L'épiscopat du haut Moyen Âge

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  • Steffen PATZOLD

    L'piscopat du haut Moyen ge du point de vue de la medievistique allemande

    RSUM L'article prsente un bilan de l'historiographie allemande consacre l'piscopat du haut Moyen ge (principalement entre le xc et le xnc s.). Jusqu' aujourd'hui ce sont deux tendances qui conditionnent la recherche allemande sur l'piscopat : les mdivistes s'intressent aux relations de l'piscopat avec le roi, et aux liens de parent des vques, que la medievistique dcrit en recourant la prosopographie. Dans l'historiographie allemande, l'piscopat est donc analys dans le cadre d'un modle dualiste , on regarde l'vque imprial entre la royaut et l'aristocratie . Les origines de ce modle rsident dans le changement paradigmatique que constitua, dans les annes 1930 et 1940, la Neue Verfassungsgeschichte. Le prsent article cherche surmonter le modle dualiste et propose de considrer l'piscopat comme une lite proprement ecclsiastique, dont le pouvoir et la position dans la socit n'taient pas seulement fonds sur la dlgation des droits royaux ou sur les liens de parent avec les aristocrates laques, mais sur des bases spcifiques, qui taient ecclsiastiques et sacres.

    ZUSAMMENFASSUNG Der Beitrag analysiert die deutsche Forschung des 20. Jahrhunderts zum Episkopat des fruheren Mittelalters. Hier lassen sich deutlich zwei Forschungsschwerpunkte erkennen: zum einen verschiedenartigste Studien zum Verhltnis zwischen Bischfen und Knig, zum anderen prosopographische Untersuchungen zur sozialen Herkunft und zur adligen Verwandtschaft der Prlaten. Der Episkopat wird von deutschen Medivisten demnach in der Regel mit einem dualistischen Modell erfaBt : Bischfliches Handeln wird aus der Stellung der Reichsbischfe zwischen Knigtum und Adel heraus erklrt. Die Ursprunge dieser Sichtweise liegen in Konzepten von Herrschaft und Verfassung, die in der deutschen Forschung der 1930er und 40er Jahre erarbeitet worden sind. Der vorliegende Beitrag pldiert dafr, das zweipolige Modell zu uberwinden und Bischfe als eine spezifische geistliche Elite jenseits von Knigtum und Adel zu betrachten.

    Au moins par un aspect, la medievistique ressemble l'glise catholique : toutes les deux affichent un idal universel, mais dans la pratique, elles restent toujours caractrises par des traditions nationales spcifiques. Mme si, au cours du xxe s., les conceptions historiques et les mthodes de recherche ont dpass les frontires et se sont influences les unes les autres, et mme si l'histoire mdivale est devenue une discipline internationale, on peut encore aisment observer mainte particularit nationale1. Dans le prsent expos, qui cherche prsenter un bilan de l'his-

    * Je remercie M. le Docteur Thomas Linhard, Paris, pour sa correction prcise de ma traduction franaise et pour m'avoir clair sur les diffrences entre quelques concepts-cls de l'historiographie franaise et allemande.

    1. Les remarques fondamentales de Marc Bloch restent d'actualit : cf. M. Bloch, Pour une histoire compare des socits europennes , Revue de synthse historique, 46, 1928, p. 15-50 ; sur les xc et xr s., voir aussi T. Reuter, Knig, Adelige, Andere : 'Basis' und 'berbau' in ottonischer Zeit , dans Ottonische Neuanfange. Symposion zur Ausstellung Otto der Grojie, Magdeburg und Europa , d. B. Schneidmuller et S. Weinfurter, Mayence, 2001, p. 127-150, ici p. 132-136. Il suffit de comparer deux livres traitant du mme sujet pour s'apercevoir des principales diffrences p. ex. les tudes respectives de G. Althoff, Verwandte, Freunde und Getreue. Zum politischen Stellenwert der Gruppenbindungen Cahiers de civilisation mdivale, 48, 2005, p. 341-358.

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    toriographie allemande consacre l'piscopat du haut Moyen ge (principalement entre le Xe et le xir s.), on a prfr viter une simple liste chronologique des tudes les plus importantes2 : on essaiera au contraire de s'attacher plus particulirement aux courants qui ont amen les mdivistes allemands des questions et des mthodes bien spcifiques dans leur tude des vques au Moyen ge. tant donn le volume impos au prsent article, on ne pourra fatalement qu'esquisser les grandes lignes de ce dveloppement ; mais peut-tre cette contrainte contribuera-t-elle la clart de l'argumentation. Celle-ci procdera en trois tapes : je rappellerai d'abord quelques prsupposs de la mdivistique allemande au xxe s., en particulier lorsque ceux- ci conditionnaient la recherche sur l'piscopat. Puis je m'efforcerai de montrer que ces hypothses ont abouti un modle dualiste, qui a guid bien des mdivistes allemands durant des dcennies, et qui est encore sensible dans l'historiographie consacre ce domaine. Enfin, ce bilan histo- riographique pourra tre nuanc par une prsentation plus dtaille de quelques tudes choisies.

    I. Le cadre mthodologique : La Neue Verfassungsgeschichte et les recherches prosopogra- phiques consacres l'aristocratie

    Dans tous les domaines de l'histoire mdivale, les traditions nationales ont impos leur marque ; mais leur influence fut rarement aussi dterminante que dans l'historiographie allemande consacre la priode comprise entre le Xe et le xir s. En Allemagne, la fin de l'Empire carolingien tait vue comme le dbut de l'histoire nationale (mme si la date prcise de cette naissance tait sujette controverse3). La priode prcdant la Querelle des Investitures, celle de l'Empire des Ottoniens et Saliens jusqu' Henri III, fut considre au xixe s. comme l'apoge de la splendeur impriale allemande ; Canossa, o Henri IV fit pnitence en 1077, est devenu un lieu de mmoire allemand ; et le temps des Staufen apparaissait comme la dernire phase de prosprit du Moyen ge allemand. On ne peut vouloir rsumer et expliquer la recherche allemande consacre ces trois sicles sans prendre en compte cette conception rarement explicite, mais assurment trs influente : alors que les Franais voquent la fin de l'poque carolingienne en 888 ou 987, que les Anglais considrent la conqute de 1066 comme une rupture profonde dans leur histoire, les ruptures fondatrices dans la perspective allemande taient, d'une part, la mort de Louis l'Enfant en 911 (ou l'lection d'Henri Ier en 919), et d'autre part, la fin du gouvernement de Frdric II en 1250, marquant le dbut du grand Interrgne. C'est entre ces deux vnements que les Allemands situaient les origines de leur propre nation. Certes, il y a longtemps que les mdivistes ont remis cette image en cause, pour montrer qu'elle tait irrecevable par bien des aspects ; et pourtant, le carcan intellectuel national a durablement influenc la recherche allemande. C'est ainsi que l'on peut expliquer, au moins en partie, pourquoi les mdivistes intresss par le Xe, le XIe et le xne s. se penchaient presque exclusivement sur l'histoire de l'Empire, laissant quelques rares spcialistes le soin d'tudier d'autres espaces europens. Et c'est peut-tre galement cette tournure nationale qui explique pourquoi cette histoire de l'Empire tait gnralement crite comme l'histoire des rois et de leurs grands, laissant la majorit du peuple dans l'ombre. Dans la recherche allemande consacre l'piscopat, ces deux tendances sont nettement sensibles : le plus grand nombre des historiens ne s'est intress qu' l'espace imprial, ne se tournant que rarement vers l'piscopat des autres rgions d'Europe

    im frilheren Mittelalter, Darmstadt, 1990, et de R. Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc (vif - Xe sicle). Essai d'anthropologie sociale, Paris, 1995 (Histoire ancienne et mdivale, 33) ; les mobiles, la terminologie, les mthodes et les ides de base diffrent visiblement.

    2. Pour une vue d'ensemble de l'glise allemande, crite l'usage des tudiants, cf. M. Borgolte, Die mittelalter- liche Kirche, Munich, 1992 (Enzyklopdie deutscher Geschichte, 17) ; ou T. Vogtherr, Kirche im Mittelalter, Cologne, 2002 (UTB fur Wissenschaft 2361. Das Mittelalter. GrundriB einer Epoche, 1) ; pour une synthse rcente abordant la mme priode que le prsent article, cf. G. Tellenbach, Die westliche Kirche vom 10. bis zum friihen 12. Jahrhundert, Gttingen, 1988 (Die Kirche in ihrer Geschichte, 2 F, 1).

    3. Un bon rsum de la discussion est fourni par J. Ehlers, Die Entstehung des deutschen Reiches, Munich, 1994 (Enzyklopdie deutscher Geschichte, 31) ; cf. aussi H.-W. Goetz, Moderne Medivistik. Stand und Perspektiven der Mittelalter for schung, Darmstadt, 1999, p. 185-193.

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    occidentale, de Byzance ou du monde slave4. En mme temps, l'piscopat ne retient l'attention que comme partenaire ou adversaire du roi un point de vue qui se reflte dans l'omniprsence du terme de Reichsepiskopat l'piscopat imprial. Un autre point essentiel pour comprendre l'historiographie allemande sur l'piscopat du haut Moyen ge rside dans le changement paradigmatique que constitua, dans les annes 1930 et 1940, la Neue Verfassungsgeschichte5. Cette nouvelle orientation tait clairement influence par la politique contemporaine6 : elle avait pour but d'effacer la reprsentation du Moyen ge qui avait t transmise par le xixe s., et qui tait fonde sur une ide librale de l'tat ; au lieu d'envisager les lois d'tat , les institutions du gouvernement , les charges des fonctionnaires , les droits du souverain , et ainsi de suite, on postula dsormais que l'essence du Moyen ge tait en relation avec une nature germanique7. C'est alors que le terme de Herrschaft8 devint un concept-cl de la mdivistique allemande, permettant de dsigner simultanment deux pouvoirs entre lesquels les historiens imaginaient un conflit permanent : d'une part, la domination d'une aristocratie qui aurait aspir l'autonomie, et d'autre part, celle du roi qui aurait essay de matriser ces tendances centrifuges des aristocrates. Et cette optique continua d'influencer la mdi-

    4. Il faut voquer ici la thse controverse de R. Pauler, Das Regnum Italiae in ottonischer Zeit. Markgrafen, Grafen und Bischfe als politische Krfte, Tbingen, 1982 (Bibliothek des Deutschen Historischen Instituts in Rom, 54), elle-mme limite et c'est rvlateur au nord de l'Italie, contrl par les Ottoniens ; on consultera galement les tudes de l'historien du droit G. Dilcher (et notamment Bischof und Stadtverfassung in Oberitalien , Zeitschrift der Savigny- Stiftung fur Rechtsgeschichte, Germanistische Abteilung, 81, 1964, p. 225-266) ; cf. galement la monumentale thse d'habilitation de R. Kaiser, Bischofsherrschaft zwischen Knigtum und Furstenmacht. Studien zur bischflichen Stadtherrschaft im westfrnkisch-franzsischen Reich im fruhen und hohen Mittelalter, Bonn, 1981 (Pariser historische Studien, 17), ainsi que les autres publications de Kaiser sur la France, p. ex. Munzprivilegien und bischfliche Miinzprgung in Frankreich, Deutschland und Burgund im 9.-12. Jahrhundert , Vierteljahrschrift fur Sozial- und Wirtschaftsgeschichte, 63, 1976, p. 289- 338 ; Id., Teloneum episcopi. Du tonlieu royal au tonlieu piscopal dans les civitates de la Gaule (vp-xip sicle) , dans Histoire compare de l'administration (iv-xvnr sicles). Actes du XIVe colloque historique franco-allemand. Tours, 27 mars - 1" avril 1977, d. W. Paravicini et K. F. Werner, Munich/Zurich, 1980 (Beihefte der Francia, 9), p. 469-485 ; Id., Les vques de Langres dans leur fonction de 'missi dominici' , dans Aux origines d'une seigneurie ecclsiastique : Langres et ses vques vir-xr s. (Actes du colloque de Langres-Ellwangen), Langres, 1986, p. 91-111 ; Id., Royaut et pouvoir piscopal au nord de la Gaule (viF-ixe sicles) , dans La Neustrie. Les pays au nord de la Loire de 650 850. Colloque historique international, d. H. Atsma, Sigmaringen, 1989, t. 1 (Beihefte der Francia, 16/1), p. 143- 160 ; - Id., Les vques neustriens du Xe s. dans l'exercice de leur pouvoir temporel d'aprs l'historiographie mdivale , dans Pays de Loire et Aquitaine de Robert le Fort aux premiers Captiens. Actes du Colloque scientifique international tenu Angers en septembre 1987, d. O. Guillot et R. Favreau, Poitiers, 1997, p. 117-143.

