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© 2006 – Presses de l’Université du QuébecÉdifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Québec, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.ca

Tiré de : L’écotourisme, entre l’arbre et l’écorce, Christiane Gagnon et Serge Gagnon (dir.), ISBN 2-7605-1430-7• D1430N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

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c o l l e c t i o n

TOURISME

Cette collection s’adresse à un vaste public : étudiants, professeurs, chercheurs, gestionnaires, professionnels et travailleurs du domaine du tourisme.

Elle vise à présenter une image plus scientifique du tourisme au-delà des grands mythes fondateurs des loisirs touristiques. Elle a pour objectif d’établir les bases d’une science du tourisme qui reste à faire : la téorologie. Cette discipline en émergence étudie le tourisme sous ses multiples facettes par le biais des sciences sociales, de l’histoire et de la géographie, du droit, des sciences de la gestion, etc.

Une véritable connaissance du tourisme ne peut faire l’économie de recherches rigoureuses et systématiques permettant de formuler des théories, de vérifier des hypothèses, d’établir des faits qui serviront dans les actions à mener par les gouvernements en place et dans la gestion quotidienne des entreprises touristiques.

Cette collection se propose donc de présenter un large panorama de livres fondamentaux, de recherches empiriques et d’idées en ce qui concerne le tourisme et son développement au Québec et dans le monde.

Jean Stafford

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2006

Presses de l’Université du QuébecLe Delta I, 2875, boul. Laurier, bur. 450 Québec (Québec) Canada G1V 2M2

Sous la direction de Christiane Gagnon et Serge Gagnon

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Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

vedette principale au titre :

L’écotourisme, entre l’arbre et l’écorce : de la conservation au développement viable des territoires

(Collection Tourisme)

Comprend des réf. bibliogr.

ISbn 2-7605-1430-7

1. écotourisme. 2. Tourisme – Aspect de l’environnement. 3. développement durable. 4. écotourisme – Aspect social. 5. écotourisme – Aspect économique. I. Gagnon, Christiane, 1950- . II. Gagnon, Serge, 1960- . III. Collection : Collection Tourisme (Presses de l’Université du Québec).

G156.5.E26E26 2006 338.4'791 C2006-940355-4

Mise en pages : Infoscan Collette Québec

Couverture – Conception : Richard Hodgson Photographies : Fleur, Christiane Gagnon Glacier, Istockphoto.com – Silense Marcheur, Istockphoto.com – Amygdalaimagery

1 2 3 4 5 6 7 8 9 PUQ 2006 9 8 7 6 5 4 3 2 1

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dépôt légal – 2e trimestre 2006 bibliothèque et Archives nationales du Québec / bibliothèque et Archives Canada Imprimé au Canada

nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PAdIé) pour nos activités d’édition.

La publication de cet ouvrage a été rendue possible avec l’aide financière de la Société de développement des entreprises culturelles (SOdEC).

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Table des matières

Liste des figures

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XVII

Liste des tableaux

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XIX

Remerciements

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . XXI

Introduction

L’écotourisme : une innovation durable pour le développement viable des communautés locales ?

. . . . . . . . . . . . . . . . . 1

Christiane Gagnon et Serge Gagnon

Partie I L’écotourisme sous tension

Chapitre 1

Écotourisme et développement durable viable

Une dialectique, un cadre interprétatif

. . . . . . . . . 13

Christiane Gagnon et Dominic Lapointe

1. L’écotourisme : un concept polysémique teinté par l’expression des rapports sociospatiaux . . . . . . . . . . . . . 18

2.

Les métaprincipes de l’écotourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.1. Valorisation de la conservation

de l’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.2. Contribution équitable au développement

économique local . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232.3. Prise en compte et réponse aux besoins

des communautés hôtes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242.4. Génération d’une expérience touristique authentique

et responsable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

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L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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3. Écotourisme et approches du développement durable viable (DDV) : quels liens ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.1. Écotourisme et approche environnementale du DD . . . 293.2. Écotourisme et approche économiste du DD . . . . . . . . 303.3. Écotourisme et approche humaniste du DD . . . . . . . . . 323.4. Écotourisme et approche planificatrice de

la gouvernance territoriale du DD . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4. L’écotourisme : un cadre interprétatif ? . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

Annexe I : Bibliographie des textes analysés . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

Chapitre 2

Tourisme, culture et environnement

Une problématique identitaire ?

. . . . . . . . . . . . . . . 43

Jean-Marie Breton

1. Le champ problématique : de la crise du tourisme au tourisme durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 471.1. Le tourisme sans l’environnement :

un tourisme en crise ? L’exemple de la Guadeloupe . . 471.2. Le tourisme soucieux de l’environnement :

tourisme alternatif et écotourisme . . . . . . . . . . . . . . . . 53

2. L’ambiguïté socioculturelle : tourisme, environnement et quête identitaire . . . . . . . . . . . . . 582.1. Tourisme en crise et crise identitaire . . . . . . . . . . . . . 582.2. De la réappropriation environnementale

à la reconstruction identitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

3. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

Chapitre 3

L’écotourisme : une activité d’épanouissement collectif et individuel ?

Impacts sociaux et culturels du tourisme

. . . . . . . 73

Luce Proulx

1. Les impacts sociaux et culturels du tourisme . . . . . . . . . . . . 771.1. Brève définition des impacts sociaux et culturels . . . 771.2. Les impacts dans la communauté hôte . . . . . . . . . . . . 78

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Table des matières

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1.3. Les impacts sociaux et culturels du tourisme dans le contexte québécois . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

1.4. Les impacts psychosociaux et culturels chez le touriste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

1.5. En guise de synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

2. L’écotourisme, une avenue prometteuse ? . . . . . . . . . . . . . . . 972.1. Analyse à partir du paradigme de l’écotourisme . . . . 972.2. Quelques propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

3. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

Partie II Les parcs nationaux : produit d’appel de l’écotourisme

Vers un développement viable des communautés ?

Chapitre 4

Tourisme et communautés d’accueil

Attitudes des communautés à l’égard des développements écotouristiques dans larégion de Gascoyne, en Australie-Occidentale

. . . 109

Ross K. Dowling

1. L’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1131.1. Les différentes approches environnementales . . . . . . 1141.2. La conservation de l’environnement . . . . . . . . . . . . . . 115

2. Le tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1172.1. Les types de tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1172.2. Le tourisme durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1182.3. Les impacts du tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121

3. Les approches axées sur la conservation . . . . . . . . . . . . . . . . 123

4.

La région de Gascoyne, en Australie-Occidentale . . . . . . . . 124

5. Les attitudes de la communauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

6. Analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

7.

Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137

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L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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Chapitre 5

Écotourisme, parcs et populations locales au Costa Rica

Le cas des réserves naturelles privées (Monteverde et Santa Elena) et des communautés voisines

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

Juan Antonio Aguirre G.

1. Vue d’ensemble des indices de fragilité des relations entre parcs et populations voisines . . . . . . . . . . 145

2.

Étude de cas : Forêts humides de Monteverde et Santa Elena : comment assurer la relation entre les réserves privées et la population du Costa Rica, 2005 . . . . . . . . . . . . 1502.1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1502.2. Objectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1512.3. Hypothèse générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1512.4. Sites d’étude et méthodes utilisées . . . . . . . . . . . . . . . 1512.5. Signes évidents des relations limitées et de l’impact

du tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1542.6. Quelques explications sur le problème relationnel

de Monteverde et Santa Elena . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1592.7. Les faits sur les relations avec les réserves voisines :

conclusions préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162

3. Développement de bonnes relations de voisinage entre les parcs et les communautés : enseignements . . . . . . . 164

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169

Chapitre 6

Lorsque conservation et tourisme se confrontent

Le cas du Parc national des Pyrénées et ses conflits d’usages

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

Nathalie Lahaye

1. Des parcs pour le tourisme ou un tourisme pour les parcs ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1751.1. Les parcs naturels de montagne français :

des espaces particulièrement attractifs . . . . . . . . . . . . 1761.2. Des parcs victimes de leur renommée . . . . . . . . . . . . 1771.3. Quel tourisme pour les parcs ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178

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2. La logique du conflit, ou comment l’analyse économique des conflits peut éclairer la dialectique conservation/tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1832.1. Le conflit d’usages dans les espaces protégés :

un fait inéluctable, voire productif . . . . . . . . . . . . . . . 1842.2. Les fonctions d’appropriation et de production

de règles des conflits comme sources d’interprétation de la dialectique conservation/tourisme . . . . . . . . . . . 187

3. La dialectique conservation/tourisme à la lumière des conflits d’usages dans le Parc national des Pyrénées . . . 1903.1. Le conflit de l’ours brun des Pyrénées :

jeux de pouvoir, conflits d’usages et de valeurset questionnements de l’institution « Parc » . . . . . . . . 191

3.2. Aménagements de la montagne à des fins touristiques et récréotouristiques et objectifs de conservation de la nature : quelques enseignements . . . . . . . . . . . . 197

4. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

Chapitre 7

La Charte européenne du tourisme durable dans le Parc national et réserve de biosphère des Cévennes (France)

La rencontre entre un concept et un territoire

. . . 211

Roland Jaffuel et Marylène Pin

1. Le Parc national des Cévennes : un territoire protégé et habité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2131.1. Description du territoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2131.2. Entre préservation et développement :

l’enjeu du tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214

2. La Charte européenne du tourisme durable dans les espaces protégés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2152.1. Un document cadre au service

des espaces protégés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2152.2. Un système « gagnant/gagnant » pour le Parc

et les entreprises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217

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L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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3. La mise en application de la Charte européenne du tourisme durable dans le Parc national des Cévennes . . . 2183.1. L’engagement du Parc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2183.2. L’engagement du Parc au titre du volet I

de la Charte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2203.3. L’engagement du Parc au titre du volet II

de la Charte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221

4. Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2244.1. Les premiers résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 224

5. Perspectives d’évolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2255.1. Maintenir et encourager la dynamique réseau . . . . . . 2255.2. Dégager les moyens suffisant à l’accompagnement

et au transfert d’expériences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2265.3. Renforcer les partenariats de territoire . . . . . . . . . . . . 226

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227

Chapitre 8

Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique

Le cas des parcs nationaux au Nunavik

. . . . . . . . 229

Marie Lequin et Isabelle Cloquet

1. Définition des concepts : écotourisme et gouvernance . . . . . 2321.1. Écotourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2321.2. Gouvernance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233

2. Cadre de référence théorique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2342.1. La gouvernance participative, un outil

pour structurer l’offre écotouristique . . . . . . . . . . . . . . 2362.2. Facteurs sociopolitiques influant

sur la gouvernance de l’offre écotouristique . . . . . . . . 2382.3. Schématisation du cadre de référence . . . . . . . . . . . . . 240

3. Recherche empirique et adaptation du cadre de référence . . . 2413.1. Portrait du Nunavik . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2423.2. Cadre méthodologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250

4. Principaux résultats d’analyse des facteurs sociopolitiques . . . 2524.1. Structure de la population . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2584.2. Les valeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2584.3. Le soutien de la population locale . . . . . . . . . . . . . . . 259

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4.4. Engagement et dynamique des acteurs . . . . . . . . . . . . 2594.5. Mode organisationnel des acteurs . . . . . . . . . . . . . . . . 2594.6. Synthèse des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260

5. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263

Partie III Forêt, terre et mer

L’activité écotouristique, une alternative pour la mise en valeur des ressources ?

Chapitre 9

La place de la forêt dans le développement futur des Antilles françaises

L’exemple de la Martinique

. . . . . . . . . . . . . . . . . . 269

Philippe Joseph

1. Bref aperçu de l’évolution de la végétation de l’époque précolombienne à nos jours . . . . . . . . . . . . . . . . 273

2.

Les principales aires protégées forestières du présent : répartition géographique, aspects juridiques et facteurs mésologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2742.1. Situation géographique et aspects juridiques . . . . . . . 2742.2. Quelques enseignements sur les facteurs

mésologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276

3. Caractéristiques écosystémiques, physionomiques et floristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2773.1. Les domaines forestiers du Conservatoire du littoral

du Sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2783.2. Le massif sylvestre du Conservatoire du littoral

du Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2803.3. Les réserves biologiques domaniales et forestières

futures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2813.4. Les sites inscrits et classés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281

4. La forêt entre écologie et économie : la question dudéveloppement durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 284

5.

Les perspectives d’écotourisme forestier à la Martinique . . . 2895.1. Les activités écotouristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 290

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XIV

L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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Tiré de : L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, Christiane Gagnon et Serge Gagnon (dir.), �ISBN 2-7605-1430-7 • D1430N

Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

6. L’écotourisme à l’interface des relations équilibrées entre nature et société . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 291

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293

Chapitre 10

L’impact économique, social et environnemental de l’agroécotourisme dans la Caraïbe

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 297

Athanasia Koussoula-Bonneton

1. Le tourisme : une activité économique importante . . . . . . . . 2991.1. La contribution du secteur touristique à la formation

du PIB dans quelques pays de la Caraïbe . . . . . . . . . . 300

2. L’impact du tourisme de masse sur l’environnement et sur la société d’accueil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3022.1. Le tourisme de masse est-il un frein

au développement de l’agriculture ? . . . . . . . . . . . . . . 305

3. Agriculture et tourisme : la mise en place d’une nouvelle synergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3063.1. Mise en réseau des acteurs ruraux et des acteurs

du tourisme balnéaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3083.2. Développement des prestations et des services

d’accueil, d’hébergement, de loisirs… à destination des touristes dans l’exploitation agricole ou, plus largement, dans le milieu rural . . . . 310

4. Les retombées économiques de l’agroécotourisme . . . . . . . . 313

5.

Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 316

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 318

Chapitre 11

Le tourisme sportif sur le littoral médocain dans le sud-ouest de la France

Un écotourisme en action

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 321

Jean-Pierre Augustin

1. La Côte médocaine : un cadre naturel propice aux loisirs de pleine nature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323

2.

La multipolarisation des loisirs sportifs . . . . . . . . . . . . . . . . . 326

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Table des matières

XV

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3.

Le jeu du catalogue : à chacun ses activités sportives . . . . . 3283.1. L’individuation des pratiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3283.2. L’hybridation des activités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3303.3. La délocalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 331

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333

Partie IV L’écotourisme : un nouveau marché ?

Chapitre 12

Labels et certifications d’écotourisme et de tourisme : le contexte et la portée

. . . . . 337

Marie-France Turcotte et Corinne Gendron

1. Le contexte normatif de l’écotourisme et du tourisme durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3401.1. Le niveau « macroculturel » de l’écotourisme

et de la gestion durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3401.2. Le niveau du domaine : l’institutionnalisation

de l’écotourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343

2. Les labels et les certifications fondés sur les valeurs en écotourisme et en tourisme durable . . . . . . . . 3482.1. Les labels et certifications et leurs promoteurs . . . . . 3492.2. Labels et certifications : facteurs de développement

durable ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 358

3. Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 366

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 368

Chapitre 13

L’écotourisme rattrapé par le marché

. . . . . . 375

Jacques Perret

1. L’authenticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3771.1. Le ressourcement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3781.2. L’authentique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3781.3. Il existe de fortes potentialités . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3791.4. Tout devient patrimoine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 379

2. Responsabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3812.1. Un tourisme doux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3812.2. Un vecteur du développement durable . . . . . . . . . . . . 3822.3. Messianisme ou mauvaise conscience ? . . . . . . . . . . . 384

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L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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3. Rentabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3843.1. Rester entre soi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3853.2. Un segment de clientèle restreint . . . . . . . . . . . . . . . . 3853.3. Normalisation, labellisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3873.4. La sélection haut de gamme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3883.5. La rationalisation des projets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 389

4. Conclusion : fatalisme ou principe de précaution ? . . . . . . . . 390

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 391

Conclusion

De l’écotourisme à l’éthique : retrouver le sens unitaire du monde . . . . . . . . 393Bernard Schéou

1. L’écotourisme : multiplicité et ambiguïté du concept et de ses applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 395

2. La crise de la modernité : la rupture du sens unitairedu monde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 402

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 407

Les auteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 409

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Liste des figures

Figure 4.1 Localisation de la baie de Gascoyne en Australie-Occidentale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

Figure 4.2 Population étudiée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

Figure 4.3 Occasions de contacts entre la population d’accueil et les touristes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

Figure 8.1 Modèle de gouvernance en écotourisme . . . . . . . . . . 237

Figure 8.2 Cadre de référence adapté au contexte de gouvernance des parcs nationaux du Nunavik . . . 241

Figure 8.3 Localisation du Nunavik . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243

Figure 8.4 Localisation du Parc des Pingualuit . . . . . . . . . . . . . 251

Figure 9.1 Espaces naturels bénéficiant d’outils gestionnels . . . 275

Figure 9.2 Méthode de planification territoriale dans la perspective du développement durable (valorisation écotouristique des milieux forestiers) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 292

Figure 10.1 La formation du PIB dans quelques pays de la Caraïbe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 301

Figure 10.2 Évolution des dépenses des visiteurs dans les pays de la Caraïbe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 303

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Figure 10.3 La valeur des exportations et importations agroalimentaires dans quelques pays de la Caraïbe (1997) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 305

Figure 10.4 Évolution des dépenses des touristes et de la valeur ajoutée agricole en Guadeloupe

. . . . . . . . . 307

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Liste des tableaux

Tableau 1.1 Croisement des métaprincipes d’écotourisme et des approches de DD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

Tableau 3.1 Impacts sociaux et culturels du tourisme dans les communautés hôtes . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

Tableau 3.2 Liens entre concepts de l’écotourisme et mécanismes d’influence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

Tableau 4.1 Comment les communautés d’accueil perçoivent la relation entre environnement et tourisme dans les études retenues – Gascoyne . . . 128

Tableau 4.2 Opinions que les communautés d’accueil se font du tourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129

Tableau 4.3 Opinions que les communautés d’accueil se font des activités portant préjudice à l’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

Tableau 4.4 Opinions que les communautés d’accueil se font des activités ne causant pas de préjudice à l’environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133

Tableau 4.5 Comment les communautés d’accueil perçoivent la relation entre environnement et tourisme dans les études retenues . . . . . . . . . . . 135

Tableau 5.1 Les questions des sondages . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

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L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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Tableau 5.2 Valeur moyenne des variables clés sociodémographiques, 2001 et 2005 . . . . . . . . . . . 154

Tableau 5.3 Sommaire des résultats, Étude de 2001 . . . . . . . . . 156

Tableau 5.4 Sommaire des problèmes, Étude de 2001 . . . . . . . 157

Tableau 5.5 Sommaire des résultats, Étude de 2005 . . . . . . . . . 158

Tableau 8.1 Fréquentation et recettes touristiques au Nord-du-Québec, 2001-2002 . . . . . . . . . . . . . . . 248

Tableau 8.2 Fréquentation des parcs nordiques . . . . . . . . . . . . . 249

Tableau 8.3 Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique au Nunavik . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253

Tableau 8.4 Synthèse des impacts des facteurs sociopolitiquesidentifiés sur les dimensions de gouvernance en écotourisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261

Tableau 9.1 Objectifs principaux des protections . . . . . . . . . . . 276

Tableau 9.2 Caractéristiques des acquisitions du Conservatoiredu littoral (Sud) (protection foncière forte) . . . . . . 279

Tableau 9.3 Projets de réserves biologiques . . . . . . . . . . . . . . . 282

Tableau 9.4 Données socioéconomiques de quelques composantes de l’archipel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 288

Tableau 10.1 Évolution des arrivées de visiteurs dans la Caraïbe et dans le monde . . . . . . . . . . . . . 299

Tableau 10.2 Part des revenus du tourisme dans le PIB de quelques pays de la Caraïbe en 2002 . . . . . . . . 302

Tableau 10.3 Revenus distribués dans les parcs naturels

à la suite d’une dépense touristique de 150

¤

. . . . 315

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Remerciements

Le présent livre, ouvragé en un an, est la résultante d’une collaborationassidue entre les auteurs, les éditeurs et l’équipe de production des Presses.Les textes choisis proviennent, en grande partie, mais non exclusivement,du colloque international intitulé L’écotourisme : une innovation durablepour le développement viable des communautés locales ? qui s’est tenulors de l’Association canadienne française pour l’avancement des sciences(ACFAS, 10-11 mai, 2006) à l’Université du Québec à Chicoutimi.

La réussite de cet événement a été rendue possible grâce au travaild’un comité organisateur, issu de la Table d’harmonisation du Parc nationaldu Saguenay, composé de Messieurs Luc Bouchard, François Tremblayde la Sépaq (Société des établissements de plein air du Québec), LangisBouchard de Promotion Saguenay ainsi que de Madame Guylaine Simarddu Musée du Fjord-du-Saguenay. Nous les remercions. Leur implicationdans l’organisation de tables rondes et la visite au Musée du Fjord-du-Saguenay auront permis de maximiser les échanges entre les professionnelsdu tourisme et les scientifiques présents.

Enfin, nous remercions les partenaires, soit le Consulat général deFrance à Québec, le ministère du Tourisme et sa représentante Madame ladéputée de Jonquière Françoise Gauthier, la Conférence régionale des élusdu Saguenay–Lac-Saint-Jean et enfin Monsieur le député de Chicoutimi-Le Fjord Robert Bouchard, dont le soutien financier aura servi aux dépla-cements de conférenciers internationaux.

Christiane Gagnon et Serge Gagnon

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Introduction

L’écotourismeUne innovation durable pour le développement viable des communautés locales ?

Christiane GagnonPh. D. en aménagementProfesseure au Département des sciences humaines de l’[email protected]

Serge GagnonPh. D. en géographieProfesseur au Département de travail social et des sciences sociales de l’[email protected]

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Introduction 3

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Le titre du présent ouvrage, L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce : dela conservation environnementale au développement viable des territoires,évoque de plein fouet la dialectique de l’écotourisme, à savoir la protectiond’aires naturelles exceptionnelles et leur mise en valeur économique, parune forme responsable d’exploitation touristique, en vue d’un bénéficeéconomique pour les territoires et les communautés locales avoisinantes.Dans un contexte où l’écotourisme est une activité en forte croissance,envisagée comme une sorte d’alternative au tourisme de masse mais aussicomme une voie privilégiée du développement durable, il y a là unepertinence sociale et scientifique qui mérite notre attention.

L’écotourisme prétend à la fois conserver, voire améliorer la diversitédes écosystèmes, tout en accaparant une partie de l’énorme marché tou-ristique, dont une partie bénéficierait aux populations locales. Un nobleobjectif qui repose sur une délicate alliance (Ziffer, 1989) entre les airesprotégées et leur mise en valeur à des fins de développement local. Ya-t-il une alliance gagnante entre la conservation, les impératifs dominantsdu marché de l’industrie touristique et la qualité de vie des communautéslocales, notamment les plus fragilisées ? Comment maîtriser les impactsnégatifs du tourisme et bonifier les impacts positifs pour ces communautésselon un mode de développement durable viable ? Pour réfléchir auxtenants et aboutissants de ces questions percutantes, nous avons privilégiéun éclairage par de multiples entrées : des trajectoires plurielles, en pro-venance de la France, des Caraïbes, de l’Australie, du Costa Rica, duNunavut et du Québec, tantôt sous l’angle économique, social ou culturel,tantôt sous l’angle de l’écotouriste, de l’opérateur, du parc ou de lacommunauté, tantôt sous l’angle de la forêt, de la terre ou de la mer.

La lecture des trajectoires plurielles et du domaine controversé del’écotourisme pose le problème des définitions, surtout pour celui qui s’yintéresse depuis peu. L’existence de plusieurs vocables associés, de prèsou de loin, à l’écotourisme tels que le tourisme vert, durable, solidaire,de la nature, scientifique, d’aventure, etc. ne facilite pas toujours la com-préhension, d’autant qu’ils ne sont pas forcément équivalents, voire inter-changeables (S. Gagnon, 2003). Toutefois, nuances faites, ils font partied’une parenté élargie où chacun a sa spécificité.

L’écotourisme peut être défini comme une forme de tourismecontribuant activement à la protection du patrimoine naturel et culturelet qui inclut les communautés locales et indigènes dans son développe-ment afin de contribuer à leur bien-être. Cette définition s’inscrit dans lafoulée des travaux de l’Association internationale sur l’écotourisme

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4 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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(International Ecotourism Society) et de la Déclaration de Québec surl’écotourisme (2002). Il est intéressant de noter que cette définition a étéacheminée au Sommet de la Terre sur le développement durable deJohannesburg, qui se déroulait quelques mois après le Sommet mondialde Québec. Les promoteurs de l’écotourisme y voyaient l’occasion defaire reconnaître l’écotourisme comme un secteur économique majeur,susceptible de réduire la pauvreté et de préserver l’environnement et labiodiversité. Une telle ambition s’arrime aux défis posés par l’écotourisme,en particulier, et le développement des communautés locales, indigènes,fragilisées, en général. Eu égard à l’année internationale de l’écotourisme(2002), c’est un défi que le gouvernement québécois a traduit par lamaximisation des retombées locales, l’implication et la responsabilisationdes communautés hôtes (Québec, 2002).

Malgré l’incessant discours louangeur sur le tourisme, les acteursinternationaux reconnaissent tout de même que « le tourisme a des con-séquences sociales, économiques et environnementales importantes etcomplexes qui peuvent présenter à la fois des avantages et des coûts pourl’environnement et les communautés locales » (Sommet mondial del’écotourisme, 2002, p. 1). Dans son article Tourism and EnvironmentalConservation : Conflict, Coexistence or Symbiosis ?, Budowski (1976) –généralement cité comme le père du concept d’écotourisme avec Ceballos-Lascurain – reconnaît que les rapports entre le tourisme et l’environne-ment naturel tendent à être conflictuels. Toutefois, il affirme que l’éco-tourisme représente un potentiel pour une relation gagnant/gagnant tantpour l’environnement, les opérateurs que pour les communautés hôtes.Lors d’une conférence récente au Chili, Budowski (2005) note que, trenteans plus tard, la cohabitation a considérablement diminué et que lesconflits ont augmenté, mais qu’il y a aussi un certain nombre de succès.

Dans un rapport des Nations Unies (2001), la Commission dudéveloppement durable déclarait que la pression exercée par le tourismeautour des années 2020 sera très forte (1,6 milliard de touristes). Seloncette Commission, il importe de redoubler d’efforts pour traiter de laquestion de la durabilité du tourisme et mieux planifier l’écotourisme,qui devrait continuer de progresser rapidement. Ainsi, depuis une dizained’années, une panoplie de réglementations nationales, de normes et dedirectives ont été émises par plusieurs organisations internationales, dontcelles de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT).

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Toutefois, cela est-il suffisant pour maîtriser les incidences indésirableset contribuer à un développement plus viable ? L’Espagne, après avoir misésur le modèle du tourisme de masse soleil/plage, a subi une dénaturali-sation de ses côtes1 et s’est retrouvée dépendante des tours-opérateursinternationaux pour son développement touristique (« Espagne : la movidadu tourisme », 2003). Du côté de l’écotourisme et des territoires dits sous-développées, les impacts non maîtrisés2 et non souhaitables n’en sont pasmoins présents (Barkin, 2003). L’inégalité criante entre les touristes etles hôtes (Duffy, 2002) demeure, et les conditions de vie préoccupantesdes communautés d’accueil tardent à s’améliorer (Barkin, 2003). Demême, dans les pays industrialisés – particulièrement dans le cas desRéserves de biosphère américaines –, Solecki (1994) soulève la problé-matique de la dépendance des territoires dont l’économie basée surl’exploitation des ressources naturelles repose désormais sur celle dutourisme. Malgré les résultats de ces études empiriques, l’écotourismeapparaît comme une solution permettant d’atteindre des objectifs de jus-tice sociale et environnementale, et ce, sur la base de la participation descommunautés locales.

Certes, cette alternative soulève le débat du poids du local par rapportau global et celui des stratégies d’acteurs. Mais elle soulève aussi l’épi-neuse question des modalités, des conditions de la participation des com-munautés locales voisines à la planification et au développement des airesprotégés, gérées le plus souvent à l’échelle nationale. Si personne ne peutêtre contre la vertu de la participation des communautés, quelles«capabilités3 » les citoyens et les collectivités ont-ils de maîtriser le chan-gement, ici l’industrie touristique, dans le sens de leurs aspirations et dela reconnaissance de leurs singularités culturelles, sociales et environne-mentales? La demande de participation sera-t-elle accompagnée d’un par-tenariat dans le sens de la répartition des avantages, voire des bénéfices del’activité ? Car la volonté de planifier/développer un créneau écotouristiquene s’accompagne pas forcément de moyens de diminuer les inégalités, dansle sens d’une équité et d’une viabilité accrues (C. Gagnon, 2004). C’estpourquoi le modèle d’écotourisme ne pourrait pas faire l’économie d’un

1. Le grand hôtel Atlanterra (Zahara de los Atunes), symbole de l’urbanisme sauvage des années1970 et du tourisme de masse, a dû être détruit.

2. Ne pensons ici qu’au cas du parc national de Banff.3. Au sens de Sen, c’est-à-dire les chances d’un individu de réaliser ses objectifs, de s’accomplir.

La traduction définit ainsi le néologisme : « L’ensemble des modes de fonctionnement humainqui sont potentiellement accessibles à une personne, qu’elle les exerce ou non » (Sen, 2000,p. 12).

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changement dans le mode de gouvernance des aires protégées (Lequin,2001). L’accord de Durban (UICN, 2004) a donné lieu à un engagementde 3 000 gestionnaires en faveur d’un nouveau modèle pour les airesprotégées qui, toutefois, ne spécifie pas la place des communautés locales.

Plus d’une fois, l’eldorado du tourisme n’a été qu’un miroir auxalouettes, du moins pour les travailleurs de cette industrie et les commu-nautés d’accueil (Ziffer, 1989). Ainsi se pose la pertinence d’une grilled’analyse pour tout projet à caractère touristique : Est-il écologiquementsoutenable ? Socialement viable ? Économiquement durable ? À quellesconditions l’écotourisme peut-il créer une richesse collective, une plus-value sociale ? Comment les écosystèmes, tant biologiques que sociaux,seront-ils modifiés par le changement ou le projet proposé ? Enfin, quelsmécanismes de suivi permettront de savoir si les faits correspondent auxengagements et promesses ?

C’est pourquoi plus d’un auteur se demande si l’écotourisme, danssa dimension de protection du patrimoine culturel et naturel, est réelle-ment compatible avec les mécanismes (impératifs) du marché, de la com-pétition entre les destinations et de la logique de rentabilisation. Untourisme authentique, responsable et solidaire peut-il porter les germesd’un changement significatif, à plus grande échelle, dans la façon depenser et de faire le tourisme, voire le développement durable et viabledes individus, des territoires et des communautés ?

L’ouvrage que nous proposons vise justement à éclairer cequestionnement. Pour ce faire, nous aborderons le phénomène de l’éco-tourisme à partir de quatre entrées : 1) L’écotourisme sous tension ; 2) Lesparcs nationaux : produit d’appel de l’écotourisme. Vers un dévelop-pement viable des communautés ? 3) Forêt, terre et mer. L’activité éco-touristique, une alternative pour la mise en valeur des ressources ?4) L’écotourisme : un nouveau marché ? En adoptant le fil conducteur,mais non réducteur, de la dialectique « conservation et développementdurable viable des territoires », nous allons dans un premier temps ques-tionner les tensions « visiteur/visité » qui illustrent bien un des enjeux del’écotourisme. Dans cette perspective, Christiane Gagnon et DominicLapointe se demandent si l’écotourisme est compatible avec une fré-quentation soutenue de territoires protégés ; au surplus, ils posent la ques-tion en terme de développement local durable viable pour lescommunautés rurales, éloignées ou fragilisées. Ils avancent que l’écotou-risme porte peut-être les germes d’un changement social significatif, àplus grande échelle, dans la façon de penser et de faire le tourisme et le

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développement. Pour ce faire, ils analysent les lieux convergents et diver-gents des définitions rattachées à l’écotourisme, sur la base d’un choixde textes fondateurs. Jean-Marie Breton, quant à lui, aborde la questionsous l’angle de l’altération des identités locales. À l’aide de l’exempleguadeloupéen, il avance que l’activité touristique peut porter atteinte àl’authenticité des cultures et que la démarche écotouristique, qui déve-loppe une approche « holistique », peut générer des comportements nou-veaux de la part des opérateurs du tourisme. Selon Breton, cette réflexionrelative à la perception et à l’insertion du tourisme dans le cadre de vieet dans le vécu identitaire des populations locales a le potentiel de modi-fier la signification et la portée de la démarche touristique. Enfin, LuceProulx amène la réflexion sur le terrain de la communication et de larencontre entre deux individus, l’un individuel, soit le touriste – aussimultiple –, et l’autre collectif, soit la communauté hôte. Cet espaced’échange « interculturel » doit être compris comme un système de rela-tions. Néanmoins, le tourisme génère des impacts sociaux et culturelspositifs et négatifs. Selon Proulx, l’écotourisme sollicite la participationdes deux parties dans l’expérience touristique et, à cet égard, peut cons-tituer une des voies potentielles vers un développement local et régionalcommunautaire.

La deuxième partie, intitulée Les parcs nationaux : produit d’appelde l’écotourisme. Vers un développement viable des communautés ?, estconsacrée à des études de cas internationaux de relation entre les commu-nautés locales et des environnements naturels protégés. Ross K. Dowlingavance que pour éviter les conflits « visiteur/environnement » et « visiteur/résident », il est impératif de connaître les points de vue de la commu-nauté d’accueil au moment du processus de planification touristique.Selon lui, il est essentiel d’en venir à la consultation des populationslocales concernées si les gestionnaires veulent assurer la conservation del’environnement naturel, minimiser les conséquences non souhaitées,favoriser la croissance économique des communautés et développer uneattitude positive envers le touriste. À l’aide de l’exemple d’une régiond’Australie-Occidentale, Dowling va décrire comment la communautéd’accueil voit le développement touristique et comment l’activité touris-tique se répercute sur l’environnement naturel et le tissu social. JuanAntonio Aguirre G. abonde dans le même sens que Dowling en ce quiconcerne l’importance de la participation des populations locales dans leprocessus de planification. Avec une étude comparative des commu-nautés de Monteverde et Santa Elena, des icônes majeurs de l’écotou-risme au Costa Rica, Aguirre avance que les relations communautés/aires

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protégées traversent une période de stress attribuable à une suite de chan-gements et d’espoirs économiques non comblés, chez les communautésd’accueil. Cette situation de tension polarise les membres des commu-nautés, d’un côté, et les administrateurs des réserves, de l’autre. Celarisque de détériorer les relations si elles ne sont pas réglées adéquate-ment. À partir d’un regard critique porté sur une recherche longitudinalede cinq années, il analyse les changements qui se sont produits danschacune des communautés à l’étude. Il relate comment ces changementsont influencé l’état des relations et les impacts qu’ils peuvent entraînerdans les communautés. De son côté, Nathalie Lahaye aborde la dialec-tique conservation/tourisme des espaces naturels protégés de montagnedans le Parc national des Pyrénées, en France. À partir de la notion deconflit d’usages, lié à l’introduction d’une espèce sauvage, soit l’oursbrun, et autour de projets d’aménagement en montagne à des fins touris-tiques, elle avance que la multifonctionnalité de la montagne est unesource de tensions, voire de choix d’aménagement inappropriés. SelonLahaye, la connaissance des enjeux qui entourent la double dynamiquede protection accrue et d’usages récréatifs des espaces de montagne aug-mente le succès de projets territoriaux de développement durable etviable, en général, et de projets écotouristiques, en particulier. RolandJaffuel et Marylène Pin, du Parc national des Cévennes, en France,affirment avoir trouvé des pistes de solution pour réglementer les conflitsd’usages dans les espaces naturels. Depuis 2002, avec l’exemple del’application de la Charte européenne du tourisme durable dans lesespaces protégés, ce parc serait le premier en Europe à avoir démontréque cette charte lui offre la possibilité de contractualiser directement avecles entreprises touristiques du territoire. Ils nous présentent cette démarchenovatrice de partenariat avec le milieu tout en s’interrogeant sur les pers-pectives d’application de la charte. Pour enchaîner sur le thème de lagouvernance, Marie Lequin et Isabelle Cloquet nous proposent une ana-lyse de l’écotourisme dans un contexte de développement des communau-tés en milieu autochtone. En prenant comme étude de cas la création deparcs nationaux dans la région du Nunavik, elles recensent les facteurssociologiques et politiques qui déterminent le caractère de gouvernancede l’offre écotouristique lors de la mise en valeur des espaces naturels.

À partir de cas caraïbéens et français, les textes de la troisièmepartie, Forêt, terre et mer. L’activité écotouristique, une alternative pourla mise en valeur des ressources ?, analysent le potentiel de mise envaleur des ressources naturelles par et pour l’activité écotouristique. Àl’aide du cas martiniquais, Philippe Joseph fait la démonstration que,

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malgré les activités économiques, les contraintes démographiques eturbaines et la fragilisation de l’écosystème forestier, la biodiversité desécosystèmes des forêts tropicales des Antilles françaises est un élémentimportant de l’attractivité écotouristique de ces mêmes territoires. SelonJoseph, il est impératif à cet égard de garantir leur protection et leur miseen valeur dans une perspective de durabilité. Athanasia Koussoula-Bonneton, quant à elle, avance que le développement de l’agroécotou-risme dans cette région caraïbéenne constitue d’une part une solutionviable au recul du secteur agroalimentaire et au tourisme balnéaire.D’autre part, l’agroécotourisme contribue à une meilleure prise encompte de l’environnement dans les décisions d’aménagement. L’auteuredémontre, à cet égard, que la mise en valeur écotouristique de la « terre »permet la diversification des revenus des agriculteurs et contribue à lapaix sociale par le biais de l’intégration des agriculteurs et des ruraux àun processus de développement durable. Pour boucler cette troisièmepartie, Jean-Pierre Augustin souligne l’importance, à la fin des années1960, de la volonté gouvernementale de préserver les espaces littorauxde la côte Aquitaine, en France, pour l’aménagement durable d’un éco-tourisme de loisirs sportifs. Il précise que le gouvernement français vou-lait alors refuser le développement touristique ex nihilo, comme cela avaitété le cas sur la côte du Languedoc-Roussillon, afin de favoriser l’amé-nagement des installations touristiques à partir des stations déjà existantesde la côte médocaine.

S’agissant de L’écotourisme : un nouveau marché ?, la quatrième etdernière partie de l’ouvrage aborde la notion de « marchandisation » del’écotourisme, comme modèle de développement durable et viable, àtravers une lecture critique de la labellisation des produits et, par ailleurs,le risque de banalisation de ce modèle. Marie-France Turcotte etCorinne Gendron posent la question fondamentale des réels desseins dela certification des produits et des pratiques écotouristiques. Leurréflexion s’inscrit dans le cadre général des pratiques de gouvernance desentreprises. Elles interpellent le rôle des nouveaux mouvements sociauxqui utilisent des moyens de pression économiques pour transformer lespratiques des producteurs. Quant à Jacques Perret, il avance que la loidu marché est sur le point de rattraper la pratique écotouristique. À cetégard, il fait remarquer la forte tendance à la folklorisation des cultureslocales et le danger d’une rationalisation des pratiques écotouristiquesfavorisant une normalisation des produits, voire leur banalisation et leurdénaturisation à plus ou moins long terme.

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Tous ces textes référant à des trajectoires plurielles alimenteront laréflexion et le débat sur l’importance de la qualité de l’environnementpour des activités écotouristiques dont les bénéfices doivent profiter auxcommunautés locales d’accueil et ainsi contribuer au redressement desinégalités sociospatiales.

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IIPartie

L’écotourisme sous tension

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11Chapitre

Écotourisme et développement durable viableUne dialectique, un cadre interprétatif

Christiane GagnonPh. D. en aménagementProfesseure au Département des sciences humaines de l’[email protected]

Dominic LapointeDoctorant en développement régional, [email protected]

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Résumé

L’écotourisme a été défini, lors du récent Sommet mondial, comme uneforme de tourisme durable « qui contribue activement à la protection dupatrimoine naturel et culturel, qui inclut les communautés locales etindigènes dans sa planification, son développement et son exploitation etcontribue à leur bien-être » (Québec, 2002, p. 69). En principe, les acti-vités écotouristiques reposent sur une fréquentation de lieux naturels,selon des objectifs d’observation, de récréation, de connaissances éco-logiques, culturelles, anthropologiques (Boo, 1990 ; Ceballos-Lascuráin,1996 ; Fennel, 2000). Par ailleurs, l’écotourisme participe d’une mou-vance élargie, celle du développement durable et responsable (Ziffer,1989), associée à une recherche d’authenticité, du moins de la part desécotouristes. Ce type de tourisme n’est pas sans susciter un certainnombre de questions. Malgré un discours de protection de l’environne-ment, comme le démontre le cas des parcs nationaux de l’Ouest cana-dien, l’écotourisme est-il compatible avec la fréquentation soutenue deterritoires exceptionnels ? Peut-il être envisagé, pour les communautésrurales, éloignées, fragilisées, comme un nouveau créneau de dévelop-pement économique local (Boo, 1990 ; Ceballos-Lascuráin, 1996 ; Gagnon,1998) ? Ou entre-t-il dans la logique du marché, de la compétition entreles destinations et de la rentabilisation de la nature (Duffy, 2002) ? Ensomme, l’écotourisme porte-t-il les germes d’un changement significatif,à plus grande échelle, dans la façon de penser et de faire le tourisme etle développement ? Le chapitre portera sur les lieux convergents et diver-gents des définitions et approches rattachées à l’écotourisme, à partird’une analyse documentaire axée sur les liens entre le développementlocal viable et l’Autre tourisme.

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L’écotourisme : un tourisme prenant en compte la dimension environne-mentale et contribuant au développement durable et viable des communautéshôtes ? Selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), l’écotourismecorrespond à une déclinaison du tourisme durable qui « répond aujourd’huiaux besoins des touristes et des régions qui les accueillent tout en proté-geant et en améliorant les ressources pour l’avenir » (Québec, 2003, p. 8).La Déclaration finale du sommet mondial de l’écotourisme (Québec, 2002)amalgame trois composantes dans une symphonie, en apparence,harmonieuse : la satisfaction des touristes, la protection des patrimoinesnaturels et culturels et le bien-être des communautés locales. Mais au-delàdes grands objectifs et recommandations évoqués dans cette Déclaration,il n’y a pas de référence précise au mode de résolution de conflits potentiels,aux défis posés pour arrimer concrètement l’écotourisme au développementdurable viable des communautés. Cela porte à réduire l’écotourisme à unénoncé vertueux qui ne remet pas en cause les pratiques non souhaitablesde l’industrie touristique et ses impacts sociaux. Cela pose les questionssuivantes : est-ce que les acteurs gouvernementaux font la promotion del’écotourisme pour faire contrepoids au tourisme de masse ou au tourismediffus ? Est-ce pour ajouter un nouveau créneau au marché répondant auxvaleurs écologistes de certains consommateurs (Breton, 2001b ; Duffy,2002) ? Tout se passe comme si l’écotourisme et l’industrie touristiquereposaient sur un postulat non explicite, à savoir que l’environnement estune sorte d’usufruit perpétuel dans le sens où les promoteurs s’en serventcomme produit d’appel afin de percevoir des revenus et des bénéfices àcourt ou moyen terme. Ils agissent comme s’ils disposaient de l’environ-nement, externalisant tous les types d’incidences à long terme. Ce postulatnous fait entrer de plein fouet dans la dialectique du concept d’écotourisme :vouloir conserver l’environnement et, en même temps, offrir des produitsécotouristiques pour se positionner sur un marché international dont lademande est croissante1 de même que répondre aux besoins fondamen-taux des collectivités d’accueil. Or il ne va pas de soi, comme le démontrentplusieurs études de cas, notamment dans les pays en voie de dévelop-pement, que la rencontre des objectifs d’écotourisme rencontrent cesénoncés déclaratifs.

De l’écotourisme au développement durable, le pas à franchir, dumoins conceptuellement, semble facile. Ainsi plus d’un auteur (Breton,2001a ; Place, 1998 ; Wall, 1997) avancent que l’écotourisme est un

1. Voir Québec (2003). Écotourisme et tourisme de nature, orientation et plan d’action 2003-2008, Direction du développement des produits touristiques, 73 p.

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vecteur de développement durable (DD), une solution de rechange à uneéconomie basée traditionnellement sur l’exploitation des ressources. Mais,dans les faits, l’écotourisme est-il créateur d’une plus-value en termes deDD ? Des auteurs (Duffy, 2002 ; Gagnon, 2004 ; Avila Foucat, 2002) ontdémontré, à l’aide de cas empiriques (Belize, Québec), que la création deparcs nationaux ou la promotion de l’activité écotouristique n’entraînaientpas forcément une meilleure protection de l’environnement2, pas plusqu’un développement durable viable des communautés locales limi-trophes (Fortin et Gagnon, 1999) ou encore un changement significatifde comportement chez les écotouristes, grands utilisateurs d’espace etd’environnement (Duffy, 2002).

Dans un contexte où l’écotourisme est une pratique de développementrelativement nouvelle (à peine trente ans), dans un contexte où elle estrattachée à une industrie touristique qui jouit d’une réputation presqueintouchable comme solution de survie pour les communautés fragilesaffectées par les inégalités du développement, nous assistons à un foi-sonnement de définitions sur l’écotourisme (Fennell, 2000). Selon cer-tains auteurs (Higham et Carr, 2003 ; Dawson, 2001), cette profusion dedéfinitions sème la confusion. S’agit-il d’une véritable confusion ou del’essence même de la dialectique ? Une sorte de dialogue faisant échoaux rapports de pouvoir d’acteurs aux intérêts multiples : opérateurs,financiers, gouvernements, écologistes, communautés locales ? Quoi qu’ilen soit, du point de vue de la recherche en sciences sociales, l’écotou-risme offre un cadre interprétatif des rapports avec la nature et des rap-ports sociospatiaux comprenant les stratégies de développement desacteurs, les interactions entre le local et le global, le privé et le public,l’individuel et le collectif.

Associer l’écotourisme au paradigme du développement durablemet en exergue les caractères dialectique et complexe de cette associa-tion. Au départ, en effet, elle contient une thèse et une antithèse : conser-ver l’environnement et le mettre en valeur (exploiter) ; favoriser à la foisles opérateurs et les communautés d’accueil ; structurer un marché (Perret)et instaurer une gouvernance environnementale citoyenne et équitable.Pas étonnant que cette dialectique donne lieu à de multiples interpréta-tions de l’écotourisme et approches du DD, selon les acteurs et leurpositionnement social (Gagnon, 1995 ; Gendron, 2004).

2. L’état problématique de dégradation environnementale de certains parcs nationaux américains,à proximité des centres urbains, et même de celui de Banff est édifiante. (Mitchell, 1994 ; Pageet al., 1996).

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C’est pourquoi il nous a semblé pertinent de porter une attentionparticulière au contenu des définitions de l’écotourisme, ce à quoi lapremière partie de ce chapitre s’attarde. Lorsqu’il est question d’écotou-risme, quels sont les référents ? À partir d’une analyse documentairebasée sur 25 auteurs, représentant en principe les grands courants quitraversent les définitions, nous tentons d’établir une typologie afin dedégager des métaprincipes communs à un ensemble donné. Dans undeuxième temps, comme le DD teinte le discours sur l’écotourisme, nousexplicitons des approches de DD, tout en faisant ressortir les liens avecl’écotourisme. Enfin, nous revenons sur l’écotourisme comme cadreinterprétatif des rapports sociaux afin de mieux situer les déclarations,les politiques ou les initiatives d’écotourisme se réclamant du DD.

La méthodologie de recherche adoptée ici en est une d’analyse decontenu. Elle est basée sur un corpus de 25 textes portant sur l’écotou-risme. Cette analyse de contenu avait pour but d’identifier les principesnormatifs et les finalités de l’écotourisme invoqués par les différentsauteurs. Le choix des 25 textes dans un vaste corpus repose sur un certainnombre de critères : 1) textes fondateurs tel celui de Boo (1990) et Ceballos-Lascuráin (1996), 2) types de réflexions théoriques et de positionnement(Breton, 2001a ; Dawson, 2001 ; Fennell, 2000 ; Wall, 1997), 3) études decas sur des pratiques écotouristiques (Avila Foucat, 2002 ; Duffy, 2002 ;Mitchell, 2001 ; Place, 1998 ; Ross et Wall, 2001), 4) documents officiels(Tourisme Québec, 2003 ; Organisation mondiale du tourisme, 2002),5) textes portant sur écotourisme et développement (Barkin, 2003 ;Gagnon, 2004 ; Garrod, 2003 ; Lequin, 2001 ; Pforr, 2001)3. Toutefois, ilfaut noter que nous n’avons pas distingué les définitions portant sur letourisme durable de celles de l’écotourisme, ce dernier étant compris dansle premier. Il ne s’agissait pas d’un facteur discriminant dans la constitu-tion du corpus. Les 25 textes représentent un échantillon représentatif desécrits sur l’écotourisme, réalisé à partir d’une bibliographie exhaustive4

(voir l’annexe I). Le corpus constitué pour les fins de l’analyse condenseplusieurs variations sur le thème de l’écotourisme, notamment celle liéeau DDV. La chronologie de publication des textes renvoie à une périodeassez récente, soit les quinze dernières années. Les textes proviennent derégions du monde variées, soit l’Europe, l’Amérique, l’Océanie et des paystant en voie de développement qu’industrialisés.

3. Voir à l’annexe I la bibliographie complète du corpus analysé.4. L’Université Otago s’est intéressée de manière exhaustive au sujet ; pour une bibliographie

exhaustive des écrits sur l’écotourisme dans le monde anglo-saxon, voir <divcom.otago.ac.nz/tourism/research/electronicpubs/EcotourismBibliography.pdf>.

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Ce chapitre vise à explorer et expliciter les liens entre écotourismeet développement durable viable. Nous faisons une distinction importanteet significative entre développement durable (DD) et développementdurable viable (DDV). Celui-ci insiste sur la dimension qualitative,sociale et située du développement dont les objectifs d’équité, de justiceenvironnementale et de qualité de vie pour l’ensemble des individus etdes populations de la planète sont au centre de toute action d’aménage-ment et de développement ; il valorise l’humain dans ses capacités demaîtriser son territoire et d’interagir, de façon responsable et solidaire,avec les multiples environnements.

L’ÉCOTOURISME : UN CONCEPT POLYSÉMIQUE TEINTÉ PAR L’EXPRESSION DES RAPPORTS SOCIOSPATIAUX

Le concept d’écotourisme a fait son apparition dans les années 1980.C’est un concept polysémique, correspondant à des réalités mouvantes,où une multitude d’approches et d’auteurs sont en concurrence, en com-pétition, afin de définir ce qu’est l’écotourisme et ce qu’il n’est pas. Ils’agit d’une lutte idéologique (non explicitée) pour fixer non seulementun contenu dominant mais, subséquemment, des modes d’exploitation etde mise en valeur, ancrés socialement et spatialement, qui canaliserontdes ressources tant matérielles qu’immatérielles. Le fondateur de l’éco-tourisme, Ceballos-Lascuráin a défini, il y a dix ans, l’écotourisme commeun tourisme responsable (nous soulignons) ayant un faible impact surl’environnement et qui procure des avantages aux populations locales :

Environmentally responsible travel and visitation to relatively undisturbednatural areas, in order to enjoy and appreciate nature […] that promotesconservation, has low visitor impact, and provides for beneficially activesocio-economic involvement of local population (Ceballos-Lascuráin,1996, p. 20),

Il est intéressant de noter que cette définition sous-tend au départtrois qualités normatives : 1) responsable, 2) faible impact environnemen-tal, 3) avantages locaux. Elle a été abondamment reprise, commentée etmodifiée. Par exemple, David Fennell (2000), lors d’une vaste recensiond’écrits sur l’écotourisme, a, lui, dénombré treize composantes :

1. l’intérêt pour la nature,

2. la contribution à la conservation,

3. la création de parcs et d’aires protégées,

1.

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4. la présence de bénéfices pour les populations locales sur un longterme,

5. l’éducation environnementale,

6. l’impact environnemental faible (non consommatrice de res-sources),

7. la responsabilité éthique,

8. la gestion de l’activité écotouristique,

9. la durabilité,

10. le côté satisfaisant et plaisant pour le touriste,

11. l’aspect culturel,

12. l’aventure,

13. l’échelle réduite du tourisme (petits projets, peu de fréquentation).

À partir de ces composantes, Fennell (2000) a formulé une définitionqui se concentre d’abord sur l’expérience touristique, et ensuite sur ladimension éthique de l’activité écotouristique, tout en intégrant une autredéfinition, soit celle du tourisme de nature :

Ecotourism is a sustainable form of natural resource-based tourism thatfocuses primarily on experiencing and learning about nature, and whichis ethically managed to be low-impact, non-consumptive, and locally ori-ented (control, benefits, and scale). It typically occurs in natural areas,and should contribute to the conservation or preservation of such areas(Fennell, 2000, p. 43).

Alors que cette définition met l’emphase sur l’expérience touristique,qui doit être respectueuse de l’environnement, Ross et Wall (1999) appré-hendent l’écotourisme d’abord comme un moyen de protéger la ressourceque sont les milieux naturels, et ce, par le biais de la création de revenussuite aux activités écotouristiques, de l’éducation à l’environnement et del’engagement des communautés locales. C’est la protection de la ressourceenvironnement qui est centrale dans cette définition de l’écotourismeplutôt que l’expérience touristique comme chez Fennell.

Notons que le vocable « développement durable » n’est pas explici-tement évoqué dans les définitions de Ceballos-Lascuráin, Fennell, Rosset Wall ; il est plutôt question d’« avantages pour les populations locales »chez les deux premiers auteurs. Toutefois, d’autres auteurs ont inclus leDD de manière plus manifeste dans le concept d’écotourisme. PourLequin (2001, p. 51), « [l]’écotourisme est une approche de développement

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qui favorise la conservation et la préservation des ressources naturellespour les générations futures (développement durable), tout en contribuantà l’amélioration des conditions et qualité de vie des populations locales(développement régional) ».

Dans le même ordre d’idées, d’autres associent l’écotourisme à ladémarche de développement local viable (Gagnon, 1995), intégrant lesocial, l’environnement et l’économie, maîtrisée par et pour la com-munauté hôte, c’est-à-dire celle qui reçoit le projet ou l’activité, afin derépondre à une amélioration des conditions de vie. À la suite de Gagnon,Cater affirme : « A useful way to discern responsible community-basedecotourism is to approach it from a development perspective, which con-siders social, environmental and economic goals, and questions how eco-tourism can “meet the needs of the host population in terms of improvedliving standards” » (1993, p. 85-86, cité par Scheyvens, 1999, p. 246).En effet, selon Barkin (2003, p. 371), si l’écotourisme devait se résumerprioritairement à mettre sur le marché une nouvelle offre touristique afinde répondre aux urbains en mal d’espaces verts, il ne serait pas viable :« Ecotourism will destroy itself unless it goes beyond offering attractiverural setttings to discontented urban denizens. It must encompass thesocial dimensions of productive organization and environmental conser-vation to offer viable livelihood to the direct producers of these services. »Le concept d’écotourisme engloberait donc, dans sa définition, l’appro-priation par les populations locales d’activités touristiques compatiblesavec leur culture et les principes de conservation de l’environnement.

La panoplie de définitions sur l’écotourisme peut aussi être regroupéeen quatre familles : 1) celles qui appuient sur la demande touristique,2) celles qui insistent sur la ressource à protéger, 3) celles qui mettent del’avant la communauté d’accueil (Lequin, 2001), 4) et, ajouterions-nous,celles qui mettent le développement durable viable comme étant l’objectifprincipal visé par l’écotourisme. Au-delà de la taxinomie, ce qu’il fautretenir, selon nous, c’est leur point commun, à savoir l’inclusion d’unedimension normative dans un segment de l’industrie touristique, reflétantune préoccupation éthique. Cette dimension normative avait déjà étésoulignée par Ceballos-Lascuráin (1996) et nous tentons d’en saisir ci-dessous les quatre métaprincipes qui maillent le concept d’écotourisme.

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LES MÉTAPRINCIPES DE L’ÉCOTOURISME

Lorsqu’une approche cognitive, une pratique ou une discipline nouvellesémergent, tout un arsenal de formalisation se met en branle. Forcément,entre en jeu une démarche normative pour définir les règles, les principes,le contenu que la nouvelle donne recouvre. Dans cette démarche norma-tive s’affrontent des paradigmes, des visions du monde et des valeurs.Cela correspond davantage au besoin (du moins pour les chercheurs quisont aussi ancrés socialement) de nommer, de définir les contours d’unenouvelle réalité, tout en laissant une souplesse pour définir un contenuqui se précise dans le temps, avec l’évolution des pratiques d’acteurs etdes connaissances produites.

Dans cette foulée, sur la base des écrits consultés, nous dégageonsquatre métaprincipes structurants de l’écotourisme :

1. la valorisation de la conservation de l’environnement ;

2. la contribution équitable au développement économique ;

3. la prise en compte et réponse aux besoins des communautéshôtes ;

4. la génération d’une expérience touristique nouvelle, authentiqueet responsable.

Des principes d’écotourisme ont déjà été identifiés par d’autresauteurs, tel le respect de l’environnement, la présence d’une expériencetouristique (Butler, 1992, cité dans Ceballos-Lascuráin, 1996) ou encorele partenariat avec les communautés locales (Wight, 1993, citée dansDawson, 2001). Toutefois, à travers l’analyse de contenu des 25 textesretenus, nous explicitons la formulation de ces métaprincipes.

2.1. VALORISATION DE LA CONSERVATION DE L’ENVIRONNEMENT

La valorisation de la conservation de l’environnement est le métaprincipele plus familier de l’écotourisme. Ceballos-Lascuráin rappelle que si letourisme est dommageable pour l’environnement, ce n’est pas le cas del’écotourisme5 (1996, p. 24). Selon ce point de vue, l’activité écotouris-tique serait non dommageable pour l’environnement. La distinction du

5. Traduction des auteurs.

2.

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père de l’écotourisme, partagée par la plupart des auteurs consultés, dis-tingue donc l’écotourisme du tourisme conventionnel et a fortiori dutourisme de masse du point de vue des impacts environnementaux. Eneffet, selon Le Cornec : « Le tourisme “conventionnel”, dans son accep-tation traditionnelle, est un élément étranger à l’environnement, qui nese préoccupe d’environnement et d’utilisation des ressources naturellesque pour mieux en tirer un profit immédiat, sans se soucier des consé-quences engendrées à court, moyen ou long terme » (2001, p. 59). Commele mentionne Breton, dans sa critique du tourisme de masse :

L’essor incontrôlé d’un seul tourisme de masse, au-delà des seuils tolérablespour les écosystèmes qu’il tend à coloniser, face aux capacités d’absorp-tion de ceux-ci, est source de dénaturation et d’acculturation des milieux,par l’altération de l’environnement naturel, la dégradation des sites et pay-sages, la destruction des ressources faunistiques et floristiques (Breton,2001a, p. 17-18).

C’est pourquoi le projet dit d’écotourisme, selon les auteursconsultés, devrait responsabiliser le voyageur afin de promouvoir la con-servation environnementale : « Environmentally responsible travel andvisitation to relatively undisturbed natural areas, in order to enjoy andappreciate nature […] that promotes conservation » (Ceballos-Lascuráin,1996, p. 20). À ce titre, les projets de parcs et d’aires protégées sedéfinissent comme des produits attrayants pour l’écotourisme : « It typi-cally occurs in natural areas, and should contribute to the conservationor preservation of such areas » (Fennell, 2000, p. 43).

Toutefois, la fréquentation touristique d’espaces protégés pour leurvaleur d’exemplification et de représentation d’écosystèmes singuliersporte son contraire : leur dégradation. Pensons seulement au cas de Banff(Canada). C’est pourquoi Boo (1990) suggère que cette valorisations’accompagne de mesures de fréquentation touristique par le biais d’unindicateur de capacités de charge afin d’établir les contraintes et les seuilsde fréquentation humaine et de contrôler les impacts négatifs. Ainsi, desétudes se sont penchées sur les impacts environnementaux du tourisme etdans certain pays, les projets touristiques, même petits, ainsi que l’exploi-tation du parc, sont soumis à la procédure d’évaluation environnementale.

Ainsi, afin d’éviter les erreurs du passé, au-delà des déclarations etpolitiques, des indicateurs environnementaux, serait-il nécessaire demettre sur pied une modalité d’évaluation et de suivi pour mesurer lesuccès ou non d’initiatives écotouristiques, et ce, en termes de valorisa-tion environnementale ? Oui. C’est du moins ce que soutient Avila Foucat

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(2002, p. 512), afin de soutenir la conservation et la réhabilitation deshabitats naturels où se déroulent des activités d’écotourisme. D’ailleursla France s’est dotée d’une charte du tourisme durable, assortie d’unegrille de critères, afin d’évaluer les impacts et les bénéfices des projetstouristiques.

2.2. CONTRIBUTION ÉQUITABLE AU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE LOCAL

Le deuxième métaprincipe qui se dégage de notre analyse, soit la contri-bution équitable au développement économique, insère l’écotourismedans les relations de marché où l’écotourisme doit viser la viabilité éco-nomique (Higham et Carr, 2003) tout en améliorant les produits et ser-vices aux touristes (Ceballos-Lascuráin, 1996 ; Higham et Carr, 2003), etce, en créant de l’emploi local (Fennell, 2000 ; Lequin, 2001). L’éco-tourisme deviendrait donc un vecteur de développement justifiant la con-servation de l’environnement pour des fins d’activités économiques.« From a conservation standpoint, nature tourism can provide an eco-nomic justification for conservation of areas that might not otherwisereceive protection […] since tourism to protected areas tends to occurin peripheral and non-industrialized regions, it may stimulate economicactivity and growth in isolated, rural areas » (Boo, 1990, p. XIV). L’argu-ment économique pour justifier un projet touristique n’est pas inattendu.Toutefois, l’adjectif « équitable » fait une différence entre tourisme etécotourisme. En effet, cela impliquerait que l’écotourisme n’est pas seu-lement une autre forme de ponction, voire d’exploitation des ressourcesnaturelles et humaines, au seul profit d’un capital financier privé, maisqu’il présuppose une répartition des profits (ils sont répartis avec la com-munauté d’accueil) et des risques (les coûts sociaux et environnementauxne reviennent pas qu’à l’ensemble de la collectivité).

L’activité écotouristique s’appuie sur des espaces dits vierges ounaturels ou exceptionnels. Mais ces espaces font aussi partie d’un cons-truit social, parfois marqué par une histoire millénaire, non visible à l’œilnu, comme les sites archéologiques, par exemple. La prise en compte desécosystèmes existants et des pratiques millénaires qui l’habitent doit-ellenécessairement impliquer toute forme d’interdiction d’exploitation ver-naculaire, voire d’activités de survie de communautés autochtones ?Selon Place, « [i]n the case of ecotourism, the elimination of competingland uses is usually required. Farming, forestry, mining and sometimeshunting are excluded from most protected wildlands » (1998, p. 108). Eu

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égard aux aires protégées et aux réserves de la biosphère, Wells et Bran-don (1992) ainsi que West et Brechin (1991) ont largement documentéles impacts négatifs du repoussement des populations locales hors desnouvelles frontières artificielles instaurés par les parcs, actions qui ontparfois conduit à des affrontements sanglants. Au Québec, ne soulignonsque le cas de la création du parc fédéral Forillon en Gaspésie et, auNouveau-Brunswick, de celui de Kouchibouguac.

La mise en place d’activités ou de lieux consacrés à l’écotourismeexigerait l’application d’un principe d’équité, voire une éthique appli-quée, non seulement en ce qui concerne le touriste, mais aussi pour lelégislateur, les opérateurs et les acteurs commerciaux impliqués dans lagestion, la prestation et le développement d’activités (Dawson, 2001,p. 41).

Enfin, la contribution de l’écotourisme à un développement écono-mique plus équitable, à toutes les échelles spatiales et catégories sociales,sous-tend une politique de redistribution de la richesse entre le local, soitla communauté hôte, le national, soit les gouvernements supérieurs, etl’international, soit les opérateurs privés. L’application d’un métaprinciped’équité entraînerait donc une redistribution de la richesse à l’intérieurmême de la communauté, notamment une diminution de la pauvreté pourles groupes sociaux fragilisés, ce qui supposerait une planification dudéveloppement local dans laquelle s’insère l’activité écotouristique afinqu’elle ne devienne pas une branche de l’industrie mondiale du tourisme.

2.3. PRISE EN COMPTE ET RÉPONSE AUX BESOINS DES COMMUNAUTÉS HÔTES

Le troisième métaprincipe révélé par les textes consultés, soit laréponse aux besoins des communautés hôtes, inscrit l’écotourisme defaçon incontournable dans la sphère du social. Si la redistribution dela richesse et la recherche d’équité sont des principes qu’un gouverne-ment peut promouvoir, la prise en compte des besoins des communautésne s’arrête pas à la stricte dimension économique. Les besoins d’édu-cation, de culture, de dignité, de respect des droits de la personne,spirituels, d’esthétique et autres sont tout aussi importants et la réponseà ces besoins peut faire la différence entre la conservation ou non de

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l’environnement. Tant que les communautés locales ne seront pas lespartenaires privilégiées et égales de la complexe équation écotouris-tique, tout projet risque le dérapage et l’entraînement d’effets pervers.Il est de coutume d’oublier que les territoires que les gouvernementsveulent élever au rang de parcs nationaux ou de réserves mondiales dela biosphère, compte tenu de leur état exceptionnel et exemplaire pourles générations futures, ont d’abord eu comme « gardiennes » ancestralesles communautés locales ou les habitants dudit territoire (Barkin, 2003).

Le métaprincipe, réponse aux besoins des communautés hôtes,impliquerait donc de tenir compte des besoins des communautés hôtes,de soutenir leur bien-être et d’améliorer leurs conditions de vie, dans uneperspective de développement local (Cater, 1993, p. 85-86, cité dansScheyvens, 1999, p. 247). Par conséquent, les communautés localesseront engagées dans la planification, le développement et l’exploitationdes activités écotouristiques (Organisation mondiale du tourisme, 2002,p. 69, et Sommet mondial de l’écotourisme de 2002). Ainsi, dans ceprocessus de renforcement des capacités et d’empowerment, les commu-nautés hôtes ne sont pas passives ou vues comme un simple réceptacleou un réservoir de main-d’œuvre à bon marché, mais associées à laplanification et la gestion des projets écotouristiques, compte tenu deleurs points de vue, de leurs valeurs et de leurs savoir-faire.

Pour ces auteurs, l’écotourisme pourrait devenir un véritable projetde territoire, de développement local, pensé par et pour la communauté.Pour mesurer l’acceptabilité sociale et la pertinence des projets, descritères et des mesures ont été proposés :

Les paramètres sociaux doivent permettre d’évaluer dans quelle mesure lesprojets touristiques peuvent s’insérer dans le milieu et les habitudes de viedes populations locales, de manière à ce que le tourisme se développeparallèlement aux autres secteurs d’activité économique et bénéficiedirectement au développement local (Vellas, 2001, p. 37).

L’intégration du projet dit écotouristique se fait donc en complé-mentarité avec les activités vernaculaires existantes (Gagnon, 2004), dansun partage du pouvoir décisionnel (Lequin, 2001) avec des retombéeséquitables (Mitchell, 2001), ce qui suppose un niveau de maîtrise localesur le projet lui-même et sur son orientation (Scheyvens, 1999).

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2.4. GÉNÉRATION D’UNE EXPÉRIENCE TOURISTIQUE AUTHENTIQUE ET RESPONSABLE

Le dernier métaprincipe commun aux écrits analysés est celui de la géné-ration d’une expérience touristique nouvelle. En effet, l’écotourisme pré-tend offrir une expérience touristique différente du tourisme de masse,surtout par le biais d’un contact différent avec l’environnement, le milieuphysique et les communautés hôtes :

Not only must it offer an opportunity to interact with nature in such a wayas to make it possible to preserve or enhance the special qualities of thesite and its flora and fauna, it must also allow local inhabitants and futurevisitors to continue to enjoy these qualities (Barkin, 2003, p. 371).

Cette mise en valeur de l’environnement par les communautéslocales repose sur une expérience de type éducatif : « the best examplesof strong ecotourism would build upon the preceding definition to maxi-mize local benefits and to include environmental and cultural educationfor tourists, as well as host communities » (Stem et al., 2003, p. 388).Cette expérience interactive et éducative avec le milieu naturel et socialà laquelle prend part l’écotouriste doit-elle avoir pour objectif premier laréponse aux besoins d’évasion et de dépaysement des touristes, commele suggère Bouin (2001, p. 25-26) ?

Mais au-delà de l’offre d’un contact culturel différent pour l’urbainou l’occidental en quête d’expériences nouvelles, peut-il y avoir un com-portement autoréflexif chez l’écotouriste ? Il semble que l’écotouristepourait faire des choix éclairés permettant de limiter volontairement lesimpacts de ses gestes et de ses choix de consommation : « Notion of self-reflexivity are particularly pertinent to ecotourism because proponents ofthat industry claim that ecotourists are keen to limit their consumption ofenvironmental resources in order to minimize the negative impacts of theirholiday-making […] In theory they will reduce their consumption of nat-ural resources, such as water and fuel wood, and they are concerned toensure that the local populace, and not multinational corporations,receive maximum financial benefits from tourism » (Duffy, 2002, p. 21).Mais selon Duffy, critique de l’écotourisme, cette partie n’est pas gagnée.

L’écotourisme ne devrait donc pas se limiter à offrir un contact avecun milieu naturel et culturel unique, mais aussi s’assurer de générer uncomportement éthique (Dawson, 2001) et responsable (Organisationmondiale du tourisme, 2002) et une expérience touristique imprégnéed’authenticité et d’ouverture culturelle.

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ÉCOTOURISME ET APPROCHES DU DÉVELOPPEMENT DURABLE VIABLE (DDV) : QUELS LIENS ?

Les quatre métaprincipes font ressortir des ressemblances certaines avecdes objectifs de DDV. Plusieurs des auteurs analysés associent directementla notion de développement durable et d’écotourisme (Avilat Foucat, 2002 ;Barkin, 2003 ; Lequin, 2001 ; Pforr, 2001 ; Walls, 1997 ; Place, 1998).L’écotourisme, de par ses principes, offre une expérience touristique ins-crite dans une dynamique de protection de l’environnement et de dévelop-pement économique et social. Mais au-delà de cette affirmation déclarative,il nous apparaissait pertinent de confronter les deux domaines par un croi-sement entre les quatre métaprincipes d’écotourisme et les quatre para-mètres du développement durable viable : la protection (précaution)environnementale, l’équité sociale, l’économie, la gouvernance territoriale.

Malgré l’apparence d’un consensus sur le DD, nombre de questionsdemeurent : de quelle durabilité est-il question ? Celle des grandes entre-prises? Celle des groupes environnementaux ? Celle, plus politique, desgouvernements ? Celle des organisations internationales, telles les NationsUnies ? C’est un secret de Polichinelle de dire qu’il existe plusieursinterprétations et, forcément, plusieurs approches du DD. Mais ce n’estpas une catastrophe, en autant que soient reconnues explicitement lesvisions du monde dont elles participent. En maillage avec l’écotourisme,comment les approches de DD et les dominantes discursives, soulignéespar les auteurs et les stratèges politiques, pour s’approprier le domainedu DD ou s’en servir, influencent-elles, dans un sens ou dans un autre,la nouvelle pratique touristique ?

D’entrée de jeu, identifions les quatre approches du développementdurable (Gagnon, 1995) : l’écologiste, l’économiste, l’humaniste et laplanificatrice (cette dernière pouvant aujourd’hui être qualifiée de poli-tique ou de gouvernance territoriale). Bien évidemment, quelle que soitl’approche de DD documentée ci-dessous, dans chacune l’ensemble desdimensions ou piliers est présent, définition même du DD oblige. Parcontre, ce qui diffère, c’est la dominante, l’angle choisi, les principes etles finalités visées (par exemple améliorer la performance environnemen-tale de l’entreprise ou encore permettre une meilleure redistribution desressources entre le Nord et le Sud). L’intérêt de croiser chaque métaprin-cipe d’écotourisme en fonction de chaque approche de DD réside dansla formulation d’un cadre interprétatif, clarifiant les tenants et les abou-tissants d’initiatives d’écotourisme présentées comme stratégie de DD(voir le tableau 1.1).

3.

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Selon nous, la documentation féconde et l’abondance de programmeset politiques encadrant l’écotourisme ne reflètent pas une confusion, maisplutôt une dialectique, expression des rapports de pouvoir (conflits) etdes visions du monde (paradigmes) mis en scène. D’où l’importance dereconnaître à quelle enseigne du DDV se rattachent les diverses définitionset assertions sur l’écotourisme.

Tableau 1.1CROISEMENT DES MÉTAPRINCIPES D’ÉCOTOURISME ET DES APPROCHES DE DD

Écologiste Économiste Humaniste

Gouvernance territoriale / planif catrice

Valorisation de la conservation de l’environnement

• Valeur intrinsèque de la nature et de la biodiversité et non prélèvement

• Parcs / aires protégées / échantillon national

• La rentabilisation économique justifie la conservation

• Protection du patrimoine naturel et culturel pour les générations à venir

• Souveraineté locale sur la gestion des ressources naturelles, où les populations sont gardiennes des milieux naturels

Contribution équitable au développement économique

• Nouveaux produits et secteur privé

• Consommateur = moteur écotouristique

• Reconversion

• Partage des bénéfices en faveur du développement local

• Gestion éthique démocratique

• Intégration aux plans de développement

• Normes juridiques

Réponse aux besoins des communautés

• Création d’emploi

• Amélioration la qualité de vie

• Préservation de l’identité culturelle et des pratiques

• Valorisation des savoirs vernaculaires

• Équité et justice

• Planification intégrant communauté locale et besoins des touristes

• Acceptation / initiation des projets par le local

• Empowerment• Participation

citoyenne

Génération d’une expérience touristique

• Impact nul • Besoins d’évasion des urbains

• Voyageur responsable

• Source d’information et d’éducation

• Atténuation des usages conflictuels

• Faible impact de l’activité

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3.1. ÉCOTOURISME ET APPROCHE ENVIRONNEMENTALE DU DD

L’approche écologiste ou environnementale du DDV est sans doute laplus connue. Elle met l’emphase sur la protection des écosystèmes et surleur pérennité comme motivation à l’intervention. Le développement estdurable seulement s’il permet aux écosystèmes et aux ressources qui ysont rattachées de durer dans le temps, notamment pour répondre à unefonction économique, soit celle de l’exploitation de la ressource. Seloncette approche, les systèmes social et économique seraient situés à l’inté-rieur de la biosphère et constitueraient des sous-systèmes plus ou moinsdéterminés par l’environnement biophysique.

Cette approche, appliquée à l’écotourisme, signifie que l’orientation– de la politique ou du projet ou de la définition – privilégie davantagela valorisation et la préservation de l’environnement. Les auteurs accordentalors une valeur intrinsèque à l’environnement (Wight, 1993, cité dansDawson, 2001) et à la biodiversité (Breton, 2001a) afin de protégerl’environnement pour lui-même, et ce, à l’aide de la création de parcs etd’aires protégées, à l’échelle nationale.

L’expérience touristique devient alors une solution de rechangeà l’exploitation extrusive de la forêt, du sous-sol ou de la mer pour desfins économiques, et le plus souvent à l’échelle industrielle. Les activitésécotouristiques viseraient donc à être non consommatrices (Fennell,2000 ; Stem et al., 2003), visant l’impact zéro, sans traces, pour préserverles milieux naturels sensibles, car ces derniers sont vulnérables aux pres-sions engendrées par l’activité humaine (Wall, 1997). L’écotourisme,selon une approche environnementale du DD, mettrait donc davantagel’accent sur la conservation. Une des critiques généralement formuléesest qu’elle priorise le milieu biophysique comme une fin en soi, auxdépens des problèmes sociaux et économiques :

Individual interventions aimed at nature protection can exacerbate ratherthan alleviate social justice problems. As mechanisms of resource control,conservation programs tie up natural areas that are highly sought after byresource-dependent agrarian communities (Wilshusen et al., 2003, p. 1-2).

Cette approche met l’environnement au centre des préoccupationsafin de protéger les milieux fragiles et la biodiversité, mais elle faittoutefois l’impasse sur les coûts économiques et sociaux de l’écotourismeet occulte le milieu humain et ses besoins.

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3.2. ÉCOTOURISME ET APPROCHE ÉCONOMIQUE LIBÉRALE DU DD

L’approche économique libérale s’appuie sur le marché, la technologieet la modernisation de l’appareil productif comme voies à privilégier pourrenouveler et redéployer le développement et surtout la croissance desentreprises. C’est par le mécanisme de la croissance et la redistributionde ses fruits que les besoins fondamentaux pourraient être comblés etque les ressources nécessaires pour préserver l’environnement seraientdisponibles. Autrement dit, les travaux s’inscrivant dans cette approcheinsistent davantage sur l’importance de modifier le rythme et la manièred’exploiter les ressources naturelles afin d’assurer la durabilité des res-sources sur une plus longue période de temps, pour des fins de croissanceéconomique (Gagnon, 1995). Selon cette approche, la consommation etla croissance ne sont pas remises en question (Gendron, 2004), maisl’appareil productif se modifierait, notamment par l’intégration desexternalités dans l’équation économique, afin de faire durer l’usage desressources nécessaires à la production.

Cette approche économique libérale du DD, croisée à l’éco-tourisme, signifie que c’est d’abord la rentabilisation économique quijustifierait la conservation (Boo, 1990 ; Garrod, 2003 ; Organisation mon-diale du tourisme, 2002 ; Stem et al., 2003). Ainsi le renforcement dudéveloppement de l’écotourisme passerait par une équation entre avan-tages économiques et conservation de l’environnement (Garrod, 2003,p. 42). En effet, le métaprincipe de valorisation de la conservation estalors relié à la génération possible de revenus, à son potentiel de viabilitééconomique : « Ecotourism is promoted as a means of ensuring that con-servation is financially viable through the development of revenue-generating schemes » (Duffy, 2002, p. 99).

Le métaprincipe de contribution positive et équitable au dévelop-pement économique s’exprime dans la création de nouveaux produitspour les touristes et écotouristes et dans leur mise en marché (Highamet Carr, 2003 ; Lequin, 2001) par des acteurs privés (Duffy, 2002). Dansl’approche économique libérale, c’est le consommateur, par l’expressionde sa demande, qui est le moteur de l’écotourisme (Ceballos-Lascuráin,1996 ; Duffy, 2002). Cela crée donc une monétarisation des activitésécotouristiques (Le Cornec, 2001), selon un objectif de reconversion éco-nomique basée sur le développement d’activités économiques complé-mentaires et de facteurs de diversification (Duffy, 2002 ; Organisationmondiale du tourisme, 2002 ; Ross et Wall, 1999). L’écotourisme devient

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ainsi un secteur économique parallèle (Vellas, 2001) aux secteurs tra-ditionnels d’activité touristique. Cette monétarisation de l’activité éco-touristique se fait à partir d’une logique d’usager/perturbateur/payeur :

Une activité qui se prétend écotouristique, mais qui ne fait pas payerl’usager pour le service offert (l’ouverture d’un espace naturel) ou pourcompenser les nuisances inévitablement générées (application du principepollueur-payeur dans sa variante usager-perturbateur-payeur), n’est pas uneactivité écotouristique (Le Cornec, 2001, p. 63).

Quant au métaprincipe de prise en compte et de réponse aux besoinsdes communautés hôtes, il s’exprime principalement par la logique de lacréation d’emploi (Fennell, 2000 ; Lequin, 2001) pour les résidents descommunautés hôtes, leur permettant ainsi de profiter de l’activité écono-mique générée par l’écotourisme.

Le principe de générer une expérience touristique « alternative »renvoie aux touristes et aux écotouristes, qui sont le moteur de l’écotou-risme, selon l’approche économique et libérale du DD. C’est donc uneforme d’écotourisme centrée d’abord sur la création d’une expériencetouristique visant à combler les besoins d’évasion des urbains qui estalors proposée. Duffy (2002), dans son étude de l’écotourisme au Belize,critique cette approche au sens où l’écotourisme ne serait qu’une stratégietrès faible en terme de durabilité, car elle reproduirait les relations iné-gales entre pays riches et pays pauvres. Selon cet auteur, la protection del’environnement est principalement un outil de marketing pour attirer lesriches touristes des pays développés, créant ainsi des distorsions impor-tantes dans les critères guidant la protection des écosystèmes :

The establishment of ecotourism ventures is very clearly related to ideasof valuing the environment as an economic resource because it means thatconservation has to be financially sustainable. The difficulty with this isthat only environments and landscapes that are attractive to ecotouristswill be conserved, regardless of their importance to a wider ecosystem(Duffy, 2002, p. 155).

Cette approche du DD limiterait la capacité des communautéslocales à maîtriser leur développement devant autant de paramètres exo-gènes que sont les touristes, les modes, les grossistes en voyage, etc. Là,ce sont l’offre et les choix des consommateurs qui guident le développe-ment de l’écotourisme, peu importe la capacité des communautés localesà bénéficier réellement de cette activité économique. Ces observations

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révèlent encore un aspect de la dialectique de l’écotourisme. Mais l’éco-touriste, par son choix volontaire, peut-il véritablement s’assurer que lescommunautés d’accueil profiteront de son choix ? « Non », répond Duffy :

The spiral of impacts is a process that the individual ecotourist cannotcontrol ; he or she can only make choices about consumption of goods andservices from the range already on offer, and these may be provided byBelizeans, foreign nationals or transnational corporations. This means thattheir power as a consumer is curtailed by the very businesses that decidein advance whether local people will benefit (Duffy, 2002, p. 210).

Cette approche du DD donne une valeur économique à la conser-vation de l’environnement en insistant sur la capacité de l’écotourismede générer des revenus et des retombées économiques. Toutefois, la placelaissée au marché et à la demande touristique occulte plus ou moins lesbesoins et les capacités des communautés hôtes de mieux maîtriser leurterritoire, selon leurs aspirations et leur culture.

3.3. ÉCOTOURISME ET APPROCHE HUMANISTE DU DD

L’approche humaniste, comme son nom l’indique, met l’humain aucentre des préoccupations du développement durable viable. S’il y asurexploitation des ressources naturelles et dégradation des écosystèmes,c’est à cause des inégalités entre les humains, inégalités qui poussentles plus démunis à des pratiques non durables. L’approche humanistetente de réduire les inégalités entre les pauvres et les riches au niveauéconomique, mais aussi au niveau de l’accès aux ressources naturelleset aux services sociaux telles l’éducation et la santé : « les humanistesmettent de l’avant des valeurs d’équité et de convivialité afin d’amoindrirl’écart qui sépare les pauvres des riches, et ce, en privilégiant d’abordune utilisation humaine et prudente de l’environnement tout en mainte-nant une croissance économique contrôlée (Gagnon, 1995). C’est icil’engagement des populations locales et leur identification comme par-tenaires, selon des principes d’équité, qui justifient ou non l’acceptationde l’initiative écotouristique.

Appliqué à l’écotourisme, le métaprincipe de la valorisation de laconservation se manifeste par l’expression d’une volonté de protectiondu patrimoine naturel et culturel pour les générations à venir (Breton,2001a ; Lequin, 2001). L’environnement n’est plus seulement un écosys-tème à protéger, mais un patrimoine commun à protéger dans le tempspour les populations actuelles et futures.

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Le principe de contribution équitable au développement économiquefait alors appel à la volonté de créer un processus ouvert, équitable etdémocratique de partage des avantages de l’écotourisme (Avila Foucat,2002 ; Lequin, 2001 ; Mitchell, 2001) inséré dans une stratégie dedéveloppement local :

It was found that a community more highly integrated in its local tourismindustry may at least reduce the potential for negative impacts in theprovision of local tourism services and products. Likewise, a more equita-ble sharing of decision-making power, combined with a relatively unifiedcitizenry, should result in a more balanced distribution of tourism benefits(Mitchell, 2001, p. 158).

L’approche humaniste insiste sur le niveau de réponse apportée auxbesoins des communautés locales d’accueil. Les initiatives d’écotourismeviseraient alors à améliorer la qualité de vie des communautés localespar l’établissement d’une équité et d’une justice sociale et environnemen-tale (Barkin, 2003 ; Ceballos-Lascuráin, 1996 ; Dawson, 2001 ; Organi-sation mondiale du tourisme, 2002 ; Scheyvens, 1999 ; Stem et al., 2003),d’une valorisation des savoirs vernaculaires (Gagnon, 2004), selon unobjectif de préservation des pratiques et des identités culturelles (AvilaFoucat, 2002 ; Breton, 2001a ; Organisation mondiale du tourisme, 2002).Toutefois, selon l’approche humaniste du DD, les initiatives d’écotou-risme sont désirées par les communautés hôtes et non imposées par desintérêts extérieurs : « Thus, the introduction of ecotourism can encouragesocio-economic development, if it is desired by the community. Externaljudgments and assumptions about the benefits of development, howeverconceived, should be avoided » (Ross et Wall, 1999, p. 128).

L’expérience touristique, elle, est conceptualisée comme étant unesource d’information et d’éducation (Breton, 2001a ; Garrod, 2003 ; Stemet al., 2003) pour des voyageurs responsables (Ceballos-Lascuráin, 1996 ;Organisation mondiale du tourisme, 2002).

Une des critiques avancées concernant l’approche humaniste del’écotourisme est que l’expression « communauté locale » peut donnerl’impression d’un tout unifié vivant en symbiose avec son environnement.En effet, tel que le souligne Belsky (2003), les communautés locales sontun lieu d’intersection entre plusieurs groupes et intérêts divergents ayantchacun leur plan d’action ainsi qu’un lieu de manifestation des fracturesentre les classes, les sexes, les familles et les affiliations politiques. Favo-riser la communauté locale d’accueil signifierait alors l’isoler de l’envi-ronnement microrégional et régional duquel elle fait partie. Favoriser ungroupe social plutôt qu’un autre serait alors porter un jugement externe.

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3.4. ÉCOTOURISME ET APPROCHE PLANIFICATRICEDE GOUVERNANCE TERRITORIALE DU DD

L’approche planificatrice ou de la gouvernance territoriale est uneapproche du développement durable qui s’approprie les impératifs glo-baux du développement durable et tente de les appliquer sur une baseterritoriale en concertation avec l’ensemble des acteurs, selon une logiquede projet de territoire et de démocratie participative. C’est une approcherationnelle qui conjugue outils de planification, d’évaluation et d’amé-nagement et stratégies d’acteurs : l’orientation de cette approche seraitdavantage opérationnelle et normative et viserait davantage à identifierles moyens et les mécanismes pour améliorer les politiques et le proces-sus décisionnel, dans le cadre d’une gestion environnementale intégrée(Gagnon, 1995). Cette approche met aussi l’emphase sur les institutionsexistantes ou à créer pour opérationnaliser le développement durable etla prise de décision démocratique, selon un autre principe du DD, soitla subsidiarité.

Dans l’approche de la gouvernance territoriale, le métaprincipe deconservation s’accompagnerait d’une démarche de souveraineté locale(Avila Foucat, 2002) par rapport à la gestion des ressources naturelles etécotouristiques où les populations sont historiquement les gardiennes desmilieux naturels exceptionnels (Gagnon, 2004). Le principe de contribu-tion positive et équitable au développement économique se caractérisedans cette approche par une gestion éthique (Fennell, 2000), démocra-tique et consultative (Lequin, 2001) du patrimoine environnemental etculturel (Breton, 2001a) pour offrir une diversité d’activités récréatives(Dawson, 2001) dans la planification des éléments opérationnels et nor-matifs (Mitchell, 2001) en les intégrant aux plans territoriaux de déve-loppement (Avila Foucat, 2002) et à la dynamique des réseaux locaux :« Social cohesion towards a community project, sovereignty of the use ofnatural resources, and commitment for conservation of the environmentand local culture are indicators for a sustainable community manage-ment» (Avila Foucat, 2002, p. 520).

C’est donc une vision globale de l’ensemble des activités sur unterritoire donné qui guiderait la planification de l’écotourisme, selon unelogique d’intégration aux autres activités socioéconomiques présentesdans la communauté hôte : « Although ecotourism is an ideal economicactivity to promote both sustainability and development, it cannot besuccessful in isolation. Such an activity must be actively integrated intoa broader institutional nexus in which diversified production and social

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organization are reinforced » (Barkin, 2003, p. 373). L’écotourisme seraitalors encadré par des normes juridiques qui sanctionnent les impératifsde protection de l’environnement et les espaces naturels et les ressourcesde biodiversité (Breton, 2001a, p. 16).

Le métaprincipe de prise en compte et de réponse aux besoins descommunautés hôtes passerait alors au minimum par l’acceptation desprojets écotouristiques par les communautés locales (Higham et Carr,2003 ; Vellas, 2001) qui gèrent l’exploitation de leur territoire, en con-formité avec les autres niveaux territoriaux (Organisation mondiale dutourisme, 2002), selon une finalité d’empowerment ou de renforcementde leurs capacités (Gagnon, 2004 ; Scheyvens, 1999) :

On peut en effet être tenté de dépasser la perception proprement etprincipalement écologique pour y intégrer plus directement la démarcheparticipative qui paraît devoir être celle de ces populations, soucieuses d’untourisme qui ne soit ni unilatéral, ni extraverti, ni a-culturant, mais quipermette à l’inverse la rencontre de valeurs et de modes de vie différents(Breton, 2001a, p. 16).

C’est une gestion intégrée des besoins des communautés locales quiest donc mise de l’avant, mais qui doit aussi prendre en compte les besoinsdes touristes (Barkin, 2003) qui prennent part aux activités d’écotourisme.

Le métaprincipe de générer une expérience touristique nouvelles’exprime en tentant d’intégrer ces activités écotouristiques aux autresusages du territoire avec des mesures d’atténuation des usages conflic-tuels (Place, 1998) afin de diminuer l’intensité de l’impact socioenviron-nemental des activités écotouristiques en synergie avec les autres usagesdu territoire (Ceballos-Lascuráin, 1996 ; Stem et al., 2003).

L’ÉCOTOURISME : UN CADRE INTERPRÉTATIF

Ce chapitre tente d’offrir un cadre interprétatif de la nébuleuse éco-touristique, en croisant les définitions de l’écotourisme avec chacune desgrandes approches du développement durable (DD). Bien que cet exercicethéorique semble à première vue ajouter à la complexité, il met en reliefles divergences et les convergences ; il classifie, décompose et recompose.Face à cet ensemble, nous constatons une parenté entre des définitionsd’écotourisme et des approches de DD. Toutefois, cet ensemble ne formepas un seul et même tout. Il y a des auteurs pour qui l’écotourisme est

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un vecteur de DD, voire une solution de rechange au tourisme de masse.Pour d’autres, cela constitue un nouveau segment de marché. Tout demême, des lieux communs se dégagent chez l’ensemble des auteurs con-sultés. Alors que Fennell (2000) avait reconnu treize composantes dansla panoplie des définitions et discours sur l’écotourisme, nous les avonsregroupées autour de quatre ancrages fondateurs : 1) la valorisation de laconservation de l’environnement ; 2) la contribution équitable au dévelop-pement économique ; 3) la prise en compte et réponse aux besoins descommunautés hôtes ; 4) enfin, la génération d’une expérience touristique« alternative », authentique et responsable.

L’analyse de contenu des textes choisis (Annexe 1) permet de cons-tater que ces quatre ancrages ou métaprincipes sont traités par trois desquatre approches du développement durable viable : économique, huma-niste et de gouvernance territoriale. Cela signifie donc que la définitiond’écotourisme, centrée exclusivement sur la protection de l’environne-ment ou sur le contrôle de l’impact par le touriste, bien que pertinente,ne constitue pas de l’écotourisme à proprement parler, car la prise encompte des communautés hôtes et la génération d’une expérience touris-tique nouvelle n’y sont pas valorisées et présentes. Du moins est-ce unrésultat induit sur la base de notre échantillon représentatif. Cela rejointune des critiques du DD voulant que ce dernier ne se résume pas à laprise en compte de la variable environnement dans la prise de décision.

Le croisement entre les quatre approches de DD et les quatre ancragesfondateurs de l’écotourisme montre toutes les nuances existantes del’écotourisme. Elles témoignent d’autant de logiques/pouvoirs d’acteurs,de finalités, voire de paradigmes. Autrement dit, les nombreuses défini-tions de l’écotourisme font place à des interprétations ontologiques diversesrenvoyant à autant de paradigmes de développement. Ce constat débou-che sur l’importance de confronter les contenus, les modalités de miseen œuvre de l’écotourisme de même que l’évaluation de ses impactssociaux, économiques et environnementaux, eu égard aux objectifs dedéveloppement que les acteurs cherchent à atteindre. L’écotourisme, toutcomme le développement durable, ne constitue pas une seule et mêmeentité conceptuelle. Ils sont traversés par des rapports sociaux et spatiauxqui en déterminent l’orientation et les finalités.

La présente analyse induit un cadre interprétatif et réflexif, plutôtqu’une simple typologie des définitions sur l’écotourisme. Ce cadre met enlumière le caractère dialectique de l’écotourisme de même que les domi-nantes idéologiques et ontologiques sur lesquelles reposent les définitions.

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Toutefois, pour devenir objet d’application, par exemple afin d’évaluer etde discuter ouvertement le bien-fondé de tel ou tel projet (éco)touristiquedans une communauté donnée, le cadre interprétatif devrait être associéà une grille d’enjeux et d’indicateurs de DDV, évalués conjointement avecles communautés d’accueil ou participantes. Ce chapitre ouvre donc ledébat sur les directions à insuffler à l’écotourisme, à ses pratiques, auxpolitiques qui le soutiennent, et ce, afin de pouvoir l’intégrer à une démarchetransversale et participative de développement durable viable.

BIBLIOGRAPHIE

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ANNEXE I : BIBLIOGRAPHIE DES TEXTES ANALYSÉS

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22Chapitre

Tourisme, culture et environnementUne problématique identitaire ?

Jean-Marie BretonProfesseur à l’Université des Antilles et de la Guyane (UFR des sciences juridiques et économiques de la Guadeloupe), directeur du CREJETA (Centre de recherches et d’études juridiques sur l’environnement, le tourisme et l’aménagement), président de la Section Caraïbe de la SFDE (Société française pour le droit de l’environnement)

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Résumé

Le tourisme est souvent présenté comme une possibilité d’impulsion etde financement d’un développement qui se veut désormais durable etviable. Il a de fait connu, dans les départements français d’Amérique(DFA), une expansion aussi difficilement maîtrisée que peu cohérente, audétriment du patrimoine environnemental, insulaire et littoral en l’occur-rence, en Guadeloupe notamment. Bien commun de tous et ancrage descultures comme des identités, ce patrimoine subit des atteintes et des agres-sions graves, en termes de dégradations multiples, voire de destructionsirréversibles.

La crise récurrente qu’y traverse le tourisme classique conduit à penserque la promotion et la pérennisation d’un tourisme durable, en cohérenceavec les exigences d’un développement intégrant désormais les préoccu-pations et contraintes environnementales, appelle des formes parallèlesde tourisme, parmi lesquelles l’écotourisme occupe une place de choix.La fonction paradigmatique impartie à ce dernier, autant que sa dimen-sion mythique, ne le mettent toutefois pas à l’abri des risques de déstruc-turation sociale et d’altération culturelle.

L’ambiguïté constatée à cet égard, sur le plan socioculturel, tient à ceque la crise du tourisme procède elle-même d’une crise identitaire latente,qu’elle a pour effet d’amplifier, sinon de cristalliser, sur le plan du véculocal du phénomène touristique autant qu’à travers les rencontres et leséchanges qu’il suscite. L’opportunité, et donc la viabilité, de nouvellesformes de tourisme supposent dès lors une valorisation du patrimoineenvironnemental par sa réappropriation par les populations locales, à lafois condition et expression d’une reconstruction identitaire dont dépendentla crédibilité et l’effectivité d’un développement touristique durable.

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Le tourisme est fréquemment présenté comme une solution pourl’impulsion et le financement d’un développement que, depuis peu, l’onveut par définition « durable ». Il a de fait connu une expansion aussidifficilement maîtrisable qu’incohérente, au détriment du patrimoineenvironnemental, insulaire et littoral en particulier, comme c’est le casdans les départements français d’Amérique (DFA). Bien commun detous et ancrage des cultures comme des identités, ce patrimoine en subitdes atteintes et des agressions particulièrement graves, en termes dedégradations multiples, voire de destructions irréversibles.

La soumission nécessaire de l’activité touristique aux exigences deprotection, de conservation et de gestion reproductible de la biodiversitéet du patrimoine culturel, à travers sa compatibilité et sa mise en cohé-rence avec les réglementations protectrices de l’environnement, doitgénérer des approches, des stratégies et des comportements nouveaux. Ilen va ainsi des politiques publiques comme de la gestion opérationnelle,favorables à l’optimisation du cadre et de la qualité de vie des hommes.Le « développement touristique durable » apparaît alors comme participantd’un développement plus global à dimension holistique.

La démarche écotouristique répond à ces préoccupations et constitueun défi stimulant, pour les opérateurs du tourisme comme pour les acteursde l’environnement, et une opportunité de « réappropriation » de leurmilieu de vie par les populations locales. Il convient alors d’en prendreen compte la signification et la portée, dans sa dimension paradigmatique,afin d’en déterminer la validité dans le cadre de référence, au regard desdéfis et des enjeux d’une gestion des ressources touristiques au serviced’un développement durable et viable.

La Guadeloupe offre un exemple significatif des problèmes etdifficultés auxquels peut se heurter l’activité touristique dans certainsÉtats ou territoires qui disposent d’un patrimoine environnemental excep-tionnel, propre à dynamiser l’offre touristique, et notamment une gammed’aires protégées aussi riche et attrayant que diversifié1.

1. Comprenant notamment ce qui est jusqu’à présent le seul Parc national de l’outre-mer français.

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La crise profonde qu’y traverse toutefois le tourisme2, porteuse deconséquences négatives pour le développement de l’archipel, n’est passans rapport avec une crise « identitaire » plus générale, dont les impactssur la relation accueil-service constituent un handicap pour la promotionet la valorisation de l’activité touristique.

Celle-ci y a atteint son apogée au cours de la décennie 1990, pourdépasser le million de visiteurs étrangers, séjours et croisières inclus, cons-tituée en majeure partie par un tourisme de masse en provenance de lamétropole, ciblé sur les classes moyennes. Elle connaît, depuis l’aube desannées 2000, une crise grave et récurrente, envers laquelle l’attitude del’« hôte » guadeloupéen n’est pas dépourvue d’ambiguïté. Les formulesalors recherchées en direction d’un tourisme alternatif mieux maîtrisé etsusceptible de renouveler en partie l’offre, à travers la démarche d’éco-tourisme notamment3, ne sont pas dépourvues d’intérêt. Mais demeure-raient-elles par définition marginales et donc insuffisantes pour pouvoir àelles seules inverser le mouvement de déclin constaté ?

