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Actes du XXIII ème Congrès International de l’AFM – 31 mai & 1 er juin 2007, Aix-les-Bains L’utilisation de la peur, de la culpabilité et de la honte dans les messages de lutte contre l’abus d’alcool Imène BECHEUR Wesford 6, Boulevard Gambetta, 38000 Grenoble, France E-Mail: [email protected] Tél: (06) 24.76.18.98 Hayan DIB Wesford 6, Boulevard Gambetta, 38000 Grenoble, France E-Mail: [email protected] Tél: (06) 10.42.30.06 Pierre VALETTE-FLORENCE Université Pierre Mendès France (I.A.E. Grenoble) B. P. 47 – 38040 Grenoble, France E-Mail : [email protected] Tél: (04) 76.82.56.11

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Actes du XXIIIème Congrès International de l’AFM – 31 mai & 1er juin 2007, Aix-les-Bains

L’utilisation de la peur, de la culpabilité et de l a honte dans les

messages de lutte contre l’abus d’alcool

Imène BECHEUR

Wesford

6, Boulevard Gambetta, 38000 Grenoble, France

E-Mail: [email protected]

Tél: (06) 24.76.18.98

Hayan DIB

Wesford

6, Boulevard Gambetta, 38000 Grenoble, France

E-Mail: [email protected]

Tél: (06) 10.42.30.06

Pierre VALETTE-FLORENCE

Université Pierre Mendès France (I.A.E. Grenoble)

B. P. 47 – 38040 Grenoble, France

E-Mail : [email protected]

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L’utilisation de la peur, de la culpabilité et de l a honte dans les

messages de lutte contre l’abus d’alcool

Résumé : Ce travail examine les effets de la peur, de la honte et de la culpabilité sur le

pouvoir de persuasion des messages de lutte contre l’abus d’alcool. Plus de 1000 jeunes

étudiants ont été assignés à trois conditions expérimentales faisant appel aux trois émotions

négatives étudiées. Les résultats montrent qu’à l’instar de la peur, la culpabilité et la honte

augmentent la persuasion. Plus particulièrement, l’étude plaide en faveur de l’utilisation de la

honte dans les messages de lutte contre l’abus d’alcool destinés aux jeunes. Par ailleurs,

certaines variables individuelles telles que l’intensité affective et l’efficacité personnelle

perçue favoriseraient la persuasion.

Mots clés : Menace, peur, culpabilité, honte, persuasion

The use of fear, guilt and shame in anti-alcohol me ssages

Abstract: We study the effects of fear, shame and guilt on persuasiveness of anti-alcohol

messages among young people. We experimentally test three distinct messages, each one

focusing on one of the three negative emotions using a total sample of more than a thousand

students. Results show that all three messages have a positive impact on persuasion. It

appears that shame is very effective in the case of anti-alcohol abuse advertising directed at

young people. In addition, personal variables such as affect intensity and self-efficacy might

be important in increasing persuasiveness.

Keys words: Threat, fear, guilt, shame, persuasion

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INTRODUCTION

Les émotions sont définies comme des états motivationnels sous-tendant certaines

classes de comportements et certains modes d’interaction avec l’environnement. Ce ne sont

donc pas de simples réactions aux évaluations des évènements, mais elles comportent

également des tendances à l’action (Frijda, 1986). Cette caractéristique motivationnelle des

émotions a fait que les professionnels de la communication ont depuis longtemps utilisé les

stimuli émotionnels pour persuader leurs audiences. Dans le contexte particulier de la

communication de santé publique (Health communication), de nombreuses campagnes de

sécurité routière ou de médecine préventive ont été réalisées avec l’intention ouverte de

déclencher des réactions émotionnelles chez l’audience (Kapferer, 1978).

Nous nous intéressons dans ce travail à l’effet des émotions négatives, et plus

particulièrement de la peur, de la honte et de la culpabilité dans les messages de santé

publique. Nous montrerons dans ce qui suit que même si la persuasion par la peur est l’une

des pratiques les plus utilisées en communication sociale, l’intégration de la honte et de la

culpabilité dans ce type de messages peut se révéler intéressante compte tenu du rôle adaptatif

de ces deux émotions. Nous nous interrogeons plus particulièrement sur l’efficacité de

l’utilisation de l’émotion négative (peur, honte et culpabilité) dans un contexte de persuasion

publicitaire lorsqu’il s’agit d’inciter les jeunes à adopter un comportement les préservant des

risques physiques et psychosociaux rattachés à la consommation d’alcool. En effet, la peur

n’est pas la seule émotion génératrice de réactions émotionnelles négatives. La culpabilité et

la honte pourraient le faire également. Dans ce sens, Tanner et al. (1991) définissent la

réaction émotionnelle négative comme « une réponse émotionnelle à une menace qui exprime,

ou tout du moins implique, un danger ». Elle est supposée exercer une influence significative

sur le comportement des individus : elle les incite à rechercher des moyens de s'affranchir ou

de faire face à cette menace et par conséquent au danger qui l'accompagne (Chapman, 1992).

Nous avons choisi comme terrain d’application de cette recherche, la lutte contre une

consommation excessive d’alcool en France. En effet, d’après les chiffres établis à partir des

ventes annuelles d’alcool, la France est parmi les tous premiers consommateurs d’alcool pur

par habitant au monde (10.9 litres). L’alcool représente environ quarante cinq mille morts par

an et l’âge où l’on commence à prendre de l’alcool est en baisse constante (11 ans à présent)1.

