L`Epopee Serbe ; Shants Populaires Heroiques (1888.) - Auguste Dozon

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LES NOCES DB MAXIME TZRNOVITCH. 25deux litra,al'l de vin, et qui est faite de pur or Condu. Cene sera pas l tout, frre, ce que tu auras de moi: je tedonnerai ma jument fauve, qui met bas des poulains fougueux et ardents comme le feu; ta ceinture je suspendraimon sabre, qui vaut trente bourses. Ainsi l'accord futconclu, on ta l'aigrette Maxime, l'aigrette arrondie etle plumet dor, et on les mit Miloch Obrenbgovitch,tandis que Maxime fut relgu l'cart; vers ce tempsils atteignirent le rivage, et s'embarqurent sur la mergrise.

Grce Dieu et grce la fortune qui vient de lui, latraverse fut heureuse; ils arrivrent bon port sous lesmurs de Venise et occuprent la plaine. Les portes de laville s ouvrirent, et jeunes et vieux en sortirent pour faireaccueil aux svats, pour les regarder curieusement et pourvoir s'ils reconnaitraient le gendre du doge, si ce qu'onracontait de lui tait vrai: qu'il n'avait pas son pareil enbeaut ni parmi les gens de la noce ni parmi les Latins.Reconnaitre le gendre, c'tait chose facile, au plumet et l'aigrette qu'il portait, sa taille et son visage; quand011 vit qu'Ivan n'avait rien dit que de vrai, les fils dudoge s'en vinrent saluer leur cher beau-frre: ils l'embrassent d'un ct et de l'autre, puis ils l'emmnent dansun lgant ~ a v i l l o n ; aprs quoi, les invits furent distribus dans des logements par trois et par quatre, de lamanire qui devait leur tre la plus commode.

Chez les Latins, il y avait une coutume trange: lafamille de l'pouse assistait aux noces, et on laissait reposer chevaux et cavaliers S8. Ils demeuraient l depuistrois quatre jours quand, le quatrime, l'heure ouparut le soleil et ou tonnrent les canons de la ville, le

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I.

LA NAISSANCE DE MARKO(LE MARIAGE DU ROI VOUKACIIINE)

Il, 25

Georges Voukachine crit une lettre dans le blancScutari sur la Boana, et il renvoie en Hertzgovine versle blanc chteau du Pirlitor, le Pirlitor en f a c ~ du Dourmitor 1. La lettre est adresse Vidosava, l'pouse deMomtchilo, secrtement i l l'crit, secrtement i l l'envoie,et voici ce qu'il y disait.

Vidosava, pouse de Momtchilo, que fais-tu l-basdans la glace et dans la neige? Quand, du chteau, turegardes au-dessus de ta tte, tu n'as rien de beau voir: rien que le blanc Dourmitor, enseveli sous la glaceet sous la neige, en plein t comme au cur de l'hiver.Si, au-dessous du chteau, tu jettes les yeux dans leprcipice, au fond coule la Tara, t r o u b l ~ et mugissante,roulant des arbres et des pierres; on ne voit sur elle nibarques ni ponts, et elle est borde de sapins et de rochers.

Ainsi donc empoisonne le vovode Momtchilo, empoisonne-le, ou livre-le moi, pour descendre ensuite dans

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MARKO KRALIVITCH. 57pourras les regarder ton aise. Puis i l s'tend ets'abandonne au .sommeil.

Momtchilo dort, son pouse ne dort point, elle coutesur son lit, attendant que les premiers coqs chantent; etds que la premire voix se fait entendre, la jeune femmesaute de la molle couche, allume une chandelle qu'ellemet dans la lanterne, puis prend du suif et du goudron,et s'en va tout droit l'curie neuve. Or, comme l'avaitdit Momtchilo, dj les ailes d'Iaboutchilo se montraient,elles lui tombaient jusqu'aux pieds. Elle alors d'oindreles ailes du cheval, de suif et de goudron, d'y mettre lefeu avec la chandelle, et de les consumer j ce que le feun'avait pu brler, elle le &erra fortement sous la sangle.Alors elle court la dpense, prend le sabre de Momtchilo, le plonge dans du sang ml de sel; puis retournes'tendre sur la molle couche.

