L’Internet des objets, c’est maintenant! · Les objets connectés génèrent des données en...

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LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 NUMÉRO 8 DE 10 ARTIFICIELLE AHIER SPÉ AHIER SPÉ AHIER SPÉ C D CIAL AHIER SPÉ L’Internet des objets, c’est maintenant! Dans nos maisons, les thermostats, systèmes d’alarme, détecteurs de fumée, sonnettes et réfrigérateurs sont déjà prêts à être connectés. Dans nos villes, la gestion de l’énergie, de l’eau, des transports et de la sécurité est de plus en plus intelligente. Dans les usines, les chaînes de montage connectées laissent présager une amélioration rapide de la productivité et du rendement. Tous les objets fonctionnant à l’élec- tricité sont connectables et tout ce qui est connecté est capable de récupérer, de stocker, d’analyser et de transférer des données bien plus rapidement que ne le ferait un cerveau humain. Bienvenue dans le monde de l’Internet des objets !

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L E S S A M E D I 2 7 E T D I M A N C H E 2 8 AV R I L 2 0 1 9

NUMÉRO 8 DE 10

A R T I F I C I E L L E

AHIER SPÉ

AHIER SPÉ

AHIER SPÉC

DCIAL AHIER SPÉ

L’Internet des objets, c’est maintenant!

Dans nos maisons, les thermostats, systèmes d’alarme, détecteurs de fumée, sonnettes et réfrigérateurs

sont déjà prêts à être connectés. Dans nos villes, la gestion de l’énergie, de l’eau, des transports et de la

sécurité est de plus en plus intelligente. Dans les usines, les chaînes de montage connectées laissent

présager une amélioration rapide de la productivité et du rendement. Tous les objets fonctionnant à l’élec-

tricité sont connectables et tout ce qui est connecté est capable de récupérer, de stocker, d’analyser et de

transférer des données bien plus rapidement que ne le ferait un cerveau humain. Bienvenue dans le

monde de l’Internet des objets !

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019D 2 INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

OBJETS CONNECTÉS

Pratiques, sécurisants, divertissantsAprès quelques mois passés à la direction générale de l’Institut de valorisation des données (IVADO),

Michel Langelier est depuis le mois de novembre à la tête du CEFRIO, organisme dont la mission est de sou-

tenir l’adoption de la culture numérique dans les entreprises et les organisations du Québec. Il nous parle

de l’impact que les objets connectés auront sur nos vies et des précautions qu’il faut d’ores et déjà prendre.

P R O P O S R E C U E I L L I S P A R

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

De quoi parle-t-on lorsque l’on évoque l’Internetdes objets (IDO) ?De plus en plus d’objets que nous utilisons quotidienne-ment sont contrôlables à distance, soit via Internet, soit di-rectement grâce à des applications dédiées. Ces objetssont intelligents, ils captent des données et comme ils sontconnectés les uns avec les autres, ils les partagent et sontcapables de prendre des décisions en fonction des infor-mations qu’ils détiennent. Prenons les lampadaires dansnos villes. Ils captent le degré de luminosité ambiante ets’informent sur les intempéries à venir, par exemple, pourrégler leur intensité en conséquence. C’est la même chosepour des centaines d’objets : nos réfrigérateurs, nos ther-mostats, nos chauffe-eau, nos montres, nos réveils et au-tres cafetières et mijoteuses. Et ça le sera encore plusdans les toutes prochaines années.

Qu’est-ce que mon réfrigérateur intelligent peut faire pour moi ?Il peut vous informer sur la fraîcheur des aliments, sur laquantité de liquide qu’il vous reste et gérer automatique-ment la liste d’épicerie. Voire, à l’avenir, passer une com-mande pour vous. Celle-ci pourra vous être livrée pardrone dans les minutes qui suivent. Ça, c’est l’intérêt pourle consommateur, mais du point de vue de l’industrie, c’estmajeur également. Si mon engrenage est intelligent et quetoute ma chaîne de montage est connectée, je vais savoirqu’il a incessamment besoin de maintenance, sans atten-dre l’usure complète et le bris. Ainsi, je peux programmerla réparation pendant le quart de nuit et optimiser mescoûts d’intervention.

Est-ce qu’on est dans la science-fiction ou cela est-il déjà en cours ?On est en constante évolution dans ce domaine, et les en-treprises comme les consommateurs ont chacun leurr ythme en matière d’appropriation. Les dernières en-quêtes que nous avons menées au CEFRIO sur le sujetmontrent que 48% des entreprises au Québec manifestentun intérêt pour l’IDO. Du point de vue des consomma-teurs, ils sont 55% à être enthousiastes et à vouloir que cestechnologies soient intégrées de manière à rendre les mai-sons intelligentes (voir le graphique ci-contre). Au-jourd’hui, 24 % d’entre eux ont déjà au moins un objetconnecté, mais 15 % ont l’intention d’en acheter au moinsun dans les douze prochains mois. On en est aux balbutie-ments, mais d’ici cinq à dix ans, le marché va exploser.

À propos du marché, est-ce un domaine dans lequelles entreprises québécoises ont la part belle?C’est certain que nous sommes très influencés par lesgrands joueurs ailleurs dans le monde. La Corée du Sudsemble avoir pris un certain leadership en la matière.Mais le gouvernement provincial a investi pour créer un

environnement d’affaires favorisant l’intégration de l’intel-ligence artificielle par les entreprises et les organismes duQuébec. Nous avons des chercheurs à la fine pointe et desétudiants qui seront bientôt sur le marché du travail. Bref,tout le talent nécessaire pour développer des outils. Il n’estpas de notre intérêt de nous ramasser avec une technolo-gie venue d’ailleurs. D’autant que beaucoup de solutionset de besoins sont très locaux.

Que voulez-vous dire ?Il y a beaucoup de bienfaits sociétaux à attendre du dévelop-pement de l’intelligence artificielle en général, et de l’IDOen particulier. Le maintien à domicile des personnes âgéesvia des capteurs permettant de transmettre des donnéesaux proches aidants fera faire des économies aux gouverne-ments. Nous pourrons également faire des économiesd’énergie avec les thermostats intelligents, et plus encore sile consommateur accepte que celui-ci soit modulé à dis-tance par Hydro-Québec, qui pourra ainsi mieux gérer lespics de production. Les cours, au niveau primaire, secon-daire et universitaire, mais aussi à destination des per-sonnes immigrantes par exemple, pourront être totalementpersonnalisés, ce qui mènera à une accélération des appren-tissages. Les besoins ne sont pas forcément les mêmes auQuébec qu’ailleurs, car les problématiques diffèrent.

