Le comportement du béton dans les incendies de tunnels · améliorer le comportement au feu des...

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1 - Introduction L’incendie du tunnel routier du Mont Blanc en mars 1999 avec les 39 morts qui ont été déplorés, a conduit, en France, à une accé- lération des réflexions et règlementations sur la conception des tunnels vis-à-vis des incendies. Ces réflexions ont concerné, en priorité, les équipements et procédures pour mettre les usagers à l’abri des fumées qui sont la première cause des décès. Mais elles ont concerné également les struc- tures, notamment celles en béton, pour permettre aux usagers d’échapper rapide- ment aux fumées, de se mettre en lieu sûr et d’être évacués hors du tunnel en feu, sans risquer de voir les structures s’effondrer sur leur chemin. La température à prendre en compte, main- tenant, dans les projets de tunnels, pour les structures importantes pour la sécurité des usagers, est celle de la courbe HCM (hydro- carbure majoré) c’est-à-dire à peu près 1300° pendant 2 heures, alors qu’auparavant la courbe ISO-2 heures était employée (Table 1). Cependant, un phénomène important pour la stabilité des structures en béton (armé ou non) est l’écaillage du béton (spalling, en anglais). Dans les structures en béton non armé, comme les revêtements de voûtes de tunnel, l’écaillage diminue l’épaisseur du revête- ment et peut conduire à un effondrement si le feu dure longtemps. Dans les structures en béton armé soumises à la flexion, comme les dalles de conduits de ventilation situés en plafond, l’écaillage diminue rapidement l’enrobage de béton qui protégeait les armatures et accélère la montée en température de ces armatures ; lorsque cette température dépasse 500°, les armatures deviennent très déformables et perdent une grande partie de leur résis- tance, provoquant l’effondrement de la struc- ture (Table 2). Ce phénomène de l’écaillage du béton a été étudié en laboratoire, mais il n’est pas facile de reproduire des courbes de tempé- rature de type HCM (peu de fours sont équipés à cet effet), pour tester des échan- tillons de grandes dimensions. TECHNIQUES TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007 Pierre Loïc VEYRON, Jean BERNARD & Michel LEVY - SETEC TPI Résumé : En examinant quelques tunnels incendiés et des essais en laboratoire, on constate un comportement diffé- rent des structures en béton, du point de vue de l’écaillage, en fonction de l’épaisseur de la structure et de la résistance du béton : • béton ordinaire en grande épaisseur : revêtements des tunnels du Mont Blanc (1999) et du Fréjus (2005), • béton ordinaire en faible épaisseur : dalle du plafond de ventilation du tunnel du Fréjus (1983, 2005 et essais en laboratoire), • béton à haute performance en forte épaisseur : revêtement du Tunnel sous la Manche (1996). Des propositions sont faites pour améliorer le comportement au feu des structures en béton de tunnels. Abstract: Concrete structure behaviour under fire in tunnels Looking at various tunnel damages after fire and at laboratory tests, we note a different concrete structure behaviour,as far as spalling is concer- ned, according to concrete strength and structure thickness : • usual concrete in large thickness : tunnel lining of Mont Blanc (1999) and Fréjus (2005), • usual concrete in small thickness : ventilation deck slab of Frejus (1983, 2005 and laboratory tests), high strength concrete in large thickness : Channel tunnel lining (1996). Solutions are proposed in order to improve concrete structure behaviour under fire. Le comportement du béton dans les incendies de tunnels 301 Temps en minutes 4 6 30 60 90 150 180 Température ISO °C 544 603 842 945 1006 1082 1110 Température HCM°C 1087 1147 1297 1300 1300 1300 1300 Table 1 : Courbes de température ISO et HCM en °C Températures en °C 20 100 200 300 400 500 600 700 Limite élastique de l’acier 1 0.96 0.92 0.81 0.63 0.44 0.26 0.08 Résistance à la compression du béton 1 1 0.97 0.91 0.85 0.74 0.6 0.43 Table 2 : Coefficient approximatif d’affaiblissement de l’acier et du béton

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1 - IntroductionL’incendie du tunnel routier du Mont Blancen mars 1999 avec les 39 morts qui ont étédéplorés, a conduit, en France, à une accé-lération des réflexions et règlementationssur la conception des tunnels vis-à-vis desincendies. Ces réflexions ont concerné, enpriorité, les équipements et procédurespour mettre les usagers à l’abri des fuméesqui sont la première cause des décès.

Mais elles ont concerné également les struc-tures, notamment celles en béton, pourpermettre aux usagers d’échapper rapide-ment aux fumées, de se mettre en lieu sûr etd’être évacués hors du tunnel en feu, sansrisquer de voir les structures s’effondrer surleur chemin.

La température à prendre en compte, main-tenant, dans les projets de tunnels, pour lesstructures importantes pour la sécurité desusagers, est celle de la courbe HCM (hydro-carbure majoré) c’est-à-dire à peu près 1300°pendant 2 heures, alors qu’auparavant lacourbe ISO-2 heures était employée (Table 1).

