Le reveil des combattants juillet août 2014

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PIKETTI IMPOSE SON ANALYSE DES INÉGALITÉS RÉSISTANCE ET DÉBARQUEMENT ALLIÉ MAURICE AUDIN L’OMERTA DE LA RÉPUBLIQUE Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre S'attaquer aux causes des guerres, un combat décisif pour préserver la Paix EXIGEONS L'ARRÊT DES CRIMES EN PALESTINE DES COMBATTANTS l e réveil Juillet-Août 2014 - N°805 - 5 www.le-reveil-des-combattants.fr

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PIKETTI IMPOSE SON ANALYSE

DES INÉGALITÉS

RÉSISTANCE ET DÉBARQUEMENT

ALLIÉ

MAURICE AUDIN L’OMERTA

DE LA RÉPUBLIQUE

Pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

Le journal des droits de tous les anciens combattants et victimes de guerre

S'attaquer aux causes

des guerres, un combat

décisif pour préserver

la Paix

EXIGEONS L'ARRÊT

DES CRIMES EN PALESTINE

DES COMBATTANTSle réveilJuillet-Août 2014 - N°805 - 5 €

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LE RÉVEIL ACTUALITÉSACTUALITÉS

L’ ARAC tient à exprimer sa très grande inquiétude devant la situation économique dramatique faite à l’ensemble de la population active et retraitée de

notre pays et particulièrement celle des anciens combattants et victimes de guerre qui ont donné des années de leur vie et leur santé, il faut le rappeler, pour assumer les combats qui leur ont été imposés.

Les diverses coupes sociales, les gels des salaires, retraites, pensions, allocations, les hausses des prélèvements, les ré-ductions des budgets sociaux, les fermetures de services de santé, la hausse de l’électricité, du gaz, des transports, des services postaux, et cette liste n’est pas exhaustive, impo-sés par les dispositions gouvernementales autoritaires qui aggravent journellement la situation du plus grand nombre, les anciens combattants et victimes de guerre comme les autres.

Sur le budget 2014, dit « contraint par la situation écono-mique » les anciens combattants et victimes de guerre, par l’ONAC interposé, ont vu supprimer les modestes subven-tions d’action sociale allouées depuis 4 décennies aux asso-ciations du mouvement combattant, tournant ainsi le dos aux enjeux du secrétariat d’État aux anciens combattants et victimes de guerre lui-même.

L’ARAC n’accepte pas cette situation et reste attachée à toutes les revendications exprimées au nom de toutes les associations du Mouvement combattant par l’UFAC.

Et elle insiste particulièrement pour que le budget 2015 marque une première progression du niveau du rapport constant actuellement en retard de 42,65 % et engage son relèvement par paliers annuels pour la suite, assure l’augmen-tation sensible de la pension de retraite du combattant, celle de l’allocation différentielle aux conjoints survivants à la hau-teur du seuil de pauvreté, celle de la rente mutualiste, sans oublier la réversion de 50 % de la pension des AC décédés à leurs veuves, les pensions des veuves des grands invalides,

la prise en compte des psychotraumatismes des OPEX et la mise en œuvre de la campagne double pour les anciens combattants d’Afrique du Nord.

Sur ce plan, l’ARAC, dénonçant la refonte du code des pen-sions PMI hors de toute concertation avec le Mouvement ancien combattant et les parlementaires, réclame l’élargis-sement de la commission ad hoc à ses partenaires ainsi que le vote du Parlement sur le contenu du code réformé.

L’ARAC demeure soucieuse de la nécessité d’assurer les moyens de la mise à jour professionnelle et de la réinsertion professionnelle des anciens combattants, des OPEX et des victimes de guerres actuelles, donc le maintien nécessaire des ERP.

L’ARAC revendique donc le rétablissement des subventions d’action sociale aux associations nationales combattantes dont la suppression grève sérieusement leurs actions auprès de leurs membres âgés et de santé déficiente qui doivent toujours compter sur un accueil possible dans les maisons de retraite de l’ONAC.

En conséquence l’ARAC refuse la réforme territoriale et l’ex-ternalisation des établissements de l’ONAC qui mettrait en cause leur existence même.

Enfin, l’ARAC demande qu’une aide substantielle soit ac-cordée par l’État aux actions mémorielles des associations combattantes à caractère national.

Pour l’ARAC, il n’est pas d’autre solution aujourd’hui face à la situation économique présente que d’en revenir à une poli-tique économique répondant d’abord aux besoins du plus grand nombre, des citoyennes et citoyens du pays et par conséquent, aux anciens combattants et victimes de guerre qui en sont partie prenante. Elle invite les autres associations combattantes à se rencontrer en septembre pour débattre des enjeux et des initiatives à prendre.

Villejuif, le 18 juin 2014

DÉCLARATION DU BUREAU NATIONAL DE L’ARACSUR LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET CELLE DES ACVG

La situation et les droits à réparation des AC-OPEX et des victimes de guerre mis en cause par les choix politiques du gouvernement

ASSOCIATION RÉPUBLICAINE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE, DES COMBATTANTS POUR L’AMITIÉ, LA SOLIDARITÉ, LA MÉMOIRE, L’ANTIFASCISME ET LA PAIX

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ÉDITOÉDITO LE RÉVEIL

SOMMAIRE

P. 13 D O S S I E R

RÉSISTANCE ET DÉBARQUEMENT ALLIÉ

LE RÉVEIL DES COMBATTANTS Fondé en 1931 par Henri-Barbusse

Mensuel de l’Association républicainedes anciens combattants et victimes de guerre.Commission paritaire n° 0713-A 06545Édité par les Éditions du Réveil des CombattantsSARL au capital de 45 734,41 - Siret : 572 052 991 000 392, place du Méridien, 94807 Villejuif cedexTéléphone : 01 42 11 11 12Télécopie : 01 42 11 11 [email protected]

Tirage : 60 000 exemplaires

Gérant Directeur de la publication : Raphaël

Vahé Directeur délégué - Rédacteur en chef :

Patrick Staat Comité de Rédaction : Brigitte Ca-

névêt, Hervé Corzani, Jean-Pierre Delahaye, André

Fillère, Laurence Gorain Service photos : Jean-

Claude Fèvre Administratrice : Annick Chevalier

Secrétariat de rédaction, conception gra-

phique : Escalier D Communication Impres-

sion : RIVET P.E. - 24 rue Claude-Henri-Gorceix,

87022 Limoges cedex 9

Nous assistons aujourd’hui au redéploiement de la politique des multinationales et des

gouvernements occidentaux.Les combats qui font rage actuelle-ment en Palestine, en Syrie, en Irak, ont en commun d’être menés sous

l’égide des États-Unis contre des peuples qui résistent à la volonté US de ce remodelage du « Proche-Orient élargi » et de peser ainsi sur le marché et les richesses énergétiques mondiales.La France n’est pas absente de ce processus comme le montre la place de sociétés comme Total et AREVA en Afrique.La côte méditerranéenne de Gaza comme les terri-toires de Cisjordanie regorgent de gaz et de pétrole. C’est ce qui justifi e l’intervention israélienne sur Gaza, le massacre de milliers de civils et de blessés. C’est ce qui justifi e le silence complice des Etats-Unis, du Prix Nobel de la Paix Obama. C’est ce qui justifi e le silence assourdissant des gouvernements occidentaux devant ces milliers de morts civiles. La position du Président et du Premier ministre fran-çais sur l’agression, l’invasion israélienne dans la bande de Gaza est inacceptable. Il s’agit en réalité de mettre la main sur des richesses énergétiques appartenant depuis des millénaires au peuple palestinien. Quitte à tirer contre les populations civiles. Soutenir le peuple palestinien face à la violence et aux tueries du gouvernement israélien ce n’est pas être anti-sémite, c’est soutenir l’existence d’un peuple et aider à trouver des solutions politiques qui garantissent l’exis-tence de deux états.L’ARAC continuera à dénoncer les causes des confl its parce que comprendre les causes, c’est situer les res-ponsabilités des uns et des autres.Nous exigeons l’arrêt de cette guerre, le respect des droits du peuple palestinien, l’arrêt des colonisations.Nous exigeons aussi que le gouvernement français œuvre enfi n à une solution politique, et que l’ONU mette en œuvre des sanctions et les moyens néces-saires à ces sanctions.Comment le peuple israélien peut-il laisser perpétrer de tels massacres, lui qui tout au long de son histoire a connu tant de malheurs ?L’ARAC appelle à intensifier l’action pour imposer l’arrêt de ces crimes, de ces bombardements et exiger le retrait des troupes de Tsahal.L’ARAC appelle ses militants, ses organisations, tous ceux qui sont épris de paix et de justice à faire entendre leur voix, à prendre toutes initiatives nécessaires pour que le droit à vivre du peuple palestinien soit entendu.

POURQUOI LE MONDE CONNAÎT TANT DE CONFLITS, TANT DE GUERRES ?

Actualités Conditions de travail dégradées depuis 2005 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4Exigences de la Commission européenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5SNCF : la casse du service public . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6Alstom demantelé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7L’analyse des inégalités de Piketti s’impose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8UE - Un niveau de pauvreté alarmant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

International Israël / Palestine : un peuple sous les bombes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .10GAZA : le gaz dans le viseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11Irak : triple échec du recours à la force . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12Afrique : la France en première ligne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21Aide au développement : Hollande, Président du renoncement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22Asie / Pacifi que : une dangereuse escalade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

Vie de l’ARAC Olivier Catayée décoré, le 24 juin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23Hommage à Pierre Bussone . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

Vos droits Santé : militaires et enfants de militaires livrés au privé . . . . . . . . 27Souverainiste, mais oui ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28ONACVG : Des agents corvéables à merci ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Mémoire p. 30Maurice Audin, l’omerta de la République . . . . . . . . . . . . . 30

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Patrick Staat

ASSOCIATION RÉPUBLICAINE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE, DES COMBATTANTS POUR L’AMITIÉ, LA SOLIDARITÉ, LA MÉMOIRE, L’ANTIFASCISME ET LA PAIX

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LE RÉVEIL ACTUALITÉSACTUALITÉS

Contraintes physiques ou sur les rythmes de travail, évolutions technologiques... En pleine polémique sur la pénibilité, une étude du ministère de l’Emploi montre une dégradation des conditions de tra-vail des salariés en France sur les sept dernières années.

C’est une enquête à la fois rare et riche d’enseignements qu’a mise en ligne le ministère du Travail. Rare parce qu’elle n’est réalisée que tous les sept ans et riche d’enseignements parce qu’elle porte sur les conditions de travail et parce que, sur ce sujet devenu majeur (comme le montre la polémique sur la pénibilité ou les risques psycho-sociaux) ses conclu-sions sont sources d’inquiétude.Que disent ces travaux ? Qu’entre 2005 et 2013, « Les changements organisation-nels ont repris et les contraintes de rythme de travail se sont accrues, après une relative stabilisation ». La pause constatée entre 1998 et 2005 « apparaît ainsi comme une parenthèse dans une trajectoire ascendante entamée à la fin des années 80 », note la Direction de la recherche du ministère du Travail (Dares).Elle explique le retour à la tendance de longue période par la conjonction de deux phénomènes : un « rythme accru des changements organisationnels et [...] la

plus grande insécurité de l’emploi ressen-tie par les salariés ». Elle n’identifie, en revanche, pas d’impact inverse du ra-lentissement de l’activité économique, alors qu’il avait pesé entre 1998 et 2005.

Subir au moins trois contraintesPour arriver à ces conclusions, le minis-tère du Travail a enquêté auprès d’un échantillon représentatif des personnes en emploi de 15 ans ou plus. Il leur a demandé quelles contraintes elles su-bissaient dans leur travail ainsi que leurs marges de manœuvre. Premier constat : la proportion de salariés dont le rythme de travail subit au moins trois contraintes (avoir un rythme imposé par un contrôle ou un suivi informati-sé, ne pas pouvoir quitter son travail des yeux, devoir se dépêcher souvent ...) est passé de 5,8 % en 1984 à 35 % en 2013. Pas moins de 4 points ont été gagnés depuis 2005.Les ouvriers qualifiés sont ceux qui ont été le plus touchés, passant de 8,7 % à 54 %. La proportion de cadres concer-nés par au moins trois contraintes de rythme est à l’opposé la plus faible (25,6 % contre 3,5 % en 1984). Les régimes horaires de travail sont res-tés, eux, relativement stables depuis 30 ans, « même si moins de salariés ont aujourd’hui les mêmes horaires tous les jours », note la Dares, qui, de façon sur-prenante, n’évoque pas le développe-ment du forfait-jours.Deuxième constat inquiétant : les contraintes physiques ont aussi aug-menté depuis 2005, confortant le mou-vement constaté sur longue période. En 1984, 14 % des salariés déclaraient être exposés à au moins trois types diffé-rents de ces nuisances (bruit intense, fumées ou poussières, produits dange-reux ...). Ils sont maintenant plus d’un sur trois (34,3 % contre 32,7 % en 2005 et 12,1 % en 1984). L’évolution interroge sur la réalité des efforts de prévention

des entreprises, que la réforme des retraites de 2013 a prévu d’intensifier.Progression de l’usage de l’informatiqueDu côté des évolutions technologiques, le fait marquant reste évidemment la progression de l’usage de l’informa-tique « à un rythme rapide », y compris maintenant dans des secteurs comme le commerce. « 71 % des salariés l’utilisent dans leur travail contre 60 % en 2005 et 51 % en 1998 », constate le ministère du Travail qui souligne la multiplication des types d’outils utilisés : ordinateur fixe, portable, boîte à lettres électronique professionnelle, internet, intranet, télé-phone... Les cadres sont évidemment en première ligne en la matière.Dans ce contexte, le climat dans lequel les salariés font leur travail est traversé de courants différents. Il y a dans les entreprises une progression des coopé-rations entre salariés qui « explique pour une large part qu’en dépit de l’augmenta-tion des contraintes de rythme de travail, moins de salariés se déclarent souvent obli-gés de se dépêcher ». Mais dans le même temps, de plus en plus de personnes interrogées déclarent « vivre des situa-tions de tension » ou subir le manque d’effectifs.Surtout dans les contextes de réorgani-sations et chez les plus précaires. Les salariés sont aussi plus nombreux à constater une diminution sensible de leurs marges de manoeuvre entre 2005 et 2013. Si le bilan reste positif, c’est parce que leur baisse n’atteint pas les gains réalisés en la matière entre 1991 et 1998. A noter aussi une montée des pressions émotionnelles pour les sala-riés en contact avec le public.Et le fait que le mouvement d’intensi-fication du travail a particulièrement touché la fonction publique, soumise à ce qui s’est appelé la Révision générale des politiques publiques sous Nicolas Sarkozy.

Leïla de Comarmond - Les Échos

* Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques - Ministère du Travail, de l’emploi et du dialogue social

Les conditions de travail des salariés se sont dégradées depuis 2005Enquête Dares* juillet 2014 sur les conditions de travail

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ACTUALITÉSACTUALITÉS LE RÉVEIL

C’est dans la plus grande discrétion qu’ont été publiées, le 2 juin, les Recom-mandations du Conseil concernant le pro-gramme national de réforme de la France pour 2014. Aucun média, aucun parti ne s’en sont fait l’écho auprès de nos concitoyens.Pourtant, ces « recommandations » constituent la feuille de route fixée, par la Commission européenne, à la France pour les mois à venir.Dans ce document, nous pouvons lire que « La France doit déployer des efforts sup-plémentaires pour se conformer à la recom-mandation du Conseil ».

