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evrier 2007 LE SABLE ET LE VENT Adeline Pons Projet bibliographique encadr´ e par St´ ephane Douady.

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Fevrier 2007

LE SABLE ET LE VENT

Adeline Pons

Projet bibliographique

encadre par Stephane Douady.

Remerciements

Je souhaite tout d’abord remercier Yves Leroy pour m’avoir soutenue afin que cet enri-chissant projet bibliographique voit le jour.

Ensuite, je tiens a remercier Stephane Douady pour m’avoir encadree toujours avec en-thousiasme pendant ces deux semaines, pour m’avoir poussee a essayer d’utiliser une camerarapide pour admirer la vie des grains de sable... Malheureusement, les cameras rapide ne sontpas toujours d’humeur ”filmeuse”, ce projet n’est donc reste qu’un projet. Je remercie aussitoute son equipe, notamment Jeanne qui a supporte mon agitation autour de son experiencealors qu’elle essayait de faire naıtre des dunes longitudinales...

Je remercie aussi mes trois relectrices avisees : Alice pour la poesie, Julie et Maılys pour(ou plutot contre) les fautes d’orthographes.

Enfin, je remercie Google images pour les magnifiques photos qui illustrent ce rapport.

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Table des matieres

1 Introduction 4

2 Le sable : entre fluide et solide 5

2.1 Definition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52.2 Proprietes du sable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

2.2.1 Un milieu complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52.2.2 Parametres internes caracterisant le sable . . . . . . . . . . . . . . . . 62.2.3 Parametres influant sur les proprietes du sable . . . . . . . . . . . . . 7

3 Le transport eolien 9

3.1 Description qualitative du mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93.2 Mecanisme de transport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

3.2.1 La couche limite turbulente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103.2.2 L’action du vent sur les grains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103.2.3 Le mouvement d’un grain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113.2.4 L’action des grains sur le vent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

3.3 Seuils d’entraınement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133.3.1 Mise en mouvement du grain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133.3.2 Seuil dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

3.4 Flux de sable transporte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153.4.1 Flux sature pour la saltation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153.4.2 Flux de reptons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

3.5 Parametres influencant le transport eolien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

4 Le sable et la morphogenese des paysages 17

4.1 Geomorpholgie des deserts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174.2 Modelisation des paysages en laboratoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

4.2.1 L’erosion fluviale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184.2.2 Vers des modeles tectoniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

5 Bibliographie 19

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Chapitre 1

Introduction

De multiples facteurs agissent sur la forme des paysages : l’action des fluides, la gravite,le climat, l’homme,...

La plupart du temps, dans ”action des fluides”, on ne pense qu’a l’eau car son action estbien plus forte (elle agit sur toutes tailles de particules) et bien plus visible (comme le montreles photos ci dessous).

Fig. 1.1 – Differentes figures d’erosion dues a l’eau.

Mais, l’action du vent joue aussi un role sur les paysages. Certes, il agit sur des particulesplus petites (comme le sable), son effet est domine par celui de l’eau, mais dans les contreestelles les deserts ou l’eau n’est quasiment pas presente, le vent est le maıtre du paysage.

On oublie parfois son action car elle est bien plus ephemere que celle de l’eau. En effet,prennons par exemple une plage, le vent va modeler sa surface, mais la prochaine maree vaeffacer toute son oeuvre. Nous allons ici nous interesser a l’action du vent sur une etendue desable.

Dans un premier temps, nous verrons ce qu’est le sable et quelques unes de ses proprietes.Ensuite, nous nous interesserons au transport eolien du sable. Et enfin, nous verrons que lesable peut nous aider a savoir beaucoup de chose sur la morphologie des paysages.

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Chapitre 2

Le sable : entre fluide et solide

2.1 Definition

Le sable fait partie de la famille des milieux granulaires. On nomme milieux granulairestous les milieux composes d’une collection de particules macroscopiques de taille superieure aquelques dizaines de µm. Cette limite inferieure s’explique par les types d’interactions existantentre les grains.

