Le quartier de Le quartier de Gonçalo M. Tavares : un ... · À Gonçalo M. Tavares. Je remercie...

16
Le quartier de Gonçalo M. Tavares : un espace inter artistique Angélique Sauvaire

Transcript of Le quartier de Le quartier de Gonçalo M. Tavares : un ... · À Gonçalo M. Tavares. Je remercie...

2

Le q

uart

ier d

e G

onça

lo M

. Tav

ares

:un

esp

ace

inte

r art

istiq

ue

Le quartier de Gonçalo M. Tavares :

un espace inter artistique

Angélique Sauvaire

13.2 504192

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 160 pages

- Tranche : 2 mm + nb pages x 0,07 mm) = 13.2 ----------------------------------------------------------------------------

Le quartier de Gonçalo M. Tavares : un espace inter artistique

Angélique Sauvaire

Angé

lique

Sau

vaire

2 2

2 3

Remerciements

À Gonçalo M. Tavares.

Je remercie ma Directrice de mémoire et de

recherche, Madame Idelette Muzart – Fonseca Dos

Santos de l’Université Paris Ouest Nanterre La

Défense, et ma co-directrice, Madame Anabela

Branco De Oliveira de l’Université Trás-Os-Montes

Alto Douro, qui m’ont permis d’avoir un avant-goût

de la recherche universitaire avec un voyage à

Lisbonne, mais également de trouver le rythme

rigoureux de travail et d’écriture. À mes professeurs

de l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense et de

l’Université Trás-Os-Montes Alto Douro, qui ont

rendu possible la conjugaison de deux arts que

j’affectionne tout particulièrement, la Littérature et

l’Architecture.

Ce travail est le résultat aboutit de plusieurs années

de recherches et de réflexions échangées initialement

avec le Professeur José Manuel Da Costa Esteves,

sans qui mon master n’aurait pas de sens. Je le

remercie pour sa disponibilité et son écoute, ainsi que

ses précieux conseils et ses idées.

2 4

Un merci tout particulier à ces artistes qui ont

puisé dans O Bairro pour créer leurs propres espaces,

afin de permettre à cette série littéraire de vivre au-

delà des mots. Ana Matos, directrice de Galeria das

Salgadeiras à Lisbonne, a organisé notre rencontre

avec ces artistes qui restera pour moi l’une des plus

belles et importantes. Helena Gonçalves, Joanna

Latka, Claudio Garrudo, Jaime Vasconcelos, merci de

m’avoir permis de découvrir vos univers et

d’échanger des idées pour concrétiser mon projet

universitaire. Conjuguer deux arts distincts me

paraissait impossible, jusqu’à ce que les Professeurs

et Architectes, Monsieur Fernando Hipólito et

Madame Helena Botelho, créent un projet ambitieux

avec leurs élèves. Senhores Projectos est le résultat

de ce travail. Merci pour cette publication, mais

également pour les minutes que vous m’avez

consacrées à Lisbonne, à l’Université Lusíadas

notamment.

À maman qui m’a toujours soutenue.

2 5

Sommaire

Remerciements ..................................................... 3

Introduction ......................................................... 7

I. Projet littéraire de Gonçalo M. Tavares ........ 15

1.1. Présentation des Messieurs

et des écrivains .................................................. 15

1.2. Construction cyclique des personnages ..... 23

1.3. Les chaussures de Monsieur Valéry :

le début de carrière de l’écrivain ...................... 28

1.4. Espace/temps de O Bairro :

y a-t-il des frontières ? ...................................... 37

II. Les messieurs de O Bairro : personnes,

personnages ? ....................................................... 49

2.1. Le dessin en tant que narration .................. 50

2.2. Étude de Monsieur Brecht et le succès :

le flip book ........................................................ 61

2.3. O Bairro : un voyage artistique ................. 72

III. Symphonie artistique .................................... 87

2 6

3.1. O Bairro inspire : les clés .......................... 88

3.2. Mises en scène du quartier :

Senhores Projectos ............................................ 97

3.3. “Galerista por um dia… Gonçalo

M. Tavares” exposition autour du quartier ....... 105

Conclusions ........................................................... 117

Annexes ................................................................. 123

Entrevue avec le Professeur et Architecte

Fernando Hipólito ............................................. 123

Ana Matos et les artistes de “Galerista

por um dia… Gonçalo M. Tavares” .................. 131

Bibliographie ........................................................ 147

2 7

Introduction

C’est au cours du festival littéraire Belles

étrangères 2008 qu’a eu lieu mon premier contact

avec l’écriture de Gonçalo M. Tavares. Jeune auteur

portugais d’une trentaine de livres, est né à Luanda,

en 1970. Son premier livre est publié aux éditions

Caminho, O Senhor Valéry, en 2002, et en 2008 il est

traduit en français par Dominique Nédellec aux

éditions Viviane Hamy. Cette toute première œuvre

sera décisive pour la carrière du jeune écrivain

portugais. En effet, Monsieur Valéry et la logique

marque le début d’un longue série littéraire

« O Bairro », appelée en français « Le Quartier ».

Gonçalo M. Tavares a élaboré un projet littéraire

vaste et ambitieux, celui de peupler « Le Quartier »

d’une quarantaine de petits livres, c’est-à-dire de

créer autant de personnages que de livres. Les

personnages ont une particularité non singulière,

l’auteur a choisi à chacun le nom d’un écrivain, afin

de lui rendre hommage. Cet hommage est rendu

possible grâce à la construction d’un univers, grâce à

la confection d’une maison pour les uns et les autres,

2 8

et par le biais de la narration de Gonçalo M. Tavares

et du dessin de Rachel Caiano.

D’autres séries sont signées de la plume de

Gonçalo M. Tavares, l’une d’entre elles est

« O Reino », en français « Le Royaume ». Parmi les

quatre romans noirs de cette série, nous pouvons citer

Jerusalém, ou Aprender a Rezar na Era da Técnica,

l’un traduit par Marie-Hélène Piwnik et l’autre par

Dominique Nédellec. Ces séries littéraires ont un

succès national et international ; de nombreux prix

littéraires lui ont été décernés : au Portugal le « Prix

LER/Millennium BCP » en 2004 et le « Prix

Saramago » en 2005 pour Jerusalém ; à l’étranger, le

« Prix Portugal Telecom 2007 » au Brésil, le « Prix

Internazionale Trieste 2008 » en Italie, le « Prix

Belgrado Poesia 2009 » en Servie et le « Prix

Cévennes 2009 » en France. Plus récemment, son

roman Apprendre à prier à l’ère de la technique a été

récompensé par le « Prix Fémina Étranger » et

« Médicis 2010 ».

L’étude se focalise sur la série « Le Quartier », de

la première publication O Senhor Valéry, à la

dixième, O Senhor Eliot e as conferências. Dans un

premier temps, sera présenté le projet littéraire de

Gonçalo M. Tavares. La construction cyclique de

personnages, d’un univers utopique, s’imposent dans

la Littérature contemporaine en tant que production

originale et innovatrice, toujours dans la perspective

de rendre hommage à des écrivains. L’idée de

construction sera abordée sous différents points de

vue : la cristallisation du projet littéraire qui s’appuie

sur une architecture solide, l’élaboration d’un univers

imaginaire qui est appelé « Le quartier », une

production cyclique qui ne cesse d’accroître son

2 9

nombre de publications mais également ses

nombreuses références intertextuelles. Le style de

Gonçalo qui est associé le plus souvent à un style

minimaliste – ou de synthèse –, sera également un

facteur qui orientera le travail afin de mettre en

évidence les objectifs de la série qui vont au-delà du

simple hommage. Les relations possibles entre la

formation de Gonçalo M. Tavares, son implication

dans la recherche universitaire et sa création littéraire,

peuvent être des indices pour appréhender et

comprendre comment le quartier est construit.

Il s’agit pas seulement d’élaboration littéraire, mais

également de construction architecturale. O Bairro est

construit selon différents axes. L’un d’entre eux

consiste en un effet stylistique répétitif, dont les

ingrédients littéraires répétés dans chacun des petits

livres qui constituent la série. Le domaine de

l’Architecture devient ainsi un des axes privilégiés,

avec la création d’espaces à vivre pour les personnages

fictifs, ou la description d’aménagements de lieux

comme celui de la maison, qui permettent de

confronter les différents moyens d’expression qui sont

le mot et la courbe, l’uniformisation d’un modèle

préconstruit et surtout la création d’un univers

fictionnel architectural où les mots donnent corps à une

poétique de l’espace.

Déterminer les frontières ou les limites de

« O Bairro » permettrait de définir cet espace dans

lequel cohabitent les Messieurs de Gonçalo, ou du

moins d’envisager l’avenir de cette série littéraire. Le

dessin de Rachel Caiano, présent sur chaque

quatrième de couverture des livres, met en lumière

l’évolution de l’espace où les personnages voisinent.

