L'Enseignement de l'histoire qu début du XXIe siècle au Québec…Préface La Société des...

22
Septentrion L’Enseignement de l’histoire au début du xxi e siècle au Québec Sous la direction de Félix Bouvier et Michel Sarra-Bournet Extrait de la publication

Transcript of L'Enseignement de l'histoire qu début du XXIe siècle au Québec…Préface La Société des...

  • S e p t e n t r i o n

    L’Enseignement

    de l’histoire au début du xxie siècle

    au Québec

    Sous la direction de

    Félix Bouvier et Michel Sarra-Bournet

    Extrait de la publication

  • Extrait de la publication

  • L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    Extrait de la publication

  • Extrait de la publication

  • S e p t e n t r i o n

    L’Enseignement

    de l’histoire au début du xxie siècle

    au Québec

    Sous la direction de

    Félix Bouvier et Michel Sarra-Bournet

  • Illustration de la couverture : À l’ombre de l’édifice Marie-Guyart, siège du ministère de l’Éduca-tion, du Loisir et du Sport, le projet Fresque des capitales BMO, financé à parts égales par BMO Groupe financier et la Commission de la capitale nationale à l’occasion du 400e anniversaire de la ville de Québec, devait à l’origine rendre hommage aux capitales canadiennes. Qui doit veiller à transmettre l’histoire ? L’État ou les organismes privés ?Conception et réalisation de la Fresque BMO de la capitale nationale : Murale Création (www.muralecreation.com). Production de la Commission de la capitale nationale du Québec en partenariat avec BMO Groupe financier.Révision : Solange Deschênes Correction d’épreuves : Sophie Imbeault Mise en pages et maquette de la couverture : Pierre-Louis Cauchon

    Si vous désirez être tenu au courant des publicationsdes ÉDITIONS DU SEPTENTRION

    vous pouvez nous écrire au1300, av. Maguire, Québec (Québec) G1T 1Z3

    ou par télécopieur 418 527-4978ou consulter notre catalogue sur Internet :

    www.septentrion.qc.ca

    © Les éditions du Septentrion Diffusion au Canada :1300, av. Maguire Diffusion DimediaQuébec (Québec) 539, boul. LebeauG1T 1Z3 Saint-Laurent (Québec) H4N 1S2

    Dépôt légal : Ventes en Europe :Bibliothèque et Archives Distribution du Nouveau Mondenationales du Québec, 2008 30, rue Gay-LussacISBN 978-2-89448-561-3 75005 Paris

    Les éditions du Septentrion remercient le Conseil des Arts du Canada et la Société de dévelop-pement des entreprises culturelles du Québec (SODEC) pour le soutien accordé à leur programme d’édition, ainsi que le gouvernement du Québec pour son Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres. Nous reconnaissons éga lement l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Pro gramme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.

    Extrait de la publication

  • Préface

    La Société des professeurs d’histoire du Québec

    L a Société des professeurs d’histoire du Québec (SPHQ) a été fondée à Québec, le 20 octobre 1962, à l’initiative du professeur Pierre Savard, secrétaire de l’Institut d’histoire de l’Université Laval, avec la complicité du professeur Marcel Trudel, de la même institution, et de l’abbé Georges-Étienne Proulx. Une quarantaine de participantes et de participants, dont Jean-Vianney Simard, la plupart diplômés de l’Institut d’histoire, constituaient alors une société qui avait pour buts de tenir les membres au fait du mouvement de la science historique et d’aider à l’amélioration des techniques de l’enseignement. Par ce groupement, Pierre Savard voulait introduire l’expérience de rencontres entre collè-gues pour échanger sur les instruments pédagogiques et la production historique que lui et son collègue Roland Sanfaçon, aussi de l’Institut d’histoire, avaient connus lors de leurs études en France, à l’Université de Lyon II et à l’Université de Poitiers, respectivement.

    La SPHQ se donne alors une constitution qui prévoit une assemblée annuelle et l’élection bisannuelle d’un bureau de direction. Limitée au début surtout à la région de Québec, elle s’étend à Trois-Rivières en 1964 et à Montréal en 1966, augmentant le nombre ses membres à 400 personnes. Dès 1962, elle publie le Bulletin de liaison de la Société des professeurs d’histoire, dans lequel paraissent des expériences pédago-giques, des rapports d’assemblées générales, des articles sur l’histoire ainsi que des comptes rendus. Devant son expansion rapide, la Société se dote, en 1966, de nouveaux statuts et règlements et ajoute Québec à son nom. En 1967, elle comptait 600 membres.