Vous évoquez la prise en main par Hydro-Québecde nos thermostats… pour le bien collectifpuisqu’il s’agit d’économiser de l’énergie, donc, en fin de compte, de sauver la planète… mais n’est-ce pas très intrusif ?On entre là dans le débat sur l’acceptabilité sociale.Jusqu’où est-ce que chacun de nous est prêt à partager sesdonnées, et avec qui ? Il y a toujours les théories du com-plot qui ressurgissent. Que va-t-on faire avec toutes cesdonnées ? D’un autre côté, on n’hésite plus à commanderdes fleurs en ligne, à télécharger une musique et même àdévoiler nos empreintes digitales à nos téléphones intelli-gents. Tout cela génère des données sur nous. Aussi, latrès grande majorité de la population souhaiterait pouvoirtraiter avec le gouvernement via le mobile et ne plus avoirà s’identifier chaque fois. Les consommateurs sont écarte-lés entre la peur et l’aspect pratique, sécurisant et divertis-sant des objets connectés. Mais ce qui est certain, c’estqu’ils devraient plus se protéger.

Encore plus avec les objets connectés ?Les objets connectés génèrent des données en masse etcomme chaque fois qu’une technologie est en développe-ment, le pendant, c’est que des gens cherchent à la pirater.Les développeurs doivent donc réfléchir à des protocolesde sécurité, mais d’un autre côté, pour que l’intelligenceartificielle soit la plus efficiente possible, il faut que lesdonnées demeurent libres. Le citoyen doit donc assumerune certaine vigilance. Avoir des mots de passe différents,les modifier, c’est la base. Le risque le plus grand, c’estl’usurpation d’identité. C’est un risque théorique tellementil est rare. Mais quand ça vous tombe dessus, c’est très pé-nible pour la victime.

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 D 3INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Pour une IA plus inclusiveÉ C R I T P A R O R I T H A L P E R N

Professeure agrégée au Département

de sociologie et d’anthropologie de

l’Université Concordia

P our aborder l’avenir de l’intelli-gence ar tificielle (IA), il faut

d’abord se pencher sur sa définition.Pourquoi est-elle artificielle ? Existe-t-il une seule sorte d’intelligence ?Les systèmes reposent sur desensembles de données et des algo-rithmes mis au point par des hu-mains en fonction de leurs propreshypothèses normatives à propos dela société, de l’évolution, de l’intelli-gence, de la race, du sexe, de l’éco-nomie, etc. Ainsi, bon nombre desméthodes d’apprentissage dévelop-pées pour les machines s’appuientsur les principes de la concurrence,des jeux compétitifs et de la capacitéà établir des distinctions entre lespersonnes et les choses. L’IA peut-elle être réellement artificielle si leshumains la programment en fonctionde leurs hypothèses et de leurs pers-pectives historiques?

Les créateurs d’algorithmes nesont pas objectifs. Ils ont leurs pro-pres conceptions de l’échec et dusuccès. Ces conceptions s’intègrentaux systèmes des machines et ontdes répercussions sociales souventdiscriminatoires. Cela engendre unbiais de confirmation. Ainsi, parexemple, notre conception des ma-chines intelligentes se base sur

l’image d’un corps normal et ensanté. Pourrions-nous les concevoiren ayant à l’esprit les études en ma-tière de handicap? Peut-on s’inspirerdes perspectives féministes, autoch-tones, antiracistes ? Ne peut-on pasimaginer différentes formes d’intelli-gence ? L’écologie nous apprend queles systèmes doivent souvent misersur la diversité pour s’adapter auchangement. L’évolution n’est pasqu’une question d’aptitudes, maisaussi de variété. Les villes intelli-gentes et leurs technologies inhé-rentes seront plus résilientes si ellessont diversifiées.

Pour concevoir des systèmes plusinclusifs, il est essentiel de considé-rer que nous les fabriquons avec destechnologies non humaines et pourcelles-ci. Les machines intelligentesn’ont pas à être des répliquesexactes des humains, et les villesn’ont pas à être conçues uniquementpour les humains. À mesure queceux-ci cohabitent plus facilementavec les machines et les technolo-gies, nos environnements physiquesdoivent refléter cette réalité. Lesquestions au sujet de l’intelligenceartificielle et de son incidence poten-tielle sur nos vies sont nombreuses.En les posant, nous devons garderl’esprit ouvert et être prêts à remet-tre en cause notre conception de lanature, de la vie rurale et urbaine,ainsi que de l’humain et du non-hu-main, afin de concevoir un avenirprônant la diversité et l’inclusion.

CEFRIO 2018 | NETENDANCES | LA MAISON INTELLIGENTE

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POINT DE VUE»

Le futur est à nos portes. Plus d’un Québécois sur deux souhaite que les objets intelligents fassent partie de sa vie quotidienne.

ISTOCK

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019D 4

CONTENU PARTENAIRE

Dans le secteur manufacturier, l’intelligence artificielle peut per-mettre des améliorations importantes soutenant l’innovation et les transformations des façons de faire. Des chercheurs de l’Université de Sherbrooke (UdeS) explorent les façons d’amener les entreprises québécoises à être plus intelligentes et innovantes.

«Pour que les entreprises soient compétitives, il faut travailler sur

l’aspect de leur productivité, et les tech-nologies émergentes viennent en appui à cela », lance Luis Antonio de Santa-Eulalia, professeur agrégé à l’École de gestion de l’UdeS, aussi membre fondateur du SC4 (Réseau de collaboration en recherche en gestion de chaînes logistiques 4.0) et co-fondateur du Réseau Innovation 4.0, ainsi que codirecteur du groupe de recherche IntelliLab. Ce dernier cherche à contri-buer à la performance des entreprises et des organisations de la province à travers l’innovation collaborative dans le cadre de la quatrième révolution industrielle, soit l’Industrie 4.0.

« On veut aider les PME manufactu-rières à être plus performantes et inno-vantes », renchérit Elaine Mosconi, pro-fesseure à l’École de gestion de l’UdeS, codirectrice d’IntelliLab et cofondatrice du Centre d’excellence en gestion de l’entreprise manufacturière innovante (CEGEMI). Selon elle, l’Industrie 4.0 et l’IA permettent aussi de créer de nouveaux modèles d’affaires.

« Est-ce que les technologies émer-gentes et l’IA peuvent nous aider à être plus efficaces et plus productifs ? La ré-ponse est oui », assure Luis Antonio de Santa-Eulalia, prenant l’exemple d’une entreprise qui aurait besoin d’embaucher des soudeurs. « Si j’ai de la difficulté à trouver de la main-d’œuvre, la technolo-gie pourrait me permettre d’automatiser le soudage ou encore d’accélérer le tra-vail de mes soudeurs avec des robots col-laboratifs », avance-t-il. L’intelligence arti-ficielle permet notamment aux employés d’effectuer des tâches moins répétitives et à valeur ajoutée, mais aussi d’améliorer

les processus d’affaires des entreprises, renchérit Elaine Mosconi.

