Le chemin est tracé - universite-si.org · sociétés voient en effet le logiciel libre d’un...

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PAR DAVID ELOY Le chemin est tracé ’Université d’été de la solidarité internatio- nale 2010 touche a sa fin. Pendant quatre jours, près d’un millier de personnes – une fréquentation record– sont venues des quatre coins de France (et du monde) pour se rencon- trer, s’informer, se former et débattre. Elles ont réaffirmé avec force qu’en ces temps de crises éco- nomique, sociale, écologique… la solidarité est une valeur, un impératif. Surtout elles repartent forte de rencontres, d’enseignements, d’expérien- ces qui nourriront les mobilisations à venir. Car l’aventure ne s’arrête pas là, à Pessac. Et si le mys- tère plane encore sur la région qui accueillera la prochaine édition, la conférence plénière qui a clos les rencontres a d’ores et déjà tracé le chemin pour les deux prochaines années.Michel Roy du Secours Catholique a ainsi mis l’accent sur le Sommet des Nations Unies qui, en septembre, réunira les chefs d’Etat pour faire le point sur l’avancement dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. La société civile y portera un seul slogan : « Assez de promesses, des actes ! ». Puis, fin novembre,Cancun (Mexique) accueillera une nouvelle conférence sur le changement climatique. L’occasion de rattraper l’échec de Copenhague? Quoi qu’il en soit,comme l’a rappelé Taoufik Ben Abdallah, d’Enda, l’agenda citoyen sera marqué par le Forum social mondial (FSM) qui prendra ses quartiers à Dakar (Sénégal) en février 2011. Structure organisatrice de l’Université d’été, le CRID est déjà fortement mobilisé en vue du FSM où il prévoit d’emmener une importante déléga- tion d’organisations de la société civile française. Tout comme il ne manquera pas de se mobiliser à l’occasion du G20 de 2011, présidé par la France qui organisera, six mois avant l’élection prési- dentielle, le grand rendez-vous international sur son territoire. Tout un symbole. De quoi mobili- ser les participants de l’Université d’été avant une prochaine édition en 2012. L Sommaire 1 ZOOM : Le chemin est tracé 2 QUESTIONS À… Jean-Christophe Becquet 3 COULISSES : Pessac, la culture au cœur 4 PORTRAIT : Michel Warschawski ZOOM BILLET Toute la semaine, nous avons tenté d’adopter un comportement le plus éco-responsable possible avec les repas bio, les verres à conserver ou encore le covoiturage. Toujours dans un souci de sauver la planète. Mais qu’en a-t-il été de respecter les choix dans les pratiques alimentaires ? Force est de constater qu’un seul ami de la ferme a été convié à nos tables : le porc ! Les autres étaient bien déçus, les pauvres… Et pour certains de nos camarades de l’Université d’été, l’heure du repas réveillait toutes les angoisses. La diversité n’a pas fini son chemin… N’FANTEH MINTEH LE QUOTIDIEN DE L’UNIVERSITE D’ETE DIMANCHE 11 JUILLET 2010

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PAR DAVID ELOY

Le chemin est tracé

’Université d’été de la solidarité internatio-nale 2010 touche a sa fin. Pendant quatrejours, près d’un millier de personnes – une

fréquentation record– sont venues des quatrecoins de France (et du monde) pour se rencon-trer, s’informer, se former et débattre. Elles ontréaffirmé avec force qu’en ces temps de crises éco-nomique, sociale, écologique… la solidarité estune valeur, un impératif. Surtout elles repartentforte de rencontres, d’enseignements, d’expérien-ces qui nourriront les mobilisations à venir. Carl’aventure ne s’arrête pas là, à Pessac. Et si le mys-tère plane encore sur la région qui accueillera laprochaine édition, la conférence plénière qui a closles rencontres a d’ores et déjà tracé le chemin pourles deux prochaines années.Michel Roy du SecoursCatholique a ainsi mis l’accent sur le Sommet desNations Unies qui, en septembre, réunira leschefs d’Etat pour faire le point sur l’avancementdans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour

le développement. La société civile y portera unseul slogan : « Assez de promesses, des actes ! ». Puis,fin novembre,Cancun (Mexique) accueillera unenouvelle conférence sur le changement climatique.L’occasion de rattraper l’échec de Copenhague?Quoi qu’il en soit, comme l’a rappelé Taoufik BenAbdallah, d’Enda, l’agenda citoyen sera marquépar le Forum social mondial (FSM) qui prendrases quartiers à Dakar (Sénégal) en février 2011.Structure organisatrice de l’Université d’été, leCRID est déjà fortement mobilisé en vue du FSMoù il prévoit d’emmener une importante déléga-tion d’organisations de la société civile française.Tout comme il ne manquera pas de se mobiliserà l’occasion du G20 de 2011, présidé par la Francequi organisera, six mois avant l’élection prési-dentielle, le grand rendez-vous international surson territoire. Tout un symbole. De quoi mobili-ser les participants de l’Université d’été avant uneprochaine édition en 2012.

