LE DOSSIER Le rôle des citoyens dans la Transition · Pour les acteurs financiers et les banques,...

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pour que l’argent relie les hommes Ce numéro est aussi téléchargeable sur le site : www.lanef.com Le magazine coopératif de la Nef Hiver 2017 numéro 7 La finance participative par la Nef 07 En chemin vers la banque éthique : point d’étape 10 La Nef et Terre de Liens, une combinaison gagnante 15 Comment choisir sa banque avec les Amis de la Terre 16 LE DOSSIER Le rôle des citoyens dans la Transition

Transcript of LE DOSSIER Le rôle des citoyens dans la Transition · Pour les acteurs financiers et les banques,...

pour que l’argent relie les hommes

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La finance participative par la Nef➔ 07

En chemin vers la banque éthique : point d’étape➔ 10

La Nef et Terre de Liens, une combinaison gagnante➔ 15

Comment choisir sa banque avec les Amis de la Terre➔ 16

LE DOSSIER

Le rôle des citoyens dans la Transition

éditoe sentiment qui prédomine à l’heure de ces lignes est que le temps s’accélère pour la Nef.

Faire voguer le bateau bon train, poursuivre l’élargissement de nos activités, modifier en profondeur notre organisation, réajuster les relations avec les partenaires, en interaction avec nos sociétaires et

toutes les parties prenantes... Ouf !L’essoufflement menace. C’est ce que me disent les “marins” du bateau, c’est ce dont témoignent les comptes 2016, à nouveau en pertes. Alors, se mettre à marcher sur le bas-côté en pensant au bon vieux temps, réputé plus facile ? Où trouver le bon rythme, celui qui permet de courir longtemps ? C’est la voie dans laquelle nous sommes engagés aujourd’hui. Consolider les premiers attributs de l’offre bancaire pour lesquels nous avons été agréés (livret, compte à vue professionnel), et se redire ce qui est essentiel pour le projet Nef.Œuvrer pour une circulation consciente, transparente de l’argent. Œuvrer pour que l’épargne qui nous est confiée finance un monde plus respectueux de l’homme et de la planète. Accompagner la transition, et confronter en permanence nos actes à cet essentiel.Pour cela il nous faut du souffle. Le souffle qui permet de retrouver le sens du temps, sans se laisser envahir par l’urgence. Le souffle démocratique, auquel nous appelle Patrick Viveret dans notre cahier central, vital pour ne pas perdre le fil de notre projet. Le souffle financier, qui prend le nom de parts sociales pour la Nef, tout aussi vital, et nous vous expliquons par ailleurs pourquoi nous avons besoin de votre soutien pour continuer à respirer.Que les quelques gouttes de l’essence Nef qui constituent ce numéro vous accompagnent lors de cette transition annuelle et qu’elles nous portent toutes et tous vers une année 2017 pleine de… souffle.

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Fil d’argent n° 7 / Hiver 2017 – Édité par la Société financière de la Nef Immeuble Woopa - 8 avenue des Canuts - CS 60032 - 69517 Vaulx-en-Velin Cedex / [email protected] / www.lanef.comResponsable de publication : Amandine PlatetOnt participé à ce numéro : Amandine Albizzati, Marie Brandt, Ivan Chaleil, Pascal Cottereau, Denis Dementhon, Ophélie Demond, Stéphanie Dubois de Prisque, Marc Favier, Jean-Philippe Gönenç, Iés, Hervé Kempf, Charles Lesage, Léo Miranda, Frederic Moukarim, Marion Ozanne-Breda, Anne-Charlotte Pesce, Lucie Pinson, Olivier Torrente, Pierre-Emmanuel Valentin, Varinia Vi-nay-Forga, Patrick Viveret, Laura Winn, Jean-Pierre Worms.Crédits photos : la Nef (sauf mention contraire). Couverture : © PeopleImages (Istock), droits réservés – Création graphique : Scop Crescend’O – Mise en page : CIA – Impression : Rivet Presse Édition. Imprimé avec des encres à base végétale, support papier 100 % recyclé – NFA-04 – Dépôt légal Février 2017 – ISSN 2271-5207.

Pierre-Emmanuel Valentin Président du Directoire

COURRIER DES SOCIÉTAIRESEn toute transparence _______________________________ p. 3

ÉCONOMIEUne finance au service de l’avenir, par France Active _______ p. 4

La chronique du Comité d’éthique _____________________ p. 5

Vues d’ailleurs : la Merkur ____________________________ p. 5

ACTUALITÉS DE LA NEFDes projets et des prêts ______________________________ p. 6

Zoom sur… La finance participative par la Nef ____________ p. 7

Échos du terrain : un séminaire national convivial et riche en échanges ________________________________ p. 8

Assemblée Générale : retenez la date ! _________________ p. 8

La parole à… Ivan Chaleil, Directeur du Réseau Professionnels et Entreprises _________ p. 9

Temps fort : En chemin vers la banque éthique : point d'étape _____________________________________ p. 10

LE DOSSIERLe rôle des citoyens dans la Transition _________________ p. 11

NOS PARTENAIRESReporterre, le choix économique de l’indépendance et de l’accès libre __________________________________ p. 14

2è Rencontre nationale des financeurs solidaires avec IéS _________________________________________ p. 14

La Nef et Terre de Liens, une combinaison gagnante ______ p. 15

SOLUTIONS ALTERNATIVESL’initiative : comment choisir sa banque, avec Les Amis de la Terre ____________________________ p. 16

En route vers la Transition : la transition citoyenne est plus que dans l’air du temps ! _____________________ p. 17

DÉCOUVERTEA lire… Les Tisserands d’Abdennour Bidar ______________ p. 18

A voir… Qu’est-ce qu’on attend ? de Marie-Monique Robin __ p. 18

L’invité… Jean-Pierre Worms, sociologue engagé _________ p. 19

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3numéro 7 I Hiver 2017

Courrier des sociétaires

En toute transparence

ENVOYEZ VOS QUESTIONS OU VOS REMARQUES PAR E-MAIL [email protected] OU PAR COURRIER À L’ADRESSE SUIVANTE : La Nef, immeuble Woopa 8 avenue des Canuts, CS 60032 69517 Vaulx-en-Velin Cedex

Information

Les termes “banque éthique” et/ou “banque” dans l’ensemble des articles et des communications de la Nef, sont à comprendre comme un concept définissant une manière de faire de la banque, et non comme une définition actuelle de notre établissement. La Nef est un établissement de crédit spécialisé habilité à recevoir des fonds du public.

Question

Comment

la Nef peut-elle

répondre aux

besoins des

Monnaies Locales

Complémentaires ?

Éclairage

Vous souhaitez réagir à un article publié dans Fil d’argent ? Partager une réflexion ? Vous aimeriez avoir plus de précisions sur le fonctionnement et/ou l’activité de la Nef ?

La Nef est un partenaire historique des MLC (Monnaies Locales Complémentaires). En effet, elles partagent les mêmes valeurs, les mêmes orientations pour la société de demain, et le projet de faire prendre conscience de l’impact de l’utilisation de l’argent. En pratique, de nombreux sociétaires Nef utilisent et/ou soutiennent des MLC et la Nef héberge, à travers ses produits, de nombreux fonds de garantie des monnaies complémentaires.

La Nef fait néanmoins face à plusieurs limites pour travailler avec les MLC.

Notre offre de compte-courant pour les professionnels et associations n’est pas encore complète (carte bancaire notamment) et notre agrément ne nous permet pas d’offrir de chéquiers. Notre maillage territorial est restreint, ce qui nous empêche d’être un guichet pour échanger les billets papiers. Enfin, nous priorisons notre projet de transformation en Banque qui doit servir le public le plus large possible.