Pour Luis Antonio de Santa-Eulalia, l’apport de l’intelligence artificielle dans l’Industrie 4.0 est majeur. « Beaucoup de technologies émergent présentement, et l’intelligence artificielle prend beau-coup de place parce qu’elle est intégrée à d’autres technologies », précise-t-il. Les algorithmes d’intelligence artificielle apportent notamment aux robots une flexibilité qui n’existait pas avant, leur permettant d’effectuer une gamme de tâches plus large, mais aussi de s’adap-ter et de s’améliorer en permanence. De plus, grâce aux données collectées dans les usines, les applications d’intelligence artificielle sont capables de mieux com-prendre certains comportements et de prédire ce qui se passera. « On est plus sophistiqué avec l’intelligence artifi-cielle », croit le chercheur.

Travail collaboratif

« On croit beaucoup au potentiel de la collaboration pour faire face à ce phéno-mène complexe, qui est l’Industrie 4.0», ajoute le professeur. Son équipe est entre autres associée à Productique Québec, le Centre collégial de transfert de techno-logie (CCTT) du Cégep de Sherbrooke, pour la création d’un Centre d’excellence en gestion de l’entreprise manufacturière innovante. L’objectif de celui-ci est de développer des pratiques managériales innovantes, adaptées aux modèles d’af-faires 4.0. « On vise à créer une plate-forme où les gens qui sont intéressés par l’innovation collaborative pourront se ren-contrer et travailler ensemble », explique le professeur. Dans ce lieu, chercheurs

universitaires, collégiaux et industriels pourront échanger et innover ensemble.

Au sein de ce centre, un  « living lab » permet de mener des recherches, de créer des prototypes technologiques et de gestion, ainsi que de les tester. « L’avantage est qu’on peut mettre la technologie dans un environnement contrôlé pour la tester sans arrêter la pro-duction ou mettre en risque le système manufacturier, incluant les employés », commente Elaine Mosconi.

La professeure explique que l’une des missions d’IntelliLab est de rendre les étu-diants utiles à la société de demain, mais capables de résoudre des problèmes concrets de l’entreprise d’aujourd’hui. Le secteur manufacturier a besoin de plus en plus d’une main-d’œuvre hautement qualifiée et apte à intégrer de nouvelles technologies qui ne cessent d’évoluer. Ainsi, grâce à plusieurs partenariats, les projets concrets sont nombreux, tels que le développement d’une approche sur l’intégration des robots collaboratifs, l’utilisation des agents conversationnels ou encore un projet de plateformes col-laboratives de type Facebook au sein de l’entreprise manufacturière. « Tout cela cherche à propulser la collaboration entre les gens, à faciliter le partage des connaissances, à les aider à être plus per-formants dans ce qu’ils font », explique Mme Mosconi.

En somme, pour les deux professeurs, tous ces projets servent à soutenir le secteur manufacturier pour qu’il soit le plus performant possible, créant ainsi des usines intelligentes, des entreprises innovantes, et ultimement, une société intelligente propulsée par l’IA et plusieurs autres technologies.

ISTOCK

UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

LES TECHNOLOGIES ÉMERGENTES, L’IA ET L’INNOVATION COLLABORATIVE : COMPOSANTES DU SUCCÈS POUR LE SECTEUR MANUFACTURIER

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 D 5INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Le déploiement de la 5G promet

de concrétiser les ambitions de

l’Internet des objets. Voici com-

ment la cinquième génération de

télécommunication sans fil va

transformer nos vies, notre écono-

mie et notre recours à l’intelli-

gence artificielle.

E T I E N N E P L A M O N D O N E M O N D

Collaboration spéciale

D eux antennes pas comme les au-tres ont fait leur apparition au

Québec en 2018. L’une a été installéeà Montréal, à l’École de technologie su-périeure (ETS), l’autre à Québec, aucentre de recherche et technologiesde l’entreprise Thales. La puissancedu réseau qu’elles émettent ne res-semble en rien à celle utilisée par nostéléphones cellulaires : il s’agit de la5G, soit la cinquième génération deréseau de télécommunication sans fil(voir l’encadré ci-contre). Ces bancsd’essai ont été implantés dans le cadred’ENCQOR, un projet de 400 millionsde dollars qui réunit des entreprisesprivées, dont Ericsson, Ciena et IBM,et les gouvernements du Canada, duQuébec et de l’Ontario.

Le but ? Donner la chance à deschercheurs et à des PME d’ici d’ex-périmenter le potentiel de ce nouveloutil. Ces dernières peuvent ainsi dé-velopper ou adapter leurs produitsou leurs technologies en prévisiondu déploiement commercial de ceservice, ici comme à l’étranger, du-rant la prochaine décennie.

Une nouvelle èreCar la 5G promet de faire entrer latélécommunication sans fil dans unenouvelle ère. À terme, la vitesse de

connexion devrait être plus rapide etatteindre un débit de 10 gigabits parseconde. De quoi télécharger un filmen quelques secondes. « Ça va sup-porter un débit de données accru ettrès imposant », souligne Pierre Bou-cher, directeur général innovationd’ENCQOR.

Si les antennes actuelles diffusentleurs ondes sur de longues distancesdans toutes les directions, la 5G sefonde sur la multiplication d’an-tennes, qui enverront des signauxciblés aux objets et appareils connec-tés. Comme les dispositifs n’aurontpas recours à toute la bande pas-sante, « la 5G va permettre le déve-loppement d’applications ayantbesoin d’utiliser des millions de cap-teurs répar tis sur un ter ritoiredonné», précise Pierre Boucher. Elleprépare, à son avis, la voie à la multi-plication de l’usage des capteurs, « leprotocole de communication de la5G demandant moins d’énergie».

Communication entre machinesSi les premiers réseaux sans fil ontpermis la communication mobile en-tre les personnes, « la 5G est le débutde la communication massive dedonnées de machine à machine »,explique Ke Wu, professeur au Dé-partement de génie électrique de Po-lytechnique Montréal et titulaire dela Chaire de recherche industriellesur les technologies sans fil de l’ave-nir CRSNG/Huawei. « C’est la réali-sation du rêve de l’Internet des objets.»Ou, plus largement, celui de la mai-son, de la ville et de l’usine intelli-gentes. Car leurs objets connectésvont échanger une quantité astrono-mique d’informations en temps réel.

Les espoirs dans la 5G résident sur-tout dans sa faible latence, soit un in-tervalle d’à peine cinq millisecondesentre l’envoi et la réception d’un si-

gnal. Ce délai, dix fois plus rapide queceux des réseaux actuels, pourraitaider des personnes à réaliser à dis-tance des activités, comme des opéra-tions chirurgicales, qui nécessitentdes réactions immédiates. Mais ildonne aussi la possibilité aux ma-chines, même celles en mouvement,de s’ajuster de manière instantanéeaux signaux envoyés par d’autres in-frastructures ou appareils numé-riques. «Cela permet de créer toutessortes d’applications, comme pour larobotique de précision dans le do-maine manufacturier ou pour lecontrôle sans fil de l’interaction entredes véhicules autonomes, qu’on nepeut pas encore réaliser aujourd’hui»,soulève Charles Despins, professeuren génie électrique et directeur desaf faires professorales, de la re-cherche et des partenariats à l’ETS.