L

Sommaire1 ZOOM : Le chemin est tracé2 QUESTIONS À… Jean-Christophe Becquet3 COULISSES: Pessac, la culture au cœur4 PORTRAIT : Michel Warschawski

ZOOM

BILLETToute la semaine, nous avons tentéd’adopter un comportement le pluséco-responsable possible avec lesrepas bio, les verres à conserver ouencore le covoiturage. Toujours dansun souci de sauver la planète. Maisqu’en a-t-il été de respecter les choixdans les pratiques alimentaires? Force est de constater qu’un seul amide la ferme a été convié à nos tables:le porc! Les autres étaient bien déçus, les pauvres… Et pour certainsde nos camarades de l’Universitéd’été, l’heure du repas réveillait toutesles angoisses. La diversité n’a pas fini son chemin…N’FANTEH MINTEH

LE QUOTIDIEN DE L’UNIVERSITE D’ETEDIMANCHE 11 JUILLET 2010

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PROPOS RECUEILLIS PAR SORAYA AGUDO

Questions à…

Pourriez-vous nous présenter APRIL?Jean-Christophe Becquet: L’objectif de l’asso-ciation est de promouvoir et de défendre le logi-ciel libre car c’est un enjeu de société. De grossessociétés voient en effet le logiciel libre d’un trèsmauvais œil : son utilisation, sa modification etsa diffusion étant autorisées sans contreparties,il représente une menace pour les monopoles quiexistent depuis longtemps. Ces sociétés l’empê-chent donc de se propager par des moyens juri-diques ou par la restriction des réseaux internet.APRIL joue un rôle citoyen au niveau des décideurspour contrer les lois qui voudraient mettre en pérille développement du logiciel libre.

Pourquoi le libre est-il important pour l’Afrique?J-C.B.: Le libre permet un transfert de techno-logie spontanée entre le Nord et le Sud.Avant, lespays du Sud étaient dépendants de l’industrie occi-dentale pour leur développement. Grâce au libre,n’importe quel développeur africain peut utili-ser et adapter le logiciel en fonction de ses besoins.Il permet l’émancipation des utilisateurs, qu’ilssoient des enseignants, des particuliers ou des

entreprises. Par exemple, au Mali, un comptablepeut créer sa propre entreprise et proposer sesservices sans devenir dépendant d’un logiciel.Celalui coûtera beaucoup moins cher et il pourral’adapter en fonction de ses propres besoins. Parle libre, on évite enfin le piratage qui crée aussiune certaine dépendance.

N’existe-t-il pas une fracture numérique en Afrique?J-C.B.: La fracture numérique existe mais elle neporte pas tant sur le matériel que sur l’accès àl’Internet (les connections sont très lentes). Or,logiciel libre et Internet sont intimement liés.Pouraccéder à de gros volumes de données, il faut pou-voir les transporter et c’est difficile sur le continentafricain. Pour répondre à ce genre de problèmes, ilexiste des projets, comme «la source». Le principeest de proposer des bornes avec des ordinateurs équi-pés en logiciels libres que les personnes peuvent venirtélécharger directement sur leur clé USB. La pre-mière borne de ce type a été implantée sur le mar-ché de Bamako (Mali). Elles se développent main-tenant dans les lycées. Il faut toutefois reconnaîtreque le libre reste encore utilisé par une minorité.

Jean-Christophe Becquet, vice-président de l’association APRIL,présent aux 11e Rencontres mondiales du logiciel libre.

2 ALTERMONDES

MicrotrottoirQuels conseils pour une prochaine université d’été ?Chantal«L’Université d’été était géniale. Ilserait judicieux de développer lessujets liés aux rapports entre lespays, à la finance et à la macro-éco-nomie. On a besoin de se ressourceren participant à ces universités car ilfaut se battre contre le capitalismequi criminalise les militants.»

