENT CERINO / ADE

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« C'est un mystère. "Voilà de quelle locutionla plupart desobservateurs qualifientl'origine et surtout lesleviers de l'ascension,fulgurante, du groupe Alila.Mystère sous l'écorce duquel bouillonnent suspIcion et admiration,jalousie et incompréhension, révulsion et respect. 1< Oui, commentJail-« il » ? », s'interrogent les professionnels du logement social,qu'ils soient élus, bailleurs sociaux, économistes. Et le scepticismerésonne encore plus fon lorsqu'il émane des promoteurs-construc­teurs : « Son métiel~ /lOUS l'exerçons. Nous pouvons tordre les chiffresdans tous les sens, c'est inexplicable. » « Il » a pour nom Legros elprénom Hervé. Une comète dans l'aréopage, tout juste âgé de 33ans, fier d'un parcours d'écolier cancre et d'une origine socialemodeste qui le conduisit, enfanl, à grandir dans quelques banlieues« difficiles ~ de l'agglomération lyonnaise. Oui, comment ce tilu­laire d'un CAP de plomberie a-t-il entrepris pour, quinze ans plustard, piloter une société spécialisée dans le logement convenlionnéet intermédiaire' qui revendique un chiffre d'aHaires en 2016 de272 millions d'euros (contre 148 millions d'euros un an plus tôt)pour la construction de 2 600 logements, un résultat net de 5 %, etun portefeuille d'actÎvité de 730 millions d'euros avec seulement..46 salariés'Des autodidactes entrepreneurs « successful », Hervé Legros cultivequelques aptitudes singulièrement développées: en premier lieul'intuition, l'opportunisme, mais aussi une intrépidité délestéedes conventions. Voilà sans doute ce qui l'a convaincu, dès 2004,d'investir un segment de l'immobilier alors méconnu, une nichenégligée par les ténors du secteur de la promotion-construction:celle du logement social. Il Ce que /tous avo/ts méprisé, ell nous COIlCel1­

trant sur les programmes classiques et d'ellvelgure, lui a su le prendre ilbras le corps et développer lin modèle approprié. Bien fait pour 110(/5 ! li,

concède l'un d'eux. Lintéressé est habile dans son discours, par­faitement ciselé, subtilement rôdé : de sa propre expérience devie dans les logements sociaux, il a hérité une volonté farouched'œuvrer à donner un toit de qualité à des publics auxquels ilesl souvent inaccessible. Libre à chaque observateur de séparer

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Avec son présidentde conseil desurveillanceJean-Claude Michel,rouage essentielpour le crédibiliseret le« notobiliser »

dans les milieuxéconomiques,Hervé Legroslorme un tandemdes « contraires. »

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le bon grain de l'ivraie, de distinguer une motivation intrinsèquevertueuse d'un ingénieux argument de communication et d'image,essentiel pour légitimer sa stratégie auprès des pouvoirs publics etnotamment des élus, « clés» dans son disposilif.

Alila profite d'une distorsiondes règles de concurrenceavec les bailleurs sociaux.« Quand donc cessera-t-on decomparer l'incomparable, demesurer des compétiteurs soumisà des protocoles différents? »

Resle que j'édification, mais surtout la montée en puissance de cedernier, Hies a conçues en tirant profit d'un contexte, de carences,eL de règlernentat ions providentiels. Outre donc le désintérêt del'ensemble de la profession, citons pêle-mêle la loi SRU (Solidaritéet renouvellement urbains) de 2000 qui impose aux communesde plus de 3 500 habitants (et l 500 en Ile-de-france) un quotade 20% de logements sociaux - renchéri de cinq points depuis laloi Duflot de 2013 - ; le plan « Marshall» initiê par Nicolas Sar­kozy en 200S-2009, visant à soutenir une fïlière de la constructionimmobilière alors dévastée et à régénérer une offre d'habitat socialnotoirement insurfisante - espéré à la dé : 100 000 nouveauxlogements sociaux via notamment la possibilité, pour les bailleurssociaux, d'acquérir jusqu'à 30 000 unités en bloc par le biais de lavente en l'état futur achèvement (VEFA) -; des bailleurs sociaux etdes maires dépassés par l'appel d'air, et sommés de répondre auxinjonctions de cette situation inédite. Et c'est d'ailleurs là que résidele « génie opportuniste» d'Hervé Legros: apporter aux bailleurssociaux une offre de construction « en bloc)) qui comble leur insuf­fisante capacité à produire eux-mêmes les programmes.

DISTORSION DE CONCURRENCEAinsi, fort d'un Il emprtlllL obligataire de cinq millions d'euros » (selonson président de conseil de surveillance) et d'autant de "fol1dspropres signes d'ul1l1iveau d'endettement 11111 » (selon lui), Hervé Legrospeut développer une stratégie de croissance exponelllielle, désor­mais visible de Bordeaux à Nantes, de Paris à Strasbourg, prochai­nement dans le nord et le sud-est de l'Hexagone. Et il joue sur duvelours, même s'il entretient avec les bai1leurs sociaux une relationschizophrénique: ils constituent l'essentiel de sa clientèle, maisil est concurrent de leurs propres actions en « mClîtrise d'ouvragedirecte» quand bien même il assure ne fi' jClmais » se positionner surdu foncier qu'ils lorgnent - « ce qui col1slîtuemit UI1 casus belli si c'étaitavéré Il, prévient un bailleur social. Et ce « velours» pone un nom,au cœur même de l'amertume ou de la détestation que peuventlui vouer lesdits bailleurs sociaux: un différentiel de concurrence,c'est-à-dire des conditions réglementaires d'exercice sensiblementdistinctes el avantageuses, que les plus vindicatifs assimilent àune distorsion aussi inique qu'intolérable. cc Nous devons attendreréglementairement environ trois mois pour retenir un architecte; lui, surun simple appeltélépllOnique, est autorisé it conLmctualiser », illustre,furieux, un professionnel. En effet, les bailleurs sociaux «construc­teurs » sont assujettis à la loi MOP (Maîtrise d'ouvrage publique)et au code des marchés publics, particulièrement contraignantpuisqu'il impose l'organisation de concours - architecture, etc. -, lechoix des moins-disants, des obligations de prestation... aux réper­cussions d'autant plus onéreuses qu'elles allongent sensiblement