1 Enquête réalisée par Ipsos en 2004 pour l’INPES.

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Pour répondre à la problématique posée, nous commençons par définir les trois

émotions étudiées et présenter les principaux modèles de persuasion par la peur apparus dans

la littérature puis nous exposons les hypothèses à tester. La méthodologie et les résultats sont

enfin détaillés puis discutés.

CADRE THEORIQUE ET HYPOTHESES

La peur est considérée comme « une émotion de valence négative accompagnée d’un

degré élevé d’éveil ou d’activation. Elle est provoquée par une menace perçue comme

significative et relevant des intérêts personnels de la personne » (Easterling et Leventhal,

1989). Les messages faisant appel à la peur sont utilisés dans plusieurs domaines tels que la

sécurité routière, la lutte contre le tabagisme, l’alcool ou la drogue, la prévention du SIDA,

etc. Depuis l’étude de Janis et Feshbach (1953) sur le thème de l’hygiène dentaire, les

recherches sur la persuasion par la peur se sont multipliées montrant tantôt la supériorité des

messages fortement phobiques, tantôt l’inefficacité de tels messages. Selon Dillard (1994), il

y a trois principales catégories d’approches théoriques correspondant à trois périodes de

temps dans l’évolution des théories sur les messages phobiques : (a) les modèles d’action

directe par la peur (Fear Drive Models) (Mc Guire, 1968 ; Janis et Feshbach, 1953), (b) le

modèle des réponses parallèles (Parallel Process Model) (Leventhal 1970) et (c) les théories

de la valeur d’attente (Expectancy Value Theories) (Tanner et al., 1991 ; Rogers, 1983 ;

Sutton, 1982).

En se basant sur ces théories, Witte (1992) a développé le modèle des processus

parallèles étendus (Extended Parallel Process Model : EPPM) considéré jusqu’à présent

comme le modèle le plus abouti à ce jour sur les plans théorique et empirique. Ce modèle

montre qu’un message phobique déclenche deux processus d’évaluation cognitive. L’individu

commence par évaluer la menace. Si cette évaluation donne un niveau modéré à élevé de

menace perçue, la peur est activée (Easterling et Leventhal, 1989) et les gens sont motivés à

commencer une deuxième évaluation qui est l’évaluation de l’efficacité. Un niveau élevé

d’efficacité (efficacité de la recommandation et efficacité personnelle) donne lieu à un succès

du message phobique. Si, par contre, la menace est perçue comme faible, la personne n’est

plus motivée à traiter le message, l’efficacité n’est pas évaluée et il n’y a pas de réponse au

message.

Cependant, la peur n’est pas la seule émotion génératrice de stress. Plusieurs autres

émotions négatives, comme la culpabilité ou la honte, sont utilisées en communication dans

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plusieurs domaines tels que la politique, la consommation ou la santé publique. En revanche,

les études conduites à ce sujet restent limitées et très controversées. En effet, Lazarus (1991)

dit que la honte motive le comportement prosocial et incite à se conformer aux standards

sociaux, alors que Bennett (1998) met l’accent sur le rôle adaptatif de la culpabilité et signale

que les messages faisant appel à la culpabilité pourraient réussir à condition que la honte ne

soit pas activée. Par ailleurs, certains chercheurs se sont récemment intéressés à l’étude de la

dimension sociale de la menace. La menace sociale lie le danger du comportement incriminé

au rejet du groupe (Gallopel, 2006). A cet égard, Laroche, Toffoli, Zhang et Pons (2001) ont

pu vérifier que les sujets anglo-saxons ont des attitudes négatives plus élevées envers le

tabagisme lorsque le message phobique présente une menace physique, alors que les attitudes

des chinois envers le tabagisme ne changent pas lorsqu’ils sont exposés à un message

phobique présentant une menace sociale. Ces résultats mitigés nous ont incités à nous

interroger sur l’efficacité de l’utilisation de la peur, de la honte et de la culpabilité dans un

contexte de persuasion publicitaire lorsqu’il s’agit d’inciter les jeunes à adopter un

comportement les préservant des risques physiques et psychosociaux rattachés à la

consommation d’alcool. Nous montrerons également que l’efficacité perçue agit sur le

pouvoir de persuasion de ce type de messages. La revue de la littérature révèle deux types

d’efficacité qui motivent les individus à se protéger: l’efficacité de la recommandation et

l’efficacité personnelle (Floyd, Prentice-Dunn et Rogers, 2000 ; Witte et Allen, 2000). Les

perceptions d’efficacité de la solution font référence au degré selon lequel l’individu juge la

recommandation, donnée dans le message, efficace (Exemple : Je pense que limiter ma

consommation d’alcool à trois verres par semaine me préserve contre les risques liés à

l’alcool), alors que les perceptions d’efficacité personnelle font référence au degré selon

lequel la personne est capable de suivre la recommandation qu’elle a jugée efficace. Ainsi, par

exemple, plus la perception du coût de la réponse est élevée, plus les perceptions de

l’efficacité personnelle sont faibles. Le coût de la réponse fait référence aux conséquences

négatives associées à l’adoption du comportement recommandé. Le manque de confort ou le

temps perdu associés à ce comportement dans un message influenceront alors certainement le

niveau de conformité (Hale et Dillard, 1995).

Dans le cadre des messages phobiques, plusieurs études montrent que plus la

perception de la menace est élevée, plus la peur activée est importante (LaTour et Pitts, 1989 ;

Block et Keller, 1995 ; Gallopel et Valette-Florence, 2002). Cependant, Tanner et al. (1991),

disent que la peur peut être évoquée par des processus autres que l’évaluation de la menace.

