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F.F.A LE DEMI-FOND PAR D. DURAND L 'activité demi-fond, envisagée en- core par de nombreux éducateurs comme monotone et relevant essen- tiellement d'une activité énergétique et biomécanique de la prestation physique, est beaucoup plus riche qu'il n'y paraît au premier abord. Dans notre nouvelle démarche, l'éducateur peut privilégier, outre les notions déjà citées, une composante à nos yeux origi- nale du comportement moteur : la compo- sante sensorielle et, à travers elle, l'aspect perceptif de la pratique physique. Une stra- tégie visant à optimiser cette composante permet de créer des rapports étroits entre le sujet en activité, l'espace et la durée dans lesquels il évolue. Pratique consciente et réfléchie, cette acti- vité devient enrichissante en permettant au débutant de mieux maîtriser les inter-rela- tions sujet-milieu environnant. Voici l'ap- proche que nous proposons pour relancer la pratique de la course de durée à l'école, en sollicitant la participation active des élèves par une réflexion et une analyse sensorielle des situations vécues. Outre l'application des grands principes régissant l'énergétique musculaire et les lois du mouvement, notre démarche en demi-fond s'orientera donc délibérément vers la mise en évidence des pôles du « vouloir » et du « savoir » (cf. encadré 1). LES PARAMETRES DE L'ENTRAINEMENT ET DE L'INITIATION AU DEMI-FOND Initiation puis entraînement ne peinent être réellement efficaces et enrichissants pour le coureur débutant que si les situa- tions dans lesquelles il va évoluer sont compréhensibles et cohérentes, donc rele- vant d'une démarche méthodique. La course, activité où le sujet est impliqué dans sa globalité, doit donc être pratiquée avec méthode en mettant en relation les différents facteurs évoqués dans l'encadré 1. Cette méthode utilise trois paramètres pour arriver à des progrès réels, construits rationnellement et que l'on peut objecti- ver : - le volume ; - l'intensité ; - la technicité et la tactique de course. Ces paramètres que nous allons utiliser sont en relation étroite et peuvent diffici- lement être dissociés ; cependant, pour la clarté de l'exposé et des situations propo- sées, nous les analyserons séparément tout en sachant qu'agir sur l'un provoque des transformations sur les autres. PHOTOS PRESSE-SPORTS EPS206 JUILLET AOUT 1987 37 Revue EP.S n°206 Juillet-Août 1987 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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.A LE DEMI-FOND

PAR D. DURAND

L 'activité demi-fond, envisagée en­core par de nombreux éducateurs comme monotone et relevant essen­

tiellement d'une activité énergétique et biomécanique de la prestation physique, est beaucoup plus riche qu'il n'y paraît au premier abord. Dans notre nouvelle démarche, l'éducateur peut privilégier, outre les notions déjà citées, une composante à nos yeux origi­nale du comportement moteur : la compo­sante sensorielle et, à travers elle, l'aspect perceptif de la pratique physique. Une stra­tégie visant à optimiser cette composante permet de créer des rapports étroits entre le sujet en activité, l'espace et la durée dans lesquels il évolue. Pratique consciente et réfléchie, cette acti­vité devient enrichissante en permettant au débutant de mieux maîtriser les inter-rela­tions sujet-milieu environnant. Voici l'ap­

proche que nous proposons pour relancer la pratique de la course de durée à l'école, en sollicitant la participation active des élèves par une réflexion et une analyse sensorielle des situations vécues. Outre l'application des grands principes régissant l'énergétique musculaire et les lois du mouvement, notre démarche en demi-fond s'orientera donc délibérément vers la mise en évidence des pôles du « vouloir » et du « savoir » (cf. encadré 1).

