Le Bois de sculptures

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Le Bois de sculptures Centre International d'art et du paysage - Île de Vassivière Carte et cartels développés

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Carte et cartels développés

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Cet ensemble sculpté a été réalisé lors du symposium par Jean-François Demeure. Cette œuvre connecte divers éléments entre eux : une pierre triangulaire dans le muret, l’escalier central avec l’oiseau, la colonne en bordure de prairie et la ligne d’arbres qui descend vers le lac ainsi qu’un dernier élément qui devait être placé dans le lac.

Jean-François Demeure poursuit son travail sur le granit qu'il taille, découpe, abrase auquel il ajoute du verre et du néon. Pour ses sculptures, il utilise la matière : « on pense généralement la pierre compacte et fermée. La constitution géologique de ce matériau impose un rapport au temps long, celui de son origine enracinée dans un territoire, constituant d'un paysage voire d'un lieu, celui d'une pérennité assise dans le confort de la durée mais la pierre est aussi poreuse au temps présent, à l'instant. La vraie réalité du temps c'est l'instant ; la durée n'est qu'une construction, sans aucune réalité absolue. »

Photographe : A. Morin

Jean-François DemeureSans titre, 1983

Granit, 250 x 120 x 110 cm, 263 x 32 x 24 cmCommande du Syndicat mixte "le Lac de Vassivière" en 1983

Né en 1946 à Civray en France, Jean-François Demeure vit et travaille à Limoges en France.

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En 1983, avec l’appui financier du Ministère de la Culture et de la Communica-tion qui poursuit son effort de promotion de l’art contemporain et de décentrali-sation culturelle à travers la création des Frac, l’association « Limousin Art Con-temporain et Sculptures » (LAC&S) engage la première intervention artistique sur l’île de Vassivière. L’ambition était de faire appel à des plasticiens pour réaliser des œuvres – et plus particulièrement des sculptures – à partir d’une matière pre-mière commune : le granit. Le choix de ce matériau n’est pas anodin, il s’inscrit dans une volonté d’ancrer l’art en train de se faire dans la tradition artisanale locale du travail de la pierre. A travers ce projet artistique, se dessinent des enjeux économiques et identitaires pour la pérennité d’un savoir-faire ancestral lié à la spécificité minérale du sol et à la sauvegarde d’une économie en déclin. L’association LAC&S inaugure en août 1983 le Symposium de Sculptures en Granit du Limousin situé sur l’île de Vassivière, regroupant les œuvres de douze artistes et se définissant comme « un musée en plein air de la pierre et du bois ». L’installation de ces sculptures jette les bases d’une union annoncée entre l’île de Vassivière et l’art contemporain.

Le Berger de Saint Genest est l’unique sculpture figurative présente dans le sympo-sium, une figure rassurante et protectrice de berger que l’artiste a souhaité érigé en l’honneur d’un ami à lui. Au cours des années soixante, Pierre Digan crée une entreprise de poteries dans le village de La Borne dans le Cher. Lieu de céramique depuis le XVIème siècle, c'est un haut lieu de la poterie de grès en France.

Pierre DiganLe Berger de Saint Genest, 1983

Granit, 350 x 120 x 85 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Né en 1941 à Paris, Pierre Digan vit et travaille à Saint Martin Château en France.

Photographe : A. Morin

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« La pierre fut sélectionnée à la carrière de Quenouille à cause de sa position originale dans la terre qui serait la même position horizontale sur les lieux de sa destination finale. Cette table de pierre, grossière et rectangulaire, fut d’abord sculptée à la main, et montre une topographie de surface qui suggère l’île et l’emplacement de la source. Sur le bord haut de la pierre se trouve une série de rainures sculptées qui, dans l’alphabet Ogam celtique, épèlent le mot « source ». L’alignement et la position de la pierre sont les mêmes que ceux du bassin qui lui-même est semblable à beaucoup de pierres anciennes couchées. Le dessus de la pierre est très lisse, poli en quelque sorte, ce qui n’est possible qu’à la main ». (Gary C. Dwyer)

Gary C. DwyerSans titre, 1983

Granit, 195 x 125 x 85 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Gary C. Dwyer vit et travaille à San Luis Obispo aux Etats-Unis.

Photographe : A. Morin

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« Un objet placé dans la pièce créée par la voûte basse de ces grands arbres changerait l’atmosphère entière de l’espace. Quelque chose comme un décor de théâtre. L’espace serait transformé, d’un lieu très anodin en un endroit où l’on serait attiré comme par un aimant et invité à s’attarder. Je continue à me dire combien il est rare de travailler avec des arbres comme ceux-ci…L’idée d’ombre de pierre se changea en création d’une pièce extérieure sous trois grands marronniers. A distance, les formes et échelle fantastiques des arbres furent amplifiées par l’existence d’un objet à leur base. L’objet est une invitation à entrer dans les arbres y découvrir ce qui était à l’intérieur.Une variété d’objets de pierre, à la fois nouveaux et anciens créa un changement physique qui déclencha un changement d’atmosphère plus important. L’espace devint une salle de séjour avec des murs, des meubles et un plafond. Le fait d’avoir placé l’objet sculptural au fond de cet espace (mis en opposition au milieu) créa un effet théâtral et permit à l’aire frontale de respirer librement. L’objet alors ne s’impose pas et invite le visiteur à s’attarder ». (Brad John Goldberg)

Brad John GoldbergSans titre, 1983

Granit, 360 x 210 x 320 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Photographe : A. Morin

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« Un quart de siècle signe l'espace entre mon granit de "l'île aux pierres", du "pays des pierres", le Karastan de mes ancêtres. L'Arménie. Le temps a mis la distance qu'il fallait afin que la première pierre parmi les mille et une sculptées depuis ce jour de juillet 1983, soit celle-ci. Bloc déjà figurant la fracture, source d'un imaginaire et de tous les possibles selon sa qualité, celle du sculpteur et de ses outils. Résumé de ma quête, synthèse de mes espérances. L'heure du repos n'est pas arrivé, bien que la sculp-ture enfin nommée "Petit éclat" aspire à se coucher sur la terre limousine ». (Henri-Aram Hairabédian)

Henri-Aram HairabédianPetit éclat, 1983

Granit, 140 x 150 x 110 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Henri-Aram Hairabédian vit et travaille à Dions en France.

Photographe : A. Morin

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« Mon œuvre se nourrit d'une réflexion liée à la pratique de la taille de la pierre. Chacune de mes pièces est une manière d'inven-taire du geste de sculpteur. Au processus soustractif - sculpter la pierre - répond un processus additif - récupérer les éclats. Ces derniers sont intégrés dans leur forme brute, ou réduits en poudre, dans une nouvelle configuration.Rien ne se perd dans ce jeu de destruction/reconstruction qui redistribue le volume dans une autre géométrie ». (Marc Linder)

Marc LinderSans titre, 1983

Granit, 210 x 210 x 480 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Né en 1957 à Strasbourg, Marc Linder vit et travaille à Offenheim (Bas-Rhin).

Photographe : A. Morin

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« Le matériau granit m’impose une très sévère synthèse, une réduction des moyens au sens de la concentration d’expression. Les volumes, les rythmes des surfaces sont dirigés pour arriver à une unité géométrique la plus concentrée possible à une compres-sion de l’idée. Essai appartient à la famille de mes « tentatives » qui sont des vols ratés. Une justification « extérieure » existe : un trou dans le volume… Mais il n’est pas le seul motif… ». (Constantin Popovici)

Constantin PopoviciEssai, 1983

Granit, 140 x 200 x 90 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Né en 1938, Constantin Popovici est décedé à Lazi en Roumanie en 1995.

Photographe : A. Morin

Photographe : A. Morin

Takera NaritaSans titre, 1983

Granit, 240 x 102 x 80 cmOeuvre réalisée pour le Symposium en 1983

Né en 1939 à Tokyo, Takera Narita est décédé à Paris en 2001.

« Sculpter c’est aborder avec respect le bloc de matière afin que s’éveille un dialogue intime entre les exigences de la pierre et l’outil révélateur de ma volonté de création. J’ai ressenti de grandes joies dans l’effort de la taille qui m’a permis « d’atteindre » et d’animer ce granit, de révéler l’âme de cette pierre, qui, lorsque je l’ai quittée, avait son propre rayonnement ». L’œuvre de Takera Narita présente deux blocs de granit placés l’un au-dessus de l’autre sans se toucher puisque le bloc placé, en équilibre, au-dessus repose sur trois pierres et laisse ainsi apparaître le paysage environnant.

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« Pour moi, il s’agit d’une forme polyvalente que le spectateur s’explique comme il la voit dans le moment d’une certaine illumi-nation. Ce n’est pas une forme absolue, mais une forme établissant comme une relation entre l’observateur, la pierre, et les élé-ments qui devraient évoquer le début de cette relation. C’est une sorte de naissance ou bien ce n’est rien du tout, si cette rela-tion n’est pas établie. J’ai fixé une forme trapézoïdale de manière que, sur les trois faces inférieures, la lumière crée une forme positive sur les faces taillées en négatif, tandis que la partie supérieure, tournée ves le soleil, conserve une forme positive du matin au soir ». (Janez Pirnat)

Janez PirnatSans titre, 1983

Granit, 220 x 180 x 180 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Photographe : A. Morin

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« Par rapport au granit, je dois souligner que cette matière m’est très chère. Les qualités de cette pierre, sa dureté et sa densité, présentent un défi chaque fois qu’on la conforte. Elle est mystérieuse, et par la taille directe on la découvre et elle participe elle-même à l’évolution de la forme. Cette forme devient donc presque magique. La sculpture ne se révèle que lentement par la concentration et l’adonnement physique du sculpteur. La sculpture que j’ai réalisée fut taillée d’une pierre de grande dimen-sion et je l’ai exécutée sans contrainte. Elle donne de loin l’impression d’un paysage en longueur, mais de près elle est plus intime avec ses objets divers taillés dans la masse qui s’interchangent avec le temps. Par exemple, lorsqu’il a plu, les bols sont remplis d’eau et les oiseaux viennent boire ». (Michael Prentice)

Michael PrenticeSans titre, 1983

Granit, 360 x 105 x 80 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Photographe : A. Morin

Intervention I est une sculpture environnementale intégrée au site qui l’accueille, en contrebas du Château. Une première pierre de granit de forme géométrique rectangulaire sort littéralement de terre pour reposer sur un deuxième bloc de granit posé au sol. Par son aspect plus brut, cette deuxième pierre réagit à la première d’aspect plus lisse.

Dominique RollandIntervention I, 1983

Granit, 80 x 200 x 266 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Photographe : A. Morin

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François Bouillon porte un interêt tout particulier aux civilisations qui, comme celles des Dogons, des Aborigènes australiens ou des Inuits, vivent en relation symbiotique, magique et pragmatique avec la nature. Son œuvre se fonde essentiellement sur la manipulation de matériaux. Qu’il s’agisse du bois, de la pierre ou du métal, ils sont avant tout utilisés pour leurs qualités « matériologiques » intrinsè-ques, mais subissent, par la truchement de rapprochements inattendus, un déplacement sémantique qui nous les désigne comme réso-lument investis d’une dimension symbolique.

François Bouillon décrit ainsi Solstice d’été : « La sculpture est composée de deux triangles équilatéraux qui s’opposent à l’intersection et forment une étoile juive. Le centre de gravité est parfaitement géométrique. Mais lorsque l’on tourne autour, on a l’impression d’un déséquilibre qui est rattrappé par un ovale formé de trous percés avec des mèches et à l’intérieur desquels a brûlé de l’huile ». L’empilement des deux blocs donne une curieuse impression de déséquilibre que l’ovale, formé par les traces du feu absent, parvient à corriger. « L’ovale de feu lie les deux prismes comme le solstice lie deux saisons ». Les différentes figures géométriques que sont le trian-gle, l’étoile et l’ovale interviennent, dans cette œuvre, au travers de rapports complexes d’antinomie et de complémentarité et partici-pent à l’édification d’un monument de « l’équilibre instable ».

