Le déclin de la dynastie des Ming

42
La dynastie des Ming Apogée et déclin Présenté par : Mélanie Berchier Daniel Burren Rohen d’Aiglepierre Professeur : Jean-Christian Lambelet Assistante : Ana Cristina Molina 1

Transcript of Le déclin de la dynastie des Ming

Page 1: Le déclin de la dynastie des Ming

La dynastie des MingApogée et déclin

Présenté par :  Mélanie BerchierDaniel BurrenRohen d’Aiglepierre

Professeur : Jean-Christian LambeletAssistante : Ana Cristina Molina

1

Page 2: Le déclin de la dynastie des Ming

Introduction

Dans ce travail, nous nous intéresserons à la grande dynastie des Ming, aux succès de ses premiers empereurs qui lui permis d’envoyer un siècle avant les Européens une flotte immense jusqu’en Afrique. A n’en pas douter si les explorations maritimes avaient continué, le jeu des forces coloniales des siècles qui suivirent eut pu être fort différent.On s’intéressera donc aux fondements et aux fonctionnements de la société chinoise sous la dynastie des Ming, à son économie et enfin aux déroulements et implications de ses explorations maritimes. On étudiera donc l’essor des premiers Ming et on se demandera ensuite quelles ont été les causes du déclin des Ming.

La société chinoise avant les Ming

Pour bien comprendre la dynastie des Ming, il est nécessaire de parler des deux dynasties qui la précédent.

La dynastie des Song

En 959, Zhao Kuangyin, chef des troupes du palais de l’une des cinq dynasties, arrache le pouvoir à un chef d’Etat âgé de sept ans. Il réunit la Chine et fonde la dynastie des Song qui régna de 960 à 1279.Sous le règne des Song, la Chine continua à se développer rapidement. Cette période connaît un large progrès pour l’agriculture, les outils et techniques agricoles sont perfectionnés, les voies de communication sont améliorées et on introduit le papier monnaie.

2

Page 3: Le déclin de la dynastie des Ming

La dynastie Song connut aussi un essor scientifique et technique extraordinaire : la poudre à canon fut employée vers l'an mille, l'horloge hydraulique, la clepsydre, qui fut inventée vers 1088, l'imprimerie par xylographes se développa. L'usage de la boussole marine, répandu vers 1100, venant à la suite d'autres progrès techniques dans la construction navale, permit l'expansion commerciale de la Chine. Les jonques de haute mer sillonnèrent les mers de l'Asie du Sud-Est. Fait unique dans l'histoire du pays, la fiscalité d'origine commerciale dépassent alors les revenus du sol. Ces actions permettent la croissance de grands centres urbains approvisionnés par un flux de denrées provenant de tout le pays.

Le règne des Mongols : la dynastie des Yang

Le désert de Gobi et le domaine des steppes sont habités par les tribus nomades turques et mongoles qui y menaient alors une vie rude de bergers et d’éleveurs de chevaux. En dépit de leur ignorance et de leur pauvreté, les Mongols entrèrent à plusieurs reprise en guerre contre les Chinois, d’où il sortirent toujours vaincus.En 1206, Gengis Khan rassembla ses tribus nomades mongoles sous une nouvelle bannière nationale : les « Mongols bleus », en 1215, il s’empare de Pékin. En 1279, le petit-fils de Gengis, Kubilaï Khan, fait passer la Chine entière sous sa domination et fonde la dynastie des Yang. La Chine est alors le plus vaste empire du monde. Kubilaï transféra la capitale à Pékin, qu'il appela Khanbalik (Cambaluc). Il y régna comme empereur de la dynastie chinoise Yang et comme grand Khan des Mongols. Il reprit avec succès le système bureaucratique avec lequel les dynasties chinoises, depuis la dynastie Tang, avaient gouverné. Les Mongols conservèrent néanmoins avec soin leur identité culturelle et les prérogatives de la classe dirigeante; les Chinois furent systématiquement exclus des postes clefs, et des codes de lois discriminatoires furent mis en place. Les Mongols apportèrent aussi de nombreuses modifications à l’administration de la cour chinoise, ils se révélèrent des administrateurs très durs. On améliora le système des canaux et des routes, ce qui favorisa les échanges. Le commerce fut prospère mais les envahisseurs ne parvinrent toutefois jamais réellement à faire accepter leur domination auprès des Chinois.

3

Page 4: Le déclin de la dynastie des Ming

Fondation de la dynastie des Ming

Le règne de Hongwu

Ming Tai Zu connu sous le

nom de règne de Hongwu

(Empereur de 1368 à 1398)

Humiliés pendant un siècle par les Mongols, les Chinois donnent à leur renouveau un sens étroitement nationaliste.La rébellion rurale menée par Hongwu, sociale à l’origine, se transforme bientôt en un mouvement national, qui permet aux Chinois de renvoyer les Mongols à leurs steppes d’origine. Défaisant les chefs nationaux rivaux, Hongwu se proclame empereur et fonde donc en 1368 la dynastie des Ming. Il installe sa capitale à Yingtian. Hongwu est ainsi l’un des seuls fondateurs de dynastie chinoise issu de la classe rurale, il s’est toutefois beaucoup plus positionné en tant que défenseur du confucianisme et des conventions néo-confucéennes qu’en tant que rebelle populaire. Après s’être battu contre l’invasion mongole et les avoir repoussé en dehors de son empire, Hongwu s’est vite rendu compte que la menace mongole était toujours belle est bien présente. Il réévalua donc la vue confucéenne orthodoxe concernant les militaires, qui les voyait comme une classe inférieure à subordonner par la bureaucratie, et travailla à leur rendre prestige et pouvoirs. Il créa donc une caste héréditaire de soldats subvenant par eux-mêmes à leurs besoins en cultivant de la terre mais restant toujours prêts à la guerre. Hongwu, de part ses origines et son éducation confucéenne avait aussi une certaine aversion à commercer. Il développa beaucoup plus l’agriculture notamment en soutenant la création de communautés agricoles autosuffisantes. Au début de son règne il confisqua les terres appartenant aux grands propriétaires terriens et les segmenta en de petites parcelles pour les redistribuer aux paysans.Sous Hongwu, les bureaucrates mongoliens, qui avaient dominé le gouvernement pendant presque un siècle sous la dynastie des Yuan, ont été remplacés par des Chinois, le système confucéen traditionnel d’examen fut remis en place et amélioré. Il permettait de choisir fonctionnaires et bureaucrates d’état sur la base du mérite et de la connaissance, notamment sur la connaissance des dogmes confucéens et des arts littéraires.Afin qu’aucun autre groupe ne puisse gagner assez de puissance pour le renverser, Hongwu tenta et réussi en grande partie à augmenter son pouvoir et son contrôle sur le gouvernement, et ainsi sur l’état chinois. Il supprima donc le secrétariat impérial qui était le corps de l’administration sous les précédentes dynasties. Il supprima aussi le poste de Premier ministre

4

Page 5: Le déclin de la dynastie des Ming

qui permettait de maintenir une continuité et un certain niveau de compétence dans le gouvernement, il supprima ainsi la seule assurance contre les empereurs incompétents.Pour consolider son pouvoir Hongwu fit aussi durant tout son règne exécuter des dizaines de milliers de personnes, dont un grand nombre de généraux et de hauts fonctionnaires.Hongwu qui avait noté le rôle destructif des eunuques sous les Song, eut durant tout son règne une attitude agressive vis-à-vis d’eux, les eunuques virent donc leur influence considérablement réduite, jusqu’à être totalement écartés des sphères du pouvoir.