Dans le cadre du transport eolien, on definit le sable par un intervalle de taille (qui dependde ρsable (masse volumique de la particule))[2]. La taille minimale est definie par la taille endessous de laquelle la vitesse de chute du grain est inferieure aux fluctuations de vitessede l’atmosphere, et la taille superieure par la taille au dessus de laquelle il n’y a plus demouvements que ce soit directement du au vent ou meme par impact. Ce qui nous donne undiametre de grain de quelques dizaines de micrometres au millimetre.

2.2 Proprietes du sable

N’importe quel enfant sait qu’avec du sable sec, il ne pourra faire qu’un tas, qu’avec dusable mouille son chateau sera parfait mais que s’il met trop d’eau il aura une masse informe...Cet aspect n’est qu’un grain de sable dans la complexite de ce milieu.

2.2.1 Un milieu complexe

La complexite de l’etude du sable (comme des autres milieux granulaires) reside sur lefait qu’il est compose d’un grand nombre de particules reliees par des interactions complexesce qui implique que son comportement n’est pas le meme selon le mode suivant lequel onle sollicite. Par exemple un tas de sable statique sur une table va se comporter comme unsolide (sans mouvement malgre la presence de contraintes de cisaillement); le sable, commedans un sablier par exemple, va couler comme un liquide (ou presque); et enfin, si l’on secoueenergiquement un tas de sable, le milieu devient tres agite avec des particules bougeant danstous les sens et interagissant par collisions. Dans ce regime que l’on appelle collisionnel, lemilieu ressemble a un gaz.

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Fig. 2.1 – Les milieux granulaires peuvent se comporter comme un solide, un liquide ou ungaz selon le mode de sollicitation [6].

De plus, le comportement du sable depend de nombreux parametres autres que le mode desollicitation. On compte parmi eux, la composition du sable qui n’est pas toujours homogene,de la forme des grains qui le compose, de l’humidite, ...

2.2.2 Parametres internes caracterisant le sable

Comme nous l’avons vu, le sable peut etre considere dans certain cas comme un solide,on va donc pouvoir lui appliquer les lois de la mecanique des solides, on va notamment leconsiderer comme un materiau de Mohr-Coulomb.

Definition : Un materiau de Mohr-Coulomb est definit pas le critere de rupture suivant :Le milieu va ceder au point P, s’il existe en ce point un plan repere par sa normale ~n selonlequel on a [9]:

τ = µσ + c (2.1)

Ou σ et τ sont les contraintes normale et tangentielle au plan defini par ~n , µ est lecoefficient de friction interne du materiau et c est la cohesion du materiau.

Fig. 2.2 – Domaine de Coulomb pour un materiau ideal avec cohesion.

Un materiau de Mohr-Coulomb est donc defini par une simple loi de friction et deux pa-rametres : µ et c. L’idee de decrire le sable (ou tout autre milieu granulaire) par un materiau

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de Mohr-Coulomb provient par exemple de l’observation d’un tas de sable : la pente d’un tasde sable ne peut exceder un certain angle et ceci a cause de la friction entre les grains. Cetangle limite Φ est a peu de chose pres l’angle de friction interne defini par : φ = tan−1(µ). Lacohesion, c, quant a elle traduit la capacite d’un materiau a resister aux contraintes : plus lacohesion est forte, plus il faudra appliquer une contrainte forte pour briser le materiau. Dansle cas du sable : Φ ∼ 25 − 40◦ et c est tres variable [9].

Le modele du materiau de Mohr-Coulomb bien que simple, permet de decrire raisonnable-ment la rupture. Par contre, il ne permet pas de decrire le comportement en dessus du seuilde rupture (ecoulement, deformations plastiques). En effet, ce comportement est influence parla fraction volumique de l’empilement ce que ne prend pas en compte ce modele. En effet,considerons par exemple un paquet de cacahuetes sous vide, il est impossible de le deformercar l’empilement est compact et que l’on ne peut absolument pas faire varier la fraction vo-lumique. Si l’on avait le meme paquet avec un film plastique elastique, on pourrait deformerl’empilement de cacahuetes car pour le deformer, il faut faire glisser les cacahuetes les unessur les autres et donc augmenter le volume entre elles. Cet exemple montre l’importance dela fraction volumique de l’empilement pour la rupture et les deformations.

Fig. 2.3 – Comme le sable n’est pas un milieu continu, une deformation s’accompagne toujoursde variations de volume que l’on nomme dilatance de Reynolds [6].