On ne peut dès lors faire l’impasse sur une réflexion relative à laperception et à l’insertion du tourisme dans le cadre de vie et dans levécu identitaire des populations locales. En dépendent largement la signi-fication et la portée de la démarche touristique, dans sa dimension socio-culturelle, rapportée à la problématique environnementale4.

2. Le démarrage d’activités touristiques extraverties date grosso modo du milieu des années1950, avec la mise en place d’une politique touristique appuyée sur la participation de pro-fessionnels, dans le souci de diversifier une économie jusque-là quasi exclusivement baséesur les productions agricoles (canne, sucre, banane, principalement). Après une premièrephase de développement largement axée sur un tourisme de luxe à l’intention de la clientèlenord-américaine, les pouvoirs publics vont s’attacher à développer un tourisme plus modeste,dans les années 1970-1980, basé sur la petite et moyenne hôtellerie.

3. Cf. J.M. Breton (dir.) (2001). L’écotourisme : un nouveau défi pour la Caraïbe ?, Paris,Karthala, série « Îles et pays d’outre-mer », vol. 1.

4. La présente réflexion reprend pour partie et prolonge, sous un angle différent, une étudepubliée dans la revue québécoise Téoros (2004a), « Paradigme d’écotourisme et sociétés tra-ditionnelles en mutation. Le cas de l’outre-mer français », vol. 3, no 2, p. 54-60. Également,voir : J.M. Breton (2004b), « L’écotourisme entre mythe et paradigme : quels enjeux et défispour les régions ultra-périphériques ? », dans J.M. Breton (dir.), Tourisme, environnement etaires protégées, Paris, Karthala, série « Îles et pays d’outre-mer, » vol. 3, p. 497-519.

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LE CHAMP PROBLÉMATIQUE : DE LA CRISE DU TOURISME AU TOURISME DURABLE

La relation du tourisme à l’environnement procède d’une approched’essence dialectique, dès lors qu’elle repose sur un faisceau complexed’influences réciproques, révélatrices de phénomènes d’intercausalitéssouvent déterminants (au sens premier et fort du terme). Elles s’exprimentdans les impacts croisés à la fois de l’activité touristique sur la dégradation,ou à l’inverse la conservation, de l’environnement, et des exigences dela protection et de la valorisation des ressources environnementales surl’objet, les formes et la régulation de l’activité touristique.

1.1. LE TOURISME SANS L’ENVIRONNEMENT : UN TOURISME EN CRISE ? L’EXEMPLE DE LA GUADELOUPE

1.1.1. Les carences du dév eloppement touristique

Du déficit culturel à la marginalisation de l’environnement

Sous réserve de revenir sur les implications socioculturelles entropiquesgénérées par l’activité touristique5, on peut se demander si le développe-ment du tourisme présente toujours en soi une menace à l’endroit desvaleurs identitaires locales. Aucune culture ne saurait en effet survivre àl’absence de contacts et d’échanges, indispensables pour en permettrel’évolution et l’adaptation, sauf à se scléroser et à péricliter par excèsd’endogamie.

La tradition comme le passé se nourrissent au contraire d’une dyna-mique de reconstruction et d’enrichissement permanents. Mais l’authen-ticité proclamée et mythifiée ne saurait qu’être un leurre, dès lors quebeaucoup d’éléments de la culture « locale » ont en réalité une origineexogène et ont été réappropriés au fil des temps par les traditions qu’ilsont contribué à construire6.

Le tourisme serait ainsi de nature à permettre une réappropriation7 del’environnement et de l’espace culturel et écologique par des communautésdont il peut contribuer à raviver les traditions et, partant, à cimenter les

5. Infra, voir le point 2.6. Le salako, coiffure traditionnelle des pêcheurs de Terre-de-Bas, aux Saintes, a en réalité été

importé dans l’île il y a quelques dizaines d’années à peine, lorsque des travailleurs annamitessont venus y apporter leur main-d’œuvre.

7. Infra, voir le point 2.2.

1.

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solidarités à travers des actions partagées de promotion et de valorisationdu patrimoine8 (réhabilitation de bâtiments et/ou de productions tradition-nels, préservation et exploitation des ressources de biodiversité, aména-gement et mise en valeur d’espaces protégés, etc.)9. Il ne saurait donc êtreaccablé de tous les maux auxquels on imputerait un abâtardissementculturel qui lui est largement étranger.

L’idée s’impose que la Guadeloupe, terre d’exil et de souffrancepour les esclaves dont sont issues majoritairement les populations actuelles,n’a jamais été considérée comme leur terre. En revanche, l’investisse-ment affectif et identitaire s’est réalisé sur des espaces fonciers coutu-mièrement appropriés, sur des lopins de terre souvent acquis au prix dela douleur et du sang, symboles d’une émancipation et d’une libertéchèrement conquises ; espaces personnels de l’individu et du groupesolidaire, familial en particulier, auquel il est lié.

L’espace « public », forcément résiduel, demeure à l’inverse étrangerà cette démarche et à cette appropriation, bien d’un État par définitionextériorisé et donc « autre ». Il ne saurait alors s’imposer envers lui aucundevoir patrimonial, a fortiori civique, ce qui explique des comportementsd’indifférence voire d’ignorance délibérés. Ce déficit d’appropriation decet espace détermine l’absence d’attitude positive et volontariste enversl’environnement et le patrimoine collectifs, et donc de respect, de pré-servation et de valorisation de celui-ci au profit d’une démarche à buttouristique ou écotouristique10.

Enjeux socioéconomiques et politiques publiques en matière de tourisme

Un certain nombre de questions demeurent à cet égard en suspens. On peuttout d’abord se demander pourquoi la loi d’orientation pour l’outre-mer11

(LOOM) se concentre principalement sur des mesures déjà appliquées de

8. Sur cette notion, qui appelle de longs débats, voir en particulier L. Noppen et L.K. Morisset(2003), « Le patrimoine est-il soluble dans le tourisme ? », Téoros, vol. 22, no 3, p. 57-59 ;également, S. Jérémie, « Patrimoine et développement durable », communication aux« Assises de la recherche en Amazonie », Plateau des Guyanes, Cayenne, octobre 2003, àparaître dans Actes, Éd. Conseil régional de Guyane, 2004.

9. Dans certains cas, le développement du tourisme peut effectivement amener à préserver despatrimoines culturels ou monumentaux qui auraient été perdus sans cela. Il peut y avoir unecertaine forme de réappropriation culturelle du passé, même si le regard du tourisme modifieforcément l’image de ce passé. D’autre part, la collectivité peut se reconstituer d’une manièreassociative autour des actions de gestion des ressources touristiques et écotouristiques.

10. Infra, voir le point 2.2.11. Loi no 2003-60, du 21 juillet 2003 (J.O.R.F., 22.07.2003).

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défiscalisation et d’incitation à l’embauche, alors qu’il conviendrait demettre en place les moyens juridiques et incitatifs d’un tourisme assis surle développement durable, le respect de l’environnement et l’éthiquesociale.

On peut également rester sceptique devant la multiplication, pourdes raisons inavouées de rentabilité à court terme, de projets de grandesunités voire de complexes touristiques disproportionnés, assortis d’équi-pements publics surdimensionnés, sans souci d’ancrer la démarche tou-ristique dans la durée ni dans un processus de développement durable.On sait que de tels projets, largement extravertis, aussi irréalistes quedifficilement maîtrisables par les acteurs locaux du tourisme, sont sus-ceptibles d’engendrer des conséquences néfastes tant pour l’environ-nement qu’envers la cohérence autant que la dynamique sociale12. Lapriorité s’impose à l’inverse d’associer, d’impliquer et de responsabiliserles populations dans la sauvegarde du patrimoine local et dans la promotiond’échanges culturels porteurs d’enrichissement mutuel.

On peut enfin regretter que l’accent ne soit pas plus systématiquementmis sur le développement et la promotion d’un tourisme de proximité,intercaribéen, plus soucieux des priorités internes à l’archipel et de laredistribution des retombées et des bénéfices du tourisme au profit del’économie locale. Il est en effet manifeste que le tourisme quasi unila-téralement généré par la métropole, insuffisamment diversifié et profitantmajoritairement à des groupes et à des intérêts financiers extérieurs ouétrangers a atteint ses limites.

Le risque est que les politiques publiques du tourisme deviennent– ce qu’elles sont déjà souvent – les otages d’une politique «politi-cienne», qui s’oppose à sa gestion saine et maîtrisée. En matière depromotion du tourisme, en liaison ou non avec celle de l’environnementet des ressources du patrimoine local, les cas d’attitudes radicalementdifférentes, voire antagonistes, dans des communes guadeloupéennesvoisines, sont fréquents13.

12. Dégradation des ressources naturelles, augmentation des nuisances et des pollutions, déstruc-turation sociale, production d’attitudes de rejet fondées sur un sentiment d’expropriation etde spoliation, etc.

13. L’exemple des communes de Terre-de-Haut et de Terre-de-Bas, aux Saintes, est tout à faitrévélateur de telles attitudes.

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On y verra l’expression d’un conflit classique et permanent, dont ladimension paradoxale ne l’est qu’en apparence. Il procède de la dialec-tique complexe de l’économique et de l’écologique, de l’aménagementet de la protection, du développement et de l’environnement, sauf à inté-grer celui-ci à celui-là, condition à la fois d’un développement socio-économique viable et d’un développement touristique durable.

Les retombées positives d’une médiatisation élargie et renforcéed’une politique délibérée et dynamique de promotion et de facilitationd’un tourisme aux dimensions culturelle et environnementale sont incon-testables. Malgré cela, la plupart des collectivités locales guadelou-péennes continuent de faire preuve en la matière d’une « frilosité » quine laisse pas de surprendre eu égard aux effets positifs de toute naturequi pourraient en être attendus en termes de développement économiquecomme de valorisation socioculturelle.

1.1.2. Les facteurs de crise

Ils tiennent à des causes diverses et cumulées, qui peuvent logiquementvarier en considération du lieu, du moment et des données politiques,économiques, sociales et culturelles propres au contexte envisagé. Sontentre autres en cause à cet égard, alternativement ou cumulativement, lacapacité de transports, la qualité des infrastructures d’accueil, l’implan-tation des centres touristiques, la nature des offres touristiques, les rela-tions avec les populations locales, les perturbations dues aux mouvementssociaux, les coûts de la main-d’œuvre et des services, voire l’approcheet la perception du fait et de la démarche touristiques par les communautésréceptrices.

Les manifestations et les causes

Les constats et bilans sont difficiles à établir, du fait qu’il n’existetoujours pas en Guadeloupe d’observatoire du tourisme, ni de statistiquesactualisées en ce domaine. Bien que les résultats dégradés (mais parfoisofficiellement surévalués)14 de l’activité touristique ne soient pas

14. Là où la région annonçait un taux moyen d’occupation des chambres (dans l’hôtellerie, gîteset logement chez l’habitant non compris) de 60 % à 70 %, en 2003, la FAPHT (Fédérationdes Associations de professionnels de l’hôtellerie et du tourisme) le situait plutôt pour sa partautour de 40 %.

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contestables, il n’est pas aisé d’en déterminer l’origine, d’en apprécier lagravité, a fortiori d’esquisser des pistes de réponses pertinentes et desolutions crédibles15.

La situation procède en l’occurrence de différents facteurs cumulés,qui peuvent se vérifier, peu ou prou, dans l’ensemble des Antilles fran-çaises, alors que la croissance du tourisme n’a jamais été aussi forte dansles espaces concurrentiels de la Caraïbe, en République Dominicaine età Cuba en particulier. Beaucoup, toutefois, de nature logistique, sontpropres à la Guadeloupe16, aggravés par des handicaps tenant à la main-d’œuvre prestataire de services17, à quoi s’ajoutent des responsabilitéspubliques, politiques parfois18.

Ceci est d’autant plus regrettable que la Guadeloupe disposed’atouts aussi nombreux qu’exceptionnels, aptes à ouvrir de larges pers-pectives de développement à une activité touristique rationnellementgérée et sainement maîtrisée : patrimoine environnemental, naturel19

autant qu’historique et culturel, sans égal, mais exigeant d’être dûmentvalorisé ; potentialités réelles de tourisme alternatif, d’écotourisme enparticulier ; haut niveau de services publics, d’infrastructures routières etde formations ; voisinage du marché nord-américain, et attrait pour unpays de culture et de tradition « françaises » dans un espace linguistiqueet culturel largement dominé par la présence britannique et hispanique.

15. Il s’agit pourtant d’une activité qui pèse d’un poids de plus en plus déterminant pour la régioncomme pour le département, générant plus de 19 % de la valeur ajoutée et occupant environ20 000 emplois directs (hôtellerie et restauration), tout en alimentant conjointement d’autressecteurs essentiels, comme celui des transports. Le chiffre d’affaires du tourisme a chuté deprès de 40 % sur la période 2001-2003, et le taux d’occupation des chambres n’était plus, enprincipe, que de 56 % en 2002, sans doute moins encore en réalité, et ce, alors que les avan-tages escomptés de la défiscalisation avaient engendré une forte augmentation du parc hôtelier(dont les fermetures et dépôts de bilan tendent à se multiplier, y compris pour les plusprestigieux des établissements, qui trouvent difficilement repreneurs).

16. Détérioration de la desserte de la destination par voie aérienne ; vétusté de certaines structureshôtelières ; déséquilibre géographique en matière d’implantation, quasi « ghettoïsée » danscertains parties du littoral de l’archipel ; déséquilibre sectoriel, en raison d’une offre quasiexclusivement assise sur le tourisme balnéaire et sur un tourisme de croisière lui-même endifficulté.

17. Médiocrité de l’accueil, insécurité récurrente et troubles sociaux répétitifs ; insuffisance dela formation du personnel, coûts salariaux et insuffisance de productivité ; effort linguistiqueinapte à répondre à la demande du tourisme de croisière essentiellement nord-américain.

18. Préservation médiocre de l’espace public et méconnaissance de la législation environnemen-tale ; absence de volonté politique et de priorité conséquente des politiques du tourisme.

19. Un parc national (le seul, actuellement, de l’outre-mer français ; deux autres sont projetés,en Guyane et à la Réunion), quatre réserves naturelles (plus deux en constitution), neuf sitesclassés, un environnement marin ayant encore largement échappé à la pollution et un littoraldésormais largement préservé (par l’entrée en vigueur, début 2001, du Schéma d’aménagementrégional) sur plus de 80 % du linéaire des côtes.

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L’illusion du développement univoque

Il faut toutefois se garder de considérer que le tourisme, en général, etl’écotourisme, en particulier, constitueraient la seule solution de rechangecrédible au financement du développement économique dans les DFA,face au déclin des productions agricoles, au faible potentiel industriel età l’exploitation encore embryonnaire des gisements de services. Lescourbes de convergence du développement du tourisme et de la produc-tivité économique tendent en effet à « s’aplatir » assez rapidement, aubout de quelques années, illustrant les limites de la capacité du tourismeà dynamiser la croissance au-delà d’un seul effet temporaire d’accélération,pendant une période initiale20.

Le danger est en effet de voir les initiatives et les efforts, et doncles investissements, être détournés, par un effet d’écran, d’autres secteursd’activité, également porteurs de potentialités de développement durable,en raison d’une attente excessive à l’endroit du seul secteur touristique.

Plus généralement, l’idée d’enracinement, inhérente à une vision dudéveloppement nécessairement ancrée dans le vécu local et dûment miseau service de celui-ci renvoie à une dimension patrimoniale foncièreindissociable de l’histoire douloureuse et chaotique de la plupart despeuples qui habitent aujourd’hui la Caraïbe. Au carrefour de l’histoire etde l’anthropologie, elle constitue, dans son acception la plus forte, unparamètre essentiel de la problématique écotouristique et de sa maîtrisepar les populations et les communautés résidentes, à travers l’analyse desreprésentations et des pratiques qui président aujourd’hui à l’occupationet à la gestion des espaces.

20. Cf. B. Marques (2005), « Tourisme durable et croissance : l’expérience des pays de la Caraïbesur les vingt dernières années », qui en conclut que « le tourisme serait durable [au planéconomique] dans la mesure où il contribuerait au démarrage économique d’un pays », dansK. Logossah (dir.) (2005), Tourisme et développement durable, Paris, Karthala, série « Îleset pays d’outre-mer », vol. 4.

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1.2. LE TOURISME SOUCIEUX DE L’ENVIRONNEMENT : TOURISME ALTERNATIF ET ÉCOTOURISME

1.2.1. Les handicaps socioculturels d’un tourisme alternatif

Le risque de déstructuration sociale

Il convient d’être prudent quant à la conception et à l’exploitation de« produits » touristiques alternatifs, le tourisme écologique et l’éco-tourisme en particulier, au profit de communautés marquées par un fortparticularisme21 en matière de structuration et de cohésion sociales (assisesen particulier sur des réseaux de solidarités parentales, culturelles et rela-tionnelles fortes, de type « clanique » – a maxima – ou « clientéliste »– a minima).

Si, en effet, seule une partie du groupe considéré bénéficie de lamise en œuvre et des retombées économiques du produit et de l’activitéen cause, ceci va avoir pour conséquence d’engendrer à son profit une« rente de situation », au détriment des autres groupes ou membres de lacommunauté. Il en résulte des situations inégalitaires, et donc des ten-sions, des rivalités, voire des risques de conflits, sources d’autant defacteurs de déstructuration de la communauté, de désagrégation des soli-darités originaires et de rupture de la cohésion sociale. Les « résultats »pour la communauté risquent donc d’être à terme surtout négatifs, au-delà des seules retombées économiques immédiates et apparentes.

Ceci suppose alors que les populations réceptives sont, à la foissingulièrement et globalement, appelées à réoccuper une place centraleessentielle dans la démarche touristique, dans l’offre de produits, dansl’organisation et la maîtrise des politiques, dans la réponse à la demande,afin de devenir des acteurs et des décideurs à part entière d’une activitéqu’elles n’auront plus à subir passivement.

21. Notre analyse rejoint sur ce point, serait-ce par une autre approche, celle de M. Lequin (2001),pour qui « l’écotourisme s’inscrit inexorablement dans une relation particulière entre natureet culture au sein d’une société, soit un niveau qui met en évidence une dimensionanthropologique », de telle sorte que « si l’écotourisme est culturellement déterminé, il enserait de même, à l’évidence, en ce qui regarde les produits et les retombées de l’écotourismequi doivent être développés en congruence avec les cultures et qui ne sont pas a priori decaractère universel » (Écotourisme et gouvernance participative, Montréal, Presses del’Université du Québec, p. 42).

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Il leur appartiendra au contraire, en synergie avec les différentspartenaires publics et privés, de la déterminer, l’orienter et la contrôler,en redéfinissant le tissu relationnel qu’elle postule et en contribuant àproposer des produits adaptés, à partir d’un processus conjoint de sensi-bilisation, de mobilisation et de responsabilisation.

La propension à l’« a-culturation »

Le tourisme (de masse) classique est porteur de germes de destruction dufait de l’importation sans nuance de comportement et de valeurs exogènes,support d’une démarche économiquement mercantile et socialementdéstructurante. Les populations locales qui y sont confrontées tendent àperdre la maîtrise de leurs espaces et de leurs modes de vie, et donc deleurs valeurs identitaires. Elles cherchent par réaction à se les réappro-prier, alimentant une critique exacerbée et sans nuance, certes fondée maissouvent subjective et excessive, envers une présence et une prégnancetouristiques mal ou insuffisamment maîtrisées.

L’écotourisme, comme proposition de remplacement, procèderaitalors d’un processus d’accueil, de rencontre, de découverte et de partagemutuel, plus positivement « acculturant », dans sa dimension syncrétiqueet intégrante, qu’«a-culturant» (ou «déculturant»), en termes de destructiondes valeurs et des modes de vie locaux.

Il n’apparaît pas non plus utopique de rechercher une indispensablecohérence, en termes tout autant « culturels » que juridiques, entre iden-tité, territoire (terroir ?) et patrimoine environnemental. Les représenta-tions et pratiques liées à la perception des paysages domestiqués ounaturels participent en effet de l’identité locale, l’espace personnel ethabité étant de ce point de vue largement approprié, géré, maîtrisé etsymbolisé.

La référence au sol et l’appropriation de l’espace, comme la trans-mission corrélative du patrimoine, procèdent fondamentalement en cesens d’une aspiration identitaire forte, qui renvoie à la quête des origines(voire des « racines » évoquées plus haut).

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1.2.2. L’écotourisme22 entre mythe et paradigme

La fonction paradigmatique

Des observateurs avertis se sont attachés à étudier et à mettre en lumièreles différents aspects et problématiques de la « gouvernance participa-tive» des ressources de biodiversité affectées au tourisme23, ou del’implication des communautés locales dans le développement durableet le tourisme viable24. Ils voient à cet égard dans l’écotourisme un« nouveau paradigme », dont il s’attachent alors à construire le contenuet la signification à partir d’une analyse du concept, de ses définitionset de ses impacts.

La justification de la démarche réside en l’espèce dans la considé-ration qu’il s’agit du secteur de l’industrie du voyage qui connaît lacroissance la plus rapide, tout en reposant sur une nouvelle approchealliant les objectifs de protection (des zones naturelles menacées) avecla participation des communautés locales (à leur propre développement).On peut en ce sens considérer que l’écotourisme, malgré les réservesqu’il peut susciter (cf. infra), ajoute au développement durable les dimen-sions du patrimoine culturel et l’inclusion des communautés locales, afinde contribuer à leur bien-être et à un tourisme à l’échelle humaine, prin-cipes qui rejoignent l’objectif du tourisme dit social et humaniste25.

22. On ne reviendra pas ici sur le concept, la notion et la définition de l’écotourisme, quialimentent un débat sinon des controverses récurrents, qu’il s’agisse de ses ambiguïtés poly-sémiques ou de son pluralisme conceptuel, voire de sa « construction » comme paradigme(sur tous ces points, ainsi que sur la critique du paradigme, voir J.M. Breton (2004a), loc.cit., Téoros, ainsi que l’abondante bibliographie mentionnée en référence).

23. Marie Lequin, op. cit.24. Christiane Gagnon (1999) (Tourisme viable et parcs nationaux : quel avenir pour les collec-

tivités locales ?, Chicoutimi, UQAC) ne se réfère pas systématiquement, ni explicitement, auconcept d’écotourisme, même si celui-ci demeure largement sous-jacent aux présupposés etaux orientations de sa réflexion. C’est plutôt à propos de la clarification des enjeux scienti-fiques du « développement durable et viable » (cf. infra) que cette auteure évoque expressé-ment un « paradigme novateur », l’écotourisme n’en apparaissant alors que comme un avataropérationnel, parmi d’autres.

25. Ibid.

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L’écotourisme doit alors prendre en compte ces deux dimensions : ladurabilité de la ressource et la participation des populations à un projetde développement26.

L’équilibre que postule le paradigme de l’écotourisme devrait alorsêtre compris, dans le sens évoqué ci-dessus, « comme une tension dyna-mique et évolutive dans le temps, et non comme une condition fixe dedéveloppement», dès lors que « l’écotourisme durable repose sur le pro-cessus d’interaction avec l’environnement et les échanges culturels avecles communautés d’accueil27 ».

En termes de politiques publiques, un projet d’écotourisme nepourrait satisfaire aux exigences de développement durable que pourautant qu’il répondrait conjointement à des objectifs de durabilité de laressource, d’équité intergénérationnelle et de sensibilisation des individusà l’environnement. La conciliation attendue ne peut être alors que lerésultat d’une négociation entre les différents intervenants au profit del’équilibre à instaurer entre les intérêts en présence, à partir de l’identi-fication, complexe et controversée, des valeurs qui orientent les choix etles outils propres à la réalisation d’un développement durable28.

26. M. Lequin, op. cit., p. 3. Celui-ci reposerait en ce sens sur trois postulats de base : caractèredurable du développement ; absence de définition a priori du développement durable dans uncontexte local ou régional exprimant une situation empirique donnée ; exigence d’une négo-ciation adéquate entre partenaires, afin de déterminer un équilibre durable entre intérêts éco-logiques et économiques (p. 4). L’auteure précise plus loin en ce sens : « Nous concevonsune perspective d’analyse de l’écotourisme comme un système d’action et de décision où lesprotecteurs de la ressource, les promoteurs touristiques ainsi que les communautés localesseront considérés comme des acteurs à part entière du processus de développement et demise en valeur d’un site écotouristique à caractère unique » (p. 11).Nous estimons pour notre part que l’écotourisme, faute de « définition » possible ou crédible,repose à tout le moins sur trois paramètres fondamentaux et déterminants, procédant desconcepts de nature, de responsabilité et de durabilité. Ceux-ci se déclineraient alors respec-tivement en termes de gestion environnementale et patrimoniale, pour le premier ; de valori-sation culturelle et identitaire partagée, pour le deuxième ; et de développement localparticipatif et intégré, pour le troisième.

27. Ibid., p. 25.28. Tout ceci est excellemment développé dans l’ouvrage précité de M. Lequin (2001), p. 27-40.

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La dimension mythique

Mythe ou paradigme ? Slogan ou concept opérationnel ? Mode outendance à long terme29 ? La question mérite aujourd’hui d’être posée etne peut plus être ignorée, fût-elle « dérangeante ». L’arbre du mot necacherait-il pas la forêt de la problématique, des implications, des enjeuxet, partant, des intérêts multiples et souvent antagonistes sous-jacents ?

Mythe et paradigme ? On ne peut exclure a priori que la perceptionintuitive de l’écotourisme soit apte à générer un paradigme nécessaire,sinon à constituer une conditionnalité de sa formulation. Le passage dudiscours à la démarche opérationnelle, essentielle dans son approche éco-nomique, n’est-il pas alors le cheminement logique indispensable pourcrédibiliser l’offre correspondante et y sensibiliser les consommateurscomme les acteurs potentiels ? Le débat ne saurait être esquivé30.

Il convient en tout état de cause de se démarquer des ambiguïtés dumythe pour retrouver le pragmatisme et l’efficacité attendus des solutionsopérationnelles que l’écotourisme peut apporter à la dimension et auxlimites d’un tourisme jusqu’alors principalement cantonné à une dimensionessentiellement commerciale, c’est-à-dire exposée aux excès d’une logiqueà dominante économique et productive. Il s’agit alors, entre autres, desavoir dans quelles conditions, selon quelles modalités et avec quelleslimites une telle démarche serait apte à répondre aux attentes de pays déten-teurs d’un large potentiel touristique, source d’une offre importante maisencore insuffisamment exploitée.

Au-delà d’une recherche légitime de rentabilité immédiate, ilimporte toutefois, lorsque l’on est en présence de sociétés en mutationencore largement marquées par des valeurs, des dynamiques et des modesde vie traditionnels, de rechercher si les effets pervers induits ou impli-cites dont l’écotourisme n’est pas exempt ne sont pas de nature à enremettre en cause les avantages escomptés par ailleurs.

29. S. Blangy, G. Dubois et F. Kouchner (2002), Écotourisme. Expériences françaises, Paris,Cahiers de l’AFIT.

30. Pour ne pas encourir le reproche de le faire, on peut alors être tenté d’appréhender l’éco-tourisme, dans l’approche qui en a été esquissée plus haut, et sous bénéfice d’inventaire,comme un tourisme scientifique et culturel de découverte, d’exploration et de loisirs, respec-tueux des exigences et/ou compatible avec les contraintes écologiques telles que définies etsanctionnées par les normes juridiques de protection et de conservation de l’environnementdans son acception patrimoniale extensive.

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L’AMBIGUÏTÉ SOCIOCULTURELLE : TOURISME, ENVIRONNEMENT ET QUÊTE IDENTITAIRE

Le tourisme, dont on sait l’importance déterminante à de nombreux égardspour le développement économique, mais également l’impact sociocul-turel sur les territoires et populations d’accueil, est aujourd’hui confrontéen de nombreux endroits à une crise endémique qui, dans certains Étatsen proie à des mutations rapides et profondes, procède dans une largemesure d’une problématique identitaire non ou mal maîtrisée.

Les réponses susceptibles d’y être apportées passent souvent à lafois par une réappropriation patrimoniale et une (re)construction identitairequi y est directement ou indirectement liée.

2.1. TOURISME EN CRISE ET CRISE IDENTITAIRE

2.1.1. La problématique identitaire du tourisme

L’impact du vécu identitaire

La question soulevée ici ne peut être valablement appréhendée que parréférence à un contexte particulier, celui de la Guadeloupe en l’occur-rence. Les médias ne se sont pas fait faute d’attirer l’attention, depuis uncertain temps déjà, par titres-chocs interposés31, sur la crise endémiquequ’y traverse le tourisme, crise qui, si aucune réponse n’y est apportée,en obèrera négativement et durablement la crédibilité et, par là, les pers-pectives de développement à court et moyen termes. Au-delà de l’iden-tification de certaines de ses causes les plus manifestes (cf. supra), lesconditions d’une relance de l’activité touristique sont, elles, plus délicatesà déterminer, par référence notamment aux implications d’un vécu iden-titaire peu ouvert à la démarche touristique, sinon parfois en conflit« culturel » avec celle-ci.

Les problèmes et les difficultés qui s’y rattachent, eu égard notammentau caractère d’activité de service que constitue largement la démarchetouristique, ont déjà été brièvement évoqués, parmi les nombreux obs-tacles auxquels se heurte cette démarche, même si la problématique iden-titaire n’est probablement pas à mettre sur le même plan que les autrescauses évoquées, et ce, pour deux séries de raisons.

31. « Avis de tempête sur la Guadeloupe », « Hôtellerie, rien ne va plus », « Tourisme, la chutelibre », « L’industrie hôtelière pourrait perdre 30 millions ¤ en 2003 », etc.

2.

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D’abord, parce que, souvent, elle les précède, constituant la matricede comportements « négatifs », tant individuels que collectifs, imputablesaux acteurs privés autant qu’aux responsables publics32, que l’on ne peutappréhender et comprendre que si l’on s’y réfère, comportements igno-rants ou inconscients a minima, délibérés ou irresponsables a maxima.

Ensuite, parce que le vécu identitaire engendré par les activitéstouristiques dépasse largement les enjeux économiques, dans la mesureoù il est à l’origine d’un malaise collectif et d’une difficulté latente àassumer dans le quotidien une histoire et une culture faites de contradic-tions, d’ambiguïtés, de non-dits et de frustrations multiples et plus oumoins bien identifiés. Ceux-ci opposent des obstacles déterminants auredémarrage des activités du secteur touristique et laissent parfois douterde la volonté réelle et, partant, de l’intérêt effectif (c’est-à-dire autre que« proclamé » pour des raisons de modes ou de circonstances) des popu-lations et des élus guadeloupéens, en faveur d’un développement localaxé sur le tourisme et sur ses retombées dûment valorisées.

Sans doute peut-on penser qu’un tel constat présente un caractèreiconoclaste, voire quelque peu provocateur. Il ne saurait pour autant êtreocculté, sauf à appréhender la problématique touristique en Guadeloupe,comme dans d’autres territoires confrontés à des difficultés du mêmeordre, à partir de présupposés délibérément biaisés ou consciemmentoccultés, la privant par là de toute crédibilité et donc de toute capacitéopérationnelle.

Les paradoxes de la relation accueil-service33

L’ambiguïté de la relation dialectique et conflictuelle qui associe tourisme,service et identité n’y est pas étrangère et peut même constituer un fac-teur essentiel de détermination de la relation accueil-service. Du serviceà l’offre de service, elle mérite pour cette raison qu’on l’explicite som-mairement, sans préjuger pour autant d’analyses sociologiques et anthro-pologiques, voire «psychanalytiques», plus structurées et approfondies.

32. Du promeneur qui abandonne ses emballages et déchets sur un site touristique, considérantqu’il a toute liberté de polluer un espace public qui ne le concerne pas, aux élus indifférentssinon méfiants à l’endroit de politiques et d’interventions non susceptibles de générer unprofit clientéliste, voire au contraire de nature à leur créer des inimitiés électorales.

33. Entre autres, sur ce point, dans un contexte plus général, voir M. Le Blanc (2003), « Un gested’accueil ou un service ? La perception des touristes », dans Téoros, vol. 22, no 3, p. 50-54.

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De la servitude, ancrée dans l’histoire coloniale et demeurée présentedans un inconscient collectif qui n’a pas pu ou su, ici, s’en libérer34

(alors qu’il y a plus résolument ou définitivement réussi ailleurs35), auservice inhérent au développement et à la productivité de l’économiemoderne, il y a un pas que la plupart des mentalités locales sont encoreloin d’avoir franchi et qui tend à affecter la majorité des comportementsdans le secteur du tourisme, lorsqu’il ne les obère pas négativement etstructurellement.

Le touriste-client est en effet, d’abord, demandeur et acheteur d’unensemble de « biens » matériels ou immatériels. Dans ce cadre et à ceteffet s’interpose entre ces biens et lui et, partant, à travers la confronta-tion de deux systèmes socioculturels, un prestataire (agent, personnel)de services qui est par essence expression d’altérité, c’est-à-dire porteurd’une offre de soi chargée de valeurs et de questionnements autres etoriginaux, à la fois intermédiaire et médiateur de l’offre de consommationtouristique.

Dans quelle mesure et à quelles conditions le sujet (salarié) recevantpeut-il alors véritablement et valablement « rencontrer » l’autre, enl’occurrence le touriste, objet de cette offre de soi et de son service ?« Vendre » la destination Guadeloupe, n’est-ce pas alors un peu vendrede soi et de sa culture et, quelque part, consentir à l’aliénation, fût-elleinconsciente, des valeurs constitutives de ce moi offert en pâture auxintérêts extravertis d’un tourisme mercantile et désincarné, alors mêmeque l’offre de service reste, pour les raisons historiques et sociétalessusdites, inconsciemment affectée d’un mal-être et, sans doute, d’une« culpabilité » à rebours, collectifs ?

34. Lorsque, en novembre 2002, le président du Groupe Accor a annoncé son intention de seretirer des Antilles, au motif de « l’attitude inamicale, voire agressive » du personnel hôtelierà l’égard de la clientèle touristique, ces propos ont été ressentis comme une véritable humi-liation dans un contexte où, selon le correspondant J.-L. Saux du journal Le Monde, « lanotion de service renvoie à l’esclavage, au service du maître, du Blanc » (dans « Offensivede charme pour faire revenir les touristes », à propos de la campagne pour les élections régio-nales en Martinique, 21 février 2004, p. 11).

35. On pense, par exemple, à la République Dominicaine, qui assume largement, voire revendiqueson passé colonial comme partie intégrante de son histoire et d’une construction identitaireenrichie par un métissage multiforme, européen y compris.

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2.1.2. Les handicaps de l’éc hange touristique

Les contradictions

Ce qui est en cause ici relève de la dynamique de la communication quis’instaure dans le cadre de la prestation de tourisme basique. Elle n’estpas dépourvue de résonances en termes de servitude et, par là, de péren-nisation d’une relation d’inégalité certes passéiste et anachronique, maisdurablement façonnée par l’histoire et ancrée dans les cultures. À vouloirl’ignorer ou l’occulter, on s’expose à altérer et donc à priver de toutecrédibilité ou valeur opérationnelle les réponses à apporter à la crise quetraverse actuellement l’activité et, ceci expliquant en partie cela, laprestation touristiques.

Trop souvent, en effet, le touriste, parce qu’il n’a pas été lui-mêmesuffisamment « averti » des cultures hôtes rencontrées à l’occasion de sesvisites, ni préparé à les découvrir, à les connaître et à les respecter, génèreune relation d’indifférence sinon de rejet des valeurs exogènes auxquellesil se trouve confronté (alors qu’il les a souvent délibérément recher-chées), faute d’ouverture, de curiosité et d’acceptation, que traduisent desattitudes désinvoltes et des comportements dégradés. Tous les ingrédientssont alors réunis pour une perception conflictuelle de cette relation parle salarié, qui ne manque pas d’y voir une « agression » plus ou moinsmanifeste.

Un touriste majoritairement issu des classes moyennes sinon modestesmétropolitaines et porteur d’un exotisme ambigu, plus ou moins bien mas-qué à travers son statut nouveau de consommateur de voyages et de loisirs,pâtit du déficit d’une véritable « culture d’échange ». Le sentiment deservitude qu’en éprouve l’hôte connaît de ce fait une propension à s’exa-cerber au fil des années, en raison d’une dégradation progressive de lareprésentation que tend à donner de son côté le touriste. Les termes del’échange reposent donc sur un malentendu profond entre un sujet rece-vant, qui n’est pas en mesure de contrôler la demande réelle du touristeni de lui imposer le respect de ses valeurs, et un touriste enclin à exporterson statut et à faire prévaloir sa propre culture, au nom des paramètresmercantiles de sa demande de service, relation procédant d’un décalageradical et donc négateur des intérêts et des attentes réciproques.

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L’affrontement symbolique qui en résulte, qu’il soit latent oumanifeste, n’en entre pas moins en contradiction flagrante avec ce quidevrait être au contraire l’exigence commune d’un patrimoine partagé,conjointement préservé et mis en valeur, parce qu’érigé en bien commun,culturel autant qu’économique, du visiteur comme de l’hôte.

Les implications

Les considérations ci-dessus appellent une politique touristique biencomprise de gestion concertée et intégrée des ressources environnemen-tales et patrimoniales, apte à susciter et à alimenter l’offre comme lademande touristiques, démarche comprise et conçue, à travers une prisede conscience nécessaire et appropriée, à la fois comme déterminant etcomme stimulant d’une politique rationalisée de développement localdurable et viable.

Il convient à cet effet de dépasser la perception d’un touristeassimilé – parce que majoritairement de race blanche et originaire de l’ex-métropole coloniale – à l’auteur de la servitude originelle, susceptible d’enreproduire la mentalité et les attitudes. Il importe conjointement que l’hôte-récepteur sache ce qu’il a à offrir, et ce qu’il veut offrir, au touriste-visiteur,à travers une relation authentique de rencontre et d’échanges dépourvus deprésupposés ou d’arrière-pensées, afin de dépasser les mystifications appa-rentes et démonstratives affectant des comportements de part et d’autre lar-gement « artificialisés » par la rencontre et, surtout, la crainte endémique etirraisonnée de l’altérité dérangeante et déstructurante36.

Des réponses peuvent être recherchées, entre autres, dans la volontédélibérée d’assumer une culture historique dépourvue de son passéismeconflictuel, dans la prise de conscience des bénéfices inhérents à unerencontre équilibrée et à un enrichissement mutuel des cultures, et dansune formation professionnelle apte à favoriser la symbiose de l’offre etde la demande touristiques. Les gains attendus s’expriment alors en

36. On se souviendra qu’étymologiquement, la racine grecque xenos (ξενος) désignait aussi bienl’hôte, reçu comme un véritable membre de la famille, que l’étranger dont il convenait de seméfier en lui fermant sa porte. Si elle a surtout engendré en français le terme « xénophobie »,répondant à la seconde approche, la notion latine correspondante hostis a, elle, donné nais-sance aux termes rigoureusement opposés d’« hospitalité » et d’« hostilité », rejoignantl’ambivalence paradoxale – mais elle ne l’est qu’en apparence – du mot grec ! N’en va-t-ilpas ainsi de la perception guadeloupéenne du touriste ?

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termes d’ouverture et d’écoute, d’attente et de proximité, au niveau de lademande ; de qualité et d’acceptabilité, d’accueil et de disponibilité, àcelui de l’offre, au bénéfice des deux parties.

Pour cela, il importe, à travers une modification impérative destermes de l’échange, de fixer au tourisme des objectifs précis, d’en déter-miner le rythme, d’en maîtriser l’expansion et d’en reconnaître les limites.Il convient tout autant de l’intégrer à une politique de développementdûment repensée sinon reconstruite, à partir des instruments, juridiqueset financiers notamment, que met opportunément à sa disposition, enGuadeloupe et dans les DFA, un processus de décentralisation renforcéeet d’adaptation institutionnelle.

2.2. DE LA RÉAPPROPRIATION ENVIRONNEMENTALE À LA RECONSTRUCTION IDENTITAIRE

2.2.1. La valorisation du patrimoine en vironnemental et l’incertitude identitaire

La quête d’authenticité

La référence identitaire, en termes de « reconstruction » et de « réappro-priation», appelle, si l’on entend nuancer et affiner le propos, quelquesobservations complémentaires, qui exigeraient d’être développées etapprofondies. On se limitera aux remarques ci-après, qui ne prétendentproposer que quelques pistes de réflexion37.

Parmi les offres d’écotourisme figure au premier plan toute lagamme des spectacles et manifestations qui puisent leurs racines dans lestraditions et cultures locales. Ils constituent des produits d’appel impor-tants et des composantes attractives de l’offre touristique. Dans les des-tinations exotiques, ils font toutefois souvent l’objet d’une inévitabledénaturation, et ce, dans quasi tous les cas de figure, quelque précautionque l’on entende prendre ou de quelque vigilance on entende faire preuveà cet égard.

37. Pour des développements plus approfondis sur cette question particulièrement complexe, danssa dimension culturelle notamment, et dans l’espace caribéen « français » en particulier, voirF. Reno (dir.) (1995), Identité et politique. De la Caraïbe et de l’Europe multiculturelles,Paris, Economica ; également, F. Constant (2000), Le multiculturalisme, Paris, Flammarion.

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Il en va ainsi, de manière manifeste, lorsqu’il s’agit de produitsconçus et mis en place pour les touristes, eu égard à leurs attentes et àleurs comportements supposés38. Leur défaut d’authenticité leur confèrede ce fait une valeur quasi nulle, en termes de réappropriation comme departage culturels, pour le touriste aussi bien, a fortiori, que pour le déten-teur originaire de la « culture » ainsi artificiellement proposée et exposée.

C’est aussi le cas, dans une moindre mesure, de manifestationstraditionnelles réellement authentiques, mais qui, à partir du moment oùelles se déroulent avec (c.-à-d. en présence) des touristes et leur sontouvertes, fussent-ils peu nombreux, ne peuvent plus être perçues nivécues de la même façon par les populations locales. L’effet de dénatu-ration, bien que plus réduit et latent, n’en est pas moins présent, du faità la fois de la rupture implicite mais inévitable de la cohésion culturelleet psychologique du groupe et de la finalité inévitablement « pervertie »de la démarche.

Il convient conjointement de savoir si la demande, en matièred’écotourisme, provient bien des communautés et des populations con-cernées , ou si elle ne leur est pas au contraire plus ou moins artificiel-lement « suggérée », sinon même imposée, et dûment « encadrée » à cettefin. La situation n’est en effet pas la même selon que la démarche éco-touristique a une origine exogène, construite de l’extérieur, quitte à êtreréappropriée par le groupe s’il l’estime pertinente et profitable, a fortiorisi elle s’avère réellement bénéfique, ou qu’elle procède de la perceptionendogène de besoins comme de la formulation conséquente de demandesspécifiques par le groupe lui-même et à sa seule initiative, à partir de saculture et de ses valeurs identifiées à travers ses propres référents39.

38. Cf. Téoros, Dossier « Comportements touristiques », 2001, vol. 20, no 3, notamment laprésentation de J. Stafford, p. 4.

39. Dans l’esprit des deux précédentes remarques, on attirera l’attention sur le phénomène de« doudouïsme » (le doudou est la personne aimée et, par extension, le nom donné au touristeinterpellé et choyé par les mamas commerçantes des marchés), bien connu dans les Antillesfrançaises (à Marie-Galante, par exemple), dont peut également pâtir l’écotourisme. Il con-siste, pour les concepteurs et porteurs locaux, à proposer des produits artisanaux et des acti-vités culturelles fondés sur des images artificiellement « reconstruites », à partir del’identification a priori de schémas et de comportements estimés aptes à répondre à l’attentesupposée des touristes, sur laquelle, pour des raisons d’efficacité et de rentabilité, il paraîtpertinent de s’aligner.

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La pesanteur de l’extranéité

Lorsque l’on évoque la « réappropriation » de valeurs identitaires, il estnécessaire de nuancer le propos, car en réalité il s’agit souvent beaucoupplus d’appropriation. Il n’y a en effet réappropriation que lorsqu’il s’agitd’un patrimoine originaire et propre du groupe ou de la communauté, àl’endroit d’une partie de son héritage historique (cimetières d’esclaves,par exemple, gisements archéologiques ou traditions magiques).

À l’inverse, lorsqu’il s’agit d’intégrer au patrimoine local, et d’enrevendiquer la dimension culturelle, des vestiges architecturaux ou monu-mentaux issus d’une activité économique ou militaire qui était celle ducolonisateur (ce qui représente souvent la grande majorité sinon la quasi-totalité du patrimoine immobilier et bâti : moulins de broyage de canne,« habitations » des anciens domaines fonciers, églises importées avec leculte du colonisateur, forts et bastides, etc.), il ne saurait s’agir qued’appropriation (initiale) par une communauté différente de celle àlaquelle est due la constitution du patrimoine en cause.

Souvent, également, la notion de terroir et de patrimoine restelimitée à ce qui relève du domaine de la propriété et des relations privées,voire traditionnelles. « Ce qui est à l’État » (« Biti a léta, cé ta vou ? : cequi appartient à l’État, est-ce que c’est à vous ?40 »), dans les DFA41

notamment, n’est ni perçu ni en conséquence revendiqué comme tel. Cecisuffit paradoxalement à « justifier » des comportements de désintérêt etde désinvolture, voire d’ignorance ou de rejet, à l’opposé de tout soucide préservation, de conservation, a fortiori de réappropriation, s’agissantde biens (corporels et incorporels) relevant de la chose publique quidemeurent, par l’effet d’une telle perception « négatrice », extérieurs aunoyau culturel et patrimonial.

La construction (ou la reconstruction) identitaire est d’abord en effetcelle de l’individu, même si elle s’opère par référence à un groupe ou àune communauté ou en leur sein. Il en résulte une inévitable prééminence– fût-elle plus perçue qu’effective, plus subjective que légale – des droitsréels (cf. infra) individuels sur les droits collectifs, entraînant par là un

40. Cf. R. Rauzduel (2004), « De la difficulté d’être participant écologique sur les aires touris-tiques en Guadeloupe : les Chutes du Carbet », dans J.M. Breton (dir.), Tourisme, environnementet aires protégées, op. cit., p. 473-477.

41. Expression relevée en Guadeloupe notamment.

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certain « rejet » de la chose publique, voire de la propriété étatiquecollective, comme étant contradictoire sinon négatrice de l’essence et desvaleurs de l’individu42.

Il faut, enfin, demeurer réservé et prudent envers les parfois pré-tendues traditions culturelles sur lesquelles asseoir un projet écotou-ristique. Elles ne trouvent en effet souvent leur origine que dans unerécupération, voire une reconstruction par une frange « bourgeoise » dessociétés, apte à accéder à une culture et à une démarche intellectuellequi sont celles d’une certaine « élite ». Procédant de leur seule démarchevolontariste (fût-elle implicite dans la durée, au terme d’un processusdiachronique peu aisé à appréhender), faute de laquelle elles n’auraientpas été ainsi révélées ou mises à jour (implicitement, mais sans douteinsidieusement), elles restent, une fois encore, extérieures aux massespopulaires, que l’on entend alors persuader qu’il s’agit là de composantesessentielles de leur patrimoine.

2.2.2. La dialectique culture-environnement face au développement touristique durable

Environnement, écotourisme et durabilité

Est-il donc encore possible, dans le contexte de la Guadeloupe et desDFA, de prétendre réconcilier tourisme et environnement, tourisme etculture, tourisme et « hospitalité » (au sens étymologique fort) ? Acti-vités touristiques et exigences environnementales seraient-elles paressence incompatibles et donc irréductibles, au point de vouer au conflitperpétuel et à la rupture dans l’autodestruction le « couple d’enfer »(selon le mot d’un journaliste) constitué par le tourisme et l’environne-ment? Serait-ce alors « un rêve que d’envisager un mode de tourismerespectueux de l’espace » ?

Selon un observateur averti, « la reconnaissance du tourisme durablesuppose conjointement une internationalisation des besoins et des res-sources, et une intégration généralisée et systématisée de l’environnement

42. La construction « citoyenne » procède plus alors, à cet égard, des droits réels individuels quedes droits publics collectifs, engendrant une perception « réductrice », voire marginalisée, dela place de la citoyenneté dans l’acquisition identitaire.

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dans l’ensemble des politiques et des économies43 », sauf à éviter deconfondre tourisme durable et écotourisme et de purement et simplement,voire abusivement, l’y assimiler.

L’objectif réside, par l’intégration élargie de l’environnement autourisme, dans l’élaboration et la gestion d’un développement touristiquedûment encadré et maîtrisé. Celui-ci devrait pour cela appréhender letourisme dans sa globalité, aux niveaux local, national et international,par une approche intégrant la protection de l’environnement et les droitsde l’Homme à un environnement sain et durablement protégé.

On peut en ce sens risquer une nouvelle « définition » de l’éco-tourisme, plus adéquate à la mise en valeur des ressources patrimonialeset environnementales des DFA. On y verra ainsi, au-delà peut-être du seultourisme écologiquement « responsable » ou « solidaire » que retiennentpour leur part certains (un peu réducteur, bien que non dépourvu d’argu-ments) ou, dans une perspective sensiblement différente, du tourisme fina-liste et différencié, à objectifs culturels et « altruistes », auquel d’autrespeuvent se rallier, un tourisme de « terroir », terroir à la fois culturellementpartagé et réapproprié, et collectivement protégé et valorisé.

L’écotourisme serait ainsi une composante originale, parfois déter-minante, d’un tourisme durable garant d’un développement viable. Ilpeut alors constituer, dans le contexte particulier de certaines des régionsultra-périphériques françaises et eu égard à leur histoire comme à leuravenir, à la fois le lieu, l’occasion et l’opportunité d’une nécessaire«reconstruction» identitaire, à partir d’une réappropriation patrimo-niale et, partant, d’une valorisation socioculturelle des terroirs et desressources environnementales.

« Identité foncière » et perception environnementale

La libération de la condition d’esclave a permis l’accession à la person-nalité juridique et la reconnaissance de la qualité de sujet de droit (alorsque l’esclave n’était jusqu’alors appréhendé qu’en tant qu’« objet », parle Code noir44 en particulier). Ce nouveau statut personnel s’est con-crétisé notamment, sinon principalement, par la possibilité d’accès à la

43. F. Bouin (2000). Tourisme et droit de l’environnement, thèse, Limoges, multigr., p. 42.44. Voir, entre autres, J.M. Breton (1998), « Du Code noir à la pérennisation du statut servile

(l’exemple des Antilles françaises et de la Guadeloupe) », communication à l’Académie dessciences d’Outre-Mer, Paris, 22 octobre 1998, dans Mondes et Cultures, tome 58, p. 165-187.

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propriété foncière, gage d’émancipation et d’abolition comme de partagedes privilèges des anciens « maîtres » (de même que pour le peuple del’Ancien régime face à l’exclusivité nobiliaire de la propriété des terres),propriété dûment consacrée et garantie par le Code civil.

La maîtrise et l’appropriation de la terre constituent dès lors unparamètre fondamental – et fondateur – de la personnalité juridique desnouveaux affranchis et, partant, de leur construction identitaire aux plansà la fois socioéconomique et politico-administratif. L’importance de larelation à la terre, qui va alors cristalliser la consistance de l’être juridiquede l’affranchi, participe quasi consubstantiellement de sa reconnaissanceidentitaire.

Par voie de conséquence, toute spoliation, qu’elle soit réelle, dejure, ou ressentie comme telle, de facto (en particulier toute occupationaccaparante de l’espace et du sol par la présence touristique), est indi-rectement ou implicitement perçue comme une remise en cause de l’exis-tence citoyenne et négation de l’identité, l’une et l’autre fondée et ancréesur l’acquisition de droits privés réels (sur la terre en priorité), dont lagarantie et la pérennisation entraînent sinon conditionnent celle desdroits personnels45.

La perception de l’environnement, qui est d’abord et essentiellementcelle de l’environnement physique immédiat de l’individu, s’opère alorslogiquement, mais quasi inévitablement, à travers le seul prisme d’une« identité foncière » qui perdurera tant que n’aura pas été culturellementdûment apuré, et assumé, l’héritage historique de la période de l’esclavage.Celui-ci, en effet, perdure et altère radicalement, aujourd’hui encore, parun effet de miroir déformant, la vision des manifestations « exogènes »d’occupation (fût-ce à des fins touristiques) de l’espace et du sol et, par-tant, d’appropriation « indue » d’un patrimoine environnemental limité àses composantes appréhendées en termes de propriété foncière.

45. Dans le même sens, une importance particulière s’attache conjointement à la constructionimmobilière, à la fois comme expression maximale de l’usus de la propriété foncière, etcomme acte symbolique d’appropriation nominale et individuelle de la terre en tant qu’élé-ment déterminant du statut de la personne.

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CONCLUSION

La question se pose, en fin de compte, de savoir si et dans quelle mesurele « défi » d’un tourisme alternatif intégrant les préoccupations environ-nementales, tel que l’écotourisme, serait en mesure et en situation derépondre en partie à certains des handicaps et des faiblesses du tourismetraditionnel, dans les destinations de soleil des DFA. Il est certes conduit,a priori, à se heurter aux mêmes obstacles46, dans leur composantesendémiques. Bien que ne constituant par essence qu’une « niche » relati-vement marginale de l’offre touristique, tout en connaissant une crois-sance significative, il n’en est pas moins apte à contourner certainsd’entre eux, en proposant une solution crédible bien que limitée.

Il conviendrait alors, en partant d’un état des lieux approprié, d’unbilan objectif des expériences conduites, et d’une évaluation exhaustiveet réaliste des potentialités et des conditionnalités, d’en cibler l’objet etd’en finaliser le contenu, nécessairement spécifiques pour chacun desÉtats et territoires de la région (en raison de la diversité de leurs potentiels,mais également dans le but d’atténuer les handicaps d’une concurrenceinopportune ou inégale), afin d’en valoriser l’exploitation au service d’undéveloppement touristique et local durable et viable47. La référence envi-ronnementale y occuperait alors une place déterminante, dans des sociétéset des communautés particulièrement sensibles sinon « vulnérables » àl’expansion du phénomène et de la pression touristiques.

46. Ceux-ci s’expriment respectivement, et de manière cumulée, si l’on se réfère à l’exempleactuel de la Guadeloupe, à plusieurs niveaux. C’est le cas à la fois aux plans structurel etinfrastructurel (insuffisance de l’offre de transport aérien au regard de la capacité hôtelière ;non-renouvellement et inadaptation du parc hôtelier), socioculturel (rejet latent d’une occu-pation « exogène » des espaces, croissance de l’insécurité), politico-économique (surcoûtsde la main d’œuvre, grèves récurrentes), et médiatico-commercial (inadaptation de l’offre,insuffisance de sa diversification et de sa médiatisation) (cf. supra, notes 15 à 17).

47. Voir C. Gagnon (1999), op. cit. De la même auteure (2005), « L’écotourisme et les parcsnationaux : un vecteur de développement durable et viable pour les communautés locales ?Le cas québécois », dans J.M. Breton (dir.), Tourisme et développement durable, op. cit. ;également, C. Gagnon (2003), Modèle de suivi des incidences sociales, évaluation environ-nementale et développement régional viable, cédérom, Chicoutimi, UQAC. « Par développe-ment durable et viable nous entendons un développement qui met l’accent sur la qualité devie, les valeurs humanistes de justice sociale, de solidarité et de paix, ainsi que le respectdes caractéristiques biophysique, historique et culturelle propres à chaque communauté, lamaîtrise sociale du territoire selon une temporalité intergénérationnelle visant à protéger lecapital naturel… Cette définition nous campe dans une approche humaniste et planificatricedu développement durable qui se distingue des approches écologique, économiste etorganisationnelle » (idem).

3.

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La crédibilité et l’effectivité du paradigme de l’écotourisme, danssa dimension identitaire fondée sur la dialectique particulière et située dela culture et de l’environnement, dans la mesure de ceux de ses para-mètres pour lesquels il se vérifierait, pourrait alors utilement contribuerà déterminer et à élaborer de nouvelles offres de tourisme, plus confor-mes aux attentes des individus et des peuples.

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A

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33Chapitre

L’écotourisme : une activité d’épanouissement collectif et individuel ?Impacts sociaux et culturels du tourisme

Luce ProulxChercheure-consultante en gestion et planification du tourisme et chargée de cours au Département d’études urbaines et touristiques, UQAM

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Résumé

Quelle position doit-on prendre face au développement du tourisme ? Onlui reconnaît autant des impacts positifs que négatifs. C’est surtout enregard des retombées économiques que l’on vante son apport positif auxcommunautés. À l’inverse, on critique ses effets néfastes sur l’environne-ment. Cependant, rares sont les considérations et les questionnementspar rapport aux impacts sociaux et culturels sur les populations. Pourtantle tourisme est un espace de contact qui suppose une rencontre entredeux individus, l’un individuel (le touriste) mais multiple, l’autre collectif(la communauté hôte). Cette rencontre dite interculturelle, qui se vit surle terrain de l’hôte, ne peut se faire sans effet. Cette communicationaborde la question des impacts sociaux et culturels, sous un angle socio-logique et anthropologique, autant chez le touriste que dans la commu-nauté d’accueil. Elle tentera de mettre en évidence que la rencontre, quidoit être comprise comme un système de relations, peut favoriser soitl’épanouissement social et culturel des deux parties, soit mener entreautres vers une dégradation de la qualité de vie et une aliénation ouassimilation culturelle chez les communautés d’accueil, et un ethnocen-trisme chez le touriste. En guise de conclusion, nous proposons quelquespistes d’action pour un développement touristique qui permette deséchanges et des influences socioculturelles enrichissantes, réciproques etpartagées. L’écotourisme, qui sollicite la participation des deux partiesà l’expérience touristique, constitue selon nous une des voies potentiellesvers un tel développement touristique, parce qu’il s’inscrit dans unedynamique de développement local et régional et favorise, chez le touriste,une expérience personnelle et communautaire. Cependant, son avenir estpeut-être dans l’économie sociale.

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Le tourisme crée un espace de contact qui suppose une rencontre entreun individu mobile qui se déplace vers l’Ailleurs et un groupe d’individussédentaires. Effectivement, le touriste quitte volontairement et temporai-rement son « quotidien » vers une destination choisie en fonction de pro-messes de plaisir et de découvertes qu’on lui a faites par la publicité oude rêves de voyage nourris par les médias de masse, par ses lectures oupar son réseau de relations, pour prendre contact avec un milieu naturel,culturel et social différent. Cette rencontre entraîne un processus d’échangeéconomique, mais aussi culturel et social, qui se vit dans la communautéhôte ; un processus fondé sur une relation d’accueil dans un contexteludique, éphémère pour le touriste, mais durable pour la communauté quidoit composer en permanence avec une multitude d’étrangers de cultureset d’aspirations différentes. Cette rencontre n’est pas sans impact tantchez le visiteur que le visité.

Il existe une certaine ambiguïté face à l’activité touristique, car luisont reconnus des impacts à la fois positifs et négatifs. À cet égard, deuxcourants de pensée cohabitent. Le premier, surtout appuyé par les écono-mistes et les gestionnaires, envisage le tourisme comme un agent de crois-sance économique et un outil de développement pouvant faire progresserles peuples et les nations grâce à son effet multiplicateur (Lanquar, 1985 ;Michel, 2000b ; Hillali, 2003). Dans ce même esprit favorable au tou-risme, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) et le Bureau interna-tional du tourisme social (BITS) reconnaissent en celui-ci un facteur depaix et de compréhension entre les peuples, d’enrichissement des cultureset de gardien des identités (Trottier, 1992). D’ailleurs, c’est sous le thème« Le tourisme, source d’enrichissement » que l’OMT a entrepris sa cam-pagne mondiale de communication en faveur du tourisme en 20041. Lesecond courant, soutenu davantage par les sociologues et les anthropolo-gues ainsi que les groupes d’action sociale, voit plutôt le tourisme – inter-national –, de par sa capacité de diffusion des modèles sociaux etculturels, comme une menace à la survie culturelle des groupes, étant uninstrument d’aliénation et d’assimilation des peuples par le modèle cul-turel dominant, voire la culture occidentale des mieux nantis, et un puis-sant moyen de domination et d’exploitation (Lanquar, 1985 ; Trottier,1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Michel, 2000b ; Hillali, 2003).

1. <www.world-tourism.org/francais/newsroom/campaign/menu.htm>.

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Ce chapitre ne tente ni d’analyser ces deux courants ni de prendreposition face à l’un d’eux, quoiqu’il s’appuie fortement sur des ouvragessociologiques et anthropologiques. Il aborde la question des impactssociaux et culturels, voire des incidences à plus long terme de la rencontretouristique sur les communautés d’accueil et sur les individus-touristes.Il tentera de mettre en évidence que ce rapport, qui doit être compriscomme un système de relations, peut générer des avantages sociaux etculturels pour les deux parties, mais également des incidences négatives.Autrement dit, il y a effectivement deux côtés à la médaille.

Par contre, loin de nous l’intention de dresser une liste exhaustivedes impacts et de nous attarder à les décrire individuellement, un exercicepérilleux considérant la multiplicité et la variabilité des rapports existantsentre visiteurs et visités. Également, comme le soulignent Guay et Lefebvre(1995), il est difficile de les attribuer exclusivement au phénomène touris-tique, car ils sont plutôt le fait « de complexes combinaisons de rapportsde forces et d’influences ».

Nous proposons donc, à partir d’une analyse documentaire, de jeterun regard sur les impacts sociaux et culturels du tourisme, autant chez lescommunautés hôtes que chez les touristes, en lien avec certains méca-nismes d’influence. Considérant que nombreuses études traitent desimpacts dans une réalité touristique Nord / Sud, notre curiosité nousamène à nous interroger sur les impacts dans un contexte occidental, voireau Québec, où le tourisme est un secteur d’activité économique parmid’autres. Sans avoir réalisé une enquête scientifique, nous appuierons notrepropos sur la base d’entrevues réalisées avec six intervenants2 œuvrantdans les domaines du tourisme et du développement régional et local afinde connaître leurs perceptions des impacts sociaux et culturels du tou-risme. Nous avons utilisé la même méthodologie pour saisir l’influencedu voyage sur les touristes occidentaux. L’analyse de contenu du discoursde quatre individus ayant voyagé, l’observation et l’écoute de touristeslors de nos propres voyages et l’étude de récits de voyage journalistiqueset de documentaires télévisuels nous a permis de formuler quelquesréflexions, autant d’objets d’étude à approfondir. Néanmoins, l’ensemblede la démarche méthodologique a permis d’explorer une avenue, celle del’écotourisme comme activité d’épanouissement collectif et individuel.

2. Six intervenants se sont rendus disponibles pour une brève entrevue ou une séance de réflexion ;ils provenaient d’associations sectorielles provinciales ou d’organismes locaux de différentesrégions du Québec : Abitibi-Témiscamingue, Gaspésie, Centre-du-Québec, Montérégie,Chaudière-Appalaches. Nous tenons d’ailleurs à les remercier.

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Nous avons basé notre réflexion sur les concepts avancés par MarieLequin3 où l’écotourisme est une expérience personnelle, environne-mentale et communautaire qui fait appel au développement durable descommunautés locales et régionales et à la gouvernance participative.

LES IMPACTS SOCIAUX ET CULTURELS DU TOURISME

Le tourisme, qui oppose des individus porteurs d’intérêts et de culturesdifférents, exerce inévitablement des effets chez ceux-ci. Dans cette pre-mière section, nous tenterons de préciser ces effets et les mécanismesd’influence, lesquels varient selon que l’on est le visiteur ou le visité.Dans le dernier cas, nous proposons également d’examiner les impactsdans une société industrialisée, celle du Québec. Mais avant, qu’entend-on par impacts sociaux et culturels du tourisme ?

1.1. BRÈVE DÉFINITION DES IMPACTS SOCIAUX ET CULTURELS

En lien avec les communautés d’accueil, Guay et Lefebvre (1995)définissent les impacts sociaux et culturels comme ceux qui modifientl’organisation sociale, la culture et la quotidienneté. De façon plus spé-cifique, il s’agit des effets engendrés ou exacerbés par le tourisme sur :1) le style de vie, 2) la qualité de vie collective et individuelle, 3) lesrelations amicales ou autres que les individus entretiennent entre eux,4) les valeurs, les conduites morales et les systèmes de représentation. Ducôté du touriste, il s’agit plutôt d’impacts psychosociaux et culturels quiinfluenceront sa philosophie ou son idéologie de la vie en général, sasocialisation, sa compréhension des peuples, son identité (ou sa prise deconscience identitaire) et la recherche de nouvelles expériences (Lanquar,1985 ; Amirou, 1995 ; Groupe Confluences, 1996 ; Michel, 2000a).

Le terme « impact » signifie qu’il y a changement, positif ou négatif,sur une situation donnée ou sur des groupes d’individus. On parle deschangements réels mais aussi de changements perceptuels et symboliques

3. Voir les ouvrages suivants : 1) Marie Lequin (2001), Écotourisme et gouvernance participa-tive, Québec, Presses de l’Université du Québec ; 2) Marie Lequin et Jean-Bernard Carrière(2003), « Planification de l’accessibilité à l’expérience globale en écotourisme », Téoros,vol. 22, no 3, p. 29-36.

1.

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que développe une communauté à l’égard de l’activité touristique ou unindividu face à la société visitée, passant de la bienveillance à l’hostilité,chez l’un, ou de la compréhension à l’ethnocentrisme, chez l’autre.

Ces impacts sont perçus et vécus différemment selon les acteurssociaux en présence. Ils varient en fonction : 1) du milieu d’accueil, deses caractéristiques et de son niveau de développement, incluant le déve-loppement touristique ; 2) du nombre de personnes en présence, desmodalités de contact et de la durée des contacts ; 3) des valeurs et modèlesculturels et sociaux des populations en contact et de la perméabilité socio-culturelle des communautés hôtes ; 4) enfin, de l’attitude individuelle destouristes et des types de touristes, voire des rapports qu’ils entretiennentavec la communauté hôte (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ;Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999). Il est donc impossible de prévoirles impacts générés par le tourisme de façon précise car ils sont multi-formes et varient en intensité selon les contextes sociaux et culturels.

1.2. LES IMPACTS DANS LA COMMUNAUTÉ HÔTE

À partir des différents auteurs consultés, nous avons réalisé un tableausynthèse (tableau 3.1) sur les impacts possibles engendrés par le tourisme.Ce tableau montre les aspects à la fois positifs et négatifs pour différentstypes d’impacts – changement structurel et des populations, mobilisa-tion, référence culturelle et identitaire, modification culturelle, améliora-tion ou détérioration de la qualité de vie, socialisation, migration, fierté,développement du territoire –, selon les trois grandes aires de change-ment définies auparavant : l’organisation sociale, la culture et la quoti-dienneté. Rappelons que ces impacts ne peuvent être généralisés à tousles contextes.

Selon Brunt et Brunt (1999), ces impacts découlent de trois sourcesprincipales : le développement touristique, l’interaction visiteur-visité etles différences culturelles.

1.2.1. Le développement touristique

Le « développement touristique », selon sa forme et sa croissance, impliqueforcément des changements pour les communautés d’accueil, surtout auplan de l’organisation sociale et de la quotidienneté. Effectivement, ilpeut contribuer, entre autres, au développement de régions, à la cons-truction de routes, à l’amélioration de services aériens, etc. Mais un

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Tableau 3.1

IMPACTS SOCIAUX ET CULTURELS DU TOURISME DANS LES COMMUNAUTÉS HÔTES

Positif Négatif

Organisation sociale

– Changement structurel au niveau de la communauté et de la famille (p. ex., plus de femmes sur le marché du travail, changement dans la structure de l’emploi, développement d’un entrepreneuriat local, émergence de nouvelles productions). (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999 ; Gagnon, 1999 ; Marchant, 1999)

– Apparition d’institutions sociales (hôpitaux, écoles, etc.) et de nouvelles technologies. (Lanquar, 1985)

– Emploi peu rémunérateur et souvent saisonnier. (Gagnon, 1999)

– Ébranlement de la structure, des valeurs et des liens familiaux traditionnels, et conflits de générations. (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Jenkins, 1997 ; Hillali, 2003)

– Revitalisation et brassage des populations. (Gagnon, 1999)

– Introduction de disparités socioéconomiques. (Gagnon, 1999)

– Mobilisation des acteurs, concertation, partenariat et renforcement communautaire (voire démocratisation des pouvoirs). (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Gagnon, 1999 ; Proulx, 2004)

– Apparition d’une nouvelle classe de promoteurs ou d’entrepreneurs qui peut remettre en cause le pouvoir politique local et transformer les cultures locales (Lanquar, 1985 ; Robinson, 1999)

– Conflit entre différents secteurs économiques de la communauté d’accueil (Gagnon, 1999 ; Robinson, 1999)

– Concentration des décisions (par les gouvernements, par les tour-opérateurs de l’industrie touristique internationale, etc.) et exclusion des populations dans le processus décisionnel. (Trottier, 1992 ; Robinson, 1999 ; Hillali, 2003)

– Solidarité à l’intérieur de la communauté compromise par un climat de concurrence et par des pressions politiques. (Brunt et Brunt, 1999 ; Gagnon, 1999)

Culture

– Renforcement et valorisation des référents culturels locaux, notamment par une mise en valeur de l’identité, voire conscience d’être, conscience de sa distinction. (Guay et Lefebvre, 1995 ; Jenkins, 1997 ; Erb, 2001 ; Guerreiro, 2001 ; Iankova, 2005)

– Acculturation / déculturation : danger d’aliénation et d’assimilation des communautés d’accueil par le modèle culturel dominant : imitation et reproduction de comportements étrangers. (Cazes, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Brunt et Brunt, 1999 ; Hillali, 2003)

– Tensions entre culture locale et culture globale et/ou pénétration des modèles sociaux dominants : incidences sur les pratiques religieuses, les coutumes vestimentaires, les normes de conduite et les traditions vernaculaires. (Cazes, 1992 ; Jenkins, 1997 ; Hillali, 2003)

– Apprentissage des langues, voire enrichissement de la culture. (Trottier, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995)

– Érosion du dialecte local et de la culture traditionnelle. (Brunt et Brunt, 1999)

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– Préservation, revitalisation et mise en valeur du patrimoine, de l’artisanat local et des artisans. (Trottier, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Brunt et Brunt, 1999)

– Détérioration culturelle (p. ex., artisanat de mauvaise qualité, fausse antiquité). (Jenkins, 1997; Russo, 1999 ; Iankova, 2005)

– Folklorisation, mise en spectacle et marchandisation des particularismes culturels locaux menant à une perte de sens et d’authenticité. (Trottier, 1992 ; Cazes, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Boucher, 1998 ; Brunt et Brunt, 1999 ; Urbain, 2000 ; Erb, 2001 ; Guerreiro, 2001 ; Iankova, 2005)

– Valorisation de la politesse et de la courtoisie. (Bélanger, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995)

– Déviance accrue (désordre sexuel, drogue et alcool, délinquance, naissances illégitimes…) et maltraitance des femmes et des enfants. (Cazes, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Organisation mondiale du tourisme, 1997 ; Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999) *Mentionnons que ces impacts touchent également la quotidienneté.

Quotidienneté

– Amélioration de la qualité de vie (apport d’emplois et de revenus, opportunités récréatives, amélioration des infrastructures…), et soulagement de la misère (progrès pour les femmes et les groupes sociaux défavorisés). (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Organisation mondiale du tourisme, 1997 ; Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999)

– Détérioration de la qualité de vie (envahissement par les touristes, accès réduit à de beaux sites, envahissement des équipements existants (capacité de charge), encombrement / congestion des milieux de vie, inflation des prix, usage intensif des ressources…) et apparition de comportements déviants. (Lanquar, 1985 ; Cazes, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Organisation mondiale du tourisme, 1997 ; Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999 ; Gagnon, 1999)

– Modification du rythme de vie. (Gagnon, 1999)

– Intensification des contacts sociaux, socialisation accrue. (Guay et Lefebvre, 1995 ; Proulx, 2004 ; Iankova, 2005)

– Baisse de la cohésion sociale des territoires. (Gagnon, 1999)

– Individualisme accru. (Guay et Lefebvre, 1995)

– Migration vers les lieux touristiques (repopulation des milieux) et enracinement des populations, surtout les jeunes, dans la communauté. (Lanquar, 1985 ; Brunt et Brunt, 1999 ; Proulx, 2004 ; Iankova, 2005)

– Usure et exode des habitants des lieux touristiques. (Boucher, 1998 ; Russo, 2002 ; Lorenzi, 2004)

– Désappropriation territoriale et modification du sentiment d’appartenance à la communauté. (Gagnon, 1999)

– Prise de conscience de ses richesses et fierté. (Erb, 2001 ; Hillali, 2003 ; Proulx, 2004 ; Iankova, 2005)

– Remise en question du soi, complexe d’infériorité. (Lanquar, 1985 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Hillali, 2003)

– Développement de milieux et/ou de ressources difficiles à rentabiliser (plage, flore, faune, paysage). (Jenkins, 1997)

– Spéculation foncière et disparition de terres. (Lanquar, 1985)

– Apparition de bidonvilles à proximité des zones touristiques. (Lanquar, 1985)

Tableau 3.1 (suite)

IMPACTS SOCIAUX ET CULTURELS DU TOURISME DANS LES COMMUNAUTÉS HÔTES

Positif Négatif

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développement incontrôlé, qui échappe aux communautés locales, souventgéré par un pouvoir externe, tel les promoteurs ou les voyagistes del’industrie touristique internationale, ou par un gouvernement centralavide de gagner des devises fortes assez rapidement, mène généralementà des effets indésirables : un développement qui priorise la dimensionéconomique, voire l’activité marchande, et transforme les cultures localesen biens de consommation (Robinson, 1999). C’est le cas notamment deVenise où les décisions du pouvoir public ont provoqué une overdosetouristique avec près de 13 millions de touristes par an (en 2004) qui sebaladent dans les rues de la ville (200 touristes par habitant), provoquantla spéculation foncière, une détérioration de la qualité de vie, la musé-ification de la ville et l’exode des résidants (Russo, 2002 ; Lorenzi, 2004).C’est un développement touristique où les citoyens sont passifs etsubissent les contrecoups du tourisme, situation susceptible de créer unehostilité envers les visiteurs et l’activité touristique. Par contre, lorsquela population – incluant citoyens et acteurs divers de différents paliers –est impliquée et participe au développement touristique, elle sait se don-ner un plan de développement qui s’appuie sur ses potentialités, respectela qualité de vie et s’insère de façon harmonieuse dans le tissu social.C’est le cas notamment des communautés autochtones du Canada etd’Australie qui prennent en main le tourisme (Marchant, 1999). Il s’agitd’empowerment de la population et de dynamisme communautaire quiinfluent sur la solidarité, l’appartenance, la fierté et le développementglobal de la collectivité, entre autres par l’amélioration de l’emploi, lapréservation du patrimoine, la mise en place de services et infrastructures,la stimulation entrepreneuriale, etc. « Les entrepreneurs indigènes sont deplus en plus nombreux à présenter leur propre culture et à en tirer profit »(Marchant, 1999, p. 30).

1.2.2. L’interaction visiteur-visité

« L’interaction visiteur-visité », ce contact entre deux groupes, représenteassurément l’expérience touristique la plus importante. Par contre,notamment dans une situation de tourisme de masse dans les pays envoie de développement, elle suppose un rapport de forces où un groupe– les touristes – domine l’autre au plan culturel et matériel. D’où lerisque, à travers les mécanismes « d’effet de démonstration », de «syn-drome d’éloignement / transe touristique » et « d’exigences occidentali-sées», d’impacts, particulièrement sur la culture et la quotidienneté, dugroupe dit « inférieur » – la communauté d’accueil.

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• C’est par l’effet de démonstration que survient le changementchez les visités (Jenkins, 1997 ; Brunt et Brunt, 1999) qui cher-cheront à imiter l’Autre et à imiter le style de vie touristique,lequel représente largement le style de vie occidental (Gössling,2002) envié pour la richesse matérielle, le pouvoir de l’argent, laliberté et le plaisir qu’il sous-entend. Cet effet de démonstrationagit alors positivement ou négativement (particulièrementlorsque ces valeurs vont à l’encontre du style de vie local et destraditions) sur les coutumes vestimentaires, les pratiques reli-gieuses, les idéologies, les langues, les comportements, etc.Notons que ce sont les jeunes qui sont les plus susceptibles des’associer ou d’adopter ces nouveaux « patterns sociaux », quipeuvent parfois, à cause du deuxième mécanisme, s’apparenter àdes comportements déviants.

• Le syndrome d’éloignement du domicile (Cazes, 1992 ; Jenkins,1997) et la transe touristique qui se vit sous le mode de la fêteet du jeu (Laplante, 1996) amènent le touriste à se comporterdifféremment lors de son séjour en vacances. Loin des para-mètres sociaux contraignants de sa vie quotidienne, il peut, à titred’exemple, user davantage d’alcool ou de drogues, ou s’adonnerplus activement au jeu et au sexe. Malheureusement, ces demandes« déviantes » créent une pression auprès de la communauté hôtequi y répond par une multiplication de services « déviants »comme la prostitution et les casinos, lesquels sont décrits commele « parasitisme du tourisme » par Cazes (1992).

• Les impacts sur la culture et la quotidienneté seraient dus aussiau fait que les vacanciers implantent volontairement leur style etleur rythme de vie en exigeant un service « occidentalisé » (caféavec le repas, fast-food, eau chaude dans la chambre, service entout temps, etc.) et imposent des comportements touristiquesincompatibles avec les traditions et les valeurs des hôtes (nuditésur les plages).

L’interaction visiteur-visité, toujours dans le cas du tourisme demasse, se caractérise aussi par une superficialité : 1) souvent en lien avecune relation marchande où presque tout se monnaye – l’accueil, le ser-vice rendu, une photo, un sourire, une babiole, etc. –, voire une hospi-talité financière ; 2) limitée aux contacts avec les gens œuvrant dansl’industrie touristique, voire une hospitalité de service ; 3) restreinte àla seule visite des attractions touristiques, voire une communication

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indirecte ou médiatisée (Lanquar, 1985 ; MacCannell, 1976 ; Laxon,1991 ; Cazes, 1992 ; Guay et Lefebvre, 1995 ; Laplante, 1996 ; Urbain,2000 ; Gössling, 2002 ; Heuman, 2005). D’ailleurs, Cazes (1992) men-tionne que moins de 1 % de la population locale établit un contactprolongé sous forme de conversations spontanées et informelles et derelations durables avec les touristes. C’est plutôt autour des attractionstouristiques que les individus forgent leur vision du monde et non plusà partir des relations sociales (MacCannell, 1976).

Le tourisme est donc devenu une activité qui tend à négligerl’essence même de la rencontre devant être basée sur l’hospitalité tradi-tionnelle définie par une certaine réciprocité, protection et obligationmutuelles entre visiteur et visité (Heuman, 2005), une convivialité, descontacts désirés et des rapports interpersonnels (Laplante, 1996). Dans lecontexte actuel du tourisme de masse, il est difficile de savoir si l’hospi-talité de la population est sincère ou devient une manœuvre enjôleusepour vendre quelque chose. C’est le caractère éphémère du contact quiexplique, entre autres, l’existence de ces relations dépourvues de sensprofond, ainsi que la condition d’« étrangeté » suggérée par Nash (1989).Selon cet auteur, la population locale voit le touriste comme un étrangerparmi tant d’autres qui ne fait que séjourner temporairement et qui nepartage pas le même sentiment d’attachement aux lieux ; tandis qu’àl’inverse, le touriste regarde les autochtones comme une curiosité, uneattraction. Les deux parties se perçoivent alors réciproquement commedes « objets » plutôt que comme des êtres humains, ce qui peut entraînerune relation où chacun agit en fonction de ses intérêts personnels. Lacondition d’étrangeté amène également les touristes à privilégier les rela-tions humaines à l’intérieur de réseaux sociaux familiers, c’est-à-direavec des gens de même origine, et à s’y confiner (Lanquar, 1985). MarcLaplante (1996) appelle ces réseaux la « bulle sociale », à travers laquellele touriste visite, découvre, commente la communauté visitée plutôtqu’en lien avec la population locale. Autrement dit, des deux côtés, iln’existerait pas de volonté de se mêler l’un à l’autre. Cette absence devolonté se combine à d’autres obstacles comme un état d’esprit différentqui oppose l’ordinaire au non ordinaire (car le tourisme met en relationun touriste qui est en situation de loisir, hors de ses obligations quo-tidiennes et du cadre du travail, à un hôte qui est dans son quotidien),la langue, le niveau d’éducation, des intérêts variables, l’existence depréjugés… et la différence culturelle.

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1.2.3. La différence culturelle

La « différence culturelle » entre visiteur et visité, un obstacle à larencontre et une troisième source d’impacts, constitue pourtant un desprincipaux attraits du tourisme. Effectivement, elle représente une formed’exotisme tant recherchée par le touriste et, à l’opposé, l’identité cul-tivée par la communauté hôte. Dans ce contexte, le tourisme devient unvéhicule pour aider les communautés à réaffirmer leur culture vivante età valoriser, voire sauver leurs référents culturels. Cette culture est trans-mise et s’exprime concrètement à travers l’activité artistique et intellec-tuelle locale, voire les arts sous toutes leurs formes (musique, danse,théâtre, littérature, peinture, sculpture, etc.), la gastronomie, le patri-moine bâti, les savoir-faire, etc., autant d’éléments qui donnent au lieuun caractère, une personnalité et un style, et qui influent sur la fierté despopulations et le sentiment d’« être ». Le tourisme agit souvent commecatalyseur de la reconnaissance et de la mise en valeur de l’artisanat,des fêtes et cérémonies traditionnelles, du patrimoine historique, etc. Illes fait revivre. C’est le cas notamment pour Luang Prabang, anciennecapitale royale du Laos, qui a renoué avec sa culture traditionnelle etson patrimoine architectural. « La musique traditionnelle est restéevivante, la danse reprend. Le tourisme est un stimulant » (Engelmann,1999, p. 44). Mais à la condition d’éviter de les dénaturer, de les «arti-ficialiser» et de leur enlever leur caractère vivant et sacré ou symbolique,ce qui n’est pas un mince défi, spécialement dans une industrie touris-tique qui mise beaucoup sur l’artificialité en prévoyant, par exemple, laréalisation d’une fausse médina de 55 000 mètres carrés en Tunisie(Patin, 1999) ou en vendant à Venise des masques de carnaval faits enCorée (Russo, 1999).

D’ailleurs, l’interaction superficielle, éphémère et banale décrite ci-dessus, conjuguée aux visées économiques du tourisme, a un impactmajeur sur la culture et l’identité des communautés locales, car elle tendà favoriser leur déculturation ou leur dépersonnalisation. C’est la cultureréduite au folklore, « touristifiée » et basée sur ce que MacCannell (1986)appelle une « ethnicité construite » et une « ethnicité reconstruite » qui apour effet de dépersonnaliser le pays visité. La première suppose unfaçonnement identitaire en fonction de choix parmi les « objets culturels»que la communauté hôte est prête à partager avec les touristes, voire uneintention d’« être » aux yeux des touristes. L’ethnicité reconstruite, elle,renvoie à une forme ethnique maintenue, préservée et recréée de façonfictive pour le simple divertissement d’un groupe ethniquement différent

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(souvent en fonction des mythes entretenus par ce dernier). Dans cecontexte, la relation culturelle transforme un groupe ethnique en attractiontouristique et le fige, le cantonne, dans une image stéréotypée, habituel-lement traditionnelle et primitive (pour répondre à la vague nostalgique,tourist nostalgia, qui touche le voyageur ou le touriste occidental[Bruner, 1991 ; S. des D., 2004]).

Dans les deux cas, c’est la mise en spectacle de la culture, réduiteen une chose à découvrir, à exposer et à commercialiser pour le simpleplaisir des touristes, qui constitue une menace à la culture des commu-nautés d’accueil. Une culture résiduelle détachée de son vécu, appauvrie,aseptisée, standardisée et instrumentalisée à des fins touristiques pour êtrevendue comme un bien de consommation aux touristes (Robinson, 1999 ;Shackley, 1999 ; Erb, 2001 ; Guerreiro, 2001 ; Picard, 2001). « Ces fêtes,avec leurs magnifiques danses masquées, jouaient autrefois un rôle essen-tiel pour le rapprochement des communautés isolées. Elles sont souventdevenues des “produits culturels” pour touristes » (Shackley, 1999, p. 28).Une « touristification » qui va jusqu’à détourner les populations localesde leurs pratiques traditionnelles (Shackley, 1999) ou façonner leur per-ception de leur propre identité, à partir d’une culture « retrouvée » maispas en fonction de celle qu’ils ont « perdue » (Erb, 2001). Les commu-nautés finissent par prendre l’image pour leurs caractéristiques identi-taires, ce qui brouille ainsi leurs réelles références culturelles distinctes4.En parallèle à cette altérité culturelle s’ajoutent une désocialisation et uneabsence de dialogue culturel dans la rencontre touristique par la marchandi-sation que suppose la culture-spectacle, qui met en scène des producteurs,des acteurs et un auditoire.

Cette mise en spectacle est étroitement liée au « transfert à l’argent »,c’est-à-dire cette idée de marchandisation et de transformation des com-munautés hôtes en biens de consommation – lieux idylliques et culturesexotiques. Selon Guay et Lefebvre (1995), le transfert à l’argent est unedes premières raisons de l’aliénation. Mais les coûts de ce facteur sur lescommunautés hôtes ne sont pas simplement d’ordre culturel, car ils semanifestent aussi sur l’organisation sociale et la quotidienneté avec l’idéed’intérêts économiques d’acteurs dans le développement touristique etcelle de l’hospitalité financière dans la rencontre touristique (Guay etLefebvre, 1995 ; Robinson, 1999 ; Heuman, 2005).

4. C’est ce qu’ont constaté ces trois anthropologues dans leur étude respective : Maribeth Erb(2001) à Manggarai, Antonio Guerreiro (2001) à Kalimantan-Est et Michel Picard (2001) àBali.

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Mais qu’en est-il des impacts sociaux et culturels dans le contexted’un tourisme occidental où l’activité touristique, guidée par les lois dumarché, n’est pas la principale activité économique, où l’écart socioéco-nomique entre les visiteurs et les visités n’est pas significatif et où, d’unepart, une véritable politique culturelle est mise en place pour affirmer etpréserver l’identité culturelle et, d’autre part, une politique touristiqueassure un développement touristique durable5 ? En prenant exemple surle Québec, nous tenterons de faire ressortir la nature des impacts.

1.3. LES IMPACTS SOCIAUX ET CULTURELS DU TOURISME DANS LE CONTEXTE QUÉBÉCOIS

Le Québec est une province de l’est du Canada qui occupe une superficiede près de 1,6 million de kilomètres carrés, dont 78 % est de caractèrerural6. C’est la seule province où la langue française est majoritaire enAmérique du Nord (80 % de la population, tandis que 8 % est anglo-phone, 9 % allophone et 1 % autochtone). Au plan culturel, elle tire partides origines multiples de sa population où « la culture québécoise jumelledes racines françaises à un héritage autochtone, tout en étant influencéepar son passé britannique, son positionnement dans la fédération cana-dienne, sa proximité avec les États-Unis et la population multiethniquequi compose son visage démographique7

». Le tourisme est un pilieréconomique important avec près de 330 000 travailleurs et 34 000 entre-prises touristiques québécoises. Ce sont près de 27 millions de touristesqui visitent annuellement le Québec, dont plus de 75 % sont des touristesdomestiques8. Mentionnons que la majorité des touristes étrangers seconcentrent dans les villes de Montréal et Québec. Le territoire québécoisest divisé en 21 régions touristiques dont les mandats sont, avec d’autrespartenaires, l’accueil, la promotion et le développement touristique.L’offre touristique est très diversifiée entre les régions. L’expérienceurbaine se vit dans les trois principaux pôles urbains du Québec (Montréal,Québec et Gatineau), tandis que le reste du territoire met surtout en valeur

5. Pour plus de détails, voir à cet effet la Politique culturelle du Québec : Notre culture, notre avenir :<mcc.quebectel.qc.ca/sites/mcc/ClinStat.nsf/0/4b9e6d693e6f9e8985256b840055b974?OpenDocument> et la Politique touristique : Vers un tourisme durable : <www.bonjourquebec.com/mto/publications/politiques/politique.html>.

6. Politique nationale de la ruralité, <www.mamr.gouv.qc.ca/publications/regions/ruralite/polnat.pdf>.

7. Citation tirée du site suivant : <fr.wikipedia.org/wiki/Quebec>.8. Informations statistiques tirées du site suivant : <fr.wikipedia.org/wiki/Quebec>.

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la nature et la culture du terroir. Les fêtes et festivals constituent unproduit important du Québec, avec près de 400 événements par année.Finalement, un tourisme dit « autochtone » est en émergence, répondantde plus en plus aux intérêts des Occidentaux pour les peuples et cultures« traditionnelles ».

En nous appuyant sur des entrevues réalisées auprès d’intervenants,nous constatons que les impacts du tourisme au Québec diffèrent quelquepeu de ceux exposés précédemment, surtout au plan de la culture. Glo-balement, les Québécois ne semblent pas vivre de sentiment d’inférioritéet d’aliénation identitaire par l’adoption d’attitudes et de comportementsétrangers, ni de mise en scène ethnique. Mentionnons cependant que lepetit nombre de personnes interrogées et leur provenance ne permettentpas de discriminer les impacts en fonction des milieux – urbain, rural,de quartier, de communautés spécifiques, etc., d’où l’impossibilité desoulever, par exemple, le problème d’authenticité culturelle du tourismeautochtone observé par Iankova. « La persistance d’une demandeappuyée sur l’image anachronique de l’Indien d’autrefois […] incite lesAutochtones à offrir une image stéréotypée, folklorique d’eux-mêmespour satisfaire les attentes des clients » (Iankova, 2005, p. 94).

Selon nos résultats d’enquête, les impacts se manifestent plutôt auplan du développement local des collectivités et de la quotidienneté.Certains sont positifs et d’autres, non.

1.3.1. Bénéf ces du tourisme au Québec

Il semble que le tourisme constitue une valeur ajoutée aux activités exis-tantes en contribuant à leur diversification, à la dynamique locale, àl’enrichissement collectif et individuel et à la mise en valeur du milieunaturel et culturel.

• Diversification économique : Le tourisme permet aux entre-prises existantes de développer d’autres activités contribuant,outre à sa rentabilité, au développement et à l’amélioration del’emploi, de la formation et des compétences, par exemple dansle cas des entreprises agricoles s’ouvrant à l’agrotourisme parl’ajout d’activités de transformation et d’animation touristique àl’activité initiale de production.

• Dynamique sociale : Le tourisme est une activité qui favorise lepartenariat sous toutes ses formes : concertation entre décideurs,maillage entrepreneurial ou mobilisation de citoyens. Autrement

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dit, il favorise la mise en place d’une dynamique locale parl’établissement, ou le rétablissement, de liens entre différentsacteurs ou groupes d’acteurs. Auprès des élus, le tourisme peutfaire oublier leurs confrontations pour les amener à se concerteret à penser un développement global, notamment sur des cré-neaux particuliers. L’idée de créneau interpelle à la fois les entre-preneurs qui s’unissent pour développer des produits forts oucomplémentaires et la population qui initie d’autres projets entre-preneuriaux : café mis en place par des jeunes de la Côte-Nord,livre de recettes en lien avec le produit d’appel de La Sarre réalisépar des jeunes du secondaire (Le paradis du Nord dans votreassiette). Même les institutions peuvent répondre à l’appel touris-tique. C’est le cas du Cégep de Drummondville qui a mis en placeun programme en arts. La mobilisation des citoyens est égalementtrès importante, particulièrement via le bénévolat dans les événe-ments et les corvées variées, dont le nettoyage du milieu naturelpour embellir les lieux destinés entre autres aux visiteurs. Le tou-risme a ainsi un effet d’entraînement pour des projets collectifs,lesquels ont un impact sur la création, le maintien et la perma-nence des emplois, la réinsertion sociale des jeunes décrocheursou des femmes, l’enracinement des populations (particulièrementles jeunes), le développement d’un sentiment d’appartenance etd’identification de la population à son territoire, la création denouvelles solidarités (citoyennes ou entrepreneuriales) et d’unecohésion sociale, etc.

• Enrichissement collectif et individuel : Le tourisme peutégalement entraîner un enrichissement à plusieurs niveaux. Parexemple :– il peut donner le goût aux jeunes, lors d’un premier emploi ou

d’une expérience de réinsertion dans une entreprise touris-tique, d’aller se former ou se spécialiser professionnellementpour revenir, dans certains cas, dans leur région natale et lafaire bénéficier de leur nouvelle expertise ;

– le tourisme, étant étroitement lié à la culture, favorise le déve-loppement, la démocratisation et la consommation de celle-ciauprès des populations locales ;

– l’attraction et les déplacements que certains lieux suscitentagissent, par l’« effet-miroir », sur la prise de conscience despopulations de leurs richesses et de la beauté des paysages deleur milieu. Dans ce cas, le tourisme est source de fierté et

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d’espoir, surtout pour les régions rurales vivant des problèmesde dévitalisation. C’est d’ailleurs cette fierté qui donne le goûtde partager une culture locale avec les visiteurs ;

– l’engagement bénévole que certaines activités touristiquesrequièrent influe sur l’estime de soi, la formation personnelle,la créativité, l’épanouissement de la personne, etc. ;

– le tourisme contribue aussi à l’enrichissement économiqueengendré par l’achat local et l’utilisation des ressourceslocales comme la main-d’œuvre. De ce fait, il peut contribuerà réduire l’exode des populations, particulièrement dans lescommunautés rurales.

• Préservation et mise en valeur du milieu naturel et culturel :Le tourisme permet de sauvegarder et de mettre en valeur lecaractère patrimonial et rural des villages québécois par leur res-tauration et leur embellissement. Soulignons que généralementles résidants agréent aux mesures visant la préservation et lavalorisation du milieu, étant soucieux du respect de leur environ-nement et de leur patrimoine. Le tourisme participe aussi à lamise en place d’activités de loisir pour les résidants par l’amé-nagement de parcs, l’organisation de festivals, l’implantation decentres d’interprétation ou de centres d’exposition, etc. Il favoriseégalement la valorisation des traditions et du folklore (savoir-faire, contes et légendes) qui revivent à travers les festivals oupar les producteurs touristiques ou les guides animateurs locaux.

1.3.2. Impacts négatifs du tourisme au Québec

Quant aux impacts négatifs énoncés par les intervenants interrogés, ilstouchent trois dimensions : l’emploi, la qualité de vie et la villégiaturepopulaire.

La question de la nature de l’emploi est la plus importante et la plussignifiante. Malgré que l’activité touristique suppose une certaine créa-tion d’emplois, ceux-ci ne sont pas de qualité, marqués par une faiblerémunération, par la précarité et par la saisonnalité. Christiane Gagnon(1999) a fait le même constat dans son étude sur les impacts des parcsnationaux (dans ce cas le Parc du Saguenay et le Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent) dans les communautés limitrophes. Elle ajoute que cesemplois sont souvent occupés par des femmes et des jeunes.

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Concernant la deuxième dimension, les effets négatifs sur la qualitéde vie se manifestent généralement de façon ponctuelle dans le temps,soit durant les périodes de pointe touristique. À ces moments, les rési-dants peuvent être irrités par la congestion routière et les manifestationsbruyantes (p. ex. les feux d’artifices à répétition). Dans certains lieux,par contre, comme dans le village de Saint-Sauveur, ces inconvénients, quis’étalent dans le temps étant donné un développement récréotouristiquecontinu, minent la qualité et le rythme de vie des résidants.

Finalement, l’augmentation du prix des propriétés foncières dansles milieux où la demande pour les résidences secondaires, voire la vil-légiature populaire, est importante peut jouer en défaveur de l’accessibi-lité à la propriété pour la population locale. Également, la forte présencede cette population passagère a comme effet d’affaiblir le tissu social dela communauté, surtout en dehors de la saison touristique, d’affecter lesentiment d’appartenance et de modifier la demande de biens et services.

Nous constatons que le tourisme, indépendamment du type decommunautés – de Luang Prabang à Venise, aux aborigènes australienset jusqu’au Québec –, influe sur les milieux de vie. Dans le cas duQuébec, cependant, les impacts semblent majoritairement positifs. Deuxraisons, selon nous, expliquent en grande partie cet état de fait : 1) letourisme québécois ne s’inscrit pas dans une logique de tourisme demasse ; 2) le développement touristique au Québec interpelle souvent lescommunautés locales, par la consultation, la concertation, le partenariat,la gestion des projets et même l’action militante. C’est grâce à cettedernière, d’ailleurs, que le gouvernement du Québec a aboli les clubsprivés de chasse et de pêche en 1978 et redonné accès aux terres publiquesà la population (Proulx, 2004). Le plan de développement récréotouris-tique du Sud-Ouest de Montréal, qui repose sur une vision d’ensemblede la communauté, est un autre exemple d’engagement de la commu-nauté, ayant été élaboré en concertation avec le milieu par la mise enplace de forums de consultation et de comités consultatifs (Proulx, 2004).La contribution des communautés est aussi vraie pour le tourisme autoch-tone au Québec où les projets sont gérés soit par les conseils de bande,des coopératives ou des promoteurs privés (Iankova, 2005).

Si les impacts d’une communauté à l’autre sont variables, le seront-ils chez les touristes ?

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1.4. LES IMPACTS PSYCHOSOCIAUX ET CULTURELS CHEZ LE TOURISTE

Comme le mentionne Urbain (1991), le touriste n’est pas seulement unexportateur d’influences, il est aussi un importateur, car, après son voyage,il effectuera des rites de ressouvenance (exposition de photos, mets culi-naires d’inspiration de l’Ailleurs, objets souvenirs qui prolongent l’exis-tence de l’au-delà, etc.) et, selon Laplante (1996), il gardera des « bits »culturels de l’Autre dans sa culture personnelle. « [L]e retour à la viequotidienne ne ramène pas le touriste exactement dans l’état où il setrouvait avant de partir. Il a vécu une expérience de plus, qui a laissé destraces dans sa culture au quotidien » (Laplante, 1996, p. 90). Rappelonsque les impacts, dans ce cas, pourront agir sur sa philosophie par rapportà la vie en général, sa socialisation, sa compréhension des peuples, sonidentité et sa recherche de nouvelles expériences (Lanquar, 1985 ; Amirou,1995 ; Groupe Confluences, 1996 ; Michel, 2000a). Cependant, dansnotre enquête auprès de touristes occidentaux, il est apparu nettement quele tourisme influe sur la compréhension des peuples et stimule la prise deconscience existentielle et identitaire. Ces effets semblent en lien avec letype de touriste où l’ouverture d’esprit et le degré d’observation et dereconnaissance sont variables. Ce sont trois éléments que nous aborderonsdans cette section.

