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UNE MAISON DE VIES SOLIDAIRE POUR ADULTES ÂGÉS 136 CAHIER LABISO PÉRIODIQUE LE DOMAINE DES RIÈZES ET SARTS À COUVIN

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une maison de vies solidaire pour adultes âgés

n°136Cahier labiso périodique

Le domaine des Rièzes et

saRts à Couvin

en partenariat aveC

une initiative de

Respect

comme à la maison

l’accueil des peRsonnes désoRientées

autonomie et dépendance

citoyenneté

un cadRe exceptionnel

des animations

Humanitude et bientRaitance

un modèle ?

pouR en savoiR plus

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Sommaire

Cahier N° 136Le domaine des Rièzes et Sarts à Couvin

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Culs-des- Sarts, le bout du monde, du moins le bout de la Belgique. À une dizaine de kilomètres de Couvin et autant de Rocroi, en France, le Domaine des Rièzes et Sarts a fait durant de nombreuses années la joie des vacan-ciers. Aujourd’hui, à l’ère des destinations loin-taines à bas prix, ce centre de tourisme social des Mutualités socialistes a trouvé une nouvelle affectation. Depuis 2008, c’est désormais une maison de repos et de soins dans laquelle sep-tante-neuf personnes âgées coulent des jours paisibles… (mais pas trop).

reSpect

Le projet de Dominique Bigneron, le direc-teur de ce home un peu particulier, est expli-cite. Il s’agit d’offrir à ses résidants (avec un « a ») un cadre de vie de liberté(s), d’autonomie et de citoyenneté. Une évidence, et pourtant… « J’ai exercé des années en maison de repos en tant que kinésithérapeute, dit-il. J’en ai vu des choses… » C’est un euphémisme. Violences physiques, violences morales, maltraitance ordinaire… tous les membres de son personnel

soignant en ont aussi été témoins au fil de leur parcours professionnel. « Des personnes âgées que l’on tutoie, qu’on appelle mamy ou pépé, qui doivent partager leur chambre avec un autre pensionnaire, que l’on met au lit à dix-sept heures – ou qu’on ne lève même plus –, dont on fait la toilette à la chaîne pour des questions d’organi-sation et de timing, dont on ne respecte pas les rythmes les plus élémentaires, à qui on nie encore la moindre autonomie décisionnelle, que l’on surmédicalise, que l’on surprotège... » La liste est édifiante.

Son projet institutionnel va à l’encontre de ces pratiques hélas encore régulières. C’est un projet tout simple, d’une évidence implacable : le respect. Il s’inscrit dans la logique du concept québécois de milieu de vie substitut, autrement dit d’un milieu de vie offrant les mêmes garan-ties qu’un domicile privé mais dans le cadre et les limites d’une collectivité. « Cela implique que nous imaginions le Domaine comme un lieu de vie et non comme un lieu de soins ou comme un petit hôpital, précise le directeur. C’est un lieu de vie où certains reçoivent aussi, si nécessaire, des soins. » Paradoxalement, c’est aussi la définition officielle donnée par le législateur aux maisons de repos… « Car l’âge n’est pas une maladie, et être vieux n’implique pas automatiquement une perte d’autonomie », poursuit Bigneron. Autant que possible, le Domaine des Rièzes et Sarts s’adapte aux besoins et aux désirs de ses rési-dants. Notamment en tenant compte de leurs habitudes de vie antérieure et en maintenant le plus et le mieux possible leurs capacités.

Un tel projet ne manque pas d’attirer nombre de professionnels du secteur : lors du dernier recrutement, pas moins de trente candidats infirmiers ou infirmières et près de cent cin-

le domaine des rièzes et sarts est un ancien centre de vacances.

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quante aides-soignant(e)s ont envoyé leur lettre de motivation. Noémi Blanchet, infirmière prin-cipale, se souvient de son entretien d’embauche. « Il n’a pratiquement pas été question de mes compétences, dit-elle, mon CV en attestait. En revanche, nous avons très longuement parlé de la philosophie de la maison et du respect de la personne. » Car si l’aventure est tentante, elle ne convient pas forcément à tout le monde. « C’est clair qu’une telle organisation réclame plus de souplesse qu’ailleurs, reconnaît-elle. Or pour certains, la routine est sécurisante. »

Une cinquantaine de personnes travaillent au Domaine de Rièzes et Sarts : infirmières, aides-soignantes, cuisiniers, agents administratifs ou d’entretien. Personne ici ne porte de blouse blanche mais bien des vêtements de couleur à son goût, et seul un badge permet d’identifier la fonction de chacun. ■

GaRantiR la diGnité des peRsonnes âGées

en 2008, la Belgique comptait 567 000 personnes âgées de plus de soixante-cinq ans. on estime que leur nombre atteindra les sept cents mille en 2020. Quelle solu-tion pour celles qui ne peuvent plus vivre seules ? Quelque 7% d’entre elles vivent aujourd’hui en maison de repos, malgré la rupture que cela implique. « Pour les per-sonnes âgées souffrant de handicap et de la dépendance qui l’accompagne générale-ment, l’obligation de se séparer de l’habitat qui a connu une longue ‘tranche de vie’ est un moment pénible et parfois vécu dramati-quement, un véritable deuil », constate marie-thérèse casman, sociologue au panel Démo-graphie familiale de l’Université de Liège.