La notion de « solstice » - étymologiquement l’arrêt du soleil (sol « soleil » stare « être immobile ») - se matérialise sur l’île de Vassivière par la trace de forme ovoïde du feu qui parvient à lier en un seul ensemble les deux blocs de granit aux positions pourtant opposées. Avec Solstice d’été, c’est non seulement deux forces contradictoires qui sont mises en jeu : la force de la destruction du feu qui brûle, consume, dévore et celle de la résistance du granit due à son essence cristalline et à sa densité même mais également deux approches du temps, celle, limitée, de la combustion et celle, inaltérable et indéfinie du minéral.

François Bouillon Solstice d’été, 1983

Granit et noir de fumée, 400 x 100 x 100 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Né à Limoges en 1944, François Bouillon vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

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Erik Samakh se définit à la fois comme un plasticien, un artiste paysagiste, un chasseur, cueilleur d’images et de sons. En 1983, il présente pour cette première intervention sur l’île de Vassivière un Lieu d’écoute. Dans le cadre du symposium de sculptures en granit, l’artiste propose un emplacement privilégié pour l’ouverture des sens et plus particulièrement l’ouïe. Tous ses projets et installations ultérieurs développeront la même idée : à partir d’un espace, créer une « œuvre-lieu » visant à intégrer son travail à la nature ou à l’environnement (paysage, architecture…) en modifiant ce dernier à l’aide d’installations parfois très élaborées techniquement.

Lieu d’écoute, beaucoup plus élémentaire que les œuvres qu’il produira par la suite, apparaît comme un monument mégalithique qui détermine un cadre précis et fournit une nouvelle invitation à envisager le paysage que ce soit de manière visuelle ou sonore. En libérant et ciblant ainsi l'écoute, l’artiste fait glisser l’environnement vers la partition et abolit pour un temps les mécanismes culturels et idéologiques qui affectent inlassablement la perception du réel.

Erik SamakhLieu d’écoute, 1983

Granit, 230 x 690 x 60 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1983

Né à Saint Georges de Didonne en 1959, Erik Samakh vit et travaille à Serres dans les Alpes de Haute-Provence.

Photographe : A. Morin

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Située à l’orée de la forêt et à quelques mètres de la sculpture la plus imposante de l’île, à savoir, la tour-phare du Centre d’art, l’œuvre de Jean Estaque, taillée dans un bloc de granit, fait émerger une figure humaine asexuée.

Cette œuvre s’articule clairement en trois temps. Pourvue d’une tête mais sans réelles formes corporelles – un bloc monolithique rectangulaire – cette figure exhibe, en surface, deux autres formes humaines dansantes gravées sur la roche et, dans sa partie supérieure, en profondeur, une sorte de vitrine qui est, en réalité, une cavité, creusée dans le bloc de granit, protégée d’un verre qui ren-ferme une série de quatre petits personnages désarticulés en bois peints.Ce tableau dans la sculpture, en son sein précisément, semble mettre en scène un espace théâtral, un peu clownesque, notamment par le démembrement des personnages, leurs positionnements étranges, comme resserrés, confinés.

Jean Estaque Sans titre, 1987

Granit, verre, bois, 270 x 110 x 60 cmOeuvre produite dans le cadre du Symposium en 1985

Photographe : A. Morin

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Cette oeuvre de Dominique Thébault consiste en un déploiement aussi bien vertical qu’horizontal. Elle se décline ainsi en deux éléments disctints : d’une part, un tronc d’arbre planté à l’envers dans le sol dont les racines tendues vers le ciel supportent une pierre de dimension réduite dans laquelle a été percé un trou oblique ; d’autre part, placée au sol, légèrement en amont, une longue pierre plate de granit creusée d’une profonde rainure qui prolonge l’axe imaginaire déterminé par la direction du trou. Cette sculpture peut se percevoir de diverses manières, du cadran solaire archaïque à un autel des sacrifices.

Cette construction interroge largement l’idée de nature en fractionnant et structurant le lieu qu’elle occupe mais également en matérialisant le lieu de passage qu’elle constitue, en l’occurrence, ici, le passage de la lumière, des rayons du soleil qui filtrent au travers de la forme circulaire creusée dans le bloc de granit. Cette sculpture évoque plus ou moins directement des obstacles, des passages, des abris. Elle est conçue comme un objet métaphorique de l’expérience artistique. Pour Dominique Thébault, la nature est traversée, porteuse de signes et de langages ; chaque parcelle est surchargée d’histoires, de symboles. La déambulation autour de cette sculpture permet, dans la perception discontinue qu’elle provoque, d’apprécier une durée, une conscience du temps sans lesquelles le sens même du travail s’échapperait.

Dominique Thébault Sans titre, 1985

Granit, terre, bois, 400 x 190 x 700 cm Oeuvre produite pour le Symposium en 1985

Né en 1949 à Rouen, Dominique Thébault vit et travaille à Limoges.

Photographe : A. Morin

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Lorsqu’il définit son activité artistique, Jean-Luc Vilmouth la qualifie d’« augmentation ». Ce qui l’intéresse dans ce concept « ce n’est pas de chercher une nouvelle arithmétique des objets mais de provoquer à partir de l’objet une augmentation : le même et un autre en même temps ». Cette augmentation est une transformation qui confère une portée et une importance à l’objet qui au départ n’est qu’un ready-made.

Pour Jean-Luc Vilmouth, l’objet le plus banal, le plus quotidien est un objet d’investigation. Un objet usuel comme le marteau, ôté de son contexte et placé dans une situation inhabituelle entraîne une perception autre, une lecture différente de lui-même. La vision de cet outil nous apparaît alors d’une « inquiétante étrangeté ». C’est à ces déplacements, provoquant des « glissements de sens » que s’attache le travail de Vilmouth. En 1979, Vilmouth avait déjà montré un marteau qui semblait n’avoir servi qu’à creuser la cavité dans laquelle il reposait, inutile ; la cause se résorbait dans son effet, le marteau s’offrait sans maître.

Sur l’île de Vassivière, il a choisi de présenter un marteau de plus de sept mètres de long et trois mètres de large, couché sous les fron-daisons. La tête est composée de trois blocs de granit, quant au manche, il est formé par un renflement du sol qui, à l’image du champ environnant, se trouve planté d’herbes. Dans Marteau sans maître, Jean-Luc Vilmouth se limite à une intervention très simple qui con-serve l’identité de l’objet tout en suggérant une autre approche de celui-ci. Cette tension entre identité et altérité, il la matérialise au travers de deux moyens : l’augmentation mimétique du modèle et la décontextualisation de celui-ci (qui consiste à le disposer en pleine verdure sur l’île de Vassivière). Ces deux processus menés conjointement nous amènent à nous ouvrir à toutes les possibilités percepti-ves et sensorielles qu’une telle pièce peut susciter. Au travers de cette installation, l’artiste explore clairement le schéma bipolaire modè-le-copie, leur ressemblance, leur dissemblance et s’interroge finalement sur la perception que peuvent susciter de tels transferts. Dé-tourné, augmenté, présenté, le marteau acquiert plus de sens que son utilisation fonctionnelle initiale.

Jean-Luc Vilmouth Marteau sans maître, 1985

Granit, terre, 800 x 300 x 63 cmOeuvre produite pour le Symposium en 1985

Né en 1952 à Creutzwald en France, Jean-Luc Vilmouth vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

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David Jones a longuement étudié la culture aborigène et a réalisé des sculptures sur certains sites marqués antérieurement par ce peuple. De même, son travail en Europe et en Amérique a été lié à des vestiges préhistoriques, en particulier à l’île de Pâques, en Bolivie, au Pérou, au Mexique, dans le désert de sable de la région de Kimberley…

L’artiste a tiré son inspiration de la nature de l’île de Vassivière pour finalement nous livrer un instrument de lecture et de mesure du paysage. David Jones aime se confronter à la nature et à ses énergies ; son travail est une réflexion attentive portée sur son environne-ment. Green place with red ants, réalisée en 1988, se présente comme une longue forme serpentine en fonte de fer, de 22 mètres de long, posée sur onze appuis en granit qui lui assurent son horizontalité.

Le hasard de la marche, les découvertes fortuites – une fourmilière, un serpent mort – mais aussi la qualité particulière de la lumière et la proximité de l’eau, ont designé à l’artiste le site de la sculpture : une hêtraie pentue et ouverte. Des troncs d’arbres mis bout à bout et élagués à la tronçonneuse ont servi de matrice à l’œuvre en fonte. Pour souligner encore cette forme sinueuse, l’artiste a creusé une « colonne vertébrale » sur toute la longueur. L’œuvre, par référence faite au serpent et également par le choix de la fonte et du bois, nous renvoie aux trois règnes de la nature : le minéral, le végétal et l’animal.

David Jones Green place with red ants, 1988

Fonte de fer, 11 appuis en granit du Compeix, 2200 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1988

Né en 1943 à Melbourne, David Jones vit et travaille à Perth en Australie.

Photographe : A. Morin

Page 17: Le Bois de sculptures

David Nash pour qui « nature et réalité sont synonymes », travaille exclusivement le bois, à la tronçonneuse et avec des outils plus tradi-tionnels. Les œuvres répètent inlassablement les mêmes formes : l’artiste tente de s’approcher au plus près du geste juste. Les expérien-ces antérieures du sculpteur, les préoccupations esthétiques du moment, les thèmes auxquels il s’est déjà confronté et qu’il reconsidère sont les éléments essentiels de sa démarche. La qualité de l’arbre choisi, l’environnement dans lequel il intervient sont également pris en compte. L’ensemble du travail de David Nash consiste à établir une continuité, une translation entre milieu naturel et milieu culturel.

Charred wood and green moss est une spirale, inspirée de la tradition celte, faite de morceaux de bois calcinés posés sur un tapis de mousse, dans une clairière. David Nash a choisi un chêne malade pour réaliser cette œuvre. Les morceaux taillés par l’artiste ont été calcinés par le feu avec les restes de l’arbre. Outre le rapport chromatique entre les bûches noires et la mousse verte - évoquant le souvenir du paysage de l’artiste : la végétation verte et le lac noir - les quatre éléments sont ici rappelés : le feu du bois calciné, la terre qui les supporte, l’eau vitale et l’air. Les œuvres de David Nash sont conçues pour être en évolution perpétuelle avec la nature.

David Nash avait créé deux œuvres pour le parc de sculptures de Vassivière. La seconde, Descending Vessel, était taillée dans un sapin, choisi pour sa courbure, son emplacement, mais aussi parce qu’il menaçait de s’effondrer. L’œuvre, plantée au bord de l’eau et enraci-née dans la terre, s’élançait vers le ciel. La sculpture reliait donc symboliquement le ciel à la terre, mais aussi la terre et le ciel à l’eau. Suite à la tempête de 1999 qui l’endommagea, l’œuvre a été détruite à la demande de l’artiste.

David Nash Charred wood and green moss, 1989

Bois calciné, mousse verte, dimensions variablesCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1989

Né en 1945 à Esher en Angleterre, David Nash vit à Blaenau Festiniog au Pays de Galles.

Photographe : J. Hoepffner

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Utilisant principalement le bois : des troncs sculptés, des branchages de hêtre, de noisetier ou de sorbier liés, tramés, ligaturés, Domini-que Bailly crée des sculptures sphériques ou linéaires. L’artiste conçoit ses œuvres en rapport direct avec l’environnement (souvent naturel) dans lequel elles sont montrées. Les œuvres permanentes sont réalisées pour des sites spécifiques architecturaux ou paysagers.

Dans le parc de sculptures de l’île de Vassivière, l’œuvre se trouve parmi un éboulis de blocs de granit, dans une clairière. Dominique Bailly est intervenue dans le paysage pour mettre en valeur ce site en particulier : le monticule de terre qui est l’axe central de l’œuvre a été recouvert de mousses ramassées en divers lieux de l’île. Cinq blocs de chêne, sculptés, reprennent la forme de certains rochers de la clairière.

Pour l’artiste : « Travailler dans le paysage c’est aussi entrer en contact avec d’autres matériaux que le bois (…), voir ce qui se passe entre les blocs de pierres, suivre les failles et les mouvements géologiques (…) ». Cette rencontre revêt un sens particulier dans le pay-sage de Vassivière. Elle signe la présence d’un chaos de granit, résultat d’un long processus d’altération qui aboutit à l’effleurement de ces polyèdres rocheux émoussés qui s’entassent sur place, mémoire géologique donc de la vieille pénéplaine limousine, progressivement enfouie sous des sédiments végétaux.