Le terme ‘espace’ évoque la géographie, mais

2 10

également le lieu de mémoire ou l’univers non

palpable dans lequel le lecteur se plonge qui est celui

de la lecture ou de l’imagination. Après avoir

présenté les variantes que le quartier propose en

termes de temps et de lieux, l’étude aborde l’identité

des personnages. L’attribution d’une spécialité, qui

leur est faite par le biais du titre des livres, ainsi que

le rapprochement entre les écrivains et les

personnages qui appartiennent à la fiction de Gonçalo

M. Tavares, marquent cette approche inter artistique.

« O Bairro » permet de regrouper les personnages

dans un même et seul endroit, où ils peuvent échanger

et partager leurs visions sur le monde. Il réunit ainsi

les arts et les sciences pour former un tout, un quartier

idéal ? La première motivation de l’écrivain semble

être de rendre hommage, mais il en découle une autre

tentative qui est celle de former un ensemble, une

totalité. L’universel est une perspective s’ouvrant sur

un ouvrage d’excellence qu’est l’encyclopédie, où le

Savoir rassemblerait tous les personnages de GMT,

mais également tous les écrivains auxquels il fait

référence. Des croisements sont ainsi réalisés entre

l’écrivain, qui a créé et participé à l’émancipation

intellectuelle de Gonçalo M. Tavares, et le

personnage qui fait partie de sa fiction. Ces pistes de

lecture, amèneraient le lecteur à découvrir les faits

marquants, qui ont pu inspirer l’auteur. Le travail

d’écriture de GMT est donc compris comme une

quête contre l’oubli.

Les thématiques abordées dans « Le Quartier » sont

en très grand nombre, pourtant seules quelques unes

seront analysées ici ainsi que les facteurs qui

influencent sa création, tels que : la diversité,

l’éducation, la communication d’idées philosophiques,

2 11

l’évolution intellectuelle, entre autres. L’équilibre, créé

entre les micros histoires ou micros récits, chargés

d’ironie, est structuré par plusieurs rythmes. Le dessin,

en tant qu’illustration mais aussi en tant que mode de

narration à part entière, développe des systèmes

communicatifs. Grâce aux effets de rapidité générés

par les dessins aux formes très simples et une écriture

minimale, – phrases courtes, vocabulaire accessible –,

le lecteur bascule très vite dans un univers

pluridisciplinaire ou multi artistique : l’architecture, le

cinéma, le théâtre, la sculpture… Des histoires de

O Senhor Valéry e a lógica et de O Senhor Calvino e o

passeio, les dessins qui composent le troisième livre de

la série, O Senhor Brecht e o sucesso, feront l’objet

d’une étude approfondie.

La seconde partie de ce mémoire est consacrée à

l’analyse du discours et des images, appuyée à partir

des études de Gérard Genette, Käte Hamburger ou

encore Maurice Blanchot. L’attention particulière

portée aux trois œuvres choisies permettra de tisser

des liens entre réalité et fiction, montrant que le

caractère des Messieurs de Gonçalo M. Tavares

possède des traits communs avec celui des écrivains

dont ils portent le nom.

Étudier dans une perspective comparatiste pourrait

donner lieu à la confrontation évidente de deux

œuvres littéraires. Cette étude consiste plutôt en une

approche interdisciplinaire à partir de « O Bairro ».

Certes, des comparaisons seront faites, qui

dépasseront l’univers de la Littérature ; plusieurs

domaines artistiques composent l’œuvre de Gonçalo

et seront analysés. Cette analyse permet de reprendre

la thèse suivante : il existe un langage entre les arts.

Quelle que soit la production plastique à partir d’une

2 12

interprétation de textes de O Bairro, et ses différentes

techniques, l’idée principale transmise visuellement

souligne systématiquement un point culminant qui est

celui de l’espace. Plusieurs approches sont possibles

quand un spectateur ou un lecteur découvre une

réalisation et veut se l’approprier pour créer à son

tour. L’expérience et l’interprétation du

lecteur/spectateur peut expliquer cette diversité des

découvertes d’une création.

Comment mesurer toutes les dimensions du

contact d’une œuvre littéraire avec son public ?