Les liens entre la menace et la peur doivent donc être complètement vérifiés.

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H1a : Dans le cas du scénario apeurant, plus les perceptions de la sévérité de la menace

augmentent, plus l’émotion de peur activée augmente.

H2a : Dans le cas du scénario apeurant, plus les perceptions de la vulnérabilité à la menace

augmentent, plus l’émotion de peur activée augmente.

Par ailleurs, les processus cognitifs d’évaluation de la menace sont aussi à l’origine de

toutes les émotions négatives (Lazarus, 1991). Nous supposons alors que :

H1b : Dans le cas du scénario faisant appel à la culpabilité, plus les perceptions de la

sévérité de la menace augmentent, plus l’émotion de culpabilité activée augmente.

H2b : Dans le cas du scénario faisant appel à la culpabilité, plus les perceptions de la

vulnérabilité à la menace augmentent, plus l’émotion de culpabilité activée augmente.

Même si la culpabilité est considérée comme une émotion publique provoquée par des

coups de conscience et que la honte est considérée comme une émotion publique provoquée

par l’exposition au public et le désagrément des autres (Tangney, 1995), plusieurs chercheurs

montrent qu’il est difficile de distinguer la culpabilité et la honte. Elles sont toutes deux

considérées comme des émotions à conscience de soi (Self-conscious emotions) (Lewis,

1993). La honte et la culpabilité impliquent donc toujours une auto-évaluation. Tout comme la

culpabilité, la honte est une émotion utile qui, nous prévient des normes sociales à ne pas

enfreindre. Elle induit des actions adaptées puisqu’elle motive la personne à être à la hauteur

de certains idéaux internes imposés par la société et intériorisés (Lazarus, 1991). Nous

supposons alors que, comme pour les messages faisant appel à la culpabilité :

H1c : Dans le cas du scénario faisant appel à la honte, plus les perceptions de la sévérité de

la menace augmentent, plus l’émotion de honte activée augmente.

H2c : Dans le cas du scénario faisant appel à la honte, plus les perceptions de la

vulnérabilité à la menace augmentent, plus l’émotion de honte activée augmente.

Les chercheurs suggèrent qu’un niveau élevé de peur n’est efficace que lorsqu’une solution

efficace est proposée au prospect. Cette solution permettrait d’éviter la menace présentée dans

le message (Witte, 1992). L’intégration de solutions permettant de s’affranchir de la

menace perçue et, par conséquent, de l’émotion négative ressentie, dans les messages

faisant appel à la culpabilité et à la honte serait également recommandée. Ainsi :

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H3 : Dans un message fortement menaçant, plus les perceptions d’efficacité de la solution

recommandée augmentent, plus la persuasion augmente.

Par ailleurs, les études menées montrent l’existence d’une influence positive de

l’efficacité personnelle sur les intentions d’adopter la solution recommandée par le message

menaçant (Snipes et al., 1999 ; Block et Keller, 1997). L’annonceur devrait alors préconiser

une solution perçue comme efficace et que le prospect se sent capable d’adopter

(efficacité personnelle élevée).

H4 : Dans un message fortement menaçant, plus les personnes se sentent capables d’adopter

la solution recommandée, plus la persuasion augmente.

Au niveau empirique, il y a eu des divergences dans les résultats depuis l’étude de

Janis et Feshbach (1953) concernant l’effet de la peur sur la persuasion. Toutefois, la majorité

des études confirment la relation positive monotone entre la peur et la persuasion (Arthur et

Quester, 2004 ; LaTour et Rotfeld, 1997) et considèrent la peur comme une variable

facilitatrice qui a pour rôle d’attirer l’attention et d’améliorer la mémorisation (Rogers,

1983).

H5a : Dans le cas du scénario apeurant, plus la peur activée par le message est forte, plus la

persuasion est élevée.

Bien que plusieurs recherches en marketing aient montré l’effet positif des émotions

négatives sur la persuasion, la plupart des études ont porté sur la peur et n’ont pas donné aux

praticiens la possibilité d’influencer l’anxiété des consommateurs en activant d’autres

émotions négatives comme la culpabilité ou la honte (Lascu, 1991). Pourtant, Einstein et

Lanning (1998) disent que la honte et la culpabilité sont des états affectifs négatifs qui

agissent comme des voix morales pour guider l’activité sociale des gens. Nous supposons

alors que :

H5b : Dans un message faisant appel à la culpabilité, plus la culpabilité activée par le

message est forte, plus la persuasion est élevée.

H5c : Dans un message faisant appel à la honte, plus la honte activée par le message est

forte, plus la persuasion est élevée.

En outre, la prise en compte des variables individuelles pour évaluer les effets des

émotions négatives sur la persuasion a fait l’objet de plusieurs recherches et permet

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d’expliquer certains résultats divergents observés dans des études globales. A cet effet,

plusieurs études montrent que les individus ayant un niveau élevé d’estime personnelle (HSE :

High Self Esteem) et s’engageant dans des comportements à risque utilisent souvent une

variété de stratégies cognitives qui les protègent de totalement reconnaître leur vulnérabilité

aux éventuelles conséquences négatives de leur comportement (Gerrard et al., 2000 ;

Bennett, 1996).

Dans ce travail, on suppose que, pour maintenir leur niveau d’estime de soi face à des

informations menaçantes sur les dangers de l’alcool, les personnes à estime de soi élevée vont

minimiser leurs perceptions de la gravité de ces dangers et de leur vulnérabilité à ces dangers.

En revanche, plus le niveau d’estime de soi diminue, plus les perceptions de la menace

augmentent.