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- 6, 12, 18 mois voire davantage - le délai de « sortie» d'unprogramme. Ce mode de consullation, qu'un promoteur majeurconfine à une « sdérose », les acteurs « privés» y échappent. Auxbailleurs sociaux le carcan et la pesanteur -lestée par les particula­rismes sociaux et managériaux de ces organisations assimilés à desétablissements publics, mais aussi par le volet « gestion» du parc(gardiens. entretien, etc.) -; à Alila el ses coreligionnaires l'agilité,la liberté de choisir, la rapidité de décider. On comprend mieuxl'embarras des premiers à devoir faire travailler ceux·là mêmesqui tirent profit des entraves les asphyxiant et les disqualifiant../( Quand donc cessem+oll de comparer l'incomparable, ['est-à-dire demesurer des compétiteurs assujettis à des règles différentes? ), tonneCédric Van Styvendael, directeur général d'Est métropole habitatqui revendique une pan substantielle de maîtrise d'ouvrage directe- jusqu'à 70% de son métier de bailleur social. Bref, Alila n'est pas« que » le partenaire providentiel de bailleurs sociaux désarmés,ainsi autoproclamé dans la voix de Hervé Legros et de son pré­sident de conseil de surveillance Jean-Claude Michel..

CaST KILLER ASSUMÉCette singularité contextuelle, dans laquelle Hervé Legros s'estjudicieusemem engouffré, ne suffit toutefois pas, à elle seule, àéclairer les mécanismes de son succès entrepreneurial. L.:exiguïtéde son équipe, la maniabilité de son organisation, l'extrême rigueurqu'il applique à la gestion des coûts, la sagesse d'être concemrésur une seule véritable famille de produits (vente en bloc) jugulantainsi !Oute dispersion et donc déperdition, les process habilementdupliqUés au gré des programmes y contribuent. Ses terrains dejeu sont judicieusement déterminés : des communes carencéesau regard de la loi SRU donc fortement sollicitées par les bailleurssociaux, où l'écan des coûts des logements social et privé est faible.Et il commence tout juste à (( franchir le périphérique}) pour s'ap­procher des zones hyper-urbaines. Cédant chaque programme ­tous de taille modeste - en bloc à un seul client, il s'épargne loutfrais de commercialisation direct ou indirect - études de marché,service et bulle de vente, publicité, frais financiers ... - qui peutcorrespondre. à la fin, à au moins 5 % du coat final de réalisation.Pour celle même raison de l'unicité mais aussi, consubstamielle­mem, de la solvabilité assurée dudit client, de la rapidilé de saniedu programme et du mode de règlement calé sur la progressiondes étapes de construction accomplies, ses exigences en trésorerie

« Ce business du logement social que nous avons méprisé,lui a su le prendre à bras le corps et développer un modèle approprié.

Bien fait pour nous! »

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La témérité, la naïveté ou l'erreur de Hervé Legrosest de croire que la France est l'Amérique de Trump

sont circonscrites - Il le besoin en fonds de roulement devient très vitenégatif ", précise un concurrent - et les partenaires bancaires semontrent naturellement enclins à débloquer le financement. Unrisque donc très limité, qui d'ailleurs participe substantiellement auressentiment de ses détracteurs, exposés audit risque chaque foisqu'ils lancent un programme libre « classiquement» commercia­lisé. Au final, résume un émule comme beaucoup de ses confrèresà la fois Il admiratif Il du modèle et « atterré" par la personnalité,Hervé Legros a industrialisé avec succès les règles d'une nicheimmobilière. « Ce qui profite il ses compétiteurs, qui ont appris à s'ins­pirer de ceUe gestion efficace et visiblement lucrative! ».La nature de sa relation avec les prestataires est également clé. Nuldoute que ce « cost killer » assumé obtient d'eux des conditionsavantageuses, soutenues par ledit contexte de risque très faible,la récurrence et la montée en puissance des volumes commandés,et une conjoncture économique ces dernières années défavorableaux marges des différents corps de métiers qui composent uneconstellation de 140 prestataires. Pour autant, les (mal)traite-t-il,les « saigne-t-il », comme le supputent certains de ses détracteurs etl'illustre « l'affaire» Laurent Frères (lire encadré p.42)? Gilles Cour­teix, président de la Fédération Auvergne Rhône-Alpes du bâti­ment et de la Fédération Rhône du bâtiment et des travaux publics,désamorce l'hypothèse: « Particulièrement lorsqu'elles exploitent lesdispositifs publics, nous sommes très vigilants sur l'exemplarité du com­portement des sociétés faisant appel aux entreprises de notre secteurd'activité. Ayant cu vent d'interrogatiolls le cOl1cenumt, Hervé Legrosm'a spontanément contacté, m'assurant de relations sailles avec les entre­prises du biHiment qu'il sollicite. li m'a même remis la liste de ces presta­taires, auprès desquels j'ai aussit6t diligenté une enquête. Des premièresconclusions - encore partielles mais suffisamment nombreuses pour étrereprésel1tatives du panel-, il ressort Il "inexistence de problèmes de règle­ment », et une conclusion générale ainsi résumée: « Pas pire qu'ailleurs ~>.