Cependant, un phénomène important pourla stabilité des structures en béton (armé ounon) est l’écaillage du béton (spalling, enanglais).

Dans les structures en béton non armé,comme les revêtements de voûtes de tunnel,l’écaillage diminue l’épaisseur du revête-ment et peut conduire à un effondrement sile feu dure longtemps.

Dans les structures en béton armé soumisesà la flexion, comme les dalles de conduits deventilation situés en plafond, l’écaillagediminue rapidement l’enrobage de bétonqui protégeait les armatures et accélère lamontée en température de ces armatures ;lorsque cette température dépasse 500°,les armatures deviennent très déformableset perdent une grande partie de leur résis-tance, provoquant l’effondrement de la struc-ture (Table 2).

Ce phénomène de l’écaillage du béton aété étudié en laboratoire, mais il n’est pasfacile de reproduire des courbes de tempé-rature de type HCM (peu de fours sontéquipés à cet effet), pour tester des échan-tillons de grandes dimensions.

TECHNIQUES

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007

Pierre Loïc VEYRON, Jean BERNARD & Michel LEVY - SETEC TPI

Résumé :En examinant quelques tunnelsincendiés et des essais en laboratoire,on constate un comportement diffé-rent des structures en béton, du pointde vue de l’écaillage, en fonction del’épaisseur de la structure et de larésistance du béton :• béton ordinaire en grande épaisseur :revêtements des tunnels du MontBlanc (1999) et du Fréjus (2005),• béton ordinaire en faible épaisseur :dalle du plafond de ventilation dutunnel du Fréjus (1983, 2005 et essaisen laboratoire),• béton à haute performance enforte épaisseur : revêtement duTunnel sous la Manche (1996).Des propositions sont faites pouraméliorer le comportement au feudes structures en béton de tunnels.

Abstract:Concrete structure behaviour underfire in tunnelsLooking at various tunnel damagesafter fire and at laboratory tests, wenote a different concrete structurebehaviour, as far as spalling is concer-ned, according to concrete strengthand structure thickness :• usual concrete in large thickness :tunnel lining of Mont Blanc (1999) andFréjus (2005),• usual concrete in small thickness :ventilation deck slab of Frejus (1983,2005 and laboratory tests),• high strength concrete in largethickness : Channel tunnel lining (1996).Solutions are proposed in order toimprove concrete structure behaviourunder fire.

Le comportement du bétondans les incendies de tunnels

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Temps en minutes 4 6 30 60 90 150 180

Température ISO °C 544 603 842 945 1006 1082 1110

Température HCM°C 1087 1147 1297 1300 1300 1300 1300

Table 1 : Courbes de température ISO et HCM en °C

Températures en °C 20 100 200 300 400 500 600 700

Limite élastique de l’acier 1 0.96 0.92 0.81 0.63 0.44 0.26 0.08

Résistance à la compression du béton

1 1 0.97 0.91 0.85 0.74 0.6 0.43

Table 2 : Coefficient approximatif d’affaiblissement de l’acier et du béton

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D’autre part, il n’est pas facile de deviner, àpartir d’un essai de laboratoire, sur échan-tillon de petite taille, comment se compor-tera une structure de grande dimension.

Il est donc intéressant d’observer le compor-tement de structures réelles au cours d’incen-dies réels, même si l’on ne peut pas, commedans un laboratoire, fixer les paramètres detempérature et de durée de l’incendie.

Dans ce qui suit, nous décrivons les incendiesqui se sont produits dans des tunnels que nousconnaissons bien, pour avoir participé audiagnostic des dégâts et à leur réparation. Nousavons classé les structures en 3 catégories dontle comportement apparaît différent :• Béton ordinaire en grande épaisseur,• Béton ordinaire en faible épaisseur,• Béton à haute performance en grande

épaisseur.

Nous n’avons pas eu l’occasion d’observerle comportement au feu de béton à hauteperformance en faible épaisseur, dans lesincendies en tunnel.

2 - Béton ordinaire engrande épaisseur

2.1 - Tunnel du Mont-Blanc –Incendie de mars 1999

• Type d’incendie

L’incendie s’est produit près du milieu dutunnel (dont la longueur est de 11.6 km) avecun camion qui s’est enflammé tout seul ; sousl’effet du mouvement de l’air en tunnel, le feus’est communiqué à d’autres camions arrêtésdans le tunnel sur une longueur de 3 km.L’incendie n’a pas pu être éteint et a durépendant une cinquantaine d’heures. Latempérature maximale a été estimée, aposteriori, à 1000°C.

• Type de structure (Fig.1)

Le revêtement de la voûte a été bétonné enplace ; l’épaisseur est de l’ordre de 50 à 100cm. Le béton, de résistance 25 à 30 MPa(N/mm2), a été fabriqué avec des agrégatsconstitués à partir des matériaux excavésdans le tunnel.

La dalle de chaussée est d’épaisseur plusfine ; elle supporte cependant le poids desvéhicules.