H6 : Dans un message menaçant, plus l’estime de soi augmente, plus les perceptions de

sévérité de la menace diminuent.

H7 : Dans un message menaçant, plus l’estime de soi augmente, plus les perceptions de

vulnérabilité à la menace diminuent.

D’autre part, Schaninger et Sciglimpaglia (1981) suggèrent que l’estime de soi affecte

significativement les réponses des individus aux communications émotionnelles puisqu’elle

influence leur confiance en leur capacité à prendre des décisions. A cet égard, Bennett (1996)

a montré que plus la peur augmente, plus le changement d’attitude aux messages phobiques

augmente particulièrement chez les personnes se caractérisant par une faible estime

personnelle. Nous proposons alors que :

H8 : Dans un message menaçant, plus l’estime de soi augmente chez la personne, plus les

perceptions d’efficacité personnelle augmentent.

D’autre part, selon Aaker et Stayman (1989), certains individus lorsqu’ils sont exposés

à des messages publicitaires chargés émotionnellement peuvent montrer une tendance à

éprouver leurs émotions avec de plus grandes intensités. Cette caractéristique est appelée

intensité affective et est définie comme « une tendance stable et homogène que possèdent

certains individus à réagir plus fortement que d’autres à un stimulus provoquant des

émotions, indépendamment du type d’émotion évoquée » (Larsen, 1984). Ainsi,

conformément à cette définition, Moore et al. (1995) ont montré que les individus à intensité

affective élevée, comparés aux individus ayant de faibles scores sur l’échelle de l’intensité

affective (1) ont manifesté des réponses émotionnelles et attitudinales significativement plus

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fortes aux publicités émotionnelles et (2) n’ont pas montré de différences dans l’intensité de la

réponse émotionnelle lorsqu’il étaient exposés à un message non émotionnel. Ainsi, plus

l’intensité affective augmente chez la personne, plus l’émotion négative (peur, honte,

culpabilité) augmente. Or, l’émotion négative se forme à partir des perceptions de sévérité et

de vulnérabilité à la menace. On peut alors proposer que :

H9 : Dans un message menaçant, plus l’intensité affective augmente chez la personne, plus la

sévérité perçue de la menace augmente.

H10 : Dans un message menaçant, plus l’intensité affective augmente chez la personne, plus

la vulnérabilité perçue à la menace augmente.

Le réseau des hypothèses élaborées constitue le modèle conceptuel de la recherche (figure 1)

qui sera testé dans la suite de ce travail.

Figure 1. Modèle de la recherche

METHODOLOGIE

Avant de présenter les résultats, nous exposons ci-après les stimuli utilisés, les

échelles de mesure, ainsi que les tests préliminaires relatifs à la validation des mesures et la

vérification des manipulations. Nous avons choisi d’étudier les effets des messages faisant

appel à la peur, à la culpabilité et à la honte dans un contexte de lutte contre une

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consommation excessive d’alcool. En effet, dans la plupart des pays, beaucoup de problèmes

liés à l’alcool dans une population sont liés aux boissons nuisibles ou dangereuses que

prennent des buveurs « mondains » non dépendants, souvent des jeunes. C’est pour cette

raison que nous avons choisi de mener l’enquête sur des jeunes dont les âges varient entre 18

et 25 ans.

Stimuli

Quatre annonces publicitaires ont été crées (annexe A): une pour le scénario apeurant,

une pour le scénario faisant appel à la culpabilité et deux pour le scénario faisant appel à la

honte (versions hommes et femmes). La création des annonces publicitaires s’est déroulée en

deux étapes : (1) le choix des visuels, (2) la conception du message. L’objectif était de

susciter de fortes perceptions de sévérité de la menace, de vulnérabilité à la menace,

d’efficacité de la solution et d’efficacité personnelle (Witte, 1992).

Mesures 2

Pour tous les items de mesure, nous avons choisi d’utiliser des échelles de type Likert en sept

points (1= pas du tout d’accord, 7= tout à fait d’accord). La sévérité perçue de la menace (3

items), la vulnérabilité perçue à la menace (2 items), l’efficacité perçue de la

recommandation (3 items) et l’efficacité personnelle perçue (1 item) ont été inspirées des

échelles de Witte (1992). L’émotion de peur a été évaluée à l’aide de cinq items (« m’effraie,

tendu, nerveux, anxieux, mal à l’aise ») (Gallopel et Valette-Florence, 2002 ; Laroche et al.,

2001 ; Block et Keller, 1995), Tandis que la culpabilité a été mesurée par trois items (« plein

de remords, digne de blâme, provoque chez moi un sentiment de culpabilité ») adaptés des

échelles de Cotte et al. (2005) et Izard (1977). Par ailleurs, quatre items (« confusion,

embarras, honte, humiliation ») ont été utilisés pour évaluer la honte (Rolland et De Fruyt,

2003). Il a également été demandé aux répondants d’indiquer les niveaux d’efficacité perçue

de la recommandation (« permet d’éviter, rend moins susceptible, est une solution efficace »)

et d’efficacité personnelle perçue quant à l’idée d’arrêter de boire au volant (« ne pas prendre

le volant quand on a bu est facile »). Ensuite, la persuasion a été mise en œuvre par six items

correspondant à l’indexe de persuasion utilisé par Block et Keller (1997). L’estime de soi a

été mesurée par l’échelle RSE (Rosenberg Self Esteem) de Rosenberg (1965) à laquelle nous

2 Les stimuli et les mesures utilisées ont fait l’objet d’un prétest sur 212 étudiants répartis sur les 3 scénarios de l’étude (69 pour la peur, 78

pour la culpabilité et 65 pour la honte).