Malgré ces contraintes, la Nef permet de placer les fonds de garantie des MLC sur les produits d’épargne les plus cohérents avec leurs objectifs

et leurs valeurs (transparence totale, impacts positifs, agrément Finansol, seul établissement financier agréé Entreprise Solidaire, etc.), à travers le Livret Nef OSBL et le Compte à Terme (CAT) Nef.

En 2017, la Nef permettra également aux personnes morales de souscrire des Comptes à terme “Prêt de chez moi”, à capital garanti. À travers cette plateforme de finance participative, les MLC pourront flécher une partie du fonds de garantie vers des projets de leur territoire : un circuit-court intégral ! P. 18

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Économie

Une finance au service de l’avenirConfidentielle ou marginale il y a quelques années, l’économie sociale et solidaire se développe, mute et apparaît au grand jour comme une composante à part entière de l’économie.

Denis Dementhon, Directeur général de France Active

D’un côté, l’économie sociale historique subit des trans-formations importantes, avec des mouvements de fusions

et de rapprochements d’associations qui les amènent à constituer de véritables groupes, très présents dans l’action sociale, la gestion d’établissements, l’insertion sociale et professionnelle. Ces groupes ont besoin de financer leur développement et de renforcer leur structure financière.

Parallèlement, l’entrepreneuriat est en pleine effervescence. De nouveaux entrepreneurs, souvent jeunes et bien formés, se lancent dans l’aventure de la création d’entreprise avec une dose bienvenue d’idéalisme.Entrepreneurs engagés, ils veulent que leur projet ait des impacts positifs sur la société, l’environnement, en même temps qu’il crée de la richesse. Depuis plus de 20 ans, le groupe ATF par exemple, emmené par Sylvain Couthier, favorise l’employabilité, la professionnalisation et l’insertion des travailleurs en situation de handicap. Depuis 2008, 45 ont été embauchés et 88 emplois durables créés. Ces entreprises cherchent

des financements en démarrage puis pour leurs développements, ont besoin de crédit, d’apport en capital, pour investir, constituer leur fonds de roulement et conquérir de nouveaux marchés. Pionnier de la finance solidaire, France Active, par l’intermédiaire de sa société d’investissement (la SIFA) collecte de l’épargne salariale et propose des financements solidaires adaptés aux besoins des entrepreneurs allant de 1 000 à 1 million d’euros.

Pour les acteurs financiers et les banques, cette économie solidaire est aujourd’hui un marché. Toutes les banques et leurs filiales spécialisées cherchent à attirer ces entrepreneurs et à développer une offre de service combinant financement, accompagnement, mise à disposition de locaux ou d’espaces de travail. Il reste du chemin à parcourir pour que les acteurs de la finance classique abandonnent certains réflexes et comprennent que la recherche de profit maximal n’est pas leur moteur. Ne boudons pas notre plaisir, la dynamique est là… Parmi eux, certains acteurs ont fait le pari de l’éthique de longue date.

C’est le cas de la Nef, partenaire durable de France Active, grâce à un ADN commun et des savoir-faire complémentaires. Les citoyens aussi changent leur rapport à l’argent. L’épargne solidaire existe depuis plus de 20 ans en France, mais la crise financière de 2008-2009 lui a donné un nouveau souffle. Le volume d’épargne orientée vers des supports solidaires est en augmentation constante, pour atteindre près de 7 milliards d’euros. C’est peu au regard des 3 000 milliards d’euros d’épargne des Français, mais ce n’est plus anecdotique.

De nouvelles pratiques viennent également

bousculer et renouveler l’idée

d’une finance au service de l’avenir.

L’explosion de la finance participative nous confirme que les citoyens veulent décider eux-mêmes de l’utilisation de leur argent. Des entrepreneurs engagés se regroupent localement pour créer des pôles territoriaux de coopération économiques et veulent se doter eux-mêmes d’outils d’investissements.

Après le changement d’échelle, la désinter-médiation et les circuits courts sont sans doute le nouvel horizon de la finance solidaire.

EN SAVOIR PLUS : www.franceactive.org

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ATF Gaia : l’une des 7 000 entreprises financées par France Active chaque année

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Économie

La chronique du Comité d’éthique

100 % éthique ? Nous sommes souvent interpellés sur la question des “deux tiers”, sur l’équilibre à trouver entre l’argent prêté et l’argent placé, sur ce que certains appellent notre “part éthique”. Est-ce que la question se pose en ces termes ? Pouvons-nous avoir une part éthique et une part qui ne le serait pas ? Qu’est-ce que le 100 % éthique ?

Laura Winn pour le Comité d’éthique

Tous les prêts octroyés par la Nef sont publiés. Cette transparence à 100 % est l’un des fondements de notre

coopérative. Il reste une part de nos liquidités – c’est la part la plus importante encore aujourd’hui – qui est placée. Ces gouttes d’eau qui transitent par le clair torrent de montagne qu’est la Nef rejoignent l’océan avec ses profondeurs obscures. La vitesse des courants dans cet océan fait qu’on ne peut suivre toutes les transactions ; cet argent-là relie plus les ordinateurs qu’il ne relie les Hommes.

Comme la Nef, Merkur a été créée sous l’inspiration conjointe de la banque éthique allemande GLS, de la pensée sociale de Rudolf Steiner et de

mouvements alternatifs de la fin des années 1970. Comme la Nef, l’association Merkur a dû se transformer en coopérative bancaire au milieu des années 1980, à la grande différence près qu’elle a pu directement devenir une banque de plein exercice. Comme la Nef, Merkur a collecté et prêté des sommes de plus en plus importantes au cours des années 1990 et 2000, mais c’est surtout son influence sur la société qui a été

Pour autant, est-ce notre éthique, – notre démarche – serait moins entière ? L’argent circule, comme l’eau c’est un flux.

Notre éthique est une dynamique de vie, faite de responsabilités

individuelles et collectives qui se rejoignent.

remarquable : le meilleur exemple en est probablement le financement des premières éoliennes citoyennes au Danemark, devenues depuis un fleuron national entrainant avec lui une transition vers une énergie espérée à 100 % renouvelable en 2050.

Merkur a souffert de la crise internationale bancaire de 2008, dont elle n’était pourtant pas responsable… Mal pour un bien, cela l’a amenée à se diversifier, à renforcer ses bases, pour connaître désormais une nouvelle phase de fort développement. Merkur veut, avant toute chose, permettre la liberté individuelle (projets éducatifs

Nous avons l’obligation de placer une part de nos liquidités ; notre responsabilité réside dans le respect du cadre règlementaire. Nous observons une corrélation intéressante entre épargne et prêts, avec un décalage dans le temps de plusieurs années ; notre éthique ne sera-t-elle pas aussi celle du temps long et de l’accompagnement de la Transition dans la durée ?

Continuons à faire vivre nos choix et nos responsabilités à travers ces questionnements.

et culturels), liberté s’inscrivant dans une responsabilité sociétale à long terme (projets sociaux et environnementaux).

Merkur agit localement, nationalement et internationalement, notamment au travers du réseau “Global Alliance for Banking on Values”.

EN SAVOIR PLUS :www.merkur.dk om-merkur/english/ (en anglais)

Vues d’ailleurs

La MerkurLa sirène jumelle de la Nef, danoise et libertaireLes similitudes entre la Nef et la banque éthique coopérative danoise Merkur sont troublantes, malgré des contextes bancaire et culturel très différents.

Marc Favier Coordinateur de projet – La Merkur

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Actualités de la Nef

Des projets et des prêtsLa 7è édition des Grands Prix de la finance solidaire, organisée par l’association Finansol et le journal Le Monde, a mis à l’honneur de belles initiatives de transition écologique et sociale. Acteur majeur du financement solidaire en France, la Nef a eu le plaisir de voir cinq projets ayant bénéficié de son financement, nominés et récompensés dans différentes catégories.

