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Enquête qualitative L’accompagnement des maîtres d’ouvrage autres que les particuliers (autres MO) Les leçons tirées de l’expérience dans le Nouveau Rhône Enquête réalisée par l’association Hespul (2018)

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Enquête qualitative L’accompagnement des maîtres d’ouvrage

autres que les particuliers (autres MO)

Les leçons tirées de l’expérience dans le Nouveau Rhône

Enquête réalisée par l’association Hespul (2018)

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Avec le soutien de

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Table des matières RÉSUMÉ ....................................................................................................................................... 4INTRODUCTION .......................................................................................................................... 5Éléments de contexte ..................................................................................................................... 5 Contribution d’Hespul à la réflexion commune ................................................................................ 7 Principales conclusions .................................................................................................................. 7 PRÉSENTATION DE L’ENQUÊTE ............................................................................................. 10Périmètre et contexte local ........................................................................................................... 10 Méthodologie ............................................................................................................................... 10 Échantillon .................................................................................................................................... 12 POUR UNE DÉFINITION PARTAGÉE DE L’ACCOMPAGNEMENT AUTRES MO ................. 14Indépendance et désintéressement .............................................................................................. 14 Trois volets d’expertise ................................................................................................................. 15 Vision globale et lien entre acteurs ................................................................................................ 18 DES APPORTS INATTENDUS À LA RÉFLEXION .................................................................... 23Un rôle charnière entre les acteurs locaux et les réseaux nationaux et européens ......................... 23 Compétences historiques et spécificités d’Hespul ........................................................................ 23 Capitalisation d’expériences ......................................................................................................... 24 QUELLE ARTCULATION ET QUEL MODÈLE ÉCONOMIQUE ? ............................................. 27Complémentarité avec la mission de CEP .................................................................................... 27 Positionnement par rapport au secteur marchand ........................................................................ 29 Gratuit ? Payant ? Quel coût pour le bénéficiaire ? ....................................................................... 32CONCLUSION ............................................................................................................................ 35Annexes ...................................................................................................................................... 37

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RÉSUMÉ Nous retiendrons de cette enquête que la mission d’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage, articulée avec une démarche de planification territoriale, répond aux enjeux de transition énergétique d’un territoire dans la mesure où elle conjugue trois facteurs permettant de passer d’une idée, à la mise en œuvre concrète de projets qualitatifs de performance énergétique et/ou de production d’énergies renouvelables.

Ces trois facteurs sont :

! Le statut et l’objet social de la structure réalisant l’accompagnement, garantissant à la fois son indépendance vis-à-vis des fournisseurs d’énergie ou de matériaux, et le caractère désintéressé des conseils qu’elle donne ;

! L’apport d’expertise multithématique sur une diversité de sujets liés à la transition énergétique, permettant de lever les barrières techniques et non techniques faisant obstacle à l’émergence d’un projet ;

! L’ancrage territorial qui permet de faire du lien entre les acteurs, d’animer la concertation, de capitaliser de l’expérience pour éviter les écueils, valoriser des projets exemplaires et reproductibles et alimenter la motivation des maîtres d’ouvrage.

Ces trois facteurs sont indissociables et peuvent être considérés comme autant de prérequis d’une aide efficace aux autres maîtres d’ouvrage pour la réalisation de projets qualitatifs cohérents avec les objectifs énoncés par les politiques publiques.

Par ailleurs, la série d’entretiens semi-directifs (avril-août 2018) a soulevé des zones de flou, des besoins de clarification pour assurer une meilleure lisibilité et compréhension de l’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage. Nous nous sommes prêtés à cet exercice en apportant des précisions sur les caractéristiques et les limites de cette mission, et notamment sur son positionnement par rapport au champ concurrentiel. Ces discussions ont inévitablement amené la question du coût de l’accompagnement pour les bénéficiaires, dont les différents points de vue ont été retranscrits en fin du présent document.

L’enquête qualitative fait finalement ressortir un consensus sur le fait que l’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage s’apparente à un service public, au sens de mission d’intérêt général. A l’heure où l’État et la Région s’interrogent sur la pérennisation de son financement, l’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage apparaît d’autant plus important pour les collectivités locales engagées dans des démarches obligatoires (PCAET) ou volontaires (TEPOS). Ces maîtres d’ouvrage spécifiques que sont les collectivités ont besoin de passer de la volonté de faire à l’action. Ce contexte ouvre un autre champ de réflexion en posant de fait la question de la prise en charge de cette mission d’intérêt général, qui peut difficilement être qualifiée comme telle si elle ne bénéficie pas d’une définition partagée et d’un financement pérenne.

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INTRODUCTION Au moment où les financeurs historiques que sont l’ADEME et le Conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes sont en pleine redéfinition de leurs modes d’intervention autour de cette mission d’accompagnement, des évolutions règlementaires et budgétaires viennent aussi bousculer l’organisation et le modèle économique des structures locales en charge de la réaliser.

Dans ce contexte, la présente étude sur l’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage (autres MO en raccourci) permet de faire le point sur cette mission mal définie. Peu homogène sur le territoire national, avec des modèles de financements hétéroclites, l’accompagnement autres MO est peu mis en lumière, mais pourtant tout aussi légitime et important que l’accompagnement des particuliers pour faciliter l’émergence et la réalisation de projets dans le cadre des stratégies locales de transition énergétique.

Le but de ce travail est, d’une part, de partager un socle commun de définition de l’accompagnement autres MO, et d’autre part, d’en analyser l’utilité pour la mise en œuvre de la transition énergétique territoriale et pour contribuer à la réflexion collective sur cette mission.

Dans un souci de clarté, il convient de préciser que nous entendons par « autres maîtres d’ouvrage » tous les profils autres que les particuliers susceptibles de réaliser sur leur propre patrimoine bâti des travaux de rénovation énergétique ou d’investir dans des systèmes de production d’énergies renouvelables ; notamment les collectivités locales, les institutions, les entreprises, les associations, les bailleurs sociaux, les agriculteurs, etc.

Éléments de contexte

Savoir d’où l’on vient pour savoir où aller : une courte histoire des Espaces Info"Énergie en Rhône-Alpes Initiative nationale lancée par l’ADEME au début des années 2000, plus de 15 ans avant que l’on entende parler de transition énergétique, le déploiement du réseau des Espaces Info"Énergie (EIE) s’est réalisé en Rhône-Alpes dans des conditions particulières du fait de la conjonction de ces trois ingrédients :

• une représentation locale de l’ADEME dirigée par un Délégué régional particulièrement volontariste, voire visionnaire, lui-même élu local en tant que maire d’une commune de l’agglomération lyonnaise et conseiller communautaire de ce qui allait devenir 15 ans plus tard la Métropole de Lyon ;

• un Conseil régional que l’on peut, avec le recul actuel, qualifier d’avant-gardiste en matière de politique énergétique. On peut notamment souligner la création en 1974 de la première Agence régionale de l’énergie de France (Rhônalpénergie, devenue depuis 2015 Auvergne-Rhône-Alpes Énergie Environnement – AURA-EE) ou encore la mise en place d’un dispositif structuré d’aide à la maîtrise de l’énergie et au développement des énergies renouvelables dès le milieu des années 1980 ;

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• la présence sur l’ensemble du territoire régional d’un tissu dense d’associations locales agissant dans le champ de l’énergie, déjà largement professionnalisées et pour la plupart portées par des citoyens mobilisés mais aussi par certaines collectivités locales, comme l’Agence locale de l’énergie de Grenoble.

C’est de la synergie entre ces trois facteurs conjoncturels qu’est née l’idée de structurer le réseau régional des EIE, dès sa création, dans une logique de « service public ». Il repose, d’une part, sur un conseil indépendant des fournisseurs d’énergie et de matériaux grâce à la Charte nationale des EIE, et d’autre part, sur un maillage territorial qui en garantit l’accès à chaque habitant, quels que soient sa localité ou son niveau de revenu.

Assumé à l’époque conjointement par l’ADEME et la Région, le choix de faire appel aux associations locales pour porter le service EIE dans le cadre de conventions de partenariat répondait à une double exigence : garantir l’intérêt général et s’adapter à un environnement en évolution puisqu’il s’agissait de créer un nouveau métier – celui de conseiller énergie. Le co-financement de l’ADEME et de la Région, complété par le recours au dispositif des « Emplois-jeunes », a ainsi permis la création simultanée en 2001 de 60 postes qui se sont ajoutés à la cinquantaine déjà existants. Conformément aux engagements initiaux, tous ces postes ont pu être pérennisés grâce aux efforts d’innovation des associations, qui ont poursuivi leur croissance jusqu’à atteindre un total de 180 ETP sur l’ensemble de la région Rhône-Alpes quelques années plus tard.

Dans le même temps, l’expérience acquise par les structures les plus anciennes en matière d’accompagnement de projets territoriaux de transition énergétique a suscité le souhait d’une définition extensive du périmètre de ce service EIE. La volonté est alors d’y associer des activités moins techniques comme la sensibilisation, le changement de comportement ou l’éducation à l’énergie, tout en évitant les distinctions entre les différents maîtres d’ouvrage. Privés, publics, particuliers, tertiaire, collectif, etc. chacun pouvait s’adresser à l’Espace Info"Energie de son territoire pour y trouver un conseil et une expertise dans le domaine de l’énergie.

Bénéficiant d’une structuration et d’une identité commune à l’échelle nationale, le service EIE s’est au fil du temps concentré sur le conseil aux particuliers. C’est ainsi qu’est apparu, en contrepoint, le concept d’accompagnement des maîtres d’ouvrage autres que les particuliers. Répondant à un vrai besoin, cette activité a pu se développer en parallèle de l’EIE grâce à des financements spécifiques de la Région et de l’ADEME. Cette dernière s’est par la suite désengagée, considérant que l’accompagnement autres MO relevait de la compétence des EPCI, tandis que la Région a maintenu son soutien et pourrait continuer à le faire dès lors que son intérêt est démontré.

De l’EIE au SPPEH : la longue marche institutionnelle d’un service public enfin reconnu En 2013, la labellisation de tous les EIE rhônalpins au titre de « Points-rénovation-information-service » (PRIS) dans le cadre du Plan de rénovation énergétique de l’habitat (PREH) a permis de clarifier la définition et le rôle du conseil dit « de premier niveau », vis-à-vis notamment des Plateformes territoriales de la rénovation énergétique (PTRE). Celles-ci sont généralement pilotées par les EPCI et ont vocation à prendre le relais pour accompagner les ménages qui se lancent dans des travaux de rénovation énergétique.

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En parallèle, l’expérimentation réalisée dans 4 des 8 départements rhônalpins – dont le Rhône – et connue sous le nom de « PRIS-unique » a démontré la pertinence de la mise en place effective d’un guichet unique. Le principe étant de proposer une seule et même porte d’entrée pour tous les ménages, indépendamment de leur niveau de revenu qui conditionne l’éligibilité aux aides de l’ANAH.

Puis en 2015, l’article 22 de la loi dite « de transition énergétique pour une croissance verte » (LTECV) a institué la notion de « Service Public de la Performance Énergétique dans l’Habitat » (SPPEH), accessible à tous les habitants en tous points du territoire national, et qui devrait à terme conjuguer les missions des EIE et des PTRE. Cette avancée significative n’a fait que confirmer la pertinence de l’approche qui avait été choisie par les acteurs rhônalpins 15 ans plus tôt. La définition du SPPEH offre également la visibilité institutionnelle qui manquait et ouvre la perspective d’un mode de financement pérenne et autonome.

Néanmoins, la loi reste muette sur la notion même de l’accompagnement autres MO et donc sur son statut vis-à-vis du SPEEH. Cette absence laisse ouvertes les questions de son mode de financement et de son inclusion dans le périmètre d’activité des structures locales opératrices du SPPEH. C’est une raison qui vient s’ajouter au besoin de partager une définition commune et d’en comprendre l’intérêt pour les différentes parties prenantes.

Contribution d’Hespul à la réflexion commune Face au flou laissé par la loi, Hespul souhaite contribuer à la réflexion conjoncturelle autour de la définition de l’accompagnement autres MO à travers l’analyse qualitative qui fait l’objet du présent rapport d’enquête. En complément des bilans quantitatifs régulièrement transmis aux financeurs, ce travail s’appuie sur plus de 15 ans de retours d’expérience de la mission autres MO sur le département du Rhône, ce qui a permis de tisser des relations de confiance et de reconnaissance réciproques entre Hespul et les acteurs du territoire rhodanien.

Elle a aussi vocation, en s’appuyant sur des éléments tangibles et des interviews d’acteurs locaux, à alimenter plus largement la réflexion collective sur les instruments opérationnels à mettre en place ou à consolider afin d’accélérer la transition énergétique dans les territoires tout en optimisant les fonds publics qui y sont consacrés.