Le règne de Yongle

Ming Cheng Zu connu sous le

nom de règne de Yongle

(Empereur de 1403 à 1424)

Hongwu eut pour successeur son petit-fils connu sous le titre d’empereur Huidi, toutefois l’un de ses plus puissants vassaux, son oncle le prince de Yan se révolta. S’en suivit une guerre de quatre ans jusqu’en 1402, qui vit la défaite de Huidi. Le prince de Yan accéda au trône et intitula le titre de son règne Yongle, c’est sous ce nom qu’il sera connu dans l’histoire.Une fois sur le trône il procéda immédiatement à l’abolition du pouvoir militaire des princes vassaux, renforçant ainsi son propre règne féodal autocratique.Pour acquérir son trône Yongle du avoir recours aux services des eunuques, ceux-ci commencèrent ainsi à regagner de leur ancienne influence. Il transféra la capitale des Ming de Yingtian à Beijing et recruta pour cela quelque 250’000 artisans et près d’un million de paysans. Trois ans et demi de dur labeur transformèrent Beijing en une grande et magnifique métropole. En 1421, Beijing fut déclaré officiellement capitale nationale et Yingtian, l’ancienne capitale rebaptisé Nanjing. Avec le transfert de la capitale, l’empereur fit mobiliser un grand nombre de paysans terrassiers pour draguer le grand canal, afin d’asseoir le transport ininterrompu vers le Nord du grains de la soie et des tissus de coton produits dans le Sud. Yongle manifesta le pouvoir impériale en dehors des frontières, il conquit l’Annam (Vietnam), le Turkestan, obtint la réouverture de la route de la soie et eut des relations diplomatiques jusqu’en Turquie. Les besoins de la capitale en bois de construction nécessitèrent par ailleurs la pacification des peuples aborigènes du Sud-Est ( Ser Tchouan, Yunnan).

5

Page 6: Le déclin de la dynastie des Ming

L’essor sous les premiers Ming (1368-1435)

Sous le règne de Hongwu et de son fils cadet Yongle, la Chine connaît un moment d’apogée, on peut trouver les racines de cet essor dans plusieurs causes.

Restauration d’un espace unifié

Parti du bas Yang Zi, Hongwu parvient à conquérir le Nord et à rallier certaines provinces restées fidèles aux Yuan, comme le Yun Nan et le Nord-Est. Les armées mongoles furent refoulées vers les steppes septentrionales, et afin de prévenir tout récidive, on construisit une nouvelle Grande Muraille. La ligne de fortification avait cessé d’être frontière depuis les Tang et les ouvrages de défense étaient tombés en ruine. Le tracé du nouveau rempart passa beaucoup plus au sud que l’ancien ; il allait depuis le fleuve Ya lu à l’est, jusqu’à la passe de Jia Yu Guan au Gan Su. En tout 12’700 km, divisés administrativement et stratégiquement en neuf commanderies. Le rôle de cette Grande Muraille était avant tout défensif, mais il ne faut pas oublier d’autres fonctions possibles ; son chemin de ronde pouvait servir de voie de communication et cette route suspendue permettait d’implanter au loin des colons et de contrôler les nomades. Au prix de plusieurs campagne les Chinois parvinrent à maintenir un temps les Mongols au nord de cette limite, les Ming n’eurent toutefois jamais la possibilité de reconquérir tout le territoire de la dynastie des Song.Le déplacement de la capitale vers le nord à Beijing a aussi, du point de vue historique, une grande signification. Beijing jouait le rôle d’un centre de résistance contre les invasions du Nord (par les Mongols et les Mandchous) et de l’Est (par les Japonais)

6

Page 7: Le déclin de la dynastie des Ming

Réorganisation et essor de l’agriculture

Les guerres intestines du début du XIVème siècle avaient porté un grand préjudice à la population des campagnes, mais le départ des Mongols laissait vacantes de grandes étendues de terre, spécialement en Chine du Nord. Hongwu veilla à ce qu’on les répartisse entre les paysans pauvres et à ce qu’on attribue une part aux soldats, qui purent ainsi subvenir à leur propre entretien (système de champs militaires). Le gouvernement adopta une mesure constructive en recrutant des paysans réfugiés pour le défrichement et l’exploitation des terres incultes. Le gouvernement leur fournissait des bœufs pour labourer la terre et des semences pour mettre les nouvelles terres en culture. Il leur était permis de garder comme propriété privée les champs ainsi travaillés. Ces paysans étaient aussi exonérés de tout impôt pour trois ans. On procéda à la restauration des travaux d’irrigation notamment en construisant bon nombre de canaux et de réservoirs.La nouveauté la plus important était probablement l’importation d’une nouvelle sorte de riz, provenant du royaume indien Champa en 1012. Ce riz était plus résistant contre la sécheresse et donnait une meilleure récolte que les sortes chinoises. Les Chinois ont cultivé un riz de Champa qu’ils pouvaient récolter 60 jours après l’avoir semé, ce qui a permis deux récoltes par année. Dans les champs de riz sous l’eau, les paysans ont commencé à élever des poissons. Ceci donnait non seulement une nouvelle source de nourriture, mais a aussi fertilisé les champs et ainsi augmenté leur productivité. En plus, les poissons ont mangé les moustiques portant le paludisme ce qui a fait que les Chinois ont colonisé des régions qu’ils avaient évité autrefois à cause du paludisme. Et en 16ième siècle, les pommes de terre, le mais et les cacahuètes ont été amené de l’Amérique. A partir de la dynastie Ming, il y avait aussi une tendance a faire des monocultures.Pour résoudre sur place le problème de la nourriture de l’armée, Hongwu encouragea un système de défrichement par les soldats. Il spécifia que les garnisons de frontière devaient consacrer 30% de leurs effectifs à la défense et 70% à la culture des terres, la proportion serait de 20/80 pour les garnisons des régions intérieures.Cette politique a fait, que des régions auparavant inoccupées devenaient peuplées. Il y avait des gens qui ont quitté leurs demeures au milieu de la Chine ou aux régions côtières pour s’installer dans ces colonies parce qu’ils se sentaient protégé par la présence des soldats et peut être aussi parce que la terre y était bien et pas chère. Entre 1371 et 1379 la surface cultivée doubla. Le gouvernement entreprit aussi de gigantesques projets de reforestation. En 1391 Nanjing fut reboisé avec quelques 50 millions d’arbres (ces bois serviront à construire la flotte navale de Yongle quelques années plus tard). En 1392 et encore en 1396 on recommande aux paysans de planter des arbres fruitiers dans les provinces d’Anhui, de Hunan et de Hupeh. Au total, plus d’un milliard d’arbres ont été plantés durant cette décennie.Pour prévenir les disettes, chaque région devait avoir des greniers ou lors des bonnes récoltes, on emmagasinait les surplus. En 1394, on ordonna la culture obligatoire du coton, cette plante connue jusque-là surtout au sud du Yang Zi gagna le nord du pays. En général, les résultats de ces mesures furent satisfaisants et l’on estime que vers la fin de l’ère Hongwu, la moitié de la surface du pays était en culture et que la production de céréales était le double de celle des Yuan. Progrès qui explique en partie l’essor démographique qui s’amorce alors.On estime, que la population en Chine était de 65 millions vers la fin du 14 ième siècle et de 150 millions en 1600 et que le taux de croissance était plus élevé en sud du pays qu’en nord.1 Mais il est difficile de faire des estimations parce que les seules statistiques à disposition sont les

1 J.A.G. Roberts A History of China, Volume 1, Prehistory to c. 1800, J.A.G Roberts, 1996 p.190

7

Page 8: Le déclin de la dynastie des Ming

listes d’impôts qui comprennent seulement les nombres des ménages et des hommes imposables. Il faut alors estimer la taille moyenne d’un ménage et le nombre d’individus qui ont évité d’être enregistré pour ne pas devoir payer les impôts.Parallèlement, l’artisanat est réorganisé et le commerce profite de l’élan général, l’empereur peut ainsi prélever des taxes commerciales dans trente-trois cités.

Regain de l’autorité impériale

Comme on l'a vu, les premiers empereurs Ming cherchèrent à renforcer leur autorité et à rehausser le prestige impérial. Ils généralisèrent le système li jia ; onze familles étaient regroupées pour un jia, dix jia pour former un li. Chaque jia et chaque li avait à sa tête un responsable chargé du contrôle et du bon ordre. Un pareil quadrillage permettait une étroite surveillance et entravait dans une certaine mesure les émigrations intempestives. En 1381, on entreprit un gigantesque travail d’enregistrement : recensement de la population et rédaction de « registre jaune », ainsi qu’établissement de cadastres.L’administration centrale fut entièrement réorganisée et l’on créa de nouveaux services qui en principe devaient être des instruments d’autocratie : une sorte de bureau de renseignements (le jin yi wi), un conseil central de cinq ou six membres (le Nei ge) et un deuxième service secret, la garde impériale, qui se consacrait tout entier à la chasse d’informations compromettantes auprès de fonctionnaires et de simple gens du peuple, les plaçant sous la menace constante d’une peine de mort qui pourrait les emporter avec toute leur famille.

