LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

89
Université de Strasbourg Faculté de Droit, de Sciences Politiques et de Gestion Master II Droit social interne, européen et international Rapport de stage présenté par Anne-Laure FERRY Rédigé sous la direction de Madame Mélanie SCHMITT Année universitaire 2014/2015 LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE D’UN LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE : Détour autour de la réalité du motif économique et de l’obligation de reclassement

Transcript of LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

Page 1: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

Université de Strasbourg Faculté de Droit, de Sciences Politiques et de Gestion

Master II Droit social interne, européen et international

Rapport de stage présenté par

Anne-Laure FERRY

Rédigé sous la direction de

Madame Mélanie SCHMITT

Année universitaire 2014/2015

LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE D’UN LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE :

Détour autour de la réalité du motif économique et de

l’obligation de reclassement

Page 2: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

2

REMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à remercier ma responsable pédagogique, Madame Mélanie SCHMITT,

d’avoir accepté de m’accompagner tout au long de mon stage et de l’intérêt qu’elle a porté au

bon déroulement de mon stage. Un grand merci aussi pour son soutien et ses précieux conseils

lors de la rédaction de ce rapport de stage.

Merci ensuite à Madame Emmanuelle PARISSE de m’avoir accueillie au sein du pôle juridique

du cabinet FIBA de Schiltigheim et d'avoir accepté d’être ma maître de stage durant ces cinq

mois et plus particulièrement pour sa disponibilité, son appui et sa patience, ainsi que de

m’avoir permis de traiter des dossiers plus variés les uns que les autres.

Je remercie enfin toute l’équipe du cabinet et tout particulièrement le pôle juridique ainsi que

le service paie, de m’avoir si bien intégré tout comme d’avoir pris le temps de répondre à

chacune de mes questions.

Page 3: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

3

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

Juridictions

Cass. Ass. plén. : Assemblée plénière de la Cour de cassation

Soc : chambre sociale de la Cour de cassation

CJUE : Cour de justice de l’Union Européenne

Cour EDH : Cour européenne des droits de l’Homme

Autres :

art. : Article

BC : bulletin civil

CDD : Contrat à durée déterminée

CDI : Contrat à durée indéterminée

c. trav. : Code du travail

CSP : Contrat de sécurisation professionnel

DIRECCTE : Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du

travail et de l’emploi

PME : petites et moyennes entreprises

PSE : Plan de sauvegarde de l’emploi

TPE : très petites entreprises

Page 4: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

4

SOMMAIRE

REMERCIEMENTS ............................................................................................................................. 2

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS ................................................................................. 3

SOMMAIRE .......................................................................................................................................... 4

INTRODUCTION GENERALE .......................................................................................................... 6

PREMIERE PARTIE : Présentation du stage au sein du cabinet FIBA ......................................... 7

I. Présentation du cabinet FIBA de Schiltigheim............................................................................ 7

A. Aperçu historique de FIBA .......................................................................................... 7

B. Composition et fonctionnement du cabinet FIBA de Schiltigheim ............................. 8

II. Présentation du stage et des missions réalisées ......................................................................... 11

A. Les activités de conseils aux entreprises ................................................................... 11

B. L’élaboration d’actes juridiques et l’accompagnement des employeurs ................... 12

III. La détermination du sujet du rapport de stage ........................................................................... 14

DEUXIEME PARTIE : La réalité du motif économique et l’obligation de reclassement, points

centraux de la complexité du licenciement économique dans le groupe ......................................... 16

INTRODUCTION ............................................................................................................................... 16

I. Le groupe, une notion aux multiples facettes difficile à cerner ........................................... 20

A. Le groupe, notion floue et pourtant déterminante pour l’appréciation d’un motif

économique ....................................................................................................................... 21

B. Le périmètre de reclassement : une aire de mobilité adaptée au groupe mais source

d’une multitude de difficultés ........................................................................................... 33

Page 5: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

5

II. Un enchevêtrement de difficultés pour des sociétés déjà en détresse ....................................... 44

A. Un employeur souvent impuissant mais seul responsable ......................................... 44

B. Le projet de loi Macron : vers une simplification ? ................................................... 57

CONCLUSION .................................................................................................................................... 65

BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 67

TABLE DES MATIERES ...............................................................................………………………78

ANNEXES ............................................................................................................................................ 79

Page 6: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

6

INTRODUCTION GENERALE

Dans le cadre de mon Master II de droit social interne, européen et international à l’Université

de Strasbourg, il m’a été donné l’occasion de confronter mes connaissances juridiques théorique

en droit social avec la pratique.

Attirée par l’approche de conseils aux entreprises, j’ai choisi de faire mon stage dans un service

juridique au sein d’un cabinet d’expertise comptable.

Cette expérience m’a permis, à travers divers dossiers et demandes de clients, de mieux

comprendre et d’identifier les enjeux et problématiques économiques des petites, voire très

petites et moyennes entreprises. Ainsi, dans le contexte de crise économique qui est le nôtre,

l’une des grandes préoccupations des entreprises clientes est de s’adapter aux fluctuations du

marché économique et ce, de la manière la plus rapide et la moins couteuse possible afin de ne

pas en faire pâtir leur chiffre d’affaires.

Cependant, j’ai pu constater que le droit du travail en matière de licenciement pour motif

économique est loin de répondre aux impératifs énoncés précédemment. Par ailleurs, ce droit

est souvent source de complexité pour les TPE et PME et qui, au vu de leur taille, se tournent

naturellement vers leur cabinet d’expertise comptable afin de bénéficier d’un soutien et d’un

appui juridique lors de cette lourde procédure.

De plus, un certain nombre de clients confrontés à ce type de procédure et quel que soit leur

taille appartient à un groupe de société, ce qui rend plus complexe ladite procédure.

Aussi, le choix de mon sujet de rapport de stage s’est précisé afin de fournir un support aux

collaborateurs du cabinet afin d’expliquer et d’accompagner les éventuels clients confrontés à

ce type de situation.

La première partie de ce rapport sera consacrée à la présentation du cabinet FIBA de

Schiltigheim ainsi que des missions qui m’ont été confiées au cours du stage. La seconde partie

quant à elle, exposera les difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises appartenant à

un groupe lors d’un licenciement pour motif économique.

Page 7: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

7

Avant d’exposer les missions qui m’ont été attribuées durant ces cinq mois de stage (II), il

conviendra, dans un premier temps, de présenter la structure m’ayant accueillie en son sein (I).

Enfin, je consacrerai un troisième paragraphe aux raisons qui m’ont poussées à opter pour le

présent sujet de rapport de stage (III).

I. Présentation du cabinet FIBA de Schiltigheim

Voici tout d’abord un bref aperçu de l’historique du cabinet (A), avant de se pencher plus

amplement sur son fonctionnement et sa composition actuelle (B).

A. Aperçu historique de FIBA

Créé en 1969, le cabinet FIBA n’a eu de cesse de s’agrandir. Aujourd’hui, FIBA est devenu un

vrai groupe représenté essentiellement dans l’Est de la France, Alsace et Moselle, mais

également dans la capitale avec au total, pas moins de 15 établissements en France. Le groupe

compte ainsi trois entités : deux filiales (FIBA Lorraine et FIBA Paris) dépendant de la société

mère FIBA Alsace.

Depuis 2002, la société anonyme FIBA Alsace a installé son siège social au cœur de l’Espace

Européen de l’Entreprise basé à Schiltigheim, une zone qui est en perpétuel développement.

Comptant environ 4.500 clients exerçant dans des secteurs d’activité variés et parfois totalement

opposés, FIBA a su toucher aussi bien des entreprises locales que nationales. Sa proximité avec

PREMIERE PARTIE :

Présentation du stage au sein du cabinet FIBA

Page 8: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

8

la frontière allemande a su aussi faire du cabinet un interlocuteur privilégié des entreprises

d’Outre-Rhin cherchant à développer leurs activités économiques sur le territoire français.

Par ailleurs, l’adhésion de FIBA à Prime Global permet d’offrir à ses clients des relais de

compétence et de proximité en France et dans le monde entier. Prime Global est issu en 2012

d’un rapprochement entre différentes associations internationales comptables qui lui permet

d’être l’une des cinq plus grandes associations mondiales de cabinets indépendants d’expertise

comptable.

FIBA, c’est aussi environ 150 salariés répartis sur les différents sites dont plus de soixante

collaborateurs opérant depuis le siège social. Et c’est d’ailleurs dans cette structure que j’ai

effectué mon stage.

B. Composition et fonctionnement du cabinet FIBA de Schiltigheim

Le cabinet FIBA Schiltigheim est composé de différents pôles (1) qui fonctionnent en

collaboration (2).

1. Sa composition

Nous présenterons successivement les principaux pôles du cabinet qui sont le Pôle Comptabilité

(a), le Pôle Paie (b) et le Pôle Juridique (c).

a. Le Pôle Comptabilité

Le Pôle Comptabilité est au cœur même de l’activité du cabinet et c’est d’ailleurs le pôle qui

rassemble la majorité des effectifs du cabinet. Il se scinde en plusieurs entités comme l’expertise

comptable, le commissariat au compte ainsi que l’audit et le pôle fiscal.

Page 9: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

9

La mission de l’expert-comptable et de ses équipes consiste en premier lieu à garantir à ses

clients le respect de leurs obligations légales en matière de comptabilité et de fiscalité. Ces

tâches sont diverses comme l’établissement des comptes annuels, la saisie de la comptabilité,

les déclarations fiscales,…

Le commissaire au compte, quant à lui, a la charge de certifier les comptes des sociétés dont il

n’assure pas la gestion, c’est-à-dire de vérifier la régularité et la sincérité des comptes devant

donner une image fidèle du résultat de la société.

Le Cabinet propose aussi à ses clients ses services en matière d’audit. Cette mission va au-delà

du contrôle des comptes. Il s’agit plutôt de donner une opinion sur la régularité et la fiabilité de

l’information financière mise à disposition de toutes les parties prenantes de l’entreprise.

Enfin, le cabinet est composé d’un Pôle fiscal chargé de définir avec le client la stratégie la plus

adaptée à ses besoins et à ses objectifs.

b. Le Pôle Paie

Parce que la gestion des paies est une fonction complexe et à risques au regard des perpétuelles

réformes de la législation sociale, bon nombre de sociétés sous-traite ladite gestion, en partie

ou intégralement, au cabinet FIBA au sein duquel une dizaine de gestionnaires paie se charge

de l’établissement d'une part des bulletins de paie et d'autre part de documents annexes tels que

les soldes en tout compte, les attestations de salaire, les déclarations préalables à l’embauche…

c. Le Pôle Juridique

Dans un environnement juridique en mutation permanente, son rôle consiste à assurer au client

une parfaite conformité avec la législation et d’accompagner le client dans tous les événements

de la vie de l’entreprise.

Composé de 3 juristes et d’un secrétariat juridique, le pôle juridique se scinde en deux

départements : le département Droit des Affaires et le département Droit Social.

Page 10: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

10

Le département Droit des Affaires a pour mission d’assurer le conseil, la négociation,

l’ingénierie, la rédaction des actes, le suivi des contentieux, la création des sociétés…

Le département Droit Social que j’ai intégré lors de mon stage a en charge l’application du

Droit du Travail et de la Sécurité Sociale aux sociétés clientes au travers de son activité de

conseils et d’accompagnements des entreprises notamment en cas d’embauches, de

licenciements, d’élections professionnelles, d’accidents de travail…

2. Son fonctionnement

Si FIBA peut se prévaloir de différents pôles, spécialisés chacun dans un domaine de

compétences propres, ces pôles sont cependant loin d’être hermétiques. En effet, il existe une

véritable collaboration entre ses différentes entités et notamment entre les trois pôles principaux

que nous venons de présenter précédemment.

A titre d’illustration et en relation avec le sujet de ce rapport de stage, lorsqu’un client envisage

de procéder à un licenciement pour motif économique, celui-ci se met en rapport soit avec son

chargé de clientèle qui est très souvent son expert-comptable, ou directement avec le Pôle

Juridique.

Le pôle Juridique sera alors en charge de procéder aux différentes formalités énoncées dans le

Code du Travail.

Afin d’obtenir les renseignements nécessaires relatifs à titre d’exemple à sa situation

économique, le juriste en charge du dossier peut se mettre en relation avec l’expert-comptable.

Parallèlement, pour le calcul de l’indemnité de licenciement pour motif économique, les douze

dernières fiches de paie établies par le Pôle Paie sont indispensables. De plus, ce Pôle se

chargera de l’établissement des dernières formalités à savoir les soldes de tout compte, les

certificats de travail…

Enfin, dans le cadre d’un licenciement pour motif économique en raison de la cessation

d’activité, le département Droit des Affaires aura pour mission de procéder à la clôture de la

société.

Page 11: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

11

II. Présentation du stage et des missions réalisées

Exercer la profession de juriste en droit social au sein d’un cabinet d’expertise comptable est

synonyme de diversité. En effet, au cours de mon stage, plusieurs missions m’ont été confiées

toutes plus différentes les unes des autres. Il m’est toutefois possible de mettre en évidence deux

types de missions distinctes : la mission de conseils aux entreprises (A) et l’élaboration des

divers actes juridiques (B).

A. Les activités de conseils aux entreprises

Le droit social étant en perpétuelle mutation, l’employeur n’a ni le temps nécessaire, ni les

connaissances adéquates de se maintenir en conformité avec cette législation, encore moins

lorsqu’il est dirigeant d’une PME ou TPE et qu’il n’a aucun service juridique ou ressources

humaines pour l’épauler. Ainsi, c’est dans le cadre d’interrogations et de demandes de

précisions du client qu’intervient le juriste en droit social.

J’ai ainsi eu l’occasion d’effectuer une multitude de recherches sur des thèmes très variés

comme la prise en charge des frais professionnels, la question des jours fériés, le registre unique

du personnel et les dernières modifications relatives aux stagiaires, les emplois d’avenir, le

véhicule de fonction… Ces recherches effectuées avec l’aide de différentes bases de données

mises à ma disposition m’ont permis d’approfondir mes connaissances en droit social.

En outre, certaines demandes de nos clients nécessitaient une recherche plus poussée ainsi que

la réalisation d’une étude en relation avec les caractéristiques de l’entreprise et de ses salariés.

De ce fait, j’ai réalisé plusieurs études approfondies sur le cumul emploi retraite et l’âge de

départ à la retraite du salarié, mais aussi sur la coordination des régimes de Sécurité Sociale et

le droit applicable au salarié travaillant dans plusieurs Etats pour le compte d’un ou plusieurs

employeurs. Dans ce cadre-ci, il convenait de présenter aux clients les différentes solutions

envisageables et de les conseiller au mieux afin qu’ils puissent opter pour le résultat le plus

adapté à leur entreprise.

Page 12: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

12

Enfin, d’autres recherches relatives aux dernières réformes intervenues en droit social étaient

nécessaires à la rédaction de courriers d’information aux clients notamment concernant la mise

en place de la base unique de données ou encore l’obligation de l’employeur de réaliser des

entretiens professionnels faisant suite à la loi relative à la formation professionnelle.

Tout l’enjeu desdites recherches était d’apporter une réponse détaillée tout en restant précis sur

le thème demandé et sans perdre le client avec une multitude d’explications. En ce sens, il était

primordial d’adapter la solution aux particularités de l’entreprise.

De surcroît, au vu de la diversité de clientèle du cabinet, le degré de technicité de la réponse

apportée au client variait sensiblement. En effet, le client étant souvent profane en droit social,

la réponse se devait d’être claire et à sa portée.

B. L’élaboration d’actes juridiques et l’accompagnement des employeurs

Parallèlement à cette mission de conseil, il m’a été permis d’élaborer différents actes de droit

du travail intervenant au cours de la vie de l’entreprise.

J’ai ainsi rédigé différents types de contrat, du Contrat à Durée Déterminée au Contrat à Durée

Indéterminée, en passant par les emplois d’avenir, avec à chaque fois leur lot de particularités

notamment concernant le travail à temps partiel, le CDD étudiant… A cette occasion, il me

revenait de me rapporter aux dispositions légales tout en les comparant aux dispositions

conventionnelles applicables à l’entreprise afin de toujours employer la solution la plus

favorable au salarié.

Par conséquent, de par la diversité des clients de FIBA, j’ai pu prendre connaissance d’une

variété de conventions collectives aux nombres desquelles nous retrouvons principalement

celles du Bâtiment, du Commerce de gros et des Hôtels, Cafés, Restaurants.

Corrélativement, j’ai procédé à la rédaction d’avenants aux contrats de travail, notamment pour

mettre en conformité le contrat avec les nouvelles dispositions législatives ou conventionnelles.

A côté de la rédaction de contrats, je me suis occupée de son exact opposé : la rupture. J’ai pu

intervenir à différents stades de la procédure de licenciement. J’ai notamment rédigé des

Page 13: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

13

convocations aux entretiens préalables, des notifications de rupture pour différents motifs dont

deux récurrents qui sont le licenciement disciplinaire en raison d’absences injustifiées et le

licenciement pour motif économique. Il me revenait également de calculer les indemnités de

rupture auxquelles le salarié avait droit.

Néanmoins, si le licenciement est le mode de rupture traditionnel à l’initiative de l’employeur,

ce n’est pas la procédure la plus pratiquée au sein du cabinet. En effet, les employeurs ont

davantage tendance à recourir à la rupture conventionnelle. J’ai donc pu procéder à l’élaboration

des différentes modalités rattachées à cette procédure comme la convocation à l’entretien

préalable, la rédaction d’un projet de convention de rupture et enfin à l’établissement des

formulaires de demande d’homologation de la rupture par la DIRECCTE. Afin de respecter les

différents délais procéduraux prescrits par le Code du Travail, je me devais d’élaborer un

planning devant être scrupuleusement suivi tout en sachant que le moindre manquement pouvait

entrainer une irrégularité dans la rupture du contrat.

Mon travail ne s’étant pas limité aux missions précédemment présentées, j’ai eu l’occasion de

rédiger des accords d’entreprises tels que les accords d’intéressements. Plus récemment, la loi

du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale

ayant permis dans les entreprises de plus de 10 salariés de conclure un accord d’entreprise relatif

au Compte personnel de formation, il était de mon devoir d’élaborer un modèle d’accord. La

question étant nouvelle, les principales difficultés ont été l’absence de développement et de

précision sur cette possibilité ainsi que l'absence de support sur lequel se baser.

Un problème quasi identique s’est posé à moi alors que j’ai été chargé de préparer un modèle

de désignation d’un représentant en France de l’entreprise étrangère procédant au détachement

de travailleur, obligation issue du décret du 30 mars 2015 relatif à la loi visant à lutter contre la

concurrence sociale déloyale du 10 juillet 2014. Là aussi, le décret venant d’être adopté, je n’ai

eu que très peu de données pour élaborer ledit modèle.

Enfin, j’ai encore eu l'occasion d’accompagner différents clients dans l’organisation d’élections

professionnelles. A l’aide de modèles, il me fallait préparer les documents nécessaires,

notamment le courrier d’invitation à négocier le protocole préélectoral adressé aux

organisations syndicales représentatives, les différentes notes d’informations à destinations des

salariés, les listes électorales et le procès-verbal.

Page 14: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

14

J’ai, par ailleurs, pu participer plus activement au déroulement des élections professionnelles

puisque le cabinet FIBA devait lui-même renouveler la délégation unique du personnel. A

travers cette expérience, j’ai pu m’apercevoir de la faible audience électorale et surtout du faible

nombre de candidats se présentant aux élections.

En définitive, et bien que toutes mes missions n’ont pas été abordées précédemment, mon stage

a été extrêmement diversifié et m’a permis d’élargir mes connaissances sur des thèmes qui

m’étaient parfois inconnus. Il m’a aussi donné l’occasion de confronter mes connaissances

universitaires avec la pratique en cabinet d’expertise comptable. Enfin, c’est une véritable

expérience pratique et très bénéfique que j’ai acquis durant ces cinq mois de stage.

III. La détermination du sujet du rapport de stage

Comme énoncé auparavant, les missions qui m'ont été confiées au cours de ce stage ont été très

variées, je n’ai en conséquence pas eu de thème récurrent pouvant constituer mon sujet de

rapport.

Au regard de la conjoncture économique actuelle, le cabinet est amené à traiter de nombreuses

procédures de licenciement pour motif économique. Etant donné la complexité de ces

procédures qui sont par ailleurs souvent incomprises par l’employeur, celui-ci attend de son

cabinet un soutien, voire même un accompagnement durant le temps de la procédure. Je me

suis ainsi penchée, sur proposition de ma Maître de stage, sur ladite procédure.

Tout au long de mon stage, j’ai eu l’occasion de participer moi-même à l’élaboration de

procédures et d’intervenir à divers stades. Les motifs invoqués afin de justifier d'un tel

licenciement étaient tous plus singuliers les uns que les autres, me permettant ainsi de balayer

les différentes particularités de ces procédures et ainsi de pouvoir les comparer.

J’ai dès lors traité un licenciement pour motif économique en raison de difficultés économiques,

un autre pour des raisons de mutations technologiques intervenues dans l’entreprise et enfin un

licenciement pour motif économique suite à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la

sauvegarde de leur compétitivité dans le secteur d’activité du groupe auquel l’entreprise

appartient.