• Comportement à l’issue de l’incendie

Peu de dommages ou d’épaufrures sur lerevêtement de la voûte ; la peau du béton a

un aspect de terre cuite ; les seuls éclats sesont produits aux endroits où des venuesd’eau passaient à travers le béton. Par ailleurs,sous l’effet de la chaleur, le béton s’est dilatéet s’est mis en compression ; tout le long dela reprise de bétonnage entre la voûte et lepiédroit, on observe une ligne légèrementépaufrée.

La dalle de chaussée a eu peu de dommagescar la température est nettement plus élevéeau-dessus des camions qui brûlent, qu’auniveau de la chaussée.

2.2 - Tranchée couverte Moyol àToulon - Incendie de 2000Il s’agit d’un passage souterrain de courtelongueur (60 m), de 9 m environ de largeuret de 3.3 m de gabarit en hauteur.

• Type d’incendie

L’incendie a été provoqué par un camionde transport d’hydrocarbures dont la citerneétait plus haute que le gabarit disponiblesous la dalle. La cabine du camion est rentréedans la tranchée ; la citerne a heurté la dalleet s’est déchirée ; l’essence et le gaz oil sesont déversés et ont coulé jusqu’au point bassitué au centre de la tranchée. La chaleurdu moteur a enflammé l’essence. Le conduc-teur a pu s’échapper en étant légèrementbrûlé.

Le seul intérêt de cet incendie est qu’il s’agitd’un feu d’hydrocarbure (dont le passage entunnel est généralement interdit) dont onpeut espérer que la température s’appro-chait de la courbe HCM du nouveau règle-ment français (25 août 2000). Il a duré 2.5heures dont 1 h avec une grande intensitéjusqu’à ce que les 5 m3 d’essence et les 5m3

de gaz oil échappés de la citerne aient brûlé.

• Type de structure

Elle est constituée par une dalle en bétonarmé de 45 à 50 cm d’épaisseur posée surles deux murs latéraux. Le béton est un bétonordinaire de résistance 30 à 35 N/mm2.

• Comportement de la structure

La photo jointe (Fig. 2) montre que, dans lapartie souterraine, seule la dalle a subi desécaillages localisés sur une profondeur suffi-sante pour mettre à nu les armatures infé-rieures, ce qui représente une profondeurmaximale de 5 cm.

Les corniches et garde-corps d’extrémitéont souffert un peu plus, du fait des flammesqui sortaient par les deux extrémités de latranchée, pendant tout l’incendie, mais cesparties n’ont pas un rôle très important pourla tenue de la structure.

2.3 - Piédroits du tunnel routierdu Fréjus - Incendie de juin2005

• Type d’incendie

L’incendie s’est produit vers le centre dutunnel et a été provoqué par un camion n°1chargé de pneus qui roulait vers l’Italie et apris feu tout seul. Le tunnel est un tubeunique bidirectionnel à une voie de circula-tion dans chaque sens de 12,9 km delongueur. La chaussée est assez large (9 mentre bordures de trottoir). Les fumées étant,en partie, aspirées par le plafond (200 m3/s)dans la zone de l’incendie, les véhiculeslégers ont pu sortir ou faire demi tour avantque toute la zone ne soit envahie par lesfumées. Seuls les poids lourds étaientbloqués. Le courant d’air naturel ayant eutendance à pousser l’air chaud et les fuméesvers l’Italie, les camions stoppés à l’arrièredu camion en feu (côté France) n’ont pasété endommagés. En revanche, les camionsqui roulaient vers la France et qui se sontarrêtés avant le camion en feu, ont pris feu

TECHNIQUESLe comportement du béton dans les incendies de tunnels

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007302

Figure 1 - Tunnel du Mont Blanc : Coupe

Figure 2 - Passage souterrain de Toulon(Tranchée couverte Mayol)

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à leur tour. Le feu s’est ainsi propagé aucamion n°2, chargé de fromage, arrêté à 60m du camion n°1 en feu, puis au camion n°3chargé de chaînes en acier, arrêté à 60 mdu camion n°2, puis au camion n°4 arrêté à240 m du camion n°3 ; ce camion n°4 avaitune citerne contenant des produitschimiques pour fabriquer de la colle ; lecamion a brûlé mais pas le contenu de laciterne.

Le feu a été attaqué seulement par le côtéFrance, du fait de l’abondance des fuméescôté Italie. Le camion n°1 initiateur du feuet les camions n°2 et 3 ont été éteints en 2heures ; les pompiers ont eu du mal àatteindre le camion n°4, en raison de lachaleur, et ont réussi à l’éteindre 6 heuresaprès le début de l’incendie.

La chaleur a donc été particulièrementélevée à proximité des 3 premiers camions.On estime à 800° environ la température àlaquelle a été porté le béton, au-dessus descamions en feu.

• Type de structure (Fig. 3)

Le revêtement de la voûte est en béton nonarmé ; l’épaisseur théorique minimale est de35 cm, mais l’épaisseur réelle était de 60 à80 cm en raison du découpage irrégulierde la roche à l’explosif. Le béton à based’agrégats calcaires concassés, dosé à400 kg de ciment par m3 a été coulé en placeet avait une résistance de l’ordre de 40 MPa(N/mm2).