Dans le probleme qui nous interesse, le transport eolien, le parametre le plus importantest la cohesion qui caracterise a quel point un grain est lie aux autres.

2.2.3 Parametres influant sur les proprietes du sable

De par sa nature ”divise” de multiples parametres influencent les proprietes du sable.En effet, il ne faut pas oublier qu’il se passe des phenomenes a l’echelle du sable (en tempsqu’ensemble de grains) mais aussi a l’echelle du grain.

Tout d’abord, a l’echelle du grain, les parametres jouant beaucoup sont :

– La nature des grains (composition chimique) qui va jouer sur la densite, la durete, lesforces cohesives,....

– La taille des grains.

– L’heterogeneite ou non des grains. Les proprietes ne seront pas les memes si l’on a quedes grains de la meme taille ou non.

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– L’empilement i.e. l’agencement des grains entre eux influe sur la friction interne du mi-lieu et donc sur son comportement.

Ensuite, a l’echelle du milieu entier, le parametre preponderant est la presence de fluide.En effet, si l’on introduit de l’eau dans le milieu, sa cohesion va augmenter par capillaritemais si l’on ajoute plus d’eau que le volume qu’il existe entre les grains, on va briser toutecohesion et obtenir de l’eau avec du sable dedans.

Fig. 2.4 – Effet de l’eau sur la cohesion du sable : A) sable sec, B) sable humide, C) sablesature en eau.

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Chapitre 3

Le transport eolien

3.1 Description qualitative du mouvement

Lorsque le vent souffle sur une etendue de sable, ce dernier se met en mouvement. Il existetrois modes de transport des grains [1],[2],[3],[4]:

– La suspension : c’est le transport des grains sur une tres longue distance sans contactavec le sol (essentiellement restreint aux particules de taille inferieure a 20 µm ou a desvents tres violents et turbulents).

– La saltation : c’est le mouvement que suit un grain qui est deloge du sol par la turbulencepuis entraine par le vent mais dont la masse est suffisament grande pour qu’il finissepar retomber. Les grains qui suivent une telle trajectoire sont appeles saltons. Lors del’impact avec le sol, grace a sa grande energie cinetique, le salton met en mouvementd’autres grains.

– La reptation : ce mode s’apparente au precedent mais le mouvement est plus lent, pluspetit car l’energie d’un repton est plus faible que celle d’un salton.

Le processus se met en place de la maniere suivante : lorsque le vent commence a souffler,il va faire rouler quelques grains qui vont finir par faire des bonds. On definit donc un seuilen vitesse statique : u∗t. Si le vent est assez fort, lors de leur bond, les grains vont acquerirassez d’energie pour entraıner d’autres grains lors de l’impact. Ces grains entretiennent letransport de telle sorte que meme si la vitesse du vent descend en dessous de u∗t le transportcontinuera. On definit donc un seuil en vitesse dynamique u∗i.

Fig. 3.1 – Les differents modes de transport : (A) suspension, (B) saltation, (C) reptation.

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3.2 Mecanisme de transport

3.2.1 La couche limite turbulente

Pour un ecoulement turbulent sur un sol plat, la vitesse de l’ecoulement a l’altitude z estclassiquement decrite par une loi logarithmique [2],[3]:

uz =u∗

κln(

z

z0) (3.1)

ou

– κ est la constante de Von Karman prise habituellement egale a 0,4

– z0 est la rugosite du sol, en general de l’ordre d’un trentieme de la taille caracteristiquedes grains. On considere qu’en dessous de z0, uz = 0.

– u∗ est la vitesse de cisaillement, elle caracterise la force que le vent exerce sur le sol.

De uz on tire u∗, a partir de laquelle on evalue la contrainte cisaillante que le vent exercesur le sol : τO ∼ ρairu

2∗. On travaille generalement en terme de u∗ plutot que de τO.

3.2.2 L’action du vent sur les grains

Un grain se deplacant dans l’air a la vitesse relative v par rapport a celui-ci, subit une forceresistante qui se decompose en une partie horizontale (la traınee Fd) et une partie verticale(la portance Fl). Toutes deux s’expriment de la maniere suivante :

{

.Fd ∼ ρairACxv2,Fl ∼ ρairACzv

2,(3.2)

ou

– A est l’aire de la projection du grain sur un plan perpendiculaire a l’ecoulement.