    5. Cf. M. Borgolte, Sozialgeschichte des Mittelalters. Eine Forschungsbilanz nach der deutschen Einheit, Munich, 1996 (Historische Zeitschrift Beihefte, Neue Folge, 22), p. 37-48 ; Goetz (op. cit. n. 3), p. 174-175. Pour un rsum des tudes les plus importantes du point de vue italien, cf. G. Tabacco, La dissoluzione mdivale dello stato nella rcente storiografia , Studi medievali, srie terza, 1, 1960, p. 397-446, p. 426-440 ; dans la perspective amricaine : B. Arnold, Count and Bishop in Mdival Germany. A Study of Rgional Power, 1100-1350, Philadelphie, 1991, p. 1-9.

    6. Cf. l'article fondamental de F. Graus, Verfassungsgeschichte des Mittelalters , Historische Zeitschrift, 243, 1986, p. 529-589 ; voir aussi G. Algazi, Otto Brunner 'konkrete Ordnung' und Sprache der Zeit , dans Geschichtsschreibung als Legitimationswissenschaft 1918-1945, d. P. Schttler, Francfort-sur-le-Main, 1997 (Suhrkamp-Taschenbuch Wissenschaft, 1333), p. 166-203 ; Id., Herrengewalt und Gewalt der Herren im spten Mittelalter : Herrschaft, Gegenseitigkeit und Sprachgebrauch, Francfort-sur-le-Main, 1996.

    7. O. Brunner, Land und Herrschaft. Grundfragen der territorialen Verfassungsgeschichte sterreichs im Mittelalter, Darmstadt, 1973 [rimpr. du 5e tirage, Vienne, 1965, lrc d. 1939], et W. Schlesinger, Die Entstehung der Landesherr- schaft. Untersuchung vorwiegend nach mitteldeutschen Quellen, Dresde, 1941 (Schsische Forschungen zur Geschichte, 1) [rimpr. Darmstadt, 1964] ; cf. aussi Id., Herrschaft und Gefolgschaft in der germanisch-deutschen Verfassungsgeschichte , dans Herrschaft und Staat im Mittelalter, d. H. Kmpf, Darmstadt, 1960 (Wege der Forschung, 2), p. 135- 190; et O. Brunner, Moderner Verfassungsbegriff und mittelalterliche Verfassungsgeschichte, ibid., p. 1-19 [d'abord 1939]. W. Rsener, Adelsherrschaft als kulturhistorisches Phnomen. Paternalismus, Herrschaftssymbolik und Adelskritik , Historische Zeitschrift, 268, 1999, p. 1-33, ici p. 10-11, donne un rsum prcis des ides de Brunner.

    8. Il n'est pas facile de traduire en franais ce concept central, et l'on hsite utiliser les termes pouvoir , puissance ou domination : pour les mdivistes allemands, la Herrschaft mdivale n'tait pas une relation hirarchique entre plusieurs acteurs, fonde sur la commandement de l'un et sur l'obissance des autres. Elle tait plutt une relation bilatrale, axe sur la fidlit germanique : Le Herr tait oblig de protger ses hommes, qui lui devaient en retour aide et conseil. H. Dannenbauer, Adel, Burg und Herrschaft bei den Germanen. Grundlagen der deutschen Verfassungsentwicklung , dans Herrschaft und Staat (op. cit. n. 7), p. 66-134 [lre d. 1941], affirmait que cette relation sociale tait dj en place chez les Germains.

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    vistique, mme aprs la Seconde Guerre mondiale : ainsi, en 1970, Karl Bosl put affirmer sans ambages dans le Gebhard il s'agissait alors du plus important manuel d'histoire allemande : le face--face entre le roi et l'aristocratie constitue la base de l'histoire des peuples romano- germaniques, et surtout, il fut dcisif pour le dveloppement constitutionnel de l'Allemagne au Moyen Age 9. Bien plus que les institutions, c'taient ainsi les liens personnels entre les grands qui intressaient la Neue Verfassungsgeschichte : dans les annes 1930, Theodor Mayer forgea le terme de Perso- nenverbandsstaat, un de ces mots dont la longueur, si elle est coutumire en Allemagne, rend la traduction difficile ; il dsignait plus ou moins prcisment un tat fond sur la domination personnelle du roi sur quelques grands aristocrates 10. Vu sous cet angle, le mastic social qui reliait le roi, l'aristocratie et le peuple, ne se trouvait ni dans les institutions, ni dans les lois ou les fonctions administratives, mais dans un lacis d'obligations et de liens personnels avant tout des liens de parent entre les grands ecclsiastiques et laques. Le dogme de la mdivistique allemande affirmait ainsi que l'tat n'tait devenu une institution transpersonnelle n qu' partir du XIe s. : avant cette date, il n'aurait constitu qu'un tissu de relations entre individus12. Ce ne fut donc pas un hasard si la riche recherche allemande sur l'aristocratie remonte elle aussi aux annes 1930. Ce fut Gerd Tellenbach qui imposa en 1939 le terme de Reichsaristokratie, pour dsigner le groupe des familles nobles qui se distinguaient des autres par leur richesse et par leur dtention d'un capital foncier tendu toute l'chelle de l'Empire. Tellenbach s'efforait donc de dcrire le rle de ces familles en recourant la prosopographie 13. Aprs la guerre, ses lves se fixrent pour objectif d'employer les Libri memoriales et les ncrologes pour analyser les groupes familiaux aristocratiques. On admettait alors, sans que cela ft jamais discut, que la famille constituait le noyau plus ou moins naturel de la vie sociale14. Les liens de parent entre les membres de l'aristocratie semblaient expliquer comment se prenaient les dcisions politiques et comment, de manire plus gnrale, fonctionnait la socit en gnral. Jusqu'aux annes 1970, la prosopographie de l'aristocratie domina la recherche allemande consacre l'histoire sociale mdivale.

    9. K. Bosl, Staat, Gesellschaft, Wirtschaft im deutschen Mittelalter , dans Gebhardt. Handbuch der deutschen Geschichte, d. H. Grundmann, 9e d., t. 1, Stuttgart, 1970, p. 693-835, ici p. 711 : Das Widerspiel von Knig und Adel macht den wesentlichen Teil der mittelalterlichen Geschichte der germanisch-romanischen Vlker aus, hat vor allem die verfassungsgeschichtliche Entwicklung Deutschlands im Mittelalter entschieden ; cf. encore B. Schneidmller, Konsen- suale Herrschaft. Ein Essay iber Formen und Konzepte politischer Ordnung im Mittelalter , dans Regionen und Europa in Mittelalter und Neuzeit. Festschrift fiir Peter Moraw, d. P.-J. Heinig et. al., Berlin, 2000 (Historische Forschungen, 67), p. 53-87, ici p. 69, qui considre le fallweise ausgestalteten und auszugestaltenden Mit- und Gegeneinander vom Christus Domini und den Adelsverbnden comme un sujet central de l'histoire mdivale.

    10. T. Mayer, Die Entstehung des 'modernen' Staates im Mittelalter und die freien Bauern , Zeitschrift der Savigny- Stiftung fur Rechtsgeschichte, Germanistische Abteilung, 57, 1937, p. 210-288, ici p. 210-214 ; Id., Die Ausbildung der Grundlagen des modernen deutschen Staates im hohen Mittelalter , dans Herrschaft und Staat {op. cit. n. 7), p. 284-331 [lre d. 1939], surtout p. 289-290 et 293-294 ; de mme Id., Adel und Bauern im Staat des deutschen Mittelalters , dans Adel und Bauern im deutschen Staat des Mittelalters, d. T. Mayer, Leipzig, 1943, p. 1-21, ici p. 7.

    11. Ce terme s'est impos en allemand pour caractriser une forme de pouvoir qui fonctionne indpendamment de la personnalit de ceux qui l'exercent.

    12. Cf. H. Beumann, Zur Entwicklung transpersonaler Staatsvorstellungen , dans Das Knigtum. Seine geistigen und rechtlichen Grundlagen. Mainauvortrge 1954, Lindau/Constance, 1956 (Vortrge und Forschungen, 3), p. 185-224.

    13. G. Tellenbach, Knigtum und Stmme in der Werdezeit des Deutschen Reiches, Weimar, 1939 (Quellen und Studien zur Verfassungsgeschichte des Deutschen Reiches in Mittelalter und Neuzeit, 7,4), surtout p. 41-69. Voir aussi Id., Zur Bedeutung der Personenforschung fur die Erkenntnis des fruheren Mittelalters, Fribourg en Brisgau, 1957 (Freiburger Universitatsreden, n.s., 25) ; ainsi que le volume publi sous la direction de Tellenbach : Studien und Vorarbeiten zur Geschichte des grofifrnkischen und friihdeutschen Adels, Fribourg en Brisgau, 1957 (Forschungen zur oberrheinischen Landesgeschichte, 4).

    14. Cf. l'tude fondamentale de K. Schmid, Zur Problematik von Familie, Sippe und Geschlecht, Haus und Dynastie beim mittelalterlichen Adel. Vorfragen zum Thema 'Adel und Herrschaft' im Mittelalter , dans Id., Gebetsgedenken und adliges Selbstverstndnis im Mittelalter. Ausgewhlte Beitrge. Festgabe zu seinem sechzigsten Geburtstag, Sigmaringen, 1983 [d'abord 1957], p. 183-244 ; et aussi le volume : Prosopographie als Sozialgeschichte ? Methoden personengeschichtlicher Erforschung des Mittelalters. Sektionsbeitrage zum 32. Deutschen Historikertag 1978, Munich, 1978.

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    II. Le modle dualiste : l'vque imprial entre la royaut et l'aristocratie

    La Neue Verfassungsgeschichte et V Adelsforschung furent dterminantes dans la recherche sur l'piscopat au haut Moyen ge. Dj en 1910, Aloys Schulte avait publi Der Adel und die deutsche Kirche15, dont la thse centrale, en bref, tait la suivante : l'glise allemande mdivale tait domine par l'aristocratie. L'ouvrage fut suivi par plusieurs publications parues durant les premires dcennies du xxe s., qui examinaient, l'chelle d'un diocse ou d'une province, l'origine rgionale et sociale des vques16. Les rsultats de ces tudes concordaient : l'piscopat mdival tait noble, et cette rgle ne souffrit que peu d'exceptions, que l'on pouvait expliquer au cas par cas. Dans l'ensemble, cette opinion reste admise jusqu' nos jours, bien que la dfinition juridique de la noblesse que prsentait Schulte ne soit plus compatible avec les acquis rcents sur l'aristocratie au haut Moyen ge, et que l'hypothse d'une glise exclusivement aristocratique soit fonde sur un argument a silentio : en effet, pour la priode prcdant le xr s., nos sources laconiques n'indiquent que trs rarement l'origine sociale d'un vque17. Le postulat d'une glise aristocratique avait conduit transfrer vers l'piscopat les nouvelles mthodes et expriences de recherche qui avaient t appliques par la Neue Verfassungsgeschichte et par Y Adelsforschung. Dans cette perspective, les vques et les abbs des monastres royaux n'taient rien d'autre que la grande aristocratie en habit ecclsiastique, aussi bien par leur naissance que par leurs fonctions dans l'exercice du pouvoir tel tait l'avis de Friedrich Prinz en 1970 18. L'impact de V Adelsforschung reste sensible jusque dans la terminologie : en allemand, les vques sont qualifis, comme d'ailleurs les abbs des grands monastres19, de geistliche Grofie (en les distinguant des weltliche Grofie). Parfois encore, ils sont purement et simplement assimils l'aristocratie ce que l'historiographie justifie en invoquant pour cela la coopration entre les membres d'une mme famille, qu'ils fussent ecclsiastiques ou laques. Dans les faits, deux caractristiques piscopales peuvent inciter appliquer le modle dualiste de l'historiographie allemande. D'un ct, on peut regarder les vques comme les ttes de l'glise impriale, donc comme une source de pouvoir pour le roi : celui-ci, en effet, contrlait l'attribution des vchs, tout en tant lui-mme proche de la sphre clricale par la sacralit de son ministre royal20. D'un autre ct, on peut mettre en lumire les liens familiaux des vques, et

    15. A. Schulte, Der Adel und die deutsche Kirche im Mittelalter. Studien zur Sozial-, Rechts- und Kirchengeschichte, Stuttgart, 1910 (Kirchenrechtliche Abhandlungen, 63/64).

    16. Cf. p. ex. J. Simon, Stand und Herkunft der Bischfe der Mainzer Kirchenprovinz im Mittelalter, Weimar, 1908 ; W. Pelster, Stand und Herkunft der Bischfe der Klner Kirchenprovinz im Mittelalter, Weimar, 1909 ; B. Morret, Stand und Herkunft der Bischfe von Metz, Toul und Verdun im Mittelalter, Bonn, 1911 ; G. Muller-Alpermann, Stand und Herkunft der Bischfe der Magdeburger und Hamburger Kirchenprovinzen im Mittelalter, Prenzlau, 1930.