Réduction des dépenses publiques C’est ce que le gouvernement a annoncé avec son plan de 50 milliards d’économie. C’est la fameuse contrepartie du « pacte de responsabilité » pour ne pas faire ex-ploser le déficit. À ce pacte de responsabi-lité peu efficace sur la compétitivité, il est désormais demandé d’ajouter une nou-velle réduction drastique des dépenses publiques.Pratiquer des coupes sombres dans les dépenses publiques lorsqu’un pays est déjà en période de stagnation écono-mique est une politique qui ne peut me-ner qu’à la récession (Le réveil, juin 2014). C’est en outre contre-productif puisque la récession entraîne une baisse des recettes fiscales souvent supérieure aux économies réalisées par la réduction des dépenses. En d’autres termes, cela revient paradoxalement à creuser le déficit que l’on prétendait combler…

Redéfinir « la portée de l’action des pouvoirs publics »Autrement dit : accentuer les privatisa-tions, la destruction de notre système de santé, de nos services publics, auxquels les Français sont majoritairement attachés.Le texte va plus loin concernant le sys-tème de santé puisqu’il explique que « d’importantes économies à court terme

ne peuvent être réalisées sans une réduction significative de l’augmentation des dépenses de sécurité sociale. »Il faut donc s’attendre à une baisse mas-sive des remboursements de santé, puisque la branche maladie représente quasiment 50 % des dépenses de la Sécu-rité sociale, ainsi qu’à une privatisation de la Sécurité sociale, via le recours croissant aux mutuelles privées, présentées comme solution à tous les problèmes.Pour la branche vieillesse, il s’agit bien évidemment des retraites qui sont en ligne de mire. Après la hausse de l’âge de départ à la retraite, vient maintenant le gel du montant des pensions.Pour le chômage, le texte parle de «dégres-sivité des allocations». Cela augure d’une baisse plus importante et plus rapide des allocations dans le temps.

Simplifier les différents échelons administratifsVoilà l’une des motivations avancées par les pouvoirs publics pour adopter une nouvelle loi de décentralisation. Il faut pourtant noter qu’aucune des lois pré-cédentes de décentralisation n’a apporté d’économies substantielles. Bien au contraire, les coûts des collectivités locales ont généralement eu tendance à exploser.Cette injonction de réduction des éche-lons administratifs témoigne donc, non seulement que la République française n’existe plus comme État souverain et indépendant, mais aussi qu’en dépit de leur nom, les « recommandations » ont aussi des visées géopolitiques. Ce qu’elles visent, ce ne sont pas seulement des économies budgétaires, c’est aussi, et ni plus ni moins, que le démantèlement des grands États nations d’Europe, au premier rang desquels la France, avec des grandes régions qui traiteront directe-ment avec Bruxelles. François Hollande, lui-même le 2 juin, a parlé d’ailleurs de «régions à taille européenne».Dans le chapitre coût du travail, «il convient que le salaire minimum continue

d’évoluer d’une manière propice à la compé-titivité et à la création d’emploi.»En d’autres termes, arrêter les revalori-sations du SMIC et commencer à mettre en œuvre sa suppression, l’objectif étant sa baisse à terme.Ne doutons pas que des campagnes de presse se préparent pour expliquer au bon peuple que le SMIC est « un frein à la croissance » et que sa suppression permet-trait de « libérer les énergies »…«Une attention particulière devrait être accordée aux dispositions réglementaires du Code du travail ou aux règles comptables liées aux seuils spécifiques en matière d’ef-fectifs, qui entravent la croissance des entre-prises françaises »C’est exactement ce que « propose » Fran-çois Rebsamen, le ministre du Travail, de l’emploi et du dialogue social.

Accroître la souplesse des conditions de travail en cas de difficultés économiques provisoiresEt ainsi, poursuivre la remise en cause de l’existence même des contrats de travail à durée indéterminée (CDI) et accroître la précarisation des contrats de travail !«Une majorité reste confrontée à d’impor-tantes barrières à l’entrée ou à l’exercice (par exemple les taxis, le secteur des soins de santé, les notaires et, plus généralement, les profes-sions juridiques). »Il faudra donc déréguler tous ces secteurs, déjà mis à mal par les traités européens.«Les tarifs réglementés restent d’application pour les ménages et, en ce qui concerne l’élec-tricité, ils sont fixés en dessous des niveaux de coûts et l’accès pour les autres fournisseurs est limité. »La hausse des tarifs et la privatisation d’EDF sont donc programmées ; à l’exemple du gaz qui a augmenté de 60 % en 9 ans.La Commission européenne a d’ailleurs le culot de prendre l’Espagne comme mo-dèle de pays qui a appliqué ces recettes. Avec le succès que l’on connaît !

Exigences de la commission européenne du 2 juin :La France en souffrance

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LE RÉVEIL ACTUALITÉSACTUALITÉS

«Dans le secteur ferroviaire, des barrières à l’entrée continuent d’entraver le bon fonction-nement du marché.»C’est la privatisation de la SNCF et sa mise en concurrence forcée qui sont au programme du gouvernement.

Pour résumer, nous l’avons bien compris, aucune de ces mesures visant prétendu-ment à la réduction du déficit budgétaire et à la relance économique n’aura l’effet escompté.Non seulement parce que vouloir baisser les dépenses publiques est une absurdité

en période de stagnation économique, mais parce que ces mesures ne peuvent régler en rien le problème de compétiti-vité de la France.Les inspirateurs de ces mesures n’étant pas stupides, ils ne se font aucune illu-sion sur leur inefficacité pour réduire le déficit budgétaire et relancer la crois-sance. Leurs objectifs ne sont pas là. Ce qui est en réalité visé, c’est le démantèle-ment des États nations et la destruction de tous les acquis sociaux obtenus par les peuples européens depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Pour la France, ce programme voulu par la C.E. passe par la suppression des départements et des communes, une décentralisation de plus en plus poussée, la mise en pièces de notre système social et la disparition de nos services publics.C’est le démantèlement par étapes de la République française, la destruction com-plète du programme du Conseil national de la Résistance et les acquis sociaux que les peuples ont obtenu grâce à leur lutte.

Magalie Couzeix

Le récent mouvement des cheminots pose de vraies questions quant au devenir de la SNCF. Avec force, les travailleurs ont mis sur la place pu-blique les véritables enjeux auxquels est confronté le transport ferroviaire dans notre pays. Pour comprendre cet enjeu et le rôle néfaste des orien-tations de la commission européenne et des décisions gouvernementales, un peu d’histoire …

1983, la SNCF devient un « établisse-ment public industriel et commercial » (EPIC). Elle doit répondre aux obligations mentionnées dans un cahier des charges et suivre une politique précisée par un plan d’entreprise. La privatisation est en marche.1993, privatisation de British Rail qui coute des milliards de livres aux contri-buables britanniques. Une cinquantaine d’entreprises se la partage à bon prix, au détriment de l’État. Les sociétés privées n’investissent pas dans le réseau, n’amé-liorent pas la sécurité, leur priorité est de dégager rapidement les plus gros profits possibles. L’accent est mis sur la baisse des coûts, en multipliant le recours à la sous-traitance (personnel peu / pas qua-lifié = salaire le plus bas possible). Ce qui aboutit aux grandes catastrophes ferro-viaires de Paddington en 1999 (31 morts), d’Hatfield en 2000 (4 morts)) et de Pot-ter’s Bar en 2002 (7 morts).

1997, création de Réseau ferré de France chargé entre autre de la dette de la SNCF. 1998, Railtrack, la société privée gestion-naire du réseau ferré britannique, réalise un bénéfice de 800 millions d’euros, aucun de ses devoirs n’est rempli. Au-jourd’hui, en Grande-Bretagne, non seu-lement les trains sont systématiquement en retard et les risques d’accidents réels et permanents mais en plus, ce mode de transport coute très cher. Sur un trajet de même kilométrage, le billet coute 2,5 fois plus cher qu’en France.2003, dix ans après la privatisation de British Rail, le gouvernement britan-nique reprend la main sur son système de transport ferroviaire, la reprise des dettes de Railtrack (9,3 milliards de livres) et l’État reverse à la nouvelle société dont il est majoritaire 21 milliards de livres. Bel exemple de socialisation des pertes.Sur les 10 prochaines années, la société d’état Network chiffre à 54 milliards la re-mise en état du réseau ferré britannique. Elle prévoit le licenciement de 3 000 des ses 14 000 employés, pour diminuer ses coûts, rentabilité financière oblige. Merci la privatisation et la mise en concurrence totale, libre et non faussée du transport ferroviaire…C’est exactement le même schéma que le gouvernement français souhaite mettre en place dans notre pays.L’exemple catastrophique sur tous les plans du Royaume-Uni sur cette ques-tion n’impressionne pas le gouvernement Hollande / Valls. Au contraire, il souhaite

SNCF : la casse du service public marcher de force vers l’objectif ordonné de la Commission européenne. A savoir, faire basculer vers le privé les aspects les plus rentables de notre transport ferro-viaire.Pourtant, exit la qualité du service rendu, la sécurité des passagers et des person-nels, exit le statut des cheminots qui est une garantie essentielle pour la protection non seulement des personnels mais aussi de la pérennité de la présence publique dans les chemins de fer.La catastrophe de Brétigny-sur-Orge n’est qu’un avant gout de ce qui nous attend dans un futur proche. Le démantèlement du système ferroviaire français et euro-péen qui vise à une privatisation massive des différents réseaux ferrés porte en lui les pires présages néfastes.Les cheminots, en engageant le fer contre cette réforme non seulement se portent au premier rang de la défense des intérêts des personnels de la SNCF mais surtout, ce sont eux qui défendent avec courage un vrai service public ferroviaire avec en son cœur la priorité aux transports col-lectifs de haute qualité dans un cadre de sécurité maximum à tarif acceptable et normal.Cette lutte des travailleurs du rail en appelle d’autres, plus fortes, plus larges, avec un soutien des usagers à la hauteur des besoins et des exigences de chacun.Merci donc à ceux qui ne s’en laissent pas compter par les tromperies du gou-vernement et qui ont réellement à cœur la défense d’un vrai service public ferré.

Hervé Corzani

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ACTUALITÉSACTUALITÉS LE RÉVEIL

M. Hollande et M. Valls en ont décidé, l’américain General Elec-tric va récupérer Alstom. Ainsi, les élucubrations de Montebourg sur le patriotisme industriel, la cohé-rence de l’appareil productif fran-çais, la protection des entreprises stratégiques pour notre pays n’au-ront été au final que de l’agitation stérile pour endormir l’opinion publique et arranger au mieux les intérêts du grand patronat.

En fait le dépeçage d’Alstom, ce n’est qu’une affaire de gros sous. Bouygues décide de sortir du capital d’Alstom (il en détient 30 % des actions), il considère les dividendes qu’il en tire insuffisantes et ce malgré des profits confortables.L’État se propose de racheter 20 % de ces actions au prix de 35 € minimum à Bouygues, 7 € de plus que le prix actuel du marché, réservé à tout vendeur d’ac-tion Alstom autre que le groupe de BTP. C’est une véritable arnaque, l’État va ver-ser à Bouygues 500 millions d’euros de plus que ce que ne lui aurait rapporté le marché et à ce pactole s’ajoute un divi-dende exceptionnel de 250 millions

d’euros versé par Alstom.Au final, une superbe opération finan-cière réalisée par le géant du BTP.Enfin cette prétendue prise de part de l’État n’influera en rien sur la possibi-lité de notre pays de peser sur les déci-sions stratégiques d’Alstom démantelé : encore faudrait-il que le gouvernement ait cette volonté !Par exemple, le contrôle de notre pays ne pourra plus s’exercer sur les acti-vés turbines à gaz et à vapeur (hors nucléaire) si stratégique pour Alstom et pour la France, General Electric en devient détenteur à 100 %. Ce n’est que dans les activités « turbines à vapeur nucléaires » que l’État français gardera la main, les brevets nucléaires Arabelle étant logés dans une société à part.Et dans cette affaire, qu’en est-il de la fameuse tirade sur le « patriotisme éco-nomique » ?En 2004, Nicolas Sarkozy avait déjà procédé à une nationalisation partielle d’Alstom pour rendre cette entreprise suffisamment profitable pour intéres-ser Bouygues. A la suite en 2006, Bouygues devient actionnaire à hauteur de 30 % d’Alstom, depuis, en huit ans donc, Alstom a versé au porteur du BTP, 1,5 milliards d’euros en dividendes. De 2007 à 2012 Alstom

ALSTOM : pressé comme un citron, démantelé pour le plus grand profit de General Electric et de Bouygues

a versé 2,170 milliards d’euros en inté-rêts payés aux banques et en dividendes versés aux actionnaires.L’entrée de l’État dans le capital d’Als-tom ressemble à une opération qui per-met à Bouygues d’en sortir de la façon la plus profitable possible.

Il semble bien que cette opération ne soit que la partie visible d’une OPA visant à permettre que les profits du géant du BTP soient gonflés au maxi-mum. Hollande, Valls, en fait se sont encore une fois agenouillés devant les exigences capitalistes, et ne répondent, ce faisant qu’aux injonctions du grand patronat. Ne trouve grâce à leurs yeux que la logique du profit maximum dans le plus court laps de temps au détriment des intérêts de notre pays, de notre in-dépendance, de nos industries (fussent-elles de pointes technologiquement et stratégiquement) et enfin des intérêts de notre peuple, des salariés.MM. Hollande et Valls, le Parti socia-liste portent ainsi une très, très lourde responsabilité, celle de déposséder notre pays, après Mittal d’une partie des capacités de maîtriser les moyens industriels, d’ingénierie, d’intelli-gence qui devraient être au service de la construction de l’avenir de la société. Leur pratique, leurs décisions, auront de très lourdes conséquences pour notre pays et notre peuple.Il en est ainsi pour des dizaines d’entre-prises qui sont le fleuron de nos indus-tries, tant du point de vue de leur maî-trise technologique que de leur place, au cœur du dessin du futur de notre pays.Les spécialistes (Hollande, Valls, Mon-tebourg) de la génuflexion devant les patrons et le capitalisme sont en oppo-sition et en confrontation directe aux intérêts du pays et du peuple. Il y a né-cessité urgente de leur faire recouvrer la raison, il en va de l’avenir, du rôle, de la place, de la grandeur de la France.

Hervé Corzani

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 20148 -

place importante, un peu plus de 30 % du total en Espagne, en Italie ou aux États-Unis, et presque 60 % en France pour les 5 000 personnes concernées.L’une des raisons généralement avan-cées pour expliquer que les plus riches ont vu leurs revenus salariaux forte-ment progresser est qu’avec la mon-dialisation, les plus qualifiés, capables d’en profiter le plus, en auraient touché les bénéfices. Si c’était le cas, la progres-sion des salaires des mieux payés aurait dû se retrouver avec à peu près la même intensité dans tous les pays où la mon-dialisation a progressé. Or, ce n’est pas ce que l’on peut constater, les disparités sont grandes entre les pays.Une autre explication tient au poids croissant de la finance, de ses rému-nérations pharaoniques et du mauvais exemple qu’elle donne aux autres sec-teurs. De fait, une étude du sociologue Olivier Godechot a montré qu’entre 1996 et 2007, la moitié de la progres-sion des inégalités en faveur des très hauts revenus s’expliquait par le boom des rémunérations dans la finance.

Le FMI et l’OCDE séduitsMais, insistent les experts de l’OCDE, une autre cause importante a joué son rôle : les politiques fiscales ont été de plus en plus favorables aux plus riches, aussi bien par l’abaissement des tranches les plus hautes d’imposi-tion que par la diminution de la taxa-tion des profits des entreprises et des dividendes. La crise a certes stoppé la tendance et même réorienté les poli-tiques fiscales vers un accroissement de l’imposition des plus riches, mais, faisant siennes les conclusions du Fonds monétaire international (FMI) placé sur la même longueur d’onde, l’OCDE conclut qu’ « il existe encore des marges de manœuvre pour accroitre les taux supérieurs afin de maximiser les recettes fiscales ».C’est exactement l’orientation que propose Thomas Piketty lorsqu’il sou-haite, à la fin de son livre, voir la mise en œuvre d’un impôt progressif sur le capital (par exemple 0 % en deçà d’un million d’euros de fortune, 1 % entre

LE RÉVEIL ACTUALITÉSACTUALITÉS

Piketty impose son analyse des inégalitésL’étude historique et comparée de Thomas Piketty bouleverse la ré-flexion économique sur les inégalités.