1.4.1. Le touriste

Outre le fait que le touriste est un étranger qui se déplace volontairementpour son plaisir vers l’Ailleurs, il existe une panoplie de typologies pourle décrire en fonction de ses comportements et attitudes de voyage9. Dansla littérature anthropologique, on fait la distinction entre deux types : levoyageur et le touriste (Michel, 2000a). Le premier est « vrai », l’autreest « faux ». Le voyageur est celui qui découvre, qui explore et quicherche l’aventure. Il est désireux de connaître l’Autre, le secret de seslieux et de ses mœurs, pour se découvrir. En d’autres termes, il est à laconquête de soi, de son identité, à travers l’Autre. Le touriste, quant àlui, est un voyageur pressé, superficiel et de premier niveau d’observation

9. Exemples de typologies. 1) En fonction de la consommation : client méfiant, calme, pressé,aimable, qui sait tout, etc. 2) Selon ses attitudes : sociable, timide, mondain, casanier, curieux,itinérant, individualiste. 3) Selon son comportement spatial : sédentaire, sédentaire-mobile,itinérant, nomade. 4) Divers : explorateur, touriste d’élite, touriste hors-circuit, touriste à larecherche d’insolite, touriste de masse, touriste à la recherche de confort, touriste voyageantà forfait. Etc.

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avec la communauté hôte. Il est attiré vers l’image des choses, le spec-tacle, les sites obligés. Il se détourne de la rencontre en préférant lesmonuments aux Hommes et en la dépersonnalisant avec son appareilphoto. Deux « touristes », selon Bruner (1991) et Urbain (1991), qui sedistinguent par leur ouverture d’esprit et leur degré d’observation et dereconnaissance de la communauté hôte, et qui opposeraient des modesdifférents de voyager : l’un, davantage individuel et itinérant, qui préfèrevoyager incognito et où les occasions de rencontres et d’acculturationsont plus fréquentes (c’est le touriste dit « sioux » d’Urbain) ; l’autre,programmé, ritualisé et probablement concentré et enclavé spatialement(c’est le touriste de masse, communément désigné par le même auteurtouriste « huron »).

1.4.2. L’ouverture d’esprit

L’attitude du touriste sioux est plus susceptible, selon nous, de provoquerchez l’individu des changements positifs comme une meilleure compré-hension des peuples, une conscientisation face aux différences, et de cefait une plus grande tolérance et une plus forte propension à la paix, carà travers la rencontre ou l’ouverture à l’autre, il accepte de douter de luiet de se risquer à l’altérité (Michel, 2000a). C’est le cas entre autres dece touriste québécois, Bruno Blanchet, qui a entrepris une « frousseautour du monde » en mai 2004, et qui à Mandalay, par exemple, setrouve indécent d’être parmi les pauvres qui ont toujours un sourire etd’être aussi blanc avec ses dollars américains dans les poches (Blanchet,2005a)10. Pour sa part, le touriste de type huron tend à renforcer, par sesinteractions superficielles et éphémères à travers la visite ritualisée devillages et de musées, les préconceptions culturelles et les stéréotypesqu’il entretient de son monde et de l’Autre, lesquels tirent leur originedes colonisations antérieures, de la littérature et des bandes dessinées,des films et de la télévision… et même des discours des guides touris-tiques. C’est ce qu’a constaté Laxon (1991) au Nouveau-Mexique, où lavisite des sites touristiques vient conforter l’Américain de classe moyenne-riche dans son opinion sur son identité et celle du peuple visité, lesIndiens. À ses yeux, ces derniers sont de « nobles sauvages » qui viventen harmonie avec leur environnement, jouissent d’une simplicité de vie,mais sont stoïques, sanguinaires, alcooliques et pauvres, tandis que lui ades aspirations professionnelles plus élevées, est autonome, a une

10. L’ensemble des textes du périple de Bruno Blanchet peut aussi être consulté sur le site Internetsuivant : <www.ilederien.com/bruno/frousse>.

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meilleure éducation, est matérialiste, etc. L’auteur conclut que l’on nepeut pas briser les stéréotypes par ces rencontres trop brèves et la visitede sites touristiques obligés. Au contraire, au lieu de favoriser uneouverture d’esprit, on ne fait que renforcer l’ethnocentrisme.

1.4.3. Degré d’observation et de reconnaissance

L’ouverture d’esprit est étroitement liée au degré d’observation et dereconnaissance, voire d’acculturation. Effectivement, on constate, dans lecas de l’étude de Laxon mentionnée ci-dessus, que les touristes améri-cains sont à un niveau d’observation superficiel en limitant leur séjourau circuit proposé par l’industrie touristique. À l’inverse, Bruno Blanchetvit l’acculturation et accepte, par exemple, de chasser le cochon sauvageen sulu, c’est-à-dire « en jupette pas de bobettes » (Blanchet, 2004), oude manger de la viande au petit déjeuner, au dîner, pour le souper et lesoir devant la télévision en Mongolie (Blanchet, 2005a).

Mais l’absence de rencontre authentique ou d’acculturation nesignifie pas l’absence d’influences positives sur le touriste, notamment surla conscientisation. C’est ce que les entrevues avec des touristes occiden-taux nous ont enseigné. Effectivement, le tourisme invite à réfléchir surdeux dimensions : l’existence et l’identité, et ce, indépendamment du typede voyage – organisé, enclavé ou itinérant – ou du type de touriste – siouxou huron. C’est le degré de profondeur d’observation et de reconnaissancequi varie, voire le degré de réflexion et de conscientisation. Le touristeitinérant aura la chance de voir les réalités, mais aussi de s’instruire àmême les contacts et les expériences vécus auprès de la population hôte,lesquels sont riches en information, tandis que le touriste « enclavé » ou« organisé » saisira visuellement quelques brins des conditions de vie,mais alimentera principalement sa réflexion des discussions entretenuesavec les membres du personnel touristique (guide animateur, marchand,employé de l’hôtel, chauffeur), sortes de médiateurs culturels, et desattractions visitées.

Sur la question de la conscientisation existentielle, certains touristesviennent à se demander : « Pourquoi eux et pas nous ? », un questionne-ment qui est d’autant plus important dans un contexte de voyage Nord /Sud. Le fait d’être témoin oculaire ou auditif d’une autre réalité, provo-quant presque une gêne face à ce voyeurisme de conditions « intimes »telle une grande pauvreté, conscientise le touriste aux inégalités et auxinjustices au niveau de la richesse et de l’accès aux ressources et aux

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services dits « essentiels ». « Notre impatience face au système de santéquébécois devient alors injustifiée en comparaison à un pays [comme leVietnam ou le Cambodge] qui n’a pas de système de rendez-vous. » Ilpermet aussi de saisir la valeur des choses, comme les ressources natu-relles (spécialement le prix de l’eau), de vieilles chaussures, un simplecrayon, etc. Effectivement, en tant que citoyen d’une société occidentale,le touriste se considère « chanceux et gâté », malgré qu’il envie la tem-pérature, la mer ou les valeurs familiales traditionnelles des pays visités.Parfois il s’interroge : « Qu’est-ce qu’on peut faire ? », mais la plupart dutemps l’action se limite à l’observation, à l’achat de quelques souvenirset à la simple compassion. Dans son quotidien, il apprend à se contenter,sans pour autant changer réellement ses comportements.

Le voyage amène aussi le touriste à prendre conscience de sa propreidentité, et ce, indépendamment de la destination. « Qui sommes-nous ?Que ne sommes-nous pas ? » Effectivement, voyager c’est affirmer sadifférence et pour cela on a besoin de l’Autre comme repère. Alors, letouriste est en constante comparaison… qui l’amènera peut-être, sait-on,à recomposer son identité : « Ils aident et respectent les personnesâgées… nous, on a pas le même attachement. » « Ils ont des qualitéshumaines… nous, on ne les exprime pas comme eux. » « Ils se contententde peu pour être heureux… nous, on a besoin de beaucoup de matériel. »Malheureusement, il arrive parfois, à cause d’une méconnaissance de laculture de l’Autre, que la comparaison découle en commentaires ou cri-tiques déplorables, comme chez ces touristes américains qui considèrentles Indiens comme des alcooliques (Laxon, 1991).

On peut conclure que le tourisme a le potentiel de développer uneconscience sociale, laquelle pourrait dériver en gestes concrets (autant àl’étranger qu’à domicile), selon le type de touriste, son ouverture d’espritet son niveau d’acculturation. Il est aussi une source d’enrichissementdes individus, tel que promu par l’OMT et le BITS, par la simple décou-verte de milieux, de cultures et de peuples différents qu’il suscite.

Cependant, pour stimuler davantage la compréhension des peupleset une conscientisation salutaire, il ne suffit pas, à notre avis, de misersur la rencontre authentique, celle spontanée et partagée du « vrai » voya-geur, d’autant plus que ce dernier n’existe pratiquement plus selonLaplante (1996), mais plutôt sur le « savoir-être touriste », c’est-à-direl’apprentissage de l’« art » de faire des voyages d’agrément.

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[S]avoir faire un voyage d’agrément suppose un apprentissage et constitueun élément clé du développement culturel personnel et collectif. Qui-conque s’occupera de développer ces apprentissages renouera d’abord avecun art de voyager qui s’est formé au cours des siècles et fait partie del’héritage culturel des voyageurs d’aujourd’hui ; il tiendra compte aussi dufait qu’une formation nouvelle est nécessaire pour tirer tous les avantagespossibles des voyages d’agrément. (Laplante, 1996, p. 139).

Diverses organisations agissent déjà à ce niveau, et ce, à différentesétapes de l’expérience touristique. Les agences de voyages jouent, oudevraient jouer, un rôle principal sur la sensibilisation à la culture del’Autre et ses interdits, notamment parce qu’elles rejoignent le touristeau moment où il a fait le choix de partir. Les organisations de tourismesocial, quant à elles, misent sur la rencontre, la sociabilité et la solidaritédans leurs activités. Et dans le quotidien, on peut penser aussi aux orga-nisations de loisir qui encouragent la rencontre, la socialisation et lerespect d’autrui, sans oublier les initiatives qui se mettent en placeactuellement au plan international pour assurer un tourisme éthique etresponsable de la part des touristes : Code de bonnes pratiques de l’éco-touriste11 promu par le ministère du Tourisme au Québec (Canada),Charte éthique du voyageur12 créée par le voyagiste Atalante, rejoint parl’éditeur Lonely Planet (France), Code mondial d’éthique du tourisme13

de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), Charte italienne detourisme durable14 coproduite par différents acteurs membres del’Agence italienne de tourisme responsable (Italie), Charte du tourismeen village d’accueil TDS15 de l’organisation Tourisme et Développementsolidaires, qui soutient les villages d’accueil au Bénin et au Burkina Faso(France et Burkina Faso), etc.

1.5. EN GUISE DE SYNTHÈSE

« Si l’on a su implanter des stratégies susceptibles de favoriser lesavantages économiques du tourisme, on doit pouvoir se donner lesmoyens de bien gérer les impacts sociaux, culturels et environnementaux»(Jenkins, 1997, p. 15). Sans prétendre avoir la solution à tous les mauxsociaux et culturels du tourisme, nous nous sommes permis de proposer

11. <www.bonjourquebec.com/mto/publications/pdf/etudes/code_eco_fr.pdf>.12. <www.lonelyplanet.fr/charte>.13. <www.world-tourism.org/code_ethics/pdf/languages/Codigo%20Etico%20Fran.pdf>.14. <www.aitr.org/Charte%20italienne%20du%20Tourisme%20durable.html>.15. <www.tourisme-dev-solidaires.org/qui/charte.htm>.

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certaines pistes de réflexion qui semblent s’imposer comme piliers d’undéveloppement et d’une rencontre touristiques plus équitables socia-lement et culturellement, c’est-à-dire réduisant les impacts sociaux etculturels négatifs et multipliant les avantages pour les communautésd’accueil.

Il apparaît que l’activité touristique doit être utilisée comme un outilde développement local et régional qui s’inscrit dans des objectifs d’amé-lioration de la qualité de vie de la communauté, et non comme unefinalité à caractère exclusivement marchand. Dans ce contexte, la parti-cipation locale « active », qu’elle soit citoyenne, entrepreneuriale ou ins-titutionnelle, est une condition essentielle au développement d’unsentiment d’appartenance, à la bienveillance face au touriste et à la réus-site du développement touristique. Ce développement doit être axé sur lacréation de créneaux territoriaux avec des activités qui mettent en valeurun système de représentation, voire une identité, inspiré d’une consciencehistorique mais fondé sur un patrimoine naturel et culturel vivant etactualisé, plutôt qu’exclusivement centré sur les monuments historiqueset les traditions. Ce patrimoine ne doit pas être l’exclusivité des touristes,mais ouvert aux résidants par des aménagements multifonctionnels, sti-mulant l’appropriation patrimoniale et facilitant l’interaction visiteur /visité. Sur la question de l’interaction, il faut prioriser un tourisme àpetite échelle (à l’opposé d’un tourisme de masse) ainsi qu’une animationtouristique ludique pour respecter la transe touristique et une hospitalitétraditionnelle basée sur la réciprocité, la convivialité et la communication.En d’autres termes, il convient de privilégier un tourisme alternatif (tou-risme social, tourisme solidaire) où les valeurs sociales prédominent surles retombées économiques.

Quant au touriste, il faut mettre en place des mesures pour favoriserprincipalement son ouverture d’esprit. D’une part, il faut encouragerl’apprentissage au voyage et la sensibilisation à la culture et aux normessociales de la communauté d’accueil, voire le « savoir-être touriste».D’autre part, un séjour long, la multiplication des visites et l’implicationcommunautaire (à l’inverse de l’observation) lors du voyage semblent agirpositivement sur les comportements des touristes par l’effacement de cer-taines barrières psychologiques qui entravent initialement l’ouverture àl’autre, la volonté de rencontre et d’acculturation et le désir d’agir. Il fautdonc envisager le développement d’activités basées sur un séjour prolongé(à l’inverse d’éphémère) ou des séjours fréquents au même endroit, les-quels ont un effet sur les solidarités entre les peuples. Effectivement,

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certains touristes choisissent de retourner dans les pays fréquemmentvisités dans le but d’y faire de l’aide humanitaire. C’est le cas d’unehygiéniste dentaire qui a fondé une clinique pour les plus démunis enRépublique Dominicaine après de nombreux séjours comme vacancière16.Par ailleurs, mettre les touristes « en action » lors de leur séjour, par dutravail communautaire, a l’avantage de transposer le visiteur dans la peaudes Autres, de traduire la réflexion en action, en plus de susciter uneinteraction étroite et une hospitalité traditionnelle. C’est ce qu’a constatéHeuman (2005) dans son étude sur l’importance de la relation dans uncontexte de « touristes au travail » en République Dominicaine, untourisme très proche de celui dit « solidaire ».

L’ÉCOTOURISME, UNE AVENUE PROMETTEUSE ?

Miser sur un tourisme alternatif pour assurer un développement touristiquequi maximise les bénéfices sociaux et culturels de la communautéd’accueil et du touriste semble être une option qu’il faut envisager avecplus de sérieux. Parmi les voies prometteuses, mentionnons l’écotourisme,dont un des principes est la recherche d’avantages. Dans cette section,nous analyserons le paradigme de l’écotourisme en lien avec les méca-nismes d’influence dégagés précédemment. Nous proposerons égalementcertaines actions complémentaires à la formule écotouristique actuelle-ment diffusée afin de faire de celle-ci un produit « accompli ».

2.1. ANALYSE À PARTIR DU PARADIGME DE L’ÉCOTOURISME

L’écotourisme peut être considéré comme un tourisme alternatif, car ilrepose sur une expérience personnelle, environnementale et communau-taire (Lequin et Carrière, 2003) qui fait appel à des notions de dévelop-pement durable, de développement régional (et local) et de démocratieparticipative (Lequin, 2001).

Une expérience personnelle puisque l’écotouriste recherche unerelation intime avec une nature authentique (avec des aménagementsminimaux), idéalisée et hors des sentiers battus et en lien avec les culturesrégionales, c’est-à-dire où l’histoire est inscrite dans un milieu physique

16. Documentaire Le tourisme change-t-il le monde ?, 1992, Société Radio-Canada, émissionEnjeux.

2.

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Tiré de : L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, Christiane Gagnon et Serge Gagnon (dir.), �ISBN 2-7605-1430-7 • D1430N

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donné. Une relation qui favorise le respect envers l’environnement naturelet culturel, notamment par les activités d’éducation et d’interprétation,qui sont des composantes formelles du produit écotouristique. L’écotou-risme vise à aller chercher le visiteur dans ses valeurs pour l’amener àun second niveau d’éveil, celui de la sensibilité, des émotions et de laspiritualité, qui stimulera assurément la réflexion sur l’existence etl’engagement citoyen. Cette expérience personnelle permettra sûrementde réduire l’impression d’étrangeté et l’influence de la bulle sociale, touten favorisant le savoir-être touriste.

Une expérience environnementale, car l’écotourisme est un produit« de lieu », à forte identité écologique, culturelle et géographique, et àhaut degré d’observation et d’appréciation d’un exotisme. Nous sommesdonc loin, d’une part, de l’« attrait-spectacle » construit ou reconstruitconsidérant le souci porté à la question de l’authenticité et, d’autre part,du « transfert à l’argent ». Également, il y a lieu de croire que cette expé-rience ne peut qu’être actualisée et vivante, car on ne peut figer dans letemps l’environnement ainsi que la culture régionale qui s’y rattache.

Une expérience communautaire, c’est-à-dire qui « planifie et facilitela rencontre, l’échange sous diverses formes avec la population locale,afin de mieux comprendre comment elle s’est développée en relation avecla nature en place, comment son bien-être à long terme repose sur laconservation des lieux et du patrimoine » (Lequin et Carrière, 2003, p.33). N’est-ce pas ce que l’on convoite que de réduire l’effet du contactsuperficiel, de l’étrangeté et de la bulle sociale, et d’accentuer l’ouvertureà l’Autre ? Parallèlement, le touriste ainsi intégré à la communauté etvivant l’exotisme réduit son effet de démonstration et devient moinsexigeant par rapport à ses désirs occidentaux.

Manifestation du concept de développement durable, l’écotourismevise à assurer une plus grande part des avantages du tourisme auxcommunautés locales tout en préservant l’intégrité culturelle et environ-nementale et l’authenticité des lieux, notamment par la protection despatrimoines naturels et des zones fragiles et en évitant de dénaturer lessites. Un développement contrôlé ayant pour objectif d’améliorer la qua-lité de vie des résidants à court, moyen et long termes. Cette perspectivesur le long terme est intéressante, car elle permet parallèlement d’assurerune stabilité dans les conditions de vie des populations (au niveau del’emploi, de la préservation des ressources, etc.). En plus, le développe-ment durable permettrait, théoriquement, de garder l’authenticité du lieuet donc d’éviter la mise en spectacle.

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Considérer l’écotourisme dans une stratégie de développementrégional et local, c’est assurer l’amélioration des conditions et de laqualité de vie des collectivités, notamment par le développement del’emploi, l’achat local, l’émergence et le soutien à des projets provenantdu milieu, le respect des particularités, la diversification des activités, lavalorisation des produits locaux, notamment ceux des artisans, le réin-vestissement dans la préservation et la conservation de l’environnement,etc. Également, un tel développement a l’avantage de réduire le risqued’un développement incontrôlé, d’une prise de contrôle externe et de lafuite des bénéfices. Il permet aussi d’éveiller chez les résidants une appar-tenance et une fierté par rapport au lieu, réduisant l’envie d’imiter laculture et le style de vie du touriste. Mentionnons que ce développementest possible à partir de la mise en place d’un système de démocratie etde gouvernance participative.

C’est par une démocratie participative, voire une participation descollectivités locales, que se réalisent ou doivent se réaliser les projetsd’écotourisme. Cette démocratie sous-tend un système d’organisation derapports sociaux et de valeurs partagées dans le but d’une prise en charge.Elle réfère au pouvoir d’un peuple, plutôt que d’un seul homme, etsuppose une gouvernance impliquant une participation, une coopérationet une responsabilisation d’acteurs variés et multiples, incluant lescitoyens. D’ailleurs, ceux-ci doivent se situer au cœur du projet. Cettegouvernance est indispensable à un développement touristique équilibréqui tient compte des intérêts des populations et du respect du système dereprésentation, voire de la conscience d’être. Également, c’est par ceprocessus que se bâtit une dynamique locale autour d’un développementglobal social, environnemental et économique. La multiplicité des acteurspermet de considérer des intérêts autres que simplement économiques.Ceci assure aussi un meilleur contrôle sur la préservation et la conserva-tion des environnements, en plus de favoriser le développement d’unsentiment d’appartenance réduisant ainsi l’influence de « l’effet dedémonstration » discuté précédemment. Une telle gouvernance agit fina-lement sur l’habilitation (empowerment) et la formation des citoyens etla sensibilisation des décideurs.

À la lumière de ce portrait de l’écotourisme, nous concluons quecette activité a le potentiel de réduire les impacts négatifs et générernombreux avantages pour les milieux hôtes et les touristes. Le tableau 3.2résume ce potentiel en établissant les liens entre les concepts d’éco-tourisme et les mécanismes d’influence.

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Nous constatons que c’est dans le développement régional et localsoutenu par une démocratie participative, une expérience personnelle etune expérience communautaire que l’écotourisme trouve sa force. Cepen-dant, il semble moins se préoccuper du touriste en négligeant la transetouristique dans l’interaction visiteur/visité et le développement d’un« savoir-être touriste ».

2.2. QUELQUES PROPOSITIONS

Certains éléments restent donc, à notre avis, à développer pour améliorerle produit écotouristique dans un contexte d’effets positifs significatifssur le touriste.

Premièrement, pourrait s’ajouter à l’écotourisme, défini principale-ment comme une activité d’observation, de contemplation et d’apprécia-tion, une dimension de « mise en action communautaire » des touristesen les mobilisant dans des projets solidaires à teneur environnementaleet culturelle, avec la participation de la communauté locale, tout en pré-servant le caractère récréatif que suppose le tourisme. De tels projetspourraient favoriser une ouverture d’esprit dans un contexte de voyaged’agrément visant la solidarité, la sociabilité et le respect de l’autre. Enplus, ils pourraient contribuer à la fidélisation de la clientèle et à sonretour fréquent dans le milieu.

Rappelons que le tourisme se vit sous un effet de transe touristique,celle du jeu et de la fête. Ainsi, dans les activités de sensibilisation etd’éducation prévues, il ne faut pas oublier cet esprit de fête et prévoir,en second lieu, une animation ludique qui stimulera le touriste, maistoujours dans le respect de l’authenticité culturelle, sociale et environne-mentale du lieu et de la communauté hôte. Pensons à titre d’exemples àdes jeux de rôle, une exposition des photos prises par les touristes, undébat, la confection d’un document vidéo, etc.

Finalement, l’entreprise écotouristique doit aller plus loin dans lasensibilisation et l’éducation du touriste en ne limitant pas ses actionsexclusivement aux lieux de pratique. Il faut rejoindre ce dernier chez lui,avant son départ. La seule diffusion du Code des bonnes pratiques del’écotouriste, pour ne prendre que cet exemple, n’est pas suffisante, selonnous, pour informer sur la culture et le milieu. Il faut aider activementl’écotouriste à préparer son voyage.

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CONCLUSION

Le présent chapitre a mis l’accent sur l’analyse des impacts sociaux etculturels du tourisme dans les communautés hôtes et chez les touristes,les deux parties prenantes de cet espace de rencontre.

Auprès des communautés d’accueil, il apparaît que le dévelop-pement touristique, l’interaction visiteur/visité et les différences cultu-relles existant entre ces deux parties génèrent tant des impacts positifsque négatifs sur l’organisation sociale, la culture et la quotidienneté descollectivités. Divers mécanismes agissent à cet égard, lesquels peuventêtre mieux contrôlés lorsque l’activité touristique est utilisée comme outilde développement local et régional mobilisant la participation citoyenne,entrepreneuriale et institutionnelle locale et visant, d’une part, un tourismerespectueux des cultures régionales vivantes et, d’autre part, un tourismeouvert à une hospitalité traditionnelle à travers des lieux communs derencontre avec la population.

Quant au touriste pour lequel le voyage agit sur sa compréhensiondes peuples et sa réflexion existentielle et identitaire, il importe de sti-muler chez lui son ouverture d’esprit et son désir d’acculturation, notam-ment par un apprentissage au voyage, une sensibilisation face à l’Autreet le développement d’une offre de tourisme plus solidaire.

Dans cette volonté de mettre en place un tourisme socialement etculturellement bénéfique pour le couple touristique, l’écotourisme paraîtêtre une voie porteuse d’espoir, surtout parce qu’il a la prétention, ledésir et le souci de réduire au minimum les inconvénients dans lesmilieux et d’y maximiser les effets positifs. Mais cela ne se concrétisera,à notre avis, que dans la mesure où il réussira à éviter l’idéologie mer-cantile du tourisme de masse et restera dans un créneau de tourisme dit«alternatif». Par contre, une attention plus grande doit être portée enregard du touriste pour développer son « savoir-être » et respecter sonesprit du jeu et de la fête.

Peut-être que l’avenir de l’écotourisme se trouve davantage dansl’économie sociale qui promeut des valeurs d’égalité, de sociabilité, desolidarité et de durabilité dans les activités touristiques ; un tourismenouveau qui mise sur les forces de la collectivité plutôt qu’exclusivementsur les règles du marché et qui défend le développement de la personne,le contact humain, l’équilibre social, culturel et environnemental, et le

3.

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partenariat ; un tourisme qui s’insère, ou devrait s’insérer, avec sesvaleurs, dans l’industrie touristique. Selon nous, en effet, le terme« alternatif » ne sous-tend pas nécessairement la marginalité.

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IIIIPartie

Les parcs nationaux : produit d’appel de l’écotourismeVers un développement viable des communautés ?

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44

Chapitre

Tourisme et communautés d’accueil

*

Attitudes des communautés à l’égard des développements écotouristiques dans la région de Gascoyne, en Australie-Occidentale

Ross K. Do wling

, Ph. D.Foundation Professor and Head of TourismEdith Cowan University

* Les codirecteurs remercient madame Yolande Dumais pour la traduction de l’anglais au français.

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Résumé

La participation de la communauté d’accueil est fondamentale dans laplanification et la gestion du développement touristique, principalementen ce qui a trait aux problèmes environnementaux. La recherche sur lesattitudes des communautés envers le tourisme est en général assez biendéveloppée, mais il est peu fréquent de voir leurs opinions utilisées dansle processus de planification. La planification participative et citoyennedu tourisme favorise la conservation de l’environnement, le développementde communautés viables et une attitude positive envers le tourisme demême qu’elle minimise les impacts négatifs. La planification du dévelop-pement touristique doit servir à réduire les conflits d’usage entre lesvisiteurs et des objectifs de conservation de l’environnement aussi bienque ceux pouvant exister entre les visiteurs et les résidents, étant donnéqu’ils utilisent les mêmes ressources. Ce chapitre fera ressortir quelquesapproches environnementales et touristiques pour ensuite décrire commentla communauté d’accueil d’une région d’Australie-Occidentale, désignéecomme site du patrimoine mondial, voit le développement touristique, etcomment ses perceptions se répercutent sur l’environnement naturel et letissu social.

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La participation des communautés d’accueil est une base essentielle duprocessus de planification et de développement touristique (Cooper etWanhill, 1997 ; Richards et Hall, 2000). A.S. Travis (1980, p. 82) affirmeque « la population hôte et les services locaux sont très importants en soi,mais ils constituent en plus, il faut bien le dire, les ressources qui sont àla base de la relation avec les touristes ». Le Programme des NationsUnies sur l’environnement (PNUE) recommandait en 1986 que l’indus-trie touristique soit soumise à un programme de planification écologiqueet d’aménagement de l’environnement devant tenir compte du bien-êtrede la population locale qui, trop souvent par le passé, s’est vue contrainted’accepter une grande affluence de touristes sans avoir pu, au préalable,se prononcer à ce sujet. Les gens souhaitent maintenant voir leurs pré-occupations faire intégralement partie du processus de prise de décision.C’est ce qui a favorisé l’émergence de programmes de participationpublique et rendu dorénavant nécessaire la préparation des étudesd’impact environnemental.

Au cours d’une vaste étude, Liu et al. (1987) ont cherché à savoircomment les populations résidentes de Hawaii, du Pays de Galles et deTurquie percevaient l’impact du tourisme sur l’environnement. L’étudeillustrait à quel point il est important, à l’étape de la planification, deprendre en compte le point de vue des résidents dans l’évaluation deseffets du développement touristique. Les habitants d’Hawaii et du Paysde Galles ont mis la protection de l’environnement en tête de leurs prio-rités, classant celle-ci avant les bénéfices culturels, les coûts sociaux etmême les gains économiques. Les conclusions tirées de cette étudeétaient que l’impact du tourisme sur l’environnement est une préoc-cupation universelle ; selon la culture, on peut avoir des perceptions dif-férentes des impacts négatifs et environnementaux du tourisme ; lescommunautés d’accueil entrevoient les nombreux avantages que peutapporter l’industrie touristique comme, par exemple, la préservation dessites historiques ; il faut donc inclure le point de vue des communautésd’accueil quand vient le temps d’évaluer les effets du développementtouristique pour fins de planification.

La participation du grand public à la planification touristique estimportante pour plusieurs raisons. Elle permet, entre autres, de mieuxconnaître les attitudes et les perceptions correspondant aux points devue (à l’opinion) des résidents sur leur environnement, sur le dévelop-pement touristique, sur les aspirations de leur communauté et des tou-ristes eux-mêmes. Dasmann et al. (1973, p. 115) avancent que « plus

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la population locale retire d’avantages du tourisme, plus elle tireraprofit d’un engagement visant à préserver les caractéristiques naturellesqui attirent les visiteurs ».

Une deuxième raison de consulter la population est liée au fait queles communautés ne sont pas toutes favorables au développement touris-tique. La planification touristique devrait toujours se faire en étroite col-laboration avec les populations locales susceptibles d’en subir les effets.De Kadt (1979) déplorait qu’aucun pays, à sa connaissance, ne prenaitla peine d’évaluer des solutions touristiques de rechange dans le but desélectionner celle permettant de maximiser les avantages sociaux pourles populations d’accueil. Il recommandait une planification contrôlée parla communauté, une planification axée sur l’avenir, tout à l’opposé de laméthode habituelle de planification corrective. Quelques années plus tard,Murphy (1985) et Getz (1986) lui ont fait écho en insistant aussi sur laparticipation des communautés pour leur propre profit.

Une troisième raison en faveur de la consultation communautaireréside dans le fait que les populations locales sont effectivement cellesqui ont le plus à perdre ou à gagner dans les décisions politiques. LePNUE (UNEP, 1986, p. 2) suggère de « toujours faire la planificationtouristique en étroite collaboration avec les habitants des lieux, car cesont eux qui sont les plus susceptibles d’en subir les conséquences ».Murphy (1983) affirme que le tourisme s’épanouit grâce aux ressourcesde la communauté locale et qu’il faut donc tenir compte de l’opinion desgens qui habitent une destination touristique. Il ajoute qu’on prend deplus en plus conscience de la dépendance accrue du tourisme envers lacommunauté d’accueil et de ses responsabilités envers cette dernière. Parconséquent, il recommande de concevoir à l’avenir la planification dansune optique d’industrie communautaire ayant des comptes à rendre à lacommunauté qu’elle cherche à vendre. C’est aussi l’avis de Getz (1986),qui affirme qu’un plan de développement touristique devrait comprendredes clauses spécifiant comment le tourisme doit contribuer à l’atteinted’objectifs plus généraux favorisant le développement de la communauté,le renforcement de l’identité, le bien-être de la société, ainsi que l’ins-tallation et la maintenance de loisirs, d’infrastructures et de commodités.

La quatrième raison de connaître le point de vue de la commu-nauté au moment du processus de planification, c’est que l’on peut ainsise faire une idée de la perception que les hôtes (résidents) se font desvisiteurs (touristes). Mathieson et Wall (1982) suggèrent aux planificateursde tenir compte des opinions discordantes émises par les membres de la

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communauté d’accueil, et Romeril (1989) affirme que les cultures hôtesprésentent un degré variable de résistance ou de souplesse face à l’impactdu tourisme. Plusieurs individus impliqués dans l’industrie touristique vonttrès vraisemblablement accueillir les touristes à bras ouverts, tandis qued’autres peuvent ne pas supporter leur présence et leurs comportements.

En résumé, la participation de la communauté d’accueil au dévelop-pement touristique, principalement en ce qui a trait aux problèmes reliésà l’environnement physique, fournit une approche plus équilibrée que lesapproches de développement traditionnelles. La recherche sur les attitudesdes communautés envers le tourisme est en général assez bien développée,mais il est peu fréquent de voir ces opinions utilisées dans le processusde planification (Pearce, 1989). Il est cependant essentiel d’en venir là sil’on veut assurer la conservation de l’environnement, minimiser les con-séquences inacceptables et favoriser la croissance des communautés et uneattitude positive envers le tourisme. La planification touristique doit servirà réduire les conflits de toute sorte entre les visiteurs et l’environnementaussi bien que ceux pouvant exister entre les visiteurs et les résidents, étantdonné que tous revendiquent les mêmes commodités (Knopp, 1980). Ceconflit potentiel peut être résolu en grande partie si l’on cherche à connaî-tre les opinions des résidents et des touristes et si l’on en tient compte àla phase de planification. L’adoption par l’industrie touristique d’une atti-tude proactive offre des perspectives plus vastes que la position réactiveactuelle de la plupart des communautés (Gunn, 1987). Il appert doncqu’une partie importante de tout processus de développement touristiqueconsiste à chercher à connaître l’opinion des membres de la communautéd’accueil sur les problématiques physiques, sociales et culturelles soule-vées par le tourisme. Pour y parvenir, il importe de bien comprendre lesdifférentes approches vis-à-vis les questions environnementales. Dans cechapitre, nous ferons ressortir quelques approches environnementales ettouristiques pour ensuite décrire comment la communauté d’accueil d’unerégion d’Australie-Occidentale désignée comme site du patrimoine mon-dial voit le développement touristique, et comment tout ceci se répercutesur l’environnement naturel et le tissu social.

L’ENVIRONNEMENT

L’environnement se définit simplement comme étant « ce qui nousentoure ». Généralement, cependant, le terme sert à désigner l’environne-ment terrestre, qui comprend à la fois les éléments biophysiques et des

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éléments fabriqués par l’être humain. L’environnement biophysique,appelé aussi environnement physique, c’est la biosphère ou la coucheexterne de la Terre. Il comprend l’atmosphère (l’air), l’hydrosphère (l’eau)et la lithosphère (le sol). La biosphère contient tous les organismes vivants,et ce qui fait la variété parmi les nombreux organismes s’appelle la diver-sité biologique ou biodiversité. L’environnement biophysique englobe àla fois l’environnement terrestre (la terre) et l’environnement marin(l’eau), divisés en trois grandes zones climatiques : les régions polaires,les régions tempérées et les régions tropicales. Dans les latitudes plusélevées (polaires), c’est la température qui revêt le plus d’importance,alors que dans les zones tempérées et tropicales, les précipitations déter-minent les différenciations. À l’intérieur de chaque grande région clima-tique, on retrouve plusieurs environnements (ou écosystèmes) différents,notamment les déserts, les prairies et les forêts.

1.1. LES DIFFÉRENTES APPROCHES ENVIRONNEMENTALES

Selon leur façon de voir le monde, les gens ont des opinions variablesdu degré de gravité de nos problèmes environnementaux (Miller, 1994).Ces visions du monde sont de plusieurs natures, mais les deux pluscommunes se distinguent selon qu’on place ou non l’être humain aucentre de toutes choses. Deux exemples illustrent ces façons de voir : ily a la vision centrée sur l’humain (anthropocentrique), sous-jacente à laplupart des sociétés industrielles et la perspective écocentrique (centréesur la vie). Les principes clés de l’approche centrée sur l’humain sontque les êtres humains forment l’espèce la plus importante de la planèteet que nous sommes une espèce à part qui est responsable du reste de lanature. Cette vision suppose que la terre recèle des ressources illimitéesauxquelles nous accédons par le biais de la science et de la technologie.D’autres pensent que toute vision du monde centrée sur l’être humain,même en termes de responsabilité, est une vision insoutenable à terme(non durable). Ils nous suggèrent d’élargir notre vision du monde afin dereconnaître une valeur inhérente et intrinsèque à toutes les formes de vie,c’est-à-dire une valeur indépendante de l’utilité potentielle ou réellequ’elles représentent pour nous. Par cette vision écocentrique, les humainscroient qu’il est utile de reconnaître la biodiversité comme un élémentvital de toute vie sur terre.

La perspective écocentrique estime que la nature existe pour toutesles espèces de la Terre et que l’espèce humaine n’est pas une espèce àpart ou en charge du reste de la nature. Essentiellement, cela sous-entend

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que nous avons besoin de la Terre, mais que la Terre n’a pas besoin denous. Cela suppose aussi que certaines formes de croissance économiquesont bénéfiques, mais que d’autres sont nuisibles. Nous devrions avoirpour objectif de concevoir des systèmes économiques et politiques quiencouragent les formes de croissance durable et entravent ou interdisentles formes qui causent la dégradation de l’environnement ou la pollution.Une économie saine dépend d’un environnement sain.

Donc, selon cette interprétation, le maintien de l’intégrité de la terreimplique que chacun de nous soit prêt à prendre l’engagement personnelde vivre une vie dans le respect de l’éthique environnementale. Par exten-sion, quand on applique cette théorie au tourisme, cela signifie que lesgouvernements, l’industrie touristique, les exploitants, les touristes et lescommunautés locales devraient tous avoir un rôle à jouer, non seulementdans la conservation des aires naturelles, mais aussi dans leur enrichis-sement. De cette façon, la ressource elle-même, qui est le fondement del’industrie du tourisme des aires naturelles, sera protégée et utilisabled’une manière durable qui encourage la protection de l’environnement etcontribue au bien-être social et économique.

1.2. LA CONSERVATION DE L’ENVIRONNEMENT

Au niveau de la communauté, la conservation de l’environnement physiquepeut se faire de plusieurs manières, par exemple, en adoptant une approchebiorégionale ou en faisant la promotion de l’éthique éducative. La pre-mière option vise à amener les gens à acquérir une vision élargie de lazone géographique locale où vit leur communauté pour mieux com-prendre qu’elle fait partie d’une région naturelle ou biorégion. Une bio-région est un milieu de vie unique qui comprend ses propres sols, sonpaysage, son bassin hydrologique, ses microclimats, ses populations deplantes et d’animaux sauvages et d’autres caractéristiques naturelles quila distinguent. Le mode de vie biorégional est une tentative de compré-hension des cycles naturels, des débits et des rythmes d’un endroit par-ticulier dans le but d’y vivre « de façon durable ». Pour les communautéslocales, cela signifie plus de clarté au niveau de leur utilisation de l’envi-ronnement et au niveau des conséquences sur l’énergie, l’eau, la produc-tion de rebuts, etc. Ces choses sont souvent plus facilement comprisespar les communautés traditionnelles, rurales ou éloignées que par cellescrées plus récemment et plus urbanisées.

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Par l’éducation environnementale, on cherche avant tout à aider àdévelopper des communautés informées, préoccupées de la protection del’environnement et motivées à poser des gestes. Ceci implique qu’on aideles gens à acquérir des connaissances sur leur environnement naturel,social et économique ; qu’ils se préoccupent de leurs problèmes environ-nementaux ; qu’ils soient motivés à agir de manière responsable en amé-liorant la qualité de leur environnement et de leur vie. Ainsi, pour assurerla durabilité de l’environnement physique au niveau de la communauté,il faut que les gens s’engagent individuellement et collectivement à vivredans le respect de l’éthique environnementale. Cette logique supposequ’on agisse en raison du bon sens plutôt que pour se conformer à uneloi. Cette rectitude morale réside dans notre responsabilité individuelleet collective envers l’environnement, la Terre et tout ce qui vit. C’est ceque nous appelons « l’éthique environnementale », et les communautéspeuvent entreprendre une série d’étapes pour faire la promotion de cetteapproche. Ces étapes comprennent une évaluation de notre vision del’environnement physique en comparant son état actuel à sa conditionnaturelle. Les communautés devraient aussi devenir mieux informées ausujet de l’écologie tout en mettant en commun leurs connaissances envi-ronnementales et leur sensibilisation à l’environnement, afin de bâtir unevision collective du monde naturel.

Les communautés pour lesquelles une perception écocentrique del’environnement fait déjà partie de la tradition ou a déjà été adoptée sontplus susceptibles que les autres de parvenir à préparer un avenir durable.Dans les éléments importants de cette approche, on retrouve l’idée quel’environnement physique existe pour toutes les espèces et que l’humainn’est que l’une d’entre elles, et non une espèce à part ou responsable dureste de la nature. Ceci est étayé philosophiquement par la vision voulantque « les êtres humains ont besoin de la Terre, mais la Terre n’a pasbesoin des gens ». Par conséquent, le développement touristique chez lescommunautés d’accueil devrait viser à créer des systèmes économiqueset politiques qui encouragent des formes de croissance durables qui appor-tent des gains économiques et sociaux à tous, pour aujourd’hui et pourl’avenir. On fait ici valoir la notion voulant qu’une économie saine nesoit possible que dans un environnement sain. Une vision durable commecelle-ci se base sur quelques grands principes : l’interconnexité, la valeurintrinsèque, la conservation, l’équité intergénérationnelle et la responsa-bilité individuelle.

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LE TOURISME

Hall (1991) définit le tourisme comme le déplacement temporaire et decourte durée de non-résidents allant d’une destination vers une autre. Cecipeut causer une vaste gamme d’impacts sur la destination, la routeempruntée et le lieu de provenance des touristes. Le tourisme peut aussiinfluencer le caractère du touriste lui-même. On fait du tourisme dans unbut de loisir et de récréation, bien que plusieurs se déplacent par affaires.L’expérience touristique est habituellement centrée sur les activités de loi-sir et de récréation. Le tourisme est généralement perçu comme étant mul-tidimensionnel, avec des caractéristiques physiques, sociales, culturelles,économiques et politiques.

L’industrie touristique du XXIe siècle sera non seulement la plusgrande industrie mondiale, mais aussi la plus grande industrie jamais vuedans le monde (Page et Dowling, sous presse). Au fur et à mesure de sacroissance, l’industrie touristique devra assumer des responsabilités deplus en plus importantes en raison de ses impacts considérables, que cesoit sur l’économie, sur la société ou sur l’environnement. L’Organisationmondiale du tourisme (OMT) indique que les touristes du XXIe sièclevoyageront plus loin pour leurs vacances. La Chine sera la destinationprivilégiée en 2020 tout en devenant aussi le quatrième marché générateurde touristes pour les autres pays. D’autres destinations appelées à franchirde grands pas dans l’industrie touristique sont la Russie, la Thaïlande,Singapour, l’Indonésie et l’Afrique du Sud. Le développement et la miseen marché des produits seront plus étroitement liés et devront se basersur ce qui motivera principalement les déplacements au XXIe siècle : ledivertissement, la participation à des activités stimulantes et l’éducation.

2.1. LES TYPES DE TOURISME

La notion de tourisme comprend deux volets : le tourisme de masse et letourisme alternatif. Le premier se caractérise avant tout par une foulenombreuse de gens recherchant une réplique de leur propre culture dansdes lieux institutionnalisés, avec un minimum d’interactions culturelleset environnementales dans des contextes authentiques. Le tourisme alter-natif est parfois défini comme un « tourisme à thème » ou un « tourismeresponsable » qui implique habituellement des approches touristiques dif-férentes, en cherchant à établir un contact plus étroit et une meilleurecompréhension entre les hôtes et les visiteurs, et entre les touristes etl’environnement (Smith et Eadington, 1992).

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L’essor du mouvement en faveur de l’environnement dans lesannées 1980 a coïncidé avec le développement d’un choix plus grand etplus accessible de séjours qui, contrairement au tourisme de masse,impliquent un niveau supérieur de sensibilisation à l’environnement. Letourisme alternatif peut se définir grossièrement comme : différentesformes de tourisme qui s’efforcent de demeurer en harmonie avec lesvaleurs naturelles, sociales et communautaires et qui permettent autant àl’hôte qu’au visiteur de prendre plaisir à une interaction intéressante touten partageant des expériences (Wearing et Neil, 1999).

E. Cater (1993) mentionne que le tourisme alternatif comporte desactivités à petite échelle, offertes par des gens de la place. Elle laisseentendre que ces activités font contraste avec le tourisme de masse, sou-vent caractérisé par des intérêts multinationaux de grande échelle dontles profits sont généralement rapatriés vers des pays étrangers. Parmi lesautres caractéristiques de l’écotourisme, on compte ses impacts négatifsminimes au niveau social et environnemental, ses liens avec les autressecteurs de l’économie locale et de l’agriculture, la rétention des dépenseséconomiques par les populations locales. Finalement, le tourisme alter-natif encourage aussi l’engagement des gens de la place dans le processusde prise de décisions tout en les incluant dans le processus de dévelop-pement touristique. À la lumière de ces critères, le tourisme alternatif vaau-delà de la simple préoccupation pour l’environnement physique typiquedu « tourisme vert », il inclut aussi les considérations économiques, socialeset culturelles. Donc, on peut voir le tourisme alternatif comme un syno-nyme de la notion de développement touristique durable (Holden, 2000) ;cet aspect est encore plus pertinent quand on parle de tourisme chez lescommunautés d’accueil.

2.2. LE TOURISME DURABLE

Les aires naturelles ont toujours constitué un attrait ; avec les moyens detransport modernes, les gens sont maintenant en mesure de visiter desendroits partout sur la planète. Le tourisme axé sur les aires naturellesest en plein essor : il est passé de 2 % de toutes les activités touristiquesà la fin des années 1980 à environ 20 % de tous les voyages d’agrémentqui se font actuellement (The Ecotourism Society, 1998 ; Weaver etOppermann, 2000). L’OMT convient de ce chiffre et prétend que le tou-risme dans les aires naturelles est une industrie qui rapporte maintenant20 milliards de dollars américains par an (World Tourism Organization,1998). Par conséquent, le tourisme dans les aires naturelles connaît

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présentement une croissance explosive, ce qui lui confère la capacité demodifier non seulement les aires naturelles, mais aussi l’industrie touris-tique en tant que telle. Nous allons maintenant explorer ce phénomène àpartir du point de vue selon lequel le tourisme dans les réserves naturellespeut être profitable pour les individus, les régions et les pays en autantqu’il est planifié, organisé et aménagé de façon responsable.

Au cours des deux dernières décennies, les préoccupations toujourscroissantes au sujet de la préservation et de la salubrité de notre environ-nement ont transformé en débat public des inquiétudes qui étaient parta-gées, au départ, par une poignée de personnes. En même temps, il y aeu une augmentation phénoménale du tourisme au niveau planétaire quia donné naissance au phénomène connu sous l’appellation de « tourismede masse ». Cette croissance jamais vue des deux tendances devait iné-vitablement mener à leur rencontre et à leur interaction. Dans les airesnaturelles déjà exploitées sur le plan touristique ou en voie de l’être, ily a toujours un potentiel d’impacts positifs et négatifs sur l’environne-mental aussi bien que sur les sociétés. C’est pourquoi il y a deux courantsde pensée qui gouvernent la relation entre environnement et tourisme.D’un côté, on pense que le tourisme est nuisible à l’environnement et,par conséquent, on situe l’environnement et le tourisme en conflit l’unpar rapport à l’autre. D’un autre côté, on croit que les deux peuventtravailler en symbiose afin de bénéficier l’un de l’autre.

Le débat sur la relation entre environnement et tourisme dure depuistrois décennies. L’Union internationale pour la conservation de la natureet des ressources (UICN, maintenant connue sous le nom d’Union mon-diale pour la nature) a fait état de la nature du débat pour la premièrefois quand son directeur général a soulevé la question dans un écritprésenté sous le titre « Tourisme et conservation environnementale :conflit, coexistence, ou symbiose ? » (Budowski, 1976). Treize ans plustard, la question semblait toujours sans réponse alors que Romeril (1989)demandait à son tour : « Le tourisme et l’environnement sont-ils enaccord ou en désaccord ? » Par conséquent, la relation entre environne-ment et tourisme peut être perçue à partir de deux points de vue : soitconflictuel, soit symbiotique. On peut adopter et défendre l’un ou l’autrede ces points de vue, mais nous soutenons ici que, peu importe le pointde vue, la seule façon d’amoindrir le conflit ou d’en venir à une meilleurecompatibilité, c’est d’allier la compréhension et la planification à unegestion adaptée basée sur les concepts environnementaux et permettantun développement durable.

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La relation entre environnement et tourisme est basée sur lesprincipes d’utilisation durable des ressources naturelles prescrits par laStratégie mondiale de conservation (UICN, 1980) et la Stratégie de déve-loppement durable de la Commission mondiale sur l’environnement et ledéveloppement (WCED, 1987). Le tourisme sert souvent de pont entrel’environnement et le développement. La base de ce partenariat est ladurabilité de la ressource, et le tourisme doit s’intégrer totalement dansle processus de gestion de la ressource. Pour ce faire, il faut adopter desvaleurs conservatrices en plus des objectifs traditionnels de développe-ment. Au centre des objectifs de conservation de l’environnement et dedurabilité des ressources, il y a la protection et la préservation de la qualitéenvironnementale. L’atteinte de ce but primordial exige que la sensibili-sation soit basée sur la protection et la valorisation de l’environnementtout en faisant la promotion du potentiel touristique.

A. Drumm (1998) mentionne que les communautés locales voientl’écotourisme comme une option accessible de développement qui permetd’améliorer leurs conditions de vie sans avoir à vendre leurs ressourcesnaturelles ni à compromettre leur culture. En l’absence d’autres solutionsdurables, leur participation à l’écotourisme est souvent perçue comme lameilleure option pour combler leur volonté de développement durable.Drumm souligne des options possibles pour les communautés qui veulents’impliquer dans le développement touristique. Elles peuvent :

1. louer des terres à des promoteurs en se contentant de faire unsuivi des impacts ;

2. travailler à titre occasionnel et à temps partiel ou encore à pleintemps à l’emploi d’un exploitant étranger ;

3. procurer des services particuliers comme la préparation de repas,les services de guides, de transport ou d’hébergement auxexploitants ;

4. se lancer en affaires en partenariat avec des exploitants étrangersselon un partage des tâches permettant à la communauté de four-nir la plupart des services, tandis que l’exploitant se charge dumarketing ;

5. exploiter elles-mêmes des programmes touristiques communau-taires totalement indépendants.

Drumm ajoute que dans chaque cas, l’implication entière de lacommunauté est essentielle à toutes les étapes de la planification et de lagestion pour assurer un développement viable.

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2.3. LES IMPACTS DU TOURISME

Les impacts peuvent être positifs ou négatifs. Les ouvrages consacrés àce sujet parlent le plus souvent d’impacts physiques sur l’environnementqui sont considérés comme négatifs. Wall (1994) mentionne que l’éco-tourisme attire l’attention sur des trésors naturels, ce qui a pour effetd’amplifier la pression sur ceux-ci. Hvenegaard (1994) décrit plusieursimpacts environnementaux nuisibles qui sont causés par le tourisme dansles aires régionales. Ce sont le surpeuplement, la surexploitation, lesactivités récréatives non réglementées, la pollution, le dérangement de lafaune, l’utilisation de véhicules à moteur. Cependant, on a aussi vantéles bienfaits de la relation entre environnement et tourisme depuis vingtans. Le tourisme et l’environnement sont interreliés et il semble qu’il yait plusieurs raisons de vouloir amener la conservation à rechercherl’appui du tourisme. Mentionnons ici que le tourisme pose une justifica-tion économique, c’est un moyen de bâtir un soutien à la conservation,lequel peut éventuellement mener à la conservation des ressources(Phillips, 1985).

Le tourisme peut générer à la fois directement et indirectement desimpacts positifs en augmentant le soutien politique et économique néces-saire à la conservation et à la gestion des régions naturelles. Par consé-quent, on retrouve considérablement d’appui à la notion voulant que letourisme dans les régions naturelles puisse servir à préserver à la foisl’environnement physique et les acquis sociaux et économiques descommunautés d’accueil.

Alors qu’il est possible de mesurer et de quantifier les impactséconomiques pour identifier leurs effets au niveau des finances et del’emploi, les impacts sociaux et culturels sur les visiteurs et les commu-nautés d’accueil ne sont souvent pris en compte que lorsque le dévelop-pement touristique entraîne des oppositions locales (Page et Dowling,sous presse). Les attitudes des résidents de la communauté d’accueil sontun élément clé de l’identification, de la mesure et de l’analyse de l’impacttouristique. La perception des résidents à l’égard du tourisme peut êtrel’un des facteurs formant l’attrait d’une destination, et les attitudes néga-tives peuvent servir d’indicateur de la capacité d’une région à absorberle tourisme.

L’indice d’irritation due au tourisme (irridex) de Doxey (1975)illustre comment l’interaction entre touristes et résidents peut se traduireen différents degrés d’irritation. Doxey prétend que la réponse des résidents

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se modifie selon un barème prévisible, passant par quatre étapes :l’euphorie, l’apathie, l’agacement et l’antagonisme. À tout moment, unecommunauté peut se caractériser par une gamme d’opinions et cette façonde les regrouper dans un modèle simplifié comme celui de Doxey ne tientpas compte de la diversité à l’intérieur de la localité elle-même (Page etDowling, sous presse). Les communautés qui ont depuis longtemps étéexposées au tourisme s’adaptent pour s’accommoder de ses effets, alorsleurs attitudes changent avec le temps : des communautés peuvent pré-senter simultanément des attitudes positives et des attitudes négativesenvers le tourisme.

L’environnement socioculturel des communautés d’accueil est vucomme une attraction touristique et il en subit aussi les impacts (Lindberget McKercher, 1997). Si les impacts deviennent défavorables, la notionde « durabilité » du tourisme sera mise en péril. Pour l’industrie touris-tique, les préoccupations principales sont d’éviter que les populationslocales soient aliénées ou subissent des impacts nuisibles au point d’envenir à vouloir modifier la ressource locale qui est à la base du tourismeou d’en empêcher l’accès futur, si elles en sont les gardiens.

Un des éléments clés du tourisme, c’est que cette activité devraitapporter des bénéfices localement. Ceci soulève la problématique liée audegré de contrôle que les habitants peuvent exercer sur les entreprisesécotouristiques, en mettant en lumière la nécessité de prendre en comptela passation des pouvoirs aux communautés locales (Ashley et Roe,1998). Si l’on veut encourager des attitudes positives envers le tourisme,alors les communautés d’accueil devraient en retirer des avantages éco-nomiques et sociaux. Ces avantages sociaux comprennent une meilleureappréciation et compréhension de la culture, un héritage culturel et unefierté locale (Ross et Wall, 1999).

Il est aussi important de laisser les résidents décider quel niveau detourisme ils désirent recevoir (c.-à-d. l’autodétermination), quelles pra-tiques culturelles ils désirent partager et où les touristes seront autorisésà aller. Plusieurs niveaux d’implication sont possibles, depuis le dévelop-pement d’infrastructures communautaires jusqu’à un partenariat ou uneentreprise conjointe avec l’industrie (Brandon, 1996). Le processus devraitinclure une conscientisation croissante à l’égard des impacts possibles dutourisme afin que les résidents puissent prendre des décisions éclairéesquant au niveau de tourisme désiré.

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Ainsi, le développement touristique ne devrait être considéré commeréussi qu’au moment où les communautés locales possèdent un certaindegré de contrôle et partagent équitablement les bénéfices générés par lesactivités d’écotourisme (Scheyvens, 1999). Il laisse supposer que leseffets positifs du tourisme sur les communautés locales devraient engloberles missions de conservation et de développement au niveau local.

LES APPROCHES AXÉES SUR LA CONSERVATION

La planification et le développement touristiques en région partent duprincipe que le tourisme devrait apporter son appui à la conservation del’environnement biophysique de ces lieux. Ceci peut se faire soit direc-tement, par l’engagement des visiteurs dans la protection de l’environ-nement ou par des activités d’assainissement, soit indirectement, engénérant des redevances qui serviront au financement d’activités localesde conservation. Les solutions résident dans l’établissement d’un systèmeadéquat de collecte de revenus par le biais des tarifs, mais aussi par lamise en place d’une forme efficace de gestion du tourisme.

Un code d’éthique est une série d’attentes, de comportements ou derèglements écrits par des membres de l’industrie et des organismes gou-vernementaux ou non gouvernementaux (Holden, 2000). Par ces codes,on vise principalement à influencer les attitudes et les comportements destouristes ou de l’industrie touristique en général. Le code peut être infor-mel et adopté par un groupe, ou plus formel et institué pour les membresde l’industrie ou les touristes. Il fournit la norme de performance accep-table. Souvent présenté sous forme écrite, le code d’éthique aide à établiret à maintenir une approche professionnelle (Fennell, 1999).

L’Organisation mondiale du tourisme a adopté un code globald’éthique touristique (WTO, 2000). Ce code renferme les principes quiforment les grandes lignes d’une approche durable du développementtouristique pour les destinations, les gouvernements, les voyagistes, lespromoteurs, les agents de voyage, les travailleurs du domaine du tourismeen général et, enfin, pour les voyageurs.

3.

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LA RÉGION DE GASCOYNE, EN AUSTRALIE-OCCIDENTALE

La région de Gascoyne est située sur la côte ouest de l’Australie, environ1 000 km au nord de Perth. C’est une région qui recèle plusieurs phé-nomènes biologiques et géologiques exceptionnels et parfois uniques(Dowling, 1991). Son environnement naturel est protégé par plusieursparcs nationaux, des parcs marins et des réserves administrés par leDepartment of Conservation and Land Management (CALM – Ministèrede la Conservation et de la Gestion du territoire) d’Australie-Occidentale.Cependant, la pression exercée sur le milieu par l’achalandage touristiquefait naître des préoccupations de plus en plus grandes pour l’environne-ment de la région.

La région couvre une superficie de 141 000 kilomètres carrés et sapopulation est clairsemée (14 000 personnes). Elle est divisée en quatrezones gouvernementales locales : les comtés de Carnarvon, Exmouth,Shark Bay (baie des Requins) et Upper Gascoyne (Haute-Gascoyne)(figure 4.1). La ville la plus importante est Carnarvon (7 000 habitants,dont 30 % sont des Aborigènes). Les autres centres les plus peuplés sontExmouth (3 000 habitants), Denham (1 000 habitants) et GascoyneJunction. L’économie de la région est basée sur l’élevage pastoral, l’hor-ticulture, la pêche, les mines, le tourisme et la défense. Le tourisme estl’industrie de la région de Gascoyne qui connaît l’expansion la plusrapide et la Commission du tourisme mondial en fait le suivi. En 2000,la région a enregistré un achalandage de 401 600 touristes qui ont générédes revenus de l’ordre de 100 millions de dollars. Dans le plan de déve-loppement touristique de la région, on a fait ressortir les besoins crois-sants de nouvelles attractions, de nouvelles installations et infrastructures,et ces besoins sont accentués par l’expansion générale des structures déjàen place et par les projets de nouveaux centres de villégiature et demarinas.

Depuis 1988, une étude longitudinale fait l’évaluation des impactssociaux et environnementaux de l’industrie touristique sur les ressourcesde la région. Une partie de l’approche incorpore l’étude des opinions dela communauté d’accueil, à partir de ses perceptions de l’environnementnaturel, du tourisme et de la relation qui existe entre les deux. C’est cettesection d’une enquête beaucoup plus exhaustive qui est exposée briève-ment dans la présente étude de cas. On a recueilli des données lors d’entre-vues en direct avec les résidents. Les entrevues ont été réalisées sur unepériode de 12 ans, de janvier 1990 à janvier 2001 (p. ex., Dowling 1990,

4.

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1993, 1996, 1999, 2000). Durant cette période, plus d’une dizaine desondages ont été faits au hasard pour établir un échantillonnage représen-tatif des populations de la région de Gascoyne. L’échantillonnage totali-sait 1 200 résidents, dans une proportion de 647 hommes et 553 femmes,ayant des niveaux d’éducation et des occupations variables. L’âge desrépondants variait entre 14 et 73 ans et ils habitaient la région en moyenne

Figure 4.1

LOCALISATION DE LA BAIE DE GASCOYNE EN AUSTRALIE-OCCIDENTALE

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depuis 12,6 ans (figure 4.2). Ces répondants ont dit vivre dans la régionen raison des perspectives d’emploi (61 %), parce que c’est un endroitagréable pour vivre (25 %), parce qu’ils sont nés dans la région (9 %) ouencore parce que c’est un endroit agréable pour vivre sa retraite (5 %).

LES ATTITUDES DE LA COMMUNAUTÉ

Le tissu social de la communauté de Gascoyne change rapidement. Ceuxqui demeurent dans la région depuis longtemps voient maintenant s’ins-taller des retraités en provenance de Perth qui recherchent une vie sanstracas, sous le soleil. De plus, on observe chaque année une croissancedu nombre de touristes. Les résidents qui habitent la région depuis long-temps n’aiment pas beaucoup ces deux groupes. Quand on a demandé àun pêcheur local s’il aimait que des touristes visitent la région, il arépondu : « Nous ne les aimons pas, c’est tout » (Raffaele, 1989, p. 65).Pourtant, un sondage auprès des résidents indique qu’ils sont fréquem-ment en contact avec les touristes, soit dans le cadre de leur travail (dans

Figure 4.2

POPULATION ÉTUDIÉE

14-17 18-24 25-39 40-54 55+0

100

200

300

FemmesHommes

Âge (ans)

Nom

bre

de p

erso

nnes

= 321= 256

Total = 577

5.

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40 % des cas), soit parce qu’ils les croisent dans la foule (33 %) ou qu’ilsreçoivent des visiteurs chez eux (Dowling, 1993). La majorité des rési-dents disent que les touristes ne les empêchent pas d’apprécier la région(66 %) et qu’ils ne constituent pas une surcharge pour les services locaux(61 %). Ceux qui font état d’une pression sur leur communauté (24 %)indiquent que celle-ci se manifeste en rapport avec les services de police,les services médicaux et l’approvisionnement en eau.

Les résidents s’entendent sur le fait que le tourisme génère plusd’argent pour la communauté que les autres activités commerciales(72 %). Ils trouvent que cette activité assure un partage plus égal desgains économiques que ne le font la pêche commerciale, l’exploitationdes mines ou l’élevage pastoral. Comme le tourisme augmente dans larégion, il y a aussi une augmentation du nombre d’étrangers cherchant àinvestir ou à travailler dans l’industrie touristique. Par exemple, le Con-seil de comté de Shark Bay, qui a réussi pendant plusieurs années àendiguer la marée de touristes, adopte maintenant une position plusproactive par rapport au développement et à la promotion du tourisme(Dowling, 1996).

Une forte majorité de résidents de Gascoyne (73 %) s’entendent surla nécessité d’apporter plus de protection à l’environnement en général(tableau 4.1). Même si l’on réclame plus de protection environnementaledans la région, les opinions des répondants au sondage sont partagées àsavoir s’il faut un plus grand nombre de parcs nationaux et de parcsmarins. Plusieurs personnes pensent qu’il y a déjà assez de parcs (42 %)alors que d’autres voient la nécessité d’en créer encore plus (31 %). Lesrépondants qui disent que l’environnement est bien protégé en attribuentle mérite aux efforts des habitants, des éleveurs et des pêcheurs. D’autresdisent que le crédit en revient au CALM et quelques-uns mentionnentque les touristes contribuent à la protection de l’environnement.

Ceux qui disent qu’il y a déjà assez de parcs nationaux, de parcsmarins et de réserves dans la région énumèrent les nombreux parcs etréserves actuels, parmi lesquels le parc marin de Shark Bay, le parcnational Francois Peron et la réserve marine Hamelin Pool (Dowling etAlder, 1996). Il y avait aussi, au moment où les premières études ont étémenées, des propositions du gouvernement fédéral pour que Shark Bay,qui occupe la partie sud de la région, soit désigné site du patrimoinemondial (Dowling, 1990). Les habitants du secteur étaient consternés, carils sentaient qu’ils étaient en train de perdre un certain degré d’autonomiesur la région. Lors d’une audience publique particulièrement houleuse au

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sujet de cette problématique, 299 résidents sur les 300 présents ont votécontre la proposition de site du patrimoine mondial (Chubb, 1988), pro-posant plutôt la mise en place du Shark Bay Region Plan, un plan régio-nal établi par l’État pour la gestion de Shark Bay (SPC et CALM, 1988).La baie s’est vu attribuer le titre de site du patrimoine mondial en décembre1991 (figure 4.1).

Les résidents qui trouvaient qu’il y avait déjà un nombre suffisantde parcs et de réserves ont laissé entendre que le vrai problème ne résidaitpas dans le nombre de parcs ou de réserves, mais plutôt au niveau d’uneprotection accrue de ceux qui sont déjà en place. De nombreux répon-dants ont proposé qu’on assure plus de gestion sur place en engageantplus de gardes-parcs (CALM) et de gardes-pêche (ministère des Pêcheriesd’Australie-Occidentale). D’autres ont proposé d’établir un programmede sensibilisation du public à l’environnement sous forme de dépliantset d’affiches qui fourniraient de l’information supplémentaire pourl’interprétation de la nature.

Tableau 4.1

COMMENT LES COMMUNAUTÉS D’ACCUEIL PERÇOIVENT LA RELATION ENTRE ENVIRONNEMENT ET TOURISME DANS LES ÉTUDES RETENUES – G ASCOYNE

Classement Facteur Moyenne Pourcentage

1. Dans la région, le tourisme devrait faire partie intégrante de la notion de conservation.

4,391 87,8

2. La région doit encourager le développement touristique tout en s’assurant qu’il ne porte pas préjudice à l’environnement.

3,917 78,3

3. L’environnement doit faire l’objet d’une protection accrue. 3,645 72,9

4. Les avantages économiques conférés par le tourisme sont tout aussi importants que la protection de l’environnement.

3,357 57,9

5. La région devrait compter plus de parcs nationaux et de parcs marins.

2,112 42,2

6. L’industrie touristique ne nuit pas à l’environnement. 1,175 23,5

Notes1. Résultats d’un sondage réalisé auprès de 1 200 membres de la communauté d’accueil de la région

de Gascoyne entre 1990 et 2001.2. Les facteurs ont été classés en utilisant la méthode des valeurs combinées.3. L’échelle de classification varie entre 1 = Je ne suis pas du tout d’accord et 5 = Je suis entièrement

d’accord.4. Le pourcentage d’approbation correspond aux réponses 4 et 5.

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La communauté d’accueil s’entend sur le fait que les gains économi-ques entraînés par l’industrie touristique sont aussi importants que la pro-tection de l’environnement (58 %). Tous sont en faveur du tourisme dansla région de Gascoyne (tableau 4.2), en indiquant que la présence destouristes ne les empêche pas d’apprécier tout autant la région (66 %). Laplupart sont considérablement en contact avec les touristes, soit directe-ment dans leur travail, soit en recevant des visiteurs chez eux (figure 4.3).Pour d’autres résidents les contacts, s’il y en a, se limitent à croiser destouristes dans les endroits publics. Les résidents s’accordent aussi pourdire que le tourisme n’est pas une charge pour les services locaux. Mais,certains pensent que le tourisme exerce une pression sur la communauté(32 %), surtout au niveau des services policiers, médicaux et de l’approvi-sionnement en eau. Les autres problèmes soulevés comprennent l’augmen-tation des rebuts et les embouteillages dans les rues des villes et auxinstallations récréatives très fréquentées comme les débarcadères.

Les résidents admettent en général que le tourisme génère plusd’argent pour la population locale que les autres activités commerciales(72 %). Ils trouvent que les gains économiques pour la communauté sontrépartis « plus également » que ceux générés par l’élevage pastoral, lapêche commerciale ou l’activité minière. D’autres ajoutent que l’aveniréconomique de la région est lié de près au tourisme ; cependant, ceux

Tableau 4.2

OPINIONS QUE LES COMMUNAUTÉS D’ACCUEIL SE FONT DU TOURISME

Classement Facteur Moyenne Pourcentage

1. Le tourisme est fondé sur les ressources naturelles de la région.

4,455 89,1

2. L’industrie touristique génère plus de revenus pour les populations locales que toutes les autres activités commerciales.

3,590 71,8

3. Le tourisme ne m’empêche pas d’apprécier la région. 3,285 65,7

4. L’environnement de la région est bien protégé. 2,570 51,4

5. Le tourisme exerce une pression sur les services locaux. 1,650 33,0

Notes1. Résultats d’un sondage réalisé auprès de 1 200 membres de la communauté d’accueil de la région

de Gascoyne entre 1990 et 2001.2. Les facteurs ont été classés en utilisant la méthode des valeurs combinées.3. L’échelle de classification varie entre 1 = Je ne suis pas du tout d’accord et 5 = Je suis entièrement

d’accord.4. Le pourcentage d’approbation correspond aux réponses 4 et 5

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qui ne sont pas de cet avis (12 %) mentionnent que les avantages éco-nomiques sont répartis parmi un petit groupe de gens, particulièrementles gens d’affaires des villes, alors que l’activité touristique entraîne unehausse du coût de la vie pour les habitants des lieux. Tous les résidentssont aussi unanimes pour préciser que le tourisme dans leur région estbasé sur les ressources naturelles (89 %), mais ils sont moins nombreuxà croire que l’environnement de la région est bien supervisé (51 %répondent oui, 23 % non).

Parmi les quatre activités commerciales du secteur, les résidents etles touristes s’accordent à dire que celle qui est la plus compatible avecla protection de l’environnement est le tourisme (83 %), passant avantl’élevage pastoral (62 %), la pêche commerciale (55 %) et l’exploitationminière (19 %). Les résidents font remarquer que la surpêche, la sur-abondance des troupeaux et la possibilité de déversements de pétrolejustifient l’incompatibilité exprimée. Dans l’ensemble, les résidentstrouvent à ces activités un plus haut niveau de compatibilité que lestouristes et leur deuxième choix diffère, la pêche venant avant l’élevagepastoral. Ceci s’explique par le fait que le gagne-pain d’une plus grande

Figure 4.3

OCCASIONS DE CONTACTS ENTRE LA POPULATION D’ACCUEIL ET LES TOURISTES

Au travailDans les endroits publicsComme visiteursPeu ou pas du tout de contact

13%

14%

33%

40%

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partie des gens de la région dépend de cette activité commerciale. On esten accord avec le tourisme en autant qu’une planification adéquate estinvoquée et que la gestion est assurée sur place.

Les résidents considèrent que ce sont le climat agréable (80 %),l’accès à la pêche (71 %) et le style de vie tranquille (63 %) qui constituentles attractions principales de la région. La plupart des activités de loisirde la communauté se font dehors et dans l’environnement marin. Les pluspopulaires sont la pêche, la natation et la voile. Figurent aussi les baladesen bateau, l’observation des baleines ou des tortues marines et la conduitede véhicules tout-terrain. Parmi les activités récréatives pratiquées par unnombre plus restreint d’adeptes, on retrouve la randonnée dans l’arrière-pays, la plongée en apnée, la randonnée à bicyclette, le plongeon, le surf,la collecte de coquillages et la plongée autonome.

La communauté donne très peu d’appui à l’énoncé disant que letourisme ne cause aucun préjudice à l’environnement (23 % ; tableau 4.1).Les répondants avancent que les effets de nombreuses activités régionalesliées aux loisirs et au tourisme nuisent à l’environnement (tableau 4.3).On parle ici des rebuts (84 %), de la surpêche (75 %) et des prises dedimensions insuffisantes (64 %), de la perturbation ou de la destruction

Tableau 4.3

OPINIONS QUE LES COMMUNAUTÉS D’ACCUEIL SE FONT DES ACTIVITÉS PORTANT PRÉJUDICE À L’ENVIRONNEMENT

Notes1. Résultats d’un sondage réalisé auprès de 1 200 membres de la communauté d’accueil de la région

de Gascoyne entre 1990 et 2001.2. Les facteurs sont classés en ordre de pourcentage de réponses.

Classement Activité Pourcentage

1. Déchets 84

2. Surpêche 75

3. Prises trop petites 64

4. Altération des dunes de sable 35

5. Destruction de la végétation 31

6. Perturbation de la faune 21

7. Ancres qui endommagent les récifs 20

8. Pollution de l’eau 16

9. Pollution par le bruit 15

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du relief, de la faune et de la flore, sans oublier le bruit et la pollutionde l’eau. La communauté est portée à attribuer ces états de choses plusaux touristes qu’à la population locale. On impute aux campeurs et auxpêcheurs l’abondance des déchets qui se retrouvent dans la baie, sur lesrécifs et les plages sous forme de poissons décapités, de viscères, de sacsd’appâts et d’hameçons. Toutefois, les habitants de Carnarvon blâmentsurtout les autres membres de la communauté pour l’abondance desordures dans leur comté (Dowling, 1993).

D’autres secteurs où l’on retrouve beaucoup de déchets sont lesbords de routes, qu’on dit jonchés de différents objets de verre, de métal,de plastique et autres. Les terrains de camping et les aires de repos le longdes routes sont aussi reconnus comme des lieux où se retrouvent de fortesconcentrations de déchets, comprenant même des excréments humains.Pour contrer cette dégradation du paysage, on recommande entre autresl’installation de poubelles supplémentaires, surtout aux haltes routières etsur les terrains de camping, l’engagement de plus de vidangeurs, l’aboli-tion de la vente de bouteilles non consignées, la pose d’un nombre accrud’affiches antirebuts et un programme de sensibilisation du public.

L’activité qui vient au deuxième rang dans le classement desactivités touristiques et de loisir qui sont nuisibles à l’environnementregroupe la surpêche et les prises de dimensions insuffisantes. Ceux quisont contre ces activités nuisibles désignent particulièrement la pêche aufilet, les pièges et l’usage abusif des congélateurs portatifs qui permettentde sortir le poisson de consommation de la région. Comme dans le casdes déchets, la communauté attribue le blâme en grande partie aux tou-ristes. Les raisons soulevées sont, entre autres, l’usage de filets pourpêcher à partir de la plage, les prises faites hors saison, le non-respectdes limites de prises et l’ignorance des lois. Les solutions proposéesincluent l’augmentation du nombre de gardes-pêche, l’éducation, l’inter-diction des congélateurs et l’imposition de limites de prises plus res-treintes. En troisième place des activités les plus nuisibles, on retrouvel’altération des dunes de sable (35 %), suivie de la destruction de lavégétation (31 %) et de la perturbation de la faune (21 %). Ces perturba-tions sont en majorité dues à l’utilisation de véhicules tout-terrain prèsdes plages et des terrains de camping à haute fréquentation.

La communauté d’accueil propose aux touristes plusieurs activitésappropriées à l’environnement de la région (tableau 4.4). Les plus impor-tantes sont les safaris photographiques, la pêche et la plongée sous-marine. D’autres activités sont aussi autorisées, surtout celles qui peuvent

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se faire sous le contrôle d’un organisateur responsable. Les résidentsdésapprouvent les activités non contrôlées qui sont associées à l’utilisa-tion sans discernement de véhicules tout-terrain. Ils soutiennent qu’ondevrait encourager les développements touristiques à condition que ceux-ci n’entrent pas en conflit avec l’environnement (78 % ; tableau 4.1).

Plusieurs mentionnent qu’il est important d’éviter à tout prix que lecaractère de l’environnement régional et le tissu social ne soient détruitspar le tourisme. Les développements touristiques à petite échelle ont lapréférence (88 %). On propose plus d’aménagements pour le camping etle caravaning, surtout en dehors des parcs nationaux, et plus de débarca-dères et d’hébergement touristique à bas prix. On recommande aussi desinfrastructures qui se fondent bien dans leur environnement. On préfèreles marinas (26 %) aux centres de villégiature (22 %) mais en général, lesdéveloppements touristiques à grande échelle reçoivent très peu d’appuis(6 %). On propose aussi de concentrer ces développements à l’intérieurde zones déjà exploitées pour réduire au minimum les impacts environ-nementaux. Cela vient appuyer une proposition semblable faite récem-ment par les ministères du Tourisme et de l’Environnement (WATC etEPA, 1989).

Tableau 4.4

OPINIONS QUE LES COMMUNAUTÉS D’ACCUEIL SE FONT DES ACTIVITÉS NE CAUSANT PAS DE PRÉJUDICE À L’ENVIRONNEMENT

Classement Activité Pourcentage

1. Safaris photographiques 82

2. Pêche 71

3. Plongée 70

4. Randonnée à bicyclette 68

5. Yachting 67

6. Planche à voile 65

7. Navigation de plaisance 61

8. Sentiers historiques 60

9. Observation de la faune 52

10. Canotage 49

Notes1. Résultats d’un sondage réalisé auprès de 1 200 membres de la communauté d’accueil de la région

de Gascoyne entre 1990 et 2001.2. Les facteurs sont classés en ordre de pourcentage de réponses.

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La communauté d’accueil approuve très fortement (88 %) l’alliancedu tourisme et de la conservation dans la région (tableau 4.1). Un résidentfait le commentaire suivant : « Le développement touristique est inévi-table, alors il faut pouvoir le contrôler et le diriger grâce à des négocia-tions habiles entre les autorités de comté et les ministères comme leCALM ». Il en découle que le CALM devrait avoir plus de portée dansles futurs projets de planification et de gestion des activités de dévelop-pement touristique liées à la protection de l’environnement. Ainsi, lesprincipes du développement durable seraient appliqués dans la régionpour permettre une croissance du tourisme tout en assurant la conservationet la protection de l’environnement.

ANALYSE

Les observations découlant de l’étude de cas de Gascoyne recoupentplusieurs autres études menées précédemment sur les perceptions qu’ontles populations résidentes par rapport à la relation entre environnementet tourisme (p. ex. Liu et al., 1987 ; Schlüter et Var, 1988 ; tableau 4.5).Cependant, sur certains points, nous notons des divergences. En exami-nant les résultats, on obtient la confirmation des études précédentes selonlesquelles les communautés d’accueil voient dans le tourisme une façond’améliorer l’économie locale sans surcharger les services locaux. Cettevision est aussi appuyée par le fait que les communautés d’accueil sup-posent que le tourisme ne nuit pas au bien-être des résidents ni à leurjouissance des lieux. Le fait que les répondants adhèrent à l’énoncé vou-lant que les gains économiques que procure le tourisme soient « tout aussiimportants que la protection de l’environnement » concorde avec lesrésultats obtenus précédemment à savoir que les résidents ne sont pasprêts à voir leur niveau de vie diminuer pour assurer une protectionaccrue de l’environnement. Les résidents de Gascoyne ne partagent pasl’opinion selon laquelle le tourisme aide à protéger l’environnement(23 % d’accord avec l’énoncé ; études précédentes : 51 %) et ils appuientfortement l’idée d’une meilleure protection de l’environnement. Toute-fois, l’étude confirme les résultats recueillis précédemment, selon lesquelsles communautés d’accueil perçoivent que le tourisme a de nombreuximpacts négatifs pour l’environnement. L’accumulation de déchets estcitée comme étant le problème le plus évident, mais les résidents acceptentune bonne partie du blâme. Quand on leur demande si les touristes ensont la cause, les résidents classent cette cause comme la cinquième surles neuf impacts environnementaux cités.

6.

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En termes de planification et d’aménagement de la communautéd’accueil de Gascoyne, l’étude est en accord avec les résultats précédents,qui établissaient qu’une planification à long terme peut permettre decontrôler les impacts du tourisme sur l’environnement (81 % de réponsesaffirmatives). C’est ce point qui a reçu l’appui le plus fort de tous et c’estce qui ressortait aussi des études précédentes (83 %). La communauté de

Tableau 4.5

COMMENT LES COMMUNAUTÉS D’ACCUEIL PERÇOIVENT LA RELATION ENTRE ENVIRONNEMENT ET TOURISME DANS LES ÉTUDES RETENUES

Énoncé Hawaï1 Pays de Galles 1 Turquie1 Argentine2

Impacts positifs

Crée de nouveaux parcs accessibles à la population locale

51,7 65,0 76,4

N’a pas contribué à la dégradation de l’environnement

49,6 56,5 45,6

Aide à protéger le milieu bâti de la région 47,5 50,9

Aide à protéger les bâtiments historiques 86,8

Impacts négatifs

Augmentation des déchets 51,7 84,9 97,0

Augmentation de la circulation automobile 47,9 98,1 87,9

Augmentation de la fréquentation des parcs 38,0 45,3 49,0

Augmentation de la fréquentation des centres commerciaux

41,4 44,0

Hausse du vandalisme 43,1 50,9

Augmentation de la pollution par le bruit 12,7 30,4 63,6

Généralités

Une planification à long terme peut permettre de contrôler les effets du tourisme sur l’environnement

90,4 66,9 [85,4]3 87,5

La protection de l’environnement justifie un niveau de vie plus modeste

41,2 58,5

On devrait investir plus d’argent dans la protection de l’environnement que dans la promotion touristique

61,7 62,3 54,7

Notes1. Hawaï, É.-U. ; Pays de Galles et Istanbul, Turquie – d’après Liu, Sheldon et Var (1987).2. Argentine – adapté de Schlüter et Var (1988).3. Les crochets indiquent les réponses à un énoncé comparable.

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Gascoyne croit aussi qu’on devrait encourager les développements tou-ristiques en autant qu’ils n’entrent pas en conflit avec la protection del’environnement (78 %). On n’a pas demandé aux résidents si le tourismecrée plus de parcs pour leur propre usage, mais ils n’ont pas donné grandappui à la suggestion d’ajouter de nouveaux parcs dans la région (42 %).L’argument principal est qu’il existe déjà un grand nombre de parcs etde réserves dans la région.

CONCLUSIONS

L’avenir du développement touristique durable dans les communautésd’accueil réside dans la planification et la gestion de leurs environne-ments économique, social et physique. La planification du tourismerégional permet aux exploitants et aux gestionnaires de faire la promotiondu tourisme dans ces secteurs, non seulement pour protéger l’environne-ment naturel, mais aussi pour apporter une meilleure compréhension dece dernier. La solution réside dans le fait d’axer la planification pour lesrégions naturelles plutôt que de se contenter de planifier des activitésdans les régions. La meilleure manière d’y parvenir est de procéder defaçon inclusive en tenant compte des intérêts et des investissements desintervenants clés, notamment les habitants des communautés d’accueil.De plus, une telle planification devrait être itérative et flexible pour per-mettre de réaliser des objectifs et des stratégies tout en procurant unmoyen de gestion caractérisé.

Il y a plusieurs manières de gérer le développement touristique dansles environnements biophysiques ; certaines sont centrées sur la gestiondes lieux disponibles, d’autres mettent l’accent sur les techniques degestion des visiteurs. L’une des stratégies clés de la gestion consiste àdélimiter des zones dans lesquelles les activités sont séparées soit parl’espace, soit par le temps. La gestion est la somme des stratégies et desactions posées pour protéger et enrichir les aires naturelles de façon àfaire face aux impacts de l’activité touristique. Les stratégies sont définiescomme des approches générales de gestion, habituellement guidées parun objectif, par exemple, délimiter un secteur naturel en réserve ou enzone protégée pour en faire un parc national. Une stratégie peut aussiêtre un groupe d’actions, par exemple l’aménagement d’un site et lesactions qui s’y rattachent.

7.

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Il faut que la planification et la gestion reflètent une approcheéquilibrée pour l’utilisation des ressources naturelles en engageant lescommunautés locales dans le processus de développement. Une approcheplus « durable » du développement touristique est nécessaire et on croitque les communautés d’accueil peuvent y parvenir (Dowling, 1998).Nous ne pouvons plus nous contenter de percevoir les éléments environ-nementaux de la terre seulement comme des attributs. En réalité, pourassurer la survie des aires naturelles, il faut amener les gens à reconnaîtreleur grande valeur et leur importance par le biais de développements telsque le tourisme. Souvent, c’est seulement par le tourisme qu’on pourraassurer la protection de telles régions. Alors, bien que nous dénotions deplus en plus d’inquiétudes face à la demande croissante pour le tourismeen régions naturelles, il se peut que ce soit, justement, la seule activitéen mesure d’en assurer la pérennité. Par conséquent, c’est par l’inter-action des différents niveaux de compréhension qu’une communautéd’accueil peut faire une réussite du développement durable à l’intérieurde son propre environnement biophysique. C’est le préalable fondamentald’une croissance touristique responsable.

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A

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55

Chapitre

Écotourisme, parcs et populations locales au Costa Rica

*

Le cas des réserves naturelles privées (Monteverde et Santa Elena) et des communautés voisines

Juan Antonio Aguirre G.

, Ph. D.Professeur en économie environnementale.École des études de terrain,Centre pour le développement durable. Atenas, Costa Rica.

* Les codirecteurs remercient madame Yolande Dumais pour la traduction de l’anglais au français.

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Résumé

Les réserves naturelles privées de Monteverde et de Santa Elena sontdevenues les icônes costaricaines indiscutables de l’écotourisme et ducommerce axé sur le tourisme de nature. Une étude, basée sur des entre-vues conduites dans les communautés voisines, entre 2001 et 2005, apermis : a) d’évaluer l’état des relations parcs/communautés et b) d’iden-tifier les variables qui peuvent les affecter. L’étude conclut que, comptetenu de la mesure sur l’emploi et le revenu, l’impact économique du tou-risme de nature est plutôt faible dans les communautés d’accueil, ce quienvenime les relations parcs/communautés, ces dernières étant peu satis-faites des retombées économiques qu’elles retirent des activités touris-tiques. Si l’on veut assurer la durabilité économique, sociale etenvironnementale à long terme des parcs, des réserves naturelles privéeset des communautés, le partage des retombées économiques devra êtreéquitable et les communautés devront travailler de concert avec les auto-rités des aires protégées à la planification et l’exécution de politiques, deprojets. Présentement, tous les indices recueillis semblent indiquer quecette collaboration est bien inférieure aux attentes. La gestion viable del’impact de l’écotourisme sera compromise si les parcs ne font pas active-ment participer les membres des communautés locales. Les communautésveulent devenir des acteurs et non plus être des observateurs.

Remerciements

L’auteur souhaite exprimer ses remerciements à Christiane Gagnon, miamiga Cristina, pour sa patience exemplaire au cours du laborieux proces-sus qui a permis de rendre ce matériel disponible en français après avoirgénéreusement contribué à l’amélioration du produit final par ses commen-taires techniques. Merci aussi aux élèves de la School for Field Studies(l’École des études de terrain), car ce sont eux qui, au cours des cinqdernières années, ont joué un rôle capital dans le processus en recueillantles données pour en faire l’analyse préliminaire. Ce sont incontestablementles héros de cet effort commun. En dernier lieu, j’aimerais exprimer mareconnaissance à mes amis Nolan Quiros, directeur du SFS/Costa Rica, etTracy Farrel, anciennement directeur des études au SFS, aujourd’hui avecConservation International et qui, depuis le tout début, a cru en mon idéeet m’a encouragé à relever le défi d’un effort à si long terme.

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Les impacts de l’écotourisme sur la création de liens entre les réservesnaturelles privées et les communautés frontalières des aires protégéesconstituent l’un des grands problèmes auxquels font face les pays del’isthme d’Amérique centrale : Guatemala, Salvador, Honduras, Belize,Nicaragua, Costa Rica et Panama. Ce problème est aggravé par les pou-voirs limités que détiennent les dirigeants des aires protégées pour assurerla gestion durable de ces zones (publiques ou privées) susceptibles derecevoir des marées de touristes.

Une bonne partie des milliers de dollars voués aux efforts de gestionécotouristique sont dépensés chaque année pour assurer la surveillancedes limites des parcs, car les gestionnaires des aires protégées craignentque les membres des communautés voisines n’endommagent les res-sources. Nous sommes convaincus que la stratégie « policière » présen-tement en vigueur n’est pas la bonne stratégie à adopter si l’on veutréaliser, à long terme, la pérennité environnementale dans les aires pro-tégées de l’isthme centre-américain, pour les ressources dédiées au tou-risme de nature. C’est encore plus vrai maintenant que ces pays subissentla pression toujours croissante de nombreux touristes débarquant dans larégion pour profiter des activités récréatives écotouristiques fondées surses attraits naturels.

La seule stratégie à long terme qui peut protéger et garantir lapérennité de l’environnement des zones protégées, en dépit des dom-mages occasionnés par les communautés, c’est une coopération absolueentre les administrateurs des parcs publics ou privés et les communautés,et ceci est possible si les administrateurs des zones protégées en viennentà percevoir les membres des communautés en tant que partenaires et nonplus dans le rôle de potentiels fauteurs de trouble qui leur a traditionnel-lement été attribué.

VUE D’ENSEMBLE DES INDICES DE FRAGILITÉ DES RELATIONS ENTRE PARCS ET POPULATIONS VOISINES

Le problème lié à l’état des relations entre les administrateurs des airesprotégées et leurs communautés périphériques est non seulement un pro-blème centre-américain, c’est aussi un problème d’ordre mondial qui aété mis en évidence en 2003 lors de la Rencontre de la Commissionmondiale des aires protégées tenue en Afrique du Sud. Des preuves enseront fournies dans les prochains paragraphes.

1.

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Le concept initial du système de parcs nationaux costaricains étaitcentré autour de la conservation des ressources naturelles et, dans certainscas, les parcs pouvaient servir d’enclaves de recherche pour les cher-cheurs étrangers. Au début, la philosophie de conservation de base selimitait à circonscrire les réserves, le tourisme était une activité marginaleet les visiteurs de cette époque étaient habitués au style de vie en pleinair, ils connaissaient bien la nature et manifestaient beaucoup de respectenvers l’environnement. Cette période initiale s’est prolongée jusqu’à lafin des années 1980. Les principales sources de conflit durant cettepériode étaient dues à l’insuffisance des dédommagements payés pour lesterres confisquées en prévision de la création des parcs Boza (1989) –d’ailleurs, aujourd’hui, plus de 25 ans plus tard, le pays doit toujours del’argent pour 42 % des terres confisqués par le Contrôle général de laRépublique (2000) – et le conflit avec les chasseurs illégaux, qui se sontvu dénigrer leurs droits ancestraux à la chasse, ou la situation conflictuelledes chasseurs sportifs avec le système des parcs. Ces différends ne sonttoujours pas réglés.

À la fin des années 1980, le Costa Rica, en tant que nation, a vécudeux événements très importants. En premier lieu, le monde entier aredécouvert le pays, à la suite de la remise du prix Nobel de la paix auprésident Oscar Arias. Deuxièmement, Franklin Chang, le premier astro-naute costaricain de la NASA, a effectué son premier voyage dansl’espace. Ces deux événements ont tracé la voie du marché de l’écotou-risme pour le Costa Rica, qui est devenu une destination écotouristiquede premier choix. La nation a soudainement pris conscience que lestouristes attirés par la nouvelle popularité du pays arrivaient en nombretoujours croissant, apportant avec eux de la monnaie étrangère et mélan-geant tourisme de nature et visite des parcs avec la macroéconomie dupays, dans la foulée de la nouvelle logique de mondialisation. Mainte-nant, les ajustements structuraux, la dette, la mondialisation, Internet, labalance des paiements et les termes d’échanges sont devenus les nou-veaux compagnons de voyage de l’écotourisme. Le travail de conserva-tion a toujours existé, mais sans trop de planification ou de gestion. Lesparcs ont donc commencé à imposer des tarifs d’accès aux gens desvillages voisins des communautés d’accueil. Le parc remet cet argent augouvernement central et les parcs nationaux commencent à se plaindrede ne recevoir en retour que de maigres budgets, bien que ce soient euxqui génèrent les fonds. On a ajouté graduellement d’autres niveauxau-dessus de la bureaucratie normale de direction des parcs et les

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administrateurs de parcs stagnent à la base de la pyramide bureaucratique,pyramide que le Bureau du vérificateur général du Costa Rica a déclaréne pas être le meilleur administrateur des fonds CGR (2000).

Déjà en 1997, les études indiquaient que de 65 % à 70 % destouristes réguliers qui arrivaient dans le pays visitaient les aires proté-gées au moins une fois au cours d’un séjour de 11 jours et que, pour lamême période, 50 % à 65 % des visiteurs s’y rendaient de 2 à 4 fois. Lamême étude établissait qu’il y a des régions du Costa Rica qui n’offrentque des activités basées sur la nature (variant de la descente de rivièreen radeau pneumatique jusqu’à l’observation des oiseaux) (Dean etAguirre, 1997).

Le tourisme de nature prend de l’ampleur dans plusieurs forêtsprotégées et il devient évident que les communautés d’accueil et lescommunautés voisines de ces régions souhaitent avoir leur part des béné-fices économiques de l’écotourisme. Au Belize par exemple, les étudesmenées ont indiqué que si les communautés partagent les bénéfices del’écotourisme engendré par les aires protégées, elles vont s’impliquerdans la protection de la région et veiller à faciliter les activités écotou-ristiques. Quand il n’y a pas de partage, on constate des résultats contraires(Lindberg et Enriquez, 1994).

Dans une enquête menée au Costa Rica, sept groupes de pressionont été identifiés dans les régions de Manuel-Antonio et de Quepos ; cesgroupes gênaient, d’une façon ou d’une autre, la gestion du parc nationalManuel-Antonio en rendant très compliquée la coopération des différentsintervenants : chasseurs et cueilleurs illégaux, administrateurs du parc etpersonnel du parc provenant de l’extérieur de la communauté, proprié-taires d’hôtel locaux, propriétaires d’hôtel étrangers, personnel local tra-vaillant au parc, fermiers de subsistance, chercheurs de la région et del’étranger, exploitants touristiques, voyagistes, vendeurs d’artisanat localà la barrière du parc, élus municipaux et dirigeants, politiciens locaux etpersonnel du ministère de l’Énergie et de l’Environnement et du Systèmedes zones de conservation (Aguirre, 2000).

D’un autre côté, dans le cas du Costa Rica, plusieurs entreprises detourisme de nature et d’écotourisme ont bénéficié d’une exonérationd’impôt substantielle afin d’importer les biens et services nécessaires audéveloppement, sans parler de crédits considérables sur les taxes sur les

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profits et les investissements. Par contre, plusieurs petites communautésreçoivent très peu de bénéfices économiques, quand elles n’ont pascarrément été oubliées (Damon et Vaughan, 1993).

Les résidents de la communauté d’accueil Poasito, de la région duparc national du Volcan Poas, déplorent le fait que les touristes en routevers le parc national Volcan Poas ne s’arrêtent pas dans leur communauté.Cette situation est nettement plus favorable que celle qui existait au débutde la décennie 1990 pour le parc national de Carara, où seulement 1 %des revenus générés par les touristes en visite restait dans la région, parceque les voyagistes refusaient de faire arrêter les autobus bondés de tou-ristes, en route pour le parc, dans les commerces de la région. Dans lecas de Poasito, plusieurs autobus s’arrêtent dans les kiosques où sontvendus des fraises et du fromage, le long de l’autoroute menant au parc(Heisterkamp et al., 2001 ; Fouche et al., 2001 ; Damon et Vaughan, 1993).

Les réserves et les parcs peuvent stimuler les économies localesquand les revenus qu’ils génèrent sont remis en circulation dans le milieuavoisinant. Les effets de multiplication dans les emplois, les investisse-ment, les dépenses pour l’achat de matériel, ont été bien documentés auCosta Rica. Dans la région de Quepos, par exemple, dans l’industriehôtelière, on a trouvé que plus de 90 % des gens occupant des fonctionsde deuxième ou troisième niveau d’emploi venaient de la région, alorsque les postes de direction étaient attribués à des étrangers ou à despersonnes provenant d’autres régions du Costa Rica, l’excuse invoquéeétant la difficulté de trouver parmi les habitants de Quepos des personnescapables d’occuper des postes de haute direction (Aguirre, 2000). Pource qui est des emplois rémunérés, les gens ont du mal à reconnaître lesbénéfices qui reviennent aux communautés locales parce qu’il sembleplutôt difficile d’associer les emplois, et les salaires, à l’existence desparcs ou des réserves (Wells et Brandon, 1992). Cette situation a étéétablie au cours d’études menées dans la région des parcs Manuel-Antonioet Quepos, où les gens des communautés voisines qui ont été interviewésassociaient leur emploi directement à leur employeur, plutôt qu’à la capa-cité du parc d’attirer des touristes (Aguirre, 2000). Le tourisme de naturesuscite l’intérêt du domaine de l’emploi et des revenus en Australie et enAfrique (Eagles, 1997). En Afrique, malgré l’apport de l’écotourisme àl’économie, on expérimente bon nombre de « fuites », étant donné queplusieurs produits nécessaires au bien-être du tourisme sont importés ;c’est notamment le cas des véhicules, des guides touristiques et desapprovisionnements (Teye, 1987).

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L’importance d’établir de bonnes relations a été clairement reconnueen 2004 dans une étude du Fonds mondial pour la nature, qui enquêtaitsur l’état de la gestion des zones protégées autour de la planète et tiraitla conclusion suivante : « L’un des problèmes qui malheureusementrevient toujours, c’est l’absence de gestion des relations humaines. Lesproblèmes sont évidents, à la fois en termes de relations avec les com-munautés locales et avec les populations indigènes, au niveau de la ges-tion du tourisme, de l’installation d’équipements touristiques et de l’accèsaux infrastructures touristiques commerciales » (WWF, 2004). Cettesituation semble se perpétuer en dépit de tous les efforts, les beauxdiscours et les vœux pieux.

Finalement, ce qui avait commencé, en 1951 à Monteverde et plustard à Santa Elena, comme une entreprise de conservation sur une basescientifique (Burlingame, 2000) se retrouve en 2005 sur une trajectoirede collision avec les réalités sociales et économiques du XXIe siècle. Lesmodèles de conservation axés essentiellement sur la préservation desécosystèmes biologiques, qui étaient et sont toujours à la base des acti-vités dans plusieurs parcs et réserves du pays, aussi bien ici que danstoute l’Amérique centrale, restent sans solutions pour plusieurs des nou-veaux problèmes créés par le commerce d’activités récréatives en pleinair et pour les nouvelles réalités macroéconomiques.

Ce qui résultera de cette collision inévitable, c’est que la région deMonteverde et Santa Elena risque de prendre une tournure non durabledu point de vue touristique, parce que tous semblent plus se préoccuperde l’agriculture et de la durabilité écologique de la région, pendant que« l’environnement » se détériore rapidement à cause de ce qui apparaîtêtre une mauvaise gestion du tourisme et une planification urbaineinadéquate.

L’étude rapportée dans ce chapitre constitue le second aboutissementd’un projet à long terme, qui abordera en 2006 sa sixième année d’exis-tence et qui comprend des enquêtes menées au Nicaragua, au Honduras,au Costa Rica et, plus récemment, au Panama, sur des aires protégéesgérées par des organismes publics et privés. L’étude a été menée parl’auteur avec l’appui des étudiants et du personnel de la School for FieldStudies (École des études de terrain), au Centre de développement durable,à Atenas au Costa Rica.