La quantité massive d’informationsgénérées dans la foulée viendra ali-menter l’intelligence artificielle, gour-mande en données. Avec la faiblelatence du réseau, elle pourra s’adap-ter en temps réel et son apprentis-sage se réalisera en continu, plutôtqu’avec des données déjà colligées.Ke Wu croit que son usage se répan-dra avec le déploiement de la 5G.« Les premiers groupes qui utilise-ront l’IA ne sentiront pas de pressionsur le réseau pour l’acquisition, letraitement et le stockage de données,prévoit-il. Mais lorsque tout le mondel’utilisera, ce sera un problème extra-ordinaire». La 5G risque donc d’êtreà l’image des premières autoroutes,qui ont amélioré la fluidité automo-bile lors de leur ouverture, mais quiont incité les gens à utiliser des voi-tures pour finalement générer desbouchons de circulation monstres.Selon M. Wu, la prolifération de l’IAva probablement ainsi pousser ledéveloppement… de la 6G.

La 5G, ou la promesse de la communication entre machines

Les cinqgénérations de latélécommunicationLa 1G amorce la téléphonie cellulaire.La 2G offre la possibilité d’écriredes textos.La 3G donne accès à Internet avecdes appareils mobiles.La 4G permet la diffusion de vidéosen continu sur nos téléphones.La 5G promet l’échange en tempsréel de données massives entreles objets connectés.

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019D 6

IVADO, AU COEUR DE LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE ET DE L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Suivez-nous!

Des jeuxet des enjeuxPrendre au sérieux les jeux vidéo en créant une chaire de recherche en ludification ?

Une idée brillante.

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

L’Internet des objets (IDO) est en

train de révolutionner la façon

avec laquelle l’humain interagit

avec son environnement. Gestion

de l’énergie, du trafic et des es-

paces de stationnement, entre-

tien des équipements, éclairage

intelligent, surveillance environ-

nementale, collecte des déchets

ou sécurité routière, le nombre

d’applications possibles pour les

municipalités ne cesse de pro-

gresser. On y voit des occasions

de réaliser des économies, de ga-

gner en efficacité et de bonifier

l’offre de services.

C H A R L E S - É D O U A R D C A R R I E R

Collaboration spéciale

«É videmment, il y a de grandsleaders, c3omme c’est le cas

avec Montréal. Mais toutes les villespeuvent accéder au concept de villeintelligente et avoir accès à la tech-nologie», assure Michel Angers, pré-sident de la Commission des villesintelligentes de l’Union des munici-palités du Québec (UMQ) et mairede Shawinigan.

Malheureusement au Québec,nombreuses sont celles qui se voientcontraintes de limiter leurs ambi-

tions technologiques pour des rai-sons d’accès à Internet haute vitesse,élément essentiel à la mise en placede structures visant le déploiementd’objets connectés. « Les gouverne-ments provincial et fédéral nous ontpromis que, d’ici sept ans, toutes lesmunicipalités seront connectées,souligne M. Angers. Mais vous com-prenez qu’au rythme où ça avance,des municipalités auront une lon-gueur d’avance importante alors qued’autres accuseront un retard cer-tain. La fracture numérique, elle estlà. C’est nettement plus difficile pourles petites municipalités. » D’autantque plusieurs acteurs du milieu dou-tent du réalisme de cette cible.

Développement durableSelon l’UMQ, une ville intelligentedoit chercher à augmenter son at-tractivité en réduisant son em-preinte écologique et en offrant unemeilleure qualité de vie à travers lafluidité de ses services et une gou-vernance par tagée. Pour MichelAngers, cette notion de développe-ment durable est cruciale dans lefondement même de la ville intelli-gente : « I l y a toutes sor tes demoyens qui existent pour permettrede faire des économies en matièrede développement durable, tantd’un point de vue environnementalque social ou économique. À titred’exemple, il n’y a aucun doute quel’Internet des objets permet aux dif-

Objets connectés et ville intelligente: un mariage prometteur

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férentes municipalités de réduireles émissions de gaz à ef fet deserre. » À cet égard, il fait référenceà l ’optimisation des circuits decueillette des ordures, aux autobusque l’on peut suivre en temps réelou encore aux moteurs des camionsqui s’ar rêtent automatiquementlorsque les véhicules ne bougentpas, tout ça grâce à la géolocalisa-tion et à l’intelligence artificielle.

La population est par ailleurs deplus en plus sensible à l’importanced’encourager des décisions qui sonten accord avec les grands conceptsde développement durable. MichelAngers croit que cette tendance seremarque aussi pour les villes intelli-gentes : «De plus en plus, en particu-lier chez les jeunes familles, on ferale choix de la technologie. Une villequi est branchée vers le numérique,avec ses citoyens, c’est un incitatifimportant. » L’UMQ, en collaborationavec le CEFRIO, a d’ailleurs déve-loppé un outil d’autodiagnostic enligne pour aider les municipalités duQuébec à déterminer leur niveau dematurité en matière d’intelligencenumérique. Jusqu’à maintenant, ellessont plus de 200 à en avoir bénéficié.

L’exemple de MontréalBien entendu, lorsque l’on parle desystèmes intégrés, d’Internet des ob-jets et de collecte de données, la cyber-sécurité et les questions éthiques de-

viennent rapidement un enjeu. «Mont-réal a élaboré un partenariat avec l’Ins-titut québécois d’intelligence artifi-cielle [MILA] et a signé la Déclarationde Montréal pour l’intelligence artifi-cielle responsable dans le cadre d’unedémarche visant à utiliser l’IA au ser-vice des Montréalais d’une manièreéthique et responsable», explique Mé-lanie Gagné, de la division des rela-tions médias à la Ville de Montréal.

Pour mener à bien des projets detechnologie connectée, une gouver-nance transparente et collaborativepeut avoir un impact concret puisqu’enplaçant le citoyen au centre des ré-flexions, on augmente les chances desuccès. Dans ce même ordre d’idée,Montréal lançait récemment RêvonsMontréal 2020 > 2030, une consulta-tion citoyenne qui servira de fondationpour les prochaines vagues de déve-loppement en matière de ville intelli-gente. « La Ville souhaite que lescitoyens y participent en grand nom-bre, soutient Mme Gagné. De plus, leLaboratoire d’innovation urbaine solli-cite régulièrement les citoyens à parti-ciper à des tests ou à des évaluationsvia son programme de Citoyens tes-teurs afin d’évaluer les innovationsavant leur déploiement.» Parce qu’àMontréal comme ailleurs, au-delà desconcepts d’efficacité, de rentabilité etde connectivité, l’IDO et la ville intelli-gente doivent aussi permettre de re-connecter la ville à ses habitants.

LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 D 7INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Trente milliards d’objets connectés dans le monde en 2020,

75 milliards en 2025… D’accord, mais en quoi vont-ils améliorer le

quotidien de chacun d’entre nous ? Voici trois exemples d’applica-

tions très concrètes.