Fabien«J’interviens dans le domaine dessciences et de la démocratie. Pour laprochaine édition de l’Universitéd’été, je souhaiterais que l’on déve-loppe les thèmes liés aux risquestechnologiques et à la recherche.»

Laurence «Il n’y a rien à dire sur l’Universitéd’été ! J’y assiste pour la première foiset je regrette qu’elle ne s’étale passur davantage de jours, peut-être quela prochaine édition pourrait durerplus longtemps.»

Mamadou«Je pense que l’on pourrait réunirdavantage de personnes. Il faudraitaussi, dans une prochaine édition,réunir les différentes thématiquesabordées dans les modules afin quetout le monde puisse bénéficier de lamême information, complète, quel quesoit le module ou l’atelier choisi.»

N’Fanteh«Ce fut une bonne semaine pour moi.C'était comme si une grande famillese retrouvait, les gens étaient dans lemême état d'esprit à savoir le partage,l'échange mais aussi le débat. Tusens qu'il y a une vie même en dehorsdes ateliers ou des modules. Malgréles horizons très divers des gens, il ya l'envie de découvrir les autres, devoir comment chacun vit dans son nid.C’est une expérience très intéressanteet humainement très riche.»

JEAN-CHRISTOPHE BECQUET À GAUCHE

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Les coulisses

ALTERMONDES 3

PAR DARYL JOHN

Pessac, la culture au cœurL’Université d’été ne se résume pas qu’aux débatset aux ateliers de réflexion. Elle propose aussi ungrand nombre de moments festifs et culturels quipermettent, à leur manière, de véhiculer aussi lemessage de solidarité.

Nicolas«J’ai trouvé l’Université d’été trèsbien. J’ai participé à plusieurs modu-les, entre autres sur les migrationsou encore le Forum social mondial, etje trouve que le temps de parole esttrop limité pour les participants.J’espère que la prochaine éditiondéveloppera les thèmes liés à l’éco-nomie sociale et solidaire car j’étu-die dans ce domaine.»

Nicole«Je donne un 9/10 à l’édition,j’espère que l’inscription par Internetaux modules sera facilitée et j’espèreque la prochaine édition aura lieu àl’Est de la France étant donné quel’Université d’été a déjà été organi-sée au Nord et à l’Ouest.»

Sabine«Je me régale ! C’est la première foisque j’assiste à cette université d’étéet j’ai pu participer à de nombreuxmodules et ateliers très instructifs etintéressants. Je pense qu’il seraitbien d’avoir des ateliers plus longs.»

près un an de préparation intense, Josyane Perez, présidente de l’associationCœur Soleil (www.coeur-soleil.org) et responsable de l’organisation desanimations culturelles pendant l’Université d’été, a le sentiment du travail

accompli. L’ambition était pourtant grande : concevoir un programme de fes-tivités et de manifestations culturelles pour les soirées tout en mettant en valeurla qualité des projets et des actions menées par les acteurs de la culture en Aqui-taine. Le résultat est à la hauteur des espérances. La Médiathèque Camponac etle Cinéma Jean Eustache de Pessac ont donné l’occasion aux participants àl’Université d’été de découvrir quelques merveilles: Leena, l’opéra urbain franco-wolof mis en scène par Migrations Culturelles Aquitaine Afriques (MC2a), leForum citoyen d’Afriscope, les Saltim’Bask, l’Afroguinguette de Cheikh Sow, lePessac Jazz Band… Le théâtre, le cinéma et la musique, autant de vecteurs pourtransmettre différemment le message de solidarité pendant l’Université d’été.Le secret de cette réussite? «Le tout est d’agencer les déplacements et les horairesen fonction des acteurs culturels et des participants de l’université»,explique Josyane,chef d’orchestre de la programmation qui n’a de cesse de valoriser l’investisse-ment des bénévoles et des associations. Il faut dire qu’en ce samedi matin touteson équipe s’active pour remettre en ordre la Médiathèque de Camponac oùs’est déroulée la soirée de clôture. Josyane reste quand même sur sa faim parrapport à la fréquentation de certains événements qui n’ont pas attiré autantde public qu’ils l’auraient mérité. Mais elle se souvient aussi de cette partici-pante venue de Paris qui était étonnée par la manière dont les intervenants,associations et élus, parvenaient à échanger entre eux. Elle ressentait «un véri-table partage politique». Heureusement la soirée festive du vendredi est gravéedans la mémoire de Josyane: «Au-delà de la joie manifestée par le public, je croisque les gens étaient en amour», confie cette militante passionnée.