Principales conclusions Les démarches de planification énergétique territoriale type PCAET ou TEPOS sont synonymes pour les EPCI qui s’y sont engagés d’enjeux politiques, socio-économiques et environnementaux importants. Une fois la stratégie territoriale définie et adoptée, vient le temps de la mise en œuvre des projets de sobriété, d’efficacité énergétique et de production d’énergies renouvelables.

Que ce soit dans le secteur public ou privé, l’émergence de tels projets est encore rarement spontanée. Il apparaît donc nécessaire de créer les conditions du succès d’une politique énergétique territoriale ambitieuse, notamment en stimulant la demande par diverses

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opérations de sensibilisation, la mise en pace de mécanismes de financement facilitateurs, et la structuration d’une offre professionnelle locale capable d’y répondre.

L’expérience montre que malgré ces efforts, la seule motivation du maître d’ouvrage ne peut être suffisante pour mettre en œuvre un plan d’actions qui soit à la fois techniquement pertinent, économiquement soutenable, et surtout, à la hauteur des objectifs poursuivis. Afin de décliner de façon très opérationnelle les objectifs locaux, il semble nécessaire que les autres MO puissent bénéficier d’un accompagnement, d’un soutien.

En effet, pour être efficace, la stimulation de la demande ne peut pas se limiter à des opérations de communication censées faire naître les idées de projets et faire connaître l’existence des aides. Elle doit s’envisager sur la durée, par un accompagnement qui va de l’identification à la qualification de projets potentiels jusqu’à la livraison des travaux et la prise en main par les utilisateurs du bâtiment rénové et/ou des équipements de production ou de distribution d’énergie renouvelable.

C’est très précisément la capacité à intervenir à toutes les étapes de cette chaîne en soutien au maître d’ouvrage pour l’aider à prendre les bonnes décisions au bon moment, et donc à le rassurer et le conforter, qui caractérise la mission d’accompagnement autres MO telle que nous la concevons et la pratiquons. Il ne s’agit pas de faire ou de décider à la place de, mais d’apporter au maître d’ouvrage ce dont il a besoin pour bien faire son « métier ». Notre expérience nous a montré à maintes reprises que la présence de ce chaînon est l’une des principales conditions de réussite des projets qui sont aujourd’hui très souvent des premiers projets, et plus encore de la nécessaire montée en compétence et en capacité des acteurs locaux pour pouvoir envisager la massification dont il est question aujourd’hui.

On peut dire à cet égard qu’un accompagnement pleinement efficace est celui qui permettra au bénéficiaire de ne pas en avoir besoin la fois suivante, parce qu’il aura appris et compris beaucoup de choses tout en limitant les risques d’erreur et de déception grâce à l’expertise apportée par un tiers neutre et indépendant qui maîtrise les enjeux, les objectifs à atteindre, la technique et le jeu d’acteurs.

Dès lors que l’on se situe dans cette logique doublement vertueuse, on comprend bien que la mission d’accompagnement ne se substitue pas à celle d’assistance à maîtrise d’ouvrage. La première se concrétise par des interventions ponctuelles sur des points précis, notamment pour lever des freins ou des barrières. La seconde permet au maître d’ouvrage de se décharger de manière permanente sur un tiers de confiance pour piloter l’ensemble du projet sur toute sa durée. Ces deux missions ne sont donc pas concurrentes mais au contraire, complémentaires. On note par ailleurs que toutes les parties prenantes ont intérêt à ce qu’elles cohabitent :

• le bénéficiaire bien entendu, pour toutes les raisons exposées ci-dessus ; • les entreprises prestataires en phase de conception comme d’exécution parce qu’elles

sont assurées d’avoir des projets de qualité, et de pouvoir si besoin dialoguer pour résoudre les inévitables difficultés de mise en œuvre ;

• la collectivité locale qui peut ainsi s’appuyer sur ce qui s’apparente à une « démarche qualité » pour que son plan d’actions coûteux en temps et en argent ait plus de chances de devenir réalité à court terme ;

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• les financeurs parce qu’ils ont ainsi la certitude, en conformité avec leurs propres objectifs, d’une utilisation optimale de l’argent public mobilisé sous différentes formes aux différentes étapes des projets.

La pertinence, la légitimité et l’efficacité de l’accompagnement autres MO reposent sur quelques prérequis que nous tirons de notre expérience de terrain de cette mission. L’enquête est venue confirmer ces conditions par les propos convergents de la plupart des interviewés :

• la nature et le positionnement de la structure porteuse de la mission est un élément déterminant pour garantir son indépendance intellectuelle, économique et statutaire vis-à-vis des fournisseurs d’énergie et de matériaux, et assurer qu’elle ne fasse pas de prescription commerciale, qu’elle ne propose pas elle-même une offre en réponse à la demande du maître d’ouvrage qu’elle a aidé à qualifier. Autrement dit, qu’elle apporte un conseil désintéressé ;

• l’expertise apportée doit couvrir un large champ de compétences dans des domaines variés et être orientée vers la levée des barrières techniques et non techniques (juridiques, économiques, organisationnels, ...) à la concrétisation des projets ;

• enfin, l’ancrage territorial permet d’apporter un soutien stable dans le temps et garantit sur la durée la qualité et la pertinence de l’accompagnement pour la mise en œuvre opérationnelle de projets de transition énergétique.

Vecteur de légitimité et de fiabilité propre à créer une relation de confiance avec les acteurs d’un territoire, la conjugaison de ces trois critères constitue un socle commun de définition. Cette base permet d’une part, d’identifier et de qualifier la mission d’accompagnement autres MO, et d’autre part, lui donne accès à un financement public sur une durée suffisante afin que les acteurs locaux aient le temps de s’approprier cette compétence.

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PRÉSENTATION DE L’ENQUÊTE

Périmètre et contexte local L’enquête a été menée dans le périmètre du « Nouveau Rhône » qui correspond à la partie de l’ancien département du Rhône qui s’est détachée de la Métropole de Lyon. Avec 451 000 habitants (pour une superficie de 2700 km2), il est dans la moyenne des départements français.

Ce territoire à dominante rurale est composé de 11 EPCI, tous soumis à l’obligation de PCAET, parmi lesquels 7, représentant environ la moitié des habitants du département, sont engagés dans une démarche de « Territoires à énergie positive » (TEPOS), soit directement, soit via un Syndicat Mixte pour 4 d’entre eux. Il correspond très précisément au « périmètre EIE » historique d’Hespul, celui de l’actuelle Métropole de Lyon étant couvert par l’Agence locale de l’énergie et du climat créée à cet effet dès 2001.

La transition énergétique voulue par les EPCI constitue un véritable projet de territoire propre à augmenter leur résilience face aux enjeux sociaux et environnementaux tout en créant localement de l’activité et de la richesse. Cette dynamique locale s’inscrit depuis la LTECV dans une évolution sensible des jeux d’acteurs publics dans le domaine de l’énergie et du climat, marquée notamment par la montée en puissance des EPCI, pour la mise en œuvre opérationnelle des PCAET, et des Régions, pour la définition d’une stratégie de moyen-long terme à travers les SRADDET.

Cette montée en puissance de l’échelon intercommunal a conduit dans plusieurs départements ex-rhônalpin à la transformation des associations citoyennes porteuses d’EIE en Agences locales de l’énergie dont la gouvernance et les ressources sont assurées par les collectivités locales.

Compte tenu des nombreuses autres activités d’Hespul, ce schéma pouvait difficilement s’appliquer dans le Rhône. C’est pourquoi il a été décidé de transférer l’activité « EIE » à une Agence territoriale de la transition énergétique qui devrait être créée au premier semestre 2019.

Au moment où les entretiens détaillés ci-dessous ont été réalisés (premier semestre 2018), cette décision n’avait pas encore été prise et les personnes interviewées n’étaient pas nécessairement informées de cette évolution à l’époque très hypothétique. Dénués des biais qu’aurait pu introduire leur connaissance de cette information, leurs propos en sont d’autant plus désintéressés, et par conséquent intéressants.

Méthodologie

Le choix d’une enquête qualitative Comme toute activité financée par la Région ou l’ADEME, la mission d’accompagnement autres MO fait l’objet d’un suivi quantitatif annuel : nombre de projets accompagnés, état d’avancement, nombre de kWh ou CO2 économisés, etc.

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Alors que se pose la question de l’avenir de cette mission, non seulement dans le Rhône, mais aussi dans l’ensemble de la région Auvergne-Rhône-Alpes et ailleurs en France, il manquait jusqu’à présent une analyse qualitative permettant de mieux en comprendre la réalité concrète et d’en évaluer l’intérêt, notamment économique à travers l’effet levier que l’on est en droit d’en attendre.

L’enquête vise précisément à combler ce manque ; elle est basée sur une série d’entretiens semi-directifs conduits selon les règles de l’art sociologique. Cette méthodologie permet de recueillir des informations non quantifiables, d’avoir des retours directs et subjectifs du terrain d’enquête sur le thème précis de la mission d’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage.

Définition : « Technique de recueil d’informations qualitatives permettant de rassembler des faits et opinions des personnes interrogées sur un sujet donné. L’entretien semi-directif permet de recueillir des informations de différents types : des faits et des vérifications de faits, des opinions et des points de vue, des analyses, des propositions, des réactions aux premières hypothèses et conclusions des évaluateurs » (Fiche technique Euréval, 2010).

Les entretiens semi-directifs Dans un premier temps, nous avons travaillé à la constitution d’un échantillon de personnes à interviewer, en recherchant le plus de diversité possible : maîtres d’ouvrage ayant bénéficié de l’accompagnement pour un ou plusieurs projets par le passé, élus et techniciens de collectivités, syndicats et fédérations de professionnels, bureaux d’étude, artisans, financeurs, institutions, etc. S’en est suivie une prise de contact avec ces personnes préalablement identifiées, pour leur présenter l’enquête en cours et solliciter un rendez-vous pour l’entretien.

Les entretiens se sont déroulés sous diverses formes, pour s’adapter au mieux aux agendas et aux contraintes géographiques de chacun. Environ la moitié des entretiens ont eu lieu en face-à-face, les autres en visio-conférence, voire par téléphone dans quelques cas isolés.

Dans tous les cas, l’entretien débutait par une présentation de la démarche, reprenant les objectifs de l’enquête et des éléments de contexte. Deux types de supports étaient mis à disposition pour présenter visuellement le contexte de la mission (voir annexe 1) et clarifier dès le début de l’entretien la distinction entre la mission d’accompagnement des particuliers (EIE), et celle des autres maîtres d’ouvrage sur laquelle l’enquête se concentre. Le second schéma présenté aide à visualiser les différentes étapes d’un projet et à rendre concrètes les étapes des projets pour lesquels la mission d’accompagnement peut intervenir (voir annexe 2). Il permet aussi à la personne interviewée de se positionner sur ce schéma selon son rôle au cours d’un projet contribuant à la transition énergétique. En complément, papiers et crayons étaient mis à disposition pour que la personne puisse traduire visuellement la façon dont elle percevait son écosystème sur le thème de l’énergie (quels acteurs, quelles interactions avec un système de flèches).

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Une grille d’entretien (voir annexe 3) servait ensuite à rythmer l’échange, avec un certain nombre de questions préalablement classées par thématiques, et des éléments de relance pour dynamiser et recadrer les échanges.

La neutralité, l’objectivité, le désintéressement, l’utilité sont des termes fréquemment employés par l’échantillon, que nous nous efforçons de faire préciser notamment en utilisant différentes techniques les incitant à reformuler : écho-miroir (répétition d’un mot, d’une phrase), reflet (explicitation d’une attitude, d’une intonation : « vous pensez que… », « vous signifiez que… »), recentrage (reprise de la question de départ pour limiter les digressions), marques d’écoute (manifestation verbales ou physiques de sa compréhension pour inviter la personne interrogée à poursuivre son discours), demande d’informations complémentaires, etc. Le recours à ces méthodes a pour but de faire ressortir des faits généralisables, des définitions partagées, et éviter les biais d’interprétation.

L’analyse des entretiens Les entretiens étaient suivis par une étape de retranscription. La plupart des personnes rencontrées ayant accepté d’être enregistrées, les entretiens n’étaient pas alourdis par une prise de note simultanée, ce qui facilite une écoute active, et donnaient lieu à un travail de saisie à la main à l’issue de l’entretien. Pour les personnes dont l’enregistrement n’était pas possible (téléphone) ou ayant exprimé leur refus, l’analyse s’appuyait sur les seules notes prises au cours de l’entretien.

