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  • DCIDEURS : STRATGIE FINANCE DROIT/ DROIT BOURSIER

    Le mandat de gestion programme pour un avenir radieux ?

    Dcembre 2010 par Arnaud Prs

    Avec le mandat de gestion programme, mesure phare du guide que vient de publier lAMF pour laprvention des manquements dinitis, le rgulateur propose pour la premire fois aux dirigeants dessocits cotes un cadre juridique formel, scuris, pour la gestion de leurs titres. Reste savoir si laformule propose saura sduire le march.

    Le 3 novembre 2010, lAMF a publi un guide qui dresse linventaire des pratiques dont elle recommandelapplication au sein des socits cotes pour prvenir les manquements dinitis. Parmi ces mesures, ilen est une, nouvelle, qui fait lobjet dune attention tout fait particulire : le mandat de gestionprogramme.Avec ce dispositif, lAMF souhaite rpondre une proccupation grandissante des dirigeants face auxrisques lis la gestion de leur portefeuille de titres. Avant toute dcision dachat ou de vente, ledirigeant est en effet confront la ncessit de procder un examen de conscience pour dterminersil dtient ou non une information privilgie. Cet exercice est dlicat, puisque, du fait mme de sesfonctions, le dirigeant a en permanence accs des informations non publiques, et quil se rvle parfoisdifficile dtablir a priori si une information revt ou non un caractre privilgi.

    Dconnecter la dcision dintervention de la dtention de linformation privilgie

    Lide fondamentale qui prside la mise en place du mandat de gestion programme consiste dconnecter la dcision de raliser une opration de la dtention dune information privilgie1. Ledirigeant confie un tiers la gestion de son portefeuille selon des modalits prdfinies, pour unepriode suffisamment longue. Ainsi, aucun lien de cause effet ne peut tre tabli entre les informationsprivilgies dont le dirigeant pourrait ventuellement avoir connaissance et les transactions effectuespour son compte par le mandataire, puisque ces dernires rsultent de la simple excution dinstructionsdonnes longtemps lavance par le dirigeant.

    LAMF en dduit logiquement que de telles transactions doivent bnficier dune prsomption simplede non commission dopration dinitis . Cest l une avance trs importante, notamment au regard delvolution rcente de la jurisprudence de la CJUE2. Les juges communautaires ont prcis que lergulateur na pas dmontrer que linformation privilgie a t utilise par liniti pour raliserlopration; il lui suffit dtablir que liniti dtient une information privilgie au moment de loprationlitigieuse. lgard des dirigeants ayant recours au mandat de gestion programme, lAMF posedsormais la prsomption inverse, pour autant que le mandat satisfasse un certain nombre deconditions.

    1Arnaud Prs, Emmanuel Cohen, La gestion sous mandat, une solution prventive au risque de dlit diniti ?, Option financen 895, 28 aot 2006, p. 26.2 CJUE, 23 dcembre 2009, Arrt Spector , Bulletin Joly Socits, 1er avril 2010, n4, p.346 Dominique Schmidt.

    Article

  • Le devoir de non-immixtion du dirigeant

    La premire condition pose par lAMF consiste interdire au dirigeant de simmiscer dans lexcution dumandat. Cette interdiction est absolue, puisquil sagit mme dempcher tout contact entre le dirigeantet le mandataire. Cette exigence ne va pas de soi et semble superflue quand les instructions initialesdonnes par le dirigeant sont prcises et ne laissent pas de marge de manuvre au mandataire. On noteque, dans la rglementation amricaine des 10b5-1 trading plans qui a largement inspir les travaux delAMF le devoir de non-immixtion ne simpose que lorsque le mandataire bnficie dune certainelatitude dans la gestion du portefeuille de titres et non pas lorsque les instructions initiales indiquent lesconditions et le calendrier des oprations raliser. De mme, il nest pas certain que lexigence de lAMFquant labsence de tout lien familial et de tous liens daffaires antrieurs entre le mandant et lemandataire qui sera probablement assez contraignante en pratique soit justifie lorsque lesinstructions donnes par le dirigeant sont suffisamment prcises.