    17. Une nouvelle tude serait souhaitable ; pour l'heure, on peut prendre note des critiques de F. J. Felten vis-- vis des hypothses que formulait Schulte au sujet des moines et des chanoinesses : Id., Wie adelig waren Kanonissen- stifte (und andere weibliche Konvente) im (friihen und hohen) Mittelalter ? , dans Studien zum Kanonissenstift, d. Irne Crusius, Gttingen, 2001 (Verffentlichungen des Max-Planck-Instituts fur Geschichte, 167), p. 39-128; Id., Zum Problem der sozialen Zusammensetzung von alten Benediktinerklstern und Konventen der neuen religisen Bewegung , dans Hildegard von Bingen in ihrem historischen Umfeld. Internationaler wissenschaftlicher Kongrefi zum 900jhrigen Jubilum, 13.-19. September 1998, Bingen am Rhein, d. Alfred Haverkamp, Mayence, 2000, p. 189-235.

    18. F. Prinz, Klerus und Krieg im fruheren Mittelalter. Untersuchungen zur Rolle der Kirche beim Aufbau der Knigs- herrschaft, Stuttgart, 1971 (Monographien zur Geschichte des Mittelalters, 2), p. 70 : Le haut clerg franc war im Grunde nichts anderes als die Reichsaristokratie in kirchlichem Gewande, und zwar sowohl nach der Herkunft wie nach der Funktion im [...] Herrschaftsaufbau . Cf. aussi W. Strmer, Friiher Adel. Studien zur politischen Fuhrungsschicht im frnkisch-deutschen Reich vom 8. bis 11. Jahrhundert, Stuttgart, 1973 (Monographien zur Geschichte des Mittelalters, 6/2), t. 2, p. 311 : l'auteur considre les vchs comme mittelbares Machtinstrument von oft erheblichem Ausmat fur die einzelnen Adelsfamilien, die sich ihrer zu bedienen wissen , ce qui l'amne se demander wie stark einzelne Familien oder Sippen in die Besetzung der Bischofsstiihle einzugreifen vermochten .

    19. Cf. T. Vogtherr, Die Reichsabteien der Benediktiner und das Knigtum im hohen Mittelalter (900-1125), Stuttgart, 2000 (Mittelalter-Forschungen, 5).

    20. Cf. dsormais l'tude dtaille de F.-R. Erkens, Vicarius Christi sacratissimus legislator sacra majestas. Religise Herrschaftslegitimierung im Mittelalter , Zeitschrift der Savigny-Stiftung fiir Rechtsgeschichte, Kanonistische Abteilung, 89, 2003, p. 1-55.

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    considrer ceux-ci donc comme des reprsentants de l'aristocratie. Ils sont ainsi, comme l'a exprim Rudolf Schieffer en 1989, l'piscopat imprial, entre royaut et aristocratie21. C'est ce double rle qui explique les questions centrales, les principales mthodes de recherche et les controverses les plus acharnes qui polarisrent l'historiographie allemande dans ce domaine. Avant tout, ce modle dualiste constitua un cadre dominant pour les tudes prosopographiques qui, pass le temps des historiens prcurseurs, s'panouirent essentiellement dans les annes 1970 et 1980. Depuis les analyses d'Helene Wieruszowski22, de Karl Stroheker23 et surtout de Martin Heinzelmann24, on connat le rle dterminant que joua l'aristocratie gallo-romaine^ au sein de l'piscopat, durant la priode de transition entre Antiquit tardive et haut Moyen ge. Pour la priode ottonienne et salienne, ce fut Herbert Zielinski et Albrecht Graf Finck von Fincken- stein qu'il revint de rassembler et d'exploiter systmatiquement le matriau prosopographique. Tous deux avaient pour objectif de dterminer plus prcisment le rle de l'piscopat dans l'intgration de l'Empire et dans le fonctionnement du pouvoir royal25. Si l'on se tourne vers le ixe et le dbut du Xe s., l'tat des sources exige une enqute beaucoup plus serre avant de pouvoir analyser les liens personnels et familiaux des vques. De telles tudes sont mme d'un rendement douteux ; elles n'ont pourtant pas manqu de surgir dans l'historiographie allemande26. On recourait alors une mthode qui combinait les donnes gnalogiques et les indications de proprit (genealogisch-besitzgeschichtliche Mthode) : on admettait pour cela qu'un lien de parent tait probable entre deux individus ds lors que ceux-ci disposaient d'une proprit foncire en un mme lieu (ou en des espaces trs rapprochs), et portaient un anthroponyme dont une partie, au moins, tait identique. D'un point de vue thorique, ce postulat peut se justifier, mais son application est gnralement dlicate. En effet, on aboutit bien souvent des rsultats qui reposent sur une chane d'indices extrmement faibles, faisant natre des soupons : ne pourrait-on pas prouver n'importe quel lien de parent en utilisant cette mthode-l ? C'est cette difficult qui explique pourquoi, jusqu' nos jours, aucun mdiviste

    21. C'est l le titre de l'tude, par ailleurs trs nuance, de R. Schieffer, Der ottonische Reichsepiskopat zwischen Knigtum und Adel , Fruhmittelalterliche Studien, 23, 1989, p. 291-301 ; cf. aussi D. Hagen, Herrschaftsbildung zwischen Knigtum und Adel. Die Bischfe von Freising in salischer und frhstaufischer Zeit, Francfort-sur-le-Main, 1995 (Europische Hochschulschriften, III 634), qui se rfre Schieffer (cf. p. 5-6 et p. 12). Voir en outre Strmer (op. cit. n. 18), t. 2, p. 357 : So zeigt sich also wie im politischen Leben der fruhmittelalterlichen Laienwelt so auch auf den Bischofsstihlen das wechselseitige Verhltnis von Adel und Knigtum, das bisweilen zu einem Ringen um den kniglichen oder primr adeligen Einflut werden konnte .

    22. H. Wieruszowski, Die Zusammensetzung des gallischen und frnkischen Episkopats bis zum Vertrag von Verdun (843) mit besonderer Beriicksichtigung der Nationalitt und des Standes. Ein Beitrag zur frnkischen Kirchen- und Verfas- sungsgeschichte , Bonner Jahrbucher, Yll, 1922, p. 1-83.

    23. K. F. Stroheker, Der senatorische Adel im sptantiken Gallien, Tiibingen, 1948. 24. M. Heinzelmann, Bischofsherrschaft in Gallien. Zur Kontinuitt rmischer Fiihrungsschichten vom 4. bis zum 7.

    Jahrhundert. Soziale, prosopographische und bildungsgeschichtliche Aspekte, Munich, 1976 (Beihefte der Francia, 5) ; cf. aussi Id., L'aristocratie et les vchs entre Loire et Rhin jusqu' la fin du vir sicle , dans La christianisation des pays entre Loire et Rhin (iv-vir sicle), d. P. Riche, Paris, 1993, p. 75-90.

    25. H. Zielinski, Der Reichsepiskopat in sptottonischer und salischer Zeit (1002-1125), Ve partie, Stuttgart/Wiesbaden, 1984 ; A. Graf Finck von Finckenstein, Bischof und Reich, Sigmaringen, 1989 (Studien zur Medivistik, 1) ; autre rfrence, qui anticipait les rsultats de l'tude de Zielinski : C. Brhl, Die Sozialstruktur des deutschen Episkopats im 11. und 12. Jahrhundert, dans Le istituzioni ecclesiastiche dlia societas christiana dei secoli Xl-Xll : diocesi, pievi e parrocchie. Atti dlia sesta Settimana internazionale di studio, Mendola, Milano, 1-7 settembre 1974, Milan, 1977 (Pubbli- cazioni dell'Universit cattolica del Sacro Cuore. Miscellanea del Centro di studi medioevali, 8), p. 42-56.

    26. Sur la Bavire, cf. surtout Stormer (op. cit. n. 18), t. 2, p. 312-357 ; sur la Saxe, voir R. Wenskus, Sdchsischer Stammesadel und frankischer Reichsadel, Gttingen, 1976 (Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Gttingen, Phil.-hist. Klasse, 3, 93) ; pour une tude plus rcente, on pourra consulter W. Strmer, Zur Herkunft Bischof Arns von Wilrzburg (855-892), dans Von Sacerdotium und regnum. Geistliche und weltliche Gewalt im fruhen und hohen Mittelalter. Festschrift fiir Egon Boshof zum 65. Geburtstag, d. F.-R. Erkens et H. Wolff, Cologne/Weimar/Vienne, 2002 (Passauer historische Forschungen, 12), p. 301-311 ; G. Diepolder, Bemerkungen zur Herkunft der Bischfe Adalwin und Baturich von Regensburg. Landfremd ? Aus dem Uradel des Donaugaus ? , dans Staat und Verwaltung in Bayern. Festschrift fur Wilhelm Volkert zum 75. Geburtstag, d. K. Ackermann et A. Schmid, Munich, 2003 (Schriftenreihe zur bayerischen Landesgeschichte, 139), p. 21-36.

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    allemand n'a publi d'tude prosopographique de grande ampleur propos de l'piscopat du IXe S.27. Par ailleurs, le mme modle dualiste se prtait galement au concept dj ancien d' glise impriale28. C'est ce qui permit Heinrich Gerdes, ds 1878, de prsenter comme un fait historique irrfutable l'mergence d'un nouveau systme politique sous Otton [Ier] : l'auteur considrait en effet que ds 953, le roi s'effora de gouverner le royaume avec l'aide du haut clerg , afin de crer un contrepoids vis--vis des duchs qui, par leurs tendances centrifuges, mettaient sans cesse en danger l'unit du royaume . On s'accordait alors penser que les vques constituaient des agents particulirement fidles vis--vis du roi, pour deux raisons : en premier lieu, on considrait que leur ambition ne pouvait pas consister transmettre leur charge leurs hritiers ; en second lieu, pensait-on, Otton Ier aurait dvelopp l'usage consistant attribuer systmatiquement les vchs des ecclsiastiques qui avaient servi dans sa chapelle royale, auxquels il pouvait donc faire confiance. Moyennant quoi, les rois ottoniens accordaient de nombreux privilges, et notamment des comts entiers, ces loyaux agents. Ce modle d'un systme d'Eglise impriale fut rsum par Lo Santif aller en 195429 ; puis Josef Fleckenstein contribua tayer cette image, tout en nuanant quelque peu la chronologie de l'ensemble, par une minutieuse analyse de la chapelle royale des Carolingiens et Ottoniens 30 ; le modle fut alors rig au rang de vrit indpassable et s'imposa dfinitivement dans les manuels. Il n'est peut-tre pas anodin que ce fut un mdiviste anglais, mme s'il avait des affinits avec l'historiographie allemande, qui critiqua la thorie allemande : il s'agit de Timothy Reuter qui, dans un article de 1982, dploya son argumentaire. Selon lui : 1. les Ottoniens n'avaient pas

    27. Mme si l'on se limite un seul vque carolingien, les difficults sont nombreuses : K. Schmid, Bischof Wikterp in Epfach. Eine Studie iiber Bischof und Bischofssitz im 8. Jahrhundert , dans Gebetsgedenken (op. cit. n. 14) [d'abord 1964], p. 18-58 ; voir aussi la critique de l'historiographie consacre aux origines de l'vque Baturich de Ratisbonne, propose par S. Freund, Die Rolle des bayenschen Episkopats bei der Intgration Bayerns ins Karolingerreich. Das Beispiel Bischof Baturichs von Regensburg (um 780-848) [thse d'habilitation dactyl.], Jena, 1999, p. 134-175. Sur quelques exceptions, cf. K. Schmid, Die 'Liudgeriden'. Erscheinung und Problematik einer Adelsfamilie , dans Gebetsgedenken (op. cit. n. 14) [d'abord 1978], p. 305-335, surtout p. 320-324 ; et O. G. Oexle, Bischof Ebroin von Poitiers und seine Verwandten , Fruhmittelalterliche Studien, 3, 1969, p. 138-210. Pour une critique de la genealogisch-besitzgeschichtliche Mthode, on pourra consulter L. Holzfurtner, Untersuchungen zur Namensgebung im friihen Mittelalter nach den bayerischen Quellen des achten und des neunten Jahrhunderts , Zeitschrift fur bayerische Landesgeschichte, 45, 1982, p. 3-19 ; cependant cette tude n'est elle-mme pas exempte de faiblesses, et ses hypothses exagres ont t contredites par W. Hartung, Tradition und Namengebung im frtihen Mittelalter , dans Frtih- und hochmittelalterlicher Adel in Schwaben und Bayern, d. W. Hartung, I. Eberl et J. Jahn, Sigmaringendorf, 1988 (REGIO. Forschungen zur schwabischen Regionalgeschichte, 1), p. 23-79 ; cf. aussi le rsum de ce dbat dans l'article de D. Geuenich, Personennamengebung und Personennamenge- brauch im Fruhmittelalter , dans Personennamen und Identitt. Namengebung und Namengebrauch als Anzeiger indivi- dueller Bestimmung und gruppenbezogener Zuordnung. Akten der Akademie Friesach Stadt und Kultur im Mittelalter Friesach (Karnten), 25. bis 29. September 1995, d. R. Hrtel, Graz, 1997 (Grazer Grundwissenschaftliche Forschungen, 3 = Schriftenreihe der Akademie Friesach, 2), p. 31-46, ici p. 38-39.