Enfin, l’analyse du contenu des entretiens a été suivie par un travail de rédaction qui a directement alimenté le présent rapport d’enquête.

Échantillon Suite aux diverses sollicitations, nous avons pu nous entretenir avec 22 personnes entre avril et août 2018. D’horizons professionnels différents, elles constituent un échantillon représentatif des quatre profils suivants :

- les « pairs » qui exercent le métier d’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage et qui ont du s’interroger sur la pratique de leur mission car elle est en perpétuelle évolution (1) ;

- les « bénéficiaires » de l’accompagnement, donc des maîtres d’ouvrage qui ne sont pas des particuliers (2) ;

- les « porteurs d’offre marchande » qui proposent une offre commerciale en réponse à la demande des maîtres d’ouvrage (3) ;

- les « partenaires » qui sont à des postes d’observation et d’orientation de ce marché (4).

Classé selon les quatre catégories identifiées ci-dessus, l’échantillon se compose de :

1 – Les pairs

Joseph Bourrez – Directeur, en charge du projet associatif – ALEC07, Ardèche

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Benoît Petitcolas – Responsable du pôle « Accompagnement de projets collectifs » - AGEDEN (Association pour une GEstion Durable de l’ENergie), Isère

2 – Les bénéficiaires

Thomas Robert – Directeur Parc Eco Habitat, Responsable du Service Transition Energétique et Développement Durable – Communauté de Communes des Monts du Lyonnais (CCMDL), Rhône

Christophe Charnay – Responsable des services techniques – Communauté de Communes des Vallons du Lyonnais (CCVL), Rhône

Anne-Marie Dernoncourt – Adjointe aux Bâtiments et à l’Urbanisme – Bully, Rhône

Guy Fayard (Vice-président) et Philippe Buecher (Président) – OASIS (Organisme d’Accueil Communautaire et d’Activités Solidaires), Gleizé, Rhône

Olivier Maire – Maire de Cublize, Rhône

Mario Scarna – Conseiller municipal de la commune de Grézieu-la-Varenne, Vice-président de la CCVL en charge de l’agriculture, de l’environnement, du développement durable et de la voirie, Rhône

3 – L’offre marchande

Arnaud Brunel - Directeur Général – SEM SIPEnR, Paris

Olivier Blum – Responsable Promotion immobilière et énergies renouvelables – Crédit Agricole Centre-Est

Christophe Bourgin – Gérant – EURL Vent Solaire, Rhône

Arthur Brac de la Perrière – Gérant – SARL Metiista, Rhône

Matthieu Cadic – Architecte (Airial Architectures), Trésorier du Syndicat des Architectes du Rhône, Président de la délégation du Rhône de l’Association nationale des architectes de la rénovation

Clément Daval – Co-gérant des bureaux d’étude Ingénef et BE&CO, Rhône

Fabien Hubert (Chargé d’opérations) et Olivier Pereyron (Chef de Projet Photovoltaïque) – SYDER (Syndicat Départemental d’Energies du Rhône)

Franck Janin – Gérant – Bureau d’étude Héliasol

Viviane Hamon – Consultante marketing – Viviane Hamon Conseil, Alpes-de-Haute-Provence

4 – Les partenaires Christine Guinard (Directrice adjointe) et Jean-Marie Mortemousque (Adjoint de la chef du service « Bâtiment Energie Accessibilité ») – Direction Départementale des Territoires du Rhône

Frédéric Wolf – Environnement et Métiers – Fédération Française du Bâtiment, Rhône

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POUR UNE DÉFINITION PARTAGÉE DE L’ACCOMPAGNEMENT AUTRES MO La série d’entretiens semi-directifs a permis de confronter nos hypothèses de définition à un échantillon diversifié de professionnels. Mises à l’épreuve du terrain, notre vision se trouve confortée par les propos des interviewés qui se rejoignent sur l’importance d’un accompagnement désintéressé, d’une expertise indépendante des fournisseurs d’énergie et de matériaux, de l’ancrage territorial et de la stabilité dans le temps.

Indépendance et désintéressement

Un conseil indépendant L’indépendance vis-à-vis des fournisseurs d’énergie ou de matériaux est un élément central de la mission d’accompagnement. Gage de crédibilité, cette indépendance est fréquemment abordée au cours des entretiens, appréciée et recherchée. Elle apparaît être un véritable vecteur de légitimité, permettant de créer une relation de confiance.

Frédéric Wolf (FFB) souligne que la posture indépendante de l’accompagnement permet de conserver une relation de confiance entre l’offre, la demande et l’accompagnateur : « Pour le cadre de cette mission, il faut préserver le côté neutre, indépendant. On aurait plus de mal, nous, à nous appuyer sur des structures orientées ou sponsorisées par un négociant en matériaux ou un fournisseur d’énergie. Alors qu’une association reconnue neutre et indépendante, que l’on estime efficace et compétente, oui on s’appuie dessus. Sinon, on arriverait beaucoup moins à converser ».

C’est également l’avis de professionnels du bâtiment comme Arthur Brac de la Perrière, gérant de l’entreprise Metiista, ou Christophe Bourgin (Vent Solaire) qui conclue l’entretien de la façon suivante : « Hespul doit garder son caractère indépendant, c’est ce qui vous rend crédible ».

Le but non lucratif

A côté de l’indépendance des fournisseurs de matériaux ou d’énergie, le caractère « désintéressé » de l’accompagnement autres MO apparaît être un gage de confiance notable. C’est-à-dire qu’elle n’est pas motivée par l’intérêt propre, au sens financier, de la structure accomplissant la mission.

Nombreuses sont les personnes interviewées qui soulignent le fait qu’ « Hespul n’a rien à vendre ». Insistant sur ce point, elles restent tout à fait conscientes que, tout au long de l’accompagnement, les conseils donnés permettent d’orienter le projet vers des solutions techniques qui satisferont au mieux les objectifs du territoire (ambitions TEPOS, efficacité, impact carbone et ACV, soutenabilité économique, etc.). En effet, tel ou tel système ou matériaux est étudié selon un raisonnement global (faisabilité, solvabilité, efficacité, etc.), allant dans le sens de la transition énergétique et détaché de

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toute injonction de fabricant ou fournisseur d’énergie et matériaux, sans prescription de telle ou telle solution commerciale.

Mario Scarna (élu) relève justement que l’accompagnement dont la collectivité a bénéficié a fait prendre au projet une autre direction en termes de source d’énergie renouvelable envisagée : « Sur le mandat précédent vous nous aviez aussi accompagnés sur la piscine intercommunale, à Vaugneray. On voulait mettre différents systèmes d’énergies renouvelables pour le chauffage, on avait pas mal étudié le solaire mais il s’est avéré que ce n’était pas la meilleure des solutions ». Dans ce cas précis, le recours au solaire thermique aurait couvert seulement 2% des besoins de chaleur de la piscine, solution jugée peu pertinente, au vu de critères technico-économiques. L’accompagnement a donc orienté le projet vers une solution technique plus pertinente, en l’occurrence le bois énergie.

Pour Olivier Maire, maire de la commune de Cublize (69) qui a bénéficié d’un accompagnement pour la rénovation de son école primaire, « le caractère non-lucratif de la mission est important ». C’est une véritable valeur ajoutée à l’expertise technique, cela la rend d’autant plus crédible qu’elle n’est pas accompagnée d’une prescription commerciale. La mission d’accompagnement est ainsi perçue comme un éclairage allant dans le sens de la transition énergétique « pour faire monter le projet en gamme ».

Trois volets d’expertise

La maîtrise des enjeux de transition énergétique

L’historique d’Hespul, son réseau et les expertises qu’elle développe au sein de ses différents pôles lui permettent d’avoir une bonne connaissance des enjeux de transition énergétique, aussi bien à l’échelle internationale et nationale que locale. Cette maîtrise des enjeux de transition énergétique, de façon transversale (politiques, économiques, énergétiques, sociétaux, etc.), est tout aussi souvent mise en avant lors des interviews.

Au vu des objectifs d’efficacité énergétique et de production d’énergies renouvelables à atteindre, Hespul apporte au maître d’ouvrage des éléments de contexte ainsi qu’une bonne définition des enjeux déclinés localement lui permettant d’affiner sa stratégie. Cet apport est tout aussi apprécié par un maître d’ouvrage privé, qui peut ainsi planifier ses travaux et les postes à traiter en priorité par exemple, que par une collectivité qui doit établir une feuille de route stratégique (planification énergétique), que ce soit dans le cadre de démarches obligatoires type PCAET ou volontaire comme TEPOS.

Christophe Charnay, directeur des services techniques (CCVL): « Travailler avec un prescripteur privé, c’est déjà lui donner une mission en lui disant de travailler sur tel ou tel enjeu. Travailler avec Hespul, c’est avoir une idée générale de ce que l’on veut, et Hespul se met du côté du maître d’ouvrage pour définir avec lui les enjeux importants du projet qu’il va mener ». (…) Et d’ajouter : « En tant que technicien, je pense que des missions telles que celle menée par Hespul doivent toujours être portées par un organisme indépendant et proche des collectivités. Dans tous les domaines (…) il faut des organismes où les enjeux sont mis en évidence, de façon à bien cadrer l’action d’une collectivité locale. C’est ce que l’on recherche avec Hespul : être aidé pour y

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voir plus clair et faire la part des choses sur ce qui est vraiment annexe et ce qui concentre plus d’enjeux, là où il faut bien poser les règles au départ, bien avoir mis les rails en place, en vue d’un partenariat avec des bureaux d’étude ».

Sur une autre collectivité du Nouveau Rhône, la CCMDL, Thomas Robert souligne également la plus-value de la maîtrise des enjeux pour apporter aux collectivités un « éclairage qui va dans le sens de la transition énergétique », et ce à trois niveaux. En premier lieu pour aider les collectivités à clarifier et trier l’information, pour ensuite planifier leurs stratégies énergétiques et enfin identifier les acteurs qui peuvent les accompagner selon la nature et l’avancement de leur projet, ceci dans la perspective de faciliter la concrétisation de projets de transition énergétique. « Aller chercher l’ensemble des informations pour les mettre à disposition des collectivités, c’est comme ça que je vois le rôle d’Hespul (…). Il y a un besoin pour les collectivités d’avoir une certaine lisibilité sur les différents acteurs qui peuvent les accompagner».

L’expertise technique sur le sujet de l’énergie La relation de confiance établie avec le maître d’ouvrage ne va pas sans la légitimité apportée par l’expertise technique pointue. En effet, si une partie de l’accompagnement apporte au maître d’ouvrage des informations pour alimenter sa réflexion et affiner sa stratégie, un autre volet tout aussi important de la mission réside dans le conseil technique qui permettra à l’idée de se concrétiser.

On note d’ailleurs, au cours des entretiens, que l’expertise sur le sujet de l’énergie (bâtiment, EnR, réseaux, planification énergétique, etc.) est une qualité recherchée par les maîtres d’ouvrages, privés ou collectivités de petite à moyenne taille (commune ou communauté de communes) n’ayant pas la capacité d’en disposer en interne.

Conjuguée à un conseil indépendant (voir p.14), cette expertise constitue aussi un gage de crédibilité que l’on peut identifier à deux niveaux : d’une part en termes de pertinence face aux objectifs de transition énergétique à poursuivre (maîtrise des enjeux), d’autre part en termes de qualité du projet lui-même (dimensionnement, critères techniques à respecter, matériaux les mieux adaptés, etc.) pour que les économies d’énergie ou la production renouvelable soient au rendez-vous.

Enfin, cette expertise est un gage de sécurité pour les établissements bancaires qui financent des projets de transition énergétique comme le souligne Olivier Blum (Crédit Agricole Centre Est): « Si quelqu’un comme vous valide techniquement, on finance plus facilement, voire de façon automatique, et beaucoup moins cher. Sur le sujet des économies d’énergie, la plus-value pour nous, financeurs, c’est d’être rassurés ».

Thomas Robert (CCMDL) aborde cette expertise « énergie » comme un véritable besoin pour les collectivités n’ayant pas le moyens de l’internaliser : « Dans une collectivité il y a des techniciens, comme moi, mais nous ne sommes pas experts dans tous les domaines. C’est là que l’on a besoin de faire appel à un groupe d’experts, sur un tas de sujet – une isolation paille (comment on dispose les bottes ? combien ça coûte ? quelle résistance thermique ?), un réseau de chaleur, etc. – pour pouvoir conseiller les élus puisque l’on est l’interlocuteur privilégié entre les élus et le groupe d’experts ».