Le matin, de bonne heure, quand l'aube commena blanchir, Montchilo se leva: Vidosava, ma fidlepouse, dit-il, quel songe trange j'ai eu cette nuit' Ils'levait, du pays maudit des Vaovitch, un brouillardfloconneux, qui peu peu enveloppa le Dourmitor j jem'enfonai dans ce brouillard avec mes neuf frres, mesdouze c o u s ~ n s et quarante soldats du chteau; la brume,femme, nous spara, nous spara et nous ne parnes nousretrouver j Dieu le sait, il n'arrivera rien de bon. - Soissans crainte, cher Seigneur, lui rpond Vidosava j son.geest mensonge, et Dieu est vrit.

Momtchilo le vovode s'apprte, et descend du blancdonjon; Au bas ses neuf frres l'attendaient, avec sesdouze cousins et quarante soldats du chteau; son pouselui amena le cheval blanc, tous sautrent en selle sur

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CHA:-ITS AXClEXS. D'POQUES DIVERSES. 145tomber! Ce n'est pas la un officier imprial, mais bienmon seigneur, le ban Strahinia. Ne reconnais-je pas sonfront et sous le front ses deux yeux, sa double moustachenoire, et sous lui son cheval blanc, et son lvrier fauveKaraman? Ne plaisante pas, seigneur, i l y va deta tte.Quand le Turc, Ali le Valaque, a entendu ces mots, lafureur le rend fou, d'un bond i l est sur ses pieds lgers,i l met sa riche ceinture, y enfonce des poignards acrs,puis il attache son sabre tranchant, et ses yeux ne quittent plus Je coursier blanc.

Cependant le ban arrive devant la tente; c'tait unhomme sage, et pourtant il commet une faute; on taitau matin, et il ne souhaite pas le bonjour, ni ne salue enturc, mais il apostrophe outrageusement Ali : Te voiladonc, btard! btard rebelle au sultan 1 quelle maisonas-tu pille? quelle famille as-tu emmene en esclavage?l'pouse $le qui caresses-tu l sous la tente? Sors, quenous nous battions bravement.

Le Turc s'lance comme un fou furieux, d'un bond i latteint son cheval, d'un autre il se jette en selle, et ilramne a lui les rnes. Mais Strahinia non plus ne perdpas de temps, il pique des deux et darde sa lance deguerre, les deux guerriers se ruent l'un sur l'autre. Alile Valaque a tendu le bras, de la main i l saisit au volla lance du ban, et puis lui adresse ces paroles: Vilbtard, ban Strahinia, de quoi donc, manant, t'es-tuavis? Tu n'as pas affaire a une vieille femme de laChoumadia, qu'on chasse devant soi en l'injuriant, maistu as affaire au fort Ali le Valaque, qui ne craint nisultan ni vizir, a qui toute l'arme impriale fait l'effetde fourmis dans l'herbe; ct c'est avec lui, rustre! que

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206 " ,L EPOPEE SBRBE.en grand nombre et commettaient des meurtres et desvols frquents, les Turcs mettaient toute la populationsur pied pour leur donner la chasse. Quand la battuen avait point de rsultat, les Turcs avaient recours auteftich, c'est--dire que quelque fonctionnaire se meLtait parcourir le pays avec un nombre d'hommes assez considrable, et qu'au moyen de la prison, des coups etd'amendes, il contraignait les kmtes (chefs des villages)et les parents des hadouks chercher les recleurs et capturer les hadouks eux-mmes j mais hors le cas deteftich, les parents des hadouks aussi bien que leursfemmes et leurs enfants n'taient inquits par personne,et vivaient au contraire en paix dans leurs maisons.