    28. H. Gerdes, Die Bischofswahlen in Deutschland unter Otto dem Grossen in den Jahren 953 bis 973, Hambourg, 1878, p. 6.

    29. L. Santifaller, Zur Geschichte des ottonisch-salischen Reichskirchensy stems, Vienne, 1954 (sterreichische Akademie der Wissenschaften, Phil.-hist. Klasse, Sitzungsberichte, 229, 1) ; pour un compte rendu des recherches menes jusqu'aux annes 1960, cf. O. Khler, Die ottonische Reichskirche. Ein Forschungsbericht , dans Adel und Kirche. Festschrift fur Gerd Tellenbach zum 65. Geburtstag, d. J. Fleckenstein et K. Schmid, Fribourg-en-Brisgau, 1968, p. 141-204 ; concernant la terminologie, voir J. Fleckenstein, Zum Begriff der ottonisch-salischen Reichskirche , dans Geschichte Wissen- schaft Gesellschaft. Festschrift fur Clemens Baver zum 75. Geburtstag, d. E. Hassinger, J. H. Mller, H. Ott, Berlin, 1974, p. 61-71. Cf. en outre J. Schur, Knigtum und Kirche im ostfrnkischen Reiche vom Tode Ludwigs des Deutschen bis Konrad L, Paderborn, 1931 (Grres-Gesellschaft zur Pflege der Wissenschaft im katholischen Deutschland. Verffent- lichungen der Sektion fur Rechts- und Staatswissenschaft, 57) ; H. Hoffmann, Politik und Kultur im ottonischen Reichskirchensystem. Zur Interprtation der Vita Brunonis des Ruotger , Rheinische Vierteljahrsbltter, 22, 1957, p. 31-55 ; H. Hurten, Die Verbindung von geistlicher und weltlicher Gewalt als Problem in der Amtsfiihrung des mittel- alterlichen deutschen Bischofs , Zeitschrift fur Kirchengeschichte, 82, 1971, p. 16-28 ; M.-L. Crone, Untersuchungen zur Reichskirchenpolitik Lothars III. (1125-1137) zwischen reichskirchlicher Tradition und Reformkurie, Francfort-sur-le- Main/Berne, 1982.

    30. J. Fleckenstein, Die Hofkapelle der deutschen Knige. II : Die Hofkapelle im Rahmen der ottonisch-salischen Reichskirche, Stuttgart, 1966 (Schriften der MGH, 16/11), surtout p. 54-58.

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    systmatiquement cr et utilis l'glise impriale pour exercer une pression contre l'aristocratie sculire ; 2. beaucoup d'vques taient tout aussi loyaux envers leurs familles qu'envers le roi ; et 3. l'appui que le roi pouvait trouver dans les vques ne constituait nullement une spcificit de l'Empire ottonien et salien, et se retrouvait, au contraire, dans des rgions ou des poques bien diffrentes31. Pour l'exprimer dans les concepts de notre modle dualiste : Reuter avait quelque peu loign les vques du roi, les rapprochant de l'aristocratie. Malgr une rplique acharne de Fleckenstein32, les arguments de Reuter33 sont dsormais reus par l'historiographie allemande, au moins dans leur ensemble et sous une forme plus modre34. Confirmant cette stabilit de la fonction picopale entre les Carolingiens et les Ottoniens, Odilo Engels a montr que l'idal piscopal n'avait pas non plus connu de changement fondamental durant cette poque ; selon lui, ce n'est qu' partir des annes 1050, et notamment lors de la Querelle des Investitures, que l'on peut observer une telle modification35. Ernst-Dieter Hehl a mis en lumire les vques insoumis des temps ottoniens : ceux-ci, loin d'tre les marionnettes du roi dnues de toute volont, taient en ralit soumis tout un systme de rgles spcifiques, que ni le roi ni les vques eux-mmes ne pouvaient briser36. Enfin, Rudolf Schieffer a rappel rcemment que ds les derniers Carolingiens, les vques s'taient vu attribuer une fonction similaire d'agent royal. Selon lui, Otton Ier n'introduisit que deux nouveauts : il utilisa de manire plus consquente la chapelle royale pour la formation de futurs vques impriaux , et il fit participer la papaut ses projets d'organisation ecclsiastique37. Rcemment, Gerd Althoff exprima des doutes quant la capacit pratique des rois du Xe s. dvelopper des projets politiques long terme38 or c'tait l un des postulats de ceux qui envisageaient un systme d'glise impriale .

    31. T. Reuter, The 'Imprial Church System' of the Ottonian and Salian Rulers : A Reconsideration , Journal of Ecclesiastical History, 33, 1982, p. 347-374.

    32. J. Fleckenstein, Problematik und Gestalt der ottonisch-deutschen Reichskirche , dans Reich und Kirche vor dem Investiiurstreit. Vortrge beim wissenschaftlichen Kolloquium aus Anlafi des achtzigsten Geburtstags von Gerd Tellenbach, d. K. Schmid, Sigmaringen, 1985, p. 83-98.

    33. Dont quelques-uns avaient dj t avancs dans un livre tonnamment mconnu : E. N. Johnson, The Secular Activities of the German Episcopate. 919-1024, Lincoln, 1932.

    34. Le concept d'un systme se retrouve pourtant parfois dans l'historiographie rcente, cf. p. ex. M. Weitlauff, Kaiser Otto I. und die Reichskirche , Jahrbuch des Vereins fur Augsburger Bistumsgeschichte, 26/27, 1993, p. 21-51, qui est fortement influenc par la vision de Santifaller et de Fleckenstein.

    35. O. Engels, Der Reichsbischof (10. und 11. Jahrhundert) , dans Der Bischof in seiner Zeit. Bischofstypus und Bischofsideal im Spiegel der Klner Kirche. Festgabe fur Joseph Kardinal Hoffner Erzbischof von Kln, d. O. Engels et P. Berglar, Cologne, 1986, p. 41-94 ; cf. aussi Id., Der Reichsbischof in ottonischer und friihsalischer Zeit , dans Beitrage zur Geschichte und Struktur der mittelalterlichen Germania Sacra, d. I. Crusius, Gttingen, 1989 (Verffentli- chungen des Max-Planck-Instituts fur Geschichte, 93 = Studien zur Germania Sacra, 17), p. 135-175 ; et son rsum : Id., Das Reich der Salier Entwicklungslinien , dans Die Salier und das Reich. III : Gesellschaftlicher und ideengeschicht- licher Wandel im Reich der Salier. Publikation zur Ausstellung Die Salier und ihr Reich , veranstaltet vont Land Rheinland- Pfalz in Speyer, d. S. Weinfurter, Sigmaringen, 1992, p. 479-541, ici p. 514-533.

    36. E.-D. Hehl, Der widerspenstige Bischof. Bischfliche Zustimmung und bischflicher Protest in der ottonischen Reichskirche , dans Herrschaftsreprsentation im ottonischen Sachsen, d. G. Althoff et E. Schubert, Sigmaringen, 1998 (Vortrge und Forschungen, 46), p. 295-344.

    37. Pour les citations, cf. R. Schieffer, Karolingische und ottonische Kirchenpolitik , dans Mnchtum Kirche Herrschaft 750-1000, d. D. R. Bauer et al, Sigmaringen, 1998, p. 311-326, ici p. 325 ; cf. aussi Id., Der geschichtliche Ort der ottonisch-salischen Reichskirchenpolitik, Opladen, 1998 (Nordrhein-Westflische Akademie der Wissenschaften. Geistes- wissenschaften. Vortrge, G 352).

    38. Ce fut la biographie d'Otton III par G. Althoff qui provoqua le dbat : G. Althoff, Otto III., Darmstadt, 1996 (Gestalten des Mittelalters und der Renaissance), surtout p. 21-22, p. 30-31 et p. 114-125, niait l'existence de concepts politiques de longue dure l'poque ottonienne ; cette opinion fut critique par divers auteurs : M. Borgolte, Biographie ohne Subjekt, oder wie man durch quellenfixierte Arbeit Opfer des Zeitgeistes werden kann , Gttingische Gelehrte Anzeigen, 249, 1997, p. 128-141 ; F.-R. Erkens, Mirabilia mundi. Ein kritischer Versuch iiber ein methodisches Problem und eine neue Deutung der Herrschaft Ottos III. , Archiv fur Kultur geschichte, 79, 1997, p. 485-498 ; E. Hlawitschka, Kaiser Otto III. , Schriften der Sudetendeutschen Akademie, 20, 1999, p. 29-74 ; E. Eickhoff, Otto III. in Pereum. Konzept und Verwirklichung seiner Missionspolitik , Archiv fiir Kulturgeschichte, 83, 2001, p. 25-35 ; H. Dormeier, Die Renovatio Imperii Romanorum und die 'Autenpolitik' Ottos III. und seiner Berater , dans Polen und Deutschland vor 1000 Jahren. Die Berliner Tagung iiber den Akt von Gnesen , d. M. Borgolte, Berlin, 2002 (Europa im Mittel- alter, 5), p. 163-191. Pour Charlemagne, cf. l'tude de R. Schieffer, Karl der GroBe Intentionen und Wirkungen ,

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    Mais les dbats produits par la thorie d'une glise impriale ne concernaient pas seulement le caractre exceptionnel ou systmatique de l'glise l'est du Rhin ; de manire plus gnrale, ils marqurent de leur griffe de nombreuses tudes jusqu' nos jours39. Il n'est peut-tre pas exagr d'affirmer que dans l'historiographie allemande du xxe s., l'piscopat ne fut presque jamais considr en tant que tel, comme une lite ecclsiastique avec ses propres rgles, ses propres champs d'activit et ses propres conditions d'existence, mais plutt comme un simple facteur de la Herrschaft du roi (ou ventuellement d'une famille aristocratique). Quelques exemples suffiront pour s'en convaincre : on s'intresse aux vques parce que l'on considre l'attribution des vchs comme un facteur d'intgration pour les parties htrognes de l'Empire c'est--dire, en fin de compte, comme un facteur de dveloppement pour la nation allemande40. On s'intresse aux vques parce qu'ils fournissaient une grande part du contingent royal, et comptaient donc parmi les principaux piliers de la puissance militaire royale41. On s'intresse aux vques parce qu'ils se voyaient octroyer une grande part des droits royaux42, allant jusqu' contrler, ds la fin du Xe s., des comts43. On s'intresse eux parce qu'ils taient investis44 ou destitus45 par le roi, promus au sige papal par le roi46, qu'ils faisaient des lgations au nom du roi47, qu'ils participaient l'lection d'un roi48, qu'ils taient issus de la chapelle du roi49, appels intervenientes

    dans Karl der Grofie und das Erbe der Kulturen. Akten des 8. Symposiums des Medivistenverbandes, Leipzig 1999, d. F.-R. Erkens, Berlin, 2001, p. 3-14, surtout p. 5-6 ; pour le xir et le xnr s., cf. aussi K. van Eickels, Vom inszenierten Konsens zum systematisierten Konflikt. Die englisch-franzsischen Beziehungen und ihre Wahrnehmung an der Wende vom Hoch- zum Spatmittelalter, Stuttgart, 2002 (Mittelalter-Forschungen, 10), p. 34.

    39. Cf. aussi la critique de M. Suchan, Kirchenpolitik des Knigs oder Knigspolitik der Kirche ? Zum Verhaltnis Ludwigs des Frommen und des Episkopates whrend der Herrschaftskrisen um 830 , Zeitschrift fur Kirchengeschichte, 111, 2000, p. 1-27, surtout p. 22 : l'auteur doute que le modle de l'glise impriale soit apte expliquer la crise des annes 830.

    40. Ainsi p. ex. dans les tudes de H. Zielinski (pp. cit. n. 25), et de A. Graf Finck von Finckenstein (pp. cit. n. 25).

    41. Cf. K. F. Werner, Heeresorganisation und Kriegsfhrung im deutschen Knigreich des 10. und 11. Jahrhun- derts , dans Ordinamenti militari in occidente nell'alto medioevo, Spolte, 1968, t. 2 (Settimane di studio del Centro Italiano di Studi sull'Alto Medioevo, 25), p. 799-884 ; Leopold Auer, Der Kriegsdienst des Klerus unter den schsischen Kaisern. 1. Teil , Mitteilungen des Instituts fiir Osterreichische Geschichtsforschung, 79, 1971, p. 316-407 ; 2. Teil , ibid., 80, 1972, p. 48-70.