Il semble que les quelques errements d'hier ne soient plus d'actualité.Mais nous demeurons attentifs. »

PROFESSIONNALISATION MULTIFORMEUne professionnalisation des process internes d'Alila qui doit« aussi» à celle des éqUipes dirigeanles - le récent recrutementde jean-Michel Simard, jusqu'alors directeur technique AuvergneRhône-Alpes de Bouygues, ou de Fabien Thierry (HEC eL Berkeleyuniversity) ex-directeur régional d'Altara Cogedim, l'atteste - favo­risée par une politique d'embauche selon un acteur majeur du sec­teur fi particulièrement généreuse et convaincante H - «des directeurs deprogramme se voient proposer des rémunérations allnuelles de 100 000euros quand le marc11é les situe 40 %en-deçà, et même des Q5sistantessont débauchées pour des promesses deux fois supérieures à leur traite­ment >1 -, également à un devoir d'exigence proportionnel à J'enver­gure croissante de la société, de sa notoriété, de ses ramifications

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nationales, et des... critiques qui l'assaillent, dans le prolongementdesquelles s'affUtent les armes de la « discréditation » et de lariposte. Une professionnalisation dont l'implication, à ses côtés, deGéraldine Mazier et de jean-Claude Michel fut le point de départ.Sa compagne, directrice régionale Rhône-Alpes, fil ses armesau service développement de Nexity. Cette expérience, chez un.c major », dans la conquête du foncier n'est pas étrangère à laréputation, laudatrice, relayée jusque chez seS concurrents: «pro­fessionnelle afJütée li, « négociatrice 110rs pair )l, « capacité singulièred'analyse et de persuasion Il. Elle n'est peut-être pas étrangère nonplus à la première réalisation « lyonnaise », hautement symbolique,d'Alila ; ce programme de 42 logements baptisé Atipik et inauguréle 9 décembre 2016 devait, initialement, être orchestré en maîtrised'ouvrage directe par Immobilière Rhône-Alpes (groupe 3F, l'undes principaux bailleurs sociaux français) ; selon nos sources, lefoncier lui était promis, mais il fut finalement vendu à Alila par leconsortium en charge de la construction-promotion de l'ensemblede 180 logemenLs. ConsorLium piloté par NexiL y.Quant à l'ancien numéro 2 du transporteur Norbert Dentressangle,débarqué de sa présidence du directoire le 25 juilleL 2008, il exercecomme actionnaire - il possède 10% du capital d'Alila Participa­tion via sa société Management et participation, 25 % étant déte­nus par l'ex-dirigeant du clermontois Babou, jean-Philippe Rey,et 65 % par la holding personnelle d'Hervé Legros, HPL groupe-,président du conseil de surveillance - auquel participe égalementle discret fondateur d'Adequat imerim, Jean-Marc Brun -, mais,davantage encore, cOlUme conseil el Jacilitateur, deux missionsessentielles pour sculpter la légitimité d'un poulain impréparé auxcodes des affaires, inconnu des cercles décisionnels, peu au fait dela maîtrise de la croissance. Une sorte de « caution morale» aussi,de garantie nécessaires à 4( l'institutionnalisation» d'ABIa et à la« notabîlisation Il de son fondateur, le sexagénaire et le trentenaireformant un tandem singulier - « la complémentarité des contraires,

cc Oui, c'est vrai, Alila pratiquel'entente anticipée avec lesbailleurs sociaux, et oui c'estdélictueux. Mais il est tout aussivrai que c'est communémentpratiqué par l'ensemble desprofessionnels. » Un élu del'agglomération lyonnaise.

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Le comportement ostentatoire,provocateur et « agressif »

d'Hervé Legros pourraitdépasser le simple stade de« l'idiotie » dont nombred'observateurs l'affublent.Et liguer compétiteurs,bailleurs sociaux, acteurspublics, élus et législateursdans un « Tous contre Alila. »

une alchimie au départ bien improbable mais au final heureuse ~ - quiéveille, dans la mémoire du premier, « bien des similitudes» aveccelui qu'il composa avec le créateur du géant du transport et dela logistique. Mêmes les (( attaques 1/ dont Hervé Legros est l'objet,motivées par « la jalousie d'tilt milieu désarçonné par l'efficacité d'unmodèle innovant " lui rappellent celles, 20 ans plus tôt, appelées àsalir l'essor du groupe Norbert Dentressangle. /( On nous SOUPÇOIl­

nait de dissimuler de la drogue dans les ralles des camions franc/tissantla Mallche.. )}

ZONES DE FRAGILITÉEt c'est ce panorama mulli-factoriel, ce puzzle habilemem composéqui assurent à Hervé Legros un avantage concurrentiel dans laphase la plus cruciale du processus d'ensemble: l'acquisilion dufoncier, dans la course à laquelle les bailleurs sociaux punis par lacontrainte économique et administrative peinent à être compétitifs.Car « lui>; peut se permettre d'acheter le foncier plus cher lOuten proposant à son client un produit final à la fois de qualité - ceque concèdent même ses détracteurs - et contenu dans des tarifsdécents ~ autour de 2 500 euros HT/ml

. D'où, là encore, la per­plexité au sein du cénacle, d'autant plus aigué que rien ne semblepouvoir contrarier l'ascension du« vilain petit canard» ell'expan­sion tentaculaire de son empire naissant. Vraiment rien?L:aplomb, la suffisance, même j'arrogance volontiers provocateursqu'exhibe le longiligne trentenaire ne traduisent pas « que» l'ap­parente assurance indestructible en son modèle économique. Ils nemanifestent pas non plus « que» son rejet des caciques du milieu