La société sous les premiers Ming

Les règnes de Hongwu, de Yongle et des empereurs qui suivirent, qui durèrent 67 ans marquèrent la première et la plus glorieuse période de la Dynastie Ming.L’empire des Ming connut alors, malgré quelques révoltes paysannes, et les troubles fomentés par les pirates japonais sur les côtes, une période de relative stabilité, de prospérité et de richesses. Sous les Ming, la pensé du vieux maître Confucius est érigée en dogme, elle est présente à tous les niveaux de la société chinoise.Un certain élément de nouveauté y est cependant apporté par un penseur confucianiste : le « général-philosophe » Wang Yang Ming, qui introduit dans le système confucéen la notion d’intuition ce qui permet, dans la pratique de justifier n’importe quel acte politique. Hongwu l’utilisa pour justifier le renforcement de son pouvoir d’empereur, face aux eunuques et à l’aristocratie. Pendant les premières années de la dynastie Ming, Hongwu créa les bases d’un état plus favorable au secteur agricole qu’au commerce. Avec peu de compréhension des processus économiques, le fondateur de la dynastie des Ming admit simplement le point de vue confucéen en cours à l’époque, voyant les négociants comme des parasites, il estima donc que l’agriculture devait être la source de richesse du pays et considéra le commerce comme une chose ignoble. Son point de vue confucéen fut sans doute aussi accentué par ses origines rurales. En conséquence même si cette vue fut considérablement adoucie durant le règne des empereurs qui suivirent, le système économique des Ming souligna l’importance de l’agriculture. Ainsi contrairement aux Song qui récoltaient la majeure partie de leurs revenus

8

Page 9: Le déclin de la dynastie des Ming

des impôts sur le commerce, les Ming contaient davantage sur les revenus provenant de l’agriculture.Pour obtenir le plus possible de taxes, les Ming mirent aussi en place à plusieurs reprises de très grands recensements, les impôts étaient en fonction de la classe de l’individu : soldat, paysan ou artisans. Les impôts respectif furent rassemblé par différent ministère ; le ministère des ménage, le ministère militaire, ou le ministère des travaux public.

Cette société des premiers Ming au-delà de ses succès dans les secteurs de l’agriculture et de l’artisanat eut tout de même à faire face à des crises monétaires. En effet, les empereurs Hongwu et Yongle ont distribué l’argent papier en telle quantité, comme récompenses, pour les guerres ou les nombreux projets monumentaux de leurs règnes, qu’ils ont crée une inflation galopante. Ainsi en 1425, la devise ne vaut plus que 1/70 de sa valeur originale, l’état est donc forcé de réintroduire les pièces de monnaie en cuivre.

Toutefois cet essor global de la dynastie des Ming amené par une amélioration de l’agriculture et une autorité puissante de l’empereur eut historiquement deux effets importants. D’une part l’augmentation très importante de la population chinoise, d’autre part cette période permit les grandes explorations maritimes dans les mers du sud, dont nous parlerons plus loin.

9

Page 10: Le déclin de la dynastie des Ming

Partie Commerce / Economie

Cette partie de notre rapport illustre les confrontations entre l’état et le commerce privé pendant la dynastie Ming. Il faut mentionner que les marchands étaient discrédités pendant presque toute la période des empereurs (206 avant J.C. – 1850) à partir du moment où la philosophie de Confucius s’est établie.2 Dès lors, le gouvernement a essayé d’exercer un certain contrôle sur le commerce. Nous verrons que les interventions de l’état Ming n'étaient la plupart du temps pas optimales, on le verra notamment avec l’exemple du commerce du sel dans le chapitre commerce intérieur ainsi qu'avec tout le chapitre sur le commerce extérieur. Cette partie aide aussi à comprendre pourquoi la Chine ne s’est pas industrialisée aussi tôt que certains pays européens, bien qu’elle fût la puissance économique la plus importante au XVème

siècle3. Il y avait une population se montant à 100 millions, des gens cultivés et lettrés, une agriculture fournissant un surplus, une bonne infrastructure, des accès à la mer et des bateaux de très bonne qualité.

Le commerce intérieur 4

La politique des empereurs Ming concernant le commerce intérieur

Ayant vu l’énorme inflation qu’il y avait vers la fin de la dynastie Yang, un objectif de la politique de Hongwu était la stabilisation des prix. Il a ordonné à ces fonctionnaires d’aller voir chaque mois les prix qu’il y avait dans les marchés locaux et de faire subir aux marchands qui demandait des prix trop élevés le supplice de fouet. On punissait aussi les marchands (et non pas les producteurs) s’ils avaient vendu des produits de mauvaise qualité. Par contre, les marchands pouvaient bouger librement et choisir eux-mêmes ce qu’ils échangeaient. Par la réouverture du Grand canal, Yongle a créé des conditions favorables pour le commerce. En effet, l’état Ming était assez neutre face au commerce intérieur. Il ne l’a ni stimulé, ni restreint. Il n’a pas établi des institutions surveillant les transactions et les accords financiers, mais il n’a pas non plus empêché ces transactions et ces accords.5 On verra que ceci n’était pas le cas pour le commerce extérieur.

La structure du marché Globalement, nous pouvons distinguer trois formes de marchés intérieurs: les marchés locaux, les marchés urbain-rural et le marché national.Les marchés locaux se sont multipliés à cause de l’accroissement de la population. Mais ces marchés n’étaient pas très commercialisés. Les producteurs et consommateurs ont troqué leurs biens sans passer par l’intermédiaire d’un marchand. Peu de profit a été réalisé parce que les gens étaient conscients du travail que demandait un certain produit et on a essayé de faire des 2 Roger Goepper Das Alte China C. Bertelsmann 1988 p. 1723 Denis Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, Volume 8, Cambridge University Press 1998, p. 3784 Wolfram Eberhard Geschichte Chinas, Von den Anfängen bis zur Gegenwart A. Kröner Verlag 19715 D. Twitchett, F. W. Mote The Cambridge History of China, V. 8, Cambridge University Press 1998, p. 671

10

Page 11: Le déclin de la dynastie des Ming

prix ‘justes’, ce qui était sans doute dû au confucianisme. Le plus grand nombre de marchés qui ont apparu pendant la dynastie Ming étaient de ce type. Les propriétaires terriens ont déménagé dans les villes, suite à quoi un marché urbain-rural a apparu. Ils y vendaient leurs surplus qu’ils faisaient venir en bateau à travers les rivières et canaux, et ils ont souvent renoncé à faire un profit. Les marchands professionnels ne participaient donc pas toujours à ces transactions. Le 3ème type était le marché national qui est devenu important pendant la dynastie Ming. Ce marché a pu se développer grâce à la bonne infrastructure, qui a facilité le transport, et grâce aux différences géographiques qu’il y avait entre les régions. Le province Shansi (ville Lu-an) dans le nord, par exemple, a dû importer du grain ce qu'elle a payé avec de la soie. La carte suivante montre les principaux flux de marchandises:

L’exemple du Grand canal illustre assez bien à quel point l’infrastructure était primordiale. Il faut ajouter qu’il a été creusé en 605, sous la dynastie Sui, parce qu’en Chine presque toutes les rivières coulent de l’ouest à l’est ce qui avait été un ennui pour le transport de marchandises entre le nord et le sud. Une carte du Grand canal se trouve dans l'annexe.Dans le cadre du marché national, une classe de marchands a apparu qui a profité du fait que les producteurs étaient souvent incapables d'être en contact eux-mêmes avec les clients. Ils ont profité des différences de prix entre les régions. Les deux chapitres suivants éclairent les marchés du type urbain-rural et national.