Page 15: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

15

Etant intervenue lors de procédures concernant des entreprises de tailles différentes, j’ai pu

constater que les complexités rencontrées par ces entreprises s’amplifient dans les entreprises

appartenant à un groupe de sociétés, pis encore dans un groupe de dimension internationale.

D’où mon choix de me concentrer sur le groupe de sociétés.

Par ailleurs, lors d’entretiens téléphoniques ou en cabinet, j’ai pu observer les principales

difficultés que doivent surmonter ces petites entreprises appartenant à un groupe de sociétés et

j'ai opté pour cette voie. Mon sujet s’est ainsi précisé pour se focaliser sur les deux principales

complexités qui sont avant tout l’obligation de l’employeur de reclasser le salarié menacé par

un tel licenciement et la détermination du motif économique.

J’ai, pour finir, réuni toutes ces difficultés afin d’aboutir à la problématique suivante et faisant

l’objet de ma seconde partie : obligation de reclassement et réalité du motif économique, deux

notions facteur de complexité de la procédure de licenciement économique dans un groupe de

sociétés.

Page 16: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

16

INTRODUCTION

« L’union fait la force ».

Si ce célèbre proverbe est devenu la devise nationale de plusieurs Etats dans le monde, il n’en

reste pas moins que celui-ci ne se vérifie pas toujours dans un groupe de sociétés lorsqu’une de

ses filiales fait face à un licenciement pour motif économique. « L’Union fait la complexité »

illustrerait davantage le casse-tête auquel les sociétés appartenant à un groupe de sociétés sont

confrontées dans ce cadre-ci.

Le Petit Larousse définit le groupe comme un « ensemble de choses, d’animaux ou de

personnes, formant un tout et définis par une caractéristique commune »1. Plus précisément

dans le domaine économique, selon le dictionnaire du droit privé de Serge Braudo2, un Groupe

est « un ensemble d'entreprises appartenant à des personnes physiques ou morales

juridiquement distinctes et indépendantes les unes des autres dont l'activité est contrôlée par

une institution dite société mère qui, par l'intermédiaire d'un ou de plusieurs dirigeants, détient

sur chacune d'elles un certain pouvoir financier, de gestion et d'administration économique ».

Cependant, ce ne sont là que deux définitions parmi une multitude d’autres. Néanmoins, nous

y reviendrons plus amplement dans notre développement. D'ores et déjà, une première

complication est à mettre en lumière puisque le groupe est une notion dont les contours ne sont

pas clairement définis. Ladite complication est davantage accrue lorsqu’un licenciement pour

motif économique est envisagé par l’une des filiales du groupe.

1 Définition Groupe, Le Petit Larousse, 2015 2 Dictionnaire de droit privé, Serge Braudot, http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/groupe-d-entreprises.php

DEUXIEME PARTIE :

La réalité du motif économique et l’obligation de reclassement, points

centraux de la complexité du licenciement économique dans le groupe

Page 17: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

17

Il convient à présent de s’arrêter sur le licenciement pour motif économique, lui-même. Si pour

exister, tout contrat doit passer par sa conclusion, il existe en revanche différents moyens d’y

mettre fin. En effet, si de nouvelles variantes de rupture de contrat sont apparues ces dernières

années au titre desquelles nous pouvons citer la rupture conventionnelle mise en place par la loi

de modernisation du marché du travail du 25 juin 2008, d’autres modes plus traditionnels de

rupture de contrat de travail à durée indéterminée revêtent toujours une certaine importance.

Parmi ces modes de ruptures traditionnels, le licenciement est la rupture prise à l’initiative de

l’employeur. Cette catégorie de rupture se scinde en deux procédures. D’un côté se trouve le

licenciement pour motif personnel, c’est-à-dire le licenciement prononcé par un employeur pour

un ou plusieurs motifs inhérents à la personne du salarié. Ce licenciement peut être soit

disciplinaire, donc reposant sur la faute du salarié, soit basé sur une inaptitude physique ou une

incompétence professionnelle du salarié et que son maintien dans l’entreprise est de ce fait

rendu impossible, même sans faute. De l’autre côté et à l’opposé du licenciement pour motif

personnel se situe le licenciement prononcé pour des motifs économiques, licenciement

constituant l’objet de notre développement.

A la différence du licenciement pour motif personnel, le législateur a donné une définition du

licenciement pour motif économique à l’article L.1233-3 du code du travail. Constitue alors un

licenciement pour motif économique, « le licenciement effectué par un employeur pour un ou

plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou

transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du

contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations

technologiques ».

A la lecture de cette définition, il convient de s’arrêter sur l’adverbe « notamment ». La présence

de celui-ci a permis à la jurisprudence dans l’arrêt Thomson Tubes du 5 avril 19953 d’enrichir

cette définition par l’ajout de deux autres causes pouvant justifier le licenciement pour motif

économique. Ces causes sont la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder la compétitivité

et la cessation d’activité de l’entreprise à la condition que celle-ci ne résulte ni d’une faute de

l’employeur ni d’une légèreté blâmable.

3 Cass. Soc. 5 avril 1995, B. n° 123, Société Thomson Tubes et Displays et Société TRW-Repa

Page 18: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

18

D'après cette définition, ce sont bien deux conditions que l’employeur, envisageant de procéder

à un tel licenciement, doit satisfaire. D’une part, le licenciement doit comporter une cause

économique (la suppression ou transformation d’emploi ou une modification du contrat de

travail) et d’autre part, ladite cause doit avoir des conséquences sur l’emploi (des difficultés

économiques, des mutations technologiques, une réorganisation, une cessation).

Une définition qui apparait donc bien complète et rigoureuse et cela se justifie notamment par

la volonté même du législateur d’encadrer ce type de licenciement. Le risque, en effet, comme

pour tous types de licenciement, serait que l’employeur en fasse une utilisation abusive afin de

se séparer, à son gré, d’un ou plusieurs de ses salariés. Ainsi, la sanction encourue en cas de

détournement de la procédure n’est pas des moindres. Le licenciement sera alors qualifié de

licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié aura droit alors à une indemnisation du

préjudice encouru dont le montant dépend pour l'instant de son ancienneté et de la taille de

l’entreprise. Néanmoins, ces dispositions sont amenées à être modifiées par la loi Macron.

Par ailleurs, cette loi aussi appelée Loi pour la croissance de l’activité et l’égalité des chances

économiques définitivement adoptée le 10 juillet 2015 mais ayant fait l’objet de recours auprès

du Conseil Constitutionnel, est venue aussi réformer la procédure applicable au licenciement

pour motif économique dans l’optique de la simplifier.

En effet, la procédure régissant ce licenciement est toute autant rigoureuse. Conformément à la

procédure de licenciement pour motif personnel, l’employeur lorsqu’il envisage de procéder à

un licenciement pour motif économique est tenu de procéder à une convocation écrite du salarié

à un entretien préalable, lettre qui devra contenir l’objet de la convocation. Lors de l’entretien

au cours duquel le salarié à la possibilité de se faire représenter, l’employeur doit faire connaître

au salarié le ou les motifs de la mesure envisagée. Enfin cette procédure s’achève par la

notification du licenciement au salarié devant comporter l’énoncé du ou des motifs invoqués

par l’employeur.

La procédure de licenciement prononcée pour motif économique fait cependant l’objet de

certaines particularités retrouvés aux articles L 1233-1 et suivants du Code du travail. Cette

législation s'est, à l'origine, largement inspirée de l'accord national interprofessionnel sur la

sécurité de l'emploi du 10 février 1969 et modifié par un avenant du 21 novembre 1974.

Page 19: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

19

Par ailleurs, ces règles sont en accord avec le droit de l’Union européenne et la directive

98/59/CE du 20 juillet 1998 (JOCE 12 août) ayant codifié la directive 75/129/CEE du 17 février

1975 complétée par la suite par la directive 92/56/CEE du 24 juin 1992.

Premièrement, selon la taille de l’entreprise, l’ampleur du licenciement envisagé et la période

sur laquelle ces licenciements sont prononcés, la procédure applicable est déjà différente et plus

ou moins contraignante. Aussi, les modalités procédurales comme la consultation des

représentants du personnel et la constitution d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE),

varient en fonction du mode de licenciement, individuel ou collectif, du nombre de salariés

touchés et sur quelle période, plus ou moins de 10 salariés sur une période de 30 jours et du

nombre de salariés total de l’entreprise, plus ou moins de 50 salariés.

Ensuite, une autre de ces particularités intervenant au début de la procédure est la fixation des

critères d’ordres du licenciement. Ces critères prenant en compte notamment ceux énoncés dans

l’article L 1235-5 c.trav. permettent alors à l’employeur de déterminer les salariés qui seront

menacés par un tel licenciement. La mise en œuvre de ces critères devant se faire au niveau de

l’entreprise, nous ne nous attarderons pas sur ce point dans notre développement.

En revanche, l’une des principales difficultés que doit faire face une entreprise appartenant à

un groupe lorsqu’elle envisage de licencier économiquement est la mise en œuvre de

l’obligation de reclassement. Au terme de l’article L 1233-4 c.trav. le licenciement pour motif

économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et

d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans

l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.

Dans ce cadre-ci, et contrairement à l’entreprise « isolée », la filiale doit chercher à reclasser le

salarié visé par cette procédure, dans les entreprises du groupe auquel elle appartient ou plus

précisément à l'intérieur du groupe parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le

lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

C’est bien là tout le nœud du problème. En effet, que faut-il entendre par cette définition du

groupe ? Jusqu’où s’étend cette obligation ?

Page 20: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

20

De la même manière, le motif même du licenciement est source de complication. Il faut entendre

par « motif » les raisons qui justifient la décision de l’employeur de recourir à une telle solution.

Ces motifs sont ceux énoncés dans la loi et par la jurisprudence que nous avons cités au

préalable.

Or, la cour de cassation n’apprécie pas uniquement l’existence de difficultés économiques au

sein d’une entreprise, mais également dans le secteur d’activité du groupe auquel appartient la

filiale et ce, peu importe que celle-ci appartienne à un groupe implanté en France ou à un groupe

international. Là encore se pose la question de la notion de secteur d’activité du groupe.

Que d’interrogations et de difficultés pour une entreprise pourtant déjà confrontée à ses propres

difficultés. Ce n’est, de plus, pas les seules complications auxquelles une telle entreprise doit

faire face. Par ailleurs, le nombre et le degré de complexité varient d’un groupe à un autre selon

notamment sa taille, sa dimension internationale ou non, selon les relations entretenues entres

les différentes filiales et la société mère…

Il semble opportun de préciser que ces difficultés, comme nous pourrions le croire, ne

concernent pas qu’une minorité d’entreprises appartenant à un groupe, car en effet en 2008 ce

ne sont pas moins de 40.600 groupes et tout autant de filiales qui ont été recensés en France.

Aussi, il conviendra dans un premier paragraphe d’observer que le groupe est critère

déterminant dans la procédure de licenciement pour motif économique et bien qu’ayant une

variété de définitions, celui-ci demeure une notion difficile à cerner (I). Ensuite, dans un second

paragraphe nous constaterons que l’appartenance d’une entreprise à un groupe de sociétés

accentue davantage la complexité d’une telle procédure, procédure que le législateur a tenté de

simplifier en adoptant la loi Macron (II).

I. Le groupe, une notion aux multiples facettes difficile à cerner

La cour de cassation apprécie le motif économique au niveau du groupe de société, ainsi il

conviendra tout d’abord de délimiter cette notion de groupe dans un premier temps (A). Ensuite,

nous verrons que pour un même licenciement, la définition donnée au groupe de société varie

Page 21: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

21

lorsque l’étendue de l’obligation de reclassement est appréciée, ce qui n’est pas sans comporter

quelques difficultés (B).

A. Le groupe, notion floue et pourtant déterminante pour l’appréciation d’un motif

économique

Le groupe de société revêt différentes significations selon le domaine concerné (1). La

jurisprudence a quant à elle opté pour le secteur d’activité du groupe afin d’apprécier la réalité

du motif économique (2).

1. Une multiplicité de définition de groupe

Comme le dit Gérard Couturier, « à chacune des règles dont l'application implique la prise en

considération de l'existence d'un groupe de sociétés correspond une manière de délimiter le

groupe »4. Il n’existe cependant en droit français aucune définition « légale » du groupe de

sociétés, ni aucun droit « spécial » des groupes, bien que cela ait été longtemps suggéré.

Toutefois, il est possible de rencontrer de nombreuses règles juridiques autonomes et éparses

applicables aux groupes selon les différentes branches du droit, que ce soit en droit du travail

(b) ou dans les autres domaines (a). Par ailleurs, la doctrine a, elle aussi, tenté d’appréhender

cette notion (a).

a. L’appréhension de la notion de groupe par la doctrine

Dans la doctrine française, diverses définitions conceptuelles d’un « groupe de société » ont été

proposées par des auteurs. Ainsi, se prévalant de l’interdépendance économique et financière

entre les sociétés appartenant au groupe, M. Vidal est d’avis qu’un groupe de sociétés « est un

ensemble de sociétés qui présentent une structure juridique distincte, mais qui sont liées par

4 Gérard Couturier, Droit social, 1992, p.1112

Page 22: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

22

des participations ou des relations contractuelles leur conférant une certaine interdépendance

économique ou financière laquelle peut se manifester par l’existence d’un pouvoir de décision,

uniquement prépondérant ou partagé, extérieur à plusieurs de celles-ci et propre à l’ensemble

du groupe » 5.

Cette position est principalement rejointe par MM. Ripert, Roblot et Germain, selon qui le

groupe « est constitué par plusieurs sociétés juridiquement autonomes, mais situées les unes

par rapport aux autres dans un état de dépendance économique, susceptible d’altérer leur

autonomie juridique »6.

En revanche, le groupe de sociétés est défini par certains autres auteurs plutôt en référence aux

modalités d’organisations du pouvoir de décision. Dans ce sens, un groupe est « un ensemble

constitué par plusieurs sociétés, ayant chacune leur existence juridique propre, mais unies

entre elles par des liens divers en vertu desquels l’une d’entre elles, dite société mère, qui tient

les autres sous sa dépendance, exerce un contrôle sur l’ensemble et fait prévaloir une unité de

décision »7.

Enfin, certains auteurs proposent de rajouter, outre les deux éléments essentiels de cette

définition – à savoir l’autonomie juridique des sociétés membres et l’unicité de la décision – «

l’existence d’un intérêt du groupe mise en place par une politique économique ou financière

globale »8.

Le groupe pourrait aussi se définir comme un mode de concentration économique performant,

permettant notamment une organisation globale et rationnelle de l’activité à l’échelle du groupe,

une organisation flexible puisqu’il est assez aisé d’exclure une entité du groupe qui ne

correspondrait plus aux attentes dudit groupe en recourant par exemple à la vente d’actions. Un

autre avantage du groupe qui n’est pas des moindres est la limitation de la responsabilité

juridique. En effet, la responsabilité juridique reste attachée à chaque entreprise juridiquement

5 Vidal, D., « Les mérites de la méthodologie ponctuelle d’un droit des groupes de sociétés », LPA, 1993, n° 78, p. 17 6 Ripert G. Roblot R. et Germain M., « Traité de droit commercial », Tome 1, L.G.D.J., 15e Ed. 1993, n° 1608 7 Définition mise en avant par MM. B. MERCADAL et PH. JANIN : « Sociétés commerciales », 1996 p. 1079. Cette définition a été reprise par Mme Charvériat et M. Couret dans le Memento de F. Lefebvre : « Groupes de sociétés », 2007-2008, p.15. 8 « Dictionnaire de la Comptabilité » (les dictionnaires La Villeguerin), 2 ème édition, p.454

Page 23: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

23

autonome. Ainsi, toute l’originalité du groupe est d’avoir une unité de décision économique

composée d’une pluralité d’entreprise économiquement dépendantes mais toutes juridiquement

autonomes9.

b. L’appréhension du groupe dans les matières autres que le droit du travail

Le droit pénal tout d’abord reconnaît au groupe un intérêt économique, social ou financier

commun à travers l’arrêt Rozemblum10 qui admet en matière d’abus de biens sociaux, la

possibilité d’écarter la responsabilité du dirigeant d’une personne morale en énonçant ces trois

critères cumulatifs et prenant en compte l’intérêt du groupe tout entier. Le groupe de sociétés

est appréhendé dans cette optique à travers la notion d’intérêt de groupe, seule justification

possible à une « atteinte » à la primauté de l’intérêt social.

Le droit fiscal admet, à travers le mécanisme de l’intégration fiscale, la possibilité pour une

société mère dite « tête de groupe », de se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés.

Ainsi, le droit fiscal appréhende ici le groupe de sociétés à travers des liens essentiellement

financiers et capitalistiques, lui permettant d’en tirer des conséquences juridiques spécifiques.

Cependant, le phénomène du regroupement d’entreprises reste une réponse du monde des

affaires aux exigences du marché. Le groupe est avant tout une réalité économique. Ainsi, bien

qu’il ait pénétré le droit du travail, le groupe demeure tout d’abord une notion issue du droit des

sociétés. A l’instar des autres disciplines, le droit des sociétés n’appréhende que de façon

ponctuelle le droit des groupes de sociétés.

Le code de commerce aborde le problème des groupes en fonction de l’importance de la

participation détenue par une société dans le capital d’une autre. À certains degrés de détention

du capital d’une société correspondent des définitions. Aussi, lorsqu’une société possède plus

de la moitié du capital d’une autre société, la seconde est considérée, pour la réglementation

des sociétés contrôlées, comme la filiale de la première (c. com. art. L. 233-1).

9 Séminaire de Madame Marguerite Kocher, Le groupe de société et le droit du travail, 2014 10 Cass. crim., 4 Février 1985, D. 1985, p. 485

Page 24: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

24

De même, il est possible de citer à titre d’exemple la possibilité pour les sociétés appartenant

au même groupe d’établir des comptes consolidés (art. L. 233- 16 et s. c.com). Ladite possibilité

de consolidation comptable dépend là encore de critères particuliers.

Cependant, le droit du travail s’est, lui aussi, emparé de cette notion.

c. La reconnaissance juridique du groupe d’entreprises en droit du travail

Le droit du travail a été dans un premier temps perturbé par le groupe de sociétés, par le fait

que l’entreprise appartienne à un groupe. En effet, si l’entreprise appartient à un groupe,

l’employeur n’est plus totalement maitre de la stratégie économique de son entreprise.

Par le passé, le périmètre était délimité à l’entreprise ou l’établissement et ce, principalement

dans les relations collectives du travail. Ainsi, la négociation se fait en principe avec

l’employeur qui exerce l’intégralité du pouvoir économique de gestion sur l’entreprise, au

niveau de l’entreprise.

Cependant, l’entreprise n’a pas la personnalité juridique. Et donc cette entreprise, pour être

incarnée, a besoin d’être appuyée sur un groupement personnifié qui est la société. C’est la

société qui est juridiquement employeur des salariés.

Le terme d’unité économique et social (UES) a tout d’abord été consacré. Ladite UES a son

intérêt en particulier dans les relations collectives de travail pour la mise en place des

représentants du personnel, l’objectif étant d’éviter tout détournement de l’employeur de la

fraction de son entreprise en entité autonome afin d’éviter de mettre en place lesdits

représentants. La reconnaissance d’une UES permet de considérer que les sociétés créées

artificiellement forment globalement une unité économique et sociale, laquelle constitue une

entreprise au sens du droit du travail pour la mise en place des représentants du personnel.

Puis le droit du travail a appréhendé la notion de groupe de sociétés à travers la création, par la

loi du 28 Octobre 1982 dite Loi Auroux, d’un organe de représentation spécifique aux groupes

de sociétés qui est le comité de groupe.

Page 25: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

25

A cette occasion, le législateur a délimité la notion de groupe. Retrouvée aux articles L. 2331-

1 et s. du code du travail, la définition légale du groupe repose sur une structure pyramidale

avec une entreprise dominante et des entreprises dominées. Elle repose sur des relations de type

sociétaire, des relations donc de détention en capital ou de contrôle par les droits de vote à

travers les notions d’influence dominante et de contrôle sociétaire. De ce fait, l’approche est

énormément influencée par le droit des sociétés. D’ailleurs, cette définition renvoie au code du

commerce et plus précisément à son article 233-1 déjà cité précédemment et l’article 233-3.

Néanmoins, dans cette définition, seules les entreprises ayant leur siège social en France entrent

dans le périmètre du comité de groupe. Sont donc exclues les filiales ou autres entreprises

situées à l’étranger.

Plus récemment, la notion de groupe a été reprise tout d’abord par la jurisprudence11 puis par la

loi du 4 mai 200412 qui consacre l’accord collectif de groupe à l’article L.2232-10 du code du

travail. Il reste cependant une interrogation sur la délimitation de ce groupe. Même si le

législateur ne donne pas de définition du groupe et ne renvoie pas expressément à la définition

légale de l’article L.2331-1 du Code du travail relative à la mise en place du comité de groupe,

une circulaire du 22 septembre 200413 considère que cette définition s’applique. En revanche,

cette circulaire ne lie pas le juge.