Dominique Bailly Sans titre, 1990

Blocs de chêne taillés, pierres et mousses, 150 x 800 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1990

Née en 1949 à Paris où Dominique Bailly vit et travaille.

Photographe : J. Hoepffner

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L’artiste utilise le verre sombre, le papier photographique, avec d’autres matériaux plus traditionnels de la sculpture tels l’acier, le plomb, et élabore une réflexion sur la sculpture, son environnement, sur la perception du spectateur, en travaillant sur la notion de passage : de l’ombre à la lumière, de l’objet au reflet, de la sculpture à l’image.

Située dans un puits de lumière de la partie forestière, Bernard Calet a choisi de situer son œuvre au pied d’un ancien muret en partie démoli, déjà présent lors de la création du lac. Ce mur sert d’élément de « référence architecturale » mais également de « trace mémoire » de l’activité rurale et des huit hameaux noyés.

Cette œuvre s’apparente aux fondations d’une maison construite en granit de la région qui épouse naturellement la pente du terrain. Au-dessus de ces « fondations » a été posé un plateau de granit noir poli qui rappelle l’horizontalité de l’eau. Sa couleur noire et son dépoli renvoient à l’aspect miroitant de l’eau du lac. Lorsqu’on accède à l’île, l’on est ainsi frappé par cet aspect de miroir sombre du lac qui reflète l’environnement, la végétation, le ciel.

Bernard Calet Sans titre, 1990

Granit jaune, granit noir poli, ciment, 70 x 380 x 380 cmDépôt du Frac Limousin, Fonds régional d’art contemporain en 1990

Né à Charenton en France en 1958, Bernard Calet vit et travaille à Tours.

Photographe : A. Morin

Page 20: Le Bois de sculptures

Le travail de Marc Couturier puise en quelque sorte dans le monde invisible des choses et tente de révéler au regard et au mental de chacun ce qu’au fond tout le monde voit et ressent. Son travail constitue une offrande où tout ego est absent et où le retrait de l’artiste laisse la place à l’esprit contenu dans toute œuvre.

Situé dans l’ancien arboretum de l’île, Nadir fait partie d’un ensemble d’œuvres réalisées à partir de l’hostie. Ainsi en 1988, il a conçu pour l’exposition « Les Magiciens de la Terre » au Centre Georges Pompidou, Hostia une œuvre circulaire composée de plaques d’hostie montées sur plexiglas. Successivement, cette œuvre était exposée devant une ouverture sur l’extérieur de la Grande Halle de la Villette. L’aspect translucide du matériau était révélé aux visiteurs par la lumière naturelle. L’hostie, chargée de spiritualité, porte en elle l’idée de transcendance et Nadir représente cette évolution spirituelle non seulement par sa forme mais aussi par le choix artistique de son emplacement parmi les bouleaux, arbres sacrés.

La forme de l’œuvre évoque une porte ou un portique, une sorte de passage fictif et le motif du demi-cercle blanc renvoie à l’hostie. Le concept d’offrande qui anime la démarche de l’artiste ne pouvait trouver havre plus juste que cet ilôt dans l’île qu’est l’arboretum, dont l’emplacement à flanc doux vers les rives du lac invite à une déambulation montante et descendante telle qu’elle induit l’idée d’un espace suspendu, entre l’eau et le ciel, et bien au-delà entre le nadir et le zénith.

Marc CouturierNadir, 1990

Verre, verre sérigraphié, cadres en aluminium, ciment, 200 x 750 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1990

Né en 1946 à Mirebeau-sur-Béze en France, Marc Couturier vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

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Kimio Tsuchiya travaille principalement avec des matériaux naturels tels que le bois, la pierre, les cendres et des objets de récupéra-tion, de vieux objets abandonnés, pour réaliser des œuvres au travers desquelles il tente de retrouver le langage de la nature.

Cette double utilisation de matériaux élémentaires et d’objets trouvés permet à l’artiste de bâtir des œuvres qui font référence à la mémoire et au temps qui passe. L’artiste travaille de telle sorte que l’origine de ses matériaux reste apparent et le spectateur est ainsi amené à y déceler une narration.

Eternity est un assemblage demi-discoïdal de granit et de poutres de bois récupérées dans une maison démolie de la région de Vassi-vière. Si les fenêtres n’existent pas dans les constructions traditionnelles japonaises, c’est que les murs eux-mêmes remplissent cette fonction. Ce mur a été monté selon une maçonnerie traditionnelle afin de mettre en évidence le respect extrême entretenu par l’artiste vis-à-vis des matériaux récupérés qui ne sont pas contraints ou transformés violemment mais juste déplacés et ré-assemblés.

Kimio Tsuchiya Eternity, 1990

Bois, pierres, matériaux divers, 500 x 320 x 70 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1990

Né en 1955 à Fukui au Japon, Kimio Tsuchiya vit et travaille à Tokyo.

Photographe : A. Morin

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Kimio Tsuchiya emprunte à la nature son matériau de base pour l'organiser de manière totalement inédite... Selon lui, l'œuvre d'art elle-même a une vie ; elle naît, se développe, vieillit et meurt ; elle est une part de la nature et donc est soumise à ses lois. Il n’agit pas pour les autres mais pour la nature. C'est avec elle qu'il s'exprime, se découvre et s'enrichit, qu’il établit un dialogue d'ordre spiri-tuel et esthétique. Ses travaux n'ont jamais un effet destructeur. Il n'hésite pas à créer des œuvres ayant une portée morale grâce auxquelles il place les hommes face à la réalité.

Ever est une sculpture de forme ovoïde, haute de trois mètres environ. A l’intérieur de cet « œuf », réalisé à partir de morceaux de métal assemblés et soudés entre eux, s’entassent encore des restes de vieilles chaises récupérées, cassées ou non, visibles à travers les interstices des pièces de métal qui entourent leur lente décomposition.

Kimio Tsuchiya Ever, 1990

Structure en acier, chaises en bois, 300 x 200 x 200 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1990

Né en 1955 à Fukui au Japon, Kimio Tsuchiya vit et travaille à Tokyo.

Photographe : A. Morin

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Si Jean-Pierre Uhlen porte un grand intérêt à l’art conceptuel, il n’en reste pas moins très préoccupé par les rapports qui unissent archi-tecture et sculpture. Le mot occupe également une grande place dans ses œuvres, moyen pour lui d’introduire l’idée de la représenta-tion dans sa sculpture.

Jean-Pierre Uhlen a réalisé Steinland dans une trouée d’arbres au bord du lac. L’œuvre se présente comme un lieu de point de vue mais aussi comme un signal, ouvert à la fois sur le lac et sur la rive opposée de l’île. Elle est donc comme un passage, une communication établie entre l’île et l’extérieur. La couleur vive du portique et du plateau teintés au minium renforce l’aspect signalétique de l’œuvre.

Steinland entretient un état fictionnel d’une architecture intérieure transposée en plein air. Au sol, des blocs de granit assurent l’horizontalité du cadre en acier de six mètres de côté lequel délimite le territoire de l’œuvre. Le portique et le plateau, dont le rendu en perspective n’offre pas de finalité pratique, s’inscrivent à l’intérieur de ce cadre au sol.Cette sculpture monumentale se présente aussi comme un tableau, une référence ambiguë toujours présente dans l’œuvre sculpturale de l'artiste. Le portique orange joue alors le rôle de cadre en circonscrivant l’œuvre. La géométrie formelle de la sculpture renvoie aux plantations rigoureuses des résineux à l’entour et sur la colline de l’autre côté du lac. Le titre de l’œuvre, Steinland soudé sur le cadre horizontal, évoque à la fois le paysage (land) et l’élément minéral (stein).

Jean-Pierre Uhlen Steinland, 1990

Acier, granit, résine et couleur minium, 290 x 600 x 500 cmDépôt du Frac Limousin, Fonds régional d’art contemporain en 1990

Né en 1959 à Mulhouse, Jean-Pierre Uhlen vit et travaille à Limoges.

Photographe : A. Morin

Page 24: Le Bois de sculptures

Le travail d’Alain Kirili relève indéniablement de la statuaire. Il s’exprime par la taille directe, le modelage et le moulage. Métal forgé, plâtre, terre, ciment, bronze sont ses matériaux privilégiés.

L’emplacement de cette sculpture sous le parvis du bâtiment de Aldo Rossi, à l’entrée du Centre d’art, constitue un signe fort qui, à la fois, désigne la spécificité du Centre, à savoir, recevoir des œuvres, susciter la création contemporaine et établit un net contraste, de par son volume, avec l’ensemble architectural des verticales métalliques. Cette sculpture abstraite (mais constituée à partir d’un modèle féminin vivant) est posée sur un socle en granit, celui utilisé pour les parements extérieurs du Centre qui fait partie intégrante de l’œuvre. Pour Kirili, cette œuvre chargée d’une lourde mémoire (à l’instar de celle de Aldo Rossi) peut évoquer de par sa forme un peu protubérante une énorme tête gardienne qui annoncerait l’entrée dans le bâtiment et protégerait les salles d’exposition.

Alain Kirili brutalise le ciment, lui impose sa force et sa volonté, et donne à son œuvre un titre lourd de référence et d’allusion mytholo-giques Ariane, Messagère des Dieux. Ses sculptures fonctionnent comme une apologie de l’esprit, du rythme, du refus de l’immobilité et du mutisme : « Mes sculptures ne sont pas des objets mais des présences, des corps vivants » qui peuvent tout à la fois se regarder de face, de dos, de côté. Le travail de Kirili relève d’un « expressionnisme non amnésique » qui porte les traces d’une « profonde mémoire de l’histoire, des traditions, en relation avec l’inconscient ». Pour Alain Kirili, le modelé est l’art de la plus grande subjectivité ; à cet égard, Ariane, Messagère des Dieux témoigne bien de cet intérêt dominant pour le geste, le modelé, une chair vivante, extatique : la terre transformée en chair est palpée comme un corps.

Alain Kirili Ariane, Messagère des Dieux, 1990-1991

Ciment gris, granit de Compeix, sculpture 110 x 70 x 70 cm, socle 110 x 50 x 65 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication et du Conseil régional du Limousin en 1990

Né en 1946 à Paris où Alain Kirili vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 25: Le Bois de sculptures

Dans son travail, Bernd Lohaus utilise surtout des matériaux puissants et denses tels le bois et la pierre. Il privilégie l’usage d’éléments qui ont déjà servi, portant les traces de l’industrie humaine et du temps, chargés et enrichis d’un passé dont ils témoignent. Ils affichent encore les stigmates des coupes, des encoches, des entailles, de leurs anciennes fonctions. La langue primaire figurant sur les supports bruts est une donnée tout aussi fondamentale dans le travail de cet artiste qui nous amène à créer des correspondances entre langue et sculpture.

Vouant une grande admiration aux matériaux forts, durs, solides, compacts, c’est tout naturellement qu’il investit la roche graniteuse limousine dans le parc de sculptures. En sortant les blocs de granit de leur contexte originel pour les intégrer, par déplacement et posi-tionnement, dans de nouvelles compositions, il prend soin de ne pas altérer, de ne pas effacer ce qu’elles ont été. Loin de les défigurer, il leur restitue une existence, en tant qu’œuvre, une possibilité de figurer dans notre présent autrement. Cette sculpture horizontale tire sa force de la manière dont il dispose et ordonne les trois pierres les unes par rapport aux autres, les unes à côté des autres.

Avec Essai / Par Toi / Traces, Bernd Lohaus joue sur les formes et la position de ces trois blocs de granit tout en soulignant par un agen-cement précis les inscriptions scripturaires : « Essai », « Par Toi », « Traces » respectivement inscrits à gauche, à droite et au milieu. L’apparition d’un langage élémentaire par le biais de mots isolés inscrits sur des blocs de roche graniteuse, traces des temps géologi-ques, nous invite à voir dans cette association un saisissant contraste temporel. Au travers de cette sculpture, Bernd Lohaus convoque conjointement la mémoire des temps géologiques et la fin des temps préhistoriques marquée par l’avènement de l’écriture.

Bernd Lohaus Essai / Par toi / Traces, 1986-1992

Granit, 100 kgDépôt du Frac Limousin, Fonds régional d’art contemporain en 1992

Né à Düsseldorf en 1949, Bernd Lohaus est décédé à Anvers en Belgique en 2010.