L’urbanisation et l’industrie des textiles

La modernisation de l’agriculture a encouragé l’urbanisation. La plupart des nouvelles villes ont été fondées dans le bassin du Yang Zi. Les citoyens dans les villes avaient besoin de nourriture et de textiles. Il fallait des manufactures pour satisfaire l’énorme demande d’étoffes et Shanghai est ainsi devenu le centre des tisseurs de coton. On pourrait maintenant se demander pourquoi la Chine n’a pas connu un développement similaire à l ‘Angleterre où l’accroissement de la demande de coton a encouragé l’invention de nouvelles techniques et

11

Page 12: Le déclin de la dynastie des Ming

ainsi marqué le début de l’industrialisation.6 Une théorie dit qu’en Chine cette industrie n’a pas dépassé la phase de production manuelle parce qu’il y avait assez d’ouvriers bon marché et que de petits progrès techniques ainsi qu’un bon réseau de distribution ont permis de satisfaire la demande facilement. Il manquait donc la motivation de faire des innovations. Une autre théorie dit que c’était parce que les commerçants ne s’étaient jamais entièrement émancipés, qu'à cause de l'idéologie de Confucius, très répandue à l'époque, ils n'essayaient pas de maximiser leurs profits.7

A cause de l’industrie des textiles, des petites villes avec des marchés se sont développées, où les fileurs et tisseurs pouvaient acheter la matière première et vendre leurs produits. En plus, les guildes ont gagné du pouvoir et ont parfois réussi à influencer les autorités locales. Enfin, les boutiquiers n’étaient plus obligés de fermer au coucher du soleil. L’état n’y est pas intervenu pas parce qu’il a reconnu qu’en le faisant il aurait probablement détruit ce système où des milliers de gens avaient trouvé une place de travail, ce qui aurait mis en danger la stabilité politique.

Suite à l’urbanisation, le commerce du riz s’est intensifié. Les propriétaires terriens ont acheté le riz auprès des paysans et l’ont vendu à des commerçants qui l’ont transporté en bateau par les rivières vers les villes côtières. Ceci a fait augmenter le prix du riz dans la province et parfois le peuple provincial a attaqué ces bateau pour récupérer le riz.La demande de porcelaine a aussi augmenté à un point où les usines étatiques n’arrivaient plus à la satisfaire et souvent, il n’y avait pas assez d’ouvriers8 (affirmation qui semble contredire ce que nous avons dit sur l’industrie de coton à Shanghai, mais il faut tenir compte du fait que l’industrie de porcelaine se situait surtout dans la province Jiangxi avec la capitale Nanchang qui se trouve à 600km de Shanghai). En 1601, les 10'000 ouvriers de l’atelier impérial ont protesté contre le gérant qui avait exigé un accroissement de la production.9 Il n’est donc pas étonnant que des ateliers privés aient été fondé. Le travail dans ces ateliers était hautement divisé, parfois jusqu’à 70 ouvriers ont travaillé sur une pièce.

Le commerce du sel et les garnisons militaires aux frontières

Une chose qui a influencé le commerce intérieur était la menace persistante des Mongols. Pour se protéger, les Chinois ont stationné des garnisons aux frontières. Comme expliqué précédemment, les soldats ont travaillé partiellement comme paysans. Mais comme la production agricole dans ces colonies militaires était insuffisante, le gouvernement a utilisé un autre moyen. Il a promis des coupons de sel à chaque marchand qui transportait du blé vers les frontières. Pour ces coupons, le marchand recevait une certaine quantité de sel qu’il pouvait vendre en faisant un grand profit. Il faut mentionner que l’état avait le monopole sur le sel. Avec ces gains, le marchand pouvait acheter du terrain qu’il faisait exploiter par un fermier. Le fermier payait le bail avec du blé que le marchand revendait aux militaires en augmentant ainsi ses gains. Quand le gouvernement apprit ceci, il arrêta de donner des coupons de sel et paya le blé avec de la monnaie pour diminuer les gains des marchands. Comme conséquence, les marchands cessèrent leurs livraisons, le prix du blé dans les régions frontalières augmenta et ainsi l’efficacité des troupes fut réduite. Après, les marchands ont fait du commerce avec l’argent, le riz et le coton. Au XVIème siècle, ils avaient souvent des contacts avec des contrebandiers de qui on parlera plus tard.

6 Prof. H.Günther-Arndt, Prof. J. Kocka Geschichtsbuch 3 Neue Ausgabe Cornelsen 20007 J.A.G. Roberts A History of China, Volume 1, Prehistory to c. 1800, J.A.G Roberts, 1996 p.1928 Wolfram Eberhard Geschichte Chinas, Von den Anfängen bis zur Gegenwart A. Kröner Verlag 1971 p. 3079 Patricia Buckley Ebrey China, eine illustrierte Geschichte, Cambridge University Press 1996 p. 217

12

Page 13: Le déclin de la dynastie des Ming

Commerce extérieur

Nous nous sommes limités au commerce extérieur dans l’entourage de la Chine, et n’avons donc pas traité les relations de la Chine avec l’Europe et l’Amérique. Nous abordons la politique extérieure, en montrons les conséquences et essayons d’en comprendre les motivations.

Le système du tribut

Le système du tribut marchait ainsi: la cour chinoise accueillait des délégations apportant des produits (le tribut) de leurs pays, et fournissait des contre-dons qui valaient, pendant la dynastie Ming, souvent plus que le tribut. La Chine a réglementé le nombre de délégations et le volume de leurs tributs.Ce système a gagné de l’importance à partir du règne de Hongwu, qui était marqué par des efforts visant à contrôler les échanges avec l’étranger, à les canaliser sur l’apport du tribut, et même à en réduire le volume, “afin d’alléger le poids budgétaire, occasionné par l’accueil des étrangers et par la fourniture des contre-dons.” Nous précisons que cette justification nous semble douteuse parce que d’après nous, l’état aurait pu réaliser des profits sur le commerce extérieur en appliquant la bonne politique comme l’avait fait le gouvernement des Song, qui s’était engagé lui-même dans le commerce. Il avait eu le monopole sur certains produits d’importations et, entre les années 1076 et 1078, les bénéfices de la vente de ces produits et les taxes douanières avaient représenté environ 12% du revenu de l’état10. En 1374, Hongwu a interdit le commerce extérieur à titre privé et a ainsi mis fin au libre échange avec l’étranger, qui avait connu un essor florissant pendant de nombreux siècles. Les raisons pour cette mesure ne nous sont pas très claires. Selon l'historien Gang Deng, la raison était que la Chine voulait donner la priorité au développement de l’agriculture, à la défense et à l’assurance de la sécurité intérieure.11 Mais pourquoi un commerce extérieur privé empêcherait-il ceci? La raison n'était-elle pas plutôt que la cour chinoise craignait que les marchands ne rendent inutile le système du tribut et qu’elle ne perdre son influence sur le commerce extérieur? Depuis l’interdiction, le commerce extérieur officiel se limitait à ce système du tribut. Hongwu a restreint, en 1374, le nombre de délégations de la Corée portant un tribut à une arrivée tous les trois ans et, par la suite, il a fait de même pour l’Annam, le Siam, le Cambodge et Java. En 1383, des limites sur le nombre de bateaux formant une délégation et sur le volume de certains produits d’importations ont été introduites.Néanmoins, la Chine a continué à recevoir des quantités importantes. Voici quelques exemples. En 1394, le Cambodge a envoyé 35.8 tonnes d’encens comme tribut. Une autre année, le Siam a envoyé six tonnes de poivre et 60 tonnes de bois sapan (sapanwood), et en 1485 le Japon a livré 38'610 épées, ce qui était assez pour armer 7 divisions de la cavalerie Ming. Le gouvernement recevait de telles quantités qu’il a parfois payé les officiels et soldats avec du poivre ou du bois sapan au lieu de donner de la monnaie ou du blé.12 Il se pose la question de savoir pourquoi le gouvernement a accepté ces immenses quantités qui lui étaient inutiles. D'autant plus en considérant la politique de l’empereur Yongle (1403-1424), qui consistait à encore stimuler l’apport du tribut et qui était, par ce point, différente de celles des

10 Charlotte von Verschuer Le commerce extérieur du Japon G.P. Maisonneuve et Larose 1988 p. 3411 Gang Deng Chines Maritime Activities and Socioeconomic Development, Greenwood Press 1997, p. 8812 Gang Deng Chines Maritime Activities and Socioeconomic Development, Greenwood Press 1997, p. 86

13

Page 14: Le déclin de la dynastie des Ming

autres empereurs de la dynastie Ming. Nous avons trouvé une explication dans une citation de Yongle :