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« Plus jamais je ne feraitravailler cet homme. »L'un des plus puissants bailleurs sociauxde Rhône-Alpes

de l'immobilier et du logement social, qu'il s'emploie à bousculer,à moquer ou à défier. lis servent « aussi» à faire digression devantles failles, les points de fragilité susceptibles de vulnérabiliser unédifice à plusieurs égards friable - en dépit de comptes sociauxplutôt solides.Ces zones de fragilité sont de deux ordres: intrinsèques et exo­gènes. Les premières résultent notamment d'une stratégie de faiblemarge, selon certains observateurs de marge « même nulle>; lorsquel'investissement correspond à une stratégie de séduction el d'im­plantation dans une commune ou une agglomération. Peut-êtreest-ce d'ailleurs le cas dans la région Nouvelle Aquitaine, espace dedéveloppement primordial pour Alila, et où le directeur territorialFabien Thierry occupa de 2011 à 2014 la responsabilité de direc­teur général adjoint de l'aménagement de la ville cie Borcleaux. Al'aune de J'extrême sensibilité que la qualité des relations avec lesélus exerce sur celle de J'activité des bâtisseurs de logement social- les mairies proposent du foncier, et selon qu'il s'agisse de fon­cier cédé par la collectivité à l'issue d'un concours ou directementacquis par un promoteur, les communautés urbaines et apparen­tées sont délégataires des aides à la pierre et à ce titre habilitées à« flécher» les opérateurs vers les bailleurs sociaux -, nul doute quecet épisode professionnel aux côtés d'Alain juppé aura participé aurecrutement de ce profil.D'autre part, et quand bien même l'auscultation des comptessociaux du seul holding HPL Groupe indique un niveau de capi·taux propres (33 millions d'euros au 31 décembre 2015) et de tré­sorerie (12,7 millions d'euros) solide, l'efficience du {( système»Alila impose un rythme soutenu et ininterrompu de programmeset donc est incompatible avec une conjonction de défaillances ouune quelconque stagnation. Nonobstant les subventions conféréesaux bailleurs sociaux qui, lorsqu'elles sont élevées, abondent lebusiness model de l'opérateur et enflent la rentabilité finale duprogramme, la modestie des marges doit être compensée par unevolumétrie et une vélocité d'exécution qui d'ailleurs imposent unelogistique parfaitement huilée. Et le renchérissement annoncé descoûts de construction, amorcé en 2015 et promis à une accélérationdans les prochains mois, devrait altérer davantage ces marges.Mise en perspective des questionnements relatifs à la jeunesse, àl'inculture académique, à l'invisibilité dans les réseaux décision­nels, et à la ... personnalité du dirigeant, mais aussi à la fulgurancede l'ascension de son groupe, toute incenitude pourrait alors êtresynonyme de crise de confiance - chez les clients et les banquiers­et donc d'écroulement. « Il constmit !Ill château de cartes. vulnérable() tout changement même mineur de paramètre », synthétise un promo­teur-constructeur. Dont la rLiière est coutumière des cas de débâcleaussi vertigineuse que fut la croissance préalable.

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Ou'esl-i1 allé fioquer le logo d'Alila sur le maillot de Parker majoritaire ESI-ce amsi confiée par une source au plusl'Olympique lyonnais? «Je suis 11/, gClmin de l'OU proche du champion NBA parce que les négociations faillirent àlai grandi au rythme des cmntcs 2000 synonymes cit plusieurs reprises « [(Ipolcr " à l'aune de certaines exigences degrande épopée, j'cli toujours rrgank (lvee Cl.dminHioll ft Hervé Legros jugées inacceptables, que la communication orfi­succès du président jeall·Mic11cl Aulas. AffIcher le nOIll delle sur le montam de l'investissement ou sur le pourcentage de

de ma société dans le dos dcSjoucufS était clonc un rèvc )), explique pans détenu faill'ohjct d'un silence talai? Ni l'intéressé ni le pr ­Hervé Legros. Un re-vc qui a un coût - qu'il rduse de révéler sidem du conseil d'administration Gaëtan Muller s'abritant deImais qui peuL être estimé à environ 1 à 1,2 million d'euros par rière «uneclCHlse de non divulgation des ilifonnatiolls », ne consententsaison -, d'uutant moins compréhensible que le portefeuille à r v ler le monlan! de l'investissemenl. Le storytelling,là encore,clients d'Alila est confiné à une... quarantaine d'intcrlocu- est efficace ft quellc belle rcvanclll' pour nOlis l1uis - TOI1)', Gaètanteurs, et que le potentiel d'élargissement n'est que de quelques el moi-mèm dlllcun élève mcdioal' mais bL'lIt' l'L'I'SOl1l1L', de nàtpoignées supplémentaires. Nul doute que la notoriété d'Alila~"'I"-",';;;t'.form'l/iOIl sport-éludes. Les projets l'orles l'ar/'Asve/ sont dL' touscratt désormais au-delà de Lyon, mais on est donc loin des ordres: sportif cl scolaire donc, nwis aussi cIHrcpn:IH.'llrial, ci/oyell, clmotivations classiques et rondées propres au BloC. El si l'ae immobilier l'iCI la consfruction dc la salle A,.clla ct cil' la Padier Aca­complissemem personnel d'un rève d'enfam assorti d'un ego demy (située ft Gerland, et dont le naming de\'ait être dé\'oilé le(l'adulte fier d'être vu de tous est au cœur de l'investissernem la février). Ces projels feron( myolUll:.,-lc club ct l'agglomération dlll1sl'opportunité d'afficher aux yeux des aCleurs publics el poli- Ir moncle enlier; y pt'rlicil'er est stimul"nt ., délaille Hervé Legros.tiques son enracinement local et son soutien à une « cause» Deux grands chantiers infrastructurels auxquels, Gaetan Mullerpopulaire et éminemment « idcntitaire » n'est pas nelltre. Tout l'estime lui-m~me, l'expertise immobilière du nouvel actionnaire,ce qui concourt à consolider les « liens» avec le petit cercle qui (f exercera cn fanf l[tle conseiller II au sein de la gouvernance,des élus - notamment les édiles et ceux des collectivités ter- contribuera de manière précieuse. Mais comment? « If Ile m'aimeriloriales - ct des bailleurs sociaux au fil desquels « lOut se l'C1S. c'est ce que le PDG d'Alila pense de son homologue ThienyJOu » est précieux. Ceux qui d'ailleurs semblel1l profiler de Gion s aux commandes de la société TGl Group Floriollmmo­sa gén rosité, notamment lors de déplacements «sportifs en bilier laquelle, aux cOtés de DCB International, financera, éngeravol privé pourraient en témoigner. En revanche, son argument ct exploitera l'enceinte Arena (12 000 places, 60 millions d'eurosau nom duquel il serail ( IWl'cc1é de sollicitations émanant de de budget, sortie prévue en 2020)... Quant à la Parker Academy,supporlers de "DL}) prêts à lui céder leurs terrains ct ainsi aurail Hervé Legros espère+il « récupérer » la réalismion de la cemaineconclu «( heaucoup d'opénllions » est-il bien crédible? de logements sociaux intégrée au programme immobilier (com-Son investissement au capilal de l'Asvei SASP, celui-là personnel prenant nOlammel1l 400 10gemel1ls étudiants) ? Chez le promo-le placerait avec ft au moins 15% dll capital» au (1 sccond rang» dans teur-constructeur Océanis, aux commandes du projet, on affirmela hiérarchie des actionnaires, devant Jacques Gaillard, Bruno par la voix de la directrice marketing Dominique Labadie « /lC l'asRoussel, Gaetan Muller, les ex-basketteurs américains Michael conllllitn: Ali/a» ct accomplir ( l'intégralité de la construcLÎon, «yFinley el Corey Maggelle, et derrière le président « icône 1) Tony colllpris sociale. Il M