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

Maintien à domicileLe maintien à domicile d’une personne coûte moins cher à la société quesa prise en charge dans un établissement, et la majorité des personnesâgées, lorsqu’on leur en donne le choix, préfèrent demeurer dans leursmeubles. Ce n’est cependant pas l’idéal pour les proches, qui craignentpour la sécurité de leur parent. À Sherbrooke, à Trois-Rivières et à Sague-nay, les projets de recherche se multiplient afin de rendre les logementsde nos aînés intelligents.

Grâce à des détecteurs de déplacement de corps chaud, il est au-jourd’hui possible de capter la personne dans son environnement afin dedéterminer quand et comment elle occupe un espace ou un autre (cham-bre, salon, cuisine, etc.). Le but ? Définir une empreinte comportementalesusceptible d’être croisée avec les événements ponctuels connus, afin dedétecter toute modification anormale de la routine et d’en alerter lesproches ou l’environnement médico-social.

Économie d’énergieEt si le thermostat de votre système de chauffage pouvait lui-même al-ler chercher sur Internet de l’information sur la météo, prévoir unepointe de froid — ou de chaleur — et s’ajuster en conséquence ? Et s’ilétait également relié aux serveurs de l’entreprise qui produit l’énergie,lui fournissant ainsi assez de données pour lui permettre de prédire trèsprécisément l’ampleur des pics de consommation et de produire justece qu’il faut d’énergie, évitant ainsi d’en gaspiller ?

C’est le mandat que s’est donné la société CaSA.energy. Installée depuis2014 au sud de Montréal, elle met au point des solutions intelligentes qui, àterme, permettront de faire des économies d’énergie. Hydro-Sherbrooke,avec laquelle la petite entreprise a lancé un projet-pilote et qui compte82 000 clients environ en Estrie, estime que, si le tiers des foyers qu’elledessert s’équipaient d’appareils connectés, l’économie pourrait atteindre5 millions de dollars par année. Et que dire d’Hydro-Québec avec ses troismillions d’abonnés? De quoi éviter la construction de nouvelles centrales,entraînant un bénéfice tout aussi économique qu’environnemental…

Prévention d’accidentsLes avantages de l’Internet des objets dans l’industrie automobile sont infi-nis. À terme, cette technologie permettra une réduction des accidents etune fluidification du trafic, une gestion des émissions de gaz à effet deserre et de nouvelles expériences marketing et commerciales.

Les centaines de capteurs intégrés dans les véhicules produiront en ef-fet des données exploitées par les entreprises pour améliorer l’expérienceutilisateur. Les véhicules seront notamment en mesure de soumettre despublicités et du contenu personnalisés. Les assurances seront par ailleursles premières à profiter de ces données, qui leur permettront de proposerdes offres selon la conduite de chaque usager. Mais ces données pourrontégalement être partagées avec d’autres véhicules. Ainsi, une voiturepourra prendre l’initiative de changer son itinéraire si un mauvais conduc-teur se trouve sur la même route. Autonome, votre voiture pourra égale-ment faire vos courses, selon vos préférences d’achat, aller récupérer lesenfants au CPE, et même faire le café !

Des objets connectés pour tous les besoins

ISTOCK

Les villes relèvent le défiLe 14 mai prochain, Infrastructure Canada dévoilera les grands gagnants duDéfi des villes intelligentes, un concours ouvert aux collectivités de toutestailles, y compris les municipalités, les administrations régionales et les col-lectivités autochtones. «Le Défi vise à encourager les collectivités à adopterune approche axée sur les villes intelligentes pour améliorer la qualité de viede leurs résidents grâce à l’innovation, aux données et aux technologiesconnectées», peut-on lire sur le site de l’événement. Parmi les finalistes, onretrouve les villes de Montréal et de Québec.

ISTOCK

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019D 8

SYSTÈME EMBARQUÉ | CONNECTÉ | DISTRIBUÉ | PRÉDICTIF | INTELLIGENT

CENTRE D’INNOVATION EN MICROÉLECTRONIQUE DU QUÉBEC

AU SERVICE DES ENTREPRISES INNOVANTES DEPUIS 1982

ENVIRONNEMENT PRÉDICTIF ET INTELLIGENT • S

TÈME EMBARQUÉ

ONNECTÉ • INSOBJET CT EN GESEXPER

SYS

ENVIRONNEMENT PRÉDICTIF ET INTELLIGENT • S

ONNECTÉ

ATRUMENTONNECTÉ • INSTION ÉNERGÉTIQUE • ARCHITECHTURE DE ST EN GES

C|TÈME EMBARQUÉ

TÈME DE C

TRIBUÉ

SYENVIRONNEMENT PRÉDICTIF ET INTELLIGENT • STION D’ENVIRONNEMENT • GESA

YTION ÉNERGÉTIQUE • ARCHITECHTURE DE S

DIS|ONNECTÉ

ONTRÔLE EMBARQUÉTÈME DE CTION DES MÉGADONNÉESTION D’ENVIRONNEMENT • GES

TÈME INTELLIGENTSY

| PRÉDICTIF |TRIBUÉ

TION DES MÉGADONNÉES

INTELLIGENT

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

Les données que les internautes et autres utilisa-

teurs d’objets connectés laissent un peu partout sur

la Toile permettent de connaître clairement leurs

goûts et de prédire leurs comportements avec pré-

cision. Une mine d’or encore trop peu utilisée par

les entreprises québécoises.

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

« Avec les objets connectés, les consommateurs parta-gent une masse de données inimaginable, indique

Maurice Vaillancourt, directeur du marketing et de l’intel-ligence d’affaires et relations clients chez Keolis Canada etnouveau président de l’Association marketing Québec. Envalorisant ces données, les entreprises peuvent, d’unepart, leur proposer des services et des produits très per-sonnalisés et, d’autre part, mettre au point des stratégiesd’affaires basées sur les informations collectées. »

Savoir ce qui se passe à même l’utilisation d’un servicepermet, chaque fois que le consommateur se connecte, delui proposer des solutions adaptables en fonction des infor-mations qu’il aura lui-même fournies. Son expérience s’entrouvera donc améliorée.

« À terme, la machine pourra réagir en temps réel, ex-plique M. Vaillancourt. On n’est pas rendu là, mais enthéorie, grâce à l’apprentissage profond, la machinepourra digérer l’information qui lui est donnée et adaptersa conversation avec le client. »

En théorie, parce que selon M. Vaillancourt, il y a en-core très peu d’entreprises qui tirent entièrement profitde l’intelligence artificielle. Les modèles sont très coû-teux, les équipes en place ne sont pas prêtes et au final, ils’agit plus d’accumuler des données qui vont être mâ-chées, digérées, interprétées par des humains pour fairedes recommandations.

Le marketingpersonnalisé aubout du tunnel

«Le vrai défi, il n’est pas tant technologique qu’humain,note-t-il. L’être humain se retrouve devant un paquet dechiffres qu’il n’est pas forcément capable d’analyser, de va-loriser. Ça prend des ordinateurs bien sûr, mais aussi etsurtout une réelle volonté d’embrasser le changement. »

Dans le tunnel qui mène à l’IAAccepter que ce soit des machines qui fassent les recom-mandations. Penser différemment. Car à quoi bon avoirdes analystes capables de nourrir adéquatement les outilsd’intelligence artificielle et de mettre en place de nouvellesstratégies d’affaires si, derrière, l’entreprise n’est pas assezflexible pour réaliser les changements nécessaires?