La partie haute de la voûte est occupée parles conduits de ventilation. Leur structurecomporte une dalle en béton armé de 0.15m d’épaisseur, appuyée dans des encochesdu revêtement et suspendue, vers la mi-travée, par des suspentes métalliquesancrées dans le béton de la voûte et noyées

dans une cloison verticale en béton armé de0.15 m d’épaisseur ; cette cloison sépareles deux conduits, un pour le soufflage d’airfrais, l’autre pour l’aspiration des fumées.

• Comportement de la structuredes piédroits

On constate, sur une longueur de tunneld’environ 30 m dans la zone du camion n°1initiateur du feu, une perte d’épaisseur d’unedizaine de centimètres qui atteint 20 cm surune courte longueur. Cette perte d’épais-seur règne sur une hauteur qui va de 1 m au-dessus de la chaussée à 4.5 m au-dessus dela chaussée où on trouve la dalle de plafond.

Dans le conduit d’air vicié, la voûte n’a paseu d’écaillage, même à proximité de latrappe d’aspiration la plus voisine du camionn°1, par où l’on aspirait environ 20m3/s d’airtrès chaud.

Après avoir envisagé de reconstituer l’épais-seur manquante du revêtement despiédroits à l’aide de béton projeté, il s’estavéré, après plus ample investigation, quel’épaisseur de béton restante était supé-rieure à l’épaisseur théorique du projet etque les contraintes dans le béton, mesu-rées à l’essai au vérin plat, étaient faibles, carle rocher dans cette zone était de bonnequalité ; on a donc retiré, par hydrodémo-lition, quelques centimètres d’épaisseur debéton altéré et pollué et on a seulementaplani la surface avec du mortier pourpouvoir repeindre les piédroits avec unepeinture époxy claire.

2.4 - Conclusion pour lesbétons ordinaires en forteépaisseurComme le donnent à penser les 3 casexposés, l’écaillage est faible, pour des

bétons peu compacts : très peu, voire pasdu tout, d’écaillage pour le béton médiocredu tunnel du Mont Blanc, un écaillage limitépour le béton, de qualité moyenne, de ladalle de la tranchée couverte de Toulonmalgré une température élevée de feu d’hy-drocarbure. L’écaillage est plus importantdans les piédroits du Fréjus où la compa-cité du béton est assez importante alors quela chaleur et la durée de l’incendie ont étérelativement limitées.

3 - Béton ordinaire enfaible épaisseur - Cas dela dalle de plafond dutunnel du Fréjus • La structure du plafond du tunnel routier

du Fréjus est décrite au paragraphe 2.3.Il faut ajouter que la dalle peut se dilatertransversalement car elle est posée surappuis en néoprène ; de plus, du polysty-rène (1.5 cm) est interposé entre les bordsde la dalle et le revêtement (Fig. 4).

• La dalle comporte des armatures supé-rieures et inférieures dans le sens trans-versal et dans le sens longitudinal ; lesdiamètres des aciers sont de 8, 10 et 12mm. L’enrobage est de 2 cm.

• La nature du béton est la même que celledes piédroits mais les agrégats ont unedimension maximale de 14 mm au lieude 25 mm.

Nous avons eu l’occasion d’observer la dalleaprès 2 incendies. De plus, à la suite de l’in-cendie du tunnel du Mont Blanc, nous avonsobtenu des échantillons de 1m2 prélevésdans la dalle qui ont été essayés au four duCTICM, d’abord en suivant une courbe de

TECHNIQUESLe comportement du béton dans les incendies de tunnels

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007 303

Figure 3 - Fréjus coupe transversale Figure 4 - Fréjus : Appui de la dalle sur le revêtement

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température ISO pendant 2h puis, ensuivant la courbe HCM pendant 2h. Nousavons fait également des essais, en suivantla courbe HCM 2h, avec des éléments dedalle prélevés sur le côté italien du tunneloù l’épaisseur est de 12 cm. Dans tous cesessais, nous avons examiné le comporte-ment de la dalle actuelle sans et avec protec-tion thermique.

3.1 - Incendie de 1983

3.1.1 - Type de feuUn camion chargé de 20 ou 30 tonnes desacs plastiques s’est enflammé, par suited’une fuite d’huile du moteur qui s’estenflammée en tombant sur le tuyau d’échap-pement. Le feu s’est communiqué à lacabine, puis au chargement. Les pompiersde la société d’exploitation (SFTRF) sontintervenus avec des moyens limités (camiontri-extincteur) et sont arrivés 20 minutesaprès le début de l’incendie. Ils ontcommencé à arroser le camion et la dallece qui a permis de limiter la température,mais ne sont pas arrivés à éteindre le feu.Lorsque les pompiers de la commune sontarrivés avec un camion-pompe plus puis-sant, le feu a été éteint 2 heures après sondémarrage.