En outre, là encore, cet accord vaut uniquement pour les entreprises françaises. Dès lors, même

si le groupe a une dimension européenne ou internationale, le régime juridique de l’accord de

groupe ne va pas au-delà du territoire français.

Il existe encore une variété d’articles du code du travail faisant référence à cette notion de

groupe. Nous pouvons ainsi citer rapidement, à titre d’exemple, l’obligation de négocier la

Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) dans les entreprises appartenant

à un groupe d’au moins 300 salariés, tout comme l’obligation de négocier les contrat de

génération qui vise les entreprises dépendantes de petits groupes d’au moins 50 salariés, ou

encore l’obligation de négociation relative à la pénibilité dans les entreprises comptant au moins

11 Cass. soc. 30avril 2003, Arrêt Axa, n°01-10027 12 Loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue

social 13 Circulaire du 22 septembre 2004 relative au titre II de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation

professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social

Page 26: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

26

30 salariés et appartenant à un groupe d’au moins 50 salariés dès lors que plus la moitié de ses

salariés sont touchés par des facteurs de pénibilité.

Enfin, en matière de participation l'article L.3344-1 du code du travail retient une approche

extensive du groupe en énonçant que « l'intéressement, la participation ou un plan d'épargne

d'entreprise peut être mis en place au sein d'un groupe constitué par des entreprises

juridiquement indépendantes, mais ayant établi entre elles des liens financiers et économiques

».

Au regard de ce qui précède, c’est donc une multitude de définition du groupe qu’il faut recenser

et ce, au sein même du droit du travail. De la même manière, la jurisprudence a créé sa propre

définition du groupe de société afin d’apprécier la réalité du motif économique du licenciement

prononcé par une entreprise appartenant à un tel groupe.

2. Une cause économique appréciée au niveau du groupe

Alors même que le cadre du contrat de travail est l’entreprise et non le groupe, la jurisprudence

fait souvent prévaloir la réalité des liens existant entre les entreprises du groupe. C’est ainsi

qu’elle se place dans le cadre du groupe pour apprécier la réalité du motif économique (b). Pour

cela, elle a développé la notion de secteur d’activité du groupe (a).

a. La notion de secteur d’activité du groupe

D’après l’article L.1233-3, pour être régulier, le licenciement pour motif économique doit

remplir trois critères.

Tout d’abord le motif invoqué par l’employeur dans la notification au salarié de son

licenciement doit être non inhérent à la personne de ce dernier. Lorsque la raison

économique sert à motiver un licenciement, le salarié est « choisi » en fonction de certains

critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements et ce, même si un seul poste doit être

supprimé.

Page 27: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

27

Ensuite, un motif économique implique un élément matériel, c’est-à-dire l’existence d’une

suppression ou d’une transformation d’emploi, ou une modification d’un élément essentiel du

contrat de travail, en d’autres termes, il doit y avoir un effet sur le poste occupé ou les fonctions

exercées par le salarié.

Enfin, la dernière condition tient à la cause économique du licenciement. Il peut s’agir d’après

l’article L.1233-3 principalement de difficultés économiques ou de mutations technologiques

et plus récemment, selon la jurisprudence du 5 avril 199514 d’une réorganisation pour

sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou d’une cessation d’activité.

Le motif économique étant défini, il convient cependant de préciser que ce n’est pas l’ensemble

du motif économique qui est apprécié au niveau du groupe. En effet, l’élément matériel est

toujours apprécié au niveau de l’entreprise concernée par les licenciements. A titre

d’illustration, dans un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 5 avril

199515 ou plus récemment dans un arrêt du 8 juillet 200816, les Hauts juges ont décidé qu’une

suppression d’emploi s’apprécie uniquement au niveau de l’entreprise. Tel est également le cas

d’une modification du contrat de travail ou d’une transformation d’emploi17

A l’inverse, l’appréciation de l’élément originel diffère selon que l’entreprise appartienne ou

non à un groupe de société. Ainsi, lorsqu’une entreprise ne fait pas partie d’un groupe de société,

la cause économique est appréciée au niveau de l’entreprise elle-même. Aussi, l’appréciation

des difficultés économiques, par exemple, se fait au niveau de l’entreprise dans son ensemble

mais elle ne s’effectue ni au niveau d’un établissement, ou d’un magasin si l’entreprise en a

plusieurs18, ni au niveau du secteur d’activité concerné19 ou d’un département de l’entreprise

sous prétexte qu’il correspond à un secteur d’activité20.

14 Cass. Soc. 5 avril 1995, B. n° 123, Société Thomson Tubes et Displays et Société TRW-Repa 15 Cass. Soc. 5 avril 1995, n°93-42690, B. n° 123 16 Cass. Soc. 8 juillet 2008, n°06-46654 D 17 Cass. Soc. 16 janvier 2001, n°98-44461, BC V n°11 18 Cass. Soc. 17 juin 1992, n°89-42769, BC V n°403 ; Soc. 26 octobre 2005, n°03-41972 D 19 Cass. Soc. 7 octobre 1998, n°9643107, BC V n°405 20 Cass. Soc. 26 juin 2012, n°11-13736, BC V n°197

Page 28: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

28

La solution est toute autre lorsque l’entreprise appartient à un groupe de société. Les juges de

la Chambre sociale ont décidé que dans ce cadre-ci, la cause économique évoquée à l’appui

d’un licenciement doit s’apprécier au niveau du secteur d’activité du groupe. Ce cadre

d’appréciation a été donné dans un arrêt en date du 5 avril 1995, Sté Thomson Tubes et Displays

c/ Steenhoute21, qui énonce que « constitue un licenciement pour motif économique le

licenciement résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification

substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à

des mutations technologiques ou à une réorganisation. Si la réalité de la suppression ou

transformation d'emploi ou de la modification substantielle du contrat de travail est examinée

au niveau de l'entreprise, les difficultés économiques doivent être appréciées au regard

du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée. »

Depuis, d’autres arrêts, notamment un arrêt en date du 21 novembre 201222, sont venus

confirmer cette solution en réemployant toujours le même attendu de principe. Un arrêt du 20

février 1991 avait déjà affirmé que la réalité des motifs économiques du licenciement doit

s'apprécier dans le cadre du groupe, sans toutefois préciser ce qu’il fallait entendre par groupe.

Afin de mieux comprendre la signification que la Cour de cassation entend donner à la notion

de secteur d’activité du groupe, nous pouvons illustrer cela au travers de la principale cause

économique invoquée qui est la difficulté économique. En effet, les

licenciements économiques sont souvent envisagés en raison de difficultés financières

rencontrées par l'entreprise (résultats déficitaires, déclin durable de l'activité, etc.).

Si ni le code du travail, ni la jurisprudence ne donnent de définition des « difficultés

économiques » susceptibles de générer des licenciements, l’appréciation de la réalité et du

sérieux de ces difficultés relève, en pratique, du pouvoir du juge du fond. Celles-ci doivent être

suffisamment importantes et durables pour justifier la suppression d’un emploi ou la

modification d’un contrat de travail. En revanche, il n’est pas nécessaire que la situation

économique et financière soit catastrophique.

Néanmoins, ce qui est primordial, c’est que l’employeur dont l’entreprise appartient à un

groupe, certifie que les difficultés économiques invoquées concernent non seulement

l’entreprise qui envisage de procéder à des licenciements, mais également le secteur d’activité

21 Cass. soc. 5 avril 1995 n° 93-42.690 (n° 1954 PB), Sté Thomson Tubes et Displays c/ Steenhoute ; n° 93-43.866 22 Cass. soc. 21 novembre 2012 n° 11-13.919 (n° 2473 F-D), Sté Vauclusienne d'automobiles c/ Ayme.

Page 29: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

29

du groupe. Aussi, il a été jugé qu’une « cour d'appel, ayant constaté que le groupe dont relevait

l'entreprise avait subi à l'époque du licenciement une perte d'exploitation importante, a

caractérisé des difficultés économiques et a pu en déduire que la rupture du contrat de travail

reposait sur une cause réelle et sérieuse »23.

La cour de cassation est même allée plus loin en jugeant que « les

difficultés économiques s'appréciant au niveau du secteur d'activité du groupe auquel

appartient l'entreprise qui licencie, la cour d'appel n'a pas à rechercher si les résultats de la

société sont bénéficiaires. »24 Implicitement, cette solution permettrait à une entreprise

prospère de procéder à des licenciements économiques dès lors que le secteur d'activité du

groupe auquel elle appartient connaît des difficultés économiques. Ainsi, le principe qui, à

l'origine, était censé protéger les salariés des licenciements prononcés par des entreprises ayant

des difficultés économiques mais appartenant à un groupe en bonne santé peut se retourner

contre eux comme en l'espèce.

La principale difficulté de l’employeur est de cerner correctement la notion de secteur d’activité

du groupe. En outre, ce critère de rattachement au groupe n’est pas comme pour le Comité de

groupe fondé sur une approche capitalistique. Il a ainsi été jugé que « la détention indirecte par

une banque d'une participation dans le capital d'une société ne suffit pas à créer un groupe au

niveau duquel doit être apprécié le motif économique de licenciement »25.

Il n’y a pas de définition du secteur d’activité, celui-ci relève de l’appréciation souveraine des

juges du fond. A ainsi été jugé que la technologie numérique qui remplace progressivement

la technologie argentique dans l'imagerie et qui est fondée sur des technologies différentes

nécessitant des outils de production différents, constitue un secteur d'activité distinct de celui

de l'imagerie argentique26.

De la même manière, concernant des activités bancaires, les juges du fond ont pu distinguer les

activités bancaires traditionnelles des activités de bourse. En effet, les activités de bourse sont

soumises à une règlementation spécifique et il y a bien deux secteurs d’activité distincts27.

23 Cass. soc. 29 janvier 2008 n° 06-44.189 (n° 162 F-D), Tanic c/ Sté Econocom Products and Solutions : RJS 4/08 n° 386. 24 Cass. soc. 28 novembre 2007 n° 06-40.489 (n° 2463 FS-PB), Barbie c/ Sté Ensival-Moret : Bull. civ. V n° 197. 25 Cass. soc. 3 décembre 2008 n° 07-43.684 (n° 2046 F-D), Abric c/ Sté Rivoire et Carret Lustucru : RJS 2/09 n° 153. 26 Cass. soc. 24 octobre 2012 n° 11-23.418 (n° 2192 F-D), Alves Lopes c/ Sté Kodak : RJS 1/13 n° 17. 27 Cour d’appel de Lyon 28 Sept 2006

Page 30: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

30

Pour déterminer le secteur d’activité de l’entreprise, les juges recourent le plus souvent à la

technique du faisceau d’indice. La Cour de cassation donne dans un arrêt de 2010, quelques

indications sur les critères qui permettent d'identifier le secteur d'activité du groupe au niveau

duquel s'apprécie la situation économique justifiant un licenciement. Aussi dans cet arrêt, les

juges ont pris en considération la nature des produits, la clientèle à laquelle s'adressaient les

produits et le mode de distribution mis en œuvre par l’entreprise28.

Si la notion de groupe, pour la mise en place du Comité de groupe ou des accords de groupe,

ne concerne que les entreprises franco-françaises, ce n’est en revanche pas le cas du motif

économique du licenciement. En effet, les difficultés économiques invoquées à l'appui d'un

licenciement pour motif économique doivent être appréciées au niveau du groupe ou du secteur

d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux

sociétés ou entreprises situées sur le territoire national. Cette solution a été énoncée dans un

arrêt du 12 juin 200129 et par la suite constamment reprise comme le montre un arrêt de 2009

qui retenait que les éléments produits par l’employeur étant limités aux entreprises situées sur

le territoire français, ils ne permettaient pas de déterminer l’étendue du secteur d’activité du

groupe et donc l’arrêt retenait que la réalité des difficultés économiques invoquées ne pouvait

donc pas être établie30.

L’extension de la notion de secteur d’activité aux sociétés d’un groupe basées à l’étranger est

amplement justifiée. En effet, il ne faudrait pas que l’employeur puisse arguer de difficultés

économiques au sein de filiales basées sur le même territoire que son entreprise, alors que les

autres sociétés du groupe qui relèvent du même secteur d’activité ne connaitraient pas ces

difficultés voire effectueraient quant à elles des profits, sinon il serait aisé pour une société mère

étrangère de se séparer des filiales françaises non prospères ou déficitaires. Ainsi, si le groupe

international profite des bénéfices réalisés par ses filiales, il doit à l’inverse partager ses

difficultés.

28 Cass. Soc. 10 février 2010 n° 08-41.109 (n° 326 F-D), Sté Valaubrac c/ Blanc : RJS 4/10 n° 321. 29 Cass. Soc. 12 juin 2001 n° 99-41.571 (n° 2747 FS-P), SA Sprague France (Vishay) c/ Beauvais : Bull. civ. V n° 214 30 Cass. Soc. 4 mars 2009, n°07-42381, BC V n°57

Page 31: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

31

En ce qui concerne les autres causes de licenciement, le principe est le même, il faut apprécier

la cause au niveau du secteur d’activité du groupe.

Ainsi, concernant le motif relatif à la réorganisation de l’entreprise, celle-ci doit être nécessaire

afin de sauvegarder la compétitivité du groupe auquel elle appartient31. L’intérêt seul de

l’entreprise n’est plus suffisant. Il a été par ailleurs jugé que si « le groupe est de dimension

mondiale, les licenciements opérés ne sont pas justifiées lorsque seule la situation des

concurrents sur le secteur européen est mise en avant »32.

La cause économique relative à la cessation d’activité, motif autonome de licenciement crée

par la jurisprudence, pose en revanche davantage de difficultés lorsqu’elle est invoquée à

l’appui d’un licenciement dans un groupe de sociétés. En dehors de l’hypothèse d’un groupe,

la cessation d’activité doit pour constituer une cause légitime de licenciement être définitive,

ne doit pas avoir pour origine la faute de l’employeur et surtout concerner l’entreprise elle-

même et non pas l’une de ses unités seulement. L’entreprise qui cesse son activité et licencie

ses salariés pour ce motif peut, en principe, être une filiale d’un groupe. Mais afin d’éviter les

licenciements dans une filiale qui seraient décidés au niveau du groupe dans un but purement

stratégique, les Hauts juges tempèrent ce principe.

Concrètement, lorsque plusieurs sociétés d’un groupe, par exemple une société fille et la société

mère sont considérées par les juges comme coemployeurs des salariés concernés par le

licenciement, la cessation d’activité doit alors concerner toutes ses entités pour constituer un

motif légitime de licenciement33. Sans nous attarder sur les caractéristiques du coemploi que

nous étudierons plus loin dans notre développement, il convient de préciser que si l’employeur

est dans une telle situation, la seule solution pour lui est de fonder sa décision de licencier sur

un des autres motifs de licenciement économique. Le risque serait en effet, que le ou les

licenciements prononcés soient qualifiés de sans cause réelle et sérieuse.

En revanche, lorsque les sociétés d’un groupe ne sont pas coemployeurs et ont chacunes une

réelle autonomie, la fermeture totale et définitive qui motive les licenciements économiques

peut parfaitement concerner une seule des sociétés du groupe.

31 Cass. Soc. 7 avril 2004, n°01-42882, BC V n°112 ; Soc. 14 décembre 2011, n°10-11042, BC V n°295 32 Cass. Soc. 21 septembre 2005, n°04-41789 D 33 Cass. Soc. 18 janvier 2011, 09-69199, BC V n023

Page 32: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

32

Le secteur d’activité du groupe est donc une notion centrale permettant au juge d’apprécier la

cause économique du licenciement.

b. Le contrôle du juge de la réalité du motif invoqué par la filiale

Depuis la suppression de l'autorisation administrative de licenciement par les lois du 3 juillet

1986 et du 30 décembre 1986, le contrôle du bien-fondé d'un licenciement pour motif

économique incombe au juge judiciaire.

Le juge chargé du contrôle de la cause réelle et sérieuse du motif économique doit, pour former

sa conviction, disposer d'éléments objectifs. Le motif sur lequel repose le

licenciement économique doit en premier lieu avoir été clairement précisé dans la lettre de

licenciement. L'énoncé d'un motif imprécis équivaut à une absence de motif. La lettre de

licenciement doit en outre préciser l'incidence de la cause économique sur l'emploi du salarié.

Deux modèles de notification du licenciement au salarié se trouvent en annexe du présent

rapport. Dans le premier, concernant un licenciement motivé par des difficultés économiques

partagées par l’ensemble du secteur d’activité, nous pouvons constater que la notification

commence tout d’abord par invoquer le motif général du licenciement (les difficultés

économiques présents dans le secteur d’activité du groupe), puis elle entre dans le détail en

précisant les conséquences directes de ces difficultés économiques pour l’entreprise et le secteur

d’activité (baisse du chiffre d’affaire, baisse des investissements), enfin elle conclue en

démontrant que ces difficultés économiques rendent inévitables la suppression de poste et in

fine le licenciement du salarié.

Par ailleurs, nous pouvons constater que des données financières et chiffrées ont été intégrées

à la justification, tout comme des statistiques de l’évolution du marché des matières premières.

En effet, plus la lettre de licenciement sera détaillée et précise, moins il y aura de risque que le

licenciement soit jugé irrégulier par le Conseil des Prud’hommes.

Mais la notification du licenciement n’est pas l’unique document sur lequel se base le juge pour

apprécier la réalité de la cause économique au niveau du secteur d’activité du groupe. Ainsi,

afin d’apprécier l’étendue des difficultés économiques, la nécessité de recourir à la

Page 33: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

33

réorganisation de l’entreprise ou la fermeture définitive de l’entreprise, le juge doit pouvoir se

baser sur des éléments concrets dont l’employeur, auteur des licenciements, à la charge de lui

fournir.

L’employeur doit donc fournir des informations sur la situation économique et financière du

groupe dont fait partie la société. Les documents permettant de juger de la réalité des difficultés

économiques d’une société sont pour le moins divers. Nous pouvons citer à titre d’exemple les

différents documents comptables qui doivent être établis chaque année comme le bilan annuel,

tout comme le compte de résultat, le rapport de gestion… Ces documents sont souvent établis

par chaque filiale du groupe ou par la société mère. Pour ce faire, l’entreprise qui envisage de

procéder à ce type de licenciement doit se mettre en contact avec les autres entreprises du

groupe appartenant au même secteur d’activité, voire avec la société mère, afin de connaitre

leurs situations économiques et qu’elles lui transmettent les différentes données.

L’enjeu est de taille car en l’absence de telles informations, les juges en déduisent que

l’existence de la cause économique de licenciement n’est pas établie au niveau du secteur

d’activité de ce groupe34.

Si le secteur d’activité du groupe est la délimitation du groupe choisie par le juge afin

d’apprécier la réalité du motif économique, le juge a, en revanche, optée pour une autre notion

afin d’apprécier l’obligation de reclassement de l’employeur.

B. Le périmètre de reclassement : une aire de mobilité adaptée au groupe mais source

d’une multitude de difficultés

En matière d’obligation de reclassement, la Chambre sociale de la Cour de cassation interprète

la notion de groupe en fonction du périmètre dans lequel la permutation du personnel est

possible (1), ce qui n’est pas sans engendrer quelques difficultés de mise en œuvre pour une

filiale (2).

34 Cass. Soc. 14 janvier 2004, n°01-45020 D

Page 34: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

34

1. La permutation du personnel : une notion jurisprudentielle à la base de tout

reclassement

L’obligation de reclassement du salarié visé par une procédure de licenciement économique

bien qu’ayant une origine prétorienne, a été reprise dans l’article L.1233-4, al. 1 du code du

travail qui dispose que « le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir

que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement

de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel

l'entreprise appartient ».

La notion de permutabilité du personnel s’est construite progressivement au gré des arrêts de la

Chambre sociale qui montre ces dernières années une tendance à l’assouplissement de ladite

notion (a). Si au départ seul le groupe français était concerné, le périmètre de reclassement s’est

très vite étendu aux filiales étrangères du groupe (b).

a. La permutabilité du personnel : création jurisprudentielle allant vers un

assouplissement

La loi impose donc à l'employeur de rechercher, avant de rompre les contrats de travail, les

possibilités de reclassement des salariés concernés afin d'éviter leur licenciement économique.

En effet, le licenciement doit être la dernière solution envisageable. L'obligation de

reclassement s'impose à l'employeur, quel que soit le nombre de salariés concernés. L'obligation

de reclassement n'est donc pas limitée aux seuls licenciements collectifs mais s'applique

également au licenciement individuel pour motif économique.

Parfois assimilée à un élément de la définition du motif économique, y compris par les juges,

l'obligation de reclassement doit être plutôt regardée comme un critère de la légitimité

du licenciement économique, indépendant de la définition de ce dernier et dont la mise en œuvre

s'inscrit dans le cadre de la procédure de licenciement.