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avons omis les items formulés de façon inversée3. Enfin, pour mesurer l’intensité affective,

nous avons utilisé la deuxième dimension de l’échelle4 de Geuens et De Pelsmacker (2002)

correspondant aux émotions négatives.

Echantillon et tests préliminaires

Le questionnaire a été diffusé en ligne à des étudiants appartenant à plusieurs

universités françaises. Au total, nous avons obtenu 1082 questionnaires remplis et

exploitables répartis sur les 3 scénarios (391, 401 et 290 respectivement pour le scénario

faisant appel à la peur, à la culpabilité et à la honte).

Pour tester la qualité des mesures, nous avons tout d’abord vérifié

l’unidimensionnalité de chacune des échelles de mesure à l’aide de plusieurs analyses en

facteurs communs. Ensuite, les résultats de l’analyse factorielle confirmatoire5, le coefficient

ρ de Jöreskog et le coefficient α de Cronbach nous ont permis de vérifier les validités

convergentes et discriminante et la fiabilité des échelles de mesure utilisées (annexe B)6.

En ce qui concerne les manipulations effectuées des émotions, des comparaisons

effectuées entre les scénarios montrent que les niveaux de peur, de honte et de culpabilité sont

respectivement plus élevés dans les scénarios suscitant la peur, la honte et la culpabilité

(annexe C). De même, à l’intérieur de chaque scénario, nous avons trouvé que (1) le scénario

phobique suscite plus de peur que de honte et de culpabilité, (2) le scénario faisant appel à la

culpabilité produit plus de culpabilité que de peur et de honte et (3) le scénario honte génère

plus de honte que de peur et de culpabilité (annexe D).

RESULTATS

Pour mettre en lumière les différences existantes entre les trois situations d’émotions

(peur, honte et culpabilité), nous avons utilisé une approche structurelle multi-groupes7. Nous

avons alors comparé un modèle où tous les paramètres structurels sont laissés libres (modèle

libre) à un modèle où les paramètres structurels sont contraints à égalité (modèle contraint).

La différence s’est révélée significative (∆χ2 = 119,59 ; ∆ddl = 32 , p < 0,001). Ceci nous

3 Conformément aux préconisations de Wong et al. (2003).

4 Echelle réduite de « l’Affect Intensity Scale » (AIM) de Larsen (1984).

5 D’une part, le ρvc (variance partagée entre le construit et ses items de mesure) > 50% pour tous les construits. D’autre part, la variance

partagée entre les construits est inférieure à leurs ρvc (Fornell et Larcker 1981). 6 Les résultats de l’analyse factorielle confirmatoire présentés en annexe B ont été obtenus après bootstrap (1000 itérations) pour pallier les

problèmes de normalité. 7 Un test de l’invariance des mesures a été effectué au préalable. Il montre globalement l’existence d’une variance de toutes les échelles de

mesure entre les scénarios. Ainsi, pour éviter l’erreur due à la variance des mesures, il a fallu contraindre tous les paramètres de mesure à

égalité entre les trois groupes, le but étant de conserver une structure des instruments de mesure identique parmi les groupes étudiés.

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incite à identifier l’origine de cette différence. En d’autres termes, il s’agit de déceler les

paramètres structurels qui diffèrent entre les trois scénarios.

Pour identifier les paramètres structurels qui diffèrent d’un scénario à l’autre, nous

avons effectué une série de comparaisons entre les χ2 des modèles libre

8, contraint

9, et

contraints deux à deux10. Ces comparaisons se feront pour chaque relation structurelle du

modèle. La règle adoptée pour le choix du meilleur modèle est toujours de conserver le

modèle le plus contraint en cas de différence non significative et le modèle le moins contraint

dans le cas contraire. Les modèles choisis nous renseignent sur les estimations de chaque

paramètre structurel pour chaque scénario (figure 2).

Les résultats montrent que quel que soit le scénario, l’intensité affective exerce un

effet positif direct sur la sévérité perçue de la menace d’une part (H9 validée) et la

vulnérabilité perçue à la menace d’autre part (H10 validée). De plus, et conformément à

l’hypothèse H3, plus l’efficacité perçue de la solution augmente, plus la persuasion augmente

(H3 validée). De même pour l’efficacité personnelle perçue qui influence directement et

positivement la persuasion (H4 validée).

En ce qui concerne l’estime de soi, les hypothèses de la recherche attribuent des effets

directs négatifs sur les perceptions de la sévérité et de la vulnérabilité de la menace et un effet

direct positif sur l’efficacité personnelle perçue, indépendamment du scénario. Contrairement

à nos attentes, nous n’avons trouvé d’effets significatifs de l’estime de soi, ni sur la

vulnérabilité perçue à la menace (H7 non validée), ni sur l’efficacité personnelle perçue (H8

non validée). Dans cette même optique, nous ne constatons pas d’effet de l’estime de soi sur

la sévérité perçue de la menace, dans le cas du scénario honte. L’estime de soi affecte bien au

contraire cette variable de façon directe et, contrairement à nos attentes, positive dans le cas

des scénarios faisant appel à la peur et à la culpabilité, ce qui contredit l’hypothèse H6 et nous

conduit à la rejeter (H6 non validée).

Par ailleurs, pour le scénario peur, plus les perceptions de la sévérité et de la

vulnérabilité à la menace augmentent, plus le niveau de peur activé augmente (H1a et H2a

validées). D’autre part, la peur exerce un effet positif direct sur la persuasion (H5a validée).