3.1.2 - Comportement du bétonBien que la dalle ne soit située qu’à 0.5 mau-dessus du camion, aucun écaillage n’a étéobservé. On a seulement constaté que lacouleur du béton avait changé (couleur plusclaire) et que la grille des armatures du lit infé-rieur était dessinée sur la face inférieure dela dalle par des traits plus sombres. Lesmesures de vitesse sonique réalisées sur ledessus de la dalle ont fait apparaître desvitesses de 3500 à 4000 m/s (au lieu de 4200m/s pour les parties plus éloignées du feu).La zone dégradée régnait sur près de 30 mde longueur.

3.2 - Incendie de juin 2005

3.2.1 - Type de feuLes conditions de l’incendie ont été décritesau paragraphe 2.3.

3.2.2 - Comportement du bétonDe façon surprenante, on n’a constatépresque aucun écaillage, même à proximitéde la bouche d’aspiration la plus proche ducamion de pneus.

La vitesse sonique est descendue sous2500 m/s sur près de 200 m de longueur.

La zone de dalle proche de la bouche d’aspi-ration citée ci-dessus, a été chauffée en fibreinférieure par le feu et en fibre supérieurepar l’air chaud aspiré. Sur une longueurd’une cinquantaine de mètres, la vitessesonique est descendue à près de 1000 m/s(Fig. 5).

Les essais d’écrasement sur éprouvettes depetit diamètre carottées ont donné desvaleurs de résistance de 10 à 12 MPa(N/mm2), sur une longueur de tunnel de36m alors que les éprouvettes de contrôleréalisées pendant les travaux avaient unerésistance de 45 MPa ; mais les prélève-ments réalisés en des endroits non touchéspar le feu avaient une résistance de 30 à 35MPa, ce qui nous donne à penser que larésistance du béton d’une dalle de faibleépaisseur compactée par vibration est plusfaible que celle des éprouvettes cylindriquesréalisées pour le contrôle de chantier.

3.3 - Essais au four du labora-toire du CTICM à Mézières-Les-MetsLorsque la nouvelle instruction techniquedu 25 août 2000 a rendu obligatoire la priseen compte d’une température HCM 2heures pour les structures de tunnel dont

la stabilité est nécessaire pour la sécurité, ona rencontré des difficultés, en France, pourfaire des essais au four en laboratoire.

En effet, à cette époque aucun laboratoiren’avait de four capable de résister lui-mêmeà une température HCM pendant 2h. LeCTICM*, le premier, s’est équipé d’un fourrésistant HCM 2h. Maintenant, le CSTB**en dispose d’un également.

Le tunnel routier du Fréjus ayant dû accueillirle trafic PL du tunnel du Mont Blanc, en plusdu sien propre, un certain nombre demesures ont été prises pour améliorer lalutte contre les incendies. Notamment ladalle du plafond de ventilation a été testéevis-à-vis de la courbe HCM de température.En même temps, on a testé l’efficacité d’uneprotection thermique passive constituéede " Promactect " (silicate), sous forme deplaques de 2 à 3 cm d’épaisseur qui peuventêtre spittées sur la face inférieure de la dalle.

3.3.1 Essais de 2001 (Fig.6)Le premier essai a été réalisé sur deséléments de dalle d’environ 1 m2 de surfacequi avaient été découpés sur le côté italiendu tunnel (où l’épaisseur de la dalle est de12 cm), pour installer des trappes d’aspira-

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TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007304

Figure 5 - Fréjus : Vitesse du son dans la dalle

Figure 6 - Dalle Fréjus : essai HCM en laboratoire

* CTICM : Centre Technique Industriel de la Construction Mécanique** CSTB : Centre Scientifique et Technique du Bâtiment

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tion télécommandables. Le béton avait 23ans environ.

Ces éléments ont été installés en couver-ture du four, face inférieure côté four, faceextérieure à l’air libre. Des mesures detempérature par jauges ont été faites, àdivers niveaux du béton pendant l’essai oùune rampe de brûleurs au gaz produisait enface inférieure de la dalle une courbe detempérature HCM.

Un élément nu a été testé ainsi que 2éléments revêtus chacun d’une plaqueisolante.

A la grande surprise des observateurs, onn’a pratiquement constaté aucun écaillagede béton sur l’élément sans protection(Fig. 7).

Les températures atteintes ont été lessuivantes :

Pendant l’essai de l’élément non protégé,on a vu, sur la face supérieure de la dalle, desfissures avec de l’eau qui sortait, par cesfissures, entre 5 et 20 minutes après le débutde l’essai. Après 25 minutes, la dalle acommencé à s’assécher pour être totale-ment sèche après 36 minutes.

Sur les éléments de dalle avec protectionthermique, les températures après 2hétaient :

• armature inférieure 161°• armature supérieure 108°• dessus de dalle 100°

3.3.2 - Essais sur la dalle prélevéecôté FranceDes essais semblables ont été faits sur deséléments de dalle prélevés côté France oùl’épaisseur est de 15 cm au lieu de 12. Undes essais a été fait, en 2002, avec la courbeISO de température ; l’autre, en 2006, avecla courbe HCM.

