ele Lebe (i re partie)

Un artilleur colonial avec unfusil Modèle 1886-93 R 35 .

A la fin de la PremièreGuerre mondiale,la France se trouveà la tête d'un arsenalphénoménal d'armescomplètementdémodées.Le programme de 1921prévoit le remplacementcomplet de tous lestypes d'armes alorsen service et de leursmunitions. Mais le paysest épuisé par quatreannées de guerreet l'économie nationaledoit en prioritéreconstruire les villes,les villageset infrastructuresdétruites.

CIBLES - 12/99

5 5

L a réforme de l'armement passealors au second plan, à tel pointqu'en 1939 tous les programmes

n'avaient pas encore abouti, ceci n'estle fait ni des militaires, ni destechniciens de l'armement. Enraison du retard pris dansle développement d'armesnouvelles, on envisagealors de modifier lesarmes existant dans lesdépôts, ce qui per-met en mêmetemps de

limiter lescoûts .

C'est ainsi que lefusil Lebel et les

armes du systèmeMannlicher-Berthier

vont être transformées « àchargeur » (selon lestermes de l'époque),pour pouvoir utiliser la car-

touche 7,5 mm Mle 1924 dans unpremier temps, puis la cartouche7,5 mm Mle 1929 .

∎ Fusil Modèle 1886 M 27 ∎

C'est la Manufacture d'Armes de Tulle qui estchargée d'étudier la transformation du Modèle1886-93, elle réalise ainsi deux types d'armes

56 C B L E S . 12/99

Fusil Lebel Modèle 1886 M27 . L'arme est raccourcie et lecanon est partiellement re-couvert par un garde-main .

® Un magasin à fond ouvrant a pris la placedu mécanisme d'alimentation .

- un fusil à canon de0,60 m,

- un mousqueton à canon de0,50 m .

Le fusil reçoit un canon dont le pro-fil extérieur est copié sur celui du Mauser

turc, à l'exception de la partie dépassant del'embouchoir. Il est recouvert partiellementpar un garde-main entre la hausse et l'anneau

grenadière .

La culasse mobile reçoit une nouvelle tête mo-bile avec un extracteur simplifié . La sûreté aété modifiée . Le magasin prend la place dumécanisme d'alimentation, il possède uneplaque de fond démontable de typeMauser .La hausse tangentielle à cur-seur, est fixée sur le tonnerre

au moyen d'un collier, ellepossède un cran de mirefixe . La planchette est gra-duée de 200 à 1 200 m . Labaïonnette est logée dans lefût, elle résulte de la transfor-mation de la lame d'une baïon-nette Mle 1886 ou dérivé . Elle est rac-courcie à 495 mm et vient s'emmancher dans

un tube fixé à la partie antérieure du fût . Lemousqueton ne diffère du fusil que par la lon-gueur de son canon . On a recherché l'allége-ment de certaines pièces (plaque de coucheen alliage léger, et pied de hausse allégé) . La

Fusil et mousqueton Modère 1886 M 27

lame de la baïon-nette mesure

450 mm .Ce mousqueton

était présenté avectrois culasses différentes :

cylindre d'origine légèrementallégé, cylindre avec levier coudé,

cylindre avec levier d'armement cou-dé et aplati . Une première campagne

d'essai laissait apparaître que ces armes don-

naient en général satisfaction, sauf en ce quiconcerne l'organisation de la hausse, celle del'extracteur et de la poignée de la baïonnette .Le mousqueton semblait particulièrement re-tenir l'attention des officiers de la Commissiond'Expériences de Versailles chargés de l'expé-rimentation, mais ils déploraient un poids ex-cessif de l'arme et une flamme de bouche, ju-gée aveuglante .Seul le développement de la version fusil Mle1886-93 est poursuivi jusqu'en 1933, la baïon-nette intégrée au fût est abandonnée . On uti-lise une nouvelle hausse graduée jusqu'à900 m . En juin 1930, une version équipéed'une lunette est mise en essai et enaoût 1931 le modèle chambré en 7,5 Mle1929 est disponible .On estime que 500 exemplaires du fusil Mle1886-93 M 27 ont été réalisés .Avec le même mécanisme, on expérimenta

également quelques fusils ayant conser-vé le canon de 0,80 m, chambré

pour une cartouche de 8 mmà gorge .Confronté aux fusils 07-15 M 16 modifiés par lesManufactures d'Armesde Châtellerault et Saint-Etienne, le Lebel trans-

formé est finalement écar-té. Mais les recherches de la

I Le nouveau marquage apposé sur la face gauchedu boîtier, remarquer la plaquette de fixation dunouvel éjecteur .