    42. ce sujet, cf. avant tout les articles de R. Kaiser (op. cit. n. 4). 43. Cf. la rcente tude circonstancie de H. Hoffmann, Grafschaften in Bischofshand , Deutsches Archiv fur Erfor-

    schung des Mittelalters, 46, 1990, p. 373-480. 44. Rsumant bien d'autres tudes, cf. F.-R. Erkens, Die Bischofswahl im Spannungsfeld zwischen weltlicher und

    geistlicher Gewalt , dans Die friih- und hochmittelalterliche Bischofserhebung im europischen Vergleich, d. F.-R. Erkens, Cologne/Weimar/Vienne, 1998 (Beihefte zum Archiv fiir Kulturgeschichte, 48), p. 1-32, ainsi que les autres article dans ce volume, avec une vaste bibliographie. Pour une historiographie plus date, voir encore G. Weise, Knigtum und Bischofswahl im frnkischen und deutschen Reich vor dem Investiturstreit, Berlin/Gttingen, 1912.

    45. M. Meyer-Gebel, Bischofsabsetzungen in der deutschen Reichskirche vom Wormser Konkordat (1122) bis zum Ausbruch des Alexandrinischen Schismas (1159), Siegburg, 1992 (Bonner Historische Forschungen, 55).

    46. H. Beumann, Reformppste als Reichsbischfe in der Zeit Heinrichs III. Ein Beitrag zur Geschichte des ottonisch-salischen Reichskirchensystems , dans Festschrift Friedrich Hausmann, d. H. Ebner, Graz, 1977, p. 21-37.

    47. W. Georgi, Legatio uirum sapientem requirat. 7my Rolle der Erzbischfe von Kln als kniglich-kaiserliche Gesandte , dans Kln. Stadt und Bistum in Kirche und Reich des Mittelalters. Festschrift fur Odilo Engels zum 65. Geburtstag, d. H. Vollrath et S. Weinfurter, Cologne/Weimar/Vienne, 1993 (Klner Historische Abhandlungen, 39), p. 61-124.

    48. U. Stutz, Der Erzbischof von Mainz und die deutsche Knigswahl. Ein Beitrag zur deutschen Rechts- und Verfas- sungsgeschichte, Weimar, 1910 ; W. Sellert, Zur rechtshistorischen Bedeutung der Krnung und des Streites um das Krnungsrecht zwischen Mainz und Kln , dans Herrscherweihe und Knigskrnung im fruhneuzeitlichen Europa, d. H. Duchhardt, Wiesbaden, 1983 (Schriften der Mainzer philosophischen Fakulttsgesellschaft, 8), p. 21-32 ; U. Reinhardt, Untersuchungen zur Stellung der Geistlichen bel den Knigswahlen im Frnkischen und Deutschen Reich (751-1250), Marbourg, 1975 (Untersuchungen und Materialien zur Verfassungs- und Landesgeschichte, 4) ; F.-R. Erkens, Der Erzbischof von Kln und die deutsche Knigswahl. Studien zur Klner Kirchengeschichte, zum Krnungsrecht und zur Verfassung des Reiches (Mitte 12. Jahrhundert bis 1806), Siegburg, 1987 (Studien zur Klner Kirchengeschichte, 21).

    49. H.-W. Klewitz, Knigtum, Hofkapelle und Domkapitel im 10. und 11. Jahrhundert , Archiv fiir Urkundenfor- schung, 16, 1939, p. 102-156 ; cf. l'tude de J. Fleckenstein sur la chapelle royale (op. cit. n. 30) ; et Id., Hofkapelle und Reichsepiskopat unter Heinrich IV. , dans Investiturstreit und Reichsverfassung, d. J. Fleckenstein, Sigmaringen, 1973 (Vortrge und Forschungen, 17), p. 117-140.

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    dans les diplmes royaux50, apparents au roi51, que le roi pouvait fonder des vchs nouveaux ou dissoudre des vchs existants52 bref, parce que l'piscopat tait, en raison de sa relation au roi53, un lment constitutif pour le fonctionnement de l'Empire54. Dans ces conditions, on comprend mieux l'intrt rcent qu'a suscit la Querelle des Investitures, et le changement profond qu'elle a fait subir l' glise impriale (et, travers elle, la structure impriale)55. De la mme manire, les mdivistes allemands se sont intresss tout particulirement aux premires tapes historiques de cette position particulire de l'piscopat : c'est ainsi que fut tudi tout particulirement le rle des vques dans la prise en charge des pouvoirs sculiers en Gaule, entre l'Antiquit tardive et le haut Moyen ge56 ; on poursuivait l'tude jusqu' la formation des

    50. R. Schetter, Die Intervenienz der weltlichen und geistlichen Fursten in den deutschen Knigsurkunden von 911- 1056, Berlin/Bottrop-en-Westphalie, 1935.

    51. H. Schnitger, Die deutschen Bischfe aus den Knigssippen von Otto I. bis Heinrich V, Wurzbourg, 1938. 52. E.-D. Hehl, Merseburg eine Bistumsgriindung unter Vorbehalt. Gelbde, Kirchenrecht und politischer Spielraum

    im 10. Jahrhundert , Frhmittelalterliche Studien, 31, 1997, p. 96-119 ; lu, Herrscher, Kirche und Kirchenrecht im sptottonischen Reich , dans Otto III. Heinrich II. : eine Wende ?, d. B. Schneidmller et S. Weinfurter, Sigma- ringen, 1997 (Mittelalter-Forschungen, 1), p. 169-203. Sur l'poque carolingienne, cf. R. Kaiser, Bistumsgriindung und Kirchenorganisation im 8. Jahrhundert , dans Der hl. Willibald Klosterbischof oder Bistumsgrnder ?, d. H. Dickerhof, E. Reiter et S. Weinfurter, Ratisbonne, 1990 (Eichsttter Studien, n.s., 30), p. 29-67 ; K. Honselmann, Die Bistums- grundungen in Sachsen unter Karl dem Groten mit einem Ausblick auf sptere Bistumsgriindungen und mit einem Exkurs zur Ubernahme der christlichen Zeitrechnung im fruhmittelalterlichen Sachsen , Archiv fur Diplomatik, 30, 1984, p. 1-50 (voir cependant la critique de R. Schieffer, Papsttum und Bistumsgriindung im Frankenreich , dans Studia in Honorent Eminentissimi Cardinalis Alphonsi M. Stickler, d. R. I. Castillo Lara, Rome, 1992 (Studia et Textus Historiae Iuris Canonici, 7), p. 517-528.)

    53. Voir A. U. Friedmann, Die Beziehungen der Bistiimer Worms und Speyer zu den ottonischen und salischen Knigen, Trves, 1994 (Quellen und Abhandlungen zur mittelrheinischen Kirchengeschichte, 72) ; pour Conrad III, cf. B. Schtte, Knig Konrad III. und der deutsche Reichsepiskopat, Hambourg, 2004 (Studien zur Geschichtsforschung des Mittelalters, 20).

    54. Ainsi dernirement encore l'tude de B. Bigott, Ludwig der Deutsche und die Reichskirche im Ostfrnkischen Reich (826-876), Husum, 2002 (Historische Studien, 470) : l'auteur analyse l'piscopat et les abbs des grands monastres dans le royaume de Louis le Germanique, pour valuer leur fonction vis--vis du pouvoir royal. Cf. aussi Id., Die Vershnung von 847. Ludwig der Deutsche und die Reichskirche , dans Ludwig der Deutsche und seine Zeit, d. W. Hartmann, Darmstadt, 2004, p. 121-140, o l'auteur date en 847 le dbut d'une Reichskirche en Francie orientale.

    55. Pour montrer quel point ces tudes taient ancres dans une tradition ancienne, je ne citerai que K. Lffler, Die westflischen Bischfe im Investiturstreit und in den Sachsenkriegen unter Heinrich IV. und Heinrich V, Halle, 1903 ; R. Rudolph, Erzbischof Siegfried von Mainz (1060-1084). Ein Beitrag zur Geschichte der Mainzer Erzbischfe im Inves

    titurstreit, Francfort-sur-le-Main, 1973 ; G. Meier, Die Bischfe von Paderborn und ihr Bistum im Hochmittelalter, Paderborn, 1987 (Paderborner theologische Studien, 17) ; F.-R. Erkens, Die Trierer Kirchenprovinz im Investiturstreit, Cologne/Vienne, 1987 (Passauer Historische Forschungen, 4) ; voir aussi Die Salier und das Reich. II : Die Reichskirche in der Salierzeit. Publikation zur Ausstellung Die Salier und ihr Reich , veranstaltet vom Land Rheinland-Pfalz in Speyer, d. S. Weinfurter, Sigmaringen, 1992, en particulier les articles de Rudolf Schieffer (p. 1-29, sur Cologne), Franz Staab (p. 31-77, sur Mayence), Peter Johanek (p. 79-112, sur Hambourg-Brme), Egon Boshof (p. 113-154, sur Passau et Ratisbonne), Helmut Maurer (p. 155-186, sur Constance), Ingrid Heidrich (p. 187-224, sur Spire), Alfred Wendehorst (p. 225- 249, sur Wurzbourg, Eichsttt et Bamberg), et Michael Horn (p. 251-266, sur Augsbourg). Par contre, H.-W. Goetz, Die bischfliche Politik in Westfalen und ihre historiographische Legitimierung whrend des Investiturstreits , Westflische Zeitschrift, 141, 1991, p. 307-328, a montr que la politique piscopale en Westphalie durant la Querelle des Investitures n'tait pas seulement influence par la relation des vques avec le roi Henri IV, mais aussi par leurs relations avec les chapitres, les ministriaux et les citoyens de leurs villes.

    56. Les articles fondamentaux sont ceux de F. Prinz, Bischfliche Stadtherrschaft im Frankenreich vom 5. bis zum 7. Jahrhundert , Historische Zeitschrift, 217, 1974, p. 1-35 ; Id., Die bischfliche Stadtherrschaft im Frankenreich vom 5. bis zum 7. Jahrhundert , dans Bischofs- und Kathedralstdte des Mittelalters und der frtihen Neuzeit, d. F. Ptri, Cologne/Vienne, 1976 (Stdteforschung, Al), p. 1-26 ; Id., Der frnkische Episkopat zwischen Merowinger- und Karolin- gerzeit , dans Nascit dell'Europa ed Europa carolingia : un'equazione da verificare. 19-25 aprile 1979, Spolte, 1981, t. 1 (Settimane di studio del Centro Italiano di Studi sull'Alto Medioevo, 27), p. 101-133 ; Id., Herrschaftsformen der Kirche vom Ausgang der Sptantike bis zum Ende der Karolingerzeit. Zur Einfhrung ins Thema , dans Herrschaft und Kirche. Beitrge zur Entstehung und Wirkungsweise episkopaler und monastischer Organisationsformen, d. F. Prinz, Stuttgart, 1988 (Monographien zur Geschichte des Mittelalters, 33), surtout p. 2-9. Voir aussi M. Heinzelmann, Bischof und Herrschaft im sptantiken Gallien bis zu den karolingischen Hausmeiern. Die institutionellen Grundlagen , dans Herrschaft und Kirche, op. cit., p. 23-82. Sur le Ve s., voir P. Gassmann, Der Episkopat in Gallien im 5. Jahrhundert, Bonn 1977 ; S. Baumgart, Die Bischofsherrschaft im Gallien des 5. Jahrhunderts. Eine Untersuchung zu den Grinden und Anfangen weltlicher Herrschaft der Kirche, Munich, 1995 (Miinchener Arbeiten zur alten Geschichte, 8). Sur les vp et vir s.,

  • L'PISCOPAT DU HAUT MOYEN GE 351

    tonnants tats piscopaux durant la seconde moiti du vne et le dbut du vme s., qu'Eugen Ewig qualifiait de rpubliques aristocratiques avec une tte piscopale 57. Dans les annes 1970 et 1980, deux conceptions opposes amenrent les historiens croiser le fer : selon l'une, les vques taient des usurpateurs qui avaient exploit le dclin de l'Empire romain pour s'approprier des droits qui, auparavant, taient impriaux ; d'aprs l'autre, l'empereur lui-mme avait dlgu ces droits l'piscopat. Deux opinions permettent d'illustrer cette divergence : selon Friedrich Prinz, le dveloppement du pouvoir piscopal partir du Ve s. fut un processus d'viction via facti, dcoulant directement de l'effritement de l'administration centrale romaine58; par contre, du point de vue de Martin Heinzelmann, ce mme dveloppement se fondait sur la dlgation de domaines d'activit publics par l'autorit suprieure de l'tat59. Rcemment, Bernhard Jussen a nergiquement critiqu cette alternative usurpation/dlgation60. Selon lui, le pouvoir piscopal tait plutt le rsultat des changements qui avaient affect la smantique culturelle61. Pass le ive s., les rgles traditionnelles par lesquelles se distinguait l'aristocratie devinrent progressivement incomprhensibles en Gaule, et il fallut donc tablir de nouvelles formes de reprsentation. D'aprs Jussen, c'est dans cette bataille pour de nouvelles

    cf. G. Scheibelreiter, Der Bischof in merowingischer Zeit, Vienne/Cologne/Graz, 1983 (Verffentlichungen des Instituts fur sterreichische Geschichtsforschung, 27). Sur la Bischofsherrschaft en Neustrie : Kaiser, Royaut (op. cit. n. 4), p. 143-153. Sur Le Mans, voir aussi M. Weidemann, Bischofsherrschaft und Knigtum in Neustrien vom 7. bis zum 9. Jahrhundert am Beispiel des Bistums Le Mans , dans La Neustrie (op. cit. n. 4), p. 161-193.