Page 35: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

35

A l’image de l’appréciation du motif économique, le périmètre de mise en œuvre du

reclassement n’a cessé de connaitre des évolutions initiées par la Cour de cassation. Initialement

cantonné à l’entreprise dans sa vision la plus étroite, le reclassement a par la suite été étendu au

groupe auquel appartient l’entreprise et ce, par un arrêt en date du 25 juin 199235. A partir de

cet arrêt, une tendance s’est alors développée et qui a été marquée par un assouplissement de la

notion de « groupe de reclassement », expression reprise de Françoise Favennec-Héry36.

La notion de « permutation du personnel » s’est alors développée37. Ainsi, il était exigé que

l’employeur effectue les recherches de reclassement à l’intérieur du groupe, parmi les

entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation leur permettent la

permutation de tout ou partie du personnel.

En revanche, à cette époque, l’existence de lien capitalistique entre plusieurs sociétés ,bien que

non suffisante afin de délimiter le champ d’application de l’obligation de reclassement, restait

pour le moins un préalable nécessaire38. La Cour de cassation appréciait donc l’obligation de

l’article L.1233-4 du code du travail au regard du groupe sociétaire, c’est-à-dire au sens du droit

commercial et des articles L.233-1, L.233-3 et L.233-16.

Progressivement, ce « terrain privilégié du reclassement » pour reprendre les termes de

Monsieur Bertrand Ines39 a dérivé et la chambre sociale a délaissé l’exigence de des liens

financiers, de contrôle ou d'influence entre les sociétés. Elle a ainsi autorisé qu’un reclassement

puisse être effectué entre une association gérant une gare routière et des entreprises de

transport40, entre une société et ses partenaires 41 ou entre la société employeur et une autre

société dans laquelle le gérant de la première avait des intérêts42…

Aussi, aucun lien de sociétaire n’était plus requis. Des liens de fait entre les différentes activités

exercées par l’employeur ou des liens liés à une gestion commune de diverses sociétés étaient

suffisants43.

35 Cass. Soc. 25 juin 1992, n°90-41244, BC V n°420 36 V. F. Favennec-Héry, Le groupe de reclassement, Dr. soc. 2012. 987 37 Cass. soc. 5 avril 1995 n° 93-42.690 (n° 1954 PB), Sté Thomson Tubes et Displays (Vidéocolor) c/ Steenhoute 38 Cass. Soc. 25 juin 1992, n°90-41244, BC V n°420 ; Soc. 27 octobre. 1998, n° 96-40.626, BC. V, n° 459 39 Bertrand Ines, Licenciement économique : notion de groupe de reclassement, Dalloz actualité 26 février 2015 40 Cass. Soc. 23 mai 1995, n° 93-46.142, Dr. soc. 1995. 678, obs. F. Favennec-Héry 41 Cass. Soc. 5 oct. 1999, n° 97-41.838, BC. V, n° 368 ; D. 2000. 382 , obs. B. Reynès ; Dr. soc. 1999. 1112, obs. G. Couturier 42 Cass. Soc. 23 janv. 2003, n° 00-44.882, BC. V, n° 27 43 Cass. Soc. 10 févr. 2009, n° 07-45.712, RDT 2009. 377, obs. Y. Chagny

Page 36: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

36

Comme pour l’appréciation de la cause économique au regard du secteur d’activité du groupe,

la Chambre sociale a recourt à la technique du faisceau d’indices. Parmi ces indices, elle tient

compte notamment de la similarité des activités et l’organisation des entreprises, de l’antériorité

des échanges, d’une production commune.

A titre d’illustration, elle a ainsi pu déduire que dans la mesure où le contrat de travail du salarié

prévoyait l’obligation de se déplacer dans cette société, cela attestait une organisation

permettant la permutabilité du personnel et rendait possible le reclassement44. Elle a encore jugé

qu’une cour d'appel a retenu à bon droit l'existence d'un groupe au sein duquel l'employeur

aurait dû rechercher à reclasser le salarié après avoir constaté que les deux entreprises en cause

étaient liées par un accord d'entreprise conférant aux salariés une identité de statut professionnel

quelle que soit leur mobilité au sein du groupe, ce dont il résultait que la permutation de tout

ou partie du personnel entre ces entreprises était possible45.

Les magistrats tiennent également compte d’éléments matériels comme des papiers en-têtes

identiques, les mêmes coordonnées, un même numéro de téléphone, une identité de siège

social…

Parallèlement à cette jurisprudence, l’administration dans une circulaire en date du 30 juillet

2012 a quant à elle, indiqué que « la nature des activités, identiques, connexes ou

complémentaires, de même que l’existence de relations de partenariat entre entités distinctes,

peut favoriser la permutabilité du personnel au sein d’un tel périmètre »46.

Par ailleurs, si le champ du reclassement ne s’étend pas aux entreprises extérieures au groupe47,

en revanche, une disposition conventionnelle (convention collective nationale, accord collectif,

voire plan de sauvegarde de l’emploi) peut imposer à l’employeur de rechercher un

reclassement à l’extérieur de l’entreprise et même du groupe auquel elle appartient. Le

manquement à cette disposition prive même le licenciement de cause réelle et sérieuse48.

44 Cass. Soc. 29 janv 2003, n°00-44882, BC V n°27 45 Cass. Soc. 12 juin 2002 n° 00-40.908 (n° 1952 F-D), SA Société équipement du Rhône de Lyon dite « SERL ». 46 Circ. DGT 2012-07 du 30 juillet 2012, fiche 7 b, p.53 47 Cass. Soc. 15 juin 2010, n°08-70391, BC V n°135 48 Cass. Soc 28 mai 2008, n°06-46009, BC V n°116, Soc. 10 février 2009, n°08-40057 D

Page 37: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

37

Cet assouplissement de la notion de groupe se poursuit encore aujourd’hui comme peut

l’illustrer un arrêt en date du 11 février dernier49. Dans cet arrêt, selon Bertrand Ines, la Cour

accepterait donc que le groupe de reclassement puisse être caractérisé parmi les mutuelles de

santé et la fédération à laquelle celles-ci ont adhéré sur le seul critère de la permutation, effective

ou organisée, de tout ou partie du personnel. Elle s'écarte donc un peu plus de l'idée selon

laquelle doit exister une gestion ou une organisation commune, voire un lien de fait tenant à la

personne ou au dirigeant de l'employeur50.

A titre de parallèle, nous pouvons constater que cette solution se rapproche de celle adoptée en

matière d’inaptitude sur le fondement de l'article L. 1226-10 du code du travail. Dans ce

domaine et jusqu’à présent, la conception du groupe de permutation était considérée comme

plus souple qu’en matière de licenciement pour motif économique51. Ainsi, dans cette matière,

l’employeur a pu être contraint de poursuivre ses recherches de reclassement au sein d'un réseau

de franchisage52.

Pour Bertrand Ines, la Cour de cassation se dirigerait vers cette conception du groupe de

reclassement « en élaborant par là même, une vision unitaire, fonctionnelle et particulièrement

extensive de cette notion »53.

b. L’extension de la notion de permutabilité du personnel au groupe international

Si l'employeur doit en priorité rechercher à reclasser les salariés dans les établissements ou

autres entreprises du groupe auquel il appartient le cas échéant, et qui sont situés sur le territoire

national, la Cour de cassation a décidé qu'à défaut de possibilités de reclassement en France, le

cadre de la recherche de reclassement doit être étendue aux établissements et entreprises du

groupe situés à l'étranger54.

49 Cass. Soc. 11 février 2015, n° 13-23573 50 Bertrand Ines, Licenciement économique : notion de groupe de reclassement, Dalloz actualité 26 février 2015 51 F. Favennec-Héry, préc 52 Cass. Soc. 20 févr. 2008, n° 06-45.335, Dalloz jurisprudence 53 Bertrand Ines, préc 54 Cass. Soc. 7 octobre 1998 n° 96-42.812 Sté Landis et Gyr Building Control c/ Bellanger :

Page 38: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

38

Sans s’attarder sur la procédure spécifique à ce type de reclassement que nous étudions

ultérieurement, l'obligation de reclassement obéit en principe aux mêmes règles de

permutabilité, qu'elle s'exerce à l'étranger ou sur le seul territoire national.

Les critères d'appréciation de cette permutabilité peuvent toutefois être particuliers.

Notamment, s'agissant d'un reclassement à l'étranger, le fait de maîtriser parfaitement la langue

du pays où doit s'exercer le nouvel emploi peut être exigé.

Nous pouvons toutefois nous demander si l'application de ce principe n'est pas remise en cause

compte-tenu de la rédaction de l'article L 1233-4-1 du Code du travail, issu de la loi 2010-499

du 18 mai 2010, et imposant aux employeurs de respecter cette procédure spéciale comprenant

l'obligation d'interroger les salariés sur leurs souhaits. Certains auteurs iraient notamment dans

ce sens.

Néanmoins dans un arrêt de 2012 la Chambre sociale a jugé que « dès lors qu'elle a constaté

qu'un salarié dont l'emploi a été supprimé ne connaissait pas l'allemand, une cour d'appel peut

en déduire qu'un poste disponible à Munich ne correspondait pas à ses compétences et à ses

aptitudes »55. Aussi, c’est plutôt l'aptitude du salarié à s'adapter à un nouvel emploi que doit

porter l'examen des possibilités de reclassement.

Par ailleurs, toujours concernant ce cadre d’appréciation de l’étendue de l’obligation de

reclassement à l’étranger, un arrêt de 2007 énonce que « les possibilités de reclassement doivent

être recherchées à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation

ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer une permutation du personnel, même si

certaines de ces entreprises sont situées à l'étranger, sauf à l'employeur à démontrer que la

législation applicable localement aux salariés étrangers ne permet pas le reclassement »56.

Cet arrêt marque une évolution de la jurisprudence. En effet, antérieurement la Cour de

cassation estimait que les possibilités de reclassement devait être recherchées à l'intérieur du

groupe, y compris dans les entreprises situées à l'étranger dès lors que « la législation applicable

localement n'empêchait pas l'emploi de salariés étrangers »57 .

55 Cass. Soc. 10 mai 2012 n° 11-12.469 (n° 1204 F-D), Améla Da Cunha c/ Sté BLD. 56 Cass. Soc. 4 décembre 2007 n° 05-46.073 (n° 2580 FS-PB), Geoffroy c/ CGEA de Nancy : RJS 2/08 n° 158, Bull.

civ. V n° 204.Soc. 27 janvier 2009 n° 07-44.062 (n° 134 F-D), Monier c/ Sté Kiowi Limited. 57 Cass. Soc. 7 octobre 1998 n° 96-42.812 Sté Landis et Gyr Building Control c/ Bellanger :

Page 39: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

39

Désormais, la détermination du périmètre de reclassement n’est plus de savoir si la législation

locale permet ou non l'emploi de salariés étrangers, mais si elle permet ou non le reclassement

des salariés dont le licenciement est envisagé. A titre d’exemple, nous pouvons citer comme

contrainte le délai nécessaire à la délivrance d'une autorisation de travail, sans empêcher

l'emploi des étrangers.

Pour Françoise Favennec Héry, « l'apport de la loi du 18 mai 2010, qui a vocation à être

générale, pourrait s'avérer contre-performant et servir de prétexte à une réduction de l'aire

géographique de reclassement. Comment effectuer des recherches dans un pays où, par

hypothèse, la rémunération est à un niveau indécent ? »58

Il n’en reste pas moins qu’en matière de reclassement à l'étranger, il appartient à l'employeur

de s'assurer de la législation applicable localement59.

Cette condition de permutabilité en perpétuel mouvement semble bien délicate à mettre en

œuvre en pratique par un employeur.

2. Un périmètre de reclassement variable, source de difficultés

L’une des principales difficultés de mise en œuvre de l’obligation de reclassement de

l’employeur vient de la notion même de permutabilité du personnel (a). Ce n’est en revanche

pas l’unique complexité, la recherche de reclassement dans le groupe comporte elle aussi son

lot de difficultés (b).

a. Une conception du groupe difficile à cerner

Les Hauts juges considèrent que si cette condition de permutabilité est remplie, le périmètre des

recherches de reclassement s’étend à l’ensemble des sociétés du groupe, et ce même si ces

58 F. Favennec-Héry, Le Groupe de reclassement, droit social 2012, p.987 59 Cass. Soc. 15 novembre 2006 n° 05-40.935, Sté Maisonmag c/ Milanovic-Brezak : Bull. civ. V n° 344.

Page 40: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

40

sociétés ne font pas partie du même secteur d’activité60. C’est donc une conception autonome

du groupe qui se dégage. Deux conceptions différentes du groupe au sein d’une même

procédure. D’un côté, les sociétés appartenant au même secteur d’activité du groupe et de

l’autre, une permutabilité du personnel. Une conception du groupe qui plus est, n’est pas

clairement délimitée et qui ne fait que s’assouplir au gré des arrêts de la Chambre sociale.

L’employeur souvent novice en droit du travail, a alors la charge de cerner correctement le

groupe car le risque est de taille. En effet, tout manquement à l'obligation préalable de

reclassement prive de cause réelle et sérieuse le licenciement économique ensuite prononcé61.

Nous pouvons aisément comprendre que cela n’est pas de toute simplicité pour l’employeur.

Une définition uniforme aurait été préférable pour l’employeur. Néanmoins, il faut garder à

l’esprit que derrière un licenciement pour motif économique, c’est aussi l’avenir professionnel

d’un ou plusieurs salariés qui se joue. Aussi, pour que le licenciement du salarié reste l’ultime

recours de l’employeur, tout doit être mis en œuvre afin de maintenir le salarié dans l’emploi,

et cela passe, notamment, par une conception du groupe adaptée à ladite obligation de

reclassement afin de rechercher et trouver le reclassement optimal ou, tout du moins, le moins

dommageable pour le salarié visé.

b. Une recherche de poste de reclassement compliquée à mettre en œuvre

Divers problèmes peuvent être recensés lorsqu’il s’agit de reclasser un salarié au sein d’un

groupe.

Tout d’abord, la cour de cassation a eu l’occasion de juger dans un arrêt du 27 mai 2009 que

l'obligation de reclassement incombe seulement à l’employeur qui ne peut s'en décharger sur

d'autres entreprises, alors même qu'elles font partie du même groupe. C’est à lui de proposer au

salarié dont le licenciement est envisagé des offres de reclassement écrites et précises. A défaut,

le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Dans cet arrêt, la seule proposition de

reclassement dans une autre entreprise avait été adressée directement par celle-ci et non par son

employeur. Il aurait pu être envisageable de considérer que, puisque la société ayant fait une

60 Cass. Soc. 12 septembre 2012, n°11-30373 D 61 Cass. Soc. 19 novembre 2008 n° 07-44.416

Page 41: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

41

proposition de reclassement appartenait au même groupe que la société employeur, l’obligation

de reclassement aurait été remplie. Néanmoins, la Cour de cassation souhaite responsabiliser

l’employeur puisque c’est à lui que revient, en tant que cocontractant, l’obligation première de

fournir un travail à son salarié.

Une autre difficulté qui peut survenir apparait lorsqu’une société projette à brève échéance

d’intégrer un groupe. La question qui se pose alors est de connaitre l’étendue du périmètre de

reclassement si cette entreprise envisage des licenciements économiques avant cette intégration.

Face à cette interrogation, la Cour de cassation a répondu dans un arrêt du 1er juin 201062 dans

lequel elle rappelle que les possibilité de reclassement, s’appréciant au plus tard à la date du

licenciement sauf fraude, l’entreprise n'ayant pas encore effectivement intégrée le groupe à la

date de notification du licenciement, l’employeur n’a donc pas à étendre le périmètre de ses

recherches de reclassement aux entreprises du groupe.

La question inverse pourrait elle aussi se poser. Et si une société appartenant à un groupe quitte

ledit groupe très peu de temps avant de notifier le licenciement au salarié, en ce sens que la

procédure de licenciement aurait débuté alors qu’elle appartenait encore à ce groupe, pourrions-

nous envisager que l’employeur doivent, là aussi, chercher à reclasser le salarié dans le groupe

fraichement quitté ? A cette interrogation, les Hauts juges n’ont malheureusement pas encore

eu l’occasion de répondre.

Un autre problème reste à recenser auquel la Chambre sociale a répondu dans un arrêt de 2001.

Lorsque des entreprises d’un même groupe engagent simultanément une procédure de

licenciement économique, les postes de reclassement doivent être proposés en priorité (et à

qualification comparables) aux salariés de l’entreprise au sein de laquelle les postes se trouvent

disponibles.63

Enfin, au vu des brefs délais entourant la procédure de licenciement pour motif économique

dans le cadre d’une procédure judiciaire, nous pouvons remarquer qu’il est compliqué voire

impossible pour l’employeur, ou à défaut, l’administrateur ou le liquidateur judiciaire de

satisfaire pleinement à cette obligation de reclassement dans le périmètre du groupe. C’est

d’ailleurs ce qu’arguait le mandataire-liquidateur dans un arrêt du 10 mai 199964. Le

62 Cass. Soc. 1er juin 2010, n°09-40421, BC V 63 Cass. Soc. 11 décembre 2001, n°99-44291 BC V n°379 64 Cass. Soc. 10 mai 1999 n° 97-40.060 (n° 2146 P), Bourguignon c/ Petit : RJS 6/99 n° 802, Bull. civ. V n° 203

Page 42: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

42

mandataire-liquidateur faisait en l'espèce valoir qu'étant dans l'obligation de prononcer les

licenciements dans les 15 jours de la date de l'ouverture de la procédure collective afin que les

créances salariales bénéficient de la garantie de l'AGS, il lui était matériellement impossible de

rechercher un reclassement dans le groupe dans le délai imparti.

Cependant, la Cour de cassation ne va pas le rejoindre dans son argumentation mais va décider

que le mandataire-liquidateur n’ayant procédé, antérieurement au licenciement, à aucune

recherche de reclassement dans le groupe, en a exactement déduit l'absence de cause réelle et

sérieuse du licenciement.

C’est une décision qui s’avère bien sévère quand nous connaissons la rapidité dont doit faire

preuve l’employeur, l’administrateur ou le liquidateur et le contexte difficile dans lequel se

déroule ladite procédure, mais la Cour de cassation continue de vouloir protéger le salarié et

son emploi même dans cette situation trouble.

D’autre part, l’employeur qui envisage un licenciement doit au préalable effectuer une

recherche sérieuse et active des possibilités de reclassement existant dans le groupe. Sachant

que l’employeur doit être en mesure d’établir qu’il a bel et bien effectué ces recherches. Il est

ainsi possible pour un employeur d’envoyer un courrier aux différentes sociétés dans lesquelles

la permutation du personnel est envisageable, afin de leur demander les postes disponibles.

Mais une telle mesure n’est pas suffisante en soi selon la Cour de cassation.

A titre d’exemple dans un arrêt un employeur avait adressé à des sociétés du groupe des lettres

par lesquelles il les invitait à signaler les emplois éventuellement disponibles pour des

reclassements, ces correspondances étant accompagnées d’une liste de l’ensemble des postes

de son entreprise et de l’ensemble des catégories professionnelles concernées par le

licenciement. Or, la Cour a jugé que le « seul envoi de lettres circulaires à des sociétés relevant

du groupe auquel appartenait l’employeur ne pouvait suffire à établir que ce dernier avait

effectué une recherche préalable, sérieuse et active des possibilités de reclassement existant

dans le groupe »65.

En outre, si l’employeur procède au licenciement sans attendre le retour des autres sociétés du

groupe sollicitées, il ne respecte pas son obligation de reclassement et le licenciement sera

qualifié de sans cause réelle et sérieuse66.

65 Cass. Soc. 13 février 2008, n°06-44984 D 66 Cass. Soc. 21 mars 2001, n°99-43108 D

Page 43: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

43

Ensuite, les offres de reclassement doivent être « écrites et précises », c’est-à-dire concrètes et

personnalisées pour chaque salarié concerné67. L’employeur ne peut pas se contenter, par

exemple, d’afficher dans l’entreprise ou de diffuser sur l’intranet, les possibilités de

reclassement dans les sociétés du groupe et d’inviter les salariés à prendre contact avec la

société mère68.

L’une des principales difficultés réside toutefois dans le reclassement au sein d’une filiale

étrangère. Une procédure spécifique est à respecter lorsque la permutabilité du personnel

s’étend aux entreprises situées à l’étranger. Celle-ci est retrouvée à l’article L1233-4-1 du code

du travail.

De plus, afin que chaque salarié visé par le licenciement puisse se voir proposer des offres de

reclassement en France mais aussi à l’international, l’employeur dont l’entreprise appartenant

à un groupe composé de sociétés basées en France mais aussi à l’étranger devra donc combiner

ces deux procédures de reclassement (reclassement en France et à l’international) et ce, en

raison du fait que la Cour de cassation condamne la pratique des employeurs consistant à

recueillir par questionnaire les vœux de mobilité des salariés avant toute recherche et

proposition de reclassement sur le territoire national69. Ainsi, employeur et salarié ne peuvent

s'accorder pour restreindre le champ du reclassement et même si le salarié invoque des raisons

personnelles pour ne pas s'éloigner de son domicile, ce refus exprimé « avant toute proposition

de reclassement personnelle et concrète » n'a aucune portée lorsque le reclassement sur le sol

français est envisagé.

Nous avons donc pu remarquer que les variétés de définitions et d’appréhensions du groupe

d’entreprises sont certes élaborées afin que le licenciement reste le recours ultime, cependant

cette multitude de facettes fait du groupe une notion difficile à cerner pour l’employeur. Ce

n’est en revanche pas l’unique souci pour les entreprises devant faire face elles-même à leurs

propres difficultés.

67 Cass. Soc 26 septembre 2006, n°05-43841, BC V n°288 68 Cass. Soc 26 juin 2012, n°11-14610 D 69 Cass. Soc. 4 mars 2009 n° 07-42.381 (n° 385 FS-PB), Sté PB et M c/ Blanchard : RJS 5/09 n° 418.

Page 44: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

44

II. Un enchevêtrement de difficultés pour des sociétés déjà en détresse

Dans un premier temps, nous constaterons que bien que l’entreprise, envisageant des

licenciements pour motif économique, appartient à un groupe de société, l’unique responsable

de la procédure de licenciement est l’employeur (A). Enfin, dans une dernière sous partie, nous

exposerons les différents aménagements que la Loi Macron va tenter d’apporter dans l’objectif

de faciliter cette procédure, loi qui, à peine entrée en vigueur, fait déjà l’objet de vives critiques

(B).

A. Un employeur souvent impuissant mais seul responsable

Le manque de transparence au sein d’un groupe est un véritable handicap lorsqu’une filiale

envisage de procéder à un licenciement pour motif économique. Handicap qui s’amplifie en

présence d’un groupe comportant une multitude de sociétés (1). De plus, si le licenciement est

apprécié dans le cadre du groupe, l’employeur direct du salarié demeure l’unique débiteur du

respect de la procédure (2).

1. Un manque de transparence au sein d’une nébuleuse de filiales

Le groupe peut comporter plus ou moins de sociétés en son sein, rendant plus complexe la tâche

de l’employeur qui doit cerner les filiales concernées par la procédure de licenciement pour

motif économique (a). Ajouter à cela, le manque de transparence au sein d’un groupe ne fait

qu’accroître la complexité de cette tâche, l’employeur ayant souvent peu de moyen pour

contraindre les autres sociétés du groupe à collaborer (b).

Page 45: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

45

a. Un enchevêtrement de sociétés rendant difficile la délimitation du groupe

« Uni dans la diversité ». Cette devise de l’Union Européenne pourrait illustrer une première

constatation qu’aucun groupe n’est identique.

Tout d’abord, le groupe peut avoir différentes tailles donc le nombre de filiales d’un groupe à

l’autre peut sensiblement varier. Nous connaissons par exemple de grands groupes tels que le

groupe suisse Nestlé qui compte en son sein plusieurs sociétés de différents horizons,

spécialisées dans différents domaines (Crunch, Nescafé, Vittel, La Laitière, Maggi, Laboratoire

Guigoz…).

En outre, si « un train peut en cacher un autre », la réciproque est vraie au sein d’un groupe.

En effet, parfois les filiales d’un même groupe sont elles-mêmes regroupées en sous-groupes.

Nous pouvons à titre d’illustration citer le groupe Purina Petcare, tout en étant filiale du groupe

Nestlé, comprend la société Friskies, Gourmet, Félix, Purina One et tant d’autres encore70.

Par ailleurs, si certains groupes se cantonnent encore au territoire national, la plupart des

groupes prend une dimension internationale comme peut l’illustrer le groupe français Bouygues

dont au départ les sociétés étaient uniquement basées en France, mais qui aujourd’hui sont

présentes sur les 5 continents dans plus de 100 pays différents71.

Au vu de ce qui précède, nous pouvons constater que cerner les différentes entités d’un groupe

peut s’avérer plutôt complexe. Cependant, dans le cadre du licenciement économique,

l’employeur doit délimiter correctement ce groupe afin de pouvoir apprécier la situation

économique des autres sociétés du même secteur d’activité ou rechercher les postes vacants

dans les sociétés ou la permutabilité du personnel est possible afin de reclasser le salarié.

Il arrive par ailleurs que lors de ses investigations, l’employeur découvre de nouvelles sociétés

ou un sous-groupe qu'il n’avait pas envisagé.

70 http://www.nestle.fr/ 71 http://www.bouygues.com/

Page 46: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

46

b. Un manque de transparence au sein du groupe ajouté au manque de moyens de

contraintes filiales

La filiale d’un groupe qui envisage de procéder à un licenciement économique doit, comme

nous l’avons déjà énoncé précédemment, obtenir des autres sociétés du groupe plusieurs

informations nécessaires voire indispensables à la procédure de licenciement. Les magistrats

éviteront donc la difficile recherche d'informations à l'étranger, les mesures d'instruction

prévues à l'article L. 1232-1 du Code du travail étant, par nature, peu efficace, voire vouées à

l'échec hors du territoire national72.

Ainsi, dans le cadre d’appréciation de la cause du licenciement, l’entreprise doit se mettre en

relation avec les autres sociétés du même secteur d’activité pour évaluer si lesdites sociétés

partagent les mêmes difficultés. L’entreprise peut, à cette fin, demander que les autres sociétés

sœurs entrant dans ce cadre lui transmette tout document attestant de leur situation économique

et financière tel que des données chiffrées ou comptables qu’elles auront elles-mêmes

constituées (bilans annuels, comptes de résultat…).

Rappelons que le risque est important, en effet, en l’absence de telles informations car les juges

en déduisent que l’existence de la cause économique de licenciement n’est pas établie au niveau

du secteur d’activité de ce groupe73.

De la même manière, afin de trouver des postes de reclassement disponibles à l’intérieur du

groupe parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation lui permet

la permutation de toute ou partie du personnel, l’employeur doit, à cette occasion, entrer en

contact avec ses filiales afin que lesdites filiales lui fournissent une liste de postes vacants et

compatibles avec les salariés visés par la procédure.

En cas de contentieux, l’employeur devra démontrer la réalité et le sérieux de ses recherches

ainsi que l’impossibilité de reclassement qui passe notamment par cette prise de contact et cet

échange d’information. Là encore, le risque est de taille puisqu’en cas de non-respect de

l’obligation de reclassement, le licenciement sera considéré comme sans cause réelle et

sérieuse.

72 Christine Masquefa, Licenciement économique. Difficultés économiques. Groupe de sociétés. Niveau d'appréciation, Droit social 2001 p. 894 73 Cass. Soc. 14 janvier 2004, n°01-45020 D

Page 47: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

47

Cependant dans la pratique, cet échange n’est pas toujours aussi aisé. La charge peut se révéler

lourde pour l'employeur devant partir lui-même « à la chasse aux informations » tant en raison

du cloisonnement qui peut exister entre les différentes sociétés que de la hiérarchisation des

rapports au sein du groupe. Il existe en effet rarement des bases de données communes aux

entreprises du groupe desquelles les entreprises filiales pourraient obtenir les renseignements

nécessaires à cette procédure. Aussi, l’employeur doit contacter individuellement chaque

société du groupe, sachant que lorsque le groupe est de dimension internationale, leur nombre

peut très vite devenir colossal.

A cela s’ajoute de surcroît des problèmes d’origine linguistique. En effet, dans un groupe de

portée internationale, ces échanges et informations ne sont pas constamment rédigés en anglais,

encore moins en langue française, mais plus fréquemment dans la langue du territoire sur lequel

est basé cette société sœur. Si ce problème est déjà de taille pour une grande société, il l’est

davantage encore pour une PME/ TPE n’ayant pas forcément les moyens de faire appel à un

traducteur.

De plus, nous pouvons aisément concevoir qu’une société souhaite rarement partager ses

résultats financiers avec les autres sociétés alors même qu’elles font parties du même groupe.

Même au sein d’un groupe, il demeure toujours une certaine concurrence entre filiale. C’est à

celle qui fera le plus de profits afin de « rester dans les bonnes grâces » de la société mère. Dans

cette optique, les informations financières et résultats financier doivent demeurer plus ou moins

confidentiels.

Cette affirmation est encore davantage vraie lorsque cette société est plus importante en taille

mais aussi en poids économique et financier à l’intérieur du groupe. Plus encore si cette société

est tout bonnement la société mère du groupe. Quel poids aurait une filiale quelconque à

connaitre les données financières de la société mère ?

L’entreprise a beau appartenir à un groupe, elle se trouve souvent isolée et seule dans cette

procédure. Elle ne représente qu’un atome parmi tant d’autres. Si une société mère accède

facilement aux informations de ses filiales du fait de son poids et pouvoir découlant lui-même

Page 48: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

48

d’actions et de droits de vote dans celle-ci, la réciproque est rarement vérifiable. En effet, nous

pouvons nous interroger sur les moyens dont disposerait la société fille afin d’inciter voire de

contraindre la société mère à coopérer, si de surcroît cette société fille n’est qu’une PME/TPE ?

L’entreprise doit alors tenter de faire prendre conscience aux autres sociétés du groupe et surtout

à la société mère, de l’importance d’une coopération avec elle, car en effet il en va de sa

responsabilité et de la validité des licenciements qu’elle souhaite prononcer. Mais comme nous

venons tout juste de le dire, c’est la responsabilité du seul employeur qui est jeu, et non du

groupe ou des sociétés l’en composant, alors pourquoi devraient ils y prendre part ?

2. Un groupe, mais un seul responsable

La particularité même du groupe résulte en ce que chaque entité demeure, en principe, seule

responsable et notamment à l’égard des salariés qu’elle emploie (a). Cependant, toujours en vue

d’assurer la protection des salariés, la jurisprudence a procédé à travers la notion de coemploi

à une extension de cette responsabilité à d’autres sociétés du groupe (b).

a. Un employeur seul responsable

Le groupe n’ayant pas de personnalité juridique propre, ce n’est pas un sujet de droit en tant

que tel. Ainsi, le groupe n’a pas un patrimoine propre et pas la capacité de contracter, donc il

ne peut pas être responsable d’actes auquel il ne prend pas part.

En revanche, cette absence de personnalité morale distincte des entités qui composent le groupe

ne signifie pas que le groupe n’a pas d’existence. Il a, de toute évidence, une dimension

économique propre.

Quelle conséquence faut-il alors tirer de cette absence de personnalité morale ? Tout d’abord,

chaque entité du groupe doit avoir sa propre organisation et sa propre représentation. Il en est

ainsi, même au niveau de la société mère. Celle-ci ne représente pas ses filiales et ne peut

exercer de droits appartenant à celles-ci tout comme elle n’est pas tenue d’exécuter les

Page 49: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

49

obligations souscrites par ses filles. La société mère ne peut donc pas engager sa responsabilité

pour des actions commises par ses filles.

Par ailleurs, les sociétés d’un même groupe, en raison de leur indépendance juridique, doivent

être considérées comme des tiers les unes des autres.

L’employeur direct des salariés qui envisage de procéder à des licenciements de nature

économique est donc seul débiteur des obligations que lui impose cette procédure. Il a ainsi été

jugé dans un arrêt en date du 13 janvier 2010, que « l'obligation de reclasser les salariés dont

le licenciement est envisagé et d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi répondant aux

moyens du groupe n'incombe qu’au seul employeur »74.

Une filiale ne peut pas se substituer à lui en proposant directement aux salariés de l’entreprise

prononçant les licenciements, des postes de reclassement. C’est ce qu’a jugé la Chambre sociale

dans un arrêt de 2009. « L'obligation de reclassement incombe seulement à l’employeur qui ne

peut s'en décharger sur d'autres entreprises, alors même qu'elles font partie du même

groupe »75.

Parallèlement en matière d’information, de consultation des représentants des travailleurs tout

comme en matière de notification intervenant dans le cadre d’un licenciement collectif pour

motif économique, l’employeur est là aussi le seul débiteur de ces obligations. Cela a été

notamment jugé dans la décision Akavan de la Cour de justice de l’Union Européenne en date

du 10 septembre 200976. Dans cette arrêt, la cour a jugé qu’indépendamment du fait que les

licenciements collectifs soient envisagés par l’entreprise qui emploie les travailleurs concernés

ou par la société mère, c’est toujours la première qui est obligée en tant qu’employeur d’engager

74 Cass. soc. 13 janvier 2010 n° 08-15.776 (n° 84 FS-PB), Sté San Carlo gruppo alimentare SPA c/ Ancelin : RJS 3/10 n° 247. 75 Cass. soc. 27 mai 2009 n° 07-44.022 (n° 1128 F-D), Bloch-Gosselin c/ Sté Lederlex : RJS 8-9/09 n° 700. 76 CJUE 10 septembre 2009, C-44/08, Akavan Erityisalojen Keskusliitto AEK ry e.a. contre Fujitsu Siemens

Computers Oy

Page 50: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

50

les consultations avec les représentants des travailleurs, et, le cas échéant d’en supporter les

éventuelles conséquences du non-respect de l’obligation de consultation77.

Il peut pourtant paraitre injuste pour un employeur de devoir subir les conséquences d’un

licenciement irrégulier résultant d’une mauvaise volonté et d’un défaut de coopération de ses

sociétés sœurs voire de la société mère. De même, le choix de licencier est parfois « imposé »

par la société mère elle-même, elle devrait donc elle aussi supporter les risques d’un tel

licenciement. C’est dans cette optique que la notion de coemploi a été développée dans la

jurisprudence.

b. Le coemploi ou la recherche du véritable employeur dans le groupe

La notion de coemploi a été développée afin d’étendre à d’autres sociétés du groupe la

responsabilité qui incombe à l’employeur dans le cadre d’une procédure de licenciement pour

motif économique, mais récemment cette notion a été bridée (alpha). Néanmoins, ce n’est pas

l’unique moyen de rechercher le véritable employeur dans le groupe. Il est également

envisageable de recourir à la responsabilité délictuelle (béta).

α Le coemploi : un moyen efficace mais récemment mis en péril

L’indépendance de chaque entité composant le groupe n’est souvent qu’illusion. La société

mère, bien que tenue de respecter l’autonomie de sa filiale, apparaît davantage comme l’entité

qui gère en pratique la vie de cette dernière et exerce sur elle un pouvoir effectif de direction.

La filiale agit en fonction d'une ligne de conduite déterminée par sa mère. Le suivi de cette ligne

de conduite s’effectue non pas par obligation juridique ou quelconque lien de subordination

juridique, mais en fonction d'un schéma de dépendance économique78. Les liens entre la mère

et sa fille sont beaucoup plus étroits que de simples liens juridiques et tendent à remettre en

77 Commission européenne, Service juridique, résumés d’arrêts importants, http://ec.europa.eu/dgs/legal_service/arrets/08c044_fr.pdf, novembre 2009 78 Sénat, Rapport d’information n° 558, rédigé par le groupe de travail relatif à la responsabilité civile, 15 juillet 2009, p. 61.

Page 51: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

51

cause l’autonomie de la filiale. I est donc normal que cette société mère assume, elle aussi, les

conséquences des choix qu’elle dicte à sa fille.

Cette extension de responsabilité a été consacrée dans plusieurs domaines. C’est ainsi le cas en

matière de procédures collectives prévues par le livre VI du Code de commerce. Dans cette

matière, les magistrats, afin de justifier cette extension, font appel à un faisceau d’indices afin

de caractériser une confusion de patrimoine, la fictivité d’une filiale, une communauté

d’intérêts, des actes accomplis dans l’intérêt personnel de la société mère…

Tel est aussi le cas en droit du travail et plus précisément dans le cadre d’un licenciement pour

motif économique. Les magistrats font alors abstraction de l’entité signataire du contrat pour

s’attacher à identifier le véritable employeur, et cela à travers la notion de coemploi. La situation

de coemploi est reconnue lorsqu'une société du groupe s'implique de façon très appuyée dans

la gestion d'une autre société de sorte que l'autonomie effective de cette dernière disparaît. En

général, ce type de rapport concerne une société mère et une de ses filiales.

Traditionnellement, la jurisprudence a considéré qu'une situation de coemploi est constituée en

cas de confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre des entités juridiquement distinctes,

se manifestant notamment par une immixtion de l'une d'elles dans la gestion et direction du

personnel d'une autre79. II n'est pas nécessaire de démontrer l'existence d'un lien de

subordination entre chaque salarié de la filiale et la société mère80.

A titre d’illustration, nous pouvons citer un arrêt du 22 juin 201181, dans lequel la Chambre

sociale a relevé, tout d’abord, une confusion d’intérêts découlant d’une prise de contrôle d’une

société sur l’autre, résultant du fait que l’autre société était l’unique client de la première et que

cette même société fixait les prix des deux sociétés. Par ailleurs, elle a constaté une confusion

d’activités, conséquence d’un partage des produits, de matières, de services généraux, de

procédés de fabrication d’une gestion administrative, comptable, financière, commerciale,

technique et juridique communes aux deux sociétés. Et enfin, elle a constaté une gestion

79 cass. soc. 18 janvier 2011, n° 09-69199, BC V n° 23 ; cass. soc. 6 juillet 2011, n° 09-69689, BC V n° 185 ; cass. soc. 28 septembre 2011, n° 10-12278 D ; cass. soc. 12 septembre 2012, n° 11-12343 D 80 cass. soc. 18 janvier 2011, n° 09-69199, BC V n° 23 ; cass. soc. 28 septembre 2011, n° 10-12278 D 81 cass. soc. 22 juin 2011, n° 09-69021 D

Page 52: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

52

commune du personnel des deux sociétés, les cadres dirigeants de la première société n’étant

que de simples exécutants des décisions du dirigeant de la seconde société relative à la gestion

du personnel et aux domaines industriels et techniques, ce qui a permis aux Hauts Juges de

caractériser une confusion de direction.

Jusqu'à présent, les juges avaient tendance à favoriser une conception extensive de la qualité de

coemployeur, facilitant ainsi l'indemnisation des salariés demandeurs à la suite de leur

licenciement économique. Cependant, dans plusieurs arrêts en date du 2 juillet 201482, la Cour

de cassation semble restreindre le rayonnement du coemploi à l'hypothèse selon laquelle

l'employeur conjoint a réellement privé la société employeur de son autonomie, au-delà de la

simple domination économique du coemployeur. Dans ces arrêts, la Cour de cassation semble

tracer une frontière entre ce qui relève du fonctionnement normal et logique d'un groupe, ce qui

est inhérent à l'organisation interne ce dernier, et ce qui va plus loin en matière d'ingérence de

la société mère, menant de fait à une situation de coemploi.

Elle a estimé que du fait que les dirigeants de la filiale proviennent du groupe et que la société

mère ait pris, dans le cadre de la politique du groupe, des décisions affectant le devenir de la

filiale et se soit engagée à fournir les moyens nécessaires au financement des mesures sociales

liées à la fermeture du site et à la suppression des emplois, ne pouvait suffire à caractériser le

coemploi.

Désormais, pour les Hauts magistrats, hors l'existence d'un lien de subordination, une société

faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel

employé par une autre que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des

actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination

économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de

direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette

dernière.

En revanche, lorsqu’un lien de subordination est établi entre une société et les salariés d’une

autre société, la Cour considère qu’il y a automatiquement coemploi.

82 Cass. Soc. 2 juill. 2014, nos 13-15.208 à 13-21.153

Page 53: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

53

Par conséquent, un groupe de sociétés ne caractérise pas forcément à lui seul une situation de

coemploi. Au contraire, à la lettre de ces arrêts, il s'agit « presque » d'une exception dont la

réalité doit être démontrée par les salariés. Ce n'est qu'à partir d'un certain stade qu'il y

a « immixtion abusive » et donc coemploi. Toute la difficulté consistant, bien entendu, à

délimiter cette frontière au cas par cas car l’enjeu est de taille puisque la société reconnue

coemployeur devra assumer les obligations de l'employeur.

Les affaires jugées jusqu'à présent ont été initiées par des ex-salariés licenciés à la suite de la

fermeture de leur site ou la liquidation de leur société. Leur employeur étant souvent insolvable,

ils intentent une action en reconnaissance du coemploi dans le but de rechercher une société

(généralement la maison mère) qui pourra prendre en charge leurs indemnités de rupture et, le

cas échéant, leurs indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, car la

reconnaissance du coemploi peut remettre en cause le bien-fondé des licenciements

économiques notifiés par l'employeur.

En effet, en cas de coemploi, le motif économique doit exister, non seulement au sein du secteur

d'activités du groupe, mais également au sein de la société coemployeur. Ainsi, la cessation

d'activité de la société employeur ne peut justifier des licenciements qu'à la condition que le

coemployeur cesse également son activité.

De la même manière, si la société reconnue coemployeur n'a pas procédé à des recherches

sérieuses et loyales de reclassement, elle sera condamnée à indemniser les salariés licenciés,

peu importe si le coemploi n'a été reconnu qu'a posteriori, soit après les licenciements83. Or,

dans le cas où le coemploi a été reconnu, le coemployeur n’a pu se soumettre à cette obligation

de reclassement puisque cette reconnaissance n’est intervenue qu’après rupture des contrats.