« Souvent, il y a un analyste dans son coin qui vafaire un rappor t en fonction des données recueillies,mais celui-ci va se retrouver tabletté parce que la cul-ture d’entreprise ne permet pas de s’engager dans unmodèle renouvelé exigeant de faire confiance aux déci-sions prises à la lumière des données, regrette le pré-sident de l’association. Avoir la réponse, c’est unechose. Agir en conséquence, c’en est une autre. »

Selon Maurice Vaillancourt, les entreprises n’en sontaujourd’hui qu’à la phase de réflexion. Certaines sont trèsen avance et d’autres au contraire se sont mis des œil-lères et ne veulent pas entendre parler des données. Maisla très grande majorité d’entre elles se situent au cœur dutunnel qui mène à l’IA.

« Et c’est correct parce que chacun doit vérifier les op-tions, conclut-il. Il ne faut pas faire de l’IA pour faire del’IA. Il faut considérer les coûts et les bénéfices. Attendreque les technologies se démocratisent et que les besoinsdeviennent de plus en plus insistants. Avec quand mêmele défi d’arriver à valoriser un volume de données sanscesse grandissant au fur et à mesure que les consomma-teurs se mettent à adopter les objets connectés. »

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 D 9

CONCORDIA .CA/APPRENTISSAGEMACHINE

APPRENTISSAGE MACHINE ET SÉCURITÉ LOGICIELLE Nous concevons un outil pour déceler les failles de sécurité des codes de logiciel.

L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

APPRENTISSAGE MACHINE ET SÉCURITÉ LOGICIELLEAPPRENTISSAGE MACHINE ET SÉCURITÉ LOGICIELLE

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

E T I E N N E P L A M O N D O N E M O N D

Collaboration spéciale

L e Tech3Lab, à HEC Montréal, adéveloppé une technique pour

comprendre ce que les personnesressentent, même de manière incons-ciente, lors de l’utilisation d’inter-faces technologiques. « Ce qui nousintéresse, c’est de mesurer ce que lesgens vivent réellement dans leurs in-teractions pour améliorer l’interfaceet la rendre plus facile à utiliser», ex-plique Pierre Majorique Léger, codi-recteur du Tech3Lab. Aperçu de sestravaux en quatre temps.

Ça consiste en quoi ? Lorsque des volontaires interagis-sent avec des produits ou services

technologiques dans le Tech3Lab,les chercheurs enregistrent les mou-vements oculaires, la transpiration,le rythme cardiaque et les expres-sions du visage, tout en recourant àl’électroencéphalographie (EEG).Les données sont ensuite synchroni-sées, triangulées et analysées àl’aide de l’IA pour relever les émo-tions ressenties ou les efforts cogni-tifs réalisés durant l’interaction.Elles révèlent ainsi quand l’expé-rience laissait à désirer.

C’est pour qui ?La Banque Nationale a ainsi testé saplateforme transactionnelle avant dela mettre en ligne en 2018. D-Box etl’Opéra de Montréal travaillent ac-tuellement avec le Tech3Lab pourmieux comprendre l’expérience des

spectateurs assis sur des fauteuilsqui bougent et qui vibrent durantune projection ou une représentationd’opéra. La Chaire de recherche in-dustrielle CRSNG-Prompt en expé-r ience u t i l i sa teur, d i r igée parM. Léger, compte aussi parmi sespartenaires Sobeys, le MouvementDesjardins et Vidéotron.

On s’en va où ?Les recherches de M. Léger seser vent de l’EEG pour mettre aup o i n t d e s « c o n t r e - m e s u r e s » ,comme un changement de couleurde l’inter face, pour conserver l’at-tent ion d ’un usager. Son but ?Maintenir la concentration d’untravailleur qui doit demeurer vigi-lant, notamment pour des raisonsde sécurité, durant de longues pé-

riodes de temps. Il souhaite queces travaux mènent à la créationd’inter faces technologiques capa-bles de s’adapter, par elles-mêmeset en temps réel, à l’émotion et àl’attention de ses utilisateurs.

Des garde-fous ?« J’aide les organisations à concevoirdes inter faces qui sont très enga-geantes, et l’objectif est d’amener lesgens à les utiliser et à continuer deles utiliser », reconnaît M. Léger.Conscient de cette influence, ilmène d’autres expériences sur la di-vision de l’attention induite par lesappareils numériques, notammentpour « mieux comprendre la dif fi-culté des gens de se désengager detâches franchement dangereuses,comme texter en marchant. »

Nos interactions avec les interfacestechnologiques sous la loupe

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CONTENU PARTENAIRE

ESG UQAM

L’INTERNET DES OBJETS, UN DÉPLOIEMENT SILENCIEUXDes objets connectés, capables de communiquer entre eux, d’échanger des informations et d’in-teragir avec les utilisateurs : l’Internet des objets (IdO) — Internet of Things (IoT) en anglais — est un concept qui prend de l’ampleur et qui continuera à gagner du terrain.

«L’ Internet des objets, c’est une vi-sion où tous les objets sont équi-

pés de dispositifs qui leur permettent de communiquer automatiquement avec leur environnement et, à partir de là, de s’autogérer », présente Ygal Bendavid, professeur au Département de mana-gement et technologie de l’École de sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (ESG UQAM) et qui œuvre depuis plus de 15 ans dans l’étude de l’Internet des objets (IdO).

Dans leur laboratoire IdO/IoT, Ygal Ben-david et son équipe étudient les avan-tages et les limites actuelles de diffé-rentes technologies, ainsi que des objets connectés. « Nous sommes un pôle d’in-novation neutre, de transfert d’expertise et de formation de la relève », présente-t-il. Les solutions imaginées dans ce la-boratoire sont ensuite implantées dans le GreenUXlab, laboratoire de recherche appliquée en sciences de la gestion, afin d’en tester les impacts. Situé un étage en dessous du laboratoire de M. Bendavid, le GreenUXlab est spécialisé dans l’ana-lyse des comportements d’achat et les interactions entre les interfaces techno-logiques et les consommateurs.

Dans tous les milieux où se trouvent des objets que l’on a envie de suivre en temps réel, il existe des applications d’In-ternet des objets. « Dans un magasin, l’In-ternet des objets nous permet de com-prendre le comportement d’un produit sur une étagère, de comprendre le com-portement des clients, de savoir où ils se déplacent, quels produits ils prennent, ce qu’ils essaient ou n’essaient pas, illustre M. Bendavid. Dans un hôpital, il sert pour le suivi des patients, le suivi des lits pour

le trajet des patients, et dans un entre-pôt, à la gestion et à l’automatisation en temps réel de tous les mouvements de produits », donne-t-il comme exemples.