NOMINÉ PRIX

Coup de cœur du public

Coopérative Pointcarré 20 bis rue Gabriel Péri, 93200 Saint-Denis www.pointcarre.coop Ouverture d’un tiers-lieu de travail, de production et de vente

La coopérative Pointcarré réunit un joyeux pêle-mêle d’artisans, d’habitants et d’entrepreneurs dans une logique de coopération et de partage des savoir-faire. Ce lieu facilite la production et la commercialisation d’objets artisanaux, attractifs et inventifs. La Nef a été sollicitée pour participer au financement des travaux et aménagements de cet ancien bâtiment, aux côtés du Crédit Coopératif et de France Active.Prêt n°5357 - Montant : 50 000 E - Durée : 54 mois

LAURÉAT DANS LA CATÉGORIE

InnovationsociétaleL’Atelier Paysan

ZA des Papeteries - 38140 Renage www.latelierpaysan.org Développement d’une coopérative de formation à l’autoconstruction

Le collectif Atelier Paysan développe une démarche innovante de réappropriation de savoirs paysans et d’autonomisation dans le domaine des agroéquipements adaptés à l’agriculture biologique. Ils mettent à disposition des plans, des conseils et des formations pour autoconstruire des machines et apprendre à les utiliser. La Nef a été sollicitée aux côtés de la MCAE Isère Active pour le financement de son développement. Prêt n°5009 - Montant : 40 000 E - Durée : 84 mois

Jean Bouteille Port Fluvial de Lille - 59 000 Lille www.jeanbouteille.fr Développement d’une entreprise de vente de liquide en vrac dans des bouteilles consignées.

Jean Bouteille associe deux modes de consommation écologiques : le vrac et la bouteille consignée. Il remet la consigne au goût du jour en vendant des produits liquides en vrac (huiles, vins, vinaigres, etc.) et fournit un parc de bouteilles propres. En 2015, le réemploi des bouteilles de verres a évité à 20 000 bouteilles de finir à la poubelle. La Nef est sollicitée aux côtés de Nord Actif, les Cigales et LMI pour financer le développement de l’activité.Prêt n° 4832 – Montant : 15 000 E –

Durée : 60 mois

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NOMINÉ DANS LA CATÉGORIE

ActivitésécologiquesCombrailles Durables

SCIC - SA, le Bourg, 63410 Loubeyrat www.combraillesdurables.fr Création d’une coopérative d’énergie citoyenne dans le Puy-de-Dôme

L’association Combrailles Durables implique les collectivités, les citoyens, les associations et les entreprises du territoire pour mener un projet de transformation locale. Son objectif d’efficacité énergétique dans une démarche de sobriété passe par la production d’énergie renouvelable locale. Elle a sollicité la Nef, en complément de France Active, pour financer le matériel et l’installation de son premier projet : l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit de l’école primaire de la commune de Loubeyrat.Prêt n° 3528 - Montant : 18 620 E - Durée : 90 mois

LAURÉAT DU PRIX

Coup de cœur du public

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Actualités de la Nef

Une équipe est désormais dédiée à l’accom-pagnement de chacun des projets qui les sollicite.

Zeste est la plateforme de dons de la Nef. Après 18 mois d’activité, elle a collecté plus de 785 000 € pour le compte de 85 projets typiques de l’écosystème propre à la Nef : documentaires engagés, fermes paysannes, tiers-lieux, supermarchés coopératifs et autres initiatives à l’avant-garde de la transition écologique et sociale. Parce qu’il agit comme de l’argent libéré des circuits économiques, le don est une ressource essentielle pour les initiatives qui n’ont pas une vocation marchande (une grande partie des associations) ou qui sont encore en germe (en amont de la création d’entreprise).

Prêt de chez moi est la plateforme de prêt solidaire de la Nef. Expérimentée avec succès il y a 3 ans en région Rhône-Alpes, elle a été enrichie et simplifiée en 2016. Chacun peut désormais flécher son épargne, non rémunérée mais garantie (ouverture d’un compte à terme dédié à partir de 250 € et exclusivement en ligne) directement vers le projet de son choix – lequel bénéficie d’un prêt à taux zéro.

Zoom sur…

La finance participative par la NefLe financement participatif est à la mode et c’est une bonne chose. La crise financière a contribué à ce succès et à l’éclosion ces dernières années de plateformes Internet telles KissKissBankBank, Ulule et autres (on en recense 150 aujourd’hui). Ces acteurs ont intelligemment exploité le potentiel du “digital” pour simplifier – et par là-même démocratiser – le financement désintermédié (don, prêt, investissement en capital). Depuis, l’idée a fait son chemin : un citoyen sur 30 a déjà soutenu un projet sur une plateforme en ligne.

Jean-Philippe Gönenç Responsable Finance Participative

Le financement participatif permet à chacun de redevenir acteur d’un circuit qui nous échappe encore trop souvent.

Pour autant, il ne peut avoir réponse à tous les maux de la finance moderne. Quid de la sélection des projets ? Les plateformes généralistes ne se prononcent pas sur l’impact écologique ou social de ces derniers, mais sur leur capacité à toucher le plus grand nombre – ce qui favorise les projets ayant déjà le plus de ressources (financières, communicationnelles, etc.). Quid de la solidarité, et notamment de la mutualisation des risques ? On ne peut faire porter à quelques-uns les risques inhérents aux projets qui in fine feront le bien de tous. Le soutien en direct ne doit pas occulter la nécessité de recourir à des acteurs intermédiaires qui évaluent le risque et le mutualisent autour d’une communauté d’épargnants, sans quoi seuls les projets innovants les plus rentables verront le jour.

Ces enjeux pris en compte, la Nef

a construit patiemment une offre de financement

participatif qui lui ressemble autour de

deux plateformes : Zeste et Prêt de chez moi.

La Nef intervient pour évaluer les risques des projets mis en ligne et pour gérer la relation entre épargnants et emprunteurs pendant toute la durée de vie du prêt. Cette offre est particulièrement adaptée aux projets pour lesquels l’ancrage autour d’une communauté d’acteurs locaux et citoyens est essentiel.

EN SAVOIR PLUS :www.zeste.coop [email protected] [email protected]

785 000 €collectés

11 800donateurs

85projets soutenus

Zeste au 31/12/2016

PRÊTMOI

DE CHEZ

POUR SUIVRE NOS ACTUALITÉS, INSCRIVEZ-VOUS À NOS NEWSLETTERS SUR Zeste.coop ET Pretdechezmoi.coop

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Actualités de la Nef

RETROUVEZ LES COORDONNÉES DU GROUPE LOCAL PROCHE DE CHEZ VOUS SUR www.lanef.com > rubrique Vie coopérative

Assemblée Générale : retenez la date !L’ Assemblée Générale statuant sur l’activité et les comptes 2016 aura lieu le 20 mai 2017 à Marseille (13).

Échos du terrain

Vie coopérative : un séminaire national convivial et riche en échanges !Dans une ambiance studieuse et conviviale, 25 salariés et membres des instances se sont mobilisés les 14 et 15 octobre 2016 pour accueillir au siège de la Nef 35 sociétaires actifs venus de toute la France. Au menu : visite de la délégation des particuliers, stands d’information, échanges “en direct” avec les membres du Conseil de Surveillance et du Directoire.

Marie Brandt Coordinatrice Nationale

Vie coopérative

Les productions issues de douze ateliers thématiques vont permettre de nourrir les réflexions et les actions concrètes des

équipes et des sociétaires actifs bénévoles. Outils numériques pour favoriser l’intelligence collective entre toutes les parties prenantes de

TÉMOIGNAGES DE PARTICIPANTS

Être sociétaire actif, c’est quoi pour moi ?

Un moyen de continuer à consolider l’éthique de la Nef. Un vrai dialogue entre les salariés, les instances et les sociétaires pour construire la Nef.

