Le Monde Du Mardi 04 Aout 2015

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Mardi 4 août 2015 - 71 e année - N o 21942 - 2,20 € - France métropolitaine - www.lemonde.fr Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Jérôme Fenoglio Algérie 180 DA, Allemagne 2,50 €, Andorre 2,40 €, Autriche 2,80 €, Belgique 2,20 €, Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 €, Finlande 4 €, Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 £, Grèce 2,80 €, Guadeloupe-Martinique 2,40 €, Guyane 2,80 €, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 €, Italie 2,50 €, Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 €, Malte 2,50 €, Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 €, Portugal cont. 2,50 €, La Réunion 2,40 €, Sénégal 1 900 F CFA, Slovénie 2,50 €, Saint-Martin 2,80 €, Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA L’ÉTÉ EN SÉRIES L es bombardements atomi- ques d’Hiroshima et de Na- gasaki, dont sont commé- morés cette semaine les 70 ans, posent un défi à la philosophie. Le Monde a demandé à des intel- lectuels de se pencher sur la ques- tion nucléaire. Pour Jean-Pierre Dupuy, philosophe et professeur à Stanford, en Californie, « l’exis- tence de l’arme nucléaire pose un défi extrême à la pensée. Par elle, une possibilité inouïe a fait irrup- tion dans l’histoire humaine : l’autodestruction de l’espèce ». A sa suite, Dominique Pestre, historien des sciences, s’interro- gera sur les enjeux posés par les avancées de la recherche. David Marcus, historien américain, et Yuichi Seirai, romancier japonais, éclaireront le point de vue de leurs pays respectifs. Avant ceux de Gilles Bœuf, président du Mu- séum d’histoire naturelle, et de Stuart Russell, spécialiste de l’in- telligence artificielle. LIRE PAGE 12 DÉBATS PENSER L’IMPENSABLE DESTRUCTION NUCLÉAIRE PAS DE RISQUE ZÉRO POUR L’ANTITERRORISME L a croissance impres- sionnante de la Chine ces dernières années a favorisé leur émergence : Le Monde consacre une série de six portraits aux nou- veaux milliardaires chinois. Comme Liu Dejian, 43 ans, patron geek de la société de jeux en ligne NetDragon, dont la fortune pesait 343 millions d’euros en 2014, faisant de lui un milliardaire en yuans. Resté un grand en- fant, « DJ » est fan de Lego, de la saga « Star Wars » et de « Star Trek » – il s’est fait construire une gigantesque reproduction du vaisseau spatial de la série télévisée. Obsédé par le passage du temps, il optimise sa vie en travaillant la nuit et en se consacrant au maximum à ses loisirs. LIRE PAGE 23 Liu Dejian, PDG de NetDragon. GILLES SABRIÉ POUR « LE MONDE » L’ enquête que nous pu- blions aujourd’hui le confirme : la lutte contre le terrorisme djihadiste est un combat complexe, incertain et dans lequel le risque zéro n’existe pas. Ainsi, les services de sécurité ne doivent qu’à un coup de chance inédit d’avoir évité, le 19 avril, un projet d’attentat con- tre une église de Villejuif, qui aurait pu faire des dizaines de morts. Son principal suspect, Sid Ah- med Ghlam, a été victime de sa propre maladresse : il s’était tiré une balle dans le pied avant d’ap- peler le SAMU. Pourtant, cet étu- diant algérien de 24 ans avait été signalé aux services de sécurité dès le printemps 2014 pour ses velléités de départ en Syrie. LIRE LA SUITE PAGE 13 Révélations sur l’attentat manqué de Villejuif Les enquêteurs pensent avoir identifié trois Fran- çais, commanditaires de Sid Ahmed Ghlam, l’Algé- rien qui voulait mitrailler une église à Villejuif Parmi eux, un converti toulousain, proche de Mo- hamed Merah, condamné à cinq ans de prison et parti rejoindre depuis les rangs de l’Etat islamique Les documents saisis prouvent que Sid Ahmed Ghlam a été minutieuse- ment téléguidé depuis la Syrie pour se procurer des armes et trouver une cible L’attentat a été évité fortuitement, le 19 avril, quand Ghlam s’est tiré une balle dans le pied. Il est soupçonné d’avoir tué une femme près de l’église Ghlam semble être le dernier « soldat », tardive- ment identifié, de réseaux djihadistes bien connus depuis les années 2000 LIRE PAGES 6-7 MIGRANTS TENSIONS ENTRE LE ROYAUME-UNI ET LA FRANCE LIRE PAGE 2 NATATION LE RELAIS 4 × 100 M, UNE SPÉCIALITÉ FRANÇAISE LIRE PAGE 16 CLIMAT NOUVEAU PLAN D’OBAMA POUR RÉDUIRE LES ÉMISSIONS DE CO 2 LIRE PAGE 5 ÉCONOMIE LA BAISSE DE L’EURO PROFITE AUX SOCIÉTÉS DU CAC 40 LIRE PAGE 9 L a reprise en main de Canal+ place l’industriel breton au cœur de l’attention média- tique. Mais c’est à un projet moins connu que Le Monde consacre une série d’une semaine : la boucle fer- roviaire de 3 000 km qu’il a com- mencé de construire en Afrique de l’Ouest. Vincent Bolloré, 63 ans, n’est pourtant pas un nouveau venu dans le capitalisme français. Son groupe familial est actif de- puis des générations dans l’indus- trie et le transport. On croise dé- sormais ses Bluecar, souvent si- glées Autolib’, dans les métropoles françaises, et bientôt, espère-t-il, ses trams électriques ou son nou- veau cabriolet. Plus récemment, l’homme d’affaires s’est lancé dans la publicité et les médias. Avec sa prise de contrôle de Vi- vendi, puis la reprise en main de Canal+, on redécouvre le « rai- der » fidèle à sa réputation : très impliqué, volontiers expéditif. « Nous sommes cotés en Bourse, mais la famille contrôle le capital depuis 185 ans, je n’ai donc pas be- soin de plaire. Je me fiche de mon image », jurait-il à Télérama en 2007, après ses premiers inves- tissements dans les médias. « Les coupures de presse sont celles qui cicatrisent le plus vite », aime-t-il à répéter. Un important trésor de guerre Le personnage fascine. Le milieu voit en lui un mélange rare de fi- nancier et d’industriel, capable de coups en Bourse tout comme d’in- vestissements à long terme, dans une logique de conglomérat. Il dis- pose, à Vivendi, d’un trésor de guerre de plusieurs milliards d’euros, avec lequel il n’a fait qu’une « petite » acquisition, la plate-forme Dailymotion. Ses mouvements alimentent les spéculations. Vivendi monte au capital de Telecom Italia ? On se demande si M. Bolloré renie la stratégie du groupe qui s’est dé- sengagé des télécoms ou s’il veut réaliser un coup financier. Ou en- core à renforcer son ancrage en Italie, où il aurait des vues sur Me- diaset. Cet été, Le Monde a donc choisi de raconter l’un des projets les moins connus de l’industriel. Alors qu’il règne déjà sur les ports de la région, M. Bolloré se lance à la conquête des terres. Trois re- porters ont parcouru les 3 000 km de cette ligne ferro- viaire qui traverse cinq pays d’Afrique de l’Ouest ponctuée de « bluezones » – ces zones de déve- loppement économique écologi- que –, où le groupe fait la dé- monstration de ses batteries LMP, une technologie dans laquelle il a déjà investi plus de 2 milliards d’euros. « Le chemin de fer va prendre le relais des batteries », af- firme M. Bolloré qui espère le voir rouler avant le 17 février 2022, jour du bicentenaire de l’entre- prise… et du passage de flambeau à ses enfants. p Le rail africain, l’autre bataille de Vincent Bolloré Vincent Bolloré projette de construire ou de réhabiliter 3 000 km de rails, reliant cinq pays différents. Ici, à Cotonou, au Bénin. BÉNÉDICTE KURZEN/NOOR POUR « LE MONDE » L’ÉTÉ EN SÉRIES LES MILLIARDAIRES CHINOIS www.topper.fr 7J/7 • M° BOUCICAUT • P. GRATUIT Canapés : 63 rue de la Convention, 01 45 77 80 40 Literie : 66 rue de la Convention, 01 40 59 02 10 Armoires lits : 60 rue de la Convention, 01 45 71 59 49 Mobilier Design : 145 rue Saint-Charles, 01 45 75 06 61 Meubles Gautier : 147 rue Saint-Charles, 01 45 75 02 81 PARIS 15 e CANAPÉS, LITERIE, MOBILIER : 3 000 M 2 DENVIES ! L’excellence française ! Découvrez toute la collection de fauteuils Club et de canapés-lits fabriqués en France. Club St-Nicolas Cuir Basane gold, patiné et ciré à la main, passepoil maroquinier 1590 dont 3,50 d’éco-part au lieu de 1975 Dimensions : L89 x P93 x H85 cm Structure hêtre massif, assise et dos suspension ressorts acier, assise mousse polyuréthane HR 35 kg/m 3 , ouate polyester 100 kg m 2 , dos HR 26 kg/m 3 . Prix hors livraison. OFFRES ESTIVALES

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Le Monde News paper 4 August 2015

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  • Mardi 4 aot 2015 71e anne No 21942 2,20 France mtropolitaine www.lemonde.fr Fondateur : Hubert BeuveMry Directeur : Jrme Fenoglio

    Algrie 180 DA, Allemagne 2,50 , Andorre 2,40 , Autriche 2,80 , Belgique 2,20 , Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Cte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 , Finlande 4 , Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 , Grce 2,80 , Guadeloupe-Martinique 2,40 , Guyane 2,80 , Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 , Italie 2,50 , Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 , Malte 2,50 , Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 , Portugal cont. 2,50 , La Runion 2,40 , Sngal 1 900 F CFA, Slovnie 2,50 , Saint-Martin 2,80 , Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA

    LT EN SRIES

    L es bombardements atomiques dHiroshima et de Nagasaki, dont sont commmors cette semaine les 70 ans,posent un dfi la philosophie. Le Monde a demand des intellectuels de se pencher sur la question nuclaire. Pour JeanPierre Dupuy, philosophe et professeur Stanford, en Californie, lexis-tence de larme nuclaire pose un dfi extrme la pense. Par elle, une possibilit inoue a fait irrup-tion dans lhistoire humaine : lautodestruction de lespce .

    A sa suite, Dominique Pestre,historien des sciences, sinterrogera sur les enjeux poss par les avances de la recherche. DavidMarcus, historien amricain, etYuichi Seirai, romancier japonais, claireront le point de vue de leurs pays respectifs. Avant ceux de Gilles Buf, prsident du Musum dhistoire naturelle, et de Stuart Russell, spcialiste de lintelligence artificielle.

    LIRE PAGE 12

    DBATS

    PENSER LIMPENSABLE DESTRUCTION NUCLAIRE

    PAS DE RISQUE ZRO POUR LANTITERRORISME

    L a croissance impressionnante de la Chineces dernires annes afavoris leur mergence : Le Monde consacre une sriede six portraits aux nouveaux milliardaires chinois.Comme Liu Dejian, 43 ans,patron geek de la socit de jeux en ligne NetDragon,dont la fortune pesait343 millions deuros en 2014,faisant de lui un milliardaire

    en yuans. Rest un grand enfant, DJ est fan de Lego, dela saga Star Wars et de Star Trek il sest fait construire une gigantesque reproduction du vaisseauspatial de la srie tlvise.Obsd par le passage du temps, il optimise sa vie entravaillant la nuit et en seconsacrant au maximum ses loisirs.

    LIRE PAGE 23

    Liu Dejian, PDG de NetDragon. GILLES SABRI POUR LE MONDE

    L enqute que nous publions aujourdhui leconfirme : la lutte contrele terrorisme djihadiste est uncombat complexe, incertain etdans lequel le risque zronexiste pas. Ainsi, les services descurit ne doivent qu un coupde chance indit davoir vit, le 19 avril, un projet dattentat contre une glise de Villejuif, qui aurait pu faire des dizaines de morts.

    Son principal suspect, Sid Ahmed Ghlam, a t victime de sa propre maladresse : il stait tirune balle dans le pied avant dappeler le SAMU. Pourtant, cet tudiant algrien de 24 ans avait tsignal aux services de scurit ds le printemps 2014 pour sesvellits de dpart en Syrie.