« Par admiration pour l’Empire du Milieu, les barbares viennent nous apporter un tribut. Ils traversent la mer périlleuse et se frayent un chemin sur des milliers de lieues. La route est lointaine et les frais occasionnés par ce voyage sont considérables. Les paiements qu’ils reçoivent les aident à couvrir les frais...Comme les armes ne peuvent pas être vendues sur le marché public [il s’agissait d’un certain nombre de sabres que les Japonais ont apporté en plus de ceux qui faisaient partie du tribut], le gouvernement les achètera au prix normal en Chine. Ne lions pas les mains (aux barbares) en leur infligeant des interdictions. Cela va à l’encontre des ambitions généreuses de la cour impériale et décourage le désir d’allégeance des peuples lointains. »13

Cette source révèle que les Chinois ont considéré les peuples voisins comme des barbares qu’il fallait civiliser. Le but du système de tribut était alors d'exporter la culture et la civilisation chinoises et non pas de faire des profits ce que confirme le fait que les contre-dons des Chinois (tissus précieux, robes en soie, satin, monnaie, céramique) valaient souvent plus que le tribut. Mais pourquoi voulaient-ils civiliser lesdits barbares vu que ceci a apparemment été si coûteux ? La réponse est que les Chinois pensaient pouvoir ainsi empêcher d’éventuelles invasions de ces barbares.14 Une idée qui, selon nous, était fausse vu les attaques des Mongols, Mandchous et des pirates mentionnées plus loin dans ce rapport. Nous montrerons que ce système du tribut, fait pour assurer la défense des frontières, déclenchait en réalité des conflits (un exemple illustratif, parlant de trois riches familles japonaises, se trouve tout à la fin du sous-chapitre suivant) et était, avec l’interdiction du commerce privé, à la base de l’émergence de la piraterie.

Le Japon dans le cadre du système de tribut

Regardons de plus près le cas du Japon. Ceci pour deux raisons. Premièrement, le Japon n'a souvent pas suivi les règles du système du tribut imposées par les Chinois, ce qui nous permet d’examiner les réactions de la cours chinoise. Et deuxièmement, et ceci va introduire le prochain chapitre, l’exemple du Japon nous permet d’illustrer les raisons d’un engagement de certaines familles japonaises dans les activités du commerce illicite et de la piraterie.Au début de l'ère Yongle (1403-1424), le Japon a été autorisé à envoyer une mission apportant le tribut tous les dix ans, comptant au maximum deux cents membres par délégation, montés dans deux bateaux au plus. Pour le gouvernement du Japon, ce système présentait un gros avantage, celui de lui procurer le monopole des échanges avec la Chine. Toutefois, il a violé le règlement en envoyant une délégation en 1404 et d’autres en 1405, 1406, 1407 et 1408. Mais ces délégations ont été toutes très bien reçues en Chine, et raccompagnées au Japon. Par contre, le gouvernement chinois était plus sévère envers des expéditions privés. Ainsi, il a refusé la délégation d’un certain Shimazu Ujihisa en 1374, faute d’une lettre officielle des autorités japonaises. Pour donner une idée des profits que les Japonais pouvaient tirer des transactions, voilà quelques chiffres. La location d’un navire, les salaires de l’équipage et les provisions coûtaient environs 1500 ligatures. Le chiffre d’affaires que l'on pouvait réaliser avec un tel navire se montait à 100'000 ligatures ; ceci grâce aux énormes différences de prix (prix de 13 Charlotte von Verschuer Le commerce extérieur du Japon G.P. Maisonneuve et Larose 1988 p. 10814 Denis Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, Volume 8, Cambridge University Press 1998, p. 223

14

Page 15: Le déclin de la dynastie des Ming

marché ou prix payés par le gouvernement chinois?) entre le Japon et la Chine (dans l’annexe se trouvent deux listes des exportations du Japon vers la Chine qui montrent différents produits et leurs prix en Chine et au Japon).Selon un commerçant japonais, rien n’était plus profitable que le commerce du fil de soie. Apparemment, une livre de fil valait 20 fois plus au Japon qu’en Chine. Le cuivre, par contre valait la même chose dans les deux pays en 1453. Ce commerçant conseilla alors d’échanger le cuivre en Chine contre du fil de soie ce qui donnait un chiffre d’affaires énorme. Il y a d’autres exemples comme celui-ci, qui nous laissent deviner combien les affaires menées par les délégations en Chine furent lucratives.15 De ce point de vue, il est compréhensible que les Japonais avaient toujours tendance à dépasser les limitations sur le tribut. Etant donné que la cour chinoise n’admettait pas le principe d’un commerce extérieur privé, elle était obligée d’acheter les produits apportés par les représentants japonais risquant sinon de stimuler un trafic sauvage. Dans la pratique, pourtant, l’administration chinoise autorisait à partir d’un certain moment la mise en vente dans la capitale des articles trop nombreux pour être absorbés par les autorités.16 A côté du gouvernement japonais, il y avait des investisseurs privés qui en ont profité. En effet, parfois le gouvernement japonais a chargé une famille riche et reconnue de l’organisation d’une mission envoyée en Chine. Suite à un incident où des représentants japonais, qui se trouvaient sur le chemin de retour de Pékin, ont tué quelques Chinois au cours d’une mêlée, la Chine a imposé des règles plus rigoureuses sur les délégations japonaises en 1496. A partir de là, seulement une mission était autorisée à se rendre à Pékin. Mais vers la fin du XVème siècle, il y avait trois familles puissantes (Ise, Hosokawa et Ouchi) qui aspiraient à contrôler le commerce avec la Chine. Evidemment, elles se sont disputé cette permission et finalement, en 1523, la famille Hosokawa et la famille Ouchi sont allées à Ning-Po, ville côtière en Chine. Là, les Ouchi ont corrompu les autorités locales pour être acceptés, suite à quoi les Hosokawa ont attaqué les Ouchi et maraudé la ville. Le commandant Ming chargé de les poursuivre a été tué dans une bataille maritime. Ceci a eu des conséquences : depuis là, aucune mission japonaise violant le règlement, qui permettait une mission par décennie, n’a été acceptée. A cause de cela, ces familles japonaises et des marchands ont, entre 1530 et 1550, commencé à contacter des marchands chinois qui se sont installés sur des îles pour trafiquer. Ainsi, le commerce illicite des contrebandiers s’est développé17.

Le commerce illicite et la piraterie

Vu les possibilités d’arbitrage qu’offraient les différences de prix entre la Chine et d’autres pays, il n’est pas étonnant qu’un commerce illicite important se soit développé. Souvent, les contrebandiers et les pirates étaient les mêmes personnes ; quand il n’y avait pas d’affaires à faire, ils pillaient des villes chinoises. Au début de la dynastie Ming, il y avait encore relativement peu de pirates. Ils venaient surtout du Japon et de la Chine. Parfois, les pirates chinois se sont déguisés en Japonais quand ils ont pillé des villes ou négocié avec des marchands chinois pour tromper les autorités chinoises. Au cours du temps, les contrebandiers ont amélioré leur organisation et ainsi, durant les XVème et XVIème siècles, le trafic et la piraterie atteignaient des dimensions jamais vues. Un

15 Charlotte von Verschuer Le commerce extérieur du Japon G.P. Maisonneuve et Larose 1988 p. 11716 Charlotte von Verschuer Le commerce extérieur du Japon G.P. Maisonneuve et Larose 1988 p. 11917 Denis Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, Volume 7, Cambridge University Press 1988, p. 492

15

Page 16: Le déclin de la dynastie des Ming

certain Wang Zhi, par exemple, avait une flotte comprenant plusieurs centaines de bateaux guerriers que même les forces impériales (chinoises) n’osaient pas à affronter.18 En plus, les contrebandiers devenaient internationaux. A côté des Chinois et Japonais, il y avait des Portugais, Vietnamiens, Africains et d’autres. La cour chinoise n’arrivait pas à intervenir de manière efficace. Fréquemment, les contrebandiers corrompaient les autorités locales. En plus, certains officiers militaires Ming, chargés de lutter contre le commerce illicite, n’avaient souvent pas la motivation de le faire, parce qu’ils en faisaient eux-mêmes partie en jouant comme courtier entre les pirates, contrebandiers et les marchands chinois.19 Il y avait même des hauts fonctionnaires qui ont mené une double vie, comme par exemple Lin Xiyuan qui est devenu magistrat à Nanjing en 1530 et qui possédait une flotte commerciale à côté. Mais mentionnons aussi un exemple d’une coopération entre un contrebandier et les autorités chinoises. Entre 1549 et 1552, Wang Zhi a capturé deux leaders pirates qu’il leur a livrés. Il a espéré ainsi pouvoir motiver la cour chinoise à assouplir l’interdiction sur le commerce privé. Pourtant, ceci n’a pas été fait et Wang Zhi a attaqué des établissements publics. Pendant les étés de 1545 et 1546, il y eut des sécheresses dans le bassin du Yangtze ce qui a causé des famines, raison pour laquelle des milliers de gens ont joint les pirates.20