Charles, Groupe Local Grand Lyon (69) [email protected]

Participer à un groupe localement pour faire connaître la Nef et donner envie à d’autres de participer à cette belle aventure.

Christine, Groupe Local Val de Drôme (26) [email protected]

Ne pas rester spectatrice, faire sa petite part.

Catherine, Groupe Local Drac-Isère (38) [email protected]

la Coopérative, bonnes pratiques des Groupes Locaux, comment motiver nos sociétaires – personnes morales et physiques à s’impliquer dans le projet de la Nef... Autant de sujets passionnants démontrant la richesse et la vitalité de notre Vie coopérative.

Une modification des statuts de la Nef nécessitera la tenue d’une Assemblée Générale Extraordinaire afin d’obtenir

l’agrément ESUS “Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale” qui, depuis la Loi Hamon sur l’Économie Sociale et Solidaire de juillet 2014, remplace l’agrément “Entreprise Solidaire” dont la Nef bénéficie depuis 2002.Cette AG sera également l’occasion d’échanger avec nos amis d’Énergie Partagée et d’Enercoop PACA dont les AG se tiendront simultanément et au même endroit. Pour préparer cette AG, vous retrouverez dès mi-mars sur notre site internet

le rapport annuel 2016 ainsi que les informations pratiques concernant les Assemblées Locales organisées près de chez vous.

EN SAVOIR PLUS : www.lanef.com, rubrique Vie coopérative

DATES DES ASSEMBLÉES LOCALES :VENDREDI 17 MARS : PARISSAMEDI 18 MARS : RENNESSAMEDI 25 MARS : TOULOUSEVENDREDI 31 MARS : LYON

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Actualités de la Nef

Le fil rouge de la Nef, depuis sa création, au-delà de la recherche d’une circulation plus transparente de l’argent : le crédit, le financement

des entreprises. C’est son cœur de métier : collecter de l’épargne auprès d’un nombre toujours croissant de personnes physiques et morales et utiliser celle-ci pour apporter les fonds nécessaires aux créations, reprises et développements d’entreprises, de professionnels et d’associations de toutes tailles.

Les principes du crédit à la Nef ?• un projet doit être appréhendé autant sous

l’angle de la plus-value sociale, culturelle, et/ou environnementale, que de sa rentabilité économique ;

• la Nef finance des projets, quelles que soient leurs structures juridiques, et sur une fourchette de montants d’intervention très large (de 5 000 € à plusieurs millions d’euros) ;

• La Nef n’agit pas seule sur le territoire, sa petite équipe ne le lui permettrait pas. Elle se développe et appuie les demandes des porteurs de projet au travers des différents

Elle a par ailleurs su y ajouter des innovations ou pratiques alternatives avec, par exemple, la création des cercles de cautions solidaires dans les années 80 (plusieurs dizaines de personnes soutenaient un porteur de projet par l’apport en garantie de petites sommes d’argent) ou avec le développement d’un modèle innovant de finance participative sous forme de prêt aujourd’hui (voir article sur Prêt de chez moi en page 7 de ce Fil d’Argent).

Le crédit à la Nef constitue donc le fil conducteur de l’offre de notre coopérative

auprès de ses sociétaires professionnels.

Et force est de constater que c’est également un produit qui a de l’avenir, puisque le nombre de nouveaux crédits distribués a augmenté de plus de 35 % entre 2015 et 2016 !

Se posent les prémices d’un établissement bancaire différent des autres en France, sous forme associative, s’inspirant d’initiatives étrangères similaires (allemandes notamment) qui émergent à l’époque.

La Nef n’abandonne pas le modèle associatif mais crée la Société Financière, sous forme coopérative, et via un agrément délivré par la Commission Bancaire (aujourd’hui ACPR), pour développer son activité.

Presque 40 ans après ces premiers pas, la Nef poursuit son chemin de création d’un outil au service de celles et ceux qui souhaitent donner du sens à leur argent.

La parole à…

Le crédit, cœur d’activité de la NefDepuis le démarrage de l’activité crédit de la Nef, plus de 5 600 prêts ont été accordés à des projets novateurs et responsables. Ce sont ainsi plus de 300 prêts qui sont octroyés chaque année par les quatre délégations de la Nef (Paris, Nantes, Toulouse et Lyon) : une activité en constante progression qui reste la raison d’être de notre coopérative, une base solide pour poursuivre notre projet de transformation en banque de plein exercice.

Ivan Chaleil Directeur du Réseau Professionnels

et Entreprises

partenariats qu’elle a pu nouer avec d’autres acteurs de la finance solidaire, ainsi que grâce à la force de sa coopérative, et notamment aux dizaines de sociétaires actifs permettant le rayonnement de la Nef sur le terrain.

La Nef n’est ainsi pas la plus grosse banque en France, loin de là, ni la plus prompte à communiquer sur ses financements Verts, mais, à l’instar de ses voisines anglo saxonnes (Triodos, GLS notamment) ou italiennes (Banca Etica), elle tente de s’insérer dans le système bancaire “classique” et de se conformer à ses règles pour tenter d’en modifier en profondeur les pratiques et les finalités. Et grâce à l’extension d’agrément dont elle a bénéficié, elle peut aujourd’hui étoffer son offre aux professionnels de nombreux autres services de banque au quotidien (compte courant, livret, crédit court terme, gestion des flux,…) lui permettant une plus grande proximité et une meilleure interconnaissance avec ses sociétaires professionnels et entreprises…et donc plus de visibilité pour les financer !

C’est donc sur cette base solide et stable, le crédit, que la Nef s’est constituée et développée.

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Actualités de la Nef

Le succès de cette première phase du projet de transformation de la Nef en banque éthique de plein exercice a été possible grâce à une mobilisation sans

précédent de moyens humains et financiers qui lui ont permis, au-delà du lancement de ces nouveaux produits, de procéder au remplacement de son système d’information.

Parallèlement à l’ouverture de plus de 5 000 livrets Nef en 9 mois, la Nef a continué à développer fortement “son cœur de métier”, avec une augmentation de plus de 35 % du nombre de prêts débloqués par rapport à l’année précédente !2016 a également été l’année d’une percée de la Nef dans le secteur de la finance participative (crowdfunding) avec le lancement remarqué de la plateforme de don Zeste en mars 2016 (près de 800 000 € collectés pour plus de 80 projets) et le lancement d’une phase pilote pour le nouveau Prêt de chez moi.

A partir de 2017, la Nef s’engage dans une deuxième phase de son programme de transformation qui visera d’abord à repartir de l’avant sur le compte courant professionnels, un temps mis en suspens, afin d’en stabiliser le fonctionnement. Ces comptes courants Nef Pro seront ouverts en priorité aux clients emprunteurs de la Nef. Pour compléter cette offre, la Nef va proposer un service de gestion automatisée des flux entrants et sortants (EBICS). Par ailleurs, une réponse aux besoins des clients en matière de crédits court terme sera mise sur pied au premier semestre 2017. Enfin, la Nef poursuivra ses réflexions pour répondre progressivement aux autres besoins des professionnels et notamment

les moyens de paiement (carte bancaire) et d’encaissement (solution d’encaissement type Terminal de Paiement Électronique).

En direction des particuliers, la Nef va poursuivre ses travaux engagés en 2016 pour étendre son offre en matière d’épargne et apporter une réponse aux besoins de transactions (compte à vue et carte de paiement). Sur ce terrain, la situation économique de la Nef ne lui permet pas d’effectuer une nouvelle demande d’agrément auprès de l’ACPR pour le moment. Nous travaillons ainsi sur plusieurs hypothèses, afin de déterminer début 2017 les orientations à retenir. Parmi celles-ci figurent la refonte de l’actuel compte courant Nef-Crédit Coopératif et le lancement d’une offre en matière d’assurance-vie solidaire.