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Christophe Charnay (CCVL) complète cette analyse: « Il y a deux ch oses autour des enjeux énergétiques : la technicité et la réglementation. Pour la technicité, les petites collectivités comme la nôtre, par définition, ne peuvent pas être autre chose que généralistes. On a donc besoin d’organismes qui, eux, sont beaucoup plus spécialistes dans un domaine donné. C’est pour cela que c’est intéressant d’être accompagné par Hespul, une vraie aide. Et pour la réglementation, les obligations, les contraintes législatives, etc. Hespul sait nous dire ce qu’il faut mettre dans un cahier des charges par exemple ».

Jean-Marie Mortemousque, adjoint de la chef du service « Bâtiment Energie Accessibilité » de la DDT du Rhône, relève lui aussi cette expertise dans le domaine de l’énergie. De part sa collaboration avec Hespul dans le cadre de l’organisation des « 5à7 de l’éco-construction », événement s’adressant aux professionnels du bâtiment, il a pu faire le constat de la plus-value technique apportée par les structures porteuses de la mission Info -> Energie (ALEC Lyon et Hespul) sur le sujet de l’énergie. Reconnue localement, cette expertise technique sur le sujet de l’énergie apparaît être très complémentaire de la mission des têtes de réseaux tels que la CAPEB, la CMA, la FFB, Fibois ou l’AQC qui co-organisent ces événements.

Lever les barrières non techniques

A côté de l’ingénierie nécessaire à la concrétisation technique d’un projet, le sujet des barrières non-techniques qui doivent être levées revient fréquemment. À cet égard, être accompagné par une structure qui souhaite que le projet voie le jour et qui cherche à résoudre les difficultés dans leur globalité, à tout stade d’avancement, est une aide appréciée.

Les maîtres d’ouvrage interrogés soulignent notamment l’accompagnement technico-administratif dont ils ont pu bénéficier (obligations réglementaires, démarches administratives, calendrier, informations sur les aides financières, etc.). Les professionnels, eux, apprécient l’éclairage juridique ou financier qu’ils peuvent solliciter.

Mario Scarna (élu) note la complémentarité entre le conseil technique, et l’éclairage sur les aides financières qui pouvaient être sollicitées pour aider au lancement du projet : « On a travaillé ensemble sur la nouvelle école de Grézieu car on désirait un bâtiment basse consommation. On a bénéficié des conseils de Julien qui nous a accompagné aussi bien pour le choix des matériaux que sur le plan administratif, pour faire des demandes de subvention ».

Christophe Charnay (CCVL), lui, se souvient de l’aide dont a bénéficié la communauté de communes pour le plan de financement, notamment sur les diverses échéances à prendre en considération à propos des aides financières demandées pour le projet de rénovation et d’extension au niveau BBC des bureaux de la CCVL : « Pour les bureaux par exemple, on naviguait vraiment à l’aveugle pour les aides financières. Grâce à Hespul on avait les infos, on connaissait les dates importantes de décisions, ça c’est une aide indispensable ».

Au-delà de cet accompagnement technico-administratif, Joseph Bourrez, directeur de l’ALEC07, met en avant d’autres niveaux d’expertises faisant aujourd’hui partie intégrante de l’accompagnement autres MO. En effet, les enjeux liés aux projets de transition énergétique impliquent la création de modèles juridiques ou économiques innovants. Pour devenir des

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projets de territoire pertinents et structurants, l’adhésion des citoyens est tout aussi importante. « Sur des projets aussi structurants que des réseaux de chaleur en lien avec la filière bois, sur des projets de démarche globale type planification énergétique territoriale, (…) on mobilise des compétences qui ne sont pas uniquement techniques, mais aussi socio-économiques, juridiques, etc. (…) On a également une plus-value sur les montages, les financements. Les élus commencent à beaucoup se demander s’il faut par exemple créer une SEM ou une SAS, etc. ».

Vision globale et lien entre acteurs

L’ancrage territorial sur le long terme

L’ancrage territorial de l’association lui apporte une connaissance fine à la fois du territoire (spécificités géographiques, sociologiques, économiques, démographiques, etc.) et des acteurs locaux, que ce soient les collectivités avec leurs élus et techniciens, les institutions, les associations et têtes de réseaux, les professionnels de l’énergie et du bâtiment, les collectifs citoyens, etc. De plus, sa présence depuis de nombreuses années sur le département du Nouveau Rhône a permis à l’association de construire une légitimité largement reconnue localement sur la thématique de l’énergie.

Depuis le travail de sensibilisation et d’animation pour faire émerger les idées, jusqu’à l’exploitation, l’usage du bâtiment et le suivi des consommations, l’accompagnement s’inscrit dans une vision de long terme. C’est d’ailleurs une plus-value fréquemment relevée au cours des entretiens, permettant d’être en adéquation avec les enjeux de transition énergétique qui appellent des solutions de long terme.

Joseph Bourrez (ALEC07) insiste sur la qualité corrélée à la temporalité longue dans laquelle s’inscrit l’accompagnement autres MO : « Qu’est-ce qui fait que le service que l’on apporte s’inscrit dans la durée sur un territoire ? C’est que l’on ne fait pas du ‘one shot’ (…). On capitalise, on fait monter progressivement le service en qualité et en pertinence car on est très ancrés sur le territoire ».

D’autres personnes interviewées soulignent que l’ancrage territorial et la bonne connaissance des acteurs locaux, conjugués à la maîtrise des enjeux et à l’expertise énergie, sont des facteurs nécessaires à réunir pour proposer un accompagnement efficace, des solutions pertinentes et ainsi faciliter la concrétisation de projets de transition énergétique. Christophe Charnay (CCVL) mentionne le gain de temps lié à la bonne connaissance du territoire et de ses acteurs : « Vous avez une pratique des collectivités locales qui fait que vous savez comment ça fonctionne, ça va mieux, ça va plus vite. Dans le méli mélo de ces dossiers, Hespul vous êtes bien placés, vous connaissez les interlocuteurs et les institutions. C’est un point essentiel puisque l’on a touché des montants importants ».

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La maîtrise des jeux d’acteurs locaux

Le réseau d’experts mis à disposition par Hespul, toutes filières confondues (bâtiment, énergie, transaction immobilière, financement) est vu comme un point clé pour faire converger les besoins du territoire et le savoir-faire des professionnels vers les objectifs de transition énergétique à atteindre.

De façon complémentaire au travail effectué par les fédérations et têtes de réseaux propres à chaque filière, la mobilisation des professionnels sur les enjeux locaux de transition et l’apport d’expertise sur le sujet de l’énergie s’avèrent importants pour créer des conditions favorables à la concrétisation de projets de transition énergétique sur le territoire. Une structure à la fois indépendante et experte du sujet de l’énergie, ancrée localement, se trouve être en bonne position, de par sa connaissance du jeu d’acteurs, sa maîtrise des enjeux, son implication parmi divers réseaux, pour entretenir cette dynamique locale de mobilisation, organiser des moments d’échange et de partage de bonnes pratiques, créer des espaces de rencontres entre professionnels et maîtres d’ouvrage, effectuer une veille technique ou réglementaire alimentant les différentes professions, etc.

Frédéric Wolf (FFB) met en avant la complémentarité de la fédération de professionnels pour laquelle il travaille, et l’association experte en énergie, ancrée localement, qu’est Hespul, pour répondre au mieux aux enjeux locaux de transition : « Nous avons besoin de vous pour identifier la demande, quelles sont ses attentes, pour que nous, derrière, on accompagne nos entreprises pour répondre à cette demande. Sur les deux exemples des ‘Petits déjeuners photovoltaïques’ et les ‘5à7 de l’éco-construction’, nos relations me semblent donc évidentes, car ce n’est pas nous tous seuls, en tant qu’organisation pro du BTP, qui pouvons avancer sur ces sujets-là. La formation et la sensibilisation des entreprises, on s’en charge. Mais pour la rencontre nécessaire entre le territoire et les entreprises, on a besoin de faire les choses ensemble ». Plus tard dans l’entretien, Frédéric Wolf souligne l’importance du travail d’animation territoriale rendu possible par la collaboration entre Hespul et la FFB, chacun apportant ses compétences et son réseau pour créer des lieux de rencontres et d’échange pour les professionnels : « L’avantage d’Hespul, c’est que vous connaissez la maîtrise d’ouvrage, et que vous avez un réseau de pros, de maîtres d’œuvre, de bureaux d’étude… qui nous permet de nous appuyer sur vous, de faire des choses ensemble comme les 5à7. L’objectif est bien de faire venir des entreprises et vos réseaux pour qu’ils se croisent sur un même lieu, sur un même thème. C’est permettre la rencontre locale ».

Le dialogue entre professionnels et le partage d’expérience, c’est également ce que recherche Matthieu Cadic (architecte) en participant par exemple aux visites de sites exemplaires (construction ou rénovation) organisées localement : « Etant seul, et voyant la méconnaissance de certains collègues sur ces sujets, je me suis dis que je ne pouvais pas rester dans mon coin. J’ai suivi dès que je pouvais des visites, qui amènent des rencontres, des partages d’expérience, dans un métier où il est difficile de partager, de communiquer (…). Pour vous donner une idée, le Syndicat des architectes du Rhône, c’est 10 % des architectes du Rhône (environ 115 personnes, sur les 900) ».

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L’animation territoriale

Faire du lien : c’est ce qui ressort massivement des entretiens pour qualifier la plus-value de cette mission d’accompagnement. L’ancrage territorial, la bonne connaissance du jeu d’acteurs et des professionnels, la maîtrise des enjeux et l’expertise sur une diversité de sujets liés à la transition énergétique sont autant de facteurs qui, conjugués à une ingénierie d’animation, permettent de faire du lien sur le territoire.

Une bonne articulation entre ces diverses compétences plaide pour qu’elles soient rassemblées au sein d’une même structure capable d’animer la concertation, de faire du lien entre les acteurs, d’organiser la rencontre entre la demande et l’offre, de mettre en relation les maîtres d’ouvrage avec les bons interlocuteurs selon la nature du projet, l’avancement, etc.

Au cours des entretiens, le travail d’animation territoriale est souvent défini comme essentiel pour faire émerger puis se concrétiser des projets de transition énergétique sur le territoire. Ce travail ne peut que s’enrichir de la vision de long terme et de l’ancrage historique de la structure, facteurs qui la rendent pertinente et légitime pour intervenir le plus en amont possible des projets, c’est-à-dire au moment des décisions stratégiques – que ce soit à l’échelle du choix d’une chaudière, d’un bâtiment, d’un quartier ou d’une politique énergétique type PCAET.

Benoît Petitcolas (AGEDEN), insiste bien sur la capacité de sa structure à faire du lien sur leur territoire isérois : « Notre plus-value se trouve dans le fait de créer des liens. Avec des collectivités, des bailleurs sociaux, des institutions, etc. (…) Le côté historique fait que l’on est vraiment des acteurs de terrain, on accompagne beaucoup de projets chaque année, aux alentours de 140. Il est intéressant de continuer à les accompagner, au moins pour le côté lien entre acteurs, le côté vision globale que l’on apporte car on connaît bien les territoires ».

C’est une vision partagée par divers acteurs rencontrés lors des entretiens, quelle que soit leur profession ou le moment où ils interviennent lors d’un projet de transition énergétique. Matthieu Cadic (architecte) note par exemple le rôle d’aiguillage de la structure, permettant d’orienter un maître d’ouvrage vers les interlocuteurs appropriés : « Vous êtes bien placés pour aiguiller. Vous êtes les premiers à accueillir un porteur de projet, c’est vous la porte d’entrée. Il faut ensuite que vous sachiez diriger le porteur de projet vers l’ensemble de professionnels ». Point sur lequel il est rejoint par Olivier Blum (Crédit Agricole Centre Est) : « Pour le sujet des économies d’énergie, vous êtes le guichet unique vers qui on renvoie. Il ne faut pas qu’un conseiller en agence se pose la question. Dès lors qu’on aborde le sujet, on renvoie vers vous car vous orientez ensuite vers les professionnels compétents et labellisés ». Clément Daval (bureau d’étude BE&CO) complète ce point sur la mise en relation des différentes parties prenantes d’un projet : « Le fait que l’on figure sur l’annuaire nous permet d’être mis en contact avec des porteurs de projet. (…) Vous êtes l’un des vecteurs d’affaires potentielles. Vous êtes facilitateurs de projets de rénovation ». Enfin, relevons également les mots de Thomas Robert (CCMDL) : « Vous mettez en contact les bons acteurs, c’est un vrai rôle d’aide au démarrage. Et cela permet d’assurer une lisibilité pour les collectivités : ‘vous êtes engagés dans une démarche TEPOS ? Voilà comment nous, Hespul, on peut vous accompagner. Et ce qu’on ne fait pas, tel ou tel acteur prend le relais sur tel ou tel sujet ».