Photographe : A. Morin

Page 26: Le Bois de sculptures

L’œuvre de Jean Clareboudt constitue une partie de la série Passages Fer : une déclinaison de dix pièces réalisées lors d’une résidence de l’artiste dans l’Atelier Calder en Touraine, de juillet 1991 à mars 1992. Les sept autres sculptures ont été déposées à Montbel-liard, Rennes, Nozay… A propos de la série des Passages Fer, il évoquait combien il avait été marqué lors d’un de ses déplacements entre les rives de la Loire et le Jutland (Danemark) par les métamorphoses du paysage et par la permanence des signes circulaires qui le jalonnaient et s’imposaient à son attention (rouleaux de paille, meules de pierre, etc.).

Les dix meules d’acier sont la cristallisation de cette pensée en mouvement. A la fois dans un rapport d’appartenance et de tension avec la nature, les sculptures de Jean Clareboudt modifient le paysage. Ici, les meules échangent leur valeur d’usage contre une valeur sensible : elles deviennent des machines à déconcerter. Le poids et la hauteur de chacun des disques imposent une présence forte au spectateur. Simultanément, un jeu s’opère : vide et plein alternent et entrent en dialogue. L’artiste crée un vide « actif » qui invite à plier les genoux, à découvrir comme à travers une caméra un fragment du paysage. L’imposante sculpture est alors l’opposé d’une clôture, elle fait entrer en mouvement. Entre chaque meule, un parcours visuel et physique s’instaure qui nous renvoie à une sorte de danse. Cette œuvre nous laisse entrevoir une lecture du paysage agricole, lecture du temps qui travaille sans cesse.

Jean ClareboudtPassages Fer, 1991

3 sculptures en acier, 200 x 200 x 52 cm chacuneDépôt du Fonds national d’art contemporain en 2000

Né en 1941 à Lyon, Jean Clareboudt est décédé en Turquie en 1997.

Photographe : A. Morin

Page 27: Le Bois de sculptures

Andy Goldsworthy, un des artistes majeurs du Land Art, a conçu cette œuvre permanente sur l’île en relation avec l’histoire et la nature géographique du site et du lac artificiel. En 1994, il écrit : « Le paysage anglais est riche en murs de pierres sèches entourant les champs. Leur influence sur mon travail a été plus grande que les cercles de pierre préhistoriques auxquels je rends occasionnellement visite. Les murs sont des éléments vivants dans le paysage et c’est une grande leçon pour un sculpteur, par la manière dont ils utilisent le matériau et le lieu. C’est une grande leçon pour un sculpteur. Les enclos ont leurs origines dans ceux qu’édifiaient les éleveurs des collines pour enfermer leurs moutons. J’aime y entrer, parfois, pour m’abriter du vent qui souffle sur ces collines. Le lieu est rendu intense et calme par les murs qui le délimitent, on s’y sent protégé.

À Vassivière, j’ai travaillé sur les restes d’un mur qui délimitait autrefois un champ mais qui maintenant, depuis la création du lac artifi-ciel, part d’un bois pour s’enfoncer dans les eaux. J’ai exploré la frontière entre le lac et le bois à l’aide d’un mur qui est lui-même fron-tière. Il enclôt les deux espaces et accentue leur contraste. Les différences d’espace et de lumière entre les deux endroits soulignent les changements qui ont eu lieu. Le mur évoque la nostalgie que l’on peut ressentir pour les huit villages qui ont été noyés, sans pour autant prendre parti contre le barrage. Il permet par sa présence de comprendre la nature de Vassivière. Le passé enracine une œuvre et la met en résonance avec le lieu.

Je n’ai jamais travaillé dans un lieu ayant été aussi soudainement transformé que Vassivière - on en ressent encore l’impact à l’heure actuelle - et, où la nature en dépit de cette transformation, soit toujours aussi forte. Le mur s’élève sur une rive mise à nue par la ren-contre de deux natures - le bois et l’eau - et par les fluctuations engendrées par le barrage, le climat, les saisons ».

Andy Goldsworthy Sans titre, 1992Mur de pierres sèches de granit, 160 cm x 380 cm, deux boucles de 1500 cm et 1700 cm de diamètreCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1992

Né en 1956 dans le Cheshire en Angleterre, Andy Goldsworthy vit et travaille dans le Drumfriesshire en Ecosse.

Photographe : J. Hoepffner

Page 28: Le Bois de sculptures

Roland Cognet emploie des matériaux simples, naturels ou industriels, et crée des formes élémentaires souvent issues d’une maîtrise directe de la matière.

Ici, l’organique ou le naturel (le tronc de séquoïa) sont mis en parallèle avec l’industriel, le fabriqué (le ciment) par la technique du moulage. Ainsi l’artiste propose une réflexion sur la symétrie et la dualité, ce qui souligne le rapport particulier entre l’architecture et l’environnement naturel du Centre d’art.

Selon Roland Cognet, la question du modèle reste posée et des attitudes techniques simples telles que le moulage, le modelage, la taille directe sont riches de sens. S'il peut sembler « naturel » de trouver à cet endroit un morceau d’arbre coupé, son moulage simplement posé à côté, va faire basculer cette perception pour devenir, avec la taille de l’arbre, un événement insaisissable.

Roland Cognet Moulage, 1994

Séquoïa, ciment, 400 x 220 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1994

Né en 1957 dans l’Allier, Roland Cognet vit et travaille à Jussat en France.

Photographe : A. Morin

Page 29: Le Bois de sculptures

« L’œuvre consiste en sept sculptures en pierre de lave de Volvic, installées horizontalement, au sol, c’est-à-dire enterrées sur toute leur épaisseur, donc affleurant et pouvant être piétinées, foulées… Chaque élément est disposé au croisement de deux ou plusieurs sentiers suivant un parcours annulaire qui se développe à l’intérieur de la colline boisée de l’île, c’est-à-dire le long du chemin habituel des visi-teurs. Le projet s’intitule Il Segno Arte pour lequel j’ai défini une forme qui identifie le concept « art ». Les références de ce signe dans son existence physique et matérielle sont multiples à l’image même de l’art qui peut déceler et condenser les termes opposés : division-union, clôture-ouverture, conjonction-fuite, superficie-perspective, dessin-matière, concept-objet, implosion-explosion, lacération-tenue, statisme-dynamisme, comme le papillon qui naît de la métamorphose, donc poids-légèreté. Il Segno Arte est situé au croisement de voies dont il accentue le sentiment de tenue structurale dans les points focaux qui unifient les différentes directions : arrivée et départ, divergence et choix, possibilité et décision. Cette œuvre ne s’élève pas verticalement comme un monument traditionnel, mais se dispose horizontalement au sol pour assumer la dimension fluide du temps. L’œuvre est féconde sur toute la longueur du parcours et non pas en un seul point, pourtant sans être envahissante. Elle exprime la couleur des éléments comme l’érosion naturelle et la lente dégradation résultant du passage rituel et continuel des visiteurs. C’est l’horizontalité comme glissement du temps. Il Segno Arte fait partie d’une idée que j’ai manifestée en 1976 en écrivant le livre des Cent Expositions. La réalisation du projet de Vassivière en est le témoignage durable ». (Michelangelo Pistoletto)

Actuellement, seulement six sculptures sont visibles dans le parc de sculptures ; la septième, originellement positionnée à proximité de la tour-phare de Aldo Rossi a été ensevelie suite à la tempête en 1999.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : J. Hoepffner

Page 30: Le Bois de sculptures

La dimension humaniste de Michelangelo Pistoletto est exceptionnelle. Elle donne un fondement éthique à son œuvre dont elle amplifie et renforce l’apport esthétique.

En 1968, à la Biennale de Venise, Pistoletto présente le manifeste de la Collaboration. C’est à partir de là que naît le Zoo, un groupe ouvert qui propose un art d’échange créatif, c’est-à-dire de découverte de l’identité de « l’autre ». Il ne s’agit pas d’action purement théâtrale ni de happening mais d’une activité intersubjective qui a pour ambi-tion de créer au-delà de l’objet. Ce genre d’activités se poursuit tout au long de son existence d’artiste et il y mêle famille, amis, artistes, jusqu’à ce qu’il concrétise son dessein en créant Cittadellarte en 1996 à Biella. C’est l’action de diviser-multiplier le miroir qu’il applique à la société microcosmique de Cittadellarte. Dans une ancienne filature de cette région autrefois spécialisée dans la fabrication de fils à partir des plus belles laines, dans un lieu à l’architecture grandiose, il propose à des chercheurs, à des artistes confirmés ou en gestation, des écrivains, des scientifiques une sorte de creuset où les échanges d’idées peuvent faire naître une collaboration fructueuse et active en matière de dynamique sociale.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 31: Le Bois de sculptures

Le parcours de cette figure importante de l'arte povera et de l'art conceptuel est exceptionnel à maints égards ; le travail de Michelan-gelo Pistoletto sur le temps, le banal, la forme, l'abstrait est le corollaire d'une attitude humaniste forte et l'art prend avec lui base sur l'éthique. Les miroirs "fractals" jouent un rôle important dans sa vision. Le miroir est au centre de l'oeuvre de Pistoletto depuis l'"Autoritratto oro" (1960), les premiers "Quadri specchianti" (ses "Tableaux-miroirs" de 1961-1962 dans lesquels des figures humai-nes et des objets étaient peints sur des surfaces réfléchissantes), au "Metrocubo d'infinito", le M3 d'infini (1966), ce cube fermé dont les six faces intérieures sont des miroirs se reflétant à l'infini. Un autre acte de Pistoletto, manifesté en objets à usage banal et en adé-quation avec la finalité exprimée à la Cittadellarte, a été de choisir un symbole, Segno Arte, son signe personnel dérivé de l'Homme de Vitruve de Leonardo da Vinci, ce dessin-modèle géométrique d'un homme normal décliné sous toutes les formes possibles d'objets utilitaires.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 32: Le Bois de sculptures

Le travail de Michelangelo Pistoletto en adéquation avec la finalité exprimée dans le concept de la Cittadellarte, a été de choisir un symbole, Il Segno Arte, Le Signe Art, son signe personnel, qu’il décline sous toutes les formes possibles d’objets utilitaires : table, lit à baldaquin, fenêtre, radiateur, porte... et pour l'île de Vassivière une dalle d’autant plus symbolique que la dalle est le vecteur du « passage », ce signe qui est l’indice de la fusion de l’art et de la vie.

Si ce cheminement du Segno Arte, entre rêves et réalités, entre séductions et interroga-tions, procure selon leur positionnement, à chaque fois singulier et spécifique, une émotion esthétique, plaisir sensuel, stimulation de l'imaginaire, il déploie dans le même temps dans le parc de l'île de Vassivière ses symboles hermétiques.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 33: Le Bois de sculptures

À travers des œuvres significatives de sa démarche entreprise depuis les années 60, Michelangelo Pistoletto retrace avec le Segno Arte le fondement de son concept global de l'art et de son prolongement social et politique. Quête d'identité personnelle et engagement fort dans les mouvements des utopies artistiques de ces dernières années, ces propositions plastiques sont considérées comme des moyens de transformations sociales.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 34: Le Bois de sculptures

L'idée du passage des visiteurs à la base du Segno Arte est aussi un des éléments fondateurs du projet Love Difference. Love Difference a été fondé en 2002, promu par la Fondazione Michelangelo Pistoletto (Cittadellarte), centre d'art contemporain en collaboration avec des institutions internationales, des centres culturels, des professeurs, des conservateurs et des artistes, comptant actuellement environ 400 membres dans le monde entier. Le but du projet Love Difference est de réunir des personnes et des institutions des régions méditerranéennes intéressées à créer de nouvelles perspectives pour surmonter le conflit tragique entre les différentes cultu-res. Toutes les activités de Love Difference visent une approche interdisciplinaire, innovatrice, transparente, participative, partagée et soutenable.

Michelangelo Pistoletto Il Segno Arte, 1993-1994

Sept pierres en lave de Volvic placées à des croisements, 10 x 210 x 120 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 1994

Né en 1933 à Biella en Italie où Michelangelo Pistoletto vit et travaille.