8 Les paramètres structurels en question sont différents (libres) entre les 3 groupes (peur, honte et culpabilité).

9 Les paramètres structurels en question sont contraints à égalité pour les 3 groupes.

10 Peur libre : les paramètres structurels en question sont contraints à être égaux pour les scénarios honte et culpabilité et libres pour le

scénario peur.

Honte libre : les paramètres structurels en question sont contraints à être égaux pour les scénarios peur et culpabilité et libres pour le scénario

honte. Culp libre : les paramètres structurels en question sont contraints à être égaux pour les scénarios peur et honte et libres pour le scénario

culpabilité.

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Actes du XXIIIème Congrès International de l’AFM – 31 mai & 1er juin 2007, Aix-les-Bains

13

En d’autres termes, la peur joue le rôle de médiateur entre les perceptions de la menace et la

persuasion. En revanche, toutes les relations concernant la honte et la culpabilité ne sont pas

significatives11. Ceci peut être expliqué par le fait que les perceptions de la menace (sévérité

et vulnérabilité) dans le scénario peur ne provoquent pas de niveaux assez élevés de

culpabilité et de honte pour influencer la persuasion.

Figure 2. Résultats des tests des hypothèses

Scénario peur

Scénario culpabilité

Scénario honte

11 sever�honte, sever�culp, vuln�honte, vuln�culp, honte�persuas, culp�persuas

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Estimation significative Estimation non significative

Pour le scénario culpabilité, les perceptions de la sévérité de la menace ont une

influence positive sur la peur et la culpabilité seulement (H1b validée). Cependant, la

vulnérabilité perçue de la menace n’a d’effet ni sur la peur, ni sur la honte, ni sur la

culpabilité (H2b non validée). Malgré cette absence d’effet de la vulnérabilité perçue sur la

culpabilité, cette dernière exerce un effet significatif positif sur la persuasion (H5b). Ceci peut

être expliqué par l’effet significatif positif de la sévérité perçue sur la culpabilité (H1b).

D’autre part, l’effet significatif de la peur sur la persuasion peut être dû à un effet significatif

positif de la sévérité perçue sur la peur qui aurait compensé l’absence d’effet de la

vulnérabilité perçue sur la peur. Ceci veut dire que le scénario faisant appel à la culpabilité

provoque la peur aussi bien que la culpabilité. Concrètement, les répondants auraient pu avoir

peur de se sentir coupables (Ghingold, 1981). Dans ce cas, les émotions de peur et de

culpabilité se chevauchent. Par ailleurs et comme prévu, la culpabilité exerce un effet direct

sur la persuasion (H5b validée). En outre, étant donné que les perceptions de la menace ne

suscitent pas de honte dans ce scénario, cette émotion n’a aucun effet sur la persuasion.

Enfin, dans le cas du scénario faisant appel à la honte, les perceptions de la sévérité et

de la vulnérabilité à la menace produisent un niveau élevé de honte (H1c et H2c validées) qui,

à son tour, influence positivement la persuasion (H5c validée). Nous nous apercevons, par

ailleurs, que les perceptions de la sévérité de la menace provoquent un niveau élevé de peur et

que les perceptions de la vulnérabilité à la menace génèrent une forte culpabilité. Ces deux

effets expliquent, respectivement, l’impact de la peur et de la culpabilité sur la persuasion. Le

scénario faisant appel à la honte serait probablement à l’origine de la peur et de la culpabilité,

en plus de la honte.

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15

DISCUSSION, LIMITES ET VOIES FUTURES DE RECHERCHE

Conformément à ce que nous postulions, les résultats confirment l’effet positif de

l’intensité affective sur la sévérité perçue de la menace d’une part et la vulnérabilité

perçue à la menace d’autre part, indépendamment du scénario. Ces résultats nous

renvoient à ceux de Moore et al. (1994) ayant révélé que les réponses cognitives

(perceptions de la menace) jouent un rôle médiateur entre l’intensité affective et les

réponses émotionnelles.

Par ailleurs, même si l’effet de la vulnérabilité perçue sur la culpabilité s’est révélé

non significatif dans le cas du scénario culpabilisant, les émotions négatives que nous

étudions s’avèrent jouer un rôle médiateur entre les perceptions de la menace et la

persuasion. Ce résultat confère aux émotions négatives un rôle central et met en lumière,

conformément à plusieurs autres recherches (Arthur et Quester, 2004 ; Tanner et al.,

1991), que la menace fait naître des émotions négatives (peur, honte et culpabilité) qui, à

leur tour, ont un impact direct sur le comportement.

Les résultats soulignent, en outre, le rôle important des perceptions d’efficacité à

augmenter l’acceptation du message et améliorer ainsi la persuasion. De nombreux

chercheurs dans le domaine des appels à la peur ont déjà adopté ce point de vue et

s’accordent à dire que l’efficacité perçue est une condition nécessaire à l’efficacité de la

peur (Block et Keller, 1997 ; Hale et Dillard, 1995 ; Witte, 1992).

D’autre part, il est important de noter que la persuasion dans le scénario honte s’est

produite grâce aux trois émotions étudiées (peur, honte et culpabilité). En effet, le scénario

honte a suscité le registre complet des émotions mesurées dans l’étude, c'est-à-dire non

seulement la honte, mais également la peur et la culpabilité. Ces résultats ne sont guère

surprenants puisque les auteurs affirment que plusieurs émotions sont ressenties face à un

message menaçant et influencent le processus de persuasion (Gallopel, 2006). Dillard et

Anderson (2004) montrent alors que la surprise, la colère, la tristesse, l’irritation,… sont

ressenties, en plus de la peur, après l’exposition à un message phobique. Dans le même

ordre d’idées, Lavoisier (2000) montre que face à un message menaçant, des émotions de

tristesse, de colère, de culpabilité, de honte et de dégoût émergent.