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Cette position charnière dans le jeu d’acteurs, associée à l’expertise multiple (enjeux, technique, réglementaire, etc.) et la vision globale qui caractérisent l’accompagnement, rend pertinente la structure pour engager le dialogue avec les élus locaux. L’éclairage technique ou socio-économique apporté vient alimenter la réflexion, leur permettant de bâtir une stratégie en phase avec les objectifs locaux de transition énergétique, définis dans le cadre d’un PCAET ou d’une démarche TEPOS.

C’est ce que met en avant Anne-Marie Dernoncourt (élue). La commune de Bully (69) a bénéficié d’un accompagnement pour son projet de construction d’un Etablissement d’Accueil des Jeunes Enfants (EAJE) avec des matériaux bois-paille. Elle souligne notamment la plus-value de la présentation faite devant le conseil municipal par un conseiller énergie qui accompagnait le projet. Alliant pédagogie et technique, cette étape est apparue nécessaire pour emporter l’adhésion des élus au projet, notamment sur le recours aux matériaux biosourcés, une première pour un EAJE sur le Nouveau Rhône à l’époque. La présentation nécessite également un certain nombre de connaissances solides (réglementaires, économiques, sanitaires, etc.) pour être en mesure d’aborder et lever les barrières non-techniques.

Frédéric Wolf (FFB) met lui aussi en évidence cette capacité à aborder les collectivités, leurs élus et techniciens. Cette proximité avec le terrain qui permet de faire le lien entre les objectifs et attentes du territoire, et les compétences professionnelles à mettre en œuvre pour les atteindre : « Nous avons une vue de faiseur, mais on n’a pas forcément la vue des maîtres d’ouvrage, des associations qui tournent autour, et c’est ça que vous apportez. Et aussi les relations avec les élus locaux qui nous permettent d’accompagner nos entreprises sur ces marchés innovants. Vous êtes en lien avec les collectivités, avec les particuliers, avec des maîtres d’ouvrage, des maîtres d’œuvre. Nous aussi, mais de façon plus institutionnelle : avec la Fédération des promoteurs immobiliers, les maires de France, … Mais ce n’est pas ça qui fait concrètement le terrain. Vous, vous êtes en lien avec le terrain, on a besoin de dire à nos entreprises : ‘le terrain attend ceci, cela’ ». Il conclut finalement l’entretien en présentant sa vision du rôle d’Hespul en tant qu’animateur territorial, sorte de médiateur créant les conditions du dialogue entre les différents acteurs d’un territoire dans le but de faire avancer la transition énergétique locale : « Tout comme le particulier a besoin d’un opérateur pour l’accompagner jusqu’au bout de ses démarches, les collectivités ont besoin d’un opérateur pour faciliter les échanges. L’expertise d’Hespul permet de jouer ce rôle, sans forcément créer de nouvelles structures qui alourdissent, qui rebattent les cartes. (…) Il faut bien une structure qui sache inviter les bonnes personnes, créer un ‘Copil’ ou je ne sais quoi, et qui sache faire agir l’ensemble des acteurs ».

Le travail d’animation, à l’heure des PCAET obligatoires pour les intercommunalités de plus de 20 000 habitants ou des démarches TEPOS, que l’on compte au nombre de quatre sur le Rhône aujourd’hui, ressort comme étant une véritable plus-value de la mission d’accompagnement, une compétence recherchée. Pour Joseph Bourrez (ALEC07) c’est aujourd’hui un véritable enjeu associé à la mission : « On a une vraie plus-value car on aide les élus à se positionner dans une démarche de concertation, de co-développement. (…) L’essentiel de la montée en compétence aujourd’hui, c’est sur l’animation de la concertation car il y a des vrais enjeux dans ce domaine autour des projets de méthanisation ou de bois énergie par

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exemple. Pour moi l’animation, la sensibilisation, la médiation, sont des véritables besoins des porteurs de projets ».

C’est également un point sur lequel insistent Fabien Hubert et Olivier Pereyron (SYDER - Syndicat départemental d’énergie du Rhône). Ils soulignent la complémentarité entre leur apport d’expertise technique sur des projets comme des réseaux de chaleur ou des parcs photovoltaïques, et le rôle d’Hespul d’accompagnateur de ces projets de l’idée vers la concrétisation : « Là où j’ai vu Hespul, c’est beaucoup sur l’animation territoriale que vous faites, notamment sur la CCMDL. Être TEPOS c’est bien, mais sans animation on voit bien que ça ne marche pas. (…) La méthanisation pourrait faire partie de votre mission d’animation sur le terrain, pour lancer un peu le sujet. (…) Et là où vous pouvez aussi intervenir, c’est en donnant envie aux élus des territoires de faire des choses qui sortent un peu de l’ordinaire ».

Conjuguant une expertise indépendante des fournisseurs d’énergie ou de matériaux, un conseil désintéressé, une présence de terrain stable dans la durée, l’accompagnement autres MO apporte aux maîtres d’ouvrage une vision globale de leur projet de transition énergétique, de la chaudière bois à la stratégie EnR d’un territoire en passant par la rénovation basse consommation d’un bâtiment ou d’un quartier. En apportant des éléments objectifs qui participent à lever les barrières techniques et non techniques faisant obstacle à la réalisation d’un projet, l’accompagnement autres MO permet d’impulser, qualifier, concrétiser et reproduire des projets de transition énergétique en cohérence avec les politiques engagées localement.

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DES APPORTS INATTENDUS À LA RÉFLEXION Les échanges occasionnés par les entretiens ont donné lieu à un élargissement de nos hypothèses de travail initiales. Les personnes interrogées ont en effet mis en exergue d’autres caractéristiques qu’ils associaient à l’accompagnement autres MO, identifiées comme tout aussi essentielles dans un processus de qualification de projets de transition énergétique.

Un rôle charnière entre les acteurs locaux et les réseaux nationaux et européens Parallèlement à l’ancrage territorial et la bonne connaissance associée du jeu d’acteurs locaux, l’évolution de la structure au sein de divers réseaux à plus grande échelle est abordée au cours des entretiens. Elle est jugée appréciable dans la mesure où elle permet à des acteurs locaux d’avoir accès à des retours d’expérience et partages d’expertises plus vastes. C’est notamment l’implication d’Hespul au sein de divers programmes européens depuis des années qui est vue comme une véritable plus-value pour ses partenaires locaux.

Frédéric Wolf (FFB) met particulièrement en avant l’opportunité de pouvoir participer à des programmes européens, par la médiation d’Hespul, et d’ainsi bénéficier du retour des pays voisins ayant des expériences à partager sur telle ou telle thématique, qu’elle soit d’ordre technique, pédagogique, organisationnelle, etc. : « La plus-value d’Hespul réside dans sa capacité à capter des projets européens, et de nous amener sur ces projets. (…) Je pense que sur des projets européens démonstrateurs, sur le pilotage, on pourrait travailler mieux ensemble car vous avez cette expertise-là, et nous on peut vous mettre en face un groupe de travail, des entreprises intéressées… Que ce soit sur des projets d’innovation managériale ou techniques ».

Compétences historiques et spécificités d’Hespul Un autre élément important qui ressort de la majorité des entretiens est celui de l’expertise photovoltaïque d’Hespul. Au moment de préparer l’enquête, la problématique et les hypothèses de travail nous n’avions pas intégré cet aspect-là pour la simple raison que nous ne mettons pas la compétence photovoltaïque particulièrement en avant dans notre façon de penser et présenter l’accompagnement autres MO à des tiers. Cependant, les retours du terrain ont bien mis en évidence que le positionnement historique d’Hespul sur la filière photovoltaïque et l’expertise qu’elle a pu développer en la matière notamment à travers le Centre de Ressources et le site www.photovoltaique.info qu’elle anime, est indissociable de l’image de l’association. Si cette expertise internationale sur le photovoltaïque semble donc jouer en faveur de la notoriété d’Hespul sur le territoire, gage de sa légitimité d’expert de la transition énergétique, elle n’est pas pour autant un prérequis indispensable pour une structure qui accompagne les « autres maîtres d’ouvrage » vers la concrétisation de leurs projets de transition énergétique sur un territoire donné.

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Mario Scarna (élu) évoque au cours de l’entretien l’accompagnement dont a bénéficié la CCVL pour la création des centrales villageoises, faisant ainsi le parallèle avec l’expertise photovoltaïque attachée à Hespul : « On est pleinement satisfait de votre professionnalisme et de vos connaissances, en particulier sur tout ce qui concerne l’énergie solaire ». Arnaud Brunel (SIPEnR) qui a davantage l’occasion de voir Hespul sur des projets photovoltaïques, met donc régulièrement en avant cette expertise là au cours de l’échange : « La collectivité s’est appuyée sur vous car d’une part, vous êtes très reconnu dans le solaire pour votre expertise, et également parce que vous êtes neutres ». De la même façon, Frédéric Wolf (FFB) met en évidence la notoriété de l’association sur le photovoltaïque, « En tant qu’organisme professionnel, nous sommes là pour conseiller les entreprises, mais aussi pour anticiper les évolutions techniques ou réglementaires. Et c’est là où l’on se rencontre : dans l’identification de ces évolutions, sur le photovoltaïque mais aussi de façon plus large, là où votre expertise est évidente et reconnue, et s’on appuie sur elle. (…) Ce n’est pas forcément une « mission » facile à identifier, et pourtant elle est nécessaire en matière de liens. Après, sur le photovoltaïque, c’est encore plus évident du fait de votre expertise et votre historique ».

A côté de l’expertise photovoltaïque historiquement associée à Hespul, c’est également l’expertise « réseaux énergétiques » qui est fréquemment citée, une plus-value jugée essentielle au vu des objectifs de production locale d’énergies renouvelables, et donc de distribution, avec les implications que cela engendre sur les réseaux existants.

Thomas Robert (CCMDL) souligne par exemple que l’apport d’une expertise sur les réseaux est vraiment utile pour la collectivité qui, dans le cadre de ses objectifs TEPOS, avance sur cette thématique des réseaux de chaleur ou encore de l’injection des EnR au réseau de distribution d’électricité : « Quelque part, nous, on n’est pas assez expert pour aller creuser ce sujet, l’expertise dans les réseaux est une véritable plus-value d’Hespul ». Ayant eu l’occasion de travailler avec Hespul sur le projet SMAP dans les monts du Pilat ou encore sur une centrale villageoise, Olivier Pereyron (SYDER) affirme avoir « découvert une grosse expertise réseau chez Hespul ».

Capitalisation d’expériences Nombreux sont les interlocuteurs qui, au cours des entretiens, soulèvent également l’apport de l’accompagnement en matière de bonnes pratiques, capitalisées par la structure accompagnatrice à travers son ancrage territorial de long terme et son évolution au sein de différents réseaux. Cet essaimage est perçu comme bénéfique pour les maîtres d’ouvrage du territoire qui peuvent s’appuyer sur des retours d’expériences réussies pour développer des projets les plus vertueux possibles économiquement, techniquement et environnementalement.

L’accompagnement est également identifié par les maîtres d’ouvrage concernés comme une opportunité pour s’emparer de la question de l’énergie, et plus généralement de monter en compétences sur une diversité de sujets liés à la transition énergétique, que ce soit sur la maîtrise des enjeux, sur des points techniques ou économiques.

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Benoît Petitcolas (AGEDEN) va dans ce sens en soulignant notamment le gain en efficacité permis par le partage d’expérience, qui permet d’éviter les écueils rencontrés par d’autres pour privilégier des solutions dont on connaît la faisabilité : « nous faisons beaucoup de liens qui permettent de faire bénéficier à tous de beaucoup de retours d’expérience et de gagner en efficacité ». De la même façon, Mario Scarna (élu) note que l’historique de l’association sur le territoire lui a permis de capitaliser beaucoup d’expertise et donc d’être compétente et légitime pour assurer cet accompagnement : « Votre mission est importante pour la transition énergétique du territoire, et puis elle dure déjà depuis longtemps, une vingtaine d’années déjà ! Donc il y a une expérience énorme là-dessus ».

Du côté du SIPEnR, Arnaud Brunel voit d’un bon œil cette capitalisation d’expérience, qui permet aux maîtres d’ouvrage de faire un pas de côté en s’appuyant sur d’autres projets concrétisés, et de pouvoir notamment être vigilants sur les prix pratiqués : « Vous avez le regard pour analyser les réponses à un appel d’offres, les écarts de prix parfois conséquents. La collectivité est en contact avec vous qui connaissez les prix. (…) Là, il n’y a que vous qui, en amont, pouvez alerter les villes là-dessus, sur l’importance de la transparence financière ».