À cette difficulté s’ajoute celle du choix de l’institution d’accueil. Une personne âgée devrait en principe avoir le choix entre plu-sieurs formules d’hébergement mais en réalité cette liberté est plus restreinte qu’on ne l’ima-gine, parfois à cause de l’état de santé ou des capacités cognitives de la personne, souvent par manque de places ou de ressources suf-fisantes. « Le niveau moyen des pensions est inférieur au prix de base d’un hébergement en institution », rappelle marie-thérèse casman.

La sociologue pointe deux éléments fondamentaux pour garantir la dignité des personnes âgées : la sécurité et l’autonomie, l’autogestion de l’existence. « La dépendance provoque une crainte compréhensible de privation des facultés d’autodétermination, explique-elle. On comprend d’autant mieux la résistance et l’inquiétude des personnes viei l l issantes devant des propositions qui ébranlent les caractéristiques de leur habitat. » Facteur de stress aggravant, l’insti-tution collective est souvent vue comme un lieu de réclusion et de renonciation. « Pour la plupart, les gens perçoivent trop peu le vieil-lissement comme un projet mais comme un événement subi », regrette casman. Pourtant, comme tout un chacun, le retraité souhaite rester au centre de la décision de son projet de vie et mener une existence autonome. » ■

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comme À La maiSon

« A quelle heure souhaitez-vous déjeuner ? », « A quelle heure voulez-vous vous coucher ? » Une petite question d’apparence banale permet de cerner les habitudes des résidants. « Lève-tôt ou couche-tard, faut-il revoir entièrement sa façon de vivre lorsque l’on entre en maison de repos ? » interroge Dominique Bigneron. A dix heures du matin, quelques tables du restaurant – on ne dit pas réfectoire – sont encore dressées pour accueillir les adeptes de la grasse matinée. « Pourquoi devraient-ils tous déjeuner entre huit et neuf heures du matin, poursuit-il, alors qu’à la maison chacun peut s’octroyer quelques heures de sommeil en plus quand il en a envie ? » Idem pour le repas de midi, où il est toujours possible pour les retardataires de faire réchauffer leur

plat par un commis de cuisine. Un repas que les résidants peuvent en outre agrémenter, comme tout le monde, d’un pichet de vin ou d’une bière du pays. « Ce sont des adultes, ajoute le directeur. Ils ne vont pas tout à coup sombrer dans l’excès. Et les gros consommateurs l’ont été toute leur vie, il ne m’appartient pas de refaire leur éducation. » Les plaisirs de la vie ne s’estompent pas avec les années. Une attention particulière est portée aux menus et reprendre deux fois du dessert n’est pas péché. ■

un repas au restaurant du domaine.

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L’accUeiL DeS perSonneS DéSorientéeS

Autre particularité du Domaine : la mixité du public dans tous les lieux de la maison. Parmi les septante-neuf résidants, une quinzaine sont des personnes désorientées, souffrant de la maladie d’Alzheimer ou d’autres troubles dégénératifs. « C’est un choix, insiste le directeur. Il est inscrit dans le projet de vie de la maison. Au Domaine, les personnes désorientées partagent tout de la vie avec les personnes bien ou mieux orientées. » Le projet est clairement expliqué aux futurs habitants et à leur famille ; les gens y adhèrent en connais-sance de cause quand ils décident de venir vivre ici. « Mais, relativise-t-il, la pénurie de places en maison de repos occulte souvent cet aspect de notre vie communautaire. Des gens s’inscrivent parfois dans la nécessité ou dans la précipitation puis se rendent compte que cela ne leur convient pas. » De part et d’autre, chez les personnes orientées comme chez les désorientées, des déconvenues sont en effet possibles car le prin-cipe des Rièzes et Sarts n’est pas d’enfermer les personnes démentes dans leur chambre, de leur infliger une camisole chimique ni de les entraver dans leur lit. Au contraire, elles sont libres de circuler dans les couloirs, dans le restaurant, dans la véranda ou dans le jardin. « Il est arrivé qu’on en retrouve l’un ou l’autre, généralement un nouvel arrivant, errant dans le village, reconnaît Dominique Bigneron, mais quand cette personne s’aperçoit qu’elle est réellement libre de ses mouve-ments, elle n’a plus de raison de s’enfuir… »

Cette mixité peut également engendrer de petites frictions au quotidien. Certains résidants aimant entendre et voir ce qui se passe dans le couloir laissent par exemple leur porte grande ouverte. « Une personne désorientée peut s’intro-duise dans la pièce. En général, cela ne pose pas de problème, explique le directeur. Elle s’assied un temps, puis poursuit ses déambulations. Mais cela ne plaît pas à tout le monde... » Une fine barrière de cannage placée dans l’embrasure a résolu en grande partie ces conflits de liberté, sans obliger les gens à vivre porte close.

Cette mixité peut également engendrer de petites frictions au quotidien. Certains résidants aimant entendre et voir ce qui se passe dans le couloir laissent par exemple leur porte grande ouverte. « Une personne désorientée peut s’intro-duise dans la pièce. En général, cela ne pose pas de problème, explique le directeur. Elle s’assied un temps, puis poursuit ses déambulations. Mais cela ne plaît pas à tout le monde... » Une fine barrière de cannage placée dans l’embrasure a résolu en grande partie ces conflits de liberté, sans obliger les gens à vivre porte close.

stéphanie poncelet est à l’écoute des personnes désorientées.

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Stéphanie Poncelet consacre entièrement son temps à ces personnes désorientées. « Je suis là », dit-elle tout simplement. Cette petite phrase résume l’essentiel de son travail d’édu-catrice aux Rièzes et Sarts. Stéphanie et sa col-lègue Catherine ont en effet été engagées « juste pour être là » et pas pour « faire ». Une présence qui rassure, un bras qui se tend pour aider l’un à s’extraire d’un fauteuil, un autre à s’y installer confortablement ou pour effectuer quelques pas de conduite. Un mouchoir ou un verre d’eau à présenter, une part de gâteau. Une main à cares-ser, un mot, un sourire, un regard… Le toucher est très important. Quels sont les contacts physiques autres que fonctionnels – saluta-tions, soins, toilette – accordés aux personnes âgées ? « Pour qu’un bébé devienne un homme, on le regarde, on le touche, on lui parle, on le met debout, explique Dominique Bigneron. On doit partir de la même idée avec la personne âgée. Pour qu’elle reste un homme, il faut la toucher par pur plaisir, lui parler par intérêt, la regarder vraiment et la mettre ou la maintenir debout et donner sens au fait d’être encore debout. »

aUtonomie et DépenDance

L’autonomie se traduit dans le rythme de la vie quotidienne, comme le respect de l’heure du lever et du coucher de chacun par exemple, mais aussi dans le choix des vêtements. « J’ai besoin d’aide pour m’habiller, dit Odette. Mais c’est moi qui choisis les vêtements que je vais porter. C’est important pour moi, je suis restée coquette. » Au domaine, l’équipe part du principe que seul l’ha-bitant sait ce qui est bon pour lui et en décide. « Bien entendu, précise le directeur, plus de prudence et d’accompagnement sont nécessaires pour les habitants désorientés. » La dépendance sera palliée par une aide adaptée, à l’un pour se déplacer, à l’autre pour manger.

L’autonomie, c’est aussi bien sûr pour les résidants le droit de recourir au médecin ou au kiné qu’ils souhaitent, même en dehors de l’éta-blissement, et celui d’orienter leur traitement médical en fin de vie.

Le vouvoiement est en outre de rigueur et le personnel serre la main des résidants pour leur dire bonjour, à moins que ceux-ci ne préfèrent explicitement échanger une bise, qu’on les appelle par leur prénom ou qu’on les tutoie.

La sphère personnelle, l’intimité, est pré-servée. « Le personnel frappe toujours à la porte d’une chambre et surtout attend qu’on l’y invite avant d’entrer, dit Noémi Blanchet, l’infirmière coordinatrice. Si la personne n’est pas prête, on repasse un peu plus tard. » A ce propos, toutes les portes des chambres ferment à clé : leurs

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occupants peuvent en verrouiller l’accès quand ils la quittent, ils peuvent aussi tourner le loquet de l’intérieur. L’usage d’un passe-partout en cas de nécessité est discuté avec eux. Derrière ce fonctionnement respectueux du jardin secret de chacun, c’est aussi le droit à une vie sexuelle et affective qui est reconnu.