    57. E. Ewig, Milo et eiusmodi similes , dans Id., Sptantikes und frnkisches Gallien. Gesammelte Schriften (1952- 1973), d. H. Atsma, Munich/Zurich, 1979, t. 2 (Beihefte der Francia, 3/2), p. 189-219 [d'abord 1954], ici p. 212-213; cf. aussi D. Claude, Untersuchungen zum friihfrnkischen Comitat , Zeitschrift der Savigny-Stiftung fur Rechtsgeschichte, Germanistische Abteilung, 81, 1964, p. 1-79, surtout p. 24-30. R. Kaiser, Civitas und Bischofssitz im westfrnkisch-franz- sischen Reich , dans Stadtkernforschung, d. H. Jger, Cologne/Vienne, 1987 (Stadteforschung, A 27), p. 247-278, ici p. 262, prfre parler de regionale[n] Bischofsherrschaften mit starkem stdtischen Zentrum . Voir rcemment la synthse de H.-H. Anton, 'Bischofsherrschaften' und 'Bischofsstaaten' in Sptantike und Frtihmittelalter. Reflexionen zu ihrer Gense, Struktur und Typologie , dans Liber amicorum necnon et amicarum fur Alfred Heit, Trves, 1996 (Trierer Historische Forschungen, 28), p. 461-473, et U. Nonn, Zwischen Knig, Hausmeier und Aristokratie Die Bischofserhebung im sptmerowingisch-fruhkarolingischen Frankenreich , dans Die friih- und hochmittelalterliche Bischofserhebung (op. cit. n. 44), p. 33-58, ici p. 51-57. Pour le dmantlement de ces Bischofsherrschaften par les Carolingiens au viif s., cf. J. Semmler, Episcopi potestas und karolingische Klosterpolitik , dans Mnchtum, Episkopat und Adel zur Grundungszeit des Klosters Reichenau, d. A. Borst, Sigmaringen, 1974 (Vortrge und Forschungen, 20), p. 305-395 ; en outre, sur l'exemple de Chur, voir dj U. Stutz, Karls des GroBen divisio von Bistum und Grafschaft Chur. Ein Beitrag zur frnkischen Verfassungs- und Rechtsgeschichte im allgemeinen und zur Geschichte des Eigenkirchenrechts im besonderen , dans Historische Aufsatze K. Zeumer zum sechzigsten Geburtstag als Festgabe dargebracht von Freunden und Schlern, Weimar, 1910, p. 101-152 ; O. P. Clavadetscher, Die Einfiihrung der Grafschaftsverfassung in Rtien und die Klageschrift Bischof Victors III. von Chur , Zeitschrift der Savigny-Stiftung fur Rechtsgeschichte, Kanonistische Abteilung, 70, 1953, p. 46-111 ; M. Borgolte, Der churrtische Bischofsstaat und die Lehre von der Eigenkirche. Ein Beitrag zum archologisch-historischen Gesprch , dans Geschichte und Kultur Churratiens. Festschrift fiir Pater Iso Mller OSB zu seinem 85. Geburtstag, d. U. BRUNOLD et L. Deplazes, Disentis, 1986, p. 83-103.

    58. Prinz, Bischfliche Stadtherrschaft (op. cit. n. 56), p. 6 ; voir aussi F. Vittinghoff, Zur Verfassung der sptan- tiken 'Stadt' , dans Studien zu den Anfngen des europdischen Stdtewesens. Reichenau-Vortrge 1955-1956, 4e d., Sigmaringen, 1975 [lre d. 1958] (Vortrge und Forschungen, 4), p. 11-39, ici p. 39 : Der Zusammenbruch der Zentralgewalt in den Wirren des 5. Jh. und das Versagen der staatlichen Verwaltung haben zwangslufig den Bischof mit der Entwertung des defensor-Amtes zum tatschlichen Herren der civitas gemacht und jene Entwicklung vorbereitet, die zu einer bischf- lichen Stadtherrschaft des Mittelalters gefiihrt hat .

    59. Heinzelmann (op. cit. n. 56), p. 26. En guise de compromis, Prinz, Herrschaftsformen (op. cit. n. 56), p. 7, proposait la formule suivante : Die 'Legalitt' bischflicher Macht war zwar lngst vorhanden, aber die extrem ausge- weitete Praxis ergab sich erst aus der Umgestaltung der Verhltnisse seit der Merowingerzeit .

    60. B. Jussen, ber 'Bischofsherrschaften' und die Prozeduren politisch-sozialer Umordnung in Gallien zwischen 'Antike' und 'Mittelalter' , Historische Zeitschrift, 260, 1995, p. 673-718, ici p. 677-684, et Id., Liturgie und Lgitimation, oder : Wie die Gallo-Romanen das rmische Reich beendeten , dans Institutionen und Ereignis. Uber historische Praktiken und Vorstellungen gesellschaftlichen Ordnens, d. R. Blnkner et B. Jussen, Gttingen, 1998 (Verffentlichungen des Max- Planck-Instituts fiir Geschichte, 138), p. 75-136, ici p. 80-82, o l'on trouvera critique l'historiographie plus ancienne. Pour un rsum de son opinion, voir aussi Id., Zwischen Rmischem Reich und Merowingern. Herrschaft legitimieren ohne Kaiser und Knig , dans Mittelalter und Moderne. Entdeckung und Rekonstruktion der mittelalterlichen Welt. Kongrejiakten des 6. Symposiums des Medivistenverbandes in Bayreuth 1995, d. P. Segl, Sigmaringen, 1997, p. 15-29.

    61. Jussen, Liturgie (op. cit. n. 60), p. 78.

  • 352 CAHIERS DE CIVILISATION MDIVALE, 48, 2005 STEFFEN PATZOLD

    reprsentations ou lgitimations que fut dfini le pouvoir {Herrschaftsordnung) mdival et, du mme coup, le pouvoir piscopal62. Pour appuyer sa thse, l'auteur montrait comment, partir de 400 en Gaule, volurent les conceptions de la dignit piscopale et les qualits requises des candidats l'piscopat63. Il mettait en valeur le statut nouveau des processions urbaines, l'volution de la liturgie et du style des vques, c'est--dire leur faon de se comporter et de s'habiller64. Ce serait dans ces domaines-l que l'aristocratie gauloise aurait russi, au cours du ve et du vie s., imposer un nouveau monde de signes, de significations, de rituels, etc. 65. Elle se serait ainsi appropri la production du sens culturel , ce qui lui aurait permis de modeler sa guise l'espace et le temps, la vrit, le futur et la saintet. Il tait incontestablement salutaire que quelqu'un s'attelt renouveler, par des considrations smantiques, les vieilles conceptions allemandes centres sur des aspects juridiques, institutionnels et sociaux. Mais malheureusement, Jussen est lui-mme rest fidle notre modle dualiste, reprenant son compte le schma de l'vque comme aristocrate en habit ecclsiastique . De son point de vue, les spcificits d'une lite ecclsiastique ne jouaient qu'un rle secondaire : tout se jouait, selon lui, dans les manuvres de l'aristocratie gallo-romaine pour maintenir son pouvoir.

    III. Pour surmonter le modle dualiste : l'vque, par-del la royaut et l'aristocratie

    On a pu voir ainsi que suite un modle dualiste, les vques taient perus comme des reprsentants de l'aristocratie ou de la royaut et rarement comme les porteurs d'une dignit qui tait aussi ecclsiastique, c'est--dire spcifique. Il reste attirer l'attention sur quelques autres champs de recherche qui furent explors durant le xxe s., pour dmontrer qu'un coup d'il sur l'vque par-del la royaut et l'aristocratie se justifierait pleinement. C'est dans ce but que je prsenterai successivement des tudes qui concernent la position et les devoirs des vques dans leur civitas, leur activit comme administrateurs, juges et connaisseurs du droit canon, et enfin leur rle de promoteurs pour l'art et la littrature. Il va de soi que cette prsentation n'a aucune prtention exhaustive : les tudes retenues ici ne constituent que des exemples au sein d'une historiographie beaucoup plus riche et varie66. L'ombre du modle dualiste s'est tendue jusqu'aux tudes qui analysaient la position de l'vque dans sa civitas. Ici comme dans d'autres domaines, les historiens allemands ont d'abord examin les aspects juridiques, puis institutionnels : ce fut ds le dbut du xxe s. que Siegfried Rietschel publia ses tudes fondamentales sur les institutions des villes piscopales en Francie orientale ; cette date, lui-mme pouvait dj puiser dans une abondante littrature67. Dans les dcennies suivantes, ce fut surtout la formation de la Stadtherrschaft piscopale qui draina les recherches allemandes dans ce domaine68; il est d'ailleurs rvlateur que le terme de Bischofsstadt (ville

    62. Ibid., p. 83. 63. Jussen, Reich (op. cit. n. 60), p. 21 et Id., Liturgie (op. cit. n. 60), p. 93. 64. Id., Bischofsherrschaften (op. cit. n. 60), p. 691-695 et p. 699-704. 65. Id., Liturgie (op. cit. n. 60), p. 105 ; cf. aussi Id., Reich (op. cit. n. 60), p. 20 et p. 24-26. 66. En dehors de la Neue Verfassungsgeschichte et de Y Adelsforschung, une troisime particularit caractrise l'hist

    oriographie allemande du XXe s. : il s'agit de la Landes geschichte ( histoire rgionale / locale ). Jusqu' nos jours, celle- ci est institutionellement ancre dans beaucoup d'universits, avec des chaires spcifiques, et ajoute sa pierre aux publications historiques par une plthore de journaux et de collections spcialises. On lui doit notamment toute une littrature sur l'histoire de tel ou tel vque ou vch. Pour une bibliographie rgulire des principales publications, voir le journal Bltter fur deutsche Landesgeschichte.

    67. S. Rietschel, Die civitas auf deutschem Boden bis zur Karolingerzeit. Ein Beitrag zur Geschichte der deutschen Stadt, Leipzig, 1894 ; Id., Das Burggrafenamt und die hohe Gerichtsbarkeit in den deutschen Bischofsstadten wahrend des fruhen Mittelalters, Leipzig, 1905 [rimpr. Aalen, 1965].

    68. Pour une vue d'ensemble sur l'historiographie prcdente, cf. H. Jakobs, Vescovi e citt in Germania , dans I poteri temporali dei Vescovi in Italia e in Germania nel Medioevo, d. C. G. Mor et H. Schmidinger, Bologne, 1979 (Annali dell'Istituto storico italo-germanico, 3), p. 283-328 ; cf. en outre les remarques de F. Merzbacher, Die Bischofsstadt. Entwicklung und Bedeutung eines mediterran-abendlndischen Stadtetyps, Cologne/Opladen, 1961 (Arbeitsgemeinschaft fur Forschung des Landes Nordrhein-Westfalen, Geisteswissenschaften, 93) ; R. Kaiser, Bischofsstadt , Lexikon des Mittelalters, 2, 1983, col. 239-245 ; E. Ennen, Bischof und mittelalterliche Stadt. Die Entwicklung in Oberitalien,

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    piscopale ) dsigne exclusivement, dans son sens strict, les villes dans lesquelles tout pouvoir drive de l'vque 69. L encore, la priode de l'glise impriale ottonienne est considre comme un temps de rupture, car elle vit les vques pourvus de nombreux privilges ; l'autre basculement, quant lui, se situerait au xnr s., lorsque le pouvoir piscopal dans les villes fut nouveau remis en question, cette fois par l'essor de la bourgeoisie70. Ainsi, l'hydre dualiste exerce sa vigueur jusque dans les tudes qui concernent la position de l'vque dans sa ville. Il faut toutefois prciser que depuis les annes 1970, la varit des questions et mthodes employes dans ce domaine s'est considrablement largie : de nombreuses publications mirent ainsi en valeur la distinction typologique entre la ville piscopale et d'autres types de ville71, la continuit urbaine entre l'Antiquit tardive et le haut Moyen ge en Gaule72, et surtout les changements engendrs dans la topographie des villes par l'amnagement des infrastructures ecclsiastiques pendant les premiers sicles mdivaux73. Une tude qui illustre bien la diversit des intrts de l'historiographie actuelle est celle de Frank Hirschmann, portant sur vingt- quatre villes piscopales du Xe et du xr s.74 : l'auteur interprte les quipements ecclsiastiques d'une ville comme un indicateur de la qualit urbaine ; il considre les villes comme lieu de runion des saints ; il met en relief les fonctions administratives, conomiques et sociales des grandes rues et des places urbaines ; il prsente l'approvisionnement en eau comme un des problmes fondamentaux de la planification urbaine ; il se penche sur la construction des murs d'enceinte et d'autres btiments de dfense ; il analyse le rle des vques mais aussi des autres grands, ecclsiastiques et laques, ainsi que de la population urbaine comme matres d'ouvrage, il s'intresse l'organisation des projets de construction, il met en lumire le rle de Rome et de Jrusalem comme modles pour la topographie sacrale de plusieurs villes ; enfin, il dcrit l'image que les contemporains se faisaient eux-mmes de leurs villes piscopales75.