    En octobre 2007 s’est tenu à Laval le 45e congrès annuel de la SPHQ. Soixante-quatre ateliers axés sur l’histoire et son enseignement ont été offerts aux enseignantes et aux enseignants du primaire et du secondaire, faisant du 45e congrès un des plus grands rassemblements de l’année en

    Extrait de la publication

  • 8 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    enseignement de l’histoire au Québec, sinon le plus grand. Le livre que vous avez entre les mains en est un grand bénéfice. Pour la première fois, à ma connaissance, une association regroupant des enseignantes et des enseignants d’histoire principalement du secondaire publie un livre. Pourquoi ? Parce que la SPHQ a pour mission de promouvoir l’enseignement de l’histoire au Québec, sous tous ses aspects, auprès de ses membres et de la population en général, et de contribuer à assurer l’information et le développement professionnel de ses membres. Ce livre s’y inscrit donc en droite ligne, tout comme la tenue du congrès annuel et la publication de sa revue Traces. Là est aussi la raison pour laquelle la SPHQ s’est jointe, en 2006, à la levée de boucliers au sujet du nouveau programme d’histoire et éducation à la citoyenneté du 2e cycle du secondaire. Lors de son assemblée générale de 2007, une résolution unanime y a été votée, après les deux séries de retouches (cosmétiques ?) apportées au programme en 2006 par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, demandant que la question de la place du Québec dans le Canada et les différents points de vue sur la question nationale soient rendus beaucoup plus visibles dans ce même programme d’étu-des.

    Sous la direction de Félix Bouvier et Michel Sarra-Bournet, ce livre est l’aboutissement du travail de plusieurs personnes. D’abord, tous les ani-mateurs qui se sont rendus au 45e congrès, tous ceux qui ont produit les textes que vous lirez ici et le comité organisateur du 45e congrès, formé de Xavier Beaudry-Maisonneuve, étudiant à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Céline Benoit, de la Commission scolaire de Laval, Félix Bouvier, didacticien et historien, UQTR, Robert Comeau, historien et professeur associé, UQAM, Pascal Debien, enseignant à la Commission scolaire de Laval, Josiane Lavallée, historienne, Jean-Claude Richard, rédacteur de Traces, Claude Tousignant, enseignant à la Commission scolaire de Laval, et Madeleine Vallières, enseignante à la Commission scolaire des Hauts-Bois de l’Outaouais.

    Laissons la plume aux auteurs et bonne lecture.

    Laurent Lamontagne

    Président de la Société des professeurs d’histoire du Québec

    Mai 2008

  • Introduction

    L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    Félix Bouvier

    D epuis 2006, il y a au Québec un débat1 sur l’enseignement de l’histoire qui a pour l’essentiel, et jusqu’à récemment, été circonscrit au programme et à l’enseignement de l’histoire « nationale » en troisième et quatrième secondaire. À l’occasion du congrès de la Société des professeurs d’histoire du Québec de l’automne 2007, Christian Rioux en élargit la perspective en affirmant que l’association de l’éducation civique et de l’histoire – entrée en vigueur en 2000 avec la réforme pédagogique québécoise et étendue depuis 2005 à l’enseignement se-condaire – véhicule de façon implicite, mais claire, une conception de l’histoire rigoureusement axée vers le présent2. S’attardant aux manuels scolaires et au programme d’enseignement de première et de deuxième secondaire, Rioux est d’avis que l’histoire n’est plus étudiée pour ce qu’elle est, mais qu’elle est devenue un outil d’interprétation, une sorte de propagande éditoriale à la gloire de la société contemporaine. Il en veut pour preuve le manuel scolaire D’hier à demain « d’ailleurs super-visé par l’un des principaux concepteurs des programmes, le didacticien Christian Laville »(p. 25), qui a mis de l’avant un chapitre d’un genre nouveau en enseignement de l’histoire : « Pour les suites de l’histoire : une réalité du présent »3. Pour Rioux, le Québec, en incorporant le présent et l’avenir immédiat à l’histoire, opère en quelque sorte une

    1. Voir à ce sujet Félix Bouvier (dir.), « Débat sur l’enseignement de l’histoire au Québec », Bulletin d’histoire politique, vol. 15, no 2, hiver 2007, p. 7-106.

    2. Depuis, Christian Rioux et Magali Favre ont repris ces idées dans l’article « Les manuels de l’insignifiance », L’Actualité, 1er avril 2008, p. 50-52.

    3. Christian Laville, D’hier à demain, vol. 2, Graficor-Chenelière éducation, Montréal, 2006, p. 252-265.

  • 10 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    révolution en ce qu’il propose une approche qui fait table rase du passé. Ce faisant, Rioux va bien loin dans son interprétation des programmes d’enseignement d’histoire et éducation à la citoyenneté au Québec, qui sont tout de même essentiellement basés, au premier cycle du secon-daire dans ce cas-ci, sur les grandes époques – occidentales, le plus souvent – qui ont une filiation historique signifiante pour le Québec contemporain. Pour lui, les programmes ne proposent pas de former des adolescents cultivés, aptes à se situer dans le temps. Il soumet l’hypothèse que l’on craint peut-être que les élèves découvrent qu’ils ne vivent pas nécessairement dans la société la plus évoluée de l’histoire de l’humanité à tous les points de vue, cet âge d’or « où triomphent les droits de l’homme, le multiculturalisme et la démocratie »(p. 28). Pour Christian Rioux, les objectifs didactiques et ministériels derrière le re-nouveau pédagogique en enseignement de l’histoire seraient plutôt de « former des citoyens compétents pour ne pas dire capables, efficaces et performants »(p. 27). Il faut avouer qu’il y a là matière à réflexion… Son argumentation nous y pousse.

    Vient ensuite un texte fort intéressant et instructif d’Alexandre Lanoix s’intitulant « L’enseignement de l’histoire et la formation des identités nationales au Québec ». L’auteur nous précise que ses recher-ches récentes4 lui ont permis d’étudier les façons de procéder d’organis-mes s’occupant de l’enseignement de l’histoire canadienne, tout en se mettant clairement au service d’objectifs politiques. Il retrace, depuis 1867 jusqu’à nos jours, six tentatives de mettre en place, d’un océan à l’autre, un récit unique dans l’enseignement de l’histoire du Canada afin de structurer ou de restructurer l’unité canadienne, à des moments où elle était jugée menacée, habituellement par une crise politique. C’est généralement et historiquement par la confection d’un manuel scolaire unificateur et utilisé dans toutes les provinces que l’on a procédé pour atteindre les buts visés. Par exemple, en 1968, les historiens Marcel Trudel, Paul Cornell, Jean Hamelin et Fernand Ouellet (de l’école his-torique bonne ententiste de l’Université Laval pour Trudel, Hamelin et Ouellet) publient le manuel scolaire Canada, unité et diversité5 dans le but d’opérer un rapprochement culturel avec l’autre au Canada. Cela se passe au moment où la commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (Laurendeau-Dunton) vient d’identifier une crise

    4. Alexandre Lanoix, L’enseignement de l’histoire au service de l’unité canadienne : 1867-2007, Lux, Montréal, 2007, 140 p.

    5. Paul Cornell, Jean Hamelin\, Fernand Ouellet et Marcel Trudel, Canada, unité et diversité, Rinehart and Winston of Canada, Toronto, 1968, 140 p.

    Extrait de la publication

  • Introduction 11

    politique grave au Canada, en provenance du Québec, pouvant mener à l’indépendance du Québec6.

    Au cours des années qui suivent le référendum serré de 1995, la fondation CRB, mieux connue sous le nom de sa filiale Historica, produit, entre autres et avec d’énormes moyens financiers, les Minutes du patrimoine, puis Le Canada, une histoire populaire. Comme nous le dit Lanoix, ces deux véhicules étaient mus « par la même convic-tion ; les Canadiens pouvaient être réconciliés par l’enseignement de l’histoire »(p. 40). La principale méthode utilisée consiste à éviter « les zones de conflit pour se concentrer sur les grandes réalisations, les grands personnages et l’histoire du gouvernement central »(p. 41). L’étude menée par Lanoix l’amène à observer qu’entre 1867 et 2007 ces tentatives d’unifier le Canada par le relais de l’enseignement de l’histoire « ont fait un usage quasi exclusif du récit, de l’histoire ra-contée, comme vecteur de l’histoire canadienne »(p. 41). Comme les didacticiens le savent bien et comme Lanoix le note aussi, une histoire beaucoup trop basée sur le récit ne favorise pas « une compréhension poussée de phénomènes et de concepts historiques complexes »(p. 42). L’utilisation exagérée de ce récit et de l’émotion qu’il suscite vise donc essentiellement à « développer un sentiment d’appartenance à la nation et à l’histoire canadienne »(p. 42). Et comme le dit encore avec justesse Alexandre Lanoix, le fait d’enseigner « l’histoire en visant d’abord et avant tout la formation d’un sentiment nationaliste apparaît comme un recul définitif pour l’esprit critique qui devrait caractériser l’étude de l’histoire, en témoignent les manuels d’histoire pancanadiens discutés ici »(p. 43).

    La deuxième section de notre ouvrage, Le nouveau curriculum, débute par un texte de Julien Prud’homme : « La réforme du programme d’histoire et ses acteurs, 1963-2006 ». Dès le départ, il fait référence au débat sur l’enseignement de l’histoire qui s’est amorcé en 20067. Pour lui qui étudie le parcours évolutif des programmes d’histoire nationale depuis 1964, « la lutte pour l’écriture des programmes déborde de loin la seule question nationale »(p. 45). Il veut démontrer que les nouvelles visées didactiques mises en place en 2005 à l’enseignement secondaire,

    6. Voir à ce sujet, Félix Bouvier, André Laurendeau, Lidec, Montréal, 1996, coll. « Célébrités », p. 45-54.

    7. Voir à ce sujet Félix Bouvier (dir.), op. cit., et voir aussi Félix Bouvier, Bilan du débat relatif au programme histoire et éducation à la citoyenneté du deuxième cycle de l’ordre d’enseignement secondaire qui a eu cours au Québec en 2006-2007, janvier 2008, 20 p., http://www.accomodements.qc.ca/documentation/rapports/rapport-13-bouvier-félix.pdf

    Extrait de la publication

  • 12 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    incluant l’association de l’éducation à la citoyenneté à l’histoire, ont pour but de marginaliser cette dernière. C’est donc par la « dilution du socle disciplinaire de l’enseignement de l’histoire »(p. 45) que Prud’homme perçoit une nette césure avec les programmes antérieurs de cette réforme de l’enseignement de l’histoire propre au renouveau pédagogique du début du e siècle au Québec.

    C’est par le relais de la montée en force de conseillers pédagogiques au cours des années 1960 que Prud’homme amorce son explicitation du phénomène. Se définissant eux-mêmes comme des experts en di-dactique, ces conseillers pédagogiques orientent leur carrière d’abord vers les sciences de l’éducation plutôt que vers l’histoire. Ces nouveaux didacticiens s’éloigneraient des prérogatives disciplinaires propres à l’histoire pour orienter la matière enseignée d’abord vers la psycholo-gie de l’élève, puis surtout « autour de concepts psychopédagogiques, comme les objectifs ou les compétences »(p. 46). Peu efficace dans les années 1960 et 1970, la « conquête politique »(p. 47) qu’exige cette conception didactique de l’enseignement de l’histoire pour s’incorporer dans les programmes arrive à maturité dans les années 1990, bien que le « programme de 1982 connaît aussi la notion d’“habileté”, au sens d’une performance considérée pour elle-même. Cependant, il ne la détache jamais vraiment des conditions intrinsèques de la pratique de l’histoire »(p. 50). C’est là surtout que Prud’homme voit un point de rupture du renouveau pédagogique actuel, en ce que les compétences (et les concepts et repères qui les accompagnent) deviennent le paradigme éducatif, aux dépens des contenus et de la démarche disciplinaire ainsi marginalisée.

    Par-delà l’évolution sur la question nationale des programmes d’enseignement de l’histoire qu’il observe par ailleurs, Prud’homme cherche surtout à nous dire que c’est l’autonomie des enseignants en histoire que remet en cause l’évolution dénoncée de la montée en force d’un corps professionnel distinct et affirmé, les didacticiens. Mais pour nous, cette baisse présumée de l’autonomie des enseignants est une fausse prémisse. En fait, c’est plutôt du contraire qu’il s’agirait. L’approche par compétences a la grande qualité didactique de favoriser l’autonomie professionnelle des praticiens, bien que nous adhérons au fait que l’influence didactique des programmes conçus demeure considérable et incontournable par l’incidence qu’elle a sur ce qui se passe en classe.

  • Introduction 13

    Certains des principaux concepteurs du programme d’histoire « nationale » si dénoncé depuis avril 20068 ont beaucoup ergoté9 sur le fait qu’ils étaient dans une bonne mesure redevables aux écrits des rapports Lacoursière et Inchauspé, qui leur avaient ouvert la voie, en particulier sur l’interprétation (l’occultation, dirions-nous) à donner à la question nationale en enseignement de l’histoire. Bien qu’il se défende au départ de vouloir s’inclure dans ce débat, « n’étant ni historien ni didacticien »(p. 54), le texte de Paul Inchauspé amène ici un apport très intéressant sur l’éclairage qu’il faut donner au rapport qu’il a signé il y a maintenant plus de dix ans10.

    D’abord, sur un plan global, la réforme des programmes en cours au Québec, nous dit Inchauspé, fait davantage de place à l’histoire dans l’ensemble des disciplines puisque l’on a renforcé la perspective cultu-relle à donner à leurs contenus. Inchauspé fait ensuite un bref retour sur l’introduction de l’enseignement systématique de l’histoire à l’école, au début du e siècle en France et en Allemagne, où l’on procédait au renforcement de l’identité nationale. Plus tard, dans les années 1960, la France s’est tournée vers l’approche dite des Annales où l’histoire événementielle a été remplacée par des schèmes explicatifs historiques globaux, basés principalement sur les aspects sociaux et économiques de moyenne et de longue durée, en procédant à l’intégration de diverses disciplines à l’histoire (géographie, sociologie, économie, etc.). Inchauspé constate que la réforme des programmes au Québec en histoire, en commençant par ce qu’il observe au primaire, s’inspire nettement de l’approche française évoquée, ce qui est pour lui un anachronisme. Il affirme en effet, et avec beaucoup de pertinence, que l’approche des Annales s’est singulièrement modifiée en France depuis vingt ans en ce qu’elle « s’intéresse maintenant à d’autres aspects et recherche un rééquilibrage en réintroduisant l’histoire politique »(p. 62). Bien qu’il ne veuille pas comparer spécifiquement la France et le Québec à ce chapitre, Inchauspé n’en déplore pas moins l’évacuation constatée de l’histoire politique dans les nouveaux programmes de l’enseignement de l’histoire (trop intégré aux autres matières, devine-t-on aussi) au Québec…

    8. Ibid.9. Michèle Dagenais et Christian Laville, « Le naufrage du projet de programme d’histoire

    nationale. Retour sur une occasion manquée accompagnée de considérations sur l’éduca-tion historique », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 60, no 4, printemps 2007, p. 538-539.

    10. Réaffirmer l’école, Rapport du groupe de travail sur la réforme du curriculum, Gouvernement du Québec, Québec, 1997.

    Extrait de la publication

  • 14 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    Voyons maintenant la prise de position de Paul Inchauspé sur l’ensei-gnement de l’histoire nationale. « Et ce n’est pas parce que le nouveau programme d’histoire s’intéresse aux faits sociaux qu’il ne doit pas y avoir une place dans le cursus d’étude pour une histoire nationale, comme lieu de mémoire. C’est la position que nous avons tenue dans notre rapport »(p. 63). Puis, Inchauspé dénonce le rapport Lacoursière de 1996 qui n’ose aborder franchement la place fondamentale que doit occuper l’histoire nationale dans un curriculum global. « Le mot de “nation” est tabou, il sent le soufre (nation ethnique ? nation civique ?) et la lutte de la reconnaissance nationale au Québec ne simplifie pas une approche sereine de la question »(p. 63-64). De telle sorte que le rapport Lacoursière11, tout comme les versions du programme d’histoire du Québec-Canada, si dénoncées depuis avril 2006, n’osent pas aborder franchement l’histoire nationale, sous prétexte de tomber, ce faisant, dans une histoire nationaliste orientée.

    La position de Paul Inchauspé à ce sujet est limpide. « L’école doit donc transmettre les éléments de la mémoire collective qui construisent l’identité et ce n’est pas parce qu’on est privé de la souveraineté comme ciment identitaire qu’il faut s’empêcher de le faire. Au contraire, c’est encore une plus grande exigence, même si c’est plus difficile et plus délicat pour pouvoir le faire correctement »(p. 68). Et l’argument voulant que la diversité culturelle accentuée du Québec contemporain ne permette plus de transmettre la mémoire nationale authentique de la grande majorité des Québécois ne trouve pas non plus d’échos chez Inchauspé, au contraire. Avec beaucoup d’acuité, il évoque le fait que le « sentiment d’appartenance à une collectivité se développe sur deux socles, celui du vouloir-vivre partagé, le vouloir-vivre démocratique, mais aussi sur celui de la mémoire de l’histoire. Éducation interculturelle et éducation à la citoyenneté certes, mais aussi mémoire de l’histoire »(p. 70, n. 7). Ainsi, mémoire nationale et éducation à la citoyenneté n’ont pas à s’exclure, elles doivent plutôt se compléter pour le mieux-être de tous, anciens et nouveaux arrivants. C’est un Québécois éclairé de première génération qui nous le dit.

    La section Le nouveau programme se termine par un texte de Sébastien Parent, pourtant historien, mais s’intéressant à certains aspects didactiques de l’enseignement. Pour lui, le programme d’histoire et éducation à la citoyenneté du deuxième cycle du secondaire se situe

    11. Se souvenir et devenir, Rapport du Groupe de travail sur l’enseignement de l’histoire, Gouvernement du Québec, Québec, 1996, 80 p.

    Extrait de la publication

  • Introduction 15

    en filiation directe avec l’évolution de la recherche qui se fait dans les milieux universitaires québécois. Dans cette foulée, Parent note « cette étrange fusion entre histoire savante et citoyenneté que l’on défend avec la réforme »(p. 75) qu’il désapprouve en ce qu’elle mêle deux métiers fondamentalement différents : enseignant et chercheur, d’autant que le premier doit jongler avec le socioconstructivisme pour appliquer les préceptes du second.

    Depuis la Révolution tranquille, nous dit Parent, la production des historiens québécois – mais aussi canadiens – a évacué le plus possible tout ce qui pouvait donner des airs « attardés » de l’histoire du Québec, tout en s’éloignant au maximum d’un Lionel Groulx, ce « qui a amené ses producteurs universitaires à la dépouiller des plus importantes références au Canada français et, même, de l’idée de l’existence d’une nation canadienne-française »(p. 77).

    L’histoire politique, qui dominait depuis le milieu du e siècle, a été remplacée par les grands mouvements sociaux, moins marqués par des événements précis et amenant de ce fait « une périodisation assez peu usuelle pour le non-initié et encore moins signifiante dans la mémoire nationale canadienne-française »(p. 78). Ce faisant, les Canadiens fran-çais se voient mêlés à une trame où l’appartenance à la fois nationale et ethnoculturelle a peu d’importance. Aussi, si les « historiens sont conscients de la distorsion provoquée par une lecture purement sta-tistique »(p. 79) qui ne se préoccupe pas des particularités ethnique ou culturelle, c’est qu’ils veulent mettre en évidence une industrialisation et un développement québécois effectués au même rythme que dans le reste de l’Amérique du Nord, tel que le concept des « collectivités neuves » de Gérard Bouchard tend à le démontrer.

    Pour Parent, la désaffection des historiens à l’égard de la réalité natio-nale s’est accentuée à la suite des échecs de 1980 et 1990 (référendum et entente, suivie du rejet des accords du lac Meech) du nationalisme québécois. De plus, cet « abandon du cadre national, et de fait d’une histoire dite nationale, s’inscrit dans une mouvance [scientifique] for-tement marquée par l’histoire sociale telle qu’elle s’épanouit à la même époque un peu partout en Occident »(p. 80). De cela découlerait le désengagement constaté face à l’histoire « nationale » au secondaire en ce qui touche les faits et les tendances politiques, puis expliquerait les si-lences du programme par rapport au thème de la nation. Peut-être, mais de là à procéder au déni à peu près complet en ce qui touche l’identité nationale canadienne, devenue canadienne-française, puis québécoise, il y a une solide marge – au demeurant inacceptable quant à la véracité

  • 16 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    et à l’intégrité historique – que les programmes précédents n’avaient pas franchie, loin s’en faut.

    Vient ensuite un texte purement didactique, fruit d’une recherche menée par l’auteur de ces lignes dans un milieu scolaire excentré du Québec en 2006-2007. Ce texte amorce la section La didactique de l’histoire et éducation à la citoyenneté. La recherche est orientée sur des expériences d’enseignement – apprentissage en histoire et éducation à la citoyenneté au premier cycle de l’ordre d’enseignement secondaire. Le prisme est mis sur l’appropriation des concepts propres aux deux disciplines par l’intermédiaire de ceux que propose le Programme de formation de l’école québécoise. Les conclusions qui en émergent proviennent quelque peu de la recherche documentaire effectuée ces dernières années, mais surtout d’entrevues semi-dirigées menées avec élèves et enseignants, tout comme de l’observation en classe qui est effectuée.

    De l’analyse qui découle de cette recherche toujours en cours, il émane que, oui, l’appropriation de certaines compétences propres à l’histoire semble favorisée par la manipulation d’éléments conceptuels par les élèves, ce qui alimente d’emblée leur conscience historique. Ce n’est cependant pas nécessairement une panacée et certains concepts, tel celui d’État, peuvent demeurer nébuleux pour les élèves et même possiblement accentuer l’imbroglio sémantique à leur sujet. Toutefois, l’apprentissage par concepts semble favoriser les liens entre le monde actuel et ses référents historiques en histoire et éducation à la citoyen-neté. C’est bien là la moindre des choses ! L’éducation à la citoyenneté semble d’ailleurs être la première bénéficiaire de cette association avec l’histoire. Des recherches et des enquêtes plus poussées et allant dans le même sens demeurent toutefois éminemment souhaitables pour en connaître davantage, d’autant qu’il semble bien que le ministère de l’Éducation lui-même n’en a pas mené avant de joindre l’enseignement de l’histoire et celui de l’éducation à la citoyenneté12.

    Autre travail de nature didactique, le texte d’Étienne Dubois-Roy (étudiant à la maîtrise en histoire) et Luc Guay (didacticien) s’inti-tule « La crise d’Octobre 1970 : une démarche socioconstructiviste ». D’entrée de jeu, le texte annonce qu’il est en quelque sorte une réaction « à la polémique qui a eu lieu au printemps 2006 au sujet du nouveau

    12. David Lefrançois, « Sur quelle conception de la citoyenneté édifier le modèle de formation civique ? » dans Fernand Ouellet (dir.), Quelle formation pour l’éducation à la citoyenneté ?, Presses de l’Université Laval, Québec, 2004, p. 75.

    Extrait de la publication

  • Introduction 17

    programme d’histoire et éducation à la citoyenneté »(p. 95). Mettant à profit une situation d’apprentissage et d’évaluation (SAE) et exploi-tant les trois compétences disciplinaires dévolues au programme et à l’enseignement de l’histoire et éducation à la citoyenneté, l’expérience didactique de Dubois-Roy et Guay est fort intéressante en elle-même. Le problème, c’est qu’on nous dit « que, pour comprendre le Québec d’aujourd’hui, nous ne pourrions passer à côté »(p. 97) de l’étude de la crise d’Octobre. J’opine ici que rien n’oblige l’enseignant à couvrir cet élément périphérique du programme, tout important puisse-t-il être historiquement.

    Quoi qu’il en soit, il s’agit pour les élèves du deuxième cycle du se-condaire d’interroger un de leurs grands-parents sur la crise d’Octobre après avoir pris connaissance d’un diaporama informatique et rempli une fiche signalétique propre au thème étudié. Par la suite, les élèves procèdent à la collecte de fiches documentaires colligées par l’enseignant sur divers aspects de la réalité historique en cause. Dans un cinquième temps, une séance plénière est prévue pour que les élèves échangent et aient accès à différents points de vue relatifs à cette crise politique. Finalement, une question synthèse individuelle est posée à l’élève, ce qui devrait lui permettre de faire un retour sur ses apprentissages, élément très important sur le plan didactique.

    Nonobstant les particularités qui ont entouré l’expérience pilotée en milieu de pratique par l’étudiant Dubois-Roy, il ressort plusieurs constatations intéressantes quant au développement des deux pre-mières compétences historiques (interroger avec une perspective et interpréter avec méthode) chez les élèves par l’analyse de documents et d’écrits consécutifs à la documentation fournie. Bien que cette analyse et son traitement ne soient pas toujours clairs, non plus que les liens qui sont effectués avec les deux premières compétences disciplinaires du Programme, il s’agit d’un outil à la fois pertinent et prometteur.

    La quatrième section porte pour sa part sur des Réalités historiques québécoises, éléments de contenu essentiels en enseignement de l’his-toire, approche par compétences ou pas. Les compétences ont en effet besoin de contenus – ouverts et multiples, bien sûr – pour s’exercer. Le premier texte traite de la participation et de l’implication canadienne à la Première Guerre mondiale. La reconstitution historique, effectuée par Mourad Djebabla et Samy Mesli, est bien menée, intéressante et rend bien compte des moments clés de la participation canadienne à cet important conflit militaire. En 1914 (et jusqu’en 1931), le Canada est toujours assujetti aux prérogatives de la Grande-Bretagne en matière

    Extrait de la publication

  • 18 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    de politique extérieure. Par-delà l’évolution de la participation militaire canadienne et québécoise bien documentée, cette courte fresque his-torique rend bien à la fois le jalonnement militaire de l’évolution du conflit lui-même et quelques-uns de ses engagements sociaux, culturels, économiques et politiques.

    Entre autres, les auteurs évoquent la nécessaire arrivée des femmes sur le marché du travail, ce qui s’incorpore mal avec une « image type des femmes du début du e siècle »(p. 117). Aussi, phénomène moins connu, 9 000 « étrangers d’origine ennemie »(p. 118) sont internés au Canada, dont 1 300 au Québec. Sur le plan national, la guerre de 1914-1918 provoque de vives tensions entre Canadiens français et Canadiens anglais, entre autres. La conscription de 1917, imposée de force aux Canadiens français par la majorité canadienne-anglaise, en est évidem-ment le temps fort. La brisure que provoque la conscription chez un grand nombre de Québécois est bien étayée.

    Riche et de grandes qualités dans l’ensemble, ce texte compte cepen-dant quelques légères failles. Lorsque le jour du Souvenir, commémorant chaque année la Grande Guerre au Canada le 11 novembre, est mis de l’avant, on aurait pu mentionner qu’il n’y a qu’au Québec où il n’est pas chômé, ce qui illustre bien que, si cet événement historique a en quelque sorte provoqué l’éventuelle autonomie complète du Canada jusqu’alors colonie britannique, il a aussi produit en quelque sorte deux Canadas : un au Québec et un dans le reste du Canada.

    Ivan Carel y va ensuite d’une réflexion sur le concept de « moderni-sation » de la société québécoise entre 1930 et 1980. De fait, il interroge le programme ministériel de troisième secondaire à ce sujet, lui qui a fait de ce découpage chronologique et de cette appellation une réalité sociale, c’est-à-dire un découpage didactique bien important. Il note que ce découpage a le mérite de regrouper les trois décennies qui précèdent 1960 à celles qui sont perçues comme plus novatrices dans la mémoire collective, celles de la Révolution tranquille, de 1960 à 1980.

    Pour lui, tracer l’amorce de la modernisation du Québec en 1930 est acceptable, bien que l’on puisse en situer les débuts dès le e siècle, au moment où le Québec amorce son industrialisation et son urbani-sation. Là où le programme ministériel pose problème pour Carel, c’est dans l’interprétation qui est faite de cette modernisation. Cela l’amène à poser plusieurs questions : « assiste-t-on à une minimisation des rapports conflictuels, est-ce la fin de l’Histoire au profit d’une lecture post-moderne et, enfin, est-ce un programme postnationaliste par le

    Extrait de la publication

  • Introduction 19

    fait même qu’il tend à valoriser une bonne entente “gestionnaire” de la chose publique ? »(p. 126).

    Carel s’interroge aussi sur le peu de cas fait par le programme de la Deuxième Guerre mondiale, tout comme il constate que la périodisation retenue met en quelque sorte la table à la société idéalisée d’aujourd’hui où les individus, par le relais des chartes et de la démocratie qui en est la source, peuvent changer le cours des événements grâce à l’action citoyenne. « Pour le dire autrement, lorsque j’ai parcouru le programme, j’y ai vu une lecture rectiligne de l’histoire qui mène à une fin heureuse dans l’harmonie entre l’État et le citoyen. Un État débarrassé de ses scories nationales, devenu enfin le reflet démocratique des aspirations individuelles »(p. 128). La suite résume de façon encore plus précise sa pensée. « La définition de la modernisation telle qu’adoptée par le programme tend donc à valoriser les politiques du fédéral (qui, soit dit en passant, ont inspiré les “révolutionnaires tranquilles”, fédéralistes comme nationalistes, au cours des années 1950), estimant que les ten-sions des années 1950 sont dues à l’inadéquation entre les aspirations populaires et les structures étatiques, peu présentes au Québec »(p. 129). « Cela va également dans le sens d’un certain désengagement, que ce soit en termes nationaux ou en termes politiques de façon générale (le “postnationalisme”), et ce, malgré l’insistance sur une formation à la citoyenneté, cette dernière manifestant de l’intérêt pour un État instrumentalisé comme pourvoyeur de services individuels »(p. 130), encore une fois puisque c’est crucial. Voici donc un historien de plus qui partage cette opinion en ce qui touche l’orientation du programme, plus particulièrement encore, et de ses versions précédentes sur la question nationale. Cela en fait d’ailleurs beaucoup13…

    Le dernier texte, et non le moindre, de ce collectif est lui aussi basé sur la réalité sociale allant de 1930 à 1980 : « La modernisation du Québec selon le nouveau programme d’histoire pour l’enseignement secon-daire ». Il est de la main de l’historien Jacques Rouillard. D’entrée de jeu, l’auteur observe que le découpage chronologique propre à un programme d’enseignement est en soi porteur « de significations »(p. 131). Ainsi,

    13. À ce sujet voir, entre autres, « Le programme d’histoire au secondaire, une nouvelle version à recentrer », Le Devoir, 28 septembre 2006, p. A-7. Ont signé cet article dénonciateur, dans l’ordre alphabétique : Denise Angers, Jacques Beauchemin, Éric Bédard, Jean-Paul Bernard, Marc Chevrier, Robert Comeau, Micheline Dumont, Jean-Marie Fecteau, Lucia Ferretti, Alain Gagnon, Yvan Lamonde, Laurent Lamontagne, Josiane Lavallée, Martin Pâquet, Guy Rocher, Jacques Rouillard, Louis Rousseau, Michel Sarra-Bournet, Michel Seymour, Denis Vaugeois.

    Extrait de la publication

  • 20 L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec

    Rouillard note que, pour les auteurs du programme, l’importance donnée au changement d’empire (1760-1763) se veut, dans la version antérieure à juin 2006, « secondaire pour l’avenir des habitants de la Nouvelle-France. C’était plutôt la diffusion des idées libérales et l’accession du Québec à la démocratie politique au début du e siècle qui étaient privilégiées comme un tournant marquant de son histoire »(p. 131). Ultimement, cette conception orientée de l’histoire doit permettre à l’élève d’exercer la troisième compétence disciplinaire du programme : « consolider l’exercice de la citoyenneté à l’aide de l’histoire ». Rouillard met en relief que les vives protestations du printemps 2006 ont amené le ministère à mettre en place un nouveau découpage chronologique après 1760 qui s’intitule « “Revendications et luttes dans la colonie britanni-que”. À juste titre, les deux réalités, nationales et politiques, peuvent très bien se conjuguer »(p. 132).

    Poursuivant l’approfondissement du découpage chronologique proposé à la première année (secondaire trois) du deuxième cycle de l’enseignement secondaire québécois, Jacques Rouillard conteste le fait que l’on choisisse de situer l’amorce de la modernisation du Québec en 1930 plutôt qu’en 1939. « Comment alors peut-on faire de la décennie qui a donné naissance à l’Union nationale le prélude de l’État-providence mis en place pendant la Révolution tranquille ? »(p. 133) Pour lui, il y a bien des forces de changement qui émergent des années 1930, mais elles sont de nature « tout à fait contraire à [celle] qui va s’exprimer pendant les années 1960 »(p. 141). L’essentiel de l’argumentation de l’historien érudit qu’est Jacques Rouillard consiste ensuite à démontrer, documen-tation bien utilisée à l’appui, le bien-fondé de la prémisse énoncée.

    En fait, c’est l’ancien programme d’enseignant de l’histoire du Québec-Canada au secondaire (celui de 1982-2008) qui visait juste à ce chapitre pour Rouillard en situant l’amorce de la modernisation du Québec en 1939. Il perçoit les années 1930 comme celles où l’on assiste à un renfor-cement des éléments à la fois cléricaux et conservateurs du Québec aux dépens « du libéralisme et des valeurs démocratiques. Ce découpage devient d’autant plus saugrenu que le nouveau programme veut mettre en relief les conquêtes démocratiques en vue de mieux former les jeunes à la citoyenneté »(p. 141). Aussi, pour former davantage les élèves à développer leur esprit critique par le relais de l’histoire devine-t-on, Rouillard avance avec justesse que le recul démocratique québécois des années 1930 peut très bien renforcer leurs repères démocratiques, sans mettre l’accent continuellement sur leurs avancées. De plus, la refonte à certains niveaux du programme d’enseignement de l’histoire nationale

    Extrait de la publication

  • . -

    ’ ’

    --,

    Extrait de la publication

    Préface: La Société des professeurs d’histoire du QuébecIntroduction: L’Enseignement de l’histoire au début du xxie siècle au Québec