    Lirrvocabilit du mandat

    LAMF prcise ensuite que le mandat doit tre irrvocable. Il sagit sans doute du prolongement ultimedu devoir de non-immixtion du dirigeant : celui-ci est tenu par les conditions initiales du mandat sanspouvoir y mettre fin.Cette condition mrite quon sy arrte. Prenons lhypothse dun dirigeant qui, la veille dune cessioninitialement programme dans le mandat, vient disposer dune information privilgie susceptibledentraner une hausse du cours du titre. Naturellement, il sera enclin diffrer la cession prvue et nyprocder quune fois que linformation aura t rendue publique. Mais cest prcisment ce que veutempcher lAMF. quelles fins ? Quels intrts protge-t-on en interdisant au dirigeant de rvoquer lemandat et de sabstenir de raliser une opration, ds lors quil nintervient quaprs que linformationest devenue publique ? Le devoir dabstention de liniti ntait-il pas depuis toujours la vertu suprmeloue par le rgulateur ? Si lon peroit confusment les considrations morales qui sous-tendent lalogique du rgulateur, il demeure quelle aboutit un rsultat tonnant et paradoxal : le simple fait desabstenir devient suspect si lon avait prvu lorigine dintervenir sur ses titres.

    On le voit, cette condition dirrvocabilit nest pas dicte par des considrations juridiques lies lintgrit du march. On observera quelle nest du reste nullement impose outre-Atlantique sagissantdes 10b5-1 trading plans. En cas de rsiliation du mandat, il suffisait de prendre acte que le dirigeantperd le bnfice de la prsomption de lgitimit. Et quil retombe en quelque sorte dans le rgime dedroit commun.

    Le respect dun dlai de viduit de trois mois

    LAMF impose assez opportunment un dlai de viduit de trois mois entre la conclusion du mandat et ledbut de son excution par le mandataire. Elle ajoute lobligation pour le dirigeant de confirmer par crit,ds lorigine, quil nest pas dtenteur dune information privilgie. Cette dernire exigence est sansdoute redondante, le dlai de trois mois pouvait sembler suffisant pour purger toute informationprivilgie. Une autre solution aurait t de prvoir ces deux conditions comme tant alternatives, pluttque cumulatives.En consacrant le mandat de gestion programme - dsignation dsormais officielle - lAMF veutpromouvoir auprs des dirigeants un mcanisme scuris pour la gestion de leurs titres. Cette initiativedoit tre salue, mme si le cadre quelle propose est sans doute un peu rigide. Il reste savoir si, dansles faits, ce nouveau dispositif rencontrera le succs escompt. LAMF se donne trois ans pour faire lebilan de la pratique et envisager les amliorations apporter au nouveau dispositif.

  • Quelques-unes des autres mesures recommandes par lAMF pour la prvention des manquementsdinitis

    Dfinir des fentresngatives

    Priodes dabstention applicables aux dirigeants et toute personneayant accs de manire rgulire ou occasionnelle des informationsprivilgies : 30 jours minimum avant la publication des comptes annuels,semestriels et, le cas chant, trimestriels 15 jours minimum avant la publication de linformation trimestrielle

    Dsigner un dontologueDsignation dans les socits cotes dun dontologue qui doit treconsult pralablement toute opration sur les titres de la socitralise par une personne figurant sur la liste dinitis

    Codifier les obligations desinitis potentiels

    Codification des obligations qui incombent aux personnes susceptiblesdavoir accs des informations privilgies (procdures, codes dedontologie).

    LES POINTS CLS

    Principe : lide centrale du mandat de gestion programme est de dconnecter la dcision deraliser une opration de la dtention dune information privilgie

    Rgime : les transactions effectues par le mandataire, pour le compte du dirigeant, bnficientdune prsomption simple de lgitimit

    Principales conditions : absence de lien (familial ou daffaires) et absence de tout contact entre ledirigeant et le mandataire pendant le mandat, irrvocabilit du mandat, dlai de viduit de 3 moisentre la conclusion du mandat et le dbut de son excution.