Photographe : A. Morin

Page 35: Le Bois de sculptures

« Installés dans la forêt sombre de conifères et suspendus entre les arbres, deux mots : “erreurs” et “exact” sont écrits en néon blanc. De petites tailles et orientés selon deux axes, ils sont lisibles depuis la lisière. L’utilisation de la lumière, le choix spécifique de mots écrits et de l’environnement dans lequel l’œuvre se situe sont des aspects particuliers du travail d’Anne Marie Jugnet. Cette œuvre contient une part d’errance, de recherche et ne renvoie pas à l’unicité du point de vue. “Erreur” provient du latin errare : errer et “exact” de exigere : achever ». (Anne Marie Jugnet, 1994)

La plupart des œuvres d’Anne Marie Jugnet sont composées de mots ou de petites phrases et l’artiste recherche une forme de com-munication avec le spectateur par l’emploi de l’écriture. Dans son texte « Ecrire l’invisible », Michel Bourel explique la démarche de l’artiste : « Elle puise dans le texte comme réservoir dont elle extrait mots, expressions qui renforcent la dimension essentiellement mystérieuse de son travail. Elle établit un mode de communication extrêmement allusif, bien loin de la recherche de persuasion pu-blicitaire qui, parfois, a emprunté ce rapport au langage. […] Le fait de communiquer est affirmé, et même au centre de son œuvre, elle prend aussi en compte des dimensions plastiques avec une extrême attention et explore, du manifeste à l’invisible, la relation de celui qui doit voir pour lire et lire pour voir l’œuvre et ainsi accéder au sens ».

Anne Marie JugnetErreurs-exact, 1994

Tubes en néon blanc, dimensions variablesCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1994

Née en 1958 à La Clayette en Saône et Loire, Anne Marie Jugnet vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

Page 36: Le Bois de sculptures

L’œuvre d’Hervé Le Nost est entièrement dédiée au liquide, à la fluidité. Suite à l’exposition « Ile, terre, eau, ciel » présentée au Centre d’art en 1994, l’artiste a installé une déclinaison de formes représentant l’île de Vassivière en divers matériaux (bronze, acier, granit, peau, porcelaine et lumière électrique) qui se déclinent dans l’espace d’exposition sur le sol et au mur. Chaque matière trouve la justifi-cation de sa présence soit dans l’histoire du site, soit par sa couleur.

Par la suite, il a choisi de réinstaller deux de ses sculptures (en acier et en granit) dans le parc, au-dessus d’une pêcherie sur laquelle flotte une autre forme en bronze représentant l’île en dimensions réduites. Un processus de mise en abîme de cette forme irrégulière et insulaire investit donc la pêcherie, isolant une particularité pour chaque matière, dans un souci de mémoriser et de qualifier une succes-sion de périodes avant et après l’isolement de cette terre par les eaux (de l’âge de pierre à l’époque postmoderne).

Résultant de la construction d’un barrage, l’île de Vassivière est artificielle et par conséquent artefact à part entière. L’eau lui a donné sa forme, l’a sculptée. Dans ce double jeu de la représentation et du réel – où la nature s’arrête et où la culture commence – le lieu d’exposition devient la pièce elle-même. Comme tout art est artifice, l’île devient une métaphore pour une réflexion sur la nature de l’art.

Hervé Le Nost Ile, 1994

Granit, acier, bronze, 150 x 150 x 15 cmCommande du Centre international d'art et du paysage de l’île de Vassivière en 1994

Né en 1957 à Guingamp en France, Hervé Le Nost vit et travaille à Cast en France.

Photographe : A. Morin

Page 37: Le Bois de sculptures

Vannhus ou Maison d’eau située sur une pente boisée qui surplombant le lac, repré-sente une construction en bois, sans porte, emplie d’eau jusqu’à hauteur du bas des quatre fenêtres.

Grâce à la déclivité du terrain, les angles de vision se diversifient : par les fenêtres, le spectateur découvre des points de vue cadrés sur le paysage, le lac et la forêt, l’espace intérieur de la maison se réfléchissant à la surface de l’eau.

Le lieu constitue l’un des éléments actifs dans l’élaboration des œuvres de Per Bar-clay ; l’architecture et la nature en sont des référents majeurs. Très présente dans ses œuvres, l’eau est utilisée à la fois pour sa forte charge symbolique (source de vie, naissance, larmes, mer…) et ses qualités plastiques (transparence, son, capacité à couler et à ne pouvoir être saisie).

Per BarclayVannhus (Maison d’eau), 1995

Construction en bois et fenêtres, eau, 310 x 210 x 300 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1995

Né en 1955 à Oslo, Per Barclay vit et travaille à Paris.

Photographe : J.D. Frater

Page 38: Le Bois de sculptures

Vladimir Skoda est venu étudier en France où il abandonne en 1968 la peinture pour se consacrer à la sculpture dans les ateliers de l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris en 1969. À partir de 1975, le travail du fer et de l’acier à la forge lui permet de régler le problème de la représentation. L’énergie du corps, dans son rapport à la matière vient s’y substituer. Très vite des formes issues d’une géométrie simple apparaissent, lui permettant d’articuler ce que lui dicte le matériau, du dessin préalable au projet. Les premières "boules", "toupies" ou "pyramides" en résultent. A Vassivière, l’œuvre de Skoda trouve un emplacement idéal au sein d’un muret en forme de cercle.

« J’aime les choses simples, élémentaires. Si j’utilise des formes géométriques, ce n’est pas parce que je suis austère, mais parce qu’elles sont fermes », déclare Skoda. Insistant sur la capacité de résistance de ses matériaux comme de ses formes, il ajoute : « Le métal peut se déformer, se transformer d’une forme à l’autre sans que rien ne se perde. La masse irréductible du métal, la sphère qui résiste à tous points de vue, la fermeté de la géométrie me permettent de maintenir la présence physique de l’œuvre et de l’affirmer de façon manifeste contre l’inconsistance des objets ».

Vladimir Skoda Sans titre, 1996

Métal, 70 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1996

Né en 1942 à Prague, Vladimir Skoda vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

Page 39: Le Bois de sculptures

Pour Veit Stratmann, l’œuvre d’art n’est pas quelque chose d’achevé. L’œuvre reste inachevée parce qu’elle est avant tout un outil, un mécanisme architectural, un jeu...Sans titre (Pièce pour Hellerau) est une machine invitant le spectateur à prendre posi-tion, à exprimer une volonté. Elle constitue une matérialisation et une mise en discus-sion des concepts qui ont donné naissance au lieu pour lequel elle a été conçue (un bâtiment abritant une ancienne installation militaire soviétique au quartier de Helle-rau à Dresde). La structure peut être installée dans tous les lieux dont la fonction correspond à un ou plusieurs points du contenu de ce qui est mis en discussion par la pièce. L’œuvre n’est considérée comme entière que dans la mesure de son utilisation par les visiteurs.

Veit Stratmann Sans titre (Pièce pour Hellerau), 1996

Tubes métalliques peints, 100 x 100 x 1000 cmDépôt du Fonds national d’art contemporain en 1996

Né en 1960 à Bochum en Allemagne, Veit Stratmann vit et travaille à Paris.

Photographe : A. Morin

Page 40: Le Bois de sculptures

La Maison de Laine était composée de deux éléments : un bloc de granit en forme de maison sur laquelle était posée une tapisserie en laine et soie tissée à l’atelier Courant d’art à Aubus-son. La tapisserie, représentant sur les six côtés de la structure un membre du squelette humain et installée à l’extérieur, a subi des dégradations consécutives aux diverses intempé-ries et s’est donc dégradée au fil du temps.

Chaque élément composant l’œuvre est indicateur du propos de l’artiste : « Dans sa manu-facture même, le tricot [la tapisserie] peut être perçu comme le symbole de certaines préoc-cupations quotidiennes. Maille après maille, comme autant de pièces réalisées, dans la soli-tude, ce geste peut témoigner à lui seul de l’acte de subsistance : il forme un tout, une enve-loppe protectrice. […] La Maison de Laine de la taille d’un corps replié sur lui-même, en position de défense déjà lui offre un refuge face à la quotidienneté et le scelle dans un espace clos. Sans accroc, sans débord, le corps contraint par l’espace réduit - protecteur et geôlier - retourne à une réalité opaque, clandestine. Anonyme de nouveau ». La Maison de Laine est une œuvre issue d’une réflexion spécifique sur l’identité de l’individu dans l’espace social urbain.

La Maison de Laine est conçue pour être abandonnée, comme les graffitis, elle a laissé l’érosion se charger de faire disparaître peu à peu toute trace de son passage dans le lieu. L’œuvre renouvelle ainsi l’utilisation de la tapisserie, médium habituellement attaché à l’idée de pérennité. La tapisserie investissant généralement l’intérieur se retrouvait ici à l’extérieur ; le squelette devient une peau puis disparaît pour de nouveau laisser apparaître un autre sque-lette, celui de la structure en pierre. Le long travail du tissage se défait avec le temps ; la maison se fond dans la nature. Le squelette est disloqué, comme un pantin cassé, désarticulé qui s’use progressivement. La perte de l’œuvre est incontrôlable, la dépense irrémédiable.

Frédéric Ollereau La Maison de Laine, 1997

Granit, tapisserie en laine et soie, 100 x 60 x 100 cmDépôt du Fonds national d’art contemporain en 1996

Né en 1962 à Grenoble, Frédéric Ollereau vit et travaille à Paris.

Photographe : J. Hoepffner

Photographe : A. Morin

Page 41: Le Bois de sculptures

« C’est une sculpture spécialement conçue pour Vassivière. La sculpture passe son temps à se déhancher. Ses cassures sont l’antithèse de la stabilité du phare. Ses décrochements se contredisent et, en se contrariant, se corrigent. Elle se construit en une succession de retournements, d’inversions. La partie la plus lourde et la plus dense, en béton coloré, est en hauteur, soutenue par de fins entrelacs de métal, d’autant plus frêles qu’ils sont hasardeusement torsadés. C’est comme si elle avait été bousculée et s’était affaissée en partie sous la pression. Les flammes métalliques qui se déploient à son sommet paraissent plus charnues et dons plus pesantes que les barreaux grêles de la base. Seule cette partie basse est métallisée. La rouille, au lieu de grimper, semble paradoxalement descendre vers le sol. Les bandeaux de couleur vert acide qui encerclent la partie supérieure font écho aux linteaux en IPN peints, utilisés dans l’architecture du bâtiment et leur forme ovale renvoie aux petits voûtains de brique du corps du bâtiment et aux rondeurs de la tour. En même temps, ce vert met en exergue le feu de la rouille et l’acidité de la couleur du béton. Mais le point de vue est toujours comme à la recherche d’un équilibre ». (Bernard Pagès)

Bernard Pagès Point de Vue, 1997

Acier rouillé, métallisé ou peint, béton taillé, 565 x 31 x 300 cmCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1997

Né en 1940 à Cahors, Bernard Pagès vit et travaille à Nice.

Photographe : A. Morin

Page 42: Le Bois de sculptures

Depuis le début des années 90, le travail de Marylène Negro se fonde sur le croisement des procédures d’interpellation de la réalité sociale, des pratiques d’échanges et d’infiltration qui s’y développent et de données autobiographiques rigoureusement et très discrètement explorées. Longtemps les objets qu’elle produisit n’eurent d’existence qu’en ce qu’ils témoignaient de ses préoccupa-tions. Volatiles et nomades, ils prirent souvent l’apparence d’affichages ou de montages éphémères de photographies mais également de Tee-Shirt (I love art), d’éditions d’artiste ainsi que de pièces sonores.

Cette installation permanente sur la prairie est un ensemble de sept agrès intitulé Sport France, nom même du fabricant de ce matériel sportif proposant un parcours de santé disposé de manière aléatoire.

Entre la réalité dont elle s’éloigne et la sculpture qu’elle n’est pas tout à fait, elle témoigne de cet interstice dans lequel l’artiste fait passer le fil rouge de l’art au cœur même du vivant. Face à cette proposition de Marylène Negro, le visiteur peut s’exercer à franchir barres et obstacles d’un parcours de santé mis à sa disposition sans mode d’emploi.

Marylène Negro Sport France, 1995-1998

7 agrès en bois et métal, dimensions variablesCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 1998

Née en 1957 à Grenoble, Marylène Negro vit et travaille à Paris.

