L'Entreprise n° 7, 1er juillet 1953, p....

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Né le 13 juin 1907 à Pouilly-sur-Serre (Aisne), 1 m. 73 , 85 kilos, yeux bleus, visage coloré et souriant. Citroën 11 CV noire. Décoration : néant (a refusé trois fois la Légion d'honneur), Ascen- dance : terrienne mitigée. Pupille de la Nation après I a mort de son père à Verdun. Quitte la ferme familiale (150 habitants) de Pouilly-sur-Serre pour entrer à l'Ecole des Arts et Métiers de Lille. En sort troisième sur cent, en 1927, avec une médaille d'argent. Capitaine d'artillerie de réserve. Marié à Suzanne Vinchon. L'histoire de la famille Vinchon, originaire de l'Aisne, a fait l'objet d'un, livre. Trois enfants : André, vingt et un ans, s'est marié en juin avec une filleule de son père, Odette Philips (fille d'un ingénieur à l'E. D. F.) ; Henri, dix-huit ans ; Anne, dix-sept ans. « Mes garçons se destinent à la terre et ma fille au mariage. » René Blondelle est à son bureau de Paris, 11, rue Scribe, les mardi, mercredi et jeudi. Le reste du temps à Barenton-Bugny (Aisne). Ferme de 250 hectares (betteraves, blé, colza, maïs). A trois passions : le syndicalisme, les chevaux et sa fille (qui lui ressemble beaucoup). Sports : chasse, « comme tout bon paysan » et cheval. Ecurie : Vengeur C, Devise (jument) et Emir qui participent aux concours hippiques montés par ses fils. Faitla navette Paris-Barenton en train exclusivement, pour pouvoir travailler. Ne reçoit personne le samedi et le dimanche pendant les concours hippiques. Chiens trouvés : Val, griffon cortal, et Whisky, cocker. Distractions : l'hiver, manille coinchée, en famille ou avec Ies amis du pays. Pas de vacances depuis 1939. Lectures : Del ly et Max du Veuzit (très reposants). A beaucoup aimé « Ma Cousine Yvette », « Rien qu'une nuit » et « John, chauffeur russe ». Journaux : quatre-vingt-dix départementaux. Lit souvent « Combat ». Abonné au « Figaro »; n'aime pas les éditoriaux de Mauriac. Ses amis : ceux qui ne lui rappellent pas ses activités quotidiennes. Sa maxime favorite : « La première habileté, dans I a vie, c'est I a I oyauté ». Cette histoire l'a fait sourire : passant un jour en Champagne pouilleuse avec ses enfants, son fils aîné (qui avait alors dix ans), s'est écrié : « Papa, pourquoi a-t-on laissé ces petits tas de blé dans les champs ? » Ces petits tas de blé, c'était toute la récolte. BLONDELLE René, Henri, président de l'Assemblée per- manente des présidents des Chambres d'agriculture, prési- dent de la Fédération Nationale des Syndicats d'exploitants agricoles (900.000 syndiqués), vice-président de la C. G. A. UN JANUS TERRIEN René Blondelle a renouvelé le mythe du roi Janus. A Paris, cravaté de noir et rasé de près, il évolue aumilieu d'une nuée de téléphones et de secrétaires, dans les bureaux spacieux et vernis. Il dicte, il reçoit, il préside pendant trois jours. Le quatrième jour, iI regagne discrètement sa propriété, retrouve sa femme, ses amis et ses chiens, chausse de grosses bottes et hume la bonne odeur de Ia terre. Il a dressé dans sa vie des « cloi- sons étanches », qui lui permettent de garder un équilibre souriant. Sa ligne de conduite est double (elle aussi) et fort simple : amour des réalités, méfiance des doctrines. L'Entreprise n° 7, 1er juillet 1953, p. 33

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  • Né le 13 ju in 1907 à Pou i l l y -sur -Ser re (A isne ) , 1 m. 73 , 85 k i los , yeux b leus , visage co loré et sour ian t . C i t roën 11 CV noire. Décorat ion : néant (a refusé t ro i s fo is l a Légion d ' h o n n e u r ) , A s c e n -dance : terr ienne mit igée. Pup i l le de la Nat ion après I a mor t de son père à Ve rdun . Qui t te l a ferme fami l ia le (150 habi tants) de Poui l ly-sur-Serre pour entrer à l 'Eco le des A r t s et Métiers de L i l l e . En sor t t ro is ième sur cent , en 1927, avec une méda i l l e d ' a rgen t . Capi ta ine d ' a r t i l l e r i e de réserve.