MAT n'ont pas été vaines, car en 1935, onlui confie la transformation des fusils Mle1886-93 en mousqueton sans changementde calibre !On s'interroge encore sur les nécessités d'untel choix dans la mesure où l'adoption du MAS36 était pratiquement chose faite et où lesarmes transformées ont reçu une hausse, ungarde-main, des bois et un canon neufs !

∎ Fusil Modèle 1886-93 R 35 ∎

Malgré ses dimensions, le Mie 1886-93 R 35est toujours qualifié de « fusil » dans la no-menclature militaire . Comprenne qui pourra .

CaractéristiquesMunition

Fusil Mle 1886 M 277,5 mm Mle 1924 ou 1929

Mousqueton Mle 1886 M 277,5 mm Mle 1924

® Longueur totale 1,110 m 1,010 mLongueur avec baïonnette 1,430 m 1,280 mLongueur du canon 0,600 m 0,500 mPoids de l'arme 4,170 kg 3,670 kg

"~ Capacité 5 coups 5 coups

Quelques

canons ont

été fournispar les manufac-

tures d'Armes

Tulle et Châtellerault, mais c'est

surtout l'industrie privée qui fut

mise à contribution pour la réali-

sation de cette pièce (S .A .C.M . à

Cholet ou Manufacture à Saint-

Etienne) . Il mesure seulement

45 cm et il est alésé pour la car-

touche 8 mm modèle 1932 N .

La hausse du Modèle 1920 A est

celle du mousqueton Mle 1916

modifié . Le magasin ne contient

plus que trois cartouches .

La grenadière comporte un an-

neau latéral .

marquages spécifiques du Modèle Re canon a été produit par Manufrancerque MF) .

Fusil d'essai Mie 1886 M 27, réalisé à la MAT en 1933avec un canon rayé à gauche au pas de 235 mm .

La baïonnette et son fourreau

sont raccourcis, la lame ne me-

sure plus que 35 cm . En fait, cet-

te réduction de longueur s'éche-

lonne de 0,35 m à 0,40 m . Le

fourreau est raccourci dans les

mêmes proportions que la lame .

Les parties métalliques reçoivent

une finition bronzée ou phos-

phatée, souvent complétée parune couche de laque noire

cuite au four .

Il existe deux ver-

sions de cette

arme :

- une desti-

née aux trou-

pes montées

qui possède

une barrette

de crosse,

- une autre dont la bretel-

le vient s'accrocher sur un bat-

tant articulé .

Le Mle 1886-93 R 35 fut utilisé

par l'artillerie coloniale, le train

(unités de circulation routière) et

les troupes sahariennes .

Dans la plupart des cas, ces

armes ont été distribuées sans

baïonnette .

La production de cette arme est

estimée à 25 ou 30 000 exem-

plaires .

Jean HUON

Fusil Modèle 1886-93 R 35

Munitions : 8 mm LebelLongueur totale : 0,960 mLongueur avec la baïonnette : 1,310 mLongueur du canon : 0,450 mPoids de l'arme vide : 3,760 kgCapacité du magasin : 3 coups

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Les fusils modes annéesle Modèle07-15 M 34

Pendant que laManufactured'Armes de Tulles'était vu confier l'étudede la modernisation dufusil Mle 1886-93, celles deChâtellerault, de Saint-Etienne et la Commissiond'Expériences de Versaillesrecevaient pour mission de secharger de la transformation desfusils Modèles 1902, 07-15 ou 07-15M 16 et du mousqueton 1916 en« armes à chargeur » destinées au tir dela nouvelle cartouche de 7,5 mm à gorge .