Internet des objets et intelligence artificielle

Au quotidien, nous utilisons déjà des ap-plications d’Internet des objets sans né-cessairement nous en rendre compte. Par exemple, en prenant le bus avec une carte de transport équipée d’une puce ou en utilisant sa clé pour emprunter un Bixi. « Pour le consommateur, la facilité d’accès à tous ces services est déjà là », estime Ygal Bendavid.

Pour lui, l’Internet des objets s’avère intéressant à la fois pour le consomma-teur et pour les industriels. « Le concept permet de collecter des données en temps réel », ajoute-t-il. Ces données vont ensuite nourrir les systèmes d’in-telligence artificielle, qui seront alors capables de faire des analyses prédic-tives très poussées. « D’un point de vue marketing, avoir accès à des données du terrain en temps réel avec une gra-nularité extrêmement fine, ça permet au système d’intelligence artificielle d’apprendre, d’apprendre à apprendre et d’être beaucoup plus performant », pense le chercheur.

Une vision du futur

Les technologies sur lesquelles travaille l’équipe du laboratoire IdO pourraient révolutionner, dans certains cas, le mar-keting, la gestion des stocks et la sécurité. « Il n’y a aucune limite à l’interconnecti-

vité des objets », croit Ygal Bendavid. Ef-fectivement, les technologies deviennent de plus en plus petites, presque tous les objets sont aujourd’hui connectés et il faut de moins en moins d’énergie pour les alimenter. Selon le chercheur, la to-talité des objets sera un jour équipée de technologies qui leur permettront de communiquer avec leur environnement et de s’autogérer.

Dans tous ses travaux, le chercheur tient compte des préoccupations re-latives à la sécurité informatique et à l’atteinte à la vie privée. L’existence de millions d’objets connectés multiplie les risques de cyberattaques et donne ac-cès à de plus en plus d’information sur les préférences des usagers. Mais en dé-veloppant ces technologies en ayant ces préoccupations en tête de prime abord, Ygal Bendavid défend l’idée que l’Internet des objets jouera une place prépondé-rante dans le futur, et est enthousiaste à cette idée. « Actuellement, il y a déjà des environnements connectés, dit-il. J’ai un magasin connecté, par exemple, et dans le futur, les magasins vont se connec-ter entre eux. Ces magasins vont aussi se connecter à un abri de bus, qui va se connecter à une ville… On s’en va vers cette vision », croit-il.

LABORATOIRE DE RECHERCHE GREENUXLAB - UQAM

« Nous sommes un pôle d’innovation neutre, de transfert d’expertise et de formation de la relève »

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019 D 11INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

En 2018, le CEFRIO questionnait les

dirigeants d’entreprises manufactu-

rières au Québec sur leur percep-

tion de l’industrie 4.0, un diminutif

pour parler de la quatrième révolu-

tion industrielle. Bien que 55 %

des répondants étaient au fait de

ce changement de paradigme,

seulement 8 % des entreprises

ont mis en place des processus de

production soutenus par des logi-

ciels intégrés ou des solutions in-

terconnectées. Connaissons-nous

vraiment tout le potentiel de l’In-

ternet des objets?

C H A R L E S - É D O U A R D C A R R I E R

Collaboration spéciale

C es chiffres provenant de l’étudedu CEFRIO ne surprennent pas

du tout Alain Marchildon, présidentde CIO sur demande et conseilleraccrédité RCTi, dont le rôle estd’accompagner les PME vers un vi-rage 4.0. « La sensibilisation est es-sentielle. J’ai vu plusieurs plans nu-mériques appuyés par le ministèrede l’Économie et de l’Innovation ouencore le CEFRIO, mais une majo-r i t é d ’en t r epr i ses ne bougenttoujours pas. Il y a de beaux pro-grammes en place, mais les entre-p r e n e u r s n e r é p o n d e n t p a s àl’appel, soit à cause d’un frein finan-c ie r, so i t par ce qu ’ i l s do iven téteindre des feux ailleurs et quel’opérationnel prend toute la place. »

En effet, il n’est pas toujours évi-dent, surtout pour des entreprises encroissance, de prendre du recul et dedéployer des efforts supplémentairespour plonger dans cette révolutionnumérique. D’autant que, pour y arri-ver, les champions doivent être mis àcontribution. « Les dirigeants ont dela difficulté à retirer leurs “seniors”des activités courantes pour leur de-mander de réfléchir aux aspects nu-mériques et d’implanter de nouvellestechnologies », poursuit M. Marchil-don. Le consultant est catégorique : leQuébec est en danger et la concur-rence, qui est aujourd’hui mondialedans presque tous les secteurs,avance à grande vitesse.

Par où commencer ?Le terme 4.0 renvoie au fait que nousen sommes maintenant à la qua-tr ième révolut ion industr iel le .La première était liée à l’arrivée del’électricité, la seconde faisait émer-ger la notion de chaîne de montage,des processus organisés et de répéti-tion. Sont ensuite venus l’informatisa-tion, les systèmes intégrés et l’auto-matisation. «Avec l’industrie 4.0, toutest lié à Internet et tous les objetspeuvent être connectés à moindrecoût. On parle de démocratisation dela technologie, maintenant que l’in-terconnexion entre les systèmes etles machines est simplifiée.»

En réponse à ce nouveau modèle,les entreprises doivent donc se réin-venter en tenant compte de la techno-logie disponible. Pour y arriver, la cléest de saisir les occasions et d’élabo-rer d’abord un plan numérique enpriorisant une démarche participative

qui ne négligerait surtout pas l’aspecthumain. «Les gens ont peur du chan-gement, remarque M. Marchildon.C’est pourquoi il faut démontrer rapi-dement tout le potentiel de l’Internetdes objets industriels avant de s’atta-quer à des projets à plus long terme.»

Digérer les donnéesU n e f o i s l e v i r a g e n u m é r i q u eamorcé, il faut trouver une façon demonnayer les données d’équipe-ments connectés. « Par les donnéesdes machines, des équipements etdes objets, les entreprises ont l’occa-sion de transformer leur modèled’af faires. Elles peuvent gagner enef ficacité sur le plan opérationnel,prédire des pannes, créer des dos-siers de services, etc. Tout ça passepar le décodage d’importantes quan-tités de données, pour en sortir del’intelligence ar tificielle », détailleFrédéric Bastien, p.-d.g. de Mnubo.

Son entreprise, qui s’est donnépour mission de faire adopter l’IA auxPME, a bâti une plateforme vers la-quelle les clients pointent leur flux dedonnées pour que le logiciel reçoiveles informations, les nettoie, les orga-nise et les enrichisse. C’est la basepour passer au mode apprentissageautomatique, faire des prédictions etoptimiser plusieurs paramètres. Ap-pareil de ventilation, systèmes com-plexes de valves, ascenseurs, robots,thermostats ne sont que quelquesexemples d’appareils connectés quigénèrent des données et qui ont lacapacité d’apprendre par les techno-logies d’intelligence artificielle. Enpratique, tout ce qui est électriquepeut être connecté.