Enfin, 2017 est également l’année du lancement officiel de Prêt de chez moi, plateforme de finance participative sous forme de prêt, qui suivra la phase pilote engagée fin 2016.

Pour porter cette seconde phase de développement, la Nef a besoin d’accroître son capital dans des proportions importantes. Elle va de ce fait intensifier ses actions d’appel à capital en 2017, ainsi que pour les années suivantes. L’objectif est de permettre la poursuite du programme d’investissement consacré au projet banque, et de contenir le déséquilibre financier transitoire qui en résulte, tout en poursuivant le développement de sa raison d’être : le financement par l’épargne citoyenne des entreprises respectueuses de la personne et de l’environnement.

Temps forts

En chemin vers la banque éthique : point d’étapeLe 4 avril 2016, un an après la réception d’une extension d’agrément de la part de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), la Nef lançait, dans les temps impartis, son livret pour les particuliers et les associations ainsi que son compte courant pour les professionnels.

Pierre-Emmanuel Valentin Président du Directoire

Léo Miranda Directeur Marketing

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Le dossier

Patrick Viveret Philosophe et conseiller honoraire

à la Cour des comptes Co-fondateur de “Pouvoir citoyen

en marche”

Le rôle des citoyens dans la TransitionCe que l’on peut appeler “la grande Transition” – en référence à ce que Karl Polanyi avait nommé “la grande Transformation” dans un ouvrage de référence – suppose un profond changement de modèle économique, afin que l’économie soit cohérente et non antinomique avec l’écologie. Mais elle exige aussi une profonde transformation du modèle politique, qui appelle un rôle accru des citoyens dans la perspective, non d’une “prise de pouvoir” au sens classique du terme, mais d’un changement dans le rapport même au pouvoir.

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Le dossier

Le rôle des citoyens dans la Transition

Il s’agit de passer du Pouvoir comme

conquête et captation, au Pouvoir comme

énergie créative.

Il s'agit de passer du Pouvoir comme conquête et captation, au Pouvoir comme énergie créative. C’est donc aussi une forme de transition “énergétique” qu’il s’agit

de promouvoir au niveau du modèle politique : le Pouvoir comme lutte pour conquérir ou prendre un pouvoir statique (“le Pouvoir d’État” avec majuscules !) se traduit en effet par des risques accidentels majeurs et sécrète des déchets hautement radioactifs. Cette métaphore entre nucléaire ou énergies renouvelables s’agissant du pouvoir est aussi une réalité puisque la double dépendance de l’état français au nucléaire militaire et civil accentue son caractère centralisé et potentiellement autoritaire.

Ce changement nécessaire de rapport au pouvoir se lit dans l’épuisement croissant de ce que l’on peut caractériser comme le modèle de la démocratie de compétition. On le constate avec la montée des “démocratures”, pour reprendre l’expression de Pierre Hassner. Ces régimes qui ne conservent de la démocratie qu’un caractère superficiel, à travers des élections largement instrumentées, et développent de plus en plus des logiques autoritaires. L’élection de Donald Trump, instrumentant les peurs et replis identitaires nés des dégâts sociaux du neocapitalisme reaganien (tout comme le Brexit est la conséquence des dégâts sociaux du “tatcherisme”), intervient après le basculement inquiétant de régimes comme la Turquie, la Hongrie, les Philippines, etc ou le “coup d’état institutionnel” brésilien pour destituer la présidente élue.

Certes ce modèle, dont l’épuisement est en train de conduire aux “démocratures”, a rendu deux grands services aux pays dans lesquels il a été appliqué, en instituant une alternative à la guerre civile et aux formes de gouvernance despotiques ou oligarchiques. Il l’a fait en démilitarisant la lutte pour le pouvoir et en organisant le suffrage universel. Partout où la gouvernance par la guerre et/ou des formes autoritaires se maintiennent, ce modèle est comparativement le plus satisfaisant, même s’il comporte nombre de défauts. C’est la phrase fameuse de Churchill qui le définit alors le mieux :

“la démocratie est le pire système

à l’exception de tous les autres”...

Pour autant ce modèle présente des insuffisances de plus en plus criantes pour assurer les fonctions de participation, de délibération et de décision dans des sociétés pluralistes et à haut niveau de complexité.

La première, et la plus grave, vient du fait que cette approche compétitive du pouvoir maintient en son sein les germes des deux risques majeurs que la démocratie prétend combattre : la guerre et le despotisme. En effet, s’il n’y a pas des forces conséquentes au cœur de la société civile pour s’opposer à ces deux risques, les motivations des compétiteurs restent de nature guerrière et le vocabulaire politique l’exprime bien : on parle de “campagne” ou de “bataille éléctorale”, de vainqueurs et de vaincus, de clans, d’écuries, de “premiers” ou de “seconds couteaux”, etc. Dans cette perspective, les compétences requises par les compétiteurs et leurs soutiens sont des compétences de l’ordre de la capacité à conquérir le pouvoir plus qu’à l’exercer, de l’ordre de la rivalité plus que de la collaboration, de l’ordre de l’idéologie simplificatrice plus que de l’intelligence complexe etc. Les méthodes adéquates sont celles destinées à construire des rapports de force, à repérer des chefs potentiels, à se maintenir au pouvoir après l’avoir conquis.

De même, le suffrage universel n’est pas

à lui seul une garantie contre le despotisme.

Napoléon Bonaparte a d’abord été le premier président de la République Française élu au suffrage universel. Hitler n’a fait son coup d’état qu’après être arrivé au pouvoir dans des conditions légales, et pour prendre des exemples récents, Orban, Erdogan et tout récemment Trump, sont arrivés au pouvoir dans des formes légales. Cela signifie que le principe électif, fut-il au suffrage universel, est insuffisant pour caractériser une démocratie. Il faut lui adjoindre tous les éléments procéduraux ou qualitatifs qui permettent une réelle qualité de participation et de délibération citoyenne.

La deuxième série de dysfonctionnements, voire de dérèglements, liée à cette approche vient de sa porosité aux phénomènes de

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Le dossier

Le rôle des citoyens dans la Transitioncorruption, ou au minimum, sa perméabilité aux stratégies d’influence menées par des acteurs disposant d’argent ou de pouvoir d’influence sur des clientèles électorales. La plupart des démocraties occidentales sont ainsi minées de l’intérieur par les conflits d’intérêt, les trafics d’influence, des formes plus ou moins graves de corruption, qui finissent par entraîner une défiance généralisée à l’égard des politiques et miner la démocratie elle-même. La progression inquiétante, comme dans les années trente, de courants autoritaires qui se nourrissent de ce discrédit en est la conséquence. Et l’affaiblissement des démocraties face à des faits autoritaires externes constitue un danger redoutable.

Enfin, cette forme démocratique s’avère de plus en plus incapable de traiter la plupart des grands défis qui appellent des niveaux importants de diagnostic et de modes de résolution complexe de problèmes à haut niveau d’interaction entre eux. Les approches binaires, simplificatrices et fortement idéologiques, qui ont pu être adaptées à la phase de la conquête du pouvoir, se révèlent profondément inadaptées à son exercice et à la conduite de transformations importantes qui supposent l’élaboration de diagnostics partagés, de négociations multi-acteurs

et de stratégies de transition combinant sur des territoires des approches plurielles telles celles qu’exigent par exemple un développement soutenable combinant de manière cohérente approches économiques, écologiques et sociales.