Depuis ces arrêts du 2 juillet 2014 et le rétrécissement du domaine du coemploi, des auteurs

comme Jean-François Cesaro et Elsa Peskine vont jusqu’à se demander si le coemploi ne serait

pas sur la sellette84. Cependant, le coemploi était devenu « une sorte d’épouvantail » pour

reprendre les termes du professeur Grégoire Loiseau85 surtout vis-à-vis des groupes

internationaux implantés ou envisageant de s’implanter en France, en d’autre terme un risque

83 Cass. soc. 28 septembre 2011, n ° 10-12278 D 84 Jean-François Cesaro et Elsa Peskine, Le coemploi sur la sellette ?, Revue de droit du travail 2014 p. 661 85 Grégoire Loiseau, Le coemploi est mort, vive la responsabilité délictuelle, La Semaine juridique Social, n°29, 22 juillet 2014, p1311

Page 54: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

54

juridique à prendre en considération. Néanmoins aujourd’hui, « le risque du coemploi est

désormais davantage un risque judiciaire qu’il ne soit pas retenu »86.

Le professeur Grégoire Loiseau illustre encore les arrêts de juillet 2014 par l’expression

suivante : « le coemploi est mort, vive la responsabilité délictuelle »87. En effet, dans ces arrêts,

la Cour de cassation a, d’un côté, voulu limiter le rayonnement du coemploi pour lui préférer,

de l’autre côté, d'autres techniques d'imputation comme la responsabilité délictuelle.

β Retour au droit civil et à la responsabilité délictuelle

Dans deux arrêts du 8 juillet 201488 rendus à quelques jours d’intervalle des arrêts relatifs au

coemploi cités précédemment, les hauts magistrats estiment qu'une société prenant des

décisions « qui avaient aggravé la situation économique difficile » d'une autre société et qui «

ne répondaient à aucune utilité pour elle et n'étaient profitables qu'à son actionnaire unique »

avait commis une « faute » et une « légèreté blâmable » ayant concouru à la déconfiture de

l'employeur et à la disparition des emplois. Elle engageait donc sa responsabilité à l’égard des

salariés sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil.

Certaines difficultés doivent cependant être soulevées. Aux termes de l'article L. 1411-1 du

Code du travail, le Conseil des Prud'hommes est compétent pour régler « les différends qui

peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code

entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient ». Échappent donc à

la compétence de la juridiction prud'homale, les actions menées par des salariés contre une

personne n'ayant pas la qualité d'employeur. Avec la notion de coemploi, il est possible

d’attraire devant la juridiction prud’homale d’autres personnes que l’employeur direct, mais

encore faut-il prouver que ces personnes ont bien la qualité d’employeur.

Or, la responsabilité délictuelle ne fait nullement référence à la notion d’employeur et ne devrait

donc pas être du ressort du juge prud’homal, ce qui aboutirait in fine à un éclatement du

contentieux89. En raison de l'incompétence de la juridiction prud'homale, le choix d'une action

86 Grégoire Loiseau, préc. 87 Grégoire Loiseau, préc. 88 Cass. Soc. 8 juill. 2014, nos 13-15.573 et 13-15.470 89 Alexandre Fabre, La responsabilité délictuelle pour faute au secours des salariés victimes d'une société tierce, Au-delà des arrêts Sofarec du 8 juillet 2014, Revue de droit du travail 2014 p. 672

Page 55: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

55

en responsabilité délictuelle contre une société tierce oblige donc les salariés à multiplier les

procédures.

En outre, les salariés, invoquant la responsabilité délictuelle d’une société tierce, doivent

démonter un préjudice spécial et distinct des autres créanciers. D’un côté, il est aisé de justifier

que les salariés subissent un préjudice spécial et distinct puisqu’ils sont les seuls à souffrir de

la perte de leur emploi. En revanche, d’un autre coté cette condition est discutable puisque les

salariés perçoivent déjà une indemnité de l'employeur lorsqu'ils sont licenciés. « Comment le

préjudice pour perte d'emploi pourrait-il être invoqué s'il a déjà été réparé par ailleurs ? »90.

Mais à cela, nous pouvons répondre que certes les salariés bénéficient d’une indemnisation pour

le préjudice lié à la perte d’emploi, cependant compte-tenu de son mode de calcul, l'indemnité

de licenciement ne permet pas une réparation intégrale du préjudice pour perte d'emploi. De

plus, dans d’autres circonstances, le versement de l’indemnité de licenciement ne fait pas

obstacle à la réparation de la perte d’emploi par l’octroi de dommages-intérêts. Il semble que

c'est seulement si l'indemnisation de ce préjudice est déjà assurée par d'autres dommages-

intérêts que le salarié ne peut en demander à nouveau réparation. Ainsi, les salariés, ayant

obtenu des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peuvent pas

obtenir, en plus, réparation de la perte injustifiée de leur emploi du fait de l'inobservation des

critères d'ordre de licenciement 91.

La seule hypothèse dans laquelle des salariés ne pourraient pas invoquer le préjudice pour perte

d'emploi contre une société tierce serait donc lorsque ces derniers demandent également

réparation de ce préjudice à leur employeur via le versement de dommages-intérêts pour

licenciement sans cause réelle et sérieuse ou pour violation des critères d'ordre de licenciement.

D’autre part, bien que les deux notions soit distinctes, la proximité des situations de coemploi

et de faute, ainsi que le recul de l’utilisation de la première notion pourraient profiter à une mise

en œuvre plus courante de la responsabilité délictuelle. L’avantage d’un transfert des

contentieux du coemploi à la responsabilité délictuelle serait de couper court aux dérives des

applications de la notion de coemployeur.

90 Alexandre Fabre, préc. 91 Cass. Soc. 5 oct. 1999, n° 98-41.384, Bull. civ. V, n° 366.

Page 56: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

56

Néanmoins, le recours au droit de la responsabilité permet de répondre, à l'égard des salariés

licenciés, au même sentiment d'injustice que celui qui avait motivé l'invention du coemploi. Les

règles de la responsabilité délictuelle ont toutefois un champ d’application plus large que la

notion de coemploi. Ainsi, il n’est pas question de l’existence d’une immixtion dans la gestion

de la filiale.

Par ailleurs, le recours à l'article 1382 du Code civil étend les perspectives indemnitaires des

salariés licenciés bien au-delà des seuls groupes de sociétés. Ainsi, toute personne est

susceptible de commettre à l'égard d'une entreprise, une faute conduisant à des licenciements.

Nous pouvons songer à la rupture brutale de crédit par un établissement bancaire, à des salariés

ou des entreprises concurrentes qui commettraient des actes de concurrence déloyale, des

syndicats qui organiseraient des mouvements illicites dans l'entreprise et préjudiciables à son

fonctionnement, etc.92 Ajoutons à cela que, comme toute nouvelle règle, le recours au droit de

la responsabilité ouvre le champ aux praticiens et à la doctrine à de longs et interminables débats

autour de la notion de faute.

En outre, le recours à la responsabilité délictuelle a assez bien été accueilli et pourrait donc

conduire les plaideurs et les magistrats à privilégier cette voie.

Cependant si le coemploi fait l’objet de vives critiques, il n’est pas totalement remis en cause.

Dans ces arrêts, Jean-François Cesaro considère que « la Cour de cassation paraît plutôt avoir

trouvé, avec le droit de la responsabilité, une qualification alternative permettant de contenir

le coemploi dans une fonction en principe résiduelle : sanctionner les situations de domination

excessive d'une société par une autre ». 93

Il nous reste enfin à présenter les évolutions apportées par la loi Macron à la procédure de

licenciement économique.

92 Alexandre Fabre, préc 93 Jean-François Cesaro et Elsa Peskine, Le coemploi sur la sellette ?, Revue de droit du travail 2014 p. 661

Page 57: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

57

B. Le projet de loi Macron : vers une simplification ?

Cela fait plusieurs mois déjà que le projet de loi Macron ou Loi pour la croissance, l'activité et

l'égalité des chances économiques fait grand bruit et oppose les différents acteurs de la vie

économique. Cette loi, dont un des reproches formulés à son égard, est d’être une loi "fourre-

tout", a été définitivement adoptée le 10 juillet dernier et promulguée le 6 août 2015. Si certaines

dispositions comme le travail du dimanche et la réforme des professions réglementées ont fait

l’objet de vifs débats, d’autres quant à elles sont passées inaperçues. Telles sont notamment le

cas des dispositions concernant les licenciements pour motif économique.

Nous verrons ainsi dans une première subdivision que ladite loi est venue apporter quelques

modifications à la procédure de reclassement dans les sociétés du groupe basées en dehors du

territoire national (1). Et enfin, nous montrerons que le contrôle du respect des obligations de

l’employeur est désormais cantonné aux moyens dont dispose l’entreprise et non plus le groupe

(2).

1. Le reclassement à l’étranger : une future initiative du salarié

Nous recenserons tout d’abord les difficultés qui, aujourd’hui, entourent ce reclassement

spécifique (a), puis nous nous intéresserons aux réformes apportées par la loi de 2015.

a. Des modalités de propositions de reclassement complexes

Récemment encore, l’employeur devait proposer aux salariés, à titre de reclassement, tous les

postes vacants, même ceux situés dans des pays en développement et assortis de salaires

pratiqués localement. Ces propositions étaient souvent jugées offensantes par les syndicats de

salariés et avaient donné lieu à différents scandales largement médiatisés.

Page 58: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

58

La loi du 18 mai 2010 "visant à garantir de justes conditions de rémunération aux salariés

concernés par une procédure de reclassement" a tenté de pallier cette difficulté en encadrant les

propositions de reclassement à l’étranger.

L’article L.1233-4-1 du code du travail prévoit une procédure spécifique s’appliquant lorsque

les sociétés, dans lesquelles une permutation du personnel est envisageable, sont situées en

dehors du territoire français.

Dans ce cadre-là, avant de débuter ses recherches, l’employeur doit demander à chaque salarié

s’il accepte de recevoir des offres de reclassement à l’étranger, dans chacune des implantations

de l’entreprise ou du groupe ou s’il souhaite poser des restrictions éventuelles quant aux

caractéristiques des emplois offerts, notamment en matière de rémunération et de localisation.

Selon l’administration94, la demande de l’employeur, dont un exemple se trouve dans les

annexes de ce rapport, peut se présenter sous la forme d’une lettre d’information qui détaillera

la procédure applicable à laquelle l’employeur joindra le questionnaire proprement dit. Afin de

se ménager la preuve, il est conseillé à l’employeur d’adresser ce courrier par lettre

recommandée avec avis de réception ou de le remettre en main propre contre décharge.

Concernant le contenu du questionnaire, en dehors de l’objet même de celui-ci, le code du

travail ne fournit aucune information pratique sur son contenu et en particulier sur le degré de

précision des questions.

L’administration a toutefois précisé dans la circulaire du 15 mars 2011 déjà citée, que le

document doit indiquer tout d’abord les pays dans lesquels est implanté l’entreprise ou le groupe

et où des « permutations » sont possibles. Il doit permettre ensuite au salarié de formuler des

restrictions en matière de rémunération en fixant un niveau minimal acceptable et plus

généralement toute réserve, qu’il s’agisse de principales clauses du contrat de travail (nature de

l’emploi, durée du travail, avantages contractuels, etc.) ou des conditions de travail souhaitées

(horaires, congés payés, règles de santé et de sécurité, etc.). Enfin, l’administration préconise

d’ajouter des informations générales sur les conditions de travail (lieux de travail, horaires,

congés payés, etc.).

Néanmoins, cela reste une circulaire qui n’est pas opposable au juge prud’homal.

94 Circ. DGT 2011-3 du 15 mars 2011, § II.2

Page 59: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

59

Quant au moment auquel l’employeur doit envoyer sa demande, la recherche de reclassement

devant intervenir avant la notification du licenciement, il est préconisé que l’employeur adresse

le courrier lors de la convocation à l’entretien préalable en cas de licenciement individuel ou de

« petit licenciement collectif » ou à l’issue de la dernière réunion des institutions représentatives

du personnel en cas de « grand licenciement collectif ». Dans tous les cas, ce courrier ne peut

être envoyé avant que l’employeur n’ait déterminé l’ordre des licenciements puisque ce n’est

qu’après cette occasion qu’il est possible d’identifier les salariés susceptibles d’être licenciés et

donc à reclasser.

Le salarié aura alors un délai de 6 jours ouvrables à compter de la réception du courrier pour

indiquer s’il accepte de recevoir de telle offres et éventuellement à quelles conditions. A défaut

de réponse dans ce délai, il sera considéré comme ayant refusé de recevoir lesdites offres à

l’étranger. Sur ce point, nous pouvons constater que ce délai de réflexion est extrêmement court,

néanmoins il peut s’expliquer par le fait que le salarié à ce moment de la procédure n’accepte

pas encore définitivement une offre de reclassement à l’étranger et n’autorise l’employeur qu’à

lui proposer ultérieurement de telles offres qu’il pourra accepter ou refuser. Par ailleurs,

l’employeur ne peut pas indéfiniment attendre la réponse du salarié, celui-ci doit pouvoir

avancer dans la procédure.

L’employeur sera tenu par la suite d’adresser des offres de reclassement à l’étranger qu’aux

salariés qui ont expressément accepté de recevoir de telles offres, compte tenu des éventuelles

restrictions déjà formulées. S’il n’existe aucune offre de reclassement à l’étranger

correspondant aux souhaits exprimés par le salarié, l’employeur devra l’en informer.

En revanche, il convient de ne pas adopter une lecture trop « rigide » de la loi. En effet, en cas

de doute de compatibilité d’un poste avec les réserves exprimées, il est conseillé à l’employeur

de proposer néanmoins le poste en prenant soin de constituer une proposition de reclassement

particulièrement détaillée, voire en invitant le salarié à un entretien afin de procéder à un

examen poussé de sa situation personnelle.

Nous voyons bien que ceci est une lourde procédure pour l’employeur pour des propositions de

reclassement qui sont souvent rares et ne correspondent pas forcément aux salariés et à leurs

attentes. Par ailleurs, rares sont les salariés enclins à quitter le pays, s'éloigner de leurs attaches

et ce, pour reprendre un emploi à l’autre bout du monde et souvent de catégorie inférieure.

Page 60: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

60

Précisons que déjà au sein même du territoire national, peu nombreux sont les volontaires à la

mobilité géographique.

b. Quels changements pour demain ?

L'article 100 du projet de loi Macron limite l'obligation de reclassement aux "emplois

disponibles situés sur le territoire national". Avec cette loi, c’est désormais au salarié de

prendre l’initiative de formuler une demande afin de recevoir des offres de reclassement à

l’étranger95. A cette occasion, il pourra préciser les restrictions qu’il entend faire valoir en

matière de rémunération et de localisation. L’employeur doit en retour transmettre au salarié

les offres de reclassement individualisées correspondant à ses restrictions.

La différence avec le dispositif existant est à peine perceptible, le seul objectif est de rassurer

les employeurs… Le projet de loi renverse ainsi les rôles puisqu'avant, c'était à l'employeur de

demander au salarié s'il accepte des propositions à l'étranger. Si l’initiative de demander à

recevoir des offres de reclassement à l’étranger incombe désormais au salarié, il n’en reste pas

moins que l’employeur devra l’informer préalablement de sa possibilité de faire une telle

demande selon des modalités qui seront précisées ultérieurement par décret. Il y a donc fort à

parier que cette information se fera par le biais d’un questionnaire invitant le salarié à préciser

ses restrictions en matière de localisation et de rémunération, ce qui reviendrait à adopter un

dispositif quasiment identique à celui existant actuellement...

Les entreprises ne seront donc plus sanctionnées si elles omettent de faire ces propositions à

l’étranger mais elles devront tout de même faire la liste des postes disponibles partout dans le

groupe, ce qui n’est pas toujours simple. Aucune avancée pratique donc sur ce point.

Pour Jean-Michel Mir "il aurait été préférable de supprimer l'obligation de reclassement dans

le groupe à l'étranger car elle est juridiquement critiquable et ne produit aucun résultat probant

sur le reclassement effectif des personnes concernées (les propositions de poste à l'étranger

restent la plupart du temps purement formelles car elles sont refusées dans leur immense

95 Article 100 du Projet de loi Macron

Page 61: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

61

majorité). Elle alimente aussi un contentieux sans fin pour déterminer si l'employeur a bien

respecté ou non ses obligations de reclassement"96.

Il convient à présent d’étudier si la réforme relative au contrôle des obligations de l’employeur

au regard des ressources de l’entreprise sera plus salutaire.

2. Un contrôle cantonné aux ressources de l’entreprise

La loi Macron a apporté des modifications concernant le contrôle par l’administration de la

validité du Plan de sauvegarde de l’emploi lorsque l’entreprise fait l’objet d’une procédure de

redressement ou de liquidation judiciaire (b). Nous avons choisi de traiter cette disposition car

jusqu’à aujourd’hui, l’appréciation du respect des obligations de l’employeur dans le PSE était

envisagée d’après les moyens du groupe (a), or nous avons précédemment vu que, bien que la

société appartienne à un groupe, les autres sociétés sont souvent peu coopératives. Par ailleurs,

comme le PSE comprend un volet relatif au reclassement du salarié, il nous semble opportun

d’aborder ce thème.

a. L’état actuel du contrôle

Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins

10 salariés dans une même période de 30 jours, l'employeur doit établir et mettre en œuvre un

plan de sauvegarde de l'emploi afin d’éviter les licenciements ou en limiter le nombre. Ce plan

intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le

licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des

caractéristiques sociales ou de qualifications rendant leur réinsertion professionnelle

particulièrement difficile97.

96 Jean Michel Mir dans l’article de Marianne Rey, Licenciement économique: six mesures de la loi Macron qui ont pu vous échapper, Journal L’express L’Entreprise, publié le 17/12/2014 et mis à jour le 15/01/2015 97 C. trav. art. L 1233-61.

Page 62: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

62

Comme pour l’obligation de reclassement, l’obligation d'établir un plan de sauvegarde de

l'emploi répondant aux moyens du groupe n'incombe qu'à l'employeur. Il en résulte qu'une

société relevant du même groupe que l'employeur n'est pas, en cette seule qualité, débitrice

d'une obligation de reclassement envers les salariés de sa société sœur. En conséquence, elle ne

répond pas non plus, à leur égard, des conséquences d'une insuffisance des mesures de

reclassement prévues dans le plan.98

Une double obligation de reclassement pèse ainsi sur l'employeur.

L'une, étudiée précédemment, est individuelle et personnelle et l'autre, contenue dans le PSE, a

quant à elle, un caractère collectif et anonyme. Toutefois, ces deux obligations ne sont pas

exclusives l'une de l'autre. Les deux obligations ont des points communs, notamment en ce qui

concerne le périmètre et l'emploi de reclassement ainsi que les précisions de l'offre de

reclassement.

Depuis la loi de sécurisation de l'emploi 2013-504 du 14 juin 2013, l'autorité administrative

exerce l'intégralité du contrôle du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, aucun

licenciement ne pouvant être notifié sans qu'elle ait préalablement, selon le cas, validé ou

homologué la procédure et le PSE.

Avant la loi Macron, la DIRECCTE devait apprécier le projet de licenciement de manière

globale au regard de la qualité des mesures sociales d'accompagnement, mesures devant être

proportionnelles à la taille de l'entreprise et aux moyens dont dispose l'entreprise, l'UES ou le

groupe. Ainsi, dans un arrêt de la Cour d’appel de Nancy, les juges d’appel ont conclu au

caractère adapté du plan puisque l'accent mis sur la formation et la mobilité correspondait à la

composition de la population concernée (en majorité des ouvriers et des employés) et à la

situation dégradée du bassin d'emploi. Ils l’ont en revanche estimé non proportionné. Pour ce

faire, la Cour d’appel a passé en revue les mesures d'incitation à la mobilité (aides à la mobilité

géographique, frais de déménagement, indemnité de changement de domicile pour les

célibataires et les chargés de famille, frais de double résidence et d'agence, frais de nuits d'hôtel,

aide au reclassement du conjoint) et a conclu que les montants alloués étaient insuffisants pour

98 Cass. soc. 13 janvier 2010 n° 08-15.776 (n° 84 FS-PB), Sté San Carlo gruppo alimentare SPA c/ Ancelin : RJS 3/10 n° 247.

Page 63: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

63

permettre à un salarié de postuler à un reclassement à l'étranger. Puis elle a examiné la situation

du groupe dont elle a relevé qu'il a réalisé, l'année précédant le PSE, un bénéfice important.99

Si le PSE n'était pas proportionnel aux moyens du groupe, la DIRECCTE pouvait ne pas

l'homologuer et l'employeur devait « revoir sa copie. »

b. Demain : un contrôle apprécié selon les moyens de l’entreprise

Tout d’abord, la version initiale du projet de loi prévoyait que le périmètre de l’obligation de

reclassement serait limité pour les entreprises placées en redressement ou liquidation judiciaire,

uniquement à l’entreprise, y compris lorsque celle-ci fait partie d’un groupe. Cette disposition

a toutefois été abandonnée par les députés. Et donc, lorsque l’entreprise envisageant des

licenciements économiques appartient à un groupe, les recherches de reclassement doivent

s’effectuer au sein des entreprises du groupe dont l’organisation permet une permutation du

personnel. Ces dispositions sont du fait des délais de procédure extrêmement réduits, à l’heure

actuelle particulièrement difficile à mettre en œuvre dans les entreprises placées en

redressement ou liquidation judiciaire. Aussi, nous aurions pu espérer que la loi y apporte

quelques modifications.