LES PARAMETRES DE L'ENTRAINEMENT ET DE L'INITIATION AU DEMI-FOND

Initiation puis entraînement ne peinent être réellement efficaces et enrichissants pour le coureur débutant que si les situa­tions dans lesquelles il va évoluer sont

compréhensibles et cohérentes, donc rele­vant d'une démarche méthodique. La course, activité où le sujet est impliqué dans sa globalité, doit donc être pratiquée avec méthode en mettant en relation les différents facteurs évoqués dans l'encadré 1. Cette méthode utilise trois paramètres pour arriver à des progrès réels, construits rationnellement et que l'on peut objecti­ver : - le volume ; - l'intensité ; - la technicité et la tactique de course. Ces paramètres que nous allons utiliser sont en relation étroite et peuvent diffici­lement être dissociés ; cependant, pour la clarté de l'exposé et des situations propo­sées, nous les analyserons séparément tout en sachant qu'agir sur l'un provoque des transformations sur les autres.

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EPS N° 206 JUILLET AOUT 1987 37 Revue EP.S n°206 Juillet-Août 1987 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

Le paramètre « volume »

Il se définit comme la quantité de travail réalisé dans l'exercice, la série, la séance ou le cycle.

Objectif : stabiliser les progrès résultant de l'entraînement en qualité.

Moyens de développement

Par la durée du travail ou la distance courue ou, encore, par le nombre de répéti­tions.

Modalités de déroulement

Le relevé de la fréquence cardiaque (FC) pendant l'effort est un indice précieux de contrôle de l'effort. Toutefois, d'autres indices peuvent avoir une utilité dans l'ap­préciation de la quantité optimale de tra­vail à réaliser : • La capacité à reproduire le même effort avec la même intensité sans baisse de l'effi­cacité. La limite de la quantité que l'athlète peut supporter se matérialise par l'appari­tion du « décrochage ». • La capacité à récupérer d'une manière efficace après un exercice ou une série. La régularité et la rapidité des récupérations cardiaques sont un bon indice d'adapta­tion au volume de travail effectué. • L'observation de l'apparition de l'essouf­flement et de la sudation. Un rythme respi­ratoire régulier, une sudation abondante dénotent un travail en dominante aérobie donc à un régime adapté autant par la quantité que par l'intensité. La fourchette de la FC dans laquelle l'athlète doit travailler lors du développe­ment du paramètre « volume » peut être très variable selon : le niveau de pratique, l'intensité à laquelle il court, la forme du travail effectué (continu ou intermittent).

la durée des phases de repos ou des pauses de repos relatif entre les exercices. Pour de jeunes athlètes en début de pro­gression l'entraînement en volume se réali­sera sur la base d'une FC voisine de la FC MAX moins 50 pulsations environ, mais devra évoluer en fonction des progrès, d'abord en jouant sur la quantité, puis sur l'intensité du travail (cf. encadré 2). Le développement du facteur « volume » n'est cependant pas à poursuivre indéfini­ment et son augmentation ne doit pas être un objectif en soi mais seulement un sup­port de travail permettant d'utiliser le paramètre « intensité » le plus judicieuse­ment possible. Seule l'amélioration pro­gressive de l'intensité du travail provoque de réels progrès dans le domaine de la consommation d'oxygène (V02) elle-même clé de voûte des progrès en demi-fond. Trouver la quantité optimale et non maxi­male à chaque niveau de pratique des jeunes athlètes, tel doit être le souci de l'éducateur. Une relation étroite existe entre les deux paramètres « volume » et « intensité » dont nous parlons plus loin : à une faible intensité de travail correspond une quan­tité ou un volume important et inverse­ment, ceci pour chaque niveau de pratique. La notion de recherche constante de la qualité du travail est ici comprise comme le rapport le plus juste entre le volume et l'intensité permettant les progrès de l'élève et la stabilisation des acquis (cf. tableau p. 39). Le coureur expérimenté est capable pour un même volume d'entraînement que le débutant, de le réaliser à une intensité nettement supérieure, donc d'être plus performant tout en étant dans des condi­tions physiologiques (FC, essoufflement) identiques à celles du débutant.

Le paramètre « intensité »

On peut le définir comme le degré de difficulté du travail réalisé dans l'exercice, la série, la séance ou le cycle.

Objectif : stimuler et développer les grands processus d'adaptation à l'effort.

Moyens de développement

Par la vitesse de déplacement qui, par ses conséquences sur la fréquence cardiaque (FC) et sur le degré d'essoufflement, donne une idée concrète de l'intensité de l'effort effectué, pour un sujet donné, à un mo­ment donné de sa pratique.