Lorsqu'un hadouk se lasse du mtier, il se rend, .c'est--dire qu'il mande aux: kmtes de lui obtenir dupacha une leUre de pardon (bourountia), aprs quoi ilreparat en public, et personne ds lors n'oserait parleren sa prsence de ce qu'il a fait tant hadouk. Dans cettesituation, ils deviennent le plus souvent pandours (gardesde police), car ils ont perdu l'habitude des travaux agricoles; i l n'y a du reste que les fonctions de kmte qu'ilsne puissent pas remplir.

dont les lois pnales ont, cet gard, un caractre de s-vrit draconienne. Ds que l'autorit a connaissance d'unhadouk, ce qui ne signifie plus qu'un hrigand ordinaire,elle convoque, exactement comme quand i l s'agit d'un loup,les paysaus de la localit, quelquefois en trs grand nomhre,

.", qui, sous le commandement du natchaillik ou du capitaine'du district, procdent la hattue (haka). Si le hadouk, lapremire sommation, refuse de mettre has les armes et dese rendre, on tire dessus immdiatement (t859).

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216 L'POPE SERBE.se mit dire: Eh! mon frre, Starina Novak, nouSn'avons plus ni vin ni tabac; il ne nous reste ni paras nidinars. - N'aie point de crainte, brave Radivo, rpondit Novak ; s'il n'y a plus ni vin ni tabac, et s'il ne nousreste plus d'argent, nous avons encore Grou'itza, l'adolescent, qui est plus beau qu'une fille. Habillons-nous enmarchands, mettons Groutza des vtements misrables,et allons le vendre Saraevo, puis qu'il s'enfuie commeil pourra; seulement que nous ayons de l'argent, et noustrouverons du vin et du tabac. Cela plut fort Radivo. Tous deux sautrent sur leurs pieds lgers et s'habillrent en marchands, puis, ayant mis Groutza desvtements misrables, ils s'en allrent pour le vendre Saraevo,

L, une fille turque racheta, et offrit pour lui deuxcharges d'or. Comme elle tait partie pour aller chercherla somme, le diable amne une veuve turque, la veuvede Djafer-Bey, qui offre pour lui trois charges d'or, avectrois chevaux pour les porter. La fille turque s'emporteen maldictions: Emmne l'esclave, femme de DjaferBey 6, et puisses-tu ne pas l'avoir longtemps: une nuitseulement ou deux! La veuve emmne l'esclave cher-achet 1 et le conduit sa blanche maison. Elle apporte de l'eau et du savonet, aprs avoir lav le jeune Groutza, elle l'habille et luisert un magnifique souper. Groutza s'assied et mangeson repas, mais la Turque ne peut y toucher, ne songeant qu' regarder l'adolescent; puis, le souper fini, elletend un lit dlicat, et Groutza se couche avec elle surle matelas.

Le matin, quand le jour parut, la femme de Djafer-

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222 L'POPE SERBE.Malheur tout hros qui n'coute point un plus g

que lui!v

GROUITZA ET LE NGREIII,

Novak est boire du vin avec Radivoi, dans la montagne, sous un vert sapin; le jeune Tatomir leur sert levin, tandis que Groutza l'adolescent Cait la garde. EtNovak dit son frre: Radivoi, toi qui es n du mmepre que moi, nous avons purg le pays de tous lesoppresseurs, il ne reste que le Ngre qui va par leschemins la rencontre des noces, enlve les fiancesdans leurs atours, et aprs en avoir joui pendant unesemaine, les vend pour de l'or. Que dis-tu de ceci, Crre?Si nous rassemblions des messieurs comme pour unenoce, et si nous revtions le jeune Groutza d'un costumede marie, en le ceignant d'un sabre par-dessous son voile;puis, si nous passions cheval par le chemin, devant lamaison du Ngre, pour essayer si Groutza ne pourraittromper ce dbauch, le tromper et le tuer. Cela plut fort Radivo. On rassembla, comme pourune noce, des gens de distinction, on couvrit le jeuneGroutza d'un voile de marie, et, sous le voile, on leceignit d'un sabre, puis tous, chevauchant par le chemin,passrent devant la maison du Ngre. Mais le Ngre n'ytait pas, il tait au cabaret, boire du vin, tandis quesa sur gardait la maison. Or, sa sur courut au caba-