– Cx et Cz sont deux parametres fortement dependants de la forme de l’objet et du nombrede Reynolds (dans notre cas : Re ∼ ρairvd

ηair∼ vd

νairavec d la taille caracteristique d’un

grain).

Pour tous les corps, il existe, selon les valeurs de Re, deux comportements pour Cx/z. On

a C ∼ 1Re pour les ecoulements laminaires (faibles Re) et C ∼ constante pour les ecoulements

turbulents (grands Re). Ces comportements sont les memes, seule la limite entre les deuxcomportements varie.

Fig. 3.2 – Variations de C en fonction de Re.

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Dans le cas qui nous concerne :

.v ∼ 5m/sd ∼ 200µm donc Re ∼ 500νair ∼ 10−6m2/s

(3.3)

On est dans le cas ou Re est grand, donc C ∼ constante (et comme A ∼ d2), la forcequ’exerce l’air sur le grain est :

{

.Fd ∼ Cdρaird

2v2,Fl ∼ Clρaird

2v2,(3.4)

Cette force est la force exercee par l’air quand le grain est deja en l’air. Mais l’air exerceaussi une aspiration sur les grains toujours dans le lit de sable. Le vent est accelere au dessusde toute asperite du sol. Cette acceleration s’accompagne d’une chute de pression (d’apresl’equation de Bernoulli) qui aspire le grain vers le haut ce qui initie le mouvement. On peutmontrer que cette force peut se mettre sous la forme : F ∼ Fl ∼ ρaird

2u2∗

(a une constantemultiplicative pres) [2],[3].

Fig. 3.3 – Le resserrement des lignes de courant provoque une depression.

3.2.3 Le mouvement d’un grain

Nous allons nous interesser a un salton. Une fois en l’air, le grain est soumis a la graviteet a la resistance de l’air. Les equations du mouvement sur la verticale et sur l’horizontalesont donc de la forme [1]:

{

.ρsabled

3y + ρsabled3g + Clρaird

2u2 = 0,ρsabled

3x + Cdρaird2u2 = 0,

(3.5)

Rigoureusement, pour la force de resistance de l’air, il faut considerer la vitesse relativedu grain par rapport au fluide i.e. u− vgrain, et non juste u, dans les equations. De plus, cetteforce est dans le sens oppose de cette vitesse relative ce qui implique des histoires de projec-tions compliquees sur les differents axes, mais comme u >> vgrain, on simplifie l’expressionde cette force.

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Fig. 3.4 – trajectoire d’un salton [1].

Sur la verticale, le mouvement est tout de suite domine par la gravite (comme pour unechute libre). Et horizontalement, il est entraıne par le vent et se met tres vite a sa vitesse.Considerons un grain de sable ejecte a la vitesse w par un vent soufflant a la vitesse u. On aalors l’ordre de grandeur de son temps de vol T , de la longueur, lsal, et de la hauteur Zsal,du saut :

T ∼ 2wg , lsal ∼

2uwg et Zsal ∼

w2

2g

L’approximation de la ”chute libre” est valable si la gravite est bien plus forte que laresistance du vent. Or, on a le rapport entre la force d’entraınement horizontale du vent et la

force de gravite qui est de l’ordre de : ρairu2

ρsabledg ∼ 1 (ce rapport explique le fait que les grainsde sables peuvent a la fois etre entraınes et retomber sur le sol). Comme la force verticalequ’exerce le vent est bien plus faible que celle qu’il exerce horizontalement, l’approximationde chute libre est bien justifiee. Il faut quand meme noter que cette approximation n’est plusvalable si le vent est trop fort.

Verifions maintenant que le grain de sable se met reellement tres vite a la vitesse du vent.Le temps d’acceleration par le vent est Tent ∼

ρsabledρairu . On a bien Tent << T .

On peut exprimer les trois parametres en fonction de u∗ sachant que :

– u = u∗

κ ln( zz0

) = ξu∗ avec z0 ∼ d30 et z ∼ 5m.