En général, les familles apprécient. Mais elles s’inquiètent aussi parfois, notamment de la sécurité. Leur aïeul ne va-t-il pas se mettre en danger ? Et s’il lui arrivait quelque chose quand il est enfermé dans sa chambre ? Pourquoi n’ins-talle-t-on pas de barrières devant l’escalier ? « Nous refusons d’aménager les lieux de la sorte,

insiste le directeur. Nous n’avons pas affaire à des personnes malades, mais à des personnes âgées tout simplement. Évidemment qu’elles risquent de tomber, tout comme à la maison, tout comme à l’hôpital… Nous agissons à leur demande. Si une dame, par exemple, ne souhaite pas s’appuyer sur une tribune pour se déplacer, nous n’allons pas la lui imposer tant qu’elle ne le réclame pas. » Car souvent ce sont de tels petits adjuvants qui amorcent une diminution de l’autonomie de la personne âgée. « Le risque zéro n’existe pas, ajoute-t-il. L’âge et la maladie ne sont pas une entrave à la vie et il n’y a pas de pire risque que celui de ne pas en prendre. Je pense qu’autoriser encore l’accès au risque est synonyme de dignité conservée. »

Chaque chambre est personnalisée.

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citoyenneté

La citoyenneté ne disparaît pas non plus avec l’âge. Elle est entre autres symbolisée par la carte d’identité et par l’exercice du droit de vote. « La symbolique des documents d’identité est très forte, dit le directeur. ‘Avoir ses papiers’, c’est encore exister, être quelqu’un. Pourquoi les leur retirer à l’entrée en maison de repos ? Même les personnes désorientées, lorsqu’on prend la peine de les responsabiliser, perdent très rarement leur portefeuille. Au plus profond d’elles, elles savent que c’est important. »

Ce principe s’applique de facto au moment des élections. « Nous organisons les déplace-ments vers le bureau de vote, tandis que bien des institutions (au mieux) se contentent de faire remplir des procurations, (au pire) institution-nalisent les certificats médicaux d’incapacité des résidants de se rendre aux urnes. Nous sommes prêts au Domaine à participer à un projet qui amènerait le bureau de votes au sein même de la maison. Moyennant un débat citoyen qui donne-rait sens au projet, je suis certain qu’encore bien plus de résidants voteraient. » Le Domaine est en effet accoutumé aux rencontres réflexives. Dernièrement, une sociologue (voir encadré) et un juge ont croisé leurs points de vue sur le thème du droit au risque. « Nos professionnels étaient présents, mais aussi nos résidants et leur famille ainsi que des étudiants. Nous avons la responsabilité de donner à nos adultes âgés le message qu’ils sont encore des citoyens à part entière et que leur parole compte encore malgré qu’ils vivent dans une maison communautaire. »

Comme dans toutes les maisons de repos, un conseil des résidants et des familles rencontre tous les trimestres la direction et des membres du personnel. Ce moment permet à chacun de s’exprimer, de faire des remarques, des propo-sitions. C’est aussi le lieu où est débattu le choix des destinations d’excursion ou des animations à venir, les petits soucis quotidiens liés à la logistique. « Nous tentons d’éviter l’écueil d’un débat qui ne tournerait qu’autour des menus, explique Dominique Bigneron. Un temps compté est donc accordé à chaque sujet à l’ordre du jour. » Ces derniers mois, la cohabitation avec les personnes désorientées est régulièrement revenue sur la table. « Il faut être vigilant, pour-suit-il, répéter les valeurs fondatrices de notre projet : la solidarité, la fraternité, l’acceptation des différences, les libertés. Et aussi celles des personnes désorientées. En d’autres termes il m’a fallu rendre du sens à ce qui peut parfois paraître comme une contrainte, en me faisant le porte-parole des sans-voix : les désorientés eux-mêmes. » A lui aussi de faire prendre du recul aux habitants qui auraient tendance à grossir ce qui en réalité n’est qu’un tout petit problème (bien que pour eux il s’agisse de quelque chose d’important), de dédramatiser et de rappeler la nécessité d’un compromis dans une vie pour partie communautaire.

Le registre des plaintes/commentaires/demandes est un autre outil de communication. Là également, puisque la parole est libre, des habitants y écrivent régulièrement des remarques : un lit non refait dans le délai prévu, un repas servi froid en chambre, une réponse tardive à un coup de sonnette, une cohabitation parfois douloureuse avec une personne désorientée... « Tout n’est pas toujours agréable à lire, reconnaît le directeur qui répond systématiquement aux interpellations.