Photographe : J. Hoepffner

Page 43: Le Bois de sculptures

Les différentes disciplines sportives (football, basket-ball, golf…) sont la ressource exclusive du travail de Jacques Julien. C’est même cette monomanie qui donne à ses pièces un air de simplicité, de familiarité, exhibant un imaginaire délibérément éteint.

Entassés à même le sol, tronçonnés, trois paniers de basket-ball et leur portique sont exposés tels des morceaux d’un puzzle dans une forme sphérique à la fois imparfaite, volumineuse et ouverte. Cette œuvre nous permet d’approcher la démarche de Jacques Julien, selon lequel, le sport représente surtout un système fait de lois et de règles que les joueurs se doivent de respecter. Les terrains de sport avec leurs tracés, leurs dimensions, leur topographie particulière sont précisément là pour nous le rappeler, en ceci qu’ils signifient ces règles, qu’ils en sont les signes tangibles. Ainsi, le sport, le système qu’il suggère, les lois, les règles qu’il présuppose mais aussi l’engagement qu’il nécessite, le progrès qu’il exige, peut s’apparenter au monde dans lequel nous vivons. Un monde structuré, réglé et organisé. En représentant le monde du sport d’une manière si chaotique, déstructurée, déformée, tronquée, Jacques Julien invite le spectateur à s'interroger sur son propre monde et son fonctionnement.

Jacques JulienSans titre, 1997-2000Fer, pvc, 210 x 360 x 280 cmCommande du Centre international d'art et du paysage de l'île de Vassivière en 2000

Né en 1967 à Lons-le Saunier en France, Jacques Julien vit et travaille à Paris et Besançon.

Photographe : M. Domage

Page 44: Le Bois de sculptures

Dès 1964, Olivier Mosset s’inscrit d’emblée dans le contexte d’une analyse critique de la peinture. Le forme choisie d’un cercle noir peint au centre d’un carré deviendra pour lui signature avant qu’il ne revendique par la pratique de la monochromie, une vérité née de la peinture considérée comme objet. Installé depuis 1977 aux Etats-Unis, il y poursuit un travail peint extrêmement cohérent autour des questions de signature, d’anonymat, d’appropriation et de répétition.

La célèbre sculpture de Maillol, Hommage à Cézanne fut commandée en 1912 par un comité d’artistes d’Aix-en-Provence. Pour Maillol, cette composition classique qui représentait une statue de femme vêtue, portant une branche d’olivier, était la meilleure manière d’évoquer la peinture. L’œuvre fut installée au Jardin des Tuileries puis déplacée près du Louvre sans son socle d’origine et attribuée au Musée d’art moderne de la ville de Paris.

En se promenant dans le Jardin des Tuileries, Olivier Mosset découvre le socle abandonné avec l'inscription "A Paul Cézanne". Il fit répliquer cette pierre à Bienne. Aujourd’hui, au Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière, cette œuvre signe de façon commune le paysage à la fois par Paul Cézanne et par Olivier Mosset.

Olivier MossetSans titre (à Paul Cézanne), 2000

Béton, 50 x 230 x 63 cmDépôt du Frac Limousin, Fonds régional d’art contemporain en 2005

Né en 1944 à Berne, Olivier Mosset vit et travaille en Arizona.

Photographe : J.D. Frater

Page 45: Le Bois de sculptures

Les œuvres de Adel Abdessemed représentent une forme d'engagement ou d'investissement politique où il est question notam-ment d'exil, de résistance et de subversion.

Confronté aux contradictions de la culture africaine et de la culture occidentale, l'artiste s'est intéressé à leurs tabous et à la façon de les transcender. Il poursuit une autre quête, inlassable : celle de l'identité individuelle et collective. Dans les œuvres d'Adel Abdessemed, il y a toujours une tension entre la poésie de l'image et la violence de l'idée qu'elle sous-tend. Car la guerre est partout présente, même dans les environnements les plus idylliques, d'où cette notion d'Exil, sous forme d’un néon bleu, présenté au-dessus de la porte d'entrée du Centre d'art de Vassivière.

Adel Abdessemed a choisi le mot « Exil » car il l’entendait souvent à son arrivée en France mais également pour le paradoxe qu’il dégage : « il signifie à la fois quitter et s’installer, ici et là-bas, le drame de l’étranger ». Le néon bleu « Exil » associe explicite-ment « exil » et « exit » jouant de l’ambiguïté de son emplacement.

Adel AbdessemedExil, 1996-2002

Néons bleus, plastique, 26 x 11 cmCommande du Centre international d'art et du paysage de l'île de Vassivière en 2002

Né en 1971 à Constantine en Algérie, Adel Abdessemed vit et travaille à Berlin.

Photographe : M. Domage

Page 46: Le Bois de sculptures

La démarche formelle de Marco Boggio Sella naît d’une réflexion sur l’impact visuel et psychologique de l’œuvre d’art sur le spectateur et l’interprétation qu’il en fait.Untitled, représentant un casque allemand à la fois monumental et rouillé, fonctionne comme une métaphore du poids de l’Histoire, encore profondément ancrée dans les consciences. L'acte de reproduire cet objet emblématique de manière hyperréaliste et surdimen-sionnée transforme celui-ci en une représentation du concept lui-même.Ce qui au premier regard nous renvoie à une image douloureuse et violente de notre société contemporaine se révèle un troublant vec-teur de mémoire. La rouille qui recouvre l'objet associée à son caractère de relique annulent tous les doutes quant à la possibilité d'une lecture commémorative de cette sculpture.

En plaçant cette œuvre sur l’île de Vassivière, en terres de résistance à l’envahisseur nazi, l’artiste a souhaité réactiver notre devoir de mémoire faisant écho à celui, toujours vivace, de la population locale. Marco Boggio Sella a ainsi érigé une représentation rouillée et abandonnée du nazisme. Ainsi, le casque, relique de ces temps obscurs, se déploie, imposant, dans tout son volume et nous contraint à une confrontation permanente à l’Histoire.

Marco Boggio SellaUntitled, 2003

Fer, 210 x 364 x 304 cmDépôt de l’artiste en 2007

Né en 1972 à Turin, Marco Boggio Sella vit et travaille à New York.

Photographe : M. Domage

Page 47: Le Bois de sculptures

La pensée de Erik Samakh est à l’opposé d’un désir de sanctuarisation qui exclurait la présence humaine d’une nature protégée. Il s’intéresse aux comportements et aux com-munications, à la relation entre les choses plutôt qu’aux choses elles-mêmes, incluant dans ces processus tous les êtres vivants, y compris le public. Pour lui, la relation à la nature ne prend en aucun cas la forme d’un isolement romantique et d’un retrait du champ social.

Pour Vassivière, Erik Samakh conçoit une installation de trente flûtes solaires installées sur un site de plus de 30 hectares. Les sons des Joueurs de flûte, sont toujours assez brefs et ont des tonalités différentes, car chaque module, avec l'énergie autonome de son capteur solaire, souffle de l'air dans une flûte d'un modèle unique. La source d'énergie solaire introduit une modulation d'intensités suivant les rayonnements lumineux. Ces deux paramètres contribuent ensemble à un renouvellement sonore permanent jusqu'au silence durant la nuit. Cette variation coïncide avec le milieu lui-même. Comme des animaux, les flûtes réagissent aux alternances du jour et de la nuit et aux conditions climatiques. Erik Samakh mêle dans son travail son intérêt pour la nature et son intérêt pour la technologie. Il souhaite que l'interface avec l'utilisateur soit la plus directe possi-ble et que le spectateur ne voie pas les machines technologiques.

Erik SamakhLes Joueurs de flûtes, 2004

Aluminium et résine, capteur solaire, turbine et électronique, 70 x 10 cmCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication et du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 2002

Né à Saint Georges de Didonne en 1959, Erik Samakh vit et travaille à Serres dans les Alpes de Haute-Provence.

Photographe : M. Domage

Page 48: Le Bois de sculptures

Erik SamakhLes Graines de lumière, 2002Les Rêves de Tijuca, après la tempête, 2002

54 espèces différentes d'arbres, parcelle d’un hectare et demiCommande publique du Centre national des arts plastiques en 2002

Né à Saint Georges de Didonne en 1959, Erik Samakh vit et travaille à Serres dans les Alpes de Haute-Provence.

Photographe : M. Domage

Vous vous trouvez ici à la lisière d’une ancienne plantation de pins frappée par les deux tempêtes qui ont traversé la France en décembre 1999. D’une superficie d’un hectare et demi, cette parcelle a été nettoyée quelques mois plus tard des nombreux troncs, branches et racines qui en jonchaient le sol.Auteur en France et à l’étranger de plusieurs œuvres environnementales, Erik Samakh a conçu un projet de restauration de la forêt et proposé de planter 2500 arbres et arbustes de cinquante quatre espèces différentes choisies pour leur aptitude à attirer, grâce à leurs fleurs et à leurs fruits, des insectes et des oiseaux pour renouveler la biodiversité et l’ambiance sonore de l’île. Répondant à la demande du Centre international d’art et du pay-sage de l’île de Vassivière, l’artiste a invité le public (plus de deux cents personnes) à prendre part à cette plantation entre le 22 avril et le 3 mai 2003. Le résultat de ce projet est une futaie irrégulière mixte qui, telle une tapisserie vivante, fait réponse à la monoculture des forêts industrielles à l’entour. Œuvre singulière par sa nature (à la fois durable et sociale, végétale et sonore) ainsi que par ses dimensions (il s’agit davantage d’une « œuvre-lieu » que d’un « objet d’art »), contribution à l’histoire des jardins, de la musique aussi bien que des arts plastiques, cette plantation fera l’objet d’un entretien doux, essentiellement manuel, basé sur l’observation du milieu et l’interaction entre les espèces. Cette réalisation s'inscrit dans la volonté du Centre international d’art et du paysage d’aménagement de l’île de Vassi-vière en une île-jardin.

Parallèlement à la plantation des Rêves de Tijuca, Erik Samakh a disposé 350 diodes électroluminescentes et clignotantes au sommet de quelques-uns des plus grands arbres de l’île. Visibles dès la tombée de la nuit depuis les rives opposées, cette œuvre qui dialogue avec la nature du lac artificiel créé par Edf en 1951 symbolise l’essaimage des graines après la plantation.

Ce projet a été réalisé avec le soutien financier de l’Etat (Ministère de la culture et de la communication / Drac du Limousin, Ministère de l’écologie et du développement durable, Diren du Limousin), du Conseil Régional du Limousin, du Conseil Général de la Creuse, du Syndicat mixte interdépartemental et régional de Vassivière (SYMIVA) et de la Mission Mécénat de la Caisse des dépôts et consignations. Il a bénéficié de l’assistance scientifique et technique d’Isabelle Jacob (botaniste), de Gilles Fournel (agent technique de l’ONF), de Gilles Clément (jardiner paysagiste), de Jean-Christophe Grossetête (enseignant) et ses élèves du LEGTA de Meymac, de l’équipe du Centre international d’art et du paysage et des étudiants des écoles d’art d’Aix-en-Provence, de Cergy-Pontoise, de Dijon, de Limoges-Aubusson et de Toulon.