C’est dans cette perspective qu’il faut penser, dans une logique anticipatrice et non marginale, les nouvelles approches qui s’inscrivent dans la perspective d’une mutation qualitative de la démocratie. C’est là qu’interviennent les initiatives de réseaux qui cherchent à promouvoir une citoyenneté réellement active tels “le Collectif pour la Transition citoyenne”, “Pouvoir citoyen en marche”, “la belle démocratie”, les maisons de citoyens, etc. rassemblant nombre d’acteurs venus de la société civile mais qui construisent une véritable “société civique” fondée sur la réappropriation citoyenne du politique. La fameuse phrase de Clémenceau suivant laquelle “la guerre est une chose trop sérieuse pour être laissée aux militaires” vaut tout autant pour la finance et la politique. C’est la raison pour laquelle on a vu se multiplier au cours des derniers mois des initiatives citoyennes qui contestent aux partis politiques leur monopole de représentation, de délibération et même de choix de futurs responsables publics.

Des processus de primaires citoyennes ont été initiés, tels par exemple la primaire.org, qui a prévu dans sa boîte à outils démocratique un système de vote qualitatif très novateur. De même des initiatives telles “le pacte des Jours heureux”, prises par des jeunes marqués par le film de Gilles Perret sur l’histoire du Conseil national de la Résistance, ont élaboré ce que la plupart des partis politiques ne font plus réellement : un véritable programme de réformes constitutionnelles et législatives destinées à faire vivre l’esprit du pacte de la Résistance mais en l’adaptant dans sa lettre aux conditions de la période actuelle.

Ainsi, quelle que soit la personne élue par le système politique traditionnel issu du vieux monde, elle devra prendre en compte une force citoyenne de plus en plus exigeante et créative, porteuse de la germination créative du nouveau monde. De ce point de vue aussi, “la grande Transition” a bien commencé.

POUVOIR CITOYEN EN MARCHE !Plusieurs réseaux sont à l’origine de la plateforme collective, d’abord dénommée États généraux du pouvoir citoyen, puis Pouvoir citoyen en marche : le Pacte civique, le Collectif Roosevelt, le Labo de l’Économie Sociale et Solidaire, les Convivialistes etc. Depuis, cette plateforme s’est élargie avec des mouvements comme Nuits debout, Pas sans nous, le Pacte des Jours heureux… et a noué des liens étroits avec le Collectif pour la Transition citoyenne, la Belle démocratie ou avec des initiatives qui œuvrent pour porter l’exigence citoyenne au niveau mondial, telle “le Serment de Paris”, initié pendant la Cop 21 et qui appelle “les citoyennes et les citoyens du peuple de la terre” à “construire leur propre pouvoir”.

EN SAVOIR PLUS :www.eg-pouvoir-citoyen.org

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Nos partenaires

Reporterre, le choix économique de l’indépendance et de l’accès libreDepuis 2013, le “quotidien de l’écologie” propose sur internet des informations claires et pertinentes sur l’écologie dans toutes ses dimensions, ainsi qu’un espace de tribunes pour réfléchir et débattre.

Hervé Kempf Rédacteur en chef

de Reporterre

“Dans toutes ses dimensions” signifie que, pour nous, l’écologie est politique et ne peut se réduire

à des questions de nature et de pollution – même si nous suivons attentivement ces questions vitales. L’écologie engage le destin commun, engage l’avenir, sa situation découle largement des rapports sociaux : c’est donc une écologie politique et sociale que Reporterre présente et discute.

Reporterre a choisi d’être gratuit afin que tout le monde puisse avoir accès à l’information sur l’écologie, quel que soit son âge, son sexe ou ses revenus. Gratuité ne veut pas dire mauvaise qualité, mais accessibilité. Pour nous, l’information est un bien commun et nous voulons que le plus grand nombre puisse connaître les problèmes écologiques. Nous faisons le pari que les lecteurs, convaincus du bien fondé de Reporterre, soutiendront financièrement celui-ci, afin de permettre à d’autres de découvrir que les alternatives au système dominant sont possibles et réalistes.

En 2016, 69 % de nos recettes viennent des dons, et 21 % de subventions de fondations ou de collectivités publiques. Les 10 % restant proviennent de prestations fournies par Reporterre (vente de livres, animation de conférences/débats et organisation de rencontres).Enfin, nous refusons la publicité payante, parce qu’elle crée des liens de dépendance et gêne la lecture des internautes.

À nous de produire l’information,

aux lecteurs de lui permettre d’être libre.

EN SAVOIR PLUS :www.reporterre.net

Rencontre nationale des financeurs solidaires : nous y étions ! Les 26 et 27 janvier derniers, s’est tenue à Montpellier la deuxième Rencontre nationale des financeurs solidaires, co-organisée par Initiatives pour une Économie Solidaire (IéS) et Garrigue.

Les équipes d’IéS Coopérative

de financement solidaire

Une occasion de regrouper en Occitanie/ Pyrénées-Méditerranée les structures de financement en fonds propres et quasi-

fonds propres mais aussi des représentants de l’ensemble des acteurs et réseaux de l’Économie Sociale et Solidaire et de la finance solidaire nationale (dont la Nef).

Nos échanges ont porté sur des problématiques actuelles liées aux activités de capital-risque (crowdfunding, renforcement des modèles économiques) et des thématiques plus larges (disparités des territoires, implication citoyenne, accompagnement des entreprises …).Une opportunité de renforcer les liens entre acteurs de la finance solidaire mais aussi de mieux coordonner les initiatives existantes à l’échelle nationale pour l’appui de plus d’entreprises et la consolidation de plus d’emplois.

Plus d’informations seront disponibles à la demande dans les actes rédigés suite à cette rencontre.

EN SAVOIR PLUS :www.ies.coopTél. : 05 61 75 12 97 [email protected]

POUR NOUS REJOINDRE ET INVESTIR ÉCOSOLIDAIRE :www.ies.coop/ bulletin-de-souscription

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Nos partenaires

La Nef et Terre de Liens, une combinaison gagnanteVotre argent fait pousser des fermes ! Comme plus de 12 000 actionnaires de Terre de Liens, devenez copropriétaire de fermes bio et biodynamiques en circuit court. 127 fermes sont déjà acquises, des dizaines à la recherche d’épargnants… Trouvez sur notre site internet la plus proche de chez vous !

Stéphanie Dubois de Prisque Pôle communication de Terre de Liens

C’est quoi Terre de Liens ?Terre de Liens est né d’une réflexion sur la difficulté à accéder à la terre malgré les outils collectifs existants tels que les SCI (société civile immobilière) et GFA (groupement foncier agricole). Une des missions de Terre de Liens consiste à aider les candidats à l’installation en acquérant collectivement les terres par l’épargne solidaire ou le don. Treize ans plus tard, près de 200 producteurs ont pu s’installer ou maintenir leur ferme grâce à l’action de la Foncière Terre de Liens et, plus récemment, de la Fondation Terre de Liens. Dix-neuf associations territoriales accom-pagnent chaque année des centaines de pay-sans à la recherche de solutions d’installation.

C’était le cas de Céline Gormally, viticultrice biodynamique à Passenans, petit village du Jura. La Foncière lui loue des vignes depuis 2008, année où elle et son entourage ont rassemblé le capital nécessaire pour l’acquisition d’un hectare. La Nef a complété par un prêt direct à l’agricultrice pour du matériel et de la trésorerie. Céline est aussi soutenue localement par 71 familles qui s’engagent sur trois ans à acheter par avance le vin qu’ils recevront l’année suivante. L’action de la Foncière s’élève à ce jour à 103 € et permet une réduction fiscale (soumise à conditions). Pour Céline : “Avec Terre de Liens, la terre va rester dans une agriculture respectueuse de l’environnement”.

La Nef et Terre de Liens main dans la mainAssociée à la Foncière depuis le début, la Nef accompagne régulièrement les porteurs de projets de Terre de Liens. D’un côté, Terre de Liens libère le paysan du poids du foncier, de l’autre, la Nef lui apporte un capital pour investir dans son outil de production.