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Le suivi est primordial. » Ce cahier collecte aussi, faut-il le dire, des compliments. « Cela booste à chaque fois l’équipe de sentir que son engagement et sa disponibilité sont reconnus et appréciés par les habitants, par leur famille et parfois aussi par des intervenants de passage. C’est un baromètre précieux. »

des réclamations mais aussi des compliments émaillent les pages de ce carnet de communication.

une maison de Repos pas comme les autRes ?

rencontre avec myriam Leleu, sociologue et gérontologue au Bureau d’études en socio-logie et gérontologie, maître-assistante à la Haute école Louvain en Hainaut.

labiso : le domaine des Rièzes et sarts présente un projet original, mais n’est-il pas tout simplement normal de placer l’individu au centre de l’accueil en maison de repos ?

c’est tout à fait normal mais c’est aussi très rare. c’est la rareté de la démarche qui la rend originale. Le Domaine de rièzes et Sarts pratique la tolérance zéro à la conten-tion : pas de contention chimique, pas de contention physique. La personne est res-pectée de façon absolue dans ce qu’elle est, dans ce qu’elle fût ou dans ce qu’elle a envie d’être et encore devenir, avec certes une

prise de risque. cette idée, naturelle et qui paraît absolument normale, n’est pas perçue comme telle par toutes les structures ni par tous les gestionnaires de maison de repos. c’est cette prise de risque qui pose question. on a vu des personnes s’ouvrir au monde en arrivant au Domaine, alors qu’ailleurs elles étaient enfermées… L’hyper protection est enfermante et ce n’est peut-être pas ce dont on a envie quand on souhaite la vie la plus longue. peut-être qu’une personne décédera un peu plus tôt que s’il avait été médicalisé, mais plus heureuse…

Quelle est la place de telles structures dans le paysage actuel de l’hébergement des personnes âgées ?

Les personnes âgées représentent un marché économique, social et de soins. J’ai pu constater que les structures qui propo-saient une démarche originale ou considérée comme telle – plus humaine, axée sur plus de libertés ou sur l’intergénérationnel, des thèmes plus présents selon les époques – sont surtout portées par des gestionnaires qui se démarquent par un projet, un sorte d’idéal institutionnel et personnel. cela va à contre-courant de la tendance actuelle de regrouper des maisons de repos en gros pôles, des groupes financiers en fait, pour qui la gestion prime sur l’approche humaine.

La perspective du secteur est aussi de plus en plus médicalisante parce qu’on entre en maison de repos de plus en plus tard – la moyenne d’âge est supérieure à quatre-vingts ans – et avec des pathologies de plus en plus lourdes. cela révèle simplement ceci : même si on vit aujourd’hui plus longtemps, on n’a toujours pas plus envie d’entrer en collecti-vité. Le Belge moyen tient à son chez soi.

on ne lâche que quand le corps lâche finalement ?

À peu près, ou quand la solitude fait trop peur. Quelques personnes choisissent d’entrer en maison de repos par convenance

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personnelle mais la plupart y entrent suite à une difficulté ou un accident de santé.

il faut accepter qu’un lieu de vie collectif soit marqué par des obligations de rythme, de différences entre les entrants et les sortants que sont le personnel et les résidents. ici, au Domaine des rièzes et Sarts, l’institution s’adapte au rythme de ses résidents pour les repas, les sorties. La vie de la personne dans son contexte privé est dominante par rapport au contexte collectif.

comment réussir son entrée en maison de repos ?

La réussite d’un projet de vie en maison de repos, quelle qu’elle soit, tient à la qualité du moment d’accueil. Selon le thérapeute familial français thierry Darnaud, c’est ce moment qui va valider la qualité de vie future. ce temps d’accueil doit se faire en convergence avec les trois parties concernées : la personne âgée, sa famille et les intervenants (directeur/gestion-naire et le service de nursing). tous trois sont acteurs d’un même projet, qui est celui de la personne âgée et pas celui de l’institution. ■

Un caDre exceptionneL

De l’ancien centre de vacances, le Domaine en a conservé le cachet et l’atmosphère. Dans un parc de huit hectares agrémenté d’un mini-golf, d’un barbecue, d’une piste de pétanque et d’une plaine de jeu bien pratique pour recevoir les petits et arrière petits-enfants, les bâtiments offrent une fonctionnalité exceptionnelle pour une maison de retraite. Toutes les chambres sont individuelles et disposent d’une salle de bains privative. Si certains résidants vivent dans un décor sobre, d’autres par contre ont choisi de s’installer au milieu des souvenirs de leur vie d’avant : décoration, bibelots, meubles person-nels transforment ces espaces en studios cosy.

