Le guidage du déplacement chez les fourmis.Le guidage du déplacement chez les fourmis. L'homme a...

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BRACHET Aline DESFETE Florine CHEVALIER Martin Le guidage du déplacement chez les fourmis. L'homme a organisé son espace afin d'optimiser ses déplacements. Il a notamment créé des routes sur lesquelles il circule et des panneaux lui permettant de se guider. Il a ainsi inventé une signalétique propre à son espèce et compréhensible par la majorité. Cette démarche lui a été nécessaire afin de canaliser les déplacements des différents individus. Pour atteindre un emplacement précis, il suit les indications données par cet ensemble de signaux. Cependant, l'homme n'est pas le seul être vivant à évoluer au sein d'une société organisée. Ainsi, de nombreux insectes vivent en communauté comptant de nombreux membres. Les fourmis en sont un bel exemple, les fourmilières pouvant atteindre plusieurs milliers d'individus (1) . Pour l'espèce Lasius niger (2) , il n'est pas rare l'été d'observer sur les arbres une colonne ascendante de fourmis et une autre descendante, reliant ainsi la fourmilière à une zone d'élevage de pucerons. Les trajectoires des différentes fourmis sont alors extrêmement semblables les unes aux autres. Cette organisation du déplacement est-elle liée à des signaux particuliers leur permettant de s'orienter dans l'espace? Comment se fait le guidage du déplacement chez les fourmis, s'il existe?

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BRACHET AlineDESFETE FlorineCHEVALIER Martin

Le guidage du déplacement chez les fourmis.

L'homme a organisé son espace afin d'optimiser ses déplacements. Il a notamment créé des routes sur lesquelles il circule et des panneaux lui permettant de se guider. Il a ainsi inventé une signalétique propre à son espèce et compréhensible par la majorité. Cette démarche lui a été nécessaire afin de canaliser les déplacements des différents individus. Pour atteindre un emplacement précis, il suit les indications données par cet ensemble de signaux. Cependant, l'homme n'est pas le seul être vivant à évoluer au sein d'une société organisée. Ainsi, de nombreux insectes vivent en communauté comptant de nombreux membres. Les fourmis en sont un bel exemple, les fourmilières pouvant atteindre plusieurs milliers d'individus (1). Pour l'espèce Lasius niger (2), il n'est pas rare l'été d'observer sur les arbres une colonne ascendante de fourmis et une autre descendante, reliant ainsi la fourmilière à une zone d'élevage de pucerons. Les trajectoires des différentes fourmis sont alors extrêmement semblables les unes aux autres.

Cette organisation du déplacement est-elle liée à des signaux particuliers leur permettant de s'orienter dans l'espace? Comment se fait le guidage du déplacement chez les fourmis, s'il existe?

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Sommaire:

I. Mise en évidence de l’établissement d’une trajectoire particulière lors de la quête de nourriture. A. Matériel d’étude.

1) Identification des caractères propres à l’espèce Lasius niger.2) Conditions d’élevage.3)Structures liées à l’expérience.

B. Méthodologie 1) Utilisation de vidéos.2) Analyse des données numériques

C. Observations d’une expérience sans modification de paramètre. 1) Conditions expérimentales.2) Résultats.3) Interprétations et hypothèses.

II. Les modalités du guidage du déplacement. A. L'influence des sens.

1) Protocole.2) Résultats.3) Interprétations.

B. Influence des repères spatiaux: expérience à trajectoires imposées. 1) Dispositif expérimental.2) Traitement des résultats.3) Interprétations et hypothèses.

C. Mise en évidence d'un comportement spécifique lié au guidage du déplacement. 1) Motivations et protocole.2) Résultats.3) Interprétations grâce aux données bibliographiques.

III.Conséquence biologique du guidage du déplacement des fourmis. A. Influence du guidage du déplacement sur la vitesse moyenne des fourmis et le temps de

déplacement.1) Protocole2) Résultats3) Interprétations

B. Limites et amélioration possible de notre étude.

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I. Mise en évidence de l’établissement d’une trajectoire particulière lors de la quête de nourriture. A. Matériel d’étude.

1) Identification des caractères propres à l’espèce Lasius niger (2).L'espèce étudiée est Lasius niger (Fig.1) qui, selon certains myrmécologues, seraient

l'espèce de fourmis la plus représentée sur Terre.

Figure 1 : Quelques critères d'identification de l'espèce.

2) Conditions d’élevage.