    LIRE L A SUITE PAGE 13

    Rvlations sur lattentat manqu de Villejuif Les enquteurs pensent avoir identifi trois Franais, commanditaires de Sid Ahmed Ghlam, lAlgrien qui voulait mitrailler une glise Villejuif

    Parmi eux, un converti toulousain, proche de Mohamed Merah, condamn cinq ans de prison et parti rejoindre depuis les rangs de lEtat islamique

    Les documents saisis prouvent que Sid Ahmed Ghlam a t minutieusement tlguid depuis la Syrie pour se procurer des armes et trouver une cible

    Lattentat a t vit fortuitement, le 19 avril, quand Ghlam sest tirune balle dans le pied. Il est souponn davoir tuune femme prs de lglise

    Ghlam semble tre le dernier soldat , tardivement identifi, de rseaux djihadistes bien connus depuis les annes 2000 LIRE PAGES 6-7

    MIGRANTS TENSIONS ENTRELE ROYAUME-UNIET LA FRANCE LIRE PAGE 2

    NATATIONLE RELAIS4 100 M,UNE SPCIALIT FRANAISE LIRE PAGE 16

    CLIMAT NOUVEAU PLAN DOBAMA POUR RDUIRE LES MISSIONS DE CO2 LIRE PAGE 5

    CONOMIE LA BAISSE DE LEURO PROFITE AUX SOCITS DU CAC 40 LIRE PAGE 9

    L a reprise en main de Canal+place lindustriel breton aucur de lattention mdiatique. Mais cest un projet moins connu que Le Monde consacre unesrie dune semaine : la boucle ferroviaire de 3 000 km quil a commenc de construire en Afrique delOuest. Vincent Bollor, 63 ans, nest pourtant pas un nouveau venu dans le capitalisme franais.

    Son groupe familial est actif depuis des gnrations dans lindustrie et le transport. On croise dsormais ses Bluecar, souvent sigles Autolib, dans les mtropolesfranaises, et bientt, espretil, ses trams lectriques ou son nouveau cabriolet. Plus rcemment, lhomme daffaires sest lanc dans la publicit et les mdias.

    Avec sa prise de contrle de Vivendi, puis la reprise en main deCanal+, on redcouvre le raider fidle sa rputation : trsimpliqu, volontiers expditif. Nous sommes cots en Bourse,mais la famille contrle le capital depuis 185 ans, je nai donc pas be-soin de plaire. Je me fiche de monimage , juraitil Tlrama en 2007, aprs ses premiers investissements dans les mdias. Les coupures de presse sont celles quicicatrisent le plus vite , aimetil rpter.

    Un important trsor de guerre

    Le personnage fascine. Le milieu voit en lui un mlange rare de financier et dindustriel, capable de coups en Bourse tout comme dinvestissements long terme, dans une logique de conglomrat. Il dispose, Vivendi, dun trsor de guerre de plusieurs milliards deuros, avec lequel il na fait quune petite acquisition, la plateforme Dailymotion.

    Ses mouvements alimentent lesspculations. Vivendi monte au capital de Telecom Italia ? On se demande si M. Bollor renie la stratgie du groupe qui sest dsengag des tlcoms ou sil veut raliser un coup financier. Ou encore renforcer son ancrage en Italie, o il aurait des vues sur Mediaset.

    Cet t, Le Monde a donc choiside raconter lun des projets lesmoins connus de lindustriel.Alors quil rgne dj sur les portsde la rgion, M. Bollor se lance la conqute des terres. Trois reporters ont parcouru les3 000 km de cette ligne ferroviaire qui traverse cinq paysdAfrique de lOuest ponctue de bluezones ces zones de dveloppement conomique cologique , o le groupe fait la dmonstration de ses batteries LMP,une technologie dans laquelle il a dj investi plus de 2 milliards deuros. Le chemin de fer va prendre le relais des batteries , affirme M. Bollor qui espre le voirrouler avant le 17 fvrier 2022, jour du bicentenaire de lentreprise et du passage de flambeau ses enfants. p

    Le rail africain, lautre bataillede Vincent Bollor

    Vincent Bollor projette de construire ou de rhabiliter

    3 000 km de rails, reliantcinq pays diffrents.

    Ici, Cotonou, au Bnin.BNDICTE KURZEN/NOOR POUR LE MONDE

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    OFFRESESTIVALES

  • 2 | international MARDI 4 AOT 20150123

    LE TUNNEL FORME UN GOULOT

    DTRANGLEMENTO SE RETROUVENT

    EN MASSEDE NOMBREUX

    CANDIDATSAU DPART

    Immigration Les esprits schauffent autour de CalaisParis et Londres tentent de calmer le jeu, tandis que les tablods britanniques accusent la France de laisser passer les migrants

    londres - correspondance

    Paris et Londres tentent de fairefront commun face la crise desmigrants Calais. Alors que lestensions politiques de chaquect de la Manche sont vives,avec des centaines de clandes-

    tins qui tentent chaque nuit dentrer dans lEurotunnel pour atteindre le Royaume-Uni, le ministre de lintrieur, Bernard Cazeneuve, et son homologue britannique Theresa May, ont publi, dimanche 2 aot, une tribune commune pour essayer de calmer les esprits. Pour la France comme pour le Royaume-Uni,les choses sont claires : mettre fin cette situa-tion est une priorit absolue. Nos deux gouver-nements sont dtermins y parvenir, et yparvenir ensemble , crivent-ils dans Le Jour-nal du Dimanche et le Sunday Telegraph.

    Les deux ministres tentent de replacerdans son contexte global les tensions actuel-les autour du tunnel sous la Manche. Il sagit dune crise migratoire mondiale qui ne con-cerne pas seulement nos deux pays . Pour eux, il nexiste pas de solution simple , et celle-ci doit se trouver dans toute lEurope, et

    pas seulement autour des 650 hectares duterrain dEurotunnel.

    Mais cette tentative de calmer le jeu risquedtre noye par les dclarations politiques deplus en plus virulentes dans les deux pays. Ct britannique, la dirigeante par intrim duParti travailliste, Harriet Harman, a demand la France de verser des compensations fi-nancires aux routiers et aux vacanciers bri-tanniques qui se sont retrouvs bloqus des heures, voire des jours, aux abords du tunnel. Il faut employer toutes les pressions diploma-tiques ncessaires , demande-t-elle au pre-mier ministre britannique, David Cameron.

    Depuis juin, lopration Stack , qui con-siste, ct britannique, fermer des tron-ons dautoroute prs du tunnel pour y ins-taller les camions en attente, a t mise enaction 24 fois en quarante jours. Pour les commerces locaux dans le Kent, les cons-quences conomiques sont trs ngatives : faute dautoroute pour se dplacer, de nom-breux clients ne viennent plus les voir.

    TACTIQUE DE DAVID CAMERON

    Les tablods britanniques sont dchans. En ce dbut de mois daot creux en actualit,ils nhsitent pas jeter de lhuile sur le feu. Avec une ligne dattaque rpte : la France est inefficace pour arrter les migrants. Le Daily Mail offre une pleine page lhistorien Andrew Roberts, qui titre : Est-ce que lesFranais sont responsables du chaos Ca-lais ? Oui. Est-ce quon peut sattendre plus quun simple haussement dpaules de leurpart ? Non. Selon lui, la police franaisechoisit simplement de regarder ailleurs alors que les migrants lancent chaque nuit leurs as-sauts . Pour Nick Ferrari, ditorialiste in-fluent du Sunday Express, un tablod trs an-ti-immigration, la raction des autoritsfranaises est faible, terne et inefficace . A voir les images des clandestins escaladant

    dans les camps autour de la ville. De mme, le Royaume-Uni reoit deux fois moins de de-mandes dasile que la France et six fois moins que lAllemagne, preuve que le pays nest pas une destination particulirement prise. Sim-plement, pour des raisons gographiques vi-dentes, le tunnel sous la Manche forme un goulot dtranglement o se retrouvent en masse de nombreux candidats au dpart.

    Ces derniers mois, la situation a cependantempir Calais. Les tentatives pour entrerdans lenceinte dEurotunnel se comptent souvent par milliers chaque nuit, mme si le nombre a baiss quelques centaines ceweek-end. En partie, il sagit dune cons-quence logique de la crise migratoire euro-penne : avec la guerre civile en Syrie et lechaos libyen, le nombre de candidats au d-part a augment. En dix ans, les demandesdasile dans lUnion europenne ont tripl. En partie, il sagit dune consquence de lins-tallation rcente de nouvelles barrires auport de Calais, plus difficiles pntrer. Beau-coup dimmigrs se sont reports sur le tun-nel, malgr les graves dangers. Une dizaine dentre eux ont trouv la mort ces deux der-niers mois.

    MESURES SCURITAIRESFace cette ralit, la France et le Royaume-Uni ont annonc des mesures scuritairessupplmentaires. Les deux pays vont d-bourser 10 millions deuros pour accrotre lascurit le long des voies du tunnel sous laManche, qui sajoutent aux 15 millions deuros que le Royaume-Uni stait engag payer en septembre 2014. Cent vingt policierset gendarmes supplmentaires sont surplace depuis quelques jours, portant le total 550, tandis que de nouvelles cltures de scu-rit doivent tre installes dici la fin de la semaine prochaine . Des chiens de garde etdes camras de surveillance supplmentai-res sont galement prvus.

    Au Royaume-Uni, M. Cameron veut durcirles conditions daccueil des demandeurs dasile, en rduisant leurs aides sociales. Il en-tend aussi sattaquer aux propritaires qui lo-gent des clandestins, en renforant les sanc-tions jusqu cinq ans de prison.

    Des deux cts de la Manche, la raction desautorits a un point commun : elle se con-centre sur le scuritaire et la meilleure faon de bloquer les migrants, qui fuient souventdes guerres et des conflits ravageurs. Cette absence dempathie a fait sortir de ses gonds lEglise dAngleterre, qui a choisi dentrer dansle dbat politique. Nous sommes en train de devenir un monde de plus en plus dur, et nous devenons durs les uns avec les autres, au pointque nous oublions notre humanit, estimelvque de Douvres, Trevor Willmott. Nousdevons redcouvrir ce que cest que dtre hu-main, et que tous les hommes comptent. p

    ric albert

    les grillages, il conclut que la police ne cher-che pas vraiment faire face.

    Pourtant, David Cameron na pas une seulefois attaqu publiquement les autorits fran-aises sur ce terrain. Selon M. Ferrari, il sagit dune simple tactique de la part du premier ministre britannique, afin de se garder unemarge de manuvre dans le cadre de ses n-gociations avant le rfrendum sur lUnion europenne. Il faudrait que nous ayons unpeu moins peur du gouvernement franais , lance pour sa part Nigel Farage, le chef de file du Parti pour lindpendance du Royaume-Uni (UKIP, anti-europen, anti-immigration).

    Face ces attaques, les ractions fusent enFrance. Le dput (Les Rpublicains) de lAisne, Xavier Bertrand, candidat de droiteaux lections rgionales dans le Nord - Pas-de-Calais - Picardie, y est all de sa charge dans Le Journal du dimanche. Il menace dedemander aux autorits franaises de laisser passer les migrants jusquau Royaume-Uni. Aprs tout, le contrle des frontires pourraitlogiquement revenir au Royaume-Uni, qui est le pays o souhaitent se rendre les mi-grants. Je dis nos amis anglais : notre exas-pration est totale. Un bras de fer ne serait pasla meilleure solution, mais il faut quils sa-chent ce que beaucoup de Franais pensent : sion na pas su empcher [les migrants] de venir[en Europe], eh bien, on va arrter de les emp-cher de partir [en Angleterre]. Le premier adjoint au maire de Calais, Emmanuel Agius, adopte la mme approche : Si a continue comme a, avec autant de provocation outrancire, je crois qu un moment donn,nous aussi nous allons faire de la provocation,et nous allons dire : laissons passer les mi-grants, et M. Cameron va se dbrouiller. Ils se-ront sur son territoire, sur le port de Douvres.

    Derrire ce match de petites phrases setrouve souvent une vision dforme de laralit. Au Royaume-Uni, les images de d-sesprs essayant, soir aprs soir, de pntrerdans le tunnel donnent limpression que le pays est pris dassaut par les immigrants dumonde entier. Le systme daides socialessoi-disant trop gnreux est point du doigt.