Le capital au XXIe siècle a fait un tabac dès sa sortie en avril aux États-Unis. Et on parie que le succès sera identique dans les 25 pays qui ont acheté les droits du livre. Il arrive au meilleur moment sur le plan politique.Le succès intellectuel du livre tient d’abord à la qualité du travail produit par l’économiste français : une remar-quable étude empirique, sur plusieurs siècles et dans plusieurs pays, qui dé-montre que les inégalités de revenus et de patrimoine sont en train d’exploser dans les grands pays industrialisés. Il suggère même qu’elles pourraient revenir vers les niveaux du capitalisme sauvage de la fin du XIXe siècle.

Une nouvelle idée dominanteLa force des travaux de Thomas Piketty est liée au fait qu’ils sont en train de s’imposer comme la nouvelle idée dominante. Une preuve récente en a été fournie par une étude publiée en

mai par l’OCDE, institution qui regroupe les vieux pays industrialisés et quelques émer-gents, l’un des en-droits où s’établit la « bien-pensance » économique mon-diale.Utilisant les bases statistiques regrou-pées par Piketty et le groupe d’écono-mistes qui accom-pagne son travail, l’institution com-mence par rappeler combien les inéga-lités ont progressé au cours des trente dernières années, États-Unis en tête. La part des revenus accaparés outre-At-lantique par le 1 %

les plus riches a pratiquement doublé, pour atteindre quasiment 20 % du total. Une progression qui a, de plus, surtout profité aux plus riches. En effet, tou-jours aux États-Unis, le 0,1 % des plus fortunés accapare 8 % des revenus, à comparer aux 4 % à 5 % détenus au Canada, au Royaume-Uni et en Suisse, et aux 3 % environ en Australie ou en France. On comprend mieux pourquoi l’Oncle Sam, ses politiques, ses jour-naux et ses économistes se sont sentis particulièrement concernés par les ana-lyses de Thomas Piketty.

SupersalairesL’OCDE souligne également que même pour les 10 % les plus riches, ce sont les revenus du travail qui représentent la source prioritaire de leurs revenus. Il faut monter sur les plus hauts barreaux de l’échelle sociale, chez le 0,01 % pour que les revenus du capital prennent une

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 2014 - 9

ACTUALITÉS ACTUALITÉS LE RÉVEIL

Ces trois courbes en « U » résument par-faitement la thèse du livre de Thomas Piketty. Elles indiquent l’évolution de la valeur des patrimoines privés exprimés en années de revenu national. En clair, on se rapproche dangereusement de l’ampleur des inégalités patrimoniales observées pendant la Belle Époque. Jusqu’à la Première Guerre mondiale, les patrimoines privés, qu’ils soient immobiliers, financiers ou profession-nels, avaient une valeur équivalente à six ou sept années de revenu national. Un niveau considérable. D’autant plus que ces valeurs sont nettes de dettes.

Dans les années 1950, on était retom-bé à deux années de revenu national. Mais depuis, le capital revient en force, jusqu’à côtoyer les sommets atteints à la fin du XIXe siècle. Comme le montre Thomas Piketty, cela s’explique par le retour à un régime de croissance éco-

nomique relativement lente. Cette crois-sance poussive donne « une importance disproportionnée » aux patrimoines issus du passé. Car ce que rapporte le capital en une année, sous forme de profits, de dividendes, d’intérêts ou en-core de loyers, augmente plus vite que

l’accroissement annuel de la production et des revenus. Reste à savoir si le U va se transformer en J…

Alternatives EconomiquesJuin 2014

UNION EUROPÉENNE Selon la Croix-Rouge, le niveau de pauvreté est proche de celui de la seconde guerre mondialeEn 2012, selon Eurostat, un quart de la population était menacée de pauvreté ou d’exclusion sociale, soit environ 125 millions de personnes.Anita Underlin, directrice de la Croix-Rouge Europe, a fait état de la situation de pauvreté en Europe : le niveau dans certains pays atteint celui de la Seconde Guerre mondiale.Environ 43 millions de personnes souffrent de pauvreté dans l’UE, soit près de 10 % de la population. La distri-bution alimentaire a augmenté de 75 % (depuis 2009) pour l’ensemble des 52 pays européens où est présente la Croix-Rouge.

Au Royaume-Uni (pays où le nombre de banquiers ayant dépassé le million d’euros de rémunération atteint des sommets) le nombre de personnes ayant recours à la distribution alimen-taire (350 000) a triplé depuis 2009.Pour la 1re fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la Croix-Rouge a dû sollici-ter des dons de nourriture. C’est la plus grande campagne de distribution alimentaire depuis la Seconde Guerre mondiale.Des pays comme l’Italie, la Grèce, l’Es-pagne ne sont pas épargnés. La Croix-Rouge espagnole aide 1,2 million de personnes en aide alimentaire alors

que selon Eurostat, ces pays ne seraient pas à risque.La Roumanie, la Bulgarie et la Croatie sont au plus haut risque de pauvreté extrême, et les gouvernements sont in-capables d’aider leurs populations, tous les budgets publics ayant été réduits.

Et dire que l’Union européenne s’est fixée comme objectif de ramener à 20 millions le nombre de personnes vivant dans la pauvreté d’ici 2020.

Le retour en force du capital

1 et 5 millions, 2 % au-delà, etc). L’idéal serait qu’il soit mis en œuvre au niveau mondial. Ou au moins au niveau régio-nal : l’Europe pourrait le faire, les États-Unis également.

Que l’idée d’augmenter les impôts sur les riches soit aujourd’hui jugée perti-nente dans les couloirs du FMI et de l’OCDE, aussi bien qu’auprès de Joseph Stiglitz et Paul Krugman, souligne com-

bien, avec son livre, Thomas Piketty est en train de révolutionner la réflexion économique sur les inégalités.Christian Chavagneux - Alternatives économiques - Juin 2014

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LE RÉVEIL INTERNATIONALINTERNATIONAL

Les représailles massives décidées par Tel-Aviv, après l’assassinat de trois jeunes israéliens par des extrémistes non identifiés pour l’instant, ont mis le feu aux poudres. S’en est suivi le kidnapping et le meurtre d’un jeune Palestinien par des fanatiques Israé-liens et toute la région s’est embrasée. Le Hamas riposte à coup de missiles lance-roquette et cible des villes israé-liennes. Le système de défense anti-aé-rien israélien surnommé « Dôme de fer » financé par Washington depuis 2009, en plus des 3 milliards d’aide militaire annuelle, semble pour l’instant fonc-tionner et protéger la population israé-lienne. Selon France infos et France 2 qui se sont rendus à Tel-Aviv, la capitale éco-nomique du pays « Là-bas, tout se passe presque normalement (…) les plages sont toujours remplies de touristes. Ils sont sim-plement perturbés par le bruit des roquettes interceptées… »

Mettre un terme à la colonisationPendant ce temps le gouvernement Netanyahu allié à l’extrême-droite fana-tique, a convoqué 45 000 réservistes et semble prêt à lancer une offensive de plus grande envergure. En fait il agit comme s’il voulait porter un coup d’ar-rêt définitif à l’espoir né de la réunifica-tion des deux principaux mouvements palestiniens. Objectif : maintenir sous son joug l’ensemble du territoire, as-phyxier les populations et l’administra-tion palestinienne, discréditer ses diri-geants et poursuivre tranquillement la colonisation par des implantations nou-velles. Car il semble bien que c’est là le

point central de cette nouvelle flambée de violence. Samedi 5 juillet, l’éditorial du quotidien Libération notait : « Il reste qu’aujourd’hui, Israéliens et Palestiniens payent des années de blocage du processus de paix (…) L’État hébreu, premier res-ponsable de cet enlisement, croit pouvoir poursuivre son refus de tout compromis. Les gouvernements multiplient année après année, les implantations de colonie empêchant de fait la création d’un État palestinien viable… »C’est également l’avis de Ury Avnery, figure du camp de la Paix en Israël qui dans l’ Humanité du 10 juillet exprimait sa crainte de la montée d’une extrême-droite (présente dans le gouvernement NDLR) hostile à tout horizon de paix et estimait qu’il « est évident que le refus obs-tiné de mettre un terme à la colonisation de la Cisjordanie est en cause… » En attendant, les grandes puissances, qui auraient pourtant de réels moyens de pression se taisent et continuent de se taire malgré l’inquiétude de l’ONU qui s’alarme d’une violation possible des lois de la guerre : « Nous avons reçu des rapports troublants sur le fait que nombre de victimes y compris les enfants, sont le résultat de frappes sur des maisons » a déclaré la porte-parole du Haut-Com-missariat aux Droits de l’Homme des Nations-Unies, Ravina Shamdasani. Selon elle, « ces rapports appellent à des doutes sur le fait que ces frappes sont conformes aux lois humanitaires interna-tionales et aux lois internationales sur les droits humains. » Palme de la honte à François Hollande qui a « condamné fermement les agres-

ISRAËL/PALESTINEUn peuple sous les bombes Alors que Netanyahu déclenche une offensive terrestre sans précédent depuis des années, les bombardements israéliens sur Gaza ont déjà fait des centaines de morts et des milliers de blessés essentiellement dans la population civile. Femmes, enfants, vieillards palestiniens sont sous le feu de Tsahal en toute impunité.

sions contre Israël », exprimé sa solida-rité envers Netanyahu et jugé « qu’il appartient au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population. » Pendant ce temps, les palestiniens meurent.

Contraindre Tel-AvivToutes les réunions du Conseil de sé-curité de l’ONU n’y feront rien. Il faut contraindre Tel-Aviv. Netanyahu ne connait que la force. Il faut donc que l’ONU, les pays occidentaux si prompts à réagir parfois, prennent des sanctions financières et politiques à l’égard de l’État israélien.Washington doit stopper son aide mili-taire. Des sanctions financières et d’em-bargo s’imposent pour faire cessez le massacre.

JP.Delahaye

MANIF INTERDITE :UNE VIEILLE TRADITION

DU PS…

Un état étranger - Israël - dispose en France de trois

représentations permanentes : la très officielle ambassade

de Tel-Aviv, le Conseil représentatif des Institutions

juives en France (CRIF) et le gouvernement de

M. Valls aux relations familiales, très proches des autorités

israéliennes. Ceci expliquant cela, on comprend mieux pourquoi la manifestation

de solidarité avec le peuple palestinien, samedi 19 juillet

à Paris, a été interdite. Le parti socialiste renoue

ainsi avec une vieille tradition colonialiste datant de

la guerre d’Algérie.

JOSÉ FORT

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 2014 - 11

INTERNATIONALINTERNATIONAL LE RÉVEIL

En 1999, avec un accord signé par Yas-ser Arafat, l’Autorité palestinienne confie l’exploitation de Gaza Marine à un consor-tium formé de British Group et Consoli-dated Contractors (compagnie privée palestinienne), avec respectivement 60% et 30% des actions, dans lequel le Fonds d’investissement de l’Autorité palesti-nienne a un pourcentage de 10%. Deux puits sont creusés, Gaza Marine-1 et Gaza Marine-2. Mais ils n’entrent jamais en fonction, car bloqués par Israël , qui veut tout le gaz à des prix cassés. Par l’inter-médiaire de l’ex-Premier ministre Tony Blair, envoyé du « Quartet pour le Moyen Orient », est préparé un accord avec Is-raël qui enlève aux Palestiniens les trois quarts des futurs revenus du gaz, en ver-sant la part qui leur revient sur un compte international contrôlé par Washington et Londres. Mais, immédiatement après avoir gagné les élections de 2006, le Ha-mas refuse l’accord, en le qualifiant de vol, et demande sa renégociation. En 2007, l’actuel ministre israélien de la Défense, Moshe Ya’alon indique que «le gaz ne peut pas être extrait sans une opération militaire qui éradique le contrôle du Hamas à Gaza. »En 2008, Israël lance l’opération

« Plomb durci » contre Gaza. En sep-tembre 2012 l’Autorité palestinienne annonce que, malgré l’opposition du Hamas, elle a repris les négociations sur le gaz avec Israël. Deux mois après, l’ad-mission de la Palestine à l’ONU en tant qu’« État observateur non membre » renforce la position de l’Autorité pales-tinienne dans les négociations. Gaza Marine reste cependant bloqué, empê-chant les Palestiniens d’exploiter la ri-chesse naturelle dont ils disposent. En ce point l’Autorité palestinienne prend une autre voie. Le 23 janvier 2014, lors de la rencontre du président palestinien Abbas avec le président russe Poutine, est discutée la possibilité de confier au russe Gazprom l’exploitation du gisement de gaz dans les eaux de Gaza. C’est l’agence Itar-Tass qui l’annonce, en soulignant que Russie et Palestine entendent renforcer la coopération dans le secteur énergétique. Dans ce cadre, en plus de l’exploitation du gisement de gaz, on prévoit celle d’un gisement pétrolifère dans les environs de la ville palestinienne de Ramallah en Cisjorda-nie. Dans la même zone, la société russe Technopromexport est prête à participer

à la construction d’un site thermoélec-trique d’une puissance de 200 MW. La formation du nouveau gouvernement palestinien d’unité nationale, le 2 juin 2014, renforce la possibilité que l’accord entre Palestine et Russie parvienne à bon port. Dix jours après, le 12 juin, survient l’enlèvement des trois jeunes Israéliens, qui sont retrouvés tués le 30 juin : le ponctuel casus belli qui amorce l’opération « Barrière protectrice » contre Gaza. Opération qui entre dans la stratégie de Tel Aviv, visant à s’appro-prier aussi des réserves énergétiques de l’entier Bassin du Levant, réserves palestiniennes, libanaises et syriennes comprises, et dans celle de Washington qui, en soutenant Israël, vise le contrôle de tout le Moyen-Orient, en empê-chant que la Russie ne réacquière une influence dans la région.Un mélange explosif, dont les victimes sont une fois de plus les Palestiniens.

Manlio DinucciEdition du mardi 15 juillet 2014 deIl Manifesto - Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

GAZA

le gaz dans le viseurPour comprendre quelle est une des raisons de l’attaque israélienne contre Gaza il faut aller en profondeur, exac-tement à 600 mètres sous le niveau de la mer, à 30 Km au large des côtes. Là, dans les eaux territoriales palesti-niennes, se trouve un gros gisement de gaz naturel, Gaza Marine, estimé à 30 milliards de mètres cubes d’une va-leur de plusieurs milliards de dollars. D’autres gisements de gaz et pétrole, selon une carte établie par la U.S. Geo-logical Survey(agence gouvernementale étasunienne), se trouvent en terre ferme à Gaza et en Cisjordanie.

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LE RÉVEIL INTERNATIONALLE RÉVEIL INTERNATIONALINTERNATIONAL

le réveilIrakLe triple échec du recours à la force

Peut-on arrêter la quatrième guerre d’Irak ? Après l’offensive victorieuse des djihadistes dans le nord-ouest du pays, l’Irak entre dans sa quatrième guerre en trente ans : guerre contre l’Iran (1980-1988), guerre contre la coalition in-ternationale (1991), guerre contre les États-Unis et le Royaume-Uni (2003) et maintenant guerre entre Sunnites et Chiites.