Modalités de déroulement

Jusqu'à l'atteinte « théorique » de la FC maximum, le sujet est sensé augmenter sa consommation d'02 pour atteindre sa V02 MAX. En fait, il s'avère que la V02 MAX est atteinte légèrement avant que le sujet n'ar­rive à sa FC maximum (1). Concrètement, lors de l'entraînement, l'on peut dire que pour un régime cardiaque proche de la FC maximum (calculée selon la formule « 220 pulsations moins l'âge du sujet ») le coureur atteint son régime de consommation maximale d'oxygène.

Tableau 1 : Conversion métrique des vitesses horaires 1 LES TROIS POLES

DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

LE POUVOIR

Capacité énergétique et technique qui s'ex­prime par la possibilité de durer et de doser l'utilisation de son potentiel technique.

LE VOULOIR

La connaissance des situations compétitives et les motivations s'expriment par l'intérêt que le coureur porte à l'activité tant pour l'entraînement que pour la compétition. Ega­lement, le vouloir s'exprime par des actions de coopération dans le groupe, de perturba­tion des adversaires et l'envie de gagner.

LE SAVOIR

La connaissance de l'activité et de soi, l'intel­ligence et la perception qui font partie de la tactique s'expriment par une connaissance de ses propres possibilités, une capacité de s'adapter au terrain, aux circonstances et à apprécier son allure.

2 UN EXEMPLE DE PLANIFICATION DE L'ACTION

Pour un athlète ayant effectué un test de six minutes de course en continu, à 30" de moyenne par 100 m, en conservant une FC plus ou moins égale à 150 puls./mn.

Première étape pour améliorer le paramètre volume

L'objectif sera d'augmenter les capacités de l'athlète afin qu'il devienne capable d'effec­tuer un test de dix minutes de course en continu, à 29"-30" de moyenne par 100 m en conservant une FC plus ou moins égale à 150 puls./mn.

Deuxième étape pour améliorer le paramètre volume L'objectif sera d'augmenter les capacités de l'athlète afin qu'il devienne capable d'effec­tuer un test de six, puis dix et quinze minutes de course en continu, à 25"-26" de moyenne par 100 m en conservant une FC plus ou moins égale à 170 puls./mn.

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Ce régime de V02 MAX est à travailler et à développer essentiellement chez le débu­tant, avant la spécialisation. Il permet par la suite de greffer, chez les sujets plus âgés et plus aguerris, un travail en intensité à dominante lactique. Un sujet à forte V02 MAX est capable de courir plus vite sans faire appel à la composante lactique de son « moteur » musculaire, qui limite très vite la durée de l'effort par la création d'un état d'acidose qui conduit à une véritable « im­potence fonctionnelle » chez le sujet mal préparé à ce « stress physiologique ».

Le paramètre « technique et

tactique de course »

Il se définit comme apprendre à courir « juste », c'est-à-dire à économiser l'éner­gie tout en étant plus efficace en ce qui concerne le rendement biomècanique.

Objectif : utiliser au mieux les possibilités techniques et tactiques du moment.

Moyens de développement

- Par un travail de la qualité de la foulée, c'est-à-dire la façon dont l'athlète harmo­nise le rapport entre l'amplitude et la fré­quence en fonction de certaines contrain­tes comme la force spécifique de l'appui, la durée et l'intensité de l'effort. - Par la justesse de répartition des efforts. Une course en durée, courue à train régu­lier est plus économique au plan énergéti­que qu'une même course effectuée avec des allures irrégulières et ce, pour un même résultat chronométrique. II s'agit donc d'apprendre à courir réguliè­rement et c'est là que la composante senso­rielle sera sollicitée afin de permettre au coureur débutant de vivre et ressentir tout en « mettant en mémoire » des situations sollicitant la maîtrise de la relation es­pace-durée. - Par la capacité à utiliser et maîtriser les situations compétitives. Le coureur expérimenté est capable d'in­fluer sur le déroulement de l'épreuve et sur les adversaires afin de les éprouver et de les perturber, tout en étant maître de ses ef­

forts, grâce à son sens technique et tacti­que. Ainsi les trois paramètres : la « technique et tactique », l'« intensité » et le « vo­lume » sont en interaction. Développer l'un des paramètres d'une manière domi­nante nécessite d'utiliser les deux autres, ce qui provoque en retour des effets de réajus­tement de ceux-ci par rapport aux nou­veaux acquis.