    Cette ide ne rsiste pas ltude des faits.Depuis le dbut de lanne, 230 000 migrants sont entrs dans lespace Schengen. Seule une toute petite proportion se retrouve Calais : ily a actuellement environ 3 000 personnes

    Heurts entre la police britannique et des militants anti-immigration, le 1er aot, Folkestone.JUSTIN TALLIS/AFP

    Londres

    Dieppe

    BrightonCalais

    Douvres

    Folkestone

    FRANCE

    ROYAUME-UNI

    Amiens50 km

    La Manche

    Kent

    Eurotunnel

  • 0123MARDI 4 AOT 2015 international | 3

    Loffensive turque exacerbe les divisions kurdesLe prsident du Kurdistan irakien, Massoud Barzani, a appel les combattants du PKK quitter la rgion

    ANALYSEcizre (turquie) - envoy spcial

    Rarement recherche etjamais atteinte, lunitdes diffrentes entitspolitiques et militaires

    kurdes prsentes aux confins de laTurquie, de lIrak et de la Syrie est nouveau remise en cause alors quAnkara poursuit son offensive contre la gurilla du Parti des tra-vailleurs du Kurdistan (PKK). Dans un communiqu publi samedi 1er aot Erbil, Massoud Barzani, prsident du Kurdistan dIrak autonome, a appel le PKK loi-gner son champ de bataille de la r-gion du Kurdistan irakien pour que les civils ne deviennent pas des victi-mes de cette guerre , faisant rf-rence aux rgions montagneuses quil occupe proximit des fron-tires turque et iranienne, et bom-bardes sans relche par laviation turque depuis le 24 juillet.

    Attentat contre un oloducLa dclaration de M. Barzani est in-tervenue aprs une frappe a-rienne ayant caus le mort de neufpersonnes dont une femme en-ceinte Zarkel, un village situdans les monts Qandil, en terri-toire irakien, o le PKK a tabli sonquartier gnral dans les annes 1990. Avant de se rtracter diman-che, le PKK avait, lui, revendiqu le29 juillet la responsabilit dun at-tentat commis en territoire turc contre un oloduc utilis par le Kurdistan irakien pour exporter sa production de ptrole brut vers le port de Ceyhan, sur la cte m-

    diterranenne de la Turquie. Cetteattaque affectait de fait la princi-pale source de revenu dErbil et lefondement de sa relation stratgi-que avec Ankara, une alliance aujourdhui au cur des tensions entre Massoud Barzani et le PKK.

    La Turquie a amorc un rappro-chement spectaculaire avec Erbil au tournant des annes 2010, An-kara dcidant alors dencourager lexploitation des importantes res-sources ptrolires et gazires duKurdistan irakien afin de diversi-fier ses sources dapprovisionne-ment et de renforcer sa position dans le transit des hydrocarbures vers lEurope. Concidant avec la volont dErbil de prendre ses dis-tances lgard de lEtat central ira-kien, dont il dpend encore finan-cirement, cette entente sest dou-ble dune dimension politique, le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan, alors premier ministre, ayant un temps tent dutiliser le prestige de Massoud Barzani auprs des Kurdes de Turquie pourfaire pice linfluence du PKK.

    Cest pourtant en Syrie que sestscelle lopposition entre le prsi-dent du Kurdistan et le PKK. Re-nouant ses liens anciens avec le r-gime syrien, le PKK a pu investir la faveur de la guerre civile et enbonne intelligence avec Damas les rgions kurdes du pays et y impo-ser son monopole. A travers ses manations syriennes, le PKK amis en place dans trois enclaves territoriales majoritairement kur-des un systme politique noyautpar ses cadres et soutenu par un savoir-faire militaire qui faisait

    alors dfaut aux autres forma-tions kurdes syriennes, notam-ment celles que Massoud Barzanistait efforc de runir et dorgani-ser depuis Erbil au dbut de la r-volution. La rpression souvent brutale dont ces formations ont fait lobjet par le PKK et ses allis a renforc la dfiance entre les deuxparties au point de les placer ponc-tuellement au bord de la confron-tation arme.

    En combattant le Front Al-Nosra

    puis lEtat islamique (EI), le PKK, dont les Units de protections du peuple (YPG) constituent la milice syrienne, a su justifier sa domina-tion politique en se posant en uni-que dfenseur des Kurdes de Syrie face aux islamistes. Loffensive de lEI sur le Kurdistan dIrak, lance ily a un an, na cependant pas pro-duit lunit attendue entre les Kur-des.

    Dclarations modres

    En passant par le territoire syrien pour porter secours aux yzidis (Kurdes irakiens adeptes dun culte hrit du zoroastrisme), abandonns leur sort par les pes-hmergas kurdes irakiens, puis pris au pige par lEtat islamique sur le mont Sinjar partir du 9 aot 2014, le PKK a pris position de manire indite dans les zones dinfluence du Parti dmocratiquedu Kurdistan (PDK) de M. Barzani. Par ailleurs, si des peshmergas ira-kiens ont port assistance aux

    combattants du PKK et des YPG Koban partir de novembre 2014,ils nont pas permis Massoud Barzani de regagner une quelcon-que influence politique en Syrie.

    En reprenant loffensive contre lePKK aprs un cessez-le-feu de plus de deux ans, Ankara ne manque pas une occasion de se prsenter comme pleinement soutenue par le prsident du Kurdistan irakien dans sa lutte contre la gurilla kurde. Bien que les dclarations dece dernier restent modres et ap-pellent avant tout une reprise du processus de paix, les divers orga-nes de propagande du PKK dpei-gnent depuis la fin de la semaine dernire Massoud Barzani commeun pantin de la Turquie et un valetde Recep Tayyip Erdogan, allant jusqu accuser le Parti de la justiceet du dveloppement (AKP) du prsident turc et le PDK dtre, en-semble, responsables de lassassi-nat des villageois de Zarkel. p

    allan kaval

    La propagande

    du PKK dpeint

    Massoud Barzani

    comme un pantin

    de la Turquie et

    un valet de Recep

    Tayyip Erdogan

    LHISTOIRE DU JOURUn sportif, symbole du racisme contre les Aborignes

    sydney - correspondance

    R gulirement hu, surnomm le singe , insult coupsde Retourne au zoo , lAborigne Adam Goodes, lundes plus clbres joueurs de football australien, est de-venu en quelques annes un porte-parole de sa communaut et il le paie sur le terrain. Avoir t lu en 2014 Australien de lan-ne ne lui a pas fait gagner le respect de tous les supporteurs. Loin de l. Les insultes se sont intensifies ces derniers mois, de-puis quil a excut une danse aborigne aprs avoir marqu un but. Ctait une rponse aux attaques venues des gradins, mais certains y ont vu une dclaration de guerre . Des supporteurs sont depuis alls trop loin, poussant le joueur des Sydney Swans stopper son activit, fin juillet, pour une dure indtermine.

    Dans les tribunes, on se dfend de tout racisme : certains as-surent conspuer un homme et non sa communaut, ou encorenen vouloir qu la manire de jouer dAdam Goodes. Mais lar-gument est peu convaincant et laffaire a pris une dimension

    nationale. Le hashtag #IStandWithA-dam ( Debout avec Adam ) a tmassivement partag sur les rseauxsociaux depuis la fin juillet. Le pre-mier ministre, Tony Abbott, a pris sadfense et a demand au public detraiter le joueur avec respect . Nous ne tolrons pas ces relents deracisme en Australie , a-t-il pro-clam. Linfluent homme daffairesaustralien James Packer sest dit honteux dentendre le public huerAdam Goodes. Lactrice Cate Blan-

    chett, tout comme des Aborignes travers toute lAustralie, ont pris la dfense du joueur sur Twitter. Et le public lui a renduhommage dans les stades, samedi 1er aot, en portant son maillot au numro 37 ou en exhibant le drapeau aborigne.

    Laffaire dpasse dsormais le milieu du footy , le footballaustralien, et Adam Goodes devient le symbole dun malaise na-tional. Je pense que tous ces vnements reprsentent un mo-ment trs important dans notre histoire notre nation en avait peut-tre besoin , a estim le prsident des Sydney Swans, An-drew Pridham. Il est all jusqu comparer Adam Goodes Rosa Parks, figure de la lutte contre la sgrgation raciale aux Etats-Unis dans les annes 1950. Le sportif est un ardent dfenseur des Aborignes et milite pour que cette communaut soit re-connue dans la Constitution australienne. Un rfrendum doit tre organis en 2017 pour reconnatre les Aborignes commeles premiers habitants de lle-continent.

    Prsents dans le pays depuis plus de 40 000 ans, ceux-ci repr-sentent la population la plus pauvre et la plus marginalise en Australie. A larrive des colons britanniques en 1788, leur nom-bre tait estim environ un million. Ils sont moins de 500 000dsormais, sur une population de 23 millions dhabitants. p

    caroline tax

    ADAM GOODES, UN CLBRE JOUEUR DE FOOTBALL AUSTRA-LIEN, EST RGULIRE-MENT INSULT DANS LES STADES

    LE CONTEXTE

    PKKFond en 1978

    Le Parti des travailleurs du Kur-distan a dclar la guerre lEtat turc en 1984. Initialement ind-pendantiste et marxiste-lniniste, il dfend dsormais une autono-mie au sein des Etats dans les-quels il se trouve. Sa branche sy-rienne domine les zones kurdes du pays.

    PDKCr en 1946

    Fond par Moustapha Barzani (pre de Massoud Barzani), le Parti dmocratique du Kurdis-tan contrle le nord de la rgion autonome du Kurdistan irakien. Ses partisans hors dIrak sont marginaliss par le PKK.

    Progression en Europe : semestre solide en France,acclration en Espagne

    France : monte en puissance du multiformat

    Troisime anne conscutive de hausse du chiffre daffaires

    Tous les formats contribuent la hausse organique des ventes

    Stabilit de la marge oprationnelle hors la hausse de la taxe sur lessurfaces commerciales (Tascom), lintgration de DIA et le transfertdes loyers de galeries commerciales Carmila

    Autres pays dEurope : forte hausse de la rentabilit

    Retour la croissance organique du chiffre daffaires avec une netteacclration de lEspagne

    Tendances encourageantes en Italie, lensemble des autres pays voitsa rentabilit augmenter

    Pays mergents : poursuite de la dynamiquede croissance des rsultats

    Excellentes performances en Amrique latine

    Position de leader de la distribution alimentaire conforte au Brsil

    Carrefour fait voluer son modle en Chine ; retour la croissance Taiwan

    Poursuite des investissements et acclrationdu multiformat

    Investissements soutenus de 804 M dans la remise niveau,la modernisation et le dveloppement du parc

    Poursuite de lexpansion avec louverture de 316 magasins de proximit,83 supermarchs et 14 hypermarchs ; poursuite de notre dveloppementdigital

    Intgration des magasins DIA en France.

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  • 4 | international MARDI 4 AOT 20150123

    Assassinat dun cacique du rgime au BurundiLa mort du lieutenant gnral Adolphe Nshimirimana intervient aprs un scrutin prsidentiel trs contest

    johannesburg -

    correspondant rgional

    Lembuscade, dans Bujumbura, na laissaucune chance au lieutenant gnral Adolphe

    Nshimirimana. Deux tirs de roquette RPG ont immobilis le 4 4 de lminence grise de la s-curit au Burundi, dimanche 2 aot au matin. Puis des rafales ont t tires bout portant tra-vers sa portire. Les tueurs, selonun tmoin cit par lagence Reu-ters, taient quatre et portaient des uniformes militaires. Le dcsde leur cible a t constat son arrive lhpital.

    Depuis, le Burundi attend lesconsquences de la mort d Adolphe , pice matresse du pouvoir burundais, ancien chefdtat-major, ex-administrateur gnral du Service national derenseignement (SNR). Il nest pascertain que les arrestations quiont eu lieu dans les heures sui-vantes permettront de tirer au clair comment un homme charg, en coulisse, du systme

    scuritaire burundais, comman-dant la hirarchie parallle delarme, bras droit du prsident Nkurunziza et patron des Imbo-nerakure structure sa dvo-tion, dont une partie est arme apu tre tu aussi facilement.

    Alors que le pays se sait au bordde la guerre civile, la raction, sitel tait le calcul des commandi-taires de lassassinat, aurait pu tre immdiate et terrible.

    Dans la journe, une source pro-che du pouvoir disait la diffi-cult quavaient les responsa-bles des Imbonerakure, mouve-ment de jeunesse du parti au pou-voir dot dune aile qualifie de milice par les Nations unies, tenir leurs hommes .

    Le pouvoir burundais, en tho-rie, a tout intrt continuer de tenir ses Imbonerakure. En casde massacres, le Rwanda voisin serserverait le droit dintervenir et les soutiens de Pierre Nkurunziza au sein de la rgion (la Tanzanie,en premier lieu, mais aussi le Congo-Kinshasa) seraient bien en peine de justifier leur proximit avec un rgime massacreur.

    Combien de temps cette logiquetiendra-t-elle ? Toutes les sourcesbien informes, ces derniers temps, parlent de pourrisse-ment et de radicalisation des deux camps au Burundi : celui du prsident Nkurunziza, rlu le21 juillet avec 69 % des suffrages, comme celui des forces qui conti-nuent de contester sa lgitimit, et dont une partie vient de son propre camp.

    Un embryon de rbellion tentede se former sur les cendres du mouvement de protestation cras Bujumbura par les forces de scurit. Des militaires impli-qus dans la tentative de putsch de la mi-mai, et dautres encore, ont dsert pour rejoindre cegroupe, entour encore de secret. Plusieurs attaques sans lende-main ont eu lieu au nord et au suddu pays. Les services de renseigne-ment et donc Adolphe Nshimiri-mana ont t suspects davoir partiellement infiltr le noyau re-belle pour mieux le dtruire.

    Paralllement, depuis plusieursmois, des loyalistes du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, ont rpt que la contestation tait organi-

    se depuis des quartiers tutsi deBujumbura, tentant de donner la crise une dimension ethnique. Jusquici, cette manuvre achou. Mais, compte tenu des expriences de grandes violences subies par le Burundi dans lepass sur cette base, gnrale-ment la suite de tentatives decoup dEtat et dassassinats politi-ques (comme celui du prsident Melchior Ndadaye, en 1993), lamort dAdolphe Nshimirimana constitue une bombe potentielle.

    Pilier du pouvoirA Bujumbura, son prnom suffi-sait pour donner un air de me-nace la plus anodine des phra-ses. Adolphe tait lun des hommes la fois les plus puis-sants, les plus riches, les plus craints du Burundi. Il tait lun des trois piliers du pouvoir actuel,aux cts du prsident Pierre

    Nkurunziza et du commissaire depolice chef, Alain-Guillaume Bu-nyoni, secrtaire permanent du Conseil national de scurit.

    Plonger dans les affaires de Bu-jumbura, cest tomber imman-quablement sur les noms de cestrois hommes, faisant fonction de parrains pour leurs associs dans les secteurs de lessence, latlphonie, le trafic dor, jus-quaux fournitures de haricots pour nourrir les policiers.

    Au sein du parti au pouvoir, cer-tains ont t exasprs par cette mainmise sur une conomie, trop petite, trop peu partage. De plus, les bnficiaires des secteurs-cls se trouvent bien au-del des barri-res ethniques : une preuve de plus que le ressort de la crise burun-daise na rien dun antagonisme entre Hutu et Tutsi, mais nette-ment plus voir avec une lutte pour le pouvoir et laccs aux res-

    sources dun pays pauvre et fragile.Vingt-quatre heures aprs las-

    sassinat du lieutenant gnral, la tension demeure. La prsidence dela Rpublique a lanc un appel aucalme dans un pays qui ressem-ble, de plus en plus, une grenade dgoupille. Cest dans le quartier o il a t assassin, Kamenge, quAdolphe Nshimirimana avait cr, en 1993, des groupes de d-fense hutu aprs lassassinat de Melchior Ndadaye. La violence avait alors un visage ethnique au Burundi. Il avait aussi organis la

    scurit de responsables politi-ques hutu, rfugis dans un htel pour chapper aux milices tutsi qui ravageaient la capitale.

    Un autre homme tait parti lextrieur du pays chercher des armes et constituer le noyau de cequi allait devenir le CNDD, rbel-lion, puis parti politique, au pou-voir depuis 2005. Il sappelait Lo-nard Nyangoma. Pouss dehors, au temps de la rbellion, par un groupe rival lintrieur du CNDD,o se trouvaient Pierre Nkurun-ziza et Adolphe Nshimirimana,M. Nyangoma a pris, le 31 juillet, latte du Conseil national pour le respect de laccord dArusha pour la paix et la rconciliation au Bu-rundi, et la restauration de lEtat de droit, une structure de lopposi-tion en exil, en attendant la suitedes vnements, et, peut-tre, le passage la lutte arme. p

    jean-philippe rmy

    M. Ntanyahou ferme face lextrme droite isralienneAprs deux crimes attribus des extrmistes juifs, lopposition a tax de laxisme le premier ministre

    jrusalem - correspondance

    C est le chef dun gouver-nement sous pressionqui est apparu, diman-che 2 aot, devant les camras. Benyamin Ntanyahou, lair som-bre, a employ des mots graves. Pouvait-il en tre autrement aprs deux crimes horribles , selon ses propres mots, attribus des extrmistes juifs israliens ?Le premier ministre de lEtat h-breu se veut dtermin appli-quer la tolrance zro aprs la mort dun bb palestinien brlvif en Cisjordanie et lattaque au couteau dun colon ultraortho-doxe juif lors de la Gay Pride de J-rusalem, un acte qui a provoqu lamort dune jeune Isralienne etbless cinq autres manifestants.

    Benyamin Ntanyahou a assurvouloir combattre vigoureuse-ment ces manifestations de haine, le fanatisme et le terrorisme do quils proviennent . Cette dnon-ciation des mthodes employes par les juifs les plus radicaux est rare dans la bouche dun dirigeant coutumier sen prendre au terro-risme palestinien. Prs dun an aprs le meurtre du Palestinien Mohammed Abou Khdeir, brl

    vif le 2 juillet 2014 par des extr-mistes juifs Jrusalem, Benya-min Ntanyahou est de nouveau confront la radicalisation dune frange de la socit isralienne.

    La police isralienne privilgietoujours la piste de colons isra-liens dans lincendie volontaire dela maison de la famille Dawabsha, vendredi 31 juillet, dans le villagede Douma, en Cisjordanie. Mme si trs peu de dtails sur lenqute ont t rvls cause dun ordrede censure, Benyamin Ntanya-hou a indiqu avoir fait passer comme consigne aux services is-raliens de scurit de tout fairepour retrouver les coupables.

    Frange la plus radicaleCes derniers jours, lopposition parlementaire isralienne na pas mnag ses critiques contre lechef du gouvernement et sa coali-tion trs droite, fervents soutiende la colonisation. Isaac Herzog, la tte de lUnion sioniste (centre gauche), a tax Bibi de laxismeestimant que lorsque lEtat le veut, il peut lutter contre le terro-risme . Mais le reproche le plus svre est venu de lun de ses an-ciens ministres, Yar Lapid (cen-tre), pour qui le premier ministre

    a perdu le contrle de lEtat . En rponse, le cabinet de scurit a dcid dtendre la dtention ad-ministrative aux juifs extrmis-tes. Une disposition hrite du mandat britannique qui permetdemprisonner pour une dureindtermine et sans motif, unepratique jusqualors exclusive-ment rserve aux Palestiniens.

    La consigne est claire : il fautmettre hors dtat de nuire la frange la plus radicale de la socitisralienne qui na cess de se d-velopper, notamment dans les co-lonies. Il aurait certainementfallu agir en amont contre ces l-ments extrmistes , concde Em-manuel Navon, professeur de sciences politiques luniversit de Tel-Aviv et membre du Likoud, interrog par Le Monde. Mais il re-lativise leur importance : Les ex-

    trmistes responsables des derni-res attaques sont la marge de la socit. Mme Naftali Bennett, le ministre le plus proche des colons[charg de lducation de lactuel gouvernement et la tte du partidextrme droite Foyer juif], a condamn ces agissements. Les groupuscules violents ne reprsen-tent rien politiquement. Selon lui, il faut les diffrencier du reste des colons de Cisjordanie qui ontvot en masse pour le parti dupremier ministre ou ses allis lorsdes dernires lections.

    Une explication rejete par lesdirigeants palestiniens. Immdia-tement aprs lattaque en Cisjor-danie, le prsident de lAutorit pa-lestinienne, Mahmoud Abbas, a fait le lien entre le meurtre du bbet la politique de colonisation me-ne par le gouvernement isra-lien . Plusieurs voix en Isral se sont fait entendre pour dnoncer un mal profond dans la socit is-ralienne. Lors du rassemblement Tel-Aviv contre les crimes de haine et le racisme qui a rassemblsamedi plusieurs milliers de per-sonnes, Shimon Prs a scand de-vant la foule : Celui qui incite la haine contre les Arabes dIsral, quil ne stonne pas lorsquon in-

    cendie des glises, des mosques et, qu la fin, on brle un bb dans la nuit. Une attaque peine voile de lancien prsident isralien contre le premier ministre en fonctions, qui avait conjur ses lecteurs se dplacer en masse lors du dernier scrutin affirmant que des bus entiers de citoyens arabes dIsral avaient t affrts jusquaux bureaux de vote.

    Pour sattaquer ces drives anti-palestiniennes et homophobes, Gideon Rahat, professeur au d-partement de sciences politiques de luniversit hbraque de Jru-salem, conseille de mettre le nez dans les programmes des coles religieuses, notamment celles fi-nances par lEtat. Il faudrait pou-voir voquer lhomosexualit dans les yeshivot [centre denseigne-ment hbraque] pour parvenir davantage de tolrance, mais cest impossible, cest tabou. Il en est de mme pour ce qui est des Arabes , analyse le chercheur. Avant de con-clure : Tout le monde sattend d-sormais des reprsailles palesti-niennes. Une fois quelles auront eu lieu, le gouvernement reprendra sa rhtorique scuritaire et en profi-tera pour ne rien changer. p

    nicolas ropert

    Lorsque lEtatle veut, il peut lutter contre

    le terrorisme ISAAC HERZOG

    Union sioniste (centre gauche)

    Forces de scurit dployes dans Bujumbura, dimanche 2 aot, aprs lattentat.LANDRY

    NSHIMIYE/AFP

    Le pays ressemble

    de plus en plus une grenade

    dgoupille

    LES DATES

    201525 avril Le CNDD (au pouvoir) dsigne Pierre Nkurunziza comme son candidat llection prsidentielle malgr lavis dune partie de ses responsables. Ds le lendemain, manifestations anti-troisime mandat dans la capitale, Bujumbura.13 mai Tentative rate de coup dEtat, dirige par un gnral issu du CNDD.25 juin Un autre gnral annonce le dbut dun mouvement arm.24 juillet Le prsident Nkurun-ziza est dclar vainqueurdu scrutin prsidentiel.31 juillet Lonard Nyangoma prend la tte dune coalitionde lopposition en exil et affirme quun vide constitutionnel aura lieu le 26 aot.2 aot Assassinat du lieutenant-gnral Adolphe Nshimirimana.

    CANADALes lecteurs appels aux urnes en octobreLe premier ministre cana-dien, le conservateur Stephen Harper, a annonc, dimanche 2 aot, la dissolution de la Chambre des communes et lorganisation dlections lgislatives le 19 octobre. Jai rencontr le gouverneur gn-ral qui a accept ma demande de dissoudre le Parlement , a dclar M. Harper aprs son entretien avec David Johns-ton, reprsentant de la reine dAngleterre, Elizabeth II, chef dEtat en titre. Cette dissolu-tion lance la campagne pour llection de 388 dputs dansun scrutin majoritaire uni-nominal un tour. (AFP.)

    MEXIQUEUn photojournaliste et quatre femmes tusUn photojournaliste et qua-tre femmes, dont une mili-tante des droits de lhomme, ont t tus par armes feu, dans un appartement de Mexico. Ruben Espinosa, 31 ans, qui travaillait notam-ment pour la prestigieuse re-vue Proceso et le journal AVC Noticias de Veracruz, tait venu se rfugier Mexico, il y a deux mois, aprs avoir reu des menaces. Son corps a t dcouvert, vendredi 31 juillet au soir, dans un appartement de la capitale. (AFP.)

  • 0123MARDI 4 AOT 2015 plante | 5

    Obama annonce un plan ambitieux pour le climatDici 2030, les centrales thermiques amricaines devront rduire de 32 % leurs missions de gaz effet de serre

    PARIS CLIMAT 2015washington - correspondant

    Au prsident climatosceptique et rpublicain de la commissionsnatoriale charge de

    lenvironnement, James Inhofe, qui avait considr en fvrier, boule de neige en main, quil faisait trs froid en hiver, le prsident des EtatsUnis, Barack Obama, pourrait faire remarquer, lundi 3 aot, quil fait trs chaud en t.

    Alors que ltat durgence a tdclar, vendredi 31 juillet, en Ca-lifornie, en proie dimportants incendies, les fortes chaleurs ontoblig la Maison Blanche dpla-cer la crmonie de prsentation de nouvelles rgulations visant rduire les missions de gaz ef-fet de serre et donc lutter contre le changement climatique. Cel-le-ci devait se tenir lintrieur dubtiment, lundi, alors quelle avaitt prvue initialement sur lunede ses pelouses adjacentes.

    Les nouveaux objectifs fixs auxcentrales thermiques amricaines que M. Obama devait dtailler lundi, mais que le Washington Posta publis dans son dition du 2 aot, sont plus ambitieux que ceux prsents initialement en juin 2014. Dici 2030, les Etats-Unis devront rduire de 32 % leursmissions de gaz effet de serre lies la production dlectricit, sur la base de celles enregistres en 2005. La premire version visaitune rduction de 30 %.

    Dlicates transitions

    Le plan amricain pour une ner-gie propre (Clean Power Plan), pi-lot par lAgence de protection de lenvironnement (EPA), allie la ri-gueur la flexibilit. Plus question pour les Etats de miser sur leffica-cit nergtique ou leffet dvic-tion du charbon au profit du gaz deschiste, devenu abondant aux Etats-Unis au cours de la dernire dcennie, mais dont la production entrane des missions de m-thane, au fort pouvoir de rchauf-fement. Laccent est au contraire mis sur les nergies renouvelables,comme le solaire et lolien, dont

    la part pour la production dlectri-cit passera 28 % en 2030, au lieu de 22 % initialement.

    Ladministration compte sub-ventionner ces sources dnergiepour accompagner les Etats dans leurs dlicates transitions. En ef-fet, les centrales thermiques au charbon, dont la prminence nacess dtre remise en cause par lamonte de celles au gaz, comp-tent encore pour plus de la moitide la production dlectricit dans14 Etats et pour un tiers dans 25, selon lAgence dinformation sur lnergie (EIA), soit la mme part quau niveau national. Dans troisEtats charbonniers , la Virgi-nie-Occidentale, le Kentucky et le Wyoming, cette part est mme suprieure 87 % !

    Pour tenter de dsarmer les op-

    positions, la version du plan qui devait tre prsente lundi fixe aux Etats un dlai supplmen-taire de deux ans, jusquen 2022, pour sengager dans ces rduc-tions, voque des mutualisationsentre Etats et prvoit une plus grande souplesse pour viter lespnuries qui seraient lies la transition. Cette flexibilit ne seracependant pas suffisante pour ceux qui sopposent cette atta-

    que en rgle contre les 1 200 cen-trales charbon que comptent encore les Etats-Unis. Dans le sc-nario de la premire version du plan publi en mai par lEIA, ellesignifiait dj larrt dun tiers decette production dlectricit en 2030, soit 104 gigawatts, parrapport la production de 2005.

    Elu du Kentucky, le chef de la ma-jorit rpublicaine du Snat, MitchMcConnell, a de longue date fait part de son opposition aux ambi-tions de lEPA. Il a invit les Etats les plus dpendants du charbon sengager dans une gurilla juridi-que en dnonant lintervention de lEtat fdral dans ce quil consi-dre comme des affaires relevant de leur seule responsabilit.

    Faute de disposer dune majo-rit au Congrs sur ces questions

    environnementales, M. Obamana pas pu mettre sur pied le mar-ch du carbone quil avait initiale-ment envisag. Mais la partie estcependant complique pour les thurifraires du Roi charbon qui dnoncent par avance les sur-cots de ce plan pour lconomie amricaine alors que ladminis-tration promet au contraire aux consommateurs une baisse de leurs factures dlectricit, avan-ant mme le montant extrme-ment prcis de 85 dollars (77 euros) par an une fois les objec-tifs atteints. Si les Etats rechignent prsenter un plan, lEPA pourraen effet leur en imposer un.

    Ladministration a recours lavoie rglementaire et au bras arm de lEPA, forte de larrt rendu par la Cour suprme

    en 2007. Cet arrt a dispos que le dioxyde de carbone est un pol-luant et que lagence est donc fon-de, en vertu du Clean Air Actadopt quatre dcennies plus tt, lutter contre ses missions. Lin-dustrie a dailleurs commenc anticiper cette volution selon lEIA, qui avait dj indiqu enmars que la production dlectri-cit par la combustion du char-bon allait baisser de 12,9 gigawattsen 2015, dans un march pourtanten expansion de 20 gigawatts, principalement dans lolien.

    Depuis des mois, M. Obama necesse de marteler ses ambitionsenvironnementales, partagesces derniers jours par la candidatedmocrate linvestiture pour llection prsidentielle de 2016, Hillary Clinton, qui a dvoil un projet ambitieux pour lnergie solaire. Fidle son cap, le prsi-dent a multipli les annonces de-puis plus dun an, de la premire version du plan un accord de li-mitation dmissions polluantes avec la Chine, en novembre 2014, et au chiffrage des objectifs amri-cains de rduction des gaz effet de serre communiqus en marsdans la perspective de la conf-rence internationale sur le climat prvue Paris en dcembre. p

    gilles paris

    La Californie, sec, dvore par les flammesUne vingtaine dincendies ont provoqu lvacuation de milliers de personnes

    san francisco - envoye spciale

    P lus de 1 940 pompiers,180 camions, quatre avi-ons bombardiers deau et19 hlicoptres. Malgr les im-portants moyens dploys, Rocky Fire , le plus importantincendie qui ravage actuelle-ment la Californie, ntait ma-tris qu 5 % dimanche 2 aot,selon les dernires donnes ren-dues disponibles par Cal Fire, lagence californienne de protec-tion contre les feux. En comptantles organismes locaux, tatiques et fdraux, 9 600 pompierssont mobiliss autour dunevingtaine dincendies dans cet Etat de louest des Etats-Unis, quifait face son quatrime t descheresse daffile.

    Vendredi 31 juillet, le gouver-neur Jerry Brown a dcrt ltat durgence, dbloquant ainsi des fonds supplmentaires et des ren-forts humains pour venir bout des feux qui ont cot la vie un pompier de 38 ans, Dave Ruhl, et pouss des milliers de personnes abandonner leur domicile. La svre scheresse et le climat ex-trme ont transform quasimenttout lEtat en poudrire, a com-ment Jerry Brown dans un com-muniqu vendredi soir. Nos cou-

    rageux pompiers sont en premire ligne et nous ferons tout notre pos-sible pour les aider.

    Rocky Fire , qui stend surtrois comts dans la rgion de Lower Lake, 170 km au nord de San Francisco, a dj ravag 19 hectares de fort sur plus de 200 km. Les pompiers seffor-cent pour lheure dempcher le feu, qui a progress de faon im-portante dans la nuit de samedi dimanche, de stendre un p-rimtre encore plus large. Jus-quici, les flammes ont aval24 maisons, dtruit 26 btimentset en menacent 6 301 autres.

    900 feux de plus quen 2014

    A 160 kilomtres lest de Lower Lake, aux pieds de la chane demontagne de la Sierra Nevada, 900 hectares ont t dtruits parle Lowell Fire en neuf jours.Les autorits esprent venir bout de lincendie, actuellement matris 80 %, dici au 10 aot.Cinq incendies principaux con-sument la vgtation des nom-breux parcs naturels rpartis lelong de la Sierra Nevada. Le plusimportant, le Willow Fire , adj dtruit 2 000 hectares de fo-rt. Dans le nord de lEtat, les ar-bres brlent galement en une di-zaine dendroits. Enfin, la rgion

    de Los Angeles nest pas par-gne, avec trois principaux foyers lextrieur de la grande agglo-mration.

    Plus de 3 400 feux se sont dcla-rs en Californie depuis le dbut de lanne, soit environ 1 000 deplus que lors dune anne moyenne. Ce chiffre quivaut aussi 900 feux de plus quen 2014 la mme poque, afait savoir Daniel Berlant, porte-parole de Cal Fire. Les autorits craignent un record dincendiescette anne si la scheresse ex-trme persiste, et tout indique que ce sera le cas.

    Car si les pompiers ont russi venir bout de nombreux incen-dies une trentaine ont t

    teints au mois de juillet , ils ne parviennent pas enrayer le rythme des dparts de feu. Cest un vritable marathon, pas unsprint , a dclar samedi Ken Pimlott, directeur de Cal Fire, auquotidien USA Today. Seule lar-rive de la pluie, et je ne parle pas de quelques orages isols, mais daverses durables, pourra faire la diffrence , a-t-il ajout.

    Si la foudre est majoritaire-ment responsable en ce qui con-cerne le nord de lEtat, les causesde chaque incendie nont pas en-core t dtermines. Mais lessols arides, qui nont pas vu tom-ber plus que quelques gouttes depluie depuis des mois, favorisentles embrasements.

    Au mois davril, pour la pre-mire fois de lhistoire de la Cali-fornie, le gouverneur Jerry Browna ordonn une rduction de 25 %de la consommation deau delEtat en raison de la scheressehistorique. En juin, les Califor-niens ont montr quils avaient conscience de lurgence et prisleur part de responsabilit en li-mitant leur consommation au-del des objectifs, de 27,3 %. Maissans coup de pouce de la mto,le marathon est parti pourdurer. p

    elvire camus

    Laccent est mis

    sur les nergies

    renouvelables,

    comme le solaire

    et lolien

    ENVIRONNEMENTLes Nations unies se fixent 17 objectifs de dveloppementLes 193 Etats membres des Nations unies se sont mis daccord, dimanche 2 aot, sur un ambitieux programme de dveloppement durable de la plante pour les quinze prochaines annes, qui de-vrait tre entrin lors dun prochain sommet, en septem-bre. A lissue dune semaine de ngociations intenses au sige de lONU, les 17 objectifs de dveloppement durable (ODD) pour la priode 2015-2030 ont t adopts par consensus. Ils remplacent les huit objectifs du millnaire, adopts en 2000. Les 17 ODD visent radiquer la faim et lextrme pauvret, rduire les ingalits au sein des Etats et entre Etats, atteindre lgalit entre hommes et femmes, amliorer la ges-tion de leau et de lnergie et agir vite contre le change-ment climatique. (Reuters.)

    ANIMAUXLe Zimbabwe accuse de braconnage un nouveau chasseur amricainUn nouveau chasseur de tro-phes amricain a t mis en cause, dimanche 2 aot, au Zimbabwe, suspect davoir chass un lion sans permis en avril, tandis que son orga-nisateur de safari a t en-tendu par la police. Le gou-

    vernement zimbabwen a ordonn une vaste enqute sur toute lindustrie de la chasse, aprs le scandale de la mort du lion Cecil, chass hors de la rserve animalire de Hwange par le dentiste amricain Walter James Pal-mer. Des restrictions ont t annonces sur la grande chasse (lions, lphants, lo-pards), dsormais interdite prs de la rserve. (AFP.)

    La centrale thermique au charbon John E. Amos, au second plan, Poca, en Virginie-Occidentale, en mai 2014. ROBERT GALBRAITH/REUTERS

    San Diego

    Los Angeles

    San Francisco

    300 km

    TATS-UNISTATS-UNIS

    CALIFORNIE

    NEVADA

    MEXIQUEMEXIQUE

    Ocan Pacifique

    Rocky FireLowell Fire

    Willow Fire

    LE CHIFFRE

    39 %Part du charbon dans

    la production dlectricit

    aux Etats-Unis en 2014

    Si le plan amricain pour une nergie propre est mis en uvre, la part du charbon dans la pro-duction dlectricit aux Etats-Unis tombera de 39 % en 2014 27 % en 2030, selon lAgence pour la protection de lenvironnement. La part du gaz naturel restera 30 % lhorizon 2030, tandis que les nergies renouvelables repr-senteront 28 % (contre 12 % aujourdhui avec lhydraulique). Le nuclaire reprsente, lui, 20 % de llectricit produite.

    - CESSATIONS DE GARANTIE

    COMMUNIQUE - 105811En application de larticle R.211-33 du livre II du code du tourisme,

    LASSOCIATIONPROFESSIONNELLEDE SOLIDARITE DUTOURISME (A.P.S.T.)

    dont le sige est situ : 15, ave-nue Carnot - 75017 PARIS, an-nonce quelle cesse daccorder sagarantie :

    SAKARTOURSINTERNATIONAL STI

    Immatriculation :IM 075 12 0144

    SARL au capital de 4 440 000 Sige social : 15-19 rue du

    19 janvier 92380 GARCHESLassociation prcise que la cessa-tion de sa garantie prend effet 3jours suivant la publication de cetavis et quun dlai de 3 mois estouvert aux clients pour produireles crances.

  • 6 | france MARDI 4 AOT 20150123

    Sur la pistedes commanditaires de lattentat manqude lglise de VillejuifLes enquteurs pensent avoir identifi les Franais qui ont tlguid, depuis la Syrie, Sid Ahmed Ghlam, lAlgrien qui sest tir une balle dans le pied

    ENQUTE

    Lenqute a dbutcomme un gag. Au boutdu fil, un apprenti ter-roriste un peu mala-

    droit vient de se tirer une balle dans la jambe :

    Le SAMU de Paris, bonjour ! Oui, bonjour, au secours Vous tes sur la voie publique,

    Monsieur ? Oui, sur la voie publique

    Ahhh ! () Jsuis dehors l. Ils onttir dans mon pied

    Tir dans vos pieds ! Avec avecune arme, monsieur ?