    Frankreich und Deutschland , dans Ead., Gesammelte Abhandlungen zum europischen Stdtewesen und zur rheinischen Geschichte, t. 2, d. D. Hroldt et F. Irsigler, Bonn, 1987, p. 40-52. Sur la France, voir galement l'tude fondamentale de Kaiser, Bischofsherrschaft (op. cit. n. 4), et sur Toul, l'analyse dtaille de G. Bnnen, Die Bischofsstadt Toul und ihr Umland whrend des hohen und spten Mittelalters, Trves, 1995 (Trierer historische Forschungen, 25), p. 45-331.

    69. C'est la dfinition propose par Kaiser, Bischofsstadt (op. cit. n. 68), col. 239. 70. Merzbacher (op. cit. n. 68), p. 27-33 ; E. Rtimeyer, Stadtherr und Stadtburgerschaft in den rheinischen

    Bischofsstdten. Ihr Kampf um die Hoheitsrechte im Hochmittelalter, Ble/Stuttgart, 1928 ; cf. en outre G. Dilcher, Die Bischofsstadt. Zur Kulturbedeutung eines Rechts- und Verfassungstypus , Das Mittelalter, 7, 2002, p. 13-38 ; ainsi que le volume Bischof und Btirger. Herrschaftsbeziehungen in den Kathedralstdten des Hoch- und Sptmittelalters, d. U. Grieme, N. Kruppa et S. Ptzold, Gttingen, 2004 (Verffentlichungen des Max-Planck-Instituts fur Geschichte, 206 = Studien zur Germania Sacra, 26).

    71. Ainsi p. ex. K. Hefele, Studien zum hochmittelalterlichen Stadttypus der Bischofsstadt in Oberdeutschland (Augsburg, Freising, Konstanz, Regensburg), Munich, 1970 ; G. Moncke, Bischofsstadt und Reichsstadt. Ein Beitrag zur mittelalter- lichen Stadtverfassung von Augsburg, Konstanz und Basel, Berlin, 1971 ; H. Flachenecker, Der Bischof und sein Bischofssitz : Wiirzburg Eichsttt Bamberg im Friih- und Hochmittelalter, Rmische Quartalschrift, 91, 1996, p. 148- 181.

    72. Sur Soissons, cf. R. Kaiser, Untersuchungen zur Geschichte der Civitas und Dizese Soissons in rmischer und merowingischer Zeit, Bonn, 1973 (Rheinisches Archiv, 89). Sur Trves : H. H. Anton, Trier im friihen Mittelalter, Paderborn et ai, 1987 (Quellen und Forschungen aus dem Gebiet der Geschichte, Neue Folge, 9).

    73. Cf. Kaiser (op. cit. n. 57) ; N. Leudemann, Deutsche Bischofsstadte im Mittelalter. Zur topographischen Entwicklung der deutschen Bischofsstadt im Heiligen Rmischen Reich, Munich, 1980. Sur Mayence : F. Merzbacher, Bischof und Stadt in der Mainzer Geschichte , Archiv fur mittelrheinische Kirchengeschichte, 14, 1962, p. 31-43, surtout p. 33-38. Sur Cologne : H. Jakobs, Verfassungstopographische Studien zur Klner Stadtgeschichte des 10.-12. Jh. , dans Kln, das Reich und Europa. Abhandlungen iiber weitrdumige Verflechtungen der Stadt Kln in Politik, Recht und Wirtschaft im Mittelalter, d. E. Ennen et H. Stehkmper, Cologne, 1971 (Mitteilungen aus dem Stadtarchiv Kln, 60), p. 49-123 ; E. Ennen, Erzbischof und Stadtgemeinde in Kln bis zur Schlacht von Worringen (1288) , dans Bischofs- und Kathe- dralstdte (op. cit. n. 56), p. 27-46. Sur Toul : Bnnen (op. cit. n. 68), p. 531-555.

    74. F. G. Hirschmann, Stadtplanung, Bauprojekte und Grofibaustellen im 10. und 11. Jahrhundert. Vergleichende Studien zu den Kathedralstdten westlich des Rheins, Stuttgart, 1998 (Monographien zur Geschichte des Mittelalters, 43), avec une vaste bibliographie. Sur Wurzbourg, cf. Id., Wirtziburgensibus. . . naturale est destruere et edificare. Bauprojekte und Stadtplanung in Wiirzburg im hohen Mittelalter , Das Mittelalter, 7, 2002, p. 39-70.

    75. Hirschmann, Stadtplanung (op. cit. n. 74), p. 432-541.

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    partir des annes 1990, un nouveau dbat consista soupeser l'existence d'une relle planification urbaine par les vques durant le haut Moyen ge. D'une part, Erich Herzog76, Werner Noack77, Wolfgang Braunfels78, Helmut Maurer79 et d'autres chercheurs80 supposaient que les vques du haut Moyen ge taient capables de concevoir et d'appliquer des programmes long terme, qui concernaient toute la topographie de leurs villes; d'autre part, Gabriele Mietke81, Georg Weilandt82 et de faon plus catgorique Heinrich Fichtenau83 remettaient cette capacit en doute. Face au scepticisme de ces derniers, Hirschmann a fourni de nouveaux arguments, du moins en ce qui concernait le Xe et le xr s. : il fit remarquer que dans les rgions d'outre-Rhin, o une structure urbaine moins dveloppe permettait encore des interventions de grande ampleur, on observe une politique des patrocinia oriente sur le modle de Rome tel tait surtout le cas Utrecht, Paderborn, Constance et Bamberg. En outre, d'autres interventions planifies sont attestes, par exemple la construction des suburbia, l'approvisionnement en eau, l'implantation des Juifs et l'installation des marchs, ou encore la construction des murs d'enceinte, des ponts et des rues, et la dlimitation des terrains ou des paroisses par le seigneur piscopal de la ville84.

    76. Cf. E. Herzog, Die ottonische Stadt. Die Anfnge der mittelalterlichen Stadtbaukunst in Deutschland, Berlin, 1964 (Frankfurter Forschungen zur Architekturgeschichte, 2), p. 241-251.

    77. Cf. W. Noack, Stadtbaukunst und geistlich-weltliche Reprsentation im 11. Jahrhundert , dans Festschrift Kurt Bauch. Kunstgeschichtliche Beitrge zum 25. November 1957, d. B. Hackelsberger, G. Himmelheber et M. Meier, Munich, 1957, p. 29-49 : l'auteur voulait prouver que jusque dans la premire moiti du XF s., les rues qui taient empruntes pour les processions dans les villes piscopales d'Augsbourg, Spire, Wurzbourg, Trves et Halberstadt taient conues pour des couronnements de ftes. Sur Spire, Wurzbourg et Augsbourg, cf. aussi Id., Kunstgeschichtliche Problme der mittelalterlichen Stadtplanung (an Beispielen aus dem Oberrheingebiet) , Oberrheinische Kunst, 8, 1939, p. 5-18, p. 15-17.

    78. W. Braunfels, Abendlndische Stadtbaukunst. Herrschaftsform und Baugestalt, Cologne, 1976, p. 33 et 35. 79. H. Maurer, Konstanz ah ottonischer Bischofssitz. Zum Selbstverstandnis geistlichen Fiirstentums im X. Jahrhundert,

    Gttingen, 1973 (Verffentlichungen des Max-Planck-Instituts fur Geschichte, 39) ; pour complter le prcdent, cf. Id., Bischof Konrad von Konstanz in seiner ottonischen Umwelt , dans Der heilige Konrad, Bischof von Konstanz. Studien aus Anlafi der tausendsten Wiederkehr seines Todesjahres, d. H. Maurer, W. Mller et H. Ott, Fribourg/Ble/Vienne 1975 (Freiburger Dizesan-Archiv, 95), p. 41-55, ici p. 44-50 ; Id., Kirchengriindung und Romgedanke am Beispiel des ottonischen Bischofssitzes Konstanz , dans Bischofs- und Kathedralstddte {op. cit. n. 56), p. 47-59.

    80. Cf. p. ex. E. Lehmann, Bemerkungen zu den baulichen Anfngen der deutschen Stadt im friihen Mittelalter , dans La citt nell'alto medioevo, 10-16 aprile 1958, Spolte, 1959 (Settimane di studio del Centro Italiano di Studi sull'Alto Medioevo, 6), p. 558-590, ici p. 580-582 ; G. Bandmann, Friih- und hochmittelalterliche Altaranordnung als Darstellung , dans Das erste Jahrtausend. Kultur und Kunst im werdenden Abendland an Rhein und Ruhr, Textband 1, d. V. H. Elbern, Diisseldorf, 1962, p. 371-411, ici p. 383-384; Jakobs {op. cit. n. 68), p. 307-309; E. Ennen, Friihgeschichte der europischen Stadt wie ich sie heute sehe , dans Ead., Gesammelte Abhandlungen zum europischen Stdtewesen und zur rheinischen Geschichte, t. 1, d. G. Droege et ai, Bonn, 1977, p. 267. On aura garde de ne pas oublier : W. Giese, Zur Bauttigkeit von Bischfen und bten des 10. bis 12. Jahrhunderts , Deutsches Archiv fur Erforschung des Mittel- alters, 38, 1982, p. 388-438, ici p. 396-397 et 408 ; G. Binding, Stdtebau und Heilsordnung. Kunstlerische Gestaltung der Stadt Kln in ottonischer Zeit, Diisseldorf, 1986 (Studia humaniora. Sries minor, 1), p. 27-36 et 70 ; A. Haverkamp, 'Heilige Stdte' im hohen Mittelalter , dans Mentalitten im Mittelalter. Methodische und inhaltliche Problme, d. F. Graus, Sigmaringen, 1987 (Vortrage und Forschungen, 35), p. 119-156, ici p. 131-133 et 139 ; F. Kohlschein, Der mittelalterliche Liber Ordinarius in seiner Bedeutung fur Liturgie und Kirchenbau , dans Heiliger Raum. Architektur, Kunst und Liturgie in mittelalterlichen Kathedralen und Stiftskirchen, d. F. Kohlschein et P. Wnsche, Munster, 1998 (Liturgiewissenschaftliche Quellen und Forschungen, 82), p. 1-24, ici p. 13-14 ; et S. Haarlnder, Vitae episcoporum. Eine Quellengattung zwischen Hagiographie und Historiographie, untersucht an Lebensbeschreibungen von Bischfen des Regnum Teutonicum im Zeitalter der Ottonen und Salier, Stuttgart, 2000 (Monographien zur Geschichte des Mittelalters, 47), p. 214. Plus hsitant : A. Odenthal et G. Stracke, Die Stationsliturgie Klns und ihre topographischen Beziige zu Rom, dans Heiliger Raum, op. cit., p. 134-162, ici p. 142-146; Flachenecker {op. cit. n. 71), p. 149 et p. 165-168 (sur Wurzbourg, Eichstatt et Bamberg).

    81. G. Mietke, Die Bauttigkeit Bischof Meinwerks von Paderborn und die friihchristliche und byzantinische Architektur, Paderborn et al, 1991 (Paderborner theologische Studien, 21), p. 220.

    82. G. Weilandt, Geistliche und Kunst. Ein Beitrag zur Kultur der ottonisch-salischen Reichskirche und zur Vern- derung knstlerischer Traditionen im spten 11. Jahrhundert, Cologne/Weimar/Vienne, 1992 (Beihefte zum Archiv fur Kultur- geschichte, 35), surtout p. 58-59.

    83. H. Fichtenau, 'Stadtplanung' im friihen Mittelalter , dans Ethnogenese und Uberlieferung. Angewandte Methoden der Fruhmittelalterforschung, d. K. Brunner et B. Merta, Vienne/Munich, 1994 (Verffentlichungen des Instituts fur sterreichische Geschichtsforschung, 31), p. 232-249.

    84. Hirschmann, Stadtplanung {op. cit. n. 74), p. 528. Sur Le Mans au ixe s., cf. aussi S. Patzold, Die Bischofs- stadt als Gedchtnisraum. Uberlegungen zur bischflichen Stadtplanung in der Karolingerzeit am Beispiel von Le Mans , Das Mittelalter, 7, 2002, p. 105-123.