Ce retour de l’Irak sur le devant de la scène cristallise en fait les rivalités entre l’Iran et l’Arabie-Saoudite, deux puissances régionales. Il reflète aussi les déviances du système international depuis la fin de la guerre froide en 1991 et interpelle notamment les Occiden-taux sur leurs responsabilités dans les interventions militaires, nécessaires ou désastreuses, dont l’Irak est le symboleLes bouleversements en Irak signent le triple échec du recours à la force depuis 2001. Échec de la « guerre contre le terrorisme », dont je n’ai cessé de dire qu’elle était un fantasme dangereux qui ne pouvait aboutir qu’à faire le jeu des extrémistes en leur conférant de la cré-dibilité.Deuxième échec : le changement de ré-gime par la force devait, en Irak comme en Libye, importer la démocratie dans les fourgons des armées. Résultat : des États tombent aux mains de factions instables ou d’un pouvoir sectaire qui remplace une oppression par une autre, dans l’organisation de l’armée et de l’ad-ministration.Troisième échec : celui de la construc-tion nationale au moyen de la force, comme en rêvent les ingénieurs poli-tiques américains. Dans l’Orient com-pliqué, il y a eu la tentation de faire

table rase pour construire de nouvelles nations. C’était ne pas voir qu’on ouvrait la boîte de pandore communautaire et que, tôt ou tard, on verrait toutes les frontières héritées de l’âge colonial remises en cause au nom des puretés ethniques, tribales ou confessionnelles.Il est nécessaire de rappeler ce diagnos-tic, non pour se glorifier d’avoir pré-venu, ce qui ne sert à rien, mais pour alerter sur les périls de l’avenir. S’il y a eu un triple échec de la force sur le terrain, il y a eu, malgré tout et de façon inquié-tante, un triomphe de la force dans les esprits.

Un monde sans gagnantsDeux logiques implacables sont à l’œuvre. Il y a, dans tout l’Occident, une tentation du recours à la force parce qu’elle est supposée rapide, simple et efficace face au choc des images et des émotions. La guerre tout entière change de sens. Des démocraties militarisées imposent une guerre de drones sans hommes ni pertes, d’un côté tout au moins. Il n’y a plus une année sans désir ou décision d’expédition militaire. En Libye, au Mali, en Centrafrique, en Sy-rie, en Irak aujourd’hui, c’est toujours la même logique qui veut que, dans le doute, on dégaine son arme.En même temps s’enracine au Moyen-Orient l’idée d’une force justificatrice et purificatrice qui doit venir à bout de tout ce qui est menaçant et étranger. La logique communautaire se nourrit de l’idée qu’on peut se séparer des autres par la force. Des raids de djihadistes sun-nites, peu nombreux mais bien entraî-nés, suscitent des enrôlements de masse de miliciens chiites et la mobilisation de peshmergas kurdes. Ce sont des sociétés entières qui se mettent sur le pied de guerre. Cet esprit guerrier nous conduits au bord de la désagrégation de l’ensemble du Moyen-Orient et de la communauté internationale aux points de vue de plus en plus irréconciliables. C’est un monde sans gagnants, où le seul enjeu est d’infliger plus de pertes aux autres qu’on en subit soi-même.L’urgence, c’est de préserver l’unité de la communauté internationale et de se

saisir de ce qui fait consensus, à savoir le risque de terrorisme international qui affecte les puissances. C’est l’occa-sion, peut-être unique, de rompre avec la « guerre contre le terrorisme » et de s’engager dans une vraie lutte contre ce fléau, qui doit être d’abord judiciaire, technologique, financière. Je crois que l’Europe et la France ont ici, à nouveau, une responsabilité particulière à exer-cer. La clé du succès de l’état islamique en Irak et au Levant (EIIL), c’est l’accès à des financements massifs, soit par des bailleurs de fonds complaisants, soit par des trafics transnationaux ou des rançons. Préserver l’unité du Moyen-Orient, c’est dépasser le clivage Sunnites-Chiites, qui devient la ligne de front communautaire de tout le Moyen-Orient, au sud de l’Irak par exemple, car cela entraînerait dans le chaos l’Iran, l’Arabie saoudite, la Jordanie et la Tur-quie. Une conférence régionale doit mettre autour de la table toutes les puis-sances autour de ce qui fait consensus pour chacune : la garantie des frontières dans un cadre de sécurité collective, comme l’Europe a essayé de le mettre en œuvre dans le passé.Le succès de l’EIIL, c’est une coalition hétéroclite rendue possible par la conju-gaison de l’effet de terreur et de l’effet de terrain, faisant des djihadistes soit des libérateurs, soit un moindre mal pour des populations sunnites qui se défient du régime en place. Il est encore temps d’imposer un gouvernement de récon-ciliation nationale, incluant toutes les communautés, ainsi qu’une réforme de l’administration et de l’armée donnant une place à chacun. C’est notre dernière chance avant la déflagration identitaire. Sachons la saisir.

Dominique de VillepinAncien Premier Ministre (2005-2007), ancien ministre des Affaires étrangères (2002-2004), Le Monde - 19 juin2014

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LE RÉVEIL - N° 802 - AVRIL 2014 - 13

le réveilPour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix

N° 805JUILLET-AOÛT 2014

LE CAHIER MÉMOIRE

Édité par le Réveil des combattants - 2 place du Méridien - 94807 Villejuif - Tél. 01 42 11 11 12

ÉDITO

ÉD

ITO Par Paul M

arkidèsPar Paul M

arkidès

Alors que 70 ans sont main-tenant passés depuis les grands combats libérateurs menés contre le nazisme et

le fascisme, en France et en Europe, il est temps de réexaminer et de relativiser les faits historiques sans en laisser de côtés les plus essentiels.Aussi bien, si nous réunissons dans un même hommage les troupes alliées qui débarquèrent en Normandie et en Provence tous les combattants de la Résistance réunis autour du conseil national de la Résistance, sans oublier le gouvernement provisoire de la Répu-blique française, présidé par le général de Gaulle, nous ne pouvons omettre

d’attirer l’attention sur les obstacles que celui-ci a rencontrés face au Président américain Roosevelt qui refusa long-temps de reconnaître la légitimité de la France libre.Et nous ne pouvons accepter que soit minimisé le concours déterminant de la Résistance qui assura la libération des trois quarts du territoire dans le cadre de l’avance des armées alliées et fi t obs-truction à la circulation des unités alle-mandes qui voulaient rejoindre le front de Normandie.Comme il n’est pas acceptable d’omettre de rendre l’hommage justifi é à l’armée soviétique et à la population de l’URSS, quelle que soit l’opinion que l’on

puisse avoir sur les dirigeants russes aujourd’hui, armée soviétique et popu-lation qui perdirent dans le combat anti-fasciste 27 millions des leurs.Les faits sont têtus et rien ne peut les modifi er. Et c’est pourquoi nous pour-suivrons leur réexamen dans le cadre de ces Cahiers Mémoire en les relativisant pour leur assurer la place qu’ils mé-ritent. Dans quelques semaines nous commémorerons le débarquement de Provence le 15 août 1944. Nous voulons espérer qu’il sera mis en valeur à la me-sure de ce qu’il fut : la plus importante action libératrice de l’année 1944 avec l’offensive soviétique lancée le 22 juin.

DES COMBATTANTS

Résistance et débarquement alliéRésistance et débarquement allié

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 201414 -

LE RÉVEIL DOSSIERDOSSIER

… On a beaucoup parlé du rôle de l’effet de surprise dans la réussite du débarquement…Jean-Pierre Azéma : L’effet de sur-prise a joué mais moins que la cou-verture aérienne. Le rapport entre la Luftwaffe et les Anglo-Saxons est totalement inversé par rapport à 1940, puisqu’il est de un pour soixante-dix. Dix mille avions et cinq mille navires sont engagés : c’est la plus grande opération am-phibie de tous les temps. Le second point à mentionner concerne les conséquences politico-militaires du jour J. La réussite du débar-quement ouvre une route vers le Rhin, la Ruhr et Berlin, ce qui est

d’une importance politique. A ce titre, les retombées politico-mili-taires du débarquement sont sans doute plus importantes que les affrontements strictement mili-taires. Relativiser le 6 juin, c’est aussi considérer que le D Day a été rendu possible par ce qui se déroulait sur le front russe. Le 22 juin, Staline lance une opération de l’Armée rouge de très grande envergure. Il empêche ainsi Hit-ler de ramener ses divisions de Panzer vers l’Ouest. C’est bien là l’enjeu politique majeur. Ne pas prendre en compte les Soviétiques, c’est risquer de ne pas comprendre le débarquement qui est une opé-

1944, 6 juin, 22 juin :Dates clés des combats libérateurs en Europe

ration, amphibie extrêmement ris-quée. Le D Day n’était concevable qu’avec un front russe qui tenait et retenait les forces allemandes.

Cette coordination entre les Alliés s’est décidée lors de la conférence de Téhéran en 1943, qui réunit Churchill, Eisen-hower et Staline. N’observe-t-on pas déjà des arrière-pensées et des rivalités qui préparent la guerre froide ?J.P Azéma : Il y eut peut-être l’amorce d’une course, car tout ce qui est militaire est politique, Clau-sewitz l’a dit mieux que moi. Mais ce qui prédominait d’un côté comme de l’autre était d’en finir avec le Reich. Un compromis his-torique s’était noué. Côté sovié-tique, on s’occuperait plus tard de la guerre de classe, c’est ce qui sera dit notamment aux communistes français. Tout s’est synchronisé à Téhéran et le « gentlemen agree-ment » a été respecté de part et d’autre. Il fallait seulement pas-ser le temps de la « raspoutitsa » pour que le terrain fut redevenu fiable pour les blindés soviétiques. L’Armée rouge déferle finalement le 22 juin, une date peu anodine puisqu’elle fait écho symbolique-ment à l’opération « Barbaros-sa (1)».

Peut-on comparer le 6 juin et 22 juin en termes militaires ?J.P Azéma : Les deux offensives sont extrêmement différentes. Le débarquement va avoir des conséquences politiques sou-daines extrêmement importantes, tandis qu’à l’Est les protagonistes se battent depuis trois ans. La logique n’est pas la même. Par ailleurs, les Américains veillent à la vie de leurs boys. Ils ne seront « que » 420.000 à perdre la vie durant toute la guerre, y compris sur le front du pacifique. Staline est bien moins économe. Les affronte-ments à l’Est sont épouvantables et

Extrait d’une interview de l’historien Jean-Pierre Azéma pour « l’Humanité ». Co-auteur d’un livre sur le débarquement de Normandie aux Éditions Perrin 2004.

1 / Nom de l’attaque lancée par le Reich contre l’Union soviétique le 22 juin 1941 – NDLR

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titanesques. Certes, ce qui se passe pendant la bataille de Normandie n’est pas rien, en particulier dans le bocage. Mais, d’un point de vue strictement militaire et en matière de pertes civiles, ce n’est pas com-parable.

Ce débarquement intervient après une série de « non-débar-quements ». L’opération « Ota-rie » des Allemands en Grande-Bretagne qui n’a jamais eu lieu, mais aussi le projet avorté de débarquement américain en Bretagne. Comment interpréter ce déplacement oriental du site du débarquement de la Bretagne vers la Normandie ?J.P Azéma : C’était une idée un peu vague lancée par les améri-cains : établir une tête de pont en Bretagne pour soulager le front russe à l’automne 1942 et lancer un message à Staline qui était en difficulté. Pour les anglais, c’était farfelu, et la machine de guerre américaine n’était pas prête. A

Téhéran, Eisenhower défendra par ailleurs un autre débarque-ment, oublié souvent mais deu-xième pince de la tenaille avec la Normandie : le débarquement en Provence, avec en ligne de mire l’enjeu logistique du port de Mar-seille. L’avantage des côtes nor-mandes choisies, outre ses plages était d’ailleurs l’absence de port, les Allemands prévoyant logique-ment une attaque des ports. D’une manière générale, les considéra-tions militaires prévalent dans le choix de la Normandie.

Quel rôle a joué la Résistance en France ?J.P Azéma : Elle a fait, et bien fait, le travail promis, à savoir le plan « Vert » qui consistait à couper les voies ferrés pour gêner l’ache-minent des renforts allemands. L’enjeu était de taille à J et J + 1, car les forces débarquées ne pouvaient compter que sur elles-mêmes pour assurer leur sécurité. Eisenhower et d’autres ont bien reconnu ce rôle.

… Vous écrivez que « la France de 1944 n’est pas l’Espagne de 1936 ». Le maintien de la paix civile serait donc lié à l’atten-tisme et à l’ambivalence des Français ?J.P Azéma : Les collaborateurs au-raient souhaité une guerre civile. Mais la France est atomisée, sans rapport avec l’Espagne de 1936. Il y a eu des éléments de guerre civile, des affrontements ici et là, l’épuration et des traces dans les mémoires, mais rien à voir avec ce qui s’est déroulé en Grèce après la libération. L’ambivalence joue en effet en faveur d’une aspiration à la libération qui ne se transforme pas en affrontements politico-sociaux. C’est une voie française intéressante lorsqu’on considère combien l’histoire de France a été souvent l’histoire de guerre franco-françaises…

Entretien réalisé par David Zerbib

Comment résumer ici les com-bats de la Résistance en Bretagne sinon par quelques exemples ? Dans les Côtes-du-Nord, moins de 5 % des jeunes requis pour le STO étaient partis travailler en Allemagne. Les autres avaient rejoint la Résistance. En quatre semaines, dans ce département, les FTP comptaient à leur actif cinquante embuscades, trente attaques de postes et deux cents sabotages divers.Dès le 29 juillet, les FFI avaient soutenu victorieusement un combat de dix heures au sud de Dinan. La Résistance armée dut, en flanc-garde, suppléer aux forces réduites des colonnes

américaines. Dans le Finistère, les formations FFI paralysèrent de nombreux mouvements de troupes ennemies. Les combats soutenus entre Carhaix et Châ-teaunef-du-Faou lui interdirent la grand-route qui commandait, le long de son épine dorsale, les communications avec le littoral.A Châteaulin, les FFI s’empa-rèrent, le 9 août, d’un pont miné sur l’Aulne, déchargèrent les fourneaux de mines et net-toyèrent la ville des Allemands qui s’y accrochaient. Le général Ramke, le bourreau de Brest où il s’était enfermé, assassina plus de cinquante personnes. Trente mille hommes de sa paradivision

Ne comptant que sur l’aide de faibles forces alliées, la Résis-tance de Bretagne dut faire face aux forces allemandes, d’autant plus redoutables qu’elles se sentaient en dan-ger. Cinquante mille FFI et FTP aidés des milices patriotiques et du concours insurrectionnel d’une large partie de la popu-lation, devaient donc vaincre aux côtés des blindés améri-cains et libérer un vaste terri-toire non sans que des erreurs de tactique de certains géné-raux américains n’aient permis à des troupes ennemies de s’enfermer dans les poches de Lorient et de Saint-Nazaire.