– w ≃ u∗

D’ou T ∼ 2u∗

g , lsal ∼2ξu2

g et Zsal ∼u2∗

2g

Ainsi, pour un vent soufflant a 10 m/s et du sable de diametre 200 µm et de densite 2650kg/m3 (quartz), on a :

T ∼ 50 ms , lsal ∼ 50 cm et Zsal ∼2,5 cm

3.2.4 L’action des grains sur le vent

Toute l’energie mise en jeux dans le transport est apportee par le vent. Toute cette energieest transformee en energie cinetique par l’acceleration des grains. La saltation coute beaucoup

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d’energie au vent, elle induit donc une baisse de la vitesse du vent dans la couche de saltation(∼ 5cm) ce qui diminue en retour l’effet de saltation. Donc, le vent et la saltation agissentl’un sur l’autre pour se reguler et arriver a un ecoulement stable [2],[3].

3.3 Seuils d’entraınement

3.3.1 Mise en mouvement du grain

Un grain de sable encore sur le sol est soumis a son propre poids P , la reaction R des autresgrains, l’attraction F des autres grains (i.e. la cohesion qui est le plus souvent negligeable) etl’action du vent Fd et Fl.

Fig. 3.5 – Bilan des forces sur un grain.

Tant que le poids et la reaction des autres grains contrebalancent l’action du vent, le grainest au repos. Le seuil de mise en mouvement (ce seuil est different du seuil d’arrachage dugrain, en effet, le grain peut rouler sans decoller) est atteint quand le moment des forces d’en-traınement, exprime au niveau du point de contact sollicite, s’oppose exactement au momentdu poids. On comprend bien que la topographie va jouer un role important dans cette miseen mouvement.

Considerons le cas d’une couche de sable lisse, et interessons-nous au seuil d’arrachaged’un grain a cette couche. La condition d’arrachage est l’equilibre entre le poids et Fl. Ce quinous donne comme condition sur la vitesse de cisaillement du vent [2]:

u∗t ∼

ρsabledg

ρair(3.6)

Remarque : pour la force de gravite, en realite, il ne faut pas oublier la poussee d’Ar-chimede. Dans le cas du transport eolien, ce n’est pas important car ρsable >> ρair, mais dans

le cas du transport fluvial, elle n’est plus negligeable. On a alors : u∗t ∼

(ρsable−ρeau)dgρeau

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u∗t est la vitesse a partir de laquelle l’entraınement de grain par la vent est possible. Cetteexpression en

√d n’est pas valable pour des grains trop petits. En effet, pour des grains plus

petits la cohesion joue un role qui n’est plus du tout negligeable pour differentes raisons :

– La surface de contact par unite de volume est plus grande.

– Les petites distances favorisent les forces attractives chimiques ou electrostatiques faibles(comme les interactions de Van Der Waals par exemple).

– Le nombre moyen de particules voisines est plus grand.

– Les parametres tels que l’humidite ont un effet encore plus important.

Dans ce cas, la force du vent doit compenser la cohesion et non pas la gravite. Or, onconsidere generalement que la force cohesive est en 1/d3 donc, pour des petits grains, lavitesse seuil suit la loi en puissance suivante : u∗tαd−5/2. On obtient donc une courbe de seuilde vitesse dont l’allure est la suivante :

Fig. 3.6 – Vitesse de seuil en fonction de la taille caracteristique des grains.

Pour definir la taille de grain limite entre les deux comportements (predominance dela force cohesive ou gravitaire), il faudrait avoir les expressions exactes des deux forces.Experimentalement, on trouve une taille limite dlim ∼ quelques dizaines de µm. Cette li-mite depend de la nature du sable (ρsable en particulier).

3.3.2 Seuil dynamique

Lorsque la saltation est mise en place, la vitesse du vent peut descendre en dessous duseuil dynamique sans que le transport ne s’arrete. En effet, comme les grains subissent descollisions par les saltons, ils sont plus facilement mis en mouvement par le fluide. On definitalors une deuxieme vitesse seuil u∗i, pour laquelle le mouvement s’arrete. Il peut donc etre tresinteressant, lorsqu’on etudie le transport du sable par le vent, de connaıtre les caracteristiquesdes impacts (ce que l’on appelle la fonction de splash).

Lors d’un impact, le grain rebondit mais il ejecte aussi d’autres grains de la couche desable. Des etudes sur les impacts ont montre que [8]:

– La vitesse de rebond est une fraction de la vitesse d’impact avec : vrebond

vimpact∼ 0.5. Donc le

grain perd pres de 80 % de son energie. La geometrie du rebond depend de la topographiede l’endroit d’impact.

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– Lors de l’impact, un certain nombre (augmentant avec la vitesse d’impact) de grainssont ejectes de la couche de sable. L’energie totale de ces grains ejectes n’excede pas10 % de l’energie d’impact. Les grains sont ejectes dans toutes les directions (meme acontre courant du vent). Certains de ces grains peuvent, s’ils sont ejectes a une hauteursuffisante, devenir des saltons.

– Le reste de l’energie d’impact est absorbe par la couche de sable qui est un milieu tresdissipatif. En effet, considerons par exemple une boule de petanque lachee dans un bacde sable: elle ne rebondit pas.

On peut considerer que lorsqu’un grain est a la surface de la couche de sable, il est dansun trou d’une profondeur ∼ d. La vitesse necessaire pour sortir de ce puit de potentiel estdonc

√gd. On peut alors supposer que la vitesse de seuil dynamique sera proportionnelle a

cette vitesse d’extraction soit : u∗i ≃ a√

gd. Des etudes ont montre que a ∼ 3,5.

3.4 Flux de sable transporte

On a vu precedement que le transport du sable coute de l’energie au vent. Il est doncevident que le vent ne peut pas transporter une quantite infinie de grains de sable vu qu’ilapporte au mouvement une puissance finie. Ceci nous amene donc inevitablement au fait qu’ilexiste un flux maximum de grains de sable transporte par unite de temps par une sectionunite, on nomme ce flux : le flux sature qsat [2].

3.4.1 Flux sature pour la saltation

Supposons le transport mis en place et la vitesse du vent loin du seuil. Considerons unsalton de masse m, avec pour vitesses horizontales initiale et finale respectivement u1 et u2

(il faut noter que u2 >> u1). La quantite de mouvement que le vent transmet au grain parunite de longueur est :

dP

dx= m

u2 − u1

lsal∼ m

u2

lsal(3.7)

Si, l’on considere maintenant que le vent est sature en sable, et que l’on integre cettequantite de mouvement transmise sur tous les grains de sable et sur le temps :

dP

dxdt∼ qsat

u2

lsal(3.8)

Cette quantite de mouvement vient directement de la force qu’exerce l’air sur le sable, onpeut donc ecrire :

qsatu2

lsal∼ ρairu

2∗

(3.9)

or, lsal ∝u2∗

g et u2 ∝ u∗, donc [2]:

qsat ∝ρair

gu3∗

(3.10)

Il est clair que cette expression de qsat necessite plusieurs hypotheses, comme par exempleque toute la force du fluide est utilisee pour la saltation et qu’il n’est plus possible de mettre enmouvement un salton supplementaire, mais elle donne une bonne estimation de la dependancede qsat avec la vitesse du fluide.

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3.4.2 Flux de reptons

Dans le calcul precedent, il n’est question que de la saltation. Or, bien qu’ils se deplacentbien plus lentement, les reptons jouent un role important dans le transport, de part leur plusgrand nombre. En effet, a chaque impact, un salton met en mouvement plusieurs reptons.Cependant, comme leur formation et leur mouvement sont tres differents de ceux des saltons,on ne peut utiliser les memes lois d’echelles. Par contre, on peut exprimer qrep a partir duflux de saltons, qsal et du nombre de grains ejectes a chaque impact Nej [1]:

qrep =lrep

lsalNejqsal (3.11)

Cette expression suppose que tous les reptons proviennent de l’impact d’un salton et qu’ilne peut en exister d’une autre origine, par exemple que le vent ne peut generer de reptons.

Remarques :

– Dans tout ce qui precede, nous ne nous sommes absolument pas interesses a la periodede mise en place du transport. Or, les grains possedent une certaine inertie, donc letransport ne suit pas immediatement les variations du vent.

– A l’heure actuelle, on n’etudie plus seulement l’importance du vent moyen sur le fluxde sable mais aussi celle de la turbulence. En effet, la moyenne sur le temps du fluxinstantane n’est pas egale au flux obtenu a partir de la moyenne du vent sur le temps.