C es travaux débutaient suite à laDépêche Ministérielle n° 9593CM/1 du 26 septembre 1925 . En

1926, la MAS présente deux fusils Mle 07-15 M 16 . Les canons ont été jugés tropminces pour pouvoir être retubés, ce sontdonc des tubes neufs de 7,5 mm mesurant0,60 m alésés au calibre 7,5 mm (cartoucheX 1 c) . Ces deux fusils comportent un gar-de-main qui recouvre partiellement le ca-

34

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non, les organes de visée sont inchangés,mais les gradins de la hausse ont été re-

taillés .Les deux modèles présentés par la MAS diffè-rent par leur système d'alimentation :- magasin à double colonne, avec plaque de

fond amovible,- magasin à simple colonne faisant une sailliedevant le pontet, son profil ressemble à celui

du fusil Daudeteau .

La culasse mobile a été sensiblement modifiée(tête mobile, extracteur, percuteur), l'éjecteurest mobile et il comporte un ressort .Un guide-lame-chargeur a été aménagé sur laculasse mobile .Les garnitures sont inchangées et la baionnet-te d'origine est conservée .L'expérimentation réalisée en 1926 a démon-tré qu'aucune de ces deux armes n'était aupoint et que les incidents de tir (alimentation etpercussion) ont été très nombreux .La Commission d'Expériences de Versailles réa-lise de son côté une modification du fusilModèle 1916, avec un magasin de typeMauser 98, une culasse mobile aménagée

pour la cartouche de 7,5 mm Mle 1924,une hausse de fusil Springfield 1903et un guidon d'U .S . 17 . Les essais

de ce modèle devaient révéler denombreuses imperfections en

ce qui concerne le fonction-nement, le démontage de

la culasse mobile et l'in-adaptation des or-

ganes de visée .A la suite de quoi,

la CEV était invitée àne pas poursuivre ses

travaux en ce domaine .

1 dernisés"trente

i

'

L'adoption du fusil

'Modèle 07-15 M 34

L'expérimentation comparative des fusilsMannlicher-Berthier a été poursuivie au coursdes années qui suivirent .En 1933, on expérimente un MAC 1932 et unSE-MAS 1932 .Le prototype de la MAC est un dérivé du fusilMle 1916, raccourci et muni d'un magasin àsimple colonne inspiré de celui du Mauser bel-ge. La culasse mobile a reçu les modificationsnécessaires à l'usage de la cartouche de7,5 mm .Le modèle de la MAS est un dérivé de l'armeprésentée en 1926 avec un magasin à doublecolonne, on a aménagé sur la paroi gauchede la boîte de culasse, une échancru-re pour le passage du pouce aumoment du remplissage .L'adoption d'unebaïonnette àlame

raccourcie estenvisagée mais elle

ne sera pas retenue .A l'issue de cette expérimentation,

l'arme de la MAS l'emporte sur celle de laMAC en raison de la possibilité de modifieraussi bien les armes à trois coups que celles àcinq coups et d'une meilleure organisation dumécanisme d'alimentation .

Une échancrure est aménagée dans la paroi gauchede la boîte de culasse pour le passage du poucelors des opérations de chargement .

La hausse est graduée de 200 à 1 200 m . .

A la suite de quoi, une expérimentation com-plémentaire était envisagée .Celle-ci eut lieu en 1934 à la Commissiond'Expérimentation de l'Infanterie du Camp deChâlons, avec quatre armes : deux de typeinfanterie avec canon de 58 et deuxautres de type cavalerie, aveccanon de 55 cm .L'expérience por-tait sur destirs de

Le rarissime modèle de cavalerie comporte une bar-rette de crosse, un levier d'armement coudé et unembouchoir compatible avec la baïonnette dumousqueton.

précision, des essais de bon fonctionnementen conditions normales et dans la boue, résis-tance à la surpression et visibilité des lueurs .Chacune des armes présentées a tiré 3 000cartouches . Les résultats n'ont fait que confir-mer ceux des expérimentations antérieures etont conduit à l'adoption du fusil Modèle 07-15 M 34, comme armement de transition enattendant que les fusils nouveaux modèlespuissent être disponibles .