Nous avons construit plusieurs fourmilières: une en plâtre ( par moulage dans une boite en plastique), une avec un seau contenant de la terre, deux en verre ( un cadre en bois refermé par deux plaques de verre et contenant du terreau). Deux autres ont été achetées auprès d'éleveurs spécialisés et sont formées d'une résine non toxique.

Les fourmis qu'elles contiennent sont issues soit de la capture de reines après leur vol nuptial à la fin de l'été ( les œufs pondus donnèrent des ouvrières en un mois), soit du prélèvement direct d'une petite fourmilière et soit de l'achat chez un éleveur. Les conditions du milieu naturel sont reproduites: l'hygrométrie au moyen d'un brumisateur ou d'une réserve d'eau et la température est maintenue entre 22°C et 25°C (1).

3) Structures liées à l’expérience.Des aires de chasse ont été aménagées dans des boites en plastique sans toit et dont les

parois sont recouvertes d'une substance grasse anti-évasion. (photo du dispositif fourmilière/ aire de chasse à insérer). C'est le lieu de dépôt de nourriture (dans un contenant) : il forme une annexe à l'air libre reliée à la fourmilière. Leur taux d'humidité est nettement inférieur à celui de la fourmilière, ce qui permet aux fourmis de différencier l'intérieur de l'extérieur(1).

B. Méthodologie 1) Utilisation d'enregistrements vidéos.

Les trajectoires s’établissant dans l’espace et dans le temps, nous avons procédé à des enregistrements vidéos en vue aérienne. Nous disposons alors d'une vue couvrant toute l’aire de chasse.

L'utilisation du logiciel avistep a permis de pointer les fourmis toutes les secondes, de placer un repère orthonormé et d’obtenir un tableau de coordonnées pour chaque fourmi ayant effectué un trajet dans l’aire de chasse. Ceci permet de convertir la séquence vidéo du trajet d’une fourmi en

Poils dressés sur le scap

Base des antennes proche du clypeus

Mandibules avec dents

Poils sur le clypeus

Abdomen en 5 parties Absence d'étranglement entre les deux premiers segments du gastre

Dépression du thorax Pétiole

Abdomen Thorax Tête

4mm

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données numériques utilisables.

2) Analyse des données numériques.On simule l’aire de chasse (de 25 cm sur 25 cm) par une matrice nulle de dimension 25 par

25. Ainsi chaque « case » de la matrice correspond à un carreau de l’aire de chasse de 1 cm de côté. Les fourmis mesurant environ 3mm de long, le passage d’une case à une autre est significatif d’un déplacement du corps entier de l’animal.

Prenons l’exemple de la trajectoire d’une fourmi (Fig.2). On repère dans quel carreau de l’aire de chasse elle se situe à un instant donné ,et on ajoute la valeur 1 au nombre situé dans la case représentant ce carreau dans la matrice.

Figure 2 : Exemple du repérage d'une trajectoire (à gauche) et de la matrice obtenue par traitement de ce repérage (à droite). L'entrée est en rouge, la nourriture en rose.

On a alors une matrice où toutes les cases non-nulles représentent des carreaux sur lesquels la fourmi est passée. On réalise cela pour chaque trajectoire d’une fourmi entre la fourmilière et la nourriture. En ajoutant les matrices les unes aux autres on obtient le nombre de passages de fourmis sur chaque case de l’aire de chasse.

On réalise ensuite une représentation en 3D, dont le plan (x,y) correspond au plan de l’aire de chasse et l’axe z correspond au nombre de passages sur chaque case. Un code de couleur est ensuite appliqué de façon à ce qu’une vue de dessus rende compte de la fréquentation des différentes cases.

Cette analyse numérique est réalisée pour chacune des expériences filmées.

C. Observations d’une expérience sans modification de paramètre. 1) Conditions expérimentales.

On place de la nourriture à l’opposé de l’entrée de l’aire de chasse, à une distance de 15 cm. On filme à partir du moment où la première fourmi entre dans l’aire de chasse. La première trajectoire pointée est celle de la première fourmi ayant trouvé la nourriture. On pointe alors les trajectoires des fourmis suivantes puis on applique la méthode d’analyse précédemment décrite.On a réalisé 23 fois l'expérience.

2) Résultats.Tout d'abord, au regard de la vidéo, on constate que la découverte de la nourriture par une ou

plusieurs fourmis entraîne une arrivée en masse de fourmis: il y a donc un phénomène de recrutement. On prend alors les 40 premières trajectoires de fourmis et on observe le graphique en trois dimensions obtenu (Fig.3).