Airelle myrtilleVaccinium myrtillus

Airelle rougeVaccinium vitis-idaea

Alisier blancSorbus aria

Alisier de FontainebleauSorbus latifolia

Alisier du nordSorbus intermedia

Alisier torminalSorbus torminalis

Amélanchier du CanadaAmelanchier canadensis

ArgousierHippophae rhamnoides

Aubépine monogyneCrataegus monogyna

Cerisier à grappesPrunus padus

Cerisier noirPrunus serotina

Cerisier de Sainte-LuciePrunus mahaleb

CharmeCarpinus betulus

ChâtaignierCastanea sativa

Chêne des maraisQuercus palustris

Chêne pédonculéQuercus robur

Chêne sessileQuercus petraea

Cornouiller blancCornus alba

Cornouiller de FlorideCornus florida

Cornouiller kousaCornus kousa

Cornouiller mâleCornus mas

Cornouiller sanguinCornus sanguinea

CormierSorbus domestica

Cotonéaster franchetiiCotoneaster franchetii

Cotonéaster horizontalisCotoneaster horizontalis

Cotonéaser lacteusCotoneaster lacteus

Epine-vinetteBerberis vulgaris

Erable champêtreAcer campestre

Erable rougeAcer rubrum

Erable à sucreAcer saccharum

Genévrier communJuniperus communis

HouxIlex aquifolium

MerisierPrunus avium

Myrtillier américainVaccinium corymbosum

Noisetier communCorylus avellana

Noisetier de ByzanceCorylus colurna

Noyer communJuglans regia

Noyer noirJuglans nigra

Orme champêtreUlmus campestre

Poirier à feuilles d’amandierPirus amygdaliformis

Poirier sauvagePirus pyraster

Pommier sauvageMalus sylvestris

PrunellierPrunus spinosa

RobinierRobinia pseudoacacia

Sorbier des oiseleursSorbus aucuparia

Sureau à grappesSambucus racemosa

Sureau noirSambucus nigra

Tilleul à larges feuillesTilia platyphyllos

Tilleul à petites feuillesTilia cordata

Viorne lantaneViburnum lantana

Viorne obierViburnum opulus

Page 49: Le Bois de sculptures

Figure majeure de la scène artistique internationale, Ilya Kabakov débute comme peintre et illustrateur de livres pour enfants. Au début des années 1980, il entame un travail d’installations, certaines monumentales, qui évoquent la vie et l’atmosphère quotidien-nes en Russie. La réception de cette œuvre trouvera une forte résonnance avec ce que l’on nomme la fin de l’ère soviétique. Il émigre en Europe vers le milieu des années 1980. Depuis, les installations, sculptures et peintures de Ilya et Emilia Kabakov ont été expo-sées dans les plus importants musées et galeries du monde entier.

Toilet on the Mountain est une œuvre pensée en 1999 qui a ensuite été activée sur l’île de Vassivière. Cette installation placée en hau-teur, face au lac, prend la forme de toilettes provisoires, en bois. En fait, si vous avancez vers l’œuvre, en direction du lac alors vous découvrez qu’il s’agit de deux compartiments qui ne sont ni l’un ni l’autre équipés de portes. Il s’agit d’un isolement vis-à-vis de la société, un repli sur soi-même qui permet à la fois tranquillité et sentiment de solitude tout en offrant un panorama privilégié sur le lac et son environnement.

Photographe : M. Domage

Ilya et Emilia KabakovToilet on the Mountain, 1999

Bois, 210 x 160 x 180 cmDépôt des artistes en 2005

Nés respectivement en 1933 et 1945 en Ukraine, Ilya et Emilia Kabakov vivent et travaillent à New York.

Page 50: Le Bois de sculptures

L'expérience du temps et le désir de le comprendre afin de pouvoir le dépasser est un élément central de l’œuvre de Kris Martin. La présence de ses productions pousse le regardeur à s’interroger sur sa propre position non seulement par rapport à l’œuvre mais aussi par rapport au cadre plus large de son existence.

Présentée lors de l’exposition MY PRIVATE escaped from Italy en 2006, Conductor de Kris Martin rejoint de manière pérenne le lieu qu’il avait initialement choisi dans le parc de sculptures de l’île de Vassivière, à l’entrée du Centre d’art, près du phare de Aldo Rossi, créant une nouvelle frontière entre l’architecture et la nature.

Conductor est une fine baguette de chef d’orchestre, fixée sur une branche d’un jeune arbre, qui bouge au gré du vent et s’élève progressivement au rythme de croissance propre à l’arbre. Pour l’artiste, le premier arbre de la forêt dirige le Centre international d’art et du paysage de l'île de Vassivière.

Kris MartinConductor, 2006

Baguette en bois de 31 cm, jeune arbreDépôt de My Private en 2009

Né en 1972 à Kortrijk en Belgique, Kris Martin vit et travaille à Gand.

Photographe : André Morin

Page 51: Le Bois de sculptures

Photographe : CIAP - Île de Vassivière

Gilles ClémentPrairie fleurie, 20141500 m² Plantes annuelles (Bourrache officinale, Phacélie, Chénopode blanc, Bleuet des champs, Nielle des blés, Lin bleu usuel, Chrysanthème des blés, Coquelicot), bisan-nuelles (Mélilot officinal, Digitale pourpre, Cardère sauvage, Vipérine commune, Julienne des dames, Onagre de Lamarck, Onopordon acanthe, Bouillon blanc, Chicorée sauvage, Réséda luteola, Matricaire inodore) et vivaces (Achillée ptarmique, Achillée millefeuille, Campanule agglomérée, Campanule à feuilles rondes, Campanule raiponce, Fenouil, Géranium des prés, Scabieuse des champs, Mauve musquée, Saponaire offici-nale, Scabieuse colombaire, Compagnon blanc, Véronique en épi, Ancolie commune, Oeillet des chartreux, Marguerite des prés, Lotier corniculé, Lin jaune, Lin vivace, Mil-lepertuis, Plantain lancéolé, Verge d'or)…

Né à Argenton-sur-Creuse en 1943, Gilles Clément vit et travaille à Crozant dans la Creuse et à Paris. Ingénieur horticole, paysagiste, écrivain, jardinier, il enseigne à l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage à Versailles. En dehors de son activité de créateur de parcs, jardins, espaces publics et privés, il poursuit des travaux théoriques et pratiques à partir de trois axes de recherche : le Jardin en mouvement, concept issu d’une pratique sur son propre jardin dans la Creuse, appliqué à l’espace public en France et à l’étranger dés 1983, le Jardin plané-taire, projet politique d’écologie humaniste et le Tiers-Paysage, concept élaboré au cours d'une étude de paysage pour le Centre d'art une année avant la charte "Boire l'eau du lac".

La prairie fleurie n’est qu’un élément de ce qui devait devenir « l’île-jardin », aux côtés des nombreux jardins que Gilles Clément avait imaginés pour l’ensemble des rives du Lac de Vassivière dans sa charte paysagère « Boire l’eau du Lac », rédigée avec la collaboration de COLOCO et commandée en 2002 par le Centre d’art et du paysage sous la direction de Guy Tortosa et le Syndicat mixte Le Lac de Vassivière (anciennement SYMIVA).

En 2007 une première application de la charte avait consisté en l’implantation d’une grande prairie fleurie au sud de l’île, permettant la mise en valeur d’une partie de l’île peu aménagée et pourtant très visible de la plage et du point de vue d’Auphelle. Au printemps 2014, le Centre d’art a fait renaître une bande de prairie fleurie sur le sentier des rives de l’île avec la participation de 12 élèves en Aquaculture et 15 élèves de 1ère et terminale « Sciences et technologie de l’agronomie et du vivant » du Lycée agricole d’Ahun (23), encadrés par leurs enseignants Elisabeth Pradeau (Aménagement) et Grégory Chaussade (Education socio-culturelle). Ce projet a été coordonné par Jean-Pierre Bény, agriculteur de Champsanglard (Creuse), en collaboration avec Gilles Clément et selon les méthodes de l’agriculture naturelle : plantation de semences vivaces et bisannuelles achetées chez divers producteurs indépendants du Limousin. La prairie étant une œuvre vivante et en perpétuelle transformation, le Centre d’art invite les étudiants à venir sur le site faire l’inventaire des espèces selon le rythme des saisons.

En 2014, la renaissance de la Prairie fleurie a reçu le soutien de la Fondation EDF.La Charte paysagère « Boire l’eau du lac », publiée en 2011 (éd. Silvana Editoriale) est en vente à la librairie du Centre d’art.

Page 52: Le Bois de sculptures

Pour l’île de Vassivière, Yona Friedman a créé aux côtés de la minérale Licorne de Vassivière("Licorne Eiffel"), une autre sculpture terrestre, celle-ci végétale qui occupe la prairie derrière le Centre d'art. C'est Balkis. Hommage à son inséparable chienne, disparue aujourd’hui mais porteuse d’un unique et exceptionnel souffle, protagoniste de plusieurs de ses manuels et ouvrages théoriques (Vous avez un chien. C'est lui qui vous a choisi, L’ordre compliqué et autres fragments).

Ces deux silhouettes animales, bestiaire visible du ciel comme de terre, transfigurent les prairies de Vassivière de par leur présence monumentale et mystérieuse. Balkis apparaît délicatement dessinée en sarrasin jouant à distance avec La Licorne de Vassivière("Licorne Eiffel").

De ce dessin en sarrasin, le visiteur retrouve le trait si caractéristique des bandes dessinées que Yona Friedman créées depuis plus de 40 ans pour expliquer ses modèles sociaux, urbanistiques et architecturaux.

Le sarrasin, surnommé « plante des 100 jours », a été choisi de par la nature de sa culture qui s'étend sur trois mois de juin à la fin du mois d'août - la sculpture est née pour l'exposition Etc. Balkis Island qui s'est déroulée eu Centre d'art durant l'été 2009 -. Autrefois très cultivé dans les régions à sols pauvres et acides, en Europe centrale, en Russie, en Amérique du Nord ainsi qu'en France (Bretagne, Normandie, Limousin, Auvergne, Pyrénées...), le sarrasin est aujourd'hui une plante dont la culture est en voie de disparition en France.

Yona FriedmanBalkis, 2009

Dessin tracé au sol avec du sarrasinlongueur : 36 m ; longueur totale du tracé : 90 m ; largeur du tracé : 0,70 mDépôt de l’architecte en 2009

Né en 1923 à Budapest en Hongrie, Yona Friedman vit et travaille à Paris, France.

Photographe : F. Legros

Page 53: Le Bois de sculptures

Les structures gonflables de Hans-Walter Müller peuvent s’appréhender de multiples manières : ludiques, éphémères, mémoires d’une période nomade... Tout cela est juste mais cette démarche recouvre aussi de vraies questions posées à l’architecture et aux usages qu’elle abrite. Ces modules fonctionnent comme d’authentiques réponses pour des modes de vie choisies. Le couple de créateurs, Ma-rie-France Vesperini et Hans-Walter Müller, poursuit depuis plus de vingt ans cette grande aventure de vivre sous, dans, avec un habitat gonflable dont les fonctions sont multiples (peau de protection mais aussi surface de projections). C’est à eux qu’est confié le soin de faire revivre cette page fascinante de l’histoire de l’architecture et des techniques modernes associée à la fête, au nomadisme et à une nouvelle façon de considérer notre rapport à la nature et à notre environnement.

Hans-Walter MüllerLes trois modules gonflables de l’île de Vassivière, 2007PVC, toile plastique, plate-forme en bois, moteur, 400 x 528 cm diamètreCommande publique du Ministère de la Culture et de la Communication en 2005

Né en 1935 à Worm en Allemagne, Hans-Walter Müller vit et travaille à La Ferté-Alais en France.

Photographe : M. Domage

Page 54: Le Bois de sculptures

Pour l'île de Vassivière, Yona Friedman a créé La Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel"), une sculpture éphémère qui occupe l’espace entier devant le Centre international d’art et du paysage, tracée à terre avec une substance minérale, le carbonate, et visible dans sa totalité du sommet du phare de Aldo Rossi qui domine l’île. La Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel") représente une paisible licorne anthropomorphe, aux allures féminines qui semblent tenir dans la main droite le Centre d’art.

La référence à la civilisation Incas est explicite tant son imaginaire est véhiculée à travers la figuration zoomorphe et anthropo-morphe entourée par un labyrinthe de formes géométriques, comme on peut encore le voir dans le Sud du Pérou sur les hauts plateaux de Nazca. Le corps élancé de La Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel") se termine avec une corne qui rappelle la tour construite par Gustave Eiffel et comme celle-ci mesure 324 mètres.

Avec La Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel"), Yona Friedman réalise le premier des animaux extraordinares apparaissant sous forme de Nazca-Gramme et qui vont ensuite apparaître sur l'ensemble du globe comme des signes forts d'une implication écologique. Ces réalisations chères à Yona Friedman, dont La Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel") constitue le premier élément, sont des symboles destinés à tous, englobant l'ensemble d'un territoire dans une action de préservation.

Yona FriedmanLa Licorne de Vassivière ("Licorne Eiffel"), 2009

Marne en vrac non séchée, 324 m Commande publique du Ministère de la culture et de la communication - Centre national des arts plastiques - Cnap en 2009 Dépôt du Centre national des arts plastiques - Cnap en 2009

Né en 1923 à Budapest en Hongrie, Yona Friedman vit et travaille à Paris, France.