Cependant la grande innovation de la loi Macron dans le domaine du licenciement économique

tient au fait que l'examen du PSE et donc des mesures qu'il contient pour accompagner les

salariés licenciés doit désormais se faire « au regard des moyens dont dispose l'entreprise ».

Des problèmes peuvent cependant être soulevés notamment lorsqu’une société mère

organiserait la faillite de sa fille pour s'en débarrasser, par exemple en asséchant les commandes

qu'elle lui passait, des cas qui ne sont pourtant pas rares. L'avocat de salariés Roger Koskas, du

cabinet Grumbach dénonce que, grâce à cet article 101, « les grands groupes vont pouvoir

liquider leur filiale sans endosser le minimum de responsabilité. C'est une immunité qui leur

est donnée, un aval pour se réorganiser sur le dos de la collectivité et au détriment des

salariés.»100

99 CAA Nancy 23 juin 2014 n° 14-528, 4e ch., Ministre du travail c/ Sté OCDF 100 Roger Koskas dans l’article de Francine Aizicovici, Loi Macron : un détricotage discret du droit du licenciement économique, Le Monde, 19.02.2015

Page 64: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

64

Cette disposition de la loi Macron a été présentée comme une mesure de simplification du droit

du licenciement puisque qu’elle conduira forcément à homologuer plus facilement les plans

sociaux...

Le professeur de droit à l'université Paris Ouest-Nanterre-La Défense, Pascal Lokiec, critique

lui aussi cette disposition et énonce qu’« On ne cesse aujourd'hui de dénoncer les faillites

organisées par les groupes. On avait, avec cette loi, l'occasion de se donner les moyens

juridiques d'obliger le groupe à contribuer au plan social. On a fait l'inverse. On a loupé le

coche. Avec derrière, l'idée que le droit social serait un frein à l'embauche et un handicap à

l'investissement. »101

Néanmoins, afin de contrebalancer les critiques de l’article 101 de la loi Macron, un

amendement a été ajouté en dernière minute, indiquant que l'entreprise ou l'administrateur

judiciaire « doit rechercher les moyens du groupe auquel la société en liquidation appartient

pour l'établissement du PSE ». En d’autres termes, l’employeur, l’administrateur ou le

liquidateur resteront tenus de solliciter l’aide, notamment financière du groupe pour

l’établissement du PSE.

Cependant M. Lokiec souligne que c’est un point assez « flou », et qui de toute façon «sera

sans impact sur l'homologation » du PSE, d'autant que cette obligation « n'a pas été assortie de

sanctions » en cas de non-respect.

En résumé, la loi Macron apparait assez décevante dans le domaine du licenciement pour motif

économique.

101 Pascal Lokiec dans l’article de Francine Aizicovici, Loi Macron : un détricotage discret du droit du licenciement économique, Le Monde, 19.02.2015

Page 65: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

65

CONCLUSION

L’ensemble de ces développements a permis de montrer que la procédure de licenciement pour

motif économique est une procédure très lourde et risquée pour les entreprises faisant parties

d’un groupe de sociétés et de surcroît pour les plus petites d’entre elles (TPE et PME) qui, quant

à elles, ne disposent pas des mêmes moyens et ne représentent pas le même poids dans le groupe

qu’une société d’envergure, voire que la société mère.

Toutefois, si les difficultés entourant la délimitation de la notion de groupe dans le cadre de

l’appréciation du motif économique et du périmètre de reclassement, ainsi que le reclassement

en lui-même, sont celles qui sont les plus significatives auxquelles doit faire face un employeur

appartenant à un groupe, ce ne sont en revanche pas les seules. Les employeurs soumis à cette

procédure peuvent ainsi rencontrer des complications dans l’établissement des critères d’ordres

du licenciement, dans la consultation des représentants du personnel selon la taille de la

procédure envisagée.

Cela fait beaucoup de difficultés pour un employeur déjà confrontés à ses propres difficultés

car il ne faut pas oublier que des licenciements pour motif économique sont, en théorie,

prononcés parce que l’employeur se trouve dans une situation de précarité. Une procédure trop

complexe découragera les employeurs de recourir à celle-ci et pouvant in fine les conduire à

détourner le motif de ces licenciements afin de contourner la législation d’un tel licenciement.

En effet, face à de telles complications l’employeur sera tenté de prononcer des licenciements

pour motif personnel donc inhérent à la personne du salarié. Pour cela, l’employeur devra se

mettre à la quête d’une faute qui sera bien souvent « imaginaire », voire il sera tenté de pousser

le salarié à la faute. C’est ce qu’avait notamment fait la société, Alcatel Câble France (ACF)

qui en 2001 était en proie à de graves difficultés. Plutôt que d'annoncer des réductions d'effectifs

et mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi, elle va proposer aux employés d’un de

ses sites un licenciement pour motif personnel. Les volontaires avaient donc dû accepter

d'endosser une faute inventée par la direction (introduction d'alcool, utilisation de l'ordinateur

à des fins personnelles, etc.). En contrepartie, ils percevaient une indemnité transactionnelle, en

plus de l'indemnité légale ou conventionnelle à laquelle tout salarié a droit. Déjà fragilisées par

les mesures de chômage technique, plusieurs dizaines de personnes avaient accepté le marché.

Page 66: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

66

D’autres entreprises comme IBM vont même jusqu’à recourir à la mise sous pression des

salariés afin de les amener à démissionner, ou encore leur proposent de les muter et ainsi, en

cas de refus, disposent donc d’un motif de licenciement.

Par ailleurs, du fait de la complexité de cette procédure, les employeurs attendent le dernier

moment pour y recourir. Or, s’il est vrai que le licenciement économique est l’ultime recours,

il ne faut pas non plus le prononcer trop tardivement, car alors la situation économique de

l’entreprise est souvent aggravée et davantage de licenciement devront être prononcés.

Cependant, il ne faut pas oublier que derrière de telles procédures de licenciement, c’est le

travail d’un salarié qui est mis sur la sellette. Aussi, dans cette période de crise économique,

tout l’enjeu du législateur et des juges est d’assurer un juste équilibre entre les besoins de

l’entreprise et l’emploi du salarié.

Page 67: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

67

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages et thèses :

Code du travail, Dalloz, 2015

Dictionnaire, La Revue Fiduciaire, Licenciement économique, janvier 2015

Dictionnaire, La Revue Fiduciaire, Le coemploi dans les groupes de sociétés, janvier 2015

Documentation experte Francis Lefebvre, série nb – licenciement, 2015

Lamy Social, Ed. Lamy, 2015

Marcelle Mbala Mbala, Les conventions intra-groupes de sociétés, Lille 2, université du droit

et de la santé, 2004-2005

Perle Pascaud-Blandin, La responsabilité de la société mère du fait des actes commis par sa

filiale, Université Paris Sud, 19 Septembre 2013

Séminaire de Madame Marguerite Kocher, Groupe de sociétés et droit du travail, 2015

Xinyu Hu, Le groupe de sociétés en droit français et en droit chinois, Université d’Angers, 24

Septembre 2010

Revues juridiques :

Alexandre Fabre, La responsabilité délictuelle pour faute au secours des salariés victimes d'une

société tierce, Revue de droit du travail 2014 p. 672

Page 68: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

68

Antoine Lyon-Caen, La réalité du motif économique d'un licenciement et l'examen des

possibilités de reclassement du salarié doivent s'apprécier dans le cadre du groupe auquel

appartient l'employeur, Recueil Dalloz 1992, p. 293

Bertrand Ines, Licenciement économique : notion de groupe de reclassement, Dalloz actualité

26 février 2015

Bertrand Ines, Obligation de reclassement : recherches externes et saisine d'une commission

paritaire, Dalloz actualité 21 novembre 2014

Brigitte Reynes, Les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur d'un

groupe de sociétés y compris au sein des filiales étrangères, Recueil Dalloz 1999 p. 177

Christine Masquefa, Licenciement économique. Difficultés économiques. Groupe de sociétés.

Niveau d'appréciation. Secteur d'activité à l'étranger. Absence de cause réelle et sérieuse.

Remboursement des allocations de chômage. Non-imputation des sommes versées par

l'employeur au titre des conventions de conversion, Droit social 2001 p. 894

D.Vidal, « Les mérites de la méthodologie ponctuelle d’un droit des groupes de sociétés », LPA,

1993, n° 78, p. 17

Elsa Peskine, L'imputation en droit du travail, À propos de la responsabilité des sociétés mères

en matière de licenciement pour motif économique, Revue de droit du travail 2012 p. 347

Florence Mehrez, Eléonore Barriot et Julien François, Projet de loi Macron : l'essentiel de la

réforme en droit du travail, Dalloz actualité 23 février 2015

Françoise Favennec, Licenciement économique. Obligation de reclassement. Groupe en voie

de constitution, Droit social 1995, p. 678

Françoise Favennec-Héry, Le groupe de reclassement, Droit social 2012, p. 987

Gérard Couturier, Licenciement. Groupe de sociétés. Reclassement. Clause prévoyant une

possibilité d'affectation dans différentes sociétés, Droit social 1999, p. 1112

Page 69: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

69

Grégoire Loiseau, Le coemploi est mort, vive la responsabilité délictuelle, La Semaine juridique

Social, n°29, 22 juillet 2014, p.1311

Jean-François Cesaro et Elsa Peskine, Le coemploi sur la sellette ?, Revue de droit du travail

2014 p. 661

Jean Mouly, Licenciement économique. Suppression d'emploi. Entreprise. Niveau

d'appréciation. Remplacement d'un salarié par un autre salarié du groupe, Droit social 2001 p.

559

Jules Kibalo Adom, L'obligation de reclassement et les groupes de dimension internationale,

Recueil Dalloz 1999 p. 310

Laetitia Noël, Reclassement en cas de licenciement économique : la notion de groupe de

sociétés, Recueil Dalloz 2003 p. 1657

Les groupes de PME, Licenciement pour motif économique, Hors-série de la Revue Fiduciaire,

2012-5

Marguerite Kocher, Le coemploi à l'âge de raison, Revue de droit du travail 2014 p. 625

Marguerite Kocher, De la notion de groupe au périmètre de reclassement : retour sur la décision

du 24 juin 2009, Rev. trav. 2009, p. 581

Marie Peyronnet, Obligation d'adaptation et de reclassement : précisions, Dalloz actualité 15

septembre 2014

Philippe Waquet, Licenciement économique. Obligation de reclassement. Ordre des

licenciements. Cause économique, Droit social 2004, p. 209

Quentin Urban, Le licenciement pour motif économique et le groupe, Droit social 1993, p. 272

Page 70: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

70

Ripert G. Roblot R. et Germain M., « Traité de droit commercial », Tome 1, L.G.D.J., 15e Ed.

1993, n° 1608

Roland Kessous, La recherche d'un reclassement dans le groupe, préalable au licenciement

économique, Droit social 1992, p. 826

Revues de presse :

Caroline André-Hesse, Le projet de loi Macron et le droit des licenciements économiques : des

avancées en demi-teinte, Les Echos.fr, 18.03.15

Francine Aizicovici, Loi Macron : un détricotage discret du droit du licenciement économique,

Le Monde.fr, 19.02.2015

Marianne Rey, Licenciement économique: six mesures de la loi Macron qui ont pu vous

échapper, Lentreprise.lexpress.fr, 15.01.15

Jurisprudences :

Cass. Crim., 4 Février 1985, D. 1985, p. 485

Cass. Soc. 17 juin 1992, n°89-42769, BC V n°403

Cass. Soc. 25 juin 1992, n°90-41244, BC V n°420

Cass. Soc. 5 avril 1995 n° 93-42.690 (n° 1954 PB), Sté Thomson Tubes et Displays c/

Steenhoute ; n° 93-43.866

Cass. Soc. 7 octobre 1998, n°9643107, BC V n°405

Cass. Soc. 27 octobre. 1998, n° 96-40.626, BC. V, n° 459

Page 71: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

71

Cass. Soc. 10 mai 1999 n° 97-40.060 (n° 2146 P), Bourguignon c/ Petit : RJS 6/99 n° 802,

Bull. civ. V n° 203

Cass. Soc. 5 oct. 1999, n° 98-41.384, Bull. civ. V, n° 366.

Cass. Soc. 7 octobre 1998 n° 96-42.812 Sté Landis et Gyr Building Control c/ Bellanger

Cass. Soc. 16 janvier 2001, n°98-44461, BC V n°11

Cass. Soc. 21 mars 2001, n°99-43108 D

Cass. Soc. 12 juin 2001 n° 99-41.571 (n° 2747 FS-P), SA Sprague France (Vishay) c/ Beauvais

: Bull. civ. V n° 214

Cass. Soc. 11 décembre 2001, n°99-44291 BC V n°379

Cass. Soc. 12 juin 2002 n° 00-40.908 (n° 1952 F-D), SA Société équipement du Rhône de Lyon

dite « SERL ».

Cass. Soc. 23 janv. 2003, n° 00-44.882, BC. V, n° 27

Cass. Soc. 29 janv 2003, n°00-44882, BC V n°27

Cass. Soc. 30avril 2003, Arrêt Axa, n°01-10027

Cass. Soc. 14 janvier 2004, n°01-45020

Cass. Soc. 7 avril 2004, n°01-42882, BC V n°112

Cass. Soc. 21 septembre 2005, n°04-41789 D

Cass. Soc. 26 octobre 2005, n°03-41972 D

Cass. Soc 26 septembre 2006, n°05-43841, BC V n°288

Page 72: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

72

Cour d’appel de Lyon 28 Sept 2006

Cass. Soc. 15 novembre 2006 n° 05-40.935, Sté Maisonmag c/ Milanovic-Brezak : Bull. civ. V

n° 344.

Cass. Soc. 28 novembre 2007 n° 06-40.489 (n° 2463 FS-PB), Barbie c/ Sté Ensival-Moret :

Bull. civ. V n° 197.

Cass. Soc. 4 décembre 2007 n° 05-46.073 (n° 2580 FS-PB), Geoffroy c/ CGEA de Nancy : RJS

2/08 n° 158, Bull. civ. V n° 204.

Cass. Soc. 29 janvier 2008 n° 06-44.189 (n° 162 F-D), Tanic c/ Sté Econocom Products and

Solutions : RJS 4/08 n° 386.

Cass. Soc. 13 février 2008, n°06-44984 D

Cass. Soc. 20 févr. 2008, n° 06-45.335, Dalloz jurisprudence

Cass. Soc 28 mai 2008, n°06-46009, BC V n°116

Cass. Soc. 8 juillet 2008, n°06-46654 D

Cass. Soc. 19 novembre 2008 n° 07-44.416

Cass. Soc. 3 décembre 2008 n° 07-43.684 (n° 2046 F-D), Abric c/ Sté Rivoire et Carret Lustucru

: RJS 2/09 n° 153.

Cass. Soc. 27 janvier 2009 n° 07-44.062 (n° 134 F-D), Monier c/ Sté Kiowi Limited.

Cass. Soc. 10 févr. 2009, n° 07-45.712, RDT 2009. 377, obs. Y. Chagny

Cass. Soc. 4 mars 2009, n°07-42381, BC V n°57

Page 73: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

73

Cass. Soc. 27 mai 2009 n° 07-44.022 (n° 1128 F-D), Bloch-Gosselin c/ Sté Lederlex : RJS 8-

9/09 n° 700

Cass. Soc. 13 janvier 2010 n° 08-15.776 (n° 84 FS-PB), Sté San Carlo gruppo alimentare SPA

c/ Ancelin : RJS 3/10 n° 247.

Cass. Soc. 10 février 2010 n° 08-41.109 (n° 326 F-D), Sté Valaubrac c/ Blanc : RJS 4/10 n°

321.

Cass. Soc. 1er juin 2010, n°09-40421, BC V

Cass. Soc. 15 juin 2010, n°08-70391, BC V n°135

Cass. Soc. 18 janvier 2011, 09-69199, BC V n023

Cass. Soc. 22 juin 2011, n° 09-69021 D

Cass. Soc. 6 juillet 2011, n° 09-69689

Cass. Soc. 28 septembre 2011, n° 10-12278 D

Cass. Soc. 14 décembre 2011, n°10-11042, BC V n°295

Cass. Soc. 10 mai 2012 n° 11-12.469 (n° 1204 F-D), Améla Da Cunha c/ Sté BLD.

Cass. Soc 26 juin 2012, n°11-14610 D

Cass. Soc. 26 juin 2012, n°11-13736, BC V n°197

Cass. Soc. 12 septembre 2012, n°11-30373 D

Cass. Soc. 24 octobre 2012 n° 11-23.418 (n° 2192 F-D), Alves Lopes c/ Sté Kodak : RJS 1/13

n° 17.

Page 74: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

74

Cass. Soc. 21 novembre 2012 n° 11-13.919 (n° 2473 F-D), Sté Vauclusienne d'automobiles c/

Ayme.

Cass. Soc. 2 juill. 2014, nos 13-15.208 à 13-21.153

Cass. Soc. 8 juill. 2014, nos 13-15.573 et 13-15.470

Cour administrative d’appel de Nancy 23 juin 2014 n° 14-528, 4e ch., Ministre du travail c/ Sté

OCDF

Cass. Soc. 11 février 2015, n° 13-23573

Lois, circulaires, rapports :

Loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et

au dialogue social

Circulaire du 22 septembre 2004 relative au titre II de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative

à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social

Sénat, Rapport d’information n° 558, rédigé par le groupe de travail relatif à la responsabilité

civile, 15 juillet 2009, p. 61.

Commission européenne, Service juridique, résumés d’arrêts importants,

http://ec.europa.eu/dgs/legal_service/arrets/08c044_fr.pdf, novembre 2009

Circulaire DGT 2011-3 du 15 mars 2011, § II.2

Circulaire DGT 2012-07 du 30 juillet 2012, fiche 7 b, p.53

Article 100 du Projet de loi Macron 2015

Page 75: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

75

Sites internet :

http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/groupe-d-entreprises.php

http://www.nestle.fr/

http://www.bouygues.com/

http://www.legifrance.gouv.fr/

Page 76: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

76

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS ............................................................................................................................. 2

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS ................................................................................. 3

SOMMAIRE .......................................................................................................................................... 4

INTRODUCTION GENERALE .......................................................................................................... 6

PREMIERE PARTIE : Présentation du stage au sein du cabinet FIBA ......................................... 7

I. Présentation du cabinet FIBA de Schiltigheim ....................................................................... 7

A. Aperçu historique de FIBA .......................................................................................... 7

B. Composition et fonctionnement du cabinet FIBA de Schiltigheim ............................. 8

1. Sa composition .................................................................................................................... 8

a. Le Pôle Comptabilité ....................................................................................................... 8

b. Le Pôle Paie ..................................................................................................................... 9

c. Le Pôle Juridique ............................................................................................................. 9

2. Son fonctionnement ........................................................................................................... 10

II. Présentation du stage et des missions réalisées ..................................................................... 11

A. Les activités de conseils aux entreprises ................................................................... 11

B. L’élaboration d’actes juridiques et l’accompagnement des employeurs ................... 12

III. La détermination du sujet du rapport de stage .................................................................... 14

Page 77: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

77

DEUXIEME PARTIE : La réalité du motif économique et l’obligation de reclassement, points

centraux de la complexité du licenciement économique dans le groupe ......................................... 16

INTRODUCTION ............................................................................................................................... 16

I. Le groupe, une notion aux multiples facettes difficile à cerner ........................................... 20

A. Le groupe, notion floue et pourtant déterminante pour l’appréciation d’un motif

économique ....................................................................................................................... 21

1. Une multiplicité de définition de groupe ........................................................................... 21

a. L’appréhension de la notion de groupe par la doctrine ................................................. 21

b. L’appréhension du groupe dans les matières autres que le droit du travail ................... 23

c. La reconnaissance juridique du groupe d’entreprises en droit du travail ...................... 24

2. Une cause économique appréciée au niveau du groupe .................................................... 26

a. La notion de secteur d’activité du groupe ..................................................................... 26

b. Le contrôle du juge de la réalité du motif invoqué par la filiale .................................... 32

B. Le périmètre de reclassement : une aire de mobilité adaptée au groupe mais source

d’une multitude de difficultés ........................................................................................... 33

1. La permutation du personnel : une notion jurisprudentielle à la base de tout

reclassement .............................................................................................................................. 34

a. La permutabilité du personnel : création jurisprudentielle allant vers un

assouplissement ..................................................................................................................... 34

b. L’extension de la notion de permutabilité du personnel au groupe international .......... 37

2. Un périmètre de reclassement variable, source de difficultés ........................................... 39

a. Une conception du groupe difficile à cerner ................................................................. 39

b. Une recherche de poste de reclassement compliquée à mettre en œuvre ...................... 40

II. Un enchevêtrement de difficultés pour des sociétés déjà en détresse ................................. 44

A. Un employeur souvent impuissant mais seul responsable ......................................... 44

1. Un manque de transparence au sein d’une nébuleuse de filiales ....................................... 44

a. Un enchevêtrement de sociétés rendant difficile la délimitation du groupe .................. 45

b. Un manque de transparence au sein du groupe ajouté au manque de moyens de

contraintes filiales .................................................................................................................. 46

Page 78: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

78

2. Un groupe, mais un seul responsable ................................................................................ 48

a. Un employeur seul responsable ..................................................................................... 48

b. Le coemploi ou la recherche du véritable employeur dans le groupe ........................... 50

α Le coemploi : un moyen efficace mais récemment mis en péril ............................... 50

β Retour au droit civil et à la responsabilité délictuelle ............................................... 54

B. Le projet de loi Macron : vers une simplification ? ................................................... 57

1. Le reclassement à l’étranger : une future initiative du salarié ........................................... 57

a. Des modalités de propositions de reclassement complexes .......................................... 57

b. Quels changements pour demain ? ................................................................................ 60

2. Un contrôle cantonné aux ressources de l’entreprise ........................................................ 61

a. L’état actuel du contrôle ................................................................................................ 61

b. Demain : un contrôle apprécié selon les moyens de l’entreprise ................................... 63

CONCLUSION .................................................................................................................................... 65

BIBLIOGRAPHIE .............................................................................................................................. 67

TABLE DES MATIERES ...............................................................................………………………76

ANNEXES ............................................................................................................................................ 79

Page 79: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

79

ANNEXES ANNEXE 1 : courrier de notification du licenciement conséquence de difficultés

économiques dans le secteur d’activité du groupe.

PAPIER EN TETE DE LA SOCIETE

Prénom + NOM du salarié

Adresse

A ville, le …………………………..

LETTRE RECOMMANDEE AVEC ACCUSE DE RECEPTION

Madame / Monsieur,

Dans le cadre de la procédure de licenciement pour motif économique engagée au sein de

notre entreprise et consécutivement à la réception par le soussigné le …………………, du bulletin d’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, nous vous rappelons, par

la présente, les motifs nous ayants conduits à souhaiter rompre votre contrat de travail pour motif économique.

Nous avons malheureusement été contraints de prendre cette décision pour les raisons suivantes, ayant conduit à la suppression de votre emploi.

Le délégué du personnel a été consulté, respectivement en date du ………et ……….

conformément aux dispositions légales, au sujet du projet de restructuration que nous

avons initié.

Dans ce cadre, nous vous avons interrogé, par courrier daté du ……………….., sur vos souhaits d’obtenir des propositions de reclassement au sein de notre groupe à l’étranger.

Vous nous avez informé le même jour, ne pas souhaiter obtenir des propositions de

reclassement.

Conformément au courrier qui vous a été remis en main propre le ………………. dernier,

parallèlement au contrat de sécurisation de professionnelle, vous n’êtes pas sans ignorer les graves difficultés économiques auxquelles nous sommes confrontées.

Page 80: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

80

Dans ce contexte, et du fait de l’absence de solutions de reclassement en dépit des

recherches que nous avons effectuées auprès de la commission paritaire territoriale de

l’emploi de notre branche d’acticité et auprès des entreprises exerçant des activités

similaires à la nôtre dans notre secteur, nous avons été contraints de poursuivre le

processus de rupture de votre contrat de travail.

Ainsi, à ce jour la Société doit faire face aux difficultés suivantes :

Une baisse importante du chiffre d’affaires.

Il est constaté, au sein de la société française, depuis plus de ……. ans, une très forte

diminution du chiffre d’affaires, tel que le démontre le tableau suivant :

De plus, selon les dernières situations financières, il apparait qu’à la mi-mai, la perte

d’exploitation est déjà de l’ordre de €. …………..,-.

En effet, les prix d’achat et de vente des rebus d’acier inoxydable ont subi une baisse

considérable.

Ensuite, la forte diminution du prix de revente du nickel (composant essentiel de l’acier

inoxydable) au LME est le deuxième facteur occasionnant la diminution du chiffre d’affaires

et de la marge de la société.

Ainsi, l’augmentation du prix d’achat de la matière première et la diminution du prix de

revente a gravement et durablement impacté les marges, de telle sorte que le résultat

d’exploitation se trouve aujourd’hui fortement obéré.

De plus, aucune augmentation de notre chiffre d’affaires n’est envisageable à court et

moyen terme, au vue de la crise sévissant dans le secteur de l’industrie en Europe à l’heure

actuelle et plus particulièrement dans le secteur de l’automobile, activité nécessitant de

grandes quantités d’acier inoxydables.

L’impossibilité de réaliser de nouveaux investissements en France.

Une convention d’occupation du domaine public a été signée avec …………….. afin

d’aménager le terrain de la société.

Exercic

e

Chiffre

d'affaire

s

Résultat

d'exploitatio

n

Résulta

t net

2010 ……………… ……………… ………………

2011 ……………… ……………… ………………

2012 ……………… ……………… ………........

Page 81: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

81

Toutefois, il s’est avéré que l’investissement requis pour l’exercice de l’activité sur ce terrain

s’élevait à une somme de ……… millions d’euros, alors que la société ne dispose pas d’une

telle somme à cette fin.

Les pénalités de résiliation anticipée de ce contrat s’élèveront à €. ……..,-, qui seront passés

en charge au cours de cet exercice.

En outre, le renouvellement de l’appareil de production nécessiterait quant à lui, dans les

plus brefs délais, un investissement de l’ordre de €. ……………………..,-.

Enfin, la remise en état des locaux actuels, dont la Société voulait en tout état de cause se

défaire en faveur d’un endroit plus approprié à l’activité, impliquerait également un

investissement bien trop important eu égard les capacités de la Société et surtout le constat

actuel du fonctionnement chroniquement gravement déficitaire de l’activité industrielle.

Des difficultés présentes au niveau du groupe :

Pour des raisons partiellement identiques à celles existant en France, l’ensemble du secteur

d’activité du groupe, consistant en l’achat revente de rebus d’acier inoxydable, est dans

une situation extrêmement difficile.

Ainsi, l’Europe produit malheureusement une masse trop importante de rebus d’acier

inoxydable qu’elle n’est pas capable de réabsorber faute de besoins suffisants.

En vue de remédier à cette situation de blocage, le groupe tente depuis plusieurs années

de percer le marché asiatique sur lequel il n’est pas encore bien implanté.

Toutefois, l’industrie asiatique ne peut produire qu’à partir d’acier inoxydable pur, non

retraité à partir de rebus. Les usines sont désuètes et ne peuvent utiliser que des matériaux

d’une grande pureté. Ainsi, les pays asiatiques achètent directement aux mines leur acier

inoxydable et font très peu appel aux entreprises telles que les nôtres.

Par ailleurs, sur le territoire européen, en raison de l’extraordinaire chute du prix du nickel,

les vendeurs de rebus rechignent à écouler leurs rebus dans l’attente d’une nouvelle

augmentation du prix de la matière première, réduisant d’autant les capacités d’achats des

entités du groupe, et par voie de conséquence de revente.

Enfin, au cours des trois dernières années et au sein de l’ensemble du groupe sur ce secteur

d’activité, les marges brutes ont chuté de près de …..%.

C’est dans ce contexte que l’entreprise, en raison des difficultés économiques rencontrées

par l’ensemble du secteur d’activité du groupe, est tenue de procéder à un licenciement

économique à caractère collectif.

De ce fait, l’ensemble de l’activité industrielle sera définitivement suspendue et ne sera

préservée qu’une activité commerciale.

Par voie de conséquence, notre entreprise est contrainte de procéder à la suppression de

l’ensemble des effectifs non exclusivement consacrés à l’activité commerciale.

Page 82: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

82

A toutes fins utiles, nous vous avons informé qu’après recherche et analyses d’éventuels

postes disponibles au sein de notre entreprise, aucune offre ne peut à ce jour vous être

proposée dans le cadre d’un reclassement même après une période d’adaptation ou de

formation.

Pour ces motifs, nous n’avions ainsi d’autre alternative que de poursuivre le processus de

rupture de votre contrat de travail engagé.

De ce fait, la possibilité vous a été offerte de bénéficier du contrat de sécurisation

professionnelle, dont la notice d’information et le bulletin d’acceptation vous ont été proposé le ……………….

Vous avez accepté d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle en date du

………………, dans le délai de vingt et un jours qui vous était imparti.

De ce fait, conformément à l’article L 1233-67 du Code du travail, votre contrat sera rompu

avec effet du 16 août 2013.

Durant l’année qui suivra la fin de votre contrat de travail, vous bénéficierez d’une priorité

de réembauchage dans notre entreprise, à condition de nous avoir informé dans le délai

d’un an suivant la fin de votre contrat de votre désir de faire valoir cette priorité.

Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et également ceux qui

correspondraient à une nouvelle qualification acquise après la rupture (sous réserve

cependant que vous nous la fassiez connaître).

En outre, en application de l'article L. 1235-7 du Code du travail, les actions en contestation

de la régularité ou de la validité de la rupture doivent être engagées dans le délai de douze

mois à compter de la notification de la présente.

Nous vous informons enfin, qu’avec effet de ce jour, et en application de l’article 14 de

l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 modifié par l’avenant n°3 du

18 mai 2009, vous pouvez conserver, sous réserve de prise en charge par le régime

d’assurance chômage, le bénéfice des régimes de prévoyance et de couverture des frais

médicaux éventuellement en vigueur au sein de notre entreprise.

Dans ce cadre, il vous appartient de faire parvenir au plus vite à la société, le justificatif de

sa prise en charge par le régime d’assurance chômage.

Par ailleurs, en application de l’article L. 911-8 du Code de la Sécurité Sociale, vous

bénéficierez à titre gratuit du maintien des garanties liées aux risques portant atteinte à

l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, au risque décès ou aux risques

d’incapacité de travail ou d’invalidité éventuellement prévu par le régime de prévoyance de

l’entreprise, dans la limite de 12 mois, sous réserve de justifier auprès de l’organisme

assureur des conditions requises.

Page 83: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

83

A l’expiration de votre contrat de travail, nous tiendrons à votre disposition le reçu pour

solde de tout compte ainsi que votre certificat de travail et l’attestation destinée au Pôle

Emploi.

Nous vous prions d’agréer, Madame / Monsieur, l’expression de nos sentiments distingués.

POUR LA SOCIETE

……………..

Page 84: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

84

ANNEXE 2 : courrier de notification du licenciement conséquence d’une restructuration

de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde du secteur d’activité du groupe.

PAPIER EN TETE DE LA SOCIETE

Prénom + NOM du salarié

Adresse

A ville, le …………….

LETTRE RECOMMANDEE AVEC ACCUSE DE RECEPTION

Madame / Monsieur,

Dans le cadre de la procédure de licenciement pour motif économique engagée au sein de notre entreprise et consécutivement à la réception par le soussigné le …………………, du

bulletin d’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, nous vous rappelons, par la présente, les motifs nous ayants conduits à souhaiter rompre votre contrat de travail

pour motif économique.

Nous avons malheureusement été contraints de prendre cette décision pour les raisons

suivantes, ayant conduit à la suppression de votre emploi.

Dans ce cadre, nous vous avons interrogé, par courrier daté du …………………, sur vos

souhaits d’obtenir des propositions de reclassement au sein de notre groupe à l’étranger.

Vous nous avez informé le même jour, ne pas souhaiter obtenir des propositions de reclassement.

Conformément au courrier qui vous a été remis en main propre le …………. dernier,

parallèlement au contrat de sécurisation de professionnelle, vous n’êtes pas sans ignorer

la réorganisation en cours dans notre société rendue nécessaire afin de sauvegarder de la compétitivité du secteur d’activité du groupe auquel appartient notre société.

Dans ce contexte, et du fait de l’absence de solutions de reclassement en dépit des

recherches que nous avons effectuées auprès de la commission paritaire territoriale de

l’emploi de notre branche d’activité, nous avons été contraints de poursuivre le processus de rupture de votre contrat de travail.

En effet, notre secteur d’activité a connu depuis plusieurs années un ralentissement

notable des ventes et par conséquence une baisse de son chiffre d’affaires. Afin

Page 85: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

85

de remédier à cette situation et de prévenir les difficultés économiques à venir, plusieurs

mesures ont été prises que nous vous détaillerons ci-après :

Aussi, le poste de responsable de site que vous occupez depuis le …………., était tout

d’abord nécessaire afin d’assurer le rôle de pivot de coordination entre la société et, d’une part, les autres entités et service du groupe, d’autre part les acteurs institutionnels, tels

que les banques, notre cabinet comptable…

Or depuis quelques mois, la société n’étant plus endettée, les rapports avec les banquiers

ne nécessitent plus la présence d’un interlocuteur dédié dans ce domaine.

Par ailleurs, consécutivement à une profonde réorganisation, notre société n’externalise plus sa comptabilité. Notre groupe ayant renforcé son service comptable interne en

…………., il n’est plus nécessaire d’assurer l’intermédiaire entre des comptables extérieurs

et la société.

Ensuite, vos fonctions secondaires consistaient au développement de l’activité commerciale et le management de notre équipe commerciale. Ladite activité commerciale intervenait

alors en soutien de l’activité commerciale organisée par la Société mère.

Or, ladite activité s’étant fortement développée et structurée, celle-ci ne nécessite plus d’un

tel soutien, les besoins essentiels étant assurés par notre Société mère.

Il n’y a désormais plus de personnes extérieures au groupe exerçant de fonction commerciale, ainsi le responsable de site n’a plus à assurer la gestion desdits commerciaux.

De surcroit, s’il devait, à l’avenir, y avoir à nouveau des commerciaux externes au groupe, c’est la Société mère qui se chargerait alors de la supervision de ceux-ci.

Pour les raisons ci-dessus évoquées, la suppression de votre poste étant envisagée, nous

tenions à vous informer des motifs ayant conduit à une telle issue.

Tel que vous le savez, après recherche et analyses d’éventuels postes disponibles, aucun ne peut à ce jour vous être proposé dans le cadre d’un reclassement même après une

période d’adaptation ou de formation au sein de notre société.

En outre, vous n’avez pas souhaité obtenir des propositions de reclassement à l’étranger.

Pour ces motifs, nous n’avions ainsi d’autre alternative que de poursuivre le processus de

rupture de votre contrat de travail engagé.

De ce fait, la possibilité vous a été offerte de bénéficier du contrat de sécurisation

professionnelle, dont la notice d’information et le bulletin d’acceptation vous ont été proposé le ………………..

Vous avez accepté d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle en date du

……………………., dans le délai de vingt et un jours qui vous était imparti.

De ce fait, conformément à l’article L 1233-67 du Code du travail, votre contrat sera rompu

avec effet du ………………………..

Durant l’année qui suivra la fin de votre contrat de travail, vous bénéficierez d’une priorité

de réembauchage dans notre entreprise, à condition de nous avoir informé dans le délai d’un an suivant la fin de votre contrat de votre désir de faire valoir cette priorité.

Page 86: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

86

Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et également ceux qui

correspondraient à une nouvelle qualification acquise après la rupture (sous réserve

cependant que vous nous la fassiez connaître).

En outre, en application de l'article L. 1235-7 du Code du travail, les actions en contestation

de la régularité ou de la validité de la rupture doivent être engagées dans le délai de douze mois à compter de la notification de la présente.

Nous vous informons enfin, qu’avec effet de ce jour, et en application de l’article 14 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 modifié par l’avenant n°3 du

18 mai 2009, vous pouvez conserver, sous réserve de prise en charge par le régime d’assurance chômage, le bénéfice des régimes de prévoyance et de couverture des frais

médicaux éventuellement en vigueur au sein de notre entreprise.

Dans ce cadre, il vous appartient de faire parvenir au plus vite à la société, le justificatif de

sa prise en charge par le régime d’assurance chômage.

Par ailleurs, en application de l’article L. 911-8 du Code de la Sécurité Sociale, vous

bénéficierez à titre gratuit du maintien des garanties liées aux risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, au risque décès ou aux risques

d’incapacité de travail ou d’invalidité éventuellement prévu par le régime de prévoyance de

l’entreprise, dans la limite de 12 mois, sous réserve de justifier auprès de l’organisme assureur des conditions requises.

A l’expiration de votre contrat de travail, nous tiendrons à votre disposition le reçu pour

solde de tout compte ainsi que votre certificat de travail et l’attestation destinée au Pôle Emploi.

Nous vous prions d’agréer, Madame / Monsieur, l’expression de nos sentiments distingués.

POUR LA SOCIETE

…………….

Page 87: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

87

ANNEXE 3 : Lettre accompagnant le questionnaire de reclassement

PAPIER EN TETE

Madame/Monsieur

Adresse

A ville, le ………………..

PAR LETTRE RECOMMANDEE AR – LETTRE REMISE EN MAIN PROPRE CONTRE DECHARGE

Madame, Monsieur,

Dans le cadre du projet de licenciement pour motif économique actuellement en cours, nous avons le

regret de vous informer que nous sommes conduits à envisager la suppression de votre poste.

Le groupe auquel appartient notre société est implanté dans les pays suivants : la Belgique, le Brésil, la

Chine, l’Allemagne, l’Estonie, la Grande-Bretagne, la Hollande, l’Italie, la Lettonie, les Philippines, la

Pologne, la Suède, la Suisse, l’Espagne, l’Afrique du Sud, la Tchéquie, les USA, le Rwanda, l’Arménie.

En conséquence, conformément à l’article L 1233-4-1 du Code du travail, nous vous prions de nous faire

savoir par écrit si vous accepteriez de recevoir des offres de reclassement dans ces pays.

Dans l’affirmative nous vous remercions de nous indiquer très précisément sous quelles conditions et

sous quelles restrictions éventuelles, notamment en matière de localisation, de conditions de travail

(horaires de travail, congés, règles de santé, sécurité, etc …) et de rémunération (niveau minimum de

rémunération), vous seriez disposé à accepter un poste dans ces pays.

En vertu de l’article précité, vous disposer de 6 jours ouvrables, courant à compter de la réception de

la présente lettre, pour nous informer de votre accord. L’absence de réponse dans ce délai vaudra refus

de votre part de recevoir des offres de reclassement dans les pays mentionnés ci-dessus.

Si vous souhaitez bénéficier d’une proposition de reclassement, il conviendra de nous communiquer,

avant l’expiration du délai précité, votre curriculum vitae à jour afin de pouvoir nous assurer de la

compatibilité entre les éventuels postes disponibles et votre formation, votre expérience et votre

maitrise de la langue au pays.

Nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, l’assurance de notre considération distinguée.

Pour la société

……………

Page 88: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

88

ANNEXE 4 : Questionnaire de reclassement à l’étranger

PAPIER EN TETE

Prénom + NOM du salarié

Adresse

A ville, le ………………..

PAR LETTRE RECOMMANDEE AR

OU LETTRE REMISE EN MAIN PROPRE CONTRE DECHARGE

Objet : Questionnaire relatif au reclassement à l’étranger

Madame, Monsieur,

En application de l’article L. 1233-4-1 du code du travail, nous vous remercions de bien vouloir nous

communiquer les renseignements suivants :

1/ Accepteriez-vous de recevoir des offres de reclassements à l’étranger au sein du groupe ?

OUI

NON

Si OUI, il est impératif de remettre au soussigné un Curriculum Vitae à jour en même temps que le présent formulaire, précisant notamment les langues étrangères parlées par le

salarié.

2/ Si oui, pour quelle(s) implantation(s) seriez-vous prêt à étudier une offre de reclassement ?

A ce titre, vous trouverez ci-après la liste des implantations du groupe :

PAYS VILLE OUI NON

Belgique

Brésil

Chine

Allemagne

Estonie

Grande-

Bretagne

Hollande

Italie

Lettonie

Page 89: LE GROUPE, FACTEUR DE COMPLEXITE DANS LE CADRE

89

Philippines

Pologne

Suède

Suisse

Espagne

Afrique du Sud

Tchèquie

USA

Arménie

3/ Quelle fourchette de rémunération seriez vous prêt à accepter (en brut annuel) ?

Entre ……………….. € minimum et ………………..€ maximum (en brut annuel).

4/ Avez-vous des restrictions sur les caractéristiques des emplois qui pourraient vous être proposés dans

le cadre des offres de reclassement ?

…………………………………………………………………………………………………………………………………………………

…………………………………………………………………………………………………………………………………………………

…………………….………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

………………………………………….…………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

5/ Avez-vous d’autres informations que vous souhaiteriez porter à notre connaissance ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

…………………….………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

………………………………………….………………………………………………………………………………………………………

…………………………………………………………………………………………………………………………………………………

Nous vous remercions de bien vouloir noter :

- que des offres de reclassement à l’étranger ne vous seront adressées que si vous avez accepté d’en

recevoir, compte tenu des restrictions que vous avez pu exprimer dans le présent questionnaire ; - que vous resterez libre de refuser ces offres ;

- que vous serez informé, le cas échéant, de l’absence d’offres disponibles correspondant à celles que vous avez accepté de recevoir.

Vous disposez d’un délai de 6 jours ouvrables à compter de la réception du présent écrit, pour

remettre ce questionnaire accompagné le cas échéant d’un curriculum vitae à jour au soussigné.

POUR LA SOCIETE

…………..

Votre absence de réponse à ce questionnaire, dans ce même délai, vaut refus de recevoir des

offres de reclassement à l’étranger.