Nous en déduisons qu’il était quasiment impossible d’imposer l’interdiction sur le commerce privé, ce qu’on peut d’ailleurs déjà conclure simplement en regardant une carte. La Chine est un pays beaucoup trop grand avec un littoral trop long pour pouvoir appliquer de telles restrictions. Mais apparemment, les empereurs chinois n’aimaient pas les solutions faciles, comme le montre aussi l’exemple suivant. En 1540 Altan a réunifié les Mongols sous lui. Après que la Chine eut refusé sa demande pour une reprise des relations commerciales, qui avaient été rompues en 1500, il a fait une série d’attaques. Au lieu d’accepter un commerce, la Chine a agrandi le muraille. Seulement après avoir subi des années d’attaques, la Chine a fait un accord avec Altan en 1571.21

Enfin, en 1567, les autorités chinoises ont aboli l’interdiction sur le commerce, et l’ironie de l’histoire, le port de Yuegang, où était le centre des activités des contrebandiers, a été légalisé en premier.22 Suite à cette décision, les pirates ont cessé de saccager les villes côtières de la Chine.

Le commerce extérieur après l’abolition de l’interdiction

Les marchands chinois pouvaient dès lors légalement participer au commerce mondial qui était constamment en train d’accroître. Le tableau suivant donne vaguement une idée de cet accroissement. Il indique le nombre de bateaux qui sont allés à Manille, colonie chinoise où les Chinois ont échangé, avec les Espagnols, les Portugais et les Hollandais, de la soie, du coton et de la porcelaine pour de l’argent, des armes et des produits provenant d'Amérique comme le sucre et les pommes de terre.

18 Gang Deng Chines Maritime Activities and Socioeconomic Development, Greenwood Press 1997, p. 8919 D. Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, V. 7, Cambridge Univ. Press 1988, p. 49020 D. Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, V. 7, Cambridge Univ. Press 1988, p. 49621 J.A.G. Roberts A History of China, Volume 1, Prehistory to c. 1800, J.A.G Roberts, 1996 p. 19622 Gang Deng Chines Maritime Activities and Socioeconomic Development, Greenwood Press 1997, p. 93

16

Page 17: Le déclin de la dynastie des Ming

Conclusion Partie Economique

Vu le système du tribut et les activités du trafic illicite, il est faux de dire que la Chine s’est fermée vers l’extérieur pendant la dynastie Ming.Mais à cause de sa politique restrictive, la cour chinoise a manqué la possibilité de percevoir des impôts sur un commerce extérieur florissant. Au lieu de l’état, des personnes privées, comme les contrebandiers, en ont profité et sont devenues riches. Pour la cour chinoise, pourtant, le commerce extérieur était quelque chose de très coûteux. Elle a dépensé beaucoup d’argent pour combattre les pirates et les contrebandiers ,et le commerce extérieur, qu’elle a mené par le système du tribut, était déficitaire.

Les expéditions maritimes chinoises

La dynastie des Ming atteignit son apogée durant le premier quart du XVème siècle. C’est à ce moment qu’eurent lieu leurs fabuleuses expéditions maritimes. Rappelons qu’après la mort de Hongwu (le premier empereur de la dynastie), ce fut Yongle qui arracha le pouvoir à son neveu pour devenir le nouvel empereur en 1402. Il régna jusqu’en 1424, et nomma des eunuques à des positions importantes, dans le but de faire contrepoids au pouvoir des bureaucrates. L’un de ces eunuques, nommé Zheng He, fut chargé par Yongle de superviser la construction d’une flotte gigantesque pour mener des expéditions dans les « océans de l’Ouest ». En 1405, Zheng He commença la plus grande expédition navale jamais menée à cette époque. Pendant plus de 28 ans, il dirigea 7 voyages épiques et visita une trentaine de pays étrangers, du sud-est asiatique jusqu’à la côte est de l’Afrique. Une théorie récente prétend même que Zeng He gagna les Caraïbes et donc découvrit l’Amérique avant Christophe Colomb23. Toutefois cette théorie assez invraisemblable trouve peu de support parmi les historiens.Intéressons-nous maintenant de plus près à ces expéditions. La flotte de Zeng He quitta Nanking en 1405 et navigua le long de la côte chinoise jusqu’à Champa, visita Java et Sumatra, puis Ceylan une fois passé le détroit de Malacca. Elle longea ensuite la côte est de 23 Gavin Menzies, historien anglais

17

Page 18: Le déclin de la dynastie des Ming

l’Inde et rentra en Chine en 1407, avec à son bord des émissaires pour l’empereur venant de différents pays visités. Un second voyage parti pour l’Inde en 1407 mais ce ne fut pas Zeng He qui dirigea l’expédition, car il resta en Chine pour superviser les réparations d’un temple bouddhiste. Le troisième voyage suivit de très près la route du premier, mais cette fois, ils établirent des entrepôts le long de leur parcours pour le commerce et le stockage de biens. Lors de ce voyage, le roi de Ceylan fut agressif et manqua de respect aux visiteurs. C’est pourquoi il fut capturé et emmené en Chine « pour lui apprendre les bonnes manières ». Il fut ensuite ramené à Ceylan au cours d’un autre voyage. Le quatrième voyage fut le plus ambitieux :ils atteignirent Hormuz dans le Golfe Persique, ville connue pour sa richesse et ses biens, notamment les métaux et pierres précieuses. Lors du voyage de retour, ils visitèrent la famille royale de Sumatra et l’aidèrent à venir à bout d’un soulèvement. En voici l’histoire mouvementée et amusante :« Le vieux roi de Sumatra avait été assassiné par un souverain voisin, le « roi à la face tatouée », et l’héritier était trop jeune ou pour assumer le pouvoir, ou pour venger son père. La reine fit alors serment d'épouser tout homme qui vengerait la mort de son mari et de partager avec lui le trône vacant. Un simple pêcheur – comme dans un compte de fées – se présenta et, prenant la tête des troupes, se lança à l’attaque du royaume de l’homme à la face tatouée. La reine tint promesse, le pêcheur l’épousa et devint roi de Sumatra. Mais son règne ne fut pas de tout repos. Le prince héritier était devenu grand, et, pour récupérer une place qu’il considérait comme lui revenant de droit, il n’hésita pas à tuer le pécheur. L’histoire ne finit point là. Le pécheur avait un fils, qui s’était échappé, et vivait dans les montagnes. Rassemblant des partisans et des gens de sa caste, il ne cessait d’harceler le trône, par ses attaques réitérées. C’est contre cet importun que Zheng He fut invité à exercer ses talents de guerrier. Tel un Hercule oriental, il n’eut pas de difficulté à en finir en une seule bataille et à s’emparer du rebelle. »24 Enfin, pendant les cinquièmes et sixièmes voyages, ils passèrent par Aden, visitèrent l’Afrique orientale et descendirent jusqu’à Malindi (au Kenya actuel), en passant par Mogadisho. Ils traversèrent aussi la Mer Rouge jusqu’en Egypte. Après la mort de Yongle en 1424, son successeur décida de l’arrêt des expéditions. Mais Zheng He put entreprendre son septième et dernier voyage en 1431, sous le règne d’un autre empereur, favorable lui aux expéditions. Pour certains, Zheng He serait mort pendant le retour en Chine, mais on peut aussi lire que sa mort eut lieu en 1435, une fois rentré en Chine. Quoi qu’il en soit, l`ère des expéditions touchait à sa fin. Nous reviendrons sur quelques une des raisons de cette fin prématurée plus loin dans le texte.