Crédits photographiques : Jean-Baptiste Decavèle, Yona Friedman, Les voyages extraordinaires (le voyage à la licorne spatiale), 2009

Page 55: Le Bois de sculptures

Victor Man apparaît comme l'un des artistes les plus intéressants sur la scène émergente d'Europe de l'est. Il a été présenté dans le Pavillon roumain de la Biennale de Venise 2007, et bénéficie depuis d'une renommée internationale croissante.

Utilisant la peinture, la sculpture, la peinture murale ou le sérigraphie, il construit des installations dans lesquelles s'entrelacent la mémoire individuelle et collective, les thèmes de l'érotisme, du pouvoir, du désir, et une impression de noirceur et de solitude.

Dans le cadre de son exposition monographique attebasile présentée en 2009 au Centre international d’art et du paysage, Victor Man conçoit un projet de sculpture qui se matérialise au sein de la forêt par un jeune arbre recouvert de nombreuses fourrures animales.

Au fil des saisons, subissant le climat rude et hostile de Vassivière, les fourrures se gorgeront d'eau, gèleront, se dessècheront et finiront par tomber.

De par sa présence mystérieuse au sein du bois de sculptures, l’œuvre apparaît davantage comme une inscription discrète faisant glisser l’île de Vassivière dans une zone de conscience et de méditation, un lieu de profonde mélancolie.

Victor ManUntitled, 2009

Arbre, fourrures animales, fil de ferDépôt de l’artiste en 2009

Né en 1974, Victor Man vit et travaille à Cluj en Roumanie.

Photographe : André Morin

Page 56: Le Bois de sculptures

Après le Grand Canal à Venise, Alexander Ponomarev a choisi de placer dans les eaux de l’île de Vassivière son œuvre la plus embléma-tique, le sous-marin SubTiziano. Le processus de voyage à la base de cette réalisation n’est pas stoppé mais il trouve à Vassivière un lieu d’ancrage.

Alexander Ponomarev s’empare d’un objet militaire, dangereux et furtif, devenu l’une des armes les plus secrètes et les plus terribles de notre époque dont les périscopes, radars et antennes n’ont plus une utilité d’espionnage, mais se mettant en mouvement, créent davan-tage un côté joyeux et festif. L’artiste reprend l’invention de Leonardo da Vinci – un hommage à cette figure de la Renaissance à la fois artiste, scientifique et écrivain - la dépouillant de sa caractéristique principale : le secret et l’invisibilité. En le bariolant de couleurs criardes et en le nommant SubTiziano, Ponomarev s’adresse à un autre artiste, cette fois du XVIème siècle, qui le fascine : Tiziano.

Alexander Ponomarev, diplômé du Collège d'ingénierie nautique d’U.R.S.S. en 1979, travaille plusieurs années pour la marine russe avant de se consacrer entièrement à la création. Ses œuvres ont notamment été présentées à la Biennale de Moscou, à la Biennale de Venise et font de lui l’un des artistes majeurs de la scène contemporaine russe.

Émergeant des eaux du lac de Vassivière, le sous-marin SubTiziano apparaît en premier lieu au visiteur comme une apparition, un mirage. Mais sa présence perturbante est bien réelle, il semble surveiller et protéger un territoire qui, depuis plus de vingt ans, est dédié aux artistes. Situé entre terre et lac, il patrouille dans une zone d’activités artistiques dont il devient un des signaux, preuve que la créa-tion contemporaine peut se manifester partout et étendre son territoire, apparaissant dans les endroits les plus incongrus et inattendus

Photographe : V. Sichov

Alexander PonomarevSubTiziano, 2009

Matérieaux divers, 2200 cmDépôt de l'artiste en 2011

Né en 1957 à Dniepropetrovsk, en Russie, Alexander Ponomarev vit et travaille à Moscou.

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Michael Sailstorfer aime démonter des véhicules ou des objets, car cette activité lui permet de comprendre de l'intérieur tous les types de construction qui l'entourent. Mais s'il démonte, c'est surtout pour mieux reconstruire et donner une nouvelle naissance à l'objet initial. Par ce processus de métamorphose qui est à la fois un travail et un jeu, il s'applique à créer une œuvre qui, dotée d'un nouveau nom, enclenche la machine à histoires.Michael Sailstorfer se réfère consciemment à des stratégies artistiques de générations précédentes, se sert d’elles pour démasquer la tragédie de leur sérieux.

Waldputz, dont la radicale conquête de l'espace artistique dans la nature, devient un morceau de forêt soigneusement nettoyé à la main. Une stratégie artistique qui est facilement rapprochable de Richard Long ou Michael Heizer mais qui, par le caractère vain et absurde de la tâche, la manière méticuleuse dont elle est effectuée et la nature transitoire du résultat représente un désir ardent, utopiste et finalement tragique.Confronté à des travaux de ce type qui sont sensibles, extrêmement pragmatiques en termes de construction, mais en même temps absurdes, on perçoit alors de la poésie, du désir, de l’euphorie, de l’ironie dans la réalisation et la mélancolie de son accomplisse-ment.

Michael Sailstorfer Waldputz, 2000-2004

250 x 480 x 480 cmDépôt de My Private en 2007

Né en 1979 à Vilsbiburg en Allemagne, Michael Sailstorfer vit et travaille à Berlin.

Photographe : A. Morin

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Dans le bois de sculptures de l’île de Vassivière, Oscar Tuazon met en confrontation l'éléments végétal à celui minéral : un chêne et une plaque de marbre s’affrontent dans une tension dictée par la gravité et la puissance même des éléments. L’opposition entre le marbre qui traditionnellement renvoie à la statuaire commémorative et à l’art funéraire et l’arbre, signe de vitalité et de force, souligne la capacité des plantes à s’adapter à leurs milieux pour ne pas s’éteindre.

L'œuvre - à laquelle l'artiste à donné le nom de Niki Quester en hommage à une personne de son enfance qui l’avait initié à soigner l'attention, le détail - devient une expérience du regard qui ne peut trouver un aboutissement que par la marche et l’observation attentive du visiteur à son environnement.

Oscar TuazonNiki Quester, 2009

Arbre, plaque de marbre de 90 x 200 x 10 cm, 450 kgCommande du Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière en 2009

Né en 1975 à Seattle aux Etats-Unis, Oscar Tuazon vit et travaille à Paris, France.

Photographe : F. Doury

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Dans la prairie, juste en face du Centre d’art, Etienne Chambaud a choisi d’enfouir partiellement dans le sol un corps mort en béton. Pour son exposition à Vassivière, un câble d'acier était attaché à ce corps mort et remontait à l'oblique jusqu'au sommet du phare, y entrait par une fenêtre, redescendait verticalement à l'intérieur - duquel pendait un mobile en acier, Modèle pour l'Hospitalité i.e. l'Exclusion.

Désormais, dans la collection du bois de sculptures, ce corps mort, devenu un objet énigmatique laissé par l’artiste, fonctionne comme un palimpseste qui garde la trace d'un travail antérieur. Cette œuvre s’inscrit dans la réflexion que l’artiste mène sur la nature de l'œuvre d'art, sur les relations qu'elle entretient avec d'autres œuvres, sur les contextes et raisons de l'apparition des objets, sur la manière dont on les utilise et les charge de sens ou d'un récit particulier.

Pour Etienne Chambaud, Modèle pour l'Hospitalité i.e. l'Exclusion devient un vestige, un objet « rédimé » de sa fonctionnalité qui aujourd’hui marque la séparation entre l'architecture et le paysage.

Etienne ChambaudModèle pour l'Hospitalité i.e. l'Exclusion, 2010

Béton, 1 m x 1 m x 50 cmCommande du Centre international d'art et du paysage de l'île de Vassivière en 2010

Né en 1980, Etienne Chambaud vit et travaille à Paris, France.

Photographe : Aurélien Mole

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Cette œuvre fonctionne de 9h à 20h en juillet et août et de 9h à 18h le reste de l’année.Toute dégradation volontaire entraînera des poursuites judiciaires

Dominique Petitgand aime définir ses œuvres comme des récits et des paysages mentaux. Il élabore ses installa-tions à partir de l’enregistrement de paroles, de bruits et de musiques qu’il compose, sollicite, déconstruit et découpe. Son travail explore le langage sonore, la voix humaine, les bruits d'un environnement domestique ou proche. Ses œuvres sont immatérielles ; elles trouvent leur formulation en fonction des lieux, des contextes et des supports et doivent également tenir compte des caractéristiques de chacun d’entre eux. Elles s’adressent à un visiteur mobile qui construit sa propre écoute et son propre mixage au gré de son cheminement spatial et mental.

Pour l’île de Vassivière et dans le cadre de son exposition personnelle « Il y a des nuages qui avancent », il conçoit une œuvre en pleine nature constituée de sept haut-parleurs accrochés en hauteur dans les arbres. Intitulée Je siffle au bord du quai, l’œuvre vient habiter le calme apparent de la forêt, à la lisière du lac, via la diffusion d’un sifflement mélodique discontinu, entrecoupé de silences et ponctué par de brèves interruptions assourdissantes d’un train à grande vitesse.

Dominique Petitgand vit et travaille à Paris et Nancy.Il est né en 1965 à Laxou, France.

Installation sonore pour sept haut-parleursCollection Centre national des arts plastiques Oeuvre produite pour l’exposition «Il y a des nuages qui avancent» (22 mars - 21 juin 2015)Avec l’aide technique du syndicat mixte Le lac de Vassivière

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Liliana Motta réalise des interventions in situ discrètes qui visent à faire évoluer notre relation au vivant, au paysage, en un mot au «dehors». Pour ce projet, mené, avec le Laboratoire du dehors, pour la première fois à Vassivière, elle choisit de créer une lisière entre la forêt et le chemin qui borde l’île. Dans le respect de la charte paysagère du pays de Vassivière (2004-2005) de Gilles Clément, elle envisage différents actes jardiniers modestes et éphémères comme amender et soigner les sols ou encore stimuler et contrôler la végétation spontanée. À la manière des «théâtres de verdure» du XVIIe siècle, cette zone inclinée, avec vue sur le lac, devient un lieu de rencontres et d’échangesd’échanges qui évoluera à mesure des interventions spontanées et des propositions des professionnels invités. L’enjeu est de réconcilier une gestion environnementale économe et différenciée, qui tient compte des êtres vivants sur place, avec l’histoire du site.

Artiste-botaniste-paysagiste autodidacte, Liliana Motta est née en 1959 en Argentine, elle vit et travaille à Paris.

Installation paysagèreCommande du Centre national des arts plastiques Avec l’aide du Centre International d’Art et du Paysage de Vassivière

Photographie : Liliana Motta

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Les peintures, dessins, installations et performances que Reto Pulfer crée à partir de matériaux précaires et recyclés nous transportent dans des mondes intérieurs et habités. Pour Antares-Mulde LS (Star-Rise Alignment), qu’il réalise pour la première fois sur l’île de Vassivière, il propose une intervention paysagère qui sublime le lever de l’étoile Antarès, la supergéante rouge. Composée de pierres et de plantes sauvages locales disposées dans un large fossé, l’installation ostentatoirement artificielle évoque un temple antique voué à être envahi par la nature. L’artiste s’est in-spiréspiré également du temple de Karnak, dont la partie consacrée au dieu du soleil égyptien Amon-Rê est parfaitement alignée sur l’apparition du soleil, le jour du solstice d’hiver. Reto Pulfer a ici sélectionné des variétés précises de plantes : le thym car il évoque le changement et le temps (en anglais thym se dit thyme et se prononce comme time [temps]), l'ortie à la fois espèce urticante et comestible, le piment aussi rouge qu’Antares et la fougère, une plante ancestrale à rhizome présente aussi dans les romans de science-fiction qu’il écrit.

Reto Pulfer est né en 1981 à Berne en Suisse. Il vit et travaille à Berlin.

Installation avec pierres et plantes localesCommande du Centre national des arts plastiques Œuvre réalisée dans le cadre de l’exposition-parcours «Transhumance » (25 juin - 25 novembre 2017)

Antares-Mulde LS (Star-Rise Alignment), 2017

Reto Pulfer, dessin préparatoire, 2017