Les résultats et les observations ont été toutà fait semblables à ceux de 2001, bien quela nature des agrégats soit différente entrele côté France et le côté Italie.

3.4 - Conclusion sur le comportement du béton ordinaire en faible épaisseur

3.4.1 - L’observation des cas examinés insitu et en laboratoire fait apparaître que l’é-caillage est très limité, malgré la températureélevée et prolongée. Cela tient probable-ment au fait que le béton n’est pas très com-pact, qu’il est assez fissuré après avoir été uti-lisé pendant plus de 20 ans comme conduitde ventilation. L’eau résiduelle du bétonéchauffée puis vaporisée par le feu, s’échap-pe très facilement sans exercer de pressionnotable à l’intérieur du béton.

Dans ces conditions, il y a un effet de cuissondes matériaux qui ne se traduit pas par del’écaillage. Certes, les caractéristiques méca-niques du béton se dégradent, mais pas aupoint de lui faire perdre complètement sacohésion.

Les armatures en acier retrouvent, aprèsrefroidissement, leurs propriétés méca-niques initiales.

Si on a réussi à maintenir la température desarmatures, à une température évitant l’ef-fondrement de la structure (enrobage suffi-sant ou protection thermique), on retrouve,après refroidissement une structure ayantune résistance qui peut être suffisante pourreprendre l’exploitation.

3.4.2 - Précaution à prendrelorsque l’on fait des essais enlaboratoire Au tunnel du Fréjus, on a regretté de ne pasavoir pris, au moment des essais en labora-toire la précaution suivante : après unpremier essai HCM-2h, on aurait dû refaireun deuxième essai HCM=2h sur les mêmeséchantillons de dalle, après les avoir laissérefroidir. En effet, lorsque s’est produit l’in-cendie de 2005 et que l’on a constaté que,sur une longueur de 300m, la dalle étaitencore utilisable, en réparant ses appuis surle revêtement, on s’est demandé commentse comporteraient ces 300m de dalle, au casoù un incendie se produirait à nouveau aumême endroit.

Comme nous n’avions pas la réponse etqu’il fallait trop de temps pour refaire lesessais, nous avons dû installer une protec-tion thermique sur ces 300m de plafondavant de remettre le tunnel en service et depoursuivre les travaux non indispensablespour la sécurité, en travaillant la nuit souscirculation.

En conclusion lorsque l’on fait des essais aufeu en laboratoire, il est souhaitable de lesrecommencer après refroidissement poursavoir comment se comportera le béton aucours d’un nouvel incendie.

4 - Béton à haute résistanceen forte épaisseur (Tunnelsous la Manche)Ce type de béton est employé pour les vous-soirs préfabriqués en béton armé, utiliséspour les revêtements de tunnels creusés autunnelier (TBM).

En France, on appelle BHP (Béton à hauteperformance) des bétons dont la résistanceà la compression sur cylindres à 28 jours estsupérieure à 60MPa (N/mm2) et va jusqu’à90 ou 100 MPa. Pour atteindre ces résis-tances, on ajoute souvent de la fumée desilice au béton.

TECHNIQUESLe comportement du béton dans les incendies de tunnels

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Figure 7 - Dalle non protégée après essais HCM 2h

Temps 0 0.1 h 0.5h 1h 1.5h 2h

Température four 21° 1 154 1 296° 1 306° 1 302° 1 301°

Armatures HA12 lit inférieur 22° 95 267° 436° 543° 626°

Armatures HA12 lit supérieur 21° 37 102° 155° 232° 315°

Dessus de dalle 23° 23 64° 94° 125° 194°

Table 3 - Température mesurée à divers niveaux dans l’épaisseur de la dalle.

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Dans le cas du tunnel sous la Manche, larésistance recherchée à 28 jours était de 55MPa (N/mm2) et on n’a pas employé defumée de silice.

Mais, du fait d’une granulométrie très bienétudiée, d’un ciment à haute résistance etd’une teneur en eau très faible, la résistancedu béton à 28 jours a atteint 65 à 70 MPa.

Le béton a continué à durcir avec le tempset la résistance avait atteint 80 à 100 MPa,en 1996, 5 ans après la construction, lorsquel’incendie s’est produit (la perméabilité étaitde l’ordre de K= 10 -13 m/s)

Les bétons se sont donc comportés commedes BHP.

Type d’incendie : le feu a pris sur un poidslourd d’une navette, peu de temps après ledépart de la navette. La navette n’a pu êtrestoppée avant son entrée en tunnel et a dûs’arrêter, pour diverses raisons, après 17 km(rappelons que le tunnel a une longueur de50 km).

Malgré l’arrivée des pompiers après unequinzaine de minutes, il n’a pas été possibled’éteindre le feu. Le personnel et les chauf-feurs de poids lourds ayant été évacués versle tunnel de service, les camions de la navettesitués à l’arrière du camion en feu ont brûléjusqu’à ce que le feu s’éteigne tout seul :en effet la ventilation poussait l’air et lesfumées vers l’arrière du train, pour protégerle conducteur de la locomotive et le wagondes chauffeurs situé à l’avant du train. Lefeu s’est donc propagé progressivementde wagon en wagon et de poids lourd enpoids lourd, depuis le poids lourd en feujusqu’à l’arrière du train.