24 Tsui Chi, histoire de la Chine et de la civilisation chinoise

18

Page 19: Le déclin de la dynastie des Ming

Zheng He

Zheng He est né vers 1371 dans la province actuelle duYunnan, au sud-ouest de la Chine et il s’appelait alors Ma He. Sa famille était musulmane et le père et le grand-père du garçon firent un très long pèlerinage àla Mecque. Il grandit ainsi en parlant arabe et chinois,apprenant beaucoup sur la géographie et les coutumes occidentales. Ces connaissances lui seront fort utiles pourtraiter plus tard avec les souverains islamistes lors de sesexpéditions. Yunnan était la dernière enclave de loyalistesYang. Lorsqu’elle fut conquise par l’armée de Ming, lesjeunes garçons, parmi lesquels Ma He furent capturés et castrés. Ma He, alors âgé d’une dizaine d’années fut placécomme servant dans la maison du prince de Yan. Il put apprendre les arts de la guerre et de la diplomatie et finit par servir dans l’armée de son prince comme officier.En quelque sorte, le prince et Zheng He devinrent amis.Le prince, devenu l’empereur Yongle lui donna le nomde Zheng He, et plus tard le titre d’amiral pour dirigerles expéditions.La légende dit de Zheng He qu’il mesurait 2m27, ce qui est très surprenant, surtout pour un Asiatique. Il est décrit comme d’une force étonnante, d’un visage agréablement modelé avec une dentition admirable. Il marchait avec la souplesse du tigre et sa voix résonnait comme le tonnerre.

19

Page 20: Le déclin de la dynastie des Ming

Aujourd’hui, Zheng He est quasiment inconnu en occident, mais il est la fierté de toute l’Asie. En Asie du sud-est, il y a des temples bâtis en son honneur, et à Malacca, une montagne porte son nom.

Les motivations

Comme nous allons le voir, ces expéditions étaient motivées essentiellement par des raisons d’ordre politique, bien qu’elles aient comporté un élément important de commerce.Rappelons tout d’abord que le nouvel empereur Yongle était considéré comme un usurpateur, pour avoir ravit le pouvoir à son neveu. Cette flotte spectaculaire constituait ainsi une très bonne opportunité de redorer son image, tout en faisant étalage de la puissance et de la richesse de la Chine.D’autre part, ces expéditions contribuèrent à instaurer de bonnes relations diplomatiques. Par exemple, la flotte accompagnait des souverains ou ambassadeurs étrangers jusqu’en Chine. Malgré sa puissance, la Chine n’avait pas l’ambition de créer un empire colonial, comme les expéditions européennes plus tard dans le XVème siècle. L’idée fondamentale était plutôt de créer une sorte « d’impérialisme culturel et moral ». La Chine montrait ainsi sa supériorité, et civilisait les pays visités.Yongle voulait aussi stimuler le tribut. Le tribut constituait en quelque sorte en des échanges commerciaux officiels montrant la supériorité de la Chine et ayant aussi comme but de civiliser les pays y étant soumis.Le commerce a joué un rôle important dans ces expéditions. Le commerce d’Etat d’abord, de part le tribut. Mais il faut aussi mentionner la présence de nombreux marchands participants aux expéditions. Cependant, nous répétons que ce n’était pas le but principal de ces voyages. De plus, Zheng He était un diplomate, un officier et un amiral, mais pas un commerçant.

Les apports des expéditions

Les rois et princes étrangers admiraient particulièrement la porcelaine bleue et blanche des Ming. Ils appréciaient également beaucoup la soie chinoise. Les expéditions de Zheng He contribuèrent à développer le goût pour ces produits à l’étranger. Ils transportaient aussi de l’or, de l’argent, des ustensiles en cuivre, des outils en fer et du coton.En échange de tels biens, et en tant que tribut, Zheng He ramena des perles et pierres précieuses, des épices, de l’ambre, des herbes médicinales, des défenses d’éléphant et des cornes de rhinocéros, de même que des animaux exotiques. Il s’agissait de lions, de zèbres, d’autruches et de panthères. Mais l’animal qui semble les avoir le plus intrigués fut la girafe. Elle provenait de Somalie, et là-bas, le mot pour la girafe ressemblait beaucoup au mot chinois pour l’unicorne, un animal légendaire, avec lequel elle fut initialement confondue. Ces animaux n’étaient cependant que des curiosités, et ne donnèrent pas lieu à des échanges commerciaux importants.Les voyages de Zheng He transportèrent aussi les connaissances chinoises avancées sur la navigation hors de Chine. On peut citer le compas, qu’ils plaçaient à l’intérieur d’une capsule remplie d’eau, ainsi malgré les oscillations du bateau en cas de mauvais temps, le compas gardait une certaine stabilité et pouvait être lu.Ces expéditions étaient également une source importante d’information sur les pays étrangers.

20

Page 21: Le déclin de la dynastie des Ming

Une girafe amenée d’Afrique en 1414, dessiné par Shen Du

La flotte et les hommes de Zeng He

La flotte de Zheng He était appelée la flotte des trois trésors. Lors de la première expédition, elle comptait 28000 hommes, comprenait 62 gros navires, et des centaines de petits vaisseaux les accompagnaient. C’était alors la plus grande expédition navale de l’histoire.La Chine pouvait se vanter d’avoir les vaisseaux les plus grands du monde. Le vaisseau mère de la flotte de Zheng He était long de 120m, large de 50m et pouvait transporter plus de 500 hommes. Ci-dessous, ce bateau est superposé avec le bateau Santa Maria de Christophe Colomb pour donner une bonne idée de leur taille relative. On constate aussi sur cette image que le bateau comptait 9 mâts.

En plus des hommes, la flotte transportait aussi assez de nourriture pour tout le voyage, au cas où la nourriture étrangère ne leur conviendrait pas, et aussi les grandes quantités de produits qu’ils échangeaient.

21

Page 22: Le déclin de la dynastie des Ming

A côté des marins, la flotte comprenait des soldats, gens de l’administration, commerçants, docteurs, cuisiniers, interprètes, astrologues, météorologistes…Elle incluait aussi des religieux musulmans et bouddhistes pour faciliter le dialogue avec les sociétés pratiquant ces religions.Nous allons nous intéresser à l'aspect militaire de ces expéditions. La grande majorité des passagers étaient des soldats. Leur fonction était d'abord de faire étalage de la force de la Chine à l'étranger en présentant les armes. Par ailleurs, les armes ne furent utilisées qu'à trois reprises, dont une fois pour aider le roi de Sumatra, comme raconté précédemment. Mais à aucune occasion, ils ne firent usage de la force à titre offensif. Les expéditions avaient aussi comme but de rechercher Huidi, l'empereur déchu, qui s'était probablement échappé par la mer.

Pas de suite, pourquoi?

Les eunuques, qui supportaient les expéditions, virent leur pouvoir à la cour diminuer au profit des bureaucrates. On vit alors s'accroître l'influence de l'idéologie confucéenne. Elle voulait limiter le pouvoir croissant de la classe marchande, et selon elle, les pays barbares ne pouvaient rien offrir à la culture chinoise. Les intérêts politiques de la Chine ne cadraient alors plus avec les expéditions maritimes, à un point tel que des documents officiels relatant les expéditions furent détruits.Une autre raison fut certainement leur coût, à une période où les Ming devaient financer leurs campagnes contre les Mongols, le transfert de la capitale à Pékin et l'agrandissement du Grand canal.De plus, l'Empire était devenu très soucieux de sa défense militaire. A Annam, mais surtout au nord, où les Mongols menaient des attaques fréquentes. Il préféra donc y consacre ses ressources.

Le déclin de la dynastie des Ming (1435-1644)

A partir du milieu du XVème siècle, en dépit du début propice de la dynastie, l’empire est aux prises avec des difficultés que le pouvoir central est en peine à résoudre. La dynastie des Ming connaît donc dès ce moment une longue mais inexorable période de déclin qui conduit à la fin de cette dynastie et amena l’empire à une situation déplorable. Les causes de ce déclin se trouvent en grande partie dès l’établissement de la dynastie, dans les crises mêmes des racines même de ce qui avait fait l’apogée des premiers Ming.