Le concours des maquis bretons lors du débarquement en Normandie (1)

1/ Extrait d’un article de Charles Tillon - Magazine n° 69 « Les années 40 »

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furent bloqués dans le secteur de Brest-Crozon. Il y perdit neuf mille hommes et dut avouer avant d’être condamné comme crimi-nel de guerre : « Soixante-dix pour cent de nos pertes furent causées par des FFI. »Dans le Morbihan, les FTP avaient mis les chemins de fer totalement hors d’usage dans plu-sieurs secteurs avant même le dé-barquement. De nombreux com-bats unirent tous les ésistants. Ils occupèrent Vannes dès le 4 août, tuèrent quatre-vingts Allemands, livrèrent plusieurs centaines de prisonniers aux Américains et poursuivirent la reconquête des bourgs et des villes en décou-vrant des charniers où les Nazis jetaient leurs victimes, comme

dans les citadelles de Port-Louis ou de Penthièvre…Dix mille FFI de plusieurs dépar-tements bretons assurèrent la couverture du flanc droit de la IIIe armée alliée étirée de Nantes à Orléans, évitant les infiltrations ennemies et la destruction de plu-sieurs ponts prévue dans les plans des Américains.Ainsi la Résistance armée joua le rôle d’une infanterie légère, mobile, possédant bien l’usage du terrain et redoutée des blindés en-nemis en mouvement. Elle fit des prisonniers et rétablit la légalité de la République dans les cantons libérés. Ce fut ainsi que, presque seule, la Bretagne se délivra au milieu d’un mouvement popu-laire qui donne l’exemple de ce

que sera, en général, la Libération. Eisenhower devait écrire : Par leur harcèlement incessant, les FFI de Bretagne avaient entouré les Alle-mands d’une atmosphère intenable de danger et de haine qui sapait la confiance de leurs chefs et le courage de leurs soldats… Devant l’avance des colonnes alliées, ces forces françaises tendaient des embuscades à l’ennemi battant en retraite, attaquaient les groupes isolés et les emplacements fortifiés et protégeaient les ponts. Leur tâche était, une fois que nos blindés les avaient dépassés, de net-toyer les localités où demeuraient des poches de résistance et de défendre les lignes de communication alliées. »

Le 6 juin 1944, quatre années après l’appel du 18 juin, les Alliés anglo-américains dé-barquaient en Normandie. Quatre années pendant les-quelles la Résistance organi-sée initialement par quelques milliers d’hommes et de femmes avait pris corps, avait grandi et s’était unie sans jamais cesser de verser son tribut de sang généreux. Elle avait créé son armée clandes-tine des Forces françaises de l’intérieur (F.F.I.) pour se pré-parer à aider ses alliés aux côtés des Forces françaises libres rassemblées à Londres et à Alger.

L’œuvre de la Résistancedans le second Front ouvertpar le débarquement en Normandie (1)

Le 6 juin 1944, la majorité des Français est activement de cœur avec la Résistance. Tous sont suspendus aux péripéties d’une prodigieuse opération de débar-

quement dont va dépendre le second front attendu depuis si longtemps. Cette guerre sur deux fronts, qui déjà obsédait Hitler en 1939, se réalise enfin contre les

1/ Extrait d’un article de Charles Tillon - Magazine n° 69 « Les années 40 »

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armées nazies, prises à présent entre deux formidables forces de guerre qui se donnent Berlin comme lieu de rencontre.Pour la masse des Français trau-matisée par la défaite et la trahi-son, la libération parait proche. De Gaulle nous l’a dit : « La libéra-tion est inséparable de l’insurrection nationale. »Le moment est donc venu de dé-barrasser le pays de l’occupation hitlérienne, dont la puissance s’appuie sur 300.000 soldats et autant de collaborateurs, de poli-ciers et de miliciens.

Un plan inapplicablePour faire face sans délai au débarquement des Alliés. Hitler devrait déplacer l’essentiel des forces de la Wehrmacht station-nées en France vers le front ouvert en Normandie. Mais la résistance organisée dans le pays le lui inter-dit. Toute l’armature territoriale de l’occupation serait mise en péril…Pour donner une idée de la force de la Résistance à la veille du débarquement, disons que les occupants considèrent un grand nombre de départements comme peu sûrs. Ils n’y circulent qu’en force, par exemple dans le Limou-sin. Paris, pour un nazi, c’est la forêt. A lui seul, le communiqué n° 77 du comité militaire natio-nal des FTPF pour la quinzaine précédant le débarquement relate trente-trois déraillements impor-tants.Le combat des groupes de francs-tireurs et partisans s’étend sur les Alpes au Nord. A Castellane, un de nos détachements délivre son chef et tue dix Allemands, tandis que dans le même temps la voie ferrée est coupée entre Lille et Hazebrouck, comme entre Per-pignan et Puigcerda. En Corrèze, l’ennemi laisse dix-sept morts, un char et deux automitrailleuses sur

la route 635.Les FFI de Saône et Loire, qui ont trente sept déraillements à leur actif depuis 1943, mettent quatre cents Allemands hors de combat à Azé au début de juin. En juin, les patriotes de l’Isère tueront plus de deux cents Allemands et miliciens. En Haute-Vienne, l’ennemi compte seize morts et vingt-sept blessés le 8 mai entre Saint-Yriex et Jasilhac, trente cinq morts le 20 mai à Cognac, qua-torze à Navalex, douze le 25 mai à Jarousse, cent vingt le 9 juin au Mouleydier. Mais les FTP perdent quarante deux des leurs dans ces derniers combats. (les communi-qués des actions les plus notables des FTPF étaient régulièrement publiés dans le journal France d’abord).En cas de débarquement, un plan prévoyait pour la France la mise en état de siège des villes, l’inter-diction de toute circulation, des fouilles et des internements mas-sifs appuyés par des fusillades. Ce plan général ne put être appliqué et l’occupant se montra incapable de s’opposer à la réalisation de l’action prévue par diverses orga-nisations à l’annonce du débar-quement.

Ils disciplinent leurs audaces ou leurs craintesAinsi la Résistance intérieure civile et militaire était en mesure d’apparaître en tant que partie prenante dans le combat com-mencé pour la Libération. C’est donc en l’appréciant en bloc, comme Clémenceau jugeait la Révolution française, qu’il faut ju-ger l’œuvre de la Résistance dans sa participation au second front et pour lui laisser son poids natio-nal et sa grandeur à la fin d’une période unique de notre histoire.

Extraits de l’ouvrage

d’Alain PeyrefitteC’était de Gaule -

Tome 2 - 1997

LE REFUS DU GÉNÉRAL DE GAULLE

de commémorer le 6 juin 1944

Alain Peyrefitte (l’air candide) : « Croyez-vous, mon général, que les Français comprendront que vous ne soyez pas présents aux cérémonies de Normandie ? »Charles de Gaulle (sévèrement) : « C’est Pompidou qui vous a de-mandé de revenir à la charge ? (Je ne cille pas). Eh bien, non ! Ma déci-sion est prise ! La France a été traitée comme un paillasson ! Churchill m’a convoqué d’Alger à Londres, le 4 juin, il m’a fait venir dans un train où il avait établi son quartier géné-ral, comme un châtelain sonne son maître d’hôtel. Et il m’a annoncé le débarquement, sans qu’aucune unité française n’ait été prévue pour y par-ticiper. Nous nous sommes affrontés rudement.Je lui ai reproché de se mettre aux ordres de Roosevelt, au lieu de lui imposer une volonté européenne (il appuie).Il m’a crié de toute la force de ses poumons : « De Gaulle, dites-vous bien que quand j’aurai à choisir entre vous et Roosevelt, je préfé-rerai toujours Roosevelt ! Quand nous aurons à choisir entre les Français et les Américains, nous préférerons toujours les Améri-cains ! Quand nous aurons à choi-sir entre le continent et le grand large, nous choisirons toujours le grand large ! » (Il me l’a déjà dit ; ce souvenir est indélébile).Et vous voudriez que j’aille commé-morer leur débarquement, alors qu’il était le prélude à une seconde occupa-tion du pays ? Non, non, ne comptez pas sur moi ! Le débarquement du 6 juin, ça été l’affaire des Anglo-Saxons, d’où la

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France a été exclue. Ils étaient bien décidés à s’installer en France comme en territoire ennemi ! Comme ils ve-naient de le faire en Italie et comme ils s’apprêtaient à le faire en Alle-magne !Ils avaient préparé leur AMGOT (1)

qui devait gouverner souveraine-ment la France à mesure de l’avance de leurs armées. Ils avaient imprimé leur fausse monnaie, qui aurait eu cours forcé (2). Ils se seraient conduits en pays conquis.C’est exactement ce qui se serait passé si je n’avais pas imposé, oui imposé, mes commissaires de la République, mes préfets, mes sous-préfets, mes comités de libération !Et vous voudriez que j’aille commé-morer leur débarquement, alors qu’il était le prélude à une seconde occu-pation du pays ? Non, non, ne comp-tez pas sur moi ! Je veux bien que les choses se passent gracieusement, mais ma place n’est pas là !Et puis, ça contribuerait à faire croire que, si nous avons été libérés, nous ne le devons qu’aux Américains. Ça reviendrait à tenir la Résistance pour nulle et non avenue. Notre défaitisme naturel n’a que trop tendance à adop-ter ces vues. Il ne faut pas y céder !M’associer à la commémorer d’un jour où on demandait aux Français de s’abandonner à d’autres qu’à eux-mêmes, non ! En revanche, ma place sera au Mont Faron le 15 août, puisque les troupes françaises ont été prépondérantes dans le débarquement en Provence, que notre première armée y a été associée dès la première minute, que sa remontée fulgurante par la vallée du Rhône a obligé les Allemands à évacuer tout le midi et tout le Massif central sous la pression de la Résis-tance.Et je commémorerai la Libération de Paris, puis celle de Strasbourg, puisque ce sont des prouesses fran-çaises, puisque le français de l’inté-rieur et de l’extérieur s’y sont unis, autour de leur drapeau, de leurs hymnes, de leur patrie ! Mais m’asso-

cier à la commémoration d’un jour où on demandait aux Français de s’abandonner à d’autres qu’à eux-mêmes, non !Les Français sont déjà trop portés à croire qu’ils peuvent dormir tran-quille, qu’ils n’ont qu’à s’en remettre à d’autres du soin de défendre leur indépendance ! Il ne faut pas les en-courager dans cette confiance naïve, qu’ils paient ensuite par des ruines et par des massacres ! Il faut les encou-rager à compter sur eux-mêmes !Allons, allons, Peyrefitte ! Il faut avoir plus de mémoire que ça ! Il faut commémorer la France, et non les Anglo-Saxons ! Je n’ai aucune rai-son de célébrer ça avec éclat. Dites-le à vos journalistes. »Il reprend : « Ceux qui ont donné leur vie à leur patrie sur notre terre, les Anglais, les Canadiens, les Amé-ricains, les Polonais, Sainteny et Tri-boulet (3) seront là pour les honorer dignement. »

13 mai 1964Espérant que le général aura ou-blié sa vive réplique, ou en tout cas aura oublié que c’est à moi qu’il l’a adressée, je remets la question sur le tapis, 10 mois et demi plus tard, le 13 mai 1964.Alain Peyrefitte : « Ne craignez-vous pas, si nous ne devons pas du moins quelques explications, que votre absence du 6 juin en Norman-

die soit mal interprétée ? »Charles de Gaulle : « Mais je vous l’ai déjà dit ! Il n’a jamais été ques-tion que j’y aille ! Je ne suis pas allé pour le cinquième anniversaire ; ni pour le dixième, ni pour le quin-zième. Pourquoi voulez-vous que j’y aille pour le vingtième ? Et j’ai demandé au Premier ministre de ne pas y aller non plus. D’ailleurs, le Premier ministre anglais n’y va pas. Jonhson n’ira pas non plus. Pour-quoi irions-nous ? »(Evidemment Wilson et Johnson n’y vont pas, parce que De Gaulle n’y va pas.)Alain Peyrefitte : « Finalement, Eisenhower et Montgomery, après avoir annoncé leur participation, ne sont pas venus… »

Après le Conseil du 10 juin 1964, le Général laisse percer encore son agacement : « Ces messieurs de la presse qui me reprochent de ne pas aller en Normandie 20 ans après, que faisaient-ils alors ? S’étaient-ils battus pour que la France recouvre sa liberté, pour qu’elle contribue à sa délivrance ? Que faisaient-ils pen-dant la guerre ? Ils ne se battaient ni en Normandie, ni ailleurs. La Libé-ration s’est passée sans eux. Elle s’est passée d’eux. »Et lui, il a dû se battre pour que le débarquement ne se passe pas complètement de la France libre.

1/ AMGOT : « Allied military government for occupied territories », gouvernement militaire allié pour les terri-toires occupés.

2/ Comme le révèlent leurs coloris et leur graphisme – très voisins de ceux du dollar – ces billets libellés en francs furent imprimés aux Etats-Unis, de février à mai 1944, par le Bureau of Engraving an Printing, qui est normalement chargé d’impri-mer les dollars américains et les autres docu-ments officiels du gouverne-ment fédéral. Etant fabriqués aux Etats-Unis, c’est le papier, l’encre, la matière, la pré-sentation et le format des dol-lars américains qui servirent de référence.

3/ Sainteny et Triboulet étaient respective-ment Ministre des Anciens Combattants et Ministre de la coopération.

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S’il a prononcé son discours de Bayeux le 16 juin 1946, ce ne fut pas pour commémorer le débar-quement du 6 juin, mais son débarquement sur les talons des Américains, le 16 juin 1944 à Bayeux.Il recule son fauteuil, cale son dos. Il a envie de parler. Charles de Gaulle : « Vous croyez que les Américains et les Anglais ont débarqué en Normandie pour nous faire plaisir ? Ce qu’ils voulaient, c’était glisser vers le nord le long de la mer, pour détruire les bases des V1 et des V2, prendre Anvers et, de là, donner l’assaut à l’Allemagne. Paris et la France ne les intéressaient pas. Leur stratégie, c’était d’atteindre la Ruhr, qui était l’arsenal, et de ne pas perdre un jour en chemin.Churchill avait demandé à Eisen-hower d’essayer de libérer Paris pour

4/ Leclerc et sa colonne, qui venaient du Tchad pour rejoindre la Tunisie en se battant, avaient fait, dans l’oasis de Koufra, qu’ils venaient de reconquérir, le serment de ne pas déposer les armes avant d’avoir libéré Paris et Stras-bourg

Noël. Il lui avait dit : « Personne ne pourra vous en demander davan-tage ».Eh bien si, nous étions décidés à demander davantage ! Le peuple de Paris s’est soulevé spontanément et il aurait été probablement écrasé sous les décombres, comme le peuple de Varsovie, s’il n’avait pas été soutenu. Mais il y avait des hommes qui, trois ans plus tôt, à Koufra (4) s’étaient ju-rés de libérer Paris, puis Strasbourg. Ce sont eux qui ont libéré Paris avec son peuple. Mais nous n’avions pas l’accord des Américains. Quand j’ai vu que l’insurrection parisienne allait être écrasée par une division allemande intacte qui arrivait de Boulogne-sur-Mer, j’ai donné l’ordre à Leclerc de foncer. C’est ainsi que nous avons évité à Paris le sort de Varsovie. Nous avons obligé les Anglo-Saxons à

changer de stratégie. Les Américains ne se souciaient pas plus de libérer la France que les Russes de libérer la Po-logne. Ce qu’ils voulaient, c’étaient en finir avec Hitler, en essuyant le moins de pertes possibles. Ce qu’ils voulaient épargner, c’était le sang des boys, ce n’était pas le sang, les souf-frances et l’honneur des Français.Effectivement, si les Anglo-Saxons avaient pu mener leur stratégie jusqu’au bout, ils auraient peut-être réussi à frapper l’Allemagne au cœur plus vite. De toute façon, Hitler au-rait fini par être battu, et la France aurait fini par être libérée. Mais si les Français étaient restés passifs, et si nous n’avions pas eu de part à la défaite d’Hitler, c’est au bout du compte lui qui aurait vaincu la France. »

A Utah Beach, « les flammes de l’enfer »Extrait du journal d’Alfred Birra Paroles du Jour J - Editions les Arènes, 29,90 €