Les chiens, les chats ou les canaris aussi sont admis. « Nous réservons quelques chambres du rez-de-chaussée aux propriétaires d’animaux domestiques, explique Dominique Bigneron. Mes collègues ouvriers ont bricolé de petits enclos sur la pelouse devant les portes-fenêtres pour que leurs compagnons puissent mettre le nez dehors ». Marguerite vit aux Rièzes et Sarts avec King, son petit chien. « J’aurais eu beaucoup de chagrin s’il n’avait pas pu venir avec moi, dit-elle. Je sais que c’est rare dans une maison de repos et je l’apprécie d’autant plus. » Louise, une dame désorientée, partageait sa vie avec deux york-shires mal éduqués à la propreté. Les débuts au Domaine n’ont pas été simples. « Mes collègues du service entretien ont eu du mal à accepter que cette chambre là ne soit pas toujours impeccable, poursuit le directeur. J’ai dû les convaincre qu’entre la propreté parfaite et le bien-être, le plus

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DeS animationS

Une animatrice et une ergothérapeute se chargent des activités récréatives du Domaine. Gym douce, jeux de société, animation musicale, ciné-club, ateliers manuels… le choix est vaste. « Mais ce sont à peu près toujours les mêmes qui y participent, observe le directeur. Notre population est faite de gens de la terre, assez peu attirés par les activités culturelles. » Une activité marche cependant du tonnerre : l’apéro mensuel offert par la maison. « Ce jour-là, tout le monde est présent ! » dit Noémi Blanchet. La convivia-lité qu’il génère – et peut-être aussi la qualité des cocktails offerts – semble un élément fédérateur.

« Nous avons un regard différent sur ce que doit être l’animation, explique le directeur. Nous pensons que l’essentiel doit tourner autour du lien social, du plaisir d’être ensemble ou, pour-quoi pas, de la satisfaction à ne rien faire du tout. En général, dans nos milieux, l’ennui fait peur, comme si un habitant qui n’est pas en activité était un habitant déjà mort, comme s’il ne pouvait se retrouver avec lui-même face à sa vie, à sa propre finitude, à l’échéance ultime. Je reven-dique dès lors pour lui le droit d’aussi s’ennuyer si tel est son choix ou son habitude. »

Parfois l’ambiance se niche au cœur du quo-tidien. Sous l’impulsion de Chantal, qui a rejoint récemment l’équipe de cuisine, débarrasser la table en musique peut se transformer en surprise-party. « Je me souviens aussi d’une partie mémorable de Wii, raconte le directeur. Pas un programme de mise en forme, ni un entrainement cognitif, non, un vrai jeu d’adresse dans lequel les plus acharnés n’étaient pas les plus jeunes aides-soignantes ! »

important était que Louise puisse vivre comme avant avec ses deux compagnons. »

Certains connaissaient déjà le Domaine

avant qu’il se transforme en maison de repos. « J’y venais en vacances avec mon mari, dit Marie-Jeanne. Quand je me suis retrouvée seule, c’est ici que j’ai voulu aller, sinon rien ! » D’autres viennent de loin, comme Huguette qui a quitté Bruxelles pour se rapprocher de sa fille qui habite la région. « Cela devenait trop difficile pour moi de me débrouiller », dit-elle.

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Autre activité à succès : la natation. Le Domaine a la chance de disposer d’une piscine couverte. Un gouffre financier selon le direc-teur, mais dont les aficionados ne peuvent en revanche se passer. Ils sont une dizaine à enchaî-ner les longueurs chaque matin après le petit déjeuner. « Cet hiver, nous avons dû malheureu-sement en fermer l’accès, mais nous avons mis en place une navette en minibus pour les conduire à celle de Couvin. »

Ce minibus transporte aussi chaque mercredi au marché ceux qui le désirent. L’occasion pour les amateurs de s’approvisionner en petites dou-ceurs ou en fruits de saison, de voir du monde, d’aller prendre un verre en ville. Pour les moins valides, un camion épicerie vient à leur ren-contre sur le parking du Domaine tous les jeudis.

Les résidants sont libres de quitter la maison de repos quand ils le souhaitent pour rendre visite à des amis ou à leur famille, ou pour partir en week-end. Ils peuvent aussi recevoir d’autres résidants dans leur chambre, s’inviter réciproquement.

Quelques « jeunes » vivent aussi au Rièzes et Sarts. Souvent, ils se rassemblent dans le hall d’entrée, un point central par lequel tout le monde passe. C’est le cas de Carine, très dépendante, qui souffre de sclérose en plaque et que Christine aide régulièrement à allumer ses cigarettes, de Yves et Dominique, qu’une légère déficience mentale a amené à suivre leur maman venue vivre au Domaine. Régine a quant à elle un tout autre profil encore : cette quinqua-génaire a trouvé ici un lieu de vie adapté à son handicap moteur. Elle vit en parfaite autonomie et, par exemple, reçoit ses neveux « chez elle ». Et quand l’espace de sa chambre est trop exigu pour rassembler tout le monde, l’institution met à disposition une salle de réunion familiale.