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ÉTUDE DE CASFORÊTS HUMIDES DE MONTEVERDE ET SANTA ELENA : COMMENT ASSURER LA RELATION ENTRE LES RÉSERVES PRIVÉES ET LA POPULATION DU COSTA RICA, 2005

2.1. INTRODUCTION

Au Costa Rica, la relation communautés – aires protégées traverseprésentement une période de stress attribuable à ce qui apparaît commeune suite de changements et d’espoirs économiques non comblés chezles communautés d’accueil, une situation qui donne lieu à une série demalentendus entre les membres des communautés et les administrateursdes réserves et qui risque de détériorer les relations si elle n’est pas régléeadéquatement. Le problème est particulièrement important dans le casdes réserves de forêt humide privées de Monteverde et de Santa Elena,parce qu’au cours de la dernière décennie, ces deux endroits sont devenussans contredit des icônes majeurs de l’écotourisme et de l’industrie dutourisme nature au Costa Rica, particulièrement Monteverde. La situationidentifiée antérieurement revêt une importance extrême pour le CostaRica, parce que ces deux communautés représentent aujourd’hui des des-tinations touristiques majeures et que leur grande proximité physique etleur fusion éventuelle en conglomérat rural/semi-urbain peut créer dansl’avenir des problèmes relationnels avec les réserves privées dont cesagglomérations dépendent fortement.

L’étude de cas jette un coup d’œil sur les conditions influençantl’état des relations entre les communautés de Monteverde et Santa Elenaet les deux réserves privées dont elles dépendent. Nous avons évalué cesrelations à deux reprises au cours des cinq dernières années en utilisantà chaque fois une méthodologie semblable, ce qui nous permet de faireune analyse intertemporelle des changements pouvant s’être produitsdans chacune des communautés et aussi de voir comment ces change-ments peuvent influer sur l’état des relations et sur l’impact que peutavoir l’écotourisme dans ces relations.

Le but de l’étude était double : fournir de l’information auxcommunautés pour renforcer positivement l’état de leurs relations avecles réserves privées et développer des critères permettant de gérer leséventuelles sources de conflits susceptibles d’émerger dans ces relations.

2.

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2.2. OBJECTIFS

Les objectifs de l’étude étaient les suivants :

• Évaluer l’état des conditions des relations et les changements deperception qui peuvent s’être établis entre les communautés et lesréserves privées des forêts montagneuses humides de Monteverdeet Santa Elena en raison de l’impact du tourisme de nature.

• Déterminer les variables sociodémographiques et les variables deperception influençant les perceptions des populations locales,l’état des relations avec les réserves et le rôle possible desactivités économiques touristiques.

2.3. HYPOTHÈSE GÉNÉRALE

• Le mouvement de convergence des communautés, mal préparéesà gérer l’affluence massive des touristes, et celui des autorités desaires protégées, qui sont peu habituées à superviser une pareilleaffluence de visiteurs, occasionnent des problèmes relationnelsentre les autorités des aires protégées et les communautés.

• Le tourisme est présentement un facteur déterminant des perceptionsdes populations locales quant à l’état des relations.

2.4. SITES D’ÉTUDE ET MÉTHODES UTILISÉES

Les critères qui nous ont guidés dans la sélection des communautés etdes aires protégées privées étaient les suivants :

1. L’image projetée à l’étranger par ces communautés et cesréserves : pour être choisies, elles devaient projeter une imagetrès importante à l’étranger et représenter, pour le marché touris-tique, des icônes de conservation et d’écotourisme pour le payset pour l’industrie au Costa Rica et dans la région.

2. Les signes évidents de difficultés potentielles dans les relations :dans ce cas particulier, occasionnés par un développement éco-touristique très rapide. L’information a été recueillie via uneétude exploratoire menée par l’auteur à l’automne 2000.

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L’application des critères a abouti à la sélection des communautéssuivantes :

• La Réserve de la forêt humide de Monteverde, un territoire d’unesuperficie de 3 604 hectares exploitée par son propriétaire, leCentre des sciences tropicales, a accueilli en 2004 environ 73 000visiteurs. Son image internationale est très forte et elle génère undéveloppement écotouristique accéléré dans la communautévoisine de Monteverde.

• La Réserve de la forêt humide de Santa Elena couvre 310 hec-tares et reçoit présentement entre 20 000 et 25 000 visiteurs paran. Elle est gérée par le Conseil scolaire de Santa Elena sousconcession de la République du Costa Rica. Cette réserve comptedoubler le nombre de ses visiteurs d’ici trois à cinq ans. Lacommunauté de Santa Elena et ses environs connaissent présen-tement un développement touristique qui a acquis une vitesse decroissance très rapide depuis cinq ans en raison de l’augmenta-tion exponentielle du nombre de touristes débarquant dans larégion.

Dans les deux cas, un questionnaire très similaire a été utilisé.L’information recueillie auprès des membres des communautés qui ont étéinterviewés comprenait les caractéristiques sociodémographiquessuivantes : âge, sexe, niveau d’éducation (degré équivalent), revenu men-suel de toutes sources de la famille, nombre de personnes dans la famille.

En 2001 le nombre total des personnes sélectionnés au hasard parmiles communautés pour les entrevues était de 118 pour Monteverde et 120pour Santa Elena. Dans l’étude de 2005, le nombre d’entrevues était de107 pour Monteverde et 104 pour Santa Elena.

Pour ce qui est de l’étude menée en 2001, les réponses se faisaientuniquement par choix dichotomiques codés soit Oui (1), soit Non (0).Par contre, en 2005, pour tenir compte des commentaires reçus de la partdes personnes interviewées au cours des cinq premières applications del’étude et qui disaient que le choix entre Oui et Non ne correspondaitpas à l’idiosyncrasie des Costaricains, on a modifié la présentation dequelques questions sans changer les sujets couverts par chacune et ens’assurant de maintenir une comparabilité avec les résultats de 2001.

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En 2005, quelques-unes des questions à choix dichotomique ont étéremaniées pour s’adapter, dans la mesure du possible, à un type d’échellede Likert à cinq niveaux qui permettait une augmentation graduelle desréponses : selon le cas, de l’approbation complète au rejet total ou de lapleine satisfaction à l’insatisfaction totale. Les questions de la série finaleutilisées dans les 16 derniers sondages et dans le sondage de 2005 àMonteverde et Santa Elena sont présentées ci-après.

Tableau 5.1

LES QUESTIONS DES SONDAGES

Question 1 : À quand remonte votre dernière visite du parc ?

Question 2 : Jusqu’à quel point êtes-vous lié aux activités du parc ?

Question 3 : Jusqu’à quel point votre emploi est-il relié au tourisme ?

Question 4 : Jusqu’à quel point vous sentez-vous capable de vous occuper des visiteurs du parc ?

Question 5 : Dans les 10 dernières années, est-ce que les améliorations des conditions de vie de la communauté ont été liées à l’existence du parc ?

Question 6 : Pensez-vous que les visiteurs du parc ont contribué à l’amélioration des conditions économiques de la communauté ?

Question 7 : Avez-vous l’impression que le parc fait partie de la communauté ?

Question 8 : Quels sont ceux qui retirent le plus de bénéfices de la présence du parc ?

Question 9 : Est-ce que la création d’un parc était la meilleure utilisation qu’on pouvait faire avec ce territoire ?

Question 10 : Y a-t-il des commerces près de la communauté pour offrir des services aux touristes qui se rendent au parc ?

Question 11 : Est-ce que les étrangers et les gens du pays qui visitent le parc respectent la communauté?

Question 12 : Quand les autorités du parc prennent des décisions qui affectent toute la communauté, est-ce que les opinions de la communauté sont prises en compte?

Question 13 : Parmi les bénéfices générés par le tourisme, lequel est le plus important?

Question 14 : Êtes-vous au courant d’un conflit, passé ou présent, entre la communauté et le parc?

Question 15 : Quels sont d’après vous les trois plus grands problèmes de la communauté?

Question 16 : Est-ce que les autorités du parc devraient aider à résoudre ces problèmes ?

Question 17 : Quelle est la ressource naturelle la plus importante que le parc offre à la communauté ?

Question 18 : Comment qualifieriez-vous les relations entre la communauté et le parc?

Question 19 : Qu’est-ce que vous aimeriez que le personnel et l’administration du parc fasse pour améliorer les relations avec la communauté ?

Question 20 : Avez-vous autre chose à dire au sujet de l’état actuel des relations entre la communauté et le parc ?

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L’analyse statistique qui en a été faite comprenait les étapessuivantes : sélection de variables clés fiables ; création d’histogrammescomparatifs ; analyse de la variance ; estimation d’une matrice de corré-lation ; standardisation des variables identifiées en estimant les équationsà régression multiple pour signifier zéro (0) et variance un (1) afin d’éta-blir l’ordre des variables ; estimation des équations à régression multipleen utilisant la version no 12 du logiciel Minitab. Dans le cas 2001, leprocessus d’analyse sélectionné était le modèle de régression logistiquebinaire, en raison de la nature dichotomique des variables et à la sugges-tion de Pampel (2000). Dans les données de 2005, comme on utilisait untype d’échelle de Likert « modifiée » comprenant cinq niveaux, la tech-nique ordinaire standardisée des moindres carrés suggérée par Kachiganétait le modèle de choix pour établir l’importance relative des variablesindépendantes dans l’explication de la variation de la variable dépendante(Kachigan, 1991). La dernière étape consistait à vérifier les modèles ense servant de l’expérience et de la logique acquises durant l’étude, où futévaluée la rationalité des résultats du modelage.

2.5. SIGNES ÉVIDENTS DES RELATIONS LIMITÉES ET DE L’IMPACT DU TOURISME

Les résultats présentés dans le tableau 5.2 indiquent qu’en 2001, SantaElena était une communauté plus âgée, plus pauvre et moins instruite quesa contrepartie Monteverde, cependant, en 2005 les comparaisons desindicateurs d’années de résidence, d’âge, de revenu et d’éducation portentà croire que Santa Elena serait en train d’effacer les différences initiales.Le changement le plus remarquable qui a été enregistré se situe au niveau

Tableau 5.2

VALEUR MOYENNE DES VARIABLES CLÉS SOCIODÉMOGRAPHIQUES, 2001 ET 2005

1 dollar US équivalait à 350 colons costaricains en 2001 et à environ 475 colons en 2005.

Variable2001

Monteverde2005

Monteverde2001

Santa Elena2005

Santa Elena

Années de résidence 13 20 32 27

Âge Années 32 35 40 30

Revenu 100 CRC 303 332 55 288

Éducation Années HS HS+ P P+

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Écotourisme, parcs et populations locales au Costa Rica 155

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de la variable « revenu » où, en 2001, le revenu moyen d’une famille decinq personnes à Santa Elena s’élevait à 55 000 CRC, en 2005 le niveaurapporté était de 288 000 CRC par mois pour une famille de quatrepersonnes.

Le tableau 5.3 présente un résumé des réponses aux questions quiétaient sujettes aux réponses binaires en 2001. Les résultats indiquent queles questions « Jusqu’à quel point êtes-vous lié aux activités du parc ? »(Q2) et « Est-ce que la création d’un parc était la meilleure utilisationqu’on pouvait faire avec ce territoire ? » (Q9) sont les seules auxquellesles deux communautés ont fourni des réponses semblables. Pour lesautres variables, les deux communautés se font une idée différente del’état de leurs relations avec les deux réserves naturelles privées.

Les bénéfices perçus par les membres de la communauté dans le casde Monteverde sont, dans une proportion de 31,8 %, reliés à la créationd’emploi, 18,2 % à des revenus plus substantiels et 18,2 % au développe-ment économique en général. Dans le cas de Santa Elena, 47,1 % se rap-portent à la création d’emploi, 29,4 % à une hausse des revenus et 17 %au développement général. Comme on peut l’observer, l’idée globalequ’on se fait des bénéfices est associée aux bénéfices économiques et nonà la conservation. Pour ce qui est des bénéficiaires tels que perçus par lescommunautés, dans le cas de Monteverde 41 % mentionnent la Réservede forêt humide de Monteverde et 25 % mentionnent les touristes ; pourSanta Elena 60,3 % mentionnent la communauté dans son intégrité.

À la question « Qu’est-ce que vous aimeriez que les réserves fassentpour améliorer les relations avec la communauté ? », dans Monteverde,40,8 % ont parlé de meilleures communications et 23 % de plus d’édu-cation environnementale ; dans le cas de Santa Elena, 35 % ont demandéde l’aide pour la construction de routes principales et 21 % voulaient uneamélioration des communications.

En 2001 par contre, l’évaluation globale des conditions à la base del’état des relations variait beaucoup d’un endroit à l’autre : alors que dansMonteverde 65 % des personnes interviewées disaient que les relationsétaient mauvaises, dans Santa Elena seulement 20 % exprimaient lamême opinion.

Le tableau 5.4 résume les problèmes identifiés par les deux com-munautés. À Monteverde, la répartition des réponses varie : alors que4,2 % des répondants ont mentionné le coût élevé de la vie, 16,7 % des

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Tableau 5.3SOMMAIRE DES RÉSULTATS, ÉTUDE DE 2001

Caractéristiques

Monteverde Santa ElenaOui%

Non%

Oui%

Non%

Êtes-vous associé aux activités du parc d’une quelconque façon ? (q2) 70 30 75 25Avez-vous l’impression que le parc fait partie de la communauté? (q7) 78 28 92 8Est-ce que la création d’un parc était la meilleure utilisation à faire de ce territoire? (q9) 76 24 75 25Est-ce que les étrangers qui visitent le parc respectent la communauté? (q11) 22 78 83 17Les améliorations des 10 dernières années sont-elles liées au parc? (q5) 37 63 62 38Les visiteurs contribuent-ils à l’amélioration des conditions économiques? (q4) 18 82 58 42Votre emploi est-il relié au tourisme d’une quelconque façon? (q3) 67 33 15 85Êtes-vous au courant d’un conflit, passé ou présent? (q14) 64 36 34 66Avez-vous visité le parc l’année dernière? (q1) 30 70 50 50Avez-vous des commentaires à faire sur les décisions du parc? (q12) 15 85 81 19Le parc doit-il aider à régler les problèmes? (q16) 78 21 91 9

Bénéf ces communautaires dus aux parcs % %Conservation 4,5 0Création d’emplois 31,8 47,1Hausse des revenus 18,2 29,4Recherche 9,1 0Culture élargie 4,5 5,9Éducation en matière d’environnement 13,6 0Développement général 18,2 17,6

Principaux bénéf ciaires % %Municipalité 0,0 3,2Enfants de la communauté 9,0 15,0Toute la communauté 6,0 60,3Employés du parc 9,0 1,5Touristes 25,0 11,0Réserve 41,0 9,0Bénéficiaire inconnu 10,0 0,0Total 100,0 100,0

Que peut faire la direction du P arc pour améliorer les relations ? % %Rien 10,8 17,0Améliorer les routes 15,4 35,0Plus d’éducation sur l’environnement 23,0 2,5Plus d’emplois pour les gens de la place 10,0 12,5Promotion touristique 0,0 12,0Meilleures communications avec la communauté 40,8 21,0Total 100,0 100,0

Évaluation de l’état des relations Mauv.%

Bon%

Mauv.%

Bon%

Note 65 35 20 80

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répondants parlaient du trafic plus dense et du manque de planificationurbaine. Dans le cas de Santa Elena, les plaintes se concentrent autourdu manque de planification urbaine avec 38,1 % des réponses.

Le tableau 5.5 présente le résumé de l’étude pour les questionsadaptées à la nouvelle échelle de type Likert. Comme on peut l’observer,les réactions et la perception qu’ont deux communautés des problèmesapparaissent très semblables ; c’est ce que nous tenterons de démontrerdans les paragraphes suivants.

La deuxième partie de l’analyse servait à déterminer s’il existe desdifférences importantes entre les deux communautés, du point de vue socio-démographique et dans la façon de répondre aux questions de perceptionen 2001 et en 2005. En 2001 la seule variable qui les a fait réagir de façonsimilaire était la question Q9 (la création de réserves est-elle la meilleureutilisation du territoire ?) pour laquelle, avec f = 0,01 et p = 0,94, les deuxcommunautés croyaient que c’était une bonne idée ; en général, dans lesautres catégories, les réponses et les réactions étaient différentes.

En 2005, les résultats étaient tout le contraire : les deux communautésétaient en accord sur littéralement tous les points, sauf le niveau d’édu-cation qui ne concordait pas (f = 19,470 et p = 0,000) et Q10 (Y a-t-ildans la communauté des commerces pouvant répondre aux besoins destouristes ?) avec f = 8,32 et p = 0,000. Partout ailleurs, les résultatsconcordent (intervalle de confiance de 95 %). En raison des résultats de

Tableau 5.4

SOMMAIRE DES PROBLÈMES, ÉTUDE DE 2001

ProblèmesMonteverde

%Santa Elena

%Hausse du coût de la vie 4,2 0,0

Augmentation du trafic 16,7 0,0

Drogues 12,2 9,5

Dégradation culturelle 8,5 4,8

Tourisme excessif 16,7 9,5

Manque de planification urbaine 16,7 38,1

Accroissement de la délinquance 12,5 0,0

Pollution accrue 12,5 0,0

Rien 0,0 38,1

Total 100,0 100,0

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Table

au 5

.5

SOM

MA

IRE

DE

S R

ÉSU

LTA

TS, É

TUD

E D

E 2

005

Q

Nive

au 1

Nive

au 2

Nive

au 3

Nive

au 4

Nive

au 5

Mon

tever

deSa

nta E

lena

Mon

tever

deSa

nta E

lena

Mon

tever

deSa

nta E

lena

Mon

tever

deSa

nta E

lena

Mon

tever

deSa

nta E

lena

Q2

41,1

48,2

32,7

22,7

15,9

20,9

4,7

8,2

5,6

0,0

Q3

11,2

7,3

13,1

19,1

4,7

18,2

25,2

25,4

45,8

30,0

Q4

31,8

26,4

10,3

14,5

25,2

26,4

4,7

30,9

28,0

1,8

Q5

28,0

19,1

15,0

17,3

27,1

13,6

15,9

43,6

14,0

6,4

Q6

7,5

3,6

4,7

22,7

5,6

8,2

25,2

28,2

57,0

37,3

Q9

0,0

0,0

9,3

0,0

11,2

0,9

15,9

30,9

63,6

68,2

Q10

10,3

0,9

20,6

0,0

16,8

30,0

21,5

30,9

30,8

38,2

Q11

0,0

0,0

5,6

0,0

17,8

22,7

39,3

27,3

37,3

50,0

Q12

40,2

0,0

32,7

0,0

11,2

22,7

0,0

27,3

15,9

50,0

Q16

15,0

14,5

10,3

10,0

6,5

0,0

13,1

22,7

55,1

52,8

Q18

15,9

1,8

11,2

27,3

33,6

5,5

24,3

42,7

15,0

22,7

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l’analyse ANOVA, il a été décidé qu’il serait préférable de garder sépa-rées les analyses de régression logistiques en ordre de rang, la troisièmephase de l’analyse des sondages de Monteverde et de Santa Elena en2001, et de les combiner en 2005 pour les analyses de régression en rangsnormalisés OLS. On peut observer hors de tout doute que la variable laplus importante était Q3 (Jusqu’à quel point votre emploi est-il relié autourisme ?).

Dans les résultats des deux communautés en 2001 et 2005, à la suitedu processus de sélection auquel on a soumis les données, deux élémentssemblaient influencer essentiellement la façon dont les gens de la ruepercevaient l’état des relations entre les parcs, les réserves et les commu-nautés : a) dans les deux cas et les deux périodes, des variables semblablesexpliquent de façon significative la variation de la variable dépendanteQ18 (état des relations) ; b) si l’emploi de la personne interviewée estrelié au tourisme, sa perception de l’état des relations est plus positive.

2.6. QUELQUES EXPLICATIONS SUR LE PROBLÈME RELATIONNEL DE MONTEVERDE ET SANTA ELENA

Les communautés de Monteverde et Santa Elena, comme on l’amentionné dans les sections précédentes, sont les communautés d’accueilpour les réserves de forêt humide de Monteverde et Santa Elena, deuxdes réserves privées les mieux connues du Costa Rica. Monteverde estaujourd’hui la destination d’écotourisme de nature la mieux connue auCosta Rica et les leçons apprises au cours de cette analyse seront utilespour dresser le tableau de l’avenir du tourisme de nature au Costa Ricaet en Amérique centrale.

La première différence sociale qu’il faut bien comprendre, c’est quepour l’une et l’autre des deux communautés, tout a commencé de façontrès différente. Monteverde a été créée après l’achat des terres par ungroupe religieux des États-Unis d’Amérique (les Quakers), qui ont émi-gré au Costa Rica en avril 1951 en raison de leur opposition à la guerrede Corée ; ils recherchaient un lieu isolé et paisible. Santa Elena formaitdéjà à cette époque une petite communauté rurale pareille à des milliersqui existaient et existent toujours dans le pays (Burlingame, 2000).

La comparaison des observations sociodémographiques entre 2001et 2005 est très intéressante, même si, en 2005, un demi-siècle s’estécoulé depuis l’établissement de la communauté de Monteverde. L’écartdes revenus semble se refermer, l’âge moyen à Santa Elena semble baisser.

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Quand on demande à quelques vieux résidents ce qui peut avoir permisde resserrer l’écart, la réponse est simple : les opportunités d’affaires tou-ristiques amènent des jeunes à la recherche d’emploi dans un pays encrise. Le nombre moyen d’années de résidence a diminué à Santa Elenade 32 à 27. Ces éléments montrent que les deux communautés serapprochent, non seulement physiquement, mais aussi au point de vuesociodémographique.

Notons en passant un élément strictement « observationnel » : dansl’étude de 2001, alors que le groupe menait l’étude et que les sondeursarpentaient le secteur, il n’était pas difficile d’identifier les limites phy-siques respectives des communautés. En 2005, il semblait y avoir un« rapprochement physique » et on a parfois fait remarquer à l’auteur queplusieurs « voyagistes locaux de Monteverde et Santa Elena » qui vendentdes excursions dans le secteur ne séparent pas les deux communautés :tout est annoncé sous le nom de Monteverde, étant donné que Monteverdeest déjà connue comme destination écotouristique à travers le monde. Ladifférence dichotomique initiale entre Quakers américains et paysans cos-taricains, différence qui a marqué depuis le début une séparation socio-philosophique dans la façon dont chacun voit les problèmes sociaux etleurs solutions, semble, après dix ans de développement touristiquerapide, être en train de s’éroder entre les deux communautés.

En 2001, l’élément sur lequel les deux communautés semblaient leplus être en accord était que leurs ancêtres avaient eu une très bonne idéede créer les deux réserves. Leurs points de vue différaient sur tous lesautres éléments et ANOVA en est venu aux mêmes conclusions. En 2001,ce qui ressortait le plus de l’évaluation des relations entre les deux com-munautés était une différence radicale de points de vue. Alors que lespersonnes interrogées à Monteverde mentionnaient à 65 % que les rela-tions étaient mauvaises, à Santa Elena seulement 20 % avaient la mêmeréaction, probablement parce que la réserve de forêt humide de SantaElena est la propriété du Conseil scolaire de Santa Elena, qui en assurela gestion, et que la réserve de forêt humide de Monteverde appartient àun organisme non gouvernemental dont le siège social est situé à SanJose, la capitale du Costa Rica, un indice évident de l’effet créé parl’implication communautaire dans le développement de saines relationsentre les communautés et les aires protégées.

En 2005, la situation semblait avoir changé radicalement : ANOVAindique que la seule variable de perception pour laquelle les deux com-munautés présentent des positions différentes est la Q10 (Y a-t-il, près

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de la communauté, des commerces pouvant offrir des services aux tou-ristes qui se rendent dans le parc ?). La réaction à Monteverde était dedire qu’il y avait assez de commerces, pendant que la communauté deSanta Elena exprimait un sentiment contraire. Quand, dans les deux com-munautés, les vues en termes de bénéfices sont centrées sur la créationd’emplois et la génération de revenus, les avis se rejoignent, comme ona pu l’observer. Ceci rejoint l’idée que les deux communautés entrent enconflit pour ce qui est de la disponibilité des commerces, étant donné queles boutiques touristiques sont des sources évidentes de nouveauxemplois et de revenus. Comme on s’y attendait, en 2005 on remarquaitdéjà une consolidation du rapprochement.

Les analyses indiquent que le tourisme apporte à Santa Elena lesaméliorations de conditions de vie que la population attendait et c’est ceque les gens expriment. Pour ce qui est de Monteverde, même si de« vieux Américains » déclarent que le développement économique estpeut-être « trop poussé », le nouveau Quaker/Costaricain monteverdienqui bénéficie des nouveaux emplois et des revenus ne semble pass’inquiéter outre mesure. Un autre commentaire fait lors des entrevuesétait que les « vieux » résidents d’extraction américaine sont en majoritédéjà morts ou retournés aux États-Unis et certains de leurs descendantsse sont mariés ici ; ce changement a transformé la fibre sociale de lacommunauté, qui adopte maintenant une vision plus en accord avec lavie costaricaine, par opposition à la façon de vivre plus américanisée quiprévalait il y a quelques années. Il est important d’en tenir compte, parceque le site est annoncé comme étant l’icône mondial de la conservation,bien que les Monteverdiens semblent s’intéresser beaucoup plus à lacréation d’emplois qu’à quoi que ce soit d’autre, une réaction qui s’estvérifiée à nouveau en 2005.

Au chapitre 10 des Anniversaires de Monteverde publié sous ladirection de Nadkarni et Wheelwright, Burlingame mentionne qu’avanttout, la région est à prédominance agricole (Burlingame, 2000). C’étaitencore vrai il y a dix ans. Cependant, avec près de 90 000 visiteurs en2004, partagés entre les deux réserves (73 000 à Monteverde et environ15 000 à Santa Elena), qui paient un tarif d’accès de 13 $ US pour lesétrangers et entre 2 et 5 $ US pour les résidents et les groupes spéciaux,et avec plus de 50 hôtels, gîtes du passant et restaurants, c’est sanscontredit le tourisme qui est aujourd’hui le plus grand fournisseur d’argentcomptant pour les deux communautés.

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L’analyse de régression logistique pour les données de 2001 etl’analyse standardisée OLS en 2005 indiquaient, de façon très claire,qu’en 2001 : a) dans les deux cas, les deux mêmes variables – travail enrapport avec le tourisme et connaissance des conflits – comptaient pourbeaucoup et de façon significative dans l’explication des variations de lavariable dépendante – état des relations ; b) si l’emploi occupé avait traitau tourisme, la perception était plus positive que dans le cas contraire.En 2005, de façon très claire, on observait que la variable la plus impor-tante était Q3 (Jusqu’à quel point votre emploi est-il relié au tourisme ?),avec un coefficient normalisé de 0,43, une valeur qui représente presquele double de celle qui suit immédiatement, Q7 (Avez-vous l’impressionque le parc fait partie de la communauté ?). Le fait que toutes les équa-tions estimées concordent, que le tourisme ne fait pas que rapprocher lescommunautés mais que, en général, les gens reconnaissent son influencesur leurs sentiments à l’égard des réserves, tout ceci devrait constituer unélément de grande importance au moment de concevoir et de mettre enplace les stratégies visant à améliorer les relations.

La dernière question et la plus intéressante qui doit être poséemaintenant est celle-ci : « Comment se fait-il que les élites intellectuellesétrangères, qui arrivent dans la région de Monteverde et Santa Elenachaque année, continuent de s’inquiéter, avant tout, de la durabilitéagricole alors que, dans les années qui viennent, la durabilité au niveaude la gestion touristique sera probablement l’élément déterminant del’avenir de la région et des deux sites protégés en tant qu’icônes majeursde conservation ? »

2.7. LES FAITS SUR LES RELATIONS AVEC LES RÉSERVES VOISINES : CONCLUSIONS PRÉLIMINAIRES

L’étude qui a été menée révèle ce qui suit :

1. L’impact du tourisme nature semble inévitable en raison de sesconséquences sur l’emploi et les revenus dans les deux commu-nautés.

2. Les bénéfices économiques semblent être la préoccupation depremier ordre du nouveau Montéverdien de la rue, alors quepeu de gens s’inquiètent de conservation.

3. Le sort des relations futures entre les deux communautéssemble étroitement lié au succès économique des activitéstouristiques.

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4. La participation des dirigeants des deux communautés auxactivités de planification des réserves privées est essentiellepour garantir la durabilité à long terme des activités pratiquéeset l’intégrité physique des réserves.

5. L’affluence massive de touristes que connaissent les deux com-munautés et la croissance incroyable de l’industrie semblentavoir des répercussions négatives sur les services publics desdeux communautés.

6. Santa Elena, une réserve où la population locale participe pluset est mieux informée au sujet des difficultés de gestion que laréserve connaît, semble mieux réussir à remédier à ses pro-blèmes relationnels entre l’administration de la réserve et lesmembres du conseil scolaire que ne le fait la Réserve de forêthumide de Monteverde.

7. Les communautés semblent souhaiter des bénéfices qui soientplus concrets, économiquement et socialement. Les pro-grammes d’éducation en matière d’environnement sont un bondébut, mais il faudrait faire plus.

8. La gestion durable du tourisme dans les deux communautés feraque plusieurs problèmes en mal de solutions seront encore plusdifficiles à régler si les membres de la communauté ne sont pasdirectement impliqués.

9. Il faut que les réserves et les communautés se mettent d’accordsur une stratégie de coopération allant au-delà des notionsd’agriculture et de conservation, pour que soit assurées à longterme l’intégrité physique et l’utilisation durable de la ressourcequi est pour le moment à la base du boum économique de larégion.

10. En 2005, les variables touchant le niveau de revenu, les variablesde perception du travail dans l’industrie touristique et les variablesde connaissance des conflits semblaient influencer de façon cru-ciale le point de vue de l’opinion publique au sujet des relationsentre les communautés et les réserves.

11. Des changements importants dans les conditions qui influencentl’état des relations se sont définitivement produits au cours dela période couverte par les deux enquêtes. Alors qu’en 2001 lesrésultats indiquaient deux communautés nettement séparées aupoint de vue sociodémographique, en 2005 elles semblaient se

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fusionner en une seule, non seulement physiquement, maisaussi au point de vue socioéconomique, avec tout ce qu’unetelle fusion peut déjà signifier pour déterminer l’état de la rela-tion entre les deux communautés et leurs réserves naturellesrespectives.

Finalement, il semble qu’on ait réussi à prouver la justesse del’hypothèse voulant que le mouvement de convergence des petites com-munautés rurales mal préparées à s’occuper d’une affluence massived’écotouristes et celui des aires protégées peu habituées à gérer une tellefréquentation touristique finissent par créer des problèmes au niveau desrelations entre les aires protégées et les communautés, et que les revenusgénérés par le tourisme sont un facteur très important dans la détermina-tion de la perception que les gens ont des conditions influençant l’étatdes relations, du moins dans le cas de Monteverde et Santa Elena.

DÉVELOPPEMENT DE BONNES RELATIONS DE VOISINAGE ENTRE LES PARCS ET LES COMMUNAUTÉS : ENSEIGNEMENTS

L’argent dépensé par les touristes est en train de devenir une source majeurede revenu pour plusieurs communautés costaricaines entourant les grandsparcs et les grandes réserves naturelles privées, mais plusieurs de ces com-munautés commencent à se plaindre amèrement de ne pas obtenir leur justepart des bénéfices économiques auxquels elles semblent s’attendre. Pourassurer la durabilité économique, sociale et environnementale à long termedes parcs, des réserves naturelles privées et des communautés, les commu-nautés et les autorités des aires protégées devront travailler ensemble à laplanification et à l’exécution de politiques et de projets qui feront la pro-motion des principes de durabilité environnementale et les appliqueront.Présentement, tous les indices recueillis semblent indiquer que cette colla-boration est bien inférieure aux attentes. Est-il possible d’assurer la protec-tion des territoires en même temps que celle des communautés ? Observe-t-on des signes évidents de réussite dans la région ? Oui, il y en a, mais cene sont pas des preuves parfaites ; elles méritent cependant d’être exami-nées de près pour les leçons qu’elles peuvent nous enseigner pour le plusgrand bien des aires protégées et des communautés.

Le problème identifié précédemment est extrêmement importantpour le Costa Rica, non seulement en raison de ses implications sociales,mais parce qu’il peut devenir une source de confrontation entre les aires

3.

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protégées et les communautés vivant tout autour – et cette confrontationcommence à se faire sentir dans certaines communautés – mais aussi pourles raisons macroéconomiques suivantes : depuis cinq ans, le Costa Ricaa reçu approximativement 1,1 milliard de dollars en devises étrangèresprovenant des dépenses effectuées par les touristes, une somme qui repré-sente environ 50 % de plus que la valeur combinée des exportations decafé, de bananes, de sucre et de bœuf, et plus de 300 000 Costaricainsdépendent aujourd’hui directement ou indirectement du tourisme commesource de revenu et d’emploi.

Le pays a été et est encore aujourd’hui cité en Amérique centraleet partout dans le monde comme un modèle et un prototype de bonnegestion des relations entre les aires protégées et les communautésd’accueil, et tous les problèmes pouvant avoir un effet négatif sur cetteimage peuvent aussi avoir des conséquences sur l’image que projette lepays en tant que destination touristique de premier choix.

Suivant le modèle de développement écotouristique du Costa Rica,toute la région centre-américaine a commencé à développer son secteurtouristique et, dans un monde de mondialisation, les risques de substitu-tion d’une région touristique pour une autre sont toujours présents si letouriste trouve que les produits écotouristiques qui lui sont offerts neremplissent pas ses préalables d’appui et de bonnes relations, dont on luia laissé croire à l’existence entre les aires protégées et les communautéslocales.

Finalement, en raison de l’utilisation qui a été faite du Costa Ricacomme modèle de développement écotouristique, le pays a le devoirmoral d’être à l’avant-garde du développement de mécanismes permet-tant et facilitant l’intégration des communautés d’accueil et des commu-nautés voisines des réserves naturelles à la marée de bénéfices renduspossibles par l’existence d’une aire protégée.

Les préalables suggérés ici relèvent d’observations notées àplusieurs reprises par l’auteur dans ses conversations avec des membresde communautés d’accueil, des entrepreneurs en écotourisme et des admi-nistrateurs d’aires protégées dans 23 enquêtes menées dans des commu-nautés d’accueil un peu partout dans les neuf plus grandes aires protégéespubliques et privées du Costa Rica ; ces préalables semblent constituerdes éléments constants pour soutenir le développement de bonnes relationsentre les aires protégées et les communautés d’accueil du pays.

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1. Proximité : Les communautés voisines et les communautésd’accueil sont les centres peuplés situés à l’entrée, aux limites outrès près des parcs nationaux ou des réserves naturelles privées,là où l’on suppose qu’une relation de bon voisinage est nécessaireen raison de la proximité et où cette condition amplifie aussi toutesles actions, positives ou négatives. Les observations indiquent queles communautés situées au-delà de ces limites peuvent se plaindre– et dans les faits, elles le font – mais, si elles veulent causer destorts, elles ne peuvent pas altérer la zone protégée autant que lespopulations qui sont tout près du parc. La démarcation semble sesituer à 15 km des limites du parc ; cette zone devient une zonetampon servant à absorber les dommages venant de secteurséloignés des frontières (Berg, 2002).

2. Bénéfices mutuels : On suppose que la relation est basée surl’existence d’un bénéfice pour les deux parties et que, pour obte-nir un tel bénéfice, il faut une bonne collaboration entre les deuxgroupes. Les bénéfices peuvent exister sous forme d’argent ou deservices. Nous avons observé que l’idée d’aide mutuelle dans lesrelations est un élément essentiel des « bonnes relations ». Dansplusieurs cas, les aires protégées – publiques ou privées – nevoient que leurs bénéfices et oublient comment aider leurs voi-sins à profiter aussi de ces avantages. C’est intéressant, maisl’expérience nous amène à constater que l’une des plaintes quirevient constamment est celle-ci : « Les autobus passent devantnos portes, mais ne s’arrêtent pas. » Une plainte pas toujoursjustifiée, car plusieurs petites communautés n’ont en fait rien àoffrir aux touristes, mais, même dans ces conditions, ellesespèrent voir les autobus et les touristes s’arrêter et développentde la frustration quand elles ne s’arrêtent pas. Les communautéss’attendent à ce que les autorités des aires protégées les aident àdévelopper des produits et des services pour les touristes. Quand,par le passé, nous avons abordé cette question avec les adminis-trateurs des aires protégées, particulièrement ceux des aires pro-tégées publiques, la réponse a toujours été la même, que legouvernement a d’autres agences chargées de faire ce travail :« Nous ne sommes pas des agences de développement. » C’estprobablement la bonne réponse. Par contre, les parcs nationauxet les autres formes d’aires protégées publiques sont souvent lesseuls représentants locaux du gouvernement central et ces

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conditions créent, aux yeux des communautés locales, des « res-ponsabilités» qui dépassent largement ce qui est normalementécrit dans les descriptions de tâches.

Un autre élément assez commun, c’est qu’on entend des com-mentaires comme celui-ci : « Oui, nous allons apporter notre aide,nous allons éduquer la communauté à la conservation. » C’estbien et très altruiste et ça en vaut la peine ; cependant, quand ondemande aux communautés d’expliquer ce que les parcs pour-raient faire pour améliorer leurs relations mutuelles, la réponseest immanquablement : « Donnez-nous la chance de participer etde nous engager dans les activités du parc et, pourquoi pas, dansles décisions. » Les communautés veulent devenir des acteurs etnon plus des observateurs. Elles veulent des choses tangibles, deschoses se rapportant généralement à aider à bâtir, réparer ou obte-nir pour la communauté de l’argent ou des services. « Éduquerles générations futures, c’est bien, mais qu’en est-il de nous ? »Voilà la réflexion la plus courante.

3. Communication et information : On suppose que la liaison estconsolidée lorsque les deux groupes sont mis au courant de cequi est planifié et de ce qui se passe pour les uns et pour lesautres et que l’absence de cette information génère une méfianceplus attribuable au manque de connaissances qu’à un mauvaistravail. Les gens des parcs ne sont pas les meilleurs communi-cateurs du monde : en fait, jusqu’à tout récemment, leur profes-sion n’impliquait pas beaucoup de contacts humains. Cet état dechoses a changé radicalement et la mondialisation des marchésva apporter encore plus de changements. Il est prévu qu’en 2010,la région de l’Amérique centrale recevra à elle seule, selonl’Organisation mondiale du tourisme, environ 5 millions de tou-ristes et qu’en gros, 65 % de ces touristes visiteront les parcsnationaux et les réserves naturelles privées. Les habiletés en com-munication et en information vont devenir des éléments essen-tiels des connaissances générales d’un gardien de parc. De réellescapacités dans le domaine des interactions humaines et la dispo-sition à communiquer et informer seront essentielles pour travail-ler dans les parcs ou les réserves naturelles privées. Le problèmeest que, parfois, il n’y a personne avec qui communiquer ou àinformer. Les parcs et les réserves naturelles privées ont la

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responsabilité de chercher et au besoin d’aider à « créer » desliens avec les communautés ; or, les directeurs des aires protégéesne sont pas formés pour ces fonctions.

4. Objectifs communs ou partagés : On suppose que les deuxgroupes partagent des objectifs communs. Dans le cas des parcs,c’est la préservation de l’intégrité physique du territoire ; pourles voisins, c’est l’amélioration de l’économie et du revenugénéré par l’arrivée des touristes qui vont faire des achats dansleur communauté. Il ne suffit pas que l’un des intervenants aitdes objectifs clairs ; ces objectifs doivent se traduire d’unemanière acceptable par l’autre partie. Dans plus d’une situations,nous avons vu les autorités d’un parc arriver avec des objectifsclairs en vue d’améliorer les conditions des relations, mais lacommunauté n’y voyait pas les avantages qu’elle pouvait retirerà agir ainsi. Les administrateurs du parc ont besoin de prendrele temps d’expliquer ces avantages pour la communauté et de lesrépéter périodiquement, étant donné que les chefs de communechangent souvent.

5. Mécanisme de prise de décision : Entente et dialogue doivent êtrede la partie, ce qui suppose que des avenues de dialogue et dedécisions existent, parce que c’est la voie qui mène à la réalisa-tion d’ententes scellées qui lient les parties aux yeux du groupeet de la société. Dans plusieurs des communautés d’accueil inter-rogées, on déplore que lorsque l’administration du parc change,tout le reste change : « La route de l’enfer est pavée de bonnesintentions », voilà l’une des phrases entendues le plus souventquand les membres des communautés se plaignent des manque-ments des parcs à tenir leurs engagements et leurs promesses.Des obligations irrévocables sont nécessaires pour établir unestabilité à long terme des décisions et de l’exécution des initia-tives au-delà des mots ; c’est ce que déplorent la plupart descommunautés.

6. Influence dans les décisions : On suppose que le mécanisme dedialogue permet de réelles possibilités d’influencer les décisionsde l’autre partie, et vice-versa, dans la recherche d’un objectifcommun ou partagé. Dans plusieurs cas, les conversations et lespromesses, bien que très participatoires en surface, ne se tra-duisent pas en réels changements de position de l’autre acteur,et les parcs et les communautés ont tous l’impression d’avoirperdu leur temps. Plusieurs communautés se sentent utilisées,

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particulièrement quand des efforts de levée de fonds sont requis.Il faut toujours de la flexibilité dans les processus qui impliquentdes gens dont le niveau d’acceptation du risque est très bas.

7. Soutien mutuel et effort commun de travail : Ces aspects se tra-duisent, dans la pratique, par la coopération et le soutien mutuelnécessaires pour exécuter des activités concrètes préalablementapprouvées dans une période de temps définie. Il faut du concret,quelque chose qu’on peut voir, entendre, toucher, quelque chosequi peut motiver et convaincre.

Il a été observé que lorsque ces sept préalables sont présents, ilsdeviennent la base de bons rapports. Après 26 études conduites jusqu’àoctobre 2005 au Honduras, au Nicaragua, au Costa Rica et, plus récem-ment, au Panama, en incluant celles rapportées dans ce chapitre, il sembley avoir trois principes dominants à respecter pour l’obtention de bonnesrelations entre parcs et communautés si nous voulons parvenir à faire unegestion durable à long terme de l’écotourisme dans les aires protégéesde l’isthme d’Amérique centrale : la pleine participation des communautésà l’aménagement des aires protégées ; le partage réel des bénéfices ; enfin,le respect des communautés manifesté par les visiteurs, les administra-teurs et les employés du parc. Comment se fait-il qu’après presque 50 ansd’efforts supposés dans cette direction, nous n’en soyons pas encore là ?

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66Chapitre

Lorsque conservation et tourisme se confrontentLe cas du Parc national des Pyrénées et ses conflits d’usages

Nathalie LahayeMaître de conférences en sciences économiques à l’Institut universitaire de technologie de Tarbes de l’Université P. Sabatier de ToulouseChercheure au GRES, Université des sciences sociales de Toulouse

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Résumé

Cet article se propose d’éclairer la dialectique conservation/tourismedans les espaces protégés, au travers de conflits d’usages dans le Parcnational des Pyrénées. Nous cherchons à préciser les enjeux qui entourentla double dynamique de protection accrue et d’usages récréatifs desespaces de montagne. Notre idée est que le succès de projets territoriauxde développement durable et viable, en général, et de projets écotouris-tiques, en particulier, dépend de la connaissance des enjeux en cause tantdu point de vue de la conservation des espaces naturels que du dévelop-pement économique local. Or, la multifonctionnalité de la montagne(fonction économique, fonction résidentielle et récréative et fonction deconservation) est source de tensions et de conflits ouverts. L’analyse éco-nomique de ces conflits, selon une approche institutionnaliste, permetalors de renseigner la dialectique conservation/tourisme. Les fonctionsd’appropriation et de production de règles des conflits permettent derendre compte des enjeux et des décisions liés à la régulation d’un espaced’intérêt collectif. Notre étude porte sur deux types de conflits ; le premiertraite du problème de la conservation d’une espèce sauvage, l’ours brundes Pyrénées ; le second, de conflits autour de projets d’aménagement dela montagne à des fins touristiques. Il ressort que la dialectique conser-vation/tourisme se nourrit entre autres de l’incertitude qui accompagnele sens et la valeur de la biodiversité, bien public global ou local ; durôle ambivalent de l’institution Parc, entre conservation et promotion dudéveloppement économique local ; des logiques antagonistes entre la pro-priété et les usages d’un espace d’intérêt public ; enfin, des jeux de pouvoirset des velléités d’emprise territoriale d’acteurs locaux.

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Les parcs naturels nationaux de montagne sont des objets d’étude parti-culièrement intéressants pour tenter de saisir la dialectique complexe quise joue entre conservation et tourisme. Sur un espace circonscrit, setrouve posée toute la problématique de la conservation de la nature, avecdes mesures parfois extrêmes qui limitent voire interdisent l’accès à lanature, couplée à la dynamique de développement économique du terri-toire d’accueil du parc, via l’industrie touristique. Ces espaces protégés,garants du maintien de la biodiversité, attirent de plus en plus une popu-lation urbaine avide d’évasion, de pratiques récréatives et sportives. Ledéveloppement du tourisme est par ailleurs encouragé, car il peut offrirune réponse à la déprise agricole particulièrement forte dans les espacesde montagne. Dans ce contexte, comment continuer d’assurer la protec-tion du milieu naturel tout en permettant le développement du tourisme ?Quel arbitrage faut-il faire entre activité économique et conservation ?Comment favoriser l’accès aux zones naturelles tout en les préservant ?L’écotourisme est-il la solution d’intégration ?

Le Parc national des Pyrénées (PNP), en France, n’échappe pas àcette ambivalence. Créé en 1967, ce parc se déploie sur environ 100 kmle long de la frontière espagnole et couvre 45 700 hectares. Il y abritedes paysages très variés ainsi que des espèces animales (l’isard, le coqde bruyère, le lagopède ou encore l’ours) et végétales (le lys des Pyré-nées, le gispet, l’iris xiphoïde) remarquables. Il couvre également le mas-sif Gavarnie – Mont Perdu, classé au patrimoine mondial de l’humanité,et deux réserves naturelles (Néouvielle et Ossau). La richesse de ce ter-ritoire en fait un espace convoité pour des usages récréatifs de plus enplus nombreux et diversifiés, en son sein ou en périphérie (randonnée,escalade, canyoning, ski, VTT). Or, cette double dynamique de protectiondes milieux et de développement du tourisme sur cet espace de haute etmoyenne montagne et du piémont pose des problèmes de terrains réels :surfréquentation de certains sites, pollutions diverses, détérioration despaysages, mais aussi pression foncière, précarité des emplois saisonniers,remise en cause des activités économiques traditionnelles, déséquilibrecentre/périphérie. Les conflits d’usages sont nombreux et variés. La mul-tifonctionnalité de cet espace commun (fonction économique, fonctionrésidentielle et récréative et fonction de conservation) est en effet sourcede tensions et de conflits ouverts. Les usages récréatifs cohabitent parfoismal avec la fonction de conservation des parcs, en leur centre mais aussien périphérie. Les actions de préservation d’espèces rares se heurtent aux

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réticences ou oppositions violentes des agriculteurs et chasseurs quivoient leurs activités menacées. Et si des projets écotouristiques existent,ils s’élaborent dans un contexte le plus souvent conflictuel.

Notre propos ici est d’examiner, à travers le cas du Parc nationaldes Pyrénées, la relation complexe, voire conflictuelle, qui lie la protec-tion des espaces naturels et le développement du tourisme. L’objectif dece chapitre est d’éclairer la dialectique conservation/tourisme. Nous cher-chons à préciser les enjeux qui entourent la double dynamique de pro-tection accrue et d’usages récréatifs des espaces de montagne. Notre idéeest que le succès de projets territoriaux de développement durable etviable, en général, et de projets écotouristiques, en particulier, dépend dela connaissance des enjeux en cause, tant du point de vue de la conser-vation des espaces naturels que du développement économique local.

Pour cela, nous privilégions une entrée par les conflits d’usages. Eneffet, les conflits sont récurrents à la conservation des espaces naturels,soit qu’il s’agisse de conflits inhérents à des mesures de conservation(protection d’une espèce sauvage, extension des espaces protégés) quiremettent en cause les usages traditionnels du territoire, soit qu’il s’agissede conflits dus à des projets d’aménagement dans ou aux abords desparcs, pour satisfaire aux exigences du développement touristique, et quimenacent l’intégrité biologique de ces mêmes parcs. Dans l’un et l’autrecas, le modèle de développement du territoire est remis en question, enparticulier, les choix en matière de développement touristique – les parcsparticipant de l’attractivité du territoire et de l’essor de l’économie locale.Afin de renseigner la dialectique conservation/tourisme, nous proposonsune analyse économique des conflits, selon une approche relevant ducourant institutionnaliste. Les fonctions d’appropriation et de productionde règles des conflits permettent alors de rendre compte des enjeux etdes décisions liés à la régulation d’un espace d’intérêt collectif. Nousobservons notamment que, au-delà de l’objet avéré du conflit, ce sont lesmodes de développement du territoire, le rapport centre/périphérie duparc, les valeurs (d’usages et marchandes) de la biodiversité ou encorele rapport global/local qui se trouvent interpellés.

D’un point de vue méthodologique, nous exposons des cas deconflits dont l’objet avéré relève soit de mesures de conservation (commele conflit de l’ours brun des Pyrénées), soit de mesures portant sur ledéveloppement du tourisme (comme les projets d’aménagement de lamontagne à des fins touristiques). Nous exploitons ici les résultats

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d’entretiens semi-dirigés menés auprès des différentes parties prenantesaux conflits (PNP, associations environnementales, fédérations sportives,acteurs politiques locaux). Une étude documentaire complète l’analyse.

Ce chapitre se déroule en trois temps. Premièrement, nous présentonsla dialectique conservation/tourisme dans les parcs nationaux de mon-tagne et les questionnements qui guident notre analyse. Nous insistonssur les effets du tourisme de nature sur les espaces protégés, l’apparenteadéquation entre l’écotourisme et les espaces protégés et l’évolution pos-sible du rôle des parcs, allant de la régulation de l’activité touristiquevers la promotion touristique. Dans un deuxième temps, nous expliquonsen quoi l’analyse économique des conflits, selon une lecture institution-naliste, participe de la compréhension de la dialectique conservation/tourisme dans les espaces protégés. Nous proposons une grille de lecturedes conflits à partir des deux fonctions d’appropriation et de productionde règles. Enfin, dans un troisième temps, nous analysons à la lumièrede cette grille différents conflits d’usages dans le PNP, autour des enjeuxde la conservation du patrimoine naturel et du développement touristique.Nous soulignons leurs apports du point de vue de la compréhension dudualisme conservation/tourisme. Nous concluons sur les valeurs d’usageset marchandes de la biodiversité, sur le rôle ambivalent de l’institutionParc, sur les jeux de pouvoirs et les velléités d’emprise territorialed’acteurs locaux, sur les logiques antagonistes entre la propriété et lesusages d’un espace d’intérêt public.

DES PARCS POUR LE TOURISME OU UN TOURISME POUR LES PARCS ?

Entre tourisme et nature, des rapports oscillant entre conflit, coexistenceou symbiose se tissent, pour reprendre les propos de G. Budowski (1976).La dialectique conservation/tourisme trouve sa pleine dimension dans lesespaces protégés et dans le cas qui retient ici notre attention, les parcsnaturels nationaux (PNN) de montagne français. Ces parcs participent del’attractivité de leur territoire d’accueil grâce à la mise en valeur d’espacesnaturels remarquables (1.1). Simultanément, leur réputation engendre deseffets externes négatifs, parfois irréversibles, qui portent atteinte à laconservation de la biodiversité dont ils sont les garants (1.2). La solutiond’un tourisme durable ou de l’écotourisme peut-elle alors concilier con-servation et tourisme ? Les parcs naturels sont-ils conduits à passer de larégulation des flux touristiques à la promotion touristique (1.3) ?

1.

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1.1. LES PARCS NATURELS DE MONTAGNE FRANÇAIS : DES ESPACES PARTICULIÈREMENT ATTRACTIFS

S’il est vrai que la vocation première des parcs nationaux français n’estpas le tourisme mais bien la conservation de la nature1, il ressort quel’ensemble des parcs constitue des espaces attractifs sur le plan touris-tique, en mettant en valeur des espaces naturels remarquables. Les parcsnationaux de montagne français sont des destinations recherchées. La« marque » parc naturel rassure les visiteurs sur la qualité de l’environ-nement et des paysages ainsi que sur les possibilités de visite et dedécouverte (balisage de sentiers, maisons d’accueil, présence de guides).En 1998, selon l’inventaire communal de l’INSEE, plus des deux tiersdes communes des parcs citaient l’atout parc naturel comme caused’attraction touristique, contre seulement la moitié d’entre elles, dix ansplus tôt. Les communes limitrophes reconnaissaient également l’impactdes parcs sur leur fréquentation touristique (IFEN, 2000).

Cette attractivité croissante des parcs nationaux de montagne attestede la réalité d’une demande sociale en pleine croissance pour un tourismeet des loisirs dans les espaces naturels. Les visiteurs des parcs recherchentavant tout la beauté des paysages et le silence. Ils sont en quête deterritoires peu altérés et d’une nature sans risque, entretenue, qui autorisela pratique de loisirs divers. Cela se traduit par la concomitance d’unedemande de protection forte pour la nature et d’une demande d’aména-gements garantissant découvertes et pratiques sportives en toute sécurité.

L’accroissement de la demande pour ce tourisme de nature trouveun écho favorable chez une partie de la société rurale de montagne,souvent en proie à une situation économique et sociale difficile. Latentation est grande pour ces habitants des zones de montagne d’aban-donner progressivement les activités agricoles traditionnelles, difficile-ment rentables, pour se lancer dans l’activité touristique, qui jouit d’uneimage plus lucrative. Le développement du tourisme dans les espaces demontagne est perçu par ces populations, mais aussi par les promoteursdu développement économique (élus locaux, collectivités territoriales,aménageurs), comme une réponse à la déprise agricole qui y sévit.

1. L’alinéa 1 de l’article L.331-1 du code de l’environnement français est clair sur ce point.L’objectif est de « préserver le milieu contre tout effet de dégradation naturelle et de le sous-traire à toute intervention artificielle susceptible d’en altérer l’aspect, la composition etl’évolution ».

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Le tourisme de montagne, quant à lui, est en pleine mutation. Dansun marché du tourisme en expansion, de nouvelles destinations sont régu-lièrement proposées, combinant de bons rapports qualité/prix et le dépay-sement. Les clients, de leur côté, recherchent des loisirs plus diversifiés,dans des cadres aménagés et sécurisés. Les équilibres traditionnels dutourisme de montagne sont ainsi amenés à se transformer pour répondreà une concurrence et à une demande de qualité accrue. La question quise pose alors est celle du nouvel équilibre à atteindre, sachant qu’ilconvient de dépasser l’alternative entre un aménagement dévastateur etl’intégrisme écologique.

1.2. DES PARCS VICTIMES DE LEUR RENOMMÉE

Les coûts du tourisme sont bien connus. Ils peuvent être distingués selontrois ordres : économique, social et écologique. Le coût économique setraduit par une mobilisation de l’épargne des ménages dans des rési-dences secondaires sous-utilisées, des besoins en capitaux élevés pourcréer des emplois le plus souvent précaires, une forte pression foncière,etc., tandis que le coût social renvoie au déplacement de populations, àla perte d’identité territoriale, etc. et que le coût écologique renvoie à ladétérioration des paysages, à l’atteinte à la biodiversité, à la pollution ouencore à la dégradation des écosystèmes.

Les impacts et menaces potentiels que le tourisme fait peser surles parcs naturels de montagne français sont nombreux et diversifiés(Maizeret et Olivier, 1996), qu’il s’agisse des pollutions, des modifica-tions du fonctionnement hydrographique, des phénomènes d’érosion, dela destruction directe ou indirecte des espèces (braconnage, pillage, pré-lèvements), des impacts liés aux activités de loisirs (ski, VTT, vol à voile,rafting, escalade) ou de l’installation d’infrastructures (lignes à hautetension, routes et voies ferrées, stations d’épuration). La concentrationspatiale et temporelle de la fréquentation touristique peut avoir des effetstrès destructeurs, tant pour le patrimoine naturel et les paysages que pourla valeur touristique des sites. Aux impacts environnementaux viennents’ajouter les impacts sur les populations résidantes – pollution, bruit,surfréquentation des espaces publics et naturels, augmentation des impôtslocaux, pression foncière – ainsi que sur les touristes eux-mêmes lorsquese produisent des phénomènes d’encombrement. Ces nuisances sontd’autant moins bien acceptées par les populations locales qu’elles ne

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tirent pas profit de ce tourisme de masse, soit directement (revenus dutourisme) soit indirectement (amélioration de la desserte et des servicespublics, emplois, mise en valeur des paysages).

Les menaces qui pèsent sur l’intégrité des parcs sont à la foisextérieures et intérieures (Sevegner, 1999). Les menaces extérieures pro-viennent des décisions économiques et politiques régionales, nationaleset européennes (voies de communication, lignes électriques). Le Parcnational des Pyrénées est, à cet égard, particulièrement menacé par ledéveloppement du réseau routier national et international et par l’implan-tation de lignes électriques à très haute tension. Les pollutions et amé-nagements des pays limitrophes, pour les parcs frontaliers comme le PNP,sont également à considérer. Les menaces intérieures sont tout aussi nom-breuses, qu’il s’agisse de l’opposition des populations locales à des pro-jets de conservation ou des dissensions au sein des établissements parcs,comme en attestent les débats autour d’un « espace Parc » avec le risquede dilution entre zone centrale et zone périphérique ou encore ceux quientourent le développement touristique dans un espace protégé.

Ainsi, face aux coûts écologiques, économiques, culturels et sociauxque subissent les parcs, certains en viennent à promouvoir la protectionaccrue des espaces protégés. Paradoxe s’il en est, mais aussi un révélateurdes impacts subis et des questionnements quant à la nature des menacesqui pèsent sur les parcs nationaux et quant aux modes de développementà privilégier. Deux des questions centrales deviennent donc : faut-il reve-nir à une politique plus stricte de protection ? ou au contraire, faut-ils’ouvrir à de nouvelles formes de développement économique et depratiques touristiques ?

1.3. QUEL TOURISME POUR LES PARCS ?

Les nouvelles orientations à donner au développement dans les zones demontagne concernent tous les secteurs de l’économie, primaire, secon-daire et tertiaire. Les parcs naturels ont assurément un rôle à jouer dansle maintien des activités agricoles traditionnelles comme l’agropastora-lisme. Mais le développement touristique, que certaines communes limi-trophes souhaitent plus affirmé, interroge encore plus vivement le rôle desparcs nationaux, tant les enjeux sont a priori contradictoires. La questionici est de savoir si l’écotourisme offre une réponse adaptée et quel peutêtre le rôle des parcs nationaux dans la promotion d’un tourisme alternatif.

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1.3.1. L’écotourisme : une solution ?

L’enjeu semble clair : l’aménagement touristique s’impose, a fortiori dansles espaces protégés, à la fois particulièrement attractifs et hautementsensibles. Si l’on suit les recommandations du congrès mondial sur lesparcs de 2003 à Durban (UICN, 2003) il s’agirait de faire du tourisme(dans et autour des espaces protégés) un instrument de la conservation,tout en améliorant la qualité de vie des communautés locales et autoch-tones (Recommandation 122). Autrement dit, ce qui est prôné est untourisme durable ou encore « toute forme de développement, aménage-ment ou activité touristique qui respecte et préserve à long terme lesressources naturelles, culturelles et sociales et contribue de manière posi-tive et équitable au développement économique et à l’épanouissementdes individus qui vivent, travaillent ou séjournent sur ces espaces » (défi-nition proposée par la fédération Europarc et l’OMT). L’écotourismes’inscrit alors comme la forme du tourisme qui vise le développementdurable (Wood, 2002). S’il englobe les principes du tourisme durable(Déclaration du Québec sur l’écotourisme, 2002), il insiste sur les béné-fices qu’il est susceptible d’apporter tant à la conservation qu’aux com-munautés locales (Honey, 1999 ; Lequin, 2001). Ajoutons le rôle éducatifque l’écotourisme propose aux visiteurs, à travers l’interprétation dupatrimoine naturel et culturel. Nous retrouvons alors les principes quifondent l’existence des PNN français : protection, éducation et dévelop-pement viable. En ce sens, les aires protégées en général et les parcsnationaux en particulier constitueraient des lieux privilégiés pour y déve-lopper l’écotourisme (Lawton, 2001). D’ailleurs, si l’on se réfère auxpremières définitions de l’écotourisme, celui-ci est « un tourisme respon-sable dans des sites naturels qui protège l’environnement et assure lebien-être des populations locales » (International Ecotourism Society,1991) ou encore un « voyage écologiquement responsable dans des airesnaturelles relativement intactes afin de jouir et d’apprécier la nature etles aspects culturels adjacents » (UICN, 1993). Si, de plus, on admet quel’écotourisme, idéalement pensé et conçu, devrait bénéficier aux airesprotégées de différentes façons – en générant de l’argent pour gérer etprotéger les habitats naturels et les espèces, en distribuant des revenus

2. « Renforcer l’appui aux aires protégées, améliorer la sensibilité aux valeurs écologiques,culturelles, spirituelles, récréatives et économiques des aires protégées ; générer un revenupour les activités de conservation, pour la protection de la biodiversité, de l’intégrité de l’éco-système et du patrimoine culturel ; améliorer la qualité de vie des communautés ; inciter lepublic à soutenir leurs coutumes, mœurs et valeurs traditionnelles » (Recommandation 12 duCongrès mondial sur les parcs de Durban, 2003).

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pour les communautés locales, en offrant un moyen permettant derenforcer l’intérêt des usagers pour la conservation (Goodwin, 1996) –,alors l’écotourisme deviendrait la forme de tourisme appropriée auxespaces protégés et les parcs nationaux son lieu d’application.

Cependant, de plus en plus de travaux (Fortin et Gagnon, 1999 ;Honey, 1999 ; Page et Dowling, 2002) s’accordent à souligner les effetspervers d’un tourisme, certes moins « de masse » mais plus diffus, quitouche des aires écologiquement plus fragiles, comme les aires protégées.Et si l’impact dépend de la capacité de charge des lieux, celle-ci resteune notion très subjective dont le calcul s’avère souvent délicat. Desdispositifs tels que le zonage permettent de réduire l’impact négatif d’unetrop grande fréquentation en canalisant les flux touristiques, voire eninterdisant la fréquentation de certaines aires. Les professionnels du tou-risme proposent de plus en plus des produits écotouristiques, s’entourantde labels de qualité. Mais le tourisme, même respectueux de la nature,n’est pas sans effet, a fortiori lorsqu’il se développe sous couvert depratiques commerciales. La question est sans doute de savoir ce quirelève, dans la pratique, de l’écotourisme.

Pourtant, les réflexions récentes vont dans le sens de la promotiond’un tourisme comme instrument de la conservation et d’appui aux airesprotégées. L’idée d’une valorisation de l’environnement par le tourismes’affirme pour tenter d’échapper aux écueils d’une valorisation du tou-risme par l’environnement. Dans ce contexte, l’outil « parc national »n’est-il pas voué à se transformer ? D’espace de protection de la natureet de recherche scientifique, les parcs naturels nationaux français ne sont-ils pas inéluctablement voués à devenir des espaces supports d’activitésrécréatives et de loisirs ? Les zones de protection, telles qu’elles sontaujourd’hui définies, peuvent-elles satisfaire à l’élaboration de projetsécotouristiques3 ? Les établissements parcs sont-ils administrés et organi-sés pour promouvoir l’écotourisme, qui, comme toute activité économique,se doit d’être rentable ?

3. Nous pensons ici aux réflexions sur les corridors de la biodiversité. Le maintien de la biodi-versité à l’échelle planétaire ne saurait se contenter des espaces protégés. L’écotourisme pour-rait contribuer à la sauvegarde de la biodiversité à condition de se pratiquer dans des zonestampons et des corridors naturels reliant les aires protégées entre elles.

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1.3.2. Les parcs nationaux : entre la protection et le dév eloppement local

Si à l’origine, les parcs nationaux français apparaissent comme desprécurseurs dans la prise de conscience d’intégrer protection du milieunaturel et développement économique et social, les administrations desparcs se placent d’emblée dans une situation paradoxale. La triple mis-sion de protection, d’éducation et de développement économique etsocial apparaît comme un défi que les parcs tentent de relever.

Face au développement de l’activité touristique et aux pressionsqu’elle exerce sur le milieu, trois attitudes peuvent être développées parles administrateurs des parcs (Sevegner, 1999). Première attitude : ilsconsidèrent que cette activité reste marginale et étrangère au parc, quecela dépasse leurs prérogatives, et ils développent une politique de«désintéressement». Deuxième attitude : ils estiment que le tourismeaffecte l’équilibre du parc et développent une politique réactive de« contrôle strict », interdisant toute pratique récréative et sportive dansl’enceinte du parc. Troisième attitude : ils adoptent une position proactiveet cherchent à accompagner l’activité touristique, en maîtrisant les fluxtouristiques, en gardant le contrôle de l’hébergement et des animationset en participant au développement de produits écotouristiques en parte-nariat avec les professionnels du tourisme et les collectivités locales.

La troisième voie semble aujourd’hui être privilégiée, au moinsdans le PNP, avec une volonté affirmée d’ouverture du parc à une grandemajorité de visiteurs4, tout en régulant les flux touristiques par une poli-tique de zonage appropriée ou de fixation de quotas (comme la limitationdes capacités d’hébergement ou le recul de la fréquentation automobileet des parcs de stationnement). La recherche d’une meilleure répartitionspatiotemporelle des touristes s’accompagne aussi de plans de commu-nication et d’information, par exemple avec les collectivités locales, maisaussi avec les associations sportives. Des plans d’accompagnement pourdévelopper des produits écotouristiques voient le jour, avec la volonté des’assurer des retombées économiques pour les communautés locales :projet de création de coopératives écotouristiques, aides à l’implantationet au maintien d’entreprises d’artisanat local ou de découvertes faunis-tiques et floristiques. La mission des parcs en général et celle du PNP

4. Le PNP s’engage depuis un an dans des actions en faveur des personnes handicapées etdéfavorisées. Des labels « Tourisme et Handicap » ont déjà été obtenus pour des maisonsdu parc.

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en particulier, au regard du tourisme, serait-elle alors en train d’évoluer,pour passer de la régulation de l’activité touristique à la promotiontouristique ?

On note à cet égard une prise de conscience forte, perceptible dansles discours, d’un « nouveau rôle » pour les parcs. Leur mission principaleétant assurée, il s’agirait de s’impliquer davantage dans les projets dedéveloppement territorial5. La vision d’un « espace Parc » aurait ainsitendance à s’imposer, c’est-à-dire celle de parcs aux prérogatives élar-gies, qui vont au-delà de la conservation stricte et qui s’orientent vers ledéveloppement des territoires. Le rapport Giran6 (2003) s’inscrit danscette logique, puisqu’il propose une réécriture de l’article 1er de la loi du22 juillet 1960 qui institue les PNN, où les missions d’un parc naturelnational seraient légalement celles de la protection du milieu naturel etde la promotion d’un développement durable et où la distinction centre-périphérie serait remplacée par une approche plus globale du parc.

En même temps, une seconde tendance s’affirme du côté de certainsgestionnaires des parcs et de mouvements associatifs (à l’instar de Moun-tain Wilderness), soit celle d’un renforcement de la protection à l’inté-rieur des parcs. Après des années où il s’est agi de faire accepter les parcsnationaux par les populations locales, le temps serait venu de renforcerla protection, de sanctionner de façon plus systématique les contrevenantsà la réglementation, de jouer de son influence sur tout projet (extensionde stations de ski à proximité des parcs, implantation de lignes à hautetension, ouverture de nouvelles voies de communication) pouvant mettreen danger l’intégrité du parc en zone centrale.

Ainsi, la recherche d’un équilibre entre une protection accrue àl’intérieur des parcs et une ouverture vers le développement des terri-toires constituerait le nouvel enjeu pour les parcs naturels de montagnefrançais, ce qui suppose également un changement dans les modes de

5. « Aujourd’hui l’existence des parcs est affirmée. Le rôle de protection est assuré. […] Parcontre l’évolution a montré qu’il y avait un certain nombre d’effets pervers et que là nousn’avions pas suffisamment anticipé. En effet, les zones protégées ne posent pas de problèmemajeur sauf qu’elles ont peut-être tendance, à certains moments, à se sanctuariser. Par contreles zones habitées n’ont pas tiré tout le bénéfice qu’elles étaient en droit d’attendre de laprésence des parcs ou au moins qu’elles auraient dû en tirer » (propos de G. Azavant, prési-dent du Conseil d’administration du PNP à la conférence internationale des espaces naturelsprotégés, à Tarbes en décembre 2003).

6. Commandé en janvier 2003, par le ministère de l’Environnement, auprès de Jean-PierreGiran, député du Var, afin de juger du rôle et de la place actuels des parcs naturels nationauxen France.

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gouvernance où une régulation de type régalien, avec entre autres l’exercicedu droit de police, en zone centrale s’accompagnerait d’une régulationde type contractuel plus étendue avec la zone périphérique et les terri-toires voisins (départements, régions, mais aussi pays frontaliers dans lecas du PNP).

Nous pouvons résumer ici, sous forme de questionnements, lespoints précédemment exposés. Le premier questionnement renvoie à uneexplicitation claire de la dialectique conservation/tourisme sur les espacesprotégés de montagne. Que cherche-t-on à protéger ? Quel tourismeprévaut ? Quels sont les impacts et conséquences respectifs de la conser-vation et du tourisme ? Quelles activités et quels acteurs s’opposent ? Ledeuxième point tient aux conditions nécessaires pour, à la fois, protégerla nature et promouvoir le tourisme sur ces espaces sensibles. L’écotou-risme constitue-t-il une réponse appropriée alors que l’on commence àmesurer aujourd’hui, à travers quelques expériences écotouristiques, lesdangers, en terme de perte de biodiversité, d’une trop forte ouverture dezones hautement sensibles ? Le troisième questionnement concernel’appropriation par les parcs nationaux (l’institution « parc ») de la notionde « tourisme durable » et les modes de gestion mis en œuvre pour par-venir à un objectif de développement intégré7. Plus spécifiquement, quelssont les modes de gouvernance susceptibles d’être mis en œuvre pourconcilier conservation et tourisme ? La démarche contractuelle et parti-cipative, largement plébiscitée, et dont les parcs pourraient se faire lesvecteurs, est-elle en marche ?

Afin de tenter de répondre à ces questions, nous proposons d’ana-lyser des situations de conflits d’usages dans le PNP. Mais d’abord, nousexposons dans la partie qui suit en quoi une analyse conceptuelle par lesconflits peut aider à comprendre la dialectique conservation/tourisme.

LA LOGIQUE DU CONFLIT, OU COMMENT L’ANALYSE ÉCONOMIQUE DES CONFLITS PEUT ÉCLAIRER LA DIALECTIQUE CONSERVATION/TOURISME

Si des orientations nouvelles se dessinent comme la promotion del’écotourisme, la recherche de complémentarités entre la protection desmilieux naturels et la maîtrise locale du développement (Gagnon, 1994),

7. C’est-à-dire une politique d’intégration de l’environnement dans les modes de développementtouristique de la montagne.

2.

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la problématique conservation/tourisme reste éminemment conflictuelle.Le conflit environnemental trouve son origine dans la diversité des formesd’appropriation de la nature, qu’il s’agisse des représentations, des usagesou encore de la propriété (Weber et Revérêt, 1993). Fait inéluctable, leconflit peut s’avérer utile lorsqu’il insuffle les changements attendus(2.1). L’étude économique des conflits dans les espaces protégés offrealors des perspectives intéressantes pour approfondir la connaissance duclivage entre les enjeux environnementaux de protection de la nature etde conservation de la biodiversité et les enjeux économiques et sociauxdu développement territorial par la promotion du tourisme. Notre approche,qui puise ses fondements dans le courant institutionnaliste (Commons,1934), permet d’appréhender les relations de conflits inhérentes au pro-blème de la répartition d’une ressource rare8 et les processus d’actioncollective mis en œuvre pour réguler ces conflits (2.2).

2.1. LE CONFLIT D’USAGES DANS LES ESPACES PROTÉGÉS : UN FAIT INÉLUCTABLE, VOIRE PRODUCTIF

Le terme « conflit » désigne toute relation entre des forces opposées. « Unconflit est un processus dans lequel une partie perçoit que son intérêt setrouve contredit ou négativement affecté par les intérêts d’une ou plu-sieurs autres parties9 » (Wall et Callister, 1995, p. 517) (traduction del’auteure). Le terme recouvre non seulement les aspects visibles desforces en opposition, mais également les tensions sous-jacentes. Le con-flit peut être latent ; il résulte dans ce cas-là de la condition permanented’oppositions et de tensions entre deux ou plusieurs parties aux objectifsdivergents. Le conflit peut être ouvert ; il renvoie alors à l’interaction defait des parties autour de problèmes spécifiques, le conflit latent prenantun caractère aigu et exacerbé.

Le conflit environnemental en général, et dans les espaces protégésen particulier, est un phénomène inéluctable, qui trouve son origine à lafois dans la diversité des représentations de la nature, dans la multiplicitédes usages et dans la particularité des formes de propriété de l’espace.

8. Si la montagne est vaste, peu d’endroits sont exploitables et la concurrence pour des sitesaménagés y est vive.

9. « Conflict is a process in which one party perceives that its interests are being opposed ornegatively affected by another party » (Wall et Callister, 1995, p. 517).

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On distingue ainsi généralement deux visions de la nature : la natureau service de l’homme et la nature, espace à protéger. Dos à dos seretrouvent un modèle « utilitariste » et un modèle « conservationniste » dela nature (Nash, 1989). Lorsque nous nous centrons sur les deux fonc-tions, touristique et conservatoire des espaces, ces modèles antagonistesde la nature peuvent se traduire par des comportements parfois extré-mistes, allant de l’interdiction des espaces protégés aux touristes à l’amé-nagement intensif de ces mêmes espaces pour satisfaire un tourisme demasse. Les attitudes de certains écologistes qui cherchent à faire desespaces naturels des réserves pour l’usage exclusif de scientifiques sontalors tout autant dénoncées que celles de certains aménageurs qui voienten l’espace naturel de vastes terrains de loisirs ou « stades de loisirs »pour un tourisme de masse.

La catégorie des visiteurs d’un parc naturel peut elle-même êtrescindée en quatre groupes d’usagers : 1) les populations locales, habitantspermanents de la zone parc qui ont une vision tournée vers le dévelop-pement d’activités et la volonté de vivre dans cet espace (approche éco-nomique et espace de vie) ; 2) les résidents secondaires et citadins deproximité, qui ont une vision du parc national plutôt « carte postale », yvoyant surtout un espace de détente et de loisirs (approche récréative etludique) ; 3) les visiteurs occasionnels, qui viennent à la fois pour l’esthé-tique des paysages et une explication de la faune et de la flore par desguides professionnels (approche éducative) ; 4) les scientifiques, pour quile parc constitue le support de leur production scientifique (approcheprofessionnelle). Cette pluralité des usages est à l’origine de conflitsd’intensité variable, chaque groupe d’usagers ayant tendance à revendiquerl’espace selon une approche singulière.

La nature connaît enfin des appropriations différentes et souventconflictuelles. Par appropriation, nous entendons ici l’occupation du solet les droits d’utilisation qui y sont définis. La conception même des PNNen France introduit une partition physique entre une zone centrale et unezone périphérique. La zone centrale, dédiée à la préservation de la natureet à la conservation des espèces, est soumise à une réglementation stricteempêchant tout projet d’aménagement d’envergure ou de développementde pratiques incompatibles avec la préservation des paysages, de la floreou de la faune. La zone périphérique, appelée aussi « zone préparc », sertde zone de transition entre le parc et les espaces non protégés. D’unepart, l’habitat y est autorisé et, d’autre part, les activités économiques ettouristiques, en lien avec le parc, y sont développées dans le respect des

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milieux naturels, des paysages et des traditions locales. Cette partitionentre le « dedans » et le « dehors » détermine des logiques d’appropriationspatiales opposées, entre ceux qui possèdent ou pratiquent l’espace auquotidien, ceux qui aspirent à le découvrir ou à le mettre à dispositiondu public et ceux qui font primer l’intérêt de la nation sur la propriétéprivée (y compris la propriété privée des communes) (Laslaz, 2004).Cette structuration des parcs nationaux, établie a priori sur une logiquedu compromis entre l’intérêt supérieur national (conservation des espèceset protection de la nature) et l’impératif local de développement écono-mique et touristique, ne satisfait en réalité que très rarement les partiesen présence. Elle a au contraire tendance à exacerber les oppositions entrela zone centrale et la zone périphérique. Et la logique du compromis setransforme alors en une logique d’opposition entre des espaces protégéset des espaces aménagés.

Les sources de conflits sont donc nombreuses et réelles. Pour autant,les conflits sont normaux, inhérents à la production des rapports sociauxet à la structuration du pouvoir (Freund, 1983 ; Simmel, 1995). Ils nesont pas seulement des dysfonctionnements au sein des relations humaines,mais aussi des occasions de croissance et de changement constructif(Deutsch, 1994). Les conflits sont sources de changement institutionnel.Ils constituent des vecteurs d’adaptation et d’évolution des règles et desinstitutions dans toute société (Commons, 1934 ; Rutherford, 1983 ;Leroux, 2002). Ce qui importe alors est moins l’existence des conflitsque leur régulation. Les conflits dans les espaces protégés de montagnepeuvent ainsi être lus comme des révélateurs de frustrations des popula-tions locales (des « parcs pour les citadins », des « parcs dépourvus deleurs habitants ») et des élus (sentiment de spoliation, d’expropriation,d’extraterritorialisation). Ils peuvent aussi être appréhendés comme desindicateurs de révision des approches de conservation de la nature, de labiodiversité et du développement territorial ; ou encore comme des indi-cateurs de changement et d’adaptation pour les parcs, aujourd’hui tiraillésentre leur mission originelle de protection et une mission en plein essord’animateurs de démarches territoriales durables. Une analyse économiquedes conflits peut ici enrichir ces premières lectures.

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2.2. LES FONCTIONS D’APPROPRIATION ET DE PRODUCTION DE RÈGLES DES CONFLITS COMME SOURCES D’INTERPRÉTATION DE LA DIALECTIQUE CONSERVATION/TOURISME

Nous adoptons une double lecture du conflit, soit à travers une fonctiond’appropriation et une fonction de production de règles (Vahabi, 200410).Un conflit a une fonction d’appropriation, à travers la répartition desdroits de propriété et d’usages qu’il engendre. Un conflit émerge aussipour changer des règles.

2.2.1. La fonction d’appropriation, ou comment juger de la conf ictualité autour d’un espace naturel

En premier lieu, le conflit peut être vu comme un autre moyen de réaf-fecter les ressources. Il peut prendre la forme d’une recherche de renteou de prédation. Cette réaffectation peut procéder par une redéfinition dela propriété, mais aussi des usages de la ressource. La logique d’uneanalyse coûts-bénéfices guide alors les choix. Cette approche s’inspire dela conception néoclassique du conflit rationnel où les agents, supposésparfaitement rationnels, effectuent des choix entre activités en fonctiondes coûts et bénéfices privés. L’analyse néoclassique, toutefois, expliqueseulement les litiges marchands ou les conflits rationnels, c’est-à-dire desconflits entre des adversaires qui sont aussi des partenaires et qui peuventêtre évités sur la base d’une analyse coûts-avantages. Elle n’a pas pourvocation d’expliquer les conflits réels. Le conflit social est une déviationpar rapport au comportement rationnel et à l’ordre naturel d’une économiede marché concurrentiel. La nouvelle économie politique (NPE) se place,elle, du point de vue de l’étude des conflits réels. Mais un des résultatsmajeurs de cette approche est de souligner l’impossibilité de la mani-festation de situations conflictuelles (Olson, 1965, 1982 ; Tullock, 1974).Les agents étant supposés être parfaitement rationnels, des systèmes derévélation de l’information suffisent à éviter toute confrontation réelle.

L’économie institutionnelle, dans la lignée des travaux de J.R.Commons (1934), à laquelle nous nous référons, redonne au conflit uneplace centrale. Le conflit y est défini comme une interaction sociale, une

10. Vahabi parle de fonction appropriative. Il s’intéresse plus largement à toute forme de« pouvoir destructif ».

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interaction entre des volontés conflictuelles. Il porte sur la répartition desrichesses et trouve son origine dans la rareté. Celle-ci favorise des com-portements d’appropriation privative qui vont devoir être régulés et par-fois sanctionnés. Le conflit porte ainsi sur la propriété et l’usage (Leroux,2002). La rareté entraîne des conflits d’utilisation et d’appropriation surlesquels le régime de la propriété influe.

Cette approche nous offre la possibilité d’explorer plus avant laconflictualité qui naît autour de l’appropriation d’un espace naturel (dansnotre cas, la montagne) défini ou vécu comme un espace commun. L’idéeici est d’appréhender la question de la régulation d’un bien environne-mental commun, dans une optique de gestion intégrée et durable, en nousréférant aux logiques d’appropriation des ressources naturelles, que nousdifférencions selon la propriété, l’usage, mais aussi la valeur de la res-source (Lahaye, 2003). Il s’agit, à la suite des travaux du courant descommunaux (dont Ostrom, 1990 ; Bromley, 1991, 1992 ; Baland et Platteau,1996), de dépasser l’idée selon laquelle les « problèmes des commu-naux» sont essentiellement dus à l’absence de droits de propriété sur lesressources naturelles (Alchian et Demsetz, 1973). Il s’agit aussi de resi-tuer la question des conflits d’usages dans la problématique de la valeurde la nature. Le débat actuel sur le découpage zone centrale/zone péri-phérique à propos des parcs nationaux et les questionnements autour dela valeur de la biodiversité et de la conservation de la nature viennent enappui à notre réflexion.

2.2.2. La fonction de production des règles comme v ecteur d’interprétation des arrangements institutionnels

En second lieu, le conflit comporte une fonction de production de règles.Chez Commons, le conflit constitue le fondement même de l’ajustementinstitutionnel. L’ordre social vers lequel doit tendre l’économie est lerésultat d’un processus d’ajustement institutionnel, inscrit dans la logiquedu compromis. L’ajustement peut être de nature spontanée qui fonde lacoutume. Celle-ci est l’expression d’un ensemble de règles informelles(Gonce, 1971) qui procèdent de l’institutionnalisation d’un cadre cognitifcommun. L’ajustement peut être concerté. Celui-ci renvoie à l’idée d’unesélection artificielle des règles par les autorités légitimes ; artificielle (enopposition à la sélection naturelle) parce qu’elle est orientée vers un butet qu’elle vise à anticiper le conflit ou bien les modalités de règlementsdes conflits (Commons, 1934). Ces règles dites « opérantes » rendentprévisible le comportement d’autrui et assurent ainsi un ordre qui permet

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la coopération entre les acteurs économiques, grâce à la sécurisation deleurs anticipations. Les institutions sont garantes d’un ordre social etpermettent la résolution des conflits.

Cette seconde fonction du conflit nous invite à considérer lesnouvelles règles produites ou en phase d’élaboration, qui remettent encause l’équilibre établi et qui révèlent la façon dont la dialectique con-servation/tourisme se trouve appréhendée. Les orientations en terme dedéveloppement économique sont contraintes par des règles d’appropria-tion de l’espace et des règles d’usages. Ce sont alors ces mêmes règlesque les conflits sur un espace rare tentent de remettre en cause. En mêmetemps, la recherche d’une solution collective et négociée doit permettrede fonder un nouvel équilibre.

Dans les règles produites par le jeu de l’interaction, deux dimensionsdoivent être distinguées : d’un côté, le contenu de la règle, en ce sensqu’elle révèle la façon dont la conservation de la biodiversité, la protectionde la nature mais aussi l’écotourisme sont définis ; de l’autre, la naturede la règle, formelle ou informelle, marchande, contractuelle ou régle-mentaire, en ce sens qu’elle nous renseigne sur les modes de gouvernancedominants.

De nombreuses approches aujourd’hui prônées placent la gestionparticipative au cœur des programmes de protection de la nature. Seuleune action conjointe des parties concernées parviendrait à rendre légitimela conservation. Pour nombre d’institutionnalistes travaillant dans lechamp de l’environnement (Dietz et Van der Straaten, 1992 ; Söderbaum,1990), l’action collective, reposant sur la participation et la démocratie,compromis entre l’intervention étatique et le marché, serait « la solution »aux conflits environnementaux. L’action collective est placée au cœur duprocessus politique. Plus généralement, la mise en place d’un dévelop-pement durable passe par la concertation entre les parties prenantes11. Denotre côté, plutôt que de considérer la gestion participative comme laréponse pertinente aux questions de la conservation dans sa dualité avecle développement économique, nous tentons d’apprécier la place laisséeà l’action collective dans la résolution des conflits qui opposent lesacteurs du tourisme et promoteurs du développement économique auxporteurs de projets de conservation de la nature.

11. Notons que ces auteurs insistent sur le rôle crucial de l’éducation, de l’information, de laconnaissance et du dialogue. La gestion de l’information est un élément clé de la stratégieparticipative.

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Enfin, le caractère « évolutionnaire » du courant institutionnalisteoblige à appréhender les institutions à travers leur processus de transfor-mation (Gislain, 1999). Les mutations économiques et sociales, les conflitsqui en résultent et qui produisent en retour de nouvelles règles, modifienten permanence les institutions. Comprendre les logiques institutionnellesen œuvre peut être alors un moyen d’appréhender la dynamique des con-flits constitutive des approches de la protection de la nature. La dynamiquedes conflits se double ainsi d’une dynamique de résolution des conflits parl’action collective. Autrement dit, il devient possible de saisir la dialectiqueconservation/tourisme par l’étude des arrangements institutionnels mis enœuvre. Il s’agit d’étudier l’ensemble des décisions et actions prises pourrésoudre le conflit. Ces arrangements peuvent soit mobiliser des règlesexistantes, soit en créer de nouvelles, notamment par la conclusion d’unaccord entre les usagers en situation de rivalité. Les arrangements concluspeuvent prendre des formes diverses : accord de coopération, convention,décision de justice, réglementation locale, législation, etc.

C’est dans ce cadre théorique que nous pouvons à présent aborderles conflits autour de la conservation et du tourisme dans le PNP. Cepen-dant, si les deux fonctions d’appropriation et de production de règles duconflit sont étroitement liées, nous insisterons surtout, dans ce qui suit,sur la fonction d’appropriation, l’analyse des arrangements institutionnelset de l’action collective méritant un développement à part entière.

LA DIALECTIQUE CONSERVATION/TOURISME À LA LUMIÈRE DES CONFLITS D’USAGES DANS LE PARC NATIONAL DES PYRÉNÉES

Les conflits qui mettent en cause la dialectique conservation/tourismedans le PNP sont nombreux. Les exemples que nous allons exposer neprétendent pas rendre compte de toute la variété et l’étendue de cesconflits. Néanmoins, ils permettent d’éclairer la problématique, de saisirles enjeux en cause et, aussi, de concevoir la diversité des arrangementsinstitutionnels. En particulier, à l’appui de notre grille d’analyse présen-tée plus haut, nous observons que l’opposition entre conservation et tou-risme renvoie à des conflits de valeurs, des conflits de pouvoirs et desconflits d’usages (et de droits d’usages) autour d’un espace d’intérêtpublic. Les cas de conflits que nous présentons ont été retenus en raisonde leur entrée différenciée : le premier, le conflit sur l’ours brun desPyrénées, aborde la question de la conservation d’une espèce (3.1) ; les

3.

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seconds, sur les aménagements de la montagne à des fins touristiques etrécréotouristiques, traitent du développement du tourisme dans un espaceprotégé (3.2). Ils présentent également différents degrés de conflictualité,allant du conflit latent au conflit résolu ou anticipé en passant par leconflit ouvert.

3.1. LE CONFLIT DE L’OURS BRUN DES PYRÉNÉES :JEUX DE POUVOIR, CONFLITS D’USAGES ET DE VALEURS ET QUESTIONNEMENTS DE L’INSTITUTION « PARC »

L’ours brun est toujours présent dans le PNP, mais il est menacé. Avecla mort de Cannelle12, la race pyrénéenne s’éteint. Bien que peu nom-breux dans le massif pyrénéen13, l’ours continue de susciter de violentesoppositions, que le récent plan de renforcement, annoncé par le ministrede l’Environnement au début de 2005, ne fait que réactiver. Ce planprévoit le doublement de la population d’ici à trois ans pour atteindreune trentaine d’ours fin 2008.

Les premiers plans de renforcement de la population oursine desannées 198014, qui échoueront tous, déclenchent les hostilités, avec unpoint culminant lors du projet des « réserves Lalonde » en 199015. Afinde mettre fin à ces conflits, la Charte de développement durable desvallées béarnaises et de protection de l’ours est signée le 31 janvier 1994entre l’État et les acteurs locaux16. Et l’IPHB (Institution patrimonialedu Haut Béarn) est créée, afin de mettre en œuvre la charte17. De soncôté, l’ARTUS (Association de protection des ours dans les Pyrénées)incite les communes des Pyrénées centrales favorables à l’ours à seregrouper. L’ADET, une association pour le développement durable des

12. La dernière ourse de souche pyrénéenne a été abattue par un chasseur en novembre 2004.13. On estime qu’il y a actuellement entre 14 et 18 ours dans les Pyrénées.14. Le Plan Ours de 1984 prévoyait de restaurer une population de 40 individus en 5 ans. La

directive Ours de 1988 indiquait aux préfets les actions à mettre en œuvre pour protéger lesours. La tentative échoue par manque de coordination principalement.

15. Un espace minimum vital était réservé pour préserver les derniers ours des Pyrénées. Malacceptées par les élus, chasseurs et bergers locaux, ces réserves sont supprimées et undispositif de concertation est amorcé qui débouchera sur la création de l’IPHB.

16. À savoir : les populations locales représentées par les maires de 20 communes, l’Associationdes éleveurs et transhumants des trois vallées (Béarn, Ossau, Aspe-Barétous), la Fédérationdépartementale des chasseurs, le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques et le Conseilrégional d’Aquitaine.

17. Il s’agit là d’une démarche novatrice dans le sens où l’État accepte de confier la gestion duterritoire aux représentants des vallées et à ceux qui y vivent. L’institution donne une placeofficielle à des acteurs locaux qui jusqu’ici n’en avaient pas : bergers, chasseurs, exploitantsforestiers, associations de protection de la nature.

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Pyrénées centrales, est ainsi créée dans le but de promouvoir l’image desPyrénées, « Pays de l’ours ». Après plusieurs demandes non satisfaites,l’État va soutenir l’ADET et trois ours slovènes seront réintroduits en1996 et 1997. Cette augmentation de la population provoque des réac-tions de la part des opposants (chasseurs, éleveurs, élus locaux, syndicatsprofessionnels) qui se constituent en associations anti-ours. Leur mobi-lisation reste grande, a fortiori avec le plan de renforcement aujourd’huiannoncé. L’échelle territoriale du conflit se déplace, avec le temps, delocale à nationale.

3.1.1. Le conf it de l’ours des Pyrénées : un conf it sur le pastoralisme de montagne et sur le type de dév eloppement économique souhaité pour les régions de montagne

Ce conflit révèle la précarité croissante de l’activité ovine. L’ours enparticulier, et les grands prédateurs en général, sont à la fois les révéla-teurs et les boucs émissaires de la crise du pastoralisme de montagne(Benhammou, 2003). Ce qui pose problème est sans doute moins lesdommages causés par l’ours18 que les pratiques de l’élevage de mon-tagne. La diminution du nombre de bergers et l’augmentation de la tailledes troupeaux, pour des raisons évidentes de productivité (forte concur-rence étrangère à laquelle s’ajoute la PAC avec sa politique d’indemni-sation19) impliquent une présence humaine moindre dans les estives etconduisent à dénoncer l’incompatibilité entre le prédateur et l’élevage.Instrumentalisé, l’ours est présenté par la profession comme une menaceréelle pour la survie de l’activité pastorale et en conséquence, pour lemaintien d’une économie de montagne indispensable à la lutte contre ledéclin rural.

En même temps, la protection de l’ours participe à la dynamisationdu territoire. Le renforcement de la population oursine crée des emplois(une centaine environ, dont 55 emplois à temps plein20). Sa présenceparticipe de la construction et du renforcement d’une image de qualité

18. 150 bêtes environ par an sur l’ensemble de la chaîne, soit environ 0,03 % du cheptel, àcomparer aux 3 % de pertes admises par les éleveurs du fait des maladies, des accidents, desvols ou des prédations non attribuables à l’ours.

19. La course à la prime a poussé à avoir toujours plus de bêtes sans se soucier des effets sur leterritoire.

20. Ces emplois ont été créés ou confortés au sein de l’Équipe technique Ours et de la DIREN,des Groupements pastoraux, de l’équipe des bergers itinérants, de Pays de l’ours-ADET etde l’Association pour la cohabitation pastorale.

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de l’environnement, dont bénéficient aujourd’hui une centaine de profes-sionnels de la montagne par l’intermédiaire de chartes de qualité. Laprésence de l’ours réaffirme également l’existence d’un patrimoine natu-rel et culturel qui soutient le développement touristique avec ce slogan« les Pyrénées, pays de l’ours ».

Ce conflit autour de la conservation d’une espèce pose plus largementla question du type de développement voulu pour des espaces fragiles,tant économiquement qu’écologiquement. Le développement touristiquene peut être compris que dans sa double relation avec la conservation dela nature et l’économie rurale. Conservation, tourisme et pastoralismeforment un tissu de relations complexes qui se croisent, s’entremêlent etplus souvent s’opposent. Sauf à considérer des plans d’actions qui tententla réconciliation, à l’instar des récentes actions pilotes de valorisation deproduits pyrénéens de qualité, qui s’appuient sur la présence de l’ours(chartes de qualité du « Pays de l’ours » avec les professionnels de lamontagne21 ; programme Pé Descaous22 – production fromagère ouencore production du « broutard du pays de l’ours »23). Les productionsagricoles pastorales et l’artisanat traditionnel ont besoin, pour se main-tenir et se développer, de miser sur la qualité en s’appuyant sur la pro-motion de signes de qualité. L’ours, symbole d’une nature préservée, dequalité environnementale, est l’un de ces signes. Ces productions localestraditionnelles participent à leur tour à l’attractivité du territoire. Cesactions vont dans le sens d’une cohabitation entre conservation, pastora-lisme et tourisme. La protection de l’ours, en servant les intérêts descommunautés locales, trouve ici sa justification. Mais il s’agit là des

21. Ces chartes de qualité concernent les professionnels de la montagne (activités de découverte,hôtellerie-restauration, produits du terroir, artisanat d’art et production ovine) qui intègrentla préservation de l’environnement à leurs pratiques et reconnaissent en la présence de l’oursun facteur de développement du territoire.

22. Le programme Pé Descaous est créé en 1994 par le Fonds d’intervention écopastoral avecl’association « les bergers du Haut-Béarn » et le soutien du WWF-France. L’objectif est deproduire un fromage fermier de façon traditionnelle, en estives, et de le commercialiser enutilisant l’image de l’ours. Une trentaine de bergers-fromagers participent aujourd’hui auprogramme.

23. Cette action concerne la production de viande ovine. En 2000, des éleveurs et bergers réunisen association pour la cohabitation pastorale, et accompagnés par l’Association Pays del’ours-ADET ont réfléchi à un mode de production durable, valorisée et compatible avec laprésence de l’ours. Le broutard est apparu une solution adaptée et un cahier des charges aété élaboré encadrant la production « du broutard du pays de l’ours ». Le broutard est unagneau âgé de 6 à 12 mois, élevé au lait de sa mère puis à l’herbe. Il transhume en estiveavec le troupeau et passe au moins 3 mois sur les pâturages de montagne. Il est vendu direc-tement de l’éleveur au consommateur, à la descente d’estive et jusqu’au mois de décembre.Cet élevage traditionnel des Pyrénées centrales nécessite la présence d’un berger qui, enguidant le troupeau sur les estives, empêche la fermeture des paysages et protège les bêtes.

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intérêts d’une partie seulement de la population locale. Par ailleurs, cesmesures sont encore peu nombreuses. Et la cristallisation des oppositionsautour de l’ours est aussi un moyen efficace de ne pas aborder directe-ment les questions sensibles du devenir de l’activité pastorale et del’usage des territoires de montagne, entre espaces récréatifs et espacesproductifs (Benhammou, 2003). Il paraît plus simple de continuer à oppo-ser les ruraux, sans qui la montagne n’existerait plus, aux urbains idéa-listes, qui préfèrent une nature sauvage sous surveillance (Bobbé, 2000).

3.1.2. Le conf it sur l’ours : un conf it pour le pouv oir et la reconquête du territoire

Mais le débat sur l’ours n’est pas seulement le combat de bergers locauxcontre l’État et les « écologistes de la ville » ! Il est aussi une tribunepolitique où partisans et adversaires de l’ours cherchent surtout à gagneren notoriété et en pouvoir, comme le soulignent F. Benhammou etL. Mermet (2003). Ce conflit offre un formidable terrain pour conforterles pouvoirs de certains élus24 qui, en ralliant les voies de l’opposition,cherchent à renforcer leur emprise sur le territoire. Ce sont ces mêmescommunes qui manifestent leur désapprobation, d’une façon générale, àl’existence du PNP. Le positionnement de l’IPHB sur la question del’ours – peu favorable au renforcement de la population – conforte cetteidée de reconquête du territoire par des élus qui se sentent souvent dépos-sédés de la gestion de leur territoire25. Cette institution, chargée de garan-tir l’application de la Charte de développement durable des valléesbéarnaises et de protection de l’ours et présentée initialement comme undispositif innovant d’intégration et de concertation (Hervé, 1999), estaujourd’hui accusée de servir davantage les intérêts de la profession pas-torale et d’acteurs politiques locaux (grâce à la maîtrise des fonds publics)que ceux de l’ours. Par ailleurs, son désengagement du programme gou-vernemental traduit un sentiment d’éviction et de perte de crédibilitéauprès des acteurs locaux. Cette volonté d’emprise territoriale, contrariéepar des choix politiques plus globaux, participe au renforcement del’opposition conservation/tourisme/pastoralisme.

24. C’est le cas par exemple d’Augustin Bonrepaux, farouche opposant à l’ours, qui se faitconnaître médiatiquement par le dépôt d’un amendement à la loi sur la chasse prévoyant« l’arrêt de l’opération de réintroduction et le retrait des grands prédateurs des territoires demontagne ».

25. « La gestion de la montagne se fait de plus en plus en dehors des montagnards » (J.L. Idiart,député de Haute-Garonne et président de l’ANEM – Association nationale des élus de lamontagne. « À côté de la gestion directe de l’État (parcs, réserves etc.), nous voyonsapparaître des gestions semi-directes ou déguisées. »

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3.1.3. Le conf it de l’ours pose la question du sens et de la valeur de la biodiv ersité

La conservation de la biodiversité est a priori considérée comme désirableen soi, souhaitable pour l’humanité. Toutefois, il s’agit là d’un postulatqui omet l’existence de systèmes de valeurs différenciés au sein dessociétés humaines (Compagnon, 2001). Le conflit de l’ours éclaire assezbien les divergences de sens et de valeurs qui entourent la question de laconservation.