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Ce que la profession redoute?Qu'Alila enflamme tant la contesta­tion que les pouvoirs publics et lelégislateur disent « stop ». « Nousaurions alors tous et tout perdu. »

CONDAMNATION ANECDOTIQUEOU SYMPTOMATIQUE?Un simple manquement isolé ou l'exemple d'une pratique coutu­mière ? ~affaire opposant Alila (via les sociétés HPL Promotion, HPLBourg Loups SCI, HPL Blace Beaujolais) aux Etablissements LaurentFrères met en lumière les soupçons portant sur l'Intégrité des rela­tions entre Alila et ses fournisseurs. La société de prestations élec­triques avait été retenue pour équiper deux chantiers pilotés pardes SCCV propriétés de HPL Promotion. Faisant notamment valoirà l'endroit de la SA Laurent Frères la • non réception des garantiesde paiement» puis • une rupture brutale ' et un » comportementviolent» à l'issue desquels elle fut placée en procédure de redres­sement judiciaire puis en iiquidation, les liquidateurs obtinrent enpremière instance le 17 juillet 2014 la condamnation de HPL Pro­motion à verser un total de 75 923 euros aux motifs notamment de• perte de marge» et de • dommages et intérêts. »Le jugement futconfirmé en appelle 2juillet 2015.

UN MOOÈLE LIGOTÉ À LA RÉGLEMENTATIONMais c'est 4( au-dehors,. de sa société, hébergée dans de somptueuxlocaux dominant le Parc lyonnais de la Tête d'Or et qu'illumineune impressionname noraison blanche, que se concentre l'essen­tiel des sources potcl1lielies de fragilité. Lesquelles ont pour décorla règlemenlation. Ou plus exactement les règlementations. Eneffet, qu'adviendra-I-i1 du modèle Alila si (ou lorsque) les bailleurssociaux s(er)ont dissuadés voire interdits - y compris par l'Unioneuropéenne - de procéder aux acquisitions en bloc, au nom d'uncontournement du code des marchés publics el d'une esquive desprocédures de consultation alors jugés intolérables? Si la mise enœuvre de ces programmes respecte strictement la loi, c'est-à-direqu'elle n'intervient 4C que,. lorsque les bailleurs sociaux ne dis­posent pas des ressources internes ou du foncier pour bâtir eux­mêmes - 4C l'interprétation particulièremeJlt souple des textes constitue,pour des sociétés comme Alila, une formidable opportunité II, détaille ledirecteur régional d'un géant français du secteur? Qu'adviendra-t-ildu modèle Alila si (ou lorsque) ia loi décide(ra) de réviser les procé­dures de 4C programme intégrallt de logement social au profit d'unerefonte des critères de mixité sociale? Si (ou lorsque), à l'instar decelles de Rennes, de Bordeaux, de Nantes ou de Paris, l'ensembledes colleclivités et municipalités fixe(ro)nl un prix plafond pourles logements sociaux vendus en bloc ~ 1 990 euros HT parkingscompris en Loire-Atlantique, 2 200 euros HT à Bordeaux, 3 600euros HT à Paris infra muras - ou les loyers? Qu'adviendra+iI dumodèle Alila si (ou lorsque) il esl (sera) décidé d'endiguer l'éro­sion des compétences ou des 0pporlunités d'activité des bailleurssociaux dans leur mission de maHrise d'ouvrage directe, et alors deles doter de « possibilités» réglementaires et financières d'hono­rer leur mission de service public et d'agir là ou l'équipe d'Hervé

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Le modèle Alila ? Equiperestreinte, gestion des coûtsrigoureuse, spécialisation dansune famille de produits, absencede frais de commercialisation,unicité et solvabilité assuréedu client, rapport de forcefavorable avec les fournisseurs,in fine risque quasi zéro, déterminantpour mobiliser les financements

Legros s'emploie avec bonheur à combler leurs carences - «SQVOIlS­

IlOUS bien à qlloi IJOlIS exposons èt tenne le coût du logement socicll si nous

abandonnons sa construction aux acteurs privés? », alene le directeurgénéral d'un bailleur social de l'agglomération lyonnaise? Si (oulorsque) la réaffeclalion des personnels des CIL (comités inter­professionnels du logement) dom les postes sont menacés par laréforme organisationnelle est (sera) privilégiée pour renchérir leseffectifs desdits bailleurs sociaux en maîtrise d'ouvrage directe?Qu'adviendra-t-il du modèle Alila si (ou lorsque) les représentantsde l'Etat décide(ron)t de mettre fin à un procédé officiellementillégal- car détournant les règles de concurrence du code des mar­chés publics - mais fonemem répandu et discrètement « laissé enjachère ~ au nom de la résorption des tensions du secteur: dans lecadre d'une VEFA « en bloc », l'entente, informelle, avec le clientbailleur avant "obtention du permis de construire. « Dlti, c'est vrai,Ali/a pratil/lle de la sorte, et oui c'est délictueux. Mais il est tout aussivrai que celte pratique est COl1ullwJémellt exploitée », concède un élude l'agglomérarion lyonnaise. Autant d'interrogations auxquelles ladéclaration de l'adjoint au développement urbain, à l'habitat et aulogement de la ville de Villeurbanne, Richard Uung, lors de l'inau­guration de la résidence Le Up le 17 janvier, fait sèchement écho:» Le modèle Alila fait débat. »

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ALiLA 1Entreprendre

DUALISME PÉRILLEUXDe ces menaces, voire de ces périls, Hervé Legros fait fi. Au moinsen apparence. Bravache élusive, mais aussi une intuition et un sensde l'anticipation aiguisés qu'il met au profit d'un élargissement,même encore mineur, à des programmes moins exposés aux aléaslégislatifs. Pour preuve notamment, son développement dans lesecteur du logement intermédiaire. D'autre part, et J'élévation descompétences au sein de son groupe comme la rigueur des pro­cess de gesrion contribuent à les mettre en oeuvre, les paradesau durcissement de certaines réglementations sont aisées. Il Parexemple, pour contourner le plafonnement des prix, il suffit de prOCéderà la facturation de travaux modificatifs. Ou pour riposter à l'hypothèsed'ulle limitation il 49% des ventes C1L~ourd'hui atttorisées li 100%, ellpanae/wnt les différents dispositifs de prêt. Les trous dans le gruyère nemanquent pas! ", expliquent des spécialistes et concurrents. Dansles communes aisées rétives à « afficher» leur respect d'une loiSRU vivement stigmatisée par leurs administrés, le recours à despromoteurs privés apaise l'effet ressenti au sein de la population.Enfin, la pénurie cruciale et considérable de logements - la pro~

fession estime le manque à 800 000 unités -, l'extrême tension dumarché ad llOc, celle aussi des règlementalions qui privilégient lerenouvellement à l'étalement urbains ct limitent la libération dufoncier, forment autant d'amortisseurs.Les méthodes et le style employés par l'iconoclaste président d'Alilabousculent incontestablement la profession. Mais ils forment undualisme périlleux. Car s'ils dépoussièrent et ouvrent des pers­pectives de développement inédites, les crispations el le courrouxqu'ils sécrètent pourraient « aussi» en constituer le fossoyeur.La démonstration, inquiète, du directeur d'un des leaders de laconstruction de logement social est explicite: Il Ce que lui et 110US

lOus proposons aux bailleurs sociaux répond li ulle vraie problématiquede société, à un besoin crucial: celui du mal logement. » Et ainsi deIl redouter Il que l( l'image» hautement commentée et contestéed'Hervé Legros, le questionnement fi moral ~ qu'induit la mise enperspective de son activité - à vocation sociale et soutenue par lessubventions publiques - et de ses gains trop ostensiblement exhi­bés, sa stratégie de communication agressive voire provocatrice,déstabilisent les élus et irritem le législateur au point qu'il mettefin aux dispositifs ou tout au moins les étrangle fortement. « NOLIS

CHII'i011S alors tout et tous perdu. )). Hervé Legros est-il en train de sCÎerla branche sur laquelle prospère sa vista entrepreneuriale ?,4

1 Le logemenl convenlionné s'applique au prN locaüf aidé d'intégration (PLAO,au prêl locatif à usage social (PLUS), au prêt local if social (PLS), au Pr~t sociallocalion-accession (PSLA) qui s'étagent au gré de la situation socialeel financière des demandeurs, ces deux derniers échappant à la comptabilisationdes engagements SRU. Le logement intermédiaire mobilise les dispositifs PLI(pr~t locatif inlermédiaire) autorise une liberté de loyer tomefois contenuedans des proponions jusqu'à 20% inférieures à celles recensées dans le secteur.Les trois quans de la populalion française sont éligibles au logemenl social.

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Révéler les compétences

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«Tout le monde s'interroge sur mon modèle. et cela melait bien rire. Oui. j'ai inventé une machine extroordinoire.oui j'ai révolutionné le secteur. oui ce que j'entreprendspersonne ne 1'0 fait avant moi. et oui ce que je bâtis est25%mieux construit que dons la promotion classiqueet moins cher dons les mêmes proportions.»

Il Ya la stratégie - plébiscitée -de l'entreprise, il y a celle aussi,personnelle, de son fondateurautodidocte. Laquelle, volontiersinsolente, attise les jalousies,aiguise les onathèmes ... et légitimel'interrogation: peut-elleempoisonner ce qu'il bâtit avecsuccès, nuire à l'intérêt mêmede son « oeuvre»? Hervé Legroséchappera-t-il au syndromedes entrepreneurs punis par laconfusion de l'ambition et de--"'....la démesure, par les dégâts d'un«sur-moi» incontrôlé?