LES FORMES DE TRAVAIL EN DEMI-FOND

Ayant défini nos objectifs et notre démar­che, il convient de présenter les moyens dont nous disposons pour les atteindre. Ces moyens sont les formes de travail que nous utilisons sans exclusive ; plus les situations seront variées, plus les effets seront efficaces, plus l'enrichissement sen-sori-moteur du sujet sera probant. S

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Nous définissons deux grandes formes d'entraînement : - l'entraînement continu ; - l'entraînement intermittent.

L'entraînement continu

11 peut se réaliser à des intensités plus ou moins élevées. Il faut savoir que plus l'in­tensité augmente, plus vite le sujet se fati­gue, donc moins il peut poursuivre un effort de longue durée. Dans cette forme de travail on distingue des degrés d'intensité différents : - le jogging, travail d'entretien aérobie, se pratique sur de longues distances effec­tuées à intensité modérée (environ 50 % de V02 MAX). Il ne permet pas de progrès en qualité. Il sert souvent dans les « contre-séances » avec comme effet principal de favoriser la récupération active et la régé­nération des réserves ; - l'entraînement continu lent a pour effet le développement de la capacité aérobie (l'in­tensité de la charge de travail se situe entre 75 % et 85 % de la charge de travail maxi­male représentée par VO2 MAX) ; - l'entraînement continu rapide dont l'effet essentiel est de favoriser le développement ou l'entretien de la V02 MAX (l'intensité de la charge de travail se situe entre 85 % et 95 % voire 100 % de la V02 MAX). Toute forme d'entraînement continu contraint plus ou moins vite l'athlète à la cessation de l'effort par un épuisement des réserves énergétiques et ce d'autant plus rapidement que le sujet est moins entraîné et travaille à forte intensité. Une autre forme d'entraînement permet de remédier partiellement au problème à ré­soudre qu'est la quantité ou le volume de travail nécessaire à réaliser pour stabiliser les acquis : c'est l'entraînement intermit­tent.

L'entraînement intermittent

Dans ce type de situation où le coureur alterne des efforts courts et intenses, pen­dant 15" à 45", avec des repos relatifs courts, de 15" à 30", l'organisme fonc­tionne de la façon suivante : - au plan cardio-respiratoire, le sujet sem­ble fonctionner comme dans un régime de travail continu, car, du fait de la faible durée de la pause (moins de 30"), ces grandes fonctions dotées d'une certaine inertie, n'ont pas le temps de revenir à un état de repos même relatif. Il s'en suit qu'elles se maintiennent à un haut régime de fonctionnement et d'autant plus que les « charges » de travail sont d'intensité éle­vée ; - pendant le repos relatif ou « pause », le muscle ne travaillant plus consomme beaucoup moins d'énergie, régénère une partie importante de celle-ci (en particulier les phosphagènes) nécessaire à sa contrac­tion et ceci grâce au maintien à un haut régime de fonctionnement de la respiration et de la circulation. La « filière » d'appro­visionnement en oxygène joue alors plei­nement son rôle épurateur et régénérateur au niveau musculaire. Il s'en suit que le sujet peut fournir des efforts plus intenses et plus longs qu'en

travail continu ; cette forme de travail permet donc de jouer positivement sur l'augmentation de la charge d'entraîne­ment en volume et en intensité. Connaître les formes de travail permet donc, en fonction des objectifs que l'on s'est définis, de varier les situations, d'amé­liorer le niveau tout en maintenant les sujets dans une situation permanente de désadaptation propice aux progrès. Mais, la forme seule du travail ne permet pas totalement de maîtriser l'évolution des progrès des coureurs en formation ; il faut lui adjoindre la notion de registre de travail faisant appel aux différentes gammes d'in­tensités possibles utilisables en demi-fond.