HUmanitUDe et Bientraitance

« Les cadeaux que les hommes se sont faits les uns aux autres depuis qu’ils ont conscience d’être, et qu’ils peuvent se faire encore en un enrichissement sans limites, désignons-les par le mot humanitude. ces cadeaux constituent l’ensemble des carac-téristiques dont, à bon droit, nous sommes si fiers, marcher sur deux jambes ou parler, transformer le monde ou nous interroger sur notre avenir. L’humanitude, c’est ce trésor de compréhensions, d’émotions et surtout d’exigences, qui n’a d’existence que grâce à nous et sera perdu si nous disparaissons. Les hommes n’ont d’autre tâche que de profiter du trésor d’humanitude déjà accumulé et de continuer à l’enrichir. »

aLBert JacQUarD, Cinq milliards d’Hommes dans un vaisseau.

L’outil « Humanitude » utilisé au Domaine s’inspire des travaux d’Yves Gineste et de Rosette Marescotti. « Ces deux auteurs ont mis en évidence le fait que certaines personnes, bien que résidant en institution, vivent des situations de très grande solitude relationnelle. Certaines d’entre elles ne reçoivent quasiment plus de regards, d’échanges verbaux ou de touchers agréables, validants. Beaucoup perdent égale-ment leurs capacités à la verticalisation et à la marche en raison de l’accompagnement-soin proposé. Or un être humain a besoin, symboli-quement et si possible physiquement, d’être et de rester un homme debout », insiste Dominique Bigneron.

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Qu’est-ce qu’un soignant ? interrogent Gineste et Marescotti dans leurs ouvrages. « Un soignant est un professionnel qui prend soin d’une personne qui a des problèmes de santé ou qui se préoccupe de sa santé dans le but de l’aider à l’améliorer ou à la conserver, ou pour l’accom-pagner jusqu’à la mort. Mais jamais pour la détruire. Dans cette philosophie nous définissons la personne : une personne... est un être humain... L’être humain est un animal... Celui qui prend soin d’un animal qui a des problèmes de santé est un vétérinaire... Oui, mais l’humain est un animal particulier... L’humanitude est l’ensemble de ces particularités : le rire, l’humour, l’intelligence conceptuelle, la verticalité, l’habit, la socialisa-tion ( famille, repas etc.). On ne devient soignant qu’en s’occupant de l’humanitude. L’humanitude est l’ensemble des particularités qui permettent à un homme de se reconnaître dans son espèce, l’humanité. L’humanitude est l’ensemble des par-ticularités qui permettent à un homme de recon-naître un autre homme comme faisant partie de l’humanité. »

Un moDèLe ?

En novembre 2010 le Domaine des Rièzes et Sarts a vu vingt-cinq de ses lits de maison de repos (MR) se convertir en lits de maison de repos et de soins (MRS). Plus récemment, en novembre 2011, neuf lits de court séjour ont été ouverts. Au vu de la demande toujours plus importante, une extension d’une capacité de quarante-et-un lits a été introduite auprès de la Région wallonne. Faute de budget disponible seule une petite partie de cette demande pourra être satisfaite dans un avenir proche. « Notre espoir le plus cher, confie le directeur, c’est que le Domaine soit reconnu comme un centre pilote pour son expertise dans l’accompagnement diffé-rent des personnes désorientées. Et surtout qu’il donne envie à d’autres équipes d’oser des pra-tiques différentes. » Régulièrement, le Domaine reçoit la visite d’équipes en questionnement, en recherche de sens. C’est avec fierté et enthou-siasme que l’équipe leur montre que d’autres possibles existent… et peuvent se réaliser.

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poUr en Savoir pLUS

RessourcesHumanitude – Comprendre la vieillesse,

prendre soin des hommes vieux.

Y. Gineste et J. pellissier, ed. armand Colin,

2007.

Le secteur des maisons de repos :

diagnostic 2001. l. delvecchio, J. pincé, Kluwer,

les cahiers du troisième âge, Waterloo, 2011.

La maison de repos du 21e siècle : un lieu de vie

convivial, soins inclus. v. Charlot, n. Cobbaut,

J. de Mets, b. hinnekint, M. lambert, Fondation

roi baudouin, bruxelles, 2009.

L’entrée en maison de retraite. Une lecture

systémique du temps de l’accueil. th. darnaud,

esF, paris, 1999

contactdomaine des rièzes et sarts

dominique bigneron, directeur

Chaussée de l’europe 124

5660 Cul-des-sarts

tél. : 060 37 03 11 ou 0497 114 237

site : www.riezes-et-sarts.be

Courriel : [email protected]

crédit illustrations© pascale Meunier

Cahier N° 136Le domaine des Rièzes et Sarts à Couvin

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La LectUre De ce caHier voUS Donne envie De réagir?