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UNE STRATÉGIE À DOUBLE TRANCHANT

Tout (ou presque) chez lui impressionne. Le physique - unetaille de baskeLteur -, la jeunesse qu'incarne un visageénergique, déterminé vOÎre exalté, expressif el affable, unstyle vestimentaire minutieusement étudié, l'éclat de seslocaux à la Cité internationale de Lyon ou de son goUl

pour les voilures de grand luxe, la trajectoire entrepreneuriale etle parcours personnel - que couronne sa somptueuse propriété àEcully. Mais aussi une rhétorique parfaitement éprouvée, qui s'es­crime avec force arguments à fonder moralement cl éthiquementle succès économique de l'emreprise el celui, pécuniaire, de sonfondateur. Arguments qui entrelacent inextricablement sincéritéet manipulation, l'objet même de celte fortune entrepreneuriale :le logement social, constituant simultanément une cause de frondeet un levier de légitimation - auquel son histoire personnelle (lirepar ailleurs) apporte un crédit opportun. Citons sa « vocation: lapassion de créeJ~ de bâtir plus et mieux» ; son« moteur: toutes cesfammes auxquelles Wl toit se refuse et je veux Il Jaire du bien 1> » ; samission : « comment pourrai-je considérer avoir réussi tant que desgens dormiront dans des voitures? 1> ; sa conscience sociéta1e : vial'invitation d'enfants aux matchs de l'Ol, son soutien à Sportsdans la Ville, à l'Institul Télémaque ou à la création d'un établis­semenl sport-éludes en marge du club de basket-hall Asvel, ilveut faire honneur à son « ADN» : Il Illon entreprise est citoyenne. »Mais est-ce seulement, comme l'arfirme le président du conseilde surveillance d'Alila Jean-Claude Michel, « parce qll'il a dansses veines de « rendre» un peu de ce qu'il accomplit 1>, ou aussi parcequ'il y puise matière à couvrir sa réussite matérielle d'un vernisvertueux, d'un supposé altruisme, d'un présumé sens de l'intérêtgénéral garanls d'une notabilité utile à l'acceplabilité de son entre­prise auprès des décideurs publics et politiques? «Sa philanthropien'est pas gratuite », résume le directeur régional d'un groupe depromot ion-construction.

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FLAMBOYANCETOUl est bel el bien namboyance chez ce trentenaire acharné detravail - d'ailleurs discret dans les cercles traditionnels, peu pré­sent dans les mondanités lyonnaises -, y compris l'arrogance et lamorgue «dédaigneuses », l'impertinence, volontiers irrévérencieuse etséditieuse, de sa plaidoirie el de sa prédication. Ainsi aux soupçonsou diatribes que son ascension éveille au sein de la profession, laréplique est incisive: «Je défie tous mes détracteurs d'avoir ulle gestionaussi rigoureuse et de tels outils de contrOle dignes d'ull gmnd groupe côté;une vision et des plans de développement à 12 ou 60 Illois aussi précis;une assisefina/lcière aussi solide. Tout le monde s'interroge Sllr les ressortsde la croissance d'Alifa : cela me fait bien rire. Oui, j'ai inventé un modèle,une machine extmordinaire. oui j'ai révolutiollné le sectelll~ et ce que j'en­treprends personne Ile l'a Jàit avant /11oi; oui ce que je bâtis est 25 %mieuxconstruit que dans la promotion dassic{ue et moins cher dans les mêmesproportions; oui, nous exerçons de manière extrêmement propre auprèsde nos presrataires; oui, llOS clients sont unanimement satisfaits de notretmvail et jamais auctme procédure n'a été intentée contre nous (lire enca­dré p.42); oui je me revendique être le « Eree de /'illuno/Jilier )1 ell réfé­rence à ce que mOIl ami Xavier Niel CI créé et des critiques qu'il éprouve;et oUi,je vise d'ici trois CUlS le milliard d'euros de portefeuille d'activité et 10000 logements/an. Si ÇCl déplaît, et bien tant pis! Les jaloux feraient mieuxde s'interroger: pourquoi ny alTivel1t-ils pas? C'est aussi absurde que deconsidérer qtt'un seul médecin sache soigner une maladie. »

EXASPÉRATIONOui, le succès d'Alila indispose voire agace et même horripile. Ella stratégie de communication, grâce à laquelle il parvient à « cap­turer » à son bénéfice l'exclusivité d'un savoir-faire qu'en réalilénombre de ses concurrems exercent eux aussi avec succès - et pourcertains bailleurs sociaux dans des proporlions plus élevées -, etqui semble mettre en scène le double besoin de contenter l'égo et

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ALI LA 1Entreprendre

Hervé Legros est une caricature des self made men, dont l'existence- matérielle, sociale, publique - est totalement indissociable de leurtrajectoire d'entrepreneur et de l'expansion de leur entreprise, et dontl'expression de la réussite cautérise jusque dans l'excès et mêmel'irrationnel les stigmates du cheminement social et scolaire originel.

d'occuper le terrain médiatique, ne fait que J'exacerber. Le sponso­ring de l'Olympique lyonnais et la prise de participation - à titrepersonnel - dans le club de l'Asve1 présidé par Tony Parker, ensont les emblèmes (lire par ailleurs). Mais pas seulement. Un élu del'agglomération lyonnaise se remémore, amusé el admiratif. C'étaità Nantes du 27 au 29 septembre 2016, lors du Congrès national del'Union sociale pour J'habitat. Un rassemblement majeur, réunis­sant l'ensemble des acteurs de la profession, et que Hervé Legros,faute d'avoir pu obtenir pour son sland un emplacement digne decelui des autres promoteurs, avait décidé de boycotter. Le coût dèslors économisé, il l'affecta à la publication dans la presse nationaled'un manifeste, « 2 millions de Français n'en peuvent plus d'at­tendre un logement », simultanément à la tenue du congrès. « 11était absent, mais dans les travées et lors des dîners on ne parlait quede lui. Objectivement, lUI sacré talent mar1œlÎng », analyse l'élu qui« lui », assure-t-i1, n'a pas commis l'imprudence, coupable, d'unde ses homologues qui, l'été dernier, « l'rit l'lace clans le jet l'rivéaffrété lXlr Hervé Legros ii pour assister à la finale du championnatde France de basket-bail à Strasbourg ou au match de l'équipenationale à Marseille lors de l'Euro de football..