C’est le cas en Isère, avec Mathieu Laupin. Après 4 ans de recherche de terres, Mathieu pose enfin ses valises sur la ferme du Perroux acquise par Terre de Liens. Trois prêts de la Nef lui permettent de démarrer son activité sur la ferme. Pour soutenir ce projet, la Fondation poursuit sa collecte de don auprès des citoyens (lire l’encadré) !

EN SAVOIR PLUS :Terre de Liens 10 rue Archinard, 26400 CrestTél. : 09 70 20 31 [email protected] www.terredeliens.org

AGRANDIR ET CONSOLIDER LA FERME DU PERROUXDepuis quelques mois, Mathieu poursuit la mise en valeur des terres iséroises de la ferme du Perroux. Pour certaines presqu’en friches, il les convertit en bio et bientôt en biodynamie, à contre-courant du modèle local. Il élève vaches et cochons dans le plus grand respect des animaux afin de produire une viande de qualité, qui sera transformée dans le laboratoire en cours de construction. Aujourd’hui, la Fondation Terre de Liens collecte des dons pour acquérir 42 hectares, le corps de ferme et les travaux nécessaires à son installation. Pour effectuer un don, rendez-vous sur www.terredeliens.org/le-perroux. Vous bénéficierez d’une réduction fiscale de 66 % de la valeur de votre don.

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Solutions alternatives

L’initiative

Comment choisir sa banque, avec Les Amis de la TerreVous êtes déjà sociétaire de la Nef mais les arguments vous manquent pour expliquer votre choix et convaincre votre entourage de vous suivre sur le chemin de la finance éthique ? Vous voyez bien qu’il en faudra plus pour convaincre les grands groupes bancaires de cesser leurs activités frauduleuses, inégalitaires et leurs financements polluants. Le guide “Climat : comment choisir ma banque ?” vous aide à y voir plus clair dans le monde opaque de la finance et vous donne différentes pistes pour vous mobiliser pour la justice sociale et environnementale.

Lucie Pinson, Chargée de campagne

Finance privée / Coface

Pourquoi le guide “Climat : comment choisir ma banque ?” ?Très peu de gens ont conscience de l’impact de leur argent sur le climat et les populations. Au contraire, le discours policé des grands groupes bancaires est plutôt rassurant quant à l’usage fait de notre argent. Aux Amis de la Terre France, nous avons décidé de mener l’enquête pour savoir ce que cachent leurs slogans publicitaires et pouvoir comparer les banques selon leurs impacts sur le climat. Et ce qu’on a découvert n’est pas glorieux : hormis la Nef, aucune banque française n’a un impact positif sur l’environnement et BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale comptent parmi les 15 banques les plus polluantes de la planète.

Nous espérons, qu’après lecture du guide, chacun puisse déchiffrer le discours des banques afin de ne pas tomber dans le piège des labels “solidaire”, “vert” et “responsable” qu’apposent les grandes banques sur leurs produits.

Devenez ambassadeur !Vous avez été convaincus de confier votre argent à la Nef ; à votre tour maintenant de convaincre vos proches de changer de banque, d’ouvrir un livret Nef et peut-être même d’investir directement dans des initiatives comme Énergie Partagée, afin de soutenir le développement de projets locaux d’énergies renouvelables.

Ce guide est gratuit, commandez-le aux Amis de la Terre France et distribuez-le autour de vous afin que nous soyons de plus en plus nombreux à mettre notre argent au service du développement de sociétés soutenables !

Passez à l’action avec Les Amis de la TerreTout le monde n’est pas en situation de changer de banque, et ce guide n’a pas pour vocation à les culpabiliser. D’autres modes d’actions sont possibles et nécessaires, quel que soit notre choix personnel de banque et d’épargne.

Les Amis de la Terre France se mobilisent depuis des années pour forcer les grandes banques à mettre un terme à leurs activités climaticides et déjà, nous avons fait bouger les lignes en poussant les banques françaises à se retirer de grands projets controversés et à arrêter certains financements au charbon. Rejoignez nos mobilisations !

EN SAVOIR PLUS :[email protected]

DEMANDEZ AUX GRANDS GROUPES BANCAIRES DE METTRE UN TERME À LEURS FINANCEMENTS AUX ÉNERGIES FOSSILES : jechangedebanque.eu

L’association les Amis de la Terre travaille depuis 2005 sur les impacts climatiques des banques. Nous nous mobilisons en direction des grands groupes banques afin qu’ils mettent un terme à leurs financements aux énergies sales, tout en promouvant la Nef, seule banque à-même d’accom-pagner une transition vers des sociétés soutenables.

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Solutions alternatives

En route vers la Transition

La transition citoyenne est plus que dans l’air du temps !Comment relever le défi du plus grand nombre pour faire société ?

Varinia Vinay-Forga Déléguée générale

Collectif pour une Transition Citoyenne

En 2016, la Nef a fortement co-porté le Collectif pour une Transition Citoyenne. Dans la droite ligne de la déclaration commune du Festival

de la transition de Cluny en 2013 et des deux premières Journées de la Transition citoyenne, nous avons fêté le 24 septembre dernier la 3è édition (cf. encadré).C’est un succès qui envoie un message fort, car la “transition” est dans l’air du temps et les citoyennes et citoyens engagés dans les territoires voient largement l’intérêt de ce rassemblement autour de toutes les thématiques (énergie, démocratie, finance, alimentation, agriculture,...). Ils s’approprient le sens de la déclaration commune et formulent leurs attentes au “Collectif national”.Toutefois, cela ne semble pas suffisant. Même si la Journée de la Transition amènerait à coordonner 250, 300 ou un jour peut-être 1 000 événements locaux, le Collectif se fait comme devoir de penser un véritable changement d’échelle, quantitativement et qualitativement, bien au-delà de ce rendez-vous annuel.

Une voie incontournable à ouvrir : le changement d’échelleAujourd’hui, les membres du Collectif réaffirment leur engagement et mettent l’accent sur l’urgence de changer la donne. Il semble clair qu’il faudrait 100 Enercoop, 1 000 Nef, et 10 000 Alternatiba pour relever les défis et pour marquer durablement la différence!Des milliers d’initiatives et de solutions locales restent encore invisibles à des publics qui ignorent l’enjeu de ce changement profond de la société qui se dessine.

Certainement, la terminologie “transition” paraît déjà trop abstraite, trop éloignée, voire trop experte, pour pouvoir “les toucher”. Comment pouvons-nous nous rapprocher d’eux pour les faire grandir en pouvoir citoyen ?

L’urgence d’agir au cœur des ambitionsLe Collectif pour une Transition Citoyenne se veut être à hauteur des enjeux à l’horizon de 2020. Depuis 2013, les membres parcourent ensemble un chemin qui est suffisamment engagé pour passer en force à l’action. Chacune des structures se prononce aujourd’hui sur l’urgence d’agir très concrètement. Pour ce faire, les projets ne manquent pas : Journée de la Transition, recherche-action pour viabiliser les modèles économiques

des acteurs de la transition, développer les lieux de transition, mettre en lumière une alternative par an ou encore développer le Pacte pour la Transition… le Collectif décidera prochainement de ses priorités 2017-2020.

EN SAVOIR PLUS :Collectif pour une Transition Citoyennewww.transitioncitoyenne.orgwww.journeetransition.orgTél. : 04 82 90 54 84

3È ÉDITION DE LA JOURNÉE DE LA TRANSITION : UNE TRÈS BELLE RÉUSSITE ! De la projection-débat de film au grand village des alternatives… 330 événements locaux organisés.

Des liens renforcés avec d’autres structures de la transition : la FNAB, la Semaine de la solidarité internationale, les Incroyables Comestibles, Réseau Cohérence, Agir pour l’environnement…

Un succès sur les réseaux sociaux le 24 septembre 2016 : notre #monpremierpas en trending topics et 1,4 million de vues sur une journée !