« En quelques minutes, nous sommes détrempés par les embruns des vagues qui éclatent contre la coque. Sur les 30 hommes qui sont à bord, une vingtaine sont malades comme des bêtes. Nous sommes à 6 milles de la côte. De tous côtés les croiseurs et les destroyers vomissent les flammes de l’enfer avec des canons de 14 à 16 pouces. L’air retentit des grondements assourdissants et du hurlement des obus. Alors que nous commençons à peine à nous habi-tuer à ce vacarme, il est à son tour submergé par le vrombissement des avions. Ils déferlent par vagues successives, piquant vers le rivage et vers leurs cibles. Les impacts de leurs bombes illuminent la nuit. Tout comme les tirs de l’ennemi. Mes pauvres mots n’arriveront jamais à décrire un spectacle qui dépasse à

la fois l’imagination et l’échelle du regard humain. »

A Omaha Beach, « deux tiers des pertes… »Extrait du journal de Melvin B. Farelle Paroles du Jour J - Editions les

Arènes, 29,90 €

« Je suis le troisième à mettre le pied sur la plage. Le feu des mitrailleuses balaie désormais l’intérieur de la péniche d’assaut, et la plupart de nos hommes sont tués avant même d’avoir pu en sortir. Nous nous re-trouvons dans un trou d’obus et, avec le poids de nos bagages, nous coulons à pic comme des pierres. Le temps mis pour atteindre la surface nous semble interminable. Nous abordons la terre ferme, mais il y avait encore une autre étendue d’eau à franchir entre nous et la plage. Un véritable imbroglio de pièges à chars, de mines et de tous les obstacles que les Boches ont pu planter pour contrarier une tentative de débarquement. Tout cela semble irréel, comme un cau-

Témoignages I Extraits du journal L’Humanité - Juin 2004

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chemar éveillé ; les hommes crient et meurent tout autour de moi. Je me demande si tous les hommes prient de manière aussi fervente que je le fais. Avec un lenteur navrante, je parviens jusqu’au mur derrière lequel plusieurs de nos hommes nous attendent déjà. La B. Compa-gny subit deux tiers de pertes… Les hommes courent à l’assaut de la col-line en un flot incessant ; les morts et les mourants s’empilent derrière eux. On peut pratiquement traverser la plage sans toucher le sol tant elle est jonchée de corps. La mort est là, partout… Je me demande si je serai jamais capable d’oublier tout ça. »

A Utah beach, pour la seule jour-née du 6 juin, 23000 hommes débarquent

Un succès de la désinformationArmées fantômes, faux messages et faux officiers ont été les ingré-dients du spectaculaire succès des Alliés. Ils ont réussi à tromper les Allemands sur le lieu et la date du débarquement. Les services

secrets britanniques ont multiplié les faux indices pour convaincre qu’il pouvait avoir lieu n’importe où sauf en Normandie. Deux Nor-végiens retournés par les Britan-niques donnèrent ainsi vie à une prétendue armée de 250 000 hommes en Ecosse, prête à enva-hir la Norvège. Un autre, Wulf Schmidt, accrédita l’existence d’une formidable armée dans le sud-est de l’Angleterre, tremplin naturel pour un débarquement dans le Pas de Calais. Il a trans-mis plus de 1 000 messages aux Allemands, porteurs, parfois de vraies informations confirmant sa « valeur », comme l’arrivée ul-tra secrète du général américain Dwight Eisenhower au Royaume-Uni en janvier 1944.

Les pertes humainesSur les 156 000 soldats alliés dé-barqués ou parachutés le 6 juin 1944, 10 000 ont été mis hors de combat (tués, blessés ou dis-parus). Le plus lourd tribut a été versé par les Américains, qui ont perdu 4 695 hommes pendant

le jour J (2 500 tués), dont près de la moitié sur la seule plage d’Omaha. Le premier rapport de la 1re armée américaine cite le chiffre de 1 465 tués, 3 184 bles-sés, 1 928 disparus et 26 prison-niers. Les parachutistes des 82e et 101e divisions aéroportées, lar-guées dans la nuit du 5 au 6 sur le Cotentin perdirent à elles seules 2 499 hommes (tués, blessés ou disparus), entre autres dans les marais inondés artificiellement par les Allemands. Pour leur part, les Britanniques évaluent leurs pertes du 6 juin à 2 543 soldats mis hors de combat. Quant aux Canadiens, ils déplorent la perte de 1 204 hommes.Côté allemand, sur les 50 000 hommes présents sur les zones de largage ou de débarquement, il est difficile d’avoir une réelle estima-tion des pertes de la Wehrmacht pour la journée du 6 juin même si le chiffre de 5 000 hommes semble revenir assez régulière-ment chez les historiens. Après deux mois et demi de ba-taille en Normandie, les Alliés compteront dans leurs rangs 40 000 morts, 16 000 disparus et 200 000 blessés tandis que les Allemands auront dans leurs rangs 55 000 morts, 14 0000 bles-sés et 200 000 prisonniers.

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INTERNATIONAL INTERNATIONAL LE RÉVEIL

Au nom de la lutte contre le terro-risme, la présence militaire de la France s’affirme toujours plus en Afrique. Pour qui ? Pourquoi ? Pas au nom de l’humanitaire, mais au ser-vice des firmes pétrolières, comme au Nigéria.

Loin d’en réduire le nombre, la France dis-pose de 11 bases militaires permanentes qui offrent la possibilité d’un déploiement rapide et efficace sur les différentes zones de tension. Avions et navires de com-bat, hélicoptères et moyens amphibies, blindés et fantassins, forces spéciales et moyens de renseignements sont sur le terrain (Mali, Nigéria, Centrafrique, Mauritanie, Tchad, etc.), avec l’appui des militaires américains, notamment à Nia-mey au Niger, à Atar en Mauritanie et, en appoint de la mise en œuvre des drones au profit de l’opération Serval au Mali. Drones et station de contrôle au sol sont prélevés sur les stocks de l’US Air-Force et six « pilotes » français ont déjà été formés, fin 2013, sur la base américaine d’Hollo-man, au Nouveau-Mexique. C’est d’ail-leurs le Pentagone qui a fourni et trans-porté du matériel, des avions ravitailleurs et des avions d’écoute pour la même opé-ration Serval.

La France en première ligne…Bien que les implantations américaines existent déjà en Afrique de l’Est, les USA misent avant tout sur les forces militaires françaises en place pour couvrir la zone d’instabilité, allant de la Guinée à la Soma-lie. Et c’est « donnant-donnant ».Ainsi, les opérations Sabre et Serval ont permis aux militaires français de reprendre pied là où ils n’étaient plus depuis des décennies : de l’aérodrome de Tessalit (près de la frontière algérienne) jusqu’aux ruines du bagne de Taoudéni, dans l’extrême nord-ouest sur la route de la Mauritanie… Sans oublier la base aé-rienne de Faya-Largeau, au Tchad, d’où les Rafales de l’armée de l’air surveillent la frontière Libyenne…

Maintenir une présence permanenteL’idée est de maintenir une présence per-manente de 3 000 hommes capables de sauter d’un point d’appui à l’autre. Et le gouvernement s’attache à passer des ac-cords avec les pays de la zone sahélo-saha-rienne afin de donner un cadre juridique à sa présence militaire… dans le cadre de « la lutte contre le terrorisme », bien sûr.Ces accords prévoient la garantie de l’armée française contre une agression extérieure, l’aide à la répression de mou-vements de rébellion, du rétablissement d’une situation interne « périlleuse » et à l’exfiltration du chef d’État en cas de besoin. Ils comprennent la création, l’équipement et la formation de gardes présidentielles, mais aussi d’une police secrète en lien avec les RG français, afin de surveiller l’activité des opposants réfu-giés en France. Et, naturellement, l’accès prioritaire de la France aux matières pre-mières stratégiques… Chaque chef d’État africain serait secondé par un respon-sable des services secrets français et d’un conseiller juridique français. L’ensemble visant à « contenir l’avancée communiste » dans les anciennes colonies françaises et le maintien au pouvoir « d’amis » de la France. Tout un programme, sous couvert de lutte antiterroriste, pour légitimer une politique de domination néocoloniale et de militarisation.

Au nom de la financeAccord avec le Tchad, le Niger, le Mali, avi-ons de combat à Niamey, afin d’être prêts à intervenir si les intérêts français étaient menacés, notamment à Arlit et ses mines d’uranium.L’exemple du Nigéria est criant : Ce pays, déjà tellement éprouvé où l’Angleterre et la France s’opposèrent en créant et soutenant, de part et d’autres, la guerre du Biafra (2 millions de morts de 1967 à 1969), est au cœur de l’actualité africaine, avec 70 % de sa population sous le seuil de pauvreté ! C’est pourtant la première puis-sance économique du continent, devant l’Afrique du Sud. Elle produit et exporte

AfriqueLa France, bras armé des USA, en 1re ligne

bananes, maïs, manioc, cacao, l’arachide. Et puis, et surtout, il y a le pétrole (2,5 millions de barils / jour, 15e producteur mondial) qui représente 95 % des expor-tations du pays. S’y ajoutent d’impor-tants gisements de gaz naturel (2e rang africain, 2,5 % des réserves mondiales), des réserves de charbon, fer, zinc, étain, or, pierre à chaux, marbre… et uranium.Sa balance des exportations/importations, est une révélation : il exporte vers les USA (42,5 %), le Brésil (9,5 %), l’Inde (9 %), l’Espagne (7,3 %), la France (5,1 %). Et ses principaux fournisseurs sont la Chine (16,1 %), les Pays-Bas (11,3 %), les USA (9,8 %), l’Angleterre (6,2 %), la France (5,1 %), l’Allemagne (4,4 %). Ici apparait donc la Chine, le pays émergent qui se place vigoureusement sur le marché africain et vient allégrement brouter dans le pré-carré américain. Alors les USA font sonner la cavalerie, la France, son gendarme africain, dont l’intérêt de-vrait pourtant être tout autre. Car la secte Boko Haram, implantée dans le nord, délaissé du pays, n’est pas née d’hier. Déjà en septembre 2001, des affrontements avaient fait plus de 1 000 morts ; et la secte impunie, vivant de pratiques mafieuses, de trafics et de prises d’otages, est vraisem-blablement financée par les pétromonar-chies du Golfe qui l’utilise vis-à-vis des pays exportateurs de pétrole de l’OPEP.Et ce ne sont pas les « slogans » de Carla Sarkozy et Michèle Obama qui mettront Boko Haram en péril, tant leurs époux respectifs, et M. Hollande aussi, s’accom-modent fort bien d’une secte terroriste captant la colère pour la dévoyer sans pré-senter d’alternative et préservant l’ordre néocolonial établi.A l’opposé, une véritable politique de lutte contre le terrorisme consisterait à se donner les moyens de promouvoir une politique de réelle coopération permet-tant aux Africains d’assurer la maîtrise de leurs choix politiques, économiques et mi-litaires, les aider à répondre eux-mêmes aux besoins sociaux et humains de leurs peuples, afin qu’ils éradiquent le terreau mortifère sur lequel prolifèrent la violence et le fanatisme. En un mot, inverser le sens de la politique néocoloniale actuelle du gouvernement.

André fillère

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 201422 -

LE RÉVEIL INTERNATIONALINTERNATIONAL

Aide au développementHollande, Président du renoncement ? La branche française de l’organisation humanitaire ONE, une ONG cofon-dée par le chanteur Bono pour lutter contre la pauvreté et les maladies en Afrique, tire le signal d’alarme et appelle Hollande à tenir ses engage-ments en faveur de l’aide publique au développement.

Elle craint, pour raison d’économie bud-gétaire des coupes disproportionnées d’ici 2017. Depuis 2011, la France baisse effectivementt son budget d’aide : chute de près de 10% en 2013 , baisse de 2,5% prévue dans le budget rectificatif de 2014). ONE France estime aujourd’hui, que pour réaliser les fameux 50 milliards d’écono-mie le gouvernement prévoit de réduire

l’enveloppe dédiée à l’aide publique au développement de manière drastique, soit davantage que les 4% qui correspondent à la moyenne des coupes prévues sur la tota-lité de ce budget. « C’est doublement dispro-portionnée quand on sait que l’aide publique au développement ne représente qu’1% du budget global. Une part infime qui ne permet-tra pas de sauver les finances publiques mais qui aura des conséquences désastreuses dans les pays en développement » déclare Friede-rike Röder, directrice de ONE France. Si tel était le cas, Paris se retrouverait à contre-courant du mouvement mondial de lutte contre l’extrême pauvreté. La France, comme tous les pays de l’Union européenne et les membres de l’OCDE, a promis d’allouer 0,7% de son revenu na-tional brut à l’aide au développement. Le cas du Royaume-Uni en est un exemple et démontre qu’atteindre cet objectif inter-national est possible en peu temps, quel que soit le contexte socio-économique

(entre 2012 et 2013, augmentation de près de 30% de son aide). Par ailleurs, le 1er mars 2013, Hollande avait fait la pro-messe de tendre de nouveau vers cet ob-jectif international et d’augmenter l’aide quand le pays renouerait avec la crois-sance. Or, « c’est le contraire qui se produit aujourd’hui », dénonce ONE France esti-mant que « le gouvernement est en train de décider que, peu importe la conjoncture dans les 3 prochaines années, l’aide au développe-ment connaîtrait une baisse pour atteindre potentiellement son plus bas montant depuis 2007 ». « On sait que les promesses politiques ne sont pas toujours tenues mais prévoir à l’avance de ne pas les tenir, c’est sidérant », commente Friederike Röder. « L’argument budgétaire n’est pas valable (…) Si la France entérine ces coupes, ce serait pire qu’un manque de volonté politique, ce serait un véritable renoncement à sa politique d’aide aux pays en développement », ajoute t’elle. JPDelahaye

Asie/PacifiqueDangereuse escaladeTensions accrues entre Pékin et ses voisins pour le contrôle de la mer de Chine. Le Japon, soutenu par Washington, envisage de modifier sa constitution pour se donner les moyens d’intervenir militairement.

Depuis plusieurs années maintenant la tension ne cesse de monter en Mer de Chine. Les incidents se sont multipliés, parfois à la limite de l’affrontement mili-taire, entre voisins régionaux, Japon, Viet-nam, Philippines (alliés de Washington) et la Chine. Dans la ligne de mire des uns et des autres, la suprématie économique et stratégique de la région. En 2012, les agences maritimes chinoises occupent l’atoll de Scarborough dans la zone éco-nomique exclusive des Philippines. Quelques mois plus tard, le Japon acquiert les îlots des Senkaku à ses propriétaires privés, créant une crise avec la Chine. Des affrontements sporadiques s’ensuivent... En 2013, la Chine proclame sa nouvelle zone d’identification de la défense aé-rienne, interdisant le survol d’une partie

de la mer de Chine. Par pure provocation, deux appareils de l’US Air-Force, « viole-ront » quelques jours après cet espace aé-rien. Le 2 mai dernier, l’installation d’une plate-forme pétrolière chinoise dans les îles Paracels revendiquées par Pékin et Hanoï, ravivent les tensions… Pour la Chine, deuxième puissance éco-nomique mondiale (certains experts du FMI affirment que prochainement elle pourrait passer devant les USA), il n’est pas question de se faire damner le pion, dans cette partie du monde par Washing-ton et ses alliés. Selon un spécialiste occi-dental des questions navales, cité récem-ment par le quotidien Le Monde, « Pour Pékin, quatre besoins motivent ses revendica-tions d’extension maritimes : l’accès à la haute mer pour sa marine et sa base de sous-marins nucléaires de Hainan, au sud du pays ; la pro-tection des voies marchandes ; la sécurisation de ressources halieutiques et naturelles ; la satisfaction d’une opinion publique nourrie au nationalisme. »

Le Japon veut jouer un rôle prépondérant dans la région Pour justifier son agressivité, Pékin s’ap-puie sur la volonté d’Obama de réorienter une partie de la stratégie US sur l’Asie Pa-cifique, le fameux « Pivot ». Washington a

réitéré ces dernières semaines son soutien à ses alliés sur la zone.Au-delà des dangers régionaux, cette esca-lade nuit gravement à la paix, à la sécurité internationale et aux équilibres issues de la 2nde Guerre mondiale. Le 1er ministre japonais, Shino Abe, a proposé une « évo-lution » de la conception de la sécurité du Japon. « Il faut, a-t-il indiqué, pouvoir venir en aide aux pays d’Asie du Sud-Est qui veulent résister à l’offensive des “grandes puissances” et prendre une part active aux opérations de maintien de paix de l’ONU. » Par “grandes puissances” faut-il entendre la Chine ? Notons que dans cette volonté, Shino Abe bénéficie du soutien de la Maison-Blanche qui plaide pour un rôle accru du Japon dans la sécurité globale et un réequilibrage de l’alliance bilatérale de sécurité. Selon Le Monde, citant une source proche de l’admi-nistration américaine, « l’idée est de passer à un véritable partenariat. » Si le premier ministre nippon assure que le Japon « reste pacifique », le pays n’en connaît pas moins une « renaissance sécuritaire » : hausse en 2014 de son bud-get défense, pour la première fois depuis vingt ans ; forces armées maintenues à un niveau très performant ; nouveau Conseil de sécurité nationale et stratégie ad hoc, adoptée en décembre 2013. JPD

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VIE DE L’ARAC VIE DE L’ARAC LE RÉVEIL

Après la présentation de l’ORMCM par Raphaël Vahé, Président de l’ARAC, Paul Markidès a présenté les raisons de la remise de la médaille à M. Catayée, principal du collège Gustave Courbet de Romainville, en présence de Ma-dame le maire, Corinne Valls.

« Cher Olivier, en 2008, de représentants d’une association de Mémoire et d’Histoire au service des élèves, nous sommes deve-nus, grâce à toi et à Ludovic Pétoin, des partisans soucieux d’agir pour intéresser les élèves à la connaissance de la Mémoire et de l’Histoire, exciter leur curiosité, créer les conditions qui les incitent à vouloir acqué-rir les informations et les connaissances historiques à vos côtés. Cette coopération nous rendait plus proches, direction du collège, professeurs, élèves et militants de l’ARAC. Cette activité éducative commune concrétisait la volonté de faire jouer à l’ARAC un rôle nouveau répondant aux exigences d’aujourd’hui en matière de diffusion de la Mémoire et de l’Histoire et en matière d’actions civiques correspondantes aux orientations des fon-dateurs de l’ARAC notamment Henri Bar-busse et Paul Vaillant-Couturier. Garder la ferme conviction qu’il est pos-sible de poursuivre une tâche d’éducateur et d’assurer l’organisation des études des jeunes en leur faisant confiance, en les mettant sur la route de l’apprentissage permanent de la vie, explique pourquoi tu t’es saisi d’emblée de nos propositions de découverte par les élèves eux-mêmes de la Mémoire et de l’Histoire. A toi, Olivier, nous pouvons attribuer ces vers de Rudyard Kipling :

« Si tu peux supporter d’entendre tes paroles travesties par des gueux pour exciter des sots et d’entendre sur toi mentir leurs bouches folles sans men-tir d’un mot ; Si tu peux supporter triomphe après défaire et recevoir ces deux menteurs d’un même front ;Si tu peux conserver ton courage et ta tête quand tous les autres les perdront ;Alors, les rois, les chefs et la victoire se-ront à tout jamais tes esclaves soumis et, ce qui vaut bien mieux que les rois et la gloire, tu seras un homme, mon fils. »Eh bien, c’est cet homme, Olivier, que la sec-tion de l’ARAC de Romainville a reconnu chez toi et c’est pourquoi elle a demandé sa reconnaissance par l’Office Républicain des Mérites Civiques - civils et militaires.

Extraits de l’intervention d’Olivier Catayée« C’est un très grand, un trop grand hon-neur. Car cette distinction émérite, si elle m’est remise à titre personnel ce soir, est la reconnaissance d’un travail collectif qui n’a pu voir le jour que grâce à de nombreux acteurs dont la plupart sont présents ce soir et je les en remercie. Un soir d’automne 2008, un homme au crâne un peu dégarni, aux cheveux grison-nants se présenta au collège, demanda à me voir pour me demander si j’étais intéressé par des interventions de l’ARAC auprès des élèves. Bien sûr que j’étais intéressé, répon-dis-je, mais allez donc en parler plus avant avec mon adjoint, monsieur Petoin, dans le bureau là-bas. Le monsieur s’exécuta et lorsque j’ouvris la porte du bureau de Ludovic, 3 heures plus tard, je le retrouvai dans une discussion passionnée avec Paul Markidès… Ludovic

Décoration Olivier Catayée - 24 juin 2014

me dit qu’il fallait absolument qu’on tra-vaille avec ce type, c’était une mine d’or. Je fus estomaqué de voir Paul Markidès tenir une classe remplie d’adolescents… Très vite des professeurs furent embarqués dans cette épopée et la transmission de la connaissance et de la Mémoire devint un des axes de la politique de l’établissement. Pour la première fois, certains élèves sen-tirent que l’Histoire Nationale, la Grande Histoire, dont ils se vivaient peut être éloi-gnés, faisait écho à leur propre histoire. Dans leurs yeux, on pouvait lire qu’ils se sentaient intégrés - au moins pendant ce temps - dans le roman national. La belle histoire s’est poursuivie avec l’adhé-sion de 12 élèves quelques mois plus tard à l’ARAC et pour leur participation aux temps forts de cette association. C’est la connaissance de cette Mémoire commune qui doit nous servir - et notam-ment aux plus jeunes - pour éviter de réité-rer les erreurs du passé, pour se construire un présent de citoyens pleins et entiers, pour envisager un avenir serein et porteur d’espoir… Merci aux élèves de nous avoir suivi, avec leur enthousiasme, leur curiosité, leur confiance, leur spontanéité. Merci à nos amis de l’ARAC, à Mme le Maire pour sa confiance. Merci à Ludovic Petoin pour y avoir cru dès le début… Merci enfin à toi Paul, merci pour ton humanité. Cette médaille par toi remis, emplit de fier-té le petit fils d’ancien combattant médaillé de l a Croix de Guerre et Compagnon de la Libération que je suis. C’est une dis-tinction qui honore le collège, l’Institution mais aussi l’homme que je suis et qui la représente. Mes derniers mots iront à ma famille, à toi Delphine, à vous Arthur et Jade, qui me supportez, qui endurez mes absences et mes veillées mais vous savez maintenant, après toutes ces années, que tout cela n’a pas d’objectif personnel, sinon celui, unique de contribuer, comme le disait Aimé Césaire : « en ces temps de ténèbres, à la force de regarder demain. »

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 201424 -

LE RÉVEIL VIE DE L’ARACVIE DE L’ARAC

Extraits I Discours de Patrice Bessac (maire de Montreuil)« Pierre Bussone est un fils de Montreuil… issu du peuple, appartenant au monde âpre du travail, celui des années 50- 60, ces années de l’après guerre et des « 30 glo-rieuses » où Montreuil était une fourmilière d’entreprises. Une cité joyeuse et une cité rebelle où il a décidé de poser son sac.A son retour d’Algérie… Une guerre dont il va vivre les horreurs à 20 ans et pendant 24 longs mois. Pour Pierre cette guerre est une déchirure. Car, il est de cette génération de la deu-xième guerre pour laquelle les mots liberté et indépendance nationale ne sont pas des vues de l’esprit. … Une guerre coloniale à l’opposé de ses valeurs humanistes, de son engagement politique au sein du PCF. Ce parti dont il est un membre déterminé. Un parti qui réclame à corps et à cri « la paix en Algé-rie »…La guerre d’Algérie, ceux qui en reviennent sont souvent brisés. Pierre n’échappe pas à la douleur… mais il y puisera une aversion définitive pour la guerre, pour le colonia-lisme… pour ces puissances d’argent qui n’hésitent pas à sacrifier les enfants du peuple pour leurs seuls intérêts. La force de Pierre sera de transformer cette aversion en volonté d’agir pour la paix,

pour la liberté des peuples… Après la victoire du peuple vietnamien, il va participer d’une façon décisive au travail du comité français pour le Village de l’ami-tié Van Canh… … Il s’engagera dans l’ARAC où il a mené une action exemplaire comme vous, ses camarades ici présents, savez l’exprimer avec pertinence et force détails. … Fils de Montreuil. Il a été généreux à l’égard de sa cité… Il n’a eu de cesse - comme militant, comme citoyen- de se mettre au service du bien commun. Ce faisant, il a forgé le visage et l’âme de notre ville où les mots coopération, solidarité et partage ne sont pas des mots en l’air. … Pierre Bussone, au nom des Montreuil-lois que j’ai l’honneur de représenter, je te remercie pour ce don de toi, pour ton héri-tage. Je te remercie d’avoir été. »

Extraits I Discours de Patrick Staat, Secrétaire général de l’ARAC « … Comment dire l’amitié qui pouvait nous rattacher au Pierre que nous avons connu, obstiné à voir naître un monde de justice, de liberté, d’égalité ? Un monde où toutes les femmes et tous les hommes auraient la possibilité de vivre heureux et égaux. Ce sont ces convictions qui ont marquées son combat, sa vie, son engagement profes-

sionnel et militant.Parler de Pierre Bussone, c’est d’abord par-ler de l’homme debout, de celui qui a fait des idéaux de la République, des idéaux de communiste, du combat pour la paix et l’émancipation, sa raison d’être. Ce sont des hommes comme lui qui au long des siècles par leurs persévérances, leurs vo-lontés, ont forgé ce qui fait la richesse de la France, son originalité, qui depuis la révo-lution française marque le monde avec sa devise au fronton de nos mairies « Liberté, Egalité, Fraternité »…… Pierrot était un homme de cœur, ouvert, rassembleur, tolérant et modeste.Sa première qualité, c’est sans aucun doute, son dévouement à la cause du peuple… … Parce qu’il sut, sans faillir, servir la cause des humbles et des opprimés. … Sa générosité était sans limite. Il s’était engagé pour faire le bien. Il ne dérogea jamais à ce choix. … A vrai dire, je crois que la vérité de l’homme perçait dans cette sincérité, cette passion qu’il mettait à dénoncer ce qui le révoltait et à défendre ses idées. … Fort de nos prédécesseurs, de leurs ac-tions. C’est cet héritage qui fait de l’ARAC depuis 1917, une association particulière, originale, c’est cet héritage que Pierre a su faire grandir, dans les conditions d’au-jourd’hui.

Hommage rendu à Pierre Bussone le 19 Juin 2014 à la mairie de Montreuil

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 2014 - 25

Parce ce que dans les conditions d’au-jourd’hui, défendre les valeurs républi-caines, défendre la place et le rôle éman-cipateur que peut avoir la France dans le monde, défendre la Nation et sa souverai-neté, défendre la paix et l’émancipation humaine devant les tenants du libéralisme et de la fi nance, demande du courage et de la détermination. Cette volonté, cet enga-gement, ce courage, Pierre les portaient quelque soit l’adversité, l’âpreté du combat. … Ancien d’Algérie, Pierre est devenu na-turellement un des dirigeants de l’ARAC, responsable de notre ARAC, en charge de l’organisation, de la vie des comités, secré-taire national jusqu’à son dernier souffl e.… Il était de ceux qui ont la conviction que la planète est assez riche pour que chacun puisse y vivre dignement pour peu qu’une minorité ne s’accapare pas pour elle les richesses… Avec calme et sincérité, avec chaleur et engagement, en refusant le culte et le dogme, il a pris sa place avec tous ceux qui s’attaquent en permanence à modifi er le présent pour construire l’avenir. C’est pour cette raison qu’il était attaché au

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travail de mémoire en direction des jeunes générations, pour leur avenir, la connais-sance, la compréhension du passé et leur donner les atouts clefs pour construire leur propre avenir. … Nous pouvons affi rmer qu’à sa place, Pierre a contribué à défendre et à faire fructifi er ce que des générations d’hommes et de femmes nous ont laissé en héritage, au lendemain de 1936, de la résistance, du CNR, de 1968, de 1981. Cette France là, celle des réformes émancipatrices est la

France de demain car c’est la France qui répond aux besoins du peuple, de ceux qui n’ont que leurs bras et leur cerveau pour vivre et élever leur famille. Alors oui, avoir côtoyé, milité avec Pierre, est, pour beaucoup d’entre nous, avoir découvert le mot camarade, ce mot si gal-vaudé et pourtant si riche et si valorisant, plein de sens et d’engagements »…

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LE RÉVEIL VIE DE L’ARACVIE DE L’ARAC

NOS PEINES JUILLET - AOÛT 2014

Le Réveil des Combattants adresse aux familles et aux amis de nos camarades décédés ses sincères condoléances.

ALLIER (03)Commentry : Jean André BIDET, AC ATM. André VIGNON, 82 ans, invalide de guerre. Louis ZINGRAFF, AC 39-45.St-Germain-des-Fossés : Roland MAGER, AC ATM, ancien trésorier départemental.

ALPES MARITIMES (06)Cagnes-sur-Mer : Jean GIORDANA, AC 39-45

BOUCHES-DU-RHÔNE (13)Berre-l’Etang : Gérard VIDEAU, AC ATM, président de la section.St Marcel : Paul FAVERIEUX, Résistant, ancien président de la section.Velaux : Edouard GUIDAUD, 80 ans, AC ATM. Mme Simone OCCHIENA, 88 ans, veuve.

CHARENTE (16)La Rochefoucauld : Louis PARVERY.Ruelle : Jean OLIVIER.

CORREZE (19)Vigeois : Henri BOMBILLON, AC 39-45

HERAULT (34)Montpellier : Jacques AZEMA, AC ATM. Jean DAUMAS, 74 ans, AC ATM

ILLE ET VILAINE (35)Rennes: Roger DODIN, 93 ans, Résistant, Interné, ancien secrétaire départemental. Mme Jeannine FAISANT. Roger MOREL, 92 ans,

Résistant. Mme Yvonne PERRIGAULT, 82 ans. Raymond SALESS, 82 ans, AC ATM.

ISERE (38)Seyssinet : Roger HUBAUD, AC 39-45.

LOIRE (42)St-Chamond : André MICHAUDON, AC ATM.

LOIRE ATLANTIQUE (44)Ste-Anne : Claude FORGET, 75 ans. Guy GAU-DIN, 78 ans. Joel PICARD, 78 ans, président de la section.

NORD (59)Aulnoye-Aymeries : René BENIT, AC ATMFeignies : Mme Madeleine QUILLET-VIL-LETTE, 94 ans, Résistante.Ferrain-Vallée de la Lys : Henri DELBERGUE, 80 ans, AC ATMSolre-le-Château : Mme Christiane BASILE, 71 ans, combattante pour la paix.Somain : Achille DRECOURT, 79 ans, AC ATM. François MARTINACHE, 80 ans, AC ATM.

OISE (60)Montataire : Mme Marguerite FOSSARD.

PYRENEES-ORIENTALES (66)Cabestany : Adolphe SEVERI, 101 ans, AC 39-45

SAONE ET LOIRE (71)Montceau-les-Mines : Maurice GAGNARD, 75 ans, AC ATM.

SAVOIE (73)Chambéry : René BLARD, AC ATM, secrétaire adjoint du comité.

SEINE MARITIME (76)Le Havre : Bernard CHALOT, 76 ans, AC ATM. Christian TROUVAY, AC ATM.

ESSONNE (91)Massy : Mme Clara CLAIN, AC 39-45. Mme Marie-Louise LE BIANNIC, combattante pour la paix. Gilbert MOLINA, AC 39-45. Savigny/Orge : Guy GLOUSIEU, AC ATM. Jacques NICOLLE, combattant pour la paix.