Description

∎

La monture d'une seule pièce à crosse anglai-se, a été raccourcie de 218 mm, le renflementdu magasin a été diminué . Un garde-main en-cadre la hausse et recouvre le canon sur unepartie de sa longueur .Le canon est de section ronde étagée, il estalésé au calibre 7,5 mm et chambré pour lacartouche 7,5 mm Mle 1929 . Les quatrerayures sont orientées à gauche .La boîte de culasse a été modifiée de façon àpouvoir être compatible avec le nouveau ma-gasin . A la partie supérieure, on a aménagéun guide-lame-chargeur qui facilite le rem-plissage du magasin . Sur la paroi gauche uneéchancrure a été usinée pour le passage dupouce et la monture a été, elle aussi, légère-ment entaillée . La culasse mobile possède unenouvelle tête mobile, le diamètre de sa cuvet-te est compatible avec la cartouche de

HISTOIRE DES ARMESA R M E S M 1 L 1 T A I R E S

36

Le fusil Mie 07-15M 34 constitue

ban armementtransition

I La plaque de fond de magasin démontable,est striée .

L'arme est alimentée au moyen d'unelame-chargeur de cinq cartouches .

7,5 mm. On a également installé un nouvelextracteur et un éjecteur mobile . Le magasinde type Mauser 98, reçoit les cartouches enquinconce . Il se compose d'un boîtier en tôle,assemblé par soudure . Il a pris la place de l'an-cien magasin . Son élévateur est monté sur uneplaque de fond démontable, dont la face ex-terne est striée transversalement .Le mécanisme de détente reste inchangé, il secompose d'une détente, de la gâchette et d'unressort en V . Les garnitures sont restées ellesaussi les mêmes : la plaque de couche, le bat-tant de crosse articulé, la grenadière et son an-neau, l'embouchoir à quillon .Les organes de visée sont constitués du gui-don d'origine et d'une hausse tangentielle àcurseur réglable de 200 à 900 m . On retrou-ve une hausse identique sur le Lebel Mle1886 M 27 .Les parties métalliques sont phos-phatées, mais on peut aussirencontrer des modèlescomportant des piècesbronzées ou la-quées noir .Ce fusil re-

çoit l'épée-ba'ionnette

Modèle 1915 dontla lame est bronzée

et la poignée peinteen noir s'il s'agit d'un

modèle à poignée en lai-ton ou en maillechort, ou en-

tièrement phosphatée s'il s'agitde la version à poignée en fonte .

Une bonne armede transition

Le fusil Modèle 07-15 M 34 fut fabriquéà environ 40 000 exemplaires, la plupart

d'entre eux étaient du type infanterie . Ils ont

Calibre : 7,5 mmMunition : 7,5 mm Mle 1929 CLongueur totale : 1,075 mLongueur avec la baïonnette1,595 mLongueur du canon : 0,570 mPoids de l'arme vide : 3,700 kgCapacité du magasin : 5 coups

été affectés à certaines unités de for-teresse, ainsi qu'aux 4e et 13eRégiments d'Infanterie. On les re-trouve ensuite dans l'Arméed'Armistice et chez lesForces Françaises Libres .Pour autant qu'elleait été construi-

te, la versiondestinée à la ca-

valerie, comportaitune barrette de crosse

au lieu du battant articulé .Le levier d'armement est cou-

dé. L'embouchoir à quillon cou-

Le modèle le plus courant destiné à l'infanterie,comporte un levier d'armement droit (ou parfoiscoudé) et un battant de crosse articulé .

dé est aménagé pour recevoir le sabre-baïon-nette du mousqueton Mle 1892 dont la lamea été phosphatée, la croisière et le fourreau

sont phosphatés ou peints en noir .

Il avait aussi été prévu de transformer, suivantle même principe, le fusil de tirailleur indochi-nois redésigné Modèle 1902 M 37 . Il est pos-sible que cette arme ait été réalisée, mais entrente ans de recherches, l'auteur ne l'a jamaisrencontrée .Le fusil Mle 07-15 M 34 constitue un bon ar-mement de transition. Pour peu que le pou-voir politique l'ait voulu, cette arme et toutescelles qui suivirent auraient pu être prêtes dixans plus tôt . Ce qui aurait évité les situationscatastrophiques d'approvisionnements en mu-nitions constatées lors de la campagne de1939-40 .

Jean HUON