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304 L'POPE SERBE.Vladika de Tztign l'a su, et il leur a fait un don : Novitza, il a donn une capitainerie j il a confirm KaraChouo dans ses fonctions de vovode, pour les exercer Drobniak ainsi que l'ont fait ses anciens j et Mirko areu deux pistolets, tous deux d'argent pur, et plongsdans une cume d'or. - Les trois bans sont de retour Drobniak, et dans leur blanche tour Touchina, ils boivent de l'eau-de-vie jaune, songeant mal, Smal-Aga,et cherchant comment ils auront et ma tte et la tienne.Mais coute, cher pobratime 1 rassemble des troupes Gatzko, pas en trop grand nombre, de crainte d'effrayerles raas, et amne-les dans la plaine de Drobniak, versDouji et ma blanche maison : peut-tre pourrons-noustromper les trois bans, et faire tomber leurs ttes blondes jalors nous ferions dans notre Drobniak, nous ferions notre guise, et nous laisserions en vie les petits enfants,pour tre de vrais ra'ias et obir aux Turcs. . . . . . .*

Smal-Aga apprend que le bey Mirala-bey est arriv;aussitt il donne des ordres ses serviteurs, et fait charger plusieurs chevaux de poudre, de plomb et des au-tres provisions qui lui seront ncessaires; puis il appelleson sas Martin, et commande qu'on lui amne son ta-lon, il monte sur le coursier et se dirige vers la plaine deGatzko, suivi" du seigneur cadi. Quand ils arrivrent

* V. 105 v, 229. A la r c e p t i o ~ de cette lettre, Smail-Aga se hte lui-mme d'en crire trois Ali-pacha Rizvanbegovitch, de Mostar, Ahmet-Baouk, de Nikchitch, et MouiagnMouchovitch, de Kolachine, en les priant


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310 L'POPE SERBE.dire: Ami Chouo Karadjitch! dj la nuit sombrenous a quitts et le jour blanc nous a surpris, n'essayonspoint d'attaquer l'aga aujourd'hui, mais attendons lanuit prochaine. Mais quand Chouo a entendu ce discours: Honte vous, M i r k ~ et Novitza! leur dit-il,ou j'attaquerai l'instant l'aga, ou je perdrai ma tte. Puis i l prend dix, douze compagnons, va voler sous lestentes les chevaux, et parmi eux, l'talon tachet del'aga et les emmne dans la montagne. Aussitt troiscents fusils partent et les balles font voler la tente de l'aga.Smal-Aga tait couch; il dormait, alors i l s'lance surses pieds, saisit deux pistolets argents, les dcharge enl'air, puis les jette sur l'herbe, et appelant .son palefrenier Martin, il demande son talon. Mais le sas Martinlui dit: Comment l'amener, quand dj les gens desBrda l'ont vol 1 - Donne-moi ton petit cheval !:.oir,ton cheval noir, puissent les chiens manger sa mre! Les gens disent et racontent qu'il lui tait facile de fuir,mais le Turc est trop brave, il n'en a pas le cur; faisantvolter le petit cheval noir, il tire son sabre forg afin decouper des ttes serbes. Un jeune garon l'ajuste, -Dieuclment, qui tait-ce donc? Mirko Damianovitch, de 1\1a-l imki,- et fait feu de son fusil rapide; il a bien vis l'aga,au front, entre les deux yeux et le renverse bas de soncoursier. Le Turc tombe et Mirko se jette sur lui, puistirant son couteau de la ceinture, il lui tranche la tte.Alors les vo'jvodes couprent des ttes, ils en couprentquatre-vingts; Novitza, celle du seigneur Cadi, KaraChouo celle du vieux Kariman, qu'il saisit par la barbeet emporte. Ils dpouillrent les Turcs, et firent dubutin autant que la bande en pouvait porter, puis ils cou-

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L`Epopee Serbe ; Shants Populaires Heroiques (1888.) - Auguste Dozon

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