A

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ALTERMONDESREVUE TRIMESTRIELLE DESOLIDARITÉ INTERNATIONALE

14, passage Dubail | 75010 Paris

TÉL. : 01 44 72 89 72

FAX : 01 44 72 06 84

E-MAIL : [email protected]

SITE : www.altermondes.org

RÉDACTION EN CHEF: David Eloy (Altermondes),

Sabrina Kassa (Dawa) et Philippe Merlant

(Reporter Citoyen)

EQUIPE DE RÉDACTION : Soraya Agudo, Anglade

Amédée, Fatoumata Diallo, Daryl John,

N’Fanteh Minteh, Sofien Murat et Khalid

Nahi

GRAPHISME : Atelier des grands pêchers

([email protected])

Le Quotidien de l’Université d’été est

réalisé par trois projets de formation

à l’écriture journalistique:

Jeunes reporters et migrants :www.jeunesrm.org

Dawa: dawabobigny.wordpress.com

Reporter Citoyen:www.reportercitoyen.fr

Retrouvez l’intégralité des numéros du Quotidien de l’Université d’été sur

www.universite-si.org

4 ALTERMONDES

Michel Warschawski Pacifiste et médiateur

Lorsque j'étais jeune,un jour, je dis-cutais avec mon père et, dans une

phrase, j'ai sorti le mot “nègre”. Il s'est levéet m'a giflé. Je ne comprenais pas ce quej'avais dit de mal. Mais il m'a expliquéle sens de son geste par la nécessité de tolé-rance entre les peuples face au racisme,et notamment celui subi par les juifs pen-dant la Seconde guerre mondiale. Je m'ensouviendrai toute ma vie!» Né de pèrerabbin, Michel Warschawski passe sonenfance à Strasbourg.A l'âge de 16 ans,il quitte la France pour Jérusalem etentreprend des études de théologie.Deux ans plus tard,en 1967,il commen-ce à militer pour le droit et la justicesociale en adhérant à l'Organisationsocialiste israélienne, l'un des premierspartis politiques qui exprime publique-ment son opposition au projet sionisteen Israël. «D'un côté, mon peuple a subila ségrégation et l’oppression raciale; del'autre, lorsque je suis arrivé à Jérusalem,j'ai observé une volonté de dominationd'Israël», explique-t-il.Ainsi,depuis près de vingt-six ans,por-tée par une vision philosophique de lavie, Michel milite pacifiquement pourune médiation face au conflit armé etcontre le mur qui sépare les peuples. Ila créé l'AIC (Alternative Information

Center,en français Centre d'informationalternative), une sorte d'agence depresse qui regroupe près de trenteorganisations arabes et israéliennesafin de coordonner les manifestationsde contestation et de rendre normal ledialogue des peuples.«Par exemple, lorsde l'attaque de la flottille humanitaire parIsraël, en mai dernier, nous avons été lespremiers médiateurs entre les médias etles personnes présentes sur le bateau, caril y avait des personnes que je connaissais».Mais parfois, le dialogue, l'échange etla réflexion ne suffisent pas.Sa femme,avocate depuis près de quarante ans etmilitante pour la cause palestinienne,le soutient activement en défendant lesinjustices issues de ce conflit.«En 1989,j'ai été condamné par Israël à vingt moisde prison ferme pour “prestations de ser-vices à organisations illégales”, car j'avaisimprimé des tracts relatifs au Front popu-laire de libération de la Palestine.»Trois fois père et trois fois grand-père,Michel exprime comme un sentimentd'accomplissement d'une vie bienremplie. Sur le plan professionnel, iln'écrit plus que des chroniques, mais«se sent journaliste tout le temps.Le jour-nalisme, c'est pour moi un acte militant»conclut-il.

«PAR KHALID NAHI

Journaliste dans l'âme, il a créé en Israël le Centred'information alternative. Né en France d'un père rabbin, parti à Jérusalem à l'âge de 16 ans, Michel Warschawski devient vite un symbole de la défense des droits des Palestiniens, par l'action et la réflexion. Vingt-six ans de militantisme contre la colonisation.

Portrait

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