Par ailleurs, ce résultat confirme les propositions de Lazarus (1991) sur le rôle de la

honte. Celle-ci motive le comportement prosocial et incite à se conformer aux standards

sociaux. Même si Bennett (1998) signale que les messages faisant appel à la culpabilité

pourraient réussir à condition que la honte ne soit pas activée, cette recherche a pu monter

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qu’un message menaçant suscitant à la fois la peur, la honte et la culpabilité serait, bien au

contraire, le plus persuasif. Ce résultat pourrait être expliqué par la théorie de l’action

raisonnée (Fishbein et Ajzen, 1975) qui stipule que l’intention d’adopter un comportement est

déterminée par les normes subjectives, par les croyances normatives et par la motivation à se

plier aux normes (Sheppard, Hartwick et Warshaw, 1988). La menace sociale due à la

pression du groupe serait plus efficace chez une population de jeunes. Ainsi, Pechmann

(1997) note que les publicités anti-tabac n’attirent pas les adolescents lorsqu’elles

présentent les points de vue des adultes. Elle conseille, de même que Smith et Stutts

(2003), que ces publicités devraient plutôt mettre l’accent sur les coûts à court terme du

tabagisme, montrer des jeunes qui refusent des offres de cigarettes et affirmer que « fumer

n’est pas la norme ».

.Nous estimons ainsi avoir pu contribuer à travers cette recherche à l’enrichissement

des connaissances dans le domaine de la persuasion sociale par les émotions négatives. Les

résultats appuient le rôle de la peur dans un contexte de prévention contre l’abus d’alcool.

Ils affirment, par ailleurs, l’impact persuasif d’autres émotions négatives, à savoir la honte

et la culpabilité.

Les applications concrètes que pourraient trouver les conclusions d’ordre théorique et

empirique de ce travail sont nombreuses. En effet, les résultats aideraient les praticiens à

prendre des décisions quant à une éventuelle utilisation des émotions de peur, de honte et de

culpabilité pour agir sur les comportements. Des organismes publics trouveront alors dans

cette recherche un cadre d’analyse des éléments préalables au développement de campagnes

faisant appel aux émotions négatives pour lutter contre une consommation abusive d’alcool.

Toutefois, ce travail n’est pas dépourvu de limites. La première concerne la mesure

des émotions. En effet, la méthode de mesure des émotions utilisée, à savoir le rapport verbal

déclaratif, présente certaines limites comme le risque de désirabilité sociale. Les répondants

peuvent alors avoir tendance à surestimer les effets de la peur, de la honte et de la culpabilité.

De plus, ils peuvent mal traduire délibérément ou non la tonalité affective qu’ils ressentent

(Derbaix et Poncin, 2005). D’autres chercheurs se sont attachés à expliquer la variation de

l’efficacité des messages faisant appel aux émotions négatives en fonction du genre. Block et

Keller (1997) montrent, à cet égard que, les messages phobiques s’accompagnant d’un volet

« efficacité personnelle » sont plus persuasifs pour les femmes que pour les hommes. De

même, Rossiter et Thornton (2004) constatent que la répétition d’un message apeurant est

plus efficace lorsque ce dernier s’adresse à des femmes.

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Dans cette recherche, nous n’avons pas pu confirmer l’effet négatif de l’estime de soi

sur les perceptions de la menace. Bien au contraire, les résultats prouvent que l’estime de soi

agit d’une manière directe et positive sur la sévérité perçue de la menace dans le cas des

scénarios faisant appel à la peur et à la culpabilité. De même, nous n’avons pas trouvé d’effet

de l’estime de soi sur l’efficacité personnelle perçue. Ceci peut être expliqué par plusieurs

raisons. Tout d’abord, le caractère personnel et intime de cette variable rend sa mesure

difficile et délicate. Le risque de désirabilité sociale est alors très élevé. Ensuite, les liens

entre l’estime de soi et les perceptions de la menace ne seraient pas directs. Une explication

du rôle de l’estime de soi dans le traitement des messages phobiques fondée sur la théorie du

management de la terreur serait intéressante. Hunt et Shehryar (2002) ont, par exemple

montré que l’implication de l’égo au comportement incriminé modère l’impact de la nature de

la peur sur la congruence avec l’attitude désirée. En d’autres termes, chez les personnes se

caractérisant par un niveau élevé d’implication de l’égo au comportement incriminé, les

messages phobiques mettant en avant une menace liée à la mort produit des niveaux plus

faibles de congruence entre l’attitude et la recommandation que les messages phobiques

intégrant une menace non liée à la mort. Ces hypothèses méritent alors d’être vérifiées dans

de futures recherches.

Enfin, la recherche de sensations (Zuckerman et al., 1964) serait une variable

pertinente pouvant intervenir dans l’évaluation des messages faisant appel aux émotions

négatives, notamment dans le contexte de la prévention contre l’abus d’alcool (Donohew et

al., 1990). Palmgreen et al. (2003) recommandent l’utilisation de messages préventifs à haute

valeur en termes de sensations ou HSV (High Sensation Value) pour les personnes en

recherche de sensations fortes étant donné que ces personnes ont constamment besoin de

stimuli nouveaux, complexes, ambigus ou émotionnellement intenses. On pourrait alors

supposer que la recherche de sensations modère la relation entre les émotions négatives et la

persuasion. D’autres variables individuelles pourraient avoir un impact sur la relation entre les

émotions négatives et la persuasion comme le trait de culpabilité, la tendance à la

procrastination, l’aversion au risque ou l’introversion. Un développement de ces propositions

dans les recherches futures serait d’un grand intérêt.