Journée de la transition 2016 à Châteauroux (36)

Notez d’ores et déjà la Journée de la Transition le Samedi 23 Septembre 2017 prochain !

numéro 7 I Hiver 201718

Découverte

À lire…

Les Tisserandsd’Abdennour BidarDans ce nouveau numéro de Fil d’argent, je souhaite partager avec vous une lecture que j’ai trouvé inspirante et en résonance avec le projet de la Nef. Ce livre met en effet en exergue tous les acteurs qui travaillent tous les jours à réparer le tissu déchiré du monde humain. Personnellement, j’en rencontre tous les jours dans l’écosystème de la Nef.

Frédéric Moukarim Directeur du développement

À voir…

Qu’est-ce qu’on attend ?de Marie-Monique RobinMarie-Monique Robin, réalisatrice engagée qui parcourt le monde depuis plus de vingt ans pour donner voix à la transition, a suivi pendant plus d’un an l’équipe municipale et les citoyens du village d’Ungersheim.

Charles Lesage et Pascal Cottereau

Sociétaires actifs de la Nef

Au travers d’un texte philosophique mais accessible et concret, l’auteur Abdennour Bidar aborde les grands

déchirements qui traversent notre société. Face à ce constat, il met en avant avec optimisme les changements profonds et concomitants en marche.

Dans l’Est de la France, le maire de la commune d’Ungersheim a embarqué les 2 100 habitants dans une aventure

citoyenne qui s’articule autour de trois piliers : autonomie intellectuelle, énergétique et alimentaire. Les alternatives écologiques et sociales (monnaie locale, centrale scolaire, cantine bio, chantiers d’insertion, etc.) sont ainsi devenues le quotidien des ungersheimois et ungersheimoises.

La réalisatrice nous invite à mieux comprendre leur démarche écologique et sociale à travers des témoignages sincères et la participation “de l’intérieur” à des moments saillants de la vie de la commune. Un film enthousiaste et plein d’espoir, qui montre que nos possibilités sont immenses et qu’il ne tient qu’à nous – ou presque – de les mettre en place.

Il souhaite amener le lecteur à prendre conscience de l’existence et de la force des acteurs engagés sur le plan social, spirituel, écologique ou économique qui participent selon ses termes à construire une nouvelle civilisation. Au cœur de leurs pratiques se trouve l’urgence de recréer les liens

Le message est fort : en ces temps de repli sur soi, la tolérance et l’ouverture sur le monde nous permettent d’agir pour le bien-être de la Terre et de l’humain.

nourriciers de la vie humaine notamment : le lien à soi, le lien de fraternité et de coopération avec les autres, le lien d’émerveillement et de méditation à la nature.

A ceux qui seraient tentés, je souhaite une belle lecture.

Comme il est dit dans le film

“C’EST EN MARCHANT QUE L’ON OUVRE LE CHEMIN”. Alors, qu’est-ce qu’on attend ?

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Découverte

L’invité...

Jean-Pierre Worms,sociologue engagéSociologue, ancien chercheur au CNRS et ancien parlementaire, Jean-Pierre Worms s’est rapidement impliqué dans l’univers associatif, en parallèle de ses autres activités : il participe notamment à la création de France initiative en 1980 (aujourd’hui Initiative France, premier réseau associatif de financement des créateurs et des repreneurs d’entreprise) et en est aujourd’hui le vice-président. Il est également secrétaire général puis président de la Fonda, association présentée comme le “laboratoire d’idée du monde associatif”, elle-même à l’origine du collectif Pouvoir d’Agir, dont Jean-Pierre Worms est également membre.

Amandine PLATET Responsable du service

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Vous vous décrivez comme un “sociologue engagé” menant un travail “d’ingénierie démocratique”, pouvez-vous nous en dire plus ?

J’ai commencé par étudier la philosophie mais, ressentant le besoin de m’ancrer davantage dans la réalité sociale, j’ai bifurqué vers la sociologie. Toujours à la recherche d’une plus grande proximité avec le réel, je me suis rapidement engagé politiquement… Mais j’ai toujours pensé que l’essentiel, c’était l’engagement concret dans la vie associative ! J’ai réalisé par exemple, en tant qu’universitaire, des recherches sur l’organisation du système politique local dans le développement territorial. Je suivais en parallèle, en tant que député, l’ensemble de la législation concernant les collectivités locales et étais rapporteur des lois de décentralisation de 1983. J’étais ainsi en charge de l’organisation des relations entre l’appareil d’État central et les dynamiques locales. Enfin, mon engagement associatif s’est concrétisé par l’animation de deux comités d’expansion, l’un départemental et l’autre régional. J’évoluais ainsi dans trois univers, universitaire, politique et associatif, qui se regardent habituellement en chien de faïence...

Vous dénoncez aujourd’hui une crise écologique, économique et sociale à laquelle le pouvoir politique ne parvient plus à faire face. Comment en est-on arrivés là ?

Notre modèle démocratique a mal vieilli : il s’est construit sur des espaces et des temporalités dépassés. L’organisation de notre République est ainsi basée sur une distinction entre les élites dirigeantes et le reste du peuple, considérant que seule cette élite est à même d’identifier le “bien commun”. Si on peut imaginer que cette démarche “descendante” de l’état providence a pu fonctionner dans des périodes de stabilité, elle est beaucoup moins tenable aujourd’hui. Le constat est que le pouvoir politique, celui qui décide au nom de l’intérêt des autres et pour les autres, connaît très mal les réalités terrains, et ce dans divers domaines (ville, de la santé, de l’éducation, de l’emploi…).

Il faut reconnaître la valeur du “savoir d’expérience”, reconnaître la capacité de chaque citoyen à contribuer à l’identification des solutions aux problèmes qu’il vit.

C’est bien dans cette démarche de reconnaissance du pouvoir citoyen que s’inscrit le collectif “Pouvoir d’Agir”?

La démarche de Pouvoir d’Agir s’inscrit effectivement dans une autre conception de l’organisation collective. C’est d’abord une démarche de lutte contre les inégalités puisqu’elle reconnaît la dignité de la personne humaine et considère que même les personnes les plus démunies ont une richesse personnelle latente, qui peut venir construire une richesse collective. Elle se décline sur différents territoires, part du terrain, mobilise les citoyens, le monde associatif et les entreprises pour trouver des solutions concrètes aux problèmes d’emploi, de santé, d’éducation…

De plus en plus de citoyens savent ce qu’ils veulent, il faut développer ces initiatives ascendantes et celle d’Initiative France, de la Fonda et du collectif Pouvoir d'Agir.

EN SAVOIR PLUS www.pouvoirdagir.fr

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Zeste est une marque de la Société financière de la Nef, société anonyme coopérative à capital variable, à directoire et à conseil de surveillance - Agréée par la Banque de France - RC Lyon B 339 799 116 - NAF 6492Z – ORIAS 09050786 - Associée au groupe Crédit Coopératif - Siège social : Immeuble WOOPA, 8 avenue des Canuts, CS 60032 - 69517 Vaulx-en-Velin Cedex

Que vous portiez un projet qui construise le monde de demain ou que vous souhaitiez contribuer à l’émergence de telles initiatives :

• Zeste est dédiée aux acteurs de la transition écologique, sociale et culturelle : documentaires engagés, fermes paysannes, tiers-lieux, supermarchés coopératifs, etc.

• L’équipe Zeste fait de l’accompagnement humain et personnalisé sa priorité, pour chaque porteur de projet, en amont et tout au long de la campagne.

LA PLATEFORME DE DONS QUI VOUS RESSEMBLE

9 MOIS ET DÉJÀ DE NOMBREUSES BELLES HISTOIRES**

Le crowdfunding* par la Nef

*financement participatif - **zeste au 31/12/2016