QUESTIONNEMENT MORALHervé Legros est simplement emblématique, voire est une cari­cature des self made men, dont l'existence - matérielle, sociale,publique - est totalement indissociable de leur trajectoire d'entre­preneur et de l'expansion de leur entreprise, et dont l'expressionde la réussite cautérise jusque dans l'excès et même l'irrationnel,les stigmates du cheminement social et scolaire originel. L'exas­pération, qu'enflamme un style de vie qui a le « tort» d'êtreaffiché quand la bienséance lyonnaise cultive la discrétion et lasobriété voire l'austérité - tel banquier gestionnaire de fan unecélèbre de la place l'a bien compris, qui parque ses bolides decourse loin des regards -, un questionnement moral légitime lacristallise toutefois: est-il «normal» de générer autant de profitset de « vivre personnellement aussi bien» lorsque l'activité dontces résultats et cette opulence résultent d'une parL pone sur lelogement des plus modesles d'autre part eSl subsLantiellementconditionnée aux subsides publics? «( C'est Ull vmÎ slUet il, recon­nait Michel Le Faou, vice-président de la métropole de Lyon encharge de l'urbanisme el de l'habitat - par ailleurs positif sur la«qualité» et 1'« utilité» des prestations d1\lîla, mais aussi sur unepersonnalité que la concordance de l'origine sociale et de l'ob­jet entrepreneurial rend « attachante ». Bref, résume le directeurrégional d'une « major », « peut~on produire du logement social etrollier en Ferrari? 1>. « Se poser ce type de questioll et critiquer ceuxqu.i réussissent eSl lJien français i, réagit l'intéressé. je ne dOÎs rienil personne, je suis loyal et 1lOlll1ete, eL aucun reproche ne peul m'êtreformulé. Je gagne de ('argent, mais la qualité et les coûts de mes pro­grammes en fOllt gagner aux bailleurs sociaux, aux acteurs publics etil l'État. Tout le monde estgagnallt. » Oui, comme le corrobore l'unde ces bailleurs sociaux, la témérité, la naïveté ou plus proba­blement Perreur d'Hervé Legros est de croire que la France esll'Amérique de Donald Trump, qui glorifie sans limite les mani­festations de réussile financière.

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« IDIOTIE"Et un spectre rôde. Celui de se « brûler les ailes ». Car, comme lerésume l'un des plus puissants bailleurs sociaux de Rhône-Alpesqui incrimine {( j'honnêteté 1> d'un homme que « pllls jamais" il nefera travailler, plus dure sera la chule si un jour elle survient. Certes,si l'ancien numéro 2 de Norbert Dentressangle t< dit vrai », «l'humi­lité (sic), la riguew; la force cie travail, la curiosité, l'écoute, l'envie d'ap­prendre» que son « poulain» a en commun avec les autodidactes,mais aussi le fait qu'il «joue sa fierté, 5011 image et sa reconnaÎssancedam cl1aque îmmwble bâti 1>, le protègent de dérapages rédhibitoires.« Surtout si par ailleurs il réussit» le défi organisationnel et managé­rjallul aussi consubstantiel de sa caractéristique entrepreneuriale etclé dans l'accomplissement des nouveaux seuils de développement:« déléguer », mais aussi diriger - c'esl-à-dire imposer son leadershiptout en faisant place à leurs compétences - des collaborateurs auxpedigrees professionnels de plus en plus élevés. Certes pour l'heure,

Sa méthode pour nouer des liensest sans limites. L.:élu qui, selonplusieurs sources, prit place l'étédernier dans son jet privé affrétépour assister à la finale du cham­pionnat de France de basket-bail àStrasbourg ou au match de l'équipenationale à Marseille lors de l'Eurode football pourrait en témoigner...

et quand bien même il brandit un« jolœ,.» à l'évocation d'une diver­sification « persollnelle, indépendallte cl'Alila » vers le logement libre,sa concentration dans l'activité t< sociale» et dans un modèle selonmême ses concurrents « tellement intelligent» demeure une garan­tie de cohérence. « Il sait qul\ir France ne saura jamais «faire )) del'Easyjet, et vice-versa il, corrobore Jean-Claude Michel. Certes. Maiscomme le rappelle la direclrice des éLudes d'un cabinet spécialisédans l'immobilier, la performance du système repose sur l'efficacité,subtile, du trio que forment l'opérateur, le maire et le bailleur social.Un grain de sable, eL c'est toUle la machine qui tousse puis peULcontaminer cet exigu microcosme. « Vile plaquette aussi luxueuse,Hll afficllClge personnel aussi grossier sur l'ensemble de.~ photos, tlll telcadeatt accol1lpclgnal1t le fascicule - WI chocolat il l'effigie de l'entreprise- me choquellt : comment peut-on aguicl1Cr de manière aussi opulentelorsqu'on « œuvre» dalls le domaine du logement social? » : la réactionde l'édile d'une commune cossue de l'agglomération lyonnaise à laréception des vœux 2017 de Hervé Legros l'alteSLe,le comportementostenLatoire, provocateur cr « agressif» d'Hervé Legros pourraitdépasser le simple stade de « l'idiotie 1> dont nombre d'observateursl'affublenL Et notamment liguer compétileurs, bailleurs sociaux,acteurs publics, élus el législateurs dans un « Tous contre Alila. »A

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