Plusieurs sources le permettent sous différents degrés

d’investigation. Une première évaluation de la

réception réservée à l’œuvre de Gonçalo M. Tavares

peut être réalisée à partir des traductions de ces livres

dans d’autres langues. Le succès se mesure à l’échelle

internationale, par le nombre de ventes mais

également par les nombreux prix qui lui ont été

décernés. Les personnages appartiennent à la fiction

et ils finissent par en sortir avec l’appropriation des

petits livres par ses lecteurs. Les personnages fictifs

de la série littéraire deviennent les clients d’étudiants

en architecture, par exemple. On s’inspire de

« O Bairro » pour proposer des adaptations théâtrales,

des illustrations, des performances in situ, des

maquettes architecturales, et tant d’autres.

L’interprétation et l’appropriation d’un univers

imaginaire devient réel et concret grâce aux diverses

initiatives des lecteurs de « O Bairro ». Il s’agirait de

matérialiser la pensée, ou des idées. En annexe de ce

mémoire, la transcription d’entrevues originales de

différents artistes pourra confirmer cette thèse. Le

projet littéraire se transforme ainsi en véritable

spectacle ou art de vivre, il s’inscrit très largement

2 13

dans le domaine de la culture. Les créations réalisées

à partir de la lecture prouvent qu’il existe bien un

dialogue entre les arts. La dernière partie de cette

étude tentera aussi de répondre à différentes

questions : comment peut-on traduire les mots par des

traits, par des courbes architecturales, par des mises

en scène ? L’oralité et la sensibilité seront un des

points déterminants pour vérifier que la traduction de

paroles en objets ou en représentations est possible.

2 14

2 15

I.

Projet littéraire de Gonçalo

M. Tavares

Définir les principales lignes d’une série littéraire

ne se limite pas à une présentation des personnages et

leurs caractéristiques, ni même de l’espace et du

temps dans lesquels ils sont insérés. La présentation

est fondamentale, mais son interprétation l’est

d’autant plus. Interpréter signifie proposer plusieurs

lignes d’idées, ou plusieurs sens possibles aux

schèmes qui sont privilégiés dans O Bairro de

Gonçalo M. Tavares.

S’appuyer sur différents ouvrages, principalement

des ouvrages théoriques sur la fiction et la poétique,

permettra d’ouvrir et comprendre cette création

littéraire contemporaine.

1.1. Présentation des Messieurs et des écrivains

En 2002, O Senhor Valéry inaugure un groupe de

livres rassemblés en un tout : O Bairro. Le nom qui

est attribué à la série littéraire donne quelques indices

spatiaux au lecteur. Si nous cherchons les définitions

2 16

de ce mot, nous trouvons une source géographique et

physique. Les principaux dictionnaires portugais font

ressortir une idée principale, celle de l’espace clos où

cohabitent un groupe de personnes susceptibles

d’appartenir à une même échelle ou catégorie sociale.

Nous vérifions les définitions attribuées au mot

<bairro>, dans le Dicionário da Língua Portuguesa

Contemporânea da Academia das Ciências de

Lisboa : “Conjunto habitacional com homogeneidade

e características próprias, dentro de uma

povoação.”1 ; dans le Grande Dicionário da Língua

Portuguesa : “Parte da cidade que compreendia certa

e determinada área, ocupada em geral por povos da

mesma esfera ou classe […]”2, dans le Dicionário

Enciclopédico Luso-brasileiro “Cada uma das áreas

administrativas em que se divide uma cidade”3.

Toutes ces définitions expriment le fait qu’un

quartier est bien délimité dans l’espace et en fonction

de règles civilisationnelles dont la première semble

être la cohérence sociale. Si nous approfondissons

davantage la recherche avec son origine, nous

parvenons à comprendre les mutations ou l’évolution

de cet espace4, où la marginalisation se transforme

1 Dicionário da Língua Portuguesa Contemporânea da

Academia das Ciências de Lisboa. Lisboa : Verbo, 2001. p. 460. 2 SILVA, António Morais de. Grande Dicionário da Língua

Portuguesa. 10ª ed. s/l : Confluência, 1950. [II Volume. ed. aum.

e rev.] p. 325. 3 Dicionário Enciclopédico Luso-Brasileiro. Porto : Lello &

Irmão, 1993. [Volume I] p. 282. 4 ETIM. orig.contrv. ; ou do ár. vulg. bárri (clássico barrî)

‘exterior, subúrbio’, pelo lat.tar. barrium, ou de um lat.vulg.

*barra ‘travessa, divisória’, de que se teria formado um adj.

barriu- ‘que e o que está do lado de fora’, donde o port. bairro e