3.5 Parametres influencant le transport eolien

Dans l’etude qui precede, nous nous sommes limites a une surface plane et lisse, de sablehomogene compose de grains spheriques, or dans la nature une telle situation ne se presentejamais et de nombreux parametres influent sur le transport du sable. Citons par exemple [3]:

– La repartition en taille et en forme des grains.

– Le pendage du sol : il sera plus facile a un grain de sable de descendre une pente que dela monter.

– La presence d’asperites moyenne echelle (bosse et creux de l’ordre du cm a la dizainede cm): les irregularites augmentent la turbulence qui favorise l’arrachage des grains ausol.

– La presence de vegetation : elle va modifier le champs de vitesse du vent et, en quelquesorte, proteger la couche de sable.

– L’humidite : elle influence la cohesion du sable. Elle peut aussi former une croute a lasurface du sable (apres une petite pluie par exemple) qui protege le sable.

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Chapitre 4

Le sable et la morphogenese des

paysages

L’etude du comportement du sable face a un fluide (air ou eau) est tres importante pourla geomorphologie. Que ce soit dans l’etude des dunes sur la plage ou dans le desert ou dansl’elaboration de maquette modelisant l’erosion et la morphogenese des paysages, l’action d’unfluide sur le sable est cruciale.

Connaıtre le comportement du sable peut nous aider a expliquer directement des phenomenes,comme pour le cas des dunes, mais il peut aussi nous aider a modeliser a l’echelle du labora-toire ce que l’on observe dans le nature.

4.1 Geomorpholgie des deserts

Le transport eolien est le facteur preponderant de la morphologie des deserts. C’est essen-tiellement le vent qui faconne les etendues de sable et forme les dunes.

Si l’on osberve les formes que prend le sable dans le desert (ou meme sur une plage), onen decouvre une grande variete :

Fig. 4.1 – Quelques exemples de structures de sable formees par le vent: a) une barchane, b)des rides eoliennes, c)une dune lineaire.

L’explication de la formation de ces structures est complexe et necessite la connaissance dutransport a l’echelle du grain. La donnee la plus importante est bien evidemment l’expressiondes flux de sable en fonction du vent, de la topographie deja existante, de la vegetation,... [4]

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4.2 Modelisation des paysages en laboratoire

De part ses proporietes proches de celles des roches mais a une echelle differente, le sable estun excellent materiau pour modeliser la croute terrestre pour des experiences en laboratoire.

4.2.1 L’erosion fluviale

Ici aussi, le comportement du sable face a un fluide (l’eau ici) est le moteur du phenomene.Le comportement du sable face a l’eau est similaire, a des lois d’echelle pres, mais la plusgrande difference reside dans le fait que contrairement au vent, l’eau ne se repartit pas surtoute la surface mais suit la ligne de plus grande pente en restant confinee dans un lit. Deplus, dans le cas de l’eau, il ne faut pas oublier l’effet chimique, la dissolution des roches parl’eau.

La figure suivante montre les similitudes entre les phenomenes d’erosion et les experiencequi peuvent etre menees en laboratoire sur du sable.

Fig. 4.2 – a) experience d’erosion fluviale en laboratoire, b) figures similaires sur une plage,c)embouchure d’un fleuve.

4.2.2 Vers des modeles tectoniques

Les modeles analogiques peuvent etre d’un grand secours pour modeliser les phenomenestectoniques. Deux principaux materiaux sont utilises a ces fins : des pates de silicone et dusable.

Dans ce cas, ce n’est pas forcement son comportement face a l’action d’un fluide qui est misen jeu, mais sa similitude de comportement avec la croute terrestre a des echelles differentes.

En general, les modeles utilises sont en deux dimensions seulement (par exemple, dans lecas de l’etude des prismes d’accretion ou celui des zones de failles). Mais on peut faire desmodeles en trois dimensions auquel on peut meme ajouter une composante d’erosion [5].

Ceci nous montre que malgre sa complexite, etudier le sable peut nous apprendre beaucoupde choses dans differents domaines.

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Chapitre 5

Bibliographie

[1 ] Andreotti B., Claudin P., Douady S., Selection of dunes shpes and velocities. Part 1:Dynamics of sand, wind and barchans, Eur. Phys J. B., p341-352, 2002.

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