LES REGISTRES DE TRAVAIL EN DEMI-FOND

Un sujet dont le niveau de performance est connu doit effectuer des efforts dans des registres variés afin d'améliorer toutes les qualités nécessaires à la pratique du demi-fond ; ces registres varient, de celui de l'entretien de V02 à l'effort maximal et bref de vitesse, en passant par l'améliora­tion de la V02 MAX et l'accoutumance à l'effort spécifique (vitesse spécifique ou train utile). Toutes ces composantes du travail de demi-fond ont pour but de concourir à la formation complète du coureur. Celui-ci doit être capable de consommer une grande quantité d'oxygène mais aussi de résister à la fatigue en s'accoutumant à l'effort en état d'acidose lactique. Enfin l'athlète doit être capable d'aller « vite » et d'être « relâché » sur un état de fatigue plus ou moins prononcé. Les registres de travail en V02 et V02 MAX représentent donc la base du travail en « volume ». Le développement de ces capacités permet de réaliser par la suite des efforts à dominante spécifique lactique ou non, sans hypothé­quer les possibilités d'accélération termi­nale.

Nous ne prétendons pas avoir fait un tour d'horizon complet de l'entraînement de demi-fond : celui-ci, en effet, comporte bien d'autres composantes dont une non négligeable que nous n'avons pas abordé : le développement de la force qui est une part importante de la préparation muscu­laire du coureur de demi-fond.

En effet, l'amélioration de la force chez le coureur de demi-fond est également béné­fique car elle permettra d'influer sur la technique (force spécifique de l'appui) mais aussi sur l'énergétique (un muscle fort travaille plus économiquement). Notre propos n'a pas d'autre prétention que d'essayer modestement de présenter sous un jour nouveau, plus attrayant, cette activité fondamentale pour la formation de l'athlète, quelle que soit sa future spécia­lité.

INITIATION AU DEMI-FOND

La séance pratique que nous proposons pour illustrer notre démarche qui vise à développer les qualités sensorielles du coureur débutant n'est qu'un exemple parmi d'autres. Elle ne saurait être envisa­gée comme exhaustive dans le choix des objectifs et des situations mises en place. Elle n'est qu'un moyen de répondre au questionnement de l'éducateur sur le constat qu'il peut faire concernant les com­portements du « débutant » dans l'activité, c'est-à-dire : • l'inaptitude à courir à allure régulière longtemps et économiquement ; • l'incapacité d'apprécier finement les du­rées d'effort, ce qui a pour effet de provo­quer de fréquentes erreurs de rythme de course ; • le manque de contrôle et de maîtrise du cycle respiratoire, avec comme consé­quence l'asphyxie et l'essoufflement pré­coces hypothéquant la poursuite de l'effort.

MISE EN TRAIN

Exercice 1

Objectif : Découverte et appréciation des durées.

Déroulement

Courir 20" à allure lente et individualisée sans repère matérialisé et en tout sens dans l'espace. Demander à l'athlète de s'arrêter quand il pense avoir atteint 20" de course. Répéter trois à quatre fois cet exercice.

Variante

Répéter deux à trois fois le même exercice avec une minute de course. Valoriser la réponse juste.

Exercice 2

Objectif : Maîtriser un cycle respiratoire profond et régulier en privilégiant les temps expiratoires actifs consciemment.

Déroulement

Marcher en vidant complètement ses pou­mons au moyen d'une expiration longue et diffuse (non saccadée). Mesurer la durée des temps inspiratoires et expiratoires en les étalonnant sur les ap­puis au sol.

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. Variante

Exécuter le même exercice en courant un tour de piste à allure lente.

Exercice 3

Objectif : Mettre l'athlète en difficulté respi­ratoire afin de provoquer une hyperventila­tion pulmonaire à la fin de l'exercice.