Labiso.be est un espace interactif. Sur le site Internet www.labiso.be, vous trouverez un forum qui vous permettra de déposer vos impressions de lecture. Réactions à chaud? Avis divergeant sur une idée défendue par cette expérience? Projets semblables à mettre égale-ment en évidence? Liens à faire avec l’actualité? Témoignage?

N’hésitez pas. Le micro vous est ouvert…

le laboratoire des innovations sociales et de santé c’est :

➝ écrire pour décrire son projet dans l’action sociale et la santé

Présenter son action au delà d’un rapport d’activités, d’un dossier de subvention ou d’une prise de parole publique, c’est une manière de se positionner autrement par rapport à l’extérieur, de décrire ses pratiques professionnelles sous un autre jour. C’est aussi s’extirper du quotidien et prendre le temps de la réflexion : qui est-on, que fait-on, quel sens a l’action… ?

L’équipe de journalistes de Labiso propose cette démarche d’écriture voire même de co-écriture. Concrètement, en fonction des attentes et de la disponibilité des équipes, plusieurs scé-narios peuvent naître de la rencontre avec un journaliste spécialisé. Rédaction par nos soins

sur base d’entretiens et de documents, accompa-gnement dans l’écriture d’un membre de l’équipe tenté par le travail, écriture à quatre, huit ou douze mains, mise en valeur de productions internes… Tout est possible.

➝ éditer dans une collection de livres numériques

Avec Labiso, la démarche d’écriture se pro-longe et se matérialise en une publication d’un livre numérique, partie d’une collection de « cahiers ». Ces petits bouquins, téléchargeables gratuitement sur Internet, peuvent être impri-més, lus à l’écran, compulsés à l’envi. La Toile offre l’avantage d’occuper un espace d’expres-sion et de visibilité aux possibilités infinies. Les cahiers numériques sont recyclables sur n’importe quel site web et d’une formule plus souple que les éditions papiers. Même si l’accès aux nouvelles technologies et à Internet n’est pas encore égal pour tous, investir cet espace d’expression c’est aussi être au plus près des nou-velles réalités sociales, des nouveaux besoins, des nouvelles formes de pauvreté

➝ échanger pour s’inspirer, décloisonner, innover

L’ambition est là : favoriser l’échange sur les pratiques et le décloisonnement entre profes-sionnels, stimuler les démarches innovantes. Une fois sur la Toile, les effets des « cahiers » sont entre les mains des équipes et des lecteurs. Si les équipes ont trouvé intérêt à faire le point, ont modifié leurs pratiques ou déterminé un nouveau projet…, les lecteurs eux, peuvent faire des liens entre différents types d’interventions, s’interroger sur les modèles et, nous le souhai-tons, s’interpeller les uns les autres. C’est en

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tout cas loin des codes de « bonnes pratiques », des grands’ messes institutionnelles, que Labiso propose le premier terme de l’échange.

t2 : labiso cela peut aussi être :

Certains services, certaines associations ont fait le pari de l’Internet comme outil de visibilité, de travail en réseau, d’échanges sur les pratiques. Ils sont conscients des énormes possibilités que leur offre la Toile : devenir émetteur/pro-ducteur et non plus seulement consommateur/récepteur.

Le recours aux nouvelles technologies de la communication est conçu ici comme un outil au service du travail social et de ses travailleurs.

Si la démarche de Labiso montre des effets très positifs, elle est aussi de celles qui néces-sitent une adaptation continue, un questionne-ment permanent, notamment du fait du support qui la sous-tend. Un support, l’Internet, dans lequel il est intéressant que les professionnels de terrain des secteurs de l’aide aux personnes investissent pour l’alimenter de contenus perti-nents et mobilisateurs.

contacts labiso :

[email protected]él. : 02 541 85 36

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La collection est une initiative de l’asbl texto en collaboration avec l’agence alter

où les tâches rédactionnelles sont coordonnées par marinette mormont.

ce cahier a été rédigé par pascale meunier avec l’aide de l’équipe du domaine des rièzes

et Sarts.

il a été achevé le 29 mai 2012.

Le Domaine des Rièzes et Sarts, à Couvin, accueille près de quatre-vingt résidants. Cette maison de repos et de soins mise sur un cadre de vie de liberté, d’autonomie, de citoyenneté et d’humanité. Autrement dit, de respect.

n°136Cahier labiso périodique

Le Domaine DeS rièzeS et SartS À coUvin Une maison de vies solidaire pour adultes âgés

en partenariat aveC

une initiative de

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