L’accompagnement autres MO est également un moyen pour les maîtres d’ouvrage qui en bénéficient de s’acculturer au sujet de l’énergie, d’être sensibilisés aux enjeux de transition territoriaux, ou d’affiner leurs compétences pour ceux déjà familiers avec le sujet. C’est une façon de rendre les maîtres d’ouvrage pleinement acteurs de leur projet, de leur donner envie d’aller plus loin et de les outiller pour la suite en termes de connaissances et de méthodologies de travail propres aux projets de transition énergétique.

Guy Fayard, vice-président de l’association OASIS, est bénévole depuis une dizaine d’années, en charge de l’énergie et du recyclage. Au cours des dernières années, il a eu l’occasion de travailler avec Hespul à de nombreuses reprises, l’association ayant engagé divers projets de production d’EnR et travaux d’efficacité énergétique : chaudière bois déchiqueté, réseau de chaleur, solaire thermique, isolation des ateliers, puis récemment rénovation énergétique complète du bâtiment d’accueil. Il retient notamment les compétences acquises au gré des différents projets : « Je trouve que les cheminements avec vous ont été riches, j’ai appris beaucoup de choses. Tout seul on n’en serait pas arrivés ici. Vous êtes beaucoup venus sur place, puis c’étaient des coups de fil permanents sur certaines périodes. Vous nous avez toujours bien répondu, on a bien senti chez vous le souci d’accompagner ».

Arnaud Brunel constate également cette montée en compétences des collectivités, élus ou techniciens, au cours des projets sur lesquels le SIPEnR a eu l’occasion de travailler de près ou de loin avec Hespul : « Même pour une collectivité qui a en interne des ingénieurs en énergie, un économe de flux, elle sait qu’elle peut s’appuyer sur Hespul pour monter en compétences. On leur explique combien coûte un parc solaire, les OPEX, les TRI, etc. (…) Vous permettez une acculturation des collectivités. Sinon elles en resteraient au stade ‘on passe un marché public pour trouver quelqu’un qui fait’. Vous renversez complètement la pyramide : la collectivité s’intéresse et co-développe avec vous au moins sur la phase amont ».

Enfin, notons l’exemple avancé par Joseph Bourrez (ALEC07) sur un cas précis de collaboration entre l’association et la Chambre des Métiers et de l’Artisanat (CMA) ardéchoise : « Sur le Nord Ardèche, la communauté de communes animant des réunions dans le cadre de son TEPOS s’est rendue compte que plusieurs salons de coiffure étaient intéressés par l’eau chaude

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solaire. On a donc appelé la Chambre des métiers : ‘vos coiffeurs ont l’air de vouloir se mobiliser, nous on sait intervenir ponctuellement, mais on ne va pas intervenir pour les 300 salons de coiffure du département’. On leur a donc proposé une démarche en deux temps : on fait les premiers avec vous, et on vous donne des éléments de criblage qui vous permettront de repérer des contextes pertinents pour exploiter du solaire thermique sur salon de coiffure. On amène la CMA à monter en compétences, on essaie de transformer quelque chose de ponctuel et local en un projet de structurant pour le département ».

L’accès à un réseau et des retours d’expériences nationaux et internationaux, une compétence reconnue sur le photovoltaïque et les réseaux énergétiques, la capitalisation de méthodologies éprouvées et de projets reproductibles, sont autant d’éléments que les entretiens ont permis de mettre en évidence, pour approfondir notre analyse de l’accompagnement autres MO. Une grande partie de l’échantillon souligne notamment la plus-value de l’accompagnement en termes de partage d’expérience et d’expertise. C’est également une façon pour les bénéficiaires de se familiariser avec le sujet de l’énergie, et plus globalement de monter en compétence pour s’emparer des enjeux de transition énergétique. Cela contribue à créer et entretenir une dynamique locale favorable à l’émergence de projets de transition énergétique de qualité.

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QUELLE ARTCULATION ET QUEL MODÈLE ÉCONOMIQUE ? Les échanges avec l’échantillon de personnes interrogées ont également permis de révéler un certain nombre de points méritant d’être précisés pour assurer une meilleure compréhension de l’accompagnement autres MO, son rôle, son positionnement et ses limites. Il est donc apparu nécessaire de clarifier cette mission et son articulation avec les autres professions intervenant au cours d’un projet de transition énergétique, de lever les confusions quant à ses interactions avec le marché, et d’aborder la question de son coût.

Complémentarité avec la mission de CEP

Définition de la mission de CEP La mission de Conseil en Energie Partagé (CEP) consiste à partager les compétences en énergie d’un technicien spécialisé entre différentes collectivités (communes ou intercommunalités) de moins de 10 000 habitants. Le CEP réalise un état des lieux complet du patrimoine bâti de la collectivité dans l’objectif d’en maîtriser les consommations énergétiques.

Une partie de la mission consiste donc à effectuer un inventaire du patrimoine et à collecter des données techniques : caractéristiques des bâtis, du réseau d’éclairage public, points de livraison toutes énergies confondues, clés de répartition des consommations, données de facturation sur quatre ans, etc. Cette phase opérationnelle est suivie par un travail de saisie de l’ensemble des données collectées permettant ainsi de suivre et analyser les consommations énergétiques du patrimoine d’une collectivité.

La présentation de ces résultats permet d’informer les élus et les usagers du patrimoine de la situation énergétique de la collectivité et ainsi dessiner les grandes lignes d’une politique de maîtrise des consommations à travers des actions de sobriété et d’efficacité. Pour être en mesure d’évaluer l’impact des actions de sobriété, cette démarche implique une mise en œuvre dans la durée.

Rappelons enfin que la mission de CEP concerne uniquement les collectivités, et donc une partie bien précise et limitée des « autres maîtres d’ouvrage » auxquels s’adresse l’accompagnement autres MO.

Des missions complémentaires

Un travail de définition de la mission de CEP apparaissait nécessaire au vu des zones de flou pointées du doigt lors des entretiens. Dans le jeu d’acteurs gravitant autour des maîtres d’ouvrage spécifiques que sont les collectivités, il est vrai que le rôle de chacun est parfois difficile à identifier. L’enquête a mis en évidence le socle commun aux misions EIE, accompagnement autres MO et CEP qui n’est autre que le métier de « conseiller énergie ».

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Viviane Hamon par exemple, consultante marketing spécialisée dans les projets de développement durable, de transition énergétique et d’action sociale, soulève une zone de flou sur le rôle de chacun : « Vous intervenez pour qu’un cahier des charges soit mieux fait par exemple ? En quoi cela diffère des missions d’un CEP ? ».

Les élus ou techniciens interviewés ont quant à eux une vision assez claire de l’articulation entre les divers acteurs qui interviennent à un moment ou un autre du projet, que ce soit le CEP, le chargé de mission énergie, le maître d’œuvre ou l’architecte, et ils savent les réunir autour de la table dans une optique qualitative. Olivier Maire (élu) illustre cette complémentarité lorsqu’il parle du projet de rénovation BBC de l’école primaire de Cublize (69): « Léa a pu nous rappeler le cahier des charges à chaque réunion où elle était présente pour voir si on n’avait rien oublié. Il y avait aussi d’autres partenaires : le CEP et le CAUE. Les idées de chacun, ça fait un peu d’émulation et ça permet de faire monter le projet en gamme ».

Fabien Hubert, spécialiste des réseaux de chaleur au SYDER, identifie effectivement une frontière poreuse entre la mission de ses collègues CEP et celle d’un chargé de mission énergie intervenant au cours de l’accompagnement autres MO : « Là où il pourrait y avoir doublon, je pense que c’est surtout sur la mission de CEP. Mais au final, ils sont plutôt spécialistes de l’audit des bâtiments. Ils font également un peu de conseil de rénovation, mais par contre mes collègues ont moins de connaissance que Julien ou Frédéric sur les chaufferies bois par exemple, donc c’est très complémentaire ».

Complémentaire, c’est finalement le qualificatif fréquemment employé au cours des échanges pour désigner les missions des différents acteurs qui interviennent à un moment donné auprès d’une collectivité pour la maîtrise de ses consommations d’énergie. Pour illustrer cette complémentarité, le partenariat mis en place en Isère est un exemple particulièrement intéressant, décrit par Benoît Petitcolas (AGEDEN) au cours de l’entretien : « Notre spécificité en Isère, c’est le partenariat que l’on a passé avec le SEDI [Syndicat des Energies du Département de l’Isère]. On fait la promotion du service de CEP auprès des communes. On leur dit que c’est souvent la bonne porte d’entrée pour avoir une vision de leur patrimoine. Et nous, derrière, on va accompagner les collectivités pour la mise en œuvre des préconisations. (…) On se posait un moment la question : ‘est-ce que l’on intervient en concurrence avec le SEDI ou de façon complémentaire ?’ On a fait le choix de la complémentarité, et aujourd’hui on est très content de ce partenariat. (…) Plus on communique dessus, plus cet affichage est clair pour les collectivités. L’idée est bien de faire passer le message que l’on s’associe pour les accompagner sur un projet du début à la fin. Le CEP, ça relève du syndicat d’énergie, tout comme l’éclairage public, avec toutes ses compétences. Puis tout ce qui est rénovation du patrimoine public, mise en œuvre des préconisations du CEP, appel d’offres, production d’EnR, là c’est l’AGEDEN. (…) Quand tu montres qu’il y a vraiment une bonne complémentarité, que tu joues cartes sur table, tu arrives vraiment à créer un climat de confiance ».

Pour finir, citons Joseph Bourrez (ALEC07) qui présente, lui, la façon dont cette complémentarité est mise en place en Ardèche : « Dans notre contexte ardéchois, le CEP est mis en œuvre comme une compétence optionnelle du syndicat d’énergie. On avait très tôt réfléchi à ce besoin de clarification : ‘Qu’est-ce qui ressort du rôle du CEP et de notre mission ?’ On a assez rapidement trouvé un consensus : ce qui relève de la bonne gestion du patrimoine public, ce sont des dossiers sur lesquels on renvoie systématiquement sur le CEP. Par contre, on est clair sur

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le fait que dès qu’il y a un enjeu de concertation, par exemple pour envisager des périmètres avec de la desserte publique/privée dans un projet de réseau de chaleur, des enjeux territoriaux de structuration de filière, de partenariat avec des acteurs locaux, etc. ça relève de notre champ d’action et le Syndicat d’Energie nous renvoie les demandes ».

Positionnement par rapport au secteur marchand

De la concurrence Marché concurrentiel ou Service public ? Cette interrogation formulée par certaines personnes rencontrées en entretien mettent en évidence le besoin de clarifier la position de l’accompagnement autres MO par rapport à un marché concurrentiel dont l’offre se densifie à mesure que les enjeux de transition énergétique gagnent la société dans son ensemble, et que des modèles économiques se positionnent sur le sujet. Quelques extraits.

Pour Franck Janin, co-fondateur du bureau d’étude Heliasol, la limite est difficile à identifier entre l’accompagnement autres MO et la mission d’un bureau d’étude : « Votre mission pourrait rentrer en concurrence avec un bureau d’étude si elle allait au-delà, si vous commenciez à faire des diagnostics de copropriétés complets, ou des calculs réglementaires … Dans ce cas là ce ne serait pas une bonne chose, ça vous ferait perdre votre indépendance ».

Ou encore Olivier Blum (Crédit Agricole Centre Est), qui aborde le risque de concurrence avec les développeurs sur les projets d’énergie renouvelable : « Sur la production d’EnR, il ne faut pas que vous preniez le rôle du développeur. Mais vous pouvez être la digue face au monde des développeurs qui ont tendance à pousser à la surconsommation. Aujourd’hui, faute de conseil, beaucoup de gens se font embarquer sur du suréquipement ».

Pour faire écho aux extraits relevés ci-dessus, il semble utile d’apporter un éclairage sur le rôle de cet accompagnement. Où commence-t-il et où s’arrête-t-il ? Comment se positionne-t-il par rapport au marché concurrentiel ?

Tentons de rendre plus lisible l’accompagnement autres MO : le but n’est pas de faire à la place des maîtres d’ouvrage, mais bien de les aider à réfléchir, à avoir un projet le plus précis possible pour passer la bonne commande. L’accompagnement constitue un appui à la qualification de projets de transition énergétique, dans toute leur diversité : chaudière bois, rénovation performante, bâtiment ou quartier basse consommation, investissement citoyen, énergies renouvelables, planification énergétique (d’une entreprise, d’un territoire, ...).

Ainsi qualifiée, la demande rencontre le marché, une offre de professionnels qui travaillent alors à rendre opérationnel ces projets en répondant à une demande précise et pertinente au regard des objectifs de transition énergétique poursuivis.