Déroulement

Courir en accélérant sur les temps expira­toires et en ralentissant sur les temps inspi-ratoires, tout en respectant le cycle de la respiration maîtrisé précédemment à allure régulière. Dans cette situation l'athlète atteint, plus ou moins rapidement, un essoufflement important qui entraîne un arrêt de l'exer­cice. Lors de la récupération qui suit cet effort, l'athlète prend conscience de l'hy-perventilation provoquée par cet exercice. Il est conseillé d'effectuer un auto-contrôle manuel en appliquant les mains latérale­ment sur les côtes. Effectuer des étirements spécifiques de la course à pied en fin d'échauffement.

ENTRAINEMENT

Situation 1

Objectif : Découvrir sa vitesse horaire de course.

Déroulement

Construire un parcours balisé avec des bornes matérialisant des vitesses horaires (cf. tableau 1). Départ à un signal sonore pour courir dix secondes ; au signal suivant, le coureur s'arrête et enregistre la borne horaire en face de laquelle il s'est arrêté. Retourner en trottinant au départ. Répéter l'exercice cinq à six fois.

Situation 2

Objectif : Maîtriser sa propre vitesse horaire en l'intériorisant.

Déroulement

Constituer des groupes homogènes à partir des vitesses horaires de chacun.

Distribuer des handicaps correspondant aux différents niveaux des groupes homo­gènes (cf. tableau 1). Les groupes s'élancent pour une course de trente secondes, au terme de laquelle, quel que soit le handicap, ils arrivent sur la même ligne, tous ensemble (cf. schéma 1).

Variante

Exécuter le même exercice, mais un seul coureur de chaque groupe prend le départ. Ceci a pour but d'affiner la perception et le contrôle de sa propre allure.

Situation 3

Objectif : Identique à la situation précé­dente.

Déroulement

Reprendre, par groupes homogènes, les mêmes vitesses horaires que précédem­ment. Partir pour une course de 200 mè­tres ; au passage du 100 mètres, recevoir le temps de passage et arriver dans le double du temps indiqué à mi-course.

Variantes

• « Apprécier » son temps final à partir de l'indication du temps intermédiaire et de ses sensations ; confronter le résultat de l'appréciation au temps réel. • Effectuer les mêmes exercices sur une distance plus longue, de l'ordre de 400 mè­tres, ce qui entraîne une perturbation des sensations et donc de l'appréciation.

Situation 4

Objectif : Identique à la situation 2.

Déroulement

Définir par groupe un temps à réaliser sur une distance de 400 mètres. Changer de « meneur » tous les 50 mètres, cette distance est matérialisée par des plots ou des piquets (cf. schéma 2). Attribuer des pénalités pour les erreurs d'appréciation du temps réel par rapport au temps prévu.

Variantes

• Prendre en compte les erreurs des temps de passage à chaque changement de « me­neur ». • Alterner les contre-efforts trottines ; tous les 50 mètres, retrouver la bonne al­lure après la variation de vitesse.

Nous espérons que cette modeste partici­pation permettra à certains de nos collè­gues, enseignant dans des conditions par­fois difficiles, de renouer avec bonheur des liens vis-à-vis d'une activité considérée comme rébarbative. Nous tenons à signaler qu'une partie importante de cet exposé fut le fruit d'un travail collectif réalisé par le « cercle d'étude sur la course en durée » de l'Académie de Dijon. Ce « cercle d'étude », composé d'ensei­gnants d'EPS de l'Académie, opère à diffé­rents niveaux d'enseignement : élémen­taire, secondaire ou fédéral. Il est réuni et animé par Claude Gauthier (adjoint à l'I.P.R. de l'Académie de Dijon) et une de ses missions consista à harmoniser un ensemble de siutations pédagogiques sous forme de fiches thématiques parues dans « La Course d'Endurance » éditée au CRDP de Dijon en 1983.

Daniel Durand Professeur EPS

Conseiller Universitaire d'Athlétisme Entraîneur 3e degré FFA courses-sauts

NOTES (1) La V02 MAX est atteinte légèrement avant que le sujet n'arrive à sa FC maximum en raison de phénomè­nes liés à la limitation de la masse sanguine dans les muscles qui travaillent. La masse sanguine se répartit aussi dans les tissus au repos et limite donc les possibi­lités de prélèvement de l '02 au niveau local dans les muscles au travail.

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