    Quelques minutes plus tard, lapolice dcouvre le bless gisant sur le trottoir au pied de sa rsi-dence tudiante, dans le 13e arron-dissement de Paris : Sid Ahmed Ghlam, un tudiant algrien de 24 ans. Tandis quil est emmen lhpital, les policiers remontent une trace de sang jusqu sa voi-ture. A lintrieur, une kalach-nikov, deux armes de poing, un gilet pare-balles et des documentsmanuscrits sur un projet datten-tat. Dans sa chambre, ils mettent la main sur trois autres kalach-nikovs et trois gilets pare-balles.Lanalyse du matriel informati-que confirme leurs inquitudes :le jeune homme envisageait, comme il la reconnu par la suite, dattaquer une glise de Villejuif,dans le Val-de-Marne, le matin mme, ce dimanche 19 avril.

    Lattentat na jamais eu lieu.Dans des circonstances qui res-tent claircir, une jeune femme, Aurlie Chatelain, a t tue dans sa voiture gare quelques cen-taines de mtres de lglise Sainte-Thrse de Villejuif. Sid Ahmed Ghlam attribue ce meurtre un complice, mais lADN de la vic-time a t retrouv sur sa mancheet lexpertise balistique a tabli que la mme arme avait tu Aur-lie Chatelain et transperc sa jambe. Toujours est-il que cemeurtre, apparemment non pr-mdit, a fait drailler un scnario

    crit depuis plusieurs semaines.La maladresse du jeune homme

    est un coup de chance indit dansles annales de lantiterrorisme. Il va permettre de mettre au jour unprojet dattentat orchestr depuis la Syrie par des djihadistes fran-ais, que les services de renseigne-ment pensent avoir identifis. Surleur principale hypothse de tra-vail plane un spectre, connu des services depuis plus de dix ans : Fabien Clain, un proche de Moha-med Merah lauteur de la tuerie de Toulouse en 2012 considrcomme un des principaux anima-teurs de la filire dite dArtigat, en Arige, au dbut des annes 2000.

    Tlguid depuis ltranger

    Le dossier dinstruction dresse, par le jeu des relations de ses pro-tagonistes, un tableau vivant de lagalaxie djihadiste de ces quinze dernires annes. Cette enqute tiroirs commence par le dcryp-tage de dizaines de fragments de correspondances retrouvs dansle matriel informatique de Sid Ahmed Ghlam. En moins de trois jours, les hommes de la Sous-di-rection antiterroriste (SDAT) et de la Direction gnrale de la scu-rit intrieure (DGSI) restaurentles fichiers effacs. Leurs auteursnapparaissent pas, mais le con-tenu est explicite : ltudiant a vi-siblement t tlguid depuis ltranger.

    Laspect le plus intressant deces changes rside dans la prci-sion des instructions qui lui sont envoyes. Une de ces missives lui

    indique comment rcuprer desarmes dans une voiture vole sur un parking dAulnay-sous-Bois, enSeine-Saint-Denis :

    Tu vas trouver sur cette rue unesandwicherie qui est dans un an-gle, a sappelle LAtmosphre. () Tu regardes parmi les voitures ga-res l, et tu cherches une Renault Mgane. () Tu regardes sur la roue avant droite, tu vas trouver lescls poses dessus. () Tu ouvres, turcupres le sac et tu vas le ranger dans ta voiture. () Une fois quecest fait tu vas garer ta voiture plus loin et tu la laisses, tu revien-dras la rcuprer demain matin. () Tu rentres en transport la maison. () Met des gants quand tu touches la voiture. () Le pa-quet, cest ce que tu as besoin pour travailler. Quand tu as rcupr lesac, envoie-moi un message.

    Mais cest une autre instructionqui va permettre aux enquteursde remonter jusquaux possiblescommanditaires. Son auteur sug-gre ltudiant de se rendredans un garage de Pierrefitte-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), pour rcuprer une deuxime voiture afin dy cacher son arsenal : Quand tu arrives l-bas, tu de-mandes parler Rabi. Ds que tule vois tu lui dis : Je viens de lapart de Vega et Thomas pour rcu-prer la BMW 318. Les acteurs de lopration ont pris soin de crypter toutes leurs conversa-tions. Mais ils ont commis un im-pair : ils ont livr aux enquteursun surnom et un prnom.

    Il faudra quelques jours seule-ment la DGSI pour exploiter cet indice : Vega sappelle en ralit Macreme A., comme la confirmle grant du garage, et son acolyteThomas M. Les deux hommes, originaires de Seine-Saint-Denis,sont partis en Syrie dbut 2015 et apparaissent dans la mme pro-cdure de filire djihadiste que Fabien Clain. Prsent comme leur comparse , ce Toulousainde 36 ans dorigine runionnaise aurait jou un rle majeur dans

    leur endoctrinement depuis laSyrie.

    Selon une note des services derenseignement, Fabien Clain ap-parat ds 2001 dans le radar delantiterrorisme. Son frre Michel et lui ont fond un groupusculesalafiste et pous deux conver-ties qui portent la burqa ce qui leur vaut le surnom de clan desBelphgor dans le quartier du Mirail. Leur groupuscule fu-sionne fin 2004 avec une autre communaut, structure autour dun Franais dorigine syrienne, Olivier Corel, dit lEmir blanc .

    A loccasion des runions orga-nises dans la ferme de lmir Ar-tigat, les frres Clain rencontrent Abdelkader Merah et Sabri Essid,

    les frre et beau-frre de Moha-med Merah. Considre commeun des noyaux historiques du dji-hadisme franais, la cellule dArti-gat apparat dans plusieurs dos-siers de terrorisme, dont celui de Merah. En 2009, Fabien Clain a tcondamn cinq ans de prison pour avoir anim une filire dacheminement vers lIrak. Partirejoindre les rangs de lEtat islami-que aprs sa libration, il na pu tre entendu par les enquteurs.

    Microcosme

    Le volet franais de lenqute a enrevanche permis la mise en exa-men de trois personnes elles aussi connectes de faon plus ou moins directe danciennes cel-lules djihadistes. Parmi elles figureune autre vieille connaissance de lantiterrorisme : Rabah B., dit le Kabyle , souponn davoir or-ganis la livraison des armes ca-ches dans la Mgane lattention de Sid Ahmed Ghlam. Il avait t interpell puis relch faute de preuves lors du dmantlement en 2005 du rseau Chrifi, dont onze membres ont t condam-ns en 2011 pour un projet datten-tat contre la DST, la Direction de la surveillance du territoire, lanctrede la DGSI. Le Kabyle a conti-nu en frquenter plusieurs aprs leur sortie de prison.

    Les deux autres mis en examen,galement souponns davoir particip la livraison des armes, nont jamais t impliqus dans des affaires de terrorisme. Mais leur cercle relationnel illustre l encore le microcosme de la nbu-leuse djihadiste et sa porosit avec le milieu du banditisme. Le pre-mier est un proche de Moussa

    Dans des

    circonstances qui

    restent claircir,

    une jeune femme

    a t tue dans

    sa voiture gare

    prs de lglise

    Sainte-Thrse

    de Villejuif

    Coulibaly, qui avait agress trois militaires au couteau Nice le 3 f-vrier. Quant au second, il fr-quente un ancien membre du Groupe islamique combattant marocain, suspect davoir com-mandit les attentats de Casa-blanca et de Madrid au dbut des annes 2000.

    Un autre homme, Pascal K., a tinterpell aprs lidentification deson ADN sur une brosse cheveuxretrouve chez Ghlam. Il a finale-ment t relch, mais les enqu-teurs ont dcouvert que son frre Franck, un dserteur de larme franaise ayant particip une opration extrieure au Liban, avait t llve de Farid Benyettou lancien mentor de Chrif Koua-chi, lun des auteurs de la tuerie de Charlie Hebdo.

    Autant de connexions qui retra-cent lhistorique de la famille du djihadisme franais. Les anciens rseaux des annes 2000 ont plant leurs graines. Sid Ahmed Ghlam tait leur dernire jeune pousse. Jusqu ce quil se tire une balle dans le pied. p

    soren seelow

    sur la devanture mauve constelle de photos de paninis, une promesse : Le got et la qualit . En passant la porte decette petite crperie des Yvelines, les poli-ciers nimaginaient pas tomber sur un re-paire dislamistes. Cest en dmlant les filsde lenqute sur le projet dattentat contre une glise de Villejuif, dans le Val-de-Marne, vit de justesse en avril, quils d-couvrent ce commerce tonnant, dont plu-sieurs employs font lobjet dune fiche S pour Sret de lEtat .

    Les trois hommes mis en examen pouravoir particip la livraison des armes des-tines au principal suspect, Sid Ahmed Ghlam, se retrouvaient rgulirement dans ce petit snack, rebaptis crperieconspirative par les enquteurs.

    Abdelkader J. y travaillait jusqu son in-carcration, Farid B. y faisait des remplace-ments tandis que Rabah B., dit le Ka-byle , en tait un client rgulier. Cest dans

    la salle exigu de la crperie, sur ses siges recouverts de Ska fuchsia, que le Ka-byle aurait demand Abdelkader J., se-lon les propos de ce dernier, de lui fournir une voiture, des armes et des gilets pare-balles.

    Mes trois employs sont des sucres

    En creusant la personnalit des salaris du restaurant, les enquteurs ont exhum un petit concentr de lhistoire du terrorisme franais : son patron a t condamn le23 octobre 2008 trois ans de prison pour son appartenance Ansar Al-Fath ( lespartisans de la victoire ), un groupe soup-onn dacheminer des combattants enIrak et de prparer des attentats sur le sol franais. Cette cellule avait t cre par unancien membre du GIA, dj condamn pour avoir fourni un soutien logistique lors des attentats de 1995 Paris.

    Un de ses trois employs, trs dfavora-

    blement connu des services antiterroris-tes , est un ancien dtenu de Guanta-namo, arrt en Afghanistan en 2002 et re-lch en 2004. Selon la Direction gnrale de la scurit intrieure, le deuxime est un militant salafiste souponn de pro-slytisme et de grenouiller dans les mi-lieux radicaux. Quant au troisime, il estmis en examen dans laffaire Ghlam et a t en relation avec un ancien membre du Groupe islamique combattant marocain, dmantel au dbut des annes 2000.

    En dehors dAbdelkader J., aucun em-ploy de la crperie na t inquit dans ledossier Ghlam. Le grant a tout de mmet entendu par les enquteurs. Interrog sur le profil de ses salaris, il sest fendu dune rplique savoureuse : Mes trois em-ploys sont des sucres. Sur la devanture deson restaurant, un slogan : Vous mangez sucr ou sal ? p

    so. s.

    La crperie conspirative , concentr franais du djihadisme

    Le dossier

    dinstruction

    dresse un tableau

    vivant de la

    galaxie djihadiste

    de ces quinze

    dernires annes

    A N T I T E R R O R I S M E

  • 0123MARDI 4 AOT 2015 france | 7

    A gauche : scells sur la porte de la chambre de Sid Ahmed Ghlam (portrait ci-contre), dans une rsidence tudiante Paris. KENZO TRIBOUILLARD/AFP

    A droite : devant une glise de Villejuif (Val-de-Marne), le dimanche 26 avril, une semaine aprs lattentat ratde Sid Ahmed Ghlam. ERIC BAUDET/DIVERGENCE IMAGES

    Sid Ahmed Ghlam, entre les mailles du filetMalgr la surveillance, l Algrien est all deux fois en Turquie sans veiller les soupons

    Il a longtemps gard le silence. Puis sest perdu dansdes explications peu vraisemblables. Confront aux

    lments du dossier, Sid Ahmed Ghlam, le principal suspect du projet dattentat vit de justesse Villejuif (Val-de-Marne), en avril,a finalement dcid de sexpli-quer. Lors de son audition devant un juge antiterroriste, le 19 juin, il a propos un rcit trs dtaill etsans doute partiel de la gense de son projet.

    Tout commence par un voyageen Turquie, fin octobre 2014. Le jeune homme fait lobjet depuis leprintemps dune fiche S qui dsigne un danger pour la s-ret de lEtat en raison de ses vellits de dpart en Syrie ; il a mme t convoqu pour un entretien administratif le 3 octobre. Mais son vol pour Alger, le 15 octobre, nalerte pas les services : Ghlam est algrien et se rend rgulirement dans son pays dori-gine. Ce que les policiers ignorent alors, cest quil profite de ce d-placement pour rejoindre Is-tanbul, en Turquie, le 29 octobre. Il y restera un mois.

    Ses activits sur place sont en-core nbuleuses. Il dit avoir re-joint Istanbul en compagnie dun homme rencontr en Algrie, qui lui disait avoir des contacts au sein de lEtat islamique (EI). Dans

    une maison daccueil de lEI Istanbul, un djihadiste franais se faisant appeler Abu Al-Mouthana, originaire de Ville-pinte (Seine-Saint-Denis), lui aurait alors expliqu que son ami passerait en Syrie, mais que lui devait rentrer en France. AlMouthana lui aurait donn 2 000 euros pour ses frais de re-tour , en lui demandant de resteren contact sur Internet.

    Dbut 2015, le mystrieux AlMouthana lui aurait demand de revenir en Turquie. Sid Ahmed Ghlam prend un billet pour Istanbul le 3 fvrier. Il reste dix jourssur place. A len croire, il nest jamais pass en Syrie. Suivant des instructions envoyes par mail, il se serait content de prendre un bus pour Gaziantep, une ville une quarantaine de kilomtres dela frontire. Six personnes, dontle fameux Abou Al-Mouthana,lauraient alors rejoint dans une maison daccueil pour lui expli-

    quer quil fallait quil les aide en France . Al-Mouthana voque unattentat contre la gare de Ville-pinte, ville dont il est originaire.

    A son retour en France, ltu-diant algrien a un ordre de mis-sion oral. Mais lenvironnementtechnique ralis par les servi-ces de renseignement ne permet pas dtablir quil a franchi la fron-tire, ni mme douvrir une pro-cdure judiciaire. Malgr deux voyages en Turquie en moins de trois mois, Sid Ahmed Ghlam nest pas considr comme dangereux. Le jeune homme a ds lors toute libert pour oprer ses reprages.

    Petit soldat du djihad

    Le premier, la gare de Villepinte, lui permet de constater quil ny a que des Arabes : cette premirecible est carte. Ses interlocu-teurs lui demandent alors de trou-ver une bonne glise avec du monde , ce dont attestent les fi-chiers retrouvs sur son disque dur. Il en repre deux Villejuif et propose, de faon plus floue, de vi-ser le Sacr-Cur , Paris. Il suggre galement une attaque dans un train pour des frres , son interlocuteur lui ayant assur,peut-tre pour le motiver, que dautres attentats taient prvus le mme jour : Ils peuvent tuer au minimum 160 personnes, au

    max 400 , crit ltudiant. Un de ses correspondants lui demande alors daller chercher des trucs sur un parking dAulnaysousBois, savoir des armes et des gi-lets pare-balles cachs dans une voiture. On lui ordonne gale-ment de rcuprer une BMW dansun garage de Pierrefitte, en se r-clamant de Vega et Thomas . Ghlam a assur au juge quil ne connaissait ni lun ni lautre.

    Son rcit ne recoupe pas totale-ment lhypothse de travail des enquteurs, qui suspectent trois djihadistes franais, Vega , Thomas et Fabien Clain, un ancien cadre de la filire dArtigat, en Arige, dtre impliqus dans lopration. La question est de savoir qui se cache derrire ce fa-meux Abou Al-Mouthana , rsume une source proche du dossier. Ce nom de guerre corres

    pondil lun des trois hommes suspects pour les enquteurs ou un intermdiaire ? Son existence est en tout cas avre par deux messages dans lesquels Ghlam demande de ses nouvelles.

    Le vendredi 17 avril, ltudiantreoit une instruction lui deman-dant de passer laction le diman-che suivant. Son interlocuteur le prvient galement quun autre frre , qui devait laccompa-gner, ne le rejoindra peut-tre pas.Ghlam semble hsiter, rpond quil ne se sent pas prt. Il affirme aujourdhui que ce deuxime frre tait finalement bien pr-sent Villejuif, et que cest lui qui aurait accidentellement tu Aur-lie Chatelain dans sa voiture, prs de lglise, la scurit de larme tant partie toute seule .

    Cest ce moment que Ghlamdit avoir pris conscience de lasituation et dcid de tout arrter.Il affirme stre volontairement tir une balle dans la jambe pour se rendre la police les enqu-teurs le souponnent de stre bless par simple maladresse. Une maladresse salutaire pour les services de renseignement, qui nont pas su comprendre que cet tudiant en informatiquesans casier judiciaire stait transform, au fil des mois, en petit soldat du djihad. p

    so. s.

    Lors de son

    reprage la gare

    de Villepinte,

    il constate quil

    ny a que des

    Arabes : cette

    premire cible

    est carte

    LE MOT

    DIEU TE GARDE Si lenqute a progress rapide-ment grce au savoir-faire des services de lutte antiterroriste, deux procs-verbaux laissent tout de mme songeur quant la formation de certains enqu-teurs. Le 28 avril, un gardien de la paix de la Sous-direction anti-terroriste interroge un suspect sur un message reu par Ghlam, qui se termine par ces mots : rabbi yahfadek . Connaissez-vous le dnomm Rabbi Yahfa-dek ? , demande-t-il, soupon-nant quil pourrait sagir l dun commanditaire. Le 10 juin, face un autre suspect, le policier rci-dive : Ce courriel est sign Rabbi Yahfadek, connaissez-vous cet individu ? Pas du tout. Le prnom Rabbi vous voque-t-il quelque chose ? Pas du tout . Une simple recherche sur Googlelui aurait permis de comprendre quil sagissait dune formule de politesse usuelle signifiant Dieu te garde .

    Lors de son

    audition,

    il a propos un

    rcit trs dtaill

    de la gense

    de son projet

    .

  • 8 | france MARDI 4 AOT 20150123

    Dans les rgions, pas de fusion des rectoratsLes rectorats actuels seront regroups dans treize rgions acadmiques

    Enseignants et personnelsadministratifs de lducation nationale sontrassurs : la nouvelle or

    ganisation territoriale arrtevendredi 31 juillet en conseil desministres abandonne dfinitive-ment lide de la fusion dacad-mies. Alors que le passage de 22 13 rgions fait disparatre neuf postes de prfets de rgion et neufdirecteurs gnraux dagences r-gionales de sant, ainsi que plu-sieurs dizaines de postes de direc-teurs rgionaux des administra-tions de lEtat, la rforme nimpli-quera pas une remise en cause des rectorats actuels.

    Larbitrage de Matignon acte lemaintien des acadmies dans leurs limites gographiques ac-tuelles. Sur le papier, celles-ci sontcependant regroupes en 13 r-gions acadmiques chapeau-tes par un comit rgional aca-dmique o sigent les diff-rents recteurs. Lun deux, dsign recteur de rgion acadmique ,

    reprsentera donc ses collgues auprs du futur super-prsidentde rgion.

    Fusion ou cooprationrenforce entre les acadmies dune mme rgion : les deux sc-narios taient sur la table depuis le mois davril. Un rapport dins-pection remis au premier minis-tre prconisait la premire op-tion. Les acadmies de Caen etRouen taient entre autres con-cernes, comme celles de Lille etAmiens, Poitiers et Limoges, etc. Un mcano territorial d-nonc par la quasi-totalit des or-ganisations syndicales.

    Le meilleur compromis

    Auprs du gouvernement, largu-ment de la spcificit de lad-ministration de lducation natio-nale, port par toute linstitution des syndicats enseignants au ca-binet de la ministre, en passantpar les personnels des rectorats , a donc t entendu. Une adminis-tration qui regroupe la moiti des

    fonctionnaires dEtat de lHexa-gone et permet laccueil de quel-que 12 millions dlves du pre-mier et du second degr dans 64 000 tablissements.

    Le maintien dune proximit etdun pilotage fort et structurant dece service public tait une prio-rit, indique-t-on dans lentou-rage de la ministre de lducation. Les 13 rgions acadmiques se-raient ainsi le meilleur compro-

    mis entre ce pilotage de proximit des tablissements, la cohrencedes politiques ducatives, et lob-jectif dune simplification de lor-ganisation administrative sou-hait par la rforme territoriale.

    On reste sur ce quon connat,mais dans un schma proche decelui de lIle-de-France, o le rec-teur de Paris est depuis longtemps linterlocuteur du prsident de largion , estime Christian Cheva-lier, du syndicat enseignant SE-UNSA. A limage du Service intera-cadmique des examens et con-cours (SIEC), commun aux trois acadmies franciliennes (Paris,Versailles et Crteil), cette coop-ration renforce pourrait permet-tre des mutualisations de servicesentre acadmies. Si synergies il y a, celles-ci devront absolumentse faire sans dnaturer la qualit du service , plaide Frdric Sve,du SGEN-CFDT.

    Les recteurs des rgions acad-miques seront ceux des acad-mies dAix-Marseille, Besanon,

    Bordeaux, Caen, Lille, Lyon, Mont-pellier, Nancy-Metz et Paris. Ils ont t choisis dans un souci dquilibre territorial prcise-t-on au ministre. Autrement dit :pour ne pas concentrer tous les pouvoirs, et surtout pour mna-ger les susceptibilits ou fierts locales, les recteurs des rgions acadmiques ne sont pas toujoursceux installs dans les nouveauxchefs-lieux de rgion Rouen, Toulouse ou Dijon par exemple.

    Reste savoir quels pouvoirsleur seront donns. Aucun lien hirarchique avec les autres rec-teurs, indique le ministre, mais des pouvoirs propres dans les domaines qui intressent la r-gion : politique dorientation, lutte contre le dcrochage sco-laire, formation professionnelle, etc. Le recteur de rgion sera sim-plement primus inter pares, prci-se-t-on. Un dcret doit venir claircir ses comptences avant le1er janvier 2016. p

    sverin graveleau

    Fusion

    ou coopration

    renforce

    entre les

    acadmies

    dune mme rgion : les deuxscnarios taient

    sur la table

    Le stationnement Paris dsormais payant en aotLa fin de la gratuit estivale sinscrit dans une rforme globale des tarifs

    L es traditions se perdent. De-puis le 1er aot, il en cote degarer sa voiture Paris ent. Le stationnement, jusquici gratuit dans 60 % des rues de la ca-pitale en aot, est dsormais payant partout. Il est logique et normal que les automobilistes paient le juste prix douze mois surdouze, se flicite Christophe Na-jdovski, adjoint (EELV) charg des transports de la maire de Paris, Anne Hidalgo. Lentretien de les-pace public cote de largent toute lanne la collectivit. En outre, la gratuit du stationnement est une incitation lusage de la voi-ture , rappelle llu cologiste.

    La mesure nest pas des plus po-pulaires. Pour la droite pari-sienne, la Ville est prte tous lesexpdients pour gratter quelques sous , comme le dit Jean-Fran-ois Legaret, maire (Les Rpubli-cains) du 1er arrondissement.

    La fin de la gratuit estivale sins-crit dans une rforme globale en-gage en dcembre 2014. Depuis le 1er janvier, la gratuit partielle a t supprime le samedi. En se-maine, le stationnement est payant jusqu 20 heures, au lieu de 19 heures. Les tarifs ont aug-ment pour le stationnement ro-tatif et surtout pour les Parisiensqui bnficient dun barme r-sidentiel . Gratuite jusquici, la carte de stationnement rsiden-tiel est vendue 45 euros par an de-puis le 1er fvrier. Sy ajoute unehausse du tarif de stationnement quotidien ou hebdomadaire ce dernier passe de 3,25 9 euros. Au final, un Parisien qui se gare toutelanne dans la ville voit son bud-get passer de 169 euros 513 euros.

    Lexcutif municipal relativisela flambe des cots pour lauto-mobiliste. Entre 2002 et 2014, leprix du stationnement rsidentiel avait baiss de 80 %. Le nouveautarif reste infrieur celui de

    2001 , rplique M. Najdovski. Llu cologiste justifie ce quil ap-pelle une remise niveau par lavolont de lutter contre les voi-tures ventouse et dinciter lusage des parkings souterrains pour dgager de lespace sur la voirie.

    Des sanctions plus dissuasives

    Sous couvert darguments colo-gistes, la politique dAnne Hidalgo obit uniquement des objectifs financiers, rtorque Nathalie Kos-ciusko-Morizet, chef de file duparti Les Rpublicains Paris. LaMairie prend aux habitants lar-gent que le gouvernement a refusde prlever sur les transporteurs routiers en renonant mettre en place lcotaxe prvue par le Gre-nelle de lenvironnement , sindi-gne lancienne ministre de lco-logie de Franois Fillon. Qui rap-pelle que lcotaxe poids lourds sur le priphriqueaurait pu rapporter 18 millions deuros la Ville.

    La rforme globale du station-nement devrait, elle, engendrer 50 millions deuros de recettessupplmentaires en 2015, pour des recettes de 68 millions deuros en 2014.

    Pour orienter les comporte-ments des automobilistes, lex-cutif parisien veut aussi rendre lessanctions plus dissuasives. 90 %des automobilistes ne paient pas leur stationnement rotatif, selon M. Najdovski. Ils prfrent prendrele risque dune amende de 17 euros.Le manque gagner pour la Ville cause de la fraude se chiffre en cen-taines de millions deuros.