Joseph Bourrez (ALEC07), qui parle de l’accompagnement autres MO pour le département ardéchois, nourrit une définition allant dans ce sens : « Le discours que l’on porte sur l’utilité de cet appui à la qualification de projets est double :

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- permettre aux professionnels du secteur, aussi bien bureaux d’étude que chauffagistes, d’intervenir dans des conditions saines et claires sur les projets. Le bureau d’étude va avoir un cahier des charges lisible, net et précis, pour lui permettre de savoir ce qui est attendu de lui. - avoir un discours sur la plus-value de cette activité pour développer les marchés auprès des professionnels, qui ne nous voient pas comme des concurrents, mais comme des partenaires sur qui ils peuvent s’appuyer pour sortir des projets dans de bonnes conditions. Ça nous arrive assez régulièrement d’avoir des bureaux d’étude qui nous appellent en disant ‘j’étais en contact avec la commune X qui veut faire une chaufferie bois dans le cadre de leur projet de réaménagement. Par contre ça nous semble un peu bancal, est-ce que vous pourriez les aider à mettre en place un cahier des charges qui va venir cadrer les choses ?’ ».

Lorsque l’on pose la question à un bureau d’étude directement, Franck Janin (Héliasol) est bien dans cette perspective. Il ne voit pas la mission d’accompagnement entrer en concurrence avec son métier, au contraire il dit apprécier de recevoir des demandes pertinentes, pour la qualité du travail qu’il pourra engager par la suite : « En général après on reçoit des projets bien qualifiés, ils savent ce qu’ils veulent comme prestation ». (…) Cela oblige le bureau d’étude à travailler comme il faut, à proposer les bonnes solutions. Pour moi, Hespul facilite, met de l’huile dans les rouages, et permet d’éviter les catastrophes comme des gens qui demandent des prestations dont ils n’ont pas besoin. Moi j’ai l’impression que c’est utile et que ça permet de faire bouger les choses plus vite. (…) Donc vraiment votre rôle c’est de conseiller le maître d’ouvrage pour qu’il ait un projet bien ficelé pour aller voir le BE, et ensuite, c’est de suivre le BE pour voir s’il répond bien à la demande. C’est de challenger le BE, c’est là que vous avez une valeur auprès du maître d’ouvrage : Hespul défend mes intérêts. Chacun joue son rôle, et pour l’instant ça ne marche pas trop mal je trouve ».

De la même façon, Arthur Brac de la Perrière, gérant de la SARL Metiista, parle de la plus-value pour son activité positionnée sur l’éco-rénovation d’une mission qui « suscite l’envie, provoque les projets de clients ». Il voit la mission d’accompagnement comme un vecteur de projets de bon niveau, auxquels il peut alors apporter une réponse de qualité dans une perspective de « faire du facteur 4 ». Il trouve particulièrement intéressante la sensibilisation des maîtres d’ouvrage aux matériaux biosourcés ou à l’importance de traiter l’étanchéité à l’air par exemple : « Notre quotidien c’est quand même de travailler avec des gens qui ne veulent pas perdre de m2, qui veulent faire au moins cher, qui ne sont pas sensibles aux questions d’isolation, d’étanchéité. Donc on a besoin de relais pour faire passer les messages. (…) Grâce à vous, les maîtres d’ouvrage ont déjà qualifié leur projet, il y a une démarche déjà entreprise. (…) Et puis on est sur un marché de prix, sur un marché hyper concurrentiel. Donc en arrivant avec une offre plus qualitative, où on va travailler l’étanchéité à l’air, avec des matériaux biosourcés, on a besoin que la personne soit sensibilisée car on ne peut pas être au même prix avec du Biofib ou avec de laine de verre. Souvent je le chiffre pour montrer qu’on sait le faire, et je préfère quelqu’un qui isole en laine de verre que quelqu’un qui n’isole pas du tout ».

Pour finir, citons Benoît Petitcolas (AGEDEN), qui aborde son expérience de l’accompagnement autres MO sur le département de l’Isère. Lorsque l’on aborde la position de l’accompagnement par rapport au champ concurrentiel, il admet en effet que le besoin de clarification se pose aujourd’hui : « Il y a beaucoup de thématiques qui sont aujourd’hui rentrées dans le domaine de la connaissance, notamment pour les collectivités : la transition énergétique

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n’est plus un sujet tabou. La question aujourd’hui c’est : ‘est-ce qu’on continue à aller là-dessus ? Ou alors : c’est le champ concurrentiel, on n’y va plus ?’ ». Et d’apporter un éclairage en définissant la mission d’accompagnement par ce qu’elle n’est pas : « Notre accompagnement, ce n’est pas de l’AMO, ce n’est pas de la maîtrise d’œuvre : on est là aux côtés de la collectivité, mais quelque part, si ce qu’elle fait ne nous semble pas pertinent, on va l’alerter : ‘ce n’est pas cohérent’. Et ça, c’est une véritable différence, appréciée par les collectivités : d’avoir quelqu’un en face qui n’ait pas peur de dire que ce n’est pas cohérent pour telle ou telle raison. Nous on vous préconise de plutôt faire ceci ou cela, et de vous entourer de tel ou tel acteur ». On retrouve ici la fonction de faire du lien entre les différents acteurs, pour créer les facteurs de concrétisation d’un projet de transition énergétique.

L’enjeu de la complémentarité

Après avoir questionné puis clarifié la position de l’accompagnement autres MO par rapport au champ concurrentiel, c’est finalement l’atout de la complémentarité qui est fréquemment mis en évidence au cours des entretiens.

Quel que soit le rôle de chacun, le jeu d’acteurs rassemble des compétences et professions diverses qui interagissent de façon complémentaire tout au long d’un projet de transition énergétique : institutions, financeurs, conseillers, maîtres d’œuvres, entreprises, etc. Chacun détient une part de la solution dans le processus de transition énergétique. Les extraits suivants illustrent des contextes différents impliquant une variété d’acteurs sur des territoires différents, mais soulignent bien la complémentarité des différents métiers de l’écosystème de la transition énergétique pour que des projets de qualité voient le jour.

Frédéric Wolf (FFB) met par exemple en évidence la complémentarité entre Hespul et les professionnels du territoire sur les enjeux liés à la production locale d’énergies renouvelables, l’un apportant une expertise sur les enjeux, les autres adaptant leurs pratiques pour répondre au mieux aux objectifs du territoire : « Je lance en ce moment un questionnaire auprès de nos adhérents pour mieux identifier aujourd’hui ceux qui font des EnR et ceux qui veulent en faire demain, dans l’idée de mieux travailler avec vous pour créer une synergie locale et permettre aux entreprises d’améliorer leur offre et leurs règles de l’art ».

Côté collectivités, Olivier Maire (élu) fait ressortir le caractère complémentaire des différents acteurs réunis autour de la commune dans son projet de rénovation de l’école primaire : « Hespul ne peut pas être partout, n’est pas un architecte par exemple. C’est plutôt le côté complémentarité qui est intéressant pour nous ».

Matthieu Cadic (architecte), lui, souligne la complémentarité entre l’accompagnement réalisé par Hespul sur le volet énergie d’un bâtiment et la mission du CAUE sur le volet architecture : « L’indépendance, c’est important de la garantir, que les collectivités continuent de financer des associations comme vous. Moi j’en ai bien conscience, et j’essaie de sensibiliser des collègues qui tiennent ce genre de discours : ‘ils nous prennent du travail, gratuitement en plus !’. La complémentarité réside dans le fait que vous aiguillez vers les professionnels compétents, sans oublier le conseil croisé avec le CAUE ».

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Et Joseph Bourrez (ALEC07) de compléter sur la complémentarité avec les chambres consulaires (Chambre d’agriculture, Chambre des métiers et de l’artisanat, Chambre de commerces et d’industrie), qui se traduit par diverses collaborations récemment mises en place : « On a commencé à travailler avec des entreprises, et on se pose la question de la complémentarité avec les consulaires. (…) Il faut donc créer une relation de confiance avec les consulaires, et ça prend du temps. (…) Il faut rassurer les consulaires : on est pas en train de prendre leur travail ou de remettre en cause leur légitimité. Parallèlement au travail mené avec la CMA sur la question du recours au solaire thermique pour les besoins en eau chaude des salons de coiffure, l’ALEC07 a également entamé une collaboration avec la Chambre d’agriculture : « On a des pépiniéristes viticoles en sud Ardèche qui ont des quantités importantes de bois de vigne : les 9/10ème du support d’un greffon restent du déchet qu’ils vont brûler : comment valoriser ces sarments en bois énergie ? Du coup on est allé travailler avec eux pour envisager cette faisabilité, en lien avec la Chambre d’agriculture et le Syndicat des pépiniéristes pour ensuite permettre à la Chambre d’agriculture de valoriser cette démarche là dans une fiche exemplaire ensuite distribuée à tous les pépiniéristes. La Chambre d’agriculture ne se sent pas concurrencée, on essaie vraiment d’être dans cette logique-là de développement ». Sans oublier une récente coopération avec la CCI sur la thématique du bois énergie : « Un fabricant de camping-cars qui mobilise beaucoup de chaleur et de vapeur, actuellement au gaz propane, s’est manifesté dans le cadre du TEPOS de la communauté de communes pour passer en bois énergie. C’est là qu’on se rapproche de la CCI, pour qu’elle trouve des moyens pour aider à optimiser le process, et nous on travaille sur l’analyse d’opportunité du bois énergie en lien avec les enjeux territoriaux de verdissement des réseaux de chaleur ».

Gratuit ? Payant ? Quel coût pour le bénéficiaire ? Le financement de l’accompagnement autres MO peut aller, selon les endroits et les situations, de la gratuité totale pour le maître d’ouvrage à une prise en charge à 100% par les financeurs en passant par une mission « socle » de quelques jours gratuits complétés si besoin par des jours supplémentaires payants. Une diversité qui peut alimenter la confusion quant à son positionnement par rapport au marché concurrentiel.

Service gratuit ?

Certains avis vont dans le sens de la gratuité pour les maîtres d’ouvrage : dans une logique de service public, ce n’est pas le bénéficiaire qui supporte le coût de l’accompagnement.

Benoît Petitcolas nourrit cette vision en partageant l’approche de l’AGEDEN : « À l’AGEDEN, on voit vraiment cette mission accompagnement autres MO comme un service public. Donc cela veut dire que ce n’est pas le maître d’ouvrage qui va payer ».

Un autre argument avancé en faveur de la gratuité est celui de l’accès à l’accompagnement, quels que soient les moyens du maîtres d’ouvrage. En parlant du projet de rénovation de l’école de Cublize (69), Olivier Maire (élu) souligne le fait que la gratuité de l’accompagnement dont a bénéficié la commune lui a permis faire monter le projet en qualité, puis de le concrétiser : « Pour un futur projet, on ferait appel à vous pour le prix bien sûr ! C’est-à-

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dire qu’Hespul ne nous a rien coûté, il ne me semble pas que l’on ait eu une facture d’Hespul sur ce projet là. (…) Les actions sont plus ou moins gratuites en fait, c’est la COR (Communauté d’agglomération de l’Ouest Rhodanien) qui paie une cotisation au SYDER ou à Hespul pour que vous travailliez sur le territoire. On aurait pas les moyens nous, mairies, de payer individuellement ces services. Les trois partenaires qui étaient autour de la table contribuent vraiment à tirer le projet vers le haut. Et malheureusement ce serait clairement des partenaires dont on se passerait s’ils étaient payants, à regret ».

Service payant ?

On peut a contrario se poser la question de la contribution financière du bénéficiaire au service pour adapter l’accompagnement à ses besoins. En effet, la dimension d’engagement du maître d’ouvrage est régulièrement mise en avant comme facteur de succès d’un projet, et, par ricochet d’avancée de la transition énergétique territoriale. Dans cette optique, un service 100% gratuit pour le bénéficiaire ne semble pas être particulièrement engageant. Lors des échanges, plusieurs personnes trouvent d’ailleurs « normal » de contribuer financièrement au service, notamment pour qu’il puisse être taillé « sur-mesure » en fonction des besoins du maître d’ouvrage.

Christophe Charnay (CCVL) note que les premiers jours d’accompagnement sont généralement intégrés dans diverses conventions, puis la communauté de communes met en place une convention propre au projet, avec l’association accompagnatrice, pour aller plus loin si le projet le nécessite : « Souvent, pour initier des projets, il y avait des journées financées par la Région ou des organismes publics, qui permettaient d’amorcer la pompe, et puis après on allait plus loin éventuellement ». Mario Scarna (élu) va également dans ce sens en exposant le cas du projet de construction performante de l’école de Grézieu-la-Varenne (69) : « On avait déjà quelques jours de financés. Et puis ensuite on avait pris un peu plus puisque ça ne suffisait pas, donc il y a eu un financement de la collectivité. J’essaie de faire un peu l’analogie avec le CAUE : on les sollicite dans un premier tant avec la somme à laquelle on a droit de par notre association avec eux, puis la mission est rallongée par des avenants, et financée par la collectivité locale. Si les jours qui nous sont dédiés de suffisent pas, on ne va pas se limiter, on prolonge toujours ».