0 0 0 0 0 0 0 0

0 1 1 0 0 0 0 0

0 1 1 1 0 0 0 0

0 1 0 1 " +1 " 0 0 0

0 0 0 0 0 0 0 0

0 0 0 0 0 0 0 0

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Figure 3 : Exemple de graphique 3D obtenue ( en vue latérale à gauche, verticale à droite). L'entrée est représentée par un rectangle bleu, la

nourriture par un cercle bleu.

Parallèlement, pour chaque colonne de la matrice obtenue par le pointage des fourmis, on numérote les cases. On détermine alors l'espérance et l'écart type des cases fréquentées, pour chaque colonne (Fig.4).

Figure 4 : Écarts types et espérance sur chaque colonnepour l'exemple précédent.

3) Interprétations et hypothèses.On note un plus grand nombre de passage sur certaines successions de cases entre l’entrée et

la nourriture,semblant dessiner une trajectoire préférentielle. Cette trajectoire ne correspond pas forcément au chemin le plus court . On peut alors se demander quels sont les paramètres qui guident les fourmis vers à la nourriture, en les incitant à emprunter des chemins proches les uns des autres . Est-ce la vue de la nourriture, son odeur? Ou est-ce un facteur dépendant des fourmis elles-mêmes(traces laissées au sol)(3)?

II. Les modalités du guidage du déplacement. A. L'influence des stimuli issus de la nourriture

1) Protocole.On se place tout d’abord dans les mêmes conditions que l'expérience précédente. On laisse

les fourmis suivre une trajectoire préférentielle pour se rendre à la nourriture. Au bout d’une quarantaine de trajets, on déplace celle-ci à l'opposé de sa position initiale mais toujours à la même distance de l’entrée de l’aire de chasse. Si l'odeur ou la vue de la nourriture interviennent dans le guidage, le déplacement de la nourriture devrait induire un changement rapide dans la trajectoire initialement prise.

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2) Résultats.On représente les résultats de la même façon que précédemment, en prenant les

trajectoires des 40 premières fourmis après qu'on ait déplacé la nourriture (Fig.5).

Figure 5 : Exemple de résultats d'une expérience avec déplacement de nourriture : la place de la nourriture avant déplacement est au niveau du cercle en pointillé bleu, la nouvelle au cercle bleu.

Sur les 23 expériences, on a toujours la même tendance de trajectoire avant et après le déplacement de la nourriture.

3) Interprétations.Les trente premières fourmis qui entrent dans l’aire de chasse après le déplacement de la

nourriture suivent la trajectoire empruntée jusqu’alors et se dirigent à l’emplacement initial de la nourriture. La perception des informations sensorielles (vue, odeur) issues de la nourriture ne semble intervenir que partiellement dans le repérage de la nourriture, et donc dans le guidage du déplacement. On ne peut cependant pas conclure qu'ils n'ont aucun impact puisque les fourmis finissent par retrouver la nourriture. Les fourmis s'agglutinent à l'ancien emplacement de la nourriture sans raison apparente : cela peut s'expliquer si elles détectent l'odeur qu'elle a laissé (3). Cette expérience amène à une hypothèse pour expliquer le guidage: l'utilisation de repères spatiaux (mémorisé ou communiqué).

B. Influence des repères spatiaux : expérience à trajectoires imposées.

Les fourmis peuvent utiliser des repères fixes, comme la position de la source de lumière, d'un objet, pour se guider par rapport à eux.

1) Dispositif expérimental.On fabrique un labyrinthe transparent (Fig.6) ce qui permet de filmer les déplacements des

fourmis. On place la nourriture à la sortie de ce dispositif. En passant dans cette structure les fourmis ont la possibilité d’emprunter douze trajectoires différentes. On repère chaque portion de tube par un numéro, afin de pouvoir retracer les trajectoires suivies par les différentes fourmis. On regarde ensuite si l'une des 12 voies est davantage fréquentée au cours des 40 premiers passages. Dans un second temps, après une vingtaine de passages, on réalise une rotation de 180° autour de l'axe Ox, puis on compare les trajectoires avec ou sans rotation. On a réalisé 10 fois chacune des deux expériences.

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Figure 6 : Schéma du labyrinthe

2) Traitement des résultats.Pour plus de facilité, on dote d'un numéro chaque trajectoire : la trajectoire passant 1-3-6

sera la numéro 1, 1-4-6 la 2, et ainsi de suite. Lors de la rotation, le tube 1 se retrouve à la place du 2: le chemin de la trajectoire 1 à subit une symétrie axiale par rapport à l'axe Ox.

On obtient un tableau correspondant à la succession des trajectoires empruntées pour chaque expérience (Fig.7).

Figure 7 : Exemple de séries de résultats, dans l'ordre chronologique en partant de la gauche.

Tout d'abord, on voit que, selon l'expérience, la trajectoire 2 est empruntée pour 80% des passages pour l'une, la trajectoire numéro 5 à 77,5% pour l'autre. Pour une trajectoire donnée x, on recense le nombre de passages par cette trajectoire en fonction du nombre total de passages effectués dans le labyrinthe (Fig.8).

Figure 8 : Représentation graphique des deux résultats pris en exemple ( en bleu la trajectoire principale, en rouge une secondaire, en jaune les non empruntées).

Sur la première courbe a), on voit que le nombre d'occurrences de la trajectoire 2 augmente avec le nombre de passages effectués . Cette corrélation ne se retrouve pas avec les autres trajectoires ( toutes du même type que la rouge ou la jaune).

En moyenne, le nombre de passages par la trajectoire la plus utilisée est de 29,2 soit 73%. Ce nombre varie entre 25 ( 62,5%) et 34 (85%), alors que les autres trajectoires ne sont jamais empruntées plus de 4 fois pour 40 passages successifs.

Trajectoire 2

Trajectoire 5

a) b)

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Les résultats de l'expérience avec rotation b) sont similaires: on obtient toujours une trajectoire empruntée majoritairement (ici la numéro 5) dont le nombre d’occurrences augmente avec le nombre de passages effectués, corrélation ne se retrouvant pas pour les autres trajectoires (en rouge et jaune).

3) Interprétations et hypothèses. Puisque la rotation n'a rien changé, il semble donc y avoir une corrélation entre le nombre de

fourmis déjà passées par une trajectoire et la probabilité qu'une fourmi emprunte à nouveau cette trajectoire. Si les fourmis se guidaient grâce à des repères spatiaux fixes, elles auraient dû emprunter après la rotation la trajectoire symétrique à la trajectoire avant rotation, puisque les repères spatiaux liés au labyrinthe n'ont pas changer entre les deux. Or ce n'est pas le cas : les fourmis ne semblent pas utiliser de façon prépondérante les repères spatiaux pour guider leur déplacement (3). Elles doivent laisser une trace de leur passage reconnaissable par leurs semblables, trace non détectable pour l'homme, et indiquant des informations sur le lieu de la nourriture.

C. Mise en évidence d'un comportement spécifique lié au guidage du déplacement.

D’après les résultats précédents il semblerait qu’il existe un mode de guidage spécifique du déplacement, indépendant de la vue ou de l’odeur de la nourriture et des repères spatiaux.

1) Motivations et protocole.Pour tester l'hypothèse selon laquelle il y a un marquage actif du sol par les fourmis, nous

avons enduit une plaque de verre avec du noir de fumée (on approche la flamme d'une bougie de la plaque) (4). Lors de leur passage, si ces insectes déposent volontairement une substance , ils devront frotter la partie de leur corps qui la secrète. S'il s'agit d'un marquage physique (griffure par exemple), il se remarquera aussi : l'action des fourmis laissera une marque en rendant le verre visible.

2) Résultats à venir3) Interprétations grâce aux données bibliographiques:

Le noir de fumée a été retiré en divers endroits sur le passage de la fourmi. Les données bibliographiques (réf.) nous indiquent que ce sont les endroits où la fourmi frotte son abdomen sur le sol afin d'y déposer, par sécrétion de la glande de Dufour (5), une substance incolore et inodore pour l'homme mais perceptible par ses congénères. Il s'agit de phéromones de piste qui, une fois détectés par les autres ouvrières, leur indique la trajectoire à suivre. Pour cette espèce il s'agit surtout de dihydroisocoumarine (6). Plus il y a de passages, plus il y a de phéromones déposées.

III.Conséquence biologique du guidage du déplacement des fourmis A. Influence du guidage du déplacement sur la vitesse moyenne des fourmis et le temps de

déplacement.1) Protocole

On réalise des calculs de vitesse de différentes fourmis, grâce à l'exploitation des vidéos précédentes (notamment les enregistrements sans modification de paramètre). Il s’agit de calculer la vitesse moyenne des fourmis entre l'entrée et la nourriture au fur et à mesure que s'établit la trajectoire préférentielle.

2) Résultats à traiter:On constate que la vitesse moyenne des fourmis augmente tout au long de l'expérience

(Fig.9).

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Figure 9 : Évolution de la vitesse moyenne selon l'ordre de passage (à gauche) et de la moyenne des vitesses moyennes selon le nombre de passages (à droite).

La vitesse moyenne est multipliée par 3 entre le premier et le dernier passage, tandis que la moyenne des vitesses moyennes double.

3) Interprétations:La trajectoire qui se met en place au fur et à mesure des passages est de plus en plus

directe, en conséquence la distance parcourue est alors réduite ce qui augmente la vitesse moyenne. Néanmoins, à partir d'une vingtaine de trajet, la distance ne diminue plus significativement : c'est la vitesse même des fourmis qui augmentent. Plus la quantité de phéromone est importante, plus le déplacement est rapide(7).

B. Limites et amélioration possible de notre étude. 1) Ce qui n'a pas été pris en compte :

Lors de certains trajets, plusieurs fourmis se déplacent en file indienne. Le guidage peut s’effectuer par le suivi de la première fourmi de la file.

La sécrétion de phéromones guidant le déplacement n’a pas été clairement mise en évidence. Il aurait fallu synthétiser la substance afin de former une piste artificielle. Or la synthèse de cette substance est impossible avec les moyens dont nous disposons, et elle n’est pas commercialisée. L'utilisation d'une ancienne piste est impossible les phéromones étant trop volatiles.

2) Améliorations :Le retour à la fourmilière semble se faire grâce à des repères spatiaux : elle est souvent plus

directe que l'aller. La bibliographie sur le sujet indique l’influence de la position du soleil, paramètre que nous n’avons pas testé (3).

L’utilisation de phéromone obtenue artificiellement aurait pu nous permettre de tester la distance à partir de laquelle la substance est détectée par les fourmis ainsi que l’influence de la concentration sur le guidage du déplacement.

Un comportement observé pourrait avoir un rôle dans le déplacement particulier des fourmis lors de la quête de nourriture : le déplacement double (une fourmi en force une autre à se déplacer en la traînant).

Le signal d’arrêt du déplacement n’a pas été mis en évidence, il pourrait s’agir de l’épuisement de la source de nourriture ou de la constitution de réserves suffisantes. En effet, on a observé que les déplacements cessent même lorsqu’il reste de la nourriture dans l’aire de chasse.

Nos expériences permettent de mettre en évidence un guidage du déplacement des fourmis entre la fourmilière et la nourriture. Les stimuli liés à la nourriture ( odeur, vue...) et la mémorisation du trajet via des repères spatiaux interviennent que partiellement dans le guidage. Il est permis grâce au dépôt de phéromones de piste par les fourmis ayant trouvé la nourriture, ce qui va augmenter la vitesse de découverte de la nourriture par les autres fourmis.

R²=0,69

R²=0,98

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Lorsque la nourriture a été repérée par une ouvrière, cette dernière retourne à la fourmilière en déposant des phéromones par frottement de l’extrémité de leur abdomen sur le sol. Les fourmis alors nouvellement recrutées suivent une trajectoire globalement semblable à celle de la première grâce à cette piste de phéromones. Au fur et à mesure que le nombre de trajets entre la fourmilière et la nourriture augmente,de plus en plus de fourmis empruntent la même trajectoire car il y a de plus en plus de phéromones déposées. Néanmoins,il est possible que les phéromones ne soient pas le seul paramètre permettant le guidage du déplacement, des repères spatiaux pouvant intervenir pour le retour. En outre, les conclusions obtenues sont valables pour l'espèce étudiée (Lasius niger),nous ne pouvons que supposer que le guidage du déplacement fonctionne de la même façon chez les autres espèces de fourmis.

Ce guidage du déplacement par les phéromones de piste est un exemple de communication chimique entre les fourmis. Il existe également d'autres phéromones, comme celles du stress qui mettent en alerte les fourmis. Enfin, l'essentiel de la communication se fait par frottement des antennes de deux fourmis. Il serait alors intéressant d'étudier l'influence de cette communication sur le guidage du déplacement.

Bibliographie:

• (1) Les fourmis, Marie Sophie Germain, édition De Vecchi• (2) http://cle.fourmis.free.fr/.Cl Lebas, consulté le 22/02/2011.• (3) La vie des fourmis, Laurent Keller et Elisabeth Gordon, édition Odile Jacob• (4) contact: Alain Lenoir, chercheur notamment sur la communication chimique des

insectes sociaux à l'Institut de Recherche sur la Biologie de l'Insecte de Tours.• (5) Voyage chez les fourmis, Bert Hölldobler et Edward O.Wilson, édition Science

Ouverte SEVIL• (6) http://www.pherobase.com/database/genus/genus-Lasius.php,2009. Dr Ashraf M.

El-Sayed, consulté le 22/02/2011.•