Les mouvements d’opposition (pro- et anti-ours) revendiquent tousla conservation de la biodiversité. Toute une rhétorique écologiste desintérêts des opposants se met alors en place (Mermet, 2001). Pour les« pro-ours », la protection d’un prédateur s’impose de fait, au nom dumaintien de la biodiversité et de la préservation de la nature sauvage. Lesanti-ours, eux, mettent en avant le rôle essentiel que représente l’activitépastorale dans la gestion de la montagne et de ses paysages. La protectionde l’ours ne peut alors qu’affecter l’équilibre des écosystèmes, parl’atteinte qu’elle porte au pastoralisme.

Derrière cette opposition sur l’objet de la biodiversité (espècesauvage et son habitat contre paysages ouverts) se cache une différencede valeurs, entre valeur d’existence et valeur d’usage de la biodiversité.Pour les uns, la valeur de la biodiversité résulterait de son existencemême (intérêt scientifique, intérêt esthétique, voire éthique) ; c’est ici lathèse « conservationniste » qui l’emporte, avec un attachement émotion-nel fort du public pour certaines espèces comme l’ours. Pour preuve, lesmanifestations de protestation qui ont suivi la mort de l’ourse Cannelleen novembre 2004, un peu partout en France. Pour les autres, la valeurde la biodiversité émanerait de l’usage dont elle fait l’objet. C’est làl’affirmation de la thèse « utilitariste » de la nature. La préservation desespèces n’a de sens que si elle sert les intérêts de l’homme. Or, aujourd’hui,la « valeur économique » (ou marchande) de l’ours reste faible. Tout aumoins, elle pèse peu face aux retombées économiques et sociales dupastoralisme, même si, par son image, l’ours constitue un faire-valoirpour promouvoir des activités économiques et touristiques pyrénéennes.Comme le souligne D. Compagnon, « la valorisation économique de lafaune n’est favorable à la conservation qu’en l’absence de toute alternativeéconomique, cas extrêmement rare » (2001, p. 13).

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3.1.4. Le conf it de l’ours soulèv e le problème des droits d’usages et celui des règles de gestion pour un espace commun

Le conflit de l’ours réactive la bataille pour une meilleure protection dela nature à l’intérieur du parc et pose, de fait, la question du rôle du parctant vis-à-vis du maintien de la biodiversité que de la promotion dutourisme. Les zones centrales des parcs nationaux ont été initialementcréées pour permettre la préservation des espèces fauniques et floristiquesrares et menacées. La préservation de l’ours a présidé à la naissance duPNP. Pourtant, le parc n’a pas l’entière maîtrise foncière du territoire surlequel il œuvre. Dans le PNP, 90 % des terres sont la propriété des com-munes du parc, qui louent ces terres aux éleveurs pour les rentabiliser.Ours et moutons partagent donc les mêmes terres, au cœur du parc. Unepolitique de protection complète de la nature, par ailleurs revendiquéepar les associations de protection de l’environnement, s’avère de faitdifficile à mettre en œuvre, sans réactiver les tensions. L’acceptation duparc par les populations locales repose sur la jouissance d’un droit d’usageauquel un soutien trop appuyé à la protection de l’ours porte atteinte, undroit d’usage que l’État s’engage à respecter par des mesures de soutienappropriées telles que la mise en place de chiens de protection ou ledédommagement pour les bêtes tuées, pour compenser les contraintesimposées par la présence du prédateur. L’administration du parc doitaussi composer avec un conseil d’administration où les décideurs locauxsont majoritaires. Entre protection de l’ours et soutien au maintien del’activité pastorale, l’administration du PNP affiche une position prudenteen réaffirmant sa fonction première de conservation tout en insistant surle rôle essentiel du berger26, garant selon elle du maintien de l’ouverturedes milieux pastoraux, enjeu capital pour le parc en terme de préservationdes espèces et des habitats et enjeu économique fort pour les vallées. Etde citer les actions de valorisation des produits du terroir qu’il encourageen mobilisant l’image de l’ours, une façon de concilier conservation,pastoralisme et tourisme pour contenter un peu tout le monde.

26. « L’action du berger constitue le facteur essentiel intégrant qualité des produits et préservationdu milieu » (document PNP, Orientations pour le contrat de plan État-Région 2000/06 surl’espace Parc national de Pyrénées, juin 1999).

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3.1.5. La récente procédure de concertation autour du plan de renforcement de la population oursine fav orisera-t-elle la formation de plans de dév eloppement durable et de projets écotouristiques ?

La façon dont est géré le conflit renseigne enfin sur les modes de gou-vernance qui président à l’élaboration de plans de développement durableterritorial. Après des échecs successifs de plans de réintroduction desours, souvent liés à un manque de dialogue entre toutes les parties pre-nantes, il semble qu’aujourd’hui, les acteurs sociaux s’engagent dans unenouvelle ère où la voie de la concertation est privilégiée. La décision derenforcer la population d’ours des Pyrénées fait en effet l’objet actuelle-ment d’une procédure de concertation27. Le plan de renforcement devraitdonc découler d’une démarche participative. Les cadres de planificationproposés, qui fournissent aux acteurs un forum afin d’exprimer la situa-tion conflictuelle et d’élaborer ensemble une solution, mobilisent diffé-rents supports : dossier présentant les dispositions techniques28, réunionspar comités multiples, démarche d’écoute des habitants des Pyrénées aumoyen d’un site Internet, etc. La démarche s’apparente à un débat public,sans en avoir la lourdeur réglementaire. Mais la concertation autour dela question de la sauvegarde, dans le massif pyrénéen, d’une espèce parailleurs protégée aidera-t-elle à mieux penser le développement durableet viable du territoire ? La dialectique ternaire conservation/tourisme/pastoralisme trouvera-t-elle là sa force d’expression ?

3.2. AMÉNAGEMENTS DE LA MONTAGNE À DES FINS TOURISTIQUES ET RÉCRÉOTOURISTIQUES ET OBJECTIFS DE CONSERVATION DE LA NATURE : QUELQUES ENSEIGNEMENTS

Dans cette partie, nous traitons de cas de conflits liés aux aménagementsde la montagne à des fins touristiques ou récréotouristiques. Il s’agit icisurtout de pistes de recherche pour approfondir la compréhension de la

27. Cette concertation débutée le 11 février 2005 s’achèvera à la fin du mois d’avril. Il est prévuque soit présenté à l’ensemble des acteurs locaux consultés, en juin, un plan de restaurationglobal, intégrant les aspects biologiques (origine des ours, procédures techniques, sanitaireset administratives, lieux de lâchers) et l’ensemble des mesures d’intervention économique etsociale, enrichies par la concertation.

28. Ce dossier propose les dispositions techniques et laisse largement ouverte la discussion surles mesures destinées à rendre compatible la réintroduction des ours avec le maintien et ledéveloppement des activités humaines. Ces mesures poursuivent trois objectifs principaux :1) soutenir les activités qui sont confrontées à un impact direct de l’ours : élevage etagriculture ; 2) accompagner la limitation des impacts de certaines activités sur la préservationde l’ours : gestion forestière et chasse ; 3) soutenir des activités pouvant valoriser la présencede l’ours : tourisme, artisanat et développement économique plus général.

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dialectique conservation/tourisme dans les espaces protégés. Mais nouspouvons d’ores et déjà tirer quelques enseignements qui viennent com-pléter l’analyse précédente. Les aménagements concernent la pratiquedes sports de nature, en particulier l’escalade et le ski alpin, et l’héber-gement en montagne avec les refuges29. Les conflits sont soit des conflitsouverts, soit des conflits latents.

Les refuges, comme les aménagements pour la pratique d’activitéssportives ou de découverte (sentiers de randonnée, voies d’escalade,remontées mécaniques) concourent à renforcer l’attractivité touristiquedu territoire en général et de l’« espace Parc » en particulier. Ils répondentégalement à une demande croissante de la pratique d’un tourisme sportifet de nature. Cette demande est marquée par des changements de valeurset de représentations à la fois de la nature et de la pratique du sport(Pigeassou et al., 1999). Premièrement, dans le domaine des sports depleine nature, les valeurs écologiques ont tendance à être supplantées pardes valeurs égocentriques (perception de l’aventure vécue, risque res-senti) et des considérations techniques (performances techniques desmatériels). Deuxièmement, la conception de la nature chez les sportifsde nature s’éloigne de celle des écologistes : la nature est un espace pourl’action ; elle est approchée comme un terrain de jeux ou comme unvecteur de performances. Ces divergences nourrissent les conflits entrepratiques des activités de pleine nature et protection du milieu naturel.

3.2.1. Pratiques sportives et hébergement en montagne suscitent parfois des réactions violentes lorsqu’ils portent atteinte à la nature ou concurrencent d’autres usages de la montagne

La pratique de l’escalade dans les Pyrénées est particulièrement développée.Un grand nombre de sites d’escalade se situent dans le parc. Les tensionsque cette pratique sportive soulève sont nombreuses, pouvant allerjusqu’à des conflits ouverts. Ces conflits qui opposent les grimpeurs auxchasseurs, aux villageois ou aux écologistes ont des origines multiples :partage d’un espace commun par des acteurs pratiquant des activitésdifférentes, nuisances dues à la surfréquentation des sites, dégradationdes parois rocheuses par des équipements de plus en plus sophistiqués,troubles de la faune (dont des espèces rares comme l’aigle de Bonelli ou

29. D’autres conflits portant sur la randonnée sous toutes ses formes (pédestre, en ski, enraquettes), le canyoning, la pratique des chemins en 4 × 4 sont autant de cas qui mériteraientd’être analysés.

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le faucon pèlerin). Des dissensions au sein des fédérations sportives30 surla pratique de l’escalade (libre ou équipée), sa relation avec le milieunaturel, alimentent les tensions entre pratiquants et autres usagers de lamontagne31. Dans la majorité des cas, les conflits naissent à l’issued’arrêtés municipaux qui restreignent, voire interdisent la pratique del’activité. Ces arrêtés sont justifiés au nom de la préservation des sites etde la protection de l’environnement. En réalité, ils satisfont généralementles intérêts d’un groupe d’usagers au détriment des grimpeurs, déclen-chant alors des conflits ouverts. La régulation des conflits passe le plussouvent par une réglementation locale. Les règles d’usages sont redéfi-nies après négociation et des compensations peuvent être attribuées auxparties dont les usages se trouvent restreints32.

Les projets d’extension des stations de sports d’hiver suscitent euxaussi des tensions. Pour ne citer que deux cas, mentionnons le projetd’extension de la station de ski de Gavarnie (France) et celui de la stationde ski de Formigal dans le Val Tena (Espagne)33. Ces projets prévoientégalement des liaisons transfrontalières, reliant les stations de ski desversants français et espagnol. Ces deux cas soulèvent, d’une part, la

30. FFME (Fédération française de la montagne et de l’escalade) et COSIROC pour les deuxprincipales, auxquelles viennent s’ajouter un grand nombre de clubs d’escalades non affiliés.

31. Voir par exemple, ces propos tenus par un membre d’un club d’escalade pyrénéen : « On estparfois surpris et pris de court lorsque des interdictions d’escalade interviennent. Par contrelorsque la FFME dispose de tous les atouts pour imposer la possibilité de grimper toutel’année et de développer un site, il semble curieux, pour ne pas dire révoltant de découvrirune interdiction de grimper certains mois de l’année. C’est le cas sur le site naturel d’escaladedu Pibeste dans les Hautes-Pyrénées ».

32. Ce fut par exemple le cas dans le conflit du site du Pibeste, en plein cœur de la réservevolontaire du Pibeste, qui a opposé, de 1987 à 2001, la commune d’Agos-Vidalos (et plusexactement les chasseurs, membres majoritaires du conseil municipal) au club d’escalade,les « Grimpeurs Pibeste Chaud », composé pour l’essentiel de guides de haute montagne dela vallée. Un premier arrêté interdisant la pratique de l’escalade a déclenché les velléités. Lerèglement du conflit, après les menaces de bloquer les routes d’accès aux stations de ski enpériode d’affluence, est intervenu par l’entremise d’un nouvel arrêté, déplaçant les voiesd’escalade et fixant les périodes d’utilisation. En compensation, des travaux de réaménagementet d’équipements de nouvelles voies ont été programmés.

33. Le premier consisterait à relier la station au versant espagnol jusqu’au col de Boucharo parla construction d’un téléporté. Le second prévoit un agrandissement de la station avec unraccordement à la station d’Astun, derrière le col du Somport. Ce projet jouxte la frontièrefrançaise et le PNP. Aujourd’hui, les premiers travaux sont engagés et l’on constate d’oreset déjà des dommages sur le paysage, avec des effets sur la faune et la flore, jugés par certainsirréversibles. Les tensions s’exacerbent actuellement avec les premières manifestations,regroupant militants écologistes français et espagnols, la dernière en date étant celle du20 mars 2005 au col du Pourtalet (Pyrénées-Atlantiques), à cheval sur la frontière franco-espagnole.

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question des stations de ski au cœur du PNP34 et le difficile équilibre àtrouver entre conservation et tourisme et, d’autre part, celle de la coopé-ration (ou ici, de l’absence de coopération) transfrontalière entre laFrance et l’Espagne autour de ces projets – pays par ailleurs engagésdans une démarche de création d’un réseau pyrénéen des espaces proté-gés. Ces projets s’inscrivent dans la nouvelle dynamique qui entoure lesstations de ski, à savoir l’interconnexion des domaines skiables existants,en réponse aux attentes d’une clientèle de plus en plus friande de grandsespaces. Il s’agit là d’un moyen de diversifier l’offre de ski et de faireen sorte que chaque espace d’urbanisation ait un accès à un domaineskiable varié et étendu. Les opposants aux projets d’interconnexion sou-lignent pour leur part l’incompatibilité des projets avec les objectifs d’untourisme durable. Les désaccords portent sur le peu de retombées écono-miques et sociales pour les populations locales (précarité des emplois,main-d’œuvre internationale qui séjourne seulement le temps de la saisontouristique, pression foncière qui pousse les locaux hors de chez eux)ainsi que sur la perte d’identité des espaces de montagne (« usines àski »)35. Les menaces environnementales sont, dans les deux cas présen-tés, importantes puisque les infrastructures jouxtent les limites du parcou risquent même de traverser le parc. Il s’agit là de dossiers hautementpolémiques où les enjeux politiques et économiques risquent fort del’emporter sur les intérêts écologiques.

Les projets d’aménagement de la chaîne des Pyrénées portant surla construction ou l’agrandissement de refuges ne sont pas non plusexempts de tensions. Un conflit significatif est né dans les années 1990autour de la mise en place, tout au long des 350 km de la chaîne, de86 refuges (soit un refuge tous les 4 km). Sur les 86 refuges, 39 étaientdes créations nouvelles dont plusieurs en sites protégés ou classés. L’idéeétait de ne pas laisser de « trous » entre deux refuges. Si l’idée a étéabandonnée, les tensions demeurent, entretenues par la menace de plansde dynamisation de la fréquentation des refuges. Car les refuges apportentune contribution à la fréquentation estivale en permettant d’organiser desactivités touristiques. Des débats récents portent sur l’agrandissement derefuges situés près des grands sites déjà victimes d’un tourisme de

34. Le PNP fait valoir son opposition au projet d’extension de Gavarnie où le téléporté prévutraverserait la zone centrale du parc. Quant à la commune de Gèdre-Gavarnie, sa position estmitigée : elle affirme que le dossier appelle des compléments d’études.

35. Si aujourd’hui les Pyrénées sont loin de connaître le développement du tourisme de montagneenregistré dans les Alpes, ces projets (et d’autres : Grand Valira en Espagne – interconnexionentre le Pas de la Casa et Soldeu-El Tarler ; Cauterets-Luz-Ardiden en France) attestent dela volonté de certains élus et promoteurs de se lancer dans la course au tourisme de masse.

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masse36 ou situés à faible distance des axes routiers. La proximité d’uneroute banalise le territoire protégé et affaiblit la notion d’hébergement denécessité. Le PNP incite à préférer des hébergements en zone périphé-rique lorsqu’une course d’une journée à peine permet d’atteindre le som-met. Mais le PNP a surtout ici un pouvoir d’incitation ; sur les vingt-deuxrefuges situés en zone centrale, il n’en possède que cinq. Les autres sontla propriété du Club alpin français ou des communes du parc. La questionporte sur la vocation (hébergement de nécessité ou « hôtel trois étoiles »)et le niveau d’équipements des refuges en zone centrale, et par consé-quent sur le type de tourisme désiré. Cela implique des partenariats avecles structures gestionnaires des refuges en zone centrale. Les tensionspeuvent se muer en conflit ouvert, comme dans le cas du projet de refugede la Hillette37, un conflit d’une ampleur politique considérable où pres-sions et manipulations seront reconnues publiquement par le ministre del’Environnement en 200238.

3.2.2. Des conf its où l’appropriation d’un espace public, la valeur de la nature et les pouv oirs de l’institution P arc face aux enjeux globaux de dév eloppement économique de territoires transfrontaliers sont mis en question

Ces différents conflits rendent compte de la difficulté à définir les espacesqui doivent être protégés et ceux qui doivent être aménagés, a fortiorilorsque les installations traversent le parc. Doit-on opérer une séparationnette, quitte à « sacrifier » certains espaces, ou au contraire, privilégier lacomplémentarité des territoires ? Jouer l’opposition dans la vocation des

36. C’est le cas du refuge des Sarrasins sous la Brèche de Roland, géré par le CAF (Club alpinfrançais), et qui envisageait d’augmenter sa capacité d’accueil alors même que la municipalitéde Gavarnie a décidé de fermer la route du col de Boucharo pour contrôler le flux touristiquedans cette zone sensible située en plein cœur du Parc.

37. Ce projet prévoyait la construction d’un refuge de très grande capacité au bord du lac dela Hillette, en plein cœur d’un site classé, le cirque de Cagateille, dans les Pyrénées arié-geoises. Ce conflit, qui a duré 10 ans, opposait la commune d’Ustou, favorable au projet,et le Comité écologique ariégeois, soutenu par les associations de défense de la nature(Nature Midi-Pyrénées, Paysages de France et Mountain Wilderness) et l’ADEPEDU (Asso-ciation pour la défense et la protection des intérêts liés à l’environnement des habitants dela vallée d’Ustou). La décision du tribunal administratif de Toulouse, en juin 2003, d’annulerl’arrêté du maire d’Ustou accordant le permis de construire a mis fin au conflit après unelongue bataille juridique.

38. En février 1995, la commission supérieure des sites refuse toute implantation de refuge gardésur le site. Mais cette même commission rend un avis opposé en 2000. Une autorisation estaccordée par le ministère de l’Environnement en mai 2001. Des revirements se font sousl’effet de pressions et manipulations politiques fortes. Une demande de subvention euro-péenne avait même été obtenue sans que les communes espagnoles concernées n’aient étéprévenues.

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espaces (zone centrale/zone périphérique) est périlleux. L’intégrité duParc risque de ne pas s’accommoder d’aménagements à outrance sur sapériphérie. Les aménagements en zone périphérique ont indéniablementdes effets sur la zone centrale, par effet de « débordement ».

Nous retrouvons ici le problème de l’appropriation d’un espacecommun déjà évoqué, mais aussi la limite de l’affectation de droitsd’exclusion dans la gestion d’une ressource commune. La propriété pri-vée s’oppose à l’intérêt collectif lorsqu’elle sert les intérêts d’un grouped’usagers au détriment des autres. C’est parfois le cas avec les réglemen-tations des pratiques sportives de pleine nature. Car, derrière les appa-rences (danger d’un site, protection des espèces) les décisions peuventêtre prises pour de simples raisons d’ostracisme, de recherche detranquillité publique ou autres considérations de même type.

Plus généralement, les conflits étudiés posent la question del’ouverture à tous des espaces fragilisés et des espaces protégés. Ilsrenvoient à la fois à la question de la régulation d’un espace d’intérêtpublic et à celle de la dimension sociale, voire éthique, d’un tourismedurable : participation de la population aux projets d’aménagement tou-ristique, émancipation de toutes les couches de la population. Les projetsd’extension et d’interconnexion des stations de ski contribueraient, selonles aménageurs et professionnels du tourisme, à la dynamisation et àl’évolution des populations locales, avec cette idée qu’un tourisme dura-ble ne doit pas être l’option de l’immobilisme mais celle de l’évolutiondans le respect de l’homme et de la nature. Les projets d’aménagementdes sites de pratiques sportives sont aussi présentés comme une volontéd’ouverture et de refus de pratiques élitistes. Mais cela est parfois vécude manière contradictoire par les pratiquants des sports de nature etusagers de l’espace naturel. La production d’une nature aseptisée estainsi dénoncée39. La multiplication d’équipements pour reproduire lasécurité et le confort d’un milieu urbain ne ferait qu’accroître les pres-sions sur le milieu naturel, non seulement par leur présence même, maisaussi par les comportements qu’ils contribuent à façonner. Ainsi se mul-tiplient des comportements de « l’extrême », comme la pratique du skialpin ou du surf des neiges hors piste, en lisière ou dans le parc naturel,

39. « Aménager un milieu pour la pratique d’une activité physique c’est contribuer en grandepartie à son aseptisation. L’exemple des voies vertes françaises et belges est édifiant. Desnormes de fabrication et des règles d’usage sont clairement établies. […] C’est comme unlotissement ou un stade au milieu de la campagne. Mais est-ce mieux qu’une cité au milieud’une ville ? C’est donc bien le plus souvent un schéma urbain posé au milieu de la nature »(L. Dollo, 2004).

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en réaction à un encadrement accru des pratiques des sports de nature,dont les effets négatifs sur le milieu naturel sont souvent importants. Lecas des refuges illustre aussi la question de l’ouverture des espacesprotégés, avec des contradictions au sein même des alpinistes et notam-ment du CAF. D’un côté, on souhaite une montagne pure, sauvage, isoléedes foules touristiques, mais pour son propre confort, on revendique ledroit de l’aménager et de la domestiquer. Enfin, certains dénoncent l’atti-tude de certains acteurs du développement, qui n’hésiteraient pas à fairevaloir le droit des handicapés et autres populations en difficulté pourjustifier des aménagements servant leurs propres intérêts. Les conflitsentre tourisme et conservation se nourrissent ainsi de l’absence de con-sensus sur la définition d’un tourisme durable, dans ses dimensionssociales et éthiques, et sur les recommandations proposées. Ils révèlentégalement le problème de l’accès à un espace d’intérêt public, vécucomme un bien commun, où les usages sont réglementés et où droitprivé et droit public des communes se heurtent parfois.

Au cœur de ces conflits se développe aussi l’idée d’une hiérarchi-sation des menaces qui pèsent sur le milieu naturel, certains allant jusqu’àcomparer les impacts de la construction d’un tunnel, d’une remontéemécanique et de l’équipement d’une falaise pour l’escalade (Charte fédé-rale de l’environnement de la FFME). La question de la définition de laconservation de la biodiversité est sous-jacente. La conservation du milieuet des espèces serait, selon certains, subordonnée à la hiérarchisation deseffets externes négatifs, qui déciderait de ce qui doit être protégé et dudegré de préservation à fixer40. Cela pose en fait le problème complexede l’évaluation des impacts environnementaux et sociaux et de la respon-sabilité des différentes parties prenantes concernées par l’aménagementdes zones de montagne.

Les débats portent également sur les retombées économiques desactivités de loisirs et de sports de nature au niveau local. Les évaluationsdes intérêts économiques confrontés aux intérêts de l’environnement sontrares. Mais surtout, ce qui est mis en avant, c’est l’inégale répartition des

40. Ainsi lit-on : « Certes, des points d’assurance dans une paroi, la purge des cailloux et desblocs instables ou le débroussaillage sont une modification du cadre naturel, toutefois sanscommune mesure avec une batterie de pylônes haute tension. Mais utiliser cet argument“écologiste” pour discréditer une forme de pratique relève de la confusion des genres » ; ouencore : « La rareté d’une espèce est une notion très relative et la protection de l’aigle deBonelli, présent à quelques exemplaires en France, est sans conteste plus urgente (et justifiedes mesures d’interdiction éventuelles) que celle du faucon pèlerin, maintenant bienréimplanté dans notre pays » (Charte fédérale de l’environnement de la FFME).

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gains entre les communes limitrophes, qui profitent des retombéeséconomiques des activités touristiques et des activités de plein air et desports de nature (via l’hébergement, la restauration, les sociétés commer-ciales d’activités sportives et de découverte) et celles, situées en zonecentrale, qui supportent les contraintes liées au maintien des sites dansun état naturel attrayant pour la pratique du tourisme ou du sport. Laquestion de la valeur de la nature demeure récurrente, sans qu’il y aitpour autant de consensus sur ce qui doit être évalué et privilégié, de lavaleur économique et de la valeur éthique.

Enfin, ces conflits révèlent la difficulté à définir des projets dedéveloppement territorial durable lorsque les enjeux dépassent les seulescommunes (cas des projets d’extension des stations de ski par exemple).Les orientations données à l’échelle nationale, voire européenne (faireface à la concurrence étrangère, dynamiser un secteur touristique porteur)sont parfois éloignées des aspirations réelles des populations locales. Celasoulève la question du périmètre pertinent pour la gestion des espacesprotégés. La question du rapport entre bénéfices locaux des projets dedéveloppement et externalités positives globales de la conservation de labiodiversité se pose par ailleurs. Il est difficile, à l’échelon local, de faireapparaître les bénéfices tangibles de la conservation de la biodiversitéalors que les interdictions ou restrictions d’usages sont vécues localement.Des compensations sont alors préconisées, soit pour faire accepter desprojets touristiques (compensation environnementale en cas d’atteinte àl’intégrité du Parc), soit pour soutenir des programmes de préservationdes espèces (indemnisation des bergers, aménagement d’autres voiesd’escalades dans des sites moins fragiles). Des projets participatifs sontégalement invoqués pour atteindre l’équilibre entre conservation et tourisme.Mais il s’agit là encore de mesures ponctuelles, le règlement des conflitsd’usages relevant davantage de procédures juridiques.

CONCLUSION

Ce chapitre avait pour objectif de renseigner la dialectique conservation/tourisme en partant de l’étude de conflits d’usages dans un parc nationalde montagne. Il s’agissait d’identifier les enjeux entourant la doubledynamique de protection accrue et de développement touristique desespaces de montagne, sachant que les conflits ont leur propre dynamique.

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Les enjeux qui sous-tendent les différents conflits étudiés donnentle cadre contextuel dans lequel la dialectique conservation/tourisme ausein d’un espace protégé se développe. Celle-ci se nourrit d’une incerti-tude forte sur le sens à donner tant à la conservation de la biodiversitéqu’au tourisme durable. Il n’y a pas de consensus sur les définitions etsurtout, sur les recommandations fournies ou à produire. La dialectiqueconservation/tourisme est également influencée par une confusion entrevaleur d’usage, valeur d’existence et valeur marchande de la biodiversité.La question du choix entre conservation et tourisme (ou encore entreconservation, tourisme et pastoralisme) apparaît comme celle du poidsrelatif des différents usagers dans la décision et celle des compensationsà verser. La dialectique se nourrit aussi de l’ambivalence dans laquellele Parc national des Pyrénées (l’institution) se meut entre sa fonctionpremière de conservation et la nécessité de soutenir le développementlocal. Le Parc se félicite d’être le PNN français le plus fréquenté, avec1,5 millions de visiteurs. Il affiche ainsi ses propres retombées écono-miques, grâce notamment à la fréquentation estivale. Comment peut-il,dans ce cas, ne pas soutenir d’autres formes de retombées économiques ?La dialectique est soumise, par ailleurs, aux jeux de pouvoir et auxvelléités d’emprise territoriale d’acteurs locaux qui cherchent à s’affran-chir d’une régulation étatique, jugée parfois trop forte en matière depolitique de conservation. Elle sert en retour les intérêts catégoriels (syn-dicats professionnels, associations de défense de la nature) et la défensede politiques sectorielles. Enfin, la dialectique conservation/tourisme estcontrainte par les systèmes de droits d’accès et de propriété (servitudes,réglementation locale, législation) qui régissent l’espace commun qu’estle parc. Droit privé et droit public des collectivités publiques ont tendanceici à se heurter.

Les cas de conflits étudiés montrent que la concertation et la miseen place d’une gestion collective peuvent aider à réconcilier conservationet tourisme, même si l’action collective est précédée de la manifestationde tensions et de conflits ouverts. Les arrangements institutionnels conclusà l’issue des conflits font néanmoins apparaître une certaine primauté desréglementations locales et des règlements juridiques. De son côté, le PNPmultiplie aujourd’hui les actions de concertation. La question qui s’ensuitest alors de savoir si les parcs nationaux et plus généralement les espacesprotégés, objets de conflits, peuvent aussi être des espaces de concertationet des outils de négociation de projets de développement territorial durableà l’échelle des communautés avoisinantes. Cette question appelle une

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étude approfondie sur les arrangements institutionnels et leurs bénéficiai-res de même que sur la fonction de production de règles des conflitsservant alors de vecteur de représentation et d’analyse.

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77Chapitre

La Charte européenne du tourisme durable dans le Parc national et réserve de biosphère des Cévennes (France)La rencontre entre un concept et un territoire

Roland JaffuelParc national des Cévennes

Marylène PinCévennes Écotourisme

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Résumé

Le Parc national des Cévennes, signataire de la Charte européenne dutourisme durable dans les espaces protégés en 2002, est le premier parcen Europe à s’être lancé dans la mise en œuvre concrète du volet 2 decette charte, qui offre la possibilité aux espaces protégés de contrac-tualiser directement avec les entreprises touristiques présentes sur leurterritoire.

Après plus de deux ans d’expérimentation qui ont conduit à l’élaborationd’un guide méthodologique définissant de nouveaux paramètres dansl’organisation et le travail en partenariat, et au regard des premiersrésultats, cet article a pour objectif de présenter cette démarche nova-trice tout en s’interrogeant sur les perspectives d’évolution de ce concept.

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Le Parc national des Cévennes présente l’originalité d’être le seul parcnational français à être habité dans sa zone centrale protégée. De cetteparticularité découle la nécessité de concevoir la préservation de l’espaceet des milieux naturels tout en considérant le maintien et le développementdes activités économiques et sociales des Cévennes.

Entre « consommation » d’espace naturel et activité indispensable àla vie et à la préservation du patrimoine du territoire, et avec plus d’unmillion de visiteurs par an, le Parc national des Cévennes s’est trouvéconfronté à la problématique du développement touristique et s’est inter-rogé sur le « modèle touristique » à soutenir. Devant la concurrence accruedes destinations touristiques nationales et internationales – marquée parl’homogénéité des plans de communication sur les concepts de qualité,d’accueil, d’authenticité, de paysages, d’environnement –, devant la mul-tiplication et le manque de lisibilité des signes de qualité et pour ne pascourir le risque de banaliser sa propre stratégie touristique, le Parc natio-nal des Cévennes a fait le pari audacieux de se lancer dans l’applicationde la Charte européenne du tourisme durable.

LE PARC NATIONAL DES CÉVENNES : UN TERRITOIRE PROTÉGÉ ET HABITÉ

1.1. DESCRIPTION DU TERRITOIRE

Le Parc national des Cévennes a été créé par le décret no 70-777 du2 septembre 1970. Classé réserve mondiale de biosphère par l’UNESCOen 1985, le territoire du Parc compte 229 726 ha classés en zone péri-phérique et 91 279 ha classés en zone centrale dont 58 000 ha de forêt.Le nombre d’habitants est de 41 600, dont 600 en zone centrale. Seulparc national français de métropole implanté en moyenne montagne, ilest situé au sud du massif Central, à la charnière des influences méditer-ranéennes, montagnarde et océanique qui ont produit un paysage trèsdiversifié, fortement marqué par le pastoralisme, alternant plateaux etgorges calcaires, profondes vallées schisteuses et massifs primaires gra-nitiques. La déprise agricole de la première moitié du XXe siècle a favo-risé le retour de la forêt et une remontée biologique remarquable. En zonecentrale, il y a 2 500 espèces de plantes à fleurs et la faune des vertébréscompte plus de 400 espèces.

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1.2. ENTRE PRÉSERVATION ET DÉVELOPPEMENT : L’ENJEU DU TOURISME

Les Parcs nationaux français présentent la particularité d’avoir autour dela zone protégée, une zone périphérique, notamment destinée à recevoirdes aménagements spécifiques en termes d’accueil du public. En Céven-nes, la zone protégée compte 600 habitants. Cette particularité a contraintle Parc à adapter sa politique de protection à un territoire vivant qu’ilétait essentiel d’accompagner dans un développement harmonieux qui,dans les années 1990, a été qualifié de durable. Progressivement, le Parca étendu son action sur l’ensemble de l’espace Parc, zone centrale etpériphérique, sous la forme de contrats passés avec les collectivités locales.

Entre aménagements paysagers, conseils architecturaux et structu-ration de réseaux de randonnée, la contractualisation volontaire est venuecompléter les dispositifs réglementaires appliqués à la zone centrale.

Avec plus d’un million de visiteurs par an, et un chiffre d’affairesde l’hébergement marchand estimé à 80 millions d’euros, le tourisme estdevenu la première activité économique des Cévennes, devant l’agricul-ture. C’est donc un enjeu très important pour ce territoire, et plus parti-culièrement pour le Parc national au regard de ses objectifs de protection.La maîtrise des flux de fréquentation des espaces naturels n’est plus leseul enjeu : le territoire doit aussi faire face à une concurrence de plusen plus forte de nombreuses destinations touristiques rurales en Franceet dans les pays de l’Europe de l’Est qui arrivent sur ce marché.

C’est bien dans ce contexte particulier que le concept de tourismedurable prend toute son importance, en proposant une approche globalede cette activité, intégrant les aspects économiques aussi bien que lasensibilité des milieux naturels et l’amélioration des conditions de viedes populations qui sont les garantes de cette durabilité.

Les pressions de toute nature que subissent les populations urbainesles incitent à s’échapper régulièrement vers le monde rural et les espacesnaturels. Alors s’exerce sur ce monde rural une pression foncière qui tendà augmenter le nombre de résidences secondaires au détriment des habi-tations principales. C’est le schéma qu’il faut redouter et pour éviter cela,il est impératif de conforter l’économie du territoire à travers l’activitéprincipale qu’est le tourisme, mais en y associant aussi les autres activi-tés, notamment l’agriculture. Donner de bonnes raisons aux entreprises

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touristiques des Cévennes de continuer et d’améliorer leurs activités etde participer à la protection de leur patrimoine et de son originalité, voilàun enjeu considérable pour les Cévennes et leur Parc national.

LA CHARTE EUROPÉENNE DU TOURISME DURABLE DANS LES ESPACES PROTÉGÉS

2.1. UN DOCUMENT CADRE AU SERVICE DES ESPACES PROTÉGÉS

Le modèle de « développement durable » a été légitimé en 1992 lors duSommet de la Terre à Rio de Janeiro. En 1993, face à l’augmentation dela fréquentation touristique dans les espaces protégés, la Fédération desParcs naturels européens a fait réaliser une étude intitulée Loving Themto Death ?, titre choc traduit en français par Passion fatale). Elle préco-nisait l’élaboration d’une charte européenne pour la pratique d’un tou-risme durable dans les espaces protégés. La rédaction de cette « Charteeuropéenne du tourisme durable dans les espaces protégés » a été confiéepar EUROPARC à la Fédération des Parcs naturels régionaux de France.Elle a été élaborée entre 1995 et 1998 avec l’appui d’un comité de pilotageeuropéen représentant des organismes du tourisme et de l’environnement.Dix parcs pilotes européens, dont le Parc national des Cévennes, ontégalement participé à ces travaux. La Charte européenne du tourismedurable a été présentée officiellement le 8 avril 1999 à Lille.

L’objectif de cette charte est de répondre aux enjeux des territoiresprotégés en offrant la possibilité de concilier tourisme et protection del’environnement, tout en œuvrant pour un tourisme respectueux sur lelong terme des ressources naturelles, culturelles et sociales de l’espaceprotégé, porté par les acteurs de l’espace protégé et facteur de dévelop-pement économique et d’épanouissement pour les personnes qui vivent,travaillent ou séjournent dans l’espace protégé.

Structurée en douze principes et trois volets, la Charte reprend àson compte les principes du développement durable appliqués au tou-risme dans les espaces protégés et déclinés dans les trois domaines :environnemental, socioculturel et économique. Elle a comme stratégieglobale l’implication de tous les acteurs du tourisme dans un cadre mul-tipartenarial favorisant le partage des responsabilités. Les 12 principes dela Charte se déclinent ainsi :

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1. Reconnaître que les parcs d’Europe font partie de notre patri-moine, et qu’ils doivent être préservés pour les générationsprésentes et futures.

2. Développer et gérer le tourisme de façon durable tout enconsidérant les besoins de l’environnement, des résidents, desopérateurs touristiques et des visiteurs.

3. Faire participer tous ceux qui sont directement concernés par letourisme.

4. Rédiger et mettre en place une stratégie et un plan d’action pourle tourisme durable.

5. Offrir aux visiteurs une expérience de haute qualité pendant leurvisite.

6. Créer des produits touristiques spécifiques pour la découvertede l’espace protégé.

7. Informer efficacement les visiteurs de la valeur spécifique duterritoire.

8. Diffuser la connaissance de l’espace protégé parmi les opéra-teurs touristiques.

9. Faire en sorte que le tourisme n’affecte pas la qualité de vie desrésidents.

10. Protéger et valoriser le patrimoine naturel et culturel, aubénéfice et grâce au tourisme.

11. Apporter des bénéfices à l’économie locale grâce au tourisme.

12. Gérer les flux touristiques de manière à réduire les impactsnégatifs.

Les trois volets sont ainsi formulés :

1. Le premier volet, applicable aux gestionnaires des espacesprotégés, engage les Parcs naturels volontaires sur une stratégieet un programme d’action de cinq ans en application de cesprincipes. Le certificat décerné par EUROPARC est donc valablepour une durée de cinq ans.

2. Le deuxième volet, applicable aux entreprises touristiques volon-taires du territoire, engage ces dernières sur une stratégie et unplan d’action de trois ans.

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3. Le troisième volet est applicable aux voyagistes et autocaristesqui organisent des voyages dans le territoire du Parc sans forcé-ment y résider. Les conditions de signature de la Charte par cettetroisième catégorie d’acteurs du tourisme ne sont pas encoreprécisées à ce jour.

2.2. UN SYSTÈME « GAGNANT/GAGNANT » POUR LE PARC ET LES ENTREPRISES

La Charte présente des avantages combinés et réciproques tant pourl’espace protégé que les entreprises touristiques.

Entre « consommation » d’espace naturel et activité indispensable àla vie et à la préservation du patrimoine du territoire, la Charte euro-péenne du tourisme durable propose un modèle de développement diffé-rent par une approche globale de l’activité touristique. L’espace naturelretire différents avantages de la mise en œuvre de la Charte. En effet,celle-ci permet notamment de structurer les partenaires touristiques pri-vilégiés de l’espace naturel, qui deviennent des « ambassadeurs » desvaleurs Parc auprès des visiteurs, d’appliquer concrètement le concept dedéveloppement durable, de construire une image positive pour les parte-naires impliqués, dans la mesure où cette démarche est pilote au niveaueuropéen, et d’initier une véritable démarche de progrès sur la globalitédu territoire.

Les espaces naturels protégés sont perçus aujourd’hui par lesclientèles européennes comme des destinations touristiques de grandequalité environnementale, d’authenticité et de convivialité. Ils repré-sentent un atout considérable pour les entreprises touristiques qui, encontrepartie, se doivent de participer à la préservation et à la valorisationdu patrimoine culturel et naturel de ces territoires.

La qualification de l’offre touristique d’un territoire devient doncun objectif majeur pour tous les acteurs du tourisme. La reconnaissancede cette qualité « tourisme durable » dans les entreprises touristiques estun enjeu fort pour toutes les structures professionnelles qui font desefforts dans ce domaine. La Charte permet cette reconnaissance aussibien au niveau européen qu’au niveau de l’espace protégé. Elle n’esttoutefois pas un label qui consacrerait un niveau de qualité homogène.C’est avant tout la reconnaissance d’une réelle démarche de progrès affi-chée dans un programme d’action sur trois ans, dans les trois domaines del’environnement, du socioculturel et de l’économie.

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Plus concrètement, les principaux avantages pour l’entreprise tou-ristique peuvent de résumer ainsi :

• Être distingué au niveau européen et faire reconnaître sesengagements, utiliser l’image et le logo du Parc.

• Intégrer un réseau et profiter de sa dynamique, mutualiser etcapitaliser son expérience au moyen de rencontres, d’échangeset de formations collectives.

• Bénéficier d’un accompagnement technique et financier indi-vidualisé dans le cadre de la démarche de progrès, avoir undiagnostic global de son entreprise.

• Améliorer la qualité de son offre : en la qualifiant, en s’insérantmieux dans l’organisation du territoire, en communiquant sur leParc.

• Développer de nouvelles opportunités commerciales : en ciblantles clientèles et en observant leurs évolutions, en développant uneoffre hors saison, en travaillant en partenariat sur du montage deproduits.

• Rationaliser ses charges : en optimisant la gestion de l’eau, del’énergie, en adoptant des techniques de gestion environnementale.

LA MISE EN APPLICATION DE LA CHARTE EUROPÉENNE DU TOURISME DURABLE DANS LE PARC NATIONAL DES CÉVENNES

3.1. L’ENGAGEMENT DU PARC

Le Parc national des Cévennes a inscrit la mise en œuvre de cette charteà son programme d’aménagement 2000-2006, dans lequel est édicté enintroduction :

L’orientation stratégique no 7 consacre l’engagement du Parc national desCévennes dans le développement d’un tourisme de qualité durable sur labase d’un partenariat constructif avec les acteurs du tourisme (institutionnels,entreprises, collectivités locales).

Le grand enjeu du Parc dans ce domaine est de faire en sorte que cetourisme soit :

* porté par les acteurs cévenols du tourisme,

* porteur de bien-être matériel et spirituel pour l’ensemble des populationsurbaines et rurales,

* respectueux à long terme des grands équilibres écologiques.

3.

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Une Charte de bon usage du territoire dans le respect des hommes et del’environnement.

Ces trois critères constituent les validations indispensables pour la réussitedurable des projets de développement touristique des Cévennes. Ils sontinscrits dans la Charte européenne du tourisme durable dans les espacesprotégés.

L’application de cette toute nouvelle Charte sera le fondement de notreaction, le Parc national des Cévennes qui a participé à son élaboration lasignera prochainement et pourra ainsi faire bénéficier les entreprises céve-noles du tourisme de cette démarche qualifiante (Programme d’aménagementdu Parc national des Cévennes 2000-2006).

3.1.1. Un forum pour inf ormer et éc hanger avec les partenaires du territoire

Le 6 décembre 2001, le Parc national des Cévennes a organisé un forumréunissant les partenaires institutionnels et professionnels de l’espaceParc pour une journée d’information et d’échange sur le tourisme durableet la Charte européenne du tourisme durable.

Les comités départementaux du tourisme, les chambres consulaires,les élus locaux, les techniciens et animateurs territoriaux, les offices dutourisme, les administrations, les établissements d’enseignement et derecherche dans le tourisme, ainsi que les entreprises touristiques (héber-geurs, accompagnateurs, gestionnaires de sites touristiques, etc.) desCévennes ont été invités. Quelque 230 personnes ont répondu présent etmanifesté un réel intérêt pour cette démarche de qualification à la foisdu territoire et des entreprises touristiques qui y travaillent. Les orga-nismes en charge du tourisme en Cévennes ont assuré le Parc nationaldes Cévennes de leur soutien à la mise en œuvre de ce programme.

3.1.2. La signature de la Charte par le P arc national des Cévennes

En mars 2002, le Parc national des Cévennes a présenté officiellementsa candidature à EUROPARC. En cela, il s’est engagé dans un pro-gramme d’actions « tourisme durable » pour une période de 5 ans, dansle cadre de son programme d’aménagement 2000-2006. Un rapportprécisant les conditions d’élaboration de ce programme et les moyens

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envisagés pour son exécution a été présenté à EUROPARC. En juin 2002,un expert européen commandité par EUROPARC a fait une expertise dela candidature du Parc lors d’une visite de trois jours.

Enfin, la candidature du Parc national des Cévennes a été agréée etconfirmée par EUROPARC en août et la Charte signée le 5 octobre 2002à Llandudno, au Pays de Galles, lors de la conférence annuelle.

3.2. L’ENGAGEMENT DU PARC AU TITRE DU VOLET I DE LA CHARTE

Les actions programmées par le Parc national des Cévennes sont préciséesdans son programme d’aménagement 2000-2006, plus précisément dansles orientations stratégiques nos 6 et 7. Nous reprenons ici les principalesopérations engagées par le Parc au titre du volet I et contenues dans leplan d’action.

3.2.1. Les aménagements touristiques

Dans le cadre de la programmation du parc, trois aménagementstouristiques ont été développés :

1. La structuration du réseau de sentiers de petite randonnée a étéengagée en 1994 en partenariat avec les intercommunalités dansun objectif de régulation des flux de fréquentation en matière depetite randonnée. Ainsi, seize entités géographiques de la tailled’un canton sont traitées, faisant l’objet d’autant de topoguidesédités par les intercommunalités. Enfin, une vingtaine de topo-guides seront disponibles d’ici trois ou quatre ans.

2. La requalification de la station de ski du Mas de la Barque enstation de pleine nature hiver / été est en cours avec le démontagedes installations de ski alpin partiellement fait, la démolition desbâtiments vétustes et la construction des nouveaux gîtes achevée.Un comité de pilotage associant les vallées a été mis en placepour favoriser une stratégie touristique complémentaire vallées-station.

3. Le système des écomusées du Parc propose aux visiteurs l’inter-prétation des principaux massifs le constituant en mettant à leurdisposition plusieurs sites éclatés sur le territoire, mêlant muséo-graphie, sentiers d’interprétation et sites patrimoniaux identi-taires. L’aménagement de nouveaux sites et sentiers se poursuit.

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3.2.2. L’animation et l’inf ormation touristiques

Celles-ci sont réalisées par le biais d’un programme de plus de 400animations destinées à l’ensemble des populations locale et touristique.Festival nature est reconduit chaque année associant de nombreusesstructures du territoire (associations, foyers ruraux, administrations,établissements scolaires, érudits et artistes locaux). En outre, plus de25 centres d’information sont ouverts au public, la plupart gérés pardes offices du tourisme partenaires du Parc et intégrés au dispositifd’information du Parc.

3.2.3. Les partenariats de territoire

Le Parc développe plus fortement ses relations avec les organismes encharge du tourisme sur le territoire. Des conventions sont passées ou encours de rédaction pour engager des actions mieux coordonnées en faveurd’un tourisme durable avec les Chambres de commerce et d’industrie, lescomités départementaux du tourisme et les pôles touristiques. Plusieursorganismes ou collectivités sont associés au Parc techniquement ou finan-cièrement à la mise en œuvre de la Charte européenne du tourisme durable,comme les agences de l’eau, l’Agence de l’environnement et de la maî-trise de l’énergie (ADEME), la Délégation à l’aménagement du territoireet à l’action régionale (DATAR), la Région, les départements…

3.3. L’ENGAGEMENT DU PARC AU TITRE DU VOLET II DE LA CHARTE

3.3.1. La mise en réseau des entreprises touristiques et la création de Cévennes Écotourisme

Au-delà des gîtes Panda, des centres d’information partenaires du Parcet des sites touristiques des écomusées, de nombreuses entreprises tou-ristiques (hébergeurs, professionnels d’activités de pleine nature, gestion-naires de sites touristiques) sont prêtes à s’engager dans une démarchede progrès au regard des principes de la Charte.

Afin de faciliter la relation avec les entreprises touristiques duterritoire, le Parc a suscité la création d’une association, Cévennes Éco-tourisme, regroupant les entreprises touristiques qui s’engageront à signerla Charte auprès du Parc. Une mise en réseau formelle de ces entreprisesavec des moyens de fonctionnement appropriés, notamment un posted’animateur, permettra d’assister l’entrée des professionnels dans la

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Charte. L’objectif vise à intégrer une cinquantaine de professionnels dutourisme à la Charte pendant la durée du programme d’aménagement.Cette association est l’interface indispensable entre le Parc et chaquecandidat à la signature de la Charte. Des financements publics sont mobi-lisés par le Parc pour le fonctionnement de l’association et notamment lerecrutement d’une chargée de mission permanente. Cévennes Écotourismecompte aujourd’hui plus de 50 entreprises touristiques parmi lesquellesse retrouvent des hébergeurs et des professionnels de sports et loisirs depleine nature, des accompagnateurs en montagne, des professionnels dela sensibilisation et de l’éducation à l’environnement ainsi que des ges-tionnaires de sites naturels et culturels. Réparties sur l’ensemble del’espace Parc, ces entreprises représentent un poids économique de plusde 5 millions d’euros (chiffres d’affaires cumulés), 140 emplois en équi-valent temps plein, 842 lits marchands et 296 places de camping et offrentplus d’une vingtaine d’activités de pleine nature.

3.3.2. Le rôle et les missions de l’association Cév ennes Écotourisme

Les cinq missions se définissent ainsi :

1. Accompagner les entreprises touristiques pour présenter leurcandidature à la signature de la Charte auprès du Parc.

2. Assurer pour le compte du Parc national des Cévennes des pres-tations d’organisation, de maîtrise d’ouvrage dans le cadre deprogrammes relevant de l’application de la Charte, notammentdes formations, inventaires, enquêtes de fréquentation qualitativesou quantitatives, équipement, documentation des hébergementslabellisés (gîtes Panda).

3. Mettre au point pour le compte de ses adhérents des outils pra-tiques en application des principes du développement durabledans les domaines de l’environnement, du social et de l’économietouristique.

4. Monter des produits touristiques ciblant des clientèles sensiblesà une qualité « tourisme durable ».

5. Représenter et assurer la promotion de ses adhérents sur lesfoires et salons.

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3.3.3. La procédure d’agrément des entreprises touristiques

La définition d’une procédure d’agrément des entreprises touristiques aété faite en 2002 par l’association Inter-Parcs Massif Central (IPAMAC)pour le compte des parcs naturels du massif Central. Pilotée par la chargéde mission d’IPAMAC, Sandrine Charnay, avec l’appui d’un bureaud’étude externe (Cabinet MaHoc) et la participation active des chargésde mission en tourisme des parcs d’IPAMAC, ces travaux ont permis dedisposer d’une méthodologie que le Parc national des Cévennes a pré-sentée à EUROPARC début janvier 2003 en vue de sa validation auniveau européen. Après un accord formel d’EUROPARC en 2004, c’estau début de 2005 que la fédération européenne a validé le principe del’utilisation de cette procédure au titre de la Charte par les parcs qui lesouhaitent. Le Parc national des Cévennes est le premier parc européensignataire de la Charte à s’être engagé dans l’application du volet 2concernant les entreprises touristiques de son territoire. À ce titre, il faitfigure de parc pilote.

La procédure d’agrément des entreprises comprend cinq phasesprincipales :

1. un audit diagnostique de l’entreprise par un technicien (la char-gée de mission de Cévennes Écotourisme) ;

2. l’examen du rapport d’audit par un comité technique pluridisci-plinaire composé essentiellement de techniciens (Agence del’eau, ADEME, CCI, Chambres d’agriculture, service départe-mental architecture et patrimoine, CDT), qui donne des préconi-sations aux entreprises dans l’objectif d’améliorations dans lestrois domaines : environnement, socioculturel et économie ;

3. la rédaction d’une stratégie et d’un plan d’action sur trois ans parl’entreprise ;

4. la validation de la candidature de l’entreprise par une commis-sion d’agrément (en l’occurrence la commission du tourisme etde l’information du Parc) ;

5. la signature par le Parc et l’entreprise d’un contrat précisant leursengagements respectifs.

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3.3.4. L’accompagnement des entreprises touristiques

Il y a à la fois un accompagnement individuel et un accompagnementcollectif.

L’accompagnement individuel

Chaque entreprise bénéficie d’une assistance à plusieurs niveaux, àsavoir : la présentation de sa candidature par la chargée de mission deCévennes Écotourisme et notamment la rédaction de son plan d’actionsur trois ans ; l’amélioration de ses performances, notamment dans lesdomaines de la gestion des déchets, des économies d’énergie, de l’utili-sation de produits écologiques, de l’utilisation des espaces naturels ; lemontage de produits touristiques spécifiques ; enfin, la promotion de sonentreprise.

L’accompagnement collectif

À travers le réseau de Cévennes Écotourisme, des accompagnementscollectifs seront développés dans lesquels le Parc sera partie prenante.Cela prendra la forme de formations afin de permettre la connaissance dupatrimoine cévenol, la connaissance de clientèles spécifiques aux espacesprotégés et sensibles aux principes du tourisme durable, la réalisationd’inventaires et le travail d’interprétation, base de toute démarche de sen-sibilisation auprès des clientèles, la représentation et la promotion desmembres du réseau dans les foires et salons, et finalement la mobilisationde financements publics : pour des améliorations environnementales, desaméliorations architecturales, des actions d’animation et de formation.

CONCLUSIONS

4.1. LES PREMIERS RÉSULTATS

4.1.1. Au niveau européen

En 2004, 23 parcs naturels sont signataires de la Charte européenne dutourisme durable. La Commission Européenne a reconnu ce texte commedémarche de qualité. La section française d’EUROPARC a été créée auprintemps 2005. Le Parc national des Cévennes, premier Parc européen às’être lancé dans l’application du volet 2 de la Charte, est suivi par le Parcnaturel régional du Pilat (France), qui s’appuie sur la même méthodologie.

4.

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4.1.2. En Cévennes

Depuis mars 2003, il y a eu le lancement de la démarche en Cévennes :treize entreprises sont signataires, sept autres en cours d’agrément et unequinzaine d’entreprises sont candidates à la signature. À ce jour, le réseaude Cévennes Écotourisme compte cinquante et une entreprises adhérentes.

Le comité technique pluridisciplinaire s’est réuni trois fois pourexaminer les rapports d’audit des vingt premières entreprises, la com-mission du tourisme et de l’information du Parc s’est prononcée sur lesplans d’action des treize entreprises maintenant signataires. Le Parc etCévennes Écotourisme ont participé à plusieurs échanges d’expériencesorganisés sur le thème du tourisme durable1.

PERSPECTIVES D’ÉVOLUTION

5.1. MAINTENIR ET ENCOURAGER LA DYNAMIQUE RÉSEAU

Ce programme qui a encore une forte connotation expérimentale, doits’appuyer sur un réseau des entreprises touristiques volontaires. Ce sonttoutes les actions d’accompagnement technique des entreprises, de pro-motion de la démarche de progrès et de commercialisation des produitstouristiques qui dépendent de cette dynamique de réseau. L’originalité dela démarche consiste à la construction d’une relation de confiance entreles entreprises et le Parc. Grâce à un suivi permanent du réseau, donc deCévennes Écotourisme, cette originalité ne devrait pas perdre de sa force ;elle ne doit pas céder la place au laxisme que pourrait laisser supposerl’absence de contrôles rigoureux et coûteux. Et surtout, le réseau permet,par un système d’échanges permanents, de transférer les expériences etavancées de chaque entreprise vers les autres.

1. Séminaire EUROPARC en mars 2004 (Vilm, Allemagne), Plusieurs séminaires des Parcsnationaux français (2003-2004-2005), Accueil du Parc de la Garrotxa (Espagne), signatairede la Charte (octobre 2004).Séminaire tourisme durable de la Fédération des Parcs naturels régionaux de France en mars2005 (Parc du Vexin, France). Séminaire tourisme durable coorganisé par le Parc, ODITFrance, Cévennes Écotourisme et la communauté de communes du Viganais en juin 2005.

5.

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5.2. DÉGAGER LES MOYENS SUFFISANT À L’ACCOMPAGNEMENT ET AU TRANSFERT D’EXPÉRIENCES

La pérennisation et le renforcement du poste d’animation de CévennesÉcotourisme est le principal enjeu à moyen et long termes. Cette démarchede progrès crée de nombreuses attentes de la part des entreprises quiapprécient cette approche individualisée. Elles attendent beaucoup del’accompagnement technique et financier en aval de la signature de laCharte.

Au-delà de l’accompagnement des entreprises, la coordination desactions de communication, de promotion et de commercialisation estindispensable avec les autres organismes en charge du tourisme sur leterritoire. Le réseau de Cévennes Écotourisme est maintenant un acteurincontournable du paysage touristique cévenol. Ce réseau est aussi uneréférence dans l’expérimentation de cette démarche de progrès. Cetteexpérience gagnera à être diffusée sur d’autres territoires et se nourrirad’être confrontée à d’autres expériences.

5.3. RENFORCER LES PARTENARIATS DE TERRITOIRE

Si le Parc national des Cévennes n’a pas encore acquis une forte légitimitésuite à son implication dans le développement touristique, il est mainte-nant reconnu comme acteur incontournable dans ce domaine. La qualitéde son image dans la double problématique de protection de la nature etde développement fait de lui un partenaire susceptible de valoriser letourisme cévenol. Il est donc du devoir du Parc de répondre à l’attentede ses partenaires institutionnels et territoriaux. C’est aussi à long termeun élément fondamental de la stratégie de tourisme durable du Parcd’impliquer ces partenaires et de faire en sorte qu’ils s’approprient cettequalification des prestations touristiques de la destination touristiqueCévennes. Cévennes Écotourisme ne peut pas non plus rester à l’écartdes autres groupements œuvrant dans ce domaine. Les synergies, com-plémentarités de compétence, économies d’échelle font partie des straté-gies de l’association, qui s’est déjà engagée dans des partenariats avecd’autres associations thématiques et de promotion du tourisme, dans unobjectif de qualification de l’offre touristique (programme en cours avecl’Office du tourisme de Florac et les associations Chemins de la Châtaigneet Chemin de Stevenson).

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BIBLIOGRAPHIE

RAPPORTS / T EXTES

DESCHAMPS, L. (2003). Guide méthodologique pour les entreprises touristiques,MaHoc Consultants, IPAMAC.

EUROPARC FEDERATION (2001a). La Charte européenne du tourisme dura-ble dans les espaces protégés, texte officiel, Grafenau (Allemagne),EUROPARC.

EUROPARC FEDERATION (2001b). Loving Them to Death ? SustainableTourism in Europe’s Nature and National Park, Grafenau (Allemagne),EUROPARC.

JAFFUEL, R. (dir.) (2002). Le tourisme durable dans le Parc national desCévennes, Les Actes du Forum, Éditions Parc national des Cévennes.

PARC NATIONAL DES CÉVENNES (2002). Dossier de candidature à laCharte européenne du tourisme durable dans les espaces protégés, Parcnational des Cévennes.

SITES INTERNET

Cévennes Écotourisme : <www.cevennes-ecotourisme.com>.

EUROPARC : <www.europarc.org>.

Fédération des Parcs naturels régionaux de France : <www.parcs-naturels-regionaux.tm.fr>.

Parc national des Cévennes : <www.cevennes-parcnational.fr>.

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A

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88Chapitre

Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristiqueLe cas des parcs nationaux au Nunavik1

Marie Lequin , UQTR Ph. D. en études urbaines, professeure au Département des sciences du loisir et de la communication sociale, à l’Université du Québec à Trois-Rivières

Isabelle Cloquet , UQTR Maîtrise en loisir, culture et tourisme à l’Université du Québec à Trois-Rivières et licenciée en tourisme à l’Université Libre de Bruxelles

1. Cette recherche a été possible grâce à une subvention de la Fondation québécoise de larecherche sur la société et la culture (FQRSC).

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Résumé

La délégation aux institutions du Nunavik de compétences dans la miseen tourisme des parcs en création sur ce territoire nordique incite àréfléchir sur les conditions d’efficacité d’une gouvernance locale chargéede structurer l’offre touristique d’une région, où les questions relativesà la protection de l’environnement et au développement socioéconomiquese posent avec une acuité particulière. C’est dans ce cadre que s’insèrela présente recherche, laquelle s’est intéressée à l’identification de fac-teurs sociopolitiques susceptibles d’influer sur l’efficacité du développe-ment de l’offre touristique au Nunavik et la gestion de cette offre selonune perspective écotouristique.

Notre cadre de référence repose sur le modèle de gouvernance en éco-tourisme de M. Lequin (2001) et un courant théorique qui met de l’avantle rôle des facteurs sociologiques dans l’efficacité du développementtouristique d’un territoire.

L’étude a permis d’identifier cinq groupes de facteurs : la structure de lapopulation et l’histoire politique, économique et sociale locale ; la pré-sence de valeurs favorisant ou non l’entrepreneuriat en tourisme ; lesoutien de la population locale ; l’engagement et le dynamisme desacteurs locaux ; enfin, l’organisation des acteurs du développementtouristique et leur mise en réseau.

La confrontation de ces facteurs avec les dimensions d’une gouvernanceparticipative en écotourisme tend à faire ressortir les influences poten-tielles de chacun des facteurs sur l’efficacité d’une gouvernance sur unterritoire.

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Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique 231

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Tiré de : L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, Christiane Gagnon et Serge Gagnon (dir.), �ISBN 2-7605-1430-7 • D1430N

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Ce chapitre présente une analyse de l’écotourisme dans un contexte dedéveloppement communautaire en milieu autochtone, en prenant commeétude empirique la création de parcs nationaux dans la région du Nunavik.De façon plus précise, l’objectif général visé est d’identifier les facteurssociopolitiques qui déterminent le caractère de gouvernance de l’offreécotouristique lors de la mise en valeur des parcs nationaux actuellementen création au Nunavik.

L’écotourisme, tel que défini par plusieurs auteurs, dont la Sociétéinternationale de l’écotourisme (TIES), se veut une forme de voyageresponsable à destination d’espaces naturels relativement peu perturbés,qui protège l’environnement et contribue à améliorer le bien-être despopulations locales. On peut toutefois se demander dans quelles circons-tances l’écotourisme demeure une solution responsable lorsque l’on doitprévoir la construction d’infrastructures souvent très polluantes telles queroutes, aéroports ou hébergements nécessaires pour accueillir des visi-teurs à la recherche d’expériences uniques dans des parcs nationaux. Àla lumière des différents écrits dans ce domaine, il en ressort commeessentiel d’exercer un « contrôle » sur le développement de l’écotourismeen adoptant une structuration de la gouvernance de l’offre écotouristiqueappropriée au contexte territorial.

La délégation de compétences aux institutions du Nunavik pour lamise en tourisme des parcs nationaux sur ce territoire nordique incite àréfléchir sur la structuration des éléments d’une gouvernance locale, làoù l’équilibre entre les questions relatives à la protection de l’environne-ment et au développement socioéconomique se posent avec une acuitéparticulière.

Dans un premier temps, les notions d’écotourisme et de gouvernanceseront définies et replacées dans la perspective de l’objectif poursuivi. Ladeuxième partie du chapitre précise le cadre de référence théorique quisous-tend l’analyse. La troisième décrit la phase empirique de l’étude etdresse un portrait sommaire du Nunavik. Les facteurs sociopolitiquesidentifiés pour cette région sont présentés en dernière partie. La conclu-sion met ces facteurs en relation avec les paramètres d’une gouvernancede l’offre écotouristique au Nunavik.

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DÉFINITION DES CONCEPTS : ÉCOTOURISME ET GOUVERNANCE

1.1. ÉCOTOURISME

Le terme écotourisme, associé à l’origine à une forme de tourisme pratiquéedans un environnement naturel peu perturbé et dont l’impact sur l’envi-ronnement physique et culturel était très faible, s’est élargi par la suitepour combiner l’idée de conservation des écosystèmes à celle du dévelop-pement durable de la communauté d’accueil. Encore aujourd’hui, la notiond’écotourisme est définie comme une forme de tourisme « respectueux»de l’environnement, un voyage responsable à destination d’espaces natu-rels uniques, qui contribue à la conservation des ressources naturelles etparticipe à l’amélioration de la qualité de vie des populations locales.

Bien que cette notion soit apparue dans la deuxième moitié desannées 1970, il n’existe pas de définition universellement reconnue del’écotourisme. Toutefois, suite au Sommet mondial de l’écotourisme, tenuen 2002, la Déclaration de Québec a statué sur les grands principes oudimensions qui définissent le phénomène de l’écotourisme et le distinguentde la notion plus large de tourisme durable dont il fait partie, à savoir :

• il contribue activement à la protection du patrimoine naturel etculturel ;

• il inclut les communautés locales et indigènes dans sa planification,son développement et son exploitation et contribue à leur bien-être ;

• il propose aux visiteurs une interprétation du patrimoine naturelet culturel ;

• il se prête bien à la pratique du voyage individuel ainsi qu’auxvoyages organisés pour de petits groupes2.

Pour les fins de cette étude portant sur les facteurs sociopolitiquesde la gouvernance, l’écotourisme est défini en termes de stratégie dedéveloppement régional fondée sur la participation de la communautélocale à la gestion de son patrimoine environnemental et culturel ainsique sur le rôle décisif qu’elle peut et devrait jouer dans le développe-ment et la mise en marché du produit écotouristique sur le territoirequ’elle occupe.

2. Sommet mondial de l’écotourisme – Québec 2002, Déclaration de Québec sur l’écotourisme

1.

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Cette définition suggère les éléments d’analyse suivants commelignes directrices d’encadrement de la gouvernance (terme défini ci-après) en écotourisme :

• la priorité aux différentes formes de participation des commu-nautés locales au développement de l’écotourisme ;

• l’identification des responsables nationaux et régionaux dans lagestion de l’écotourisme et de leur rôle respectif ;

• la concertation des actions entre les différents acteurs dans ledéveloppement de produits et de destinations écotouristiques ;

• l’analyse des impacts des activités écotouristiques sur la société,l’économie et l’environnement comme facteurs clés de la dura-bilité (Organisation mondiale du tourisme, 2002).

Dans le cas de la création de parcs nationaux dans le Nord-du-Québec, la planification de la gouvernance en écotourisme s’inscrit dansune collaboration entre les communautés autochtones, les représentantsde l’industrie touristique (autochtones et allochtones) ainsi que les ges-tionnaires du ministère du Développement durable, de l’Environnementet des Parcs (Québec), pour mettre en valeur et protéger des espacesnaturels qui serviront de support au développement de ces régions, undéveloppement qui induit la participation de ces communautés territo-riales au contrôle et à la gestion des ressources naturelles en harmonieavec leurs valeurs culturelles.

1.2. GOUVERNANCE

La Commission européenne3 définit la notion de gouvernance commeétant « les règles, les processus et les comportements qui influent surl’exercice des pouvoirs […], particulièrement du point de vue de l’ouver-ture, de la participation, de la responsabilité, de l’efficacité et de lacohérence ». Ces principes, auxquels s’ajoute celui de la subsidiarité,inscrivent la notion de gouvernance dans une problématique de l’effi-cience et de l’efficacité de l’action publique ainsi que sur les rapportsentre l’autorité et le pouvoir (De Senarclens, 1998 ; Hewitt de Alcántara,1998 ; Merrien, 1998 ; Stoker, 1998).

3. <europa.eu.int/comm/governance/governance/index_fr.htm> (consulté le 13 janvier 2006).

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Nous retenons de cette définition que la gouvernance repose sur unréseau d’acteurs que l’on suppose autonomes, mais qui agissent en inter-dépendance, suivant leurs intérêts et objectifs personnels, et selon unelogique d’action prenant appui sur la négociation pour réaliser un projetcommun, tel celui de la création et de la mise en tourisme d’un parcnational. Une telle structure de gouvernance participative vise à créer lesconditions d’un pouvoir organisé en vue d’un projet collectif.

La gouvernance représente une forme de gouverne ouverte à diversintervenants étatiques et non étatiques opérant dans un mode fortementauto-organisationnel, où l’on reconnaît comme légitime la dynamiqueinterne développée entre les intervenants. Le rôle de l’État en est un derégulateur des contextes structurels et stratégiques dans lesquels s’inscritcette dynamique propre. Lorsqu’on le met en relation avec la notionprécédente d’écotourisme, on peut en déduire que, pour qu’un projetécotouristique soit réalisé selon sa propre cohérence, cela requiert unestructure de gouvernance qui soit adaptée à un territoire et en reflète lesprincipales composantes et valeurs.

Un tel système se traduit par le fait que toutes les parties prenantes,y compris l’État, réalisent l’action prévue en fonction du résultat visé.Ainsi, le potentiel de gouvernance locale réside dans la capacité du sys-tème territorial de générer une dynamique collective qui mobilisera tantles forces endogènes qu’exogènes de manière à susciter une synergie,afin d’exploiter rationnellement les diverses ressources existantes pour lacommunauté.

C’est dans cette perspective que les notions d’écotourisme et degouvernance ont été retenues comme concepts centraux d’analyse auxfins d’identifier les facteurs sociopolitiques déterminants pour la planifi-cation de l’offre écotouristique des futurs parcs nationaux au Nunavik.

CADRE DE RÉFÉRENCE THÉORIQUE

Le potentiel de développement touristique d’un territoire est souventappréhendé en termes de son potentiel d’attraction évalué à partir desressources patrimoniales, naturelles et culturelles présentes sur le terri-toire. Cette approche de planification est remise en question par certains

2.

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auteurs, dont l’Équipe Mobilité, itinéraires, territoires (MIT)4, qui pro-posent plutôt de recentrer le rôle des acteurs – touristes et acteurs deterrain – comme source première de développement touristique.

Cette approche s’appuie sur la mise en œuvre de mécanismesd’intégration de la population aux projets de développement écotouris-tique. Or, quelles sont les conditions que devrait remplir une telle inté-gration pour pouvoir contribuer efficacement au développement social etéconomique des communautés concernées ? Si la problématique de laparticipation des acteurs individuels et collectifs, publics et privés, auprocessus décisionnel rencontre un intérêt croissant chez les chercheursen écotourisme (gouvernance participative, intégration des communautéshôtes aux projets de développement écotouristique, etc.), les conditionsinhérentes aux caractéristiques des acteurs de terrain sont, quant à elles,relativement peu documentées.

Le Nunavik a été choisi comme terrain en raison de la structureparticulière de gouvernance mise en place pour développer et gérer lesprochains parcs nationaux du Québec. En effet, le gouvernement québé-cois et les institutions inuites ont conclu en 2002 une entente de parte-nariat, dénommée « Sanarrutik » (outil de développement), qui portenotamment sur l’aménagement de cinq parcs nationaux au Nunavik. Enoutre, les Inuits du Nunavik ont reçu la délégation de compétences con-cernant la mise en place et la gestion de parcs en voie de création surleur territoire. Cette tendance à la délégation, entérinée le 23 mars 2004par une entente entre le gouvernement québécois et l’Administrationrégionale Kativik, pose ainsi le problème des conditions liées à l’émer-gence d’une gouvernance locale dans le développement touristique d’unterritoire.

La recherche des facteurs sociopolitiques pouvant faciliter la misesur pied d’une gouvernance structurante et opérationnellement efficacede l’offre écotouristique du Nunavik prend une signification tout à faitparticulière lorsqu’elle est analysée dans une perspective de développe-ment territorial intégrant, dans ses objectifs, les dimensions liées à laprotection des ressources naturelles et culturelles, au développementrégional et à la démocratie participative.

4. Équipe MIT (2002). Tourismes, 1. Lieux communs, Paris, Belin.

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Les repères théoriques qui ont guidé l’élaboration du cadre théoriquesont, d’une part, un schéma de gouvernance qui tend à mettre en valeur lesdimensions et les valeurs qui sous-tendent la gouvernance participative enécotourisme (Lequin, 2001) et, d’autre part, les résultats de recherchesrécentes sur le rôle et la nature des facteurs sociologiques dans l’émergenceet l’efficacité du développement touristique d’un territoire (De Arriba,1999 ; Équipe MIT, 2002 ; Bergeron, 1999 ; Koh, 2002 ; Wilson et al., 2001 ;Decarnin, 1999 ; Augustyn et Knowles, 1999 ; Pascal, 1995 ; Violier, 1999).

Comme première étape, cinq groupes de facteurs sociopolitiques ontété recensés dans les écrits sur la question. Ensuite, nous avons adapté cesfacteurs génériques aux trois principales dimensions de la gouvernance enécotourisme. Ces dimensions sont : la protection des ressources naturelleset culturelles, le développement régional et la démocratie participative.

2.1. LA GOUVERNANCE PARTICIPATIVE, UN OUTIL POUR STRUCTURER L’OFFRE ÉCOTOURISTIQUE

La gouvernance participative sous-entend la concertation d’un systèmed’acteurs dont la logique d’action prend appui sur la négociation et estorientée sur la réalisation d’un objectif ou projet commun. Les effortsdes parties se concentrent sur l’atteinte d’un consensus ou d’un consen-tement permettant l’exécution d’un programme dans une enceinte où denombreux intérêts divergents entrent en jeu (Hewitt de Alcántara, citédans Lequin, 2001). Elle peut se définir par la participation des interve-nants, publics et privés, leurs interactions et leur système d’influence.

L’originalité de la gouvernance participative réside dans ses procédéset, en particulier, dans l’implication des citoyens tout au long du proces-sus décisionnel, de la consultation initiale à sa mise en œuvre finale et àla gestion subséquente. Le caractère de la gouvernance participative estalors nécessairement relié à certaines valeurs sociales ayant trait à laconception, à l’organisation et au partage du pouvoir. Par conséquent, lagouvernance ne pourrait émerger et fonctionner sans être influencée parles contextes sociopolitique, socioéconomique et culturel en place. Ils’agit dès lors d’un mode de gestion situationnel5, dans le sens où lagouvernance peut revêtir un caractère ad hoc selon le contexte.

5. Voir les théories dites situationnelles. Selon les auteurs partisans de ces théories du leadership(Tannenbaum et Schmidt, Vroom et Yetton, etc.), « l’efficacité du leader ne dépend pas seu-lement de son style de gestion, mais aussi de la situation dans laquelle se trouve ce dernier ».Cf. Notes du cours de « Gestion et développement des équipes performantes », réalisées parG. Hébert, 1998, (thème VIII, p. 4).

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Une condition apparente du succès d’une gouvernance participativeest la recherche d’un équilibre des rapports d’autorité et de pouvoir entrel’État d’un côté et, de l’autre, les intervenants du milieu. Cet équilibrepeut, selon le cas, être plus ou moins difficile à atteindre, car il nécessiteune redéfinition constante qui soit adaptée au degré de maturité desacteurs et aux tensions entre les intérêts divergents existants.

Le cadre de gouvernance en écotourisme présenté ci-après (figure 8.1)est appréhendé comme un outil que se donnerait un territoire pour struc-turer et coordonner, au niveau local, son offre écotouristique de manièreà répondre aux objectifs d’une stratégie de développement territorial,objectifs qui se déclinent plus spécifiquement au niveau des trois con-cepts considérés ici comme centraux à l’idée d’encadrement de l’offreécotouristique, à savoir le développement durable, le développementrégional et la démocratie.

Figure 8.1MODÈLE DE GOUVERNANCE EN ÉCOTOURISME

* Source : Lequin, 2001.

Développement régional• Croissance économique

– Développement touristique – Retombées économiques locales

• Diversification des activités– Étalement spatial et saisonnier

– Développement de produits et infrastructures touristiques

• Autonomie régionale– Maîtrise d’œuvre– Non-concurrence de l’État

– Réseau de coordination– Identité locale

• Impacts négatifs– Inflation, surexploitation, surconcentration

Gouvernanceen écotourisme

• Valeurs sociales– Confiance– Honnêteté– Transparence

• Compétences– Communication– Formation/éducation– Délibération

• Pouvoirs– Négociation– Délégation– Habilitation

Développement durable

• Durabilité de la ressource– Hiérarchie des objectifs– Intégrité des écosystèmes– Zonage– Réglementation

• Équité intergénérationnelle– Pérennité des sites

• Sensibilisation– Information– Éducation

Démocratie

• Accessibilité des visiteurs– Qualitative (sécurité)– Quantitative

• Participation des communautés– Participation– Partenariat– Information

• Devoirs envers la ressource– État– Communautés locales

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2.2. FACTEURS SOCIOPOLITIQUES INFLUANT SUR LA GOUVERNANCE DE L’OFFRE ÉCOTOURISTIQUE

Cinq groupes de facteurs sociopolitiques susceptibles de favoriser unedynamique d’émergence et de gouvernance de l’offre écotouristique ontpu être identifiés dans les écrits scientifiques portant sur le tourisme, ledéveloppement local et l’entrepreneuriat à partir de la recension desouvrages mentionnée précédemment.

2.2.1. Structure historique, sociale, économique et politique du territoire

Teissereinc soutient que « des territoires connaissant des situationsproches et disposant de ressources identiques ne réagissent pas de lamême manière » (1994, p. 153). Il explique ces divergences entre locali-tés par le fait que chaque territoire présente un agencement de donnéeshistoriques, sociales, culturelles et politiques qui lui est propre. La valo-risation économique d’un territoire serait fonction de l’état du systèmesocial local.

Par ailleurs, les modes d’organisation traditionnelle de la famille(Matteudi, 1997), la confrontation du territoire à une crise économiquegrave et les solutions qui s’offrent à lui pour y faire face (Decarnin,1999), ainsi que les conflits d’intérêts et rapports de forces entre lesgroupes sociopolitiques principaux du territoire (Le Galès, 1991) appa-raissent comme autant de facteurs pouvant influencer le développementtouristique et économique. Ceci peut être mis en rapport avec les modesd’organisation familiale et territoriale traditionnels inuits, qui s’apparententà la division ethnique du clan ou de la tribu.

2.2.2. Valeurs favorisant l’entrepreneuriat en tourisme sur un territoire donné

Il ressort des écrits sur l’entrepreneuriat que certaines valeurs vivementpromues par un système social influenceraient positivement la créationd’entreprise. Il s’agirait d’une culture entrepreneuriale valorisant

les caractéristiques personnelles rencontrées chez les entrepreneurs (indi-vidualisme, besoin d’accomplissement, internalité du locus de contrôle,prise de risque, …), qui apprécie le succès et accepte l’échec, qui encou-rage la diversité et non l’uniformité, qui voit le changement comme modede vie normal, donc orienté vers l’innovation (Belley, 1994, p. 32).

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Shapero et Sokol (1982) voient la culture entrepreneuriale commeétant ouverte à divers types d’entreprises, tant à vocation économiquecapitaliste qu’à but non lucratif. Or, l’on remarque chez les Inuits duNunavik une tendance pour l’entrepreneuriat coopératif. Cette formed’entrepreneuriat semble se caractériser par des valeurs telles que le par-tage, la solidarité, l’altruisme, la transparence, la confiance, le respect, ladémocratie, l’égalité, l’équité, la responsabilité sociale ainsi que la priseen charge et la responsabilité personnelles et mutuelles (Perron, 1999 ;St-Pierre, 1999).

2.2.3. Soutien de la communauté territoriale

Violier (1999) conclut dans L’Espace local et les acteurs du tourismeque les habitants, par le rôle qu’ils peuvent jouer et leur capacité d’agir,peuvent contribuer au développement touristique de leur territoire. Eneffet, le soutien de la communauté envers le tourisme ainsi que le senti-ment de fierté des habitants envers leur territoire et leur communautépeuvent affecter positivement la qualité du séjour des touristes. Parailleurs, la façon dont le secteur touristique est considéré semble influen-cer l’importance et la qualité du bénévolat (Wilson et al., 2001). Violier(1999) fait toutefois remarquer que si le soutien des habitants apparaîtimportant, il n’est pas certain que leur participation active soit essentielle.

2.2.4. Engagement et dynamisme des acteurs locaux en fav eur de l’activité touristique

La reconnaissance du tourisme comme une activité économique significa-tive par les acteurs économiques et politiques locaux et acteurs touristiquespotentiels semble être une condition sine qua non au déclenchement et ausuccès du développement touristique d’une région (Shapero et Sokol,1982 ; Belley, 1994 ; Pascal, 1995 ; Béteille, 1996 ; Greffe, 1996 ; Decarnin,1999 ; Équipe MIT, 2002).

Par ailleurs, la présence d’un leader, tout comme les actions dechaque acteur du tourisme envers le développement de l’offre touristique,la nature, la fréquence et la qualité de ces actions (professionnalisationdu secteur, investissement et réinvestissement, assistance technique à lacréation d’entreprises touristiques, disponibilité d’informations écono-miques locales de qualité, intégration des entrepreneurs touristiques

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« étrangers » à la localité/région) sont autant de facteurs apparemmentreliés au succès du développement touristique (Pascal, 1995 ; Béteille,1996 ; Violier, 1999 ; Wilson et al., 2001 ; Decoster, 2003).

2.2.5. Organisation et réseautage des acteurs du dév eloppement touristique régional

L’organisation des acteurs concernés par le développement de l’offretouristique locale et la gestion de ce développement en un partenariatlocal semblent constituer un moyen approprié de soutenir la coordinationet la coopération des acteurs de terrain et l’innovation. Les conditionsd’efficacité d’un partenariat public/privé local en tourisme semblent com-prendre une préparation méthodique du projet, la définition d’objectifs àlong terme, des actions pertinentes et organisées, une structure basée surle partage du pouvoir décisionnel et du contrôle où les responsabilités dechaque partenaire sont clairement établies. Un tel partenariat impliqueégalement une structure favorisant la coordination des actions, notam-ment par la mise en place d’un système d’information efficace et d’unréseau bien constitué de personnes à consulter, ainsi qu’un réseau decommunication avec les clients et les partenaires extérieurs à la localité/région (Augustyn et Knowles, 2000 ; Decoster, 2003).

2.3. SCHÉMATISATION DU CADRE DE RÉFÉRENCE

À la lumière de ce qui précède, la figure 8.2 représente une schématisationde la démarche théorique proposée pour l’analyse des facteurs socio-politiques d’encadrement de la gouvernance de l’offre écotouristique desparcs nationaux du Nunavik.

La première partie du modèle présente les cinq groupes de facteurssociopolitiques identifiés dans la documentation et décrits précédemment.La seconde reprend les paramètres structurant la gouvernance en écotou-risme, laquelle, pour être efficace, devrait rechercher un équilibre entreles objectifs de protection des ressources naturelles et culturelles, dedéveloppement régional et de démocratie participative. Cet équilibre estperçu comme dynamique et propre à chaque territoire. Enfin, le troisièmecadre laisse place aux facteurs sociopolitiques spécifiques susceptiblesd’influer sur la structuration de la gouvernance en écotourisme sur leterritoire du Nunavik. Ces facteurs seront identifiés empiriquement etprésentés dans la section 4, Principaux résultats d’analyse.

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RECHERCHE EMPIRIQUE ET ADAPTATION DU CADRE DE RÉFÉRENCE

Avant de décrire la méthodologie de recherche, une description succinctede la région du Nunavik permettra d’en saisir la complexité et la singularitéet d’aider à mieux saisir la pertinence des facteurs sociopolitiques suscep-tibles d’influer sur l’encadrement de la gouvernance de l’offre écotouristique.

Figure 8.2

CADRE DE RÉFÉRENCE ADAPTÉ AU CONTEXTE DE GOUVERNANCE DES PARCS NATIONAUX DU NUNAVIK

Gouvernance participative en écotourisme

Objectifs de protectiondes ressourcesculturelles et naturelles

• Durabilité de laressource

• Sensibilisation

Objectifs de développementrégional

• Croissanceéconomique locale

• Diversification desactivités

• Autonomie régionale• Gestion des impacts

négatifs dudéveloppement

Objectifs de démocratie

• Équité intra- etintergénérationnelle

• Accessibilité à laressource

• Implication descommunautés

• Responsabilisationenvers la ressource

Facteurs sociopolitiques génériques de développement d’une offre touristique régionale

• Structure sociale et histoire économique, politique et sociale locale/régionale favorisantune dynamique de développement économique/touristique

• Prédominance dans la localité/région de valeurs favorisant l’entrepreneuriat en tourisme• Soutien de la population locale• Les acteurs locaux, leur engagement et leur dynamisme en faveur de l’activité touristique• Organisation des acteurs du développement touristique régional et réseautage

Facteurs sociopolitiques spécifiques à la gouvernance en écotourisme dans les parcs nationaux du Nunavik

Facteurs dedéveloppementdurable de laressource

• …• …

• …

Facteurs dedéveloppementrégional• …• …• …

Facteurs dedémocratieparticipative• …• …• …

MO

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3.

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3.1. PORTRAIT DU NUNAVIK

Le champ d’application de notre recherche se limite géographiquementau Nunavik, à savoir le territoire québécois correspondant à la régionadministrative Kativik.

Il s’agit de la partie la plus septentrionale du Nouveau-Québec6.Toundra, forêts boréales, montagnes, rivières et lacs composent le paysagede ce territoire immense qui représente 33 % de la superficie du Québec.

3.1.1. Prof l sociodémographique et mode de f onctionnement

D’un point de vue démographique, le Nunavik est très peu peuplé. Lapopulation du Nunavik s’élevait à 10 024 habitants (en 2004), ce quicorrespond à 0,13 % de la population totale du Québec. On y dénombre14 villages distants de plusieurs centaines de kilomètres les uns des autreset comptant chacun entre 150 et 1 625 habitants (92,6 % de la populationest inuite). Ces communautés sont toutes situées en bordure de la zonelittorale. Les moins de 24 ans représentent 56 % de la population totalesur le territoire Kativik (contre 31 % au Québec).

Dans les sphères plus restreintes de la famille et du village, lepartage de la nourriture et l’esprit de coopération semblent être considé-rés comme des contributions primordiales, qui unissent les gens sur leplan social et paraissent avoir contribué à assurer la survie. Si la familleréside au centre de la culture inuite, elle est entourée d’un réseau socialplus large. Ce réseau repose sur deux formes d’associations : la liaisonpar le sang ou le mariage et des relations particulières créées par le biaisde l’adoption, de l’assistance à la naissance ou de la reconnaissanceformelle d’un partenariat de chasse. Ceci peut se rattacher à l’organisa-tion sociale traditionnelle, qui était fondée sur la consultation-concertationdans la prise des décisions concernant le groupe (famille ou bande).

Selon Saladin d’Anglure (1967), auteur d’un rapport sur « l’organi-sation sociale traditionnelle des esquimaux de Kangirsujuaaq », l’organi-sation de la communauté était souple et peu hiérarchisée. Une certaineforme d’autorité économique et sociale sur la bande pouvait émaner desqualités personnelles de certains individus. Toutefois, ce pouvoir demeuraitinformel et s’exerçait sous la forme d’influence.

6. Le Nouveau-Québec est divisé administrativement en deux territoires équivalents (TE) desMRC : la région Kativik et la région de Jamésie (Institut de la statistique du Québec).<www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/region_10/region_10_00.htm>.

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Figure 8.3

LOCALISATION DU NUNAVIK

Source : Société Makivik, <www.makivik.org/fr/media_centre/nunavik_maps.htm> (consulté le13 janvier 2006).

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Enfin, l’évolution du mode de vie des Inuits et de leur culture sembledessiner une aptitude à l’adaptation qui ne les écarte pas pour autant decertains de leurs traits culturels traditionnels. Des migrations fréquenteset une confrontation à d’autres cultures (baleiniers occidentaux, mission-naires, représentants gouvernementaux et autres) au cours de leur histoiresous-entend qu’ils ont dû, à chaque fois, s’adapter à un nouveau contexte.« Ce processus d’adaptation demeure une des grandes caractéristiques dumode de vie inuit » (Inuit Tapirisat du Canada, 1995, p. 3).

La sédentarisation a eu d’importantes répercussions sur les modestraditionnels d’utilisation des terres, l’activité économique et les rapportssociaux. Tous ces changements ont eu des effets néfastes, tels que l’alcoo-lisme, la violence familiale, les agressions sexuelles, le suicide, la con-sommation de drogue ou encore l’itinérance7 (Martin, 2003 ; Myles,2005). Ces problèmes toucheraient plus particulièrement les jeunes géné-rations et semblent s’aggraver au fil du temps. Néanmoins, ces boulever-sements semblent être appréhendés par les Inuits comme des témoins del’enjeu que représente la protection du patrimoine culturel et du territoire.A contrario, l’on pourrait avancer que la sédentarisation a eu certainsimpacts positifs si l’on considère les programmes et services dont lesInuits sont bénéficiaires en matière de santé, d’éducation, de servicessociaux, d’habitation mais aussi l’avancée des télécommunications qui,dans l’ensemble, ont contribué à améliorer leur qualité de vie.

En 2002-2003, les Inuits ont reçu de 19 ministères québécois lasomme totale de 307 680 531 $ CA, une somme qui s’est accrue parrapport à l’année 2001-2002 où elle s’élevait à 265 098 859 $ CA (Secré-tariat aux affaires autochtones, 2003 et 2004). En 2002, les Inuits ontconclu avec le gouvernement québécois une entente de partenariat sur ledéveloppement économique et communautaire. C’est d’ailleurs cetaccord, appelé Sanarrutik (« Outil de développement »), qui prévoit entreautres la création de parcs au Nunavik.

En dépit des innovations introduites sur le territoire (liaisons aériennes,télécommunications, etc.), les Inuits semblent avoir conservé certainescaractéristiques propres à leur culture comme leur langue (l’inuktitut) oula pratique de la chasse. Cet équilibre entre adaptation et conservation de

7. Sur l’itinérance des Inuits à Montréal, voir les articles de B. Myles parus dans Le Devoir des26-28 février 2005.

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la tradition a été décrit d’une manière intelligible et imagée par Collignon(1996) dans la conclusion de sa recherche sur le savoir des Inuits sur lagéographie de leur territoire.

[L]es Inuinnait8 vivent aujourd’hui non pas entre deux mondes mais dansdeux mondes – le territoire et le village –, non pas simultanément maissuccessivement, dans un balancement que nous, réagissant avec nos valeursoccidentales, pensons déstabilisant, mais qu’eux-mêmes considèrent commela meilleure conduite possible. C’est en toute lucidité qu’ils acceptent que :« Sur le territoire, quand nous chassons et campons, nous sommes lesInuinnait. Et puis, nous rentrons au village, où nous devenons des Blancs »(Collignon, 1996, p. 207).

3.1.2. Prof l politique

Depuis des décennies, l’autonomie politique constitue l’une des revendi-cations principales des Inuits du Nord-du-Québec. En effet, déjà dans lesannées 1960, la volonté d’autonomie se trouve au cœur de l’édificationdu mouvement coopératif inuit qui s’établit en marge des coopérativescréées à l’instigation du gouvernement fédéral (Fahndrich, 1982). Cesmouvements ont été soutenus de façon formelle par la mise sur pied, en1971, de la Northern Quebec Inuit Association, laquelle a négocié, en1975, la Convention de la baie James et du Nord québécois (CBJNQ).

La CBJNQ a mené à la création de plusieurs institutions dirigéespar des Inuits. Ces organismes veillent à l’administration et au dévelop-pement de la région dans tous les secteurs d’activités (Dumas, 1995 ;Secrétariat aux Affaires autochtones, 2001). En 1989, les Inuits se sontengagés dans des négociations avec le gouvernement québécois pourpouvoir créer leur propre gouvernement régional. Leurs initiatives ontconduit au dépôt, en avril 2001, d’un rapport9 proposant un projet degouvernement régional autonome. Depuis lors, les Inuits sont à négocierune entente de principe devant conduire à la création d’un gouvernementautonome pour le Nunavik.

8. Communauté inuite étudiée par l’auteur.9. Commission du Nunavik (2001). Partageons – Tracer la voie vers un gouvernement pour le

Nunavik. Rapport déposé en mars.

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La CBJNQ a permis de mettre en place un certain nombre d’insti-tutions publiques qui sont sous la gouvernance des Inuits, dont voici lesprincipales :

• Les corporations de villages nordiques, dont le fonctionnementest semblable à celui des municipalités québécoises, fournissentdes services locaux ayant trait à l’administration des servicesmunicipaux, des services à la population et de la réglementationen ces matières.

• L’Administration régionale Kativik (ARK), quant à elle,chapeaute, depuis Kuujjuaq, l’ensemble des municipalités nordi-ques. Elle administre les affaires régionales, faisant l’objet deplus de quarante ententes, et gère un budget annuel de quelque112 M$ CA), dont un peu plus de la moitié est versée par legouvernement québécois et environ le quart par le gouvernementfédéral, le reste provenant de sources locales. Elle représente ungrand employeur dans la région avec 350 employés dont 70 %sont inuits. Elle défend, en outre, les intérêts du Nunavik à Québecet à Ottawa.

• Une autre institution de poids est la Société Makivik. Celle-ci gèreles indemnités financières obtenues dans le cadre des ententes etjoue un rôle dans le développement social et économique de larégion : elle investit dans diverses activités économiques régio-nales et possède de nombreuses autres filiales à part entière ou encoparticipation (Secrétariat aux Affaires autochtones, 2001 ; SociétéMakivik10). De plus, elle défend et promeut les champs d’intérêtdes Inuits et a constitué une partie de poids dans les négociationsd’ententes relatives à la mise en œuvre de la CBJNQ (1990), àdes questions constitutionnelles (1990, 1992), aux revendicationsterritoriales et à l’autonomisation politique du Nunavik.

• Dans le domaine culturel également, les Inuits se sont dotés deleur propre institution : l’Institut Avataq. Cette organisation sansbut lucratif œuvre au développement culturel des Inuits par diversesactions, dont la promotion et la préservation de l’inuktitut, l’édi-fication de musées du Nunavik, un centre de documentation et desarchives, des cours sur les savoir-faire traditionnels, la recherche,etc. (Institut culturel Avataq11).

10. <www.makivik.org/fr>.11. <www.avataq.qc.ca/region/index_fr.cfm>.

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3.1.3. Prof l économique

Sur le plan socioéconomique, le Nord-du-Québec et la région Kativik secaractérisent par la tertiarisation des secteurs d’activité et de l’emploi. Letaux de chômage est nettement supérieur (14,7 %) à celui de l’ensembledu Québec (8,2 %). Le revenu personnel disponible par habitant du Nord-du-Québec montre un écart entre cette région et l’ensemble du Québecpuisque, en 2003, il s’élevait à 15 919 $ CA contre 21 065 $ CA pour leQuébec. Une forte proportion des emplois se retrouve dans l’administra-tion publique, les services de santé et assistance sociale, l’enseignement,la vente et autres services (S. Gingras et al., 2004 ; Institut de la statistiquedu Québec, 2001). La dynamique économique repose sur des petites etmoyennes entreprises ; les entreprises employant moins de 50 personnesreprésentent 82,7 % des entreprises du territoire Kativik, soit 67 entre-prises sur un total de 81 recensé par l’Institut de la statistique du Québec.Les six grandes entreprises (taille de l’emploi au-delà des 100 personnes)présentes sur le territoire sont actives dans la prestation de services admi-nistratifs publics et de services de soins de santé.

Le mouvement coopératif (Fédération des coopératives du Nouveau-Québec), le lobby Inuit Tapiriit Kanatami (ITK)12, engagé pour la pré-servation et la valorisation de l’identité, de la culture et du mode de viedes Inuits, la Conférence circumpolaire inuite (CCI), regroupant les Inuitsdu Canada, des États-Unis, de la Russie et du Danemark dans le but defaire officiellement reconnaître une solidarité culturelle dans toute larégion circumpolaire (Inuit Tapirisat du Canada, 1995), sont autantd’exemples de regroupements et de formes de coopération impliquant lesInuits du Nunavik.

3.1.4. Aperçu de l’of fre touristique en territoire nordique

L’offre touristique en territoire nordique prend plusieurs formes, dontvoici les principales : le tourisme de plein air et d’aventure, le tourismed’observation de la nature, le tourisme d’observation des aurores boré-ales, le tourisme culturel, la chasse et la pêche et le tourisme d’affaires(Desmarais, 2004 ; Girouard, 1998).

12. <www.itk.ca>. Remarque : Inuit Tapiriit Kanatami et Inuit Tapirisat du Canada constituenten fait la même organisation, qui a changé de dénomination au cours de son évolution.

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Comme il n’existe aucune étude statistique sur le tourisme auNunavik, il faut se fier à des études sur le Nord-du-Québec. Les rapportssur la fréquentation touristique et les recettes reliées au secteur touris-tique dans ces territoires sont malheureusement peu éloquents quant à laméthodologie utilisée pour la cueillette et le traitement des données.Mentionnées à titre indicatif, les données présentées ci-après donnent uneidée de la fréquentation et des recettes touristiques dans cette région quicomprend le Nunavik (tableau 8.1).

Le tourisme dans le Nord-du-Québec connaîtrait ainsi une netteprogression avec 51 000 visiteurs pour l’année 2002, soit une augmenta-tion de la fréquentation de quelque 45 % par rapport à 2001. Les touristesproviendraient en grande majorité du Québec (80 % de la clientèle). Letouriste du Nord-du-Québec dépenserait plus que la moyenne puisque lapart relative des recettes paraît supérieure à celle enregistrée pour lafréquentation. De plus, les retombées directes des dépenses des touristes

Tableau 8.1

FRÉQUENTATION ET RECETTES TOURISTIQUES AU NORD-DU-QUÉBEC, 2001-2002

*Sommes dépensées par les touristes (voyages d’une nuit ou plus) dans une région du Québec.Source : Gingras, 2004.

Région statistique

Nombre de touristes (visites – régions d’une nuit ou plus), par pro venance, 2002 et variation 2001-2002

2002Variation 2001-2002 Provenances des touristes

Nombre en milliers

Part relativeen % % Québec Hors Québec

Nord-du-Québec 51 0,2 45,7 80,1 19,9

Ensemble du Québec 30 491 100 16,1 69,3 30,7

Région statistique

Recettes* des touristes, par pro venance, 2002 et variations 2001-2002

2002Variation 2001-2002 Provenances des touristes

Recettesen millions

de CADPart relative

en % % Québec Hors Québec

Nord-du-Québec 25,3 0,3 40,8 89,4 10,6

Ensemble du Québec 7 281,5 100 17,7 47,4 52,6

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québécois dans la région du Nord-du-Québec seraient plus élevées quecelles des touristes non québécois, une tendance inverse de ce que l’onpeut constater pour l’ensemble du Québec.

Concernant la fréquentation des parcs nordiques, une étude deBCDM Conseil pour le parc des Pingualuit renseigne sur l’évolution dela fréquentation de trois parcs des Territoires du Nord-Ouest s’apparen-tant au parc des Pingualuit de par leur éloignement et leur mode d’accès.

Le tableau 8.2 montre que le nombre de visiteurs dans chacun desparcs a légèrement diminué ou marginalement augmenté entre 1992 et 1998.

La culture inuite, l’isolement géographique – aucune route ne reliele Nunavik au sud du pays – et l’étendue du territoire ainsi qu’unerichesse faunique et des paysages remarquables sont des facteurs posi-tionnant l’offre touristique du Nunavik dans une niche de marché reliéeà l’écotourisme et au tourisme d’aventure (Lequin, 2003). Cependant, leNunavik semble aussi souffrir de cet éloignement géographique dans lamesure où elle rend l’accès à la destination et les forfaits touristiquesplus onéreux que ceux proposés dans les autres régions nordiques duCanada (Desmarais, 2004).

Par ailleurs, le Nunavik affiche un retard sur l’offre de produitsécotouristiques par rapport aux autres régions nordiques du Canada.L’offre touristique se compose essentiellement de produits proposés pardes pourvoyeurs, pour la plupart des produits de chasse et de pêche. L’ontrouve également quelques activités structurées d’observation de lanature, mais très peu de tourisme culturel ou d’écotourisme (ibidem).

Tableau 8.2

FRÉQUENTATION DES PARCS NORDIQUES

Source : Parcs Canada, cité dans BCDM Conseil (mars 2000).

ParcsAnnée

de créationNombre de visiteurs

1992-1993Nombre de visiteurs

1997-1998Variation en %

1992-1998

Ivvavik, Yukon – TNO 1984 378 253 (33,1)

Auyuittuq, TNO 1972 306 348 13,7

Ellesmere, TNO 1988 514 450 (12,5)

Total 1 198 1 051 (12,3)

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En ce qui a trait à la gouvernance du secteur, le Nunavik s’est dotéde l’Association touristique du Nunavik (ATN), qui a le mandat d’assurerla promotion du territoire comme toute autre association touristiquerégionale au Québec.

D’autre part, les principales lacunes reconnues, actuellement, àl’endroit du tourisme autochtone québécois sont : la formation insuffi-sante du personnel autochtone, le manque de structuration et d’intégra-tion des produits autochtones dans l’ensemble de l’offre québécoise, lemanque de visibilité et de reconnaissance des produits distinctifs, ainsique le manque de fiabilité et de constance dans la qualité et la prestationdes produits existants. En outre, les valeurs traditionnelles, fortementaxées sur le développement communautaire, pourraient constituer unfrein culturel au développement touristique, en ce que celui-ci repose surdes exigences commerciales qui ne font pas toujours partie du quotidientraditionnel des autochtones (Lequin, 2003).

En somme, le produit autochtone et son développement trouveraientassise sur deux atouts majeurs : la localisation en pleine nature, loin dustress de la vie urbaine, et une image positive des Autochtones sur lesmarchés internationaux. Mais là encore, certaines réserves doivent êtreémises. Cette image tiendrait parfois davantage de la force du mytheentretenu par le visiteur quant à l’exotisme du mode de vie autochtoneque d’une analyse réaliste de leur mode de vie actuel qui, lorsque partagé,peut avoir pour conséquence la déception du touriste confronté à unedissonance entre son imaginaire et la réalité inuite.

3.2. CADRE MÉTHODOLOGIQUE

Une stratégie d’échantillonnage non probabiliste a été organisée autourdes acteurs du développement touristique du Nunavik, et en particulierceux associés à la mise en tourisme du parc des Pingualuit (figure 8.4),le seul parc légalement constitué à l’heure actuelle.

L’entrevue semi-dirigée a constitué la principale méthode decollecte des données, et ce, auprès de quatre informateurs clés de l’Admi-nistration régionale Kativik, l’Institut culturel Avataq, la Direction desparcs du Québec et Tourisme Québec. Ces informateurs étaient des Inuitsou détenaient une expérience de terrain reconnue du Nunavik. Des infor-mations supplémentaires ont également été recueillies par des analysesdocumentaires, sur Internet et par courrier électronique auprès d’infor-mateurs afin de valider et de compléter le contenu des entrevues.

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Les paragraphes suivants présentent quelques renseignements concer-nant les principaux acteurs collectifs territoriaux et leurs responsabilitésdans le développement touristique du Nunavik. Ils ont été regroupés soustrois catégories : les institutions, les associations et les entreprises privées.

3.2.1. Institutions

Quelque cinq grandes institutions s’occupent du développement touris-tique sur le territoire du Nunavik. Ce sont : 1) L’Administration régionaleKativik (ARK), qui voit à l’édification et la gestion des parcs nationauxsur son territoire et distribue des subventions à l’Association touristiquedu Nunavik (ATN) ; 2) la Société Makivik, qui détient le pouvoir écono-mique du Nunavik, fournit une assistance technique à l’édification desparcs et investit dans des produits ou services touristiques (croisières,compagnies aériennes) ; 3) la Direction des parcs du gouvernement du

Figure 8.4

LOCALISATION DU PARC DES PINGUALUIT

Source : Direction de la planification et du développement des parcs québécois.

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Québec (MDDEP13), qui orchestre l’aménagement des parcs et le soutienà la formation des Inuits qui travailleront au sein des parcs ; 4) TourismeQuébec, qui est responsable de la promotion touristique du Nunavik ;5) le ministère des Affaires municipales et des Régions, qui intervientpar le biais du programme ACCORD (étude du potentiel touristique).

3.2.2. Associations

On note l’existence de deux associations vouées au développementtouristique. Ce sont : 1) l’Association touristique du Nunavik, dont faitpartie la Société Makivik ; la majorité des membres de l’ATN sont despourvoyeurs ; elle voit à la promotion des produits touristiques du Nunavik(pour l’instant surtout les pourvoiries) ainsi qu’à la recherche de pistesde développement touristique (mandat reçu de la Société Makivik) ;2) l’Institut Avataq, qui est responsable, entre autres, de la réalisationd’un plan d’éducation (volet culturel de l’interprétation associée au parc).

3.2.3. Entreprises privées

Parmi les principaux entrepreneurs privés qui interviennent dans lesecteur touristique sur le territoire du Nunavik, on reconnaît : 1) les pour-voyeurs : membres de l’Association touristique du Nunavik, ils cons-tituent les principaux acteurs touristiques à l’heure actuelle et sontconcentrés autour de trois grandes communautés ; 2) la Cruise NorthExpeditions Inc. : sous-traitant de la Société Makivik, cette entreprise adéveloppé un produit de croisière mis sur le marché à l’été 2005 ; 3) laFédération des coopératives du Nouveau-Québec, qui se concentre sur laconstruction d’hôtels et la mise en marché de l’art inuit ; 4) Air Inuit, uneentreprise inuite assurant le transport aérien entre les communautés et leQuébec méridional.

PRINCIPAUX RÉSULTATS D’ANALYSE DES FACTEURS SOCIOPOLITIQUES

Le tableau 8.3 présente les résultats de terrain en croisant les facteurssociopolitiques relevés pour le Nunavik selon les trois dimensions d’unegouvernance participative en écotourisme en vue de faire ressortirl’expression locale de ces facteurs à l’œuvre, selon que la problématique

13. Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs.

4.

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t soc

iale

loca

le–

Stru

ctur

e de

la p

opul

atio

n–

Cons

éque

nces

d’é

véne

men

ts de

l’hi

stoire

pol

itiqu

e lo

cale

–Tr

ansm

issio

n du

sav

oir a

nces

tral

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Vi

gila

nce

par r

appo

rt au

x im

pact

s su

r le

s re

ssou

rces

nat

urel

les

et c

ultu

relle

s (re

prés

enté

e pa

r les

aîn

és e

t co

nser

vate

urs)

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Vo

lont

é de

s’o

uvrir

au

mon

de e

t à l’

accu

eil

de to

urist

es–

Volo

nté

et n

éces

sité

de d

ével

oppe

r de

nou

velle

s ac

tivité

s éc

onom

ique

s su

r le

terri

toire

–Vo

lont

é de

s’o

rient

er v

ers

des

form

es d

e to

urism

e pl

us p

artic

uliè

rem

ent r

espe

ctue

uses

de

l’en

viro

nnem

ent e

t de

la c

ultu

re in

uite

coto

urism

e et

eth

noto

urism

e)–

Baga

ge c

ultu

rel p

ropr

e à

parti

cipe

r à la

qu

alité

du

prod

uit é

co- e

t eth

noto

urist

ique

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Po

pula

tion

peu

nom

breu

se

faci

litan

t le

proc

essu

s d’

info

rmat

ion

et d

e co

nsul

tatio

n de

s po

pula

tions

Faib

less

es/fr

agili

tés

–Fa

ible

cap

acité

de

char

ge

des

com

mun

auté

s pa

r rap

port

au n

ombr

e de

tour

istes

Faib

less

es/fr

agili

tés

–Ri

sque

pou

r la

com

mun

auté

de

fragi

lisat

ion

de la

coh

ésio

n so

cial

e

Faib

less

es/ f

ragi

lités

–Pr

ésen

ce d

e gr

oupe

s d’

inté

rêts

dive

rgen

ts (ra

ppor

ts de

forc

es –

le

poi

ds d

e ch

aque

gro

upe

n’a

pu

être

iden

tifié)

Page 276: l'écotourisme entre l'arbre et l'écorce

254 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

© 2006 – Presses de l’Université du Québec Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Québec, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.ca

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Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

2.Pr

ésen

ce d

e va

leur

s fa

voris

ant

ou d

éfav

orisa

nt l’

entre

pren

euria

t en

tour

isme

–Ca

ract

érist

ique

s cu

lture

lles

alla

nt

à l’e

ncon

tre d

e l’e

sprit

de

déve

lopp

emen

t–

Cara

ctér

istiq

ues

cultu

relle

s al

lant

à

l’enc

ontre

de

l’effi

caci

té d

u dé

velo

ppem

ent (

éco)

tour

istiq

ue–

Cara

ctér

istiq

ues/v

aleu

rs fa

voris

ant

le d

ével

oppe

men

t éco

nom

ique

/to

urist

ique

–Ry

thm

e d’

actio

n pl

us le

nt q

u’au

su

d du

Qué

bec

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Tr

ansm

issio

n de

gén

érat

ion

en

géné

ratio

n d’

élém

ents

de la

cul

ture

an

cestr

ale

–Vi

e en

mod

e co

mm

unau

taire

pr

ivilé

gian

t l’e

ntre

pren

euria

t de

type

co

llect

if qu

i offr

e un

e m

eille

ure

assu

ranc

e de

pro

tect

ion

du p

atrim

oine

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–M

imét

isme

d’ex

périe

nces

per

çues

po

sitiv

emen

t–

Perc

eptio

n po

sitiv

e de

la ré

ussit

e pr

ofes

sionn

elle

dan

s le

s af

faire

s

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Im

plic

atio

n de

s co

mm

unau

tés

deva

nt fa

cilit

er l’

adap

tatio

n et

fa

voris

er le

mim

étism

e

Faib

less

es/fr

agili

tés

–N

éces

sité

de re

spec

ter d

e ry

thm

e d’

adap

tatio

n et

d’a

ctio

n

Faib

less

es/fr

agili

tés

–A

bsen

ce d

e cu

lture

du

déve

lopp

emen

t et

de l’

inno

vatio

n–

Néc

essit

é d’

un fl

ux p

rove

nant

de

l’ext

érie

ur

et d

e la

per

cept

ion

d’un

e né

cess

ité p

our

initi

er le

dév

elop

pem

ent d

e no

uvel

les

activ

ités

écon

omiq

ues/p

rodu

its–

Perc

eptio

n né

gativ

e de

cer

tain

s em

ploi

s du

tour

isme

–Ré

fére

ntie

l pro

pre

influ

ant s

ur le

ryth

me

et

les

form

es d

e dé

velo

ppem

ent t

ouris

tique

: no

tion

du te

mps

, ryt

hme

d’ac

tion,

pe

rcep

tion

diffé

rent

e de

cer

tain

s su

ppor

ts de

pro

duits

tour

istiq

ues

(mot

oqua

d,

mot

onei

ge)

Faib

less

es/fr

agili

tés

–G

estio

n co

mm

unau

taire

du

déve

lopp

emen

t tou

ristiq

ue p

ouva

nt

dess

ervi

r le

parta

ge d

’info

rmat

ion

entre

les

diffé

rent

s ni

veau

x de

déc

ision

(loc

al/ré

gion

al)

–Is

olem

ent g

éogr

aphi

que

et s

ocia

l de

s co

mm

unau

tés

loca

les

pouv

ant

cont

ribue

r à d

es g

uerre

s de

po

uvoi

r, no

tam

men

t qua

nt a

ux

choi

x de

pro

jets

et d

’affe

ctat

ion

des

ress

ourc

es.

Table

au 8

.3 (s

uite

)

FA

CTE

UR

S SO

CIO

POLI

TIQ

UE

S IN

FLU

AN

T SU

R L

A G

OU

VE

RN

AN

CE

DE

L’O

FF

RE

ÉC

OTO

UR

ISTI

QU

E A

U N

UN

AV

IK

Facte

urs s

ociop

olitiq

ues

Dime

nsion

s d’u

ne go

uver

nanc

e ter

ritor

iale e

n éco

touris

me

Prote

ction

des r

esso

urce

s natu

relle

s et

cultu

relle

sDé

velop

peme

nt ré

giona

lDé

mocr

atie p

artic

ipativ

e

Page 277: l'écotourisme entre l'arbre et l'écorce

Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique 255

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Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

3.So

utie

n de

la p

opul

atio

n lo

cale

–Fi

erté

par

rapp

ort à

leur

cul

ture

–O

uver

ture

de

la p

opul

atio

n au

tour

isme

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Vo

lont

é hi

storiq

ue d

e pr

otec

tion

des

ress

ourc

es fa

voris

ant l

’ouv

ertu

re

de la

pop

ulat

ion

à de

s fo

rmes

de

déve

lopp

emen

t plu

s do

uces

pou

r l’e

nviro

nnem

ent

–D

imen

sion

liée

à le

ur p

erce

ptio

n cu

lture

lle d

e la

rela

tion

hum

ain/

natu

re

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–En

vie

de p

arta

ger l

eur c

ultu

re fa

voris

ant

le d

ével

oppe

men

t de

prod

uits

tour

istiq

ues

cultu

rels

basé

s su

r l’é

chan

ge–

Fier

té d

e la

cul

ture

= A

tout

pou

r le

dév

elop

pem

ent é

co- o

u et

hnot

ouris

tique

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–L’

envi

e de

par

tage

r leu

r cul

ture

la

rend

acc

essib

le a

u to

urist

e–

Le s

outie

n de

la p

opul

atio

n pe

ut

rend

re le

s co

nsul

tatio

ns p

ubliq

ues

plus

con

struc

tives

(app

ort d

’idée

s, et

c.)

Faib

less

es/fr

agili

tés

–N

éces

sité

de re

spec

ter l

e ry

thm

e d’

ouve

rture

de

chaq

ue c

omm

unau

pour

évi

ter d

es im

pact

s cu

lture

ls né

gatif

s (s

entim

ent d

’inva

sion,

etc

.)

Faib

less

es/fr

agili

tés

–O

uver

ture

au

ryth

me

de c

haqu

e co

mm

unau

Faib

less

es/fr

agili

tés

–A

bsen

ce d

’équ

ilibr

e de

la

gou

vern

ance

ent

re le

loca

l et

le ré

gion

al p

ouva

nt c

ondu

ire à

un

éca

rt en

tre le

s as

pira

tions

de

cha

que

nive

au–

Cloi

sonn

emen

t cul

ture

l et s

ocia

l fa

ce à

l’ex

térie

ur

Table

au 8

.3 (s

uite

)

FA

CTE

UR

S SO

CIO

POLI

TIQ

UE

S IN

FLU

AN

T SU

R L

A G

OU

VE

RN

AN

CE

DE

L’O

FF

RE

ÉC

OTO

UR

ISTI

QU

E A

U N

UN

AV

IK

Facte

urs s

ociop

olitiq

ues

Dime

nsion

s d’u

ne go

uver

nanc

e ter

ritor

iale e

n éco

touris

me

Prote

ction

des r

esso

urce

s natu

relle

s et

cultu

relle

sDé

velop

peme

nt ré

giona

lDé

mocr

atie p

artic

ipativ

e

Page 278: l'écotourisme entre l'arbre et l'écorce

256 L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce

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4.En

gam

ent e

t dyn

amism

e de

s ac

teur

s lo

caux

en

fave

ur d

’un

déve

lopp

emen

t éc

otou

ristiq

ue–

Visio

n du

dév

elop

pem

ent

tour

istiq

ue–

Volo

nté

des

insti

tutio

ns

de m

aîtri

ser l

e dé

velo

ppem

ent

tour

istiq

ue–

Capa

cité

de

maî

trise

r le

déve

lopp

emen

t tou

ristiq

ue–

Croy

ance

en

l’app

ort d

u to

urism

e po

ur le

dév

elop

pem

ent é

cono

miq

ue

et s

ocia

l–

Capa

cité

des

act

eurs

à s

atisf

aire

la

dem

ande

tour

istiq

ue–

Info

rmat

ion

et c

onsu

ltatio

n de

s ha

bita

nts

–Po

uvoi

r de

négo

ciat

ion

aupr

ès

du g

ouve

rnem

ent q

uébé

cois

–Fo

rmat

ion

prof

essio

nnel

le d

es

Inui

ts po

ur le

s se

rvic

es to

urist

ique

s–

Abs

ence

d’e

ngag

emen

t des

act

eurs

du

sec

teur

fina

ncie

r–

Bonn

e co

nnai

ssan

ce d

u te

rrito

ire

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–O

rient

atio

n du

dév

elop

pem

ent

tour

istiq

ue v

ers

des

form

es

de to

urism

e re

spec

tueu

ses

de

l’env

ironn

emen

t et d

e la

cul

ture

–Vo

lont

é de

maî

trise

r le

déve

lopp

emen

t to

urist

ique

–Pr

évisi

on d

es im

pact

s su

r l’e

nviro

nnem

ent e

t sur

les

com

mun

auté

s fa

voris

ée p

ar u

ne b

onne

co

nnai

ssan

ce d

u te

rrain

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–O

rient

atio

n du

dév

elop

pem

ent t

ouris

tique

ve

rs d

es fo

rmes

de

tour

isme

max

imisa

nt

les

reto

mbé

es é

cono

miq

ues

pour

les

com

mun

auté

s–

Poss

ibili

té d

e dé

velo

pper

des

pro

duits

to

urist

ique

s ad

apté

s au

x sp

écifi

cité

s du

terri

toire

grâ

ce à

une

bon

ne c

onna

issan

ce

du te

rrain

–D

ével

oppe

men

t soc

ial p

ar la

form

atio

n pr

ofes

sionn

elle

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Pr

ésen

ce d

e di

ffére

nts

grou

pes

d’in

térê

ts pa

rmi l

es a

cteu

rs

du d

ével

oppe

men

t tou

ristiq

ue

→ ra

ppor

ts de

forc

es d

éter

min

ant

les

enje

ux d

e la

gou

vern

ance

–Tr

aditi

on d

’info

rmat

ion

et d

e co

nsul

tatio

n de

pop

ulat

ion

–Po

uvoi

r de

négo

ciat

ion

des

Inui

ts

Faib

less

es/fr

agili

tés

–In

terro

gatio

ns e

n ce

qui

con

cern

e la

cap

acité

d’e

xerc

er u

ne m

aîtri

se

du d

ével

oppe

men

t tou

ristiq

ue: p

as

enco

re d

’out

il de

pla

nific

atio

n,

inca

paci

té d

es in

stitu

tions

à p

révo

ir le

s m

anœ

uvre

s du

sec

teur

tour

istiq

ue, e

tc.

–N

ivea

ux d

iffér

ents

de c

onsc

ienc

e en

viro

nnem

enta

le s

elon

les

acte

urs

Faib

less

es/fr

agili

tés

–Pr

ésen

ce d

e gr

oupe

s d’

inté

rêts

dive

rgen

ts ay

ant u

ne v

ision

diff

éren

te d

u dé

velo

ppem

ent t

ouris

tique

(pro

fits

priv

és

vers

us p

rofit

s co

mm

unau

taire

s)–

Inte

rroga

tions

sur

la c

apac

ité d

’ass

urer

une

m

axim

isatio

n de

s re

tom

bées

éco

nom

ique

s po

ur le

s co

mm

unau

tés:

inca

paci

té d

es

insti

tutio

ns à

pré

voir

les

man

œuv

res

du s

ecte

ur to

urist

ique

, for

mat

ion

lent

e, dé

velo

ppem

ent d

e l’o

ffre

suiv

ant l

a de

man

de a

vec

risqu

e d’

écar

t im

porta

nt e

ntre

le

s de

ux, f

aibl

e as

sidui

té a

u tra

vail

Faib

less

es/fr

agili

tés

–La

qua

lité

des

proc

édés

d’

info

rmat

ion

et d

e co

nsul

tatio

n de

la p

opul

atio

n n’

a pa

s pu

être

rifiée

Table

au 8

.3 (s

uite

)

FA

CTE

UR

S SO

CIO

POLI

TIQ

UE

S IN

FLU

AN

T SU

R L

A G

OU

VE

RN

AN

CE

DE

L’O

FF

RE

ÉC

OTO

UR

ISTI

QU

E A

U N

UN

AV

IK

Facte

urs s

ociop

olitiq

ues

Dime

nsion

s d’u

ne go

uver

nanc

e ter

ritor

iale e

n éco

touris

me

Prote

ction

des r

esso

urce

s natu

relle

s et

cultu

relle

sDé

velop

peme

nt ré

giona

lDé

mocr

atie p

artic

ipativ

e

Page 279: l'écotourisme entre l'arbre et l'écorce

Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique 257

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Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

5.O

rgan

isatio

n de

s ac

teur

s et

rése

auta

ge–

Abs

ence

de

struc

ture

visa

nt

à or

ient

er le

dév

elop

pem

ent

tour

istiq

ue–

Exist

ence

et p

erce

ptio

n po

sitiv

e de

s pa

rtena

riats

polit

ique

s et

com

mer

ciau

x–

Qua

lité

de la

com

mun

icat

ion

entre

le

s ac

teur

s to

urist

ique

s ré

gion

aux

–Co

mpé

tenc

e ré

gion

ale

de la

go

uver

nanc

e du

dév

elop

pem

ent

tour

istiq

ue

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Pa

rtena

riat a

vec

un g

roup

e d’

inté

rêt

défe

ndan

t la

prot

ectio

n de

la c

ultu

re

inui

te (A

vata

q) p

our l

e dé

velo

ppem

ent

des

parc

s (v

olet

cul

ture

l)–

Parte

naria

t ave

c la

Dire

ctio

n de

s par

cs,

atta

chée

au

min

istèr

e qu

ébéc

ois

de

l’Env

ironn

emen

t → C

ontrô

le s

ur la

pr

éser

vatio

n de

s re

ssou

rces

nat

urel

les

à l’i

ntér

ieur

des

par

cs

Forc

es/p

oint

s po

sitifs

–Co

mbi

naiso

n de

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Tiré de : L’écotourisme entre l’arbre et l’écorce, Christiane Gagnon et Serge Gagnon (dir.), �ISBN 2-7605-1430-7 • D1430N

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de gouvernance relève du développement durable, du développementéconomique ou de la démocratie locale. Les facteurs identifiés témoignentet caractérisent la recherche d’un équilibre de gouvernance écotouristiquelocale/régionale. Les facteurs inventoriés sont décrits pour ce qu’ilspeuvent apporter de positif (forces) à une dimension de gouvernance enécotourisme, mais également pour les contraintes (faiblesses, fragilités)dont les acteurs devront tenir compte dans ce développement.

4.1. STRUCTURE DE LA POPULATION

Le premier facteur sociopolitique, la structure de la population, semblefavoriser le développement de deux types d’activités : celles qui reposentsur des clientèles extérieures et celles dont l’isolement géographique nereprésente pas un obstacle important, tel le tourisme. Par ailleurs, le faiblepoids démographique de même que l’absence de formation posent uneentrave au développement d’entreprises sur le territoire (p. ex., l’héber-gement, les établissements de restauration et autres). L’ouverture au déve-loppement touristique et la vitesse de cette ouverture dépendront desrapports de forces entre les jeunes et les personnes âgées (une jeunesseplus nombreuse face à des aînés qui, traditionnellement, exercent uneinfluence de poids sur les décisions collectives).

4.2. LES VALEURS

Parmi les principales valeurs favorisant le développement d’activitéséconomiques/touristiques, on note la capacité d’adaptation aux innova-tions et le rythme de cette adaptation comme facteur de développementde nouveaux produits touristiques. La perception positive des Inuits àl’égard de l’entrepreneuriat incite à penser que s’ils étaient soutenusfinancièrement et détenaient les compétences appropriées, ils éprouve-raient le désir de créer des entreprises. Puisque l’écotourisme repose surun tissu de petites entreprises, l’on peut avancer qu’il serait plus facilepour les Inuits de développer ce genre d’entreprises (incluant la formecoopérative) que des entreprises nécessitant des investissements lourds.Sur ce point, leur vision est empreinte d’un certain mimétisme qui lesamène à s’inspirer des formes de développement économique, et touris-tique en particulier, se pratiquant ailleurs qu’en milieu autochtone etavec succès.

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4.3. LE SOUTIEN DE LA POPULATION LOCALE

Les résultats font également ressortir le soutien de la population localecomme facteur favorisant le développement touristique. Les Inuits sontfiers de leur culture et veulent la partager avec le monde extérieur, etcette fierté semble être un facteur d’attraction touristique. D’autre part,on peut espérer que le désir de partager leur culture puisse conduire lesInuits à créer des produits touristiques culturels originaux et de hautequalité. Enfin, on reconnaît l’ouverture de la population à « l’autre »comme une condition sine qua non d’un développement touristiqueviable pour les communautés hôtes.

4.4. ENGAGEMENT ET DYNAMIQUE DES ACTEURS

L’engagement et le dynamisme des acteurs d’un développement éco-touristique, quatrième facteur, se manifeste principalement dans la visiondistincte du développement touristique propre à chaque groupe d’acteurs.L’expression des divergences de conception du développement touristiquecaractérise les rapports de forces entre les acteurs de la gouvernance etles enjeux auxquels s’adresse la gouvernance. Les acteurs semblent favo-rables à ce développement et en ont une perception positive. Ceci devraitinfluer favorablement sur le rythme d’ouverture au tourisme sur le terri-toire et représente un point d’entente entre les acteurs de la gouvernance.Mais pour l’instant, aucun outil d’aide à la planification globale du déve-loppement du tourisme sur le territoire ne semble avoir été réalisé. Lavolonté est cependant présente de contribuer à l’amélioration des capacitésdes acteurs touristiques autochtones à satisfaire la demande touristique.

4.5. MODE ORGANISATIONNEL DES ACTEURS

L’analyse du dernier facteur, soit l’organisation des acteurs, montre quel’Association touristique du Nunavik (ATN) est l’un des rares organismesdoté d’une structure formelle qui regroupe les principaux acteurs du déve-loppement touristique, au niveau régional, et qui a pour but d’orienter ledéveloppement touristique. L’on note également un manque de concerta-tion entre tous les acteurs. On peut se demander si cette faiblesse n’est pasdue au fait que les décisions se prennent au niveau régional, soit un niveauplus éloigné de la population que le niveau local. Ceci laisse supposer quela gouvernance pourrait se doter d’outils de consultation efficaces auprèsdes communautés locales pour pouvoir asseoir un développement touris-tique répondant aux aspirations de chacune de ces communautés.

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4.6. SYNTHÈSE DES RÉSULTATS

Le tableau 8.4 présente une synthèse des résultats d’identification desprincipaux facteurs sociopolitiques propres à chacun des objectifs degouvernance en écotourisme au Nunavik.

CONCLUSION

Au cours de notre recherche, nous nous sommes intéressées à l’identifi-cation et à la description de facteurs sociologiques susceptibles d’influersur l’encadrement de la gouvernance de l’offre écotouristique au Nunavik.Dans ce contexte, le cadre théorique a été appliqué à l’étude de la miseen tourisme régionale dans laquelle s’insère la création du parc desPingaluit. Les données d’entrevues avec des acteurs impliqués dans cettemise en valeur touristique ont été traitées de manière inductive et regrou-pées selon cinq groupes de facteurs sociopolitiques. La mise en parallèlede ces facteurs avec les dimensions de problématique d’une gouvernanceparticipative en écotourisme tend à faire ressortir les influences poten-tielles de chacun des facteurs sur l’efficacité d’une gouvernance sur unterritoire, où les institutions désirent s’engager dans une perspectiveécotouristique du développement de l’activité touristique.

En résumé, voici les principales conclusions concernant les facteurssociopolitiques les plus pertinents dans l’organisation d’une gouvernancelocale en écotourisme.

• Les principaux facteurs sociopolitiques associés à la protectiondes ressources sont : a) s’assurer d’avoir un contrôle endogènesur le développement de l’offre écotouristique ; b) en consé-quence, choisir des produits/services conformes aux principes dedéveloppement durable des communautés ; c) quel que soit leproduit/service choisi par les différentes parties prenantes, res-pecter la capacité de charge du territoire. L’équilibre entre lestrois demeure à être défini par les acteurs impliqués dans laplanification de l’offre écotouristique découlant de la mise envaleur des parcs nationaux du Nunavik.

• Les principaux facteurs qui ressortent comme essentiels quant àla dimension développement régional sont : a) l’ouverture desréseaux d’intervenants locaux à des réseaux d’acteurs externes,soit d’autres communautés inuites, soit des allochtones issus des

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grands centres urbains ; b) les formes culturelles particulières departenariat à mettre sur pied, compte tenu du caractère commu-nautaire des collectivités territoriales ; c) le développement deproduits/services de première qualité pouvant répondre auxbesoins et attentes des écotouristes, en équilibre avec les valeursculturelles des communautés d’accueil (incluant leur rythmed’ouverture), ce qui comprend la création d’emplois dans lesecteur du tourisme et la formation de personnels compétents.

• Les facteurs sociopolitiques favorisant la démocratie participativesont : a) l’intégration structurée des collectivités locales au proces-sus de planification de l’offre écotouristique (information, consul-tation et participation à la mise en œuvre) ; b) la structuration d’unprocessus démocratique de décision concernant des projets dedéveloppement écotouristique, leur financement et l’analyse desretombées locales/régionales ; c) la promotion d’une cultured’ouverture, d’un « échange culturel » réel avec les visiteurs.

Bien que la présente étude ne puisse prétendre à l’exhaustivité desconditions de structuration de gouvernance en milieu inuit, l’identifica-tion de ces facteurs en fonction d’objectifs spécifiques de gouvernanceconstitue un pas vers une meilleure compréhension de la dimensionsociologique de la gouvernance en écotourisme et sa gestion dans uneperspective de développement territorial en milieu autochtone.

Enfin, les résultats relatifs à l’identification de facteurs portant surl’histoire et les valeurs locales aident à mieux comprendre les défis posésaux populations autochtones par le développement du tourisme. Commele souligne Collignon (1996), ces communautés vivent non entre mais,tour à tour, dans deux mondes, l’un représentant leur culture ancestrale,l’autre la culture occidentale. En ce qui regarde plus spécifiquement lagouvernance écotouristique, ce paradoxe pose clairement le défi d’unegestion équilibrée de l’adaptation à un renouveau identitaire. Concrète-ment, l’écotourisme, d’une part, par son attrait pour les vécus culturelsque l’on désire le plus « authentiques » possible – terme qui assume une« pureté » des éléments culturels transmis – et d’autre part, par ses exi-gences de confort à l’occidentale – autant pour les aspects de sécurité,d’hébergement et de nourriture que de ponctualité –, oblige les Inuits àse redéfinir entre ces deux mondes, ne serait-ce que par un cloisonnementpsychologique plus « janusien14 » pour fins de survie, tant sur le plan

14. De Janus, dieu romain représenté avec deux visages regardant dans des directions opposées.

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individuel que communautaire. L’on est ainsi amené à s’interroger sur ceque seront les formes et les effets de cette nouvelle adaptation, désiréepar certains mais redoutée par d’autres, lors de la mise en œuvre de lagouvernance des parcs nationaux du Nunavik.

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Facteurs sociopolitiques influant sur la gouvernance de l’offre écotouristique 265

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IIIIIIPartie

Forêt, terre et merL’activité écotouristique, une alternative pour la mise en valeur des ressources ?

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99Chapitre

La place de la forêt dans le développement futur des Antilles françaisesL’exemple de la Martinique

Philippe JosephMCF, BiogéographieUniversité des Antilles et de la Guyane, Département de géographie, laboratoire GEODE Caraïbe E929

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Résumé

À l’origine, dans les Petites Antilles, les forêts couvraient l’ensemble desîles du littoral jusqu’à environ 800 mètres. Espace de survie desAmérindiens et des premiers colons, l’écosystème sylvestre, malgré safragilisation progressive et sa régression spatiale, fut au XVIIIe siècle, auXIXe siècle et dans la première moitié du XXe siècle un lieu de forteexploitation. La dynamique de l’habitat, le développement des infrastruc-tures et des activités économiques consommatrices d’espaces, en con-gruence avec une forte croissance démographique, sont les principalescauses de la régression actuelle des unités forestières. Pourtant celles-ci, par leur « tropicalité » singulière, sont en grande partie des élémentsessentiels dans l’attrait touristique, notamment pour l’écotourisme.

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Les résultats issus des travaux anciens et récents concernant l’évolutionde la végétation des Petites Antilles montrent le caractère purement fores-tier du couvert végétal précolombien (Stehle, 1935 ; Portecop, 1978 ;Fiard, 1994 ; Joseph, 1997), depuis le littoral jusqu’à une limite altitudi-nale comprise entre 800 et 900 mètres selon la façade. Dès l’époqueprécoloniale, la végétation de la Martinique, à l’instar des autres PetitesAntilles, a subi de profondes dégradations anthropiques liées aux moda-lités d’occupation de l’espace et d’utilisation des ressources naturelles.Cette anthropisation diversifiée en intensité et en fréquence fut et restel’élément principal conditionnant le modelé paysager actuel. Progressi-vement, au cours de l’histoire de cette île, les formations végétalesrégressives essentiellement arbustives, herbacées ou encore préforestièresse sont substituées aux différentes sylves originelles supposées climaciques1.En réalité, la forêt s’est inexorablement « insularisée2 ».

Pour cause d’artificialisation graduelle des biotopes, les unitésvégétales du présent dérivent majoritairement de cette végétation origi-nelle sylvatique homéostatique3 et ont des caractéristiques floristiques etbiocénotiques4 multiples qui, logiquement, correspondent à un grandnombre d’états de complexité. Ceux-ci s’assimilent à des stades précisde la succession végétale qui, dans une certaine mesure, sont autant deformes régressives qu’il faudra positionner sur un gradient temporel (legradient dynamique). Néanmoins, les couverts sylvestres relictuelsd’aujourd’hui renferment marginalement des groupements de grandequalité écosystémique et floristique proches de ceux qui, à l’origine,couvraient la totalité de l’île. De nos jours, la végétation est une mosaïquede communautés d’âges, de composition et de complexité floristiquesdifférents. Le maintien d’un minimum de diversité biologique a nécessité,depuis quelques décennies, la mise en protection de certaines portionsboisées du territoire martiniquais au titre de la qualité floristique, de laqualité paysagère et de la complexité écosystémique. Ces aires protégéesforestières ou considérées comme telles, se distribuant dans l’ensembledes bioclimats, sont gérées par tout un ensemble d’organismes public del’État et des collectivités territoriales : le Conservatoire du littoral et des

1. Le climax est l’évolution optimale de l’écosystème en rapport avec les conditions du milieu.Dans la zone tropicale, en général, celui-ci est forestier.

2. Aujourd’hui la forêt martiniquaise occupe 20 % de sa surface originelle. Ses unités constitu-tives s’insèrent dans une végétation principalement arbustive et sont de véritables îles.

3. Les biosystèmes homéostatiques sont ceux qui ont atteint un équilibre ultime vis-à-vis desfacteurs physiques : c’est le climax.

4. Communautés biologiques végétales (phytocénoses) ou animales (zoocénoses).

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rivages lacustres, le Parc naturel régional de la Martinique (PNRM) etl’Office national des forêts (ONF). Toutefois, en dépit d’une kyrielle delois et de directives environnementales, la petitesse de l’île, le manquede réserve foncière des communes, la croissance économique et infra-structurale, plutôt sectorielle que globale, constituent un danger pour lapréservation des reliques forestières. La dépendance quasi-totale vis-à-vis de la France et récemment de l’Europe, notamment en termes d’éner-gie et de bois, limite la régression spatiale des reliques forestières, ce quileur permet encore de conserver leurs capacités de régulation.

L’avenir semble toutefois sombre puisque la forte densité humaineet le niveau de vie similaire à celui de la France hexagonale génèrent uneemprise spatiale de plus en plus importante sur un territoire minusculeet affectés d’aléas climatiques et telluriques divers et d’occurrence variée.En réalité, sans opérer une quantification, il est fondé d’avancer quel’empreinte écologique de la société martiniquaise, comme ailleurs dansla biosphère, dépasse les capacités de résilience de ses environnementsnaturels. Du point de vue floristique, biocénotique et écosystémique, laMartinique, à l’instar des autres Petites Antilles, est un « univers replié ».En dépit de sa surface très réduite, grâce à ses formes de vie végétale età ses communautés floristiques plurales, notamment forestières, elle estconsidérée comme une zone de haute biodiversité à l’échelle de la bio-sphère5

: un hot spot de la variété biologique. Comment trouver un équi-libre entre nature et société ou encore entre les hommes et les multiplesfacettes de la forêt, lorsque la croissance économique et infrastructurale,nécessaire et vitale, est consommatrice d’espaces au détriment des for-mations sylvestres, même protégées ? C’est un véritable dilemme, car cesdernières sont une composante forte de la « tropicalité » de l’île qui, parune valorisation intelligente, serait un bon cadre pour les activités detourisme écologique. D’entrée de jeu, le problème du développement etdu développement durable se pose en termes de choix et de stratégies dela part des communautés6. L’écotourisme semble être une bonne solutiondans la perspective d’une gestion durable de la biodiversité forestière.

5. Il y a plus d’espèces d’arbres à Marie-Galante (petite dépendance de la Guadeloupe) qu’enFrance hexagonale. Le nombre d’espèces d’arbres forestiers de la Martinique est de loinsupérieur à celui de l’Europe tout entière.

6. Les stratégies locales, dans l’optique du développement durable, doivent être le reflet desdirectives régionales et nationales.

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BREF APERÇU DE L’ÉVOLUTION DE LA VÉGÉTATION DE L’ÉPOQUE PRÉCOLOMBIENNE À NOS JOURS

Il est extrêmement difficile de décrire avec précision l’évolution des tapisvégétaux de la Martinique, ceci à cause d’un manque profond de référentsscientifiques dont les caractéristiques seraient irréfutables. À partir decommunautés forestières arrivées à une phase hypothétique de plus hautestructuration, correspondant à un équilibre biologique maximal, les acti-vités humaines depuis 1635 ont induit des modifications notables. Lespopulations originelles précoloniales (les Amérindiens), à la lumière destravaux récents, semblent avoir faiblement transformé les milieux primi-tifs dont elles exploitèrent, dans des rapports symbiotiques, ou encoreéquilibrés, les ressources offertes. Depuis la prise de possession par lespopulations de l’Ancien Monde, l’évolution de la végétation de nos îlesest en covariance avec les multiples modes successifs d’utilisation desressources environnementales. En adjoignant les Amérindiens, notam-ment aux premiers temps de la colonisation, on pressent parfaitement lesdéterminismes socioculturels et techniques qui ont été actifs et qui ontconditionné l’évolution des unités paysagères.

Logiquement, à la préhistoire de la Martinique, les transformationsd’origine humaine dans le monde végétal se résumaient à quelques par-celles plantées de vivres, généralement en dehors des zones d’habitation.Leurs faibles dimensions en faisaient des éléments marginaux ayant peud’impacts tangibles sur la physionomie globale des unités de végétationsylvestre primitive. L’an 1635 constitue le point de départ d’un long etefficace processus de dégradation, de déstructuration et de recul du tapisvégétal forestier primitif. Au fil des temps, il s’est « insularisé » au nordet sur quelques mornes7 du sud. Tous les éléments constitutifs de lavégétation actuelle sont issus de la formation sylvestre préhistorique, quelque soit leur niveau organisationnel.

7. Les mornes sont de petites collines.

1.

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LES PRINCIPALES AIRES PROTÉGÉES FORESTIÈRES DU PRÉSENT : RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE, ASPECTS JURIDIQUES ET FACTEURS MÉSOLOGIQUES8

Les formations forestières bénéficiant actuellement d’une protection serépartissent sur l’ensemble du territoire martiniquais et correspondent àdes conditions bioclimatiques diverses. Ce sont des exemples pertinentsdes nombreuses facettes de l’écosystème sylvestre9, dont la gestion relèved’une pluralité d’organismes publics.

2.1. SITUATION GÉOGRAPHIQUE ET ASPECTS JURIDIQUES

Les forêts protégées se répartissent sur l’ensemble de l’île10. Toutefois,elles sont en plus grand nombre au sein de l’espace littoral. Hormis lesdomaines gérés par l’ONF, la Réserve naturelle de la presqu’île de laCaravelle et l’acquisition du Conservatoire du littoral située au niveaude la pointe nord, ces aires protégées sont à l’échelle de la Martiniquede petites surfaces sujettes à des pressions anthropiques multiples. Leursintérêts paysagers et écologiques pluriels se traduisent dans les diffé-rentes protections mises en œuvre, qui renvoient à des modes gestionnelsspécifiques. Les outils juridiques associés sont nombreux (figure 9.1,tableau 9.1) et vont de la protection foncière forte (Conservatoire dulittoral) à la réserve naturelle (Parc naturel régional) en passant parl’arrêté préfectoral de biotope, les sites inscrits (État), les sites classés(État) et les Réserves biologiques domaniales et forestières (Office natio-nal des forêts, en projet). Dans bien des cas, le classement Conservatoiredu littoral, via l’expropriation, est l’aboutissement d’une démarche deconservation et de protection qui implique préalablement la mise enplace de procédures réglementaires, tels les sites inscrits et classés,visant à grever toute dégradation pouvant remettre en cause l’intégritéde ces milieux remarquables. Cette évolution dans la préservation desmilieux conduit souvent à une superposition de mesures juridiques et decompétences administratives.

8. Les facteurs mésologiques sont les facteurs du milieu physique.9. Hormis les milieux arides, dans les Petites Antilles, grâce en partie à l’anthropisation, on

trouve presque tous les types physionomiques de l’espace intertropical.10. Tous les étages végétaux donc bioclimatiques sont concernés.

2.

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Figure 9.1

ESPACES NATURELS BÉNÉFICIANT D’OUTILS GESTIONNELS

Réserve naturelle

Forêts domaniales du littoral

Sites inscritsForêts départementales, domaniales et communalesDomaine du Conservatoiredu littoral

Mangroves

-

ˆ

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2.2. QUELQUES ENSEIGNEMENTS SUR LES FACTEURS MÉSOLOGIQUES

Nonobstant sa petitesse, la Martinique, grâce à sa morphologie et au regarddes caractéristiques aérologiques du bassin caraïbe, initie la variation nota-ble de certains facteurs climatiques telles la pluviosité, l’insolation, lanébulosité et l’évapotranspiration. Les différents bioclimats sont des con-séquences directes et définissent la mise en place des ensembles floris-tiques ou étages végétaux. À partir du littoral, ces derniers correspondentrespectivement aux bioclimats subhumide sec, subhumide humide ethumide. À la diversité des climats locaux correspondent de nombreuxtypes de sols issus de processus pédogénétiques, en partie fonction de laressource en eau précipitée. À l’instar des bioclimats dans leur pluralitéde faciès stationnels, ces sols présentent nombre d’aspects particuliers tantstructuraux, texturaux que fonctionnels. Les différentes composantes éda-phiques existantes sont à mettre en rapport avec les nombreuses classesde faciès topographiques qui résultent d’un modelé géomorphologiqueaccidenté. Cette topographie tourmentée, dans certains cas, peut être àl’origine de singularités dans la distribution normale des écosystèmessylvestres, notamment sur les crêtes exposées en bioclimat subhumide

Tableau 9.1

OBJECTIFS PRINCIPAUX DES PROTECTIONS

Arrêté préfectoral de biotope Préservation des biotopes nécessaires à la survie d’espèces protégées. Interdiction des actions pouvant porter atteinte à l’équilibre biologique des milieux.

Site inscrit Conservation de milieux et de paysages dans leur état actuel.

Site classé Protection et conservation d’espaces naturels quelle que soit leur dimension : procédure très utilisée dans la cadre de la protection de paysages.

Réserve naturelle Préservation d’espèces animales ou végétales et d’habitats en voie de disparition. Reconstitution de populations animales ou végétales ou de leurs habitats. Protection des biotopes remarquables. Préservation des milieux indispensables pour les études scientifiques et techniques nécessaires au développement des connaissances.

Réserve biologique domaniale et Réserve biologique f orestière

Établir une gestion particulière orientée vers la sauvegarde de la faune, de la flore ou de toute autre ressource naturelle. Réaliser des observations scientifiques. Assurer l’éducation du public.

Conservatoire du Littoral Protection foncière forte.

Source : P. Joseph, Direction régionale de l’environnement Nord-Pas-de-Calais et Conservatoire dulittoral et des rivages lacustres.

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humide et dans les fonds de vallons en bioclimat subhumide sec qui, dis-tinctivement, permettent la colonisation de communautés floristiquesatypiques xérophiles et mésophiles (Joseph, Pagney et Tanasi, 2003). Leréseau hydrographique par la variation spatiale de ses caractéristiquesstructurales et fonctionnelles va, lui aussi, influencer la mise en place desentités végétales, précisément les ripisylves. S’adjoignent à ces élémentsles vecteurs de dissémination anémochores, borochores et zoochores quidépendent des différentes phases d’évolution des ensembles végétaux etdont la dynamique est mal connue, notamment pour la faune aviaire.

Ce sont autant de contraintes factorielles dites naturelles, auxquellesil faut ajouter l’Homme. L’ensemble définit une multiplicité de biotopesconditionnant une mosaïque paysagère complexe. La grande biodiversitéforestière d’aujourd’hui, base possible d’une valorisation touristique, estparadoxalement le résultat des modes d’utilisation de l’espace par lessociétés successives.

CARACTÉRISTIQUES ÉCOSYSTÉMIQUES, PHYSIONOMIQUES ET FLORISTIQUES

Dans les aires protégées prises en référence, tous les types forestierssont représentés et ont des potentialités écosystémiques différentes. Ilscorrespondent aux étages végétaux inférieur, moyen et supérieur quiaccueillent les formations sylvatiques potentielles suivantes (nomencla-ture UNESCO, 1973), ayant des limites altitudinales comprises respec-tivement en moyenne entre 0 et 250 m, 250 et 400 m, 400 et 800 m : lasylve sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de facièsxérique (forêt xérophile, H. Stehle, J. Portecop), la sylve sempervirentesaisonnière tropicale type (forêt mésophile, H. Stehle, 1947 ; J. Portecop,1978), la sylve ombro-sempervirente saisonnière tropicale (forêt hygro-mésophile, écotone, H. Stehle, 1947 ; J. Portecop, 1978), la sylve ombro-phile sub-montagnarde tropicale (forêt hygrophile, H. Stehle, 1947 ;J. Portecop, 1978), la sylve ombrophile montagnarde tropicale (forêthygrophile de montagne, H. Stehle, 1947 ; J. Portecop, 1978). Le typeombro-sempervirent saisonnier tropical, se développant à l’interface dessylves ombrophile sub-montagnarde tropicale et sempervirente saison-nière tropicale d’horizon supérieur, est une forme intermédiaire ou detransition (écotone) présentant une grande richesse floristique. Hormisquelques secteurs marginaux où il existe des éléments relictuels de laforêt antécoloniale contenant nombre d’essences des phases succession-nelles terminales ou tardives, les différents secteurs protégés sont occupés

3.

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par des sylves régressives (Joseph, 1998). Malgré le caractère secondairedu couvert sylvatique, il existe sur les pentes nord-ouest de la montagnePelée des secteurs du Conservatoire du littoral et de la forêt domaniale(ONF) de haute structuration écosystémique (Joseph, 1999 ; 2004b). Cesont de véritables sanctuaires de la flore primitive.

3.1. LES DOMAINES FORESTIERS DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL DU SUD

À tendance xérique, les domaines du Conservatoire du littoral (tableau 9.2)sont définis par une faible pluviométrie annuelle (environ 1 500 mm), unenébulosité très réduite induisant une insolation conséquente (2 900 heures/an) et une exposition significative. La période sèche (Carême) peut durercinq à six mois, voire sept lors des années fortement déficitaires en eau.Les sols correspondants sont très argileux (vertisols) et sont sujets àl’érosion en absence d’une protection mécanique significative liée à laprésence de la forêt. Ces espaces ont été acquis au titre de la diversité dumilieu naturel, produisant des sites et paysages de très grande qualitébiologique et esthétique. En effet à la végétation psammophile11 s’ad-joignent les communautés d’arrière-plage et de terre ferme. La plupartdes entités floristiques observables, quelles que puissent être leur phéno-logie12 et leur physionomie, dérivent respectivement de l’écosystèmepsammophile antécolonial, s’agissant de la plage et de la sylve semper-virente saisonnière tropicale d’horizon inférieur, et du faciès xérique,concernant la terre ferme. En réalité, ce sont des phytocénoses régressivesqui appartiennent à différents stades de la succession végétale.

La grande hétérogénéité observable est essentiellement due à uneanthropisation qui fut inégale en intensité et en fréquence et aussi à denombreux faciès topographiques. À cette multiplicité d’organisations flo-ristiques est associée une avifaune abondante, typique des zones ouverteset semi-ouvertes du bioclimat sec. Actuellement, les végétaux dominantsprésentent des adaptations variées d’ordre physiologique (caducité), ana-tomique (cuticule, poils, etc.) ou morphologique (réduction accentuée dela dimension des feuilles). Globalement, la caducité est la principalemodalité adaptative face à la sécheresse (Carême). Les autres adaptationsobservées sont liées à certaines caractéristiques stationnelles comme

11. Végétation sur milieux sableux.12. Cycle biologique des espèces : la floraison et la fructification sont des phénophases.

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l’exposition au vent et les sols squelettiques. Fréquemment, au niveau dulittoral, le vent induit des anamorphoses ; les espèces d’arbres dites« anémomorphes13 » forment des phytocénoses singulières.

Tableau 9.2CARACTÉRISTIQUES DES ACQUISITIONS DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL (SUD) (PROTECTION FONCIÈRE FORTE)

Site Commune Date

d’acquisitionSuperf cie

(ha) Caractéristiques écosystémiquesPointe Rouge Trinité 1985 55 Forêt sempervirente saisonnière

tropicale type secondaire.

Presqu’île de la Caravelle

Trinité 1988 257 Couvert végétal sempervirent saisonnier tropical d’horizon inférieur, aux stades préforestier et forestier secondaire.

Morne Larcher Diamant / Anses d’Arlet

1988 64 Forêt sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur de faciès xérique secondaire.

Macabre Marin 1990 113 Couvert végétal sempervirent saisonnier tropical inférieur de faciès xérique aux stades arbustif, préforestier et forestier secondaire.

Cap Salomon Anses d’Arlet 1994 137 Forêt sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur de faciès xérique, secondaire.

Morne ACA Marin 2000 238 Forêt sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique, secondaire, quelques unités secondaires avancées.

Habitation Blin

Trinité 2000 16 Couvert végétal sempervirent saisonnier tropical inférieur de faciès xérique aux stades arbustif et préforestier.

Pointe Borgnèse

Marin 2001 10 Couvert végétal sempervirent saisonnier tropical inférieur de faciès xérique au stade arbustif, quelques îlots préforestiers.

Habitation Blin

Trinité 2001 26 Couvert végétal sempervirent saisonnier tropical inférieur de faciès xérique aux stades arbustif et préforestier.

Source : Conservatoire du littoral et des rivages lacustres.

13. Ces espèces adoptent des physionomies signifiées par une dissymétrie du houppier. Ellesexposent au vent, en quelque sorte, le plus petit volume possible de biomasse épigée.

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3.2. LE MASSIF SYLVESTRE DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL DU NORD

Les groupements forestiers du Conservatoire du littoral, au nord-ouest dela Martinique, couvrent les flancs de la montagne Pelée, de 0 à 500mètres d’altitude. Cette zone d’une surface de 679 hectares14 jouxte laforêt domaniale qui s’étend en moyenne jusqu’à 800 mètres d’altitude,là où les conditions écoclimatiques permettent l’installation de la forêt.L’existence essentiellement des bioclimats subhumide, humide et hyper-humide fait que le type sylvatique potentiel sempervirent saisonnier tro-pical est peu représenté, sauf sur les crêtes ventées possédant des solspeu profonds.

Dans les zones basse et moyenne, entre 0 et 300 mètres d’altitude,à l’exception de quelques sanctuaires relictuels de la flore primitive, lemanteau végétal originel a été notablement modifié. Cette modificationfut effective dès la fin du XVIIe siècle et conditionna les combinaisonsfloristiques, la diversité spécifique et communautaire, et les mécanismessuccessionnels15. Schématiquement, on est passé d’un couvert forestierd’organisation complexe et pluristratifiée16, signifié par un toit aux houp-piers jointifs, à une végétation composée d’unités sylvestres structurale-ment simplifiées (une ou deux strates) au toit lacunaire (hétérogène).Contrairement à l’époque amérindienne où les essences forestières ter-minales (climaciques) et très spécialisées étaient prépondérantes, dès1635 l’occupation du sol, particulièrement dans la zone basse, s’est pro-gressivement accompagnée d’une mise en place d’espèces généralistespropres aux groupements forestiers régressifs. La limite supérieure desconcessions attribuées aux premiers colons ne dépassant pas 400 mètres,on peut supposer qu’au-delà, les écosystèmes forestiers ont gardé unepart non négligeable de leur nature originelle donc primitive. Effective-ment, au regard de la topographie impropre à l’agriculture – crêtes étroi-tes, pentes de forte déclivité (35°-45°) –, de la structuration spatiale despremières concessions – les parties supérieures étaient maintenues boi-sées –, de critères phytosociologiques et écologiques – distribution desclasses diamétriques, richesse floristique, tempérament des espèces parrapport à la lumière – et à l’exception de prélèvements sélectifs d’arbres

14. Dont 509 (Anse Couleuvre) et 170 ha (Fond Moulin) ont été acquis respectivement en 1986et 1999.

15. Ceux qui sont relatifs à la succession végétale.16. Les sylves matures ont en moyenne quatre strates et présentent une forte phytomasse.

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précieux pour la construction, l’ébénisterie et la menuiserie, il est fortplausible qu’aucune coupe claire ne fut effectuée au-dessus d’une altitudede 400 m.

3.3. LES RÉSERVES BIOLOGIQUES DOMANIALES ETFORESTIÈRES FUTURES

Compte tenu de la richesse et de la diversité des écosystèmes sylvatiquesde la Martinique, la mise en place d’un réseau de réserves biologiquesest primordiale (tableau 9.3). Selon les propriétaires, elles seront doma-niales (le Département) ou forestières (Conservatoire du littoral) etrépondront au désir de plus en plus affirmé des pouvoirs publics deprotéger les milieux de grande qualité écologique. Malgré l’exiguïté dela Martinique, à laquelle s’ajoute une forte anthropisation ancienne etrécente, les ensembles forestiers d’aujourd’hui comportent quelquesreliques patrimoniales, notamment les forêts domaniales et les forêts nondomaniales gérées par l’Office national des forêts, qui sont considéréescomme des milieux fragiles et écologiquement vulnérables dans lesquelsla faune et la flore sont diversifiées. Ce sont des biocénoses d’intérêtbiologique notable présentant des raretés et des richesses aussi bien fau-nistiques, floristiques qu’écosystémiques. La sauvegarde de toutes lesressources naturelles et de toutes les diversités spécifiques et communau-taires, l’éducation du public, le suivi scientifique des populations et lagestion conservatrice sont les principaux objectifs de ces réserves. À partirde nombreux inventaires, l’Office national des forêts de la Martinique aproposé en 1998 un ensemble de sites susceptibles de constituer unréseau de réserves biologiques domaniales et forestières. Présentement,seuls les groupements forestiers de la montagne Pelée, de Grand-Macabouet de Pointe Rouge font l’objet d’une procédure de mise en réserve.Néanmoins ces forêts sont sous gestion ONF et peuvent être assimilées,d’ores et déjà, à des aires protégées.

3.4. LES SITES INSCRITS ET CLASSÉS

Les sites inscrits et classés sont des protections réglementaires permettantde prévenir toute dégradation dans un milieu considéré comme patrimo-nial tant du point de vue floristique, avifaunistique et paysager qu’éco-systémique. Ces deux principes réglementaires opposables au tiers sontlogiquement suivis de mesures de protection plus fortes associées notam-ment aux réserves naturelles, aux réserves biologiques et aux terrainsacquis par le Conservatoire du littoral. L’inscription sur la liste des sites

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Tableau 9.3

PROJETS DE RÉSERVES BIOLOGIQUES

Site Zone forestièreSuperf cie(ha) Statut

Caractéristiques écosystémiques(classif cation de l’UNESCO ; Joseph, 1998)

Montagne Pelée FDD : Pitons du Carbet 2291 RBD intégrale

Forêts anciennes : ombrophile sub-montagnarde tropicale, ombrophile montagnarde tropicale et de brouillard. Formations végétales d’altitude.

Prêcheur Grand’Rivière

FDD littorale 36 RBD intégrale

Végétation psammophile et de falaise. Forêt secondaire sempervirente saisonnière tropicale possédant des unités très structurées.

Prêcheur Grand’Rivière

Conservatoire du littoral 509 RBF intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnarde et ombro-sempervirente saisonnière tropicale aux stades secondaire et secondaire tardif, voire subclimacique.

Bois Leyritz FDD : 179 RBF intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnarde et ombro-sempervirente saisonnière tropicale aux stades secondaire et secondaire tardif.

Pitons du Carbet

FDD : Pitons du Carbet 3700 RBD intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnarde tropicale primaire relictuelle. Forêts ombrophiles sub-montagnardes secondaire et pionnière. Forêt ombrophile de montagne tropicale. Végétation arbustive et herbacée d’altitude.

Mornes des Olives

FDD : Pitons du Carbet 115 RBD intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnnarde ancienne.

Bois Crassous Forêt départementale 71 RFD intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnarde et ombro-sempervirente saisonnière tropicale aux stades secondaire et secondaire tardif.

Bois d’Once Forêt départementale 85 RFD intégrale

Forêt ombrophile sub-montagnarde ancienne, voire climacique ou subclimacique.

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Baie de Genipa FD littoral du sud 224 RBD dirigée

Stades régressifs de la forêt d’arrière-mangrove sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Le Saut FDD du sud 6,5 RBD dirigée

Stades régressifs de la forêt sempervirente saisonnière tropicale type et d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Piton Crève-Cœur

FDD du sud 30 RBD dirigée

Forêt secondaire sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Grand Macabou Conservatoire du Littoral 113 RBD dirigée

Stades régressifs de la forêt d’arrière-plage semi-décidue en saison sèche tropicale.

Grand Macabou FDD du sud 30 RBD dirigée

Stades régressifs de la forêt d’arrière-plage semi-décidue en saison sèche tropicale.

Dumaine FDD du sud 7 RBD dirigée

Forêt secondaire sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Pointe Rouge Conservatoire du Littoral 54 RBF dirigée

Forêt secondaire sempervirente saisonnière tropicale type et d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Pointe Rouge FDD du sud 11 RBD dirigée

Forêt secondaire sempervirente saisonnière tropicale type et d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Pointe Savane FDD du sud 26 RBD dirigée

Stades régressifs de la forêt sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique.

Îlet Chancel FDD du sud 44 RBD dirigée

Stades régressifs des forêts sempervirente saisonnière tropicale d’horizon inférieur et de faciès xérique et semi-décidue en saison sèche tropicale.

Source : ONF (Réseau de réserves biologiques, 1998).(FDD : Forêt départementalo-domaniale / RBD : Réserve biologique domaniale / RBF : Réservebiologique forestière)

Tableau 9.3 (suite)

PROJETS DE RÉSERVES BIOLOGIQUES

Site Zone forestièreSuperf cie(ha) Statut

Caractéristiques écosystémiques(classif cation de l’UNESCO ; Joseph, 1998)

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inscrits ou classés est en réalité un préalable, une intervention en amontdes pouvoirs publics, grevant définitivement les actions anthropiquespotentiellement dommageables à la qualité esthétique et écoystémique,donc paysagère des milieux naturels. Malgré les analogies existant entreces deux procédures juridiques, le site classé paraît être un principe deconservation et de protection beaucoup plus fort. Souvent, il précède unepréservation drastique des milieux concernés.

LA FORÊT ENTRE ÉCOLOGIE ET ÉCONOMIE : LA QUESTION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

La Martinique appartient à l’empire floral néotropical et présente defortes similitudes taxonomiques avec le reste de la Caraïbe, notammentau niveau des familles floristiques. Elle partage avec les Petites Antillesun même fonds d’espèces (Howard, 1979-1989), notamment sylvatiques.Les disparités écosystémiques actuelles résultent de caractéristiques phy-siques et de modalités anthropiques. Entre facteurs mésologiques (fac-teurs du milieu) et activités humaines, les déterminismes de l’importanceécologique des taxons forestiers sont difficiles à établir. La conservationde la biodiversité inhérente à l’écosystème forestier doit s’adresser àl’ensemble des étages végétaux (inférieur, moyen et supérieur). Seule laconnaissance des mécanismes de renouvellement écosystémique permet-tra l’exploitation durable des ressources sylvatiques. Quatre-vingts pourcent des surfaces forestières ont disparu depuis la prise de possession del’île en 1635. Celles17 d’aujourd’hui, essentiellement secondaires, sont lesiège d’une richesse écologique étonnante qui érige la Martinique, àl’instar des autres îles montagneuses de l’archipel, en zone de fortebiodiversité18.

Dans cette petite île où l’espace est une ressource à part entière, lagestion de cette biodiversité forestière doit impliquer l’ensemble de lasociété : de l’individu aux services de l’État et des collectivités territoriales.

17. Les 20 % restant sont constitués d’unités plurales de dimension, de composition floristiquese situant aux stades forestiers jeune, secondaire, secondaire tardif (forêts matures) et plusrarement préclimacique et climacique. La plupart des formations sylvatiques sont des bio-systèmes de recolonisation suite à la déprise agricole liée à l’effondrement de l’industriecannière lorsque le sucre de betterave devint concurrentiel.

18. La biodiversité, ici, est considérée dans son acception la plus large et intègre toutes formesd’organisation végétale (mais également faunistique) : de l’espèce au paysage en passant parles biocénoses (les communautés végétales et animales) et l’écosystème.

4.

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Autrement dit, tout en considérant les spécificités des différents étagesbioclimatiques, les modalités de protection, de conservation, de valorisa-tion et de gestion des milieux et des systèmes sylvestres doivent releverde directives complémentaires et hiérarchisées. Cela nécessite la mise enplace de politiques environnementales cohérentes et solidaires à l’échellecommunale, départementale et régionale.

Les pratiques administratives19 qui en découleront telles que la priseen compte de la biodiversité forestière dans les PLU (les plans locauxd’urbanisme), dans les espaces sensibles du Département, dans le SAR(schéma d’aménagement régional) et le SMVM (schéma de mise envaleur de mer) devront être conformes aux principes européens et inter-nationaux de gestion durable de la biosphère. L’équilibre entre les sys-tèmes biologiques et socioculturels, primordial pour le développementdurable, ne sera possible à long terme que par la mise en place, entreautres, d’outils de planification qui considèrent toutes les contraintessociétales et environnementales. Le développement actuel, ayant généra-lement pour but la croissance de certains secteurs de l’économie20, se faitle plus souvent au détriment des reliques forestières. Et bizarrement,même celles qui sont dites protégées subissent de façon directe ou indi-recte l’anthropisation. Au regard de la petitesse de la Martinique et deson relief montagneux21, les 400 000 habitants, dont le niveau de vie estproche de celui de la France hexagonale, imposent une charge très fortesur les milieux. Et fréquemment, c’est en périphérie des massifs forestierspériurbains et ruraux, quelquefois de grande qualité écosystémique, queles collectivités territoriales (région, département, communes), dansl’urgence et en toute illégalité, étendent l’urbanisation22.

19. En France hexagonale et insulaire, les communes constituent des départements (Conseilsgénéraux), ces derniers des régions (Conseils régionaux) : l’ensemble forme des collectivitésterritoriales décentralisées.

20. Le développement d’une activité économique qui ne prend pas en compte la dynamique desautres est sectoriel et s’oppose même au principe du développement durable. Une valorisationtouristique des sylves qui ne permet pas de les pérenniser ainsi que les services écosystémiquesqu’elles offrent est dommageable et pour la société et pour le milieu naturel.

21. Du fait de son origine volcanique due à une subduction intraocéanique, le relief est fortementtourmenté et les nombreux pitons, les collines moyennement élevées et la Montagne peléeréduisent l’espace pouvant être humanisé (les ressources foncières de communes). Tout enprésentant de fortes disparités démographiques et économiques, la majorité des populationsvit sur le littoral.

22. La législation en matière de protection de l’environnement n’est que faiblement appliquée.Ceci résulte soit des pressions opérées par les promoteurs privés, soit du laxisme lié à desstratégies bassement politiques, notamment s’agissant du bâti individuel.

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En réalité, pour protéger la forêt, il faut passer par une valorisationcomplémentaire des différentes potentialités insulaires. Il n’est pasdémontré, au regard de la démographie et de la configuration actuelle dela mondialisation, qu’une utilisation, même efficiente, de toutes les res-sources écosystémiques, puisse garantir un réel développement durable.

La Martinique présente de fortes homologies sociologiques avec lesautres Petites Antilles (anglaises, néerlandaises, l’archipel guadeloupéen).Comme celles-ci, elle est issue de la colonisation et, pendant longtemps,a été une société d’habitations23 liées à l’économie esclavagiste. De nosjours, nombre de traits identitaires, de particularismes culturels et de ten-sions ethniques et socioéconomiques proviennent insidieusement de cettepériode historique. Lors de sa fondation, cette phase coloniale signifiéepar les grandes cultures spéculatives fut déterminante dans l’organisationspatiale et humaine du territoire et, par conséquent, dans la modificationde la biodiversité originelle singulièrement sylvatique (Gargominy, 2003 ;Joseph, 1997 ; Portecop, 1978). La Martinique ainsi que les autres sociétésde l’archipel sont composées d’un même peuple aux caractères multiples,dispersé sur d’imperceptibles cailloux à l’échelle de l’immensité océanique.Finalement, les hommes de la Martinique, à l’instar de ceux des autrescomposantes de la Caraïbe, sont des « êtres émergents », des « fonctionsnouvelles » créées par le fait colonial à partir de fonctions basalesamérindiennes, africaines, européennes, indiennes et asiatiques.

Toutefois, la proximité géographique et l’histoire commune n’ontpas conduit à l’émergence d’un ensemble social, culturel, politique etéconomique unique, nonobstant l’existence d’une coopération économique,notamment entre la plupart des États de la Caraïbe24.

23. Les habitations dans les Antilles françaises et les plantations dans les Antilles anglaises étaientdes sortes de fermes de cultures spéculatives d’exportation, basées sur la force physiqued’ouvriers esclaves. Jadis elles prirent leur pleine expansion avec la canne à sucre, aujourd’huielles existent sous une autre forme : les ouvriers sont certes libres, cependant en plus dutravail dur, ils ont de très faibles revenus. Ce sont principalement les lieux de la productiondu rhum et de la banane. Mais certaines cultivent d’autres plantes fruitières (ananas, melon,etc.) ou ornementales (Alpinias, Balisiers, anthuriums, etc.).

24. Il y a autant de Petites Antilles que de mondes possibles. La compartimentation présentesemble être une règle générale. Elle prend son origine tant dans les différences culturellesdes anciennes nations coloniales (France, Angleterre, Hollande) que dans les influences despôles économiques d’Amérique, d’Europe et, dans une moindre mesure, d’Asie. Malgré desaccords de coopération et d’échanges techniques et économiques, les différentes entités desPetites Antilles (françaises, anglaises et néerlandaises) forment un conglomérat politique,économique, social et culturel de faible interactivité. Les choix de développement sont euxaussi différenciés. Ils sont influencés par les institutions internationales s’agissant des Étatsindépendants ou dépendent des lois et des directives de la République française concernantles DFA insulaires (les Départements français d’Amérique).

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L’économie y est précaire, puisqu’elle est dépendante de transfertsfinanciers de l’État français et, plus récemment, de l’Union européenne.C’est un territoire économiquement sous perfusion qui est, dans cedomaine comme dans beaucoup d’autres, en marge de la mondialisationet de ses valeurs occidentales. Une certaine pensée universitaire l’assi-mile à un anti-monde (Godard et al., 1999) par rapport au fonctionnementdes marchés financiers mondiaux et à l’utilisation irrationnelle des maigresressources, essentiellement écologiques et paysagères. La normalité éco-systémique, attestée par des milieux capables de résilience, et la norma-lité anthropique, signifiée par l’amélioration des conditions de vie del’humain, souvent au mépris des environnements forestiers, sont ici for-tement disjointes. Dans les Petites Antilles françaises riches (d’assistancefinancière) au regard des Petites Antilles anglaises pauvres, la préserva-tion de la biodiversité arborée, originelle, relictuelle et, même à certainségards, la reforestation naturelle sont intimement liées à l’aide exté-rieure25 (tableau 9.4). En effet, avec la modernité, l’énergie fossile (leshydrocarbures) s’est substituée à l’énergie ligneuse forestière. Dès lors,d’anciens domaines agricoles ont été reconquis par la forêt.

Au vu de son importance surfacique, la Martinique, comme laGuadeloupe, plus peuplée et industrialisée doit son plus grand dévelop-pement économique26 et son équilibre écologique apparent aux dépensespubliques consenties par la France depuis plusieurs décennies etaujourd’hui par l’Europe. Dans cette île française, la forêt est une res-source beaucoup plus immatérielle vouée à la culture, à la recherchescientifique, à l’écotourisme et aux activités pédestres et sportives. Lasylviculture, bien que destructrice pour la forêt naturelle, ne se résumedans le présent qu’à quelques parcelles de mahogany à petites feuilles(Swietenia mahagoni : Méliacées) produisant de faibles volumes de boisde haute qualité destinés aux artisans menuisiers autochtones. Quasimenttoute la ressource ligneuse utilisée dans la filière bois (bois brut et pro-duits manufacturés) pour la construction, l’ébénisterie et la menuiserieest originaire des forêts continentales tempérées, pour une part écrasante,et tropicales, provenant de l’Amérique du Sud (Brésil), de l’Asie, del’Afrique (Joseph, 2002).

25. Les mutations liées à la modernité ne furent pas et ne sont pas équivalentes dans les PetitesAntilles ; les indépendances n’ont fait qu’accentuer les différences naturelles et anthropiques.Nonobstant des densités de populations sensiblement faibles, l’économie de la plupart desmicro-États caribéens indépendants, basée sur le tourisme, l’agriculture d’exportation et lesmultiples produits forestiers, ne sera jamais suffisamment forte pour assurer une réelle auto-nomie.

26. Plus grand développement économique au regard des autres îles des Petites Antilles.

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LES PERSPECTIVES D’ÉCOTOURISME FORESTIER À LA MARTINIQUE

De par sa biodiversité inversement proportionnelle à sa superficie, cettepetite île est un laboratoire pertinent pour l’étude des rapports entrenature et société dans l’optique d’un développement maîtrisé. Purementocéanique, elle possède un nombre d’espèces d’arbres indigènes biensupérieur à celui de l’Europe tout entière. Sur une superficie de 1 100 km,avec ses 400 à 600 essences forestières, la Martinique est relativementaussi riche que la Guyane française qui, bien que 90 fois plus grande, nepossède que 1 600 espèces d’arbres autochtones. Cette île qui est consi-dérée par les instances françaises et internationales (Gargominy, 2003)comme un hot spot de la biodiversité doit bénéficier d’une gestion intel-ligente de ses reliques forestières, précisément celles qui, par leur qualitéécosystémique (diversité floristique, diversité phytocénotique, staded’évolution, complexité du système édaphique associé, etc.), sont quali-fiées de monuments naturels (Joseph, 1999). La préservation des forêtspatrimoniales fragiles devra être plus drastique qu’aujourd’hui. Pour évi-ter une protection dite « musée », il faudra toutefois convertir les autresespaces forestiers en outils touristiques d’éducation à l’environnement.En effet, hormis les massifs forestiers qui bénéficient d’une protectiondrastique due à leur intérêt paysager et écologique, les unités sylvestresrurales et périurbaines ainsi que les coulées vertes arborées27 urbainespeuvent être le lieu d’activités écotouristiques.

Ce type de valorisation correspond à des aménagements légers etrudimentaires (sentiers stabilisés, étiquettes d’identification des arbres,panneaux synoptiques présentant les caractéristiques écologiques des lieuxtraversés, la typologie des espèces, les biocénoses et les unités paysagères)auxquels peuvent s’adjoindre les explications de guides écotouristiques.À la gamme assez étendue de milieux forestiers correspondent de nom-breuses modalités de sensibilisation et d’éducation aux mystères de la« tropicalité forestière » insulaire. Ces activités peuvent être libres ouaccompagnées et être également l’objet d’un développement économique.En tenant compte des capacités de résilience des milieux sylvestres, deleur capacité de charge en fonction de la fréquentation journalière, desaménagements, des types activités, c’est-à-dire en estimant les pressionsexercées par les usages anthropiques pluraux, on pourra avoir une idée deleur vulnérabilité.

27. Les coulées vertes correspondent aux communautés floristiques qui colonisent les rives descours d’eau.

5.

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Le but premier est d’utiliser la part immatérielle de cette ressourcesans réduire ses propriétés de régulation écologique garantes de sa péren-nité. Présentement, à la Martinique, dans ce cadre, les relations entrehommes et biotopes sont loin d’être équilibrées puisque le ravinements’accroît le long des sentiers de randonnée et, quelquefois, empiète surles formations forestières, malgré l’effort de l’Office national des forêtspour les stabiliser. L’élargissement de ces derniers augmente l’apportlumineux au sein des sylves contiguës et change certains facteurs de leurmilieu intérieur telles la température, l’humidité et l’évaporation : c’estle fameux effet de lisière connu des forestiers du monde entier28.

5.1. LES ACTIVITÉS ÉCOTOURISTIQUES

La pérennisation des activités écotouristiques, qui s’appuie sur des diver-sités floristiques, faunistiques et écologiques des circuits de découverte,implique la protection de ces derniers contre l’érosion, qui est très activesur les sols du milieu tropical humide. À la Martinique, nonobstant legrand nombre de sentiers pédestres, ces aspects inhérents au tourismeécologique sont peu développés.

Majoritairement, les randonneurs locaux et touristes empruntent descircuits dont la signalétique et les informations propres aux caractéris-tiques des milieux sont pauvres. Pourtant, les nombreux sentiers de l’îlesont traversés par les promeneurs habitant les villages proches, les mem-bres des associations protectrices de l’environnement, les touristes locaux(essentiellement le samedi et le dimanche) et étrangers (surtout pendantla semaine). Les activités proposées aux usagers, touristes ou non, parles clubs de randonnée pédestre et par le Parc naturel régional, prenantcomme cadre le milieu forestier dans toutes ses déclinaisons (forêtssèche, moyennement humide et humide, mangroves maritime et palustre),correspondent aujourd’hui plus à des marches sportives ou à des baladesde découverte de paysages. En général, les informations écologiques,botaniques et faunistiques font cruellement défaut. En dépit d’importantes

28. La modification des facteurs mésologiques des unités sylvatiques proches des itinérairespédestres induit des changements dans la régénération et le recrutement des espèces. Dansles situations de ravinement extrême, au sein des massifs forestiers matures, caractérisésessentiellement par des espèces très spécialisées (sciaphiles et héliosciaphiles) et proche duclimax, les jeunes tiges appartiennent, en fonction de l’apport lumineux supplémentaire, auxstades pionnier et secondaire et sont plutôt héliophiles et hémihéliophiles. Il se produit uneasymétrie floristique et biocénotique entre les arbres jeunes de sous-bois et ceux dits struc-turants qui occupent les strates supérieure et moyenne. En général, dans les vieilles forêts,les régénérations appartiennent, en proportion, prioritairement aux espèces adultes.

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richesses forestières, dont la vulnérabilité est surexprimée par la dynamiquesociétale29, la valorisation écologique de la Martinique dans la perspectived’un développement touristique est balbutiante.

Dans cette île des Caraïbes, l’écotourisme, comme d’ailleurs l’envi-ronnement en général, est un concept « fourre-tout » fortement usité parla classe politique : dès lors que des activités ludiques ou sportives sedéroulent en pleine nature, on parle d’écotourisme. Le plus souvent lesbiotopes, notamment forestiers, servent de cadre, mais leurs composantessont peu ou pas connues des usagers. Les forêts de la Martinique couvrentdes superficies insignifiantes et sont des lieux d’usages multiples. Néan-moins, celles qui sont protégées et en cours de protection recèlent unetelle biodiversité qu’elle augure pour l’avenir une valorisation écono-mique durable, à la seule condition que des mutations sociétales permettentd’allier développement économique et conservation de l’environnement.Pour parvenir à un véritable développement écotouristique équilibré, cor-rélativement aux programmes de préservation et de valorisation éco-nomique, l’exploration scientifique des écosystèmes forestiers doit sepoursuivre, car ce sont de véritables laboratoires de recherche in situ etfaciles d’accès (figure 9.2).

L’ÉCOTOURISME À L’INTERFACE DES RELATIONS ÉQUILIBRÉES ENTRE NATURE ET SOCIÉTÉ

Les forêts protégées, ou considérées comme telles, de la Martinique sontsuffisamment diversifiées pour servir de cadre à des activités touristiques.Présentement, le tourisme écologique, nonobstant les effets d’annonce,est embryonnaire et ses limites sont mal définies. Les données généréespar les travaux scientifiques en écologie, en phytosociologie, en biogéo-graphie, en botanique et en zoologie, permettant d’approcher la com-plexité des sylves et de décrire les grands traits de leur évolution quel quesoit le bioclimat considéré, seront nécessaires à l’organisation et à la crois-sance de ce secteur. L’objectif premier, ici, est d’informer, voire de formerle visiteur à l’aide de critères d’identification floristique, physionomiqueet paysagère, pour qu’il puisse mieux appréhender le fonctionnement desbiosystèmes forestiers ainsi que la pluralité des transformations qui sontactuellement effectives dans la végétation, suite à une longue anthropisa-tion (qui a débuté en 1635, date de prise possession de l’île). Selon les

29. Celle-ci se déploie non pas en fonction des propriétés intrinsèques à l’insularité mais enfonction des normes de la France continentale et de l’Europe.

6.

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Figure 9.2

MÉTHODE DE PLANIFICATION TERRITORIALE DANS LA PERSPECTIVE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE (VALORISATION ÉCOTOURISTIQUE DES MILIEUX FORESTIERS )

Évaluation et suivi environnementaux :conséquences sociétales et environnementales, expériences extérieures (administratives, scientifiques et gestionnelles), analyses d’alternatives technologiques et d’aménagement intégrant les sylves comme outils économiques dans le cadre du tourisme écologique, indicateurs de contrôle et de durabilité (systèmes sociaux et écologiques)

Objectifs généraux :satisfaction des besoins vitaux, autosuffisance, équilibre écosystémique et valorisation paysagère, développement socioéconomique, complémentarité territoriale (utilisation des ressources naturelles notamment forestières)

Identification des besoins :matériels et non matériels

Synthèse et choix du modèle de planification territoriale :équilibre entre l’urbain, l’agricole et la forêt (entre les productions humaines et le fonctionnement biophysique des environnements)

État et dynamique de l’environnement social :facteurs politiques, historiques, culturels, socioéconomiques, juridiques et psychologiques

État et dynamique de l’environnement naturel :potentialités physiques, biologiques et écologiques (terrestres), complexité biosystémique, vulnérabilité et risques majeurs, érosion

Politique de planification globale ou systémique et stratégie de développement durable :plan de gestion et de valorisation environnementales, prospective territoriale, réformes, adaptation des infrastructures

Réglementation nationale et internationale :biodiversité, ressources forestières, sols, paysages

Mode d’organisation :unités écosystémiques du local au global, projection spatiale des politiques environnementales, citoyenneté et accès maîtrisé aux ressources

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zones considérées, cette anthropisation fut et reste inégale en intensité eten fréquence. Si les différentes unités paysagères structurant l’espaceobservé sont considérées comme des expressions directes de la com-plexité des biotopes, elles peuvent toutefois faire office d’indicateursd’évolution ou de stades successionnels.

Présentement, le canevas paysager reflète, depuis l’origine, lesdivers rapports hommes-végétation. La connaissance des mécanismesglobaux régissant la dynamique végétale, avec leurs incidences en termesfloristique, microclimatique et écosystémique, est primordiale pour unevalorisation écotouristique équilibrée. En définitive, à la Martiniquecomme ailleurs dans les Petites Antilles, les aires protégées forestières,dont le nombre augmentera dans l’avenir, sont de véritables outils dedéveloppement. Elles sont des entités de conservation d’une part notablede la biodiversité et s’érigent définitivement en référents incontournablesdans l’aménagement futur de l’île, notamment dans l’optique d’un déve-loppement durable. Au carrefour d’usages et d’intérêts pluraux, bien sou-vent antagonistes, relevant des opérateurs privés et publics, les forêtspatrimoniales de la Martinique, dans la perspective d’une valorisationéconomique, constituent un cadre d’analyse privilégié.

Enfin, compte tenu de leur nombre élevé et de leur importance àl’échelle locale, régionale et biosphérique, les forêts, singulièrementcelles qui bénéficient d’un statut de protection, devront, à court terme,être gérées par un seul organisme public. Le Conservatoire d’espacesnaturels est un outil approprié dont les grands principes permettraient lapréservation et la valorisation différenciées et durables de ces monumentsnaturels (Joseph, 1999). L’écotourisme, basé sur leur potentialité écolo-gique et sur les pratiques humaines matérielles et immatérielles qui s’ysont développées, impose une approche systémique de l’espace et de lagestion de ses ressources.

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1100Chapitre

L’impact économique, social et environnemental de l’agroécotourisme dans la CaraïbeAthanasia Koussoula-BonnetonMCF en économie du développement ruralGroupe de recherche CREJETAUniversité des Antilles et de la Guyane

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Résumé

Dans maints pays de la Caraïbe le tourisme est le secteur économique leplus important par les revenus qu’il distribue, les emplois directs et indi-rects qu’il crée et les effets d’entraînement qu’il induit sur l’économie natio-nale. La part de l’activité touristique dans la formation du produit intérieurbrut est supérieure à celle du secteur agricole, qui fut le secteur économiqueprépondérant durant des nombreuses décennies.

Le nombre de visiteurs s’élève à 16,7 millions de personnes avec un tauxde croissance annuel de 5,3 %1. Une personne sur quatre travaille directe-ment ou indirectement dans ce secteur. Cependant, le tourisme de masseconcurrence fortement les autres secteurs de l’économie, et tout particuliè-rement l’agriculture au niveau de l’utilisation du sol agricole, de l’utilisa-tion de la main-d’œuvre disponible, de l’énergie, de l’eau et des autresressources disponibles.

L’introduction d’un autre type de tourisme tel que l’agroécotourisme aug-mente les atouts du secteur touristique et en diminue les nuisances. Dès lors,le développement de l’agroécotourisme dans la région constitue d’une partune alternative viable au recul du secteur agroalimentaire avec un meilleuréquilibre entre le tourisme balnéaire et les autres secteurs économiques et,d’autre part, contribue à une meilleure prise en compte de l’environnement.

L’agroécotourisme est une forme de tourisme durable2 qui tend à atténuerles effets négatifs liés au tourisme de masse et à maximiser les avantageséconomiques tout en respectant les principes du développement durable.

Les principes de durabilité concernent les aspects environnemental,économique et socioculturel du développement du tourisme.

L’agroécotourisme est à la fois la mise en réseau des agriculteurs et deshôteliers pour la fourniture des produits agricoles et l’offre des prestationsd’accueil, d’hébergement, de loisirs… à destination des touristes. Il cible unpublic relativement restreint, celui d’un marché niche dont la clientèle, touten possédant un haut pouvoir d’achat, est soucieuse de la protection de l’envi-ronnement, de la qualité de son alimentation et de la préservation de sa santé.

En résumé, la mise en place d’activités agroécotouristiques permet la diver-sification des revenus des agriculteurs et une meilleure protection de l’envi-ronnement et contribue à la paix sociale par le biais de l’intégration desagriculteurs et des ruraux dans un processus de développement durable.

1. Missions économiques, revue régionale, dossier no 34, juin 2003.2. Il s’agit des aspects fondamentaux qui sont traités dans la Convention en vue de la Déclaration

de la Zone de tourisme durable de la Caraïbe (ZTDC).

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LE TOURISME : UNE ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE IMPORTANTE

Dans le monde entier, le tourisme fait désormais partie intégrante de lavie locale, quelle que soit sa forme et quelle que soit l’échelle à laquelleil est pratiqué. Il constitue un facteur important et indéniable de dévelop-pement économique. En tant que phénomène social, il s’agit d’un secteuren constante évolution. Son développement est rapide. Durant l’année2003, 694 millions de voyages ont eu lieu dans le monde, selon lesindications de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), et les recet-tes du tourisme au niveau mondial ont été de l’ordre de 514 milliards dedollars américains. La moitié (50 %) de cette recette a été réalisée enEurope et presque le tiers (26 %) dans les Amériques (OMT, 2004).

Il s’agit de la première industrie3 dans le monde avec un taux moyende croissance d’environ 4,3 % durant les dix dernières années (tableau 10.1).Le tourisme crée des emplois directs et indirects à tous les niveaux deresponsabilité et dans tous les secteurs économiques. Dans l’UE (1997),38 millions d’emplois sont liés à cette activité, ce qui correspond à12,8 % de sa population active (Organisation mondiale du tourisme,2004). Depuis les événements du 11 septembre 2001, ce secteur traverse

3. Première industrie par le taux de croissance : OMT, Tourism Market Trends, 2004 edition –Americas.

Tableau 10.1

ÉVOLUTION DES ARRIVÉES DE VISITEURS DANS LA CARAÏBE ET DANS LE MONDE

Sources : OMT, Baromètre du tourisme mondial, vol. 2, no 2, juillet 2004.

Années

Visiteurs (en millions)

Caraïbe Monde

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1999 16,0 651,1

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2001 16,9 682,9

2002 16,4 714,6

1.

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une crise, mais il y a une forte probabilité que la croissance reprenne :le tourisme est, entre autres, étroitement lié à l’augmentation du pouvoird’achat, à l’allongement du temps consacré aux loisirs et à l’augmenta-tion de la proportion de la population des retraités par rapport à celle desactifs.

Dans les pays de la Caraïbe, le tourisme constitue le secteur le plusimportant de l’économie et représente 31 % du PIB de la région. En1998, il a été à l’origine de la création de 2,9 millions d’emplois et dela distribution de 32,5 milliards de dollars américains (43,3 G$ CA) sousforme de revenus. Les devises étrangères dans 16 pays sur 28 de cetterégion proviennent essentiellement de ce secteur (Bryan, 2001). Il est ànoter que si le tourisme dans l’UE ou aux États-Unis est une activitéparmi d’autres, qui contribue à augmenter la valeur ajoutée, cette activitédans les petits pays est à la base de leur économie. Cet impact estaugmenté par la diminution des activités traditionnelles comme la pro-duction bananière ou la canne à sucre. Ces activités ont perdu, à causede l’avènement du nouvel ordre économique mondial, les avantages etles marchés préférentiels auxquels elles avaient accès auparavant. Celas’est traduit par la baisse ou la fluctuation des exportations de sucre etde la banane. Par exemple, entre 1980 à 1996, pour la Barbade, onobserve une baisse tendancielle des exportations de sucre d’environ50 %. Pour la même période, pour la Grenade, on observe une baissetendancielle des exportations de bananes supérieure à 60 % (Koussoula-Bonneton, 2004).

1.1. LA CONTRIBUTION DU SECTEUR TOURISTIQUE À LA FORMATION DU PIB DANS QUELQUES PAYSDE LA CARAÏBE

Durant les dernières années, une modification structurelle a été observéedans la composition du PIB. En effet, la part de services est devenueprépondérante et cela, aux dépens de l’industrie et de l’agriculture. Ceciest valable pour la quasi-totalité des petits pays de la Caraïbe à l’exceptionde Trinité-et-Tobago et de Guyana (figure 10.1).

Dans plusieurs pays, le taux de croissance du tourisme est supérieurau taux de croissance du PIB (Bryan, 2001). En effet, aux Bahamas, auxÎles Vierges américaines et à Sainte-Lucie, la part du tourisme dépasse60 % (1997). La région caraïbe est plus dépendante du tourisme qued’autres régions dans le monde. Une personne sur quatre est employée

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dans le secteur touristique. Souvent le nombre total des personnesemployées dans les hôtels est supérieur au nombre total de chambres. Leratio est de 1 sur 1,3.

Le nombre d’emplois indirects dans le secteur touristique est plusélevé que le nombre d’emplois directs. Pour l’année 2000, les estimationsnationales (des données chiffrées ne sont pas disponibles) évaluent lenombre d’emplois à environ 900 000 (Caribbean Tourism Organisation,2000). En tenant compte de ces données, l’industrie touristique peut êtreconsidérée comme le phénomène le plus remarquable du dernier siècle.Cette tendance se poursuivra, très probablement, durant le XXIe siècle. Lenombre d’arrivées de visiteurs augmente constamment. Entre 1950 et1999, le nombre d’arrivés au niveau international est passé de 25 à 664millions, ce qui correspond à une augmentation moyenne annuelle de7 %. Pour la Caraïbe, ce taux est de 5,5 % durant les dix dernières années.Il est supérieur au taux mondial observé (de 4,4 % pour la même période).

Figure 10.1

LA FORMATION DU PIB DANS QUELQUES PAYS DE LA CARAÏBE

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Les pays de la région ont un potentiel de croissance touristique trèsimportant. En effet, ils offrent un environnement naturel exceptionnel ettrès recherché par les touristes. La contrepartie de cet engouement estque l’économie des îles est fortement dépendante de l’activité touristique.

En 1998, dans le cas d’Anguilla, les dépenses des touristes (figure10.2) ont représenté 74,77 % du PIB et à la Barbade, 77 % des capitauxétrangers investis dans le pays durant la même période l’ont été dans letourisme et dans le secteur du transport touristique (Bryan, 2001). En2002, aux Îles Vierges américaines, la part des revenus du tourisme dansle PIB a représenté 70 % et à Cuba, 12 % (tableau 10.2).

L’IMPACT DU TOURISME DE MASSE SUR L’ENVIRONNEMENT ET SUR LA SOCIÉTÉ D’ACCUEIL

Dans des régions insulaires à écosystèmes fragiles, le développement dutourisme de masse est souvent une source importante de pollution. Lesatteintes sur l’environnement, induites par le développement du tourisme demasse, risquent de compromettre, à terme, l’activité touristique elle-même.

Les effets néfastes sur l’environnement ont des aspects divers : ladestruction de la côte par l’installation d’ensembles touristiques, la pol-lution des eaux marines par l’accumulation de déchets et par les eaux uséesnon traitées, la dégradation des récifs coralliens par la densité et la

Tableau 10.2

PART DES REVENUS DU TOURISME DANS LE PIB DE QUELQUES PAYS DE LA CARAÏBE EN 2002

Sources : <www.oecs.org> et <www.dree.org/antilles-guyane>.

Pays Part des rev enus du tourisme dans le PIB (%)

Îles Vierges américaines 70

Bahamas 50

Barbade 50

Cuba 12

République Dominicaine 6

Porto Rico 6

Guadeloupe 6

Trinité-et-Tobago 3

2.

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fréquence élevée de visites des touristes. Ainsi, à Belize, la destruction decertains récifs coralliens a coïncidé avec le boom de l’industrie touristique.Un phénomène similaire est observé à ce jour à Trinité-et-Tobago (Bryan,2001). La gestion et l’élimination des déchets solides accumulés, dus àl’activité touristique, pose un grave problème aux responsables de ces pays.

On estime que chaque touriste produit le double de déchets solidesqu’un résidant permanent. Parfois, les dommages provoqués par le tou-risme en un lieu donné sont si sévères que toute exploitation touristiquepostérieure de ce lieu devient impossible. Ce fut le cas de Negril, enJamaïque, où le traitement déficient des eaux usées déversées dans la mera été à l’origine de la pollution et de la dégradation des fonds marins. Ila conduit à la cessation des activités de plongée et, par conséquent, àl’abandon de ce site par les touristes. Ainsi, nous pouvons multiplier lesexemples de l’impact négatif du tourisme de masse sur l’environnementet la biodiversité.

Dans une approche globale, il est utile de rappeler que le tourismede masse induit également un coût social important. Les effets écono-miques et financiers positifs induits par l’activité touristique ne profitentpas équitablement à tous les secteurs de l’économie nationale. Les sec-teurs exclus (agricole et rural) subissent les effets négatifs sous la formede l’augmentation des prix, de la rareté du capital et de la concurrenceaccrue des autres secteurs avec l’utilisation de la main-d’œuvre spécia-lisée. Néanmoins, quelques exceptions existent où la proximité des sitestouristiques permet aux populations de développer des nouvelles activi-tés et d’accéder ainsi à des nouveaux marchés pour leurs produits ou debénéficier d’avantages particuliers. Ces populations peuvent avoir accèsà des centres médicaux et à de nouvelles infrastructures (routes, aéro-ports, réseaux d’électrification, eau courante) destinés au départ audéveloppement des sites touristiques.

Le contact des populations locales avec les touristes peut amenerl’adoption, par mimétisme, de comportements étrangers à la culturelocale et parfois une forme d’acculturation, telle la prolifération des fastfoods, la prostitution et la criminalité.

Dans certains pays, on observe une tendance à la ghettoïsation dessites touristiques, lesquels deviennent ainsi inaccessibles à la populationlocale. Des sentiments d’exclusion et de frustration peuvent se dévelop-per, ce qui conduit parfois à des actes d’agression et de harcèlement àl’endroit des touristes.

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2.1. LE TOURISME DE MASSE EST-IL UN FREIN AU DÉVELOPPEMENT DE L’AGRICULTURE ?

Comme nous l’avons mentionné précédemment, le tourisme dans laCaraïbe est une activité importante grâce aux emplois directs et indirectscréés, à l’augmentation des entrées de devises induite et aux revenusdistribués. On a espéré, toutefois, que les effets d’entraînement provoquéspar le développement du tourisme auraient contribué à la dynamique dusecteur agricole. Cet espoir ne semble pas se réaliser. Au fur et à mesureque le tourisme se développe, la part relative de l’agriculture dans le PIBdiminue dans presque toutes les îles de la Caraïbe (voir la figure 10.1).La valeur des exportations agroalimentaires baisse tandis que celle desimportations augmente (figure 10.3). Le cas le plus spectaculaire concernel’île d’Antigua, laquelle, en 1997, n’exportait plus aucun produit agroali-mentaire alors qu’elle importait la quasi-totalité des besoins alimentaires.Les pays où la tendance inverse est observée sont : Belize, Dominique et

Figure 10.3

LA VALEUR DES EXPORTATIONS ET IMPORTATIONS AGROALIMENTAIRES DANS QUELQUES PAYS DE LA CARAÏBE (1997)

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Guyana. En ce qui concerne les trois départements français d’Amérique,la valeur des importations agroalimentaires représente quatre fois celledes exportations. L’étude de cas de la Guadeloupe révèle ces tendances.

En effet, d’après les données de la figure 10.4, nous constatons quele montant des dépenses des touristes a progressé régulièrement d’uneannée à l’autre avant d’atteindre une augmentation de 110 %. Durant lamême période, la valeur ajoutée agricole demeure à un niveau assez bas,aux alentours de 200 millions d’euros4.

AGRICULTURE ET TOURISME : LA MISE EN PLACE D’UNE NOUVELLE SYNERGIE

Les acteurs économiques et politiques dans ces pays s’interrogent sur lesmoyens à mettre en place ou les mesures à prendre pour atténuer d’une partles effets négatifs du tourisme de masse et, d’autre part, pour stopper l’exoderural, augmenter la production agricole et protéger l’environnement.

Pour atténuer les effets négatifs, le tourisme devrait se planifiercomme une activité durable qui se développe en s’intégrant dans lasociété. Les retombées financières, sociales et environnementales corres-pondantes devraient impérativement être maîtrisées. L’émergence d’unsecteur agroécotouristique répond à cette problématique. En d’autrestermes, l’agroécotourisme contribue à diversifier l’offre touristique, àmieux maîtriser le risque environnemental et à diminuer le coût social enintégrant durablement des acteurs économiques issus d’horizons diffé-rents dans la réalisation d’un projet commun. L’idée sous-jacente est defaire coïncider un développement économique basé sur l’agriculture avecle développement du tourisme tout en tenant compte de l’environnementsous ses multiples formes :

• l’environnement naturel, qui compose l’offre touristique originelle(la mer, le climat, la plage, la flore et la faune, etc.) ;

• l’environnement social, qui valorise et applique les idées locales,en particulier le patrimoine culturel et le savoir-faire des popu-lations ;

• l’environnement culturel, qui comprend l’ensemble des compor-tements sociaux, manifestations artistiques, religieuses, alimen-taires, intellectuelles, qui définissent et identifient un groupe ouune société par rapport à une autre.

4. 1 ¤ est échangé contre environ 1,43 $ canadien.

3.

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L’agroécotourisme constitue un système de production basé sur unconsensus entre les travailleurs et les gestionnaires, afin de mieux par-tager les fruits de l’expansion. Il s’appuie sur un réseau local qui estreprésenté par une instance consulaire ou professionnelle (chambred’agriculture, chambre de commerce, office du tourisme).

Les aspects social, culturel et environnemental sont aussi importantsque les aspects économique et gestionnaire. En fait, l’agroécotourismeoffre la qualité de service d’une société industrielle en limitant le nombred’inconvénients. Son objectif global est le « redéveloppement ». La ques-tion qui se pose est : comment réussir ce couplage, quels sont les scéna-rios possibles ? Il est possible d’envisager deux approches ne s’excluantpas mutuellement.

3.1. MISE EN RÉSEAU DES ACTEURS RURAUX ET DES ACTEURS DU TOURISME BALNÉAIRE

Le tourisme balnéaire constitue un marché et un débouché potentiel pourla production agricole. La clientèle est très sensible à l’alimentation et àla qualité des produits alimentaires et est prête à payer un prix élevé pourconsommer des produits frais, des produits authentiques ou des produitsdu terroir. Actuellement, la demande du secteur touristique en produitsagroalimentaires est satisfaite presque entièrement par les importations.Les responsables des hôtels déclarent ne pas trouver sur le marché localles produits dont ils ont besoin pour leurs restaurants. Ils demandent desproduits de qualité en quantité suffisante et à des prix compétitifs. Dansce contexte, il y a une occasion à saisir par les producteurs locaux. Pouraugmenter les chances de succès, il est nécessaire de former et d’informertous les intervenants dans la filière et d’adapter la production agricole enquantité et en qualité. Pour les producteurs agricoles qui s’y implique-ront, l’existence d’un marché local est un argument fort pour l’augmen-tation de leur production et l’amélioration de sa qualité afin de répondreaux besoins de la demande. Des expériences réussies ont déjà cours dansla Caraïbe :

• Ainsi, à la Barbade, les producteurs de viande liés à une certainevariété de moutons (Black belly lamb) ont signé un accord avecune chaîne d’hôtels (Sandy Lane) pour livrer régulièrement lesquantités voulues sous un conditionnement spécifique exigé parles hôteliers. Les éleveurs de moutons ont créé une coopérativeet leur nombre ainsi que leur chiffre d’affaires ont augmenté demanière significative.

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• À la Barbade également, l’association des hôteliers et la coopérativede production maraîchère ont développé un forum qui leur per-met d’échanger des informations quant à l’offre et la demandede ces produits en temps réel. La coopérative centralise lesdemandes et informe les agriculteurs afin de connaître l’offreréelle sur place. Si cette offre est insuffisante pour satisfaire lademande, on peut faire appel aux agriculteurs des îles voisinesafin que la demande soit satisfaite.

• À Sainte-Lucie et à la Jamaïque, la chaîne hôtelière Sandal’s asigné un contrat d’approvisionnement exclusif avec un grouped’agriculteurs pour s’approvisionner en divers produits agricoles.

• À la Jamaïque, la coopérative Blue Mountain produit toute unegamme de produits pour les soins du corps à partir de matièrespremières agricoles biologiques en approvisionnant, de préférence,les boutiques des hôtels.

La généralisation de ces pratiques n’est pas très aisée pour plusieursraisons :

• Les exigences du marché dépassent parfois les capacités des agri-culteurs. En effet, la difficulté pour un agriculteur d’assurer toutau long de l’année un approvisionnement régulier en quantité eten qualité est évidente. La production agricole, plus que touteautre, est dépendante des conditions climatiques, lesquelles nesont jamais régulières, d’où la nécessité de se constituer en réseaulocal ou régional pour pallier les insuffisances individuelles.

• La qualité du produit livré dépend du respect de la chaîne dufroid, des conditions de transport et d’emballage, des conditionsde stockage, etc. tout au long de la filière. Les infrastructuresnécessaires ne sont pas toujours disponibles et fonctionnelles.Pour que ce type d’expérience ait une chance de réussir, il fautun solide encadrement, une formation adéquate, des investisse-ments importants et beaucoup de volonté.

La mise en réseau des acteurs ruraux et des acteurs du tourismebalnéaire permet aux agriculteurs, d’une part, d’accroître leur productionet leurs revenus et, d’autre part, de participer au développement durablepar le maintien de la biodiversité, grâce au suivi des itinéraires techniquesrespectueux de la nature et à la contribution à la sécurité alimentaire.

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3.2. DÉVELOPPEMENT DES PRESTATIONS ET DES SERVICES D’ACCUEIL, D’HÉBERGEMENT, DE LOISIRS… À DESTINATION DES TOURISTES DANS L’EXPLOITATION AGRICOLE OU, PLUS LARGEMENT, DANS LE MILIEU RURAL

La mise en réseau des acteurs agricoles et des acteurs du tourismebalnéaire peut se compléter par le développement de cet autre type detourisme que constituent l’accueil et l’hébergement à la ferme. À l’ori-gine, ce type de tourisme a concerné une clientèle urbaine qui, par manquede moyens financiers, passait ses vacances chez les parents restés enmilieu rural. Aujourd’hui apparaît une autre catégorie de clientèle dontles exigences sont fort différentes.

L’agroécotourisme s’adresse à cette clientèle particulière. Sesprincipales caractéristiques sont les hauts niveaux d’instruction et de pou-voir d’achat. Soucieuse de l’environnement, proche de la nature, aimantà apprendre et à observer, parfois militante, elle est ouverte aux autrescultures. Pour ces touristes, « la campagne devient un monument vivant,habité, créatif. Elle est synonyme de liberté, de beauté, de paysage, d’artde vivre. » Dès lors, cette catégorie de touristes est très demandeused’activités récréatives liées à la valorisation du patrimoine au sens le pluslarge du terme : du patrimoine naturel, d’activités de détente et de loisiren plein air, du patrimoine historique, culturel, scientifique et techniquedans le cadre de la découverte de modes de vie et de production actuelset passés, enfin du patrimoine sociologique reflétant les traditions et lescoutumes (A. le Roy, 1999). Il paraît dès lors indispensable, afin desatisfaire cette demande, de développer des partenariats forts entre lesdifférents acteurs qui évoluent dans ce milieu, de mobiliser les capitauxnécessaires pour la mise en valeur de ce patrimoine et de former etinformer les acteurs concernés.

L’agroécotourisme est un marché de « niche » qui présente unedemande complexe, plurielle et individualisée (A. le Roy, 1999). Il neconcerne qu’un nombre limité de personnes. Ce type de tourisme peutprendre deux formes différentes mais aussi complémentaires.

3.2.1. Séjour à la f erme

Il s’agit pour les exploitants agricoles d’offrir l’hébergement et lanourriture aux touristes et de les associer aux travaux agricoles de laferme. Les denrées alimentaires sont produites, transformées et cuisinéessur place. Souvent le client participe à la récolte ou encore à l’élaboration

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des différents plats. Dans ces fermes, les exploitants sont très soucieuxde la qualité de leurs produits et de la protection de l’environnement. Lesitinéraires techniques suivis sont ceux de l’agriculture biologique certifiéechaque fois que cela est possible. Certains touristes préfèrent des séjoursà la ferme, dans un milieu agréable, afin de suivre un régime alimentaireparticulier ou de pouvoir relaxer dans un milieu protégé des pollutionscitadines. Pour ce qui est de l’hébergement, les habitations traditionnellessont les plus appréciées. Le séjour à la ferme suit généralement un séjoureffectué dans une station balnéaire.

Les pouvoirs publics ont élaboré des politiques incitatives et demarketing afin d’encadrer les agriculteurs qui se lancent dans cette acti-vité. Par exemple, en France, les chambres d’agriculture appuyées parl’État ont créé un label de qualité : « Bienvenue à la ferme ». Le réseau« Bienvenue à la ferme » se compose de plus de 4 000 agriculteurs.L’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture (APCA) définit lacharte et assure l’animation du réseau et le développement de la colla-boration avec les autres partenaires. Conjointement, une politique de sub-vention à l’investissement est mise en place afin de favoriser la créationet la pérennité des ces activités.

L’exploitant agricole doit remplir les conditions d’affiliation aurégime social agricole définies par les paragraphes 1 à 3 de l’article1003.7.1 du Code rural. L’activité « Ferme de séjour – Bienvenue à laferme » doit mettre en valeur les productions et les bâtiments de l’exploi-tation agricole. Si la forme juridique qui exploite la ferme de séjour estdistincte de l’exploitation, il est exigé que le gérant de la ferme de séjourremplisse les conditions d’affiliation au régime social agricole selon lesmodalités définies précédemment. Les fermes séjours sont classées en un,deux ou trois épis en fonction du standing et de la charte définie par leréseau « Bienvenue à la ferme ».

3.2.2. Autres activités

Dans les autres îles de la Caraïbe, plusieurs projets ont vu le jour enrelation avec l’agroécotourisme. À la Barbade, des circuits touristiquesincluent la visite des grandes exploitations cannières et prévoient uneprésentation de l’histoire économique et sociale de l’habitation à traversles siècles. Cette présentation est appuyée par des supports audiovisuels.Très souvent, une dégustation est proposée par le propriétaire du domaine.

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Pour les responsables de la politique touristique de cette île, lemaintien des champs de canne est un argument de vente lors de la pro-motion touristique de l’île. La clientèle internationale est très sensible àla présence de ces champs de canne dans le paysage barbadien. En outre,la recette liée à la visite des distilleries de rhum (sous-produit ou non dela fabrication du sucre de canne), aussi bien à la Barbade qu’aux Antillesfrançaises, constitue une part importante du chiffre d’affaires de cesentreprises5. On remarque la mise en valeur et l’exploitation de l’image« exotique » de la canne à sucre à des fins commerciales.

À Sainte-Lucie, l’accent a été mis sur l’organisation des soirées depêcheurs. Des villages entiers se transforment pour une soirée en uncentre de restauration dont le plat principal est confectionné avec lesproduits de la pêche et les produits agricoles. En outre, de petites unitésartisanales utilisant les méthodes de fabrication traditionnelle produisentà partir de la farine de manioc une gamme de produits qui sont adressésprioritairement aux touristes. Ces derniers visitent les lieux de fabrication,ils goûtent et achètent ces produits.

3.2.3. Visite et séjour à des sites agroécotouristiques situés dans des aires protégées

Durant les dernières années, le concept « agroécotouristique » a trouvéune expression originale par la mise en valeur et l’exploitation de sitesayant un potentiel historique et économique. On peut citer, à titred’exemple, le cas, en Guadeloupe, de la « Grivelière ». Elle est situéedans le territoire du Parc naturel de la Guadeloupe.

En effet, dans la région de Basse-Terre, à la côte sous le vent, existeune habitation caféière, la « Grivelière », qui date du XVIIe siècle. Uneassociation du nom de Verte Vallée conçoit un projet de développementagroécotouristique en utilisant comme produit d’appel « la Grivelière ».L’Association « Verte Vallée » fut créée par les habitants (500 personnes)de la vallée de Grande-Rivière autour d’une idée forte, celle de dévelop-per la région tout en préservant et en protégeant la vallée. L’accent a étémis sur la mobilisation de toutes les ressources existant dans la vallée.Cette mobilisation s’est appuyée sur la relance de la production agricole(café, fruits, racines, légumes, plantes aromatiques, etc.), sur la création

5. Les distilleries ont diversifié leur offre avec la vente du rhum, des souvenirs et de larestauration sur place.

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d’unités artisanales de transformation agroalimentaire (liqueurs, confitures,fruits au sirop), sur la création d’une table d’hôte et sur la confection etla vente de souvenirs.

Le Domaine de la Grivelière restauré et viabilisé constitue un pointd’attraction pour les touristes qui visitent ce site magnifique et permet lacollecte des recettes indispensables au maintien et au développementfutur de ce projet. Les emplois sont proposés dans le cadre de l’entreprised’insertion créée et dirigée par l’association.

Le fait que ce site se trouve dans l’enceinte du Parc national, aireprotégée par excellence, constitue un atout considérable : il lui assure uneprotection contre des spéculations éventuelles incompatibles avec la pro-tection de la nature. Le label du Parc national est incontestablement unélément de confiance quant à la qualité naturelle des productions vendueset consommées. Le nombre de visiteurs est de l’ordre de trente mille paran. Ils sont pris en charge par un groupe de guides formés afin d’assurerla visite du domaine dans les meilleures conditions possibles.

Chaque activité a sa propre rentabilité. Les plus rentables sont lavisite guidée dans laquelle on inclut la dégustation (60 % de valeur ajou-tée), ensuite la table d’hôte (60 % de valeur ajoutée) et enfin la boutiquedes souvenirs, avec une valeur ajoutée très faible, car le coût de revientdes articles vendus reste élevé. Toutefois ce projet agroécotouristiquedégage une valeur ajoutée de l’ordre de 315 000 euros (J. Raboteur, 2004).

L’Association Verte Vallée, en mettant en place toutes ces activités,vise donc un triple objectif :

• pérenniser l’association et ses activités,

• assurer son autofinancement,

• consolider et élargir ses activités tout en respectant l’environnement.

LES RETOMBÉES ÉCONOMIQUES DE L’AGROÉCOTOURISME

La mise en place de projets de cette nature n’est pas aisée, même dansles pays développés où il y a une tradition, où les infrastructures existentdéjà, et où les services publics sont de qualité, a fortiori dans les petitspays de la Caraïbe où cette activité est récente et où les infrastructures(réseaux routiers, téléphone, électricité, eau potable) et les investisse-ments sont insuffisants. Cette situation rend la réalisation de ces projets

4.

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plus aléatoire. Les facteurs limitants les plus importants sont le manquede formation, la difficulté de mettre en place un contrôle de la qualité,la difficulté d’obtenir un label et le manque d’infrastructures.

Toutefois, ce type de projet ne peut concerner qu’un faiblepourcentage de la population rurale. Par exemple, dans le cas de laGuadeloupe, si l’on considère que 1 % des agriculteurs sont susceptiblesd’investir dans l’agroécotourisme, ceci ne peut concerner que 1 000 agri-culteurs au maximum. La capacité d’accueil ne pourrait dépasser unefamille de touristes (2 adultes et 2 enfants) pour un taux d’occupation de12 semaines par an. Augmenter la capacité d’accueil semble difficile sil’on souhaite à la fois offrir des services de qualité aux touristes et gérerl’exploitation agricole. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires escomptépar l’agriculteur est de l’ordre de 11 520 euros6, ce qui représente environ11,5 millions d’euros pour l’ensemble des agriculteurs ci-dessus et envi-ron 3 % du chiffre d’affaires réalisé dans le secteur conventionnel7. Parcontre, l’agriculteur est obligé d’investir en matière de formation afin demener à bien cette nouvelle activité, en matière d’amélioration de sonhabitat afin de répondre aux exigences de ce marché et, enfin, dans lesnouvelles technologies pour les réservations de ses clients et lapromotion de son offre de services.

Le succès de ce type de projet ne peut à lui seul ni résoudre lesproblèmes de l’agriculture ni répondre à la question du développementdes îles. Il ne s’agit que d’une diversification des activités en milieu ruralet d’un complément de revenu pour les agriculteurs concernés. Il fautnoter que des effets d’entraînement existent et que les retombées sur laprotection de l’environnement ne pourront être que positives.

L’évaluation précise des retombées économiques du tourisme ruralet en particulier de l’agroécotourisme n’est pas toujours facile. L’UE aeffectué un programme d’évaluation des effets économiques du tourismerural. Les effets des différents segments du marché touristique, dontl’agroécotourisme, ont été comparés. En ce qui concerne la France,l’étude s’est appuyée sur des informations recueillies par les parcs naturels

6. 12 semaines × 8 nuits × 4 personnes équivalent 384 nuitées à 30 ¤ la nuitée (moyenne pouradultes et enfants).

7. En 1998, le chiffre d’affaires annuel de l’activité touristique avoisinait les 380 millionsd’euros.

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régionaux (Vercors et Livradois-Forez). À titre d’exemple, nous rappor-tons ici la problématique et les résultats obtenus8. L’analyse repose surl’estimation de trois types de revenus :

• les revenus directs dont bénéficient les habitants de la zoneconsidérée (bénéfices, salaires, loyers et toutes formes de rentesdécoulant en ligne directe de l’activité touristique) ;

• les revenus indirects distribués aux résidents par les différentsfournisseurs des unités touristiques ;

• les revenus induits résultant d’une augmentation du pouvoird’achat des résidents.

Selon cette analyse, le revenu direct constitue la majeure partie dela dépense des touristes tandis que les revenus indirects et induits nereprésentent qu’une infime partie de cette dépense. À titre d’exemple,lorsqu’un touriste logé à l’hôtel dépense 150 ¤ dans un des parcs natu-rels, 45 ¤ environ sont distribués localement sous forme de revenus :salaires, bénéfices, intérêts, taxes, alors que lorsqu’il loge dans une exploi-tation agricole, 70 ¤ environ restent dans la région (voir tableau 10.3).

L’étude conclut que le séjour à la ferme apparaît plus efficaceéconomiquement que le tourisme à l’hôtel. Néanmoins, ce résultat doitêtre tempéré par d’autres informations. Par exemple, le touriste en hôteldépense plus par jour que le touriste à la ferme (51 ¤ contre 22 ¤ ). Dans

8. Exemple présenté par F. Gerbaux dans « Le développement touristique local entre régulationssectorielles et gestion territoriale », dans L. Bensahel et M. Donsimoni (dir.) (2001), Letourisme facteur de développement local, Grenoble, Presses de l’Université de Grenoble,collection « Débats », p. 109.

Tableau 10.3

REVENUS DISTRIBUÉS DANS LES PARCS NATURELS À LA SUITE D’UNE DÉPENSE TOURISTIQUE DE 150 ¤

1 ¤ est échangé contre environ 1,43 $ canadien.

Hôtellerie Agrotourisme

Revenu direct 44,00 ¤ 69,00 ¤

Revenu indirect 1,25 ¤ 1,50 ¤

Revenu induit 0,15 ¤ 0,30 ¤

Total 45,40 ¤ 70,80 ¤

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ces conditions, chaque touriste à l’hôtel induit au cours d’une journéeplus de revenus locaux que le touriste à la ferme (15 ¤ contre 10 ¤environ). Un calcul similaire conduit à l’échelon de la famille, corres-pondant respectivement à 3 personnes à l’hôtel ou 4 personnes à la ferme,montre que les familles séjournant à l’hôtel ou à la ferme induisent à peuprès les mêmes revenus journaliers (un peu moins de 45 ¤ ). Enfin si onconsidère l’ensemble du séjour familial, 4 jours dans les hôtels contre6 jours à la ferme, les familles séjournant à la ferme induisent beaucoupplus de revenus que les familles séjournant à l’hôtel (246 ¤ contre150 ¤ ). Néanmoins, les conclusions de cette étude devraient être atté-nuées, car le taux d’occupation moyen n’a pas été retenu comme critèred’analyse. À l’avenir, pour ce type d’études, il faudra également tenircompte de ce dernier facteur afin de mieux mesurer l’impact d’une unitéd’hébergement. Enfin, l’étude conclut que l’agroécotourisme est nette-ment plus efficace que l’hôtellerie si l’on se réfère au critère du multi-plicateur de revenu. En revanche, si on privilégie les effets de la présenced’une personne dans la zone considérée, les résultats sont plus contrastés.

CONCLUSION

Le secteur touristique dans la Caraïbe, en tant qu’activité économique etphénomène social, est un secteur incontournable du fait de son impact surla croissance du PIB et de ses effets déstabilisants sur l’ensemble de l’éco-nomie et de la société. Durant les dernières décennies, ce secteur fut danssa quasi-totalité un tourisme de masse. Actuellement, le tourisme durableest considéré comme une priorité pour une future politique touristique dela Caraïbe. D’ailleurs lors de la conférence tenue à la République Domi-nicaine, le tourisme durable a été définit comme suit : « [L]e tourismedurable sert à répondre de façon satisfaisante aux défis que représententla hausse des taux de chômage et le flux des devises, la protection et lapréservation de l’environnement et des ressources naturelles, la conserva-tion du patrimoine et la préservation des valeurs culturelles. Nous soute-nons la participation communautaire, ainsi que la participation des groupesd’intérêt locaux au processus de développement touristique, tel que laformulation de politiques, la planification, la gestion, la propriété et larépartition des bénéfices résultant de cette activité. »

5.

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L’agroécotourisme est une forme de tourisme durable9 qui tend àatténuer les effets négatifs liés au tourisme de masse et à maximiser lesavantages économiques tout en respectant les principes du développe-ment durable. Il constitue également une composante du tourisme rural,dans un souci de qualité, en valorisant la culture, le patrimoine local, lesdynamiques locales, les produits agricoles locaux, et en favorisantl’émergence de petites et moyennes entreprises.

Deux formules principales ont vu le jour dans le secteur. La premièreconcerne la mise en réseau des acteurs ruraux et des acteurs du tourismebalnéaire. L’analyse présentée dans ce travail montre que cette mise enréseau constitue une démarche originale qui permet l’augmentation de laproduction agricole, l’accroissement du revenu des agriculteurs et unemeilleure intégration des acteurs économiques locaux dans un processusproductif dont un des buts essentiels est le développement durable.L’objectif, à terme, de ces réseaux locaux devrait être l’accroissement deleur efficacité par le biais d’une régionalisation, permettant une con-nexion en temps réel entre acteurs régionaux de différentes nationalités.

La seconde formule est liée à l’offre de prestations et servicesd’accueil, d’hébergement et de loisirs dans l’exploitation agricole ou dansle milieu rural. Du point de vue économique, il apparaît que cette formuleest plus intéressante financièrement pour les agriculteurs et la collectivitélocale que la formule de l’hôtellerie. Considérée au niveau social, cetteseconde formule proposant le séjour à la ferme met le touriste en contactavec la culture et les coutumes locales. Par le biais du partage de certainesexpériences et activités, on aboutit à une meilleure acceptation du touristepar la société d’accueil. Dans ces conditions, les touristes s’intègrent àla vie sociale et culturelle de la communauté d’accueil et ce ne sont plusles populations locales qui sont contraintes de s’adapter aux besoinsculturels des touristes. Les touristes découvrent les coutumes locales, lesmodes de production et de vie des agriculteurs. Des échanges se fontentre les deux groupes, ce qui se traduit par une valorisation de l’imagede soi et meilleure acceptation réciproque. Durant son séjour chez l’agri-culteur, le touriste, souvent, découvre l’utilisation des plantes médicinaleset aromatiques. De retour dans son lieu habituel de résidence, il devientle prospect idéal pour l’achat de ce type de produits. Ce nouveau marchéouvre des nouveaux horizons relatifs au lancement d’activités de produc-tion et de transformation de ces plantes ainsi que d’exploitation de leurs

9. Il s’agit des aspects fondamentaux qui sont traités dans la Convention en vue de la Déclarationde la Zone de tourisme durable de la Caraïbe (ZTDC).

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dérivés (aromathérapie, massage traditionnel, souvenirs, etc.). À terme,ces activités de production et de services créeront des emplois et des reve-nus tout en mettant en valeur le savoir-faire traditionnel et les potentialitésde l’environnement naturel.

L’offre semble se diversifier afin de capter la demande exprimée parla clientèle agroécotouristique. Ces différentes pratiques de l’agroéco-tourisme permettent aux agriculteurs d’accroître et de diversifier leurssources de revenu, de réduire leur dépendance financière à long terme,d’éviter l’exode rural massif ainsi que l’abandon des zones agricoles etcontribuent à l’amélioration de leurs conditions de vie (logement, eaucourante, recyclage des déchets, traitement des eaux usées, etc.).

Il apparaît ainsi que l’agroécotourisme, par ses effets bénéfiques surl’environnement, sur l’aménagement du territoire, sur le niveau de viedes agriculteurs et sur les échanges entre acteurs ruraux et acteurs tou-ristiques traditionnels, constitue, sans aucun doute, une nouvelle perspec-tive et un nouveau défi pour les régions rurales et pour les petits pays,dont ceux de la Caraïbe.

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1111Chapitre

Le tourisme sportif sur le littoral médocain dans le sud-ouest de la FranceUn écotourisme en action

Jean-Pierre AugustinProfesseur de géographie et d’aménagementUniversité Michel de Montaigne-Bordeaux 3

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Résumé

Dès sa création en 1967 la Mission interministérielle d’aménagement dela Côte Aquitaine (MIACA) se donne comme objectif de favoriser ledéveloppement côtier en évitant une extension inconsidérée et anarchiquedu tourisme et des loisirs sportifs. Elle propose d’établir un équilibreentre les sites d’urbanisation, appelés « unités principales d’aménage-ment» (UPA), et les zones d’espaces naturels, dénommées « secteursd’équilibre naturel » (SEN). Une des idées principales est de refuser ledéveloppement touristique ex nihilo comme cela avait été le cas sur lacôte du Languedoc-Roussillon, et de favoriser l’aménagement des instal-lations touristiques à partir des stations existantes. À ce niveau, le littoralmédocain bénéficie de conditions particulières liées à la côte océane, auxplans d’eau intérieurs, aux espaces boisés qui, du Porge à Soulac, offrentun ensemble de sites dotés d’atouts naturels. Au centre de cette côte, lesstations de Lacanau, Carcans et Hourtin, situées à proximité d’uneagglomération de 800 000 habitants, peuvent être considérées comme unlieu expérimental pour le développement d’un écotourisme des loisirssportifs. Après avoir rappelé les qualités du cadre naturel propice à ladiversification des pratiques et la multipolarisation des activités propo-sées, nous soulignerons les tendances fortes, inscrites dans une volontéde préservation des espaces littoraux et dans un écotourisme en action.

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Le tourisme sportif ne cesse de se développer depuis la fin des années1960 et si les enquêtes nationales soulignent les formes différentes qu’ilprend selon l’âge, le sexe et le groupe social, tous les indicateurs s’accordentà montrer les tendances à la diversification, une diversification favoriséepar la variété des paysages et des systèmes environnementaux. Les étudesse sont multipliées sur les pratiques et les équipements des villes (LesAnnales de la recherche urbaine), mais l’accentuation des mobilités,l’augmentation des temps de loisir et la parcellisation du travail favorisentun élargissement des lieux et des activités et l’organisation de nouveauxterritoires ludosportifs.

À ce niveau, le littoral médocain bénéficie de conditions particulièresliées à la côte océane, aux plans d’eau intérieurs, aux espaces boisés qui,du Porge à Soulac, offre un ensemble de sites dotés d’atouts naturels. Aucentre de cette côte, les stations de Lacanau, Carcans et Hourtin, situéesà proximité d’une agglomération de 800 000 habitants, peuvent être con-sidérées comme un lieu expérimental de loisirs sportifs.

Après avoir rappelé les qualités du cadre naturel propice à la diver-sification des pratiques et la multipolarisation des activités proposées,nous soulignerons les tendances fortes, inscrites dans des processussociétaux, qui y sont à l’œuvre.

LA CÔTE MÉDOCAINE : UN CADRE NATUREL PROPICE AUX LOISIRS DE PLEINE NATURE

La Côte médocaine était largement inexploitée au début des années 1960même si plusieurs stations balnéaires, dont Lacanau et Soulac, avaientdéjà acquis leur réputation. La plupart des petites stations océanes duMédoc qui peuvent être considérées comme des projections sur la côtedes bourgs anciens présentent des caractéristiques communes. Implantéesau point d’aboutissement sur la mer, de la route ou de la voie ferrée venantdu bourg, elles sont nées de la volonté des notables locaux, grands pro-priétaires ou commerçants pour la plupart. Construites initialement dansla lette prélittorale selon un plan en damier, elles favorisent une architec-ture nouvelle de chalets et de villas à laquelle succèdent les premierslotissements qui annoncent la démocratisation et proposent des habita-tions diversifiées, généralement de plus petites dimensions. Le dévelop-pement des stations balnéaires maritimes ou lacustres s’est prolongé

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jusqu’aux années 1960, où l’essor du tourisme estival a posé de nouveauxproblèmes d’aménagement et entraîné une intervention publique dans uneperspective d’ensemble.

Dès sa création en 1967, la Mission interministérielle d’aménagementde la Côte Aquitaine (MIACA) se donne comme objectif de favoriser ledéveloppement côtier en évitant une extension inconsidérée et anarchiquedu tourisme et des loisirs sportifs. Elle propose d’établir un équilibreentre les sites d’urbanisation, appelés « unités principales d’aménage-ment» (UPA), et les zones d’espaces naturels, dénommées «secteursd’équilibre naturel » (SEN). Une des idées principales est de refuser ledéveloppement touristique ex nihilo, comme cela avait été le cas sur lacôte du Languedoc-Roussillon, et de favoriser l’aménagement des instal-lations touristiques à partir des stations existantes.

Trois orientations sont proposées : on définit d’abord un produittouristique où les notions de nature et d’espace sont valorisées ; ensuite,anticipant les effets de la décentralisation de 1982, on affirme la respon-sabilité du rôle des collectivités locales ; enfin, on avance clairement lavocation sociale du tourisme. La MIACA a initié diverses actions dansle domaine de la protection des espaces naturels, dans l’organisation dela fréquentation des plages océanes (les programmes « plan-plages ») etdans la construction d’un réseau régional d’itinéraires cyclables dedécouverte du littoral. Ainsi, en préservant les sites, en aménageant lesstations et en organisant les moyens d’accès au littoral, la MIACA aparticipé à la sauvegarde d’un patrimoine qui correspond aux attentes,aux perceptions et aux pratiques liées aux loisirs de pleine nature, déter-minant l’émergence des stations touristico-sportives. Cinq éléments trèsvisibles sur la côte médocaine lui donnent son originalité et sont lesfondements de son organisation touristique.

Les vagues, par leur mouvement de flux et de reflux, sont le premierattrait du littoral. Façonnées par les houles dominantes du Nord-Ouestqui abordent obliquement l’estran sableux et par la pente du plateaucontinental, elles constituent une barre formée de rouleaux déferlant surla plage. Elles sont plus ou moins fortes selon les conditions du momentet atteignent une hauteur de 0,5 à 4 mètres ; leur plan d’inclinaison varieselon la direction et l’intensité du vent.

La plage de sable se situe entre l’élément liquide et la dune. À ladifférence des plages normandes généralement plates, l’estran sableux estconstitué d’une succession de reliefs changeant au gré des saisons. La

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houle dominante favorise la formation de langues de sable formant descroissants de plage qui ont une orientation Nord-Ouest, oblique, par rap-port à la ligne de côte. Entre les langues de sable se constituent deschenaux qui portent le nom local de « baïnes ».

Le troisième élément est constitué par les dunes côtières qui, enlimitant l’accès à la plage, la valorisent et la protègent. Leur hauteur variede quelques dizaines à près de 80 mètres (située plus au sud, la dune duPilat, considérée comme la plus haute d’Europe, atteint 115 mètres). Lecordon dunaire est en réalité une montagne mouvante de sable qui sedéplace vers l’intérieur des terres. Le tracé de la falaise dunaire est légè-rement sinueux en raison de l’érosion marine qui sape sa base par endroitset de l’érosion éolienne qui ouvre des brèches appelées « caoudeyres ».

En arrière des dunes côtières se situe la lette prélittorale. Il s’agitd’une plaine herbeuse où se sont installées la plupart des petites stationsbalnéaires maritimes d’Aquitaine. Ce site naturel a l’avantage d’être pro-tégé des vents océaniques par le cordon dunaire et se prête aux diverstypes d’aménagement nécessaires au développement des loisirs et dutourisme.

Enfin, au-delà de la lette se déploient les grands massifs boisés oùse succèdent les dunes anciennes peuplées de vieux pins, de chênes tau-zins et d’arbousiers, et les dunes modernes au boisement organisé par ledécoupage des pare-feu. Les étangs s’établissent derrière les dunesanciennes qui arrêtent l’écoulement des eaux vers la mer. Leur forme estlargement déterminée par celle des dunes paraboliques qui créent despointes et des baies en eau profonde et navigable sur la côte ouest, alorsqu’ils se terminent en marais sur la côte Est.

La valorisation de ces éléments et leur organisation en unitésd’aménagement et en zones naturelles donnent à la côte sa spécificité.Chaque site est un lieu privilégié pour les loisirs sportifs. Les plans d’eauintérieurs favorisent le développement des activités nautiques dans deszones protégées mais suffisamment ventées pour les dériveurs et laplanche à voile. Les grands massifs boisés permettent les randonnées, lesparcours de VTT, le cyclomoteur et les courses d’orientation. Les duneset surtout la plage deviennent des espaces de jeux sportifs et le point dedépart des surfeurs. Enfin, les vagues sont les partenaires pour les nageurset les multiples engins dérivés du surf.

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Les éléments paysagers qui viennent d’être rappelés sont visiblesde Soulac à Bayonne, mais ce qui fait la spécificité des stations médo-caines, c’est leur proximité avec l’agglomération bordelaise. La pressionurbaine y a été plus forte qu’on ne l’avait imaginé et l’améliorationpermanente des liaisons routières favorise l’appropriation de ces nou-veaux territoires de loisir par les Bordelais. Cet attrait est encore renforcépar un ensemble diversifié d’équipements de loisir qui en font un lieud’expérimentation des pratiques et des tendances en cours.

LA MULTIPOLARISATION DES LOISIRS SPORTIFS

Si le « désir de rivage » fait de la plage et du littoral atlantique l’élémentle plus attractif de la côte, les activités de loisir sportif qui s’y déroulentne se réduisent pas aux baignades et aux pratiques du surf et de ses dérivés.La tendance forte, depuis trente ans, vient de la diversification des loisirsautour de pôles d’activités. En ce sens, les trois communes de Lacanau,Carcans et Hourtin offrent, à une heure de voiture de Bordeaux, un ensemblede sites pouvant être identifié comme un laboratoire ludosportif.

La commune de Lacanau, qui se présente d’abord comme unestation surf (Augustin, 1997), propose en réalité plusieurs pôles d’activi-tés organisés autour d’aménagements perpendiculaires à l’océan et asso-ciés au cadre naturel des dunes, de la forêt et des lacs. En dissociantl’hébergement et les équipements sportifs, le schéma d’ensemble s’établitautour d’un maillage de circulation conduisant à des groupes d’habitatsdispersés en forêt reliés à cinq pôles de loisirs. Le pôle des sports deballe dispose de plusieurs dizaines de courts de tennis de plein air etcouverts, et d’un golf de dix hectares offrant six kilomètres de longueurde jeu. Le pôle d’activité hippique organisé autour du « Village chevalPierre Durand » propose des initiations et perfectionnements dans un siteminutieusement aménagé ; outre la diversité des activités proposées, cesdeux pôles, liés à des réseaux nationaux et internationaux, organisent descompétitions locales, régionales et internationales. Le pôle d’activitéslibres s’établit à partir des plages mais aussi des pistes cyclables et descircuits de randonnées en forêt entre l’océan et les plans d’eau intérieurs.Le pôle d’activités lacustres rassemble les pratiques de voile, de plancheà voile et de ski nautique.

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Ces pôles fonctionnent au maximum durant la période estivale maisvisent à élargir leur accès toute l’année en s’appuyant sur l’effet d’attrac-tion de la métropole bordelaise, et sur les villages et centres de vacances,les lieux d’hébergement des entreprises, l’UCPA et les centres de remiseen forme. Ils bénéficient bien sûr de l’image valorisante de la station surfde Lacanau qui, avec la Maison de la Glisse, une série d’écoles de surfet l’organisation internationale du Lacanau-Pro, complète un dispositifmultipolaire d’activités.

L’ensemble de cette organisation résulte d’aménagements concertéset a nécessité la création d’infrastructures routières pour relier la stationà l’agglomération et faciliter les flux au départ de Bordeaux. L’ouverturede la pénétrante nord, le doublement des voies de Sainte-Hélène, ladéviation du Moutchic et celle de Lacanau ville en cours de réalisationpermettent la fluidité des circulations et renforcent le modèle de stationtouristique sportive desservant la métropole bordelaise.

Ce modèle est complété plus au nord par les aménagements réalisésautour du lac de Carcans-Hourtin, présenté comme le plus grand pland’eau naturel intérieur français ; le lieu-dit Maubuisson a été progressi-vement organisé avec un front de mer, un ensemble de lotissements, devillages de vacances et de campings. Une opération originale a été réa-lisée à Bombannes par le Conseil général, sur un terrain de 220 hectares,dans le cadre d’une « base de plein air et de loisirs », avec l’aide tech-nique et financière du Secrétariat d’État à la jeunesse, aux sports et auxloisirs. Elle regroupe de nombreux équipements sportifs : tennis, piscine,terrains de petits jeux, équipements nautiques, parcours Hébert et pistesforestières de cyclotourisme. Dans la base sont implantés le plus impor-tant centre nautique UCPA de France (340 planches à voile et 160 déri-veurs) et le Cercle de voile de Bordeaux-Noroît, qui compte 400 licenciéset environ 750 membres. Progressivement, d’autres lieux autour du lacont été utilisés par des groupements bordelais. Malgré quelques pro-blèmes de gestion, le succès de la base de Bombannes, auquel sont asso-ciés de nombreux villages de vacances, a incité le Conseil général de laGironde à proposer le projet d’une nouvelle base au nord du lac. Afin detenter de coordonner les activités actuelles et prévisibles dans un schémagénéral d’utilisation, les collectivités locales ont entrepris des études surl’organisation du lac.

Le site d’Hourtin-Port est présenté comme la première opérationd’aménagement touristique prenant en compte le développement del’enfant. L’autonomie, la sociabilité, la créativité ainsi que les relations

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indispensables avec parents et adultes ont été recherchées à travers laconstruction d’espaces d’activités et d’équipements qui doivent« réconcilier », pour le temps des loisirs, les motivations des uns et desautres. Des lieux privilégiés ont été aménagés, avec en particulier lacréation de l’île aux enfants, conçue comme un grand espace de jeux, levillage de la petite enfance, pour les 0-3 ans et les 3-6 ans, et enfin lesmaisons d’activités : maisons de l’informatique, du jeu, du bois et dubricolage et la maison des sciences et techniques. Outre cette optionoriginale en direction des enfants, Hourtin-Port fonde également son acti-vité sur un vaste programme nautique et sportif : un port de plaisance de400 places et sa capitainerie, une école de voile et de planches à voile,avec externat et internat, d’autres équipements sportifs et notamment descourts de tennis. La gamme des services est donc très variée ; il en estde même pour les hébergements, puisque sont proposés villages devacances, gîtes ou autres formules locatives, villages d’habitat léger,hôtels et lotissements pour résidences secondaires. La réalisation de lastation d’Hourtin-Port correspond à un projet ambitieux pour l’enfanceet le nautisme qui s’ajoute aux aménagements diversifiés de Lacanau etde Carcans. Au total, ces communes ont réussi, à partir des bourgs anciens,à valoriser leurs espaces de nature liés aux plans d’eau intérieurs, auxespaces forestiers, aux dunes et à la côte océane, permettant ainsi unredéveloppement territorial. Elles proposent un ensemble de sites extrê-mement variés qui participent à la forte demande d’activités ludosportives.

LE JEU DU CATALOGUE : À CHACUN SES ACTIVITÉS SPORTIVES

Le développement des pratiques de loisirs sportifs qui s’organisent àpartir de lieux polarisés dans les stations médocaines amène chacun àparticiper au jeu du catalogue et à diversifier ses activités. Il s’inscrit dansles tendances fortes de la société, qui peuvent se résumer à trois processusmajeurs liés à l’individuation, à la diversification et à la délocalisationdes activités (Augustin, 1995).

3.1. L’INDIVIDUATION DES PRATIQUES

Le processus d’individuation est indissociable de mutations globales etde la transmission des modèles qui ne jouent plus seulement par le cadrefamilial, scolaire ou institutionnel. L’idée même de modèle est en partiedépassée quand les temps sociaux ne peuvent plus se définir comme des

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temps inscrits dans des calendriers fixes. Jeunes et moins jeunes sontpassés insensiblement mais profondément d’une position de dépendanceà la conquête d’une autonomie, certes problématique, mais bien réelle.L’allongement de la scolarisation, les aléas de l’insertion sociale et pro-fessionnelle s’ajoutent au temps libre conquis pour faire du groupe despairs une référence obligée. Dans ce contexte se forment des culturesmobiles, des pratiques éphémères, indépendantes des lieux traditionnelsde socialisation. Le recul des formes de contrôle social laisse apparaîtrede nouveaux espaces d’expression libre et permet le développementd’activités plus autonomes et plus spontanées. Ce nouveau rapport à soin’est pas sans influence sur le rapport aux autres et sur les institutionsfamiliales, scolaires, professionnelles ou de loisirs. Les divisions entregroupes sociaux et classes se modifient, même si elles gardent unecertaine constance.

La montée de l’individu correspond à un mouvement engagé depuislongtemps dans la société occidentale. Si ce mouvement s’accentue à lafin du XXe siècle, c’est que la société holiste qui donnait une cohésionaux collectivités se défait progressivement. Cette société assignait àchacun son statut et son rôle ; elle dictait des comportements et descroyances. À sa place, une société d’individuation est en train de s’établir.Il s’agit d’une société individualiste mais de masse, démocratique maishiérarchique. L’individuation devient un principe fondateur, se distin-guant de l’individualisme, qui est un repli sur soi, et manifestant uneconscience élargie d’appartenance, qui amène l’individu à chercher dansdes groupes et des pratiques diverses un sens à son existence.

À côté des sports gérés par les fédérations, la progression du sportloisir illustre un autre processus. Alors que dans le modèle institutionnel,l’adhésion, l’entraînement et la compétition étaient au cœur du système,dans le modèle des sports de loisir, la pratique devient un but en soi etl’individu ne se sent plus autant solidaire des autres pratiquants de lamême discipline. La cohésion et la conscience du groupe d’appartenancese défont et les loisirs sportifs deviennent des objets de consommationparmi d’autres. Avec l’amenuisement de l’aspect groupal se renforce lerapport de l’individu avec lui-même et s’intensifie la dépendance auxoffres sportives issues du secteur économique (marquage publicitaire,médiatisation, ventes de produits et d’appareillages). Après avoir étéadhérent, puis usager, le pratiquant devient un simple client des offressportives diversifiées (Haumont, 1995).

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3.2. L’HYBRIDATION DES ACTIVITÉS

La multiplication d’activités sportives, correspondant au besoin d’expres-sion et de singularisation des individus, constitue le deuxième processussocial en cours, soit la diversifiation. Il s’explique à la fois par unelogique de l’offre, qui cherche à renouveler les pratiques et à s’adapteraux évolutions, et par une logique de technologisation des activités, quis’appuie sur les inventions incessantes de nouveaux instruments de pra-tiques. La tendance se manifeste par hybridation autour des sports clas-siques (basket et play-ground, tennis et squash…) et surtout autour dessports de plein air et des sports de glisse. Les dérivés du surf (body board,body surf, kayak surf, skim) ou ceux liés aux machines volantes (delta,parapente, cerf volant tractif, fly surf) sont particulièrement nombreux,mais toutes les disciplines et notamment les plus anciennes, comme labicyclette sous toutes ses formes, sont touchées par le phénomène. Lesprogrès techniques, la découverte de nouveaux matériaux et la créationde brevets sportifs sont immédiatement accaparés par les entreprises spé-cialisées qui participent à l’invention et à la production d’abord artisanale,puis industrielle d’appareillages.

Ces inventions sont reprises par les médias dans des discoursénonciateurs de nouveaux sens. Le surf par exemple, plus que le fait denager ou de se baigner, est porteur de sens, car il est un geste discoursqui allie performance et esthétisme (Augustin et al., 1994). Il peut êtreperçu comme une épure des sports de glisse puisqu’il se joue dans unmouvement perpétuel où la vague et sa pente ne sont jamais les mêmes.Dans une société où tout se complexifie, où les valeurs se transformentet se recomposent, où l’ordre et le désordre s’entremêlent, la figuresymbolique du surfeur oscillant sans cesse entre l’équilibre et la chuteapparaît comme une thématique d’une force étonnante. Ainsi se constitueun dispositif scénique où les vagues sont la scène, la mer le décor, laplage à la fois les coulisses et les tribunes, rappelant le théâtre avec lafrontalité de la scène et les regards tournés vers l’océan. Ce décor engrandeur naturelle offre des signifiants rejoignant les thèmes classiquesde la symbolique humaine, notamment ceux de la vie et du passage, etintégrant de surcroît les attributs du sacré, le mystère, la pureté, voire lapeur. Il ne s’agit pas ici de verser dans la célébration, de faire fonctionnerle mythe, mais au contraire de donner à voir comment se construit con-crètement un espace à la fois social, géographique et symbolique qui poseà terme des questions d’organisation et d’aménagement.

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La recherche de sensations inconnues, d’émotions et leur explorationintéressent une proportion plus forte de la population. Dans le jeu sportifet notamment dans les jeux de plein air, l’individu retrouve une attitudeface à la vie, à la nature, qui débouche sur des interrogations et parfoissur une quête spirituelle. Mais les relations sont souvent floues et éphé-mères ; il faut les construire et les reconstruire sans cesse, car elles s’éta-blissent dans des lieux multiples, souvent inédits qui correspondent à denouvelles territorialités explicitées dans le prochain point.

3.3. LA DÉLOCALISATION

L’apparition de valeurs plus individuelles qui transforment le rapport àsoi et le rapport aux autres joue aussi sur le rapport à l’espace et favorisela création et l’émergence de territorialités prolongeant l’espace de rési-dence bien au-delà du quartier. La faveur des activités de plein air et depleine nature comme l’attrait pour le courant écologique témoignent dece mouvement où se recomposent de nouvelles solidarités et se juxtaposentles territoires de l’ici et ceux de l’ailleurs.

La tendance en cours conduit à la multiplication et à l’extension desterritoires sportifs. On assiste d’une part à une étonnante conquête desespaces naturels maritimes et de montagne du pays, ainsi qu’à l’utilisationdes grands espaces de nature du monde, et, d’autre part, à une reconquêtedes espaces urbains et périurbains par les activités ludo-sportives. À l’évi-dence, les mobilités se sont accentuées dans les espaces urbains où dessociabilités informelles se développent, entre villes et banlieues, en margedes institutions et des microcultures où se négocient sans cesse des iden-tités sociales incertaines. Plus généralement, les mobilités hors la ville sesont accentuées et l’attrait des stations médocaines en témoigne ; sansaucun doute, la proximité spatiale n’est plus le seul ciment des relationset des identités sociales.

C’est cet ensemble de pratiques territoriales qui se modifie et secomplexifie aujourd’hui en mettant en relation des lieux multiples. Leterritoire est un espace qui a été produit par des réseaux, des flux, descircuits projetés par des individus ou des groupes. Il a progressivementété investi, occupé, approprié et peut s’analyser à partir de trois pointsde vue différents, physique, existentiel et organisationnel (Le Berre,1994). Le premier procède de l’observation et de la matérialité ; il est lesupport physique des activités qui s’inscrivent dans un cadre de nature.Le deuxième se situe dans le registre des représentations : on peut alors

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parler autant des territoires qui nous habitent que des territoires que noushabitons ; il amène souvent à identifier l’espace en lui attribuant un nom,c’est-à-dire un code d’identification qui crée une relation de dépendanceentre le lieu et son inventeur. Enfin, la troisième analyse porte sur lesaménagements et les comportements territoriaux des acteurs et mesureleur degré de cohésion ; elle pose la question de la mise en réseau desterritoires et porte une attention particulière à favoriser les concertationsparticipatives afin d’anticiper l’édification de territoires durables.

Quoi qu’il en soit, les pratiques de l’ailleurs sont déterminées parles modes de vie urbains et posent de nouvelles questions sur les straté-gies spatiales de la gestion du proche et du lointain et sur la multiplicationde petits groupes identitaires. Elles interrogent sur le sens des discoursénonciateurs qui sont repris par les médias, les pouvoirs et les agentséconomiques pour valoriser des lieux ou vendre des produits.

Les activités de loisirs physiques et sportifs sont de plus en pluspratiquées hors des villes et les usagers sont à la recherche d’aires denature sauvage ou aménagées dont la finalité sportive est de plus en plusaffirmée. Dans bien des cas, il s’agit d’une nouvelle perception de lanature qui devient support d’activités et partenaire sportif. Les stations duMédoc situées à proximité de l’agglomération bordelaise offrent une qua-lité de milieux naturels associés à des valeurs paysagères et climatiquesqui exercent une forte attraction et expliquent le flux des déplacementsdes Bordelais (Augustin et Favory, 1998). Ces espaces antinomiques del’espace urbain sont appropriés par les citadins qui recréent des territoiresidentitaires alors que ceux du quotidien se défont et changent de sens.Les individus, mais aussi les institutions (écoles, comités d’entreprises,équipements de quartiers, clubs sportifs) participent à ce mouvement cen-trifuge qui entraîne avec lui d’autres formes de loisir. Les pôles d’activitésqui se créent sur le littoral autour des sports de balle, des loisirs nautiques,des sports de glisse, des activités hippiques ou des pratiques autogérées,renforcent encore l’attraction de ces stations en favorisant la diversifica-tion des loisirs. Ils s’inscrivent de plus en plus dans la mouvance de lamétropolisation (Augustin, 2002) et participent à l’ère de la ville archipelmarquée par des discontinuités urbaines malgré une relative continuitédes modes de vie et de culture. Dans ce jeu, la volonté de préserver lesespaces littoraux s’inscrit dans un écotourisme en action et le rôle desassociations de défense du cadre naturel, notamment celles organisées dessurfeurs et des écologistes, est à souligner.

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IIVVPartie

L’écotourismeUn nouveau marché ?

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1122Chapitre

Labels et certifications d’écotourisme et de tourismeLe contexte et la portée

Marie-France Turcotte, Ph. D.Professeure au Département de stratégie des affairesChercheure principale à la Chaire de responsabilité sociale et développement durableÉcole des Sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal

Corinne Gendron , Ph. D.Professeure au Département organisation et ressources humainesTitulaire de la Chaire de responsabilité sociale et développement durableÉcole des Sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal

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Résumé

Au-delà des clichés de rêve, se posent dans l’industrie touristique plusieursenjeux environnementaux et sociaux. L’écotourisme, de même que leslabels et certifications à visées sociales et environnementales, se pré-sentent comme des moyens de susciter des pratiques plus responsablesdans l’industrie et de favoriser la consommation politique de produitstouristiques durables. Après avoir décrit le contexte normatif dans lequels’inscrivent l’écotourisme et les labels et certifications fondées sur lesvaleurs, le texte examine qui sont les promoteurs de ces initiatives ets’interroge sur leur portée en terme de facteurs de changement vers despratiques correspondant davantage à l’idéal du développement durable.Mouvements sociaux et organismes internationaux contribuent à la dif-fusion de nouvelles valeurs sur ce qui constitue la responsabilité socialeet environnementale des entreprises touristiques. Une partie de cesvaleurs sont relayées par des associations industrielles, des voyagisteset des entreprises leaders. Ainsi, différents groupes produisent des guides,des labels et des certifications et ces dernières se retrouvent en situationde concurrence les unes avec les autres. Derrière cette rivalité, se trouventdes enjeux fondamentaux relatifs aux contenus diversifiés de ces normes,à la crédibilité des mesures de vérification et au pouvoir de contrôle. Laportée d’une certification dépend de son taux d’adoption, de la naturede ses exigences, de même que de ces mesures de vérification et de contrôle.

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Des familles de baleines qui émeuvent leurs admirateurs de Tadoussac àTofino (Canada). Des oiseaux multicolores que des amateurs connaissentpar leur nom1 au Costa Rica ou au Belize. L’Himalaya qui ne se laissedécouvrir qu’aux aventuriers les plus courageux. Voilà quelques-unes desimages idylliques qu’on associe à l’écotourisme. Toucher au sable etadmirer la mer à l’infini, c’est l’image type du tourisme, voire du bon-heur. Ce sont toutes des images de rapprochement avec la nature. Ce sontles clichés de rêve.

Des hordes de bateaux qui entourent les mammifères marins qui« donnent de bons shows2 ». Des tortues qui fuient les plages où des tou-ristes, éthologues d’un jour, les attendent dans l’espoir de les voir pondre.Des montagnes de déchets laissés par les trekkers de plus en plus nom-breux au Népal3. Voilà quelques-unes des conséquences indésirables desactivités de tourisme de nature. Murs d’hôtels bloquant l’accès à la mer,plages souillées, infrastructures concentrées dans les zones touristiquesaux dépens des populations nationales, surconsommation d’eau, d’énergieet de produits importés : ce sont quelques-uns des effets pervers du tou-risme de masse. L’envers des clichés révèle des rapports de consommation,voire de domination et de destruction avec la nature.

Afin de limiter ces conséquences néfastes, des normes, des chartes,des labels et des certifications ont été mis de l’avant tant dans le domaineparticulier de l’écotourisme que dans le secteur du tourisme en général.Quelles sont ces normes ? Quels sont les acteurs qui promeuvent leslabels et certifications en écotourisme et en tourisme durable ? Ces labelset certifications contribuent-ils à des pratiques touristiques correspondantau développement durable ? Ces questions seront abordées dans leprésent texte.

Ces questions, concernant spécifiquement l’industrie touristique,s’inscrivent dans une réflexion plus générale sur la gouvernance des pra-tiques des entreprises et plus particulièrement sur le rôle qu’y jouent lesnouveaux mouvements sociaux économiques (les NMSE). Cashore (2002)voit dans le développement de normes, de labels et de certifications

1. Par opposition à un non-amateur qui confiait que pour lui, « un oiseau, c’est un oiseau », etdonc n’en vaut pas le déplacement, encore moins s’il faut se lever tôt.

2. Expression reprise d’un opérateur d’excursions.3. Au Népal, chaque trekkeur « consomme en moyenne 6 kg de bois de chauffage par jour et

l’activité d’un lodge d’étape implique l’abattage d’un hectare de forêt chaque année, alorsque le Népal manque déjà de bois et que l’érosion des sols provoque des glissements deterrain et des inondations » (Dehais et Voinchet, 2005, p. 31).

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environnementales l’émergence d’un nouveau système de gouvernancetransnationale par la société civile. Gendron, Lapointe et Turcotte (2004)ont défini les NMSE comme de nouveaux mouvements sociaux qui utili-sent des moyens économiques de pression. Plus concrètement, on peut lesdécrire ici comme un ensemble d’organisations aux visées sociales etenvironnementales (par exemple, des organisations non gouvernementales[ONG], des associations de citoyens) utilisant des moyens d’action quis’apparentent à ceux utilisés par les organisations aux visées économiques(p. ex. les entreprises, les associations industrielles), tels que les labels dequalité, l’actionnariat et les échanges commerciaux. Les certificationssociales et environnementales, l’activisme des actionnaires et le commerceéquitable sont les exemples types des moyens d’action des nouveaux mou-vements sociaux économiques. Ces moyens d’action visent à transformerles pratiques des producteurs. Cette intervention sur l’offre doit trouverson pendant du côté de la demande et suppose le consumérisme politique.

LE CONTEXTE NORMATIF DE L’ÉCOTOURISME ET DU TOURISME DURABLE

Cette première section présente le contexte dans lequel s’inscriventl’écotourisme et les initiatives de développement durable, ce qui permetde mieux situer le phénomène des labels et certifications, dont nousdiscuterons plus spécifiquement dans la deuxième section. La descriptiondu contexte est organisée en deux niveaux, soit 1) le niveau macroculturelet 2) le niveau du domaine, qui est un niveau intermédiaire entre le niveau« macro » et le niveau organisationnel. Les labels et les certifications sontdes phénomènes institutionnels qui émergent au niveau du domaine etqui puisent leur inspiration et leur légitimité dans les répertoires de lamacroculture et s’appliquent au niveau des organisations.

1.1. LE NIVEAU « MACROCULTUREL » DE L’ÉCOTOURISME ET DE LA GESTION DURABLE

La quête d’un rapprochement avec la nature et le mouvement de recon-naissance des conséquences néfastes de plusieurs activités économiquessur l’environnement n’est pas un phénomène nouveau. Linné, un précur-seur de l’écologie qui a écrit au milieu du XVIIIe siècle, avance la notiond’économie de la nature, qui correspond à une première théorie de l’inter-dépendance entre les êtres vivants (Deléage, 1991 ; Drouin, 1992). Dèsla fin du XVIIIe siècle, la prise de conscience environnementale se manifeste

1.

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notamment par l’émergence du mouvement naturaliste, dont le projet estcentré sur la protection de la nature et de ses ressources (Deléage, 1993).Au XIXe siècle, dans la foulée du mouvement naturaliste, les premièresassociations de protection de la nature sont constituées4. C’est aussià cette époque que sont créés les premiers grands parcs américains :Yellowstone en 1872, Niagara Falls et Yosemite en 1885.

Les premières décennies du XXe siècle sont marquées par unélargissement de la conscience environnementale à de nouvelles couchessociales (Deléage, 1993). À la fin de 1980, l’environnement était devenuune préoccupation majeure, occupant une part importante de l’espacemédiatique au Canada. En janvier 1990, un numéro spécial de la revueTime montrant une photographie-satellite de la Terre a joué un effetdramatique et a été suivi d’une « vague verte » dans la plupart des heb-domadaires d’information dans le monde (Duclos, 1993). Le nombre dedocumentaires portant sur la nature a aussi connu un accroissementimportant (Couture, 2002). Les documentaires du commandant Cousteauont marqué plusieurs générations de téléspectateurs. On remarque ainsiune transition culturelle, les représentations de la nature suggérant unrapprochement avec celle-ci, perçue à la fois comme douce et vulnérable,voire menacée.

Le changement des émotions inspirées par les baleines au cinémaillustre bien cette transition. L’analyse des films mettant en scène desbaleines montre que les films produits entre 1930 et 1980 dépeignent uneimage négative de ces animaux, surtout perçus comme des menaces(Lawrence et Phillips, 2004). Par exemple, Moby Dick est puissant et sanspitié lorsqu’il dévore des hommes et détruit des navires. À l’opposé, dansles films produits après 1980, les baleines sont présentées de manièrepositive et, malgré leur taille imposante, elles sont menacées plutôt quemenaçantes. Par exemple, dans Star Trek IV : The Voyage Home paru en1986, les baleines sont des êtres d’une intelligence supérieure ayant desalliés venus du fond de l’espace ; et pourtant, elles ont été poussées àl’extinction par les comportements irresponsables de l’humanité. Dans lasérie Free Willy (1993, 1995, 1997), la petite baleine est séparée de safamille, emprisonnée (dans un aquarium) et menacée de mauvais traite-ments de la part d’un entraîneur cupide. Elle demeure pourtant pleine de

4. Société nationale de protection de la nature (1854, France) ; Audubon Society (1886, États-Unis) ; Sierra Club (1892, États-Unis) ; National Trust (1895, Grande-Bretagne).

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compassion puisqu’elle offre son amitié à des humains qui l’ont appri-voisée et libérée. Le rapprochement est maximal et joue sur une fine ligneentre la domestication et le retour à la nature.

Le phénomène de l’écotourisme peut aussi être associé à destendances postmodernes et plus particulièrement à des quêtes de socialitéet de réenchantement du monde. Si la période postmoderne a été dansun courant initial surtout associée à des valeurs d’individualisme et deconsommation poussées à l’extrême dans un contexte de déshumanisa-tion, de désenchantement du monde moderne et de solitude, un secondcourant de pensée de la postmodernité (Maffesoli, 1988) a plutôt décritles efforts de reconstruction du lien social et de réenracinement dans desvaleurs plus archaïques qui caractérisent aussi cette période (Ouellet,2005). Le meunier qui rénove un moulin et qui, en plus de produire dela farine, offre un service de « visite écotouristique » répond à ce besoinde réenracinement dans des valeurs archaïques, lesquelles s’hybrident aucontexte contemporain qui s’exprime par exemple dans le fait que lesvisiteurs sont venus en voiture ou que le moulin est équipé d’un moteurélectrique pour compenser l’éventuel manque de vent. La recompositiondu lien social passe, selon Cova et Cova (2001), par la formation de petitsgroupes, de « tribus », c’est-à-dire une « micro-communauté dans laquelledes individus entretiennent entre eux de forts liens émotionnels, une sous-culture commune, une vision du monde » (Cova et Cova, 2001, p. 21,cité dans Ouellet, 2005, p. 37). Pourquoi entreprendre une difficile ascen-sion dans un coin reculé du Népal ? Pour être en contact avec la nature,pour affirmer son biocentrisme, pour gagner en estime de soi, pour ren-contrer des gens (Holden et Sparrowhawk, 2002). S’embarquer dans unvoyage d’observation des oiseaux, c’est pénétrer dans la forêt enchantée,c’est l’occasion de rencontrer d’autres amateurs et c’est aussi s’engagerdans un rituel qui confirme son appartenance à la tribu des birders. « Lelien est parfois imaginaire mais il permet à chacun de faire partie d’untout » (Ouellet, 2005, p. 37).

Des organisations internationales ont aussi participé à l’institution-nalisation de normes nouvelles. La publication en 1987 du rapport de laCommission sur l’environnement et le développement de l’ONU intituléNotre avenir à tous, communément appelé le rapport Brundtland, a misde l’avant le concept de développement durable. Ce concept suggérait deréconcilier, notamment, écologie et économie. Il suggérait en outre unprincipe d’équité entre les nations riches et les nations pauvres (le« Nord » et le « Sud »), de même qu’entre les générations présentes et

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futures. Certes, la quête de prospérité économique demeure un enjeuprédominant pour la plupart des acteurs qui endosseront le discours dudéveloppement durable, mais la détérioration de l’environnement naturelet du cadre de vie des humains est devenue une conséquence inacceptablede l’activité économique. Dans une perspective de développement durable,la conscience envers l’environnement correspond à une reconnaissancede l’interdépendance entre la prospérité économique et la santé de l’envi-ronnement, entre les écosystèmes, les nations, les générations, les acteurséconomiques et sociaux, ainsi qu’entre les êtres vivants de toutes lesespèces. Dans les objectifs formels du développement durable, on retrouveles fondements d’une « socialité », ce que Maffesoli (1988) a définicomme l’expression journalière de la solidarité. En 1996 le World Traveland Tourism Council (WTTC), la World Tourism Organization (WTO)et le Earth Council se sont associés pour publier l’Agenda 21 for theTravel and Tourism Industry, ce qui correspond à une traduction spéci-fique au secteur du tourisme de la Déclaration de Rio 1992 (van Wijk etal., 2005). Dix priorités y sont établies, dont les déchets, l’énergie et lagestion de l’eau.

1.2. LE NIVEAU DU DOMAINE : L’INSTITUTIONNALISATION DE L’ÉCOTOURISME

Selon Lawrence et Phillips (2004), le discours macroculturel de rappro-chement avec la nature, qui s’exprime notamment au cinéma, a contribuéà l’émergence du domaine institutionnel de l’écotourisme. Il contribue,d’une part, à susciter un intérêt pour l’activité d’observation des animauxet de la nature en général (création de la demande). Il contribue, en outre,à l’exigence de pratiques qui ne soient pas perçues comme irrespectueusesde la part des producteurs de services en tourisme de nature (contrôle del’offre). Par exemple, les associations d’opérateurs de tours d’observationdes baleines doivent contrer la perception que les baleines subissent duharcèlement si elles veulent conserver leur légitimité auprès de la clien-tèle et éviter la réglementation. Le discours macroculturel sur le déve-loppement durable impose aussi des normes sur la façon de gérer lesentreprises touristiques (niveau organisationnel). La définition de pra-tiques acceptables et la proposition de codes de conduite contribuent àces objectifs.

La présente section déplace l’analyse vers un niveau intermédiaireentre le niveau macro et le niveau organisationnel, soit celui du domainede l’écotourisme. Le domaine a été défini comme un ensemble diversifié

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d’acteurs (des individus, des groupes ou des organisations) qui sont liéspar un problème, un intérêt, une opportunité ou un enjeu commun (Emeryet Trist, 1965 ; Gray, 1985 ; Waddock, 1989 ; Scott, 1992 ; Ostanello etTsoukiàs, 1993). Le domaine de l’écotourisme est un ensemble regrou-pant non seulement les organisations qui sont liées par l’opportunitéd’offrir des services écotouristiques, mais aussi celles qui relèvent desproblèmes liés aux pratiques de tourisme de nature, de même que cellesqui voient dans l’écotourisme une solution potentielle à d’autres pro-blèmes. Bertels et Vredenburg (2004) expliquent qu’une forme de gou-vernance se joue au niveau du domaine, c’est-à-dire que s’y produisentdes phénomènes normatifs, les organisations d’un domaine étant amenéesà adopter des normes et à adhérer à des objectifs à travers des processusde socialisation.

L’analyse du domaine de l’écotourisme peut se faire en adoptantdifférentes perspectives théoriques. Selon une perspective économique,ces phénomènes normatifs au niveau du domaine tendent à réduire lescoûts de transaction (Bertels et Vredenburg, 2004, p. 38) et, ce, en ins-taurant un climat de confiance, ce à quoi peuvent contribuer les certifi-cations, y compris les certifications fondées sur des valeurs (Arnal etGalavielle, 2005). Par exemple, les certifications en écotourisme et entourisme durable seraient propices à rassurer les consommateurs poli-tiques sur la nature du service de même que sur la façon dont il estproduit, favorisant ainsi le comportement de consommation.

Selon une perspective institutionnaliste, les organisations doiventmaintenir leur légitimité ; c’est pourquoi elles se conforment aux normesqui émergent au niveau du domaine (Scott et Meyer, 1992), souvent parmimétisme avec les autres organisations du domaine, même si cela peutêtre contraire à leurs objectifs immédiats de quête des ressources (Mizruchiet Galaskiewicz, 1994). Dans le cas des opérateurs de tours d’observationdes baleines de la région de Victoria (Colombie-Britannique, Canada)étudiés par Lawrence et Philips (2004), les pratiques développées par unopérateur de bateau pour maintenir sa légitimité et contrer le risque queson activité soit perçue comme du harcèlement d’animaux nobles, ont parla suite été imitées par les autres opérateurs de bateaux. Si des pressionsinstitutionnelles révolutionnaires peuvent réussir à changer le cadre nor-matif dans un domaine (Hoffman, 1999), les auteurs de ce courant théo-rique ont généralement observé que les forces institutionnelles constituentplutôt des facteurs d’inertie dans une industrie.

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Quant à la perspective politique, pour en citer une dernière, elleconsiste, d’une part, à mettre en évidence qui a accès non seulement auxressources mais aussi au pouvoir et, d’autre part, à commenter de manièrecritique les conséquences de cette distribution du pouvoir en termed’équité entre les acteurs impliqués dans le domaine. Par exemple, plu-sieurs études, fondées sur cette perspective, ont constaté que les retom-bées économiques de l’instauration d’un parc naturel, produit d’appel del’écotourisme, rejoignent rarement les populations locales qui pourtantse voient privées de l’accès aux parcs pour des activités de subsistance(Lequin, 2003 ; Sarrasin, 2002 ; Cleverdon et Kalisch, 2000 ; Goodwin etRoe, 2001). La perspective politique s’intéresse aussi au pouvoir de déci-sion ; par exemple, Lequin (1990) a montré que malgré que les autoritésaient mis de l’avant des symboles de démocratie, les populations localesn’avaient pas eu véritablement d’influence sur le processus décisionneldans l’instauration et dans la gestion du parc naturel du Saguenay (Québec,Canada). Dans le domaine du tourisme en général, les critiques constatentqu’un grand nombre d’équipements et d’infrastructures sont réalisées auprofit des touristes et aux dépens des populations locales qui n’y ont pasaccès dans leurs régions (Canfin et Nahapétian, 2005).

Dans les prochains paragraphes, après une très brève tentative dedescription du domaine, on s’intéressera à ce qui est considéré légitimedans le domaine en présentant la définition et les objectifs de l’écotou-risme, tels qu’institutionnalisés par des organismes internationaux, desacteurs œuvrant dans le domaine, de même que des chercheurs. Plus tard,à la section 2, la perspective politique sera mobilisée en plus de la pers-pective institutionnaliste pour analyser le phénomène de la certification enécotourisme et en tourisme durable et pour répondre à la question de leurpotentielle contribution en matière de développement durable.

Il est intrinsèquement difficile de décrire de manière exhaustive unphénomène au niveau du domaine, car les acteurs de nature très diversesqui y participent – organisations internationales, agences gouvernemen-tales, entreprises, groupes de pression, consommateurs, voisins, institu-tions de production et de diffusion des connaissances, médias, artistes etles autres, y compris les non-humains – y entrent et en sortent au gré desenjeux et des problèmes qui les lient, parfois de manière ponctuelle, par-fois à long terme. Le domaine de l’écotourisme est a fortiori difficile àreprésenter globalement, car il regroupe en fait un ensemble de pratiquesdiversifiées. Cela est lié d’abord à la grande diversité des espèces végé-tales et animales, de même que des écosystèmes qui peuvent constituer

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le produit d’appel en écotourisme. Les normes d’observation des baleinesà Victoria sont forcément différentes et impliquent d’autres acteurs quecelles qui régissent les visites aux îles Galápagos. Au-delà de ces dis-tinctions liées aux sites naturels, on doit aussi constater une diversitéconcernant les segments de marché. Parle-t-on d’écotourisme « dur » ou« doux », d’observation ou d’aventure, qui se fait seul, en très petit groupeou en groupe plus nombreux, organisé ou pas? Les organisations impliquéesdans le domaine de l’écotourisme sont aussi fort diverses : organisationssans but lucratif et associations, entrepreneurs privés, gouvernements,agences gérant les parcs ou les espaces à protéger, voyagistes, agences deguides, agences de certification, hôteliers, associations industrielles oucommerciales et autres. Ces acteurs peuvent travailler en collaborationpour certains projets mais, à d’autres occasions, se retrouver en conflit(McKercher, 1998). Malgré cette diversité, on peut mettre en évidencequelques éléments normatifs qui s’appliquent de manière générale audomaine de l’écotourisme.

Des organismes internationaux ont en effet contribué à structurerles réflexions dans le domaine de l’écotourisme et à institutionnaliser desdéfinitions, c’est-à-dire des normes sur ce qui est attendu de l’écotou-risme et de sa pratique. L’année 2002 a été désignée année internationalede l’écotourisme par les Nations Unies et le Programme des NationsUnies pour le développement et l’environnement (PNUE) a organisé desconférences sur le sujet. En mai 2002, le Sommet mondial de l’écotou-risme a eu lieu à Québec. L’Organisation mondiale du tourisme a été unpromoteur important de ces événements. Des réflexions qui ont eu lieu,avant, pendant et après le sommet, est ressortie la volonté que l’éco-tourisme soit un moteur de développement durable.

Ainsi, la signification de l’écotourisme, qui était auparavant syno-nyme de tourisme de nature, a été formalisée lors du Sommet avec unedéfinition plus complexe qui englobe les objectifs du développementdurable, c’est-à-dire d’équité sociale, de préservation de l’environnemen-taux et de développement économique, auxquels s’ajoute une compo-sante éducationnelle. Ce sens est aujourd’hui assez largement généralisé ;par exemple, selon une définition proposée par le Bureau de normalisa-tion du Québec5, l’écotourisme est une « forme de tourisme qui vise àfaire découvrir un milieu naturel tout en préservant son intégrité, quicomprend une activité d’interprétation des composantes naturelles ou

5. Et reprise dans le glossaire du site de la forêt boréale, <www.auxarbrescitoyens.com/article.php?id_article=0204> (consulté le 16 août 2005).

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culturelles du milieu, qui favorise une attitude de respect envers l’envi-ronnement, qui fait appel à des notions de développement durable et quientraîne des bénéfices socioéconomiques pour les communautés localeset régionales ».

Les définitions de l’écotourisme que l’on retrouve dans les écrits surla question incluent souvent plusieurs de ces objectifs et parfois mêmed’autres encore. Lequin (2001) propose que le développement écotouris-tique intègre trois dimensions (dont deux constituent une interprétationparticulière des dimensions du développement durable), soit (1) le déve-loppement durable, (2) le développement régional et (3) la démocratieparticipative. Selon Bookbinder et al. (1998), l’écotourisme devrait êtreun support à la protection de la biodiversité. Si de nos jours, les préoccu-pations de préservation des espaces naturels se justifient souvent parl’argument de la biodiversité, la salubrité a déjà été l’argument privilégiéau début du XXe siècle. D’ailleurs, certains parcs nationaux canadiens ontété créés afin de maintenir la qualité de l’eau des réservoirs approvision-nant les grandes villes, la préservation des forêts évitant en effet l’érosiondans les bassins versants de ces réservoirs. Pour Blamey (2001), l’écotou-risme comprend non seulement l’objectif de l’activité pour le touriste, soitl’observation de la nature, mais aussi l’éducation environnementale et lesobjectifs liés au développement durable, de même que ceux du développe-ment régional. L’objectif d’éducation environnementale peut comprendrelui-même plusieurs dimensions, soit l’interprétation, la conscientisation etles changements de comportement. Inculquer par l’éducation des compor-tements propres à préserver l’endroit visité peut aussi être un outil privi-légié de protection des sites écotouristiques (Kuo, 2002). Selon Sarrasin(2002), le succès d’une politique en écotourisme doit se mesurer à sacapacité d’offrir un support à la conservation des espaces naturels et à serévéler un facteur d’équité sociale, les deux étant intimement liés.

Une partie de ces attentes touchent aussi le domaine du tourisme engénéral. En 2002, lors d’une conférence organisée par l’OMT, le tourismea été présenté comme un facteur de développement durable et, particuliè-rement, comme un moyen d’alléger la pauvreté (Ibru, 2002 ; Goodwin,2002 ; Sukkar, 2002). Pour Sofield (2003), le succès d’une initiative detourisme se mesure à l’aulne du potentiel d’émancipation (empowerment)qu’il offre aux populations locales et plus particulièrement aux groupesles plus démunis, qui sont généralement marginalisés. Les critères del’émancipation sont que non seulement l’activité touristique devraitrépondre aux besoins de développement économique des populationslocales, mais elle devrait en outre être réalisée par les populations locales.

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Ainsi, les objectifs qui concernent le site d’accueil sont nombreux :préservation de la nature et de la biodiversité, développement écono-mique local, lutte contre la pauvreté, équité sociale, respect des cultureslocales, démocratie participative et émancipation. En outre, au niveauorganisationnel, comme on le verra tout à l’heure, on demande aux orga-nisations touristiques une gestion écoefficiente. Il faut ajouter à cette listedéjà longue d’objectifs ceux qui concernent les touristes. Il y a d’abordles objectifs énoncés dans les définitions normatives de l’écotourisme :l’accès aux sites naturels de qualité à observer et les objectifs relatifs àl’éducation. Puis il faut aussi considérer les motivations sous-jacentes àla consommation touristique : la quête du dépaysement, de l’extraordi-naire ou du réenchantement du monde (Maffesoli, 1988), probablement ;des besoins ostentatoires ou d’appartenance à un groupe (le néotribalismede Cova et Cova, 2001), peut-être ; de manière générale, la recherche deplaisir, certainement. En somme, entre les objectifs normatifs et les objec-tifs implicites, entre ceux émanant de l’offre et ceux des consommateurs,cela fait beaucoup d’objectifs à réconcilier. Il ne serait pas étonnant queles initiatives en écotourisme les réconcilient rarement toutes à la fois.

LES LABELS ET LES CERTIFICATIONS FONDÉS SUR LES VALEURS EN ÉCOTOURISME ET EN TOURISME DURABLE

Barham (2002) parle des labels fondés sur les valeurs (values-basedlabeling) pour désigner les initiatives de labels et de certification qui ontpour but d’identifier des produits ou des producteurs dont le processusde production ou l’activité suivent des règles qui reflètent des valeurstelles que l’équité, la solidarité et la protection de l’environnement. Leslabels et certifications en écotourisme et en développement durableentrent dans cette catégorie. Selon Barham, ces labels contribuent à unréencastrement de l’économie dans le social et à la transformation dumarché ou à la création d’une économie parallèle (Ouellet, 2005). Dansce qui suit, nous décrirons de manière générale le phénomène des labelsfondés sur les valeurs en tourisme puis nous nous demanderons com-ment ils peuvent contribuer au développement durable dans le domainedu tourisme.

2.

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2.1. LES LABELS ET CERTIFICATIONS ET LEURS PROMOTEURS

Quelle est l’ampleur du phénomène des labels et certifications fondés surles valeurs dans l’industrie touristique ? Selon une étude de l’Organisa-tion mondiale du tourisme (World Tourism Organisation, 2002), il existe60 éco-labels et certifications de tourisme et plus de 7 000 produits tou-ristiques certifiés dans le monde. La majorité de ces programmes d’éco-labels et de certification ont émergé entre 1990 et 2002. Si cela constitueune lancée intéressante, cela ne représente toutefois qu’une infime pro-portion du marché touristique. On peut espérer que les produits certifiésgagneront d’avantage de parts de marché dans l’avenir, mais cet espoirest modéré par le constat que les nouvelles adhésions ont stagné pour80 % des éco-labels (WTO, 2002).

Sur le plan géographique, il s’agit d’un phénomène qui toucheprincipalement les pays occidentaux et surtout l’Europe. En effet, 68 %des programmes ont été mis sur pied par des organisations européenneset 17 % par des organisations nord-américaines. L’Amérique centrale etdu Sud, les Caraïbes et la région Asie-Pacifique se partagent les 15 %restants. C’est aussi en Europe qu’on retrouve la majorité des produitscertifiés : 6 000 des 7 000 recensés par l’étude de l’OMT (WTO, 2002).On remarque donc le déséquilibre de la répartition géographique autantdans la provenance de ces initiatives que dans le lieu de leur utilisation.Cela laisse supposer que les labels ne contribuent pas à l’objectif d’équitéNord-Sud du développement durable.

Qui sont les instigateurs des labels et certifications fondés sur lesvaleurs dans l’industrie touristique ? Des ONG, des entreprises et desassociations industrielles comme des gouvernements peuvent être à l’ori-gine des programmes de certification fondée sur des valeurs de dévelop-pement durable. Dans l’industrie touristique, on observe la présence deces trois types d’acteurs, mais on constate que de manière prédominante,ce sont des ONG qui ont promu ces programmes. Selon l’étude del’Organisation mondiale du tourisme (TWO, 2002), 30 % des certifica-tions émanent d’ONG œuvrant dans le tourisme, 10 % d’ONG aux viséesenvironnementales, 3 % d’ONG de consommateurs, 25 % d’autres typesd’ONG, 20 % de gouvernements et 12 % d’entreprises. Le rôle principalest donc joué par la société civile, tandis que les gouvernements et lesentreprises ou des organisations industrielles jouent les rôles de soutienet que les associations de consommateurs n’ont qu’un rôle marginal.

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2.1.1. Les organismes internationaux

Des organismes internationaux ont aussi joué un rôle de déclencheur etl’OMT a joué un rôle majeur dans la promotion du tourisme durable etdes normes en écotourisme. En 1994, le World Travel and TourismCouncil (WTTC) a développé un programme de certification des sus-tainable travel and tourism businesses. En 1995, lors de la conférencemondiale sur le tourisme durable organisée par l’UNESCO, l’OMT, leProgramme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et la Com-mission européenne, les participants ont adopté la Charte du tourismedurable (Alet-Ringenbach et al., 2005 ; van Wijk et al., 2005). Signée en1997 par les ministres de l’Environnement de 18 pays, la Commissioneuropéenne, le PNUE et l’OMT, la Déclaration de Berlin fait des recom-mandations pour la diversité biologique et pour un tourisme durable.Cette déclaration engage les signataires à soutenir les activités touris-tiques qui visent la conservation de la nature et de la biodiversité. Lecode mondial d’éthique du tourisme élaboré en 1999 par l’OMT reprenddes principes de la Charte du tourisme durable et indique que les acteursdu tourisme se doivent de sauvegarder l’environnement et les ressourcesnaturelles, de même qu’associer les populations locales aux activitéstouristiques et leur assurer une participation équitable aux bénéficeséconomiques, sociaux et culturels générés par ces activités.

En 2000, le PNUE a rédigé les principes pour la mise en œuvred’un tourisme durable. Cette même année, avec le PNUE, l’UNESCO etl’OMT, douze grands voyagistes, parmi lesquels Accor et British Airways,ont lancé l’initiative des voyagistes (Tour Operators Initiative, TOI) et sesont engagés volontairement à intégrer le développement durable à leurspratiques. Cet engagement n’oblige cependant pas les entreprises à rendredes comptes et l’initiative qui regroupe en 2005 vingt membres sertprincipalement de plateforme d’échanges entre eux. En 2003, la premièreConférence internationale sur le tourisme et le changement climatique adonné lieu à la déclaration de Djerba, qui affirme la relation complexeentre tourisme et changement climatique. Le transport aérien et routier,de même que la consommation d’eau, y sont reconnus comme des facteursde changement climatique (Alet-Ringenbach et al., 2005).

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2.1.2. Les ONG

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ont développé leurguide du tourisme durable ou de l’écotourisme. C’est le cas de l’Unionmondiale pour la nature (IUCN), du Sierra Club (Mader, 2005) et duFonds mondial pour la nature (World Wildlife Foundation, WWF). Plu-sieurs labels fondés sur des valeurs ont été mis sur pied par des organi-sations non gouvernementales ou engagent leur participation. Les gîtesPanda sont un label qui découle d’un partenariat établi en 1993 entreWWF-France, Gîtes de France et la Fédération des Parcs naturels régio-naux. Un programme similaire a été développé par la WWF de Belgique.

La certification Audubon Green Leaf Eco-Rating Program estinitialement originaire du Canada. Ce programme vise principalement leshôtels au Canada, aux États-Unis et en Europe. Le programme originalqui s’intitulait « Greenleaf Eco-Rating Program » a été lancé en 1998 parune entreprise privée dans le domaine du marketing, Terra Choice Envi-ronmental Services Inc., pour l’Association des hôtels du Canada. Depuis2004, Terra Choice s’est associée à Audubon International, une ONGaméricaine d’éducation environnementale dans ce programme revampéet renommé. L’objectif du programme est d’identifier les entreprises hôte-lières qui sont des leaders pour leur performance environnementale et dedistribuer des prix et marques de reconnaissance. Le programme est sou-tenu par des associations comme l’American Hotel and Lodging Organi-zation, Green Hotels et Sustainable Travel International. Ce programmecomporte trois niveaux de reconnaissance qui vont de l’engagement à lavérification de la performance en matière d’écoefficacité.

Au Québec, en 2002, le Bureau de normalisation du Québec, mandatépar l’agence gouvernementale Tourisme Québec, publiait une norme deproduit pour l’écotourisme. Cette norme s’inspire de la démarche d’uneONG, la société Duvetnor. Cette société à but non lucratif a commemission première la protection des oiseaux, particulièrement l’eider, etdes îles sauvages de l’estuaire du Saint-Laurent. Dès sa fondation il y aplus de vingt-cinq ans, pour générer les revenus nécessaires à l’accom-plissement de sa mission, cette organisation s’est engagée dans des acti-vités commerciales fondées sur les ressources mais respectueuses del’écosystème à protéger, soit la vente d’édredons faits à partir du duvetlaissé dans les nids par les canes. Lorsque l’écotourisme a pris son essor,Duvetnor s’est engagée dans l’offre de services écotouristiques, et ce, nonseulement en suivant la même logique de quête de revenus compatibles

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avec la mission, mais aussi comme une tentative de rajustement parrapport à ce que les membres de l’organisation percevaient comme unemenace pour les écosystèmes et une dérive du tourisme de nature.

Au cours des dix dernières années, nous avons été préoccupés comme biend’autres par l’afflux croissant d’écotouristes dans des sanctuaires naturelsfragiles comme les Galápagos ou certains parcs nationaux d’Afrique etd’Asie. Pourtant, dans notre estuaire et sur nos propres rives aussi, despromoteurs proposaient l’observation des baleines, la découverte des cari-bous, des ours noirs et des phoques gris dans des conditions d’exploitationparfois discutables. Ce tourisme était parfois associé à de la publicitétrompeuse, faisait appel à des équipements en mauvais état et proposaitune interprétation non seulement superficielle, mais souvent erronée dumilieu naturel […] nous allions tenter de traduire nos convictions en créantdans les Îles du Bas-Saint-Laurent des produits écotouristiques distinctifs[…] Oui, nous développerons l’écotourisme, mais seulement dans lamesure où nous n’aurons pas d’impacts négatifs sur la faune des îles et duvoisinage (Bédard et Lauzon, s.d., p. 2).

Puis, les efforts d’autorégulation de Duvetnor envers ses pratiquesécotouristiques sont passés du niveau organisationnel au niveau régionallorsqu’une douzaine d’entreprises de la région du Bas-Saint-Laurent sesont regroupées pour implanter un programme de qualité en écotourisme.Un an plus tard, le regroupement s’élargissait, couvrait cinq régions etse faisait connaître comme le Québec maritime. Les efforts du Québecmaritime pour le développement d’un programme de qualité en écotou-risme ont été soutenus par des agences gouvernementales, Environne-ment Canada, Environnement Québec et Développement économiqueCanada. Ils ont débouché, comme on l’a mentionné plus haut, sur unenorme de produit s’appliquant à l’échelle de la province. « Notre objectif,inspiré partiellement par l’industrie australienne, était d’implanter cheznous une grille de critères menant éventuellement à un sceau de qualitéaccréditant les entreprises partageant les mêmes standards élevés dequalité » (Bédard et Lauzon, s.d., p. 2).

2.1.3. Les organisations gouv ernementalesLes gouvernements et les autorités compétentes doivent entreprendre desactions de planification intégrées du développement touristique en par-tenariat avec les ONG et les populations locales pour contribuer audéveloppement durable. […]

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Les gouvernements et les organisations multilatérales devraient donnerpriorité et renforcer les aides directes ou indirectes destinées aux projetstouristiques contribuant à l’amélioration de la qualité de l’environnement.[…]

Les gouvernements, l’industrie, les autorités, et les ONG compétentes enmatière de tourisme doivent encourager et participer à la création deréseaux accessibles de recherche, de diffusion d’information, et de transfertde connaissances et de technologies appropriées en matière de tourismedurable. […]

La Conférence recommande aux États et aux gouvernements régionauxd’élaborer d’urgence des programmes d’action pour un développementdurable au secteur du tourisme, en accord avec les principes énoncés danscette Charte.

(Extraits de la Charte du tourisme durable élaborée par les participants dela Conférence mondiale du tourisme durable, réunis à Lanzarote, îlesCanaries, Espagne, les 27 et 28 avril 1995, <www.insula.org/tourism/version.htm> (consulté le 16 août 2005).

Comme le montrent les extraits ci-haut présentés, la Charte dutourisme durable met en évidence le rôle que devraient jouer notammentles gouvernements dans le tourisme durable. Les gouvernements peuventutiliser divers instruments et la réglementation est sans doute l’instrumentqu’on associe le plus souvent à l’intervention gouvernementale dans ledomaine de l’environnement, mais il en existe toute une panoplie, ycompris les incitatifs de diverses natures et les programmes volontairesde certification en tourisme durable et en écotourisme.

Le programme de certification de tourisme durable du Costa Ricaa été le premier à être créé par un gouvernement (Rivera, 2002). En 1996,le Département des ressources naturelles de l’Institut du tourisme duCosta Rica a établi le programme de certification du tourisme durable(CST). Le programme a été conçu en partenariat avec des institutionsuniversitaires, des associations hôtelières et des organisations environne-mentales. Il s’agit d’un programme volontaire d’évaluation de la perfor-mance environnementale (performance-based voluntary environmentalprogram) qui vérifie l’implantation par les organisations hôtelières depolitiques environnementales dépassant les exigences de la loi (Rivera,2002). Le programme distingue, par une échelle allant de 0 à 5 feuilles,le degré de performance en matière de développement durable. Selonl’étude de Rivera, les facteurs contribuant à l’adhésion des hôtels à ceprogramme sont la vérification par une agence gouvernementale, les

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encouragements de la part de la chambre de tourisme et des associationshôtelières auprès de leurs membres, ainsi que la présence d’une clientèle« verte ». Selon cette même étude, la participation au programme CSTest corrélée à plusieurs avantages reliés à une stratégie de différenciation,soit des prix et un volume de vente plus élevés que les hôtels qui n’yparticipent pas. Les certifications ont débuté en 1998 et actuellement55 hôtels sont accrédités6. Selon l’estimé de Newton et al. (2004), celane représenterait que 5 % des hôtels du pays. Parmi les hôtels accrédités,seulement deux ont atteint le cinquième niveau (la meilleure performance)et 45 sont accrédités au deuxième niveau7.

Très connu aussi, le label « Pavillon bleu » a été créé en 1985 parl’Office français de la Fondation pour l’éducation à l’environnement. Celabel s’est internationalisé et se retrouve actuellement dans plusieurs payseuropéens sous l’appellation Blue Flag. Les candidats qui souhaitentobtenir ce label, des communes et des ports de plaisance, doivent répondrepositivement à 36 critères concernant l’environnement, la gestion desdéchets, la gestion de l’eau et la sensibilisation du public, de même quese soumettre à des contrôles. En outre, en France, le secrétariat d’État auTourisme a adopté la Charte nationale d’éthique en tourisme en 2000.« Elle s’inspire largement du Code mondial d’éthique du tourisme élaboréen 1999 par l’OMT et a été rédigée en collaboration avec les grandsopérateurs du tourisme tels qu’Accor ou Nouvelles Frontières » (Alet-Ringenbach et al., 2005, p. 50).

2.1.4. Les associations industrielles

L’industrie, qui peut y voir un outil d’autoréglementation comportantl’avantage de la flexibilité par rapport à la réglementation, est aussi appe-lée à s’impliquer dans les programmes de certification, comme l’illustreles cas du programme NEAP en Australie et du programme POEMS enHollande. Dans ces deux cas, le gouvernement a mis sur pied les pro-grammes de certification, mais ce sont les associations de l’industrietouristique et écotouristique qui deviennent les acteurs principaux de sondéveloppement et de sa diffusion.

6. Selon l’information fournie par le site du programme, <www.turismo-sostenible.co.cr>(consulté le 16 août 2005).

7. Selon l’information fournie par le site du programme, <www.turismo-sostenible.co.cr>(consulté le 16 août 2005).

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Le NEAP est une certification d’origine australienne qui était, lorsde son lancement en 1996, connue sous le nom de National EcotourismAccreditation Program (NEAP I), mais qui a changé de nom en 2000pour devenir le Nature and Ecotourism Accreditation Program (NEAPII), reflétant ainsi une nouvelle stratégie d’internationalisation de la mar-que. Dans cette dernière version du programme, on retrouve trois niveauxd’accréditation, soit le « tourisme de nature », l’« écotourisme » et l’«éco-tourisme avancé ». Le NEAP a été créé par l’Office du tourisme dugouvernement fédéral d’Australie. Le mandat d’élaborer un programmede certification avait été initialement confié à une firme de consultantsqui a produit un document décrivant des procédures, mais pas de critèresd’accréditation (Buckley, 2001). Une équipe composée de membres del’Association d’écotourisme d’Australie, de l’Association des voyagistesde Victoria, de l’Office national du tourisme et d’une trentaine de voya-gistes indépendants s’est alors vu confier le mandat de reprendre le travailet a produit une seconde ébauche, laquelle allait devenir la premièreversion du NEAP. « NEAP was very much driven by the tourism industry– the operators – wanting to keep the cowboys out » (Crabtree, 2005).Le peu d’adhérents au programme a été une des principales difficultésde démarrage du NEAP. Des efforts promotionnels de l’Associationd’écotourisme d’Australie, appuyés par des agences gouvernementalesd’États, ont permis de dépasser cette difficulté et, selon Buckley (2001),la majorité des opérateurs australiens offrent maintenant des produitscertifiés par le NEAP.

Dans une analyse de l’industrie des voyagistes en Hollande, vanWijk, de Bakker, den Hond et Elfring (2005) ont constaté que les pres-sions exercées par des ONG et des organismes gouvernementaux ontamené l’Association industrielle des voyagistes à faire siens les valeurset les objectifs du développement durable (DD) et à devenir la principalepromotrice de nouvelles pratiques. Parmi les initiatives de l’Association,mentionnons la distribution d’information concernant sa position contrele tourisme sexuel impliquant des enfants, la publication d’un dépliantintitulé Travel Industry and Its Concern for the Environment, de mêmeque le développement du programme de certification environnementalePOEMS (Product-Oriented Management Scheme), lequel est devenu en2004 obligatoire comme condition d’adhésion à l’Association. La dif-fusion de ces valeurs et pratiques s’est réalisée rapidement auprès dequelques entreprises leaders qui s’étaient d’ailleurs impliquées dans le

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processus d’élaboration des normes. Par contre, par la suite, les initiativesmises de l’avant par l’Association se sont butées à l’inertie du reste deses membres.

2.1.5. Les initiatives multipartites

Ainsi, on remarque que les programmes de certification, qu’ils émanentà l’origine des ONG, des agences gouvernementales ou des associationsindustrielles, prennent éventuellement une forme multipartite. En effet,les organisations qui mènent ces programmes impliquent à un momentou un autre ou encore regroupent officiellement des représentants del’industrie, de la société civile et des gouvernements. Le contexte multi-partite a pour avantages de permettre d’apprendre les uns des autres etde favoriser l’innovation (Turcotte, 1997). Les normes qui découlentd’initiatives multipartites sont aussi plus susceptibles d’être implantéespuisque les groupes visés ont participé à la formation de ces normes, enprincipe du moins. Par contre, la prise de décision et les choix faits dansune structure multipartite fondée sur la recherche de consensus doiventêtre acceptables à l’ensemble des participants ; en conséquence, ilspeuvent se limiter à des énoncés généraux et omettre des détails qui sontpourtant importants pour chacun des acteurs, mais sur lesquels ils nepeuvent s’entendre (Turcotte, 1997 ; Turcotte et Pasquero, 2001). Enconséquence, les normes qui se développent en contexte multipartiteimpliquent généralement une série de petites avancées successives où leséléments se précisent peu à peu. Pour cette raison et parce qu’ils sont lefruit d’expérimentations sociales, on doit donc s’attendre à voir lesprogrammes de certification faire l’objet de révisions périodiques.

2.1.6. Les consommateurs politiques

Comme dans les industries forestière et du textile, dans l’industrietouristique, les associations de consommateurs jouent un rôle secondairedans l’instigation de labels et de certifications fondées sur les valeurs.Cette idée surprend a priori si l’on associe ces initiatives au mouvementdu consumérisme politique. On peut tenter de l’expliquer en remarquantque les associations de consommateurs ont connu leur essor pendant lapériode des années 1960 à 1980 (Pasquero, 2005) et que leur mandats’est alors centré sur la protection des consommateurs. Les labels fondés

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sur les valeurs ne visent pas en priorité la protection des consommateurs,mais d’autres objectifs tels que l’équité et le respect de l’environnement.Les associations de consommateurs posent des actions politiques (représen-tations et manifestations diverses) pour accomplir leur mandat de protectiondu consommateur, mais cela est à distinguer du concept de consom-mateurs politiques, c’est-à-dire des consommateurs qui espèrent que leuracte de consommation d’un produit certifié contribuera à transformer lasociété dans le sens de leur idéal.

En termes de part de marché, qu’en est-il de ces consommateurspolitiques ? Il s’agit en fait d’un petit segment du marché du tourismepuisque même dans le marché européen, le marché le plus développé,les éco-labels n’ont été adoptés que par 2 % de leur marché potentiel.Par ailleurs, si les éco-labels sont sensés sensibiliser les touristes etrépondre à la demande des consommateurs en matière d’information surla performance environnementale et sociale des entreprises, les labelsauraient plutôt tendance à n’être reconnus que par les consommateursdéjà convertis à la cause (Sharpley, 2001), tandis que la sensibilisationne serait pas nécessairement liée à un comportement d’achat cohérent(Sadidharan, 2001).

On peut s’interroger sur l’ampleur du phénomène du consumérismepolitique en général et de l’écotourisme en particulier, de même que surla demande de certifications fondées sur les valeurs de la part des con-sommateurs. À ce sujet, dans une réflexion sur l’émergence des certifi-cations en écotourisme au Canada, Epler Wood et Halpenny (2001)s’étonnent de la prolifération des certifications en écotourisme et en tou-risme durable, compte tenu de l’incertitude quant à l’importance de lapart de marché que cela peut représenter. « It is fascinating that a globalmovement to certify ecotourism has been launched and even becomefragmented without any measurable data on the demand for the service »(Epler Wood et Halpenny, 2001, p. 125). Par contre, si l’on peut émettredes doutes quant à savoir quelle influence a la certification sur le com-portement d’achat des consommateurs, Buckley (2001) note que lorsquele programme NEAP débutait et qu’il était encore peu reconnu, nom-breux étaient les voyagistes qui doutaient de l’avantage compétitif quepouvait leur conférer cette certification. Les perceptions ont changé àmesure que le NEAP gagnait en notoriété. Des certifications connuespeuvent donc contribuer à la création et à la croissance de la demande.

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2.2. LABELS ET CERTIFICATIONS : FACTEURS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE ?Eco-labels, awards and self-commitments have entered the tourism supplychain, and although their current impact has been minimal accross thesector as a whole, they are revealing tremendous potential to move theindustry towards sustainability (WTO, 2002, p. 12).

Nous distinguons deux catégories de conditions pour que lesprogrammes de certification fondées sur les valeurs puissent véritable-ment contribuer au développement durable. La première condition estque ces programmes soient adoptés par le plus grand nombre d’entre-prises. En effet, si leur adoption demeure un phénomène marginal, leurinfluence sera évidemment fort réduite. La deuxième condition est que,lorsqu’ils sont implantés, ces programmes de certifications soient effi-caces à l’atteinte du développement durable. Or, les programmes decertification ne peuvent atteindre ces objectifs qu’à la condition, d’unepart, d’inclure des normes de fond suffisamment exigeantes et, d’autrepart, d’être fondés sur un processus qui puisse à la fois garantir lerespect de ces critères de fond et favoriser l’atteinte des objectifs dudéveloppement durable.

2.2.1. L’adoption des certif cations

L’écotourisme et la certification en écotourisme peuvent-ils amener destransformations du domaine dans le sens du développement durable ?Pour ce faire, il faudrait qu’une proportion significative des activitéstouristiques deviennent des activités écotouristiques. L’écotourisme peut-il contribuer à la préservation de la biodiversité et des écosystèmesmenacés ? Pour ce faire, selon une logique purement économique, ilfaudrait que cette activité génère suffisamment de revenus pour compen-ser les revenus que procureraient d’autres usages de ces écosystèmes,ceux de la coupe forestière par exemple. Des recherches sur les revenusannuels générés par le tourisme de nature dans des parcs naturels natio-naux montrent que les revenus par hectare sont effectivement beaucoupsupérieurs à ceux de la coupe forestière (Lee, Lee et Han, 1998 ; Tisdell,1996 ; Wunder, 2000). D’autres analyses sont moins optimistes et cons-tatent que les revenus générés atteignent peu les populations les pluspauvres (Goodwin et Roe, 2001) et que, le plus souvent, la déforestationcontinue (Bookbinder, 1998) parce que la population a besoin de bois dechauffage ou de terres à cultiver.

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De plus, au-delà de la création de valeur économique par des parcsnationaux, pour générer les revenus nécessaires à une protection accruedes espaces naturels et de la biodiversité, il faudrait que la quantité detouristes soit assez importante. Pourtant, l’écotourisme est généralementperçu comme une expérience de contact privilégié avec la nature qui sevit en petit groupe, voire seul. La production du service écotouristiqueest décrite comme étant de petite échelle et de faible densité ; c’est unproduit qui s’adresse à des individus dont le revenu est supérieur à lamoyenne et qui sont plus scolarisés que la moyenne (Müller, 2000). Entermes stratégiques, l’écotourisme correspondrait à un marché de niche,c’est-à-dire à un petit segment de marché. Si tel est effectivement le cas,la contribution de l’écotourisme à la préservation de la biodiversité et audéveloppement durable ne peut alors qu’être réduite. Ce constat amèneWeaver (2001) à remettre en cause cette conception et à laisser entendreque l’écotourisme pourrait et devrait aussi être un tourisme de masse.

Par ailleurs, nous avons vu que les certifications n’ont jusqu’ici quefaiblement pénétré le marché. Quels sont les facteurs qui pourraient frei-ner l’adoption des certifications fondées sur les valeurs ? L’implantationd’un programme de certification entraîne pour l’entreprise un ensemblede coûts. On doit en effet tenir compte non seulement des frais exigéspar l’organisme de certification et du prix de l’audit par une organisationindépendante de vérification, mais aussi du temps consacré à cette tâchepar les gestionnaires et le personnel, des frais de consultation et de for-mation le cas échéant, de même que des coûts entraînés par les mesurescorrectives (Rohitratana, 2002). En conséquence, plusieurs petites etmoyennes entreprises considèrent ces certifications comme de nuisiblesbarrières à l’entrée sur le marché. Cette perception n’est certes pas favo-rable à l’adoption des certifications par un grand nombre d’entreprisestouristiques, particulièrement les plus petites. Comme le notent Bédardet Lauzon (s.d.), « l’entreprise en écotourisme est de faible gabarit, comptepeu d’employés, a une existence souvent éphémère dans un marché enémergence et doit faire face à d’innombrables contraintes : brièveté de lasaison, éloignement des marchés, fragmentation des sites recelant lesattraits, rentabilité précaire et manque de ressources humaines » (p. 5-6).

Pour faire contrepoids à cette représentation négative envers lesprogrammes de certifications, on doit d’abord présenter leurs avantages.Un premier avantage est que la certification donne généralement accès àun marché. Du coup, les barrières à l’entrée sur le marché, créées par lesexigences des distributeurs, constituent un avantage concurrentiel pour lesentreprises certifiées. La question revient donc à savoir si la certification

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est un attribut recherché par le client, soit le touriste ou encore le voyagiste.Peu d’études concluantes ont été jusqu’ici réalisées à ce sujet et lesréponses sont plutôt anecdotiques. À notre connaissance, seul Rivera(2002) a fait une étude systématique de cette question en s’intéressant àla perception des hôteliers ; ses résultats montrent que la certificationfournirait un avantage concurrentiel dans le contexte particulier du CostaRica, où la certification est bien reconnue et appuyée par l’État. Unfacteur limitant la croissance de la reconnaissance des éco-labels par laclientèle est le peu de budget qui peut être consacré à la promotion duproduit par les organismes de certification, généralement des organisationsd’assez petite taille (Sadiharan, 2001, p. 114).

Par ailleurs, des pressions exercées par des groupes sociaux sur lesvoyagistes pourraient les amener à exiger la certification de leurs four-nisseurs, en faire une condition d’accès au marché. C’est un phénomènesemblable qui s’est produit dans l’industrie textile où les groupes anti-sweatshops ont fait pression sur les grands distributeurs, les poussant àimposer à leurs fournisseurs des certifications fondées sur les valeurs.Nous reviendrons sur cette question un peu plus loin.

Un autre avantage de l’implantation d’une certification fondée surles valeurs est que cela pourrait être l’occasion d’améliorer les procédésde travail et d’augmenter ainsi la productivité. L’obtention de certifica-tions en écotourisme oblige à l’atteinte de nombreuses compétences,notamment en matière de sécurité, qui sont propices à diminuer les risqueset à augmenter l’efficacité. Par ailleurs, les certifications dites de tourismedurable ou environnemental visent souvent principalement l’écoefficacité.Les pratiques d’écoefficacité, telles que la réduction de la consommationd’énergie et d’eau et de la génération de déchets, entraînent généralementdes réductions de coûts des opérations. Selon l’Organisation mondiale dutourisme (WTO, 2002), la performance environnementale des organisa-tions d’accueil certifiées est en moyenne de 20 % supérieure à celle desorganisations non certifiées en Europe, c.-à-d. que leur consommationd’énergie et d’eau par nuitée et leur production de déchets sont de 20 %inférieures (WTO, 2002).

Une autre approche pour contrer les critiques des petites entreprisesface aux programmes de certification sociale est de faire en sorte qu’ellesne soient pas celles qui en assument le coût principal. C’est ce quepromeuvent certaines ONG actives dans le domaine du textile et quicritiquent à ce sujet le WRAP, une certification fondée sur les valeursque de grandes chaînes de distribution telles que Wal-Mart imposent à

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leurs fournisseurs. Selon le schéma de certification du WRAP, la certifi-cation s’applique au niveau de l’usine et non pas au niveau de la marquede commerce. Ce sont donc les entreprises de fabrication plutôt que lesentreprises de distribution qui doivent en assumer les coûts. Le MSNanalyse cela selon la perspective des rapports Nord-Sud et critique le faitque ce sont donc les entreprises les plus pauvres qui en assument lescoûts : « Northern retailers and manufacturers should take responsibilityfor their action, not the overseas factories which are the poorer part ofthe chain » (MSN, 20008, p. 4). Dans le domaine du tourisme, pourrait-on imaginer que les grands voyagistes supportent financièrement la miseà niveau et la certification de leurs fournisseurs ?

Rendre les programmes de certification plus attrayants (ou moinsrébarbatifs) auprès de ceux qui sont censés les adopter n’est certainementpas une condition suffisante pour qu’ils soient largement adoptés et pourqu’ils contribuent au développement durable. Certes, les programmes decertification sociale sont souvent considérés comme des mécanismes« volontaires » de régulation. Pourtant, il faut comprendre de manièrerestrictive le sens attribué à « volontaire » comme signifiant qu’ils ne sontpas imposés par le gouvernement par voie de réglementation. Cela nesignifie toutefois pas que c’est hors de toute contrainte que les entreprisesles adoptent. Par exemple, dans l’industrie du textile, ce sont les ONGet les actionnaires activistes qui contraignent les entreprises à adopter descertifications par leurs campagnes lorsqu’elles sont relayées par lesmédias (de Bellefeuille et Turcotte, 2005).

Ainsi, parmi les conditions essentielles à l’adoption des programmesde certification, on doit donc aussi compter sur la vigilance des organi-sations à visée sociale et sur leur capacité à se trouver des alliés ayantune influence sur l’entreprise, y compris les médias, les actionnaires etles clients. Qu’en est-il dans le domaine du tourisme ? Nous n’avons pasété témoins de campagnes médiatiques aussi fortes que celles qui ont visédes entreprises du textile telles que Nike. Toutefois, il existe des ONG,notamment Tourism Concern et le mouvement mondial antigolf, quimènent en visant l’industrie touristique des actions assez semblables àcelles prises par les ONG qui sont intervenues dans le domaine du textile.Ces organisations remettent en cause la légitimité de plusieurs pratiquesde l’industrie touristique.

8. Maquila Solidarity Network, Critique of the Worldwide Responsible Apparel Production(WRAP) Program, <www.maquilasolidarity.org/resources/codes/wrap.htm> (consulté le22 mars 2005).

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Tourism Concern est une ONG britannique fondée en 1989 qui apour mission de faire connaître les impacts négatifs de l’industrie touris-tique tant sur les plans économique, culturel, environnemental que social.Reprenant le thème des sweatshops décriés dans le domaine du textile,cette organisation mène d’ailleurs actuellement une campagne nommée« Sea, Sand, Sun and Sweatshop ». Tourism Concern a mené plusieursactivités : production d’un rapport qui met en évidence les conditions detravail déplorables et l’exploitation des travailleurs de l’industrie touris-tique, campagne de cartes postales s’adressant aux voyagistes, productionde vidéos, de matériel pédagogique s’adressant aux écoliers mais aussiaux gestionnaires d’entreprises touristiques, notamment un ouvrage surla responsabilité sociale et la gestion des parties prenantes d’une entre-prise touristique (Kalisch, 2002).

Le mouvement mondial antigolf (Global Anti-golf Movement,GAG’M) a pour mission de freiner la prolifération des golfs et du tou-risme de golf, particulièrement en Asie-Pacifique9. Cette organisation aété formée en 1993 par des ONG, des groupes de consommateurs et descritiques de l’industrie touristique. Les membres de cette organisation ontjusqu’ici décrié les contaminations chimiques engendrées par l’entretiendes pelouses des golfs, organisé des manifestations contre le développe-ment de nouveaux golfs qui impliquaient la perte de territoires forestiersou agricoles (de même que la délocalisation de paysans) et produit desdocumentaires et un manifeste10. L’organisation a aussi créé des imageschocs, telles que la photo d’un gardien de golf avec une mitraillette oucelle d’une banderole étendue sur la pelouse d’un golf où l’on voit dessinéeune figure de mort avec sa faux11.

2.2.2. L’inf uence des certif cations sur la durabilitéThe lack of universally accepted methodology for assessing environmentalimpacts […] during the various stages of the life cycle of tourism enter-prises, the inadequacy of detail and sophistication of the databases utilizedfor conducting life-cycle inventories and the reluctance of tourism enter-prises to disclose operations-specific information […] cumulatively giverise to a serious set of problems (Sadidharan et al., 2001, p. 113).

9. <multinationalmonitor.org/hyper/issues/1993/11/mm1193_13.html> (consulté le 22 août2005).

10. <www.antigolf.org/english.html> (consulté le 22 août 2005).11. <utenti.lycos.it/dossierisarenas/golf.htm> (consulté le 22 août 2005).

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Au-delà du défi de leur adoption, pour que les programmes decertification contribuent à l’atteinte des objectifs du développementdurable, il faut encore qu’ils soient efficaces à atteindre ces objectifsqu’ils sont censés viser. Pour ce faire, dans un premier temps, les pro-grammes doivent inclure des critères de fond cohérents avec ces objectifs.Cela renvoie aux multiples objectifs de l’écotourisme et du développe-ment durable qui ont été précédemment exposés. La réconciliation de cesobjectifs passe souvent par l’expression symbolique d’une logique d’inté-gration (Hoffman, 1999) qui consiste à affirmer la convergence des objec-tifs économiques, environnementaux et sociaux. Cet extrait trouvé sur lesite de Audubon en offre un exemple : « The Audubon Green Leaf Pro-gram is based on the premise that what’s good for the environment canbe good for business12. » La réconciliation symbolique s’exprime nonseulement entre les objectifs, mais aussi entre les parties prenantes,puisque plus des deux tiers des programmes d’éco-labels comportent uneforme de coopération multipartite (WTO, 2001), c’est-à-dire que leurcréation et leur gouvernance sont assurées par des comités auxquels par-ticipent des représentants de l’industrie touristique, des ONG aux viséesenvironnementales et sociales de même que, parfois, des organisationsgouvernementales.

Ainsi les certifications cherchent la légitimité en adoptant lessymboles du développement durable, notamment le multipartisme (Everettet Jamal, 2004), et les entreprises cherchent la légitimité en adoptant lescertifications. Cela est certainement un phénomène normal, voire néces-saire et acceptable en autant qu’il s’accompagne de contributions con-crètes au développement durable. Qu’en est-il ? Il existe en fait unegrande variété de certifications au sein de laquelle on peut distinguer aumoins trois grandes catégories en fonction de leurs objectifs et de leurscritères d’évaluation.

Il y a premièrement les certifications en écotourisme. La certificationaustralienne NEAP et les gîtes Panda en sont des exemples. Les critèresd’évaluation sont la qualité du site naturel, la qualité des activités édu-catives et les critères liés aux objectifs du développement durable, soitla contribution au développement économique, à la préservation environ-nementale et à l’équité sociale. Deuxièmement, il y a les certificationsde tourisme durable qui ne sont pas restreintes au tourisme de nature etdont les critères d’évaluation rejoignent les objectifs du développement

12. <www.terrachoice.ca/hotelwebsite/indexcanada.htm> (consulté le 6 mai 2005).

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durable. Les certifications sont moins nombreuses dans cette catégorie,mais on peut citer le cas du Green Globe 21. Enfin, il y a les certificationsd’éco-efficacité. Les organisations touristiques qui souhaitent obtenir cescertifications doivent réduire leur consommation d’eau et d’énergie, demême que la quantité de déchets et résidus (y compris toxiques) qu’ellesproduisent. Citons en exemple dans cette catégorie l’Audubon GreenLeaf Program et le programme ECOmmodation de l’Association deshôtels du Canada. Ainsi, si les deux premières catégories de certificationont des critères qui couvrent en principe les trois dimensions du déve-loppement durable, la dernière catégorie n’en couvre qu’une partie, soitla dimension environnementale.

On considère souvent comme allant de soi que l’impact environ-nemental de l’écotourisme est insignifiant, parce que le volume de tou-ristes est restreint et que ces touristes sont intéressés par les phénomènesnaturels et la préservation des écosystèmes. Selon l’expression populairevéhiculée notamment par le Fonds mondial pour la nature, l’écotouristene prend que des photos et ne laisse que des traces de pas. Pourtant, bienque dans une moins grande mesure que d’autres industries comme l’agri-culture, la foresterie ou l’activité minière, l’écotourisme peut entraîner uncertain nombre d’impacts négatifs sur l’environnement. On rapporte descas d’ours, de baleines, de singes et de tortues importunés par les activitésd’observation (Isaacs, 2000). La construction d’équipements d’accueil destouristes de nature peut aussi être une cause de déforestation (Isaacs,2000). Les activités écotouristiques se font dans des écosystèmes extra-ordinaires dont la capacité de charge est souvent limitée (Wall, 1997). Lesvisiteurs peuvent aussi venir à des moments de sensibilité particulière, parexemple la saison des amours ou de la ponte, et ainsi perturber la faune.Si des normes en écotourisme bien développées, véhiculées par les certi-fications et respectées par les guides et les touristes peuvent aider à réduirede tels impacts, le transport qui précède nécessairement les activitésd’observation entraîne des impacts écologiques importants.

En effet, les certifications en écotourisme, comme en tourismedurable et en écoefficacité d’ailleurs, sont généralement fondées sur uneanalyse limitée du site d’accueil et ne mesurent pas l’empreinte écolo-gique globale. Hunter (2002) déplore que rares sont les analyses dont lechamp d’évaluation inclut l’impact du transport. Pourtant, le transport aun impact élevé et le transport aérien en particulier contribue de manièreextrêmement importante à l’effet de serre puisqu’il implique la consom-mation de grandes quantités de pétrole. Les solutions à la question du

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transport semblent difficiles à implanter. On peut privilégier le transporten commun par rapport à la voiture. Cela suppose qu’il existe un systèmede transport en commun, que ce soit le train ou l’autobus, qui se rendeaux endroits à visiter, ce qui est rarement le cas pour les sites à potentielécotouristique et ce qui impliquerait d’ailleurs qu’il y ait un assez grandvolume de visiteurs pour justifier le système de transport en commun.

Quant au mode de transport consommant le plus de carburant, soitl’avion, il demeure le seul moyen de transport disponible pour effectuerde longues distances. À la marge, on peut réduire la consommation decarburant par passager en s’assurant que l’avion est plein. Plusieurs com-pagnies aériennes ont des politiques et des pratiques qui vont dans cesens, ce qui contribue par ailleurs à réduire leurs coûts. Depuis peu, desONG proposent aux passagers de calculer le nombre d’hectares de forêtnécessaires pour absorber la dépense en gaz carbonique engendrée parleur voyage et de faire un don correspondant au montant nécessaire pourpréserver cette superficie de forêt. C’est le cas par exemple du pro-gramme My Climate. De manière plus radicale, d’autres proposent quele seul moyen de faire du tourisme durable est de ne pas faire de tou-risme, c’est-à-dire de ne pas se déplacer. Toutefois, il est peu probableque cette proposition soit retenue par un nombre important de touristespotentiels, compte tenu que le tourisme est déjà l’industrie la plus impor-tante au monde, compte tenu de la croissance de la population et comptetenu de la force d’attraction que représente le voyage, ce que l’on peutcertainement associer à des éléments prépondérants de la macroculture.

Non seulement les exigences de performance sociale véhiculées parles critères des programmes de certifications doivent-elles couvrirl’ensemble du champ d’évaluation du développement durable et être suf-fisamment élevées, mais il faut encore que ces critères soient appliqués.C’est pour cette raison que le contrôle et la vérification indépendante del’application des normes est un enjeu important. D’une part, la vérifica-tion indépendante contribue à rendre le processus rigoureux et à donnerde la crédibilité au programme mais, d’autre part, cela peut rendre leprocessus lourd et ajouter des coûts. Selon l’étude de l’OMT (WTO,2002), la majorité des programmes de certification comprennent une véri-fication indépendante. Plus exactement, 80 % des programmes de vérifi-cation font évaluer l’application des critères par une tierce partie ou unjury indépendant. Pour la moitié des 59 éco-labels de l’échantillon, laprocédure de vérification incluait une visite de site et pour un tiers de

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l’échantillon, la vérification impliquait plusieurs étapes et plusieurs ins-tances de vérification (interne et externe). Pour la moitié de l’échantillon,il y a aussi des visites de contrôle après l’obtention de la certification.

CONCLUSION

Les codes de conduite d’entreprise et les programmes de certificationsociale et environnementale constituent des initiatives diversifiées quisont issues de groupes distincts : des mouvements sociaux, des entre-prises et associations industrielles, parfois des gouvernements, et souventde regroupements multipartites. On y réfère souvent en termes d’initia-tives volontaires. Cela ne signifie cependant pas que les entreprises lesadoptent en dehors de toutes contraintes.

Une certaine concurrence est inhérente à l’existence de l’offre pardifférents groupes visant à signaler et certifier la performance sociale del’entreprise. Derrière cette concurrence se retrouvent en fait des enjeuxde gouvernance. Le premier enjeu est celui de la diffusion de valeurs etl’adoption d’un cadre cognitif concernant ce qui constitue la responsabi-lité sociale des entreprises. Dans l’industrie du tourisme et particulière-ment pour l’écotourisme, on remarque l’importance du rôle joué par desorganisations internationales dans la promotion de ces normes. Ledeuxième enjeu de gouvernance est celui de la surveillance et du contrôlede ces normes. Comment l’application des normes est-elle vérifiée ? Parqui ? Selon quelles modalités ? À quel coût ? Ces questions se cachentderrière les débats entourant les orientations des programmes, par exemplecelles du NEAP ou du Bureau de normalisation du Québec.

Les codes de conduite d’entreprise et les programmes de certificationsociale peuvent contribuer à l’atteinte des objectifs du développementdurable, mais à plusieurs conditions. À la condition, bien sûr, qu’ils soientadoptés par la majorité des entreprises et que leur adoption ne demeurepas un phénomène marginal. À cet égard, la vigilance des groupes sociauxet leur capacité de faire pression sur les entreprises sont nécessaires. Laréceptivité des entreprises face à ces normes et programmes sera aussi unfacteur déterminant. Cette réceptivité sera favorisée par une meilleurecompréhension de ces normes par les personnes à tous les niveaux desorganisations. L’État a aussi un rôle déterminant à jouer. On a vu que lesuccès du programme du Costa Rica était en bonne partie lié à l’implicationétatique.

3.

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Une autre condition est que les normes de performance sociale desprogrammes les plus populaires soient suffisamment exigeantes pour sus-citer une amélioration allant dans le sens du développement durable. Àce sujet, il faut remarquer que le champ d’évaluation des certificationsest souvent partiel, excluant notamment l’impact du transport. On remarquetoutefois que plusieurs certifications tentent d’intégrer, par au moinsquelques indicateurs, les trois dimensions du développement durable.

Enfin, une autre condition est que ces normes de performance soientappliquées. La rigueur et la crédibilité des mesures de contrôle et devérification des certifications sont donc un enjeu majeur qui vise juste-ment à garantir cette condition. C’est pourquoi plusieurs insistent surl’importance de la vérification externe et indépendante. Si l’importancedes agents externes à l’entreprise pour susciter l’implantation de cesprogrammes et vérifier leur application ne fait pas de doute, il faut aussiremarquer le rôle fondamental que sont appelés à jouer les agents internesà l’entreprise pour diffuser des valeurs et apporter des changements depratique nécessaires à l’atteinte des objectifs de performance sociale del’entreprise. Les codes de conduite et les certifications ne sont qu’un deséléments de l’intégration du développement durable dans la culture et lespratiques des organisations. Selon Malloy et Fennell (1998)13, ce sont desartefacts qui correspondent à un premier niveau devant s’imbriquer surd’autres niveaux, soit sur celui de l’action, sur celui des valeurs organi-sationnelles et, enfin, sur celui de la métaculture.

Les entreprises touristiques adhèrent à des degrés divers aux objectifsdu développement durable14, du degré zéro à des engagements plus pous-sés, et ce, en fonction de la culture propre de chacune d’elles et despressions qui seraient faites sur elles. Des organisations comme le réseaudes auberges de jeunesse, les hôtels Scandic, Accor15 ou encore le groupeFairmont se sont dotées de politiques de développement durable. Lesentreprises écotouristiques sont interpellées de manière particulière parle projet du développement durable parce que ce projet est cohérent avecles idéaux qui inspirent l’intérêt pour ces produits de la part de leurclientèle, mais aussi en partie parce qu’un certain nombre des producteurs

13. Qui se sont sur le modèle d’analyse culturelle de Schein (1985).14. Pour des études des réponses de l’industrie hôtelière aux préoccupations environnementales,

voir Knowles et al. (1999) et Bohanowicz (2005) ; pour une étude sur l’influence des réseauxde pairs sur l’adhésion aux objectifs du développement durable dans les entreprises touristiques,voir Halme (2001).

15. Voir Aggeri et al. (2005) pour l’étude de cas de cette entreprise transnationale.

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ont choisi d’œuvrer dans ce domaine du fait qu’ils partagent ces idéaux.Ils ont à l’occasion à porter la cause de la défense de l’environnementface à d’autres entreprises (Driscoll et Crombie, 2001).

Les certifications ont le potentiel de contribuer de manière modesteà relever un défi de taille, celui de changer les pratiques des organisationset les habitudes de consommation des touristes. En effet, si le respect dela nature perçue comme bonne et vulnérable fait maintenant partie desreprésentations contemporaines, les représentations des vacances et duvoyage sont encore plus fortes et l’associent à la liberté et au bonheur.Si l’on peut compter depuis les années 1970 plusieurs dizaines de filmsmettant en scène les symboles de la nature menacée, on peut compterdes centaines de films où les représentations sont celles de la consom-mation, sans souci de limites aux capacités de la nature. Les héros voyagent,prennent l’avion pour se rendre dans de grands hôtels, que ce soit dansdes villes très glamour, au bord de la plage, à la station de ski, dans desvilles d’eaux ou, encore, trouvent la liberté au volant de la voiture, toutcela en profitant au passage de la beauté époustouflante des plus beauxpaysages. En toute honnêteté, il est difficile de ne pas se laisser tenterpar l’une ou l’autre de ces images.

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1133Chapitre

L’écotourisme rattrapé par le marchéJacques PerretChercheur, Cemagref de Grenoble

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Résumé

Le durable est devenu le sésame des bonnes pratiques touristiques. Dansles régions rurales et montagnardes, l’écotourisme est en première ligne.Il représente l’archétype du tourisme doux, respectueux, intelligent.Qu’en est-il réellement ? La communication portera sur trois niveauxd’analyse : 1) Sur le plan spatial, l’écotourisme peut se diffuser partout,au risque d’entraîner une patrimonialisation et une mise en scène descultures locales. 2) Sur le plan commercial, l’écotourisme est porté parla demande d’un segment très restreint de la clientèle, correspondant àune population à fort capital culturel. 3) Quant à l’organisation del’offre, l’écotourisme est l’objet d’une rationalisation qui tend à norma-liser les produits originaux.

Ces constats appellent deux types de réflexion : 1) Cette forme de tourismereprésentait une renouveau dans les pratiques touristiques par la qualitédes relations qu’elle supposait autant sur le plan social qu’environne-mental. Or, il semble qu’elle soit devenue un modèle banalisé et préco-nisé par tous les experts qui conseillent les décideurs. La loi du marchéet les techniciens de l’aménagement ont-ils eu raison de toutes cespratiques ? Ou d’autres formes d’écotourisme, loin des modèles, existent-elles toujours ? 2) Les produits touristiques ont toujours été inventés parune élite culturelle soucieuse de distinction, puis démocratisés ensuite,par effet de mode, d’imitation, de promotion. L’écotourisme peut-il con-naître cette destinée au risque de se dénaturer, ou des garde-fous sont-ils posés pour limiter cette pratique à des initiés ?

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Les enjeux environnementaux et culturels, la volonté de favoriser ledéveloppement local, motivent les recommandations des institutionsinternationales depuis une dizaine d’années1, pour que le tourisme seconforme à la notion de développement durable2. L’écotourisme, que l’onpeut définir par un « voyage responsable dans les espaces naturels quicontribuent à la protection de l’environnement et à l’amélioration desconditions de vie des populations locales » (AFIT, 2002), en est l’arché-type. Les acteurs du tourisme travaillent à le diffuser à force de promotion,tout en le canalisant pour le protéger des dérives possibles.

Contrairement aux formes de tourisme courantes qui se définissentpar l’activité pratiquée (ski, baignade, randonnée, voyage, détente), l’éco-tourisme se signale par la qualité de la destination et la relation que letouriste veut entretenir avec celle-ci : authenticité et responsabilité. Il sedistingue ainsi en affichant des valeurs fortes, qui rejettent implicitementles conditions de vie des pratiques touristiques de masse (artificialité,consumérisme, etc.), diffusées depuis les années 1980 un peu partoutdans le monde. Mais il se veut aussi rentable, comme toute activitémarchande, ce qui le ramène aux dures conditions économiques.

Ces trois qualités tentent de répondre à un marché tout en respectantles principes du tourisme durable. Mais au-delà des intentions, l’organi-sation de l’offre d’écotourisme n’est-elle pas en train de détourner laformule de départ ? C’est ce que nous allons analyser en traitant succes-sivement de la signification et des conséquences de ces trois valeurs :authenticité, responsabilité, rentabilité.

L’AUTHENTICITÉ

La clientèle de l’écotourisme affirme être demandeuse de nature, que cesoit par la randonnée en forêt ou à la campagne, ou sous forme d’activitéssportives de pleine nature, en Europe dans les régions rurales, ou dansles pays du Sud à la découverte de sites et de cultures traditionnelles.

1. La Charte du tourisme durable a été adoptée par l’Organisation mondiale du tourisme, lorsde la conférence de Lanzarote (îles Canaries), en avril 1995.

2. C’est-à-dire le « développement qui répond aux besoins des générations présentes sans com-promettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs », selon la Commission desNations Unies sur l’environnement et le développement, dite commission Brundtland, dontle rapport a été publié en 1987.

1.

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Cette demande induit une logique commerciale : le ressourcement estrecherché dans l’authentique, que l’on identifie partout au point que toutdevient patrimoine.

1.1. LE RESSOURCEMENT

Une étude réalisée pour l’AFIT (Gramond et al., 1998) signale les « pointsforts » du tourisme rural. Ce sont : la campagne (opposée au béton), lecalme, les animaux (référents enfantins), les vraies valeurs (retrouver sesracines), l’hébergement simple de caractère, la découverte des gens, duvillage, des plats locaux, l’intérêt d’accéder au vrai, par les contacts, lapratique, l’ouverture à une autre vie, le retour aux sources au niveau dela nourriture, l’abondance, la saveur des produits de terroir, l’accueil parl’hôte lui-même, le contact naturel simple et convivial non directementmercantile, le fait d’être accueilli comme un invité, l’échange équitable(chacun y gagne en plaisir). Les pays hier considérés comme « le désertfrançais » sont aujourd’hui à la mode et sont crédités des valeurs noblesdu tourisme : « espace, authenticité, environnement préservé, “tranquillitéressourçante”, racines et traditions toujours vivantes et accessibles ».« Les handicaps d’hier sont devenus les atouts de demain » (FNCDT,1997, p. 21). L’agritourisme suppose maintenant la découverte d’unmétier « noble » et de son environnement (Disez, 1996, p. 16).

« La campagne est aujourd’hui un univers jugé si paisible, si solide,si sécurisant et immuable, qu’elle est idéalisée… Socialement et écolo-giquement, la campagne, espace pur, s’oppose désormais aux tumultes,périls et pollutions que recèle la ville. » Outre son rôle hygiénique etroboratif, la campagne a aussi un attrait généalogique (attaches familiales)et économique (moindre coût) (Urbain, 1991, p. 158).

1.2. L’AUTHENTIQUE

L’authenticité comprend trois concepts : vrai, légitime, original. Ces troisconcepts répondent aux attentes de bon nombre de touristes européens,c’est-à-dire : l’évasion (tout plaquer, tout oublier) ; la nouveauté (toujoursune nouvelle destination) ; la différence (rompre avec la vie de tous lesjours) ; l’authentique (pour découvrir une région qui n’est pas comme celledans laquelle on vit). L’authenticité apporte le contraste à la vie quoti-dienne, gratifie le désir de nouveau, autorise l’évasion de l’habituel, garan-tit la différence, à condition que chaque région authentique ait suivi sonpropre chemin d’évolution (Pauchant, 2000, p. 13-14).

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Une offre touristique authentique ne veut cependant pas dire naturevierge, architecture ancienne, traditions anciennes. Elle autorise la fuiteà l’écart des vacances anonymes ; « la notion d’authenticité renvoie àl’identité d’un territoire, à ce qui ne peut pas être déplacé. L’authenticitéest aussi l’original et non la copie. C’est aussi le besoin identitaire exprimépar une population à la recherche de racines » (ibid., p. 13-14).

Cette recherche d’authenticité est une réponse à la standardisationmondiale, y compris dans les sites touristiques qui se ressemblent de plusen plus : « la même chambre d’hôtel, les mêmes aéroports, les mêmesrestaurants, les mêmes excursions et souvent les mêmes accrochespublicitaires » (ibid., p. 14).

1.3. IL EXISTE DE FORTES POTENTIALITÉS

Même si les données chiffrées ne le montrent pas, la demande de cetteforme de tourisme est estimée importante, en progression continue, etdevrait exploser sous peu (comme on le dit d’ailleurs de façon systéma-tique pour le tourisme en général, aujourd’hui grâce à la demande chi-noise). Ces prévisions sont les bienvenues puisque les ressources sont trèslargement répandues. Une étude de marché du tourisme naturaliste3 con-cluait déjà en 1994 qu’il « existait de réelles potentialités pour développerce type de tourisme dans les espaces protégés français ». Or, la France esten retard par rapport aux pays anglo-saxons et nord-européens ; très peud’associations, et de tours opérateurs (Cap Nature, Atalante, ObjectifNature, GNPL) le proposent et la France est très peu visitée (sauf laCamargue et la forêt de Fontainebleau) et les Alpes sont ignorées. Lesagences de marketing pensent donc qu’il est urgent de se positionner.

1.4. TOUT DEVIENT PATRIMOINE

Ces perspectives commerciales exigent d’organiser une offre, de créerdes produits, d’organiser le marché. On assiste ainsi depuis une vingtained’années à la production de destinations touristiques basées sur l’authen-ticité des territoires qui est formulée en termes de patrimoine.

Ce constat est appuyé par une enquête CSA-Cevipof réalisée en1994, dont B. Hervieu et J. Viard analysent les réponses (Hervieu etViard, 1996). Ils constatent que « la campagne est une origine à qui on

3. On peut le définir comme un « produit destiné à la découverte et à l’observation de la fauneet/ou de la flore d’une région dans le plus grand respect de l’environnement visité » (AFIT).

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invente un passé, un archaïsme qu’on “restaure à l’identique”, c’est-à-dire qu’on reconstruit dans le réel, pour ressaisir ce que nos aïeux ontquitté » (p. 11). La campagne s’est « libérée de ses vieilles images pours’inventer autre : ludique, esthétique, libertaire même » ; elle « estaujourd’hui chargée de nos rêves de liberté, de solidarité, de beauté etde santé » (p. 13).

Le patrimoine était dans une approche traditionnelle un objet àtransmettre. Il est devenu peu à peu une construction sociale, puis uneressource destinée à faire vivre les territoires. Le rapport au ministère dela Culture rédigé par M. Chiva étend le champ du patrimoine culturelaux paysages, aux savoir-faire, aux systèmes de représentation, auxproduits de terroir, etc.

Cette « invention de patrimoine » répond au besoin d’identifier lesterritoires, de les distinguer à un moment où l’on veut vivre et travaillerau pays ; elle permet aux aménageurs de fonder des projets de dévelop-pement (Chevallier, 2002). On met en valeur toute trace typique duterritoire ; on sensibilise la population (sentiers à thèmes), on fait de laformation pour le réapprentissage de techniques, de savoirs oubliés, onrelance des activités abandonnées. De la volonté de sauvegarde du patri-moine on passe à un projet de développement. Si l’on suit les guides dela DATAR4, de la FNPNR5, ou de la FNPAT6, ce sont les territoires dansleur ensemble qui vont être considérés comme des ressources, des gise-ments patrimoniaux à exploiter. On assiste à une « reconstruction desterritoires au gré d’opérations que l’on qualifie de relance ou de revita-lisation de pratiques traditionnelles » (Chevallier, 2002, p. 28). L’intérêtrécent pour cette notion de patrimoine n’est pas dénué d’ambiguïtés.Avec l’authenticité, ce sont les valeurs ancestrales, les racines qui sontprincipalement valorisées, avec le risque de refuser ce qui vient del’étranger ; et pourtant de très nombreux objets, parlers, pratiques,savoirs, ont une origine extérieure au territoire considéré ; c’est le métis-sage, l’articulation entre des éléments externes et internes, qui produisentl’innovation et le développement local.

4. Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale.5. Fédération nationale des Parcs naturels régionaux.6. Fédération nationale des pays d’accueil touristique.

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RESPONSABILITÉ

L’écotourisme veut établir un échange, ce qui suppose un certain tourisme,non perturbateur et qui apporte quelque chose au pays visités. Le tou-risme doux rejoint l’exigence de développement durable, pour le diffuserou pour se donner bonne conscience.

2.1. UN TOURISME DOUX

L’écotourisme est pratiqué dans des « espaces peu perturbés par l’homme »habités par « des communautés traditionnelles », que ce soit en Europe ouailleurs (Blangy, 2000, p. 62). Il consiste en « l’observation et l’apprécia-tion de la nature et des cultures traditionnelles ». Il doit être discret poursauvegarder les milieux visités, dans l’intérêt des milieux et de leurs popu-lations, mais aussi dans l’intérêt du tourisme qui ne doit pas détruire saressource. « L’écotourisme est fondé sur une exploitation raisonnée desressources touristiques de l’espace rural » (AFIT, 2002, p. 18).

Des consignes sont données, qui représentent autant de recom-mandations abondamment discutées dans les institutions internationales(ONU, OMT, Fédération européenne des PNR, la Déclaration de Québecde 2002 en énumère 49, etc.), et que les experts souhaitent édictées ennorme de reconnaissance de l’écotourisme (Blangy, 2000, p. 63). Cesinstances recommandent ainsi, par exemple :

• la limitation des retombées négatives sur l’environnementnaturel : transports collectifs à coût énergétique moindre ; visitesen petits groupes ;

• des prestations de services auprès de petites entreprises localesspécialisées ;

• le choix de destinations plus proches du domicile et peu fragilesécologiquement.

De plus, on cherche à organiser ce tourisme pour l’encadrer et éviterles abus, en prônant :

• l’éducation des touristes : « Il n’y a pas de mauvais touristes,mais des voyageurs mal informés » (Leservoisier, 2000) ;

• une meilleure gestion des sites protégés déjà très fréquentés enintroduisant des quotas, des outils d’évaluation des visiteurs, decapacité de charge, de zonage, de sensibilisation ;

2.

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• une planification régionale environnementale (traitement despaysages, qualité esthétique, recyclage) ;

• un code de bonne conduite à tous les acteurs de l’industrietouristique ;

• la rédaction de manuels de gestion environnementale pour lesétablissements d’accueil.

2.2. UN VECTEUR DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

En étant attentionné à ses retombées négatives, l’écotourisme veut sedémarquer du tourisme de masse, consumériste, idiot. Il se veut respon-sable dans deux directions, par rapport à l’environnement et par rapportaux cultures locales : « l’écotourisme est une forme de voyage respon-sable dans les espaces naturels qui contribue à la protection de l’environ-nement et au bien-être des populations locales7 ».

Le voyage en question est un loisir, mais il a aussi un rôle dans ledéveloppement durable. « C’est une démarche perçue comme permettantde maintenir une vie locale dont les résultats sont liés à la volonté deslocaux d’utiliser ou non les ressources dont ils disposent et de les partageren faisant un bon accueil aux étrangers » (AFIT, 2002, p. 18) ; c’est unoutil pour une stratégie de conservation de l’environnement. L’éco-tourisme « favorise la protection des zones naturelles par des avantageséconomiques aux communautés d’accueil, aux organismes et aux admi-nistrations qui veillent à la protection des zones naturelles, en créant desemplois et revenus aux populations locales, en faisant prendre conscienceaux habitants du pays comme aux touristes de la nécessité de préserverle capital naturel et culturel » (AFIT, 2002, p. 13). Il « prend en compte,d’une part le mode d’arrivée et d’autre part les intérêts des accueillis etdes accueillants, dans une région donnée ». « Une telle politique a pourbut d’assurer un fonctionnement écologique, économique et sociocultureldurable à tous les niveaux de référence, et cela, en rapport avec lesbesoins d’utilisation endogènes et exogènes » (Blangy, 2000, p. 61).

Tous les acteurs sont mobilisés : « C’est avant tout une démarche dedéveloppement qui implique des formes de partenariat nouvelles entretour-opérateurs, agences réceptives, communautés locales, gestion-naires…» (ibid., p. 60-61), et ça marche, puisque les populations locales

7. Société internationale d’écotourisme – TIES, dans AFIT, 2002.

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« ont largement investi l’écotourisme, comme une démarche totalementcohérente avec leurs revendications territoriales ou leurs droits à undéveloppement harmonieux de leur territoire, sans exploitation abusivede leurs ressources » (AFIT, 2002, p. 14).

L’écotourisme devient un prétexte pour apporter le développementdans des régions fragiles ou menacées par des pratiques destructrices,menées par les populations locales ou par le tourisme de masse. Et il nes’agit pas de n’importe quel développement. Il doit être porté par despetites entreprises, par une collaboration entre acteurs, dans la trans-parence, en mettant en place des labels et des programmations, autant deconseils qui apparaissent comme de bonnes pratiques expérimentées,validées, exportables partout dans le monde8.

On sait comment il faudrait faire, mais les acteurs locaux ne lesavent pas forcément ; on pense généralement qu’ils ne sont pas informésou qu’ils n’ont pas les moyens adaptés, qu’ils soient dans le Sud ou enEurope. Par exemple, la GTA9 élabore en ce moment un projet « ViaAlpina » qui a notamment pour objectif d’« encourager une vision moderneet dynamique, innovatrice autant que mobilisatrice pour les Alpes » ; ellepense qu’il « est nécessaire, dans une région comme les Alpes, qui sontle réservoir de diversité biologique le plus riche du continent, de déve-lopper des stratégies de protection de la nature, où les acteurs locaux etrégionaux soient impliqués » puisqu’il est « très difficile » pour cesacteurs de « concevoir le développement de leur région, en vue de l’orienterou de le réorienter judicieusement » (CIPRA, 2003).

Les protagonistes de ce développement mettent ainsi en place desactions de formation, de sensibilisation, de conscientisation, d’incitationà des politiques nationales adaptées, etc., de façon à apprendre le déve-loppement à ceux qui l’ignorent. On reproduit ainsi la démarche quiconsiste à proposer, exiger, voire imposer un modèle de développement,comme d’autres l’avaient fait de bonne foi, dans les années 1960-1970,au nom de la rationalité, du progrès, en faisant du béton, pour les loisirsdu plus grand nombre (Perret et Mauz, 1997). La méthode a changé, lesacteurs locaux sont impliqués, mais ils sont toujours soumis à un modèlede développement qui leur est étranger a priori.

8. La Charte européenne pour un tourisme durable dans les espaces protégés édicte de la mêmefaçon une liste de bons conseils.

9. Association Grande traversée des Alpes.

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2.3. MESSIANISME OU MAUVAISE CONSCIENCE ?

Il est curieux ou paradoxal de constater que les experts ou les partisansde l’écotourisme mettent en avant cette mission de développement durable.Pourtant, les études de clientèle montrent que les écotouristes ont desmotivations très personnelles : le découvreur-dégustateur à la recherched’authenticité, l’aventurier, le sportif, l’observateur naturaliste, le spécia-liste confirmé, le féru d’histoire, l’archéologue ou l’ethnologue refoulé,le chercheur qui s’ignore et le biologiste en herbe, l’écologiste, le for-mateur, le pédagogue, sont autant de « cibles du tourisme durable »(Blangy, 2000, p. 66). Alors comment se fait-il que, à propos de l’éco-tourisme, on ose moins parler du plaisir du touriste et plus de sa relationavec les pays visités ? Plusieurs hypothèses sont possibles mais celle dela mauvaise conscience apparaît la plus plausible : l’écotouriste sait quesa visite peut perturber des pays encore éloignés de notre culture consu-mériste. Il sait qu’il peut créer des dégradations sur le milieu naturel etque le transport en avion qui l’amène vers ce tourisme doux est extrê-mement polluant ; il est informé sur les modifications de comportementsdes populations locales qui s’adaptent au tourisme : sans parler de laprostitution, ou de la mendicité organisée dans la rue ou de la part desresponsables locaux, il faut évoquer les changements provoqués dans lessystèmes économiques locaux, ou les mirages créés par la vision d’unemodernité idéalisée. En dépit de toutes ses précautions, le touriste, quelqu’il soit, sait qu’il est un voyeur ; il sait qu’il est un vecteur d’uneévolution que les gens n’ont pas demandée. Alors, il tente peut-être demasquer cet aspect négatif, de se rattraper en apportant ce qu’il croit êtrele meilleur : le développement, et pourtant il s’agit là encore d’un para-digme propre aux pays industrialisés (Rist, 1996).

RENTABILITÉ

Les prestataires qui proposent de l’écotourisme connaissent des difficultéséconomiques, et ce, pour diverses raisons : les pratiques se veulent con-fidentielles, le segment de clientèle est étroit. L’offre doit s’adapter parune normalisation des produits qui entraîne d’une part une sélection desproduits vers une clientèle haut de gamme et d’autre part une rationali-sation des démarches de création de produits.

3.

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3.1. RESTER ENTRE SOI

L’écotouriste rejette le tourisme de masse et le comportement deconsommateur. Sa recherche d’authenticité s’exprime après une généra-tion de tourisme « moderne », de clubs, de loisirs sophistiqués, mainte-nant démocratisés, à bas coûts, que les anciens adeptes rejettent voireméprisent ; ils jettent ce qu’ils ont adoré hier ; avec l’écotourisme, c’estune nouvelle demande de distinction qui, par nature, doit rester élitistedonc limitée en nombre.

Pour le tourisme faune-flore, le client veut une démarche active : çase mérite. On veut un accès individuel ou en petit groupe. On aimeraitfaire seul, mais on reconnaît l’intérêt du guide s’il est compétent etd’origine locale ; on cherche de sa part un savoir et des émotions. Onsouhaite un hébergement économique, petit, en phase avec le milieu. Onne veut pas être pris pour un pigeon ; on ne veut pas tout payer, on veutbénéficier d’avantages gratuits. On ne veut pas de produit tout compris,on veut aviser sur place ; en fait, on se méfie des promotions, des toursopérateurs, des spécialistes, on veut fuir le monde du tourisme, on vou-drait ne pas être un touriste. Le touriste ou plutôt le voyageur a besoind’être reconnu par les locaux comme compétent et respectueux, « sedistinguant » du touriste moyen (AFIT, 2002).

3.2. UN SEGMENT DE CLIENTÈLE RESTREINT

L’écotourisme apparaît comme la demande typique de l’époque. Lamultiplicité des sondages et des études de clientèle effectués en Francelaisse penser que tout le monde exprime ce même désir de campagne.Pourtant, la clientèle touristique est diverse, sa fréquentation est enbaisse, et le client se fait surtout visiteur.

Pour l’ensemble de leurs déplacements10, les Français se répartissententre la campagne (36 % des séjours), la ville (33,4 %), la mer (27,6 %),la montagne (15,1 %) et les lacs (4 %). La campagne est l’objet d’untourisme de proximité de la part d’une clientèle familiale. Pour les vacancesd’été, le littoral est la destination première (pour 48 % des estivants), loindevant la montagne (18 %) et la campagne (14 %). Les profils des estivants

10. Direction du Tourisme, Les déplacements touristiques des Français : les voyages personnels,mémentos du tourisme, 1995-1996, 1996-1997, 1997-1998, 1998-1999, 1999-2000. Lesdéplacements touristiques comprennent tous les déplacements de plus d’une journée (avecune nuit en dehors de son domicile). Ici sont considérés uniquement les déplacements à titrepersonnel, c’est-à-dire à l’exclusion des déplacements professionnels.

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se distinguent socialement : les ouvriers et professions intermédiaires sontplus représentés sur le littoral, les personnes assez aisées à la montagne,et les cadres supérieurs à la campagne. Une typologie réalisée par leCREDOC, à propos des vacances d’été, explicite ces choix en fonctionde la situation sociale. Trois groupes sur six, qui rassemblent 40 % destouristes et dans lesquels sont surreprésentés les cadres supérieurs et les« plutôt diplômés », s’intéressent en priorité au confort et à une certainetranquillité (16 %), à la vie locale, aux paysages, à l’accueil par l’habitantet à un environnement de calme (14 %), aux activités culturelles avec unaccueil de qualité (10 %). En revanche, les trois autres groupes, danslesquels les catégories sociales sont plus modestes, ne montrent pasd’intérêt particulier à l’environnement local ; leurs attentes se portentd’abord sur le confort et sur la propreté de l’hébergement (25 % destouristes), les activités et l’animation (25 %), et les séjours en famille(8 %). La clientèle se distingue assez nettement : « en caricature, on peutdire que les plus jeunes pensent à se divertir, les plus âgés à se loger,tandis que les catégories aisées et instruites privilégient plutôt l’environ-nement local » (DT, 1999, p. 19).

L’écotourisme représente la demande typique de spécialistes quiveulent rester entre eux, en « se distinguant » du touriste moyen (AFIT,2002). En revanche, la demande de services, d’activités nocturnes, d’orga-nisation de visites, d’événements sportifs, de propreté des espaces et deseaux de baignade, caractérise un tourisme de masse, sédentaire, surtoutbalnéaire. Cette demande est plus fréquemment exprimée par les ouvrierset les jeunes ; de même, l’accueil et l’information font l’objet d’uneattente particulière chez les non-diplômés (DT, 1999). Cette populationtouristique n’est donc pas particulièrement attirée par la spécificité deslieux, même si elle visite un peu et apprécie les animations traditionnelleset folkloriques.

Si le désir de campagne traverse toutes les catégories sociales, il estprincipalement mis en pratique par une élite sociale et culturelle, quivoyage souvent, et qui cherche auprès d’un monde mythifié les valeursque la ville et la vie quotidienne ne semblent pas leur apporter. Ce quel’on qualifie rapidement de demande sociale correspond en fait à cettecatégorie sociale qui génère une grande partie des séjours touristiques :un Français sur dix génère quatre séjours sur dix et cinq courts séjourssur dix (DT, 2001).

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Cette clientèle est intéressante pour le marché touristique parcequ’elle a le pouvoir symbolique de créer la mode. Après les sports d’hiver(qui n’ont jamais intéressé plus d’un Français sur dix), après les clubsen circuit fermé (où toutes les activités ont lieu à l’intérieur du camp),cette élite se distingue dans une demande nouvelle, avec le retour à lanature, aux racines paysannes, pour les vacances, comme pour l’habille-ment ou le décor intérieur de sa maison. En ne tenant plus compte de ladiversité de la demande, on reconnaît la situation dominante d’une cer-taine demande, et c’est en voulant la satisfaire que s’organise le tourismeen espace rural.

3.3. NORMALISATION, LABELLISATION

De nombreux diagnostics sur l’offre touristique sont réalisés à lademande des gestionnaires d’équipements et des élus locaux dansl’objectif d’améliorer la fréquentation. Ils mettent tous en exergue leslacunes qualitatives des produits. Le tourisme de cueillette est régulière-ment dénoncé ; les hôteliers traditionnels comme les agriculteurs sontaccusés de manquer de professionnalisme : absence de techniques com-merciales (connaissance de leur clientèle, signalisation, site Internet),produits obsolètes (pas de forfait ni d’activités associées), mauvaise qua-lité (hébergements sans confort ou au décor désuet), lacunes en gestionou à l’accueil.

Pour pallier ces problèmes relevés par les techniciens du tourisme,de nombreuses actions de formation, de sensibilisation, sont lancées,partout, pour améliorer la compétence professionnelle. « L’investissementdemandé est surtout dans l’immatériel et dans l’état d’esprit. Les princi-paux obstacles au développement des produits de tourisme durable liésà l’environnement sont culturels » (AFIT, 2000). Une autre réponse aux« n’importe quoi » des prestataires est la création de labels. Toutes lesstructures de développement touristique (Gîtes de France, Bienvenue à laferme, Accueil paysan, les CDT11 avec Clévacances, les PNR et leurmarque Parc) définissent les caractéristiques du produit qui pourra porterle nom du label. Les critères portent sur le produit lui-même, l’accueil,l’environnement. Toutes ces actions définissent des normes de qualité.

11. Comité départemental du tourisme.

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Les démarches qualité, justifiées par l’adaptation des produits, etnotamment des hébergements, à la clientèle relèvent le niveau d’équipe-ment et de confort, mais il faut bien constater que les chambres d’hôtes,les gîtes, les fermes auberges, les signalétiques et les excursions ont unelourde tendance à se ressembler, même s’ils cultivent une spécificitélocale. « On a bien l’impression que tout un chacun fait pareil tout envoulant faire original » (Pauchant, 2000). Cette banalisation accentue lebesoin d’affirmer cette authenticité que l’on craint de perdre. Pour leprestataire, la professionnalisation modifie sans doute sa façon d’être.L’agriculteur reste-t-il lui-même, c’est-à-dire celui que cherche l’amateurd’un monde différent, ou est-il devenu commerçant, celui qu’on veutéviter en choisissant l’accueil à la ferme ?

3.4. LA SÉLECTION HAUT DE GAMME

Les produits touristiques sont définis en fonction des études de clientèle.Celles-ci affirment que le touriste demande toujours plus de confort etde disponibilité. Ce résultat apparaît tout à fait logique puisque la majo-rité de la clientèle qui fréquente les hébergements marchands appartientà des catégories sociales aisées, habituées à un confort quotidien. Leshébergements sont ainsi tirés vers le haut de gamme. La politique dequalité de Gîtes de France conduit à demander la transformation des gîteset des chambres d’hôtes en 3 épis, et à retirer les récalcitrants de soncatalogue.

La définition de produits pour une demande sociale particulièrerevient à exclure d’autres demandes. Une étude pour l’AFIT à propos del’agritourisme (Gramond et al., 1998) montre que la clientèle de famillesmodestes (en termes de statut social, de niveau d’études et de revenus),à la recherche de structures simples, bon enfant, pas cher, est une clien-tèle qui diminue, non seulement à cause des prix, mais parce que tout aété fait (en termes de produits, de commercialisation, de publicité) pourse focaliser sur la clientèle haut de gamme. Les auteurs notent d’ailleursque c’est une clientèle que l’on n’interroge pas dans les sondages (ons’intéresse à celle qui fréquente les réseaux de qualité). De plus, à forced’interroger les gens en vacances, on s’enferme dans cette population quipart déjà, sans tenir compte des demandes des non-partants. Le marchése réduit ainsi de plus en plus à un segment de clientèle, réputé le plusrentable, et la concurrence s’amplifie entre les territoires touristiques, lesproduits qui se vendent de la même façon, en répondant aux mêmesfrustrations d’urbains en mal d’authenticité et de rêve. Une étude des

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CDT remarque que l’offre brute est abondante, multiple, mais les terri-toires cherchent à attirer la même clientèle : « aucune forme de tourismen’est en fait aussi concurrentielle tant l’offre se ressemble, les produitsse dupliquent » (FNCDT, 1997, p. 24).

3.5. LA RATIONALISATION DES PROJETS

La soi-disant loi du marché impose une demande sociale et des produitss’appuyant sur certaines aménités rurales, vraies ou supposées. Aux diresdes experts, le marché est là et, en plus, c’est rentable. Ce marché fixeaussi des procédures de développement touristique.

Le projet territorial de développement touristique repose sur unmême schéma de pensée : 1) l’espace rural possède des attributs qui lerendent foncièrement attractif ; 2) la demande sociale est forte et encroissance, or l’espace rural est sous-exploité ; 3) il faut développerl’accueil, les équipements et les activités. À partir de ce raisonnement,la démarche consiste à identifier d’abord la demande qui est considéréecomme la locomotive du marché, puis à définir des produits vendables.Dans un second temps, sont recherchées les conditions d’adaptation del’offre à cette demande ; cela suppose presque obligatoirement de con-vaincre les acteurs ruraux, par des actions d’information et de formation,d’une part de prendre conscience du potentiel qu’ils ont entre les mains,et d’autre part de se conformer à la demande.

Cette démarche est devenue incontournable dans tous les projets dedéveloppement touristique. Pourtant, le désir d’authenticité devrait justi-fier des démarches originales, sans se soumettre a priori à la demande.De très nombreux sites touristiques, qui représentent aujourd’hui desattractions emblématiques (Bonneval-sur-Arc en Savoie, Les Grottes deChoranche dans le Vercors, par exemple) se sont lancées sans se préoc-cuper de la demande, sans intention première de faire de l’argent pourde l’argent. Leurs créateurs ont fait des choix d’aménagement en partantde leurs motivations, de leurs compétences, de leurs moyens, en définis-sant les prestations en fonction de ce qu’ils étaient, avant de s’adapteraux conditions du marché. Ils ont fait du tourisme en « artistes12 ». Cettevolonté de faire en fonction de soi explique les parcours individuelsd’entrepreneurs en dehors des grandes structures de développement quitendent à imposer leurs propres certitudes (Perret, 2001). C’est la position

12. Propos de Claire Bertrand, directrice du Réseau culturel/Terre catalane, 15 mars 2002.

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actuelle d’Accueil paysan dans sa démarche d’accompagnement deprojet, en fonction de la personnalité du candidat. De nombreuses struc-tures locales de développement, généralement sous statut associatif, cul-tivent aussi cette volonté de faire, de se faire plaisir, avant de vendre.Toutes ces initiatives, anciennes ou actuelles, montrent la diversité desvoies possibles pour le tourisme rural, alors que la fréquentation actuelleest en baisse.

Et plus la fréquentation évolue, diminue ou se déplace, plus lemarketing devient incontournable, pour toute forme de tourisme y com-pris l’écotourisme, au risque de galvauder son image et les conditions devoyage.

CONCLUSION : FATALISME OU PRINCIPE DE PRÉCAUTION ?

L’écotourisme se veut militant, partisan d’un certain mode de relations,d’organisation, et cette communication n’a sans doute pas échappé à desa priori idéologiques. Malgré tout, plusieurs bilans peuvent être tirés surdes registres différents.

Par rapport aux intentions du développement durable, l’écotourismeest encore modeste sur le plan économique, en termes de rentabilité etde retombées locales13 ; sur le plan écologique, l’écotourisme fait tou-jours courir le risque de concentration des visites sur des lieux précisavec des problèmes de surconsommation et de dégradation des milieux.Sur le plan social, l’écotourisme s’insère dans une hiérarchie des loisirs,avec l’ambition d’un tourisme intelligent et le risque de sous-estimer lesautres formes de tourisme largement pratiquées par le plus grand nombre.

En termes plus politiques, on peut s’interroger sur la significationde l’écotourisme dans le contexte ambiant de la mondialisation deséchanges. L’écotourisme peut être considéré comme une forme de résis-tance à la mondialisation, en cultivant les identités locales, les circuitscourts, les valeurs patrimoniales. Mais si la mondialisation veut direglobalisation, c’est-à-dire marchandisation de l’ensemble des échanges,l’écotourisme apparaît comme une forme d’intégration de certains

13. C’est le bilan que tire notamment le PNR du Vercors.

4.

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loisirs dans la mondialisation : « on crée du local, de la tradition et duterritoire pour mieux s’inscrire dans une économie globale, mondialisée»(Chevallier, 2002, p. 28).

En devenant une pratique normalisée, l’écotourisme ne peut échapperaux règles économiques, et en particulier aux exigences de rentabilité, etdonc de croissance. Il intègre le cercle vicieux de la croissance et de lapollution, et rend chimérique l’image « d’un monde idéal, un monde oùl’on pourrait concilier le profit économique, la protection du patrimoine etle développement social. Le tout en parfaite harmonie » (Chaspoul, 2000).

Faut-il se résigner à penser qu’on n’y peut rien, que de toute façonces contrées lointaines seront un jour ou l’autre soumises à une évolutionou une consommation, et donc autant faire le mieux possible ou le moinsmal ?

Ou ne faudrait-il pas s’abstenir ? Si réellement il y a fragilité desmilieux et des cultures, faut-il continuer à aller visiter des espaces et descultures menacés ? Ne pourrait-on pas appliquer à la lettre, dans le domaineenvironnemental comme culturel, le principe de précaution ? Mais ilfaudrait sans doute revoir tout notre paradigme du développement.

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Conclusion

De l’écotourisme à l’éthiqueRetrouver le sens unitaire du monde

Bernard SchéouMaître de conférences à l’Université de Perpignan Via Domitia et chercheur au Laboratoire d’économie des transports

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Conclusion 395

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Comment conclure un ouvrage collectif sur l’écotourisme ? À partir desdifférentes contributions, nous reviendrons dans un premier temps sur lamultiplicité et l’ambiguïté du concept d’écotourisme tant comme modèlethéorique que dans sa réalité. Si les critiques portées à l’encontre del’écotourisme dans ses mises en œuvre sont nombreuses, la plupart neremettent pas en cause l’ontologie qui caractérise la modernité alors qu’ànotre sens, la principale critique exprimée à travers l’écotourisme devraitjustement concerner les modalités de notre être-au-monde. Et revenir surla crise de la modernité apporte un éclairage différent sur les problèmesque révèle le questionnement autour de l’écotourisme. La solution à cettecrise n’est pas seulement technique mais, en premier lieu, éthique.

L’ÉCOTOURISME : MULTIPLICITÉ ET AMBIGUÏTÉ DU CONCEPT ET DE SES APPLICATIONS

Porté par la vague de fond que constitue le développement durable, quireprésente désormais une référence obligée de tout discours universitaireou politique, l’écotourisme est en voie d’apparaître également comme lasolution incontournable permettant de faire face aux différentes consé-quences négatives qu’implique la diffusion massive de l’activité touris-tique sur la planète. À ce titre, le concept d’écotourisme tend de plus enplus à se rapprocher de celui de tourisme durable et devient à son tour lepoint de cristallisation de multiples projections de la part des acteurs con-cernés. Cette extension du concept d’origine semble infinie, l’écotourismetendant à devenir simplement un synonyme de l’expression « tourismedurable ». Mais cette extension n’a-t-elle pas pour conséquence une réduc-tion de la pertinence du concept d’écotourisme ? D’autant plus que l’éco-tourisme, dans ses modalités de mise en œuvre, est parfois loin d’atteindreles objectifs qui lui sont assignés théoriquement.

Comment l’écotourisme a-t-il pu devenir ce « modèle banalisé etpréconisé par tous les experts1 » ? Pourtant à l’origine, le terme désigneplus un simple produit touristique, une forme de pratique touristiquequ’un véritable concept. L’une des premières définitions, celle d’HéctorCeballos-Lascuráin, abondamment citée, définit l’écotourisme par le typed’activité – étudier et admirer le paysage, les plantes, les animaux sau-vages ou toute manifestation culturelle – et par le milieu concerné –des zones naturelles relativement intactes ou peu perturbées (Ceballos-Lascuráin, 1987). Mais les nombreux conflits des administrations de

1. Jacques Perret (nous limiterons les références des citations extraites des contributions duprésent ouvrage à la simple mention de l’auteur).

1.

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parcs naturels avec certaines populations locales concernées et les échecsqui en résultaient ont permis de faire prendre conscience que la naturecomplètement vierge n’existait pas. Et très vite, on est passé d’une défi-nition basée sur la simple observation et étude de la faune et de la floreà un tourisme pratiqué en zones naturelles mais contrôlé par les popula-tions locales et leur profitant économiquement, rejoignant en cela lesdéfinitions du tourisme durable. Il existe donc une tendance au rappro-chement des différentes formes de tourisme (culturel, de nature, de ren-contre et d’échange) tant au niveau des pratiques que des valeurs deréférence et cette tendance s’explique par « la domination actuelle dumodèle du développement durable, qui en devenant l’unique étalon demesure formate et les pratiques touristiques et les valeurs auxquelles ellesse réfèrent » (Schéou, 2006). Et aujourd’hui, la plupart des auteurs quitravaillent sur l’écotourisme refusent de le considérer comme une simplepratique touristique pour en faire un concept plus ou moins proche decelui du développement durable.

Mais la relation au développement durable n’est pas toujours aussiévidente dès lors qu’on la questionne, comme en témoigne le cadre inter-prétatif proposé par Christiane Gagnon et Dominic Lapointe à partir ducroisement des quatre métaprincipes structurants de l’écotourisme (valo-risation de la conservation de l’environnement, contribution équitable audéveloppement économique, prise en compte des communautés hôtes,génération d’une expérience touristique authentique et responsable) avecles quatre approches du développement durable (environnementale, éco-nomique, humaniste et de gouvernance territoriale). Cette relation estdonc complexe : ainsi, pour Jean-Marie Breton2, si l’écotourisme est plusexigeant que le développement durable car il « ajoute au développementdurable les dimensions du patrimoine culturel et l’inclusion des com-munautés locales », c’est en même temps une forme de tourisme durable :« l’écotourisme serait ainsi une composante originale, parfois déterminante,d’un tourisme durable garant d’un développement viable ».

Dès que l’on passe de la simple activité touristique à un niveauparadigmatique, on constate combien surgissent les questions. La dif-ficulté de désigner sous un même vocable un ensemble de pratiques

2. Suivant en cela le modèle de gouvernance participative proposé par Marie Lequin. Mais sila gouvernance de l’écotourisme dépasse le cadre du simple développement durable, n’est-ce pas du fait d’une conception limitative du développement durable ? Car la démocratielocale est bien un principe récurrent des définitions du développement durable (par exemple,le principe 22 de la déclaration de Rio porte sur la participation des populations etcommunautés autochtones).

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différentes s’accentue encore lorsque l’on tente de construire un modèlenormatif applicable à une grande diversité de situations, comme lemontrent Marie-France Turcotte et Corinne Gendron.

La plupart des contributeurs à cet ouvrage définissent l’écotourismeen référence au développement durable : l’écotourisme respecte les prin-cipes du développement durable. Et la plupart se retrouvent égalementsur l’existence d’une certaine relation à la nature au sein de l’écotou-risme. L’écotourisme est alors une forme particulière de tourisme durable,celle qui concerne les zones naturelles comme par exemple les parcsnaturels. C’est aussi la conception qui semble retenue par ceux qui neconsidèrent pas qu’il soit nécessaire de définir le terme. Notons que sicertains utilisent les deux expressions « tourisme durable » et « éco-tourisme» comme des synonymes, d’autres n’évoquent jamais le termed’écotourisme dans leur texte, préférant parler de tourisme durable ousimplement de tourisme.

Ce rapprochement entre écotourisme et tourisme durable franchitun palier supplémentaire avec l’apparition de l’expression « écotourismeurbain », car disparaît alors le dernier caractère véritablement spécifiqueà l’écotourisme, à savoir la relation particulière à la nature qui se noueau cours de la pratique écotouristique. Depuis 1996, l’association cana-dienne The Green Tourism Association tente de promouvoir à Torontoun tourisme soucieux de la préservation de l’environnement sans néces-sairement employer l’expression d’écotourisme urbain, que d’autres uti-lisent cependant pour qualifier l’action de cette association. En décembre2001, a été organisée en Israël, dans le cadre de la préparation de l’annéemondiale de l’écotourisme, une conférence mondiale sur l’écotourismeurbain et plus récemment, en septembre et en octobre 2004, le sitePlaneta.com organisa, sur le thème de l’écotourisme urbain, une confé-rence en ligne associant une trentaine de participants qui conclurent leforum par une déclaration. L’action de The Green Tourism Associationcomme la déclaration des participants au forum de Planeta.com pro-meuvent en réalité l’application des principes de l’écotourisme au milieuurbain et considèrent de ce fait l’écotourisme comme un synonyme detourisme durable. Cette conception extensive de l’écotourisme n’est pastellement éloignée de celle de Jean-Pierre Augustin, qui présente le tou-risme sportif pratiqué sur la côte aquitaine à proximité de Bordeauxcomme un écotourisme en action, position à laquelle s’oppose PhilippeJoseph qui, évoquant la Martinique, regrette pour sa part que l’éco-tourisme soit « un concept “fourre-tout” fortement usité par la classe

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politique : dès lors que des activités ludiques ou sportives se déroulent enpleine nature, on parle d’écotourisme ». Il est pourtant possible d’envisa-ger un véritable écotourisme urbain basé sur l’observation de la nature,comme le démontrent Higham et Lück en étudiant trois cas néo-zélandaisde visites de réserves animalières situées en centre-ville ou à proximité,respectant les principes de l’écotourisme (Higham et Lück, 2002).

L’examen de la manière dont l’écotourisme est envisagé par lesdifférents contributeurs témoigne bien de la variété des interprétations etdes constructions paradigmatiques, chacun semblant plutôt mettrel’accent sur l’une ou l’autre des dimensions composant l’écotourisme, etprojetant par là d’une certaine manière sur le terme « écotourisme » savision personnelle d’un tourisme idéal et des solutions qu’il est suscep-tible de proposer aux inconvénients du tourisme classique. Et s’il estdifficile de nier que cette multiplicité des conceptions de l’écotourismecomme du tourisme durable témoigne bien d’un modèle en constructionqui s’enrichit et se complexifie avec le temps grâce aux apports desdifférents chercheurs et à leur confrontation fructueuse, il n’en demeurepas moins que le risque, d’ailleurs évoqué dans plusieurs contributionset notamment par Jean-Marie Breton, de se laisser emporter par la dimen-sion « mythique » de la construction est bien présent. Il s’agit donc d’êtreattentif à ne pas transformer le terme « écotourisme » en slogan, en for-mule magique, attribuant au mot lui-même, dès lors qu’il serait prononcéou écrit, le pouvoir magique de faire disparaître tous les problèmescomme par enchantement. Ainsi, n’est-ce pas cette fonction mythique oumagique qui provoque la surutilisation du terme « écotourisme » etnotamment la création de termes dérivés, alors que leur pertinence estloin d’être démontrée ? Par exemple, qu’en est-il de l’expression «agro-écotourisme»? Pourquoi ne pas utiliser les expressions déjà existantescomme « agrotourisme » ou « tourisme rural » ? L’agroécotourismeprésente-t-il réellement un sens différent, apporte-t-il une dimensionsupplémentaire3 ?

3. Il a effectivement un sens différent chez Athanasia Koussoula-Bonneton, pour qui « l’agro-écotourisme est à la fois la mise en réseau des agriculteurs et des hôteliers pour la fourniture/achat des produits agricoles et l’offre des prestations d’accueil, d’hébergement, de loisirs…à destination des touristes ». Mais peut-on qualifier la mise en réseau des agriculteurs et deshôteliers pour l’achat de denrées agricoles de pratique touristique, que ce soit de l’écotou-risme ou de l’agroécotourisme ? Évidemment que non, et c’est même, à notre sens, participerà la confusion générale liée à des usages abusifs des mots en raison de pouvoirs mythiquesqui leur sont attribués collectivement et inconsciemment.

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Comment éviter ce risque ? Comment le débarrasser de toutes lesprojections qu’il véhicule ? Est-il encore possible de l’épurer pour aboutirvéritablement à un concept, outil théorique clairement défini et opéra-tionnel? Ou faudra-t-il se résoudre à se passer du mot pour échapper àla confusion issue des utilisations erronées ou abusives ?

Au-delà des questions liées à la construction théorique du conceptd’écotourisme, plus nombreuses encore sont les critiques qui portent surla mise en œuvre réelle des principes invoqués. Nous les avons regroupéesselon quatre points de cristallisation.

En premier lieu, la fragilité des zones concernées par l’écotourismepeut rendre délicate l’activité touristique ; des critiques s’élèvent pouraccuser l’écotourisme de jouer le rôle d’éclaireur préparant l’arrivée pro-chaine du tourisme de masse, voire de ne pas être en réalité une formetrès différente du tourisme classique, si ce n’est qu’elle touche des zonesencore plus fragiles et préservées jusque-là. Christiane Gagnon et DominicLapointe relèvent à la suite d’études empiriques que la création de parcsnationaux ou la promotion de l’activité écotouristique n’a pas forcémententraîné une meilleure protection de l’environnement.

Le second point d’achoppement concerne le comportement et lesmotivations des touristes : non seulement l’écotourisme n’entraîne pasforcément un changement significatif de comportement chez les touristes(Christiane Gagnon et Dominic Lapointe), mais les motivations des éco-touristes sont plutôt individualistes ou égocentriques (Jacques Perret).Selon Nathalie Lahaye, c’est particulièrement le cas des sportifs pra-tiquant dans les parcs naturels, pour qui « la nature est un espace pourl’action ; elle est approchée comme un terrain de jeux ou comme un vec-teur de performances » et chez qui « les valeurs écologiques ont tendanceà être supplantées par des valeurs égocentriques (perception de l’aventurevécue, risque ressenti) et des considérations techniques (performancestechniques des matériels) ».

La sincérité de certains opérateurs est également mise en doute :l’écotourisme ne serait pas utilisé autrement que comme un paraventderrière lequel des opérateurs sans scrupules se masqueraient. L’éco-tourisme ne devenant qu’un argument marketing.

Mais c’est la question du développement et la participation despopulations locales qui motive le plus de critiques. Non seulement lacréation de parcs nationaux n’entraîne pas nécessairement un développe-ment durable viable des communautés locales limitrophes (Christiane

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Gagnon et Dominic Lapointe), mais comme le met en évidence JuanAntonio Aguirre, c’est l’effet sur l’emploi et sur les revenus des commu-nautés concernées par les parcs nationaux qui préoccupe en premier lieucelles-ci. Et en plus, la question de l’accès aux ressources naturelles etde la participation au pouvoir décisionnel est toujours en suspens (Marie-France Turcotte et Corinne Gendron). Malgré les nombreuses expériencespassées et la formalisation par Marie Lequin d’un modèle de gouvernanceparticipative pour l’écotourisme basé sur l’implication des populationsconcernées au processus décisionnel, la mise en œuvre reste difficile, etce, le plus souvent, du fait de la faillite des relations entre les différentsacteurs concernés (d’après un rapport du WWF cité par Juan AntonioAguirre), ce qui pousse Juan Antonio Aguirre à proposer la mise en placede procédures de communication et d’information réciproque et de prisede décision entre administration des parcs et communautés limitrophes,un dispositif de prévention et de règlement des conflits qu’appelleégalement de ses vœux Nathalie Lahaye.

Jean-Marie Breton met l’accent sur le danger que peut représenterl’introduction, sans précaution, d’un flux financier important au sein de lacommunauté : « Si, en effet, seule une partie du groupe considéré bénéficiede la mise en œuvre et des retombées économiques du produit et de l’acti-vité en cause, ceci va avoir pour conséquence d’engendrer à son profit une“rente de situation”, au détriment des autres groupes ou membres de lacommunauté. Il en résulte des situations inégalitaires, et donc des tensions,des rivalités, voire des potentialités de conflits, sources d’autant de facteursde déstructuration de la communauté, de désagrégation des solidarités ori-ginaires et de rupture de la cohésion sociale. Les “bénéfices” pour la com-munauté risquent donc d’être à terme surtout négatifs, au-delà des seulesretombées économiques immédiates et apparentes. »

Jacques Perret s’interroge pour sa part sur l’origine du modèle dedéveloppement qui est toujours étranger aux communautés locales : « onsait comment il faudrait faire, mais les acteurs locaux ne le savent pasforcément ; on pense généralement qu’ils ne sont pas informés ou qu’ilsn’ont pas les moyens adaptés, qu’ils soient dans le Sud ou en Europe […]Les protagonistes de ce développement mettent ainsi en place des actionsde formation, de sensibilisation, de conscientisation, d’incitation à despolitiques nationales adaptées, etc., de façon à apprendre le développe-ment à ceux qui ne savent pas. On reproduit ainsi la démarche qui consisteà proposer, exiger, voire imposer un modèle de développement, commed’autres l’avaient fait de bonne foi, dans les années 1960-1970, au nom

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de la rationalité, du progrès, en faisant du béton, pour les loisirs du plusgrand nombre… La méthode a changé, les acteurs locaux sont impliqués,mais ils sont toujours soumis à un modèle de développement qui leur estétranger a priori. » Cette question est relayée également par Jean-MarieBreton : « il convient conjointement de savoir si la demande, en matièred’écotourisme, provient bien des communautés et des populations con-cernées ; ou si elle ne leur est pas au contraire plus ou moins artificielle-ment “ suggérée” , sinon même imposée, et dûment “encadrée” à cet effet.La situation n’est en effet pas la même selon que la démarche écotouris-tique a une origine exogène, construite de l’extérieur, quitte à être réap-propriée par le groupe s’il l’estime pertinente et profitable, a fortiori sielle s’avère réellement bénéfique ; ou qu’elle procède de la perceptionendogène de besoins comme de la formulation conséquente de demandesspécifiques par le groupe lui-même et à sa seule initiative, à partir de saculture et de ses valeurs identifiées à travers ses propres référents. »

C’est également la critique principale sur laquelle s’appuyait l’Asso-ciation Rethinking Tourism Project4 pour remettre en cause l’année inter-nationale de l’écotourisme de 2002, critique exprimée dans une lettreenvoyée au PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement),responsable de l’organisation de cette manifestation. Pour l’ONG, la plu-part des projets d’écotourisme ne sont pas réellement des initiatives issuesdes communautés mais sont basées sur une approche du développementpaternaliste, les bénéficiaires étant principalement les investisseurs, lesspécialistes du management et les touristes. Ces critiques portaient nonpas sur les principes définissant l’écotourisme mais bien sur sa mise enœuvre par les opérateurs touristiques et les touristes. Dans un autre cour-rier signé par une vingtaine d’ONG, celles-ci souhaitaient que l’annéesoit déclarée « International Year of Reviewing Ecotourism5 » afin demettre en évidence les mauvaises pratiques en cours dans ce domaine.Pour ces ONG, le bilan est négatif : « so our experience is that “bad”policies and practices in ecotourism by far outweigh the “good”examples6 ». Sans trancher dans un sens ou dans l’autre, remarquons qu’ilserait intéressant de disposer d’une évaluation d’ensemble des actions des

4. Qui porte aujourd’hui le nom de tourism rights : <www.tourismrights.org>.5. Bobiwash, 2001, p. 48.6. Ainsi notre expérience établit que dans l’écotourisme, mauvaises politiques et mauvaises

pratiques l’emportent largement sur les bonnes (traduction par nos soins) (Tourism Investi-gation and Monitoring Team, 2000).

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opérateurs qui se réclament de l’écotourisme, l’accent étant plus souventmis, dans les témoignages et les publications, sur les cas les plusfavorables et sur les bonnes pratiques (Schéou, 2006).

Le modèle théorique de l’écotourisme apparaît donc bien commeune tentative d’améliorer les pratiques touristiques dans les zones natu-relles, mais les difficultés de mise en œuvre en font le révélateur d’unecrise plus profonde. Car si les critiques s’expliquent en partie par le niveauélevé des exigences qui lui sont attribuées ou par sa dimension «miracu-leuse», il n’en demeure pas moins que l’approche promue est avant touttechnique et économique. Or à notre sens, c’est bien ce primat de latechnoscience sur le projet politique qui fonde la crise majeure que con-naissent aujourd’hui nos sociétés et, dans le domaine du tourisme, lesdéfauts auxquels est censé précisément remédier l’écotourisme lui-même.

LA CRISE DE LA MODERNITÉ : LA RUPTURE DU SENS UNITAIRE DU MONDE

Cette crise se caractérise principalement par la rupture du sens unitairedu monde : rupture du sens unitaire qui relie l’homme à son environne-ment, rupture du sens unitaire qui relie l’homme à autrui, et finalementrupture du sens unitaire de l’homme à lui-même. Les causes sont mul-tiples et les racines anciennes : l’histoire de la modernité est jalonnéed’étapes provoquant l’agrandissement progressif de la faille initiale.Selon Augustin Berque7, est en cause le dualisme cartésien qui a eu pourconséquence de séparer le monde des choses de celui vécu intérieurementpar l’homme, entraînant « une disjonction croissante entre les choses etl’affectivité humaine ». Ce dualisme a eu pour conséquence le retrait dusujet. Celui-ci s’est retiré du monde pour le considérer objectivement,ouvrant la voie au développement de la science moderne et de la tech-nologie qui en résulte. Et ce retrait a aussi bien concerné autrui, permet-tant le développement des sciences sociales, que soi-même, permettantle développement de la médecine moderne : « Sur tous ces objets deconnaissance, distincts essentiellement de sa propre conscience, le sujetmoderne s’est mis à poser le même regard détaché que sur les chosesinanimées. » La science s’est séparée de la morale suite à la distinctionentre ce qui est (la réalité) et ce qui devrait être par le philosophe Humeau XVIIIe siècle. Cette séparation de la science et de la morale comme le

7. De qui nous reprenons l’essentiel de cette présentation de la crise de la modernité. Lescitations de cette section sont toutes extraites de Berque, 1996, sauf mention contraire.

2.

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retrait du monde par le sujet a donné à l’homme une grande libertéd’action. En effet, le retrait du monde par le sujet moderne « a vidé celui-ci des valeurs qui le concernaient lui-même », bouleversant les modalitésontologiques de l’homme. L’homme s’est mis à traiter toutes les res-sources naturelles dans le seul souci de l’efficacité, sans tenir compte deleur être propre. Pour Augustin Berque, nous sommes alors passés d’uneontologie du pourquoi, basée sur les raisons d’être et d’agir, à une onto-logie du comment, basée sur les moyens et les instruments techniques,provoquant « un déracinement de l’éthique ». Et cette ontologie du com-ment touche tous les pays du monde, les derniers ayant adopté de gré oude force les modèles de développement de la modernité. Plus grave,désormais, l’homme et son ontologie du comment et de l’efficacité fontpeser sur l’humanité elle-même un risque majeur. Pour la première foisde son histoire, l’homme a le pouvoir de causer à la Terre des dommagesconsidérables et peut-être irréversibles et de détruire l’humanité elle-même, négation la plus absolue de l’éthique.

Quelle est la principale conséquence pour l’homme de cette successionde ruptures ? Un asservissement croissant au système technico-économiquede l’efficacité qui régit le monde et qui nous imprègne tellement que nousavons du mal à y échapper. D’une part, les systèmes techniques de lamodernité, au lieu de libérer l’homme, l’asservissent. Et, « en lui ôtantla possibilité de choisir, non seulement ils l’asservissent, mais ils sup-priment la condition même de l’éthique ». D’autre part, en devenant lecritère principal qui organise notre vie dans toutes ses dimensions, l’effi-cacité transforme tout en moyen devant concourir à cet objectif d’effica-cité, la Terre et ses ressources comme l’homme lui-même. En devenantun moyen et non plus une fin en soi, la personne humaine perd le carac-tère sacré qui n’aurait jamais dû cesser d’être le sien. Les dommagesinfligés à la Terre découlent de notre rapport aux objets8 qui se traduitdans notre comportement de consommation (Marie-France Turcotte etCorinne Gendron). Philippe Joseph montre bien comment les populationsoriginelles précoloniales de la Martinique vivaient en relation symbio-tique avec leur milieu et ont peu transformé celui-ci, la colonisation,symbole d’un système basé sur la recherche de l’efficacité et doublenégation éthique9, marquant le départ de la surexploitation de la forêt :

8. « [N]otre rapport fondamental avec les objets se résume dans la guerre et dans la propriété »(Serres, 1990).

9. Double d’une part du fait de la colonisation qui a notamment pour conséquence d’obligerles populations originelles à adopter notre mode de vie et, d’autre part, du fait de la suppressionde leurs moyens d’existence.

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80 % des surfaces choisies ont disparu depuis. L’asservissement par lacolonisation laisse des marques indélébiles qu’il est difficile d’oublier.Jean-Marie Breton démontre comment la servitude ancrée dans l’histoirecoloniale de la Guadeloupe, et toujours présente dans l’inconscient col-lectif, handicape l’échange touristique et explique en grande partie lacrise touristique que connaît l’Île.

Le sociologue Vincent de Gaulejac met en évidence dans sondernier ouvrage comment la logique gestionnaire, qui caractérise lemonde de l’entreprise, tend à coloniser l’ensemble des activités humaineset touche la famille, les relations amoureuses, les loisirs, les vacances…En tentant de comprendre pourquoi l’entreprise est devenue le lieu d’uneconcurrence impitoyable des hommes tout en suscitant leur adhésion etleur participation, il montre combien nous nous trouvons dans une situa-tion paradoxale, les hommes cherchant à trouver dans l’économie et lagestion des réponses « à des problèmes qui touchent à la significationmême de ce qui fait société », ainsi qu’« un sens à l’action et même,parfois, à leur vie et à leur devenir » (Gaulejac, 2005).

La séparation du monde des choses de celui du vécu intérieur aégalement eu pour conséquence de contraindre l’homme à subir un tempsabstrait ne correspondant plus à celui de la vie humaine et de ses besoinsphysiologiques et psychologiques. Notre rapport au temps s’est modifié :« s’il existe une pollution matérielle, technique et industrielle, qui exposele temps, au sens de la pluie et du vent, à des risques concevables, il enexiste une deuxième, invisible, qui met en danger le temps qui passe etcoule, pollution culturelle que nous avons fait subir aux pensées longues,ces gardiennes de la Terre, des hommes et des choses elles-mêmes »(Serres, 1990, p. 57). Nous ne saurions dresser ici la liste complète desnombreuses conséquences de cette crise de la modernité. Elles sontmultiples et reliées entre elles.

La solution passe par la remise en cause de notre comportementactuel : c’est changer notre manière d’être, notre manière d’être aumonde, notre manière d’être avec les autres. La réponse est donc philo-sophique et éthique et non pas technique. Il ne s’agit nullement de reveniren arrière en succombant au fantasme régressif du retour à la matriceoriginelle, selon l’expression d’Augustin Berque, surtout que cette nos-talgie peut aisément se transformer en pulsions identitaires dangereuseset contraires à l’éthique, mais bien d’inventer de nouvelles manièresd’être au monde à partir du monde tel qu’il est aujourd’hui et de seprojeter vers l’avenir en construisant un projet éthique.

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Nous entendons l’éthique non pas comme le respect aveugle derègles morales mais bien comme un exercice de liberté, comme l’expres-sion d’une intention et d’un projet au sens que lui donne Paul Ricœur(1990). L’éthique est la visée d’une vie bonne, c’est un choix de vie verset pour les autres, à travers une volonté permanente d’élévation spirituelle.Cette attitude suppose à tout moment qu’on s’interroge sur son compor-tement, qu’on examine sa vie et qu’on privilégie la réflexion personnelleet l’esprit dans lequel on agit. L’éthique associe raison et sentiment et sefonde sur deux principes fondamentaux :

Le premier principe, c’est le respect de la personne humaine . Lapersonne humaine est sacrée et irremplaçable. Elle est une fin en soi. Iln’est donc pas possible de considérer la personne humaine comme unmoyen pour satisfaire une fin. C’est le fondement universel de l’éthique.Ce respect suppose qu’on reconnaît autrui comme son égal dans uneabsolue réciprocité mais également qu’on ose l’altérité, c’est-à-dire qu’onest ouvert à autrui.

Le second principe, c’est le respect de la Terre. Ce second principedécoule du premier : c’est bien parce que nous sommes humains que nousdevons respecter la Terre, en tant que notre demeure et du fait du lienexistentiel qui nous relie à elle. C’est bien par respect pour l’humanitéfuture que nous devons léguer à nos descendants une terre habitablehumainement10.

L’intention éthique se traduit par un rapport particulier au mondeet aux autres qui permet de donner du sens à son action (quitter l’onto-logie du comment pour celle du pourquoi), de gagner en liberté et enautonomie en devenant l’auteur conscient de ses actes. C’est aussi recon-sidérer son rapport à la consommation et à la possession. C’est construiresa vie à partir des liens de solidarité qui unissent les hommes entre euxet des liens qui nous unissent à la Terre. C’est aussi retrouver une plusgrande cohérence individuelle et donc retrouver un peu du sens unitairedu monde.

10. Nous n’aborderons pas ici le débat ayant cours opposant les approches biocentrées et lesapproches anthropocentrées de l’environnement évoquées notamment par Nathalie Lahayeou Singh, Timothy et Dowling. Signalons simplement que nous nous situons résolument dansune approche anthropocentrée sans pour autant souscrire à l’utilitarisme qui imprègne laplupart des présentations qui en sont faites. L’homme occupe bien une place à part sur laTerre, mais ce n’est pas en raison de l’utilité qu’il peut retirer de la Terre qu’il doit la res-pecter, mais bien en raison du lien existentiel ou écouménal qui le relie à elle, selon la thèsedéveloppée par Augustin Berque.

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Le tourisme durable en général et l’écotourisme en particulierpeuvent contribuer à combler la triple rupture de liens définie précédem-ment. Comme l’affirme Luce Proulx, le tourisme est potentiellementcréateur de liens sociaux : « Le tourisme a ceci de particulier, il est uneactivité qui favorise le rassemblement sous toutes ses formes : concer-tation entre décideurs, maillage entrepreneurial ou mobilisation decitoyens […] Le tourisme a ainsi un effet d’entraînement pour des projetscollectifs lesquels ont un impact sur la création, le maintien et la perma-nence des emplois, la réinsertion sociale des jeunes décrocheurs ou desfemmes, l’enracinement des populations (particulièrement les jeunes),le développement d’un sentiment d’appartenance et d’identification de lapopulation à son territoire, la création de nouvelles solidarités (citoyennesou entrepreneuriales) et d’une cohésion sociale, etc.11 » Mais il crée éga-lement des liens avec le lieu : « l’écotouriste recherche une relation intimeavec une nature authentique (avec des aménagements minimaux), idéali-sée et hors des sentiers battus et en lien avec les cultures régionales, c’est-à-dire où l’histoire est inscrite dans un milieu physique donné. Une rela-tion qui favorise le respect envers l’environnement naturel et culturel,notamment par les activités d’éducation et d’interprétation, qui sont descomposantes formelles du produit écotouristique. On vise à aller chercherle visiteur dans ses valeurs pour l’amener à un second niveau d’éveil,celui de la sensibilité, des émotions et de la spiritualité, qui stimuleraassurément, selon nous, la réflexion sur l’existence et l’implicationcitoyenne. Des activités d’observation et de compréhension indispen-sables à l’ouverture d’esprit dont nous avions encouragé, rappelons-le,l’étendue. Cette expérience personnelle permettra de réduire l’impressiond’étrangeté et l’influence de la bulle sociale, tout en favorisant le savoir-être touriste. » Jean-Marie Breton n’affirme pas autre chose : « Le tou-risme serait ainsi de nature à permettre une réappropriation de l’environ-nement et de l’espace culturel et écologique par des communautés dontil peut contribuer à raviver les traditions et, partant, à cimenter les soli-darités à travers des actions partagées de promotion et de valorisation dupatrimoine (réhabilitation de bâtiments ou de productions traditionnels,préservation et exploitation des ressources de biodiversité, aménagementet mise en valeur d’espaces protégés, etc.). »

11. L’exemple de la mise en réseau des entreprises sous contrat avec le Parc national desCévennes en témoigne (Roland Jaffuel et Marylène Pin).

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Mais un tourisme réellement créateur de liens et de rencontressuppose bien évidemment un comportement éthique des différents acteurs,non pas à travers le simple respect de règles établies, mais en agissantconsciemment et en développant une intention éthique. L’approche éthiqueet l’approche utilitariste diffèrent par l’esprit même si elles peuvent toutesdeux se traduire par des actes identiques en apparence. Et d’un point devue phénoménologique, la différence nous semble fondamentale.

C’est bien en se fondant sur le comportement éthique de ses acteurset en ne se réduisant pas à un simple dispositif technique visant l’effica-cité (économique ou écologique) que l’écotourisme pourra véritablementcontribuer au développement viable des communautés locales.

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Les auteurs

Juan Antonio Aguirre G., Ph. D., est professeur en économie environ-nementale à l’École des études de terrain, Centre pour le développementdurable, Atenas, Costa [email protected]

Jean-Pierre Augustin, professeur de géographie et d’aménagement àl’Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3, est spécialiste des formesd’actions collectives territoriales. Il dirige des recherches sur le tourisme,le sport, la culture et la socioculture à la Maison des sciences de l’hommed’Aquitaine et à l’UMR ADES du CNRS. Ses travaux portent sur laFrance et sur l’Amérique du Nord. Il a été professeur invité dans plu-sieurs universités nord-américaines et notamment à l’Université duQuébec à Montréal (UQAM). Auteur d’une dizaine d’ouvrages et d’unecinquantaine d’articles dans des revues spécialisées, il a dirigé plusieursrapports pour des ministères et des collectivités locales. Il est actuelle-ment membre du groupe de prospective « Temps libre et dynamiquesspatiales » de la [email protected]

Jean-Marie Breton est professeur à l’Université des Antilles et de laGuyane (UFR des sciences juridiques et économiques de la Guadeloupe),directeur du Centre de recherches et d’études juridiques sur l’environne-ment, le tourisme et l’aménagement et président de la Section Caraïbede la Société française pour le droit de l’[email protected]

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Isabelle Cloquet détient une maîtrise en loisir, culture et tourisme del’Université du Québec à Trois-Rivières et une licence en tourisme del’Université libre de Bruxelles. Ses intérêts de recherche portent sur larelation entre tourisme et développement local, en particulier sous l’angledes facteurs sociologiques intervenant dans cette [email protected]

Ross K. Dowling, Ph. D., Foundation Professor and Head of Tourism,Edith Cowan University, School of Marketing, Tourism and Leisure,Faculty of Business and Law, [email protected]

Christiane Gagnon, Ph. D. en aménagement, est professeure au Dépar-tement des sciences humaines de l’Université du Québec à Chicoutimi,coresponsable de l’axe restructuration des territoires et développementdurable du Centre de recherche en développement territorial (CRDT),membre du Centre de recherches et d’études juridiques sur l’environne-ment et du Groupe de recherche et d’intervention régionale. [email protected]

Serge Gagnon, Ph. D. en géographie, est professeur à la maîtrise endéveloppement régional de l’Université du Québec en Outaouais (UQO)depuis 2002. Directeur du module des sciences sociales à l’UQO,M. Gagnon est un spécialiste des questions de développement durabledes paysages ruraux et de l’aménagement touristique des territoires(<www.uqo.ca/corps-professoral/prof/gagnonser.asp>). Membre du comitéd’orientation de l’Université rurale québécoise, il a coordonné l’organi-sation de l’URQ2005 en Outaouais (<www.uqo.ca/urq2005/>). Cores-ponsable de l’axe de recherche « Recompositions socioterritoriales etdéveloppement durable » du Centre de recherche sur le développementterritorial (<www.uqar.qc.ca/crdt/>), Serge Gagnon a publié récemmentun ouvrage synthèse sur l’organisation du tourisme au Québec (L’Échiquiertouristique québécois). [email protected]

Corinne Gendron, Ph. D., est professeure au Département organisationet ressources humaines et titulaire de la Chaire de responsabilité socialeet développement durable. Elle enseigne entre autres aux programmes deMBA et de la maîtrise en sciences de l’environnement, École des sciencesde la gestion, Université du Québec à Montréal. Ses principaux intérêtsde recherche concernent la responsabilité sociale et éthique de l’entreprise,

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régulation et gouvernance dans un contexte de mondialisation, gestionenvironnementale, commerce équitable, développement durable, socio-logie économique de l’environnement, sociologie de l’entreprise, inves-tissement responsable, nouveaux mouvements sociaux économiques. Elleest l’auteure de nombreux livres et articles dont Le développement durablecomme compromis publié en [email protected]

Roland Jaffuel, chargé de mission tourisme et activités de pleine nature,est chargé de l’application de la Charte européenne du tourisme durabledans les espaces protégés dans le Parc national des Cévennes. Il a par-ticipé à plusieurs travaux de recherche appliquée et de gestion commeresponsable d’un secteur géographique du Parc national des Cévennes(inventaires ornithologiques, lutte biologique contre un parasite de l’épi-céa, principes de gestion forestière en zone centrale du Parc, plans degestions territoriaux). [email protected]

Philippe Joseph est maître de conférence de biogéographie à l’Universitédes Antilles et la Guyane. En 1997, à l’Université des Antilles et la Guyane,Sa thèse de doctorat soutenue à cette même université s’intitule : Dynamique,écophysiologie végétales en bioclimat sec : Antilles franç[email protected]

Athanasia Koussoula-Bonneton, Ph. D., est maître de conférences enéconomie du développement rural à l’Université des Antilles et de laGuyane et à la Faculté des sciences exactes et naturelles et membre dugroupe de recherche CREJETA (Centre de recherche et d’étude juridiquesur l’environnement, le tourisme et l’aménagement). Elle est auteur denombreuses conférences et articles dans ces domaines et participe auxtravaux de l’Institut inter-américain pour la coopération en agriculture(IICA). Elle est aussi une pionnière dans la conception de formations àdistance sur l’agriculture biologique et l’agroécotourisme à l’intentiondes [email protected]

Nathalie Lahaye, agrégée d’économie et gestion et docteur en scienceséconomiques, est maître de conférences en sciences économiques àl’Institut universitaire de technologie de Tarbes de l’Université P. Sabatierde Toulouse, et chercheure au GRES, Université des sciences sociales deToulouse. Ses travaux de recherche récents portent sur les conflits d’usages

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sur les ressources naturelles et la gestion concertée, le développementdurable territorial, la gouvernance locale et les dynamiques de proximi-tés. Après des travaux appliqués à la ressource en eau et à la gestion desfleuves, elle s’intéresse aujourd’hui aux espaces naturels protégé[email protected]

Dominic Lapointe est étudiant au doctorat en développement régional àl’Université du Québec à Rimousk et détenteur d’une maîtrise en tech-nologie éducative. Sa thèse porte sur la justice environnementale dutourisme nature en périphérie des aires protégées.

Marie Lequin, Ph. D. en études urbaines, est professeure au Départe-ment des sciences du loisir et communication sociale de l’Université duQuébec à Trois-Rivières. Ses recherches portent actuellement sur l’éco-tourisme, la gouvernance participative, le développement local et lamigration des jeunes. Elle est auteure ou coauteure de nombreux ouvragesdont La migration des jeunes en Mauricie. Rapport du sondage 2004-2005 auprès des 20-34 ans du Québec (2006), Écotourisme et gouver-nance participative (2001) et Gouvernance en écotourisme : développe-ment durable, développement régional et démocratie participative(2000). Elle a également signé plusieurs articles et rapports de recherche.

Jacques Perret, Ph. D. en sciences économiques (Économie du dévelop-pement), de l’Université Pierre Mendès-France de Grenoble II est cher-cheur au Cemagref, unité de recherche : Développement des territoiresmontagnards. Ses recherches ont porté sur le développement touristiquelocal, et notamment sur les stations de montagne considérées comme dessystèmes touristiques locaux. Des approches particulières sur l’emploi,la pluriactivité, l’agritourisme ont été poursuivies en complément d’untravail sur les méthodologies de diagnostics territoriaux. Il participeactuellement à une expérimentation sur la mise en œuvre du tourismedurable pilotée par ODIT [email protected]

Marylène Pin, est chargée de mission de l’association Cévennes Éco-tourisme depuis 2003. Elle anime et coordonne les actions du réseau touten accompagnant les entreprises vers la signature de la Charte euro-péenne du tourisme [email protected]

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Luce Proulx est recherchiste-consultante en gestion et planification dutourisme et chargée de cours à l’Université du Québec à Montréal (UQAM)au Département d’études urbaines et touristiques où elle enseigne notam-ment les cours de « Tourisme et Société » et de « Patrimoine touristique ».Ayant une bonne connaissance du milieu de l’économie sociale, elle sespécialise en tourisme social et autres tourismes alternatifs (tourisme dedéveloppement durable, tourisme solidaire, tourisme équitable, etc.). Elles’intéresse également à l’accueil touristique ayant déjà œuvré commeprésidente-directrice générale d’une corporation locale de dé[email protected]

Bernard Scheou, Ph. D. en sciences économiques, est maître de confé-rences à l’Université de Perpignan et chercheur associé au Laboratoired’économie des transports. Après avoir travaillé plusieurs années sur lesinteractions entre transport et aménagement du territoire ainsi que sur lesproblèmes de modélisation appliquée à l’économie des transports, il con-centre désormais ses travaux sur les questions liées au tourisme. Il estcoauteur avec Pascal Pochet d’un rapport officiel sur le thème du tourismeà l’âge de la retraite et auteur d’un ouvrage intitulé Éthique et tourismequi devrait paraître prochainement. Il s’implique également sur le terrainau sein de l’association Tourisme et développement solidaires, associationqui œuvre pour le développement du Sud à travers la mise en place d’uneactivité de tourisme équitable au sein de communautés rurales des Paysdu Sud. En outre, il s’investit à ce titre au sein du bureau de la Plate-forme pour le commerce équitable, collectif français d’organisations decommerce é[email protected]

Marie-France Turcotte, Ph. D., est professeure au Département destratégie des affaires à l’éCécole des sciences de la gestion de l’Universitédu Québec à Montréal. Chercheure principale à la Chaire de respon-sabilité sociale et développement durable, ses principaux domaines derecherche sont la responsabilité sociale et environnementale des entre-prises et plus particulièrement les interactions entre les entreprises etleurs parties prenantes (stakeholders), les relations de conflit et de colla-boration entre entreprises et groupes environnementaux, l’écotourisme etle développement durable dans l’industrie touristique, l’investissementdit éthique ou socialement responsable, les initiatives multipartites telles

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que les tables rondes en environnement et les comités de suivi, les nou-velles formes de régulation de l’économie telles que les standards auxvisées environnementales ou sociales (ISO 14000, SA 8000, etc.) et lecommerce équitable. Elle est auteure de nombreux ouvrage et articlesdont Responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise publiéeen [email protected]

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Dans la même collection

Droit du tourisme – 2e édition Louis Jolin2005, ISBN 2-7605-1382-3, 162 pages

le tourisme métropolitain Le cas de MontréalDanielle Pilette, Boualem Kadri 2005, ISBN 2-7605-1337-8, 156 pages

la prévision-prospective en gestionTourisme – Loisir – CultureJean Stafford et Bruno Sarrasin2005, ISBN 2-7605-1334-3, 348 pages

le tourisme international vu du sudEssai sur la problématique du tourisme dans les pays en développementMimoun Hillali2003, ISBN 2-7605-1238-X, 250 pages

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Réduction de la fracture numérique en tourimeLe rôle des grandes organisations internationalesMarc Laplante2003, ISBN 2-7605-1229-0, 160 pages

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l’espace touristiqueSous la direction de Normand Cazelais, Roger Nadeau et Gérard Beaudet1999, ISBN 2-7605-1027-1, 312 pages

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la recherche touristique Introduction à la recherche quantitative par questionnaireJean Stafford1996, ISBN 2-7605-0909-5, 184 pages

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