Au total 10 poids lourds ont brûlé en produi-sant une chaleur plus ou moins importanteselon leur chargement ; la plus forte chaleura été engendrée par un camion de bacon,la plus faible par un camion d’ananas. Onestime à 1000°C la température à laquellea été portée la face intérieure de revête-ment. Les wagons porteurs ont un toit métal-lique et sont ouverts sur les côtés. Lesflammes ne pouvaient donc pas monterverticalement jusqu’au béton au-dessus descamions ; elles devaient s’échapper latéra-lement avant de monter.

• Type de structure

Le diamètre intérieur du tunnel est de 7.60m.Les voussoirs en béton armé constituant lerevêtement ont une épaisseur de 40 cm.

Il y a 5 voussoirs et une clé pour former unanneau complet ; les voussoirs ont unelongueur curviligne de l’ordre de 4.5 m enintrados et une largeur de 1.6 m dans le senslongitudinal du tunnel.

Le contact entre 2 voussoirs d’un mêmeanneau se fait par une articulation cylin-drique (contact par une section rétrécie). Levoussoir clé a une forme trapézoïdale et unelargeur de moins de 1 m. Les voussoirs sontarmés avec un ratio d’armatures de 65 Kg/m3 ;les armatures sont nécessaires pour pouvoirtransporter et manipuler les voussoirs (fig. 8) ;mais elles sont surtout concentrées dans lazone des articulations entre voussoirs (fret-tages) (fig. 9) et sur les faces latérales desanneaux où les vérins du tunnelier exercentdes forces concentrées pour pousser letunnelier vers l’avant.

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Figure 8 - Tunnel sous la Manche - Ferraillage voussoir

Figure 9 - Tunnel sous la Manche Frettage près de joint entre 2 voussoirs

d’un même anneau

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Au moment de leur mise en place, les vous-soirs sont solidarisés par des boulons avecles voussoirs voisins du même anneau ainsiqu’avec ceux de l’anneau précédent.

Pour être complets, rappelons que les vous-soirs sont posés dans la jupe du tunnelier,si bien qu’il y a un espace annulaire de 20cm d’épaisseur environ entre l’anneau debéton armé et le terrain.

Cet espace est rempli par injection d’unmortier dont la résistance doit être du mêmeordre que celle du sol. Dans le cas du tunnelsous la Manche, il s’est avéré que la résis-tance du mortier avait atteint 20 à 30 MPa(N/mm2).

• Comportement de la structure(Fig. 10 à 12)

Dans la zone des camions en feu, on a cons-taté un écaillage très important qui a diminuél’épaisseur du revêtement en voûte de20 cm, en moyenne sur une longueur de

tunnel de 70 m. Très localement (sur 1m2

de surface), la diminution d’épaisseur a étéde 40 cm. Cette perte d’épaisseur n’est pasuniforme.

Dans les 2 zones comportant le moins d’ar-matures, on voit 2 sillons profonds (Fig. 12).Dans les zones à plus forte densité d’arma-tures, vers les bords du voussoir, l’écaillageest moins profond.

Le voussoir de clé, qui a une densité d’ar-matures plus forte que celle des autres vous-soirs, a subi moins d’écaillage. Les écaillesde béton ramassées par terre après l’in-cendie, ont une épaisseur de 3 à 4 mm et unedimension en plan de quelques cm dans les2 directions.

On peut imaginer que le scénario suivants’est produit :

- après quelques minutes de chaleurintense, l’effet combiné du gradient ther-mique (entre la face exposée au feu et lescouches plus profondes du béton) et dela pression exercée par la vapeur d’eauqui ne pouvait pas s’échapper d’un bétontrès imperméable, a conduit à la sépara-tion d’une épaisseur de béton de quelquesmm, par rapport au reste du béton.

Une fois cette couche de béton tombée, lefeu échauffe à nouveau l’intrados du revê-tement. Couche de 3mm après couche de3 mm, le phénomène a continué, à raisond’une couche toutes les 6 minutes enmoyenne, pendant toute la durée de l’in-cendie, à cet endroit.

On peut imaginer que dans les zonescomportant plus d’armatures, les couchesont été maintenues en place, malgré leur

rupture, formant un bouclier thermiquepour les couches plus profondes. Les pertesd’épaisseur de ces zones ont donc été pluslimitées.

Ce raisonnement est probablement valablepour la zone centrale des voussoirs.

Pour les bords, il y a deux effets dont on neconnaît pas l’importance respective :

- il y a plus d’armatures,

- les contraintes de cisaillement résultantdu gradient thermique sont, peut-être,moindres, du fait que les déformationssont plus libres qu’au centre des voussoirs

Signalons encore une erreur que nous avonscommise et qu’il faudrait éviter à l’avenir.