L’espace menacé

22

Page 23: Le déclin de la dynastie des Ming

A la frontière du Nord, le dispositif stratégique s’avère inefficace. Les Wala (Mongols) le bousculent à plusieurs reprises et parviennent même, en 1450, à s’emparer de la personne de l’empereur Ying Zong, qu’il retienne captif pendant sept années. Au Sud-Est, l’Annam se soulève. Vers la fin du XVIème siècle un nouveau danger se précise au Nord-Est, les Mandchous.En 1616, leur chef, Nurhachi s’affranchit de la suzeraineté chinoise et se proclame empereur ; en 1636, son fils prend le titre dynastique de Qing. Leurs attaques sont constantes et ne se termineront qu’en1644 avec leur victoire définitive et la conquête de tout l’empire.Parallèlement, les côtes maritimes, surtout celles du Jiang su et du Zhe Jiant, ont à subir les raids de plus en plus fréquents des pirates japonais. Leurs activités, tantôt purement dévastatrices, tantôt semi commerciales, bénéficient parfois de la complicité des riches marchands chinois et l’autorité centrale est le plus souvent sans défense. Dans les endroits stratégiques, on construit des fortins pour les arrêter mais rien n’y fait et en 1555 le Japonais s’avancent jusqu’à Nankin qu’ils ravage.En 1592, le Japon lance une attaque contre la Corée. Ce n’est qu’au prix d’une difficile campagne que les Chinois parviennent à défendre leur allié traditionnel et à rejeter les envahisseurs à la mer.Outre les Mongols, les Mandchous et les Japonais apparaît un nouvel ennemi : les Européens.En 1624, les Hollandais s’établissent à Taiwan ou ils se maintiendront jusqu’en 1662.

Crise de l’agriculture

Le développement des grands propriétaires terriens, ralenti un temps par les mesures de l’ère Hongwu va reprendre petit à petit, ceci d’autant plus que Hongwu avait bien veillé à se donner un domaine impérial et a doté ses vingt-quatre fils de somptueux fiefs.Ainsi durant les règnes suivants celui de Hongwu, l’empereur, les princes, les eunuques de la cour, les grandes familles provinciales, reconstituent de vastes domaines, aux dépens des petits paysans libres et mêmes des colons militaires qui disparaîtront progressivement.Au Zhe Jiang, par exemple, nous savons que la terre était entre les mains du dixième seulement de la population. On vit donc l’apparition d’une aristocratie foncière (shenjiin), qui contrôla étroitement le développement agricole et s’appropria, en accord avec les mandarins bureaucrates, l’économie tout entière. L’extension des terres annexées illégalement qui se

23

Page 24: Le déclin de la dynastie des Ming

dérobaient à l’enregistrement fiscal, forcèrent le gouvernement, afin de maintenir le montant des impôts perçu désormais sur une superficie beaucoup plus réduite, à majorer l’impôt à verser par les paysans, c’est-à-dire faire endosser aux petits cultivateurs les charges fiscales des terres illégalement annexées, augmentant ainsi l’exploitation des couches les plus déshéritées.En dépit de certaines tentatives de réformes visant à une plus juste répartition des impôts, la fiscalité faisait peser un poids très lourd sur les campagnes et ce, d’autant plus qu’avec les progrès de l’économie monétaire les paysans devaient s’acquitter désormais en numéraire.En raison des crises économiques et sociales ainsi provoquées et donc des grandes famines qui s’en suivirent, les cultivateurs recommencent à fuir et se retrouvent pour s’organiser en bandes ; des régions entières, montagneuses pour la plupart, échappent au contrôle des fonctionnaires officiels, qui ne peuvent qu’interdire formellement de s’y aventurer. Les sociétés secrètes connaissent un renouveau et les soulèvements des paysans se multiplient. Ces révoltes armées obligent le gouvernement à un cercle vicieux : elles le contraignent pour chaque nouvelle rébellion à accroître ses dépenses militaires et donc à augmenter la pression des taxes sur les paysans qui se révoltent alors de plus en plus souvent.

Crise du pouvoir central

Hongwu puis Yongle se sont attachés à concentrer tous les pouvoirs dans les mains de l’empereur, il furent tous deux des administrateurs dynamiques et brillants, toutefois leurs successeurs furent de plus en plus incompétents et se succèdent sans pouvoir dominer la situation.Des troubles sociaux opposent au XVème siècle la classe militaire qui réside autour de l’empereur à Beijing, aux propriétaires foncier du Yang Tsé.Après Yongle, les recensements sont négligés, les gouvernement locaux se trouve dans l’incapacité de rassembler efficacement les impôts.Les eunuques, réintroduits sous Yongle, confisquent bientôt la totalité du pouvoir. Administrateurs des bien impériaux, chefs des polices secrètes, maîtres du conseil central, ils nomment les leurs à tous les emplois et contrôlent toute la politique. Ils introduisent une corruption généralisée à tous les étages du pouvoir et se battissent d’incroyables fortunes. Ils créent toutefois le mécontentement et des révoltes éclatent ça et là ; vers 1600, des émeutes urbaines s’en prennent aux eunuques collecteurs de taxes impériaux. D’autre part les fonctionnaires lettrés qui sont les premiers à pâtir du succès des eunuques s’organisent en société secrète, leurs plans sont toutefois découverts et leur organisation démantelée.Les eunuques parviennent à garder le pouvoir et ce sont eux qui après avoir acculé le dernier empereur Ming au suicide, trament en sous-main avec les Mandchous qui n’attendent que cette occasion pour intervenir. En 1644 : la dynastie des Qing s’installe et des envahisseurs domine à nouveau l’empire chinois.

Conséquences :

Une des premières conséquences du déclin de la dynastie des Ming, fut le certain retour de l’empire à une logique continentale, dans un idéal d’autarcie économique et d’isolationnisme politique, bien que l’activité marchande et commerciale orientée vers le Sud ne se démente pas.L’arrivée des occidentaux en mer de Chine donne un nouvel élan aux échanges, toutefois comme on vient de le voir l’excès de centralisation et le développement de grands domaines

24

Page 25: Le déclin de la dynastie des Ming

provoquent une crise de la paysannerie, ruinent la pyramide sociale et entraîne en définitive une dépression économique.

Conclusion

Globalement à la fin cette étude on peut penser que même si les débuts de la dynastie Ming étaient très prometteurs, on peut dire que le bourgeon était tout de même plus ou moins véreux dès la conception même de cette dynastie.La base même de cette dynastie ainsi que les orientations stratégique tant commerciales que politiques n'auront pas permis à la Chine de réellement pouvoir concurrencer les nations européennes dans leurs développements.

25

Page 26: Le déclin de la dynastie des Ming

Annexes   :

Le Grand canal:

26

Page 27: Le déclin de la dynastie des Ming

Liste de prix des produits exportés du Japon vers la Chine en 1432:

27

Page 28: Le déclin de la dynastie des Ming

Carte de la littoral de la Chine, montrant les attaques des pirates

28

Page 29: Le déclin de la dynastie des Ming

Bibliographie:

Bailshouyi, Precis d’histoire de chine, Beijing (Chine), édition en langue étrangère, 1988

Latourette, Kennet Scott, The Chinese : Their history and Culture, New York, Macmillan, 1962

Graff and Higham, A military History of China, Kansas State University, Westview press, 2002 Paludan, Ann, Chronicle of the Chinese Emperors, Thames and Hudson, 1998

Charlotte von Verschuer Le commerce extérieur du Japon G.P. Maisonneuve et Larose 1988

J.A.G. Roberts A History of China, Volume 1, Prehistory to c. 1800, J.A.G Roberts, 1996

Gang Deng Chines Maritime Activities and Socioeconomic Development, Greenwood Press 1997

Denis Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, Volume 7, Cambridge University Press 1988, p. 492

Denis Twitchett, Frederick W. Mote The Cambridge History of China, Volume 8, Cambridge University Press 1998

Prof. H.Günther-Arndt, Prof. J. Kocka Geschichtsbuch 3 Neue Ausgabe Cornelsen 2000

Wolfram Eberhard Geschichte Chinas, Von den Anfängen bis zur Gegenwart A. Kröner Verlag 1971 p. 307

Patricia Buckley Ebrey China, eine illustrierte Geschichte, Cambridge University Press 1996

Roger Goepper Das Alte China C. Bertelsmann 1988

www.wikipedia.org: Très bonne encyclopédie en ligne

Tsui Chi, Histoire de la Chine et de la civilisation chinoise, Payot, Paris, 1949

29