Olivier Blum (Crédit Agricole Centre Est), identifiant la plus-value qu’il perçoit de l’accompagnement pour les collectivités, juge pertinente une forme de participation financière de la part de ces maîtres d’ouvrage : « Si vous n’étiez pas là, ils feraient comment dans les collectivités ? Je ne trouve pas anormal qu’elles financent cet accompagnement, même de façon symbolique. Il ne faut pas que ce soit gratuit ».

Dans la perspective d’engager les maîtres d’ouvrage et de les rendre acteurs de leur démarche de transition, Thomas Robert (CCMDL) évoque l’hypothèse d’un système de prix dégressif selon les actions engagées, qui inciterait la collectivité à mettre en place une démarche globale de transition énergétique : « Tout faire gratuit, ça n’engage pas les collectivités. (…) Elles ne se disent pas : ‘moi j’ai une véritable politique énergétique. Je fais appel, à raison de 50 centimes par habitant, à ce groupe d’experts qui va m’aider à avancer sur tels et tels sujets’. (…) Je pense qu’il faut faire quelque chose de dégressif, c’est-à-dire que ça coûte cher si on ne fait qu’une action. Par contre, ça coûte moins cher si on fait appel au groupe pour la partie énergie et bâtiment, encore moins cher si on ajoute la politique énergétique, et au final ça

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revient vraiment peu cher si on aborde un peu tout. Ça serait plus incitatif pour les communes, pour les engager à tout faire ! Faire en sorte que ce soit supportable en termes de coût pour les collectivités, mais que ce soit incitatif pour un maximum d’actions pour la transition énergétique ».

Si l’utilité de l’accompagnement autres MO pour créer les conditions favorables à la multiplication de projets de transition énergétique de qualité fait consensus, les entretiens mettent le doigt sur quelques incompréhensions. En effet, le manque de définition partagée et l’hétérogénéité des modes de financement participent à entretenir des zones de flou que nous avons tenté de clarifier par ce présent rapport, en précisant notamment le caractère complémentaire, et non concurrentiel, de l’accompagnement autres MO avec l’offre portée par le secteur marchand.

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;

CONCLUSION Le travail de terrain, la rencontre avec une diversité d’acteurs dans le cadre d’entretiens semi-directifs ont permis de mettre en évidence et de valider un certain nombre d’éléments de consensus à propos de la mission d’accompagnement des autres maîtres d’ouvrage.

Quels que soient leur profession, leur rôle dans la transition énergétique territoriale, la grande majorité des personnes interrogées a formulé un récit corroborant notre propre vision qui permet de conclure au caractère indissociable de ces trois facteurs pour définir et donner à l’accompagnement autres MO tout son sens et sa légitimité:

• le statut et l’objet social de la structure qui assure l’accompagnement, garantissant son indépendance des fournisseurs d’énergie et de matériaux et son désintéressement

• l’expertise multithématique sur l’énergie et la transition écologique permettant d’aborder les barrières techniques et non techniques de façon objective, de les lever ou de les contourner, et de trouver les meilleurs compromis possibles en adéquation avec les objectifs du territoire, tout en donnant l’opportunité aux maîtres d’ouvrage accompagnés de monter en compétences sur ces thématiques ;

• l’ancrage territorial et la stabilité dans le temps constituant une plus-value pour les projets accompagnés : la bonne connaissance du jeu d’acteurs permet de faire du lien sur le territoire et la capitalisation d’expérience aide à recenser les bonnes pratiques et les écueils à éviter. La mise en valeur des réalisations exemplaires et reproductibles constitue d’ailleurs l’un des principaux vecteurs de motivation d’un maître d’ouvrage voisin.

Par ailleurs, la méthodologie d’enquête employée a permis d’explorer des pistes de réflexion qui n’avaient pas été formulées au préalable. Les personnes interrogées ont en effet complété les hypothèses en soulignant la plus-value qu’ils voyaient dans l’expertise photovoltaïque associée à Hespul de par son historique, gage de légitimité sur l’expertise EnR. Plus particulièrement, la compétence sur les réseaux est aujourd’hui recherchée, car cela constitue un enjeu central dans les démarches TEPOS ou PCAET.

L’enquête donne donc des pistes sérieuses de réponse au besoin d’une définition partagée de l’accompagnement autres MO. Sa complémentarité avec la mission de CEP a été précisée ; celle de son positionnement par rapport au secteur marchand, fréquemment abordée en entretien, a été clarifiée. Le travail d’appui à la qualification de projets, qui se manifeste ponctuellement et se déroule sur un temps long, ne répond pas à une logique de marché. Il nécessite donc d’être assuré par une structure pérenne et présente dans la durée. Dans cette perspective, l’accompagnement est d’autant plus utile qu’il intervient dès la phase de planification, afin de créer une dynamique de projet ambitieux et cohérent sur le plan énergétique et ce, sans se substituer au travail des bureaux d’étude et maîtres d’œuvre. Le but de l’accompagnement est en effet d’augmenter la quantité et la qualité des demandes de maîtres d’ouvrage du territoire, en assurant un suivi dans la durée jusqu’à la sélection de la maîtrise d’œuvre, synonyme de passage à l’acte. En d’autres termes, depuis la planification d’une stratégie énergétique jusqu’au contrat de maintenance, la structure accompagnatrice se positionne en partenaire de l’optimisation des ressources investies dans des projets exemplaires et reproductibles d’efficacité énergétique et de production EnR.

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Les réflexions ouvertes L’enquête qualitative fait ressortir un consensus sur le fait que cet accompagnement s’apparente à une mission d’intérêt général, et ce pour quatre raisons :

• l’universalité : tout un chacun a droit à cet accompagnement ; • la stabilité : une mission qui s’inscrit dans la durée et permet de capitaliser des

expériences et des données ; • le caractère désintéressé : une mission dont le but est, à travers une forme de

sensibilisation « personnalisée », de tirer les projets vers le haut, en aucun cas de se substituer à une offre commerciale ;

• la nature non-marchande du service : besoin d’un cheminement impossible à programmer et qui prend du temps, insolvable dans le cadre d’une offre de marché.

Reste la question épineuse de la prise en charge de son coût. À l’heure où l’État et la Région s’interrogent sur la pérennisation de son financement, cette mission apparaît d’autant plus cruciale pour les collectivités locales engagées dans des démarches obligatoires (PCAET) ou volontaires (TEPOS), qui ont plus que jamais besoin de passer de la planification à l’action. Dans ce contexte, la participation financière des bénéficiaires ouvre un autre sujet de réflexion. Trois pistes semblent alors se dessiner :

• un financement 100% public ; • un financement partagé entre la collectivité publique et les bénéficiaires ; • un financement partagé entre la collectivité publique, les bénéficiaires et d’autres

partenaires privés, par exemple dans le cadre d’un mécénat encadré juridiquement venant soutenir une mission d’intérêt général reconnue comme telle.

Cette dernière option soulève la question de la participation de sociétés privées qui pourraient y voir le moyen de développer un marché auquel elles souhaitent accéder, ce qui pourrait être contradictoire avec l’indépendance et le désintéressement qui caractérisent la mission d’accompagnement autres MO et exigerait, par conséquent, une très grande vigilance sur les conditions de sa mise en œuvre.

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Annexes Schéma 1 Présentation de la mission autres MO dans le Rhône, en distinction de la mission d’accompagnement des particuliers à travers l’Espace Info!Energie

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Schéma 2 Présentation simplifiée des différentes étapes d’un projet

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Grille d’entretien

Introduction

Définir « autre MO » : tout maître d’ouvrage qui n’est pas un particulier. Ex : une entreprise, une collectivité, une association, un agriculteur, etc. Préciser « accompagnement autres MO » : à l’aide du schéma (Annexe 1). Faire le parallèle avec la mission EIE qui s’adresse aux particuliers, et qui est généralement bien identifiée et comprise, en précisant que l’accompagnement s’adresse dans le cadre cette mission aux autres MO que les particuliers. La mission autres MO a pour vocation d’accompagner la transition énergétique en développant des solutions concrètes sur le terrain, autour de 3 axes principaux : 1) travaux d’économies d’énergie / bâtiment performant 2) EnR 3) comportement / usages Objectifs : => faire croître une demande de plus en plus structurée et exigeante => contribuer à la massification d’une offre de service de qualité

=> répondre aux enjeux de la TE en cherchant un effet levier de l’argent public pour la TE

Présenter le contexte et le but de l’étude La mission autres MO s’est professionnalisée au fil des années. Aujourd’hui, nouvelle étape dans le processus de structuration, encore floue. Nous souhaitons donc contribuer à une meilleure lisibilité et compréhension, pour parvenir à une définition partagée de cette mission dans un contexte qui évolue : évolution de la réglementation, des financements, définition du SPEEH, … En même temps, volonté d’analyser l’utilité de la mission autre MO pour la mise en œuvre de la transition énergétique à l’échelle locale. Exposer la méthodologie Souhait d’aller au-delà du suivi purement quantitatif de l’accompagnement autre MO avec un suivi d’indicateurs chiffrés comme le nombre de MO accompagné, le nombre de kWh économisé, etc. Donc construction d’une méthodologie d’enquête qualitative, basée sur une série d’entretiens (Cf. liste des entretiens prévus). Panel d’une vingtaine de personnes qui, selon leur métier ou leur expérience, peuvent apporter un éclairage différent sur la mission autres MO. Ils sont :

- des bénéficiaires : des autres maîtres d’ouvrage qui ont bénéficié de l’accompagnement dans le Rhône,

- des pairs qui exercent le métier d’accompagnement autre MO sur d’autres territoires, qui ont du s’interroger eux aussi sur leur mission car elle est en perpétuelle évolution,

- des professionnels qui apportent une offre commerciale en réponse à la demande des autres MO,

- des professionnels qui sont à des postes d’observation et d’orientation de ce marché.

Annoncer le plan de l’entretien

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I. Les projets de transition énergétique dans leur diversité Schéma générique (annexe 2) qui correspond au développement d’un projet de TE, au sens large. Ex : parc éolien, rénovation passive d’une école, mise en place d’un réseau de chaleur… But : illustrer toutes les étapes d’un projet, la diversité des acteurs concernés, la diversité des modalités d’intervention. → Nous intervenons parfois à ce moment là (étude de faisa / aide au choix de la Moe / maîtrise d’usage / sensibilisation / etc.) / Nous sommes parfois sollicités à ce moment X, ou bien pour cette étape X. Et vous ? → Où vous positionnez-vous dans ce schéma ? → En quelle qualité ? → En quelques mots, pouvez-vous présenter votre structure et le rôle que vous y occupez ?

II. Hespul et vous → Comment avez-vous eu connaissance l’accompagnement autre MO sur le Rhône ? → Dans quel contexte nous avez-vous contacté ? → Pour quel projet avez-vous sollicité notre intervention ? → A quel moment / quelle étape du projet ? Pourquoi ? → Sur quel projet avez-vous eu l’occasion de travailler avec Hespul ? → Comment votre intervention sur ce projet s’articule-t-elle avec celle d’Hespul ?

III. La « mission » → En quoi cette mission vous a-t-elle aidé ? → Quelle plus-value associez-vous à notre intervention sur ce projet ? - technique ? - financière ? - autre ? → Est-ce qu’après cette expérience nous faisons partie de votre paysage de partenaires ? → Avez-vous le réflexe de nous solliciter sur des questions liées à l’énergie ? → Quelle complémentarité / interaction avec votre métier ?

Conclusion → Jugez-vous que cette mission a été bénéfique pour ce projet ? → Jugez-vous que cette mission d’accompagnement/d’émergence de projet utile / bénéfique pour des projets de TE (d’une façon générale) ? → Est-ce une mission pour laquelle vous seriez prêt à payer ? - NON : pourquoi ? - OUI : dans quelles mesures ? À quelles conditions ? Dans quel cadre ? → Trouvez-vous pertinente l’existence de cette mission fléchée pour accompagner ce type projet ? → Quelle position / quel statut pour cette mission / pour l’acteur qui l’effectue ? → Des suggestions pour faire évoluer cette mission / cet accompagnement ? → Ce qui vous a manqué ? → Ce que vous trouveriez bénéfique / pertinent sur un futur projet ? Reprendre les éléments saillants de l’entretien, informer sur la suite du calendrier (rédaction, puis communication de l’étude). Moment d’échanges plus libre si besoin.