Conseil NationalSt-Jean-de-Chevelu : Ferdinand BOISHARDY.

Il nous a quitté à 97 ans après une vie exemplaire. Membre de l’ARAC depuis 1947, il fut membre du bureau de la sec-tion Saint-Martinoise, porte drapeau de 1977 à 1987, président de 1988 à 2000, président d’honneur depuis 2000. Pour son engagement durant la guerre et ses activités, il était décoré de l’ordre répu-blicain du mérite civil et militaire.Durant la Seconde Guerre mondiale, refusant l’occupation, le régime de Vichy et la collaboration, il rejoignit la

Résistance début 1942 dans laquelle il se distingua avec les 3e, 8e et 27e com-pagnies FTPF, avant de rejoindre, en 1944 pour la durée de la guerre et en tant qu’engagé volontaire, le troisième régiment d’infanterie Alpine (RIA), dont le comportement vaudra la croix de guerre à la compagnie dont Clément faisait parti.Le jour de ses obsèques, devant le cer-cueil entouré des drapeaux de l’ARAC (porte drapeau José Grilli), de l’ANACR

(Eugène Caviglia), de la mairie (Jean-Marc Grilli), le président en exercice de la Section de l’ARAC, Maurice Bailet, rendit un hommage à la fois vibrant et chargé d’émotion à cette figure emblé-matique dont l’exemple de vie dépasse largement les frontières du village comme en témoigna la nombreuse foule présente.

Alex Puverel

Saint Martin du Var (06)

Clément Goglio nous a quittéUne figure marquante nous a quitté : Clément Goglio n’est plus.

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LE RÉVEIL - N° 805 - JUILLET-AOÛT 2014 - 27

VOS DROITS VOS DROITS LE RÉVEIL

Le journal Sud-Ouest relaie les cris d’alerte des syndicats de la Défense (CFDT-CGT-FO-UNSA) qui dénoncent la remise prochaine de l’Hôpital d’ins-truction des armées Robert-Picqué, de Villeneuve-d’Ornon (Gironde) au secteur privé.

L’institution est en cours de restructura-tion, dans le cadre de la loi de program-mation militaire 2014-2019 qui prévoit la suppression de 80 000 emplois au sein du ministère de la Défense. Déjà, pour Robert-Picqué, une convention a été signée avec la Fondation protes-tante voisine, Bagatelle à Talence, en vue d’une fusion qui transformerait l’Hôpi-tal en ESPIC, c'est-à-dire un Établisse-ment de santé privé d’intérêt collectif. Pétitions syndicales et manifestations des personnels civils s’opposent à ce

bradage d’un service public de santé de l’agglomération au profit du privé.

Les enfants aussiDans un courrier au ministre de la Défense, le secrétaire général FEAE-CFDT Luc Scappini conteste et dénonce la manœuvre visant à sortir du secteur public de la Défense certaines Maisons d’enfants et d’adolescents à caractère social vers les conseils généraux.Ces deux établissements, Sarthonay et La Roche Guyon, dépendent de l’IGeSA (Institution de gestion sociale des ar-mées) et la fréquentation des ressortis-sants de la Défense y avoisine les 60 %.Elles sont ouvertes aux enfants des per-sonnels du ministère de la Défense de 5 à 21 ans, en difficulté sociale et familiale, à qui elles offrent une prise en charge en hébergement individuel ou collectif. Les jeunes admis sont encadrés et orien-

tés par des équipes pluridisciplinaires avec lesquelles un projet personnalisé d’accompagnement est élaboré. La prise en charge matérielle et l’accompagne-ment éducatif permettent de retisser les liens familiaux distendus, favorisent un retour en famille et soutiennent ces enfants pour une meilleure insertion sociale, scolaire et professionnelle.Outre l’abandon de la mission sociale de l’IGeSA, comment seront traitées demain ces deux maisons d’enfants, puisque les conseils généraux ne gèrent pas en direct ce genre de structure ? Sans oublier le risque de licenciement de l’en-semble du personnel en fonction…« Se recentrer sur le cœur de l’emploi », proclament les « réformateurs », tant à la Défense qu’à l’ONAC… Rien de rassurant à considérer le sort prévu aux Maisons d’enfants, aux ERP et aux Mai-sons de retraite ! Jeunes, anciens, han-dicapés, OPEX, familles… aucun intérêt public ! Dégagez, le « privé » profitera de vous.

Santé I Militaire et enfants de militaires livrés au « privé »

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LE RÉVEIL

La souveraineté est grevée de son passé, quand les souve-rains étaient les rois et les em-pereurs. Sa malédiction survit quand on déplore qu’à l’ONU les États soient souverains. Comme si un État pouvait être souverain. Un Etat est un ensemble d’institutions, donc un appareil, un objet. C’est un instrument d’exercice du pou-voir, donc de la souveraineté. Cela renvoie à la question de savoir de quel souverain il est l’instrument. Et la malé-diction de la souveraineté est inséparable d’une conception de l’État en continuité de l’État monarchique d’antan. Il est d’ailleurs révélateur que les principaux ministères soient qualifiés de « régaliens », ce qui veut dire « du roi », comme au temps où Louis XIV disait « L’État c’est moi », et soient l’armée, la police et la justice, qui sont les armes du pouvoir. Avec quoi est complémentaire la nouvelle trou-vaille médiatique (qui contamine tous les milieux) de la « société civile » : par rapport à quelle société non civile, sinon la « classe politique » compromise, avec un État étranger au peuple et le domi-nant ?Pourtant l’alternative existe et a nourri deux siècles de bataille pour donner à la démocratie (du grec ancien « démou kratos », pouvoir du peuple) son conte-nu de « souveraineté populaire », repo-sant sur une citoyenneté gouvernante, et l’État étant l’instrument de cette sou-veraineté-là. Cela a été la trame de toute l’histoire des constitutions successives, dont a été pris le contre-pied, d’abord

avec « l’État » de Vichy sous l’occupa-tion, puis en 1958 avec la 5e. Pourtant même celle-là a dû reprendre, même pour le contredire ensuite, l’article 3 de la 4e : « La souveraineté nationale appar-tient au peuple français qui l’exerce par ses représentants » (et non dont les représen-tants l’exercent pour lui).Et cette notion de souveraineté popu-laire, avec sa dimension nationale, a été universalisée en 1945 par la Charte des Nations unies, mise au placard aujourd’hui au profit de la seule ONU, qui est censée l’appliquer, parce que trop révolutionnaire. Sa philosophie, définie par son préambule, repose sur la souveraineté des peuples, dont les États ne doivent être que les ins-truments : « Nous, peuples des Nations

unies... avons décidé d’unir nos efforts... En conséquence nos gouvernements… » Les peuples décident et les États exécutent.Quant au pluriel « Nous, peuples », c’est parce que la population mondiale est faite de peuples différents, chacun sur son territoire où il doit être le seul maître, sans immixtion étrangère (même pas de la part de l’ONU), dans une obligation de respect mutuel, et une re-commandation de coopération dans leur intérêt commun. La souveraineté nationale est la souveraineté populaire parta-gée entre les nations. Et l’inversion de l’État régalien, instrument de pouvoir sur le peuple en État social, instru-ment de pouvoir du peuple pour la satisfaction de ses be-soins est aussi internationa-lement consacrée par le Pacte

des Nations unies de 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels, qui en vertu de notre constitution a « une autorité supérieure à celle des lois », et avec lequel la politique d’austérité imposée par l’Union européenne est totalement incompatible.Mais il ne suffit pas que le droit soit sur le papier : c’est un combat, mais il y aide, à condition de s’en servir, donc de le connaître, ce qui est une autre bataille à l’heure où une médiatisation au service d’une autre souveraineté, s’emploie, avec trop de succès, à faire rejeter la sou-veraineté nationale, parce que, précisé-ment, c’est le parachèvement au niveau mondial de la démocratie.

Roland Weyl

Souverainiste, mais oui !Il n’y a pas piège plus vicieux que l’anathème de souverainisme. Être souverain, c’est être maître des décisions communes, qui sont nécessaires, sauf à être des Robinsons Crusoé vivant les uns à coté des autres en s’ignorant, la question étant de savoir qui les prend. Il ne s’agit donc pas de savoir s’il faut ou s’il ne faut pas de souveraineté, mais qui est souverain.

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LE RÉVEIL VOS DROITSVOS DROITS

D’une part, déclare la CGT, la direction générale de l’ONACVG, une vitrine, « un siège très dynamique, doté de postes d’ad-ministrateurs civils et de fonctionnaires de haut niveau attirés vers l’ONAC (…) avec

l’ambition affi chée d’en faire un tremplin vers des carrières, hors ONAC éventuelle-ment… » Au dessous des agents, « ma-nants » d’exécution, à qui on demande de gros efforts tant au niveau de leurs

ONACVGDes agents corvéables à merci ?La CGT de l’ONACVG dénonce, dans un communiqué, la dégradation rendant de plus en plus diffi cile et douloureuse les conditions de travail auxquelles sont soumis les personnels.

salaires que de la surcharge de travail qu’on leur impose au détriment de leurs conditions de travail. Sur place, pour les « exécutants », on ne parle que d’efforts à faire, d’adaptation à des conditions défi ant la raison moderne des conditions de travail, en particu-lier dans les établissements : horaires constamment modifi és, alternance de travail jour/nuit (plus propice à la des-truction des salariés qu’à leur confort et leur bien-être au travail), congés de récupération à inclure dans les congés payés ! Contrats de vacataires en congé de maladie non renouvelés, pause dite « active » (vous avez bien lu !), bref un climat général ressemblant plus à une servitude qu’à un service !Mais attention, la direction générale de l’ONACVG, toujours attentive et sociale, consciente que les efforts à consentir ont un prix… parle de mettre des psychologues à la disposition des agents qui « n’auront pas su s’adapter » !

Et la CGT de l’ONACVG de poser cette question : « L’avenir de l’ONAC, le moyen âge ? »

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LE RÉVEIL MÉMOIREMÉMOIRE

Le Parcours Maurice Audin est une« intervention urbaine » réalisée à Alger en 2003 par Ernest Pignon-Ernest

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MÉMOIRE MÉMOIRE LE RÉVEIL

2014 marque le 57e anniversaire de la disparition de Maurice Audin, suite à son arrestation le 11 juin 1957 à Alger, par les parachutistes de l’armée fran-çaise. Après l’appel des 171, deux personnalités, Michel Vinaver et Ber-nard Sigg lancent indépendamment un appel pour la reconnaissance de la vérité sur l’assassinat de ce jeune universitaire à Alger.

Le dramaturge Michel Vinaver a écrit Les Huissiers, en 1957. Dans cette pièce, « il évoque explicitement la guerre d’Algérie et l’agonie de la IVe République depuis les couloirs et les bureaux d’un ministère, avec sa farandole de préposés et de politiques, de petites mains et de grands bavards ». Michel Vinaver révèle aujourd’hui que la disparition de Maurice Audin à Alger en juin 1957 est à l’origine de sa pièce, et demande qu’il « soit mis fin à un si long retard dans la reconnaissance des faits par l’État ».Évoquant le crime dont Maurice Audin fut victime, le psychanalyste Bernard Sigg, mobilisé en Algérie, a refusé en 1960 de torturer et il a déserté quand il a compris que son travail consisterait à maintenir en vie les personnes tor-turées. Il n’est revenu en France qu’en 1965, au moment d’une amnistie. Il s’est alors investi avec l’ARAC dans le traitement des soldats traumatisés par la guerre. Il est l’auteur du livre Le Silence et la Honte, Névroses de la guerre d’Algérie (Messidor, 1989).

Audin, les autres et nous« La faillite actuelle de la République algérienne, dont j’avais espéré qu’elle animerait le tiers-monde, m’avait fait choisir le silence ; et voici qu’on me de-mande d’intervenir à propos du crime dont fut victime Maurice Audin. Sur cela je ne puis rester silencieux car ce

meurtre, comme celui d’Ali Boumend-jel et bien d’autres, réunit les pires traits d’inhumanité et lâcheté.Ce crime reste et restera inoubliable parce qu’il est toujours nié par la Ré-publique française alors que c’est son armée qui, passant lois et limites, l’a commis ; parce qu’il fut perpétré contre un citoyen désarmé, père de famille ; parce que son déroulement et ses suites portent la marque du fanatisme et du ra-cisme caractéristiques du colonialisme et de la guerre froide ; parce qu’enfin il attente à la culture, Maurice Audin étant un brillant enseignant-chercheur formé par l’école républicaine.Est-ce lui, Maurice Audin, qu’il est important de se remémorer, ou plutôt son combat contre l’entreprise crimi-nelle menée par son pays d’origine ? Je ne crois pas à la « vertu de l’exemple », trop purement émotionnelle et trop in-voquée. Par contre, la mise en évidence des motifs et modalités d’une insurrec-tion peut aider les jeunes ou les hési-tants à réfléchir, à prendre parti et agir de façon juste et concrète. C’est ainsi, je pense, que Maurice Audin en vint à transgresser les lois de la République française qui, elle-même, en transgres-sait les principes fondamentaux : Éga-lité et Liberté. Car les gouvernements de la république, 4e comme 5e, violaient officiellement leur propre législation, entre autres en maintenant ou rappe-lant « sous les drapeaux » des milliers de jeunes hommes « au-delà de la durée légale » ! Le pas était franchi et dès lors tous les Rubicon seraient franchis aussi, y compris celui du coup d’État. A ceci Audin répliqua, en sens inverse, procla-mant par sa transgression qu’il restait fidèle aux principes fondateurs piéti-nés. Ainsi était-ce la République qui se montrait criminelle, ce qu’elle confirma en éliminant ses accusateurs. Et moi, comprenant et approuvant Audin et ses camarades, je n’eus plus qu’à les suivre.

Maurice AudinL’omerta de la République

Je découvris alors que, si nous étions peu nombreux à l’époque, d’autres nous suivraient comme d’autres encore plus nombreux nous avaient précédés, n’hésitant pas à juger les lois et à peser l’injustice que souvent elles servent. Ils avaient alors choisi le chemin de l’éga-lité bafouée. Et moi qui avais honni le peuple allemand, le croyant entiè-rement complice du nazisme, je dus réviser mon jugement. Si la plupart des psychanalystes avaient fui ou s’étaient réfugiés derrière la « neutralité pro-fessionnelle », il en était au moins un qui avait résisté. En cherchant bien, à Berlin même, on peut encore trouver la trace et les écrits de John Rittmeis-ter, psychanalyste de premier plan, qui comme Audin, s’éleva contre la barba-rie, rejoignit « l’Orchestre Rouge » et lutta activement contre le pouvoir nazi. Arrêté en 1943, il fut condamné à mort et aussitôt exécuté. Son nom est excep-tionnellement prononcé et les rares notices à lui consacrées oublient de dire ce qu’il fit et mentionnent seulement « décédé à Plôtzensee », prison où il fut décapité à la hache ! On regrettera plus encore que ses écrits théoriques soient négligés, mais on sait au moins mainte-nant qu’il y eut en Allemagne aussi des intellectuels lucides qui donnèrent leur vie pour la vérité, l’égalité et la liberté.

C’est de ceci surtout qu’il nous faut nous souvenir. Trop vague est le « de-voir de mémoire », car celle-ci n’est qu’un processus automatique, incons-cient. La remémoration, par contre, demande effort, réflexion et distingue l’essentiel de l’anecdote. C’est elle qui nous précise pourquoi ils ou elles ont lutté, pour quels objectifs, nous permet-tant de faire le compte de ce qui reste à faire.Je pense que le mathématicien Audin aurait été d’accord avec cela. »

B.W. SIGGLe 21 mai 2014

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