    La Ville projette aussi daug-menter le montant des contra-ventions. La loi de janvier 2014 surla modernisation de laction pu-blique donne aux communes ledroit de fixer les barmes. Maisses modalits dapplication sont encore prciser. On attend aussi de la Prfecture de policequelle amliore le contrle du sta-tionnement , dit M. Najdovski.En 2016, la Ville indexera une par-tie de sa dotation la Prfecture de police sur la performance des verbalisations. Le prfet de police sest engag mettre davantage de moyens ds cet t. Echapperaux pervenches risque dtremoins facile. Mme en aot. p

    batrice jrme

    Un Parisien

    qui se gare toute

    lanne dans

    la ville voit son

    budget passer

    de 169 euros

    513 euros

    ACCIDENTQuatre jeunes tus et dix blesss graves sur une route du MorbihanQuatre adolescents ont trouv la mort, dans la nuit du samedi 1er au dimanche 2 aot, sur une dpartemen-tale prs de Rohan (Morbi-han), et dix mineurs ont t gravement blesss alors quils circulaient bord de la mme fourgonnette. Il y a deux causes videntes cet acci-dent : la conduite sans permis et la surcharge du vhicule , a dclar le parquet de Van-nes. Les rsultats des analyses sanguines ne sont pas encore connus. (AFP.)

    Runion dexperts autour du crash de la Malaysia AirlinesDes morceaux de valise chous sur une plage de lle de La Runion ont t ache-mins en mtropole avec le volet bordant laile dun avion(le flaperon ) pour dtermi-ner sils proviennent du Boeing 777 de la Malaysia Air-lines, disparu le 8 mars 2014 avec 239 personnes bord. Les enquteurs franais et malaisiens devaient se runir lundi 3 aot Paris. (AFP.)

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  • 0123MARDI 4 AOT 2015 conomie & entreprise | 9

    Le CAC 40 peut dire merci leuro faibleLa faiblesse de la monnaie unique face au dollar a apport entre 5 % et 10 % de croissance aux entreprises

    Leffet miroir est saisis-sant. Au dbut de la d-cennie, les entreprisestemptaient contre la

    vigueur de leuro face au dollar p-nalisant leurs exportations, accu-saient les cours levs du ptrole dalourdir leurs frais et se rjouis-saient de la vigueur des marchs mergents. Cinq ans plus tard,cest linverse. La dprciation de la devise europenne, et la chute du baril dopent les performances des socits qui sinquitent du ralentissement de leurs activitsen Chine et en Amrique du Sud. Au final, les entreprises du CAC 40qui faisaient grise mine retrou-vent des couleurs.

    Pour la trentaine de socitsayant prsent leurs comptes sur les quarante de lindice, les rsul-tats ont progress de 8 % par rap-port la mme priode de 2014 etslvent 25 milliards deuros, se-lon un classement publi par LesEchos, vendredi 31 juillet. Un netrebond, puisque les bnfices de lensemble du CAC 40 au premier semestre 2014 navaient pro-gress que de 1,6 %.

    Augmentation des exportations

    Cette amlioration est due la baisse de moiti du prix du baril de ptrole en un an, fluctuant aujourdhui autour de 50 dollars, et au recul de 30 centimes de la de-vise europenne glissant 1,10 dollar pour 1 euro. Cest une bonne nouvelle. Toutefois la baisse de leuro a un impact pour les en-treprises beaucoup plus important que celle du ptrole , estime GillesGuibout grant dactions euro-pennes chez Axa IM. Cela permet aux groupes de regagner en com-ptitivit et de reprendre leur crois-sance . Les entreprises europen-nes cotes vendent la moiti de leur production hors de la zone euro. 35 % de leurs ventes sont en zone dollar prcise-t-il et donc

    bnficient de la dprciation de leur monnaie. On estime que cela reprsente 5 % de croissancemoyenne supplmentaire du chif-fre daffaires pour lensemble de cessocits europennes au premiersemestre , ajoute M. Guibout.

    Limpact semestriel pour les so-cits du CAC 40 varie entre 5 et10 %, selon le degr dexposition lexportation, selon M. Gui-bout. Ainsi, Legrand, le fabricantde matriel lectrique annonceune hausse de son chiffre daffai-res de 8,4 %, dont 6,9 % lis auchange. Mieux, sur le seul secondtrimestre, Sanofi a enregistr16,1 % de progression de ses ven-tes, le renforcement du dollarface leuro contribuant hau-teur de 11,2 points. A changes constants, la croissance des ven-tes du groupe pharmaceutiqueest de 4,9 %. De mme Essilor aconnu un bond de ses ventes de20 % sur cette priode. Hors effetde change, la variation est de6,6 % pour le numro un mon-dial des verres ophtalmiques.

    Les principaux bnficiairessont les groupes ayant une basede production en Europe,comme laronautique (Airbus,Safran, Thales) et le luxe (LVMH,Kering et LOral). Pendant desannes, les industriels de laro-nautique ont dnonc les dan-gers dun euro fort dans un sec-teur o les transactions se fonten devise amricaine. Cette vi-

    gueur favorisait dentre de jeuleurs concurrents doutre Atlan-tique, leur production se faisanten dollars. Louis Gallois, alors pa-tron dEADS, avait cette formulechoc : Quand leuro sapprcie de 10 centimes vis--vis du dollar,Airbus perd un milliard .

    Dans le luxe, la fin de dix ansdeuro fort est aussi apprcie. Jean-Paul Agon, PDG de LOral, y voit un effet de conversion et unautre de transaction. Le groupefabrique en effet 25 % de ses pro-duits en France, alors que le pays ne reprsente que 9 % de ses ven-tes. Toutefois, prcise-t-il, puis-que nous avons pris en 2015 une couverture [pour risques sur leschanges], cet impact positif de transactions entre les diffrents pays se sentira pleinement en 2016sur la rentabilit de lentreprise .

    Cet avantage profitera aussiaux socits de construction, dinfrastructures et de services comme Vinci ou Veolia dans lesgrands appels doffres internatio-naux o ils se trouvent en com-ptition avec les Corens et lesAmricains. Cest un coup de

    pouce non ngligeable , appr-cie Ludovic Subran, chef cono-miste chez Euler Hermes.

    Pour combien de temps en-core ? Nous aurons le vent enpoupe pendant presque deux ansjusquen 2017 prdit William deVijlder chef conomiste chez BNP Paribas. Pour lui leuro de-vrait encore baisser jusqujuin 2016 pour tomber parit avec le dollar avant de remontertrs lgrement. Durant cette p-riode, les entreprises devraient en profiter pour augmenter leursexportations Si au dpart labaisse de leuro donne une impul-sion aux ventes de produits lesrendant plus comptitifs, il faut

    compter dix-huit mois pour queleffet se manifeste pleinement . Ce sera donc dbut 2016, le dcro-chage de la monnaie europennestant amorc la mi-2014.

    Une montagne de cash

    Sentiment analogue pour Franck Nicolas, directeur chez Natixis As-set Management : les politiques montaires des banques centralessont trs divergentes, explique-t-il.Dun ct les Amricains devraientrelever les taux pour rguler leur croissance, de lautre les Europenscontinuent de les baisser pour fa-voriser la reprise, dautant plus franchement que le risque dinfla-tion est nul . Ce mcanisme de-vait avoir un double effet posi-tif , marqu par la poursuite dune baisse de leuro et par une hausse des Bourses europennes.

    Cependant, en dpit de ces ventsfavorables, nous sommes dansune situation paradoxale. Les so-cits sont encore trs prudentes dans leurs plans dinvestisse-ments et leurs dpenses , relve Gilles Guibout de chez AXA IM.

    Les entreprises restent assises

    Linvestissement mondial des entreprises en berne jusquen 2017Selon Standard & Poors, les dpenses consacres lnergie et aux matires premires devraient chuter de 14 % en 2015 et de 5 % en 2016

    C est un projet pharaoni-que. Imaginez : unemine ciel ouvert aumilieu de lAlberta (Canada), deux usines, une centrale lectrique, des entrepts, un nouveau lac pour prserver les poissons, un pont, des routes, un terrain davia-tion Plus de 24 000 hectares au total. Mais la mine de sables bitu-mineux Frontier fonctionnera-t-elle un jour ? En juillet, ses pro-moteurs ont report louverture de cinq ans. Ce sera pour 2026. Aumieux. Tout dpendra des coursdu ptrole. Aux prix actuels, les mines de ce type ne sont plus ren-tables. Au Canada, les projets sontgels les uns aprs les autres. Frontier, qui devait coter20,6 milliards de dollars (19 mil-liards deuros), nest que le plus r-cent sur la liste.

    Des chantiers annuls, reports,revus la baisse, le monde des matires premires en compte ac-

    tuellement des dizaines, des cen-taines peut-tre. De Shell Exxon-Mobil en passant par BP et Vale, tous les grands du mtier taillent dans leurs budgets.

    Chute des cours de lor noir

    Rsultat : compte tenu du poidsde lnergie dans lconomie, lesinvestissements des principaux groupes mondiaux, tous secteurs confondus, devraient encore re-culer en 2015, pour la troi-sime anne daffile. Ils flchi-raient de 1 %, diminueraient en-core de 4 % en 2016, et ne se stabi-liseraient quen 2017. Telle est la prvision de lagence de notation Standard & Poors, dans son tudeannuelle publie lundi 3 aot.

    Une mauvaise nouvelle, donc :linvestissement priv ne paratpas en mesure de soutenir la croissance mondiale avant deux ou trois ans. Cest en Australie eten Amrique du Nord que le plus

    grand nombre de projets ont t remis en question. Face la chute des cours de lor noir, diviss par deux en un an, lindustrie extrac-tive amricaine a rduit ses inves-tissements de 68 % dun coup audeuxime trimestre.

    Ce nest quun dbut. Ces der-niers jours, les tnors de la profes-sion ont tous annonc de nou-veaux tours de vis. A commencer par Shell. Le numro un europenva rduire ses investissements de

    7 milliards de dollars, soit 20 %, en 2015. En attendant que le mar-ch se rtablisse, je dois faire ensorte que Shell survive aux cours actuels , sest justifi son patron Ben van Beurden, le 30 juillet.

    Situation comparable pour lebrsilien Vale, premier produc-teur de fer du monde alors que leprix du minerai a chut de 47 % en 2014. Consquence : Vale et sesrivaux limitent leurs dpenses.

    Les investissements interna-tionaux dans lnergie et les ma-tires premires devraient chu-ter de 14 % en 2015 et de 5 %en 2016, selon S&P. Un recul d-terminant, dans la mesure o 14des 20 premiers investisseurs aumonde sont des groupes nerg-tiques, avec China National Pe-troleum Corporation, Chevron etExxon Mobil en tte du classe-ment.

    Dans le reste de lconomie, lin-vestissement des entreprises

    semble au contraire repartir. Il de-vrait remonter pour la pre-mire fois depuis 2012, avec une hausse de lordre de 8 % en 2015, selon S&P. Un mouvement tir par lautomobile, linformatique, la sant et les tlcoms.

    Lautomobile loffensive

    Dsormais sortie de la crise, lin-dustrie automobile a repris lof-fensive, limage de Volkswagen. En dbut danne, le champion al-lemand, en comptition avec Toyota pour la premire placemondiale, a annonc un pro-gramme dinvestissement de 107 milliards deuros sur cinq ans, dont plus de 20 milliards enChine.

    Lex-numro un General Motorsnest pas en reste : le leader amri-cain a dvoil le 28 juillet un plan de 5 milliards de dollars afin delancer une gamme de voituresdans les pays mergents.

    Ct high-tech,

    les dpenses

    sont loin de peser

    aussi lourd

    que celles

    de lindustrie

    traditionnelle

    Assemblage dun Airbus A350, Toulouse. P.PIGEYRE/MASTERFILMS

    Les principaux

    bnficiaires

    sont les groupes

    ayant une base

    de production

    en Europe

    SOURCE : BLOOMBERG

    COURS DE LEURO, EN DOLLAR

    4 AOT 2014 3 AOT 2015

    1,34

    1,10

    sur une montagne de cash cons-tate M. Subran. Selon les calculsdEuler Hermes, les cent premi-res socits franaises cotes endehors des financires dispo-saient fin du mois de juin de235 milliards deuros de trsore-rie. Le montant a augment de 70 % depuis 2008 , prcise M. Su-bran, au rythme de 10 % par andepuis sept ans. Cela reprsente 16 % de leur chiffre daffaires. Cette augmentation est de 21 % en Italie, 17 % en Espagne. En Alle-magne, elle nest que de 12 %, etau Royaume-Uni (qui est en de-hors de la zone euro) de 9 %.

    Pourtant