  • L'PISCOPAT DU HAUT MOYEN GE 355

    Ceux qui tudient les rapports entre les vques mdivaux et la sphre juridique sont ncessairement amens se tourner vers le droit canon. Les publications consacres ce sujet ont pu s'appuyer sur le travail d'dition produit par les Monumenta Germaniae Historica : en effet, si l'on souhaite analyser les vques en tant que juges et experts du droit, on en reviendra invitablement aux actes synodaux et en ce qui concerne le IXe et le Xe s. aux statuts diocsains, ceux qui sont qualifis de capitula episcoporum. En publiant ces textes dans le cadre des MGH (et par leurs recherches qui y sont lies), Wilfried Hartmann85, Ernst-Dieter Hehl86, Peter Brommer87, Rudolf Pokorny88, Martina Stratmann89 et Rudolf Schieffer90 ont pos, partir des annes 1970, des fondations solides. Les actes synodaux91 et les statuts diocsains tmoignent la fois des pratiques d'une lite ecclsiastique, et de l'image que cette lite se faisait d'elle-mme. L'dition critique fournit galement un clairage sur d'autres problmes, lis l'histoire culturelle de l'piscopat mdival : on comprend mieux les modalits par lesquelles les vques parvenaient un consensus avant de prendre une dcision ; on saisit plus prcisment les rapports entre l'vque et les prtres de son diocse, l' auto-perception des prlats, ou encore les conditions de

    85. MGH Concilia III, d. W. Hartmann, Hanovre, 1984 ; - MGH Concilia IV, d. Id., Hanovre, 1998 ; en outre Id., Das Konzil von Worms 868. Uberlieferung und Bedeutung, Gttingen, 1977 (Abhandlungen der Akademie der Wissen- schaften in Gttingen. Folge 3 : Philologisch-historische Klasse, 105) ; Id., Neue Texte zur bischflichen Reformge- setzgebung aus den Jahren 829/31. Vier Dizesansynoden Halitgars von Cambrai , Deutsches Archiv fur Erforschung des Mittelalters, 35, 1979, p. 368-394 ; - Id., Der Bischof als Richter. Zum geistlichen Gericht tiber kriminelle Vergehen von Laien im fruheren Mittelalter (6.-11. Jahrhundert) , Rmische Historische Mitteilungen, 28, 1986, p. 103-124 ; Id., Die Synoden der Karolingerzeit im Frankenreich und in Italien, Paderborn/Munich/Vienne/Zurich, 1989 (Konziliengeschichte Reihe A : Darstellungen) ; Id., Problme des geistlichen Gerichts im 10. und 11. Jahrhundert : Bischfe und Synoden als Richter im ostfrnkisch-deutschen Reich , dans La giustizia nell'alto medioevo (secoli IX-XI), 11-17 aprile 1996, Spolte, 1997, t. 2 (Settimane di studio del Centro Italiano die Studi sull'Alto Medioevo, 44), p. 631-672.

    86. MGH Concilia VI,1, d. E.-D. Hehl, Hanovre, 1987 ; cf. aussi ses tudes cites supra, n. 36 et 52. 87. MGH Capitula episcoporum I, d. P Brommer, Hanovre, 1984 ; cf. en outre Id., Die bischfliche Gesetzgebung

    Theodulfs von Orlans , Zeitschrift der Savigny-Stiftung fur Rechtsgeschichte, Kanonistische Abteilung, 60, 1974, p. 1-120 ; Id., Die Rezeption der bischflichen Kapitularien Theodulfs von Orlans , ibid., 61, 1975, p. 113-160 ; - Id., Benedictus Levita und die 'Capitula episcoporum' , Mainzer Zeitschrift , 70, 1975, p. 145-147 ; - Id., Die Kanonessammlung Ruotgers von Trier. Quellenuntersuchung und Analyse der Arbeitsweise , Archiv fur mittelrheinische Kirchengeschichte, 27, 1975, p. 35-48 ; Id., Die Quellen der 'Capitula' Radulfs von Bourges , Francia, 5, 1977, p. 27-43 ; Id., Eine unbekannte Dizesansynode. Zur Rezeption Theodulfs von Orlans , Archiv fiir katholisches Kirchenrecht, 149, 1980, p. 467-487 ; Id., Capitula episcoporum. Bemerkungen zu den bischflichen Kapitularien , Zeitschrift fur Kirchengeschichte, 91, 1981, p. 207- 236 ; Id., Capitula episcoporum . Die bischflichen Kapitularien des 9. und 10. Jahrhunderts, Turnhout, 1985 (Typologie des Sources, 43).

    88. MGH Capitula episcoporum, d. R. Pokorny, Hanovre, 1995 ; en outre Id., Ein unbekannter Synodalsermo Arns von Salzburg , Deutsches Archiv fiir Erforschung des Mittelalters, 39, 1983, p. 379-394 ; Id., Eine Kurzform der Konzils- kanones von Trosly (909). Zur Reformgesetzgebung der ausgehenden Karolingerzeit, ibid., 42, 1986, p. 118-144; Id., Die drei Versionen der Triburer Synodalakten von 895. Eine Neubewertung , ibid., 48, 1992, p. 429-511 ; Id., Neue Texte zur kirchlichen Gesetzgebung der Jahre um 900 aus der Reimser Kirchenprovinz , ibid., 52, 1996, p. 487-508.

    89. MGH Capitula Episcoporum II, d. R. Pokorny et M. Stratmann, Hanovre, 1995 ; cf. aussi M. Stratmann, Hinkmar von Reims als Verwalter von Bistum und Kirchenprovinz, Sigmaringen, 1991 (Quellen und Forschungen zum Recht im Mittelalter, 6) ; Ead., De ministris Remensis ecclesiae. Eine Schrift Ebos von Reims zur Dizesanver- waltung , dans Aus Archiven und Bibliotheken. Festschrift fur Raymund Kottje zum 65. Geburtstag, d. H. Mordek, Francfort-sur-le-Main et al, 1992 (Freiburger Beitrge zur mittelalterlichen Geschichte, 3), p. 121-135; Ead., Die Knigs- und Privaturkunden fiir die Reimser Kirche bis gegen 900 , Deutsches Archiv fur Erforschung des Mittelalters, 52, 1996, p. 1-56 ; Ead., Schriftlichkeit in der Verwaltung von Bistiimern und Klstern zur Zeit Karls des GroBen , dans Karl der Grofie und sein Nachwirken. 1200 Jahre Kultur und Wissenschaft in Europa. I : Wissen und Weltbild, d. P. Butzer, M. Kerner, W. Oberschelp, Turnhout, 1997, p. 251-275.

    90. MGH Concilia IV, Suppl. 2 : Die Streitschriften Hinkmar s von Reims und Hinkmar s von Laon, 869-871, d. R. Schieffer, Hanovre, 2003 ; Hincmar de Reims, De ordine palatii, d. Id. et T. Gross, MGH Fontes iuris Germanici antiqui, Hanovre, 1980 ; cf. aussi sa thse : Id., Die Entstehung von Domkapiteln in Deutschland, Bonn, 1976 (Bonner historische Forschungen, 43) ; et sa thse d'habilitation : Id., Die Entstehung des papstlichen Investiturverbots fiir den deutschen Knig, Stuttgart, 1981 (Schriften der Monumenta Germaniae Historica, 28) ; en outre, les articles cits supra n. 21 et 37.

    91. Cf. aussi les volumes de la srie Konziliengeschichte, Reihe A : H. Vollrath, Die Synoden Englands bis 1066, Paderborn, 1985 ; H. Wolter, Die Synoden im Reichsgebiet und in Reichsitalien von 916 bis 1056, Paderborn, 1988 ; Hartmann, Synoden (op. cit. n. 85) ; G. Gresser, Die Synoden und Konzilien der Zeit des Reformpapsttums in Deutschland und Italien von Lo IX. bis Calixt IL (1049-1123), Paderborn, 2004 ; en outre : H. J. Sieben, Die Konzilsidee des lateinischen Mittelalters (847-1378), Paderborn, 1984 (Konziliengeschichte, Reihe B, Untersuchungen).

  • 356 CAHIERS DE CIVILISATION MDIVALE, 48, 2005 STEFFEN PATZOLD

    transmission d'ordres ou d'informations, que ce soit au sein d'un mme vch ou par-del les frontires diocsaines. Il est d'autant plus regrettable que les actes synodaux de la fin du IXe s., et de la seconde moiti du xe s., n'aient pas encore fait l'objet d'une dition moderne. Les grands faux juridiques raliss par des vques au ixe s. ont t analyss dans plusieurs publications allemandes du xxe s., mais leur tude est toujours en cours92. Rcemment, on a examin de manire critique le Decretum de l'vque Burchard de Worms, en sondant ses sources et sa diffusion93. En revanche, la recherche sur les collections de droit canon et sur les capitulaires qui furent rassembls par tel ou tel vque est encore embryonnaire ; signalons tout de mme la Bibliotheca Capitularium d'Hubert Mordek, qui facilitera sans doute les recherches futures94. En-dehors des villes piscopales et des rapports entre l'piscopat et la sphre juridique, ce sont les Vitae episcoporum et les Gesta episcoporum, autrement dit l'hagiographie et l'historiographie piscopales, qui ont t le plus intensment tudies par les mdivistes allemands. Si les Vitae des saints vques crites au ixe s. restent majoritairement ddaignes par les historiens95, les biographies mrovingiennes des prlats96, ainsi que les Vitae des vques impriaux du Xe jusqu'au xir s., connaissent au contraire une traditionnelle fortune historiographique. En particulier, l'image de l'vque et l'idal de saintet piscopale ont intress tout particulirement les mdivistes allemands97. C'est ainsi que rcemment, Stefanie Haarlnder a publi une synthse qui s'tendait de la priode ottonienne jusqu' celle des Staufen98 : elle analysait les prfaces des cinquante-cinq Vitae conserves et prsentait les intentions respectives des auteurs. Simultanment, elle rassemblait toutes les informations que fournissaient les Vitae propos de thmes divers, tels que les rapports entre l'vque, les moines et le clerg d'un diocse, le rle de l'vque comme matre d'ouvrage, les vertus du saint, son origine sociale et son parcours, son lection et finalement ses relations avec le roi, l'aristocratie laque, les autres vques et le pape. Comme rsultat, l'auteur constatait que les Vitae constituaient un ensemble beaucoup moins homogne et uniforme qu'on ne le pensait jusque-l ; cette conclusion s'explique notamment par le fait que chaque Vita avait sa propre causa scribendi. De la mme faon, Stphanie Cou a

    92. Cf. dsormais le volume Fortschritt durch Flschungen ? Ursprung, Gestalt und Wirkungen der pseudoisidorischen Flschungen. Beitrge zum gleichnamigen Symposium an der Universitt Tubingen vom 27. und 28. Juli 2001, d. W. Hartmann et G. Schmitz, Hanovre, 2002 (MGH. Studien und Texte, 31), qui faisait l'inventaire des principales tudes antrieures. Les Studien zu Benedictus Levita , tudes essentielles d'Emil Seckel, peuvent tre facilement consultes sur http:// www.uni-tuebingen.de/mittelalter/forsch/benedictus/ (4.11.2005).

    93. Cf. les articles du volume Bischof Burchard von Worms 1000-1025, d. W. Hartmann, Mayence, 2000 ; on lira galement J. B. Will, Die Rechtsverhaltnisse zwischen Bischof und Klerus im Dekret des Bischofs Burchard von Worms. Eine kanonistische Untersuchung, Wurzbourg, 1992 (Forschungen zur Kirchenrechtswissenschaft, 12) ; ainsi que l'tude critique de H. Hoffmann / R. Pokorny, Das Dekret des Bischofs Burchard von Worms. Textstufen frtihe Verbreitung - Vorlagen, Munich, 1991 (MGH. Hilfsmittel, 12).

    94. H. Mordek, Bibliotheca capitularium regum Francorum manuscripta. berlieferung und Traditions zusammenhang der frnkischen Herrscherer lasse, Munich, 1995 (MGH. Hilfsmittel, 15).

    95. Il y a naturellement des exceptions, parmi lesquelles il faut compter les Vitae des vques Ansgar de Hambourg- Brme et de Liudger de Munster. Cf. p. ex. H. Lutterbach, 'Pastor noster Anskarius'. Das Hirten-Ideal des hl. Ansgar im Kontext der Entwicklungsgeschichte christlicher Frmmigkeit , Archiv fur Kulturgeschichte, 77, 1995, p. 279-300 ; Id., Keine Siihne ohne Blut ? Das Martyrium des hl. Ansgar , Studien und Mitteilungen zur Geschichte des Benediktiner- Ordens und seiner Zweige, 106, 1995, p. 79-99 ; P. Engelbert, Mnchtum, Mission, Martyria. Anmerkungen zum Leben des hl. Ansgar , ibid., 113, 2002, p. 81-104 ; E. Kaus, Zu den Liudger- Viten des 9. Jahrhunderts , Westflische Zeitschrift, 142, 1992, p. 9-55. Sur Liudger, cf. surtout le volume Die Vita Sancti Liudgeri. Vollstndige Faksimile-Ausgabe der Handschrift Ms. theol lat. fol. 323 der Staatsbi