Si l’on veut mieux analyser les phénomènes,il faudrait prélever avec soin les débris debéton tombés à terre, noter leur emplace-ment, leur niveau dans le tas de gravatsetc….

Or, après un incendie, les exploitantsessayent de nettoyer les lieux le plus vitepossible, après avoir mis le tunnel en sécu-rité. Lorsque les matériaux arrivent à ladécharge, tout est mélangé ; on ne sait plusd’où ils viennent, ni s’ils sont tombés audébut ou la fin de l’incendie.

En particulier, au tunnel sous la Manche,les diverses analyses, dont celles duPr Sanderson de l’université de Glasgow(thermoluminescence) et celles du CETE deLille (grindosonic) ou du LCPC (MM. Acker& Ulm) ont montré que, dans le béton restéen place, seuls 2 ou 3 cm d’épaisseur étaientendommagés. Le reste était de très bonnequalité ; les 2 ou 3 cm endommagésn’avaient pas connu une température supé-rieure à 300 ou 500°; on peut donc penserque les écailles de béton sont tombées avantque leur température n’ait atteint la tempé-rature de l’air au-dessus du feu.

TECHNIQUESLe comportement du béton dans les incendies de tunnels

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS - N° 203 - SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007 307

Figure 10 - Tunnel sous la Manche

Figure 12 - Tunnel sous la Manche

Figure 11 - Tunnel sous la Manche

Figure 13 - Epaisseur restante à 1h30

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4.1 - Conclusion pour lesbétons à haute résistance enforte épaisseurLes bétons à haute résistance semblentprésenter une faiblesse particulière vis-à-vis de l’écaillage. En revanche, la partie debéton qui reste en place après l’incendie, estpeu dégradée. Avant de réparer il n’est pasnécessaire d’enlever plus de 1 à 3 cm debéton avant de retrouver un béton ayantgardé ses performances mécaniquesinitiales.

Pour limiter l’écaillage plusieurs solutionssont possibles :- Ajouter, au béton, des fibres de polypro-pylène qui fondent en cas d’incendie etménagent des canaux par où la vapeurd’eau peut s’échapper sans se mettre enpression élevée,

- disposer, côté intrados, une armature depeau de type grillage à maille de 5 cm voirede 3 cm. Ce grillage va retenir les écaillessuperficielles de béton qui auraienttendance à se former ; cela constituera uneprotection thermique pour les couchessuivantes,

- on peut évidemment disposer en intradosune protection thermique, mais celacomplique la manipulation des voussoirsà l’aide de ventouses.

5 - Conclusion générale

Rappelons d’abord que, dans tous les exem-ples cités, les structures en béton (revêtement,dalle de plafond, dalle de chaussées) ne sesont pas effondrées et n’ont causé aucun acci-dent de personne (ni parmi les usagers, niparmi les pompiers).

Les victimes ont été, presque toutes, le faitdes fumées toxiques (riches en CO) qui seproduisent très tôt après le début de l’in-cendie, et plus exceptionnellement, lerésultat des hautes températures qui seproduisent un peu plus tard.

Pour améliorer la sécurité des tunnels vis-à-vis des incendies, il n’y a pas aujourd’hui denécessité d’améliorer les structures en béton ;il est beaucoup plus important d’améliorerla sécurité des véhicules pour qu’ils ne pren-nent pas feu spontanément, et de contrôlerles chargements de produits à haut poten-tiel calorifique ; il faut améliorer l’organisa-

tion de l’exploitation pour mettre les usagersà l’abri des fumées toxiques et des hautestempératures.

Pour limiter les réparations de génie civil àfaire après un incendie, il est utile de tirer desleçons des incendies en tunnel que l’on a puobserver.

- les bétons en faible épaisseur, pas tropcompacts, se comportent bien ; pour éviterl’effondrement des dalles en béton armé, parsuite de la perte de résistance des arma-tures, il faut avoir un enrobage suffisant desarmatures ou disposer une couche deprotection thermique ; une autre solutionconsiste à disposer un lit supplémentaired’armatures à mi-épaisseur qui évite l’ef-fondrement de la structure pendant l’in-cendie en attendant que les armatures infé-rieures aient retrouvé, après refroidissement,leur résistance d’origine,

- les bétons à haute résistance, en forteépaisseur, présentent une faiblesse parti-culière vis-à-vis de l’écaillage. Pour limitercet écaillage, on peut mettre dans le bétondes fibres de polypropylène ou disposerune forte densité d’armatures (ou un grillageà maille fine), côté intrados.

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BIBLIOGRAPHIEBIBLIOGRAPHIE ••••••••••••MINISTERE DE L’EQUIPEMENT ET MINISTERE DE L’INTERIEUR (FRANCE) : Circulaire interministérielle du 25 août 2000 relative à la sécuritédans les tunnels du réseau routier national. 49 pages.

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BOROT G., LARIVE C., FERON C. : Apports des essais incendie pour la détermination de la tenue au feu des structures : Tunnels et OuvragesSouterrains n° 198 ; Nov.-Déc. 2006. p. 365-366.

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