Au-delà de ses limites, ce travail ouvre la voie à une réflexion plus complexe du

véritable rôle de la honte et de la culpabilité dans les communications de service public, et

notamment dans les campagnes anti-alcool. Bien que plus de support empirique soit

nécessaire, ce travail recommande de privilégier l’utilisation de la honte dans les campagnes

de lutte contre l’abus d’alcool destinées à un public de jeunes.

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Annexe A. Les stimuli utilisés

Scénario peur Scénario culpabilité

Subir le sort de Julie, ça fait vraiment peur !

Pourtant, elle aurait pu facilement l’éviter

Arrêtez de boire au volant

A la place de Nicolas, on se sentirait vraiment coupable !

Pourtant, il aurait pu facilement l’éviter

Arrêtez de boire au volant

Scénario honte (version hommes) Scénario honte (version femmes)

A la place de Nicolas, on aurait vraiment honte !

Pourtant, il aurait pu facilement l’éviter

Lors d’une soirée, ne buvez pas plus de

3 verres d’alcool

A la place de Julie, on aurait vraiment honte !

Pourtant, elle aurait pu facilement l’éviter

Lors d’une soirée, ne buvez pas plus de

2 verres d’alcool

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Annexe B. Fiabilité et validités des échelles de mesure

ααααCronbach 0,883 0,776 0,908 0,898 0,870 0,711 0,924 0,810 0,681

ρρρρJöreskog 0,885 0,778 0,908 0,900 0,871 0,728 0,924 0,815 0,683

RHO vc 0.61 0.47 0.77 0.75 0.77 0.48 ** 0.67 0.47 0.42

peur honte culp sever vuln soleff effpers persuas estim affect

peur ***

honte 0.207

culp 0.076 0.321

sever 0.216 0,002* 0.053

vuln 0.157 0,000* 0.060 0.229

soleff 0.050 0,001* 0.019 0.112 0.111

effpers 0,003* 0.012 0.007 0.019 0,004* 0.017

persuas 0.280 0.043 0.108 0.326 0.224 0.141 0.030

estim 0.006 0,002* 0,001* 0,001* 0,000* 0,004* 0.001 0,000*

affect 0.064 0.037 0.068 0.092 0.056 0.043 0.010 0.103 0.021

* Corrélations non significatives

** Mesure uni-item

*** Les valeurs en dessous de la diagonale représentent la variance partagée entre les construits

Annexe C. Comparaison des niveaux des émotions entre les scénarios

Scénario Honte Culpabilité

Peur

(4,62)* µ∆ = 1,94 ; ddl = 679 ; t = 19,46 ; p < 0,001 µ∆ = 1,20 ; ddl = 790 ; t = 13,11 ; p < 0,001

Honte

(2,68) µ∆ = 0,74 ; ddl = 689 ; t = 7,46 ; p < 0,001

Niv

eau d

e

peu

r

Culpabilité

(3,42)

Peur

(2,66) µ∆ = 4,37 ; ddl = 514,40 ; t = 4,25 ; p < 0,001 µ∆ = 0,08 ; ddl = 784,03 ; t = 0,92 ; p = 0,359

Honte

(3,10) µ∆ = 0,36 ; ddl = 554,92 ; t = 3,401 ; p = 0,001

Niv

eau d

e

honte

Culpabilité

(2,74)

Peur

(2,12) µ∆ = 0,03 ; ddl = 679 ; t = 0,03 ; p = 0,973 µ∆ = 1,65 ; ddl = 691,34 ; t = 15,67 ; p < 0,001

Honte

(2,12) µ∆ = 1,65 ; ddl = 687,14 ; t = 14,61 ; p < 0,001

Niv

eau d

e

culp

abilité

Culpabilité

(3,77)

* Moyenne calculée en se basant sur le score factoriel brut transformé

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Annexe D. Comparaison des niveaux des émotions à l’intérieur de chaque scénario

Niveau

d’émotion Honte Culpabilité

Peur

(4,60)* µ∆ = 1,96 ; ddl = 390 ; t = 30,36 ; p < 0,001 µ∆ = 2,48 ; ddl = 390 ; t = 35,16 ; p < 0,001

Honte

(2,65) µ∆ = 0,53 ; ddl = 390 ; t = 12,20 ; p < 0,001

Scé

nari

o p

eur

Culpabilité

(2,12)

Peur

(2,67) µ∆ = 0,44 ; ddl = 289 ; t = 6,52 ; p < 0,001 µ∆ = 0,55 ; ddl = 289 ; t = 8,23 ; p < 0,001

Honte

(3,11) µ∆ = 0,99 ; ddl = 289 ; t = 14,44 ; p < 0,001

Scé

nari

o

honte

Culpabilité

(2,11)

Peur

(3,42) µ∆ = 0,68 ; ddl = 400 ; t = 11,61 ; p < 0,001 µ∆ = 0,35 ; ddl = 400 ; t = 3,89 ; p < 0,001

Honte

(2,74) µ∆ = 1,03 ; ddl = 400 ; t = 13,05 ; p < 0,001

Scé

nari

o

culp

abilité

Culpabilité

(3,77)

* Moyenne calculée en se basant sur le score factoriel brut transformé

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