    Mar ié à Suzanne V inchon . L 'h isto i re de l a f am i l l e V inchon , or ig inai re de l ' A i s n e , a fa i t l ' ob je t d ' u n , l i v re . T ro is enfants : And ré , vingt et un ans , s 'es t marié en ju in avec une f i l leu le de son père, Odette Ph i l ips ( f i l l e d ' un ingénieur à l 'E . D. F.) ; Henr i , d ix-hu i t ans ; A n n e , d ix-sept ans . « Mes garçons se dest inent à l a ter re et ma f i l l e au mar iage. »

    René B londe l l e est à son bureau de Par is , 11, rue Scr ibe , les mard i , mercredi et j eud i . Le reste du temps à Barenton-Bugny (A isne ) . Ferme de 250 hectares (betteraves, b lé , co l za , maïs) . A t ro is passions : le synd ica l isme, les chevaux et sa f i l l e (qui lu i ressemble beaucoup). Spor ts : chasse, « comme tou t bon paysan » et cheva l . Ecurie : Vengeur C, Devise ( jument) et Emir qui par t ic ipent aux concours hippiques montés par ses f i l s . F a i t l a navette Par is-Barenton en t ra in exclus ivement, pour pouvoir t rava i l l e r . Ne reçoi t personne le samedi et le d imanche pendant les concours h ipp iques. Chiens t rouvés : V a l , gr i f fon c o r t a l , et Wh isky , cocker. Dis t ract ions : l 'h iver , man i l l e coinchée, en fam i l l e ou avec Ies amis du pays. Pas de vacances depuis 1939.

    Lec tu res : Del ly et Max du Veuzit ( très reposants) . A beaucoup aimé « Ma Cousine Yvet te », « Rien qu 'une nui t » et « John , chauffeur russe ».

    J o u r n a u x : quatre-v ingt-d ix dépar tementaux. Lit souvent « Combat ». Abonné au « Figaro » ; n 'a ime pas les édi tor iaux de Maur iac .

    Ses a m i s : ceux qui ne lu i rappe l len t pas ses act iv i tés quot id iennes. S a m a x i m e f a v o r i t e : « La première habi le té , dans I a vie, c 'es t I a I oyauté ». Ce t te h i s to i re l 'a f a i t sour i re : passant un jour en Champagne pou i l l euse avec ses

    enfants , son f i l s aîné (qui avait a lo rs dix ans) , s 'es t écrié : « Papa, pourquoi a-t-on laissé ces pet i ts tas de blé dans les champs ? » Ces peti ts tas de b lé , c 'é ta i t toute la réco l te .

    B L O N D E L L E R e n é , H e n r i , président de l ' A s s e m b l é e per-manente des présidents des Chambres d ' ag r i cu l t u re , prés i -dent de l a Fédération Nat iona le des Syndicats d 'exp lo i tan ts agr ico les (900.000 synd iqués) , v ice-président de l a C. G. A .

    UN J A N U S TERRIEN

    René B londe l le a renouvelé le mythe du roi Janus . A Par is, cravaté de noir et rasé de près, i l évolue aum i l i eu d 'une nuée de té léphones et de secrétaires, dans les bureaux spacieux et vern is . Il d ic te, i l reçoi t , i l préside pendant t ro is j ou rs . Le quatr ième jour , i I regagne d iscrètement sa propr iété, retrouve sa femme, ses amis et ses ch iens, chausse de grosses bot tes et hume la bonne odeur de Ia ter re. I l a dressé dans sa vie des « c l o i -sons étanches », qui lui permettent de garder un équi l ibre sour iant . Sa ligne de condu i te est doub le (e l le aussi) et fort s imp le : amour des réa l i tés , méfiance des doc t r i nes .

    L'Entreprise n° 7, 1er juillet 1953, p. 33