Un passage obligéLes PME, tant manufacturièresqu’industrielles, devront s’y faire.L’intégration de la technologie 4.0est essentielle à la survie des entre-prises, prévient M. Bastien. « Lesentreprises qui ne le feront pas vont

disparaître. C’est aussi simple queça. C’est inquiétant pour le Québec,qui est encore très en retard, parceque pour l’instant nos clients sontmajoritairement aux États-Unis, auJapon et en Allemagne. Ils investis-sent des sommes considérablesdans ce domaine. »

Selon lui, la vaste majorité des in-dustries et des manufacturiers duQuébec génèrent déjà des données.Il faut maintenant mettre en placeune structure pour collecter et analy-ser ces dernières. « On peut com-mencer par un seul dépar tement,voire un seul robot. L’important estd’être bien accompagné. Il est uto-pique de penser que tout peut sefaire à l’interne. C’est pourquoi il fautd’abord trouver le bon partenaire. Ladirection doit s’impliquer et s’assu-rer qu’on n’en reste pas à l’étape duprojet-pilote, poursuit le spécialiste.Il ne faut sur tout pas négliger lechangement organisationnel quecela implique. C’est une caractéris-tique de ceux qui ont réussi : consi-dérer à la fois la technologie et leschangements que cela impliquait surle plan de l’organisation.»

S’inspirer des meilleurs… au Québec« On se plaint qu’Uber déstabilisel’industrie du taxi, mais c’est exacte-ment ce genre d’impact que l’onrisque de voir dans bien d’autressecteurs, dont l’Internet des objets.C’est pour cette raison qu’il ne fautpas être les derniers », implore Fré-déric Bastien. Heureusement, mal-gré un retard non négligeable, laprovince compte plusieurs exem-ples convaincants de réussite etd’innovation dans le domaine de l’in-dustrie 4.0. Qui plus est, les diri-geants peuvent se tourner vers legouvernement pour les aider à leverle voile sur tout le potentiel des pro-jets d’innovations numériques enmilieu industriel et manufacturier.

L’INDUSTRIE 4.0

Le pouvoir des données

ISTOCK

Ce cahier spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, grâce au soutien des annonceurs qui y figurent. Ces derniers n’ont cependant pas de droit de regard sur les textes. La rédaction du Devoir n’a pas pris part à la production de ces contenus.

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LE DEVOIR, LES SAMEDI 27 ET DIMANCHE 28 AVRIL 2019D 12

CONTENU PARTENAIRE

CIMEQ

DES EXPERTS AU SERVICE DES ENTREPRISESSoutenir la croissance des industries du Québec et l’innovation technologique des entreprises : en poursuivant sa mission depuis sa création en 1982, le Centre d’innovation en microélectronique du Québec (CIMEQ), un centre collégial de transfert de technologie (CCTT) spécialisé en microélec-tronique, informatique et génie logiciel, a soutenu des centaines d’entreprises au fil du temps, contri-buant ainsi à renforcer l’écosystème québécois.

«Nos expertises sont le fruit de plus de 550 projets de recherche et

de développement technologique que nous avons planifiés, financés et réali-sés en collaboration avec nos clients, des idées innovantes qui deviennent des prototypes, qui deviennent des pro-duits commercialisables », explique Sé-bastien Adam, directeur Recherche et développement au CIMEQ. Rattaché au collège Lionel-Groulx à Sainte-Thérèse, le CIMEQ a pour mission d’accompagner les organismes, les institutions, les entre-prises et plus particulièrement les PME dans l’innovation par l’aide technique, la recherche appliquée, l’information et la formation. « Un des grands avantages pour les entreprises de travailler avec nous, c’est que la propriété intellectuelle de ce que nous développons revient à l’entreprise, affirme Michel Chabot, di-recteur général du CIMEQ. Nous sommes au service des PME, des entreprises, et tous nos chercheurs sont spécialisés dans les domaines précis dans lesquels ils interviennent. »

Interdisciplinarité à l’honneur

Le CIMEQ fait partie de Synchronex, un large réseau qui regroupe 1500 chercheurs de spécialités différentes, provenant de 59 centres de recherche répartis à travers la province. « On a des chercheurs qui travaillent sur les véhicules intelligents, d’autres sur la réalité augmentée et la réalité virtuelle, d’autres se penchent sur les mégadon-nées, les systèmes prédictifs, l’appren-tissage machine, l’intelligence artifi-cielle, d’autres étudient le traitement

des eaux, le design des vêtements ou le textile, entre autres. Il y a beaucoup de complémentarité », explique Sébastien Adam.

Ce réseau de chercheurs est à la dis-position des entreprises afin de réaliser des projets multidisciplinaires. « C’est très rare qu’un projet ne nécessite pas l’expertise des autres centres complé-mentaires, ne serait-ce que pour des petites parties du projet », affirme le di-recteur Recherche et développement. « On ne travaille plus en vase clos, ren-chérit Michel Chabot. On a un fort ré-seau de collaborateurs pour aider les entreprises à aller plus loin dans leur processus de création. »

Des milliers d’objets connectés

« Dans nos projets, créer de l’intelli-gence artificielle débute souvent par l’acquisition de données à l’aide d’ob-jets connectés, lance le directeur gé-néral du centre, rappelant que le CIMEQ est spécialisé dans les objets connec-tés. Le CIMEQ se spécialise aussi au ni-veau des environnements intelligents dans les supermarchés, les serres, les fermes et les unités d’habitation, entre autres. »

Les objets connectés se trouvent par centaines dans les supermarchés : dans les systèmes de ventilation, de réfrigé-ration, de congélation et de dégivrage, entre autres. « On peut capter des don-nées dans certaines situations et analy-ser le comportement pour prendre des décisions éclairées et faire certaines

actions », explique le chercheur. Par exemple, le CIMEQ a développé, en par-tenariat avec son client, une plateforme déployée dans plus de 5000 supermar-chés au Canada et aux États-Unis, avec des appareils connectés qui collectent des données pour comprendre le fonc-tionnement des équipements. « On a suffisamment de données pour être ca-pables d’analyser et de développer des modèles prédictifs afin d’améliorer le contrôle des appareils, améliorer leur maintenance ainsi que leur efficacité énergétique », explique M. Adam.

Pour plusieurs entreprises, l’objectif est d’améliorer les contrôles de l’en-vironnement ou d’un système. « Il ne suffit pas de connecter les objets : il faut qu’il y ait une réelle intention », pré-cise le chercheur. Même réalité dans nos maisons, avec des objets connec-tés permettant d’allumer les lumières, d’ouvrir la porte, ou encore de régler la température. « Actuellement, on tra-vaille beaucoup pour créer des habitats intelligents à partir d’objets connec-tés », explique-t-il. Un des objectifs de ces travaux est de permettre aux per-sonnes âgées de rester chez elles plus longtemps, par exemple.

ISTOCK

« Il ne suffit pas de connecter les objets : il faut qu’il y ait une réelle intention »

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE